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Le Soir Samedi 24 et dimanche 25 juin 2017
A u-delà du flot ininterrompu de mauvaisesnouvelles vivent de nombreuses histoires
d’espoir. Des récits de solutions concrètes. Destémoignages d’acteurs du changement, quiprennent à bras-le-corps certains des pro-blèmes les plus urgents dans le monde pouraméliorer, grâce à leurs idées innovantes, lesort de millions de personnes. Des histoires quiméritent d’être lues et partagées pour nonseulement rééquilibrer notre vision du monde,mais également inciter à reproduire les solu-tions existantes ailleurs sur la planète.Les médias peuvent jouer un rôle crucial enracontant ces histoires individuelles qui tissentun mouvement mondial. C’est pourquoi Spark-news invite depuis cinq ans des journaux àparticiper à l’Impact Journalism Day et à s’em-parer du pouvoir du journalisme collaboratifpour faire émerger ces histoires de change-ment. Chaque année, ces journaux explorenttoute une palette de solutions novatrices et lespublient le même jour dans un supplémentspécial. En cumulant les suppléments papierset les sections digitales, ils touchent quelque
120 millions de personnes. Conscientes del’impact de ces articles, plusieurs publicationsintègrent désormais à leur couverture mondialequotidienne des histoires riches en solutions.Pour la cinquième édition de l’Impact Journa-lism Day, les médias sont rejoints par des orga-nisations qui pensent, elles aussi, que ceshistoires peuvent amorcer le changement.Parmi elles, l’Organisation des Nations unies(ONU) ainsi que One Young World, qui réunitchaque année 1.500 jeunes leaders du domainesocial et du monde de l’entreprise impliquésdans des initiatives d’innovation positive. Unevaste communauté de personnalités et decitoyens ordinaires ont également joint leurvoix et signé un manifeste pour affirmer quechacun – gouvernements, secteur privé, sociétécivile, ONG et anonymes – peut intervenir pourfaçonner un avenir meilleur. Vous aussi pouvezprendre part à cet élan de transformation.Découvrez ceux qui ont réussi à apporter desréponses à des enjeux tels que l’accès à lasanté ou à l’eau, la qualité de l’éducation, desconditions de travail décentes et l’énergie
propre. Chacun illustre concrètement le pouvoird’initiatives individuelles ou collectives contri-buant à se rapprocher des nouveaux Objectifsde développement durable de l’ONU : éradiquerla pauvreté, protéger la planète et garantirprospérité et santé pour tous.Nous espérons que vous aimerez découvrir ceshistoires… et deviendrez vous-même une partiede la solution. Signez le manifeste (http://
sharestoriesofchange.org) et partagez lesrécits qui vous impressionnent le plus sur Face-book et Twitter (#ImpactJournalism, #StoryOf-Change, @Sparknews, @YourNewspaper).
CHRISTIAN DE BOISREDON, FONDATEUR DE SPARKNEWS ET
ASHOKA FELLOW& TOUTE L’ÉQUIPE DE SPARKNEWS
AUJOURD’HUI, 50 JOURNAUX UNISSENT LEURS FORCES POUR METTRE EN AVANT DES HISTOIRES QUI CHANGENT LE MONDE
Retrouvez les articles de l’Impact Journalism Day sur notre site internet plus.lesoir.be
60 histoires qui changent le monde
Le « Solarpak » permet aux enfants qui vivent dans des villages privés d’électricité d’étudier après le coucher du soleil. © MASHAL SHOOTING
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grâce à lui que les enfants ont accèsau Palais de justice un samedi ma-tin. Le procureur général expliqueaux enfants le cas qu’ils auront àdélibérer : « Cinq jeunes, dont unmajeur – qui sera traité comme unadulte – ont racketté un adolescentde 14 ans. Plus grave : lors d’un desrackets, ils ont menacé la victimeavec un couteau. La victime a eutellement peur qu’elle ne voulaitplus aller à l’école. »
1.000 jeunes d’ici 2020Au départ de cette initiative, une
femme : Sofie Foets. Elle travaillaitpour le cabinet d’un député euro-péen quand elle a entendu parlerde l’association hollandaise « IMCWeekenschool » : « J’ai tout desuite pensé : mais c’est ça qu’il fautpour Bruxelles ! » Elle plaque toutet fonde alors TADA, grâce au sou-tien d’entreprises privées convain-cues par le projet. « Pour moi, c’estun super exemple de comment lasociété civile peut contribuer àl’émancipation de notre jeunesseissue des quartiers défavorisés »,raconte Sofie. Mais pourquoi nepas offrir cette possibilité à tous lesenfants ? « Tout le monde dit à cesenfants-là qu’ils doivent bien tra-vailler à l’école pour réussir plustard, explique la fondatrice. Mais
de Bruxelles. Une fierté malicieuserayonne de leur visage. La fierté,pour ces gamins de 10, 11 ans issusd’un quartier précarisé deBruxelles, de se métamorphoser letemps d’une matinée en d’impor-tants avocats. Tous les samedis, ilssont 300 à participer aux activités
M esdames, Messieurs : laCour ! » La tête haute, le
torse bombé sous leur robe d’avo-cat trop grande, Bilal, Ghalia et lesautres investissent la Cour de cas-sation, la plus haute instance dupays et l’une des salles les plusprestigieuses du Palais de justice
de l’association TADA, pour « Toe-komst – Atelier de l’Avenir ». Ins-piré de l’initiative hollandaise« IMC Weekendschool », ce pro-gramme bilingue (français/néer-landais) vise à « élargir les pers-pectives d’avenir » d’enfants entre9 et 12 ans issus des quartiers diffi-ciles de la capitale européenne.Comment ? En leur faisant décou-vrir toutes sortes de métiers. Tousles samedis, pendant trois ans, lesjeunes rencontrent des profession-nels passionnés et s’initient audroit, à la médecine, à la construc-tion, mais aussi aux arts, aux tech-nologies, à l’hôtellerie…
Ce jour-là, l’un des groupes del’antenne de Saint-Josse clôture lecycle sur la justice. Les bénévoles,qui viennent présenter leur métieraux enfants, participent préalable-ment à un briefing avec l’équipe : ils’agit de se roder pour que les acti-vités roulent, mais aussi d’être àmême d’animer un groupe d’en-fants. « Vous vous souvenez, la se-maine dernière, on a expliqué quele code pénal, c’est un peu commeun Menu Mc Do, avec les infrac-tions et les tarifs à côté » : DamienVandermeersch, procureur généralà la Cour de Cassation, est rompu àl’exercice. Depuis des années, ilparticipe au projet. C’est d’ailleurs
ils ne savent pas ce que ça veut dire“plus tard”. Leur réseau, leur fa-mille n’est pas à même de leur pré-senter ce qui est à leur portée. Cesjeunes-là ont besoin d’un coup depouce pour rester motivés. Notrebut est d’en faire des citoyens res-ponsables. Et de leur dire : ici, c’estchez vous aussi ! » Ce matin-là, parexemple, de nombreux enfants dé-couvrent pour la première fois lecentre de Bruxelles, et le quartierLouise, proche de la célèbre ave-nue de magasins de luxe. Jusque-là, ils n’étaient jamais vraimentsortis de leur quartier.
Sofie rappelle les enquêtes PISA,qui révèlent, invariablement, àquel point la Belgique franco-phone se distingue comme l’unedes championnes européennes…des inégalités à l’école. Or, l’expé-rience du projet hollandais, actifdepuis plus de 15 ans, s’avère plu-tôt positive : « Des recherches ontcomparé des enfants de quartiersdifficiles qui ont participé à laIMC Weekenschool et d’autres quin’y ont pas pris part. Les premiersévoluent différemment dans la vie,s’intègrent mieux au marché dutravail, à leur société. » Et lors-qu’on s’étonne de la rigueur de ga-mins qui, pendant trois ans,suivent ces activités tous les same-
Quand les enfants de quartiers précarisésrêvent leur avenir en plus grand
Grâce à TADA, des jeunes issus de quartiers défavorisés ont pu simuler un procès au Palaisde Justice de Bruxelles.© DOMINIQUE DUCHESNES
L e petit Michel Koutouan estfélicité par ses parents,
pour ses notes en classe qui sesont encore améliorées. De cinqsur dix de moyenne, il s’est re-trouvé à sept. Même si Michou,comme l’appellent affectueuse-ment ses parents, reçoit desovations de part et d’autre de safamille, il avoue lui-même qu’ildoit cette progression au car-table solaire dénommé « Solar-pak ». Vivant dans un foyer sansélectricité à Songon village, àl’ouest d’Abidjan, cet écolier aeu la chance d’être parmi les bé-néficiaires des cinquante sacsdistribués dans la zone. A l’ins-tar de Michel Koutouan,d’autres élèves du village deGrand Aféri (département d’Af-fery, dans le sud-est de la Côted’Ivoire), comme Bessekon. F,qui ont également reçu le car-table, ont aussi amélioré leursrésultats scolaires.
Derrière ces sacs solaires, secache un nom : Evariste Akou-mian, auteur de cette invention,la trentaine. L’idée lui est venuelors d’une livraison de matérielinformatique et de fournituresde bureau à l’intérieur du pays.En escale dans un village nonélectrifié, il a observé qu’unefois la nuit tombée, les enfantsavaient du mal à apprendreleurs leçons et à faire leurs de-voirs. « Nous nous sommes ditqu’en Afrique, nous avons gra-tuitement le soleil, alors pour-quoi ne pas réfléchir à une solu-tion plus simple pour aider cesenfants afin qu’ils puissentavoir de meilleurs résultats sco-laires », explique-t-il. A l’encroire, avec le sac solaire, l’en-fant est autonome. « L’écolierpeut gérer son temps d’étude.
Alors que la lampe tempête estgénéralement utilisée par lesmembres de la famille pourleurs besoins dans la maison,elle est même parfois en posses-sion du père de famille, pertur-bant les moments d’étude del’enfant », affirme Evariste.
Combler le manque d’accès à l’électricité
En réalité, sans grandsmoyens, comme il l’admet lui-même, cette start-up squatte,dans la commune de Cocody, lesbureaux de Thierry Doffou, unautre jeune inventeur qui aconçu « Quelasy », une tabletteéducative favorisant la moderni-sation et l’apprentissage de laformation. C’est en ce lieu qu’ilconçoit les cartables solaires do-tés d’une plaquette solaire de 3watts et sur laquelle est incor-porée une batterie qui se re-charge à la lumière du jour ouau rayon du soleil. L’énergieemmagasinée tout le long de lajournée permet d’avoir de la lu-mière, à travers une lampe Ledqu’on connecte à un port USBrelié à la plaquette solaire. Pré-cisons que cette lumière a unedurée de trois heures.
Cependant, pour arriver àcette création, il soutient qu’il amis deux ans de recherche et sixmois de test sur le terrain. Puisune distribution gratuite de 500sacs solaires dans quatre locali-tés de la Côte d’Ivoire. « Ce quej’ai injecté dans Solarpak, cesont les bénéfices de mon entre-prise de vente de matériels in-formatiques. Nous avons investià peu près plus de 50 millionsde Fcfa [76 000 €] », racontenotre interlocuteur. Qui afficheune grande ambition : combler
le manque d’accès à l’électricitéqui concerne encore 700 mil-lions d’habitants en Afrique. Cedéfi, Evariste Akoumian est bienconscient qu’il n’est pas facile àatteindre. Mais, « ce n’est pasparce que c’est difficile qu’il fautbaisser les bras. Au contraire, ilfaut avoir de la persévérance,du courage. Car, rien n’est fa-cile », insiste-t-il.
Aujourd’hui, il séduit bonnombre d’autorités. Parmi elles,la ministre de l’Education natio-nale Kandia Camara ou encorele groupe Magic System. Visi-blement très sollicité -son télé-phone ne cesse de sonner lorsde notre conversation –, Eva-riste Akoumian affirme avoir étéfinaliste de la Global social ven-
ture compétition (Gsvc) franco-phone. Une distinction qui l’aconduit à la finale internatio-nale du concours en avril 2017 àBekerley (Etats Unis). Figurantparmi les 10 premiers de ceprestigieux prix américain, cejeune inventeur juge cette placesatisfaisante pour une premièreparticipation à un si grand évé-nement réunissantplus d’une cinquan-taine de pays.
En dépit de l’actede générosité del’ambassade desÉtats-Unis en Côted’Ivoire qui a pu re-layer son initiative,Evariste Akoumiann’a, pour l’instant,
aucun soutien financier pouraccroître son activité et vendreplus de sacs, dont l’unité coûte12.000 Fcfa [18€] TTC. Pourl’instant, il importe les sacs etles petits panneaux solairesd’Asie pour les monter en Côted’Ivoire, mais il espère relocali-ser la production dans son pays-.« Nous comptons lever des
fonds pour implanter une usined’assemblage qui s’occupera ducôté textile, ce qui va donner del’emploi aux jeunes », prévoit lejeune entrepreneur qui a soussa direction une dizaine de per-sonnes, dont un technicien, descommerciaux, un directeur decommunication, un directeur derelations publiques, un respon-sable achats et des designers quis’occupent de la conception dessacs. ■
KAMAGATÉ ISSOUF
http://www.solarpak.net/
L'éducation des enfants ivoiriens illumine leurs foyersgrâce à leurs cartables solaires
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dis – hors vacances scolaires –, So-fie a la réponse : « Ces enfants-là,le samedi, ils n’ont rien. Aucune ac-tivité. Sauf, peut-être, la mosquée.Alors ils adorent venir ! A cet âge,un enfant veut tout savoir sur lemonde ! »
A l’heure actuelle, TADA comptetrois antennes sur Bruxelles : une àMolenbeek (en néerlandais), une àSaint-Josse (bilingue) et une à An-derlecht (en français). Quelque300 enfants répondent présentstous les samedis. Chaque année,l’association ouvre de nouvelles« classes » qui entament alors descycles de trois ans. Malgré cela, ellen’arrive pas à répondre à la de-mande. TADA espère toucher1.000 jeunes en 2020.
Les magistrats en herbe rendentleur verdict. Le prévenu se verrainfliger une peine de travail... Maisen sera exempté le samedi, afin depoursuivre son parcours aux ate-liers de l’avenir! ■
ELODIE BLOGIE
Informations : toekomstatelierdelavenir.be
Quand les enfants de quartiers précarisésrêvent leur avenir en plus grand
I nauguré en 2010 par AhmadNaser Sarmast, l’Institut Na-
tional de Musique d’Afghanistan(ANIM) s’inscrit dans une tradi-tion d’enseignement musical fra-gilisée par l’histoire récente. Ilenseigne aujourd’hui la musiqueclassique occidentale et orientaleà 250 élèves, dont 75 filles.
Elles se sont rassemblées en2014 pour former l’OrchestreZohra, le premier orchestre af-ghan exclusivement féminin. Il acommencé son activité sur uneidée originale d’une jeune étu-diante nommée Mina qui y avaitappris la trompette. Cependant,lorsqu’elle est partie dans sa pro-vince natale, sa famille ne l’a plusautorisée à revenir à Kaboul.
400 candidats pour 50 placesConstitué d’une trentaine de
filles âgées de 12 à 21 ans, l’Or-chestre Zohra a participé à diffé-rents programmes à l’extérieurdu pays, comme le forum de Da-vos en Suisse, avec pour objectifde montrer une image positivede l’Afghanistan et de sa cultureau monde.
Chaque année, entre 300 et400 demandeurs passent leconcours d’entrée à l’institut, etseulement 50 d’entre eux sontpris. 50 % des candidats sont des
enfants vivant dans les rues oudans des orphelinats et sont pré-sentés par les ONG travaillantsur le droit de l’enfant en Afgha-nistan. En dehors de l’orchestreZohra, onze autres groupes sontactifs au sein de l’Institut. ■
HASSAN KARIMI
Les filles qui jouentleurs rêves
On dénombre 75 jeunes fillesparmi les 250 élèvesde l’orchestre Zohra. © D. R.
A vec son association Lirec’est partir, l’éditeur « low-
cost » Vincent Safrat révolu-tionne le marché de l’édition envendant aux plus défavorisés deslivres pour enfants.
Ce trublion du secteur quivend les livres comme des petitspains, au prix du pain, en a ainsiécoulé 2,5 millions d’exem-plaires en 2016 en France. Sonsecret ? Son prix unique, 80 cen-times d’euro, le prix moyen d’unouvrage jeunesse étant de 7 eu-ros. Un pari relevé en assurantlui-même la distribution, qui re-présente 60 % du prix d’un ou-vrage. Car l’impression ne coûteque 30 centimes.
Un éditeur autodidacte« J’ai l’impression que la lec-
ture peut remplacer les études.D’où mon idée de faire lire ceuxqui ne lisent pas », explique cetautodidacte originaire de la ban-lieue parisienne.
Vincent Safrat a commencé en1992 à faire la tournée des mai-sons d’édition pour récupérerleurs invendus et les distribuergratuitement dans les cités debanlieue défavorisées. Puis a im-primé lui-même ses ouvrages àbas coût. Et choisi comme canalde distribution principal lesécoles, qui achètent des ouvragespour leurs élèves ou organisentdes ventes ouvertes aux parents.Sans jamais avoir demandé lamoindre subvention aux pou-voirs publics. ■
CAROLINE DE MALET
Des livresqui se vendent commedes petits pains
Les livres édités par VincentSafrat sont vendus au prixunique de 80 centimes.© VINCENT BOISOT / LE FIGARO
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C onfrontée depuis quelquesdécennies à une baisse
constante de la pluviométrie, cou-plée d’une forte pression démogra-phique, la région du Nord du Bur-kina Faso subit une dégradationprogressive de l’environnement etune régression des rendementsagricoles. Selon les données del’Observatoire national de l’envi-ronnement et du développementdurable (ONEDD), en juin 2011, larégion constituait l’une des troiszones où la dégradation des solsétait la plus forte, avec un indicede 3,1 sur 5, et le rythme de dégra-dation des terres est élevé. Notonsque, toujours selon l’ONEDD, enjuin 2013, 74,1 % des 273.828 km2
de superficie que compte le payssont des terres affectées par la dé-sertification, la dégradation desterres et la sécheresse.
Comment cette zone peut-elleabriter une forêt ?
L’œuvre est de Yacouba Sawado-go, 80 ans, connu comme« l’homme qui arrêta le désert ».Pour cette tâche herculéenne, il atrouvé une idée innovante : le« zaï ». D’où lui est venue cettetechnique ? Pour M. Sawadogo,c’est en apprenant de la terre. « Àla fin des années 1960, des prédi-cateurs ont annoncé que nous fe-rions face à une sécheresse sans pa-reille dans notre localité. Face à cemalheur annoncé, j’ai décidé de
laisser tomber mon commerce depièces détachées afin de me mettreà l’agriculture. Afin de comprendrecomment la nature se régénère, j’aimis deux ans à sillonner les terresde mon village, souvent à pied,souvent à cheval ».
C’est au bout de ces deux ans de« communion » avec la terre quelui est venue l’idée du « zaï », unetechnique qui consiste à préparerle sol en saison sèche. Pour cefaire, il y creuse de petits trous, lesremplit de débris organiques. Cesdébris à leur tour attirent les ter-mites, naturellement présentesdans cet environnement. En s’ins-tallant dans les petites cavités, lestermites creusent des galeries, cequi permet de retenir l’eau depluie lors de la saison des pluies. Ilne reste plus qu’à semer lesgraines.
Mais l’innovation ne s’arrête paslà. Au fil des saisons, Yacouba Sa-wadogo est passé maître dans latechnique du zaï. C’est désormaisde la matière organique composéede compost ou de fumier associé àdes tiges de mil concassé qu’il met
Le « zaï », la pratique qui a stoppé le désert
C’est en 1970 que Yacouba Sawadogo a entamé le reverdissement du dé-sert. Âgé à l’époque de 40 ans, cet ancien commerçant de pièces détachéesde motos au grand marché de Ouahigouya se lance dans l’agriculture. Ob-jectif : reverdir la terre dégradée et aride dans son village. 40 ans après, cepari fou est gagné et sa technique a révolutionné le monde agricole.© L’ECONOMISTE DU FASO
A u Bangladesh, la majoritéde la population vit en mi-
lieu rural, où l’accès à l’électricitéest restreint. Plus de 70 % desBangladais vivent dans des mai-sons en tôle ondulée, qui ampli-fient la chaleur du soleil. L’été,les températures peuvent at-teindre 45 degrés.
Grey Dhaka, la filiale bangla-daise de l’agence américaine depublicité et marketing Grey, apeut-être trouvé une manière in-génieuse d’aider les habitantsdes zones pauvres du pays à af-fronter les chaleurs caniculaires.
L’entreprise a présenté Eco-Cooler, le tout premier climati-seur au monde à marcher sansélectricité. Fabriqué à partir debouteilles ou cannettes de sodarecyclées, Eco-Cooler est peucher, respectueux de l’environne-ment et simple à assembler.
Les bouteilles en plastiquesont coupées en deux et fixéessur un panneau ou une grille quise place sur le cadrant de la fe-nêtre, les goulots dirigés versl’intérieur de la pièce. L’airchaud qui entre dans chaquebouteille est compressé au ni-veau du goulot, ce qui le rafraî-chit avant qu’il n’entre dans lapièce. Eco-Cooler peut réduire latempérature de cinq degrés.
En collaboration avec Gra-meen Intel Social Business Limi-ted, Grey distribue Eco-Coolergratuitement dans les villages àtravers le pays.
Aujourd’hui, plus de 25.000
foyers au Bangladesh disposentd’un Eco-Cooler. L’inventionsoulage la vie de milliers de per-sonnes, qui bénéficient d’un peude confort grâce à ce procédéaussi simple qu’innovant. « Eco-Cooler a dès le début été conçupour être fabriqué et distribuépar tous – en favorisant l’utilisa-tion de produits durables qui ontle plus faible impact environne-mental possible. Il a été créé pourapporter un peu de secours auxcommunautés les plus pauvresdu pays », explique Ashis Paul,l’inventeur de Eco-Cooler. ■
NAHELA NOWSHIN
http://grey.com/apac/work/key/eco-cooler/id/12475/
Des bouteillesen plastique font officede climatiseur
L’air chaud qui entre dans chaque bouteilleest compressé au niveau du goulot, ce qui lerafraîchit avant qu’il n’entre dans la pièce.© GREY GROUP.
A nke Domaske a lancé sonaventure scientifique et entre-
preneuriale lorsque son beau-pèrea développé une leucémie, en2009.
« En raison de son système im-munitaire très faible, il ne trouvaitrien à porter car sa peau réagissaità toutes les matières », expliqueAnke Domaske, depuis son usinede Hanovre, en Allemagne.
Microbiologiste, Anke Domaske,qui a aujourd’hui 35 ans, com-mence ses expériences avec pourpoint de départ une technique desannées 1930 pour créer des fibresen caséine, la protéine du lait.
« Au final, nous avons testé plusde 3.000 recettes », explique-t-elle,car elle voulait un processus natu-rel qui utilise en abondance le laitgaspillé en Allemagne, mais peud’eau et aucun produit chimique.
Son processus, en cours de bre-vetage, est simple dans les grandeslignes : prenez du lait, laissez-letourner, séchez-le pour obtenir unepoudre de protéine comme celleutilisée par les athlètes, mélangez-la à de l’eau et autres ingrédientsnaturels, extrudez le tout pour dé-gager une substance duveteusecomme une boule de coton, puis fi-lez-la.
En raison des normes sanitaires,les éleveurs allemands jettent prèsde 2 millions de tonnes de lait paran – de quoi remplir 770 piscinesolympiques.
QMilk n’utilise que 1.000 tonnesde lait mis au rebut par an : lamarge de progression est impor-tante. Le tissu soyeux et antibacté-rien d’Anke Domaske est déjà utili-sé par des stylistes de mode. EnItalie, une entreprise en fait mêmedu papier toilette.
La possibilité d’utiliser les excé-dents de lait n’est pas non plus res-treinte à l’Allemagne ou aux paysoccidentaux. Anke Domaske ob-serve qu’en Inde, par exemple, lachaîne du froid n’est pas toujoursimpeccable et il n’est pas rare quele lait tourne. « D’énormes quanti-tés de lait sont gaspillées dans lemonde », regrette-t-elle. ■
NICK SPICER
http://www.qmilk.eu/?lang=en
Du lait au tissu, une affairetout en douceur
Une biologiste allemande révolu-tionne l'univers du textile encréant une fibre à partir de laitpérimé. © DELO
L e Safe Water Cube, créé parun ingénieur français, est un
système de purification de l’eausale. Une vingtaine de ces boîtesont déjà été installées au Maroc,en Inde, en Haïti.
Ce cube en inox de 1,20 mètrede côté contient cinq filtres diffé-rents (au sable, à charbon...). Ilrend potables toutes les eaux desurface, même boueuses, selonson créateur, Jean-Paul Auge-reau. Il détruit aussi « tous les vi-rus et bactéries causant diar-rhées, dysenterie, choléra et hé-patites, sans détruire les miné-raux » et traite jusqu’à 1.000litres par heure, sans besoind’énergie. La fontaine coûte3.500 euros. Elle est vendue enpriorité aux organisations hu-manitaires et aux autorités lo-cales (villes, régions...). Selonl’ONU, 10% de la populationmondiale n’a pas accès à l’eaupotable. Beaucoup d’humainsdoivent parcourir des kilomètrespour trouver une source. Chaquejour, quelque 3.000 enfantsmeurent de maladies diar-rhéiques liées à une eau de mau-vaise qualité. ■
R. VEDRENNE
Ce cube rend l’eausale... potable
A Antananarivo la capitalemalgache, la grande majori-
té des habitants utilisent des toi-lettes qui ne sont pas équipées dechasse d’eau, alors que beaucoupd’autres n’utilisent tout simple-ment pas de toilettes, déféquantà l’air libre.
Selon les chiffres publiés parl’ONG internationale WaterAidsur l’accès aux toilettes dans lemonde en 2015, Madagascar estle 4e pays au monde où il est leplus difficile de trouver des toi-lettes.
Face à cet enjeu, l’entrepriseLoowatt Ltd s’est lancée dans lafabrication de toilettes sèchessans odeur, sans eau et sanscontact. Des films plastiquesbiodégradables recueillent lesexcréments et « un systèmequ’on actionne après les sellespermet ensuite au sac de se refer-mer et de tomber dans une car-touche étanche et hermétiqueplacée juste au-dessous de la cu-vette », explique Caroline RakotoRose Soloarivololona, adjointeau directeur général. Les excré-ments y seront alors stockés jus-qu’à leur vidange qui se fait sui-vant les capacités du récipient et
la fréquence d’utilisation.D’après leur site, la principale
innovation proposée par Loo-watt réside en fait dans sa pré-sence dans « toutes les chaînes devaleur de l’assainissement ». Sesactivités vont alors de la fourni-ture de toilettes propres à la pro-duction d’engrais, en passant pardes services de vidange de quali-té et de traitement des bouespour produire du biogaz et del’électricité.
Prochain objectif : la mise envente fin 2017 de 10.000 toi-lettes sèches. L’entreprise Loo-watt a d’ailleurs conclu des ac-cords avec l’établissement quiassure les services de voirie deAntananarivo qui prendra encharge le traitement des bouesde vidange qu’elle aura collec-tées. ■
LOVA RABARY-RAKOTONDRAVONY
https ://loowatt.com/global-sanitation-madagascar-toilets/
Des toilettes sans eauqui produisentde l’énergieà Madagascar
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dans ses petits trous. En plus desgraines pour son champ, il y ajoutedes graines d’arbres.
Le coup de poker devient un vé-ritable coup de maître. La petiteexpérience de Yacouba se trans-forme peu à peu. En bordures deson champ s’érige désormais uneforêt. Elle s’étend sur 25 à 27 hec-tares, selon des estimations GPS.Celle-ci attire de nombreux oi-seaux qui rapportent à leur tour denouvelles graines et contribuent àla diversification faunique. C’estainsi qu’on y retrouve des espècesvégétales locales courantes. « J’aientrepris de semer des grainesd’arbres qui avaient disparu de larégion. Des experts viennent de lacapitale afin d’étudier ces arbresaujourd’hui présents », annonceavec fierté Yacouba Sawadogo.
Les animaux ne sont pas enreste. Au fil de la promenade danscette forêt, on remarque des petitscanaris déposés çà et là. Il s’agit enfait d’abreuvoirs pour oiseaux,rongeurs, reptiles et autres lièvresque la forêt abrite. Un véritableécosystème au milieu de cet espacearide.
La forêt de Gourga menacéeAfin de pérenniser cet acquis,
M.Sawadogo décide de partager satechnique autour de lui. Ainsi estcréée dans son village natal, àGourga (4km à l’Ouest de Ouahi-gouya), une mini-foire « marché
zaï ». Une manifestation qui aconnu la présence de producteursvenus des quatre coins du pays. Ysont présentées des variétés et desoutils adaptés au zaï, et deséchanges sont organisés sur desthématiques et des innovations enmatière de production agricole,mais aussi sylvo-pastorale. Uneinitiative qui a abouti à la créationde « l’Association des groupe-ments Zaï pour le développementdu Sahel ».
Cependant une menace planesur cette réserve. « Aujourd’hui, jelance un cri du cœur aux autoritésde ce pays. Le lotissement est entrain de détruire cet écosystème »,déplore M. Sawadogo. Depuisquelques années, la ville a rejointle village de Gourga et l’urbanisa-tion a atteint la forêt. Des parcellesà usage d’habitation ont été dé-coupées à l’intérieur de la forêt etles travaux de construction de cer-taines ont débutées. Une calamité,selon l’innovateur qui espère êtreentendu des autorités. ■
SANDRINE SAWADOGO
Le « zaï », la pratique qui a stoppé le désertLa technique du zaïLa culture par zaï permet deconcentrer l’eau et le compostdans des petits trous creusés àcet effet. Ces trous sont creu-sés à la daba pendant la saisonsèche. Entre 30 et 40 cm dediamètre pour 10-15 cm deprofondeur, répartis en quin-conce tous les 80 cm sur lepérimètre souhaité. Cettetechnique permet de récupérerle sable et les matières orga-niques transportés par l’har-mattan (vent chaud d’Afriquede l’Ouest) dans les trous.L’astuce consiste à déposerdeux poignées de résidus dematières organiques séchéesau soleil dans chaque micro-bassin juste avant ou dès lespremières pluies. Ces dernièresvont attirer les termites quicreusent des galeries jusqu’à lasurface et permettre ainsil’infiltration de l’eau et la for-mation de poches d’eau enprofondeur.Le paysan recouvre le tout d'unpeu de terre afin que les ma-tières organiques ne soient pasemportées par le ruissellementdès les premières pluies impor-tantes. En même temps, plu-sieurs graines sont seméesdans chaque poquet.
MODE D’EMPLOI
Ce cube rend l’eausale... potable
Ce cube en inox de 1,20 mètre de côté contientcinq filtres différents et traite jusqu’à 1.000litres par heure. © SAFE WATER CUBE.
I nvisible à l’œil nu mais conçupour produire de l’énergie
propre, Invisible Solar est unmodule photovoltaïque innovantdéveloppé par Dyaqua, une en-treprise de Vicence, pour ré-pondre aux besoins des villes etzones historiques soumises à descontraintes esthétiques particu-lières.
Les modules ne peuvent êtrevus car ils sont cachés dans uncomposé polymère opaque àl’œil humain, mais transparentpour les rayons du soleil. Ilspeuvent être transformés pourressembler à n’importe quel ma-tériau de construction – terrecuite, pierre, ciment ou bois –afin de se fondre dans l’architec-ture du bâtiment. La premièreligne de production de tuilesphotovoltaïques a connu un suc-cès tel que l’inventeur de la tech-nique, Giovanni Quagliato, a dumal à honorer toutes les com-mandes.
Les bardeaux photovoltaïquespeuvent servir à couvrir un toit àl’identique des bâtiments alen-tours, en parfaite harmonie avecla vue d’une ville historique.Rien n’indique qu’il s’agit en faitd’un toit photovoltaïque, à l’effi-cacité énergétique légèrement
inférieure à celle des panneauxsolaires traditionnels. La tech-nologie Invisible Solar, testée parles scientifiques de l’Agence na-tionale italienne pour les nou-velles technologies, l’énergie et ledéveloppement économique du-rable, s’applique à d’autres maté-riaux de construction, tels que lapierre. C’est le cas à Capri, où unsystème photovoltaïque a étéinstallé avec des modules deDyaqua semblables à la pierre etintégrés à un mur. GiovanniQuagliato, à l’origine un artistecréant des œuvres en résineépoxy, a lancé sur Indiegogo unecampagne de crowdfunding,toujours ouverte, afin d’augmen-ter sa capacité de production. ■
ELENA COMELLI
http://www.dyaqua.it/
Secrètement solaire
Les tuiles photovoltaïques fontpénétrer les rayons du soleil, àtravers leur matière transpa-rente, jusqu’aux cellules so-laires. © CORRIERE DELLA SERA.
U n projet de Rucher-écoleest né dans le Djurdjura
(nord de l’Algérie) à l’initiativede l’Association de promotion del’apiculture de montagne(APAM). L’association est baséeà Aïn el Hammam, à quarante-cinq kilomètres au sud-est de Ti-zi Ouzou et organise régulière-ment depuis 2010 des forma-tions d’apiculture avec le soutiendu Programme des Nationsunies pour le développement(PNUD) et de l’ONG AMSED(l’Association migration solidari-té et échanges pour le dévelop-pement).
Les stages sont destinés auxamateurs du métier, notammentles femmes rurales. Pas moins dedix-huit femmes, issues de AïnEl Hammam et d’autres localitésde la wilaya de Tizi Ouzou ontpris part aux différentes forma-tions animées par des profes-sionnels du métier, notammentceux venus de France.
Des ruches ont même été dis-tribuées par l’APAM aux femmesdésirant se lancer dans l’apicul-ture grâce à l’apport du PNUD etde l’AMSED. Le projet ambi-tieux a pour but de promouvoirl’apiculture en montagne tout engarantissant un produit bio et dequalité.
L’APAM a élargi son champd’action pour assurer d’autresformations régulières dans diffé-rents métiers de l’agriculture, cequ’elle a d’ailleurs intégré danssa dénomination pour devenirl’Association de promotion del’agriculture de montagne. ■
TASSADIT CHIBANI
Les abeillesqui permettent aux femmes algériennesde s’émanciper
Pas moins de dix-huit femmes ont pris part aux différentes formations. © EL WATAN.
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Beam, c’est un petitécran fixé sur un mon-tant qui se déplacegrâce à trois roues. Onvoit Yusuf dessus et,bien qu’il soit assischez lui, il participeactivement à la classe-.© JANUS ENGEL.
Sur une population de 4.671 personnes, le village de Kalisari compte 250 fabricants de tofu. © KOMPAS.
D es volutes de fumées’échappent de la cuisine
de Tumirah, 52 ans. Cette habi-tante de Kalisari, un village deBanyumas, dans le centre deJava (Indonésie), fabrique dutofu. Le soja mijote au feu debois dans un grand chaudronque les locaux nomment kawah,ou cratère.
En un jour, Tumirah peuttransformer 80 kilos de soja entofu jaune et obtenir au passage30 baquets (600 litres) d’eauécumante et malodorante. L’eaude cuisson était auparavant je-tée. Aujourd’hui, un tuyau ladéverse dans un conteneur à300 mètres de la maison de Tu-mirah pour y être transforméeen biogaz. Celui-ci revient en-suite dans un tuyau plus petitchauffer le chaudron où sontcuits les plats du jour.
Tumirah raconte que sa fa-mille cuisine au biogaz depuistrois ans, à la place du gaz depétrole liquéfié (GPL). « Lesflammes sont belles et je préfèrele biogaz aux bonbonnes deGPL qui risquent d’exploser ».Sans compter les économiesque cela l’aide à réaliser, puis-qu’il lui suffit de canaliser l’eau
de cuisson du tofu et de payer15.000 rupiah par mois (envi-ron 1 euro) à l’installateur debiogaz pour la maintenance descanalisations et la gestion duprocessus.
Centre de production réputéSelon Aziz Masruri, chef de
Kalisari, le village est un centrede production de tofu réputédepuis les années 1970. Il pro-duit une variété molle, com-pacte et douce au goût.
Sur une population de 4.671personnes, le village compte250 fabricants de tofu. Enmoyenne, chacun transformeune cinquantaine de kilos desoja et produit 1.500 blocs detofu par jour. La proportiond’eau usée peut atteindre septlitres par kilo de soja.
Rifda Naufalin, professeureen sciences et technologies ali-mentaires à la Faculté d’agricul-ture de l’Université du GénéralSoedirman, explique que l’eaude cuisson du tofu contient desprotéines végétales, du vinaigreet de l’acide organique. Sontaux de pH est légèrementacide. « Si la matière organiquefermente, le méthane produit
peut être utilisé pour cuisiner »,dit-elle.
Selon Rifda Naufalin, le pHdes eaux de cuisson non traitéesest de 4 ou 5 : assez pour tuerdes poissons et nuire aux plantsde riz. Si elles ne sont pas trai-tées correctement, les matièresorganiques se décomposent etproduisent un gaz ammoniacnauséabond.
Avant, les fabricants de tofudu village déversaient les eauxde cuisson dans la rivière, lapolluant gravement : l’eaus’opacifiait, moussait et déga-geait une mauvaise odeur. « Larivière était devenue sale. Enplus d’être laide, elle sentaitfort », se souvient Aziz Masruri.En un jour, 70.000 litres d’eaude rebut pouvaient y être déver-sés.
Le problème de pollution aété réglé par la construction decinq sites de traitement deseaux usées entre 2010 et 2014.Des institutions telles que leMinistère de la recherche et destechnologies, l’Agence de l’envi-ronnement du centre de Java, legouvernement du kabupaten deBanyumas et la communautélocale, y ont contribué.
« Aujourd’hui, 142 des 250fabricants de tofu du village ca-nalisent leurs eaux de cuissonvers les digesteurs, qui génèrentdu biogaz pour 210 foyers », es-time Aziz Masruri.
Rifda Naufalin pense que laproduction de biogaz écolo-gique doit s’accompagner deformations pour étendre lescompétences des habitants à lagestion des sites de traitementdes eaux usées. Aujourd’hui,cinq équipes se chargent de lagestion des sites de traitementdes eaux usées Biolita I à Bioli-ta V.
Optimiser la maintenanceAziz Masruri reconnaît que la
coordination et le managementdes équipes pourraient êtreaméliorés pour optimiser lamaintenance des installations etl’utilisation du biogaz. « Parexemple, plusieurs tuyaux deBiolita III sont cassés ou abî-més. Le village a alloué 8 mil-lions de rupiah [535 euros]pour les réparer », explique-t-il.
C’est également l’avis de Ta-ryo, 54 ans. Ce fabricant de tofurelié au site Biolita I transforme75 kilos de soja par jour depuis
deux ans, mais il n’a plus accèsau biogaz car les canalisationsse sont détériorées. « Nous necuisinons plus au biogaz. Lesconduits vers le digesteur sesont bloqués il y a deux mois »,regrette-t-il.
Wardoyo, 42 ans, qui gère lesite de traitement Biolita IV,admet que les problèmes sontfréquents du fait de la grandequantité de terre, de bois et defeuilles dans les conteneurs.« Les détritus doivent être enle-vés car ils peuvent boucher lestuyaux et encrasser les conte-neurs ».
Cependant, de nombreux vil-lageois continuent d’utiliser lebiogaz pour leurs besoins quoti-diens. Tumirah, la fabricante detofu, en fait la démonstration :elle ouvre l’arrivée de gaz sousle chaudron, tourne un boutonet gratte une allumette. Uneflamme bleue régulière jaillitinstantanément.
« Parfois, je fais frire des bou-lettes de viande pour le déjeu-ner », dit-elle. « C’est pratiquepour cuire les légumes et accom-pagnements, ou pour fairebouillir l’eau ». ■
DEFRI WERDIONO
L’énergie cachée du tofu
des trois broyeurs. Il s’ensuit desclaquements et au bout d’un en-tonnoir des matières de dimen-sions réduites sont récupérées.Après le broyage, c’est le lavage.Entre les ateliers, les granulésblancs et bleus sont exposés surdes toiles entre les ateliers.
Réduire les gaz à effet de serreAu bout de la chaîne se trouve le
dernier atelier de tamisage. Desfemmes et des hommes extraientdes derniers corps étrangers desgranulés répandus sur les tami-seuses. « C’est la dernière étape durecyclage. Nous avons des granu-lés. Nous les écoulons au Sénégal etparfois en Europe », explique Ma-madou Faye, le chargé de la pro-duction. Ces plastiques sont demoins en moins incinérés dans desdécharges, dans des quartiers et ausein des entreprises grâce au mar-ché créé par Proplast qui a permisd’éviter l’émission de 273 tonnesde CO2 en 2008. C’est une contri-bution locale à l’effort global delutte contre le changement clima-tique. « En 2008, lorsque nousavions fait notre bilan carbone,nous avions 273 tonnes d’équi-valent de CO2 évitées. Nous avionsprésenté un dossier pour la com-pensation. Et nous avions venduces tonnes d’émissions évitées aucabinet français Espere » dit Ma-coumba Diagne.
L’unité fournit de la matière auxusines de transformation implan-tées au Sénégal et parfois aux en-treprises étrangères. « La quantitéde matière recyclée revendue dé-pend de la demande, tantôt elleaugmente tantôt elle diminue.Mais il nous arrive que des clientsfassent une demande d’une ma-tière que nous ne parvenons pas à
satisfaire car il peut arriver quenous n’ayons pas des matièresbrutes demandées par l’entre-prise », explique la directrice com-merciale, Maguette Samb.
Les déchets disparaissentDe l’entrée de la ville de Thiès, à
son centre-ville, jusqu’au quartierSilmang où l’unité est implantée,des recycleurs font fortune dans lacollecte des déchets plastiquesdont la tonne s’échange à 100.000francs Cfa (environ 150 euros).« Nous sommes conscients quenous avons contribué à la luttecontre le péril plastique au Séné-gal », affirme fièrement le direc-teur technique qui accompagne lesfemmes depuis 1997. En amont dela chaîne, la filière s’organise. Acertains coins de rue de Dakar, deskiosques de vente des déchets sontouverts. C’est la phase expérimen-tale. L’extension est programméedans un avenir proche. Ceskiosques seront des points de ra-chat des déchets plastiques et devente des produits finis fabriquésavec des déchets plastiques recy-clés. « Nous sommes en traind’installer des kiosques “récuplast”pour collecter et distribuer despoubelles, des corbeilles, des tablesde jardin, des fosses septiques fa-briquées avec la matière plastiquerecyclée », révèle MacoumbaDiagne, de la société Proplast quiprojette d’investir 300 millions defrancs Cfa pour racheter 300tonnes de déchets chaque annéedans le cadre de la campagne zérodéchets plastiques au Sénégal. ■
IDRISSA SANE
traitement. « Nous gagnons notrevie dignement grâce à ce travail »,nous souffle-t-elle. Plus d’une cen-taine de femmes temporaires etpermanentes gagnent leur vie surcette plateforme. Parmi elles, cer-taines ont tourné le dos aux maraî-chages ou au petit commerce pourinvestir le créneau. « Actuellementles salaires sont de loin meilleursque lorsque nous démarrions en1997 », dévoile la directrice ad-jointe, Germaine Faye. Elle est unedes 14 pionnières du recyclage desdéchets plastiques à Thiès.
Aujourd’hui, le secteur est deve-nu un terreau fertile des emploisindirects au Sénégal. La plate-forme tourne jusqu’à 21 heures.Contrairement à l’atelier de tri,dans l’atelier de broyage, des ma-chines ronronnent. Des hommesau nez couvert d’un masque videntdes sacs dans des réservoirs d’un
L a benne d’un camion remplide ballots de déchets est collée
à la grande porte de la société Pro-plast, au quartier Silmang deThiès. A l’intérieur de celui-ci, lejour de notre visite, des monticulesde déchets emballés encombrentle quai de débarquement. Entre 5et 6 tonnes de déchets environsont débarquées chaque jour surcette plateforme. « Nous recevonsdes déchets en vrac ou triés. Nousavons du Polyéthylène Haute Den-sité (PE-HD), le Polyéthylène BasseDensité (PE-BD) et le Polypropy-lène (PP) », détaille le chargé dupersonnel, Papa Samba Bâ. A l’ate-lier de tri, des femmes prélèventdes morceaux de sceaux, de bi-dons, de bouteilles… Elles les ob-servent et les jettent dans des bas-sines en fonction de leur intensitéet de leur couleur. Fatou Bâ Faye adéjà passé 3 ans sur cette unité de
Des femmes à la base d’une révolution
Plus d’une centaine defemmes temporaires etpermanentes gagnentleur vie sur cette plate-forme. © LE SOLEIL.
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seignants danois exceptionnels.Sur l’écran, le visage de Yusuf a
rétréci. Une vidéo YouTube, où l’onvoit qu’on charge un grand ca-mion, remplit désormais presquetout l’écran, pour le plus grandamusement de ses amis Faizaan etZain. « Le bénéfice de cette techno-logie, c’est qu’on constate que Yusufse comporte exactement comme ille faisait lorsqu’il était physique-ment présent. C’est toujours unpeu un fauteur de troubles », sou-ligne Morten Jacobsen. Au départ,Yusuf ne pouvait participer quelorsque les cours avaient lieu àl’école puisque Beam nécessite uneconnexion Internet. Désormais,Morten et Francis se sont assurésque Beam et Yusuf sont connectésà Internet à l’aide d’un modemportable. « Lorsque nous sommesallés à l’Experimentarium [uncentre dédié à la science], nousavons pris la voiture en attachantle robot avec la ceinture, de sorteque Yusuf fasse le voyage avecnous. Et lorsque nous sommes allésau bowling, Francis a placé laboule par terre, et Yusuf a conduitle robot et a poussé la boule sur lapiste », raconte Morten. Récem-ment, lorsque les élèves ont donnéun concert pour leurs parents, Yu-suf a chanté avec eux grâce àBeam. Comme toujours, il resteavec ses amis. Lorsque l’alarme in-cendie s’est déclenchée, Yusuf s’estdirigé en roulant dans la cour del’école, comme le reste des élèves.
Les deux développeurs du robotont récemment entrepris l’étapesuivante de son développementpour s’assurer que Beam est adap-té aux enfants ayant d’autres be-soins : ceux qui ne peuvent pas serendre à l’école à cause de longues
son école située à Frederiksberg,un quartier résidentiel à Copen-hague, il participe activement à laclasse.
Depuis sa maison, Yusufcontrôle grâce à son ordinateur lerobot qui s’appelle « Beam ». Bienqu’il souffre d’une maladie géné-tique qui provoque des tumeurs etexige qu’il soit à l’abri des risquesd’infection, Yusuf peut continuerl’école.
Morten Jacobsen, professeurd’informatique, et Francis Nør-gaard, professeur des écoles, sontles cerveaux de ce projet, qui a per-
Y usuf Warsame, âgé de 13 ans,est allé à l’école, bien qu’il n’y
ait pas été physiquement présent.Ses camarades et lui sont en traind’apprendre les 120 mots les plusutilisés en danois, et les sept élèvesreçoivent chacun un petit papierrose avec un mot écrit dessus. Onleur demande de le placer quelquepart dans les locaux de l’école.
« Plaçons le papier ici. »Ces mots proviennent d’un petit
écran fixé sur un montant qui sedéplace grâce à trois roues. On voitYusuf sur l’écran et, bien qu’il soitassis chez lui, à trois kilomètres de
mis à Yusuf de participer active-ment aux discussions de sa classe.Depuis que l’école a introduit lerobot pour la première fois il y adeux ans, les deux hommes ontpris le temps de continuer son dé-veloppement et de l’adapter. Aulieu de se contenter d’observer, Yu-suf peut désormais écrire sur le ta-bleau blanc interactif et participerà des jeux de société. Grâce àl’usage qu’ils ont fait du robot« Beam » et à son développement,Morten Jacobsen et Francis Nør-gaard ont été sélectionnés pour leprix Politikens, attribué à des en-
maladies, ceux qui souffrent d’an-xiété ou de phobies ou bien ceuxqui se sont simplement cassé lajambe. « Les robots sont des mo-dèles standards, il est donc impor-tant de les développer et de nousassurer que tous les enfantspuissent en bénéficier. Nous nousintéressons aux défis auxquelssont confrontés les enfants et nouscherchons le moyen d’améliorerleurs conditions de vie », noteMorten Jacobsen.
De retour en classe, les élèvessont occupés à chercher les petitspapiers roses. Mais comme Yusufne peut voir que devant lui, ce n’estpas une tâche aisée pour lui. Yusuffait partie des derniers à trouver lepapier mais il n’en fait pas une his-toire. Lorsque la cloche signale larécréation, le robot file vers laporte. « Si j’avais un peu plus depossibilités pour calibrer le robot,je désactiverais probablement You-Tube et je réduirais sa vitesse »,déclare en riant Morten Jacobsen.
Potentiel mondialMorten Jacobson et Francis
Nørgaard ont également été félici-tés pour leur travail sur un secondrobot appelé Zeno, décrit commeune marionnette électronique. Ze-no est capable de répondre à desquestions programmées dans lesystème, et il aide ainsi les élèvessouffrant de troubles de l’attentionà rester concentrés.
L’école publique de Yusuf estéquipée de deux robots Beam, dé-veloppés par Suitable Technolo-gies, qui coûtent chacun 2.000 et4.700 euros. Les prix dépendentnormalement de la durée de vie dela batterie. Zeno, développé parRobokind, a coûté 5.400 euros.
Les robots Beam et Zeno ont été fi-nancés par l’école et la municipali-té de Frederiksberg. Les deux pro-fesseurs prévoient un grand essorà l’échelle mondiale de l’utilisationde robots dans les écoles, et ilssouhaitent vivement partager leurexpérience, parce qu’ils veulentque d’autres puissent en profiter.« Nous sommes en contact avecSingularityU Denmark, une par-tie de la communauté d’apprentis-sage et d’innovation de Singulari-ty University, soutenant les start-up qui essaient de trouver des solu-tions aux grands défis de notreépoque. La branche danoise a ou-vert récemment et nous discutonsavec Kris Østergaard, le directeurde l’innovation et de l’apprentis-sage, pour savoir comment les sy-nergies et le partage de savoirpourraient inspirer d’autres per-sonnes », explique Morten Jacob-sen.
Pendant la récréation, l’écran deYusuf devient noir. Alors que Mor-ten Jacobsen est en train de brico-ler Beam, quelqu’un appelle de-puis l’escalier. Yusuf a pris lecontrôle de l’autre robot Beam,rangé dans la salle du personnel.
« Il faut faire attention pendantla fête de Noël du personnel et véri-fier qu’il ne se connecte pas soudai-nement », plaisante Morten, avantque Yusuf et lui ne se dirigent versla classe pour retrouver les élè-ves. ■
METTE DALGAARD
www.mortenjacobsen.com
Beam le robot fait vivre en direct la journée d'école aux enfants immobilisés
« Souvent les gouvernementsétrangers achètent des appareilsfabriqués en Europe ou auxEtats-Unis ou les reçoivent endon, sans avoir budgété le coûtde la maintenance et sans avoirle personnel pour l’assurer, ex-plique le fondateur BertrandKlaiber. Notre modèle prévoit sixans de garantie inclus. Une offreunique en son genre. Uneconnexion Internet permettra defaire une surveillance de l’étatdes appareils à distance et d’of-frir du support au personnel lo-cal pour effectuer des opérationsde maintenance préventive. Celapermettra également d’implé-menter des services de téléradio-logie, ce qui peut être vital pourdes pays qui manquent cruelle-ment de spécialistes ».
Concrètement, son projet pré-voit à moyen terme de créer prèsde 400 emplois rien qu’enAfrique, contre 25 postes enSuisse. Un investisseur africainet un autre suisse sont déjà mon-tés dans le navire Pristem. Lastart-up a besoin de 10 millionspour mettre son produit sur lemarché : il lui reste toujours lamoitié à trouver. ■
CÉCILE DENAYROUSE BERTRAND BEAUTÉ
http://www.pristem.com
dans les pays émergents ne sontpas calibrés d’après leurs stan-dards et tombent rapidement enpanne, mal préparés aux chutesde tension du réseau électrique,à l’humidité, à la poussière, à lachaleur…
En Afrique subsaharienne,jusqu’à 70 % de l’équipementmédical est ainsi non-opération-nel. La start-up lausannoisePristem a donc développé un ap-pareil de radiologie robuste,high-tech et low-cost, baptiséGlobalDiagnostiX, adapté auxconditions difficiles des hôpitauxdu Sud.
L’innovation réside aussi dansle type de contrat proposé.
Q uel est le point communentre un accident de la cir-culation, une pneumonie
ou une fracture à la jambe ? Sivous en êtes victime, votre méde-cin aura besoin de recourir àl’imagerie médicale pour poserle bon diagnostic. Sauf que lesrares appareils que l’on trouve
Pristem met enfin la radiologie à la portéedes pays du Sud
GlobalDiagnostiX estun appareil de radiolo-gie robuste, high-techet low-cost, adapté auxconditions difficiles deshôpitaux du Sud.© PRISTEM.
Sur une population de 4.671 personnes, le village de Kalisari compte 250 fabricants de tofu. © KOMPAS.
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C ’est l’été 2015. Depuis le début del’année, près de 856.000 migrants
ont déjà traversé ces mêmes eaux desîles des Cyclades, situées entre la Tur-quie et la Grèce. Lorsque 2015 s’achè-vera, ce chiffre aura dépassé le millionde personnes mettant pied sur le sol eu-ropéen en quête d’un avenir meilleur.Des hommes, des femmes, des enfants.Fuyant le conflit en Syrie, mais aussil’Afghanistan, le Nigeria, l’Iraq, l’Ery-thrée et d’autres pays d’Afrique et d’Asieravagés par la guerre, la famine ou ladictature.
En 2016, suite à l’accord signé entrel’Europe et la Turquie et la fermeture dela route des Balkans, les arrivées ralen-tissent : 370.000, moitié moins qu’enGrèce. Mais la traversée de la Méditer-ranée coûtera la vie à 5.000 personnes,
soit plus qu’aucune autre année aupara-vant (1).
La mer et les personnes qui l’ont tra-versée, poussées à la fois par le déses-poir et l’espoir, ont changé la vie de Mi-chael. Ce responsable informatique, an-cien capitaine de l‘armée suisse, n’avaitaucune expérience dans l’humanitaire.Il se voyait comme une personne ordi-naire, jusqu’à ce qu’il « se retrouve aucœur de cette réalité et en soit affecté, nepouvant accepter que des êtres humainssoient traités de cette manière, aujour-d’hui, en Europe ». Il s’apprêtait à re-tourner à Kiesen, une localité de moinsde 1.000 habitants au sud de Berne, enSuisse, lorsque ce qu’il voit à Athènes lebouleverse. « Ce jour-là, j’ai vu dejeunes garçons sortir du métro avec dessacs à dos presque plus gros que leursfines silhouettes. Après les avoir rencon-trés, il fallait que je fasse quelque chose.La distance qui nous aveugle habituel-lement s’était évanouie ».
La tradition humanitaire suisseDeux jours suffisent à Michael pour
se décider et convaincre Rahel qu’iln’était plus question de rentrer. Puis luiest venue l’idée de créerwww.schwizerchrüz.ch (swisscros-shelps). « Quand ma femme me l’a sug-géré, je ne pensais pas que le nom de do-maine serait disponible… Pour nous, ce-la représente la tradition humanitairesuisse, celle que nous aimerions voir sepropager ». Schwizerchrüz n’est ni uneassociation, ni une organisation carita-tive, insiste Michael. C’est un réseau de500 citoyens et bénévoles venant deSuisse, d’Allemagne et d’autres pays eu-ropéens. Ces deux dernières années,Michael est resté actif sur la page Face-
book qu’il a créée. Il a réussi à lever desfonds, cuisiner et porter secours à desembarcations chargées de migrants endétresse, a pu distribuer des milliers depaires de chaussures dans le camp demigrants d’Idomeni (fermé depuis), et amême loué un espace pour les migrantssur l’île de Lesbos.
Portée sur les droits fondamentaux,son approche est simple et efficace,comme le montre le centre communau-taire One Happy Family (Une familleheureuse) de Lesbos. « Ce sont les mi-grants qui ont construit ce centre et cesont eux qui le gèrent. Cela leur permetde se sentir davantage chez eux. Pourqu’ils puissent devenir indépendants etautonomes, il est, selon nous, essentielqu’ils soient respectés et que leurs droitssoient reconnus. Le débat est ouvertavec les grandes organisations, quifondent leurs opérations sur les besoinsplus que sur les droits. Elles se foca-lisent sur les besoins ; nous voulons res-tituer leurs droits aux migrants. Celaleur permettra de prendre soin d’eux-mêmes ».
L’histoire d’Hanas, un jeune Syrien,montre que cette approche leur permetnon seulement de se prendre en mainmais aussi de venir en aide aux nou-veaux migrants. « Hanas était un mi-grant parmi beaucoup d’autres aucamp de Salonique, où il a commencé àtravailler avec nous. Quand l’expé-rience s’est terminée, il a proposé unnouveau centre à Athènes pour hébergerdes mères isolées ». Aujourd’hui, le pro-jet est lancé, a reçu des fonds et bénéfi-cie du soutien de militants.
Un autre effet tout aussi positif sur lelong terme, explique Michael, est que« nous avons commencé à changer le re-
gard souvent porté sur les migrants enleur donnant la possibilité de montrerleurs talents, utiliser leurs ressources etfaire preuve d’indépendance ».
En ce moment-même, Michael est enSuisse avec son épouse. Ils attendent lanaissance de leur fils. Michael va-t-il re-prendre le cours de sa vie à Kiesen ?« Je ne pense pas que je vais retourner àmon projet d’entreprise, ni en Grèce,dans un avenir proche. Heureusement,beaucoup d’amis et de volontaires surplace et nous pouvons les aider à dis-tance, en les accompagnant et en levantdes fonds ».
« Attendez-vous à ce que nous gagnions ! »
Face à cette crise sans précédent,beaucoup se demandent ce qu’ilspeuvent faire. « On peut aider les opéra-tions de secours en donnant de l‘argent.On peut aller en Grèce comme bénévole,ou offrir de l’aide à une personne ou unefamille de migrants en Suisse. Ces gensviennent souvent d’un pays en guerre,et ne connaissent rien de l’endroit où ilsatterrissent. Le simple fait de connaîtrequelqu’un fait une différence énorme.Être ce quelqu’un peut être le débutd’une évolution positive ».
La devise de Michael ? « Nous nousbattons pour l’humanité. Attendez-vousà ce que nous gagnions ! » ■
CLAUDIO LO RUSSO
(1) Source : Office du haut commissaire desnations unies pour les réfugiéshttp://www.swisscross.org/de/
Se battre pour une question d’humanité
Michael Räber et sonépouse Rahel ont fondéle centre communautaire« One Happy Family » àLesbos. Ce sont les mi-grants qui le gèrent. Celaleur permet de se sentirdavantage chez eux. Pourqu’ils puissent devenirindépendants et auto-nomes, disent-ils. Lesenfants s’y sentent bien.© SCHWIERCHRÜZ.CH.
M erry se lève d’ordinaire avantle lever du soleil pour être
conduite à son travail avec onze deses collègues. Ils travaillentquelques heures, somnolant en at-tendant leur tour. La mission deMerry, détecter les mines et autresrestes explosifs de guerre (REG) en-fouis dans le sol, nécessite uneconcentration sans faille. Peser unkilo aide également : légère, elle nedéclenche pas les détonateurs.
Originaire d’Afrique, Merry estun cricétome des savanes, aussi ap-pelé rat de Gambie ou rat géant, unrongeur extraordinairement intelli-gent et doté d’un odorat supérieur.Elle fait partie d’une équipe de He-roRATs – des rats héroïques – éle-vés, entraînés et déployés parl’ONG belge APOPO, basée en Tan-zanie. Une fois sa mission de détec-tion de mines accomplie au Mo-zambique et en Angola, l’organisa-tion a noué en 2015 un partenariatavec le Centre cambodgien d’actioncontre les mines.
Le Cambodge est l’un des pays lesplus exposés aux REG dans lemonde. L’impact sur les commu-nautés est absolument dévastateur.Le Système d’information sur lesvictimes des mines et REG au Cam-bodge dénombre plus de 64.000accidents entre 1979 et février 2017.
Reliés à un câble tendu entredeux dresseurs, les HeroRATs s’ac-tivent nez au sol, à la recherched’odeurs de TNT. Ils sont capablesde vérifier une surface équivalente àun terrain de tennis en 30 minutes,soit bien plus vite qu’une personnemunie d’un détecteur.
« L’impact est important », dé-clare Vendeline Shirima, supervi-seur international des rats détec-teurs de mines chez APOPO, enTanzanie. « Avec les rats, on ne rateaucune mine ». ■
LAUREN CROTHERS
www.apopo.org.
Un sacré flair pour les problèmes
Reliés à un câble tendu entre deuxdresseurs, les HeroRATs s’activent nezau sol, à la recherche d’odeurs de TNT.© LAUREN CROTHERS.
A Delhi, en Inde, un couplemarié sans domicile a été
séparé pendant six ans. Forcé devivre chacun de son côté.L’époux était hébergé dans unrefuge communal pour hommeset l’épouse dans un autre, pourfemmes. L’an dernier, ils ontpour la première fois pu emmé-nager chez eux.
Leur nouveau « chez eux » estune tente. Conçue par l’ONGsingapourienne billionBricks,elle peut être montée par unepersonne en 15 minutes, sans au-cun outil. Elle résiste aux intem-péries et protège des tempéra-tures extrêmes qui accablent laville, oscillant entre 5 et 45 de-grés. Enfin, elle est suffisammentspacieuse pour recevoir une fa-mille de deux adultes et trois en-fants. Le couple désuni a mêmepu y installer un lit, expliquePrasoon Kumar, fondateur debillionBricks.
Plus de 20 familles sans domi-cile ont testé la tente à Delhi et àMumbai. Le manque de loge-ments adéquats est un énormeproblème dans le monde. L’Or-ganisation des nations unies es-time que près de 100 millions depersonnes étaient sans toit en
2005, date de la dernière en-quête mondiale à ce sujet. Beau-coup meurent d’avoir été expo-sées à des températures exces-sives.
Pour y remédier, la tente wea-therHYDE imaginée par un stu-dio de design à Singapour estconçue pour résister aux intem-péries. L’hiver, ses trois couchesisolent du froid, tandis que lamatière réfléchissante à l’inté-rieur retient la chaleur corpo-relle. A l‘inverse, l’été, la face in-terne réfléchit les rayons du so-leil pour aider ses occupants àrester au frais. Lutter contre leséléments n’est qu’un des avan-tages de weatherHYDE compa-rée aux refuges et tentes clas-siques, dit M. Kumar. Facile àmonter et n’exigeant pas d’êtrearrimée au sol par des piquets,elle peut être utilisée en milieuurbain – un environnement sou-vent exposé aux catastrophes na-turelles. ■
PRISCILLA GOY
https://www.billionbricks.org/
La tente miraculeuse qui protègeles réfugiés de toutes les situations
La tente weatherHYDE estconçue pour résister aux intem-péries, hiver comme été.© BILLIONBRICKS.