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LES ACTES Journée régionale d’échanges et de réflexions sur la coopération et la solidarité internationale du CERCOOP Franche-Comté - 7 ème édition La solidarité et la coopération internationale comme leviers pour mieux vivre ensemble Manège de Brack à Dole 9h-17h (22, Place Frédéric Barberousse) Le vendredi 24 juin 2016

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LES

ACTES

Journée régionale d’échanges et de réflexions sur la coopération et la solidarité

internationale du CERCOOP Franche-Comté - 7ème édition

La solidarité et la coopération internationale

comme leviers pour mieux vivre ensemble

Manège de Brack à Dole 9h-17h

(22, Place Frédéric Barberousse)

Le vendredi 24 juin 2016

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Le CERCOOP F-C remercie sincèrement l’ensemble des participant-e-s, intervenant-e-s qui ont permis la tenue de cette 7ème édition de notre Journée d’échanges et de réflexions. Nous tenons à remercier le Conseil départemental du Jura, notre partenaire, ainsi que la Ville de Dole pour son accueil ; à David Eloy pour la qualité de son animation ; aux bénévoles pour leur appui logistique indispensable : Mélanie, Christophe, Safia, Jean-Christopher et Kouakou Augustin.

Ces Actes ont été réalisés par l’équipe technique du CERCOOP F-C : M. Ousmane Syll, Mme Florence Kohtz, Mme Diana Prud’homme, Mme Maria Comanescu, Mme Clara Perles, Mme Eléa Bardeau et Mme Charlotte Craimet.

Ce document présente un résumé des interventions de chacun-e. Bonne lecture !

SOMMAIRE9H ACCUEIL DES PARTICIPANT-E-S

9H30 OUVERTURE OFFICIELLE

10H30 ÉCHANGES ENTRE EXPERT-E-S ET PARTICIPANT-E-S - COMMENT VIVRE ENSEMBLE DANS UN MONDE DE MIGRATIONS ?

11H30 ATELIERS SIMULTANÉS

Atelier 1 - LES MIGRATIONS POUR VIVRE ENSEMBLE, L’EXEMPLE DE LA FRANCHE-COMTÉAtelier 2 - L’ACTION DES ORGANISATIONS DE SOLIDARITÉ INTERNATIONALE ISSUES DE MIGRATIONS (OSIM) POUR UNE COMPRÉHENSION DE L’AUTRE ET UN LIEN ENTRE LES CULTURESAtelier 3 - FEMMES MIGRANTES : MOTIVATIONS, RÔLES ET ENGAGEMENTS

14H30 RESTITUTION DES ATELIERS ET ÉCHANGES AVEC LA SALLE

15H50 GRAND TÉMOIGNAGE

16H30 CLÔTURE

JRCette Journée Régionale (ou JR), proposée chaque année est organisée en 2016 en partenariat avec le Conseil départemental du Jura et la Ville de Dole. Elle offre aux acteurs-trices d’échanger, de réflechir, de partager leurs expériences ainsi qu’une occasion de s’informer et d’informer sur les actions de coopération et de solidarité internationale menées en Bourgogne-Franche-Comté, afin d’apporter des réponses utiles pour l’amélioration de la qualité des actions ici et sur les territoires partenaires.

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9H ACCUEIL DES PARTICIPANT-E-S

©La Pépinière Culturelle

©La Pépinière Culturelle

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9H30 OUVERTURE OFFICIELLE

Mme Sylvie Vermeillet, Vice-présidente du Conseil départemental du Jura, en charge des contractualisations et des politiques territoriales ;

M. Patrice Bernard, Président de RéCiDev et Vice-président du CERCOOP F-C

Intervenants excusésM. Jean-Marie Sermier, Député-maire de Dole ; M. Hicham Boujlilat, Président du CERCOOP F-C, Conseiller régional délégué à la coopération et à la solidarité internationale, Bourgogne-Franche-Comté

[ Discours de Sylvie Vermeillet ]

Le Conseil départemental du Jura est heureux de vous accueillir et de participer à la mise en oeuvre de cette Journée.

Le Conseil départemental malgré un contexte financier contraint, continue de consacrer un budget conséquent à la solidarité internationale. C’est une mission dont j’ai la charge au sein du Département et nous sommes absolument convaincus de l’importance de ces actions. Alors avec le budget qui nous est réservé, nous essayons de faire au mieux avec le CERCOOP F-C et je tiens à vous dire comme le CERCOOP F-C nous est précieux avec toute son équipe technique, avec sa maîtrise, son expérience qui nous est absolument fondamentale pour conduire les projets que nous soutenons.

Pour le Département du Jura, il s’agit d’une quinzaine de projets par an, que nous soutenons et suivons avec des résultats très intéressants. C’est la première partie de notre action. Mais nous essayons également de sensibiliser les collégien-ne-s - les collèges étant à la charge des Départements - aux actions de solidarité internationale par le biais du dispositif des Tandems Solidaires auquel plusieurs collèges jurassiens participent : à Lons-le-Saunier, Dole, Champagnole, etc. C’est une action qui prend de l’ampleur dans le Jura et nous en sommes très fier-e-s. En cet instant, je voudrais féliciter tous les professeur-e-s engagé-e-s dans ces actions, ce qui contribue à leur succès.

Troisième action de soutien en direction de la coopération décentralisée & de la solidarité internationale : les « petites enveloppes » dont chaque conseiller départemental bénéficie. Parfois, à travers ces enveloppes nous soutenons les actions locales des associations que vous pouvez représenter, en prolongement des actions de solidarité internationale que nous avons au Département. Nous essayons tant que possible de soutenir la dimension associative, j’y suis personnellement attachée ainsi que mes collaborateurs-trices, Laurent Chabaud et Alexa Lopez donc sachez que vous pouvez compter sur nous et sur le Département du Jura.

Je vous souhaite des travaux fructueux pour cette Journée, à travers notamment les ateliers qui vont être déclinés. J’espère qu’à la fin de ces échanges, la coopération décentralisée et la solidarité internationale s’en trouveront grandies.

Merci à vous et bonne Journée !

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[ Discours d’Hicham Boujlilat lu par Patrice Bernard ]

Mme la Vice-présidente du Conseil départemental du Jura, en charge des contractualisations et des politiques territoriales, Mme la Députée du Doubs, Mme et M. les Représentant-e-s du Ministère des Affaires Étrangères et du Développement International, Mesdames et Messieurs les représentant-e-s des structures publiques et associatives agissant dans le domaine de la coopération et de la solidarité internationale, de l’accueil des réfugié-e-s et migrant-e-s, Mesdames et Messieurs qui avez répondu à notre invitation.

Nous voici réunis à Dole, après Besançon, Montbéliard, Lons-le-Saunier, pour la 7ème édition de la Journée régionale de réflexions et d’échanges sur la coopération et la solidarité internationale organisée par le CERCOOP F-C, et je remercie chaleureusement le Conseil départemental du Jura, son Président Clément Pernot, sa vice-présidente, Sylvie Vermeillet, et la Ville de Dole, son Député-maire Jean-Marie Sermier et leurs collaborateurs-trices qui ont permis que cette journée s’organise dans d’excellentes conditions et de nous recevoir aujourd’hui.

C’est pour moi une joie d’ouvrir cette septième édition de la journée régionale d’échanges et de réflexions sur la coopération et la solidarité internationale organisée par le CERCOOP Franche-Comté. Elle s’inscrit dans un contexte particulier, et tout d’abord à titre personnel puisque c’est depuis peu que je préside le CERCOOP Franche-Comté. C’est avec un mélange de fierté et d’émotion que je m’adresse à l’ensemble des participant-e-s, mesurant à la fois l’ampleur des enjeux à venir mais aussi tout le travail accompli ces dernières années. Qu’on me permette à cet égard de saluer chaleureusement Éric Durand, président depuis 2008 d’un CERCOOP Franche-Comté renouvelé, aux côtés d’une équipe qui a largement prouvé sa compétence et son dynamisme. Ensemble, ils ont su faire de cette structure, jusqu’au niveau national, un acteur reconnu et désormais incontournable du paysage de la coopération et de la solidarité internationale. Qu’il soit assuré que j’aurai à cœur de maintenir l’implication et l’enthousiasme qui ont été les moteurs de la réussite tout au long de ces années. Mais, et c’est sur ce point que je voudrais insister, le contexte est particulier également à titre institutionnel, puisque cette journée s’inscrit pour la première fois dans le cadre de la nouvelle région Bourgogne-Franche-Comté. Cela impose au CERCOOP Franche-Comté un double défi : poursuivre ses missions de réflexion et de terrain tout en travaillant en partenariat étroit avec Bourgogne Coopération pour, ensemble, réussir la fusion des deux réseaux et construire avec l’ensemble des acteurs-trices de la région Bourgogne-Franche-Comté une politique régionale cohérente et audacieuse sur les questions de coopération et de solidarité internationale.

C’est dans cet esprit que je dirai maintenant quelques mots sur le thème retenu pour nos échanges. La solidarité et la coopération peuvent-elles être des leviers pour mieux vivre ensemble ? Toutes et tous rassemblé-e-s ici, nous sommes familier-e-s des concepts de solidarité et de coopération internationale et avons, à quelques nuances près, une claire conscience des actions à mener et des pièges à éviter, au point que nous ne prenons plus toujours le temps de nous interroger en profondeur sur nos pratiques. Mais le monde change et devient chaque jour

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plus complexe. Les migrations économiques, politiques, environnementales, sociales, percutent de plein fouet nos sociétés et imposent une remise en cause de nos comportements individuels, associatifs, institutionnels.

Bien sûr, la pression et l’urgence des situations à régler sont telles que l’analyse et la réflexion sont parfois reléguées à l’arrière-plan. La détresse est une réalité quotidienne et concrète. Elle exige des solutions, et parfois même une improvisation, au jour le jour qui ne sont l’apanage ni des États ni des acteurs-trices associatifs : ces pêcheurs grecs et italiens des îles de Lesbos et de Lampedusa qui recueillent les migrant-e-s sur leurs barques, cette voisine de la jungle de Calais qui recharge gratuitement les portables des réfugié-e-s, font acte de solidarité et concourent, chacun-e à leur manière, au vivre ensemble.

Mais ces actions ne peuvent nous dispenser d’une mise en perspective des problèmes si nous ne voulons pas que les débats soient confisqués par certain-e-s et caricaturés dans des affirmations réductrices et contraires à la dignité humaine. Ces caricatures, nous les retrouvons dans les médias, dans les discours politiques, dans les propos de nos voisin-ne-s ou de nos collègues. Ils se concentrent sur quelques thèmes rebattus depuis des années : l’impossibilité d’accueillir « toute la misère du monde », la nécessité d’instaurer des quotas, l’exaltation des traditions chrétiennes et de l’identité nationale, le « tri » entre celles et ceux qui fuient pour échapper à la guerre et celles et ceux qui fuient pour échapper à la misère.

Je souhaite donc que cette journée soit un moment de pause dans un monde turbulent et qu’elle soit l’occasion, sinon d’apporter toutes les réponses, du moins de nous aider à trouver les formulations justes et à poser les bonnes questions. J’en ai, pour ma part, quelques-unes à l’esprit, qui ne sont pas les seules. La solidarité internationale, n’est-ce pas avant tout le respect des droits fondamentaux par un équitable accès de toutes et tous, quels que soient son lieu de vie et ses revenus, à des services d’égale qualité pour l’éducation, la santé, l’eau, la culture ? La coopération, n’est-ce pas aussi la mise en place d’échanges internationaux respectueux des États et des populations, le refus d’accords économiques mis en œuvre par des multinationales au mépris du droit, la fin de la prédation des terres ou des richesses du sous-sol au profit de sociétés - les nôtres - en surproduction chronique et déjà gavées de technologie ? Retrouver le chemin de la justice sociale, celui des équilibres économiques, politiques et culturels, n’est-ce pas refuser le partage du monde entre des États de départ, déstructurés par la pauvreté et la violence, et des États d’accueil contraints de recueillir la détresse des migrant-e-s mais fragilisés par le délitement de leurs institutions. Retrouver ces chemins,

n’est-ce pas mettre un terme aux migrations de survie pour renouer avec les migrations comme symbole de la liberté de circulation et de partage d’expériences et de bonnes pratiques qui font la richesse du monde. N’ayons pas la mémoire courte et souvenons nous des Espagnol-e-s, des Polonais-e-s et des Italien-ne-s des années 1930, des Algérien-ne-s, des Tunisien-ne-s et des Marocain-ne-s des années 60 ou des Vietnamien-ne-s des années 80. « Ce sont eux, tous ces réfugié-e-s du vingtième siècle, jugés chaque fois trop nombreux-ses, qui font, avec nous, la France d’aujourd’hui… Eux, c’est nous » comme l’écrit Daniel Pennac dans un petit livre essentiel consacré aux réfugié-e-s.

À nous, collectivités territoriales impliquées dans la coopération décentralisée, à nous, partenaires associatifs engagés dans les actions de solidarité et l’accueil des migrant-e-s, de nous interroger et de travailler à relever ces défis. Travailler ici par des actions de sensibilisation et de plaidoyer, travailler là-bas avec les acteurs locaux pour développer des projets innovants et mener des actions communes dans un esprit de responsabilité mutuelle.

Je vous souhaite à toutes et tous un fructueux moment d’échange.

Merci de votre attention !

Intervention de Jean-Paul Sornay pour présenter l’Université d’été des Mouvements Sociaux et de la Solidarité Internationale

«©La Pépinière Culturelle

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10H30 ÉCHANGES ENTRE EXPERT-E-S ET PARTICIPANT-E-S

G.Jacques - Pourquoi cette crispation autour des migrations ? Nous vivons une étape importante sur le plan historique : le vote de la Grande Bretagne pour sortir de l’Europe, Donald Trump, la montée du Front National et des partis extrémistes, etc. On assiste aussi à une instrumentalisation du phénomène alors que les mouvements migratoires sont un phénomène historique. L’immigration forcée se fait dans de nouvelles conditions, pour fuir des situations de violences : celles de la guerre en Syrie par exemple mais aussi celles dues aux changements climatiques ... On connaît une augmentation considérable du nombre de personnes déracinées entraînant des mécanismes de peur et une perception différente.

B.Laffort - En premier lieu, il s’agit de se « décentrer » de notre propre société. Il y a nécessité à réinterroger sans cesse notre altérité, notre regard à l’Autre, notre point de vue. « Vérité en deçà des Pyrénées, erreur au-delà », disait Pascal. Ce que nous pensons souvent être des « vérités » en matière de croyance, de culture, de modèle de société, doivent toujours être repensées, réexaminées et recontextualisées. Ce que Claude Lévi-Strauss appelait l’« ethnocentrisme » (et que j’appelle le « sociocentrisme ») apparaît ainsi comme une conduite la mieux partagée dans le monde, sur laquelle il faille quelque part « lutter ». Ce phénomène, presque « naturel » et très partagé, nous amène à penser que notre culture est forcément la meilleure, que notre pays est forcément le « meilleur »… Tout cela doit être combattu afin d’être relativisé. Seul ce véritable « travail », au sens des psychanalystes, nous permettra de proscrire de notre vocabulaire toutes les théories relatives aux « guerres de civilisation » et autres « combats idéologiques » qu’il faudrait mener… Penser l’Autre, au contraire, ne peut que nous ouvrir l’esprit et nous enrichir ! De manière très concrète, une des meilleures façons d’appliquer cela est de voyager pour cultiver l’altérité, renouveler sans cesse notre capacité d’ouverture et de rencontre pour lutter contre les préjugés. L’extraordinaire réussite d’un programme d’échanges entre étudiant-e-s de l’UE comme celui d’Erasmus constitue une voie à suivre et à développer !

D.Leschi - Sur plus de 80 000 demandeurs-euses d’asile, en gros, une personne sur deux est hébergée dans les diverses structures de l’asile comme les centres d’accueil pour demandeurs-euses d’asile ou l’hébergement d’urgence. Puisque la question est celle de l’accueil et du vivre ensemble, il y a en ce moment des signes positifs, avec une baisse de 30 % des actes anti-musulmans. Je constate positivement qu’aucun centre d’accueil n’a été récemment attaqué contrairement aux années 70 où les foyers de travailleurs-euses migrant-e-s étaient l’objet d’agression, comme c’est le cas en ex-Allemagne de l’Est. Mais il est vrai que la situation globale est différente mais elle est aussi différente sur le plan du travail et du chômage et de la crise du logement. Qu’est-ce qui fait qu’on peut vivre ensemble ? La démocratie, avant tout. Et que nous manque t-il ? Quelque chose qui était essentiel, et qui l’a été dans les années 30 ou après-guerre ce qu’on appelait le mouvement ouvrier, le syndicalisme et même le christianisme social. La crainte du monde musulman influe sur la perception des gens, le monde musulman connaît une involution. C’est le monde où on éradique l’altérité et tout cela contribue à des réactions de repli et de fermeture qui expliquent une partie du climat social actuel.

G.Jacques - Il existe une manipulation des étrangers, de ceux qui ont l’air « d’autres ». Depuis toujours dans l’histoire, on pointe du doigt ces personnes pour leur faire porter la responsabilité des maux de la société. Par exemple le Brexit en Angleterre repose sur la peur des polonais-e-s et des autres européen-ne-s...Le processus de dissuasion, la peur de l’appel d’air se traduit par une précarisation du séjour, des politiques qui, au lieu de sécuriser les parcours migratoires, ont accentué les difficultés.

COMMENT VIVRE ENSEMBLE DANS UN MONDE DE MIGRATIONS ?

Mme Geneviève Jacques, Présidente de la Cimade ; M. Didier Leschi, Directeur général de l’Office français de

l’immigration et de l’intégration (OFII) et ancien Préfet délégué pour l’égalité des chances auprès du Préfet de la Seine-Saint-Denis ; M. Bruno Laffort, Maître de conférences en sociologie, Chercheur au

Laboratoire C3S, Université de Bourgogne-Franche-Comté

Animé par M. David Eloy, Ancien rédacteur en chef d’Altermondes

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B.Laffort - Avec la chute du marxisme, on assiste, au Nord comme au Sud, depuis une trentaine d’années à un déclin des idéologies. Il n’y a plus d’idéologies qui nous fassent véritablement « vibrer » et seul le capitalisme avec son « économie de marché » se déploie désormais sous nos yeux, avec son lot de souffrance et d’insécurité qu’il entraine. Il est possible que ce désenchantement entraîne un certain retour du religieux (et pas seulement chez les musulman-e-s, mais aussi chez les chrétien-ne-s et les juifs-ves), avec des dérives importantes pouvant conduire au fondamentalisme. Dès lors, comment retrouver un cadre plus apaisé qui permette de vivre ensemble ?

D.Eloy - On peut envisager l’avenir mais que faire maintenant ?

B.Laffort - A côté de la politique institutionnalisée, il ne faut pas négliger les initiatives individuelles et associatives, toutes les idées et la bonne volonté qui viennent « d’en bas »

disposent de la légitimité du terrain et gagneraient à être davantage soutenues !

D.Leschi - Entre 200 et 220 000 titres de séjour sont délivrés chaque année. La situation n’est pas aussi simple qu’elle en a l’air et c’est une problématique européenne que de faire face aux migrations. En Allemagne, c’est la mobilisation de l’ensemble de la société qui a permis de tenir le choc et d’organiser l’accueil d’urgence. Les Églises en particulier se sont investies grâce à leur capacité financière, puisque je rappelle qu’en Allemagne, le denier du culte est collecté par l’État, mais aussi grâce à la mobilisation du mouvement syndical. Il y a une crispation à Calais ou à Grande-Synthe où la situation locale est difficile. Nous avons un double

problème qu’il faut traiter parallèlement : accueillir des nouveaux-velles arrivant-e-s mais aussi ne pas oublier d’aider celles et ceux qui sont là, et répondre à la crise de l’intégration générée par le chômage. La difficulté est d’autant plus grande que les nouveaux-velles arrivant-e-s sont pour la plupart sous-qualifié-e-s et qu’il y a la barrière de la langue. Enfin, nous le savons, nous avons un problème lié au développement de courants qui remplissent le vide laissé par le recul des mouvements d’éducation populaire et dont la philosophie n’aide pas au vivre ensemble.

G.Jacques - Il est essentiel de changer de regard : déjouer les fausses informations, dénoncer les fausses statistiques, voir la concurrence entre immigrés arrivés depuis longtemps, les nouveaux et les français pauvres. Il faut réussir à susciter une empathie humaine à travers des rencontres (fêtes de quartier, sorties d’école, etc.) et reconnaître dans la personne venue d’ailleurs une mère, un père, un voisin, un chanteur… G.Jacques fait référence au livre « Eux, c’est nous » de Daniel Pennac. Une bonne coopération entre les services de l’État, les collectivités et la société civile est nécessaire pour créer un cadre propice. On a 100 à 120 000 demandeurs d’asile cette année et pourtant il y a un déficit en matière d’hébergement. Cela engendre des crispations. Je pense qu’il faut revoir les politiques migratoires et les repenser fondamentalement car l’Europe risque de se disloquer au titre des migrations.

Réactions des participant-e-sHugo Cassagnaud (Bourgogne Coopération) - La question du vivre ensemble ne se pose-t-elle pas plutôt entre nous avant de poser la question de la place des migrant-e-s ? Finalement on n’a peut-être plus nous-mêmes de projets de vivre ensemble, on ne sait plus vivre ensemble.

Lionel Perrin (Agence de l’Eau Rhône Méditerranée Corse - Délégation Besançon) - En Allemagne, Angela Merkel a pris des risques, en s’appuyant sur l’Histoire, en évitant les réactions émotionnelles dans les médias. Ce qu’on va pouvoir faire pour notre pays ? C‘est chacun-e à son petit niveau qui pourra changer les choses.

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Participant-e (Ligue des Droits de l’Homme) - Le fondement du vivre ensemble, c’est l’égalité. Et le sentiment d’avoir perdu ce socle fondamental de la République ne peut qu’engendrer de la violence.

André Thollet (CCFD Terre Solidaire Dijon) - Pour nous aider à changer de regard, il y a les réseaux caritatifs comme Welc’home ou le réseau REPAS.

B.Laffort - Je partage le point de vue de ce qui a été dit sur l’Allemagne. Il faut confronter sa culture aux autres cultures, et parfois accepter aussi de revoir son point de vue. Il donne l’exemple du port du voile en Algérie : lors de son récent séjour de trois semaines dans ce pays, il a pu constater (en réalisant plusieurs entretiens approfondis) que certaines femmes voilées étaient porteuses de valeurs d’émancipation et luttaient « en douceur » pour obtenir davantage de droits et abolir, petit à petit, le patriarcat qui domine encore largement cette société. Le voile n’est donc pas qu’un simple signe d’oppression comme on a tendance à le voir en Occident !

D.Leschi - Il est surpris par le propos sur le voile. Il est important de prendre garde à la tolérance vis-à-vis du voile, ce n’est pas un signe anodin, même si je pense que la bataille n’est pas tant d’ordre juridique que politique. Dans tous les pays musulmans, l’avancée du port du voile est allée de paire avec une régression des droits des femmes et plus globalement des autres minorités. Concernant le solde migratoire, il ne faut pas tout mélanger. Lorsque l’on évoque le fait de faire des études, de partir s’installer ailleurs, cela devient problématique quand la peur de l’antisémitisme incite des étudiant-e-s juifs/juives à partir en Israël. L’Allemagne a une politique migratoire sans doute ouverte, elle a aussi une dette historique en particulier vis-à-vis de pays comme la Grèce. Et le contenu de son accord avec la Turquie est discutable.

G.Jacques - À notre niveau de responsabilité, on doit admettre qu’il y a eu un échec des politiques publiques. À l’époque des Trente Glorieuses, on est allé chercher des travailleurs-euses du Maghreb et d’Afrique de l’Ouest. Ils-elles étaient bien intégré-e-s mais on a oublié qu’il s’agissait d’êtres humains, qui avaient aussi le droit d’être en famille. On a assisté à une ghettoïsation d’un des quartiers les plus riches de Paris. Pourtant, il y a des formes de mobilisation associative très créatives, c’est ça la vie d’aujourd’hui. C’est à partir de ces forces-là, éparpillées mais réelles, que les politiques pourront / devraient changer. Il faut insister sur la mobilisation pour que la France arrive à faire société : égalité, fraternité - qui se perdent beaucoup - et solidarité.

Une personne cite la Cimade : « Nul n’est étranger sur cette terre », ou encore « Toucher aux droits des étrangers, c’est toucher aux nôtres » (festival Rencontres & Racines à Audincourt).

Il s’agit d’aller au-delà des apparences, de construire un monde nouveau et les idées nouvelles existent déjà et sont pour certaines déjà en expérimentation.

On pose la question de la démocratie : quelle identité l’Europe défend-elle face au vivre ensemble ? Comment élargir ce type de conférences pour toucher d’autres citoyen-ne-s ? Il faudrait mieux propager, accueillir et valoriser les initiatives et surtout défragmenter, décloisonner.

Tanja Nikolova (Miroirs de Femmes-Reflets du Monde) - J’ai obtenu la nationalité française, mais je me sens avant tout « citoyenne du monde ».

L’Accueil citoyen des réfugiés de Dole est composé de 160 bénévoles et œuvre dans plusieurs domaines d’intervention : administratif, familial, scolaire, là où l’État se désengage.

ConclusionsG.Jacques - Il faut faire ensemble pour apprendre à vivre ensemble, pour apprendre des autres cultures et prendre un grand bol d’oxygène.

D. Leschi - C’est en faisant de la politique qu’on réapprendra à vivre ensemble et en créant du débat public sans oublier les couches populaires.

B. Laffort - Il faut redonner à la politique ses lettres de noblesse, certes, mais ce sera un travail de longue haleine. À court terme, résistons à cette ambiance actuelle - extrêmement pesante et sécuritaire – qui va à l’encontre du « vivre ensemble ». En ce sens, certains médias doivent aussi sortir de la surenchère qu’ils nous imposent à longueur d’images ou d’antenne, sous peine de conduire la société française – une société très tolérante - à des clivages qui seraient extrêmement dommageables pour l’avenir.

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11H30 ATELIERS SIMULTANÉS

Afin de garantir une plus grande proximité avec les acteurs-trices et de leur permettre d’approfondir leurs réflexions sur un sujet donné, ont été proposés 3 groupes de travail sur les thèmes suivants :

Ces trois ateliers ont été enrichis par des contributions d’acteurs associatifs, institutionnels, scientifiques ou d’entreprises. Des exemples de bonnes pratiques et de projets innovants sur les sujets abordés ont été présentés.

1- Les migrations pour vivre ensemble, l’exemple de la Franche-Comté

2- L’action des organisations de solidarité internationale issues des migrations (OSIM) pour une compréhension de

l’Autre et un lien entre les cultures

3- Femmes migrantes : motivations, rôles et engagements

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S.Joly - Plus que jamais aujourd’hui, la connaissance de l’Histoire libère à condition de s’intéresser à l’Histoire et à la culture de l’Autre.

Les regards croisés permettent de se comprendre et de s’entendre. À Besançon, a été créé en 2007 le site internet « Migrations à Besançon - Histoires et mémoires ». Ce site, hébergé sur celui de la Ville de Besançon, s’adresse à tou-te-s curieux-ses de l’histoire commune, pour celles et ceux qui arrivent et celles et ceux qui viennent d’ailleurs. Le but est de rassembler, de construire un ensemble de connaissances, de témoigner des parcours individuels et les ancrer dans l’histoire collective. Il s’agit de reconstituer la complexité des faits, le lien entre les fantasmes et les idées reçues, apporter une vision historique à la compréhension du présent. Le site a d’abord été créé au sein du CCAS avec Odile Chopard. Il a intégré le service des relations internationales en 2015, suite aux réductions de dotations qui n’ont pas permis au CCAS de le conserver. J’étais alors administratrice du CCAS et tenais énormément à ce site. Après avoir rencontré le Maire de Besançon, il a été intégré au site de la Ville, j’avais pour mission de le développer mais toujours avec des petits moyens.

Notre équipe en charge du site est donc allée voir le Rectorat, la Direction régionale Jeunesse et Sports, la Direction régionale des Affaires culturelles et a finalement réussi à bénéficier d’aides. Aujourd’hui, la gestion et le développement du site nécessite un contrat d’avenir à temps plein mais aussi des professeur-e-s référents qui sont chargé-e-s de faire le lien avec les établissements scolaires. Le but de ce site est d’être un outil, avec plus de 580 articles, des témoignages individuels, des notes politiques et géopolitiques. C’est une bibliothèque avec, en satellite, de nombreux blogs interactifs. Il y a à Besançon un tissu associatif important mais le problème est de savoir comment toucher tous les publics. Les réseaux de Bourgogne-Franche-Comté doivent s’emparer de cet outil. Il faut que les élu-e-s et les différentes délégations de la ville soient présentes, afin d’assurer une transversalité des compétences des partenaires et des associations.

En ce qui concerne le pilotage, le Conseil scientifique du site, composé d’universitaires, garantit les données présentes dans la biblio-thèque sur le site et est également pourvoyeur d’articles. Le site bénéficie également d’un

Animateur : M. Bruno Laffort, Maître de conférences en sociologie, Chercheur au Laboratoire C3S, Université de Bourgogne-Franche-Comté

Rapporteur : M. Claude Mercier, Président de l’Association Franche-Sylvanie

Témoins de pratiques :Mme Solange Joly, Adjointe au Maire déléguée à l’Action internationale, Ville de Besançon ; M. Ousmane Adja, Président du Conseil représentatif des Africains, Mahorais, Comoriens et Antillais de Franche-Comté ; Mme Delphine Mentré, Adjointe au Maire, chargée de la communication, des consultations citoyennes, des jumelages, des relations internationales et des grands évènements, Ville de Belfort.

atelier 1- Les migrations pour vivre ensemble, l’exemple de la Franche-Comté

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groupe de contributeurs-trices, qui travaillent sur des thématiques diverses (travail, démarches des migrant-e-s, etc.) et recueillent des témoignages.

Le site est également un guide des adresses utiles à Besançon, avec un mode d’emploi des institutions et des services en 12 langues pour les nouveaux/nouvelles arrivant-e-s. Il est actuellement mis à jour et tout-e arrivant-e peut avoir ce document, réalisé en partenariat avec La Cimade, le CDDLE et des associations bisontines.

Le site permet de faire se rencontrer des projets, des animations, des rencontres, des acteurs-trices, en animant les blogs satellites de la bibliothèque. Prenons l’exemple de « Parlons-nous » où des lycéen-ne-s sont allé-e-s à la rencontre des migrant-e-s ; de « À voix autre » dans le cadre du plurilinguisme et éducation dans une maison de quartier ; de la conférence de Gérard Noiriel « À quoi sert l’identité nationale ? » ; de la constitution de l’association Miroirs de Femmes à la suite d’une rencontre dans le cadre du site. Ce dernier permet de faire converger des origines, des cultures, des milieux, des générations et des quartiers différents. Et c’est une belle réussite, qui connaît de nombreux-euses adhérent-e-s.

Le site a engagé un partenariat avec la Cité des migrations à Paris (Musée des migrations), qui sera réenclenché lors d’une rencontre le 7 juillet prochain, suite à un flottement lors de la transition entre le CCAS et les relations internationales de la Ville de Besançon. Autre partenariat en cours : avec le Musée comtois de la Citadelle, qui évolue vers un musée ethnologique. En ce moment, se tient d’ailleurs l’exposition « les trucs d’avant » sur ce que l’on utilisait au quotidien il y a 30 ans. Le site « Histoires et Mémoires » aurait toute sa place pour organiser une exposition sur l’Histoire de Besançon et des populations qui la composent, car il est important de montrer que les bisontin-e-s ne sont pas toutes et tous né-e-s à Besançon, mais aussi en France et à l’étranger et qu’ils-elles font l’histoire de la ville.

O.Adja - Pourquoi avoir créé le Conseil re-présentatif des Africains, Mahorais, Comoriens et Antillais de Franche-Comté ? Il existe sous l’impulsion initiale du Maire de Besançon, qui a invité l’ensemble des communautés à se rassembler en conseil. L’objet du conseil dans ce cas précis est de représenter toutes les associations issues des communautés africaines, mahorais, comoriennes, et antillaises auprès des instances institutionnelles.Dans ce but, elles ont été reçues par le Maire, par la Préfecture et ont développé des relations au sein du Centre Nelson Mandela à Planoise et au centre 1901. L’objectif de ces rencontres était de présenter le conseil, de montrer que sur Besançon il y avait un conseil représentatif et voir ensemble comment faire en sorte que ce conseil ait un sens.

Ces réunions de travail ont été très édifiantes. Ce qui a beaucoup intéressé les différent-e-s acteurs-trices est qu’il y a eu du répondant en termes d’organisation. Il y a eu 4 Assemblées générales avant de mettre le bureau en place.

Le constat était simple : aujourd’hui, il existe des structures qui sont mises en place pour aider des personnes dans tous les domaines possibles (intégration, social, économique) mais le vrai problème est la communauté au sein des communautés. Des structures existent pour régler les problèmes mais encore faut-il prendre conscience que ces structures existent. Il ne faut pas avoir peur de se rassembler. Les portes des instances sont souvent ouvertes. Les explications attendues ont été données. Il y a toute une partie de la population qui en réalité souffre d’une inconscience, d’une ignorance des solutions, que l’on appelle « repli communautaire ». Pour chaque problème, il y a une solution. Les personnes connaissent bien les services sociaux mais ont parfois juste besoin de quelqu’un pour leur dire où aller et quoi faire.

B.Laffort - L’accueil peut prendre plusieurs formes.

C’est une sorte de « triptyque » où se combinent :• le rôle des institutions (par exemple via le site

internet « Migrations à Besançon » qui nous a été décrit) ;

• le rôle des associations (à l’image, par exemple, du Conseil représentatif des Africains, Mahorais, Comoriens et Antillais de

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Franche-Comté dont Ousmane Adja nous a décrit l’éventail de ses nombreuses actions) ;

• mais aussi, le rôle de chacun-e d’entre nous, citoyen-ne-s motivé-e-s par telle ou telle action, par telle ou telle cause, qui jouons le rôle de « passeur de culture », de médiateur en apportant soutien et réconfort ponctuel.

Pour revenir aux rôles des institutions, la recherche d’un logement est sans doute LA difficulté majeure que rencontrent toutes les personnes qui arrivent sur nos territoires ; à ce titre, je pense qu’il est intéressant de laisser la parole au travail réalisé par la Ville de Belfort.

D.Mentré - En effet, la Ville de Belfort a été interpellée par l’État en septembre 2015 pour accueillir les migrant-e-s, même si les vagues migratoires avaient commencé avant. Belfort a souhaité y répondre. Les témoignages de Solange Joly et Ousmane Adja sont intéressants car ils posent la question de l’intégration des personnes qui sont éloignées des dispositifs. Le dispositif européen de relocalisation des migrant-e-s est une solution. Un nombre sans précédent de migrant-e-s est arrivé sur le territoire, des migrations liées aux conflits dans le monde, en provenance essentiellement du Moyen-Orient et de la Corne de l’Afrique. La France a décidé de participer à l’effort européen en accueillant 30 000 personnes et Belfort a souhaité s’impliquer, notamment en mettant à disposition de nombreux logements sociaux vacants. Nous ne fournissons pas uniquement des logements car un accompagnement est aussi nécessaire.Un comité de pilotage a été constitué avec des associations belfortaines volontaires pour suivre les migrant-e-s dans la durée entre l’accueil en gare ou aéroport et sur le long terme pour arriver à une autonomie par l’emploi, l’apprentissage du français (première clé pour trouver un emploi), par l’accueil des enfants, l’accompagnement social (certaines personnes n’avaient pas le statut de réfugié-e-s, mais ont pu l’obtenir à travers le visa de type D « migrant issu des minorités religieuses »).

Beaucoup de logements ont été mobilisés : 50 personnes ont été accueillies avec enfants. Il y a un suivi sur le long terme, en partenariat avec le Département qui est en charge du logement social. Une convention a permis de prendre en charge les loyers jusqu’à ce que les ménages soient autonomes (bail glissant). Le CCAS a accompagné toutes les familles qui n’étaient pas prises en charge par le Centre d’accueil de demandeurs d’asile, sans statut, pour le suivi social et le suivi des enfants, l’intégration dans les écoles, l’accès au droit, etc. La particularité de cette prise en charge est la volonté d’avoir pour chaque ménage une personne de la société civile référente, pour qu’il y ait un relais au quotidien, sur

la base du bénévolat, qui sorte du cadre associatif (appel aux habitant-e-s belfortain-e-s). Beaucoup d’habitant-e-s demandaient quoi faire pour aider. Le comité a centralisé toutes ces demandes et les a redéployées sur des aides concrètes.

Belfort se construit aussi avec les migrations, ces personnes vont construire Belfort, leurs enfants vont créer de la richesse donc l’accueil à leur arrivée est très important pour qu’ils se sentent bien accueillis dès le départ avec une vision long terme. Un bilan va être réalisé avec eux pour qu’ils puissent faire des retours sur ces dispositifs d’aide à l’accès à l’emploi, de cours de français, de Pôle emploi, des associations mobilisées, etc.

B.Laffort - Les étudiant-e-s étranger-e-s présent-e-s dans mes cours à l’Université de Besançon ne sont pas représenté-e-s - ou ne se sentent pas représenté-e-s - par les associations de type « ESN Besançon » qui sont plutôt focalisées sur les étudiant-e-s Erasmus (donc ressortissant-e-s de la seule Union européenne) ou bénéficiant d’une allocation ou d’une bourse de leur pays. Les étudiant-e-s africain-ne-s et maghrébin-e-s notamment se retrouvent esseulé-e-s quand ils/elles arrivent, le plus souvent en difficulté, car ils/elles arrivent seul-e-s, par leurs propres moyens. C’est compliqué pour eux de connaître ces structures : malgré tous les dispositifs, il y a encore des difficultés, notamment parce qu’il n’existe pas à Besançon un guide d’accueil « papier » pour les étudiant-e-s étrangers-ères. Il existe certes un guide réalisé par le CROUS depuis cette année - ce qui est déjà un premier pas dont il faut se réjouir - mais il faut déjà en avoir la connaissance, le télécharger et pouvoir ensuite l’imprimer ! Il y a une vraie nécessité qui subsiste : mener un travail d’orientation auprès de ces étudiant-e-s-là. Il y a aussi des initiatives intéressantes, mais qui restent isolées et pas assez connues des étudiant-e-s étranger-e-s. Ainsi, l’assistante sociale du CROUS a mis en place des « cercles de parole » où les étudiant-e-s étranger-e-s peuvent échanger ; il y a aussi l’association « La Dépanne » qui fournit des repas… Tout cela a le mérite d’exister, mais devrait être mieux structuré, afin que tout un chacun puisse en avoir connaissance.

S.Joly - Le problème est que les associations sont très actives mais qu’il est difficile de faire la démarche d’aller là où il y a des choses. Les associations Erasmus + et ESN, très actives, accueillent tous les étudiant-e-s et commencent à être très connues mais il y a toujours cette dimension fondamentale de la communication. Comment fait l’étudiant-e qui arrive ? On peut imaginer des initiatives comme des parrainages entre étudiant-e-s bisontin-e-s et étranger-e-s, par exemple.

Cela dépend aussi de l’état d’esprit dans lequel

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on arrive : si l’on connait de grandes difficultés, on ne peut pas faire la démarche de chercher. Il faut trouver les bons outils, les mots, le lien qui permet d’avoir ce contact qui puisse permettre d’aller plus loin. L’état d’esprit est fondamental.Il y a aussi parfois une peur de l’administration qui est associée à des connotations négatives. De plus, dans certains pays, l’accès aux droits est payant, on s’imagine qu’il va falloir payer pour bénéficier de ces droits.

Témoignage de Franche-Comté Boussole - L’association Franche-Comté Boussole a été créée il y a 16 mois dans le quartier de Planoise à Besançon pour orienter les gens car il y avait un problème d’information. Les personnes, toutes générations confondues, rencontrent des difficultés à cibler les organismes pouvant rendre service. Elles viennent voir l’association pour qu’elle les aide à lire, à écrire un courrier, à réaliser leurs démarches administratives. Pour la plupart, ce sont des familles monoparentales, des femmes qui travaillent dans le secteur de l’entretien, avec des horaires décalés. Il y a des difficultés au niveau linguistique, pour lire les documents, une barrière administrative (par peur de l’administration) notamment quand il y a des problèmes avec les employeurs. Beaucoup travaillent grâce au bouche à oreille. Les associations à Planoise ne se connaissent pas beaucoup alors qu’elles ont besoin les unes des autres sur le terrain. Certains problèmes pourraient se résoudre en un coup de téléphone ou une lettre. Les enfants délaissent les tâches administratives aux mères ou aux sœurs généralement. Il n’y a pas de croisement du tissu associatif. Le grand centre culturel Nelson Mandela ne permet de recevoir tout le monde pour tenir des réunions et recevoir des personnes alors que le contact physique est nécessaire.

Hugo Cassagnaud (Bourgogne Coopération) - C’est une évidence qu’un lien de confiance fort est nécessaire. De la même manière, quand les français-e-s partent en mobilité, le premier réflexe est de se tourner vers sa communauté, en termes de compréhension, de réseau, etc. Il faut renforcer ces structures qui font du lien, et faire en sorte qu’elles se fédèrent et que toutes ces compétences puissent bénéficier à toutes et à tous. La création d’un parcours de prise en charge de l’arrivée à l’intégration oblige à réfléchir à un relais cohérent entre les structures.

Interventions diverses

À Planoise, déjà six ou sept écrivains publics de la maison de quartier aident à la rédaction de courriers notamment. Plusieurs choses sont organisées par la Ville, par le Conseil consultatif

des habitant-e-s de Planoise. Il y a eu ce constat d’une mauvaise communication. Le forum des associations de Planoise aura lieu le 10 septembre à la maison de quartier et les habitant-e-s iront rencontrer la trentaine d’associations de Planoise, c’est l’occasion de connaître ce qui existe et d’ouvrir des champs d’actions pour aider les familles.

[ Est abordée la question du rôle des associations de migrant-e-s. ]

Les associations de migrant-e-s ont un rôle à jouer à partir du moment où les personnes se retrouvent, notamment pour responsabiliser les personnes sur leurs situations, et qu’elles ne se retrouvent pas dans des situations d’expulsion, de non accès au droit, etc. C’est aussi la position des nouveaux-nouvelles citoyen-ne-s de se prendre en charge, l’intégration doit venir de soi-même.

[ Est abordée la question de la prise en charge des mineur-e-s étrangers-ères isolé-e-s ne parlant pas le français. ]

D.Mentré - Il n’y a pas de mineur-e-s isolé-e-s à Belfort, il y a eu certains cas juridiques compliqués seulement. Les enfants sont intégrés dans les écoles de Belfort dans des classes normales avec un suivi spécifique, des cours de français spécifiques. Ils mangent à la cantine avec une aide financière. Il existait déjà des enseignant-e-s Français Langues Étrangères, la seule question était la capacité d’accueil des écoles.

Il y a également le Centre académique pour la scolarisation des nouveaux arrivant-e-s et des enfants du voyage (CASNAV) qui travaille sur le sujet des enfants non francophones, avec des ressources pédagogiques dans toutes les langues.

En gros, les kits existent déjà, le seul problème est de les assembler pour que ça démarre. Entre la loi 1901 et la structure existante, il faut provoquer une rencontre pour se mettre à penser ensemble. Les dispositifs existent, les bonnes volontés aussi.

Les fédérations d’entreprises d’insertion permettent également de créer des passerelles, c’est l’étape après la levée des premiers freins à l’arrivée des personnes. Ces fédérations accueillent les migrant-e-s.

Les moyens pour l’accueil et l’insertion sont de plus en plus restreints alors qu’ils sont nécessaires à un accompagnement de qualité, car les migrant-e-s sont plus éloignés de l’emploi.

[ Est abordée la question des référent-e-s de la so-ciété civile pour accueillir les migrant-e-s à Belfort. ]

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D.Mentré - Ce n’est pas toujours évident mais il y a vraiment un lien qui se crée. Ce sont des groupes de personnes référentes et jamais des individus seuls. Les retours sont très positifs. Cela est très important pour la ville de Belfort car ces groupes permettent d’apprendre à vivre ensemble de manière générale dans la ville. Les référent-e-s sont vecteurs d’apprentissage, d’intégration, ils/elles permettent de repérer géographiquement les lieux stratégiques de la ville. Cela demande d’avoir un fascicule d’accueil des migrant-e-s, des bases de vocabulaire, etc. On a dénombré seulement une histoire de référent-e-s compliqué-e-s avec une famille complexe.

O.Adja - Suite aux échanges avec Frédérique Faure, il y a eu une compilation de flyers, de documents, d’informations etc. Le foyer international avait permis à l’époque une intégration des migrant-e-s, pas seulement par la Ville et pas aussi communautaire. L’intégration allait bien au-delà et cela ne se fait plus. Il y a beaucoup de personnes qui viennent étudier et qui ne se vendent pas après. Le système universitaire donne de la valeur aux étudiant-e-s mais ils ne valent que s’ils sont capables de créer quelque chose, de monter un projet. Or il y a un

réel problème de financement de ces projets. Le microcrédit n’est pas forcément une solution, avec des taux d’intérêt élevés. Peut-être faudrait-il inculquer la démarche de retourner aider dans le pays plutôt que d’accueillir des étudiant-e-s étrangers-ères qui viennent se former dans nos banques ? Attention à ne pas pomper beaucoup plus qu’on ne donne.

Autre témoignageSamia Coupat (Accueil Citoyen des réfugiés de Dole) - En septembre 2015, Dole a accueilli 140 migrant-e-s. Les équipes ne peuvent pas se disperser donc des commissions ont été créées (déplacement, habillement, logement, culture). Il y en a 8 au total. Des associations prennent le relais auprès des personnes sorties du Centre d’accueil pour demandeurs d’asile se retrouvant à la rue, à l’hôtel ou prises en charge par le 115 pour diverses raisons, comme le Collectif pour la défense du Droit d’Asile. Il est fondamental de se dire qu’on ne peut pas tout faire soi-même et qu’il faut déléguer. Il y a environ 10 à 15 personnes par commission, qui s’appuient sur des associations existantes. Par exemple, il y a eu une volonté de créer une commission Français Langues Étrangères mais l’association Femmes Debout s’en occupait déjà donc elle n’a pas été créée.

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atelier 2 - L’action des organisations de solidarité internationale issues des migrations (OSIM) pour une compréhension de l’Autre et un lien entre les cultures

Animateur : M. Benjamin Léger, Directeur de Bourgogne Coopération

Rapporteure : Mme Barbara Romagnan, Députée du Doubs

Témoins de pratiques :M. Abdoul Ba, Président de l’Association pour le Développement de Ganguel Soulé (ADG France) ; Mme Marie-Lucile Grillot, ancienne volontaire en service civique au CERCOOP F-C chargée d’étude OSIM ;Mme Dieynaba Baldé, Présidente de La Teranga à Dijon.

B.Léger introduit le concept de citoyenneté mondiale et d’éducation à l’interculturalité - Les OSIM mènent des actions de plus en plus importantes à intégrer dans des réseaux tels que Bourgogne Coopération ou le CERCOOP F-C et dans le cadre de cette 7ème Journée régionale du CERCOOP F-C, nous leur donnons la parole.

M-L.Grillot - L’objet de l’étude que j’ai menée au sein du CERCOOP F-C sur les Organisations de Solidarité Internationale issues des Migrations en Franche-Comté était de les identifier : connaître leur nombre, leurs projets mais aussi leurs difficultés et les leviers d’action. Nous avons recensé près de 153 « OSIM ». Leurs principaux domaines d’intervention sont :

• L’accompagnement à la scolarité• L’accès à l’éducation• La découverte des cultures• Les projets de solidarité internationale• Les échanges universitaires et sportifs• Les interventions au sein d’établissements

scolaires• Les cours de français dans les maisons de

quartier et les MJC.

Leurs atouts : la connaissance du contexte du pays d’origine, le recul et la prise de conscience du modèle de leur pays, la possibilité de mener des projets. Les OSIM sont vecteurs de développement et de démocratie locale. On citera pour exemple, le Festival « Rencontres et Racines » qui permet de faire contribuer les OSIM à la vie du territoire et d’ouvrir le public vers d’autres cultures.

A côté de ça, les OSIM connaissent des difficultés dans le montage de projets, dans la recherche de fonds, elles ne sont pas ou peu reconnues par les politiques publiques et par les collectivités territoriales. Ces organisations nécessitent d’être accompagnées et formées afin d’améliorer leurs pratiques et la qualité de leurs projets.

En termes de préconisations, il serait intéressant que les acteurs-trices de la solidarité internationale aillent à la rencontre des OSIM pour partager leurs connaissances et apporter des compétences techniques.

D.Baldé - Mon association La Teranga a pour but de contribuer, en tant qu’OSIM, à la cohésion sociale dans les quartiers, pour les jeunes ou moins jeunes. La Teranga signifie « hospitalité »

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en wolof. Le terme reflète plus particulièrement l’ensemble des actes et gestes d’ouverture de la population sénégalaise vers les non-résident-e-s. L’association a été créée en 2010 suite à l’incendie du foyer ADOMA à Dijon qui a fait 22 victimes sénégalaises dont 2 décès. On a engagé une vraie réflexion sur comment intégrer les personnes venues d’ailleurs. L’asso-ciation permet de créer des ponts, des espaces de partage entre le Sénégal et la Bourgogne, dans les secteurs culturel, social, économique. Elle est fondée sur des valeurs de solidarité, de partage et de bien vivre ensemble.

L’association permet également une intégration des sénégalais-e-s : • Aide pour trouver un logement, démarches

administratives, judiciaires et consulaires• Aide pour l’obtention du visa étudiant : aide à la

recherche de logement• Accompagnement de personnes souhaitant

rentrer au Sénégal (retraité-e-s, aide au retour).

L’association La Teranga agit ici (soirées SOS-Refoulement, la Cimade, Ligue des Droits de l’Homme : vente d’objets d’art, organisation de repas, danses, forums associatifs) et aussi là-bas sur le terrain (échanges scolaires entre l’école Elsa Triolet à Talant et la pouponnière de M’bour, actions au Sénégal dans les régions de Kolda et de Louga : équipement d’un centre de santé à Wakhy Diaré, en milieu rural et projet d’autonomisation de 300 femmes à Ouassadou).

Au départ, l’association était composée de ressortissant-e-s sénégalais-e-s, ensuite elle s’est ouverte et a accueilli des guinéen-ne-s, des congolais-e-s. Aujourd’hui elle compte 8 membres ressortissant-e-s de Bourgogne. L’association ne bénéficie pas de subvention de fonctionnement, seulement des aides financières par projet, des adhésions, des dons de sympathisant-e-s.

A.Ba - L’association pour le Développement de Ganguel Soulé (ADG France) a été créée en France en 2006 par des étudiant-e-s sénégalais-e-s. ADG

France agit beaucoup sur le terrain. Par exemple, elle a œuvré dans une région enclavée de juin à février en raison de la saison des pluies à reconstruire un pont pour permettre aux enfants de retourner à l’école (appui à la scolarisation). L’association tente également d’accompagner la zone de Ganguel Soulé dans la démocratie par le biais du théâtre, l’organisation de débats et conférences. En France, l’association mène des actions culturelles : Journées à Mantes-la-Jolie, Dole, Talant, Semaine de la solidarité internationale.

Interventions diversesCharles Simon (Agence de l’Eau Rhône Méditerranée Corse) - Il serait intéressant de travailler davantage en collaboration avec des OSIM pour qu’elles se fassent le relais des projets sur place, même dans des zones à risques, là où les projets de coopération sont presque inexistants. Le CERCOOP F-C peut fournir des informations sur les OSIM dans les pays à risques ou il est possible de consulter leur base de données en ligne et faire une recherche ciblée. Ou encore il est possible de se rapprocher des Services de Coopération et d’Action Culturelle (SCAC) dans les pays cibles.

Enfin, le projet de l’AFD « pra/OSIM » pourrait être une piste.

L’association EauSoleil ajoute qu’il n’est pas évident de créer des liens entre associations de solidarité internationale et OSIM.

B.Romagnan s’adresse à ADG France - Les femmes occupent déjà un certain nombre de responsabilités au niveau local, quelle place occupe le micro crédit et pourquoi le confier essentiellement aux femmes ?

A.Ba - Le développement passe par l’émancipation et l’autonomie financière des femmes. L’accès au microcrédit leur permet cela.

[ Benjamin Léger de Bourgogne Coopération annonce la création d’un groupe-pays Sénégal au sein du réseau multi-acteurs Bourgogne-Franche-Comté. ]

[ Patrice Bernard, Président de l’association RéCiDev indique qu’il est – en tant que français – animateur et bénévole dans deux OSIM, l’une au Pakistan et l’autre en Somalie. ]

[ Barbara Romagnan rappelle enfin que les OSIM sont également éligibles à la réserve parlementaire. ]

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atelier 3- Femmes migrantes : motivations, rôles et engagements

Animatrice : Mme Eléa Bardeau, Membre du groupe « Genre et coopération internationale » du CERCOOP F-C, RéCiDev

Rapporteure : Mme Samia Coupat, Coordinatrice de la Plateforme doloise des associations de solidarité internationale et Présidente de l’Accueil citoyen des réfugiés de Dole

Témoins de pratiques :Mme Tanja Nikolov, Animatrice-coordinatrice de l’association Miroirs de femmes-Reflets du monde ; Mme Aferdita Doda Rama, Bénévole associative

E.Bardeau - Les femmes ont une part spécifique dans la migration. Plus de la moitié des migrant-e-s sont des femmes. Les intervenantes d’aujourd’hui vont présenter leur parcours et décrire les raisons de leur engagement associatif, ici en France. L’idée n’est pas de parler uniquement des femmes car l’on sait que ce qui impacte les femmes a aussi des conséquences importantes sur les familles.

T.Nikolov - Je suis salariée de l’association Miroirs de femmes-Reflets du monde dans un quartier dit prioritaire de Besançon, à Planoise. Quand je suis arrivée en France, je me sentais « analpha-bète ». Dans mon pays, j’étais journaliste. J’ai suivi mon mari qui était né en France et y avait vécu jusqu’à l’âge de 12 ans. Au début, je ne savais pas parler français. Il y a des petites choses auxquelles on ne pense pas, des habitudes différentes, des détails qui ont une grande importance lorsqu’on arrive dans un pays étranger. C’est une période que l’on vit comme des montagnes russes, avec des hauts et des bas.

Dans mon pays j’avais un statut, mais en France il a fallu apprendre beaucoup de choses. Mes diplômes n’étaient pas reconnus et j’avais du mal à trouver du travail sans papiers. Toutefois, j’ai

compris très vite que l’accueil va dans les deux sens. Je dois aussi faire quelque chose. Mon premier objectif était d’apprendre la langue (grâce aux bénévoles et grâce à mes enfants), puis de trouver un travail. Cette ouverture, j’ai essayé également de la trouver auprès des associations. Mon 1er stage, a été d’être animatrice dans une maison de quartier. Je ne pouvais plus m’appuyer sur mes compétences de journaliste car je ne maîtrisais pas assez la langue. J’ai donc essayé de m’appuyer sur d’autres connaissances. Avec les équivalences puis la reprise d’études, j’ai pu être diplômée de l’Université de Bourgogne.

Le chemin est parfois compliqué. Mais, on doit donner beaucoup de soi. Quand on arrive dans un pays étranger, on se plie aux « règles » de la « maison ». Il y a des règles qu’il faut respecter si l’on veut y vivre.

J’ai compris qu’il n’y avait pas de lieu pour comprendre comment fonctionne ce pays. L’association que je préside s’appuie donc sur ce concept. Aujourd’hui, nous sommes plus de 150 personnes, chaque personne étant valorisée d’après ses connaissances. Au départ, nous n’étions que des femmes dans l’association. Mais,

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aujourd’hui, il y a aussi des hommes. L’association Miroirs de femmes-Reflets du monde propose : des cours de langues (10 € par an) grâce aux aides de l’État, des cours de cuisine pour des moments conviviaux, un café des langues (lieu d’échanges où les personnes peuvent parler). Il y a également une exposition qui présente l’association. On agit localement, mais, lorsque l’on va dans nos pays respectifs on apporte également des choses de France. Notre association est donc un exemple du « bien vivre ensemble ».

A.Doda - Je fais partie de plusieurs associations en tant que bénévole.

Je suis arrivée en France en septembre 2012. C’était très difficile d’arriver dans ce pays étranger avec mes deux enfants. J’ai quitté mon pays, le Kosovo, pour des raisons politiques car j’étais traductrice. Arrivée en France, j’ai été aidée par les associations telles que la Cimade, etc. Très vite un réseau d’aide s’est constitué pour nous soutenir. Au début, je me suis sentie très coupable d’avoir dû quitter mon pays et de faire vivre ce départ à ma famille. J’ai été très déçue de ne pas avoir eu le statut de réfugiée politique. Mais, l’accueil des associations m’a permis de surmonter cette forte déception.

Toutefois, beaucoup de gens sont encore réservés sur l’accueil de migrant-e-s, mais, je pense que cela existe aussi, parce que les gens ne sont pas informés.

Une anecdote pour illustrer : un père qui demande à son fils « Est-ce qu’il y a des étrangers dans ta classe ? », il lui répond « Non ! Il n’y a que des enfants ! ». Pour mieux vivre ensemble, il faut aussi toucher les gens qui connaissent moins. Il y a toujours des moyens de vivre ensemble. On a toujours assez pour donner un peu. Quand il a fallu meubler mon appartement, ça a été fait en 2 jours.

Maintenant, je mène une belle vie en France et j’essaie d’aider les autres à mon tour en étant bénévole dans des associations. J’ai réussi à trouver du travail et mes enfants ont été scolarisé-e-s. Je remercie la Cimade et SOS Refoulement.

Interventions diverses

Pourquoi avez-vous choisi ce nom pour votre association ? Quelle est sa signification ?

T.Nikolov - Miroirs de femmes-Reflets du Monde existe en tant que groupe depuis 2008. Au départ,

il était constitué d’un groupe de personnes étrangères. Toutes ces personnes adhérentes demandaient et avaient besoin d’un lieu. Elles ont souhaité mettre en valeur la notion de rencontre. Puis, nous avons créé un site internet via le réseau blog du site « Migrations à Besançon » de la Ville de Besançon, qui traite de l’histoire des femmes. En 2013, nous avons gagné le 1er prix régional de Talents des Cités.

O.Syll - La difficulté pour les migrant-e-s est aussi d’accepter d’être un peu rétrogradé-e-s par un regard qui peut renvoyer « que l’on n’est pas d’ici » ou « que l’on n’a pas le niveau » même si dans son pays, on a un haut niveau d’études.

T.Nikolov - Il y a également le phénomène de « surdiplômé-e-s ». Quand on est surdiplômé-e, on doit avoir une prise de conscience et il faut comprendre qu’il y aura un temps nécessaire d’adaptation.

O.Syll - C’est pourquoi il faut différencier les migrant-e-s qui viennent de leur plein gré et celles et ceux qui ont dû partir suite à une période de conflits. Si les personnes ont été scolarisées en France, cela signifie qu’elles ont un certain niveau en langue française.

E.Bardeau - Les femmes migrantes sont souvent discriminées à plusieurs points de vue. Malgré leur niveau de compétences, elles sont fréquemment victimes de discrimination. Toutefois, cette discrimination ne touche pas toutes les femmes, mais il y a certainement une tendance dans cette direction. Beaucoup de femmes migrantes s’engagent dans un parcours associatif pour trouver leur place. Parfois, elles ne mettent pas leur origine sur leur CV.

Lionel Perrin (Agence de l’Eau Rhône Méditerranée Corse) - Il ne faut pas dresser un tableau trop sombre car trouver un emploi est difficile pour tous les jeunes en France. La difficulté est avant tout d’avoir les papiers.

[ Ce propos est repris par une bénévole de Besançon qui prend l’exemple des femmes migrantes asiatiques qui ont suivi leur époux. Elles ont souvent un niveau bac + 5 et ne trouvent pas de travail. ]

Edith Godfroy (Conseil départemental du Territoire de Belfort) - J’ai une expérience de 15 ans en ressources humaines et je peux confirmer qu’il y a plusieurs personnes d’origine étrangère qui ont des emplois sous-qualifiés par rapport à leur niveau d’études. J’ai l’exemple de 2 personnes très diplômées dans leur pays d’origine et qui vivaient très mal ce déclassement social. En tant que professionnelle, j’étais en difficulté pour bien accompagner ces salarié-e-s.

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T.Nikolov - Il y a l’Office Français de l’Immigration et de l’Intégration (OFII) qui normalement doit aider aussi sur le parcours de formation. Notre association travaille avec la mission locale pour être en partenariat sur le suivi des parcours.

Anne-Lise David (Club UNESCO en Bourgogne) - Je fais référence à la notion de « genre ». Chacun a sa propre interprétation, ses propres stéréotypes sur les questions de genres. Être femme est un état.

Un participant fait part de son expérience personnelle - Il faut du temps, notamment pour se faire un réseau. Il faut parfois une génération, pour avoir le temps, les réseaux sont toutes les clés d’une intégration.

E.Bardeau - Quel que soit leur niveau de diplôme ou de compétences, les femmes migrantes sont souvent associées au travail avec les enfants, le ménage ou le soin. On leur attribue donc des rôles stéréotypés. Une prise de conscience est nécessaire pour trouver les clés de la reconnaissance. Les associations permettent souvent ce lien, cette reconnaissance de la personne et non du statut de femme migrante. Il y a des profils de femmes très divers, elles n’ont pas toutes les mêmes ressources et parcours.

T.Nikolov - J’ai travaillé au CCAS de Besançon. J’étais en contrat aidé. Et finalement, c’était juste sympa. Maintenant que je suis salariée dans l’association, j’ai un autre statut. Car aujourd’hui, nous sommes prestataires, nous proposons des projets. Il y a des dialogues qui se mettent en place. Pour nous, dans l’association, une personne qui parle peu est vite mise à l’épreuve, interrogée pour l’aider à s’entraîner, améliorer sa présentation. Si vous êtes intéressé-e, n’hésitez pas à laisser vos coordonnées pour connaître notre programme.

O.Syll - Le CERCOOP F-C peut aussi diffuser l’information. L’outil associatif permet à chacun-e de s’engager, de prendre confiance en soi. Il y a aussi, la question de la formation du personnel de l’administration qui n’est pas assez formé aux questions des migrations. L’Assemblée des départements de France (ADF), au niveau des formations d’accueil des personnes, dans le cadre du Réseau Culture 21, a mis en place des formations spécifiques. Le besoin de formation de l’administration française est reconnu.

Maria Comanescu (CERCOOP F-C) - Le changement de perception des autres passe aussi par notre propre attitude. Souvent nos interlocuteurs-trices nous jugent à travers l’image de notre pays, mais, cela est vrai aussi dans l’autre sens : c’est notre propre comportement qui donne une image du pays que l’on représente. C’est à nous donc de donner un bon exemple et de changer ces

perceptions. Il est également important de savoir se positionner, non pas comme des victimes, mais comme des personnes qui ont aussi des compétences à valoriser. Bien évidemment, la raison du départ de son pays joue un rôle déterminant.

A.Doda - C’est en effet un problème quand on met tous les gens dans un même sac. J’ai confon-du une fois les mots « bricolage » et « cam-briolage » pour dire « je fais du cambriolage ». Ça m’a valu quelques incompréhensions et le ren-forcement de certains stéréotypes. Il faut donc absolument qu’il y ait du contact et aller vers les autres.

Safia Diallo (Association Les Écoliers de Lougsama Goughin) - Il est toujours nécessaire d’avoir le temps de s’adapter « aux coutumes » de chaque pays. Pour ma part, je ne savais pas qu’il fallait fermer les portes de chez moi par exemple. En tant que migrante, je pense qu’il faut aller vers les autres. Il faut toujours être positive, positiver. Je suis allée vers les associations mais j’ai mis du temps à participer dans les ateliers, comme ici, pour témoigner.

T.Nikolov - Je conclus ma présentation avec la citation de Nelson Mandela : « Je ne perds jamais, ou je gagne ou j’apprends ».

S.Coupat - Ce que l’on peut retenir ce sont des parcours d’exil. L’exil est un déracinement. On perd ses codes sociaux. L’exil est vraiment douloureux : perdre sa langue, par exemple. Il y a une vie avant et une vie après l’exil. Il faut tout reconstruire dès le début. Les connaissances d’avant ne valent-elles plus rien ? Il faut y voir un double mouvement, un aller-retour.

Finalement, ce qu’il faut retenir de ces échanges c’est qu’on est mieux intégré-e lorsque l’on est l’acteur-trice de sa propre intégration.

[ Eléa Bardeau remercie toute l’équipe du CERCOOP F-C et présente brièvement le groupe de travail « Genre & Coopération Internationale » du CERCOOP F-C dont elle est membre active. ]

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13H DISCOURS DE M. LE DÉPUTÉ-MAIRE DE DOLE

©La Pépi-

Monsieur le Président, Madame la Députée, Mesdames, Messieurs,

C’est avec un réel plaisir que je vous accueille ce jour à Dole pour les travaux du CERCOOP F-C. Outre le fait que j’ai toujours eu à cœur de travailler et de développer la coopération, je retrouve aujourd’hui nombre de personnes avec qui j’avais eu plaisir à travailler lorsque j’étais Vice-président du Conseil général du Jura.

Certain-e-s d’entre vous s’en souviennent certainement, mais j’avais dans mes attributions la coopération du Jura avec le Bénin et Madagascar, ce qui m’avait conduit à participer à la vie du CERCOOP F-C et à faire plusieurs déplacements en Afrique.

Depuis, les dolois-es m’ont fait confiance pour être Maire de leur ville. Une ville qui est, depuis le début 2016, au cœur de la nouvelle région Bourgogne-Franche-Comté mais dans laquelle j’ai retrouvé aussi une longue tradition de jumelage et de coopération ; même si cette dernière a peu à peu été reprise par l’agglomération.

Pour autant, mes valeurs n’ont pas changé, et je crois toujours aussi nécessaire, peut-être encore plus aujourd’hui qu’hier, de développer les liens entre notre pays et certains territoires d’Afrique pour les aider dans leur développement. Malgré les difficultés que nous connaissons aussi – je pense particulièrement aux contraintes budgétaires qui réduisent nos capacités d’intervention – notre appui en matière de politique de

santé, de politique sanitaire et d’éducation est fondamental.Il relève d’une nécessaire solidarité des pays développés envers ceux qui le sont moins,

d’une humanité pour aider ces hommes et ces femmes qui n’ont pas eu la chance de naître sous nos cieux, à accéder à une meilleure qualité de vie, voir parfois tout bonnement, à une meilleure espérance de vie.

À l’heure de la radicalisation, la coopération est aussi un important facteur pour éviter que ces populations ne subissent l’obscurantisme.

Bien que Dole ne soit pas jumelée avec une commune d’Afrique, de nombreux bénévoles développent des actions de soutien sur ce continent. Je tiens à les remercier. Ils sont d’autant plus méritant-e-s qu’ils-elles travaillent souvent avec peu de moyens. Mais fidèle à mes valeurs, j’essaie de les aider le plus possible, comme ce fut le cas par exemple lors de la remise de matériels informatiques inutilisés en Mairie de Dole mais tant utiles pour l’apprentissage et l’éveil des enfants du Sénégal.

Je ne voudrais pas trop mordre sur le temps de vos travaux et je m’arrêterai donc là.

Je vous renouvelle simplement mon accueil chaleureux dans la ville de Pasteur, autre Dolois pour qui la solidarité entre les peuples était la base de tout humanisme.En vous témoignant de ma reconnaissance et de mon entier soutien, je vous remercie.

JM. SERMIERDéputé-Maire de Dole

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13H15 BUFFET

©La Pépinière Culturelle

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atelier 3Femmes migrantes : motivations, rôles et engagements

Par Samia Coupat

[ Résumé synthétique des échanges]

• Atelier très sensible ;• 3 témoignages autour du parcours : exil, perte de la langue, culture vie sociale,

famille ;• Aller vers l’Autre, rencontrer l’Autre ;

• Les enfants enseignent aux parents migrants ;

• Les connaissances, qualifications sont dévaluées, il faut tout réapprendre dans

le pays d’accueil ;• Etre acteur-trice de sa propre intégration ;

• Les femmes migrantes sont cantonnées aux tâches manuelles alors qu’elles sont surdiplômées ;

• Importance de redonner confiance ;

• Témoignage de l’association Miroirs de Femmes, association qui accompagne les personnes issues

des migrations et les accompagnent dans leur construction en France.

14H30 RESTITUTION DES ATELIERS

atelier 1Les migrations pour vivre ensemble, l’exemple de la Franche-Comté

Par Claude Mercier

[ Résumé synthétique des échanges]

• Il y a des immigrations invisibles ;

• Témoignages de parcours, d’obstacles rencontrés ;

• C’est une co-construction de leur lieu d’accueil ;

• Importance de la mémoire historique ;

• Outils, kits avec lesquels travailler : des choses existent pour résoudre des

problèmes comme des sites, livrets d’accueil, associations de coaching, etc. ;

• Manque d’outils pour les repérer, rendre possible le lien ;

• Il y a des associations de communautés, du soutien scolaire, des écrivains publics, des organismes qui

tissent du lien ;• Il faut multiplier les actions de communication.

atelier 2L’action des organisations de solidarité internationale issues des migrations (OSIM) pour une compréhension de l’Autre et un lien entre les culturesPar Barbara Romagnan

[ Résumé synthétique des échanges]• Définition d’OSIM : « une association fondée par des migrant-e-s » ;• Témoignage d’acteur-trice sur le financement projets eau, éducation ;• L’OSIM permet le lien entre les associations locales (Sud) et les villages voisins ;• Focus sur les femmes, qui constituent les principales actrices ;• Constat : un problème de visibilité de ces organisations ;• Les OSIM ont la connaissance du pays et culture d’origine, peuvent s’appuyer sur l’expertise d’autres associations locales ;• Il est nécessaire d’aller sur place pour se rendre compte des dimensions du projet ;• Pourquoi ne pas solliciter les parlementaires pour soutenir les projets ? ;• Regarder les autres pour un enrichissement mutuel.

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Réactions des participant-e-s Il faut mettre l’accent sur le « vivre ensemble » et le « faire ensemble ».

Pour les personnes migrantes, il y a l’espoir puis la désillusion de « l’eldorado ».

Dans les associations, certaines problématiques taboues sont abordées, notamment la prostitution.

Avant, les femmes migrantes suivaient leur mari, maintenant la moitié sont des femmes seules avec enfants. Sans mari, la situation est invivable. Sans les hommes, une solidarité entre femmes s’organisent, ces réseaux jouent un rôle essentiel notamment dans les cas de prostitution. Même si les femmes sont les principales concernées, ce sont pourtant à majorité des hommes qui obtiennent le statut de réfugié-e : deux personnes sur trois.

Pour permettre une bonne intégration des migrant-e-s, il faut regarder vers la francophonie, à travers le prisme culturel. Chercher des solutions, des inspirations dans les oeuvres littéraires, en étudiant des textes en français comme ceux du poète, écrivain franco-sénégalais Léopold Sédar Senghor.

Les immigré-e-s doivent être créateurs-trices de richesse sachant pourtant qu’ils-elles connaissent un accès plus difficile à l’emploi. Il y a un problème récurrent en matière d’insertion sociale. Pour y remédier, il faut mutualiser les efforts et les moyens. Les avancées sont peu visibles mais bien réelles.

Les critères de sélection des formations des migrant-e-s reposent en partie sur si elles sont « vendables » ou non par la suite sur le marché du travail.

Le propos précédent est à nuancer car beaucoup d’étudiant-e-s issu-e-s des migrations s’orientent vers les sciences humaines et sont prêt-e-s à financer eux-mêmes leurs thèses.

En Afrique, les femmes fournissent un travail considérable, elles ont un rôle central.

Entre migrant-e et non migrant-e, il y a un schéma de droits et d’obligations réciproques !

Attention, les droits et devoirs concernent surtout les pauvres car les politiques ne tiennent pas leurs promesses et ne viennent pas jusqu’à eux.

Les OSIM sont essentielles dans la société car elles peuvent adopter un regard critique vis-à-vis de notre propre façon de faire.

[ Un-e participant-e évoque l’apport civilisateur de l’Afrique à travers l’exemple des travaux de l’ethnologue Marcel Griaule sur les Dogons, un peuple du Mali. ]

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15H50 GRAND TÉMOIGNAGE

M. Chansamone Voravong, ancien Président du Forum des Organisations de Solidarité Internationale issues des Migrations (Forim)

J’ai assisté aux échanges depuis ce matin, et j’ai relevé certains points d’imprécision, de doutes, et aussi certaines incompréhensions de choses en particulier concernant les OSIM et le FORIM. Plutôt que de prendre point par point ces difficultés et ces doutes dans les interprétations, j’aimerais commencer par présenter mon parcours personnel de migrant.

À la fin de la guerre du Vietnam en 1973, j’ai été envoyé dans un camp de rééducation, j’y suis resté 6 ans, sans contact avec la famille, sans contact avec la vie active réelle. Après 6 ans, je suis sorti du camp et je suis revenu en ville, parce qu’on m’a dit que je ne faisais plus partie des camps de rééducation, mais certains sont restés 12 ans et quelques-uns ne sont jamais revenus. À mon retour en ville, je n’ai jamais pensé que j’allais quitter mon pays, je pensais avoir appris dans le camp, la nouvelle façon de penser et la nouvelle façon de se comporter, en particulier, lorsqu’on est soit disant intellectuel. J’avais vraiment envie d’apprendre avec la population de base, j’avais peur d’être déconnecté de la population, et je voyais la population, les citoyen-ne-s de base comme notre modèle d’être humain. Après 6 mois en ville, je n’ai pas retrouvé la vie active et j’ai trouvé que dans la ville, on avait pas suivi du tout le programme de rééducation comme ce qui était enseigné dans le camp.

C’est comme ça que j’ai quitté le Laos.

J’ai trouvé un passeur, arrivé au bord du Mékong, le passeur qui devait venir de Thaïlande n’a pas pu venir alors j’ai décidé de passer à la nage, parce que je me suis dit que tout au plus si la milice arrivait je serais tué, mais la peur d’être arrêté était beaucoup plus forte que la peur de mourir.

Est-ce que les gens pensent que j’ai immigré en France pour embêter les français-e-s ? Pour mieux manger ?

Dans le camp de rééducation, j’avais expérimenté tous ces désagréments : avoir faim, avoir un toit qui fuit, on s’habitue très vite mais ce qu’on ne peut pas supporter, c’est le manque de liberté et la séparation avec les siens, donc c’est la question de liberté. La liberté où ? Qu’importe. C’est la liberté qui manque dans son propre pays, qui fait qu’on s’en va. Ce n’est pas le manque de nourriture, on peut supporter tout ça et on peut même être heureux mais le manque de liberté dans son propre pays c’est comme ne pas avoir assez d’air pour respirer. Dans mon cas, quand le passeur n’est pas venu j’ai décidé de passer l’eau à la nage, au pire je serais tué mais ça avait moins d’importance que d’être repris.

Je vais vous parler de mon parcours d’intégration dans la société française. Je me suis intégré assez vite car je m’intéressais à ce que pensaient les français et ce dont ils discutaient. Je n’étais pas français mais j’étais accepté parmi les groupes de discussions des clubs de politique, de géopolitique.

Dix ans plus tard, voire quinze, j’ai obtenu la nationalité française. Je voudrais vous dire, que l’intégration est un acte volontaire et un acte d’amour, ce n’est pas une obligation. S’intégrer dans un pays, ça

©La Pépinière Culturelle

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veut dire participer à la responsabilité pour l’avenir commun et l’intégration est aussi vertueuse en ce sens qu’elle demande à celui qui accueille de comprendre celui qui arrive et de se modifier un peu. On ne peut pas dire que la société française soit parfaite. L’intégration est vraiment un acte d’amour, une décision personnelle. Après cela, je me suis engagé dans la vie associative, en commençant par l’association pour les réfugié-e-s, et plusieurs années plus tard cette association est devenue une association de ressources, les réfugié-e-s sont devenus des ressources. En 2005, j’ai été élu président du Forim, j’ai réalisé deux mandats, jusqu’à 2009.

Alors, on a entendu ce matin parler d’OSIM. On a dit que c’était assez difficile de faire l’inventaire des OSIM ici en Franche-Comté parce que les migrant-e-s ont peur d’être identifié-e-s comme migrant-e-s. Au Forim, on se demande « c’est quoi un-e migrant-e ? » est-ce quelqu’un d’autre qui doit le définir ou moi-même ?

Un-e migrant-e est une personne dont le cœur et l’esprit occupent deux espaces : son pays d’origine et son pays d’accueil.

Si c’est moi qui définit, je suis migrant : quelqu’un qui a un cœur qui peut aimer deux espaces. L’argument de plus pour les OSIM est que ce terme a été institué ou créé par le Ministère des Affaires étrangères (MAE) à la fin des années 80 pour pouvoir identifier les organisations de migrant-e-s qui voulaient participer au développement ou à la coopération internationale. Dans les années 80, vous imaginez bien que parmi les migrant-e-s, il y avait beaucoup d’associations qui parlaient politique. Donc le MAE a donné la possibilité aux migrant-e-s de s’inscrire au MAE comme organisation de solidarité internationale issue de l’immigration, qui est différent du nom du Forim. Voilà pour préciser un peu ce qui a été dit ou discuté, dans l’atelier sur les OSIM.

Maintenant, on parle beaucoup des problèmes d’immigration, de migrations, de mouvements migratoires… Quelle est la différence entre la migration actuelle qui pose vraiment problème et l’immigration d’un autre temps, à la fin de la guerre du Vietnam ?

Vous avez entendu parlé des boat people ? La différence fondamentale est que les migrant-e-s d’Indochine qui arrivaient en France ont été mis-es par les autorités françaises dans des camps et ne pouvaient venir sur le territoire qu’après autorisation. Aujourd’hui, ils sont déjà là.

Ce matin, il a été dit qu’il fallait changer notre regard, et notre pensée. Notre société actuelle est un modèle issu du modèle de développement inventé par les puissants vainqueurs de la 2ème guerre mondiale. Alors que le monde actuel, c’est quoi ? Celui de 1945 ? Si on devait résumer, ce serait plutôt un monde

beaucoup plus dense et beaucoup plus complexe. Plus dense, car il y a le défi de la démographie. Plus complexe car il y a le défi écologique.

Le plus grave est que nous ne sentons pas directement la question des marchés, qui ne font pas un partage économique aussi considérable que la massification des marchés mondiaux. Ces marchés sont de plus en plus importants, de plus en plus financiarisés. Ils s’éloignent de la réalité, et deviennent criminalisés. Devant ce problème, qu’est-ce qu’il se passe ? Je pense que nous devons plus nous concentrer sur le devenir de la région, de nos villages, de nos villes. Contribuer à coopérer dans ce sens, car dans le monde actuel, dans la mondialisation, les États-nations sont trop petits pour gérer toutes ces difficultés. Mais en même temps, les États-nations sont trop grands, par rapport au contact avec leurs propres citoyen-ne-s. Il faudrait que le local, le régional, prennent vraiment en charge, car ils sont plus près de la population.

Toutes les dérives qu’on connaît, existent parce qu’on a toujours pensé macro et on n’a pas pensé local. Il y a des organisations qui pensent que la mondialisation n’est pas mauvaise en soi mais il faut que ça parte du local. Et non pas la mondialisation qui impose au local les effets néfastes sur la population.

Voilà ce que j’ai pu retenir. C’est aussi pour dire que s’il y a des OSIM, au FORIM nous souhaitons qu’elles s’unissent pour constituer un collectif d’OSIM : les COSIM et autant que possible avoir une diversité de représentation géographique. Il ne faut pas que ce soit uniquement africain, subsaharien, mais composé de migrant-e-s venant du monde entier. On peut imaginer un COSIM Franche-Comté. Je demande au CERCOOP F-C de nous aider. Actuellement le FORIM est en train d‘éditer l’annuaire national des OSIM. S’il y en a ici, elles peuvent paraître dans l’annuaire dès maintenant.

Voilà, je ne sais pas si j’ai répondu un peu à vos attentes, si j’ai pu répondre aux doutes et aux questions qui ont pu être soulevées dans la journée ...

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[ Discours de Anne-Sophie Jouanneau ]

2015 a été une année difficile pour nous tous. Les tragédies qui nous ont frappé nous rappellent la nécessité de promouvoir l’ouverture à l’Autre, la tolérance et la compréhension du monde. Elles nous amènent aussi à inscrire encore davantage la France dans son environnement international, dans le monde global actuel. Il est aujourd’hui indispensable de lutter contre les forces qui nous appellent au repli sur nous-mêmes, à l’intolérance et à la xénophobie. L’actualité internationale et les terribles évènements qui ont récemment frappé les citoyen-ne-s de nombreux pays nous rappellent la nécessité d’agir rapidement. Deux priorités :

1. L’éducation au développement et à la solidarité internationale (EAD-SI) constitue aujourd’hui une priorité pour le ministère des Affaires étrangères et du Développement international. Elle vise à sensibiliser les citoyen-ne-s aux enjeux et aux politiques de développement (lutte contre la pauvreté, climat, relations et interdépendances Nord-Sud, santé, éducation, droits humains), tout en favorisant leur engagement pour un monde plus solidaire. Il s’agit donc d’une éducation sur le développement, pour le développement et comme vecteur de développement.

2. Le Ministère pilote également des stratégies de plus long terme, comme la promotion du volontariat international. Différents dispositifs de soutien à l’engagement volontaire et solidaire permettent chaque année à plus de 3000 jeunes de participer à des projets de développement et de solidarité internationale allant de quelques semaines à plusieurs années.

1. L’éducation au développement et à la solidarité internationale

Dans la loi de programmation relative à la politique de développement et de solidarité internationale, du 7 juillet 2014, l’éducation au développement a « pour objet de faire progresser le niveau de connaissance et d’appropriation par les citoyens des actions conduites mais aussi à promouvoir la solidarité […] ». L’approche de l’Union européenne est similaire, le consensus européen pour le développement de 2007 établissant que l’EAD doit permettre à chacun de comprendre les problèmes de développement mondial pour mieux exercer ses droits et responsabilités, afin de contribuer au changement pour un monde plus juste et durable.

L’EAD-SI, clé de compréhension d’un monde « global »

Dans un monde fortement globalisé, des enjeux locaux peuvent affecter de plus en plus d’individus et de territoires parfois éloignés de plusieurs dizaines de milliers de kilomètres. L’EAD-SI entend ainsi donner aux citoyen-ne-s des éléments pour mieux comprendre le monde dans lequel ils/elles vivent et les interdépendances qui existent entre pays développés et pays en développement, entre ici et là-bas.

L’EAD-SI, vecteur d’engagement citoyen pour la construction d’un monde solidaire

L’EAD-SI encourage les citoyen-ne-s à devenir des acteurs-trices de changements. L’éducation au développement cherche à amener les individus à adopter des attitudes positives vis-à-vis de la solidarité internationale. Elle doit permettre à ces derniers d’intégrer le fait que la coopération au développement des pays pauvres peut avoir des effets importants sur notre pays, en particulier en termes d’influence et de réponses collectives aux défis sociaux, environnementaux, économiques et politiques contemporains. Elle vise aussi à les inciter et à les aider à devenir des acteurs-trices engagé-e-s, par exemple en formant et en accompagnant les porteurs de projets de solidarité internationale.

L’EAD-SI, fondement d’un mieux vivre ensemble en France

La mise en lumière des liens entre les nations et entre les peuples, vecteur de tolérance et de compréhension réciproque, est une réponse efficace à la montée des sentiments xénophobes et constitue une clé d’un

16H30 CLÔTURE

Mme Anne-Sophie Jouanneau, Responsable du pôle Volontariat, Délégation pour les relations avec la société civile et les partenariats, Direction Générale de la Mondialisation, MAEDI

M. Patrice Bernard, Président de RéCiDev et Vice-Président du CERCOOP F-CIntervenants excusésM. Hicham Boujlilat, Président du CERCOOP F-C, Conseiller régional délégué à la coopération et à la solidarité internationale, Bourgogne-Franche-Comté

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mieux vivre ensemble en France, en Europe et dans le monde. Les structures engagées dans l’EAD-SI encouragent les échanges entre individus pouvant avoir des cultures différentes, autour des grands défis contemporains (éradication de la pauvreté, climat, droits humains, égalité de genre, …). La complémentarité de ces différentes approches démontre la richesse de l’interculturalité et participe à la prise en compte des aspirations de chacun dans notre société.

Une dynamique multiforme soutenue à différentes échelles territoriales

L’EAD-SI est soutenue financièrement par le ministère des Affaires étrangères et du Développement International (MAEDI) et l’Agence Française de Développement (AFD). En effet, dans le contexte actuel, le MAEDI entend jouer un rôle de soutien, d’appui aux initiatives, aux porteurs de projets, à celles et ceux qui restent convaincu-e-s que la solidarité internationale, l’aide au développement et le développement d’une citoyenneté mondiale sont des outils efficaces en faveur de la paix. En ce sens, les réseaux régionaux multi-acteurs sont au cœur de l’approche du MAEDI pour une véritable décentralisation de la coopération internationale et le développement de partenariats durables entre nos territoires et d’autres régions du monde.

Le MAEDI finance actuellement, sur la base d’un triennal, 13 réseaux régionaux multi-acteurs à hauteur de 660 000 euros annuels. Ces réseaux conduisent des démarches d’éducation au développement et à la solidarité internationale en contribuant en régions à l’information et à la sensibilisation des citoyen-ne-s sur les enjeux du développement et à l’appropriation citoyenne des politiques de solidarité internationale.

L’AFD et notamment la Division pour le Partenariat avec les Organisations non-gouvernementales (DPO) finance pour plus de 3 millions d’euros chaque année (6% de l’enveloppe globale des financements AFD destinés aux ONG) des projets

d’EAD-SI portés par des acteurs-trices associatifs visant des actions de sensibilisation et d’information auprès de différents publics-cibles (ex : Semaine de la solidarité internationale, Festival Migrant Scène, Alimenterre, etc.).

D’autres acteurs-trices publics portent ou soutiennent également de nombreuses actions d’EAD-SI. Le ministère de la Jeunesse, de la Ville et des Sports ainsi que le ministère de l’Agriculture sont notamment particulièrement engagés sur cette thématique. Le ministère de l’Education nationale mène aussi des actions d’EAD-SI, notamment dans le cadre de l’éducation au développement durable. Les collectivités territoriales contribuent également à l’EAD-SI, en menant des actions en direct ou en finançant des initiatives ou des acteurs-trices locaux.

Les prochains défis à relever

Des avancées significatives sont encore nécessaires dans le champ de l’EAD-SI afin de permettre une véritable appropriation, non seulement de la thématique, mais aussi des politiques existantes et des moyens d’engagement à disposition du grand public.

La définition et la formalisation d’un plan d’orienta-tion stratégique interministériel dans le champ de l’EAD-SI permettra notamment d’assurer un suivi plus efficace des opérations souvent dispersées, menées dans ce domaine et de renforcer les échanges avec les différent-e-es acteurs-trices impliqué-e-s (pouvoirs publics, collectivités territoriales, associations, etc.) à travers un dialogue structuré régulier.

Les populations bénéficiaires des actions de sensibilisation sont encore trop majoritairement urbaines et il apparaît indispensable à court ou moyen terme d’intégrer plus largement les populations péri-urbaines et rurales dans ces démarches.

2. Jeunesse et Solidarité internationale – Engagement

Document d’orientation pour l’action extérieure de la France jeunesse

Lancé au printemps 2015 sous l’impulsion de Madame Annick Girardin, alors Secrétaire d’Etat chargée du Développement et de la Francophonie, le document d’orientation pour l’action extérieure de la France pour la Jeunesse a impliqué son cabinet, la plupart des services de la direction générale de la Mondialisation (DGM) et ses opérateurs.

Les 6 grands axes du document d’orientation portent sur :• Répondre au défi démographique et améliorer

l’accès aux services de planification familiale ;

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• Mobiliser l’ensemble des acteurs ;• Développer les compétences et les talents pour

la vie citoyenne et l’emploi décent ;• Améliorer la santé des jeunes ;• Développer les opportunités pour la jeunesse

en milieu rural ;• Donner aux jeunes les moyens de devenir les

acteurs du changement.

Des feuilles de route de mise en œuvre de la stratégie jeunesse ont été proposées par plusieurs opérateurs et partenaires du MAEDI : l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger, l’Agence Française de Développement, Campus France, Canal France International, le CIEP (Centre Inter-national d’Etudes Pédagogiques), la Commission nationale de la coopération décentralisée (CNCD), Expertise France, France medias Monde, France Volontaires, l’Institut Français, l’Institut de recherche pour le développement (IRD), l’Office franco-allemand pour la jeunesse (OFAJ), l’Office franco-québécois pour la jeunesse (OFQJ), TV5 Monde, avec des actions envisagées dès 2015.

Un bilan interne réalisé au début de l’année 2016 montre une mobilisation des services de la DGM et des opérateurs du MAEDI sur les 6 objectifs de la stratégie. L’année 2015 a ainsi permis de :• financer des actions en faveur de la jeunesse

et mettre en place un indicateur jeunesse pour certains projets,

• mettre en avant le thème de la jeunesse au cours de plusieurs événements internationaux, à commencer par la COP21 et la COY11,

• récompenser des jeunes porteurs-euses de projets innovants,

• soutenir des campagnes de sensibilisation portant sur la santé reproductive, les violences en milieu scolaire, l’éducation à la santé,

• mobiliser les partenaires des enceintes multilatérales pour une meilleure prise en compte de la jeunesse,

• soutenir les différentes formes d’engagement citoyen international des jeunes.

Par ailleurs, le réseau diplomatique a été sensibilisé sur ce thème et la programmation 2016 de nombreux services de coopération et d’action culturelle met l’accent sur la jeunesse.

Au cours de l’année 2015, l’accent a été mis sur la promotion du volontariat et de la mobilité pour favoriser l’autonomie des jeunes et leur insertion dans la société, leur permettre de contribuer au débat public et d’être des acteurs-trices du changement.

Engagement citoyen international des jeunes

• Montée en puissance du service civique et nécessaire prise en considération de sa dimension internationale

La dimension internationale du service civique, qui n’a permis de mettre en route que 1 120 missions en 2015 (soit 2% des 52 000 missions de service civique en 2015) est essentielle pour que nos jeunes compatriotes se sentent pleinement citoyen-ne-s du monde global et pluriculturel qui est déjà le leur et le sera encore plus au fil des ans ; pour répondre, enfin, aux demandes de missions qui sont entre 50 et 100 fois plus nombreuses que l’offre proposée.

Avec l’objectif annoncé par le Président de la République de permettre à 350 000 jeunes de faire un service civique, si le pourcentage de 2% de missions à l’international est maintenu – ce qui constitue une très faible proportion, l’objectif à atteindre est de 7 000 missions soit la création de 6 000 nouvelles missions.Le MAEDI, associé à ses opérateurs et partenaires privilégiés, est pleinement mobilisé pour que la dimension internationale du service civique soit reconnue et soutenue politiquement au plus haut niveau. Ce n’est pas un secteur d’activité propre qui se juxtaposerait à d’autres, mais bien une dimension transversale qui doit se retrouver dans l’ensemble des orientations stratégiques du développement du service civique. Mais nous n’y arriverons pas seul-e-s.

• Comment les OSI et les collectivités locales peuvent se mobiliser :

Au-delà des missions que va proposer le MAE dans ses services à l’étranger et dans ceux de ses opérateurs, la mobilisation des collectivités locales françaises et étrangères et des organisations de la société civile concernées, en France et à l’étranger, est essentielle.Avec le relais des Comités régionaux de la Mobilité (COREMOB), des associations d’élu-e-s et les réseaux régionaux multi-acteurs (RRMA), l’objectif est double : 1. élargir le type de missions et la base sociale des

jeunes concerné-e-s, 2. faire reposer ce développement sur des

partenariats à nouer entre ses différent-e-s acteurs-trices, des partenariats que ces missions de jeunes citoyen-ne-s contribueront à nourrir.

Il semble alors important, selon des principes mis à l’essai dans le volontariat de solidarité inter-nationale, de développer le principe de réciprocité et de définir les modalités d’accueil en France de jeunes volontaires étrangers.Dans cette perspective, une place particulière pourra être dévolue, d’une part, au rôle joué par les organisations de résident-e-s issu-e-s de l’immigration, d’autre part, à celui des collectivités territoriales de l’Outre-Mer français en direction de leur environnement régional.

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[ Discours d’Hicham Boujlilat lu par Patrice Bernard ]

Je remercie les participant-e-s, un questionnaire d’évaluation de la Journée vous sera envoyé très prochainement par courriel et nous serons ravi-e-s de recueillir vos avis dans le but d’être au plus proche de vos attentes l’année prochaine.

Les suites de cette journée vous seront également communiquées. Dans les documents remis aux participant-e-s, vous y trouverez la liste des uns et des autres avec vos contacts mail, je vous invite à poursuivre les échanges au-delà de cette journée.

Je remercie les intervenant-e-s et les animateurs, qui ont vraiment joué un rôle fondamental aujourd’hui, nous sommes très heureux de les avoir associé-e-s à cette journée et d’avoir pu bénéficier de leurs expériences.

Je remercie chaleureusement le Conseil départemental du Jura, la Ville de Dole et Bourgogne Coopération, avec lesquels le CERCOOP F-C a travaillé pour organiser cette journée.

Et enfin je remercie Ousmane Syll et toute l’équipe du CERCOOP F-C : Florence Kohtz qui a coordonné l’organisation de cette Journée et qui nous quittera début juillet pour rejoindre le Ministère des Affaires étrangères et du développement international, nous lui exprimons notre reconnaissance, Diana Prud’homme, Clara Perles, Maria Comanescu, et tou-te-s les bénévoles. L’équipe a beaucoup œuvré pour organiser cette journée et je salue son implication au quotidien.

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VERBATIMSQU’ATTENDIEZ-VOUS DE CETTE JOURNÉE ?

Rencontrer des acteurs de la solidarité internationale. Échanger sur leurs attentes et leur compréhension de la thématique du ‘vivre ensemble’.

Échanger avec les autres acteurs. Rencontrer et échanger avec d’autres acteurs de la S.I. Comprendre comment bien vivre ensemble grâce aux associations. Échanger avec d’autres

acteurs de la solidarité internationale. Trouver quelques solutions aux problèmes que nous rencontrons au quotidien.

Trouver une parole éclairée, avancer ensemble. Échanger, rencontrer. Travailler son réseau, échanger, rencontrer Échanger, connaître les actions, les structures, apprendre de nouvelles choses. Échanger, apprendre des interventions et des témoignages (très riches).Trouver des réponses à des questions qu’on se pose sur les personnes issues de l’immigration,

leur avenir et celui de leurs enfants concernant l’emploi. Rencontrer, avoir un retour d’expériences en Solidarité Internationale, une ouverture et des

réflexions sur les OSIM, les femmes et les migrations. Se former sur la thématique, obtenir des pistes pour la SSI 2016. Échanger avec les acteurs de la SI dans la région. Retrouver d’autres associations confrontées aux mêmes problèmes étant au contact des

migrants. Avoir des éléments de réponse sur la manière dont une région répond aux questions et au

débat actuel sur l’immigration. Croiser les regards et renforcer la connaissance des différents acteurs. Échanger, dialoguer, s’informer. En connaître davantage sur les actions existantes liant solidarité internationale et migration. Avoir une meilleure connaissance des projets de coopération en Bourgogne-Franche-Comté. Echanger avec ce qui se fait dans la région. Obtenir un apport technique, un engagement politique, une visibilité sur les initiatives de

«grande ampleur». Ecouter des témoignages d’experts et de personnes directement concernées par la migration. Découvrir le CERCOOP que je ne connaissais pas, rencontrer des personnages et des

expériences sur le vivre ensemble. Permettre aux associations de faire le relais. Les débats doivent continuer. Obtenir des informations sur l’organisation de l’accueil des immigrés au niveau national,

régional et local, échanger, entendre des témoignages. »

«

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STATISTIQUESA L’ISSUE DE CETTE JOURNEE, ESTIMEZ-VOUS QU’ELLE A REPONDU A VOS ATTENTES ?

AVEZ-VOUS PENSÉ QUE LE CODE COULEUR DES ATELIERS ETAIT :

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AVEZ-VOUS ASSEZ DE TEMPS POUR PARTAGER AVEC LES AUTRES PARTICIPANT-E-S ?

Oui, avec les temps de pause. Oui, cependant les temps de pause

et de repas le permettent, c’est pourquoi il est important de ne pas trop les raccourcir.

Oui, c’était un bon moment riche en partages !

Plus de temps pour les échanges du public eut été apprécié.

J’aurais souhaité un plus grand partage d’expériences de la vie associative.

COMMENT EVALUEZ-VOUS ...

...LES ÉCHANGES AU COURS DE LA JOURNEE ?

SERIEZ-VOUS INTERESSÉ-E POUR SUIVRE ET/OU INTERVENIR LORS D’AUTRES TEMPS FORTS DU CERCOOP F-C ?

SUR QUELLE(S) THEMATIQUE(S) ? Genre ECSI, EAD-SI Migrations, immigration de masse Insertion Exemples d’actions locales Valorisation et reconnaissance des études ou des

diplômes des étrangers-ères Développement durable Géopolitique Eau potable pour tous (exemple projet au Cameroun) Coopération décentralisée

...LES REPONSES APPORTEES A VOS QUESTIONS ?

MOYENNE GÉNÉRALE OBTENUE : 8/10

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QUELLE(S) REMARQUE(S) PARTICULIÈRE(S) FERIEZ-VOUS SUR LE CONTENU/

L’ORGANISATION/LE FORMAT DE LA JOURNEE ? (Extraits)

Assez pertinent en contenu et intervenant-e-s, surtout celui de M. Voravong (Forim).

C’est dommage que les intervenant-e-s du ma-tin ne soient pas plus entré-e-s dans les solutions concrètes et que le temps des ateliers ait été réduit. Le cadre d’accueil et l’équipe de choc du CERCOOP F-C sont au top ! Ce serait bien d’avoir les listes de participant-e-s plus tôt pour les covoi-turages !

Cette journée était simple, parfaite et complète et les thématiques ont été appropriées.

Proposer un rythme de débat et une circulation de la parole plus dynamique et participative.

Rien à dire, c’était parfait. Trop de thèmes différents, diversité, frustration

d’égarement. Achat de nourriture responsable souhaité. Facilitation des échanges par l’organisation,

les présentations. Plus d’échanges avec M. Voravong. Intervenant-e-s de qualité, thématique bien-

venue et bien traitée. Très bien ! Détermination plus précise des

objectifs des ateliers. Bien organisé. Pas assez de temps d’échanges sur du concret,

mauvaise qualité du débat introductif, problème de distribution de parole dans l’atelier 1.

Très bonne qualité des intervenant-e-s en lien avec le thème le matin. L’atelier 2 a peu abordé le sujet et était en fait relatif à l’accueil des migrants-e-s. J’aurais bien participé aux frais de repas.

Organisation bien cadrée et réponses très pointues.

Le sentiment que cette journée soit organisée «entre nous», entre personnes du milieu de la solidarité et du développement international m’a un peu gêné. La participation de néophytes à un moment donné serait peut-être intéressante pour se confronter à nos certitudes. Un public jeune : lycéen, étudiant, ou employés d’entreprises dans le cadre de leur RSE... »

QUELLE(S) AMÉLIORATION(S) SUGGEREZ-VOUS QUANT A CET

ÉVÉNEMENT ?

Plus de prises de paroles et de présence d’élu-e-s. Donner plus de temps aux échanges et moins

à la séance plénière. Les temps de débat participatif de l’an dernier

était un outil à réintroduire cette année, je pense.Former les animateurs-trices/intervenant-

e-s/associations/acteurs-trices aux demandes participatives (débats plus interactifs).

Plus d’échange moral. Gérer la prise de parole, suivre le fil conducteur. Que le sujet principal soit la solidarité

internationale, avec des exemples de projets d’associations.

Des témoignages et des échanges intéressants qu’il serait utile de partager au grand public. Ne pas rester entre convaincu-e-s et initié-e-s.

Voir pour le temps et si possibilité de faire sur deux jours ?

Mieux découvrir la vie associative de la base et les faits concrets qui engagent ces associations.

Plus de langage politique que militant. Pour les ateliers, avoir un micro et plus d’intimité

par groupes respectifs : difficile de s’entendre sans perturber les autres groupes. »

»

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Le CERCOOP Franche-Comté, association loi 1901, est un réseau régional multi-acteurs (RRMA) de la coopération décentralisée et de la solidarité internationale.

Il est animé par des structures interconnectées : collectivités territoriales, associations de solidarité internationale, établissements scolaires ou universitaires, organismes consulaires, entreprises, organisations jeunesse ...

Il s’agit également d’un lieu d’appui-conseil, d’échange, de concertation et de coordination, favorisant la circulation et la mutualisation des pratiques, dans un esprit de service public. C’est aussi un lieu d’accueil pour tout-e porteur-euse de projets de coopération au développement, ouvert aux citoyen-ne-s.Le CERCOOP F-C est une structure régionale (RRMA) comme il en existe dans la majorité des régions françaises, soutenues par le ministère des Affaires étrangères et du Développement international. Il est dirigé par un Conseil d’administration issu des collectivités, des associations, des institutions et d’autres acteurs-trices qui définissent ses objectifs, et d’une équipe de permanent-e-s, de volontaires, de professionnel-le-s des structures membres au service de leur mise en oeuvre.

Son objectif ? Améliorer la qualité des projets de coopération décentralisée et de solidarité internationale des franc-comtois-ses, tout en favorisant des synergies entre acteurs-trices.

CONTACT

CERCOOP F-C

Arsenal - Bât. QPlace Saint-Jacques

BP 1616325014 Besançon cedex

03 81 66 52 38 / [email protected] /www.cercoop.org cercoop.franchecomte / @cercoop

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