À propos de michel de certeau

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 9/ 3/2015 À prop os de Mich e l de Certe a u ht t p ://www.cairn.in f o / article p . p hp ?ID ARTICLE=MOUV 02 5 0152 1/7 152156 Distribution électronique Cairn pour les éditions La Découverte . © La Découverte . Tous droits réservés pour tous pays. Il est interdit, sauf accord préalable et écrit de l’éditeur, de reproduire (notamment par photocopie) partiellement ou totalement le présent article, de le stocker dans une banque de données ou de le communiquer au public sous quelque forme et de quelque manière que ce soit. À propos de Michel de Certeau 1 Trois rééditions, une biographie, deux publications de séminaire, ces livres de et sur Michel de Certeau posent une question : pourquoi Michel de Certeau est-il devenu, dans la période récente, une ressource majeure pour toute réflexion épistémologique sur l’histoire ? 2 Paul Ricœur, encore récemment, dans La mémoire, l’histoire, l’oubli  a avec insistance reconnu sa dette à l’égard de Certeau. Il reprend, pour ses propres analyses, « la structure triadique » proposée par Certeau pour l’examen critique de l’opération historiographique en distinguant ce qu’il appelle la « phase documentaire », la « phase explicative/compréhensive » et la « phase « représentative de mise en forme littéraire ou scripturaire ». De la même façon, il considère que Certeau est « le porte- parole le plus éloquent de [la] transfiguration de la mort en histoire en sépulture par l’historien », un thème que Ricœur met au centre de ses réflexions sur la « condition historique ». 3 C’est sans doute la situation de « doute épistémologique » que connaît l’histoire en France depuis la fin des années quatre-vingt qui explique largement cette actualité de Certeau. La proposition de Certeau d’analyser l’opération historique comme « la combinaison d’un lieu social, de pratiques scientifiques et d’une écriture » est devenue une de ces références régulièrement convoquées par les historiens qui interviennent en France sur les questions épistémologiques, mais le programme de recherche que cette proposition impliquait n’a été que très inégalement défriché. 4 Plus généralement, Certeau est tenu pour une sorte de précurseur d’une évolution historiographique ultérieure et il est, dans cette perspective, souvent associé à un groupe d’historiens qui comprend presque inévitablement Michel Foucault et Paul  Veyne, et aussi, pour certains, Paul Ricœur et Jacques Rancière. Certeau a en effet proposé dès les années soixante-dix d’entrecroiser les thèmes privilégiés par les recompositions historiographiques des années quatre-vingt, quatre-vingt-dix : écriture, récit, fiction, événement, sujet, microanalyse, mémoire. Il a en outre défendu un type d’interdisciplinarité en rupture avec l’emprunt « sauvage » que la

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    Distribution lectronique Cairn pour les ditions La Dcouverte . LaDcouverte . Tous droits rservs pour tous pays. Il est interdit, saufaccord pralable et crit de lditeur, de reproduire (notamment parphotocopie) partiellement ou totalement le prsent article, de le stockerdans une banque de donnes ou de le communiquer au public sousquelque forme et de quelque manire que ce soit.

    proposdeMicheldeCerteau

    1Troisrditions,unebiographie,deuxpublicationsdesminaire,ceslivresdeetsurMicheldeCerteauposentunequestion :pourquoiMicheldeCerteauestildevenu,danslapriodercente,uneressourcemajeurepourtouterflexionpistmologiquesurlhistoire?

    2PaulRicur,encorercemment,dansLammoire,lhistoire,loubliaavecinsistancereconnu sa dette lgard de Certeau. Il reprend, pour ses propres analyses, lastructure triadique propose par Certeau pour lexamen critique de loprationhistoriographique en distinguant ce quil appelle la phase documentaire , laphaseexplicative/comprhensiveetlaphasereprsentativedemiseenformelittraireouscripturaire.Delammefaon,ilconsidrequeCerteauestleporteparoleleplusloquentde[la]transfigurationdelamortenhistoireenspultureparlhistorien,unthmequeRicurmetaucentredesesrflexionssurlaconditionhistorique.

    3Cestsansdoute lasituationdedoutepistmologiquequeconnat lhistoireenFrancedepuislafindesannesquatrevingtquiexpliquelargementcetteactualitdeCerteau. La proposition de Certeau danalyser lopration historique comme lacombinaison dun lieu social, de pratiques scientifiques et dune criture estdevenue une de ces rfrences rgulirement convoques par les historiens quiinterviennent enFrance sur lesquestionspistmologiques,mais leprogrammederecherchequecettepropositionimpliquaitnatquetrsingalementdfrich.

    4Plus gnralement, Certeau est tenu pour une sorte de prcurseur dune volutionhistoriographique ultrieure et il est, dans cette perspective, souvent associ ungroupe dhistoriens qui comprend presque invitablementMichel Foucault et PaulVeyne, et aussi,pour certains,PaulRicuret JacquesRancire.Certeaua eneffetpropos ds les annes soixantedix dentrecroiser les thmes privilgis par lesrecompositions historiographiques des annes quatrevingt, quatrevingtdix :criture, rcit, fiction, vnement, sujet, microanalyse, mmoire. Il a en outredfenduun typedinterdisciplinarit en rupture avec lemprunt sauvageque la

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    Laquestiondulieusocialdefabricationdelhistoire.

    nouvelle histoire de ces annes soixantedix (quon nomme aussi parfois la troisime gnration des Annales) considrait trop souvent de manire noncritiquecommeunecaractristiquemajeuredesonidentitthorique.

    5Certeauremarqueceproposlerletrsfaibledumarxismedanslhistoriographiefranaise au sens o les historiens ne disent le plus souvent rien du lieu de leurpropreproductionetquilsrcusentainsileurpropreassignationunlieusocial(ausens dune analyse sociale ou sociohistoriographique de leurs travaux). Cette dngation de la particularit du lieu est pour Certeau le principemme delidologie.CommelenoteRicurenconfrontant,proposdudiscourshistorique,lanalysedelaproductiondulieuchezCerteaularchologiedusavoirchezFoucault, Certeau sloigne de Foucault en sortant de la neutralit absolue dundiscours sur le discours et en commenant darticuler ce discours sur les autrespratiquessignifiantes.PourCerteau,lanalysedulieusocialdesafabricationestunpointaveugledelarecherchehistoriquecarcestlelieuquipermetuntypedeproductionseteninterditdautresenexcluantdudiscourshistoriquecequiestsacondition un moment donn et les postulats du prsent de son analyse.Linsistance de Certeau sur lenracinement social des positions et des pratiqueshistoriographiques a t jusqualors peu entendue par les historiens. Desformulationscommelapratiquehistoriqueesttoutentirerelativelastructuredelasocitnedoiventcertespastreisolesdeleurcontextednonciationpournepas tre interprtes comme lexpression dun sociologisme mcaniste, mais ellesentrentaujourdhui tout fait en rsonanceavec lesanalysesde la sociologieetdelanthropologie des sciences, avec les dveloppements rcents de lhistoire dessciences et avec la rflexion renouvele des historiens sur leur rle social. Cest partir de ces analyses sur la production du lieu que Certeau propose derepolitiser lessciences,unetche,ditil,parexcellencehistorienne.Ilsagitpourlhistoiredexpliciterunrapportinterneetactuelaupouvoirenhistoricisantlhistoriographie ellemme. Mme si des travaux comme ceux de CharlesOlivierCarbonell,FranoisDosse,OlivierDumoulin,BertrandMllerouencoredeGrardNoiriel travaillent cette historicisation de lhistoire, cette voie reste encore trslargementexplorer.Nefaudraitilpasaussireprercedficitdhistoricisationdansletravailmmedelhistorien,danslecorpsdesoncriture?LaquestioncentraledeLabeautdumort doparlelhistorien?restedoncencoretropsouventsansrponse dans luvre ellemme. Cest bien le nud tress, dans ce qui seraitlanalogue dun refoul des traditions (ou mmoires) disciplinaires, entre lesquestionsdusujet(lesujetdusavoir),dulieu,delautreetdelafictionqueCerteauveutprcismentessayerdedmler.

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    6Lethmedurcitatutilisenhistoirecommeuneespcedemachinedeguerrecontre les tentations scientistes et contre lesmodles historiques du dterminismesociologique ou conomique.Mais chez Certeau,mme sil a dnonc les illusionsscientistesduquantitativismenafetde lamathmatisationenhistoire, laquestiondurcitnestpasrductiblecetusagengatifdedmarcation.Lhistorien,selonlui,tient bien son autorit de lillusion narrative qui mue en discours sur le rel lafabrication dun texte partir de restes documentaires. Mais plus profondment,Certeauproposedereconnatrelalgitimitthoriquedurcitenleconsidrantcommelaformencessairedethoriedespratiques.Cestlercitquitemporaliselhtroclite,quifaittenirensembledesnoncscontrairesetquifaitoubliercequifondesapossibilitmme,cestdire limmenserumeurdespratiquespassesque lhistorien remplace par ses reconstructions. Ce que combat lhistorien par lercit, cestunmanquede rfrentiel . Seul le rcit peutpermettredemettre enscnecetteinquitantefamiliaritdelautreetenpremierlieucepassquinestplus,de rendrecomptedecette relationdu transit la limite,de lcritureunemortquestlhistoricit.Lercitnestpas,chezCerteau,utiliscommeunesimplealternative technique ou demthode pour sortir desmodles dterministes de lamme faon il ne tient pas seulement aux apories de la pense du temps humain(dans lesensdonncettequestionparPaulRicur), ilest la formeobligedunesaisieinterminable,ausensfreudiendecequirsisteauxoprationstechniqueset critiques de lhistorien, ce que Certeau nomme encore lobscnit delindtermin.LeproblmequeposeCerteaupartirdelanalysedurcitcommethorie des pratiques est prcisment celui du comment rendre compte de cetinexpliqu. La difficult de rendre compte de ce reste tient tout autant aucaractre accident du temps de laction qu lirruption de la violence desconflitsetduhasarddanslediscoursdusensquelhistoriographierecomposesanscessepourprendreenchargelarelationquunesocitentretientavecsesmortsouencoreausilencedespratiquesquotidiennesparpillesdanslasituationdactesde pense . On peut retrouver ce type dinterrogations dans les travaux de ceshistoriensdupeudcelable,delexcsoudelanormalcommeAlainCorbinappelantlhistoriensefforcerdereprercequiconditionnelafrontireduditetdunondit ouencoreArletteFargeessayantdesaisircesvnementsdeparole,delaplainteetdelasouffrancequimarquentunlieufrontireolonvoitlasocitrguler,affrontertantbienquemalcequiluisurvient .Certeauvoqueencoreces histoires qui mettent en cause le sujet historien : histoire des femmes, desNoirs, des juifs, des minorits culturelles, etc. . Dans tous les cas, ce qui a tlongtempstenuenlisiredelacuriosithistorienne,cetanormalmalintgrabledans les modlisations structurales, ne peut que faire retour dans le champ delhistorien.Maiscesnouveauxobjetssontsouventconsidrscommedesadditifsquiallongent linventaire de lhistorien, sans altration visible dune pistmologie quireste largement construite sur la nonpertinence du locuteur. La place encore

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    aujourdhui accorde en plus lhistoire des femmes en France pourraitillustrer ce processus dabsorption sans contamination, sans altration de ce quiconstitue les dficits et plus gnralement lautre des rationalits historiennesdominantes.

    7Lapport de Certeau sur la question du rcit et de lcriture de lhistoire ne doitcependantpastreconfonduavec lespositionslesplusradicales(danslesensduntextualismegnralis)despartisansdu linguistic turn qui congdie le rfrent dudiscours historique. Lusage que fait par exemple Roger Chartier des positions deCerteau contre ce type de propositions dralisatrices est sur ce point significatif :Certeau est convoqu pour raffirmer le projet dobjectivit de lhistoire et sascientificit.Lhistoireestscientifiquedanslesenso,critCerteau,elletablitunensemble de rgles permettant de contrler des oprations proportionnes laproduction dobjets dtermins . La caractrisation de lhistoire comme sciencefiction, comme entredeux et discours mixte, vise ainsi rendre compte de laprtention du discours historique donner un contenu vrai (qui relve de lavrifiabilit) mais sous la forme dune narration . Lhistoire a un statutpistmologique propre, elle joue la jointure du discours scientifique et dulangageordinaireunethmatiquequiatenparticulierdveloppeparJeanClaudePasseron .[4]

    8Les thmescontemporainsduretourdesacteursetplusgnralementceluidusujetpeuventconstitueruneautreentrepourprendrelamesuredelafconditdesrflexions de Certeau pour lhistoire. Certeau prend ses distances avec unepistmologie qui contourne toute question relative au locuteur. Il constate que lediscours des affects et des passions a t lentementmarginalis dans les modlesdominantsdudterminismeconomiqueetsociologiqueet,aveccediscours,cestlaquestiondesinvestissementsdusujetsurlesstructurationscollectivesquiatrefoule.Laquestiondusujetausens lacanienreprisparCerteau, lesujetprisdansunedivisionconstituante,unsujettoujoursdbiteurdunemortatainsiquasiinaudiblepourdenombreuxhistoriensquiserclamaientdelatraditiondhistoire socialedans lespritdesAnnales.Cettequestiondusujet est revenuedans la rflexion des historiens demanire sauvage pourraiton dire, dans lesannesquatrevingt,commeunlmentdelastratgiedelgitimationdecequilestconvenudappelerlanouvellehistoirepolitique .Leretourdusujet,danssaversionplatement individualiste, lesujetytant fondenuncogito inaltrable,est depuis lors devenu un lment cl de largumentaire de cette histoire politiquerenouvele en France. Certeau est trs loign de cette version individualisante du paradigme des acteurs . Il ne sagit pas pour lui doprer un retour auxindividus,latomismesocial.Ilrappelleutilementquecestlarelation(toujourssociale)quidterminesestermes,etnonlinverse,etquechaqueindividualitestle lieu o se joue une pluralit incohrente (et souvent contradictoire) de ses

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    Rompreaveclespensesdelincorporationpassivedescontraintessociales.

    dterminations relationnelles . Certeau ne peut donc pas tre htivement enrlsous la bannire du retour du sujet qui sert souvent certains dfenseurscontemporains de lhistoire politique pour caractriser le changement de contexteintellectuelquiafavoris lasalutairelevedcrouhistoriographiquedontcettehistoireabnfici.

    9Contre les dterminations sociales extrieures qui simposent aux acteurs, ilrhabilite la ruse, linventivit des pratiques ordinaires, les arts de faire, les tactiques de pratiquants et, avec Foucault, le polythisme de pratiquesdissmines qui tour tour exacerbent et droutent n logiques : Lequotidien sinvente avec mille manires de braconner , critil encore. ContreBourdieu et la docte ignorance que ce dernier prte aux acteurs sociaux, ildnonce la ralit mystique de lhabitus qui enferme les pratiques dacteurs derrire le grillage de linconscience . Lhistoire sociale renouvele partir desapportsde lasociologiepragmatiqueetenparticuliercelledfendueparBernardLepetit est tout fait en phase avec ces rflexions de Certeau qui valorise lescomptencesdinterprtationetdadaptationdesacteursfaceauxsituations.

    os

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    10Commelercit,lcritureoulacteur,lvnementestredevenuunecatgoriebonnepenser pour les historiens, une catgorie que Certeau a profondment renouvele.Enmai dernier, on a pris la parole comme on a pris la Bastille en 1789 , cettepropositionclbredeCerteaunedoitpastrerduite lusagepdagogiqueduneanalogie incertaine. partir de la question comment un changement peutiladvenir?, ilsagitbienpourCerteaudinscrirelvnementdansnotreoutillagethoriqueetderompreavecunelogiquefondesurlerefustacitedecequinestpasleMmeetavecunerflexiontropemprisonneparledveloppementdunsystme . Lvnement dplace tout le systme, il engage la structure , critCerteauilnenestdoncpaslesimplervlateurcommedanslemodlelabroussienolvnementexprimaitenquelquesorte lastructure.QualifiparCerteaudesymbolique parlant toujours partir de ce qui sest pass en mai 1968 lvnementnestpaspourautantcondamnntrequunecaricaturede laralit(unpeucommedanslapprochecommmorativedemai1968proposparPierreNora).Laprisedeparoledonneunnouveaustatutausymbolique:lanouveautsyexprimedansunlangageancienquidsenchanteunordresocial.Noussommesavec Certeau trs loigns des analyses qui dralisent lvnement en leculturalisant.

    11SonapprochedelaquestiondelinterdisciplinaritenfinsingulariseencoreCerteauau sein de linstitution historique. Cette question est au cur des dbats

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    pistmologiques nourris des annes quatrevingt et quatrevingtdix dans ladisciplinehistorique.Lundesenjeuxprincipauxdesdbatssurlinterdisciplinaritreste sans doute la question de lappartenance de lhistoire aux sciences sociales.Cette appartenance est alors svrement remise en cause par certains courants delhistoire politique et culturelle qui rejettent le dterminisme sociologiquedinspiration durkheimienne, longtemps dominant dans lhistoriographie et lessciencessocialesfranaises.Certeau,desonct,entendrompreaveccequilnommeun interdisciplinaire mou qui engage, en particulier, lhistorien laisser auxautres disciplines laudel de son explication , ce que prcismentlhistoriographieestchargedexorciser.Contrelarductiondelusagedesautressciencessocialesunerhtorique(cestenparticulierde lusagede lapsychanalysedontilsagit),Certeauproposeunepratiquedelinterdisciplinaritquiconsisteraitsaisirdesconstellationspistmologiquesentraindesedonnerrciproquementunnouveau dcoupage de leurs objets et un nouveau statut de leurs procdures . Iltentededcrire etde circonscrire cettenouvellepratiquede linterdisciplinarit enutilisantdestermesetexpressionscommedplacements,carts,altrationsrciproques , entredeux dune ambivalence ou encore articulation . Parexemple,proposdurecourslapsychanalyse,cequiintressesurtoutCerteauestdesavoircommentsontravaildhistorienpeuttreclairaltrparlestravauxdeFreud.Laussiilnestpassrquecettepratiquedelinterdisciplinaritaiteuunevritablepostritchezleshistoriens.

    12MicheldeCerteauadoncencorebeaucoupnousdiresurlefairedelhistoireilpeut nous aider mieux comprendre la transition historiographique etpistmologiqueouvertepartirdumilieudesannessoixantedixenFrance.Unetransition qui peut tre dfinie en suivant Certeau dans son compterendu deComment on crit lhistoire de Paul Veyne comme lincessante rsurgencedinterrogations diffrentes des problmatiques remployes leur service . Lesmotsrcit,vnement,sujetparexemple,rgulirementconvoquspourcaractriserlaconjoncturehistoriographiquercente,nedoiventpasfaireillusion: ilsserventdsigner dautres usages que les usages anciens, une autre formalit des pratiqueshistoriennesdontleshistorienssontlesacteursruss.

    13CHRISTIANDELACROIX

    [1] ArticlecritencollaborationavecD.JULIAetJ.REVELetreprisdansLacultureaupluriel,PointsSeuil,1993.

    [2] A.CORBIN:Letemps,ledsiretlhorreur,Aubier,1991,p.239.

    [3] AFARGE,Deslieuxpourlhistoire,LeSeuil,1997,p.19.

    [4] J. C. PASSERON, Le raisonnement sociologique. Lespace nonpopprien du raisonnement naturel,Nathan,1991.

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    [5] Louvrage de rfrence de cette nouvelle histoire politique reste : R. RMOND (dir.),Pour unehistoirepolitique,Seuil,1988.

    [6] B.LEPETIT(dir.),Lesformesdelexprience.Uneautrehistoiresociale,A.Michel,1995.