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1 musée GOYA service des publics musée d’art hispanique La couleur Dossier d’accompagnement

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musée GOYA service des publics musée d’art hispanique

La couleur Dossier d’accompagnement

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Ce dossier d’accompagnement, spécialement conçu pour les enseignants, a été réalisé par le service des publics des musées de Castres. Avec la contribution de Henry Thiel, conseiller pédagogique pour les arts visuels et Thérèse Urroz, chargée de mission à la Délégation Académique pour l’Action culturelle. Il a pour objectif de mieux connaître la collection du musée et d’aider à la préparation des visites ou des ateliers au musée liés à la thématique de la couleur. Il est également un support de prolongements possibles en classe.

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SOMMAIRE INTRODUCTION L’HARMONIE DES COULEURS L’ETAT PSYCHO-PHYSIQUE OU L’HARMONIE CERCLE CHROMATIQUE LES SEPT CONTRASTES DE COULEURS LA COULEUR EN SOI LE CLAIR-OBSCUR LE CHAUD-FROID DES COMPLEMENTAIRES SIMULTANÉ DE QUALITÉ DE QUANTITÉ BIBLIOGRAPHIE

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1. Introduction Comme introduction à l’enseignement de la construction des couleurs, nous expliquons le cercle chromatique en douze parties issu des trois couleurs primaires : jaune, rouge et bleu. La représentation des douze couleurs du cercle doit correspondre exactement à des sensations colorées précises. Ayant ici à nous préoccuper de la couleur, il est essentiel de bien comprendre que la couleur est une sensation. Le développement de la chimie des couleurs repose sur plusieurs modes : psychique, spirituelle, métaphysique. Les effets de la couleur peuvent être vécus et compris d’une manière non seulement optique, mais également psychique et symbolique. Nous pouvons adopter pour étudier la couleur plusieurs points de vue : Le physicien étudie l’énergie des vibrations électromagnétiques ou la nature des corpuscules lumineux. La composition de la lumière blanche en couleur spectrale après passage dans le prisme, il étudie le mélange des lumières colorées, les spectres des divers éléments, le nombre des variations et la longueur des diverses ondes colorées. Le chimiste étudie la constitution moléculaire des matériaux colorants pigmentés, les problèmes de la conservation des couleurs et de leur résistance à la lumière. Le physiologiste examine les diverses actions de la lumière et des couleurs sur notre système visuel - œil et cerveau- dont il étudie les conditions et les fonctions anatomiques. Le psychologue s’intéresse aux problèmes de l’action des rayonnements colorés sur notre subconscient et sur notre esprit. Le symbolisme des couleurs, la définition et les limites des couleurs sont des thèmes importants que la psychologie doit résoudre.

Les couleurs de l’arc-en-ciel, du Traité élémentaire de physique de l’Abbé Haüy, 1806

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En 1676 le physicien Isaac Newton montre expérimentalement que la lumière solaire blanche se décompose, à l’aide d’un prisme à trois arêtes, selon les couleurs du spectre. Ce spectre contient toutes les couleurs principales, à l’exception de la pourpre. La lumière solaire pénètre par une fente et frappe un prisme à trois arêtes où le rayon lumineux blanc se décompose selon les couleurs du spectre. On peut recueillir cet éventail de couleurs sur un écran où l’on obtient ainsi une bande spectrale colorée. Celle-ci s’étend d’une manière continue, en passant par l’orange, le jaune, le vert, le bleu. Si, à l’aide d’une lentille, on concentre cette bande colorée, on obtient de nouveau, par addition, une lumière blanche sur un second écran. La bande colorée est née par réfraction. Il y a encore d’autres façons de créer physiquement des couleurs ; citons : la réflexion, la polarisation, la fluorescence. Si l’on partage la bande spectrale en deux parties, par exemple rouge-orange-jaune et vert-bleu-violet, et si l’on rassemble chacun de ces deux groupes à l’aide de lentilles, on obtient deux couleurs mixtes qui, mélangées à leur tour, donnent du blanc. Deux espèces de lumières qui, mélangées, donnent du blanc, se nomment complémentaires. Si, dans la bande de couleurs du prisme, nous isolons une couleur, par exemple le vert, et si nous rassemblons à l’aide d’une lentille les autres, rouge, orangé, jaune, bleu, violet, nous obtenons du rouge comme couleur mixte, c’est-à-dire la couleur complémentaire du vert que nous avions isolée. Si nous isolons le jaune, les couleurs restantes : rouge, orange, vert, bleu, violet se résolvent en la couleur complémentaire, le violet. Chaque couleur spectrale est complémentaire de la couleur mixte composée par toutes les autres couleurs du spectre. Nous ne pouvons pas distinguer les différentes couleurs qui composent une couleur mixte, alors que le musicien peut percevoir, dans un mélange de sons, les sons individuels qui composent la musique. Les couleurs naissent d’ondes lumineuses qui sont une espèce particulière d’énergie électromagnétique. L’œil humain ne perçoit que des ondes lumineuses de 400-700mµ. L’unité de mesure des longueurs d’onde est le micron.

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Les longueurs d’onde des couleurs du spectre et leur nombre de vibrations par seconde :

couleur Longueur d’onde Nombre de vibrations

Rouge 800-650 mµ 400-470 billons Orange 640-590 mµ 470-520 billons Jaune 580-550 mµ 520-590 billons Vert 530-490 mµ 590-650 billons Bleu 480-460 mµ 650-700 billons Indigo 450-440 mµ 700-760 billons violet 430-390 mµ 760-800 billons

1 micron = 1µ = 1/1000 mm 1 millimicron = 1mµ = 1/1.000.000 mm = 1 nanomètre.

Les ondes lumineuses en elles-mêmes sont incolores. La couleur naît seulement dans notre œil ou dans notre cerveau. Si l’on place deux filtres colorés, par exemple rouge et vert, devant une lampe à arc on obtient du noir, le filtre rouge absorbe toutes les couleurs du spectre jusqu’au rouge. Le filtre vert absorbe toutes les couleurs jusqu’au vert. Ainsi il ne reste plus de couleurs disponibles et l’effet réalisé donne du noir. La couleur d’absorption se nomme également couleur de soustraction. Les pigments sont pour la plupart des couleurs de soustractions ; un récipient rouge paraît rouge parce qu’il absorbe toutes les couleurs de la lumière et qu’il ne réfléchit que le rouge. Quand nous disons : « ce pot est rouge », cela signifie en réalité : la surface du pot a une composition moléculaire telle qu’elle absorbe tout le rayonnement lumineux à l’exception du rouge. Le pot en lui-même est incolore. Il a besoin de lumière pour paraître coloré. Si l’on éclaire du papier rouge avec une lumière verte le papier paraît noir, car la lumière verte ne contient pas de rouge qui puisse être réfléchi. Toutes les couleurs des peintres sont des pigments ou des substances colorées. Ce sont des couleurs d’absorption et leurs mélanges sont soumis aux lois de la soustraction. Un mélange de couleurs complémentaires ou une composition qui contient les trois couleurs primaires : jaune, rouge, bleu selon des proportions déterminées donne du noir : c’est un mélange de soustraction. Le mélange correspondant des couleurs du prisme, incorporelles, donne du blanc comme mélange d’addition. La réalité des couleurs désigne le pigment de la couleur (c’est à dire la matière colorante), tel qu’il est défini et analysé par la physique et la chimie. Elle reçoit son contenu et son sens humain par la perception transmise par l’œil au cerveau. Mais l’œil et le cerveau ne parviennent à des perceptions claires que par comparaisons et par contrastes.

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Une couleur ne peut prendre de valeur que par rapport à une absence de valeur, telle que le noir, le blanc ou le gris ou bien avec une seconde couleur ou même plusieurs couleurs. On sait qu’un carré blanc sur fond noir paraît plus grand qu’un carré noir de même dimension sur fond blanc. Le blanc rayonne et déborde des limites, alors que le noir rapetisse. Un carré gris clair sur fond blanc paraît obscur, et le même carré sur fond noir paraît clair.

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2. L’harmonie des couleurs La plupart du temps, les profanes considèrent comme harmonieux des assemblages de couleurs qui ont un caractère analogue ou qui groupent diverses couleurs de même valeur. Ce sont là des couleurs qui sont assemblées sans forts contrastes. D’une façon générale, les termes « harmonieux » « non harmonieux » ne concernent que des sensations « agréable » « non agréable » ou « sympathique ». De tels jugements ne font qu’exprimer des opinions personnelles, sans grande valeur objective. La notion d’harmonie des couleurs doit se libérer du conditionnement subjectif -goût, impressions- et s’ériger en une loi objective. Harmonie signifie équilibre, symétrie des forces. L’étude des processus physiologiques des perceptions colorées nous rapproche de la solution. Si nous contemplons un carré vert, puis si nous fermons les yeux, nous voyons comme image résiduaire un carré rouge. Si nous contemplons un carré rouge, c’est un carré vert que nous voyons apparaître. Nous pouvons essayer avec toutes les couleurs et nous constaterons que l’image résiduaire sera toujours de la couleur complémentaire. L’œil exige ou produit la couleur complémentaire. Il essaie de lui-même de rétablir l’équilibre. On nomme ce phénomène contraste successif. Un second essai consistera à placer sur une couleur pure un carré gris clair de la même valeur de clarté. Ce gris vire au gris rougeâtre sur le vert. Au gris verdâtre sur le rouge ; au gris jaunâtre sur le violet, le gris paraît virer à la couleur complémentaire. Les couleurs pures ont aussi tendance, l’une près de l’autre, à glisser vers leurs complémentaires. Ce phénomène se nomme contraste simultané.

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3. L’état psycho - physique ou l’harmonie Si nous contemplons un carré blanc sur fond noir, l’image résiduaire qui apparaît lorsque nous détournons les yeux est un carré noir. Si nous contemplons un carré noir sur fond blanc, c’est un carré blanc qui apparaît comme image résiduaire. L’œil s’efforce de rétablir lui – même un état d’équilibre. Mais si nous contemplons un carré gris moyen sur fond gris, l’image résiduaire n’est pas différente du carré gris moyen. Cela prouve que le gris moyen correspond à l’état d’équilibre exigé par notre sens optique. Les phénomènes produits par la substance visuelle provoquent des sensations psychiques correspondantes. Dans notre appareil sensitif optique, l’harmonie correspond donc à un état psycho - physique d’équilibre. Le gris neutre engendre cet état. Nous pouvons obtenir ce gris neutre soit en mélangeant du noir et du blanc, soit en mélangeant plusieurs couleurs qui contiennent les trois couleurs fondamentales jaune, rouge, bleu selon des proportions voulues. Deux ou plusieurs couleurs sont harmonieuses lorsqu’elles donnent un mélange gris neutre. Tous les autres mélanges de couleurs qui ne donnent pas de gris sont de nature expressive et non harmonieuse. Il existe en peinture de nombreux chefs – d’œuvre où l’accent est mis uniquement sur l’expression : dans l’optique ici définie, la composition de leurs couleurs déterminée et de son expression, leur effet frappe et saisit l’imagination. Il n’est donc pas nécessaire que toute composition colorée soit harmonieuse. L’enseignement de la construction des couleurs comprend les lois fondamentales des effets de couleurs, mais tout ce que la raison construit n’est pas, en art, ce qui joue le rôle le plus décisif. La sensation intuitive se place au-dessus d’elle, car elle mène au royaume de l’irrationnel et du métaphysique, qu’aucune formule chiffrée ne peut saisir. Les considérations logiques et intellectuelles ne sont donc qu’un véhicule qui nous portera jusqu’au seuil d’un nouveau devenir.

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4. Cercle chromatique Le cercle chromatique est un élément fondamental de l’enseignement esthétique des couleurs, car il représente le classement des couleurs. Puisque le peintre travaille avec des pigments colorés, sa conception des couleurs doit être fondée sur les lois du mélange des couleurs pigmentaires. Deux couleurs placées l’une en face de l’autre doivent être complémentaires et donner du gris par leur mélange. Ainsi dans le cercle chromatique, le bleu s’oppose à l’orange car le mélange de ces deux couleurs donne du gris. Le cercle chromatique est composé de douze parties issu des trois couleurs primaires : jaune, rouge et bleu. Nous savons que l’individu normal est capable de distinguer un rouge qui ne soit ni bleuâtre, ni jaunâtre, un jaune qui ne soit ni verdâtre, ni rougeâtre. Pour vérifier chaque couleur, il est sage de placer celle-ci sur un fond neutre, c’est -à -dire gris. Plaçons dans un triangle équilatéral les trois couleurs primaires : le jaune en haut, le rouge en bas et à droite et le bleu en bas et à gauche. Le triangle est inscrit dans un cercle où nous construisons un hexagone. Dans les triangles restants, nous plaçons les trois mélanges : chacune de ces couleurs mixtes est constituée par deux couleurs primaires. Nous obtenons ainsi les couleurs secondaires suivantes Jaune et rouge = orange Jaune et bleu = vert Rouge et bleu = violet Les trois couleurs secondaires doivent être mélangées avec beaucoup de précision : elles ne doivent tendre ni vers l’une ni vers l’autre des couleurs primaires. Pour les couleurs tertiaires nous obtenons les couleurs suivantes : Jaune et orange = jaune – orangé - Rouge et orange = rouge – orangé - Rouge et violet =rouge – violet - Bleu et violet = bleu – violet - Bleu et vert = bleu – vert - Jaune et vert = jaune – vert - Nous obtenons de cette façon un cercle de douze couleurs équidistantes dans lequel chaque couleur occupe une place non interchangeable ; Les couleurs se succèdent dans l’ordre des couleurs spectrales ou des couleurs de l’arc-en-ciel. Les douze couleurs sont disposées à intervalles réguliers et les couleurs qui se font face sont complémentaires. Delacroix avait installé sur un des murs de son atelier un cercle, de toutes les combinaisons possibles. Les impressionnistes Cézanne, Van Gogh, Signac, Seurat et bien d’autres considéraient Delacroix comme un grand maître de la couleur. C’est Delacroix et non Cézanne qui est le fondateur de cette orientation de la peinture moderne qui s’efforce de construire ses œuvres sur des principes objectifs, compréhensibles d’une façon logique, et d’introduire ainsi en elles plus d’ordre et plus de vérité.

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5. Les sept contrastes de couleurs On parle de contrastes lorsque l’on peut constater, entre deux effets de couleurs qu’il faut comparer, des différences ou des intervalles sensibles. Lorsque ces différences atteignent un maximum, on parle de contrastes d’oppositions chaud-froid, blanc-noir, petit-grand, poussées à l’extrême, sont des contrastes polaires. Tout ce que nous pouvons percevoir par nos sens s’effectue par des comparaisons. Une ligne longue parce qu’une ligne plus petite se trouve à côté d’elle ; mais la plus longue nous paraît courte si c’est une ligne plus longue qui l’accompagne. De même les effets de couleurs peuvent s’intensifier ou s’affaiblir par des contrastes colorés. Nous constatons sept contrastes de couleurs différents, ces contrastes sont régis par des lois si différentes que chacun d’eux doit être étudié en particulier. Les sept contrastes de couleurs sont : Contraste de la couleur en soi Contraste clair-obscur Contraste chaud-froid Contraste des complémentaires Contraste simultané Contraste de qualité Contraste de quantité

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6. Contraste de la couleur en soi Le « contraste de la couleur en soi » est le plus simple des sept contrastes de couleurs. Il est possible d’employer n’importe quelle couleur pure et lumineuse. De même que l’opposition noir-blanc marque le plus fort contraste de clair-obscur, le jaune, le rouge, le bleu sont les couleurs les plus expressives du contraste de la couleur en soi. Pour représenter ce contraste nous avons besoin d’au moins trois couleurs nettement différenciées. L’effet qui en résulte est toujours multicolore, franc puissant et net. La force d’expression de la couleur en soi diminue au fur et à mesure que les couleurs primaires diminuent. Par des modifications de valeurs clair-obscur, le « contraste de la couleur en soi » atteint un nombre infini de nouvelles valeurs d’expressions. Le nombre de variations est immense et, en conséquence, il est possible de varier à l’infini l’expression de l’accord. Le blanc affaiblit la luminosité des couleurs et les rend plus ternes, alors que le noir augmente leur luminosité et les fait paraître plus claires. Le « contraste de la couleur en soi » apporte la solution à de nombreux sujets en peinture. Il exprime la vie, le jaillissement. Les couleurs pures primaires et secondaires expriment toujours un rayonnement. Les art populaires sont souvent la source de contrastes de la couleur en soi. Les broderies multicolores, les costumes folkloriques, les céramiques prouvent cette joie naturelle que produisent les effets colorés ; Les miniaturistes au Moyen Âge ont employé de très nombreuses variantes de « contraste de la couleur en soi ». Très fréquent dans les vitraux sa force s’affirme en opposition avec les formes de l’architecture, mais également pour des raisons de nécessités spirituelles. Parmi les peintres modernes, Matisse, Mondrian, Picasso Kandinsky, Miró ont très souvent fait des compositions fondées sur ce contraste. (Matisse en particulier : le collier d’ambre) Quelques exemples de tableaux utilisant le contraste de la couleur en soi : « L’église d’Ephèse ». Apocalypse de Saint Sever (11éme siècle). Paris. Bibliothèque Nationale « Le couronnement de Marie ». Enguerand Charonton (15éme siècle). Villeneuve-les-Avignon, Hôpital. « Chevauchée de la fête de mai ». Les très riches heures du Duc de Berry. Paul de Limbourg (1410). Chantilly. Musée Condé. « Composition 1928 ». Piet Mondrian (1872-1944). Collection Martin Stam. « Le Jugement Dernier ». Francisco Pacheco (1611 – 1614). Musée Goya. Castres

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7. Le contraste clair-obscur Le blanc et le noir sont les plus forts moyens d’expressions pour le clair-obscur. Le blanc et le noir sont, du point de vue de leurs effets, totalement opposés ; entre ces deux extrêmes s’étend tout le domaine des tons gris et des tons colorés. Le ton le plus noir est le velours noir et le ton le plus blanc est le sulfate de baryte. Il n’y a qu’un noir maximal et un blanc maximal, mais il existe une infinité de tons gris clairs et foncés qui s’échelonnent sur une gamme continue entre le blanc et le noir. Le nombre de degrés de gris différents dépend de l’acuité de l’œil et du seuil des sensibilités de chaque individu. Une surface grise, unie et paraissant terne peut s’animer au moyen de modulations imperceptibles. Le gris neutre est une absence de couleurs, indifférente et dépourvue de caractère. Il subit facilement l’influence des contrastes de tons et de couleurs. Il est muet, mais il est facilement transformable en tons splendides. L’action de n’importe quelle couleur peut faire passer le gris d’une absence de couleur ou d’une couleur neutre à son effet complémentaire correspondant. Cette transformation s’effectue de façon subjective dans l’œil mais ne se produit pas objectivement dans les tons de couleurs eux-mêmes. En lui-même, le gris est neutre, mort et sans expression ; il ne reçoit de la vie que par la proximité des autres couleurs, qui lui donne alors un caractère. Il en affaiblit la force et les adoucit. On peut obtenir du gris soit en mélangeant du blanc et du noir, soit en mélangeant du jaune, du rouge, du bleu et du blanc, soit en mélangeant n’importe quelle paire de couleurs complémentaires. Nous trouvons dans l’art européen aussi bien que dans l’art oriental, de nombreuses œuvres fondées exclusivement sur le contraste clair-obscur. Celui-ci a une importance capitale dans la peinture au lavis en chine et au japon. Les techniques de gravure sur bois, de gravure en eau-forte et de gravure sur cuivre sont également représentatrices du clair-obscur (Rembrandt). Quelques exemples de tableaux utilisant le contraste du clair-obscur : « Citrons, oranges et rose ». Francisco Zurbaran (1598-1664). Florence. Coll. Contini-Boacossi. « L’homme au casque d’or ». Rembrandt (1606-1669). Berlin. Musée Kaiser-Friedrich. « La guitare sur la cheminée ». Pablo Picasso (1915). « Saint Augustin » (vers 1636). José Ribera (1591-1652). Musée Goya. Castres

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8. Le contraste chaud-froid Il peut paraître étrange de parler d’une sensation de température lorsqu’il s’agit de la vision optique des couleurs. Des expériences ont montré cependant que la sensation de froid ou de chaud changeait suivant que la pièce était peinte en bleu-vert ou en rouge-orangé. Dans la pièce peinte en bleu-vert, les personnes trouvaient qu’il faisait froid à 15 degrés centigrades ; dans la pièce peinte en rouge-orangé, elles ne ressentaient le froid qu’à 11 ou 12 degrés. Cela démontre scientifiquement que la couleur bleu-vert calme la circulation, alors que la couleur rouge-orangé l’active. Une seconde expérience avec des animaux a les mêmes résultats. On divisa une écurie de chevaux de course en deux parties : L’une fut peinte en bleu, les chevaux, après la course, se calmèrent très rapidement, alors que dans la stalle rouge, ils demeurèrent longtemps échauffés et agités. D’autre part, on ne trouva aucune mouche dans la stalle bleue tandis qu’elles étaient très nombreuses dans la stalle rouge. Ces deux expériences montrent l’importance du contraste chaud-froid pour la décoration colorée des intérieurs. Si l’on observe le cercle chromatique, on s’aperçoit que le jaune est la couleur la plus claire et que le violet est la couleur la plus sombre ; cela signifie qui il y a entre ses deux couleurs le contraste clair-obscur à son degré le plus fort. A angle droit de l’axe jaune-violet se trouvent les couleurs rouge-orangé et bleu-vert : Ce sont les deux pôles du contraste chaud-froid. Le rouge-orangé (rouge de Saturne) est la couleur la plus chaude et le bleu-vert (oxyde de manganèse) est la couleur la plus froide. Les couleurs suivantes : jaune, jaune-orangé, rouge-orangé, rouge et violet-rouge sont généralement considérées comme des couleurs chaudes alors que le jaune-vert, le vert, le bleu-vert, le bleu, le bleu-violet et le violet sont considérés comme des couleurs froides. Nous pouvons définir le caractère des couleurs froides et chaudes selon d’autres critères : Chaud-froid Ombragé-ensoleillé Transparent-opaque Apaisant-excitant Fin-épais Aérien-terreux Lointain-proche Léger-lourd Humide-sec La figure 16 montre le contraste chaud-froid dans son expression la plus poussée : le contraste polaire rouge-orangé bleu-vert. La figure 17 montre le contraste de la figure 16 selon les proportions inverses. Les figures 18 et 19 montrent le même violet comme ton principal. Il apparaît comme une couleur chaude dans la figure 18, car il se trouve à côté de couleurs plus froides, mais il apparaît au contraire comme une couleur froide dans la figure 19 parce que les couleurs qui l’entourent sont plus chaudes. La figure 20 montre une composition de couleurs chaudes et de couleurs froides.

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La figure 21 des modulations chaudes et froides dans les tons rouges et orangés. La figure 22 des modulations chaudes et froide dans les tons verts et bleus-verts. Si l’on veut atteindre les deux extrêmes, c’est-à-dire réaliser le contraste chaud-froid le plus fort, il faudra réaliser une gamme allant du bleu-vert au rouge orangé en passant par le bleu, le bleu-violet, le violet, le rouge-violet et le rouge. Dans cette large composition chromatique, on emploiera naturellement plus ou moins de tons intermédiaires. Les figures 21 et 22 montrent des modulations chromatiques de couleurs froides et chaudes ; en revanche, la composition en damier permet de donner plus de force aux contrastes de tons chauds et froids. Parmi les six contrastes de couleurs, le contraste chaud-froid est le plus éclatant. Le vitrail de « la belle verrière » de Chartres est composé sur l’emploi symbolique de rouge chaud et de bleu froid. Lorsque Monet se consacra entièrement à la peinture des paysages, il peignit ses tableaux, non plus dans son atelier, mais dehors, dans la nature. Les saisons, les heures du jour, les conditions d’éclairage, l’alternance de vert ensoleillé ou sombre dans le feuillage des arbres, tels furent les thèmes qu’il étudia dans ses tableaux. Il avait observé que les couleurs locales des objets se dissolvaient en touches de couleurs, par suite de l’action de la lumière et de l’ombre et des multiples rayons lumineux : ces couleurs avaient des variations de tons chaudes et froides et non claires et obscures. Dans ses paysages l’emploi du contraste clair-obscur régressa au profit du contraste chaud-froid. Les impressionnistes ont vu comment le bleu transparent du ciel et de l’atmosphère s’opposait partout aux tons chauds de la lumière du soleil. L’enchantement des peintures de Monet, Pissarro et Renoir provient du jeu habile des modulations de couleurs chaudes et froides. Les œuvres suivantes montrent l’emploi du contraste chaud-froid : Le vitrail de « la belle verrière « . Cathédrale de Chartres ( 12éme siècle ). « Le concert des anges ». Autel d’Isenheim. Mathias Grünewald (1475/80-1528). Colmar. Musée Unterlinden. « Le moulin de la Galette ». Auguste Renoir (1841-1919). Paris. Musée du jeu de Paume. « Le parlement de Londres dans le brouillard ». Claude Monet (1840-1926). Paris. Musée du jeu de Paume. « Pommes et oranges ». Paul Cézanne (1839-1906). Paris. Musée du jeu de Paume. « Saint Jean l’Evangéliste à Pathmos » (début du 15éme siècle). Joan Mates. Musée Goya. Castres

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9. Le contraste des complémentaires Nous désignons par le nom de complémentaires deux pigmentaires dont le mélange donne un gris-noir de ton neutre. Du point de vue physique, deux lumières colorées dont le mélange donne une lumière blanche sont également complémentaires. Deux couleurs complémentaires forment un mélange curieux. Elles sont opposées, mais exigent leur présence réciproque. Leur rapprochement avive leur luminosité, mais leur mélange les détruit et produit du gris. Il n’y a jamais qu’une seule couleur qui soit la complémentaire de l’autre. Le cercle chromatique de la figure 3 montre les couleurs complémentaires diamétralement opposées. Exemples de paires de couleurs complémentaires : Jaune : violet Jaune-orange : bleu-violet Orange : bleu Rouge-orange : bleu-vert Rouge : vert Rouge-violet : jaune-vert Si nous décomposons ces paires de couleurs complémentaires, nous constatons une fois de plus que les trois couleurs fondamentales, jaune, rouge et bleu se retrouvent de la façon suivante : Jaune : violet = jaune : rouge et bleu Bleu : orange = bleu : rouge et jaune Rouge : vert = rouge : jaune et bleu De même que le mélange de jaune, de rouge et de bleu donne du gris, le mélange de deux couleurs complémentaires donne également du gris. La couleur complémentaire d’une couleur spectrale est constituée par la somme de toute les autres couleurs spectrales. A chaque couleur du spectre correspond, comme couleur complémentaire, la somme des autres couleurs du spectre. Il a été physiologiquement prouvé que l’image résiduaire comme l’effet simultané mettent en évidence un fait étrange et resté inexpliqué jusqu’à nos jours : pour une couleur donnée, notre œil exige la couleur donnée, notre œil exige la couleur complémentaire et si celle-ci ne lui est pas donnée, il la produit lui-même. Ce phénomène est d’une grande importance pour tous les artistes. Avec deux couleurs complémentaires, on peut réaliser des tons gris colorés particulièrement réussis. Les anciens maîtres réalisaient ces tons gris en passant par traits successifs sur une couleur rayonnante la couleur opposée ou bien en faisant un glacis d’une mince couche de la seconde couleur sur la première. Les pointillistes ont posé côte à côte les couleurs pures sous forme de petits points, le mélange gris se produisant optiquement dans l’œil du spectateur. Les tableaux suivants montrent des exemples de l’emploi du contraste des complémentaires :

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« La Madone du chancelier Rolin ». Jan van Eyck (1390-1441). Paris. Musée du Louvre. « Salomon reçoit la reine de Saba ». Piero della Francesca (1410-1492). Fresque d’Arezzo. « La montagne Sainte-Victoire ». Paul Cézanne (1839-1906). Philadelphie. Museum of Art. « Saint Jean l’Evangéliste à Pathmos » (début du 15éme siècle). Joan Mates. Musée Goya. Castres « Les cigarrales » Aureliano de Beruete y Moret (1845-1912) Musée Goya. Castres.

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10. Le contraste simultané Par contraste simultané, nous entendons le phénomène qui fait que notre oeil, pour une couleur donnée, exige en même temps, c’est-à-dire simultanément, la couleur complémentaire et la produit lui-même si elle ne lui est pas donnée. L’expérience montre que la loi fondamentale de l’harmonie colorée renferme en elle la réalisation de la loi des complémentaires. La couleur complémentaire engendrée simultanément dans l’œil du spectateur est une impression colorée et n’existe pas réellement ; on ne peut pas la photographier. Le contraste simultané et le contraste successif ont vraisemblablement la même origine. Faisons l’expérience suivante : nous peignons sur une surface revêtue d’une couleur forte un petit carré noir. Les figures 31 à 36 montrent six carrés de couleur pure renferment chacun un petit carré gris dont le degré de clarté correspond à celui de la couleur pure sur laquelle il est placé. Chacun des petits carrés brille d’une couleur qui est en fait la couleur complémentaire de la couleur de base. Il est conseillé, lorsque l’on fixe une couleur, de couvrir toutes les autres couleurs et d’approcher l’œil le plus possible de ce que l’on regarde. L’effet simultané ne se produit pas seulement entre un gris et une couleur pure, mais également entre deux couleurs pures, qui ne sont pas totalement complémentaires. Chacune des deux couleurs cherche à repousser l’autre vers sa couleur complémentaire et la plupart du temps, elles perdent toutes les deux leurs caractères réels et semblent rayonner selon de nouveaux effets. Les couleurs semblent avoir une luminosité particulièrement dynamique. Elles perdent leur caractère objectif et réel pour déployer des effets de nature irréelle, gagnant par-là une nouvelle dimension. La couleur est comme dématérialisée et la phrase : « la réalité d’une couleur n’est pas toujours identique à son effet » est ici parfaitement valable. Citons les exemples suivants pour l’application du contraste simultané : « Satan et les sauterelles ». Apocalypse de St-Sever ( 11e siècle). Paris. Bibliothèque nationale ; « Le Christ dépouillé de ses vêtements ». El Greco (1541-1614). Pinacothèque. « Le café, le soir ». Vincent Van Gogh (1853-1890). Otterloo. Rijksmuseum Kröller – Müller

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11. Le contraste de qualité Par notion de qualité de la couleur, nous entendons le degré de pureté ou de saturation des couleurs. Par contraste de qualité, nous désignons l’opposition entre une couleur saturée et lumineuse et une couleur terne et sans éclat. Les couleurs du prisme, issues de la réfraction de la lumière blanche, sont des couleurs fortement saturées et d’une extrême luminosité. Une couleur pure peut être rompue à l’aide de blanc. Le caractère de la couleur évolue vers le froid. Le rouge carmin, mélangé de blanc, acquiert une touche bleuâtre et son caractère coloré sont fortement modifié. Avec du blanc, le jaune devient légèrement plus froid et le bleu ne change pas, son caractère coloré reste le même. Le violet sombre et saturé renferme en lui quelque chose de menaçant, le violet éclairé de blanc, le lilas, donne une impression de joie et de gaieté. La couleur pure peut être rompue à l’aide de noir. Le jaune mêlé de noir perd son expression rayonnante et claire et devient maladif et vénéneux. Il perd immédiatement sa luminosité. Le tableau de Géricault « la folle », est peint avec des tons troubles jaunes noirâtres, qui donnent au tableau une expression de folie et de dérangement. Avec du noir, le violet augmente encore son obscurité naturelle et tombe pour ainsi dire sans le vouloir dans le néant. Mêlé de noir, le rouge carmin reçoit une tonalité qui tire sur le violet. De même, le noir donne au rouge cinabre une tonalité brûlée, brun-rouge. Le noir paralyse le bleu. Le bleu ne supporte que quelques degrés seulement jusqu’au noir et sa luminosité disparaît rapidement. Le vert est beaucoup plus sensible aux modulations que le violet ou le bleu. Il offre de nombreuses possibilités ; d’une façon générale, le noir ôte aux couleurs leur luminosité. Il les éloigne de la luminosité. Il les éloigne de la lumière et les tue plus ou moins vite. Nous pouvons encore rompre une couleur saturée avec un mélange de noir et de blanc, c’est à dire avec du gris. Dès que l’on réalise se mélange, on obtient des tons de même clarté mais, quoi qu’il en soit, les tons sont toujours plus troubles que la couleur pure correspondante. Les couleurs mêlées de gris deviennent plus ou moins neutres et aveugles. Nous pouvons également troubler une couleur pure en la mélangeant avec sa couleur complémentaire. Si l’on mélange du jaune et du violet, on obtient des tons qui se situent entre le jaune clair et le violet sombre. Le vert et le rouge ne sont pas très éloignés l’un de l’autre mais, mêlés ensemble, ils donnent un mélange gris très sombre. Les différentes modifications peuvent, avec du blanc, donner des résultats étranges et surprenants. Lorsque le mélange résulte des trois couleurs primaires, le ton final adopte un caractère rompu et terne. Suivant les rapports quantitatifs des trois couleurs, le mélange devient d’un gris plus ou moins jaune, rouge ou noir. Tous les degrés de ternissement sont réalisables avec les couleurs primaires. Ceci est également valable pour les couleurs secondaires et pour n’importe quelle combinaison de couleur, pourvu que le mélange contienne d’une façon ou d’une autre le jaune, le rouge et le bleu.

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L’effet du contraste « lumineux-terne » est relatif. Telle couleur peut paraître lumineuse près d’une couleur terne et prendre un caractère terne auprès d’une couleur lumineuse. Les tableaux suivants montrent l’emploi du contraste de qualité : « Le nouveau-né ». George de la Tour (mort en 1650). Musée de Rennes. « Le piano ». Henri Matisse (1869-1954). New York. Museum of Modern Art. “L’enchantement des poisons”. Paul Klee (1879-1940). Philadelphie Museum of Art. “l’Assemblée de la Compagnie Royale des Philippines” 1815. Francisco Goya y Lucientes 1745-1828

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12. Le contraste de quantité Le contraste de quantité concerne les rapports de grandeur de deux ou de plusieurs couleurs. Il s’agit donc du contraste « beaucoup-peu » ou du contraste « grand-petit ». Nous pouvons faire des compositions de couleurs à l’aide de toutes les grandeurs de taches possibles. Mais nous pouvons nous poser la question suivante : Quel est le rapport quantitatif entre deux ou plusieurs couleurs dont nous pouvons dire qu’il est équilibré et qu’aucune des couleurs employées n’y a plus d’importance que l’autre ? Deux facteurs déterminent la force d’expression d’une couleur. Premièrement sa luminosité, et deuxièmement la dimension de la tache de couleur. Pour évaluer la luminosité d’une couleur, c’est-à-dire sa valeur lumineuse, il suffit de la comparer avec un gris moyen. Nous constaterons alors que les intensités et les degrés de luminosité des couleurs sont différents. Pour ces valeurs lumineuses, Goethe avait inventé des rapports numériques très simples et pour nous d’un grand intérêt. Ces chiffres sont des valeurs approchées. Comment faire pour déterminer des valeurs précises, quand les couleurs vendues dans le commerce sous le même on par différentes fabriques montrent d’énormes différences ? Les valeurs de lumière établies par Goethe sont les suivantes : Jaune : orange : rouge : violet : bleu : vert : correspondent à : 9 : 8 : 6 : 3 : 4 : 6 : les valeurs des couleurs complémentaires sont : jaune : violet = 9 : 3 = 3 : 1 = ¾ : ¼ orange : bleu = 8 : 4 = 2 : 1 = ⅔ : ⅓ rouge : vert = 6 : 6= 1 : 1 = ½ : ½ Si l’on transforme ces valeurs de lumière en taches de couleurs aux dimensions harmonieuses, les chiffres désignant les valeurs de lumière doivent être modifiés en conséquence. Le jaune qui est trois fois plus lumineux que le violet, doit donc occuper une place trois fois plus petite que sa couleur complémentaire. Comme le montre les figures 42 à 4, les couleurs complémentaires entraînent les rapports quantitatifs suivants : Jaune : violet = ¼ : ¾ Orange : bleu = ⅓ : ⅔ Rouge : vert = ½ : ½ Les dimensions des surfaces harmonieuses des couleurs primaires et secondaires sont donc les suivantes : Jaune : orange : rouge : violet : bleu : vert : 3 : 4 : 6 : 9 : 8 : 6 soit : jaune : orange = 3 : 4 jaune : rouge = 3 : 6 jaune : rouge = 3 : 9 jaune : bleu = 3 : 8 jaune : rouge : bleu = 3 : 3 : 8 orange : violet : vert = 4 : 9 : 6

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On peut, sur ce modèle, établir toutes les relations possibles existant entre les couleurs. La figure 45 montre le cercle des harmonies quantitatives entre les couleurs primaires et secondaires. Le tableau de Pieter Bruegel l’Ancien : « Paysage avec la chute d’Icare », Bruxelles, Musées Royaux des beaux-arts, met en valeur le contraste de quantité.

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Bibliographie La couleur. Que sais-je. Maurice Déribiré. Vision des couleurs et peintures. Direction des Musées de France. Département des Publics de l’Action Educative et de la Diffusion Culturelle. Art de la couleur. Johannes Itten. Dessain et Tolra.

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Pistes pédagogiques pour le premier degré : par Hen ry Thiel, conseiller pédagogique pour les arts visuels Si le terme de peinture est utilisé, le sens de couleur y est la plupart du temps associé ; il s’agit alors d’utilisation de matières colorantes liées par un médium permettant l’accrochage au support. La couleur a une réalité complexe qui procède non seulement de la perception elle-même (réalité variable selon l’intensité et la source lumineuses) mais aussi de la culture du regardant et des symboliques associées. D’une manière très schématique : Le blanc : non-couleur, teinte initiatrice associée au passage (mort/naissance), souvent marque d’exclusivité.

Le Canard Blanc The Deep (l’insondable)

Jean-Baptiste Oudry Jackson Pollock Le noir : non-couleur, teinte duelle car symbolisant à la fois le néant, le chaos originel et la fécondité (pensons aux premières déesses chtoniennes, divinités de la terre nourricière.

Pierre Soulages, Peinture 290 x 390 cm

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Le Greco Allégorie d’un proverbe espagnol

► À noter : l’association-opposition blanc/noir = jour/nuit, lumière/ombre, voire bien/mal…

The Most Beautiful Day or Our Lives Jean-Christian Bourcart

Mouvement en carrés Bridget Riley

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Les gris : Issus des deux non-couleurs, ils sont une synthèse de lumière et d’ombre, colorés, issus de deux complémentaires ou du trio rouge-jaune-bleu, ils complètent la palette par la possibilité de créer de multiples nuances.

Nombre et Hasard 915 Aurélie Nemours

Le bleu : profond, immatériel, souvent associé au rêve, à l’infini, au passage vers l’imaginaire.

For All That we See or Seem a Dream Jacques Monory

(Pour tout ce que nous voyons et semblons, rêve à l’intérieur d’un rêve)

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Le jaune : puissant, fort, associé à la jeunesse, à la divinité (→ or), mais aussi au déclin (automne) ; couleur très ambivalente à l’exemple du théâtre de Pékin dans lequel le jaune est, pour les costumes, la teinte des princes et, pour le maquillage, la trahison et la duplicité.

Automne Mucha

Le rouge : lié au principe de vie (feu, sang), souvent couleur première pour de nombreuses cultures.

Le Chœur

Aurélie Nemours (vitrail de l’église de Notre-Dame de Salagon)

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Le vert : entre chaud et froid, de valeur moyenne rassurante.

La Charmeuse de serpents Henri Rousseau dit le Douanier Rousseau

L’orangé : plus difficile à cerner, couleur alliant la force du jeune et la violente vitalité du rouge, teinte pouvant être provocatrice (chevelure féminine, renard…).

Concept Spatial, Attente I + I IIIXY Lucio Fontana

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Le brun : ton de la terre, curieusement associé à la fois à l’humilité, la pauvreté, voire au religieux et aux puissances sombres et infernales quand il se substitue au noir.

Saint Jean Baptiste Léonard de Vinci

Sans oublier le violet, entre rouge et bleu, la vie matérielle et la vie spirituelle, teinte de la tempérance et de l’équilibre…

Mickens

Aloïse Corbaz

Growing

Keith Haring

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Il faut néanmoins tenir compte de l’usage des couleurs dans l’expression. Telle ou telle association est voulue car elle témoigne d’une certaine tonalité émotionnelle. La teinte en soi n’a pas vraiment d’importance, il s’agit de la place qui lui est accordée. Matisse disait : « J'ai à peindre un intérieur dont la réflexion sur la peinture est l'une des plus subtiles et des plus éclairantes qui soient. J'ai devant moi une armoire. Elle me donne une sensation de rouge bien vivant, et je pose un rouge qui me satisfait. Un rapport s'établit de ce rouge au blanc de ma toile. Que je pose à côté un vert, que je rende le parquet par un jaune, et il y aura entre ce vert et ce jaune et le blanc de la toile des rapports qui me satisferont. Mais ces différents tons se diminuent mutuellement. Il faut que les signes divers que j'emploie soient équilibrés de telle sorte qu'ils ne se détruisent pas les uns les autres." Ajoutons que la couleur suit les fluctuations de la mode et du goût. Le terme d'"harmonie colorée", emprunté à la musique pour rendre compte d'une sorte d'accord privilégié, ne correspond à aucune règle précise en dépit des efforts des artistes pour en fonder une. Il y a autant d'harmonies que d'époques, d'artistes, voire d'œuvres. Toujours d’après Matisse, les couleurs n'ont leur pouvoir et leur éloquence qu'employées à l'état pur quand leur éclat et leur pureté ne sont pas altérés, rabattus par des mélanges en opposition avec leur nature (le bleu et le jaune qui forment du vert, ne peuvent qu'être juxtaposés et non mélangés, ou bien on peut employer le vert tel que l'industrie nous le fabrique, de même que, pour l'orangé, le mélange du rouge et du jaune ne donne qu'un ton sans pureté et sans vibration). Il y a trois principaux procédés de mise en couleur et en découlent toutes les variantes possibles et imaginables :

juxtaposition mélange superposition (variante du mélange)

Chaque teinte conserve sa qualité, tandis que dans ses rapports de voisinage elle s'exacerbe ou s'affadit.

Chaque teinte perd sa qualité propre au profit d'une nouvelle qualité, commune, qui n'est en rien comparable à l'une quelconque de ses composantes.

* Les teintes sont transparentes, le médium fluide, le résultat est celui du mélange, avec toutefois une luminosité particulière, * les teintes sont opaques, et peuvent, après séchage, se recouvrir totalement ; alors on peut jouer sur le grattage, qui permet toutes sortes de nuances de l'une à l'autre couleur.

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Contrastes et couleurs Lorsque l’on joue avec les couleurs, on entre dans l’aventure des contrastes. Un contraste est l’opposition entre deux choses qui sont mises en valeur par leur juxtaposition (Larousse). La perception des contrastes est induite directement par tout notre appareillage oculaire. Ainsi, d’après Eugène Chevreuil (chimiste français), le contraste simultané établit que l’œil, en reconnaissant une couleur, exige simultanément sa complémentaire et, si elle n’est pas donnée, il la produit de lui-même. En ce qui concerne le contraste successif, il s’agit d’une compensation dans la production d’une complémentaire lorsque les yeux se sont fatigués pendant un certain temps en percevant une couleur donnée. Le contraste mixte est l’ensemble des phénomènes qui s’attachent au fait de voir simultanément plusieurs couleurs données (chacune ayant une influence sur ses voisines). Johannes Itten, artiste peintre, professeur au Bauhaus, a tiré sept effets principaux de la logique des contrastes : - contraste de la couleur en soi ► les rapports entre les couleurs pures entre elles et avec le blanc et le noir

Exercice exécuté sur damier avec les trois primaires, le noir et le blanc. Les couleurs sont disposées selon deux directions pour développer le sentiment de tension des taches colorées. Contraste chaud/froid : juxtaposition de couleurs chaudes et froides (le plus grand effet obtenu = orange-bleu-vert)

autres critères de définition des caractères des couleurs froides et

chaudes ensoleillé

transparent excitant

fin terreux proche

ombragé opaque apaisant

épais aérien

lointain

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Contraste de complémentaires : juxtaposées, elles gagnent en éclat, mélangées, elles se détruisent et font un gris-noir neutre

Composition de deux complémentaires et des modulations des tons intermédiaires Contraste simultané : production automatique de la complémentaire d’une couleur par l’œil si elle n’est pas donnée

Trois carrés gris très voisins dans un carré orangé

Contraste clair-obscur : utilisation ensemble de couleurs plus ou moins vives, plus ou moins claires ou plus ou moins sombres

Composition en clair-obscur à partir dune gamme de bleus

gris bleuté ► renforcement de l’effet

simultané

gris neutre ► modification simultanée

gris orangé ► pas de modification simultanée

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Contraste de qualité : association de couleurs vives et de couleurs ternes

Une couleur peut être rompue avec du noir ou du blanc. Une couleur pure peut être troublée par un mélange avec sa complémentaire. Une couleur saturée peut être rompue avec du gris (noir + blanc). Contraste de quantité : opposition de surfaces colorées de dimensions différentes

Le rouge est peu représenté. Le vert est très abondant et provoque, dans la perception, la mise en évidence lumineuse du rouge complémentaire. D’après Johannes Itten, Art de la couleur, Dessain et Tolra Les mots de la couleur L’infinité des possibilités de création de couleurs à partir des trois primaires, du noir et du blanc a obligatoirement donné naissance à un vocabulaire extrêmement riche. L’originalité et la subtilité des dénominations témoignent autant de la richesse de la langue que de l’art des peintres.

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les trois primaires rouge jaune bleu

Ambre rouge d’Andrinople (vif) Bordeaux (chaud, assez foncé) Brique (jaunâtre) Brique recuite (plus foncé) Brugeois (entre prune et Bordeaux) Caramel brun (rouge ambré) Cardinal Carmin, carminé (tirant sur le violet) Cassis (foncé, violacé chaleureux) Chinois (laqué brillant) Cinabre (= vermillon) Coquelicot (tonique et éclatant) Corail Cramoisi (très soutenu)

Cuisse de nymphe émue (doux mélange d’incarnat et de blanc) Cuivre rouge Ecarlate Ecrevisse (vif et chaleureux) Enfer (vif et flamboyant) Feu (orangé et flamboyant) Garance Géranium (frais et franc) de Grenade (somptueux) Grenade (rouge rosé mi-transparent mi-douceâtre) Grenat (foncé, tirant sur le marron) Griotte (clair, frais et acide) Homard (vif)

Incarnat (clair et frais) des Indes (vif) Lie-de-vin (un peu trouble et violacé) Magenta Porto (clair et chaleureux) Pourpre (foncé, tirant sur le violet) Rouge-Orange clair Rubescent (plutôt pâle) Sang (très vif) Tomate (rouge doré) Tomette (rouge brique clair) Vermeil (franc et éclatant) Vermillon Vireux (rouge violacé)…

Ambre jaune Ambré Aventurine (doré, pailleté) Banane (jaune assourdi) Beurre, beurre frais (très clair) Bilieux (équivalant à jaunâtre) Blond Blondasse (vaguement blond) Bouton d’or Canari ou serin (vif et franc) Chamois (clair) Champagne (pâle) Chaume (jaune paille un peu passé) de chrome (un peu verdâtre) Citrin, citron (net, franc, acidulé) Coing (un peu verdâtre et terne) Colza (éclatant)

Corail Curcuma (jaune safrané) Electrum (vif, argent + or ou cuivre + or) Fluorescent Flavescent Jaunasse (pas très franc) Jonquille Maïs (jaune nettement orangé) Miel Mimosa (éclatant et duveteux) Mirabelle (jaune doré) Moutarde (jaune beigeâtre) d’Oeuf (intense, tirant légèrement sur l’orangé) d’Or (très brillant) Paille (jaune-beige très pâle) Pisseux (sale)

Poussin Réséda (nettement verdâtre) Rubis (rouge rosé) Safran, safrané (un peu pâle tirant légèrement sur l’orangé) Soleil (doré éclatant) Soufre (verdâtre) Tournesol (= soleil)…

Acier (un peu gris et métallique) Aniline (violacé) Antillais ou Atoll (bleu-vert intense) Aquarelle (délavé, légèrement transparent) Ardoise (nuancé de gris) Azur, azuré (franc, bleu plein-jour) Barbeau (= bleuet) Blazer (marine clair) Canard (intense, entre bleu et vert) Céruléen (presque ciel) Ciel (= céleste) de Cobalt (très pur) Crépuscule (bleu nuit plus clair nuancé de gris) Curaçao (intense) Cyan Danube

de Delft (soutenu, tirant sur le mauve) Drapeau (moyen et vif) Electrique (intense et brutal) Glacier (pastel plus ou moins foncé) Gros-Bleu (soutenu et foncé) Horizon Indigo (intense tirant sur le violet) Jacinthe (tirant sur le mauve) Lavande (assez doux, tirant sur le mauve) Marine, matelas (foncé) Méditerranéen (intense) des Mers du Sud (bleu-vert soutenu) Myosotis (bleu doux)

Nuit (plus foncé que marine) Nocturne (plus violet que le précédent) Océan (profond nuancé de vert) Pervenche (assez éclatant) Pétrole (bleu-vert très foncé avec des reflets irisés) Poudre (tirant sur le gris) Prune (foncé, très nettement violacé) Quetsche (violacé) Roi (vif et franc) Saphir (intense et lumineux) Turquoise ( Volubilis (profond, tirant très légèrement sur le violet)…

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les non-couleurs les gris

Noir

Blanc

Peu de qualificatifs car le noir est largement utilisé dans la fabrication d’autres couleurs. Airelle (bleuté) Ambre noir ou de Jais Animal Bois de violette (tirant sur le violet) Cachou (brunâtre) de Carbone Charbon, charbonné, charbonneux Corail d’Ebène d’Encre (noir absolu) Fuligineux ou de Suie (couleur de suie) Mûre sauvage (à reflets violets) Pruneau Prunelle (bleuâtre) Réglisse (tirant sur le brun)

Albâtre (un peu laiteux) Buis (ivoire foncé) Cajou (crémeux ou sale) Candi (très pur) Candide (idem) Cassé (avec un peu de beige, de rose clair ou de jaune) Cireux (jaunâtre et sans éclat) Coco (laiteux) Coquille d’œuf (légèrement teinté de beige rosé) Crayeux (légèrement grisâtre) Crème (nettement teinté de jaune) Ecru (légèrement jaunâtre) Ficelle (jaunâtre ou beigeâtre) Filasse (blond pâle) Gorge-de-pigeon (nuancé de mauve) Immaculé (pur) Ivoire (légèrement teinté de jaune) de Lait (comme du verre opaque) Laiteux (avec des reflets bleuâtres) Lys (légèrement doré) Magnolia (nacré de rose) Marmoréen (dur et froid) de Mercure (brillant) de Neige (très pur et étincelant) Papier mâché (blafard et maladif) Porcelaine (très pur, semi-transparent) de Titane (brillant) Vanille (cassé de jaune) Vif-argent (blanc-gris éclatant)…

Acier (avec des reflets bleutés) Aluminium (extrêmement pâle) Ambre gris Anthracite (très foncé) Ardoise (foncé) Argent (pâle et brillant) Brouillard (grisâtre moyen) Caviar Cendre (bleuté très pâle) Flanelle (neutre sobre) Couleur de fumée (gris plus ou moins foncé) Métal Moineau (doux, mêlé de roux) Perle (pâle et irisé) de Plomb, plombé (foncé, tirant sur le bleu) Poussière (terreux) Princesse (clair) Souris (terne et peu voyant) Taupe (plus foncé que le précédent) Tourterelle (nuancé de rose) Trianon (pâle et discret)

noirâtre, noirci, noiraud…

blanchâtre, blanchi…

grisâtre…

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De nombreux autres termes permettent de décrire les couleurs : Le suffixe « asse », très péjoratif, renseigne sur une teinte mal définie et déplaisante (jaunasse), Le suffixe « âtre » est moins péjoratif et indique plutôt une tendance à tirer sur… (bleuâtre), les roses sont particulièrement illustrés, par exemple : framboise (rose vif frais et plus pâle que fraise), layette (très doux), bois de rose (pâle et doux, tirant sur le violet), bonbon (doucereux, acidulé mais un peu fade), chair (naturel), buvard (doux, légèrement grisâtre), camélia (pâle), caresse (doux et tendre), fuchsia (rose indien un peu foncé), groseille (tirant sur le mauve), vieux rose (un peu éteint, tirant légèrement sur le gris), shocking (vif tirant sur le mauve), praline (plus vif que bonbon), saumon (tirant légèrement sur le jaune), dragée (plus doux que bonbon), aquarelle (délavé, légèrement transparent), cyclamen (rose-mauve assez doux), fraise (appétissant), fraise écrasée (violacé), aurore (assez éclatant et nuancé de doré), Tyrien (assez soutenu, tirant légèrement sur le mauve), Mistinguett (choquant), pêche (pâle), pelure d’oignon (jaunâtre et pâle), pétale de rose (délicat)… Certaines nuances, comme les beiges (entre gris et jaune pâles) demandent aussi beaucoup d’images dans la description, par exemple : beigeasse (beige sale et trouble), ventre de biche et chevreuil (nuances de beige rosé), queue de vache (beige jaunâtre pisseux et terne), bis (entre gris et brun), chanvre (beige très pâle et éteint), mastic (beige clair discret un peu jaunâtre), kaki (beige jaunâtre), grège (entre ficelle et écru, beige et naturel)… Les mots et les choses qu’ils désignent proposent aux artistes et aux regardants de multiples possibilités de descriptions ; ainsi un sujet peut être couleur de lune (or pâle avec des reflets d’argent) ou billebarré (marqué de rayures de couleurs diverses), un coloris anémique (pâle), jaspé (avec des marbrures), terreux, velouté, moiré, satiné ou translucide, un blanc nacré, livide, neigeux, blafard (malsain) ou opalescent, une teinte assourdie (moins éclatante), fade, fanée, acidulée (légèrement acide) ou acide (agressive dans sa fraîcheur piquante), fumée, blême (très pâle) ou cacateuse (trouble, brouillée par une vague nuance caca), une surface peut être chinée (mouchetée), chamarrée (avec de riches couleurs), cendrée (avec des reflets gris cendre), brillante, chaude, froide, bicolore ou plus, bariolée ou bigarrée (avec des juxtapositions de couleurs vives), arc-en-ciel (de plusieurs couleurs)... Tant de diversité à voir et dont il faut rendre compte !

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La couleur des mots Les couleurs ont besoin des mots pour nous offrir des référents, elle est aussi nécessaire à notre langage écrit et parlé pour provoquer des images très explicites. Les couleurs ont eu et auront toujours des valeurs symboliques mais, plus prosaïquement, elles nous servent aussi pour qualifier des mots, des expressions et des concepts. Ainsi, dit-on…

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Bleu

rouge

jaune

vert

violet

orangé

se faire un bleu un bleu (nouveau) un bleu de travail les bleus (équipe de France) le Grand Bleu un bas-bleu (femme savante mais pédante) un col bleu (matelot) un cordon bleu un casque bleu (soldat ONU) une colère bleue l’heure bleue (moment avant l’aube) une peur bleue la planète bleue (la Terre) un steak bleu (grillé mais cru à l’intérieur) la zone bleue avoir du sang bleu nager dans le bleu (rêver ou être incertain) passer au bleu

du gros rouge (qui tache) une alerte rouge un carton rouge le fil rouge (fil conducteur, pour un jeu par exemple) un feu rouge un peau-rouge la planète rouge (Mars) le téléphone rouge (lien téléphonique entre chefs d’état) être dans le rouge (à découvert) être sur liste rouge avoir les mains rouges (être coupable d’un crime) passer au rouge tirer à boulets rouges (attaquer verbalement avec dureté) voir rouge devenir rouge comme un coq

un jaune (traître ou briseur de grève) une petit jaune de la jaune (eau de vie vieillie) l’étoile jaune (signe distinctif imposé aux juifs par les nazis) la fièvre jaune les pages jaunes un ventre jaune (surnom donné aux Bressans, mangeurs de maïs supposés être riches et cher leur or) être jaune de jalousie rire jaune

un vert (écologiste) le billet vert (dollar) un habit vert (académicien) une langue un peu verte (langage argotique) les petits hommes verts un vin vert (trop jeune) avoir la main verte avoir le nombril vert (être jeune, immature) être vert (stupéfait) être vert de peur ou de rage se mettre au vert (se cacher ou se reposer) manger son blé vert (dépenser sans prévoyance) des vertes et des pas mûres (des choses choquantes) il est encore vert (vigoureux pour un

voir des anges violets (avoir des visions) un conte violet (histoire abracadabrante) faire feu violet (s’emballer passagèrement pour quelque chose)

passer à l’orange (griller un feu ou passer de justesse)

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gris rose (oublier) être fleur-bleue n’y voir que du bleu un menton bleu (pas rasé de frais)

(souvent sous la colère) avoir le rouge au front = devenir rouge comme une tomate, une écrevisse ou une pivoine = être rouge de honte

vieillard) une volée de bois vert (une correction) donner le feu vert une verte (sévère) réprimande chou vert et vert chou (bonnet blanc et blanc bonnet)

du gris (tabac ordinaire) un petit gris (champignon ou escargot ou écureuil) Gris de Lille (fromage) une éminence grise (conseiller restant dans l’ombre) la matière grise (cerveau) une vie grise (terne, ennuyeuse) de l’or gris (alliage de bijouterie) être gris (ivre) il fait gris (temps couvert) faire grise mine la nuit, tous les chats sont gris (on peut se tromper)

ce n’est pas tout rose envoyer quelqu’un sur les roses voir tout en rose la période rose bonbon (période Barbie) voir des éléphants roses

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noir blanc noir & blanc marron couleurs un avocat marron (malhonnête) un ouvrage marron (imprimé dans la clandestinité) envoyer un marron être marron (s’être fait avoir) faire quelqu’un marron (duper)

brun

le noir (nuit) un petit noir (café) la boîte noire une caisse noire (comptabilité suspecte) une chambre noire une colère noire un œil au beurre noir un film noir l’humour noir une gueule noire (mineur) la magie noire une marée noire l’or noir ( pétrole) une série noire un trou noir (amnésie ou astre s’étant effondré sur lui-même) un tableau noir ( souvent vert !) avoir des idées noires être la bête noire de quelqu’un être noir (ivre) être d’humeur noire être sur la liste noire

un blanc (silence) un petit blanc (verre de vin blanc) une blanche (bière claire) une arme blanche une balle à blanc un chèque en blanc un blanc-bec ( jeune homme souvent prétentieux) être blanc comme un cachet d’aspirine (pas bronzé) être blanc comme un linge (livide de peur) être blanc comme neige (innocent) les blouses blanches (médecine) un bulletin blanc/voter blanc un col blanc (employé de bureau) une colère blanche (forte) un examen blanc (test) la magie blanche

écrire noir sur blanc passer du blanc au noir (changer d’avis) dire blanc et noir (ne pas prendre parti) dire tantôt blanc tantôt noir (dire tout et son contraire) film en noir et blanc l’un dit blanc, l’autre dit noir (désaccord)

une brune (bière foncée) une langue brune (flatteur obséquieux) les chemises brunes (sections d’assaut nazis) à la brune (au début de la nuit) être brun au jeu (chanceux) aller de la blonde à la brune (être inconstant en amour) il fait brun (presque nuit)

une couleur (marque de jeu de carte = trèfle, pique, cœur ou carreau ou opinion politique) couleur locale (caractéristique d’un endroit) annoncer la couleur (ses intentions) changer de couleur (pâlir ou rougir sous le coup d’une émotion) en faire voir de toutes les couleurs haut en couleurs (très original) hisser les couleurs (le drapeau) prendre des couleurs

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blanc (bis) chocolat de quelqu’un noir comme dans un four noir de monde être dans le noir le plus complet broyer du noir voir tout en noir peindre tout en noir (noircir une situation)

le fer-blanc un mariage blanc une nuit blanche un merle blanc (chose rare) une oie blanche (ingénue) l’or blanc (neige + tourisme ou platine) une page blanche les pages blanches une peur blanche (très forte) un Russe blanc (tsariste) une voix blanche (sans timbre) une sauce blanche avoir ou donner carte blanche bonnet blanc et blanc bonnet (2 x la même chose) chauffé à blanc faire chou blanc (rater) saigner à blanc

une histoire cousue de fil blanc manger en premier son pain blanc (commencer par le plus facile) regarder dans le blanc des yeux connu comme le loup blanc de but en blanc (à l’improviste) se faire des cheveux blancs montrer patte blanche

être chocolat (stupéfait de s’être fait duper) faire le chocolat (le crédule, le naïf) être chocolat (avoir raté)

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A) Propositions générales Certaines sont développées plus en détail dans les propositions ciblées. A propos de la juxtaposition des couleurs 1-1) Appliquons la couleur : - juxtaposer des touches de couleur sans qu’elles se touchent (un pinceau par couleur, de même taille : effet de réseau uniforme, mosaïque ; une brosse par couleur, de tailles différentes : carrelage irrégulier, effet rythmé), - couvrir, à deux, une feuille : s'arrêter chaque fois que l'on rencontre l'autre. 1-2) Organisons les couleurs : - suivre à la lettre une consigne orale (serrer les touches, les parsemer, les mettre côte à côte) ou visuelle (schéma linéaire tracé à l'avance, forme déjà placée à entourer, à suivre, etc.), - déterminer un nombre de couleurs et décider des positions réciproques (aligner, alterner...). - imposer des limites : cerne noir ultérieur, réserve blanche. ►Constituer un glacis au scotch qui, par arrachage (y compris s'il abîme la surface), constituera des effets-surprises. ►Jouer à travers un grillage de plastique, à déposer de la couleur "sans déborder" dans les mailles (le grillage retiré, apparaît un réseau régulier de couleurs chatoyantes qui pourra être réutilisé comme fond pour un dessin figuratif ancré plus ou moins sur le réseau, comme support à entrelacer avec un autre, ou comme partie d'un ensemble figuratif ou abstrait). - appliquer une consigne d'ordre gestuel, toutes consignes sur la qualité de la trace ou son trajet sont valables, complétées de celles qui concernent l'application : ►Faire voyager l'outil sans que jamais les couleurs se recouvrent ou se rencontrent. ►Juxtaposer les traces de deux outils différents, avec une, deux, plus de deux couleurs. ►Faire cheminer une trace noire sur la totalité de la feuille, remplir ensuite les vides de couleur, etc.

P R O P O S I T I O N S

D E

P I S T E S

P E D A G O G I Q U E S

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1-3) Transposons les couleurs : - reproduire un ensemble déjà constitué (œuvre antérieure, travail d'autrui...) en en transformant systématiquement les teintes (même image, même sensation présentée différemment) 1-4) S’exprimer avec les couleurs : - utiliser une couleur ou une gamme colorée pour traduire une expression (montrer que l'on est content, que l'on a froid...), - symboliser (une saison, de l'eau, du feu...), - créer de la matière (recherche d'ordre sensoriel): tenter de donner une couleur à une texture sentie par le toucher, à un son, à une odeur). A propos de la superposition des couleurs Ces recherches provoquent naturellement la découverte du mélange, outre les effets propres à la superposition, que l'on pose l'une sur l'autre deux teintes transparentes, ou une transparente sur une opaque, ou deux couleurs opaques. 2-1) Travail avec outil Pour que deux teintes superposées réagissent en transparence, il faut tout d'abord que la couche inférieure ne se dissolve pas sous l'action de la seconde. Utiliser donc des couleurs tenaces et surtout laisser suffisamment sécher. Ne pas détremper, non plus, la surcouche. A partir de là, tout est permis, tout est possible, et particulièrement avec le rouleau, qui peut être imbibé plus ou moins, appuyé fortement ou non, courir sur une surface déjà peinte, sur ses propres traces : peu imprégné, d'une matière liquide, et pressé, il laisse visibles en totalité les parties sous-jacentes, porteur de matière épaisse, mais inégale, il couvre de façon irrégulière, juxtapose donc, cache, laisse transparaître en même temps, à peine appuyé, il dépose un pointillé, une matière grenue qui ne masque qu'à demi la sous-couche, enfin, il peut aussi lui-même se charger de plusieurs teintes à la fois, qui, déposées ensemble, se juxtaposeront d'abord pour se mêler ensuite. 2-2) Grattages et arrachages Le travail simple: - des matériaux collés sur la sous-couche arrachés ensuite, - des couches successives de papier, chaque fois imprégnées de couleur, sont, après séchage, "épluchées", délitées pour faire réapparaître telle ou telle teinte. Le travail avec cache : - organisé avec le rouleau, ou, plus efficacement encore, avec la pulvérisation (bombes, pulvérisateur à bouche, bruine) permet, par simple placement de la forme sur le fond, de la mettre en réserve et donc, par passages successifs, d'obtenir toutes les nuances. A propos du mélange de couleurs L'enfant a à sa disposition de nombreux mélanges tout prêts(Quand tel est le cas, le maître doit bien savoir qu'il s'est d'abord fait plaisir, ce qui n'est pas interdit) et qu'il a tout simplement donné en exemple son propre choix, ce qui n'a rien de condamnable) et pourtant il est essentiel d’apprendre à les reconnaître, à les

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différencier et donc à les fabriquer. Il suffit de proposer aux enfants les trois couleurs primaires et d'en suggérer le mélange, deux par deux, puis avec du blanc, puis de chercher « le plus de mélanges possibles". Il faut, dès que l’élève en est capable (et ne sous-estimons pas ses capacités), l’inciter à préparer lui-même ses couleurs, l'amener à associer les teintes les unes aux autres par dosage de quantités (que l'on peut échantillonner en conservant des "recettes" : 2 cuillerées de bleu outremer + 1 cuillerée de jaune citron = vert foncé, par exemple), le conduire peu à peu à être capable de confectionner une infinité de nuances, de les reconnaître, de les nommer, d'en connaître (et reconnaître) la composition. Maîtrisant alors un certain "langage", il pourra l'utiliser de façon consciente et réfléchie pour, par exemple, exprimer (une réalité, un sentiment), représenter, dire, suggérer. Les gammes fabriquées ne seront ni parachutées, ni vides de sens, mais concertées et adaptées. B) Propositions ciblées Vivre une couleur Pour aborder une couleur (voire plusieurs), il est intéressant et assez courant de développer une thématique à partir de celle-ci, les pistes se révélant au fur et à mesure.

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bleu rouge jaune vert orangé violet

donner à voir (par exemple)

- un sirop - un monochrome - une étoffe - le ciel - la mer

- une tomate - une cerise - un monochrome - un sirop - un feu rouge

- un citron - un ananas - une banane - du sable - un monochrome - un jaune d’œuf

- de l’herbe - un raisin - une laitue - un monochrome - de la mousse - la mer

- une orange - un abricot - un feu - un coucher de soleil - un monochrome

- un raisin - une prune - une étoffe - un monochrome - un sirop

chercher, collecter pour

montrer

des objets, des images, des choses qui sont bleus

des objets, des images, des choses qui sont rouges

des objets, des images, des choses qui sont jaunes

des objets, des images, des choses qui sont verts

des objets, des images, des choses qui sont orangés

des objets, des images, des choses qui sont violets

assembler, associer, entasser,

juxtaposer, jouer

en 2 ou 3 dimensions avec ces mêmes éléments pour réaliser une composition sur une seule couleur

nuancer la couleur en

travaillant le choix du monochrome avec des couleurs d’origines variées (gouache, acrylique, encre, pastel…) sur des supports de natures variées (tapisseries, tissus, Canson, bois, carton…) en utilisant aussi les effets de matières (fourrure synthétique, cuir, tissu, plastique, papier de bonbon, papier cristal, verre…)

observer le jeu de la couleur

avec une œuvre dans laquelle elle domine

se référer par exemple aux œuvres citées dans le tout petit précis de la couleur

recenser les expressions

liées

- être bleu de froid…

- voir rouge…

- rire jaune… - être vert de rage…

- passer à l’orange…

- faire feu violet…

voir le monde

en…

… grâce à des lunettes colorées et le dessiner pourquoi la mer serait-elle verte ou bleue ? pourquoi l’herbe serait-elle verte ? pourquoi le soleil serait-il jaune ?

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Pour le noir, le gris, le marron, le blanc, ce n’est guère plus difficile. Noir : charbon, goudron, cachou, obscurité totale… Gris : cendre, souris, ciel orageux… Marron : chocolat, noix, noisette, bois… Blanc : neige, glace à la vanille, lait, nuage, coquille d’œuf… Une exposition « dans l’ambiance » de la couleur élue pourrait être organisée, jouant sur la teinte des cartons d’invitation au buffet en passant par la décoration de la pièce et la tenue des exposants. Couleurs et hasard Changer les couleurs du monde est un pari intéressant. Pourquoi ne pas s’en remettre au hasard ? Chaque enfant pourrait se lancer dans l’exécution d’un dessin figuratif au crayon à papier. Une fois celui-ci terminé, il ne reste qu’à le « colorier ». La technique peut être laissée au choix de l’élève, l’important étant d’utiliser un dé et d’attribuer à chaque nombre de points une couleur. Chaque fois que l’élève doit peindre un élément, il lance le dé. Il s’agit donc d’une sorte d’anti-coloriage ; le paysage, la nature morte, le portrait ne sera pas paré des couleurs habituelles. Par exemple : ● bleu ●●●● vert ●● rouge ●●●●● violet ●●● jaune ●●●●●● orangé Une variante pourrait être de donner un avantage ou un désavantage à une couleur, à une valeur… Des exemples : de 1 à 5 = couleurs chaudes, 6 = bleu, 1 = bleu, 3 = jaune, 5 = rouge, 2 + 4 + 6 = noir… Créer des couleurs par le mouvement Sans essayer de recréer le disque de Newton et de dériver plutôt en direction de l’optique et des disciplines scientifiques, il est amusant de créer des toupies et des disques coloriés pour créer par le mouvement d’autres couleurs. Se projeter dans l’avenir en supposant un effet avant de vérifier par l’action est aussi une démarche découverte. Il est intéressant de concevoir cette activité comme une recherche créative et non expérimentale ; chaque élève concevra ses disques selon quelques règles bien simples : le disque est l’espace mis à disposition, l’acte plastique ne débouche pas sur une expression figurative, pratiquement toutes les techniques peuvent être expérimentées.

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Couleurs et transparences Sur un support blanc, réaliser une composition, abstraite ou figurative, en ayant recours à des matériaux transparents, opaques, translucides mais en tout cas colorés (papiers de bonbon, papier cristal, rhodoïd…). Veiller à utiliser des colles transparentes mais surtout à se donner du temps pour manipuler, essayer, combiner les superpositions. Jouer avec la monochromie Choisir un fonctionnement : une même couleur pour tout le groupe, ou plusieurs pôles avec chacun une couleur précise (3 pôles = 3 primaires, 6 pôles = primaires + secondaires, 2 pôles = noir et blanc…) Proposer des supports de tailles variées ( de la fiche taille Bristol au A3) plutôt rectangulaires et mettre à disposition des outils habituels (pinceaux, brosses, rouleaux, éponges…) et inhabituels (raclettes, plumeaux à radiateurs, blaireaux, brosses à dent, peignes…). Utiliser des gouaches peu diluées ou des peintures fluides acryliques. Proposer de couvrir entièrement le support en posant, faisant glisser, étalant, repassant plusieurs fois… Peindre avec une seule couleur Mettre à la disposition de chacun un support, un seul pinceau souple ou pinceau-brosse, un pot de gouache d’une couleur choisie (par l’élève, par l’enseignant pour tous…) et des touches de blanc et de noir sur une coupelle. Indiquer une direction d’expérimentation ou laisser libre cour à l’expression de chacun. Lors du bilan, bien expliciter les actions qui ont modifié la couleur de base (ajouter, mélanger, prélever…) pour obtenir des dégradés. Mélanges fortuits et émergence de formes Lors de la première phase : Remplir des flacons ménagers munis de pulvérisateurs d’encres plus ou moins diluées dans de l’eau. Mettre à disposition des poires, des compte-gouttes, des pinceaux souples et épais et des gobelets d’encres diluées. Sur un support vertical et/ou horizontal et/ou incliné, voire mobile, projeter les liquides colorés à l’aide des outils proposés. Distribuer éventuellement des pailles pour souffler dans le but de faire évoluer les traces et de créer des teintes nouvelles. Lors de la seconde phase : Observer chaque réalisation pour tenter d’isoler une ou plusieurs combinaisons colorées (figuratives ou non). A l’aide de feutres noirs de diverses tailles et pointes, révéler les formes en redessinant sur le support mis en couleur.

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Changer la couleur d’une œuvre existante Après avoir effectué une recherche sur les dominantes parmi les œuvres de plusieurs artistes, en sélectionner une et soit la reproduire à grands traits (calque ou main levée), soit la transformer en esquisse ou crayonnage à l’aide d’un logiciel de traitement de l’image (au pire une photocopie en noir et blanc ou une conversion en niveaux de gris). Choisir une option de couleur et la décliner ou jouer sur les complémentaires ou sur les oppositions Par exemple : Jouer sur la forme et le fond Une confrontation de deux complémentaires permet de détacher très nettement le sujet du fond. De nombreux artistes très variés ont exploité cette stratégie avec bonheur. Par exemple : Paul Gauguin pour « Femme au mango » (grand vêtement violet sur fond jaune), Vincent van Gogh pour « L’Eglise d’Auvert-sur-Oise, vue du chevet » (morceau de toit orangé sur ciel bleu profond), ou encore Claude Monet pour « Les Coquelicots, environs d’Argenteuil » (taches rouges disséminées sur herbe verte)…

couleur dominante de la forme

couleur du fond

rouge vert bleu orangé jaune violet

Un duo de complémentaires est composé d’une primaire et d’une secondaire violet jaune

La nuit étoilée de Van Gogh, si l’on oublie sa palette de bleus, pourrait très bien se parer de couleurs fauves et de bruns mordorés ou se décliner en rouges divers, du carmin au magenta, du flamboyant au Bordeaux.

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orangé bleu pour laquelle elle n’entre pas dans la composition.

vert rouge

S’essayer à cette stratégie et comparer les rendus. C) Propositions à partir d’une sélection d’œuvres du musée Goya Annexes : Quelques albums intéressants sur les couleurs : Editions Autrement – Petite collection de peinture jaunes, Agnès Rosenstiehl bleus, …………………… verts, ……………………. rouges, …………………. Réunion des Musées Nationaux Le musée des couleurs, Caroline Desnoëttes The Museum of Modern Art of New York/Albin Michel Jeunesse Couleurs, Philip Yenawine Centre Pompidou – Zigzart Bleu zinzolin et autres bleus, Elizabeth Amzallag-Augé Rouge alizarine et autres rouges, ……………………… Henry Thiel Conseiller Pédagogique Arts Visuels

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Les couleurs véhiculent des codes, des tabous…auxquels nous obéissons sans le savoir ; elles possèdent des sens variés qui influent sur notre environnement, nos comportements, notre langage et notre imaginaire. Proposition 1 : Rechercher dans les expressions, les institutions, les objets les différents sens que peuvent avoir les couleurs : rouge, bleu, vert, noir, blanc, jaune, rose… Voici une liste incomplète qui aidera l’enseignant : ° Expressions colorées : Une peur bleue, rire jaune, rouge de colère, voir rouge, nuit blanche, fruit vert, voir la vie en rose, histoire à l’eau de rose, sang bleu, avoir un blanc, donner le feu vert pour … ° Politique et symbolique de la couleur: Bleu pour l’Europe, l’ONU, l’UNESCO, les républicains Rouge : drapeaux des états communistes ; la Croix Rouge ; le petit livre rouge de Mao Vert : parti écologique Jaune : les anciens services de la Poste Noir : le drapeau des pirates et des anarchistes Blanc : la monarchie ° Objet et chromo-symbolisme : Le téléphone rouge ; les cartons : rouge, jaune ; les feux : rouge, orange et vert ; les panneaux de signalisation et les fonds de couleur : bleu, rouge et blanc ; une balle à blanc ; un chèque en blanc ; une voix blanche (sans timbre) ; une page blanche ; la croix verte de la pharmacie (parfois avec du bleu) ; le numéro vert ; l’étoile jaune ; le maillot jaune ; les tables de jeux et les tapis de jeux en vert, de plus en plus bleu en ce qui concerne les tables de ping-pong ; les pièces du jeu d’échec du rouge et noir au blanc et noir depuis la renaissance. ° Titres et couleurs : Le lys rouge, le mystère de la chambre jaune, blanche-neige, le petit chaperon rouge, le grand bleu, la tulipe noire, le rouge et le noir, Barbe-bleue, la rose pourpre du Caire, un taxi mauve, le nain jaune, l’ange bleu, … Une pomme verte, Une pomme rouge, Une pomme d’or, C’est toi qui es dehors ! Comptine Proposition 2 : Religion et symbolique de la couleur « Les textes bibliques anciens en hébreu, en araméen et en grec utilisent peu de mots pour les couleurs : ce seront les traductions en latin puis en langues modernes qui les ajouteront. Là où l’hébreu dit « riche », le latin traduira « rouge ». Pour « sale », il dira « gris » ou « noir » ; « éclatant » deviendra « pourpre »…Mais, à l’exception du saphir, pierre préférée des peuples de la Bible, il y a peu de place pour le bleu. Cette situation perdure au haut Moyen Age : les couleurs liturgiques, par exemple, qui se forment à l’époque carolingienne, l’ignorent (elles se constituent autour du blanc, du rouge, du noir et du vert). Et puis soudain au XII° et XIII° siècle, tout change, le bleu devient l’une des couleurs les plus importantes pour le clergé car le Dieu des chrétiens devient le dieu de lumière. Et la lumière devient bleue… ! Pour la première fois en occident les ciels sont peints en bleu ! Comme la vierge habite le ciel, elle se couvre d’un manteau bleu à partir du

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XII°, ou d’une robe bleue. La vierge devient le pri ncipal agent de promotion du bleu. » Propos de l’historien Michel Pastoureau,( « Le petit livre des couleurs », page 18). Cette couleur bleue est devenue un enjeu religieux car il faut savoir qu’en 1130, quand l’abbé Suger fait reconstruire l’église abbatiale de St Denis, il veut mettre partout des couleurs pour dissiper les ténèbres, et notamment du bleu. On utilisera pour les vitraux un produit fort cher, le cafre (que l’on appellera plus tard le bleu de cobalt). De St Denis, ce bleu va se diffuser au Mans, puis à Vendôme et à Chartres, où il deviendra le célèbre bleu de Chartres. Ce bleu divin stimule l’économie et la culture du pastel, cette plante mi-herbe et mi-arbuste que l’on utilisait dans les villages comme colorant artisanal, explose. Les coques qui contiennent ce pigment baptiseront les régions de Picardie, de Toulouse…de pays de cocagne. En 1720, un pharmacien de Berlin invente par accident le bleu de Prusse, qui va permettre aux peintres et aux teinturiers de diversifier la gamme des nuances foncées. On importe massivement de l’indigo des Antilles et d’Amérique centrale, dont le plus fort que celui du pastel et le prix de revient plus faible, car fabriqué par les esclaves ! Incitation : Rechercher dans les œuvres sélectionnées du Musée Goya, comment l’artiste a utilisé cette couleur ? (vêtement : appartenant à qui ? / Ciel / ….) Remarque : C’est en 1850, à San Francisco que le jeans est inventé par un tailleur juif du nom de Lewi-Strauss. Le premier bleu de travail idéal par sa toile teinte en indigo (teinture facile à réaliser car même à froid la couleur pénètre bien dans les fibres). Il faudra attendre les années 1930, pour que les Etats-Unis proposent ce vêtement en tant que vêtement de loisir, qui deviendra plus tard le vêtement de la rébellion ! Mais cela ne durera pas car de nos jours, il est porté par différentes générations et on peut même dire qu’il forme une masse uniforme ! « La couleur est une nécessité vitale. C’est une matière première indispensable à la vie, comme l’eau et le feu. On ne peut concevoir l’existence des hommes sans une ambiance colorée. Les plantes, les animaux se colorent naturellement ; l’homme s’habille en couleurs ». Propos de l’artiste Fernand Léger. A la queue leu-leu, Mon petit chat est bleu. S’il est bleu, Tant mieux ; S’il est gris, Tant pis ! Comptine Proposition 3 : (Français/Arts plastiques) Travail d’écriture/ Le récit narratif En vous inspirant d’un extrait d’une lettre de Van Gogh adressée à Gauguin, qui lui décrit sa chambre :

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« (…) les murs lilas pâle, le sol d’un rouge rompu et fané, les chaises et le lit jaune de chrome, les oreillers et le drap citron vert très pâle, la couverture rouge sang, la table de toilette orangée, la cuvette bleue, la fenêtre verte ». Incitation : Choisir un tableau et par écrit retraduisez les formes et les couleurs qui le composent. Donner ce texte à un élève, et celui-ci proposera une traduction plastique (techniques mixtes : collage, peinture, encres…). Proposition 4 :( Musique/ Arts plastiques) Incitations : « Les couleurs sont la musique des yeux » Delacroix. « La couleur est la touche. L’œil est le marteau. L’âme est le piano aux cordes nombreuses. » Kandinsky « L’artiste est la main qui, par l’usage convenable de telle ou telle touche, met l’âme humaine en vibration ». Kandisky Traduire par le choix de musiques soit la description écrite, soit directement le tableau lui même. Proposition 5 : (Sciences physiques/ Arts plastiques) Incitation : Couleurs lumières et couleurs matières. Par l’expérimentation, faire découvrir aux élèves que les couleurs primaires en peinture ne sont pas les mêmes pour les couleurs lumières. ° Réalisation d’un cercle chromatique en commençan t par un triangle équilatéral partagé en trois partie (les trois couleurs primaires : le bleu cyan, le rouge magenta et le jaune primaire) . Tracer les médiatrices de ce triangle, celles-ci se croisent en un point qui détermine le centre du cercle circonscrit. Tracer ce cercle tel que le rayon soit égal aux côtés du triangle, puis tracer un deuxième cercle de même centre mais de rayon plus important. A l’intérieur de cette bande ainsi délimitée, mélanger les primaires deux par deux ; vous obtenez des secondaires : verts, oranges, violets. On remarque que le côté vert fait face au triangle rouge ; le violet au jaune et le orange au bleu. Il existe dés lors trois couleurs mères et trois couleurs secondaires, ou six couleurs principales voisines, ou encore trois fois deux couleurs amies (ou couples de complémentaires). Avec l’ensemble de cette base, plus le blanc et le noir, on peut trouver une infinité de tons. ° Tout change quand la couleur n’est plus matière, mais de la lumière ! Pour obtenir une série de couleurs de base, projetez, sur un fond blanc, de la lumière rouge, verte, bleue : *lumière rouge projetée sur un fond vert donne du jaune *lumière verte ‘ ‘ ‘ bleu ‘ ‘ bleu-vert (cyan) *lumière bleu ‘ ‘ rouge ‘ violet (magenta) Effets des contrastes : « L’effet laissé sur la rétine par un rouge brusquement éloigné après une longue exposition n’est pas rouge, mais vert. Et si l’œil s’expose longuement au vert, l’effet laissé dans les mêmes conditions sera l’émergence soudaine du rouge. La même sorcellerie préside à l’alternance du jaune et du violet, du bleu et de l’orangé. Chacun

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peut constater empiriquement de cette manière la loi des complémentaires et l’existence des trois couples de couleurs ». Klee Le prisme et la décomposition de la lumière (cf le livre sur la couleur de Chevreuil) Prolongements dans le champ contemporain : °Couleurs et néons (installations) Art minimal/Par exemple: Dan Flavin « The nominal three » Luminaires fluorescents avec lampes à lumière diurne, 1964, 244cm, Guggenheim, New York…. °Couleurs et reflets (installations) Art minimal/Comme: Robert Smithson « Mirage no.1 » Verre réfléchissant, 9 parties, 92,2x648, 7cm en tout, Los Angeles, Museum of Comtempory Art…. Bleu, blanc, rouge, La Croix-rouge ! Bleu, blanc, vert La croix d’enfer. Comptine Proposition 6 : « Il y a le noir antique et le noir frais, le noir brillant et le noir mat, le noir à la lumière et le noir dans l’ombre. Pour le noir antique il faut y mêler du rouge ; pour le noir frais, c’est du bleu ; pour le noir mat, c’est du blanc ; pour le noir brillant, c’est l’adjonction de colle ; pour le noir dans la lumière, il faut le refléter de gris » Hokusaï Incitation : En vous inspirant de cette citation, inventez différents aspects d’une couleur de votre choix (notez les indications) . Références artistiques : Bleu de Yves Klein, Blanc de Ryman, Noir de Soulage. Proposition 7 : l’étendue comme qualité nouvelle de la couleur selon l’équation Quantité/Qualité : « un mètre carré de bleu, c’est plus bleu qu’un centimètre carré » Klein Dans le cadre du projet personnel de l’élève de troisième en arts plastiques, on peut lui demander d ‘effectuer des recherches dans le champ artistique et de proposer un projet plastique qui répond à la citation de Klein. La sensation colorée dépend aussi de la manière dont celle-ci est appliquée. Cela peut permettre à l’enseignant d’aborder des notions : glacis, jus coloré, transparence, empâtement, aplat, plage, giclure, dégoulinure… Références : Klein, Ryman, Soulages, Pollock… Proposition 8 : La grisaille Peinture monochrome en camaïeu de gris donnant l’illusion de relief sculpté. Mise à la mode au XIV° siècle, par les sculpteurs, qui cherchaient dans leurs dessins

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préparatoires, à rendre l’impression de relief au moyen du clair-obscur très nuancé, jouant sur une seule couleur, gris jaunâtre, qui se rapproche le plus de la pierre (Définition du Larousse, dictionnaire des termes techniques). Exercice plastique : photocopier/ décalquer une partie (ou la totalité) de la grisaille et demander aux élèves de choisir une couleur parmi les trois primaires et les trois secondaires. Ils devront par expérimentation, rechercher différents tons de la couleur choisie, pour peindre la composition. Références aux monochromies de Klein, Ryman, Soulages… Bibliographie : Du spirituel dans l’art, et dans la peinture en particulier, Kandinsky, Folio-essais/1989. Tableaux choisis, l’art moderne, éditions Scala, Paris, 1991 Tableaux choisis, l’art contemporain, éditions Scala, Paris, 1994 Art minimal, Daniel Marzona, éditions Taschen Klein, Hannah Weitemeier, éditions Taschen Rothko, Jacob Baal-Teshuva, éditions Taschen Matisse la tristesse du roi, Elizabeth Amzallag-Augé, l’art en jeu, Centre Pompidou TDC N° éditions Scéren 660 De Cézanne à Matisse 700 Cézanne 760 L’ombre en peinture 799 Les artistes de la Méditerranée 807 L’art abstrait, l’aventure de Kandinsky

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Renseignements et réservations

Musée Goya - Hôtel de Ville - B.P. 10406 - 81108 CASTRES Cedex

Contacts : Valérie Aébi, responsable du service des publics I tel : 05 63 71 59 87 I v.aebi@ville-

castres.fr Jean-Baptiste Alba I tel : 05 63 71 59 23 I [email protected]

Education nationale I Chargée de mission par la Délégation Académique à l'Action Culturelle : Thérèse Urroz /05 63 74 54 73 I [email protected]

Informations pratiques

Accueil des groupes scolaires Du mardi au vendredi de 9h00 à 12h00 et de 14h00 à 17h00 de septembre à mai

(Jusqu’à 18h pour les autres mois)