29 mai 1913 - efemeridi.it · Œuvre de nicolas (nicholas) roerich (1874-1947) un air...
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29 mai 1913 Dcor pour le ballet "Le sacre du printemps" de Igor Stravinsky (1882-1971). uvre de Nicolas (Nicholas) Roerich (1874-1947)
Un air fin-de-sicle
Odilon Redon, Le Cyclope, vers 1914 huile sur toile, 64 x 51 cm
L'art suggestif ne peut rien fournir
sans recourir uniquement aux jeux
mystrieux des ombres et au
rythme des lignes mentalement
conues.
O. Redon
Lart est une fleur qui spanouit librement,
hors de toute rgle ; il drange
singulirement, ce me semble, lanalyse au
microscope de savants esthticiens qui
lexpliquent. []
Redon, Tete sur une tige, 1885
Mon rgime le plus fcond, le plus
ncessaire mon expansion a t, je l'ai dit
souvent, de copier directement le rel en
reproduisant attentivement des objets de la
nature extrieure en ce qu'elle a de plus
menu, de plus particulier et accidentel.
Aprs un effort pour copier minutieusement
un caillou, un brin d'herbe, une main, un
profil ou toute autre chose de la vie vivante
ou inorganique, je sens une bullition
mentale venir ; j'ai alors besoin de crer, de
me laisser aller la reprsentation de
l'imaginaire. (O. Redon)
Odilon Redon, Mystre Des Esseintes sarrtait plus particulirement devant les autres cadres qui
ornaient la pice. Ceux-l taient signs : Odilon
Redon.
Ils renfermaient dans leurs baguettes
de poirier brut, lisr dor, des apparitions
inconcevables : une tte dun style mrovingien,
pose sur une coupe ; un homme barbu, tenant
tout la fois, du bonze et de lorateur de runion
publique, touchant du doigt un boulet de canon
colossal ; une pouvantable araigne logeant au
milieu de son corps une face humaine ; puis des
fusains partaient plus loin encore dans leffroi du
rve tourment par la congestion. Ici ctait un
norme d jouer o clignait une paupire triste ;
l des paysages, secs, arides, des plaines
calcines[]; parfois mme les sujets semblaient
emprunts au cauchemar de la science, remonter
aux temps prhistoriques ; une flore monstrueuse
spanouissait sur les roches ()
Odilon Redon, Mlancolie, 1876 Ces dessins taient en dehors de tout ; ils sautaient, pour la plupart, par-dessus les bornes de la peinture,
innovaient un fantastique trs spcial, un fantastique de
maladie et de dlire.
Et, en effet, tels de ces visages, mangs par des yeux
immenses, par des yeux fous ; tels de ces corps grandis
outre mesure ou dforms comme au travers dune
carafe, voquaient dans la mmoire de des Esseintes des
souvenirs de fivre typhode, des souvenirs rests quand
mme des nuits brlantes, des affreuses visions de son
enfance.
Pris dun indfinissable malaise, devant ces dessins,
comme devant certains Proverbes de Goya quils
rappelaient ; comme au sortir aussi dune lecture dEdgar
Poe dont Odilon Redon semblait avoir transpos, dans un
art diffrent, les mirages dhallucination et les effets de
peur, il se frottait les yeux et contemplait une rayonnante
figure qui, du milieu de ces planches agites, se levait
sereine et calme, une figure de la Mlancolie, assise,
devant le disque dun soleil, sur des rochers, dans une
pose accable et morne.
Joris-Karl Huysmans, A rebours,1884, cap. V
. la fede nella ragione umana e nel progresso entra in crisi, sostituita
dallangosciosa percezione della precariet della condizione umana,
dallinsensatezza della storia e della stessa esistenza. (De Bernardi,
Guarracino, La conoscenza storica 3, Temi e percorsi interdisciplinari)
Un sapere senza fondamenti
All'idea del progresso inesorabile si sostituisce l'idea dell'inesorabile
scacco; alla sicurezza di s l'insecuritas come essenza dell'uomo, il quale non
pi spinto dalla volont razionale a superare la propria finitezza nel regno
infinito della storia, ma dalla 'cura' verso la realizzazione della propria
finitezza; alla serenit che d padronanza di s viene contrapposta l'angoscia
di fronte al nulla; al dominio del mondo la derelizione nel mondo. Il senso della
colpa, che sembrava espulso dalla coscienza dell'uomo, ritorna ad affiorare. E
il pensiero della morte soprattutto, che era stato ricacciato al di fuori
dell'orizzonte dell'uomo tutto immortale nella successione ininterrotta delle
opere, posto di nuovo al centro del suo destino.
[Bobbio, La filosofia del decadentismo]
Il decadentismo
Langueur
Je suis l'Empire la fin de la dcadence,
Qui regarde passer les grands Barbares blancs
En composant des acrostiches indolents
D'un style d'or o la langueur du soleil danse.
L'me seulette a mal au cur d'un ennui dense.
L-bas on dit qu'il est de longs combats sanglants.
O n'y pouvoir, tant si faible aux vux si lents,
O n'y vouloir fleurir un peu cette existence !
O n'y vouloir, n'y pouvoir mourir un peu !
Ah ! tout est bu ! Bathylle, as-tu fini de rire ?
Ah ! tout est bu, tout est mang ! Plus rien dire!
Seul, un pome un peu niais qu'on jette au feu,
Seul, un esclave un peu coureur qui vous nglige,
Seul, un ennui d'on ne sait quoi qui vous afflige !
Paul Verlaine, Langueur, 1883
Le Dcadentisme
1871 Darwin, La filiation de lhomme
1871 Rimbaud, Le bateau ivre
1872 Nietzsche, La naissance de la tragdie
1873 Maxwell, Trait dlectricit et de magntisme
1873 Rimbaud, Une saison en enfer
La crise des fondements:
des certitudes inbranlables vont scrouler
Dans les annes 1870 savre le tournant, au cours des annes 1880 et
1890 simpose la rvolution culturelle qui secoue les valeurs fondamentales de la
civilisation occidentale.
Art potique
De la musique avant toute chose,
Et pour cela prfre l'Impair
Plus vague et plus soluble dans l'air,
Sans rien en lui qui pse ou qui
pose.
Il faut aussi que tu n'ailles point
Choisir tes mots sans quelque
mprise
Rien de plus cher que la chanson
grise
O l'Indcis au Prcis se joint.
C'est des beaux yeux derrire des
voiles
C'est le grand jour tremblant de midi,
C'est par un ciel d'automne attidi
Le bleu fouillis des claires toiles!
Car nous voulons la Nuance encor,
Pas la Couleur, rien que la nuance!
Oh! la nuance seule fiance
Le rve au rve et la flte au cor !
Fuis du plus loin la Pointe assassine,
L'Esprit cruel et le Rire impur,
Qui font pleurer les yeux de l'Azur
Et tout cet ail de basse cuisine !
Paul Verlaine, Art potique, in Jadis
et Nagure, 1874
La crise des fondements
dans la posie
L'Art potique est la posie
de l'phmre l'oppos de
tout dogmatisme.
dentro di noi un fanciullino che non ha solo brividi [.] ma lagrime ancora e tripudi
suoi. Quando la nostra et tuttavia tenera, egli confonde la sua voce con la nostra [].
Ma quindi noi cresciamo, ed egli resta piccolo; [...] Egli quello, dunque, che ha paura al
buio, perch al buio vede o crede di vedere; quello che alla luce sogna o sembra di
sognare, ricordando cose non vedute mai; quello che parla alle bestie, agli alberi, ai
sassi, alle nuvole, alle stelle, che popola l'ombra di fantasmi e il cielo di dei. Egli quello
che piange e ride senza perch, di cose che sfuggono ai nostri sensi e alla nostra
ragione. [...] E ciarla intanto, senza chetarsi mai; e, senza lui, non solo non vedremmo
tante cose a cui non badiamo per solito, ma non potremmo nemmeno pensarle e ridirle,
perch egli l'Adamo che mette il nome a tutto ci che vede e sente. Egli scopre nelle
cose le somiglianze e relazioni pi ingegnose. [...] (Giovanni Pascoli, Il fanciullino, 1897)
La crise des fondements
dans la littrature
Il conte Andrea Sperelli-Fieschi dUgenta era, in verit, lideal tipo del giovine signore
italiano nel XIX secolo, il legittimo campione duna stirpe di gentiluomini e di artisti eleganti, lultimo
discendente duna razza intellettuale. Egli era, per cos dire, tutto impregnato di arte. La sua
adolescenza, nutrita di studi vari e profondi, parve prodigiosa. Egli altern, fino a venti anni, le
lunghe letture coi lunghi viaggi in compagnia del padre e pot compiere la sua straordinaria
educazione estetica sotto la cura paterna, senza restrizioni e constrizioni di pedagoghi. Dal padre
appunto ebbe il gusto delle cose darte, il culto passionato della bellezza, il paradossale disprezzo
de pregiudizi, lavidit del piacere. [] Il padre gli aveva dato, tra le altre, questa massima
fondamentale: Bisogna fare la propria vita, come si fa unopera darte. Bisogna che la vita dun
uomo dintelletto sia opera di lui. La superiorit vera tutta qui. [] Roma era il suo grande
amore: non la Roma dei Cesari ma la Roma dei Papi; non la Roma degli Archi, delle Terme, dei
Fari, ma la Roma delle Ville, delle Fontane, delle Chiese. Egli avrebbe dato tutto il Colosseo per la
Villa Medici, il Campo Vaccino per la Piazza di Spagna, lArco di Tito per la Fontanella delle
Tartarughe. La magnificenza principesca dei Colonna, dei Doria, dei Barberini lattraeva assai pi
della ruinata grandiosit imperiale[]In casa della marchesa dAteleta sua cugina, sopra un albo di
confessioni mondane, accanto alla domanda Che vorreste voi essere? egli aveva scritto
Principe romano.(Gabriele DAnnunzio, Il piacere, 1897)
La crise des fondements dans la littrature
E. Munch, Le cri, 1893
J'tais en train de marcher le long de la
route avec deux amis - le soleil se couchait -
soudain le ciel devint rouge sang j'ai fait
une pause, me sentant puis, et me suis
appuy contre la grille - il y avait du sang et
des langues de feu au-dessus du fjord bleu-
noir et de la ville - mes amis ont continu
marcher, et je suis rest l tremblant
d'anxit - et j'ai entendu un cri infini dchirer
la Nature .
La crise des fondements dans la peinture
A. Schoenberg, Pierrot lunaire, 1912
A. Schoemberg, Portrait, autour de 1912
La crise des fondements dans la musique
Nous sommes condamns rester aveugles jusqu ce que des yeux nous soient donns,
des yeux qui sachent pntrer le futur, des yeux qui voient plus loin que la matire, laquelle
nest quune image (Schoenberg).
Le Pierrot Lunaire est dj les yeux de Schoenberg vers le futur.
L'ordre, Mot Matre de la science classique, rgn de l'atome la voie
lacte. De Kpler Newton et Laplace, il est tabli que l'innombrable peuple des
toiles obit une inexorable mcanique. La pesanteur des corps, le mouvement des
mares, la rotation de la lune autour de la Terre tous phnomnes terrestres et
clestes obissent la mme loi. La Loi ternelle qui rgle la chute des pommes a
supplant la Loi de l'Eternel qui pour une pomme fit chuter Adam. Le mot de
rvolution, s'il s'agit des plantes et des astres signifie rptition impeccable, non
rvulsion et l'ide d'Univers voque la plus parfaite des horloges. Cet Univers horloge
marque le temps et le traverse de faon inaltrable. []
En un sicle, le dsordre s'est infiltr de proche en proche dans la physis.
Parti de la thermodynamique, il est pass par la mcanique statistique, et a dbouch
sur les paradoxes micro-physiques. Au cours de ce voyage, il s'est transform : de
dchet du rel, il fait dsormais partie de l'toffe [] partir des annes vingt cet
univers se dilate, puis se disperse, puis, dans les annes soixante, il se lzarde, se
disloque, et soudain tombe en miettes.
E. Morin, La mthode, 1977-2004
La crise des fondements dans la science
Ds Galile commence la substitution d'une nature idalise la nature pr-
scientifique donne dans l'intuition. []
La mathmatique devient une Ars, c'est--dire un simple art d'obtenir des
rsultats grce une technique de calcul qui suit des rgles techniques : les seuls
modes de pense et les seules vidences qui entrent alors en jeu sont ceux qui sont
absolument ncessaires une technique en tant que telle. On opre avec des lettres,
des signes de connexion de rapport (+, X, =, etc.). []
On assiste donc une substitution d'une activit mthodiquement
idalisante ce qui se donne immdiatement comme la ralit.
Husserl, La crise des sciences europennes et la phnomnologie
transcendantale, 1936
La crise des fondements .dans la science
Un lever de rideau, en 1923, dcouvre l'existence d'autres galaxies, qui vont se
compter bientt par millions, chacune grouillant de un cent milliards d'toiles. Sans cesse,
depuis, l'infini recule l'infini et le visible fait place l'inou (dcouverte en 1963 des quasars,
en 1968 des pulsars, puis des " trous noirs "). Mais la grande rvolution n'est pas de dcouvrir
que l'univers s'tend des distances incroyables et qu'il contient les corps stellaires les plus
tranges : c'est que son extension correspond une expansion, que cette expansion est une
dispersion, que cette dispersion est peut-tre d'origine explosive.[]
On peut certes concevoir le dsordre et l'ordre de faon manichenne dans un univers soumis
ces deux principes opposs; [] Il faut certes opposer, mais aussi lier ces " deux
tendances". Ce qui signifie tout d'abord qu'ordre et dsordre ne sont pas des concepts
absolus, substantiels. Ils naissent l'un et l'autre ensemble et ont sans doute racine l'un et
l'autre, d'une faon videmment inconcevable, dans l'Avant-Commencement. Ils renaissent
sans cesse d'une indistinction gnsique ici nomme chaos. Ils sont relatifs et relationnels.
Ils sont relatifs et relationnels l'un l'autre, et cela introduit la complexit logique au cur de
ces notions : il faut mettre du dsordre dans la notion d'ordre; il faut mettre de l'ordre dans la
notion de dsordre. A la limite, l'extrme complexit du dsordre contiendrait l'ordre, l'extrme
complexit de l'ordre contiendrait le dsordre E. Morin, La mthode, 1977-2004
La crise des fondements dans la science
cest--dire la dcouverte de la complexit
dans la ralit les objets simples nexistent pas: cest--dire quun
phnomne qui semble sexpliquer par des lois dterministes, selon le
principe de la causalit, va bien au de l de ces lois.
la prvision de ltat futur dun systme peut tre possible seulement
condition de rduire qualitativement le phnomne tudi.
les qualits dun objet tudi nappartiennent pas cet objet, mais
elles sont la rponse son interaction avec lobservateur
la science se trouve face des systme, cest-- dire des totalits
organises composes par des lments rciproquement solidaires,
qui peuvent tre dfinis seulement lun par rapport lautre et en
rapport avec la totalit
La crise des fondements dans la science.
La complexit s'impose d'abord comme impossibilit de simplifier ; elle surgit
[] l o se perdent les distinctions et clarts dans les identits et les causalits, l o les
dsordres et les incertitudes perturbent les phnomnes, l o le sujet-observateur surprend
son propre visage dans l'objet de son observation, l o les antinomies font divaguer le cours du
raisonnement. []
La mthode de complexit n'a pas pour mission de retrouver la certitude
perdue. Elle doit au contraire constituer une pense qui se nourrit d'incertitude au lieu d'en
mourir. Elle doit viter de trancher les nuds gordiens entre objet et sujet, nature et culture,
science et philosophie, vie et pense. []
La complexit n'est pas la complication. Ce qui est compliqu peut se rduire un
principe simple comme un cheveau embrouill ou un nud de marin. Certes, le monde est trs
compliqu, mais s'il n'tait que compliqu, c'est--dire embrouill, multidpendant, etc.. il suffirait
d'oprer les rductions biens connues : jeu entre quelques types de particules dans les
atomes jeu entre quelques phonmes dans le langage. Je crois avoir montr que ce type de
rduction, absolument ncessaire, devient crtinisant ds qu'il devient suffisant, c'est--dire
prtend tout expliquer. Le vrai problme n'est donc pas de ramener la complication des
dveloppements des rgles de base simple. La complexit est la base.
Quest-ce-que la complexit? E. Morin, La mthode, 1977-2004
La complexit nous rend sensibles des vidences endormies : l'impossibilit
d'expulser l'incertitude de la connaissance. []. Le problme de la complexit n'est ni
d'enfermer l'incertitude entre parenthses, ni de s'y enfermer dans un scepticisme gnralis:
il est d'intgrer en profondeur l'incertitude dans la connaissance et la connaissance dans
l'incertitude, pour comprendre la nature mme de la connaissance de la nature. La complexit
est un progrs de connaissance qui apporte de l'inconnu et du mystre. Le mystre n'est pas
que privatif; il nous libre de toute rationalisation dlirante qui prtend rduire le rel de
l'ide, et il nous apporte, sous forme de posie, le message de l'inconcevable []
Ce n'est plus l'lmentaire que la physique trouve au fondement, mais le complexe.
Ce n'est plus l'ordre dterministe qu'elle trouve au principe, mais
ordre/dsordre/organisation. Le complexe est devenu une question principielle qui ne peut
plus tre refoule Nous devons nous rendre compte aujourd'hui que la simplicit de
l'Univers tait le mythe de la science, qui a autoris et justifi, non seulement l'exaltante
recherche des grandes quations, mais aussi le dlire rducteur qui veut enfermer l'Univers
en une seule quation. Nous devons nous rendre compte que le propre de la thorie n'est pas
de rduire le complexe au simple, mais de traduire le complexe en thorie.
Quest-ce-que la complexit? E. Morin, La mthode, 1977-2004
En conclusion:
la certitude qui, dans les sciences, descend dune conception du
monde imagin comme un mcanisme simple, est fausse
les lois scientifiques sont incapables de dpasser la simple
supposition dun certain tat des choses pour expliquer sans rsidus
le fonctionnement dun phnomne
la science est lun des discours possible sur le monde, non le
seul incontestable
de la conception de la science comme
la conception de la science comme ,
La crise des fondements dans la philosophie
La mort de Dieu N'avez-vous pas entendu parler de
cet homme insens qui, ayant allum une
lanterne en plein midi, courait sur la place du
march et criait sans cesse : Je cherche
Dieu! Je cherche Dieu! - Et comme l-bas se
trouvaient prcisment rassembls beaucoup
de ceux qui ne croyaient pas en Dieu, il suscita
une grande hilarit. L'a-t-on perdu? dit l'un.
S'est-il gar comme un enfant? dit
un autre. Ou bien se cache-t-il quelque part ? A-
t-il peur de nous? S'est-il embarqu? A-t-il
migr? ainsi ils criaient et riaient tous la
fois. L'insens se prcipita au milieu d'eux et les
pera de ses regards.
O est Dieu? cria-t-il, je vais vous le dire! Nous l'avons tu vous et moi! Nous tous
sommes ses meurtriers! Mais comment avons-nous fait cela? Comment avons-nous pu vider la mer?
Qui nous a donn l'ponge pour effacer l'horizon tout entier? Qu'avons-nous fait, de dsenchaner
cette terre de son soleil? Vers o roule-t-elle prsent? Vers quoi nous porte son mouvement? Loin
de tous les soleils? Ne sommes-nous pas prcipits dans une chute continue? Et cela en arrire, de
ct, en avant, vers tous les cts? Est-il encore un haut et un bas? N'errons-nous pas comme
travers un nant infini?
Ne sentons-nous pas le souffle du vide? Ne fait-il pas plus froid? Ne fait-il pas nuit sans
cesse et de plus en plus nuit? Ne faut-il pas allumer les lanternes ds le matin? N'entendons-nous
rien encore du bruit des fossoyeurs qui ont enseveli Dieu? Ne sentons-nous rien encore de la
putrfaction divine? les dieux aussi se putrfient! Dieu est mort! Dieu reste mort! Et c'est nous qui
l'avons tu! Comment nous consoler, nous, les meurtriers des meurtriers? Ce que le monde avait
possd jusqu'alors de plus sacr et de plus puissant a perdu son sang sous nos couteaux qui
essuiera ce sang de nos mains? Quelle eau lustrale pourra jamais nous purifier? Quelles solennits
expiatoires, quels jeux sacrs nous faudra-t-il inventer?
(Nietzsche, Le gai savoir, aphorisme 125)
La crise des fondements dans la philosophie
Lavnement du nihilisme
Nous devons dsormais nous attendre une longue suite, une longue
abondance de dmolitions, de destructions, de ruines et de bouleversements : qui
pourrait en deviner assez ds aujourdhui pour enseigner cette norme logique, devenir
le prophte de ces immenses terreurs, de ces tnbres, de cette clipse de soleil que la
terre na sans doute encore jamais connues ? Nous mmes, dchiffreurs dnigmes,
nous, devins-ns, qui attendons pour ainsi dire en haut des monts, placs entre hier et
demain, et contradictoirement attels entre les deux, nous premiers-ns, prmaturs du
sicle venir, qui devrions avoir dj peru les ombres dont va bientt senvelopper
lEurope, do vient-il que nous attendons la monte de cette mare noire sans un intrt
vritable, surtout sans crainte et sans souci pour nous?
(Nietzsche, Le gai savoir, Livre V, 343)
La crise des fondements dans la philosophie
Lavnement du nihilisme
La crise des fondements dans la philosophie
La dcouverte de lInconscient
Le psychique en toi ne concide pas avec ce
dont tu es conscient ; ce sont deux choses
diffrentes, que quelque chose se passe dans
ton me, et que tu en sois par ailleurs inform.
Je veux bien concder qu lordinaire, le
service de renseignements qui dessert ta
conscience suffit tes besoins. Tu peux te
bercer de lillusion que tu apprends tout ce qui
revt une certaine importance. Mais dans bien
des cas, par exemple dans celui dun conflit
pulsionnel de ce genre, il est en panne, et
alors, ta volont ne va pas plus loin que ton
savoir.
Mais dans tous les cas, ces renseignements de ta conscience sont incomplets et souvent peu srs ; par ailleurs, il arrive assez souvent que tu ne sois inform des
vnements que quand ils se sont dj accomplis et que tu ne peux plus rien y changer.
Qui saurait valuer, mme si tu nes pas malade, tout ce qui sagite dans ton me et dont
tu napprends rien, ou dont tu es mal inform ? Tu te comportes comme un souverain
absolu, qui se contente des renseignements que lui apportent les hauts fonctionnaires de
sa cour, et qui ne descend pas dans la rue pour couter la voix du peuple.
Entre en toi-mme, dans tes profondeurs, et apprends dabord te connatre,
alors tu comprendras pourquoi tu dois devenir malade, et tu viteras peut-tre de le
devenir. Cest ainsi que la psychanalyse a voulu instruire le moi. Mais ces deux
lucidations, savoir que la vie pulsionnelle de la sexualit en nous ne peut tre dompte
entirement, et que les processus psychiques sont en eux-mmes inconscients, ne sont
accessibles au moi et ne sont soumis celui-ci que par le biais dune perception
incomplte et peu sre, reviennent affirmer que le moi nest pas matre dans sa
propre maison . (Sigmund Freud, Une Difficult de la psychanalyse (1917) dans Linquitante tranget et autres essais, trad. B. Ferron, d. Gallimard, coll. Folio, 1985, p. 186. )
La crise des fondements dans la philosophie
La dcouverte de lInconscient
Dans le cours des sicles, la science a inflig l'gosme naf de l'humanit
deux graves dmentis. La premire fois, ce fut lorsqu'elle a montr que la terre, loin d'tre
le centre de l'univers, ne forme qu'une parcelle insignifiante du systme cosmique dont
nous pouvons peine nous reprsenter la grandeur. Cette premire dmonstration se
rattache pour nous au nom de Copernic, bien que la science alexandrine ait dj annonc
quelque chose de semblable.
Le second dmenti fut inflig l'humanit par la recherche biologique, lorsqu'elle
a rduit rien les prtentions de l'homme une place privilgie dans l'ordre de la
cration, en tablissant sa descendance du rgne animal et en montrant l'indestructibilit
de sa nature animale. Cette dernire rvolution s'est accomplie de nos jours, la suite des
travaux de Ch. Darwin, de Wallace et de leurs prdcesseurs, travaux qui ont provoqu la
rsistance la plus acharne des contemporains.
La crise des fondements dans la philosophie
Le doute sur la conscience
Un troisime dmenti sera inflig la mgalomanie humaine par la recherche
psychologique de nos jours qui se propose montrer au moi qu'il n'est seulement pas
matre dans sa propre maison, qu'il en est rduit se contenter de renseignements rares
et fragmentaires sur ce qui se passe, en dehors de sa conscience, dans sa vie psychique.
Les psychanalystes ne sont ni les premiers ni les seuls qui aient lanc cet appel
la modestie et au recueillement, mais c'est eux que semble choir la mission d'tendre
cette manire de voir avec le plus d'ardeur et de produire son appui des matriaux
emprunts l'exprience et accessibles tous. D'o la leve gnrale de boucliers contre
notre science, l'oubli de toutes les rgles de politesse acadmique, le dchanement d'une
opposition qui secoue toutes les entraves d'une logique impartiale.
Freud, Introduction la psychanalyse, Payot, page 266
La crise des fondements dans la philosophie
Le doute sur la conscience
Paul Gaugain, D'o venons-nous ? Que sommes-nous ? O allons-nous ?, 1897
Ques-ce-qui nous reste de nos ambitions de connaissance?
Les deux coins du haut sont jaune de chrome avec linscription gauche et ma
signature droite, telle une fresque abme aux coins et applique sur un mur or. droite
et en bas, un bb endormi, puis trois femmes accroupies. Deux figures habilles de
pourpre se confient leurs rflexions ; une figure norme volontairement et malgr la
perspective, accroupie, lve les bras en lair et regarde, tonne, ces deux personnages
qui osent penser leur destine. Une figure au milieu cueille un fruit. Deux chats prs dun
enfant. Une chvre blanche. Lidole, les deux bras levs mystrieusement et avec rythme,
semble indiquer lau-del. La figure accroupie semble couter lidole ; puis enfin une vieille
prs de la mort semble accepter, se rsigner [] ; ses pieds, un trange oiseau blanc
tenant en sa patte un lzard, reprsente linutilit des vaines paroles
Paul Gaugain, D'o venons-nous ? Que sommes-nous ? O allons-nous ?, 1897
Tout se passe au bord dun ruisseau sous bois. Dans le fond, la mer puis les
montagnes de lle voisine. Malgr les passages de ton, laspect du paysage est
constamment dun bout lautre bleu et vert Vronse. L-dessus toutes les figures nues
se dtachent en hardi orang. Si on disait aux lves des Beaux-Arts pour le concours de
Rome : Le tableau que vous avez faire reprsentera : Do venons-nous ? que sommes-
nous ? o allons-nous ? que feraient-ils ? Jai termin un ouvrage philosophique sur ce
thme compar lvangile : je crois que cest bien : si jai la force de le recopier, je vous
lenverrai
Paul Gauguin, Oviri. crits dun sauvage, Paris, Gallimard, coll. Folio , 1974, p. 194.
Paul Gaugain, D'o venons-nous ? Que sommes-nous ? O allons-nous ?, 1897
Pochi giorni fa, un mio ex allievo che insegna da anni filosofia, con molta
passione, in un liceo di Torino, mi disse che era molto interessato a questi incontri di
Cattolica, perch rispondevano a un grande bisogno di filosofia che egli constatava
da qualche tempo nei suoi studenti e che sarebbe stato inimmaginabile sei, sette, otto
anni fa, quando non esistevano altri interessi che per le questioni del giorno della
storia in atto. Gli chiesi che cosa intendesse per "richiesta di filosofia". Mi rispose con
una frase che pu sembrare un po' sibillina: una richiesta di senso. Traduco: richiesta
di senso significa bisogno di dare un senso alla propria vita, alle nostre azioni e a
quelle di coloro verso i quali dirigiamo le nostre azioni, alla societ in cui viviamo, al
passato, alla storia, all'universo intero.
proprio il caso di dire: morta la filosofia viva la filosofia.
N. Bobbio, Che cosa fanno i filosofi oggi?, 1982
De la crise des fondements
la recherche dun nouveau paradigme de raison
Une requte philosophique Une requte de sens
Qu'est-ce que l'tre ?
Quel est le destin de lhomme? Et de la terre dans lunivers?
Pourquoi y a-t-il quelque chose plutt que rien?
Jai ramass cette explication dans la rue en entendant un homme du
peuple qui disait: Il na reconnu ; je me suis demand ces mots ce que le
peuple entend au fond par connaissance ; que cherche-t-il quand il la demande?
Rien que ceci : ramener quelque chose dtrange quelque chose de CONNU.
Nous, philosophes, que mettons-nous de plus dans ce mot? Le connu, cest--dire
les choses auxquelles nous sommes habitus, de telle sorte que nous ne nous
tonnons plus ; nous y mettons notre menu quotidien, une rgle quelconque qui
nous mne, tout ce qui nous est familier Eh quoi? notre besoin de connatre
nest-il pas justement notre besoin de familier ? le dsir de trouver, parmi tout ce
qui nous est tranger, inhabituel, nigmatique, quelque chose qui ne nous inquite
plus ? Ne serait-ce pas linstinct de la peur qui nous commanderait de connatre?
Le ravissement qui accompagne lacquisition de la connaissance ne serait-il pas la
volupt de la scurit retrouve ? F. Nietzsche, Le Gai savoir, Livre V, 355.
Ncessit de la requte philosophique pour lhomme
A la recherche dun nouveau paradigme de raison
A la recherche dun nouveau paradigme de raison
Ponendo delle domande a cui non si pu rispondere, sul
significato, gli uomini si pongono come esseri interroganti. () Ora, pi
che probabile che se gli uomini dovessero perdere lappetito di significato
che chiamiamo pensare, se cessassero di fare domande senza risposta,
perderebbero insieme non solo lattitudine a produrre quegli enti di
pensiero che si chiamano opere darte, ma anche la capacit di porre tutte
le interrogazioni suscettibili di risposta su cui si fonda ogni civilt. In questo
senso, la ragione costituisce la condizione a priori dellintelletto e del
sapere.
H. Arendt (1906- 1975), La vita della mente, p. 146
Ncessit de la requte philosophique pour lhomme
Lhomme cherche se former de quelque manire que ce soit, mais
selon sa propre logique, une image du monde simple et claire. Ainsi surmonte-
t-il lunivers du vcu parce quil sefforce dans une certaine mesure de le
remplacer par cette image. Chacun sa faon procde de cette manire, quil
sagisse dun peintre, dun pote, dun philosophe spculatif ou dun physicien.
A cette image et sa ralisation il consacre lessentiel de sa vie affective pour
acqurir ainsi la paix et la force quil ne peut pas obtenir dans les limites trop
restreintes de lexprience tourbillonnante et subjective.
Einstein, Discours prononc loccasion du soixantime
anniversaire de Max Planck.
du point de vue intellectuel Ncessit de la requte philosophique
A la recherche dun nouveau paradigme de raison
Le problme du bien et du mal, la facult de distinguer ce qui est bien
de ce qui est mal seraient-ils en rapport avec notre facult de penser ? Pas au
sens, bien entendu, o la pense serait capable de scrter les bonnes
actions, comme si la vertu senseignait et sapprenait il ny a que les
habitudes et les coutumes qui senseignent, et chacun ne sait que trop bien
quelle vitesse on les dsapprend et les oublie, pour peu quune situation
nouvelle exige un changement de conduite et de manires []. La question
impossible luder tait celle-ci : lactivit de penser en elle-mme, lhabitude
dexaminer tout ce qui vient se produire ou attire lattention, sans prjuger du
contenu spcifique ou des consquences, cette activit donc fait-elle partie des
conditions qui poussent lhomme viter le mal et mme le conditionnent
ngativement son gard ?
Arendt, La vie de lesprit
du point de vue moral
A la recherche dun nouveau paradigme de raison
Ncessit de la requte philosophique
Une raison en dialogue
[] la philosophie hermneutique ne se comprend pas
comme une position absolue, mais comme un chemin vou
l'exprience. Elle insiste pour dire qu'il n'y a pas de plus haut principe que
celui qui consiste rester ouvert au dialogue.
GADAMER, Hans-Georg, La philosophie hermneutique, Paris, Presses
Universitaires de France, p. 22.
La philosophie hermneutique
Epilogue
29 mai 1913Diapositiva numero 2Diapositiva numero 3Odilon Redon, MystreOdilon Redon, Mlancolie, 1876Diapositiva numero 6Diapositiva numero 7Diapositiva numero 8Diapositiva numero 9Diapositiva numero 10Diapositiva numero 11Diapositiva numero 12Diapositiva numero 13Diapositiva numero 14Diapositiva numero 15Diapositiva numero 16Diapositiva numero 17Diapositiva numero 18Diapositiva numero 19Diapositiva numero 20Diapositiva numero 21La crise des fondements dans la philosophieLa mort de DieuDiapositiva numero 23Diapositiva numero 24La crise des fondements dans la philosophieLa dcouverte de lInconscientDiapositiva numero 26Diapositiva numero 27Diapositiva numero 28Ques-ce-qui nous reste de nos ambitions de connaissance?Diapositiva numero 30Diapositiva numero 31Diapositiva numero 32Diapositiva numero 33Diapositiva numero 34Diapositiva numero 35Diapositiva numero 36Diapositiva numero 37Diapositiva numero 38