À propos du latin « jūs »

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  • 8/19/2019 À Propos Du Latin « Jūs »

    1/19

    Georges Dumézil

     A propos du latin « jūs »In: Revue de l'histoire des religions, tome 134 n°1-3, 1947. pp. 95-112.

    Citer ce document / Cite this document :

    Dumézil Georges. A propos du latin « jūs ». In: Revue de l'histoire des religions, tome 134 n°1-3, 1947. pp. 95-112.

    doi : 10.3406/rhr.1947.5602

    http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rhr_0035-1423_1947_num_134_1_5602

    http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/author/auteur_rhr_38http://dx.doi.org/10.3406/rhr.1947.5602http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rhr_0035-1423_1947_num_134_1_5602http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rhr_0035-1423_1947_num_134_1_5602http://dx.doi.org/10.3406/rhr.1947.5602http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/author/auteur_rhr_38

  • 8/19/2019 À Propos Du Latin « Jūs »

    2/19

    A

    propos de latin

    «

    jus

    »

    On sait depuis

    longtemps

    que. le substantif latin jus (ita

    lique

    *ious-) recouvre

    phonétiquement le substantif

    indo

    iranien *yauš- défini par l'accord

    de

    sanskrit yô h

    et

    d'avestique

    yaoš-. Cette

    évidence

    ne rencontre

    plus

    guère

    d'opposition.

    Mais on ne paraît pas avoir poussé

    aussi

    loin qu'il est possible

    l'étude des

    deux, mots orientaux (qui sont

    incontestablement

    et

    uniquement religieux)

    et,

    comme les dictionnaires étymol

    ogiques

    ne peuvent en retenir que des

    traductions sché

    matiques,

    les

    latinistes

    et les

    juristes

    n'ont pas accès

    à

    quel

    ques

    faits

    importants,

    qu'ils trouveront

    réunis

    et

    complétés

    ci-dessous.

    I. — Avestique yaož-dá-1

    L'avestique yaoš-

    n'est employé

    que

    dans

    l'expression

    nominale-verbale, déjà gâthique, yaož-dá- (avec complément h

    1'atícusatif,

    et une

    fois

    sous

    la

    forme yaoš... dá-), ainsi

    que dans

    l'adjectif

    déjà

    gâthique

    yaož-dáh-,

    et aussi, en dehors

    des

    Gâthâs, dans

    quelques dérivés de

    cette

    expression.

    Yaož-dá-

    est formé à

    l'aide

    de

    la

    racine dá-,

    issue d'i.-ir. *dhá-

    «

    mettre,

    établir, créer, etc. » (sk. dhá-, gr. 6т)-, etc.), comme le sont

    zraz-dâ- « croire » (sk. çrad-dha-, lat. crl-do, irl. cre-tim)

    et

    maz-

    dâ-

    «

    se

    mettre en mémoire

    »

    (d'où

    maz-dâh-

    «

    sagesse

    »r

    sk.

    me-dhâ).

    ?

    1. Le

    mot

    yaož-dá- a trois emplois :

    (le seul dans les

    Gâthâs)

    «

    rendre mystiquement complet, parfait », p. ex.,

    lorsque le complément est la dálná «

    individualité

    religieuse

    de

    1) J'emploie, pour

    les

    parties

    de

    l'Avesta,

    es

    abréviations usuelles Y. — Yasna,

    Yt.

    =

    Yatt,

    V.

    =

    Vidëvdât.

  • 8/19/2019 À Propos Du Latin « Jūs »

    3/19

    96

    REVUE

    DE

    L'HISTOIRE

    DES RELIGIONS

    l'homme »

    ( Y., 44,

    9 ; V., 10,

    19)

    ou Vanhvà « force vitale,

    'élandel'âme»(F.'f5,21 ; 10r

    19

    ; cf.

    Yt.,

    10, 92); —

    «mettre

    rituellement dans l'état qui convient » sans

    que

    cela implique

    réparation

    d'aucune déchéance ou faute antérieure, p.

    ex.

    quand il

    s'agit d'accessoires

    du s'acrifice

    ; —

    au contraire, le

    plus souvent, « remettre en état rituellement, purifier ce qui a

    été

    d'abord souillé ».

    Ces valeurs sont

    évidemment

    parentes, sans quoi

    elles

    ne

    s'exprimeraient

    pas par un

    même mot1. Elles

    peuvent se

    grouper

    diversement. La première est d'ordre mystique- et

    même moral,

    les deux

    autres

    d'ordre

    rituel

    ce qui fait,

    soit

    dit

    en

    passant,

    qu'il

    n'y

    a

    pas

    Heu

    de

    s'étonner

    et

    qu'il

    ne

    faut

    pas

    déduire

    une

    chronologie sémantique

    de

    ce que

    les

    Gathâs

    ne

    connaissent que

    la

    première valeur, puisque

    la

    religion qui

    les inspire est tout

    abstraite, qu'elle

    exalte,"

    qu'elle ne

    retient"

    même

    que

    l'effort

    intérieur, par opposition au

    culte et

    à

    la

    magie. Mais, d'un autre point de vue, peut-être plus important,

    les

    premières,

    ne supposant pas une déchéance, se séparent

    de

    la

    troisième,

    essentiellement

    réparatrice;

    certes, le progrès vers

    le

    meilleur

    et la correction du

    mal,

    comme la "gymnastique et

    '

    la

    médecine,

    ont même

    ressort,

    mais produisent

    des

    règles

    bien différentes.

    Par

    conséquent, sur le plan religieux,

    ce tableau des sens

    distingue

    bien

    ce qui forme aussi les deux provinces ou aspects

    solidaires des techniques juridiques : définir les

    droits,

    jura,

    et

    en assurer

    la

    pleine réalisation ; corriger et

    réparer

    les viola

    tions de

    ces

    "droits, injurias. Quand l'Avesta, parlant des

    accessoires du

    sacrifice,

    mentionne par

    exemple

    yaozdâtqm

    zaobrqm «

    la

    liqueur de libation rituellement préparée » (Yt.,

    10,

    120;

    cf.

    Y.,

    65,

    10;

    -F.,

    14,

    4;

    YL,

    8,

    63),

    ou

    aësmom

    yaozdâtdm

    «

    le bois

    à brûler rituellement consacré » ( Y., 71, 8

    ;

    cf. 62, 10 ; V., 18, 19)2,

    il présente,

    sur le plan

    religieux,

    Téqui-

    1) Plusieurs

    exemples

    que Bartholomae donne pour

    le second

    sens seraient à

    classer

    plutôt

    dans le troisième.

    2)

    Ou

    quand il

    montre

    Zoroastre

    àlnm pairLyaoidaQanUm

    ь rendant rituell

    ement

    orrect, consacrant

    tout

    entier l'autel du

    feu »

    ( Y., 9, 1).

  • 8/19/2019 À Propos Du Latin « Jūs »

    4/19

    . A řROPOS

    DE

    LATIN « JUS

    »

     

    97

    valent

    de ces justa

    à la fois juridiques et

    rituels

    dont parlent

    souvent

    les Romains (ju'sîis omnibus

    hospitnlibus privafisque

    et

    publicis

    funguniur

    officiis,

    Tite-Live,

    9, 6,

    etc.).

    Quand, dans

    TAvesta,

    l'homme

    qui

    a touché un cadavre court

    et crie

    au

    passant

    qu'il rencontre

    : « J'ai touché un mort, je suis sans

    force

    de

    pensée,

    de parole, d'action, veuillez me purifier

    »,

    isaêta me~

    yaoMuitïm

    (V., 8, 100),

    il

    fait, sur

    le plan

    magico-

    religieux, quelque

    chose de

    comparable

    à ce que fait, sur

    le

    plan juridique, l'accusé qui demande aux

    judices

    de reconnaît

    r

    on

    innocence ou

    de

    le tirer, par une

    peine

    précise,

    de

    son état incertain.

    Il

    faut

    retenir,

    en particulier,

    que

    le

    mot

    avestique, dans

    la

    majorité de

    ses emplois

    et

    de ceux de

    ses dérivés, implique

    réparation

    rituelle, expiation d'une faute rituelle ou même

    morale.

    2. Le Vidëvdât est, dans

    la

    compilation avestique,

    un

    code

    religieux qui énonce un grand nombre

    de

    fautes,

    notamment

    contre

    la pureté rituelle, ainsi

    que

    leurs sanctions.

    Beaucoup

    de ces sanctions

    sont introduites par une question

    du

    type

    kâ hë asti tiba ? « quel

    en

    est le paiement

    ?

    m1. Mais, une fois

    (V.,

    3,

    38-39;

    cf.

    8,

    27),

    la

    formule

    est

    plus

    complexe,

    exacte

    ment

    riple ; il

    s'agit, à

    vrai

    dire,

    d'un péché

    particulièr

    ementrave,

    le

    dernier d'une série de péchés où

    la

    gra-

    -

    vité va en

    croissant

    : «

    Si un homme

    enterre le

    corps

    d'un

    homme

    ou

    le

    corps

    d'un

    chien

    et

    si deux

    années

    se passent

    s'ans

    qu'il le déterre... » (

    kâ hë asti

    ëiQa,

    kâ hë asti арэгэНэ, kat hë asti yaozdâQnm

    ?

    De cela quelle

    est

    la ciQâ

    ?

    De cela quelle est УарэгэШ ? De cela

    quel

    est

    le уаоЫаЪгэт

    ?

    "*

    Des*

    gloses

    jointes à

    la traduction pehlevie éclairent diffé-

    rentiellement les

    trois

    substantifs

    :

    a'0â, c'est pehl. iôzisn

    « amende », glosé pat xvâslak « quant aux biens » ; прэгэШ, c'est

    pehl. puhr (simple transcription du mot avestique paraGa),

    glosé

    pat

    aštr

    и srdščaranám « par (les deux

    variétés

    de

    fouet

    1)

    V.

    ci-dessous, p. 107. •

  • 8/19/2019 À Propos Du Latin « Jūs »

    5/19

    У8

    REVUE

    DE

    l'hISTOIRE DES

    que

    désignent) a, et sr. »

    ; yaoêdâQram1, c'est pehl.

    yozdâsrih

    fsimpie

    transcription), glosé

    pat

    ruvân

    « quant

    à

    l'âme ».

    L'étymologie

    des deux premiers termes

    confirme

    cette

    tra

    dition : čibá

    est un

    substantif

    formé

    sur la

    racine

    qui

    se

    retrouve

    par exemple

    en

    grec

    dans

    tívw,

    7roivÝ)

    (dont

    les

    pre

    miers sens sont « payer »

    et

    «

    rançon

    »), en vieux-slave dans

    cena « prix »

    ; п-рэгэШ

    est proprement « le

    talion

    », de

    la

    racine

    par-

    « faire

    égal

    »

    qui

    se

    retrouve sans

    doute

    dans

    l'adjectif

    latin

    par « égal ». On

    a

    ici un classement

    des

    peines, appa

    remment dans

    l'ordre

    croissant

    des

    importances : amende

    pécuniaire, châtiment corporel, expiation magico-religieuse.

    (La

    réponse à cette

    triple question

    est

    d'ailleurs, dans les

    deux cas,

    négative

    ; le

    crime

    est

    inexpiable

    :

    nava

    hi

    asti čiba,

    nava

    hi

    asti

    арэгэНё,

    nôiï

    hi

    asti yaozdâbrdm...)

    Cette classification tripartite des

    expiations

    est parallèle à

    la classification tripartite

    des

    médications

    dont M. Benveniste

    a

    récemment montré

    ici

    même

    le

    caractère indo-iranien et

    même indo-européen2 ; comme elle,

    d'ailleurs,

    elle repose en

    définitive sur la conception

    des trois

    fonctions3 :

    de même

    que

    le Vidfvdâl (7, 44) distingue4 «

    la médecine

    des

    plantes

    »

    (urvarô.baëSaza-),

    «

    la médecine

    du couteau » (kardto.bae-

    šaza-)

    eť«

    la

    médecine

    des

    incantations

    »

    (mqbrô.balsaza-),

    c.-à-d. trois variétés

    de

    médecine fondées respectivement sur

    la

    vitalité

    végétale, sur l'intervention

    violente et

    sur la

    magie,

    de même

    il

    distingue ici (3, 38) trois

    modes

    d'expiation de

    caractère

    respectivement économique (autre aspect

    de

    la troi:

    sième fonction), violent et magico-religieux.

    1) Avec le

    suffixe

    des noms d'instrument *-lro-.

    2) La

    doctrine médicale des Indo-Européens, RHR, CXXX

    (1945,

    paru en 1947),

    pp.

    5

    et

    auiv.

    M.

    Benveniste rapproche

    Vidëvdât,

    7,

    44 de

    Pindare,

    Pyihiques,

    3,

    40-55

    (èrcaoiSaC, cpáppiaxa, xofzaí)

    et

    cite

    en outre

    la

    classification

    des maladies

    dans JFlgnieda,

    10,

    39, 3, où les

    Nâsatya

    sont dits guérisseurs

    andhásya,

    kréásya,

    nilásya « de l'aveugle » (mal

    mystérieux,

    magique), « de

    l'amaigri

    » (mal

    alimentaire),

    « de qui a fracture » (violence).

    3)

    Non pas

    sans doute dans leur

    expression

    sociale (prêtres ;

    guerriers

    ;

    pro

    ducteurs)

    mais dans leur

    principe

    philosophique (sacré ; force ou violence ;

    richesse

    ou fécondité).

    4) Je change l'ordre du

    texte

    (qui commence par

    la

    médecine du

    couteau) pour

    ónumérer

    les

    trois fonctions dans

    l'ordre

    ascendant

    normal.

  • 8/19/2019 À Propos Du Latin « Jūs »

    6/19

    «to

    л Wíopos de

    latin' «

    jus

    »

    99

    Dans

    cette classification,

    yaozdâQrdm

    apparaît au niveau

    magico-religieux

    ;

    il

    n'en

    reste

    pas moins

    qu'il

    est engagé dans

    un

    système pénal dont il constitue, au-dessus

    de

    l'amende

    et

    des coups

    de

    fouet,

    le

    plus haut

    degré

    : il

    n'est

    pas jus,

    mais

    il

    est joint, comme une forme supérieure,

    à doux sanctions quo

    connaît

    bien

    le jus romain. •

    II. — Védique

    sám yóh

    Dans le

    Rg-Veda,

    le mot

    yóh

    n'est attesté qu'en combi

    naison

    avec sám (šam

    yóh

    17 fois ; sám ca yóš ca 3 fois ; le

    composé

    samyóh

    1

    fois, à moins

    qu'il

    ne

    s'agisse" encore

    de

    sám

    yóh)

    et ne

    figure

    dans aucun

    autre

    composé,

    alors

    que

    sám « Heil, Segen » se rencontre souvent seul

    et

    fournit le

    composé šambhú (sambhû, šámbhavislha, višvášambhu). Les

    deux neutres sám

    et

    yóh

    ne

    sont employés qu'au nominatif-

    accusatif.

    1.

    Les

    verbes les plus usuellement associés à sámseul sont

    les verbe^

    as- et

    bhu- « être, devenir »

    (63 cas

    sur 871) ;

    on

    ne

    s'étonne donc pas

    de

    les trouver aussi, l'un deux fois, l'autre

    trois,

    associés à l'ensemble sám yóh. Mais, sur les 16 autres

    exemples,

    7

    présentent

    sám

    yóh

    (ou s'a

    m

    ca

    yóš

    ca)

    en dépen

    dance dû verbe

    dhâ-

    « mettre, établir, etc. », alors que les

    9

    exemples

    restant contiennent chacun, ou presque, un verbe

    différent

    (vah- 2

    fois ; yam-,

    ïd-,

    dâ-,

    sru-,

    kr-, à-yaj- et

    as-,

    vas-

    1

    fois chacun). Comme, de

    plus, sám

    seul n'est jamais

    appuyé sur

    le verbe dhâ-,

    on peut dire, statistiquement, que

    la

    présence

    de

    yóh tend

    à entraîner,

    pour

    sám yóh,

    la

    même

    racine

    verbale dhà- qui figure

    aussi,

    soudée

    à yaoš-, dans l'avestique

    yaoz-dâ-, et par

    conséquent que

    l'expression *yaus dhâ- était

    déjà indo-iranienne (cf. Gtj-

    dans

    vo[xo6fr/)ç,

    0ео-[ло8ет7)

  • 8/19/2019 À Propos Du Latin « Jūs »

    7/19

    ÍOO

    ^kEVUtí

    L>E

    L^HISTOIHE DES

    RV,

    2,

    33

    est

    un

    hymne

    à

    Rudra où le dieu est plusieurs

    fois

    salué comme guérisseur (str.

    2, 5,

    12)

    ; la strophe 13 dit :

    -

    vo

    bheçajâ

    marulah

    sùcïni

    -

    yd

    samtamâ vr§ano yd

    mayobhů

    y

    yâni mánur ávrwtu pilu nas

    la sám ca

    yóš

    ca

    rudrasya

    vašmi

    Vos

    médecines

    brillantes,

    ô'Maruts,

    les très salutaires, ô taureaux,

    les

    bienfaisantes, celles

    que notre

    père

    Manu a demandées,

    je

    les

    souhaite, elles, le sám et le yôh de Rudra

    C'est évidemment au même fait légendaire que se

    réfère

    la

    seconde moitié de

    RV,

    1, 114, 2

    (au même Rudra)

    :

    '

    yac chám

    ca yóš

    ca

    mánur âyejé pitâ

    iád

    asyáma láva

    rudra

    práyalisu

    Le sám et le yóh

    que

    le père

    Manu

    a obtenus

    par

    un

    sacrifice,

    puissions-nous l'atteindre sous tes conduites 1

    Ainsi

    sans doute que le premier vers

    de

    RV,

    1, 106,'

    5

    lirhaspati)

    :

    sám yór

    yát

    te mánurhitam tad ïmahe

    Le

    sám yóh

    qui a

    été

    mis (dhu-)

    par toi

    dans Manu,

    nous

    le

    demandons

    '

    .

    , 6, 50, 7, demande aux

    Eaux,

    âpah

    :

    dhâta...

    sáni

    yóh,

    yuyám

    sthá

    bhisájó

    mâtftamâ... '

    Mettez

    (dhâ- ; = donnez)...

    le

    sám

    yóh,

    car vous êtes médecins,

    très maternelles...

    Cf.

    encore

    RV,

    5, 53,

    14 :

    ...vrství sáni yôr.upah usri

    bhesajám...

    ... les eaux, à l'aube, ayant

    fait

    couler

    le

    sám

    yôh, la

    médecine...

    A

    propos

    de ces derniers exemples qui font des eaux, âpah,

    les grandes donneuses de sám yóh,

    on

    notera l'emploi fréquent,

    dans

    l'Avesta,

    de yaoz-dâ-

    en

    rapport

    avec

    les

    eaux

    (арб,

    Anáhitá) qui sont un des deux grands moyens

    de

    purification :

    Y., 65,

    5 (d'où YL, 5, 5) : la rivière mythique

    Anâhitâ

    (qualifiée d'ailleurs

    au verset 1 de baěšazyá «

    guérisseuse »)

    dit

    elle-même : *

    me

    про

    уаоЫаЫШ...

    Cette eau de moi met dans

    l'état optimum (ou :

    purifie)...

  • 8/19/2019 À Propos Du Latin « Jūs »

    8/19

    A

    PROPOS

    DE LATIN «

    JUS »

    101

    Les

    exemples

    du

    Vidêvdât sont nombreux :

    НакдГэХ

    âpô vîsrasiaydti aba

    yaoždayqn...

    (7,

    29)

    Qu'ils

    aspergent

    d'eau

    une

    fois

    pour

    purifier...

    tanum pairi.yaozdaiQïta g5aS maësmana apâca... (8, 36)

    II

    purifiera tout son corps avec de l'urine de bœuf ef, de l'eau...

    âpô tanum pairi.yaozdaiQïla... (9, 31)

    II

    purifiera tout son corps

    d'eau...

    Cf. encore

    :

    yaoîdya

    tačinli âpô zrayaňhat hača puitikât... (5,

    19)

    Avec

    purification les eaux

    coulent

    hors du lac

    (mythique) Pûitika...

    3.

    Dans

    quatre

    passages

    du

    Çg-Veda

    (1,

    189,

    2

    ;

    4, 12,

    5

    ;

    5,

    69,

    3 ; 6, 5Qr 7), on rencontre la prière : bhdvâ (ou ; yàchâ ;

    ou :

    ïde

    ; ou : dhdta)

    tokâya

    tánayaya sárp, yôh «

    sois

    (ou :

    donne ; ou : je

    demande

    ; ou : mettez, établissez)

    le

    šám yóh

    pour le toká-lánaya ». On

    interprète ces

    deux

    derniers

    mots

    de

    façons différentes ; loká signifie

    sûrement,

    au

    propre,

    «

    semence

    »

    et, par suite,

    «

    descendance

    »

    ; lánaya est ид

    adjectif signifiant,

    suivant

    les uns, « prolongé »

    (rac.

    lan-), sui-

    "

    vant d'autres, « corporel »

    (cf.

    lanu « corps

    »), et, pour

    d'autres

    encore,

    il

    est

    un

    substantif désignant

    la

    «

    descendance

    élo

    ignée

    » par opposition aux « enfants » que

    désignerait

    spécia

    lement toká. Geldner traduit par exemple 1, 189,

    2

    : « Sei fiir

    den

    leiblichen Samen zum Wohl und

    Heil

    » Dans tous les

    cas, il s'agit d'obtenir le sám

    yóh

    pour les

    enfants,

    pour les

    descendants

    qui sont « semence ».

    Cela

    rejoint les textes avestiques où le mot yaoï-dà- note

    l'heureuse action d'Anâhitâ sur les agents

    physiologiques de

    la

    génération.

    Dans F.,65,

    2 (d'où

    Yt.,

    5,

    2)

    il

    est dit

    d'Anâhitâ:

    víspanqm,aršn

  • 8/19/2019 À Propos Du Latin « Jūs »

    9/19

    102

    REVUE

    DE

    L'HISTOIRE DES

    RELIGIONS

    II

    semble que la perspective eschatologique propre au

    mazdéisme a étendu cette liaison «zqiïa-

    (naissance) —

    yaozdâ- »

    à

    une autre

    sorte

    de

    naissance,

    plus

    importante

    que

    l'autre, la

    re-naissançe (aipi.zqda-), la

    naissance à

    la vie

    éternelle.

    En

    effet, ce mot

    aipi.zqba n'apparaît

    que deux

    fois

    jdans l'Avesta

    (dans une

    Gâthâ,

    F., 48, 5,

    et,

    d'après elle

    sans

    doute,

    dans

    V., 5,

    21)

    et,

    les deux fois, le mot est en dépendance

    de

    l ad

    jectif

    yaozddh-

    (avec le sens mystique, le premier sens

    de

    Bartholomae) : le Bon Enseignement procure dans

    sa

    plénitude

    pour l'ijomme la re-naissance (yaozdâ

    masyâi

    aipi.zqbdm...).

    4.

    Plusieurs

    strophes du

    Rg-Veda

    contenant

    l'expression

    sám

    yóh

    sont

    peut-être

    fondées

    sur

    le

    système des

    trois

    fonc

    tions1. Mais,

    l'imprécision,

    la

    multivalence des termes les plus

    importants ne

    permet

    pas

    de conclusion ferme. De plus,

    sám

    yóh

    apparaîtrait alors toujours au niveau de

    la troisième fonc

    tion

    et

    non de

    la

    première, à

    la

    différence de ce

    qu'on

    a

    vu

    dans

    TAvesta

    (ci-dessus", sous

    I,

    2),

    peut-être parce que, dans

    l'Inde

    védique, tout ce

    qui

    est

    médecine (ci-dessus,

    sous

    II, 2)

    et

    fécondité ;(ci-dessus, sous

    II,

    3) relève expressément, des

    Nâsatya,

    c,Tà-d. des dieux patrons

    de

    la troisième fonction2.

    ,

    Í89,

    2

    Agni)

    :

    .

    .

    ,

    -

    л agne

    Ivám

    pârayâ navy o asmân

    svaslíbhir áti durg дух víšvá

    . .

    .'

    pus

    ca prlhivï

    bahuld na

    urvi

    bhává tokdya tánayaya šájp, yóh

    O Agni, toi,

    fais-nous passer

    de nouveau, avec des bénédictions

    (.svasli)

    par

    delà

    toutes

    les

    difficultés

    Sois) pour nous une forteresse

    pur)

    large,

    forte, vaste Sois,

    pour,

    la

    semence prolongée (ou : cor

    porelle), le

    sám

    yôhl

    . • =

    -r,s

    4,

    12,5

    Agni)":

    '

    ..

    '

    niahás

    cid

    agna

    спащ abhïka

    urvád devánám uiá márlydnum%

    ••■

    ■ rnd te sákhayah sádam id rifâtna

    •.y áchá

    tokáyci tánayaya sám yóh

    1)

    Sur

    ces

    applications du système

    des trois fonctions dans la

    poésie- védique,

    v. JMQ IV, pp. 101 et suiv. (et p.

    101,

    n. 1).

    2) V. JMQ III, pp.

    92,

    159

    ;

    IV, pp. 13 et saiv.

    -'■

    • . •

    .

    t

    -

  • 8/19/2019 À Propos Du Latin « Jūs »

    10/19

    Л

    PROPOS

    DE

    LATIN

    «

    JUS »

    103

    O

    Agni,

    (garde nous) du

    grand péché

    (énas)..

    ?.. contre

    les dieux

    et

    les hommes Nous,

    tes

    amis, que nous ne

    soyons

    jamais blessés

    (ris-

    :

    cf.

    avest/

    raës-,

    iris- « blesser » ;

    raësah,

    persan reš « blessure » ;

    lit.

    ráiszas

    «

    boiteux

    »...)

    Donne,

    pour

    la

    semence

    prolongée

    /(ou

    :

    corporelle) le

    sám" yóh

    Plusieurs strophes associent trois notions : 1°

    un

    dérivé de

    la racine av~ (cf. lat. avère,

    etc.)

    « donner aide mystique,

    grâce,

    faveur » ; 2°

    le

    sárman « protection par

    couverture,

    abri

    contre les coups » (sárman est tout

    proche

    de

    got. hilms,

    all.

    Helm

    «

    casque

    »

    : rac.

    de lat.

    cěláre, irl.

    celim, etc.)

    ; 3° le

    sáni yóh.

    Bien

    que l'orientation

    de

    sám yóh vers la troisième

    fonction

    ne

    soit

    plus exprimée

    par

    desr

    mots

    marquant la

    fécondité

    (du

    type tokâya lanayâya),

    la

    nuance des deux pre

    miers termes des

    triades

    et l'analogie des deux strophes

    pr

    écédemment

    citées suggère de voir ici aussi un groupement de

    prières faisant

    référence

    aux trois fonctions :

    RV., 1, 93, 7

    Agni

    et Soma) :

    sušármáná

    svávasči hi bhutám

    álhá dhattam yajamânâya sám

    yóh-

    Puisque vous êtes

    bien

    couvrants, bien favorisants, conférez (=

    don

    nez) au sacrifiant le sám yóh

    De même 1, 34, 6 prières Ašvin

    d'apporter trois

    sortes de

    grâces :

    oman

    (encore la

    racine av-) « faveur, aide

    mystique

    »

    ;

    samyôh; « le triple sárman, c.-à-d. protection-couverture ». De

    même encore,

    peut-être avec une autre expression de la

    deuxième fonction,

    8,

    71,

    15

    prie

    Agni d'écarter l'ennemi

    (dvêso yôlavai) et

    de

    donner le sám

    yóh

    (sám yóš ca dâtave) et

    ajoute qu'Agni doit être

    invoqué

    partout avitéva, comme

    celui

    qui donne aide mystique (avilf).

    Mais,

    encore une

    fois,

    il

    n'est

    pas

    sûr

    qu'il

    y

    ait

    classif

    ication dans ces formules triples : des mots comme svasli,

    el

    même ávas, oman, aviif, ne se laissent pas rattacher

    awz

    sûrement au

    premier

    niveau

    fonctionnel.

    "-'-..:

    'r-z

    5. Il semble

    qu'on

    puisse rendre compte de touš les emplois

    du

    mot

    indien

    et

    du mot iranien

    en

    partant, pour

    *

    y auš,

    d'un

  • 8/19/2019 À Propos Du Latin « Jūs »

    11/19

    104

    REVUE

    DE L'HISTOIRE DES RELIGIONS

    double sens

    voisin

    de ce que présente encore avest. yaoš- dans

    yaoz-dâ- :

    1° État optimum (du point

    de

    vue

    ou

    mystique

    ou

    rituel)

    à

    atteindre

    à

    partir

    d'un état

    donné

    ;

    2° État

    normal

    à

    restaurer à

    partir d'un état souillé ou

    malade.

    L'expression déjà

    indo-iranienne *yauš dhâ- (v. ci-dessus,

    sous II, 1)

    devait

    signifier

    l'une

    et

    l'autre

    de ces deux

    opéra

    tions le

    progrès

    (mystique,

    rituel)

    vers

    l'optimum,

    la correc

    tion

    rituelle)

    de

    la

    souillure.

    *'.'.'-

    ; III. —

    Irlandais

    uisse,

    latin jus

    1.

    S'il faut vraiment l'expliquer

    par

    *iusliio- (H. Pedersen,

    Vergl. Gramm. d.

    kelt.

    Sprachen,

    I,

    1909, p.

    64,

    à propos du

    traitement

    irlandais de */-), l'adjectif irlandais

    u(i)sse,

    usa

    «

    mérité

    », reposerait sur *ious- pris dans

    un

    sens voisin du

    premier sens

    d'indo-iranien

    *yaus : « état maximum

    auquel

    un

    être

    peut se

    proposer d'atteindre

    ».

    En effet, avec

    un infi

    nitif

    ou

    un

    substantif muni

    d'un

    adjectif

    possessif (« est

    mérité

    son... »),

    il fournit

    l'équivalent de l'adjectif verbal

    en

    -ndus du latin. Le lexique de

    Windisch,

    au premier tome des

    Irische

    Texte,

    p. 864, cite

    is

    huisse a molath «

    laudandus », is

    huisse a legend « legendus », is use aisndis de « loquendùs »,

    hůise a serc «

    amandus

    ». Dans une version

    de

    la Táin Bó

    Cualnge (éd.

    Windisch,

    p. 675,

    1.

    4741), le comparatif uissiu

    est employé de

    même

    — en

    mauvaise

    part

    :

    iš uissiu a

    bas

    ocus a éc ocus a

    aided

    ind fir, congreiss

    in

    rig

    samlaid

    « Plus

    méritée

    sa

    mort et son

    trépas

    et

    son

    périssement,

    l'homme

    qui

    excite

    ainsi

    le roi

    »

    (Une

    variante, ibid., n. 13,

    donne le

    positif

    hisa,

    c.-à-d. usa ; une autre remplace uissiu par côir

    « convenable »

    :

    as

    cuir

    bas el

    sideadh

    et écc

    do

    tapairl donto

    gresis

    in

    righ mar sin ;

    le lexique de

    O'Clery glose d'ailleurs

    aussi. usa par côir.)

    11

    ne

    semble pas que uisse

    ait

    d'emploi

    juridique

    ; il ne

    figure

    pas, en

    tout

    cas, dans le

    lexique

    des

  • 8/19/2019 À Propos Du Latin « Jūs »

    12/19

    A

    PROPOS

    DE LATIN «

    JUS

    »

    105"

    Lois

    ď

    Atkinson1 efe le redoutable censeur Whitley Stokes

    n'a

    rien

    trouvé à redire à cette

    absence2.

    2. Je

    ne

    veux pas

    me

    substituer aux latinistes et aux

    juristes, pour. éclairer

    la

    préhistoire de jus à

    la

    lumière de

    quelques-unes des

    données

    indo-iraniennes ci-dessus réunies.

    J'indique seulement une

    direction

    dans laquelle cette opéra

    tionme paraît possible.

    Dans l'usage que nous lui

    connaissons,

    le mot

    latin

    n'est

    que

    laïque. Il désigne au sens strict : « l'aire d'action ou

    de

    prétention maxima résultant de

    la définition

    ou

    du

    statut

    conventionnel d'un. être;

    la formulation

    de cette aire. ».. En

    cas

    de

    conflit

    entre.

    plusieurs

    jura,

    le

    judex

    .dit

    les limites

    de-

    chacun ; en

    cas

    de

    violation flagrante d'un

    jus,

    il

    dit

    la peine

    et la réparation.

    Que

    le

    mot ait eu d'abord une

    valeur juridico-religieuse

    et peut-être des

    usages

    purement

    religieux, c'est ce qui res

    sort,

    on le sait,

    du verbe juràre

    et

    du

    nom

    du serment, jus

    jurandum. Quelle était cette

    valeur

    ? La considération des

    sens ďindo-iranien *yauš,

    la

    nécessité

    logique

    de

    concevoir

    un

    pont entre ces sens

    et

    le sens historiquement attesté

    de

    jus

    suggèrent,

    sans

    modifier ce

    dernier,

    d'y

    ajouter

    mention

    de

    la force

    mystique, soit inhérente, soit conférée

    par

    un dieu

    pris à

    témoin, qu'avait une telle formulation.

    Juràre serait

    alors proprement

    : « définir pour

    soi,

    par une formule

    à

    eff

    icacité mystique, une

    aire

    *d'action à remplir », c'est-à-dire,

    comme

    nous

    disons

    plus

    simplement

    :

    « s'engager par serment ».

    Juràre

    in verba

    alicujus

    serait proprement :« répéter, adopter,

    en lui donnant quant

    à soi

    force

    mystique, le programme

    d'action formulé par quelqu'un

    п., Jus jurandum

    serait

    pr

    oprement

    :

    «

    la formulation

    à

    faire

    pour

    se

    définir,

    .

    avec

    .contrainte

    mystique, un programme

    d'action».

    Dépassant le

    domaine de l'action, ne regardant plus seulement l'avenir,

    juràre

    aurait.pris le sens

    plus,

    large

    de

    «

    doirae£

    £оДОл

    1)

    Glossary to

    vol.

    Í-V of The

    Ancient Laws

    of

    Ireland, Dublin, 1901.

    2) A criticism of Dr. Atkinson's Glossary..., London, 1903.

  • 8/19/2019 À Propos Du Latin « Jūs »

    13/19

    106

    RKVUE

    DE

    l'hISTOIUE' DKS

    RELIGIONS

    tique à

    une

    formulation quelconque

    qui,sautrement, serait

    banale et révocable

    » :

    est enim

    jus jurandum, dit le De offi--

    dis, III, 29r

    affirmalio

    religiosa..

    3.

    En

    tout

    cas

    la grande

    innovation, celle qui a rendu

    pos

    sible l'épanouissement illimité du «

    droit

    romain », éclate dans

    le

    composé

    latin judex. Là où les Indo-Iraniens disent *yauš

    dhá-

    et

    les Iraniens yaož-dá-, les Romains disent ju-dic- non

    plus avec la

    racinede

    'Ú6y)(ju et

    de facio,

    mais avec

    celle de

    (kixvufn et

    de dïco1. Le consécrateur ou

    le purificateur iranien

    (yaozdâlar-) « met » automatiquement le yaoš dans un être

    ou

    dans

    un objet

    ; c'est du

    moins l'essentiel de son

    opération,

    ce

    sur

    quoi

    seul

    insistent

    les

    textes.

    Le

    consul,

    le

    juge

    romain

    (judex),

    lui, montre

    d'abord le

    jus à appliquer ;

    notamment,

    avant de châtier,

    il

    « dit » (donc

    il

    examine,

    il

    pèse) s'il y a

    lieu

    de

    châtier.

    IV. « JUSTA FACERE »

    1. Si

    l'on

    examine les

    quelque cinquante passages du

    Vidëvdât ou

    le

    mot yaoidâ-

    et

    ses

    dérivés sont

    pris au

    sens

    de

    «

    purifier

    rituellement, désinfecter d'une

    souillure »,

    on

    est

    frappé

    par

    un

    fait

    massif

    :

    à

    deux

    ou

    trois

    exceptions

    près,

    ils

    sont tous relatifs à diverses formes d'une seule

    et

    même

    souil

    lure, celle que confère

    la

    vue

    ou le contact ou la proximité

    (spatiale, consanguine)

    ou encore le mauvais

    usage

    d'un

    cadavre.

    On sait que l'Iran est particulièrement sensible au péril

    que fait courir à

    la

    bonne création cette œuvre d'Anra Mainyu

    qu'est la

    mort

    et

    que le mazdéisme interdit aussi bien la

    émation

    que

    l'ensevelissement

    et généralement

    tout

    ce

    qui

    imposerait la matière morte (avest. nasu : cf.

    grec véxuç,

    oç, lat. nex, etc.) à ces éléments saints

    que

    sont

    la

    Terre,

    '

    -

    1)

    Cf. le magistrat

    osque

    med-dix

    «

    judex », nom forma sur une гас. med- qui, en

    italique

    comme en iranien, a

    des emplois relatifs

    à

    la

    «

    médecine

    » :

    Benveniste,

    art.

    cit.,

    pp. 5 et suiv. Le grec Six*) montre une utilisation juridique plus directe

    encore

    de la

    racine *deik-, — Le latin connaît d'ailleurs

    des expressions où

    jus est

    combiné avec

    facio

    : p.

    ex.,

    la

    formule (de

    sens

    controversé) du sacra-

    mentum

    in rem :

    «'

    jus feci, sicut vindictam imposui »,

  • 8/19/2019 À Propos Du Latin « Jūs »

    14/19

    A

    PROPOS DE

    LATIN « JUS »

    107

    l'Eau, le Feu. Ce péril, cette

    puissance de

    corruption, l'Avesta

    les

    personnifie

    dans

    un

    être qui porte lui-même le nom de.

    Nasu,

    la démone,

    la

    druj

    Nasu,

    et

    qui

    reste,

    à

    l'affût

    des

    vivants, dans le cadavre,

    jusqu'à

    ce qu'elle

    en

    ait été chassée

    par

    la cérémonie célèbre du

    Sag-dîd, «

    jusqu'à

    ce

    que

    le chien

    ait vu

    le

    corps

    ou l'ait dévoré ou que les oiseaux carnivores se

    soient

    abattus sur

    lui

    »

    (V.,

    7, 3

    ; cf.

    8, 16-22, etc.).

    Pour

    toutes

    les autres

    fautes

    et souillures rituelles

    que

    prévoit

    le Vidëvdàt —

    et

    elles sont nombreuses — les mots qui

    désignent l'expiation

    ou

    la réparation

    exigée, 'outre cibâ

    et

    арэгдШ

    signalés plus haut1, sont paititiš (Darmesteter : « péni

    tence

    » ;

    littéralement

    «

    retour

    »

    ;

    traduction pehlevie

    ióžišn,

    comme pour a"6â), uzvardzdtn, uzvardšliš (proprement : « répa

    ration d'une mauvaise action par une bonne ») ;

    on

    trouve

    encore, dans une

    Gâthâ

    (Y., 30, 8), kaënâ «

    punition

    »

    (exa

    ctement le même

    mot que

    tcoiv/j)

    et, dans

    un

    Yašt

    (14, 34),

    le

    mot baesazô (proprement « remède »). Mais, dans les chapitres

    ou fragments

    de

    chapitres du Vidêvdât où il est question

    d'une

    souillure

    (soit inévitable, soit par

    imprudence,

    soit volontaire)

    provenant d'un

    cadavre,

    nasu,

    c.-à-d.

    de

    la démone Nasu, et

    dans

    ces

    cas

    seulement,

    yaoïdà-

    et ses

    dérivés

    apparaissent

    et

    dominent.

    Peut-être, ce fait

    rejoint-il,

    en

    négatif

    (« anti-mort

    »),

    cet

    autre fait,

    signalé

    plus haut2,

    et

    positif (« pro-vie »),

    que

    consti

    tuent les rapports particuliers (Avesta, Çg-Veda) entre yaoždá-

    qu sám

    yóhet

    la

    « semence

    », la génération, la descendance. En

    tout

    cas,

    l'enseignement de

    la

    statistique est clair

    :

    dans

    l'Iran

    mazdéen,

    yaoždá-, c'est presque

    uniquement

    « purifier.» (les

    vivants, la

    maison,

    les objets...)

    de

    la souillure qui

    résulte

    d'un

    cadavre,

    de

    la démone

    Nasu

    ;

    et,

    en

    particulier,

    de

    la

    souillure

    involontaire, inévitable, qui frappe l'homme le plus pieux

    quand

    quelqu'un meurt chez lui ou

    quand il

    se trouve dans

    l'aire, plus ou moins vaste selon les

    cas,

    de

    contagion d'un

    1) Ci-dessus (sous I,

    2)7p. 98. ■ •

    .

    2)

    Ci-dessus (sous II, 3),

    pp. 101

    et

    suiv.c

  • 8/19/2019 À Propos Du Latin « Jūs »

    15/19

    108

    REVUE

    DE L'HISTOIRE DES RELIGIONS

    cadavre1.

    Le huitième

    chapitre du Vidëvdât prévoit

    deux

    ci

    rconstances

    :

    si l'homme a touché

    le cadavre

    après

    que la

    Nasu

    avait .été chassée, le

    cas

    est

    bénin,

    une seule purification

    (pairi.yaozdâ-),

    par

    l'urine

    de

    boeuf

    et

    par l'eau, suffît

    (ver

    set

    6)

    ;

    si

    la

    Nasu était

    encore présente, le

    cas est plus

    grave :

    il

    faut,

    dans trois

    séries de trois

    trous

    rituellement creusés,

    trois purifications

    (pairi.yaozdâ-)

    successives, deux

    fois

    d'urine

    de

    bœuf,

    la

    troisième d'eau ;

    et

    l'homme

    se lave les

    diverses parties du corps dans

    un ordre

    savant, en

    commenç

     nt

    ar les mains (sans quoi vïspqm hvqm

    tanum

    ayaozdâla

    кэгэпаоШ, il

    rend tout

    son corps

    non-y aozdàla),

    pour

    pousser

    la démone

    Nasu

    d'organe

    en

    organe

    jusqu'à

    un dernier

    refuge,

    Vorteil gauche,

    d'où

    il

    est facile, par un dernier filet d'eau, de

    la

    débusquer « sous

    la forme d'une

    mouche furieuse..:

    ». L'homme

    est

    ainsi

    pur

    (v. 37-71).

    2.

    A

    Rome, la question des funérailles se présente tout

    autrement,

    puisque

    l'usage admet et la crémation et

    l'enseve

    lissement et

    que

    le

    droit pontifical

    paraît' avoir

    donné une

    préférence

    presque exclusive à

    l'ensevelissement,

    c.-à-d.

    à

    ce qui constitue au contraire

    un

    des péchés

    inexpiables

    du

    mazdéisme.

    Deux

    idéologies

    inverses

    commandent

    ici

    les

    pra

    tiques : le

    mazdéen a

    le

    souci de

    ne

    pas souiller les

    saintes

    matières (terre,

    eau,

    feu), en

    particulier de

    ne

    pas faire une des

    choses qui « mettent le plus mal à l'aise le Génie de

    la

    Terre »

    (V., 3, 8) ; tandis que le Romain a le

    souci de

    restituer à

    la

    Terre-mère le corps qui a cessé/

    de vivre2.

    Il

    n'en

    reste pas

    moins que

    le pluriel

    justa a un

    sens tech

    nique, et

    un seul,

    très particulier :

    les expressions jusla

    facere,

    j. peragere,

    j.

    solvere

    ou persolvere, j.

    dare, j. ferre, j.

    praes-

    tare,

    etc.,

    signifient,

    sans

    confusion

    possible,

    «

    accomplir

    les

    f y â d'ailleurs à Cette occasion toute

    une

    casuistique': tou6h eť u'n Cadavre

    desséchéne

    souille

    pas,- car

    nâjt hišku

    hiškmi

    sraěšyeiti

    «

    le.

    sec ne colle

    pas

    au sec-».

    De

    plus, on â le moyen de limiter

    les

    risques par

    des

    funérailles conduites réguli

    èrement (avec des purifications provisoires dans de l'urine de

    mouton

    ou de

    bœuf) :

    V., 8,

    13.^

    2) Gicéron, De

    legibus,

    2, 22

    :

    reddilur enim terme

    corpus

    et ita lomlitm

    ac

    situm

    quasi

    opcrimento matrix

    obducitur, e

  • 8/19/2019 À Propos Du Latin « Jūs »

    16/19

    A PROPOS DE LATIN «

    JUS

    »

    .

    '

    ЮУ

    cérémonies

    funèbres

    e1.

    Il

    s'agit sûrement d'une vieille express

    ion,ui

    atteste un rapport particulier entre une forme de jus

    et

    le

    rituel

    funéraire2

    ;

    un rapport d'ailleurs

    complexe

    :

    les

    Romains

    comprennent

    certes qu'il

    s'agit de

    donner ce

    à quoi

    il

    « a droit » au mort {jus

    Manium,

    etc.)3,

    et

    peut-être aussi à

    la

    Terre : mais l'opération a

    'un

    autre aspect ; tant que les jusia

    n'ont

    pas été accomplis jusqu'au bout, la

    famille

    est f unesla ;

    leur accomplissement seul

    la

    rend

    pura, la

    purgali

    Justa est

    donc

    fondamentalement

    lié à l'effacement

    de

    la souillure

    résultant

    de

    la proximité (consanguine) d'un mort.

    La cérémonie

    de

    cette purification portait

    un

    nom

    auquel

    les

    faits

    iraniens

    précédemment rappelés donnent une

    riche

    résonance

    : denicales

    feriae.

    L'abrégé

    de Festus par Paul

    Diacre dit,

    par exemple (s.

    v.)

    :

    denicales ferîae

    colebanlur,

    quum hominis morlui causa familia purgabalur ;

    Graeci

    enim

    véxuv

    morluum dicunl. Et Cicéron, dans le précieux chapitre

    21

    du

    second livre

    du

    De legibus

    où il donne

    tant de renseigne

    ments

    ur le jus

    Manium,

    produit

    la

    même etymologie,

    d ail

    leurs incontestable4,

    sous sa

    forme latine :

    denicales, quae a

    nece appellatae sunl. Tout se passe comme si les jusla du jour

    des

    denicales

    feriae

    avaient

    pour objet

    de

    chasser

    du monde

    des vivants

    (de-) la

    souillure de

    la nex, comme l'Iranien

    purifie

    (yaozdâ-)

    sa

    personne

    et ses

    biens

    de

    la souillure

    de

    la

    druj Nasu.

    En rapprochant les

    quelques

    documents

    conservés

    sur

    la

    matière, Samter {PW., V,

    col. 219-220),

    G.

    Rohde

    {ibid.,

    XVIII, col.

    1534-36)

    ont dégagé en quoi consistait l'essentiel

    1) Cf.

    Ovide, Fastes,

    V, 480 (cf. 450;

    jusla,

    dans

    ce

    sens'

    technique,

    mis

    en rapport

    avec

    la

    fête

    des

    Lemuria

    :

    Romulus obsequilur, lucemque Remuria dixit

    Ulam, qua

    positis justa ferunlur avis.

    2) Les

    expressions grecques

    та Sinatot, та vópupia, та

    vojjuÇo[j.eva,

    qu'on

    rap

    proche avec raison

    de justa

    dans

    son

    emploi

    ordinaire,

    n'ont pas

    ce

    sens

    technique.

    }\ faut aussi

    quelque

    bonne

    volonté pour mobiliser ici le oooa ëoixs de a, 292.

    3)

    Tite-Live,

    1,

    20,

    7

    .* (Nuraa décida) ...пес саеШШ modo caerimonias, sed

    jusla quoque Junebria placandosque Mânes ut idem ponlifex, edoceret.

    4) Et

    qui

    doit

    attester

    un

    sens

    archaïque

    de

    nex

    plus vaste que

    «

    mort

    violente

    »;

    puisque les denicales

    feriae paraissent

    suivre

    toute mort.

  • 8/19/2019 À Propos Du Latin « Jūs »

    17/19

    1

    10

    ftËVUË t>Ë L'HlSTOtftE DÈS RELIGIONS

    de

    cette purgatio, des

    dcnicales

    jeriae : le jour des funérailles,

    avant de brûler

    le

    corps, on

    avait

    prélevé un

    os

    (os reseclum,

    os

    exceptum)

    ;

    quelques

    jours

    plus

    tard,

    aux

    denicales

    ferine,

    on

    inhumait cet os, comme l'équivalent symbolique

    du corps

    auquel, en principe, la Terre-mère

    avait

    droit

    en

    totalité.

    Il

    paraît

    qu'on utilisait surtout, comme os

    resedùm,

    un doigt ;

    Festus

    dit (s. v.

    membrum

    ubscidi) : membrum

    abscidi morhio

    dicebalur, quum digitus

    ejus decidebafur,

    ad

    quod servatum

    jusla fièrent, reliquo

    corpore combuslo.

    Qu'il s'agisse là, outre d'un «

    devoir

    funèbre

    », d'une

    purifi

    cation des vivants, c'est ce

    qui

    ressort,

    par

    exemple, de

    Var-

    ron,

    De

    ling, lat.,

    3, 4

    :

    ...

    aut,

    si

    os

    excepium

    est

    mortui

    ad

    fami-

    liam purgandam, donec in purgando humo non

    est

    operius

    (ut ponlifices dicunt, quoad inhumatus

    sit), familia funesta

    manet. La

    même intention

    ressort aussi de

    la

    curieuse règle

    relative

    à ceux qui, necali en

    mer,

    ont été jetés par-dessus

    bord : s'il ne s'agissait

    que

    de

    jura compris comme « droits »

    des morts, comme « devoirs » à

    rendre

    aux

    morts,

    ou encore

    de

    dette

    envers la

    Terre,

    on s'attendrait

    à

    une

    multiplication

    non à

    une suppression des cérémonies ;

    c'est

    le

    contraire

    qui

    a.

    lieu

    :

    «

    la

    famille

    est

    pure

    [sans

    denicales

    feriae],

    parce

    qu'il

    ne

    reste pas d'os sur

    la

    terre »

    (Cicéron,

    De leg., 2, 22 fin : in eo

    qui in navi necatùs, deinde in

    mare'

    projedus esselr decrevit

    P. Mucius familiam puram,

    quod os

    supra

    ierram non

    pxslarel...).

    Ces faits romains1

    paraissent

    conserver, et

    dans

    le

    mot

    jusla,

    et

    dans les rapports qu'ils établissent entre les denicales

    jeriae

    et

    les jusla, le

    souvenir

    d'un emploi religieux précis du

    mot jus, tout semblable

    à

    celui

    de

    yaoš qui, dans l'Iran, sou-

    1) II

    faudra aussi

    regarder de près l'expression énigmatique

    que

    fournit le

    même

    chapitre

    du

    De legibus :

    quaeque in

    porca

    contracta jura

    sint.

    Voici

    le vieux

    commentaire

    de J. F. Wagner {Gottingae,

    1804), qui

    en vaut

    bien un

    autre

    (p. 139) :

    «

    Contrahere

    jura h. 1.

    dicitur,

    ut

    : noxam, poenam

    contrahere

    ; i. e. peccato admisso

    obligari ad

    praestandum

    aliquid, quo illud expiçtur. Porca

    autem mactanda

    erat

    ab iis,

    qui in

    justis ferendis

    deliquissent, auctore Festo, p. 373,

    porca

    praecidanea

    mactabatur

    Cereri ab eo,

    qui

    mortuo jusla non fecisset, i. e.

    glebam

    non objecisset... »

    11 semble bien

    que ces « jura » sont religieux

    et relatif* à

    une

    forme

    de purification.

  • 8/19/2019 À Propos Du Latin « Jūs »

    18/19

    Á

    PliOPOS 1)Ы

    LATIN

    «

    JViš » 111

    tient l'opération qui « ijaoždaMili »

    ceux

    qu'a souillés la

    druj

    Nasu1. •

    *

    ;

    V.

    Deux

    classifications des

    coups

    et

    blessures

    1.

    A la fin

    de

    Jupiter Mars Quirinus IV, pp. 170 et

    suiv.,

    ont

    été publiés des fragments d'un mémoire, resté manuscrit,,e" M. Lucien

    Gerschel

    (1945),

    qui tend

    à

    déceler

    dans le

    droit

    romain des traces plausibles

    de

    la

    préhistoire

    indo-européenne.

    En

    un

    autre endroit du même mémoire, M. Gerschel propose

    de voir,

    dans les

    classifications

    romaines archaïques des types

    ďinjuria et

    de

    leurs peines (à savoir2 : 1° malum carmen

    et

    occentaiio

    :

    incantations

    magiques

    hostiles,

    punies

    par

    la

    mort

    sous

    les verges3 ; 2° membrum ruplum et

    [anciennement

    :

    Caton] os fractum : lésion dans

    la

    chair et fracture d'os, punies

    en principe du talion4 ; 3°

    injuria, sans autre qualification

    :

    coup n'entraînant pas blessure, soufflet,

    etc.,

    puni d'une

    amende fixe de 25 as5), une

    utilisation romaine (1°

    crime et

    sanction

    magico-religieux6

    ; 2°

    crime

    et

    sanction violents

    ;

    3° sanction économique) du même système fonctionnel

    que

    M. Benveniste

    a

    signalé

    à propos de

    la

    médecine (classifications

    des

    médications

    ou

    des

    maladies)7

    et

    qui a

    été

    aussi

    rencontré

    1) On

    se rappellera que le

    latin

    sepelio,

    « j'accomplis les rites funéraires

    »,

    rejoint le védique

    šaparyati «

    il rend

    un

    culte

    à

    ».

    2)

    V.

    les

    discussions

    dans R. Monier, Manuel élémentaire de Droit Romain, II,

    éd., 1948, §

    31. -

    3) Nostrae

    XII

    Tabulae, quom perpaucas res

    capite sanxisseni,'

    in his

    hanc

    quoque sanciendam

    putaverunt,

    si

    quis

    occentavissel sive carmen

    condidissel,

    quod

    infamiam faceret flagitiumve

    alteri,

    Cicéron,

    De

    Rep., 4, 12, dans saint Augustin, Civ.

    Dei,

    2, 9 (avec, à la fin,

    la

    môme interprétation que dans Festus, s. v. occenlassinl).

    4)

    Priscien, Gramm., 6, 13, 69 : Cato...

    os protulit

    in VI Orig. Si

    quis membrum

    rupit aut os fregit, talione

    proximus

    cognatus ulciscitur. Mais pour l'os fractum,

    les

    XII

    Tables fixent

    déjà

    l'amende :

    manu fuslive si os

    fregit libero

    CGC, si

    servo

    CL

    poenam subit

    ;

    mais non pour le membrum

    ruplum :

    si

    membrum

    rupsit, ni

    cum

    eo

    pacit,

    talio

    esto

    (Festus,

    s.

    v.

    talionis).

    s

    5) Aulu-Gelle, 20, 1, 12 : Si injuriam faxsit, viginii quinque aeris poenae sunto;

    cf. Festus,

    8.

    v., viginii quinque poenae

    in

    XII signiflcat

    XXV asses.

    6)

    « La peine

    de mort est primitivement une peine

    religieuse et ses

    formes

    sont religieuses : Mommsen a souligné la parenté de l'exécution par la

    hache

    avec les

    rites du sacrifice

    ;

    la mort

    par

    flagellation est,

    à

    Rome comme dans

    toutes les civilisations primitives,

    un

    rite apotropaïque qui expulse le mal et

    chasse

    avec

    l'âme

    du coupable les « miasmes »

    qui

    imprègnent sa personne »,

    Magdelain,

    Sponsio,

    p. 138; cf. Mommsen, Droit

    pénal romain,

    III, pp. 255

    et suiv.

    7)

    Ci-dessus,

    p. 98, n. 2-

  • 8/19/2019 À Propos Du Latin « Jūs »

    19/19

    ÍÍ2

    REVUE

    DE

    L'HISTOIRE DES ftELÍGÍONŠ

    plus

    haut (sous

    I, 2) à

    propos

    des

    sanctions

    religieuses

    du

    Vidëvdât (dans l'ordre ascendant :

    sanction

    économique ;

    2° sanction

    violente

    ;

    3° sanction magique).

    2. On peut

    joindre l'analogie

    suivante.

    La

    classification des

    coups

    en trois

    espèces d'importance inégale [injuria sans

    qual

    ification : « coup n'entraînant pas

    blessure, soufflet

    »... ; mem-

    brum ruptum

    « toute

    lésion

    autre' que

    la

    fracture d'un

    os

    [Appleton,

    Monier]';

    os fractum «

    fracture

    d'os ») se retrouve

    dans le droit avestique :

    Vidëvdât,

    4, 30-34-37, distingue

    trois

    espèces, et trois seulement,

    de coups

    appelés xvara-1 (par oppos

    ition

    aux. menaces armées,

    18

    et

    22,

    et aux

    deux snaba-

    :

    Vardduš

    snaQdm,

    coup sans

    suite

    visible, 26

    ;

    le

    frazâ.baobanhdm

    snabdm,

    blessure mortelle, 40). Ce sont, selon les degrés

    crois

    sants

    d'importance (à

    l'accusatif) : 1° le

    vîxrumantdm xvardm

    (que le Nîrangistân,

    42, appelle simplement

    xvara-,

    sans

    quali

    fication) « coup qui meurtrit sans faire couler le sang » ;

    le

    iacat.vohunïm

    xvardm « coup qui fait couler le sang » ;

    le

    aslô.biBdm xvardm « coup qui entraîne

    fracture

    d'os »2. En

    dépit de

    ce qu'on

    pourrait

    croire, ce

    type de

    classification,

    simple

    et

    «

    conforme à la nature »,

    n'est

    pas fréquent dans

    les

    droits

    de

    l'antiquité.

    Georges Dumézil.

    1} On

    rapproche

    v. h.

    a.

    sweran « schmerzen

    »,

    m. h.

    a. stvcren

    «

    id.

    »

    cl

    « s'ulcérer »

    {ail.

    schwàren). \

    2)

    V.

    Darmesteter, le Zend-Avesta,

    II

    (1892), pp. 57 et suiv., et

    les

    notes

    corriger

    en

    plusieurs points), Bartholomae, Arica, XI, 66, dans Jdg. Forsch.,

    X (1899), pp.

    5

    et suiv., et Altiran. Wôrterbuch, ss. vv.