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LE MAGAZINE DE L’UNIVERSITÉ STENDHAL-GRENOBLE 3 - N ° 4 - MAI 2006 Alphabets Alphabets www.u-grenoble3.fr Un passeport pour reprendre des études Le pied à l’étrier Stendhal redécouvert : le chantier des manuscrits

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Le magazine de l'université Stendhal Grenoble 3

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LE MAGAZINE DE L’UNIVERSITÉ STENDHAL-GRENOBLE 3 - N° 4 - MAI 2006AlphabetsAlphabets

www.u-grenoble3.fr

Un passeport pour reprendre des étudesLe pied à l’étrier

Stendhal redécouvert : le chantier des manuscrits

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Le magazine de l’Université Stendhal -Grenoble 3 - N°4, mars 2006 - Tirage : 7000 exemplaires - Dépôt légal à parution - ISSN : 1772-1873. Directeur de la publication : Patrick Chézaud. Directeur de la rédaction : Bernard Roukhomovsky. Responsable éditoriale : NadiaSamba. Ont collaboré à ce numéro : Marie Butel, Houaria Bessayah, Brigitte Charnier, Marie-Rose Corredor, Francine Delage, FrançoisGenton, Elisabeth Greslou, Michel Lafon, Fabienne Marie, Cécile Meynard, Benoît Peeters, Anne Pradillon, Michèle Sautès, Marie Sibeud,Christian Surcouf, Mariek Verhoeven et les services suivants : Action Culturelle, Ellug, Scolarité et Recherche. Graphisme et réalisation :Jean-Noël Moreira. Fabrication : Imprimerie des Deux Ponts. Crédits photographiques : Bérangère Haëgy.

Contact : Université Stendhal - Grenoble 3 - Service CommunicationDomaine universitaire de Saint-Martin-d’Hères - 1180, avenue Centrale BP 25 – 38040 Grenoble cedex 9Tél. : 04 76 82 43 49 - Mél : [email protected] - www.u-grenoble3.fr

Cheminements…Naguère reléguée dansles faubourgs de lalittérature, la bandedessinée est un genrequi a fait du chemin :explorateur du Monde

d’Hergé et scénariste des Cités obscures,

Benoît Peeters prendra, le 12 avril, lechemin de l’Université Stendhal pour uneconférence très attendue sur le statut du9ème art. Une idée qui a fait du chemin,c’est la validation des acquis : une réponseefficace et pertinente aux difficultés deceux qui, parce que la vie est un cheminqui ne va pas toujours sans sinuosités nichangements de cap, aspirent à reprendredes études à l’université. Il est encore long,mais désormais bien tracé, le chemin ouvertpar les chercheurs du Centre d’étudesstendhaliennes et romantiques dansl’univers labyrinthique et foisonnant desmanuscrits de Stendhal : vertigineuseimmersion dans les secrets d’une écritureet de ses cheminements. Quant auchemin de la recherche, il n’est pas sansdifficultés de toute sorte pour les jeuneschercheurs, thésards ou tout nouveauxdocteurs, qui ont fait le choix de s’y engager;et ce n’est pas la moindre des missionsde l’université que de les préparer à lesaffronter. Tels sont quelques-uns des che-minements retracés dans ce 4ème numérod’Alphabets : à charge pour nos lecteurs– est-il besoin de l’ajouter ? – d’y tracerlibrement leur chemin…

Bernard Roukhomovsky

Sommaire

ActualitéRencontre avec Benoît Peeters

Formation 4Un passeport pour reprendre des études :la validation des acquis

Recherche 6Stendhal redécouvert :le chantier des manuscrits

Thèses 8

Perspectives 9Le pied à l’étrier :pourquoi et comment impliquer les jeunes chercheursUne priorité absolueLe rôle clé de l’École doctoraleLes Doctoriales StendhalLes Tables rondes de Sassenage :un dispositif pédagogique innovantUn colloque international pour et par les jeuneschercheurs

Livres 13Publications des EllugAutres éditeurs

Agenda 15

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Le mot de la rédaction

Alphabets

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Alphabets / 3

Rencontre avec Benoît Peeters

Actualité

Les conférences de l’ÉcoledoctoraleChaque année, l’école doctorale pré-sente, à l’initiative des chercheurs del’université, plusieurs conférences depersonnalités prestigieuses dumondescientifique ou artistique. Ainsi, en avril2005, Michel Tournier a parlé de «ses»humanités. Les conférences du prin-temps 2006 permettront de découvrirdes aspects très variés des disciplinesreprésentées dans l’établissement, du« théâtre documentaire russe » (TaniaMoguilevskaïa, 15 mars) à «l’inventionde l’écriture» (RemoMugnaioni, 29mars),en passant par la bande dessinée…

Voir Agenda page 15

La bande dessinée : sous-littérature ou neuvième art? C’est la questionque traitera Benoît Peeters, éminent spécialiste du genre, à l’occasion de sonpassage à l’Université Stendhal, dans le cadre des conférences de l’École

doctorale.

La bande dessinée (BD) est décidé-ment sous les feux de l’actualité àl’Université Stendhal. Alors que le

Grand Prix de la Recherche Universitairedécerné par le journal Le Monde récom-pensait récemment la thèse consacrée à lafigure d’Astérix par Nicolas Rouvière, jeunedoctorant de l’UFR de Lettres, la BD s’inviteà nouveau dans la maison Stendhal puis-qu’elle fournira le thème de la conférencequ’y donnera Benoît Peeters, tout à la foisscénariste et théoricien du genre, le 12 avrilprochain.

Dans le monde d’HergéBenoît Peeters est né à Paris le 28 août1956. Après une licence de philosophie à laSorbonne, il a préparé le diplôme de l’Écolepratique des Hautes Études sous la direc-tion de Roland Barthes, consacrant unelongue étude à l’album d’Hergé Les bijouxde la Castafiore.Il publie son premier roman, Omnibus, en

1976 et se consacre entièrement à l’écritureà partir de 1982,multipliant les travaux dansles domaines du scénario, de la critique, del’édition et de la conception d’expositions.Spécialiste d’Hergé, il a publié Le Monded’Hergé (1983), Les Bijoux ravis : unelecture moderne de Tintin (1984) et Hergé,fils de Tintin (2002). Théoricien et critique,il est l’auteur de nombreux essais sur labande dessinée (Lire la bande dessinée,2003), sur le scénario, le storyboard, maisaussi sur Hitchcock, Valéry et Nadar.Ilaréalisé troiscourts-métrages,denombreuxdocumentaires (dont une soiréeThémad’Arteconsacrée à Tintin et la série «Comix» surla bande dessinée contemporaine) ainsiqu’un long métrage, Le dernier plan.

Écritures en collaborationUne longue complicité avec FrançoisSchuiten a permis à Benoît Peeters deconstruire avec son ami le cycle des Citésobscures : quinze albums, alternantbandes dessinées et récits illustrés), sontparus à ce jour depuis 1983; ils ont obtenude nombreux prix et ont été traduits dansune dizaine de langues.Passionné par le récit sous toutes sesformes, et les rapports du texte et del’image, Benoît Peeters collabore aussiavec d’autres dessinateurs (Alain Goffin,Anne Baltus, Frédéric Boilet), une photo-graphe (Marie-Françoise Plissart), unechorégraphe (Michèle-Anne De Mey), desmusiciens (Didier Denis, Bruno Letort) etdes cinéastes (Raoul Ruiz, Pierre Drouot,Jaco Van Dormael).Cette écriture en collaboration qu’il pratiquede longue date et dans de nombreux domai-nes, Benoît Peeters en a fait tout récem-ment l’objet d’un livre écrit… en collabo-ration avec Michel Lafon, Professeur audépartement d’études hispaniques del’Université Stendhal, sous le titre Nousest un autre. Enquête sur les duos d’écri-vains (Flammarion, mars 2006). Premièreétude systématique de cette pratiqueméconnue, sur laquelle pèse un véritabletabou, leur ouvrage présente, en une ving-taine de récits, des « vies» d’auteurs encollaboration – des frères Goncourt à

Deleuze et Guattari, en passant par Alexan-dre Dumas et Auguste Maquet, Marx etEngels, Prévert et Carné, Breton et Soupaultou Boileau-Narcejac… Les deux co-auteursprésenteront leur ouvrage le mardi 11 avrilà 18h30 à la Librairie Le Square deGrenoble. �

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Parce que la vie n’est pas toujoursne va pas toujours sans sinuositésni sans bifurcations, les décrets de

1985 et de 2002 relatifs à la validation desacquis ont ouvert la possibilité de fairereconnaître une ou des expérience(s) anté-rieures en vue d’accéder à une formationdiplômante ou d'acquérir un diplôme ouun titre à finalité professionnelle.

La validation des acquis en pratiqueIl existe deux types de procédures de vali-dation des acquis :• La «Validation des Acquis Profession-

nels (VAP)», encore appelée «Valida-tion Accès» permet, suite à une inter-ruption d’études de deux à trois ansminimum selon les cas et sur la basede l’expérience professionnelle et per-sonnelle acquise entre temps, de s’ins-crire dans un cursus de formation del’enseignement supérieur sans satis-faire aux conditions de niveau d’étu-des, de diplôme ou de titre générale-ment requises.

• La «Validation des Acquis de l’Expé-rience (VAE) » nommée également«Validation Obtention» permet, sur labase des compétences développéesdans le cadre d’une activité profes-sionnelle exercée pendant une duréeminimale de trois ans ou/et des étu-des supérieures précédemment réali-sées, de se voir attribuer tout ou par-tie d’un diplôme. Il est à noter qu’encas d’attribution partielle d’un diplôme,le jury émet des préconisations pourpermettre au candidat d’obtenir la tota-lité du diplôme.

Il est possible à toute personne adulte,salariée ou non, de faire une demande devalidation d’acquis. Dans un premier temps,il s’avèrera nécessaire de vérifier que lademande est recevable et le cas échéant,l’étape suivante consiste à monter un dos-sier de VAP ou/et de VAE.Ce dossier n’est pas une simple formalité,

il exige une forte implication du candidat etil est en lui-même formateur. Dans lesdeux cas, il comporte une présentationdétaillée du parcours personnel et pro-fessionnel, l’exposé desmotivations et tousles éléments nécessaires à la compré-hension de la démarche et à l’apprécia-tion du parcours du candidat par la com-mission ou le jury.

Des interlocuteurs pour accompagnerla démarcheFort simple en apparence, cette démarchene va pourtant pas de soi, et nécessite unaccompagnement. C’est pourquoi le serviceFormation Continue de l’Université Stendhals’est fortement engagé, depuis 2003, dansune politique d’amélioration de l’accueildes publics en reprise d’études en généralet tout particulièrement des candidats àla validation d’acquis. Un engagement

renouvelé pour les années qui viennentdans le cadre du nouveau projet d’établis-sement.Il s’agit de prendre en compte les difficul-tés et les appréhensions spécifiques de cepublic issu d’horizons professionnels extrê-mement divers et souvent peu familiersdu monde universitaire, de sa culture etde ses rouages parfois complexes (ou quipeuvent être perçus comme tels).Il s’agit aussi – et c’est la condition sinequa non d’une issue heureuse de la démar-che–• d’identifier la demande précise des

candidats afin de les orienter, en amont,vers les interlocuteurs pertinents,

• de leur rendre plus lisible et plus visi-ble la structure et le contenu des for-mations susceptibles de leur être pro-posées,

• de les renseigner sur les aspects finan-ciers, possibilités de rémunération etcoûts pédagogiques,

• de favoriser, en aval, leur intégrationéventuelle au sein de l’université.

Le mot d’ordre est donc clair : il s’agit detout mettre en œuvre pour faciliter unedémarche dont on sait bien qu’elle n’estjamais vraiment… facile. �

Prendre un nouveau départ sans avoir à repasser… par la case départ,entreprendre des études sans pour autant passer par pertes et profits lebénéfice d’un parcours professionnel? C’est possible.

Formation

Un passeport pour reprendre des études :la validation des acquis

Pour plus d’informations :Service Commun Formation Continuede l'université StendhalBureau RÉVA (Reprise d'Étudeset Validation d'Acquis)BP 25 – 38080 Grenoble cedex 9www.u-grenoble3.frContact : Émily PerrierTél. : 04 76 82 43 18Mél : [email protected]

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La VAP par l’exemple avec Mariek Verhoeven, 30 ans

Une expérience de VAE réussie : celle de Francine Delage, 51 ans

Un parcours originalAprès avoir obtenu un Deug LEA, Mariek a souhaitéinterrompre ses études. «À l’époque, je manquais demotivation et ne voyais pas bien où cela pouvait memener.J’ai préféré me lancer dans le monde du travail et medonner le temps de concevoir réellement un projetprofessionnel, mon but étant de reprendre ensuitedes études en adéquation avec mon projet».Attirée par le domaine du tourisme, Mariek rejointle Bureau des Congrès de Val d’Isère, le temps d’unesaison… qui durera trois ans. Sa passion pour le tou-risme allant croissant, elle accepte la proposition del’agence de tourisme d’affaires Laurus International, etorganise pendant deux ans des manifestations profes-sionnelles et grand public, en France et à l’étranger.Ces deux expériences lui ayant permis de développerdes compétences en matière d’organisation d’événe-ments «sur le terrain», Mariek éprouve le désir de décou-vrir les aspects de communication stratégique qui sous-tendent les événements, en amont.

Peaufiner sa trajectoireRenseignements et conseils pris auprès du servicede la Formation Continue, Mariek dépose une demandede validation d’acquis pour reprendre ses études en3ème année de l’IUP de communication d’entreprise,c’est-à-dire directement à un niveau de master 1

(anciennement maîtrise), alors qu’elle n’a pas de licence.«La constitution du dossier a vraiment été une étape-clé qui m’a obligée à prendre du recul sur mon expé-rience professionnelle, à cadrer précisément mon pro-jet et à le coucher noir sur blanc. » Sondossier ayant été accepté, à la rentrée 2004,Mariek a donc repris ses études.Venant du monde professionnel, elle est unpeu gênée au début : il lui manque quelquesnotions théoriques fondamentales, il fautparfois rédiger des dissertations et puis sui-vre des cours théoriques… qu’elle ne tardepas à apprécier pour la hauteur qu’ils per-mettent de prendre par rapport aux actionsde terrain. Par ailleurs, il y a tous les coursdispensés par des intervenants du mondeprofessionnel qui sont très enrichissants,de même que le travail sur des cas réels.Ainsi, au terme de sa première année dereprise d’études, elle décide de continueren master 2 - communication d’entreprise.«Aujourd’hui, je conseille à ceux qui ont envie de pren-dre un nouveau départ d’effectuer une reprise d’études.Il est vraiment intéressant d’y revenir en sachant mieuxce que l’on veut faire. Et l’aspect financier ne doit pas êtreun frein, car il existe beaucoup de dispositifs qui per-mettent d’obtenir un soutien pécuniaire.» �

Flash backÀ l’âge de 20 ans, Francine revient d’An-gleterre où elle a passé deux ans et entre-prend une licence d’anglais, qu’elle estobligée d’interrompre pour des raisonsde santé. Déstabilisée par cet aléa, elle apeur de l’échec et préfère s’engager dansune filière qui lui permette de travaillerrapidement, ce sera un BTS de secréta-riat trilingue.Après un passage à l’IUFM, elle devientprofesseur de secrétariat, puis quelquesannées plus tard saisit l’opportunité d’en-seigner en anglais l’économie, le droit etla communication à des classes de ter-minale du lycée professionnel Gambettade Bourgoin-Jallieu.«Bien que j’enseigne l’anglais de spé-cialité et que j’aie continué à entretenirmon niveau, rien n’attestait officiellementde ma compétence », nous dit-elle.En septembre 2004, pressentant uneremise à plat des niveaux d’études des

enseignants, des inspecteurs pédago-giques lui conseillent vivement de fairevalider ses acquis et, heureuse coïnci-dence, elle tombe sur une annonce del’Université Stendhal qui propose uneréunion d’information sur le sujet.

Le grand sautUn peu réticente face à l’investissementque ce processus exige, Francine décidenéanmoins de se lancer dans l’aventure.Pour monter son dossier, elle prend letemps de reconsidérer son parcours pro-fessionnel et personnel, entre autres àtravers diverses actions qu’elle a menéeset qui sont significatives, telle l’organi-sation de séjours ou stages en entrepriseà l’étranger, en Irlande et en Angleterre.«Cela amène à faire le bilan de sa vie,mais on y passe des heures, des week-ends». Si la démarche lui semble fasti-dieuse et les moments de décourage-ment nombreux, la réussite se profile

enfin en juillet 2005. Au vu de son par-cours et des compétences acquises, lejury vient de lui accorder une licence d’an-glais.Grâce à ce diplôme, Francine vient deconquérir la reconnaissance officielle deses collègues et de son supérieur hié-rarchique, de retrouver sa confiance enelle-même et de s’ouvrir de nouvellesportes. En effet, elle projette à termed’enseigner en BTS l’anglais de spécialitéet, pour y parvenir, de demander, en fai-sant état de sa licence et de son parcours,l’accès à unmaster professionnel de négo-ciateur trilingue en commerce interna-tional !«Actuellement, on travaille longtemps»,fait-elle remarquer. «À 50 ans, il resteencore une quinzaine d’années de vieactive. Ce type de processus, qu’il passepar l’obtention d’un diplôme ou par unereprise d’études, permet vraiment derelancer sa carrière.» �

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« Tout ce qui est bas et plat me faitpenser à Grenoble». Ce para-doxe en dit long sur les rela-

tions de Stendhal avec sa ville natale, rela-tions faites à la fois de rancœurs tenaceset de petits bonheurs inavouables. Cetteville mal aimée est pourtant détentriced’un véritable trésor : l’essentiel des archi-ves laissées par l’écrivain. Certes, lesmanuscrits des grands romans publiés duvivant de Stendhal ont été détruits, confor-mément à une tradition d’époque, mais laBibliothèque d’étude de l’avenue du Maré-chal Lyautey possède les précieux manus-crits de Lucien Leuwen, La Vie de HenryBrulard, Lamiel¸ Le Rose et le Vert…maisaussi de textes historiques (Vie de Napo-léon, Mémoires sur Napoléon…), esthé-tiques (fragments de l’Histoire de la pein-ture en Italie) ou philosophiques (Filosofianova), souvent méconnus du grand public.

Nouveau départMieux connaître ce fonds immense et lefaire mieux connaître, voilà à quoi s’estattelé depuis une dizaine d’années un petitgroupe de chercheurs de l’Université Stend-hal regroupés au sein de l’équipe «Manus-crits de Stendhal » du Centre d’ÉtudesStendhaliennes et Romantiques. Une équipe

longtemps dirigée par Gérald Rannaud,bien connu, entre autres, pour son éditiondiplomatique de La Vie de Henry Brulard(comportant la reproduction de tous lesfeuillets, avec en regard leur transcriptionfidèle, y compris ratures, réécritures, etc.).Malheureusement, faute de moyens,l’équipe avait dû ralentir son activité. Jus-qu’à la création en 2004, dans le cadre dela dotation exceptionnelle pour la recher-che, d’un poste de maître de conférencesen «génétique textuelle et édition savante»spécifiquement dédié à ce chantier. Unecréation obtenue avec l'appui du ConseilScientifique de l’Université Stendhal, etqui vaut reconnaissance de l’importancestratégique des recherches à mener pourvaloriser ce patrimoine exceptionnel.Nouvellement nommée dans cette fonc-tion et désormais chargée de piloter lechantier, Cécile Meynard, qui entend bienlui insuffler un regain de dynamisme, neperd pas de vue l’objectif assigné par sesprédécesseurs : « Imaginer que 16 000feuillets manuscrits, écrits pour la majo-rité de lamain de Stendhal lui-même, nousattendent à la Bibliothèque d’étude, cela ade quoi donner le vertige. Mais au-delà dupetit frisson que l’on éprouve à tenir entresesmains unmanuscrit qui révèle quelquechose de l’intimité de l’écrivain en acte, ilfaut poursuivre de façon absolument rigou-reuse l’inventaire déjà repris par Victor DelLitto et Paul Hamon en 1995 pour aboutirà un catalogue exhaustif du fonds.»

Vers un accès plus facileCompte tenu du volume impressionnantde ces archives mais aussi de leur état deconservation, l’équipe entend développerles possibilités de consultation à distancesur écran, ce qui permettra de définir unclassement virtuel des feuillets, plus satis-faisant que l’actuel classement physique.C’est pourquoi elle s’emploie à constituerune base de données en vue d’une mise

en ligne prochaine sur le site de laMaison des Sciences Humaines-Alpes : ils’agit de rendre plus facile à termel’accès des chercheurs, des étudiants maisaussi du grand public, aux feuilletsprécieux et fragiles du fonds, par la repro-duction numérisée de chacun d’entre eux,accompagnée de sa transcription et d’unedescription détaillée. Un objectif qui s’ins-crit d’ailleurs dans le vaste programme denumérisation des fonds demanuscrits desbibliothèques à l’échelle nationale.Il n’est pas exclu que ce travail d’inven-taire permette d’exhumer des pages inédi-tes : on sait par exemple que certainesfeuilles volantes, jugées peu intéressan-tes par Crozet et Colomb (respectivementami et cousin de Stendhal, qui avaient pro-cédé à un premier classement en 1844,deux ans après la mort de celui-ci) ou parles bibliothécaires qui ont tenté de trierles papiers ultérieurement, n’ont pas étéregroupées dans des recueils et se trouventencore dans des cartons… «Mais ne rêvons

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Recherche

Stendhal redécouvert :le chantier des manuscrits

Quelque 16 000 feuillets, des manuscrits précieux, c’est le trésor inesti-mable que détient la Bibliothèque municipale d’étude et d’information deGrenoble. Un patrimoine méconnu dont les chercheurs de l’équipe «Manus-crits de Stendhal » s’emploient à dresser l’inventaire.

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pas, tempère Cécile Meynard, il est peuprobable que nous mettions la main surun manuscrit fondamental ! En revanche,il paraît certain que cet examen attentifpermettra de remettre en question destextes tenus pour établis, comme le Jour-nal de Stendhal. Dans les papiers de l’au-teur regroupés sous ce nom, on trouve eneffet pêle-mêle le récit de la journée pas-sée, des notes de lecture, des réflexionspersonnelles, des considérations esthé-tiques, des pensées philosophiques… oudes relevés de compte! Peut-on alors légi-timement continuer à parler d’un Jour-nal ?» Une question à laquelle les cher-cheurs de l’équipe tenteront de répondredans les mois qui viennent, afin de poserles bases d’une édition plus fidèle à l’espritde Stendhal.

Stendhal dans le détailToucher des yeux les manuscrits permetde prendre conscience que le texte s’ins-crit sur un support personnalisé avant dese retrouver figé sur le papier glacé d’uneédition : Stendhal écrit dans tous les sens,à la verticale, en diagonale, dans les mar-ges, sur les couvertures, et même sur latranche de ses cahiers, il ajoute des cro-quis et des petites phrases cryptées que lesplus grands critiques n’arrivent pas toujoursà élucider. L’écriture plus ou moins soi-gnée –plus oumoins lisible aussi!– traduitou trahit son état d’esprit. C’est donc à

une écriture vivante qu’on a affaire quandon ouvre les grands registres dans l’atmo-sphère feutrée de la salle des fonds précieuxde la Bibliothèque d’étude. Et l’on s’aper-çoit alors que le texte qu’on croit connaî-tre par le biais des éditions diffère sou-vent de ce que l’écrivain a voulu dire. Parexemple, en 1806, le jeune Henri Beyle,notre futur Stendhal, ambitionnant de deve-nir un grand auteur dramatique, décidede lutter contre une fâcheuse tendance àla mélancolie. Il écrit alors cette exhorta-tion en gros caractères sur la couverture

grise du cahier où il tient son journal :«MELANCOLIE ridicule. La diminuer ferme.Vu le 30 septembre 1806.» Une résolutionfondamentale reléguée… en note de basde page dans les éditions du Journal. «Cer-tes, il ne s’agit là que d’un détail, mais l’ac-cumulation de ces petites trahisons finitpar fausser notre approche des textesstendhaliens», commente Cécile Meynard.

OptimismeLa technologie numérique offre des solu-tions aux problèmes posés par l’éditiond’un corpus aussi complexe et hétérogène.L’apport des éditions numériques demanuscrits fera du reste l’objet d’un col-loque à l’Université Stendhal en décem-bre 2006, co-organisé par Cécile Meynard,Claude Coste (spécialiste de Roland Bar-thes) et Françoise Leriche (spécialiste deProust). Stendhal fera l’objet d’interven-tions de plusieurs participants, mais d’au-tres auteurs seront aussi abordés.Pour autant, le plus frustrant avec ce typede projets reste qu’on ne peut s’attendre àdes résultats importants à court terme :se pencher sur des manuscrits est un tra-vail souvent fastidieux, pour des cher-cheurs patients et opiniâtres. Mais CécileMeynard est optimiste : «La création duposte que j’occupe montre qu’il existe unevraie volonté de faire avancer les choses.Nous avons demandé des subventions auMinistère, à la Région et à l’Université. Deplus, avec l’aide des nouveaux moyenstechnologiques, on gagne en temps commeen efficacité. Ainsi, nous pourrons bientôttravailler à distance sur la base de don-nées, ce qui constituera un grand progrès.Et nous espérons pouvoir resserrer lesliens avec d’autres institutions, commel'Institut des Textes et des ManuscritsModernes et le Centre National de laRecherche Scientifique, pour tirer lemeilleur profit d’une véritable collaborationentre chercheurs.» �

Pour plus d’informations :Cécile MeynardResponsable de l’Équipe [email protected]/ems/

À partir du 10 mars 2006, des manus-crits de Stendhal seront exposés à laBibliothèque municipale d’étude etd’information de Grenoble. Pour ensavoir plus, consultez notre agendapage 15.

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Thèses

Kane Khady«L’appropriation des stratégies de l’Information par lesorganisations paysannes du bassin arachidier sénégalaisdans la vulgarisation phytosanitaire.»Sciences de l’Information et de la Communication, 08/11/05

Blanc épouse Bord Christine«Merlin ou la royauté confisquée : Élaboration, invariants etévolution d’une figure mythique entre le Ve et le XVe siècles.»Littérature Française, 10/11/05.

Bui Khuong Bich Hoan«Exprimer le passé en français : quels problèmes pour desétudiants vietnamiens?»Sciences du Langage, 18/11/05

Horan, épouse Grison Lorraine«Paysage anglais à l’époque contemporaine :visite et médiations esthétiques»Études anglophones, 26/11/05

Vuillet Jacques«La part de l’expressivité vocale dans le réglage de l’inter-action et dans l’émergence de conduites langagières lorsd’un atelier de langage en début d’école maternelle.»Sciences du Langage, 30/11/05

Smyrnaios Nicolas«L’industrie de l’éphémère. Émergence et consolidationde modèles diversifiés de production et de diffusion del’information en ligne»Sciences de l’Information et de la Communication, 02/12/05

Ould Sid’Ahmed Taleb«Politiques et pratiques des NTIC en Mauritanie.Le cas de l’Internet.»Sciences de l’Information et de la Communication, 05/12/05

Zouari khaled«Publics et usages de la presse francophone en ligneau Maghreb»Sciences de l’Information et de la Communication, 07/12/05

Zanardi Myriam«La communication publique territoriale de la sécurité.Construction et institutionnalisation du problème publicdes incivilités, comme rappel d’un mode de faire“légitime” : la sécurité.»Sciences de l’Information et de la Communication, 08/12/05

Gray Jane,épouse Sadan«A small country with blurry. Genre et identités sexuellesdans la littérature écossaise contemporaine»Études anglophones, 09/12/05

Rebotier Aude«Les temps verbaux en Allemand et en Français et lesphénomènes aspectuels, comparaison de deux systèmes»Études Germaniques, 09/12/05

Signorini Céline Anne«La motivation sémantique dans la création lexicale :les phytonymes de l’arc alpin»Sciences du Langage, 09/12/05

Leishman David«Nouvelles figures de l’identité écossaise : représentationsde la scotticité dans les œuvres de fiction (1979-1999)»Études anglophones, 10/12/05

Tolazzi Sandrine«Canada, Australie : étude comparative de l’évolution despolitiques du multiculturalisme. L’identité nationale et lagestion de la diversité culturelle dans les sociétés libérales»Études anglophones, 12/12/05

Radi Lidia«Études et édition critique du Penser de royal mémoire deGuillaume Michel, dit de Tours»Littérature française, 12/12/05

Chaudenson Françoise«À qui appartient l’œuvre d’art? Une tentative d’approchepluridisciplinaire des mécanismes d’appropriation desœuvres d’art»Sciences de l’Information et de la Communication, 14/12/05

Chen Yu-chen«Didactique des langues étrangères et ressourcesmatérielles d’apprentissage en dispositif d’autoformation»Sciences du langage, 15/12/05

Lambert Patricia«Les répertoires verbaux de jeunes filles d’un lycéeprofessionnel : une approche sociolinguistiqueethnographique»Sciences du langage, 15/12/05

Marie Alexandra«L’autre œil. Sans appuyer…» Empreintes et métamorphosesde l’allégorie dans le théâtre d’Arthur Adamov»Littérature française, 16/01/2006

Zourou Katerina«Apprentissages collectifs médiatisés et didactique deslangues : instrumentation, dispositifs et accompagnementpédagogique.»Sciences du langage, 22/02/06

Habilitation à Diriger des Recherches

Jousset Philippe, Langue et Littérature françaises, 25/11/2005

Jeanjean Benoît, Langue et Littérature anciennes, 03/12/2005

Legendre Bertrand, Sciences de l’Information et de la Com-munication, 06/12/05

Delbarre Roger, Sciences de l’Information et de la Commu-nication, 06/12/05

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Selon une enquête récente – et qui bouscule bien des idées reçues ! –plus de 83% des docteurs ayant soutenu leur thèse au cours de lapériode 2002-2005 à l’Université Stendhal déclarent exercer unmétier,

essentiellement dans l’enseignement supérieur, à l’étranger ou en France.Ainsi, qu’ils soient thésards plus ou moins avancés dans leur parcours derecherche ou tout nouveaux docteurs, ceux que l’on appelle les « jeuneschercheurs» ont-ils vocation à devenir, pour nombre d’entre eux, les ensei-gnants-chercheurs de demain. Pour les y préparer efficacement, pour lesaider à trouver et tracer leur chemin vers une carrière à laquelle ils aspi-rent, l’Université Stendhal et ses équipes de recherche ont mis en place unebatterie de dispositifs, souvent innovants, destinés à favoriser leur impli-cation dans la vie scientifique de l’institution et, plus largement encore,leur insertion à part entière dans la communauté des chercheurs. Col-loques ou séminaires réservés aux jeunes chercheurs, rencontres avecdes personnalités extérieures, développement des réseaux d’échange…autant d’initiatives qui répondent, par-delà leur diversité, à un objectif cohé-rent et capital. >

Le pied à l’étrierPourquoi et comment impliquer les jeunes chercheurs

Perspectives

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Demême que la recherche ne se conçoitpas sans production scientifique, sanspublication de travaux, elle ne peut

se concevoir sans transmission de sesacquis aux jeunes générations, bref sansformation des enseignants-chercheurs dedemain. Ces deux critères sont d’ailleursceux sur lesquels ministère et organis-mes fondent l’essentiel de leurs évalua-tions. Répétons-le : les jeunes chercheurssont la principale raison d’être, le cœurmême de tout notre dispositif scientifique.

Une gigantesque relèveDans les huit ans à venir, la moitié desprofesseurs et le quart des maîtres deconférences du pays partiront à la retraite.Les universités se trouvent donc confron-tées à un des plus grands défis de leurhistoire : assurer une gigantesque relèvepour l’enseignement supérieur. Pour cer-taines de nos composantes scientifiques,notamment en Sciences de l’Information etde la Communication et en Sciences duLangage, la « culture de laboratoire » favo-rise cet entraînement : chaque doctorantrencontre régulièrement l’ensemble desmembres de son équipe de rattachement(Équiped’AccueilouUnitéMixtedeRecherche),y compris les autres doctorants, avec les-quels il peut confronter ses travaux. Pourd’autres composantes, notamment enLettres et en Langues, le «co-laboratoire»est sans doute moins prégnant, les pra-tiques collectives moins solidementancrées, au risque que les doctorants seretrouvent parfois dansun certain isolement.

Révolution culturelleDepuis 2001, le Conseil Scientifique del’Université Stendhal n’a cessé d’encou-rager toutes les composantes scientifiquesà accomplir, dans ce domaine, une véri-table révolution culturelle, dumoins quandelle était nécessaire. On voit se dessinerces dernières années une dynamique très

encourageante et très prometteuse : col-loques nationaux ou internationaux réser-vés aux doctorants (les «Doctoriales Stend-hal» sont devenues notre référence obligée),journées annuelles de présentation desthèses en cours (parfois en présence d’un« grand témoin » invité pour la circons-tance), numéros de revues ou séminairespris en charge par des jeunes chercheurs…Le passage au LMD, avec le lien nouveauqu’il instaure entre quatrième et cinquièmeannée, est sans doute l’occasion idéale de

rappeler ici la nécessité d’associer auxprincipaux événements scientifiques nosétudiants, avant même qu’ils deviennentdes doctorants : la recherche nourrit, cer-tes, l’enseignement qui leur est dispensé;mais si l’on veut leur en donner le goût,les mettre dans les meilleures conditionspour envisager une carrière à l’université,il faut de toute évidence leur montrer larecherche en actes - et le plus tôt possibledans leur scolarité.

Un message clairLa semaine de l’École Doctorale de l’Uni-versité Stendhal (voir encadré), qui estdevenue au fil des années un desmomentsforts de la vie de notre communauté, estl’occasion de rencontres transdisciplinai-res, que la richesse et la diversité de notrecampus devraient permettre d’amplifieren les transformant, de plus en plus fré-quemment, en échanges entre «littéraires»

et «scientifiques». Il y a fort à parier quece mouvement deviendra de plus en plusnaturel et que les jeunes générations pra-tiqueront transdisciplinarité et interdisci-plinarité d’unemanière plus systématiqueque leurs maîtres.Dans l’immédiat, le message est clair :tout événement scientifique organisé ausein de notre Université, tout séminaire,toute publication collective doit associerau maximum les jeunes chercheurs à larecherche commune. Tous ceux qui ont

déjà cultivé ces pratiques savent qu’ellesne sont jamais à sens unique, que la recher-che, dans ces échanges, n’est pas une don-née figée transmise de haut en bas, maisqu’au contraire, dès qu’elle se parle, setransmet, se partage, elle ne cesse de s’en-richir, de se complexifier. Hors de cetteexigence ardente et permanente, point desalut. �

Michel Lafon est Vice-Président du ConseilScientifique de l’Université Stendhal

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Une priorité absoluePar Michel Lafon

Perspectives

Dans son projet d’établissement 2003-2006, l’Université Stendhal avaitprésenté l’intégration des jeunes chercheurs (doctorants, mais aussi néo-docteurs) à son dispositif de recherche comme une priorité absolue. Le pro-jet proposé au Ministère pour la période 2007-2010 est l’occasion de réaf-firmer avec force cette priorité.

« Les jeunes chercheurs sont la principale

raison d’être, le cœur même de tout notre

dispositif scientifique. »

Le pied à l’étrier

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Le rôle clé del’École doctorale

Fondée en 1993, organe de formation des étu-diants et de cogestion des équipes de recher-che et des masters, l’École doctorale de l’U-niversité Stendhal joue un rôle déterminantdans la politique d’accompagnement des jeu-nes chercheurs.

La semaine de l’École doctoraleElle organise en particulier chaque année (aumois de février depuis 2005) la «semaine del’École doctorale», destinée à proposer aux étu-diants-chercheurs (en Master ou Doctorat)un complément de formation, éventuellement«à la demande». Les techniques de l’infor-mation et de la communication, la méthode dela rédaction de la thèse, la publicité de lathèse, l’insertion professionnelle dans lessecteurs public et privé sont au cœur du dispo-sitif. Les étudiants sont invités à confection-ner des posters pour une présentation claireet synthétique de leur projet : ces posterssont classés par un jury composé d’ensei-gnants-chercheurs et du directeur de la Mai-son des Sciences de l’Homme (MSH-Alpes),qui décerne chaque année un prix du «meilleurposter» (un billet de train pour Paris).

Un accompagnement multiformePlus généralement, comme le souligne Fran-çois Genton, son directeur, « l’École docto-rale s’efforce de favoriser une sociabilité entrechercheurs» : tous les étudiants inscrits enthèse forment depuis quelques années unecommunauté « électronique » grâce à unebase qui permet de produire des informa-tions, de les diffuser et de les échanger. Ellea soutenu, d’autre part, des colloques inter-disciplinaires organisés par des doctorantsen 2004 et 2005. Le conseil de l’École docto-rale répartit à la fin de l’année universitaire,sur des critères d’excellence, les allocationset les postes de moniteurs. Enfin, en soute-nant le développement des cotutelles avecdes universités de plusieurs continents, elleparticipe à l’internationalisation croissantede la recherche à l’Université Stendhal. �

En 2002, vous avez pris l’initiative d’orga-niser les «Doctoriales Stendhal», jour-nées d’études sur Stendhal réservéespour la première fois aux jeunes cher-cheurs. Pourquoi?D’une part, il a toujours été dans la tradi-tion de notre centre, depuis sa créationpar Victor Del Litto en 1963, d’attirer à Gre-noble de jeunes chercheurs de tous hori-zons : après tout, le CESR est actuelle-ment, dans le monde, le seul centresusceptible de fédérer les recherchesmenées autour de Stendhal.D’autre part, dans les parcours littéraires,il me paraît indispensable de pallier à lasolitude du chercheur. Contrairement àleurs homologues des sciences dites dures,nos chercheurs ne disposent pas de labo-ratoire, au sens de lieu physique, où seretrouver pour travailler ensemble. De cefait, les thèses avortées ou les abandonsd’activité de recherche sont fréquents. Lesjournées d’études collectives, sous quelqueforme que ce soit, sont donc très utilespour permettre aux jeunes chercheursde se rencontrer, de créer un réseaud’échange en fonction de leurs affinités.Par ailleurs, il est important d’être à l’écoutede la jeune génération de chercheurs :c’est le meilleur moyen d’anticiper lesapproches critiques émergentes ou sus-ceptibles de s’imposer dans un proche ave-nir. Cela peut nous permettre d’affiner oud’élargir les futurs sujets d’études de notrecentre.

Vousparlezde«créerunréseaud’échange».Pensez-vous vraiment que des journéesd’études comme les Doctoriales Stendhal,qui n’ont lieu qu’une fois tous les trois ans,peuvent répondre à ce type d’objectif ?Oui, et sur ce plan, les Doctoriales Stendhalont dépassé nos espérances. En 2002, nousavions réuni une douzaine de thésards éma-nant de différentes universités françaises.Les rencontres interpersonnelles ont ététellement fructueuses, qu’à l’automne 2002,ces jeunes chercheurs ont décidé d’orga-niser àParis une fois parmois un«séminaireStendhal» et cela fonctionne vraiment bien.Depuis peu, ils ontmême créé un site Inter-net sur lequel ils annoncent le programmede ce séminaire et partagent des informa-tions diverses sur Stendhal.

Enfin, pour ce qui est de la périodicité desDoctoriales Stendhal, elle a été définie defaçon à correspondre au temps moyen dematuration d’une thèse. Comme nous sou-haitons que les différentes étapes de thèsesoient représentées, ce rythme nous per-met d’intégrer les nouveaux étudiants.

Pourquoi organiser cet événement systé-matiquement à Grenoble?Pour tous les passionnés de Stendhal,Grenoble est un des lieux qui recèle unepartie inestimable du patrimoine stend-halien : l’appartement natal, l’appartementGagnon ainsi que le fonds de manuscritsconservés à la Bibliothèque Municipale.Pour les participants à nos Doctoriales,qui rassemblent aujourd’hui de jeuneschercheurs de nombreux pays dontcertains sont assez éloignés, tel la Pologne,la Russie ou encore le Japon, venir à Gre-noble est un déplacement que l’on n’en-treprend pas tous les jours. C’est doncl’opportunité de réaliser un voyage pro-fessionnel, riche en émotions comme enenseignements, que nous leur offrons. �

Marie-Rose Corrédor est directrice duCentre d’Études Stendhaliennes et Roman-tiques.

Le Centre d’Études Stendhaliennes etRomantiques (CESR)Né en 1970 de la fusion du Centred’Études Stendhaliennes et du Centred’Études Sandiennes, le CESR estengagé dans trois chantiers principaux :• Une réflexion critique sur l’œuvre de

Stendhal, insérée dans son contextehistorique, culturel et littéraire

• Un travail sur les manuscrits deStendhal (voir pages 6-7)

• Une réflexion plus générale sur lalittérature de l’époque romantique

Les DoctorialesStendhalUn entretien avec Marie-Rose Corredor

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Perspectives

Les tables rondes de Sassenage :un dispositif innovant

En 2001, Philippe Walter, directeurdu Centre de Recherche sur l’Ima-ginaire (CRI), qui accueille de nom-

breux thésards français et étrangers, décidede les réunir pour une journée de travail etd’échange en présence d’un chercheur derenom : c’est la première édition des«Tables rondes de Sassenage».

Passage à l’acteAu cours de cette journée, tour à tour, lesthésards vont présenter une synthèse deleurs travaux en cours. Voilà qui les obligeà faire un bilan de l’état d’avancement deleur travail de recherche. Ce n’est pas lemoindremérite de la formule : «Le passageà l’acte d’écriture est difficile et la per-spective de cette journée incite à avancerla réflexion et à commencer à rédiger»,nous confie Brigitte Charnier, doctorante.Et la présence d’une personnalité exté-rieure spécialiste de disciplines diverses(sociologue, historien, folkloriste…) joueun rôle moteur, car elle oblige les étu-diants à se confronter à un regard nou-

veau : «Le chercheur invité, continue Bri-gitte Charnier, réagit après chaque pré-sentation des étudiants en posant desquestions auxquelles on ne s’attend pasforcément, en émettant des remarquespertinentes, en donnant des conseils oudes renseignements bibliographiques.»

Pluridisciplinarité etpluriculturalismeDu renouveau du conte à l’imaginaire destechnosciences, de la chanson traditionnelleaux incantationsmagiques, les Tables ron-des de Sassenage sont pour tous leursparticipants un voyage fantastique au cœurde la pluridisciplinarité, agrémenté d’uneapproche multiculturelle liée à la diver-sité des nationalités représentées : algé-rienne, lituanienne, russe… « Ces deuxaspects correspondent à l’esprit d’ouver-ture que le CRI souhaite insuffler », ajouteencore Brigitte Charnier, qui a la lourdeet délicate charge d’organiser en 2006 cetévénement très attendu par les doctorantsdu centre. �

Le CRIFondé en 1966 par Gilbert Durand, Paul Des-champs et Léon Cellier, le CRI est un centrede formation à vocation pluridisciplinaire(littérature française, littératures comparées,lettres étrangères, sociologie, psychologie,anthropologie). Son projet scientifique trouveunité et cohérence dans la réflexion surl'imaginaire, dans l’étude des mythes et dufantastique. Le CRI s’est notamment engagé,pour la période 2007-210, dans un ambitieuxprogramme de travail sur l’imaginaire scien-tifique et technologique.

Du 4 au 7 juillet prochain, se tiendraà Grenoble un colloque pluridisci-plinaire visant à rassembler tous

les étudiants-chercheurs dont l’objetd’étude est lié à la langue, à son appren-tissage, à son enseignement. Linguistiqueet didactique des langues, champsd’investigation du Lidilem –qui est à l’ori-gine de ce colloque–, seront à l’honneur,mais la sociologie, la psychologie, les scien-ces de l’éducation et bien d’autres encoreseront représentées.«Pour garantir l’excellence scientifiquedu colloque, les membres des comitésscientifique et de lecture sont constitués

d’enseignants-chercheurs choisis par leLidilem, précise Christian Surcouf, un desmembres de l’équipe organisatrice, maisl’organisation concrète de l’événementnous incombe ». En effet, des appels àcommunications à l’établissement du pro-gramme, de la recherche de financementà la gestion logistique, l’organisation com-plète de l’événement est prise en charge parun groupe de seize étudiants-chercheursdu Lidilem. «Les tâches sont réparties enfonction des compétences et souhaits dechacun, continue Christian Surcouf. Ayantvécu longtemps dans de nombreux paysétrangers, entre autres aux États-Unis, je

parle couramment anglais et suis trèsouvert aux autres, quelle que soit leurculture. Ainsi suis-je chargé de réalisertoutes les traductions et de gérer les appelsà communication. D’ailleurs, la premièreproposition d’intervention qui nous a étésoumise émanait de Taïwan, un pays danslequel j’ai passé trois ans.»De cette expérience très concrète, ChristianSurcouf retire une connaissance intimedes coulisses de la vie scientifique. �

Le LidilemCréé en 1987 et dirigé par Jacqueline Billiez, le Lidilem développe des recherches en linguis-tique et didactique des langues étrangères et maternelles autour de 3 axes principaux :• Analyses descriptives (syntaxe, sémantique et pragmatique)• Acquisition et apprentissages langagiers (développement langagier, didactique des langues)• Variations sociolinguistiques et plurilinguisme (variations du français, communication

plurilingue et interculturelle)

Un colloque international pouret par les jeunes chercheurs

Le pied à l’étrier

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Publications des EllugOuvragesLa Crise de la littérature.Romantisme et modernitéAlain Vaillant2005, 395 p.ISBN 2 84310 072 0Prix 25 €

La «crise de la littérature», qui sembleun cliché journalistique du XXIe siècle,est en fait l’événement littéraire majeurdes années 1830, prodrome des boule-versements culturels qu’on retiendrasous le nom de « romantisme » ou de« modernité ». Le présent ouvrageesquisse l’analyse historique de cette crise et l’étude des sesconséquences esthétiques, observables dans l’évolution des gen-res ou des formes de l’écriture aussi bien que chez des auteursmajeurs du XIXe siècle (Mme de Staël, Lamartine, Balzac, Musset,Hugo, Baudelaire, Allais, Mallarmé).

Le Nu moderne au salon (1799-1853)Revue de presseTextes réunis et présentés par Dominique Massonnaud(collection Archives critiques)2005, 349 p.ISBN 2 84310 067 4Prix 30 €

Le Numoderne au Salon est une antho-logie commentée de textes et dessins depresse qui critiquent ou caricaturent lesNus, dits « modernes » exposés auxSalons de Peinture et de Sculpture, entre1799 et 1853. Ces exercices de style, pourla plupart inédits permettent de mesu-rer l’emportement suscité par de gran-desœuvres, replacées dans leur contextede réception.

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Livres

RevuesTigre, Hors série, « César Aira, une révolution », 2005, 313 p.

Chroniques slaves, numéro 1, «Lumières, messianisme, révolu-tion», 2005, 227 p.

Gaia, numéro 9, 2005, 278 p.

Lidil, numéro 32, « Sémantique des noms et adjectifs d’émotion»,2005, 204 p.

Recherches & Travaux, Hors série numéro 15, « Hôs ephat’, dixe-rit quispiam, comme disait l’autre – Mécanisme de la citation etde la mention dans les langues de l’Antiquité », 2006, 350 p.

Cahiers pédagogiques du département d’italien, numéro 3, «Spé-cial concours», 2006.

Gros plan sur… la collectionArchives critiquesUnecollectiondirigéeparJean-François Louette et Lise Dumasy

La collection Archives critiques se donne pour objectif d’en-richir et de revivifier le débat critique contemporain en four-nissant à la communauté universitaire –et à tout public inté-ressé– des textes critiques peu connus ou peu disponibles,concernant des auteurs, des mouvements, des genres, desquestions d’histoire littéraire et d’histoire de l’art du XIXe et duXXe siècles.

Les textes sont sélectionnés en fonction de l’éclairage nouveauqu’ils permettent de jeter sur des questions jugées connues,ou de la nouveauté des approches qu’ils font surgir. Restituerla variété du foisonnement critique (qui accompagne l’expan-sion de la fiction demasse), permettre le développement d’unehistoire de la critique à l’époque contemporaine, porter à laconnaissance de tous les débats qui ont orienté les différentsmoments de notre histoire littéraire, artistique et culturelle,telle est l’ambition de cette collection, qui vise ainsi à appro-fondir notre connaissance de la littérature et des arts dansleur ancrage social, culturel et politique. On y trouvera doncdes reproductions d’essais critiques, des séries d’articles,des anthologies thématiques, recueils de textes, tous sélec-tionnés et annotés par des spécialistes et fournis dans leur inté-gralité, afin d’offrir au lecteur l’approche à la fois la plus largeet la plus précise possible des questions abordées. �

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Livres

Autres éditeursPublications des centres de recherche etdes enseignants-chercheurs

Artù, l’orso e il rePhillipe WalterRome, Arkeios, 2005, 213 p.ISBN 88 86495 80 3Prix 25,50 €

D’où vient le roiArthur? Qui est-il ?Authentique chefguerrier de la résis-tance bretonne àl’envahisseur saxondu Ve siècle ? Per-sonnage littérairecréé par les textesmédiévaux?En s’appuyant sur

l’étude des textes, la mythologie, l’histoireet l’archéologie, Philippe Walter établitl’origine mythique du roi. Émanant de latradition orale et de la mémoire populairepréchrétienne, Arthur hérite par bien desaspects d’une antique créature de lamythologie celte, celle de l’ours sacrédes cultes cosmiques.

Décaméron, neuf nouvelles d’amourBoccaceTitre original :Decameron, nove novelle d’amoreTraduit de l’italien, préfacé et annoté parSerge StolfGallimard, 2005, 253 p.ISBN 2 07 030823 5

Prix 8 €

Parmi les cent nou-velles du Décaméron,en voici neuf dont lethème central est l’a-mour. Sous la plumede Boccace, lesamours heureuses oucontrariées se suc-cèdent, tantôt humo-ristiques, tantôt tra-

giques, toujours émouvantes et séduisantes.Humaniste et fin connaisseur des élansdu cœur, Boccace fait vivre une Italiebaroque et passionnée.

Dell’Origine E Del-l’Ufficio Della Let-teratura. OrazioneUgo FoscoloIntroduction, éditionet notes d’Enzo NeppiLeoS. Olschki Editore,2005, 169 p.ISBN 88-222-5449-X

Du spectaculaire à l’intime. Un sièclede commedia erudita en Italie et enFrance (début du XVIe siècle- milieudu XVIIe siècle)Patrizia de CapitaniParis, Honoré Champion, 2005, 454 p.(Bibliothèque littéraire de la Renaissance,n° 56)ISBN 2-7453-1138-7Prix 86 €

Cet ouvrage a pourobjet l’étude decertains aspectsformels et théma-tiques de la com-media erudita,genre théâtral ita-lien inspiré desexpériences théâ-trales de Plaute etde Térence, en vue

demettre en lumière sa réception en Franceentre 1540 et 1640. Après avoir présenté àgrands traits la comédie régulière enItalie et en France, l’auteur s’arrête autantsur les traductions que sur les adaptationsde pièces italiennes réalisées par les dra-maturges français. Loin de suivre passi-vement leurs modèles italiens, cesderniers se sont efforcés d’insuffler uncaractère national propre aux textes qu’ilstransposaient. Les originaux italiens sontdonc étudiés ici à la lumière du réemploiqu’en ont fait les dramaturges français duXVIe et du XVIe siècles.

Imaginaires des points cardinaux.Aux quatre angles du mondeSous la direction de Michel ViegnesParis, Imago, 2005, 413 p.ISBN 2 84952 018 7

Prix 29 €

Les points cardi-naux font l’objetd’un riche investis-sement imaginaireet symbolique dansla plupart de noscultures : des signi-fications religieu-ses, historiques,politiques ou sim-

plement affectives se superposent ainsi àleur base naturelle, déterminée par lespôles magnétiques et le sens de la rota-tion de la Terre. Nord, Sud, Est et Ouestconstituent bien, pour de nombreux peu-ples, les «quatre angles du monde». Lesétudes recueillies dans cet ouvrage sontau carrefour de nombreuses disciplines,allant de la géographie à la littérature,en passant par l’histoire des religions,

l’histoire de l’art, la philologie et l’étudedes mythes. Elles couvrent un territoiregéo-culturel qui n’exclut quasiment aucunepartie du monde.

Lire les formes brèves(Réédition)Bernard RoukhomovskyParis,ArmandColin,2005,152p. (Lettressup.)ISBN 2-200-34458-9Prix 15 €

Qu’y a-t-il de communentre une épigrammedeMartial, unemaximede La Rochefoucauld,un fragment de Pascal,un aphorisme de RenéChar ou de Cioran ?L’appellation de formesbrèves recouvre-t-elleune notion cohérenteet pertinente ? Pour

tenter de répondre à cette question, l’au-teur articule ici deux parcours de lecture :le premier vise à penser la foisonnantediversité de la forme brève dans uneperspective historique, le second permetd’identifier, par-delà ce foisonnement etsans prétendre l’occulter, un certain nom-bre de modèles structurants.

Your Money or Your Life. The Tyrannyof global FinanceÉric ToussaintTraduction anglaise par Vicki Briault Manus(titre original : La Finance contre les peu-ples. La Bourse ou la vie)Chicago, Haymarket Books, 2005, 487 p.ISBN 1-931859-18-3Prix 18 $

Tout ce qu’il fautsavoir sur la mon-dialisation, l’offen-sive néo-libérale etla crise de la dettedu Sud. Référencesh i s t o r i q u e s ,tableaux documen-taires, lexique etbibliographie com-plètent un exposé

en forme de réquisitoire contre les effetsdésastreux des politiques développées aunom d’une idéologie hégémonique. Lesexplications consacrées à lamondialisationfinancière et au Fonds monétaire interna-tional sont particulièrement éclairantes,surtout dans le contexte de l’actuelle crisesystémique. Le livre évoque aussi les mul-tiples résistances que le nouvel ordre sus-cite et lui oppose un certain nombre d’al-ternatives. Il se veut à la fois outil d’analyseet arme de combat civique.

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