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1. Les énergies du ciel et de la terre
L’Univers repose sur l’équilibre entre les énergies cosmiques et
telluriques ; tous les êtres vivants, et notamment dans le monde végétal, cherchent
à réaliser l’unité entre ces deux polarités. C’est aussi l’objectif du yoga.
1.1 Le lotus : un lien entre ciel et terre Le lotus, plante aquatique, est présent dans l’esprit du yogi sous des
formes très diverses, ancrées à la fois dans la réalité et la symbolique. Il matérialise
la communication à cultiver entre le ciel et la terre.
1.1.1 Une posture
C’est tout d’abord la représentation la plus commune attachée au yoga :
une posture d’assise ferme—padmasana 9 —que l’apprenti occidental envie à
l’Oriental et qui représente une étape attendue dans sa progression et sa pratique
assidue des étirements et assouplissements nécessaires.
C’est aussi la posture la plus connue de Bouddha dans la statuaire et l’on
y associe généralement les offrandes de fleurs fraîches qui lui sont adressées dans
les temples.
Illustration 2 : Bouddha en lotus dans un temple à Ranong, Thaïlande.
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1.1.2 Un symbole
Le lotus est également très
présent dans les jardins chinois.
Apprécié pour sa valeur décorative et
son exceptionnelle pureté, que ce soit
pour la fleur ou les feuilles, il revêt de
plus une haute valeur symbolique.
Pour les spiritualités indiennes ou
bouddhiques le lotus aux racines
ancrées dans la boue émerge des
eaux stagnantes, immaculé et intact,
au-dessus de la souillure du monde. Son corps droit et la rigidité de sa tige
symbolisent la fermeté. Sa luxuriance évoque la
prospérité. Il est d’une façon générale l’image de la
beauté.
Issu de l’obscurité des eaux, il s’épanouit en
pleine lumière : il est à ce titre le symbole de
l’accomplissement spirituel.
Utilisé dans de nombreux mandalas et yantras,
il symbolise l’harmonie cosmique, les huit pétales
représentant les huit directions de l’espace.
Illustration 3 : fleurs de lotus.
1.2 La transmission des énergies
1.2.1 Les chakras
Enfin, le lotus est étroitement associé aux chakras. Parfois les chakras
sont d’ailleurs appelés padmas, ce qui signifie lotus. Cette fleur, comme la roue,
symbolise les déploiements, les mouvements de l’Energie.
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Chakra signifie en sanscrit la Roue de l’Univers. Les chakras sont des
états de la matérialisation de l’énergie créatrice. Ils font partie de pranamaya kosha,
le corps de l’énergie, et constituent des lieux d’échanges entre l’être et l’univers, à
travers des vibrations.
Les centres énergétiques sont comparés à des lotus en boutons, la tête
penchée vers le bas. Lors de l’éveil, ils s’ouvrent et se déploient de plus en plus vite,
avec des couleurs chatoyantes.
Illustration 4 : les principaux chakras représentés par des lotus.
Les Chakras de la tête travaillent sur un plan vibratoire très élevé et sont
représentés par des lotus portant de nombreux pétales ; le nombre de pétales varie
de quatre pour le chakra inférieur : Muladhara, à mille pétales pour le chakra
supérieur : Sahasrara .
1.2.2 Les végétaux
Ces vibrations se retrouvent dans l’aura, un rayonnement de force vitale
qui entoure tout corps vivant (y compris l’eau et les rochers). Le corps et l’esprit, que
nous avons l’habitude de séparer en Occident, vibrent à des fréquences différentes :
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le corps physique se situe au niveau le plus bas et le plus dense, tandis que le corps
subtil vibre à une fréquence plus rapide.
Ces échanges sont particulièrement développés avec les végétaux chez
certaines personnes qui ont avec les plantes un rapport privilégié, comme le traduit
l’expression populaire « avoir la main verte ». Des expériences prouvent en effet
que l’énergie transmise aux plantes par l’homme, notamment lors du semis, est
déterminante pour la croissance harmonieuse et pour la protection contre les
maladies. C’est pourquoi il est préférable de ne pas porter de gants pour réaliser
des opérations telles que des semis, bouturages ou repiquages.
D’autre part, quand nous respirons un parfum de fleurs, l’effet bénéfique
s’exerce à partir du corps aurique et pénètre vers l’intérieur jusqu’au corps physique.
C’est le processus de l’aromathérapie qui repose sur des essences naturelles, les
composants artificiels étant incapables d’agir de cette façon. L’échange vibratoire
inverse existe aussi : dans la phytothérapie l’effet se propage du corps physique à
l’aura.
Or il est important que l’aura soit saine, car une aura saine réagit à la
manière d’un filtre et ne laisse passer que des éléments à effet bénéfique. On
évalue l’aura au moyen de la photographie Kirlian. La qualité de l’aura varie en
fonction de notre état physique et émotionnel. Cette forme de photographie est
aussi très utile pour déterminer les champs énergétiques des fleurs ; dans la lignée
du Docteur Bach, Erik Pelham a réussi à prouver l’existence des champs d’énergie
des essences de fleurs. Ainsi chaque fleur possède sa propre identité vibratoire. On
sait aussi que la graine d’une plante possède, à une échelle plus petite, le même
champ électromagnétique que la plante.
Les fleurs permettent à l’être de s’harmoniser intérieurement. L’essence
de la fleur va agir sur les aspects subtils de notre être. Si 80 % de la population
mondiale a recours à des plantes pour se soigner, c’est que la maladie est
considérée comme un dérèglement de l’état d’harmonie du corps. Outre leurs vertus
directement curatives, elles permettent, comme la pratique du yoga, d’être en
harmonie avec la nature, la terre, les énergies positives de l’univers, donc d’être en
harmonie avec soi-même dans l’unité retrouvée.
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1.3 Vers l’équilibre La recherche de l’équilibre requiert la totale disponibilité à l’instant
présent ; elle progresse à travers les postures d’équilibre debout, et s’exprime aussi
dans les arts végétaux. Elle établit la continuité entre les énergies du ciel et de la
terre.
1.3.1 Ici et maintenant
Etre présent à soi-même ici et maintenant peut se cultiver à travers des
pratiques de yoga dans la vigilance, c'est-à-dire le fait d’être conscient de ce qui se
passe, d’être pleinement présent. En particulier par des postures favorisant
l’enracinement, mais cela s’impose de façon immédiate au contact direct de la
nature en perpétuelle
évolution.
« L’essentiel réside dans la relation aux
quatre périodes, la
splendeur des quatre
saisons » Ji Cheng.10
D’autre part
Krishnamurti11 rappelle
que « la vérité est la compréhension de ce
qui est d’instant en
instant sans le fardeau
ou le résidu du moment
précédent ».
Illustration 5 : ikebana-shôka ; école Ikenobô : fusain panaché, nérines
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L’instant présent est toujours riche si on le vit sans distraction.
Car se promener dans la nature, c’est accorder ses pas à la marche de
l’univers. C’est à la fois retrouver un lien originel avec la Terre et contacter le Ciel
avec les nuages et les étoiles, et se sentir un vecteur d’énergie qui relie le ciel et la
terre.
1.3.2 Les postures d’équilibre debout
Le ressenti dans la posture de l’arbre ou du palmier s’accompagne
d’ailleurs de la recherche difficile de cet équilibre dans la tension juste sur le plan
physique d’abord – annamaya kosha 12 –, énergétique ensuite –
prânamaya kosha – , mais surtout mental – manomaya kosha – . Il faut
d’ailleurs une certaine pratique pour que ces différents niveaux
apparaissent, puis s’harmonisent. En ce sens vrkasana – l’arbre – est
une des postures que je préfère car elle me semble résumer l’essentiel
du yoga et me rappelle à la fois les arts de l’ikebana et du bonsaï.
Illustration 6 : yoga posture de l’arbre.
1.3.3 Les arts végétaux
A travers les arts végétaux représentés par l’ikebana, le bonsaï, et les
jardins, on retrouve l’homme en équilibre entre ciel et terre.
1.3.3.1 Ikebana et Bonsaï
L’ikebana se réfère en effet à un principe fondamental de l’esthétique : la
triade.
Les trois éléments de base sont appelés :
o Branche de la vérité o Branche secondaire o Branche fluide
Souvent, les trois branches sont également désignées d’après la définition
chinoise de la structure ternaire de l’univers :
o Ten = le Ciel o Chi = la Terre o Jin= l’Homme
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On utilise en général des branches ou des feuillages pour symboliser le ciel et
l’homme, et des fleurs pour la terre.
Illustration 7 : schéma de la triade
Illustration 8 : ikebana Kozan School pin et lys
Quant au terme bonsaï, il désigne en japonais un arbre cultivé
en pot. L’homme use de son pouvoir pour maîtriser la
croissance de l’arbre en la limitant. Cette tradition en Chine
remonte aux premiers siècles de notre ère et correspond à
l’idée que « toute réalité est en soi totale, que tout dans l’Univers est comme
l’Univers. » « Parmi les arbres les plus vieux et élégants sont par exemple les pins
de T’ien Mou dont la hauteur atteint tout juste un pied, dont le tronc est gros comme
l’avant-bras et les aiguilles courtes comme des pointes de flèche et qui se nouent
dans un mouvement incliné et tortueux ». Rolf Stein dans Le Monde en petit.
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Le lien qui unit l’homme aux bonsaïs est aussi fort que son lien à la nature
tout entière ; c’est pourquoi certains spécimens se transmettent de génération en
génération. Leur présence dans un intérieur chinois ou japonais contribue à la
sérénité et peut constituer des supports à la méditation. En ce sens, leur valeur se
situe bien au delà de l’esthétique et de la diversité des techniques utilisées. On peut
ainsi établir un parallèle entre le travail de délimitation des racines et de sélection
des branches torses pour allonger la circulation
de la sève, et la méditation du sage qui ralentit
tout mouvement et se contraint à l’immobilité
pour mieux pénétrer la vie secrète de la nature.
C’est ainsi que le travail de création,
pour un bonsaï ou une composition d’ikebana,
place l’artiste au centre de l’univers car il
contribue à un véritable recentrage. Il permet
de cheminer vers son propre équilibre par une
sorte de mimétisme troublant.
Illustration 9 : Bonsaïs ; début de paragraphe chamaecyparis ; ci-dessus orme
Ces tentatives de reconstruction d’un équilibre idéal pourraient toutefois
paraître artificielles car trop théoriques.
Mais en réalité, les innombrables variations possibles et l’imagination fertile
des artistes annihilent ce risque. J’ai suivi pendant cinq ans, au Jardin Botanique de
Nancy, des cours d’ikebana dispensés par un maître japonais de l’école Sogetsu –
Madame Taga – et son enseignement m’a montré l’immense richesse de ce
domaine qui se rapproche de la nature à l’état brut, contrairement aux apparences.
Le ressenti lors de la réalisation d’une composition est multiple et nuancé, puis
s’affine au fil du temps avec l’expérimentation, tout comme une pratique de yoga. La
rigueur des choix successifs à opérer amène vite à une concentration – dhârana 13--
telle qu’on l’obtient avec une respiration carrée 14 dans un exercice de prânâyâma.
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Correspondances > une même ligne : bonsaï, yoga, ikebana.
I
l
l
u
Illustration 10 : bonsaï acer palmatum .
Illustration 11 : yoga posture utthita hasta
Illustration 12 : ikebana-shôka ; école ikenobô ; feuille de glaïeul, lierre, sedum
La notion d’espace est aussi très intéressante dans les jardins, car elle
permet une exploration particulièrement riche.
1.3.3.2 Les jardins
Les jardins sont souvent liés aux mythes qui font rêver l’être humain en le
confrontant au mystère des origines, plus précisément en ce qui concerne la
séparation de la terre et du ciel.
Né de ce partage, le jardin allie, par ses rochers et ses sources, les
assises profondes du sol au ciel. Les plantes ont en effet besoin d’air, de pluie et de
soleil. Etant au centre du cosmos, le jardin joue donc un rôle essentiel dans le lien
entre le ciel et la terre.
Ceci rappelle l’unité apportée par le yoga et liée à son étymologie, le
terme yoga désignant l’union entre le soi individuel et le soi cosmique : l’homme se
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tient en équilibre entre la terre qui est sous ses pieds et le ciel ; l’horizon lui suggère
l’infini.
Selon les plus anciens textes chinois, le Tao (origine suprême) 15
engendre d’abord l’unité d’où procèdent le Yin et le Yang16. Le Yin et le Yang
produisent les trois Souffles-énergies : le Pur, l’Impur et le Mélangé qui à leur tour,
constituent respectivement le Ciel, le Terre, et l’Homme.
L’intime alliance entre l’Homme, le Ciel, et la Terre est l’aboutissement du
traité intitulé l’Invariable Milieu17 de Zhongyong dont voici un extrait tiré du chapitre
22 :
« Il peut être en tiers avec le Ciel et la Terre »
« Seul, dans le monde, celui qui est parvenu à une totale authenticité
réalisante est en mesure de faire advenir complètement sa propre
nature ;
étant en mesure de faire advenir complètement sa propre nature, il est
en mesure de faire advenir complètement la nature des autres hommes ;
étant en mesure de faire advenir complètement la nature des autres
hommes, il est en mesure de faire advenir complètement la nature de
tous les autres existants ;
étant en mesure de faire advenir complètement la nature de tous les
autres existants, il peut aider au procès par lequel le Ciel et la Terre
transforment et font croître ;
et pouvant aider au procès par lequel le Ciel et la Terre transforment et
font croître, il peut être en tiers avec le Ciel et la Terre . »
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Enfin, l’image du paradis est traditionnellement associée au jardin.
La Bible évoque le Jardin d’Eden qui a considérablement influencé la
culture occidentale et donné aux jardins un attrait de type paradisiaque.
Des textes bouddhiques, dans trois sutras indiens, révèlent une région de
la pureté appelée Sukhavati : le sage Sakyanuni décrit ce paradis avec des jardins
merveilleux et des étangs couverts de lotus.
Illustration 13 : étang des lotus, jardin de l’Humble Administrateur, Suzhou, Chine.
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