l'impact des politiques de l'innovation
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L’IMPACT DES POLITIQUES DE L’INNOVATION SUR LA RECHERCHE UNIVERSITAIRE : SYSTÈMES NATIONAUX ET RÉSEAUX MONDIAUX
par Pierre Milot
L’IMPACT DES POLITIQUES DE L’INNOVATION SUR LA RECHERCHE UNIVERSITAIRE :
SYSTÈMES NATIONAUX ET RÉSEAUX MONDIAUX
Pierre Milot Chercheur associé
Centre interuniversitaire de recherche sur la science et la technologie (CIRST)
Avril 2011
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Fédération québécoise des professeures et professeurs d’université 4446, boulevard Saint-‐Laurent Bureau 405 Montréal (Québec) H2W 1Z5 Téléphone : 514-‐843-‐5953 ou 1-‐888-‐843-‐5953 Télécopieur : 514-‐843-‐6928 Courriel : federation@fqppu.org Site Web : www.fqppu.org Dépôt légal : 3e trimestre 2011 Bibliothèque nationale du Québec Bibliothèque nationale du Canada ISBN : 978-‐2-‐921002-‐18-‐9
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AVANT-PROPOS La recherche universitaire subit de multiples pressions qui en modifient les pratiques et les finalités. Vecteur important d'une transformation des savoirs et du développement des institutions, elle est souvent un lieu de conflits idéologiques et de concurrence économique qui compromettent la valeur éthique et intellectuelle de sa contribution à des débats de fond. Pour pouvoir mener une analyse approfondie des politiques de la recherche et en mesurer la portée, il faut connaître leurs présupposés et leurs fonctions sous-‐jacentes. C'est ce que permet l'étude fouillée et judicieuse de Pierre Milot, consacrée aux « politiques de l'innovation ». Dans une perspective historique et critique, celle-‐ci met au jour les concepts fondateurs qui, sous l'influence de l'OCDE, se sont imposés auprès des décideurs et des gestionnaires publics, lesquels les ont repris et adaptés à leurs fins. Elle apporte un éclairage inédit sur l'organisation et les orientations de la recherche subventionnée au Québec, y compris nécessairement les visées de la Stratégie québécoise de recherche et d'innovation. En l’occurrence, cette étude fait ressortir les motivations de certains acteurs qui ont conduit, en 2010, aux projets d'abolition du Conseil de la science et de la technologie (CST) et de fusion des trois organismes de recherche publique (FRSQ, FQRNT, FQRSC), et cela sans l'aval des chercheurs eux-‐mêmes. Depuis lors, le gouvernement a effectivement aboli le CST, mais il a maintenu une relative autonomie des trois organismes tout en créant, à un niveau supérieur, le Fonds Recherche Québec et le poste de « Scientifique en chef ». L’analyse présentée ici n’est pas moins pertinente pour autant, car elle dénonce des intentions politiques et met en garde contre des écueils éthiques et scientifiques. En rendant public ce rapport, la Fédération québécoise des professeures et professeurs d'université poursuit son travail d'analyse et d'information ainsi que de défense d'une université au service de la collectivité. Max Roy Président de la FQPPU (septembre 2011)
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INTRODUCTION La Stratégie québécoise de la recherche et de l’innovation (SQRI) planifiée par le ministère du Développement économique, de l’Innovation et de l’Exportation (MDEIE) et déposée par le ministre Clément Gignac, en juin 2010, s’inscrit dans le contexte d’internationalisation de l’innovation ouverte (open innovation), alors même que commencent à s’institutionnaliser un certain nombre d’instruments de mesure, dont l’OCDE fait la promotion, et qui seraient devenus indispensables pour accéder à ce nouveau paradigme de la gouvernance innovante reliant décideurs publics, citoyens et chercheurs académiques aux réseaux mondiaux des firmes multinationales. De façon symétrique, le projet de loi 130 reflète la planification stratégique de ce type d’arrangements institutionnels (a new empirical program on research funding) dont rendait compte une enquête publiée en 2010 : « Coordination modes in public funding systems » (Lepori). Les équipes de chercheurs universitaires qui soumettront leurs demandes de subvention aux règles des nouveaux programmes qui résulteront de cette réforme administrative devront savoir faire la distinction entre les partenariats science-‐industrie issus des nécessités endogènes de la recherche interdisciplinaire et ceux qui relèvent d’une interdisciplinarité exogène imputable aux besoins d’externalisation des firmes les plus innovantes : ils devront raffiner leurs concepts et leurs indicateurs dans le contexte international du mouvement de la politique des preuves (evidence based-‐policy). Le premier paradigme d’une politique scientifique (science policy) des pays de l’OCDE avait été configuré dans le rapport remis par Vannevar Bush au président des États-‐Unis, en 1945, à la fin de la Seconde Guerre mondiale : il fut ensuite reconfiguré dans le Manuel de Frascati, publié par l’OCDE, qui en fera le schéma opérationnel de ses recommandations aux pays membres, modélisant jusqu’à tout récemment les concepts de recherche fondamentale (basic research) et de recherche appliquée (applied research). Ce modèle mènera aux programmes contemporains de subvention évalués par les pairs (peer review) et au processus d’internationalisation des systèmes nationaux d’innovation qui ont été construits dans un contexte historique et épistémologique dont il faudra retracer la généalogie pour en comprendre la légitimité institutionnelle au sein de la nouvelle gestion publique (new public management). Le modèle de gouvernance des systèmes nationaux (et régionaux) d’innovation est aujourd’hui remis en question par le paradigme des réseaux mondiaux de l’innovation ouverte (Chesbrough). C’est un article de recherche biomédicale, paru en 1944 dans Science, et rédigé par deux chercheurs spécialisés en biologie expérimentale (Brozek et Keys) du Laboratoire de physiologie hygiénique de l’Université du Minnesota, qui fournit la première occurrence du concept d’interdisciplinarité et qui offre une description du contexte institutionnel dans lequel des épidémiologistes et des statisticiens s’organisent en équipes de recherche, selon des procédures qui mèneront à la médecine des preuves (evidence-‐based medecine).
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Les études administratives consacrées à la mise en œuvre des politiques (policy-‐making), d’abord concentrées sur l’économie de la science (economics of science) et du capital humain (Arrow et Becker), au sein des ministères et des agences publiques axées sur sa mesure statistique et son évaluation à l’aune de la R&D, amèneront les pays de l’OCDE des années 1970 à orienter le financement de la recherche académique vers la création de centres de recherche favorisant les relations universités-‐entreprises (Bozeman). Dans les années 1980 et 1990, l’émergence de la nouvelle gestion publique s’accompagnera d’une exigence de reddition de comptes, axée sur des indicateurs de bonne gouvernance (Hood et Pollitt), visant à mieux contrôler la relation du principal et de l’agent (principal-‐agent problem), tant au sein des ministères et des agences publiques que des départements et des centres de recherche universitaire. En parallèle, c’est un ouvrage publié par deux économistes évolutionnistes (Nelson et Winter), au début des années 1980, qui modélisera la recherche économétrique et managériale (technology management) et mobilisera les experts de l’OCDE autour du Manuel d’Oslo (1992), au sein des agences publiques, pour faire la promotion académique de l’innovation (innovation studies) basée sur le benchmarking des systèmes nationaux d’innovation (Freeman et Lundvall). Les années 2000 seront marquées par la construction d’indicateurs de productivité scientifique (couplés avec la régulation juridique des brevets et des licences délivrés aux agences publiques par les bureaux de transfert technologique des universités), afin de produire les tableaux de bord préparés pour les ministères responsables de financer la collaboration science-‐industrie, et stimuler la création d’entreprises parmi les groupes de recherche (Etzkowitz) au sein de l’économie du savoir (knowledge-‐based economy). Aux États-‐Unis, c’est un concept de management public afférent à la politique des preuves (evidence-‐based policy), dont le mouvement avait d’abord été impulsé en Grande-‐Bretagne par le premier ministre Tony Blair, qui sera utilisé pour reconfigurer les plans d’action des ministères et les programmes des agences publiques de financement élaborés au sein des départements et des centres de recherche académiques, suite à l’avis (science advisor to the president) remis au président Bush par John Marburger. C’est à la suite de cet avis que la National Science Foundation (NSF) lancera un nombre imposant de programmes de subvention faisant la promotion d’une science de la science, couplée à une politique de l’innovation (science of science and innovation policy) au sein des ministères et des agences publiques de financement en exigeant qu’ils fassent appel aux indicateurs scientométriques (Garfield), afin d’être en mesure de comparer la performance des centres de recherche et des départements (management accounting). Et ce, dans le contexte de la globalisation des politiques de l’innovation et des procédures de gouvernance innovante (innovative government) institutionnalisées au sein des équipes de chercheurs, selon les techniques du new public management (Schubert) : d’où l’incitation à indexer l’interdisciplinarité à la commercialisation de la recherche académique.
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LE RÔLE DES EXPERTS ET DES CABINETS DE CONSULTANTS DANS LA NOUVELLE GESTION PUBLIQUE En juin 2010, la décision impérative et sans appel du gouvernement Harper de modifier le questionnaire long de Statistique Canada sur le recensement de la population a généré une vive discussion publique qui s’est poursuivie tout au long de la saison estivale : de nombreux universitaires, spécialisés en études statistiques, ont alimenté le débat dans les médias, suscitant une controverse rarement observée pour une procédure administrative aussi complexe. Au Québec, même le ministre Raymond Bachand s’en est mêlé en critiquant fermement la position d’Ottawa dans ce dossier. Pourtant, le ministre des Finances avait déposé en mars un budget qualifié de « révolution culturelle » et le ministre Clément Gignac allait, en juin, rendre publique l’actualisation de la Stratégie québécoise de la recherche et de l’innovation (SQRI), dont certaines des mesures annoncées étaient susceptibles de provoquer la réprobation des chercheurs et des administrateurs du milieu. Ce ne fut pourtant pas le cas, du moins pas au cours de l’été1. Il aura donc fallu attendre le 6 octobre 2010 pour que le vice-‐doyen à la recherche de la Faculté de médecine de l’Université de Montréal, Pierre Boyle, se présente au Devoir avec trois de ses collègues pour (écrit Pauline Gravel) « dénoncer le Fonds Recherche Québec et la fusion des trois fonds distincts existants ». Le projet de loi 130, qui est au cœur de la SQRI, remettait pourtant en cause plusieurs des fondements institutionnels de la politique de l’innovation, qui avait été mise en place par le Parti québécois en 2001, même si cette loi avait déjà été modifiée, du moins en partie, par le Parti libéral lors de son élection en 2003. La SQRI vient donc compléter cette transformation de façon radicale en abolissant les principales institutions publiques chargées d’orienter et d’administrer la recherche académique : le Conseil de la science et de la technologie (CST) fondé en 1983, de même que le FRSQ, le FQRNT et le FQRSC qui assument depuis 2001 (suite au démantèlement du FCAR par le Parti québécois) le financement public de la recherche universitaire dans les disciplines des sciences de la santé, des sciences naturelles et du génie, des sciences sociales, des humanités et des arts. Et c’est sans compter la reconfiguration conceptuelle du modèle théorique des systèmes nationaux d’innovation (qui a été à la base de cette politique publique depuis les dix dernières années) proposée par ce changement de paradigme axé sur l’innovation ouverte au sein des pays de l’OCDE (et des pays émergents qui veulent en devenir membres). Si l’ampleur managériale de ce changement paradigmatique n’a pas encore été perçue dans sa dimension administrative, c’est que le CST avait lui-‐même proposé au ministère du Développement économique, de l’Innovation et de l’Exportation (MDEIE) d’adopter ce nouveau paradigme dans un rapport qu’il venait de faire paraître avant que sa dissolution institutionnelle ne soit annoncée dans le budget Bachand de mars 2010.
1 La FQPPU avait émis un communiqué le 30 juin et l’Acfas avait fait de même le 28 juin.
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Comme il l’indique dans l’introduction de son rapport de conjoncture sur l’innovation ouverte (CST : Introduction), le Conseil de la science et de la technologie a fait paraître cette étude en réponse au mandat que lui avait confié le MDEIE dans le contexte d’actualisation de la SQRI, dont il convient ici de signaler que les résultats devaient paraître dans le budget Bachand de mars 2010. Le CST, qui offre une lecture de l’innovation ouverte propre à la situation québécoise (« un apport stratégique pour rehausser la productivité et la capacité du Québec sur le plan mondial »), commence par expliquer que le modèle d’analyse que propose l’innovation ouverte « met bien en lumière la dynamique des démarches d’innovation (linéaire, itérative, en boucle, etc.) dans toute leur diversité » et que « ce modèle révèle les nombreuses interactions qui existent entre les acteurs, que l’impulsion première provienne des découvertes scientifiques et des progrès technologiques (science et technology push) ou que l’innovation procède plutôt à partir de la demande des usagers et des besoins du marché (market pull) » (CST, Avant-‐propos). Le CST expose aussi l’idée que les préceptes de l’innovation ouverte « touchent l’ensemble des composantes et des acteurs du système national d’innovation (SNI) et que le rapport « en présente une première analyse exploratoire en se référant aux axes prioritaires de la SQRI; chacun de ces défis pourrait et devrait cependant faire l’objet d’une réflexion plus approfondie » (CST : Résumé). Cette remarque prend évidemment un sens particulier, étant donné qu’une des conséquences du budget Bachand aura été l’annonce de l’abolition du CST et son rapatriement administratif au MDEIE. Au moment de la parution du rapport du CST sur l’innovation ouverte, le CIRANO (Centre interuniversitaire de recherche, de liaison et de transfert des savoirs en analyse des organisations) avait réagi avec intérêt à la vive recommandation du Conseil adressée au MDEIE d’actualiser la SQRI en fonction des orientations proposées par l’OCDE sur la nécessité, pour le gouvernement québécois et ses agences publiques, de développer les infrastructures de l’innovation ouverte. L’influence de plus en plus grande du CIRANO sur la politique québécoise de l’innovation est devenue évidente au moment de la préparation du budget Bachand. Les experts de ce think tank, principalement composés d’économistes, se donnent clairement pour objectifs de doter le gouvernement et ses institutions des moyens d'être concurrentiels « à l'échelle mondiale, tant sur les marchés de produits et services que sur ceux des ressources, humaines et autres » (CIRANO, site web, janvier 2010). Et pour atteindre ce but stratégique « l'équipe de recherche en politiques publiques du CIRANO se consacre, en collaboration avec ses partenaires privés mais aussi et surtout publics, à la recherche de haut niveau sur les grandes problématiques touchant le Québec d'aujourd'hui et de demain » (CIRANO, site web, janvier 2010). Une lecture attentive des rapports effectués pour le compte des différents ministères du gouvernement québécois et des actes des colloques réunissant des experts internationaux (dont ceux du management public) indique que le CIRANO se donne pour mission de faire la promotion d’un certain nombre de techniques du new public management au sein de l’administration publique québécoise : « une équipe de recherche de premier plan travaille
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ainsi, en partenariat avec les différents acteurs qui sont la source des politiques publiques au Québec, à identifier les questions d'intérêt et à produire des travaux dont les résultats sont utilisables par les organisations en cause ». Comme groupe de pression « le CIRANO contribue aussi activement au débat public, tant sur les questions de l'heure que sur les préoccupations de fond reliées à la formulation et à l'évaluation des politiques publiques au Québec »(CIRANO, site web, janvier 2010). Dans ces conditions, il était tout à fait logique que le rapport du CST apparaisse au CIRANO comme un document d’intérêt, puisque cet avis mettait l’accent sur les résultats décevants des retombées commerciales de la recherche publique au Québec, dans le contexte de la globalisation des politiques de l’innovation. Parmi les principaux rapports publiés par le CIRANO ces derniers mois, qui relèvent à la fois du management public et du management des technologies, on trouve une imposante étude économétrique menée par Jacques Mairesse et Pierre Mohnen (Using innovation surveys for econometric analysis), parue en avril 2010 (Série scientifique : site web, 2010-‐15), portant sur les enquêtes modélisées par l’OCDE à partir du Manuel d’Oslo, afin de guider les pays membres dans l’élaboration des indicateurs de leurs tableaux de bord (scoreboard) servant à financer et à évaluer leurs systèmes nationaux d’innovation. Les deux auteurs enseignent à la Maastricht University et le second est membre du CEFRIO (Centre francophone d’informatisation des organisations). On y scrute spécifiquement les questionnaires que doivent remplir les managers (publics et privés) pour satisfaire aux exigences de comparaisons statistiques internationales (benchmarking) en termes de R&D, en vue de trouver des solutions à la mise en œuvre de réformes managériales susceptibles d’améliorer la performance économique des firmes et des universités, quand elles collaborent ensemble à des projets innovateurs financés par les ministères et les agences publiques. Le rapport du CEFRIO en arrive à la conclusion que malgré les améliorations constantes apportées aux versions successives du Manuel d’Oslo (dont celle de 2005), les différences institutionnelles de gouvernance, au sein des relations entreprises-‐universités, sont à un tel point hétérogènes parmi les pays membres, qu’il est encore impossible de se satisfaire des indicateurs économétriques construits pour ce type d’enquête statistique. Ainsi, les chercheurs constatent que si certaines universités semblent profiter largement du financement public accordé à leurs équipes qui collaborent avec des firmes privées, d’autres ne parviennent pas à faire en sorte que les résultats obtenus par leurs chercheurs académiques soient commercialisés. Lorsque le CST, en citant l’ouvrage de Chesbrough (2003), proclame qu’au-‐delà des grandes firmes « le modèle gagne progressivement les autres entreprises et soulève aujourd’hui un questionnement sur l’ensemble des composantes du système national d’innovation (SNI) ainsi que sur leurs relations avec les acteurs internationaux » (CST, janvier 2010, Résumé), il faut prendre cette thèse au sérieux, dans la mesure où toute la politique de l’innovation du MDEIE s’est appuyée sur le concept de système national d’innovation depuis le lancement de la SQRI en 2006 (qui n’était elle-‐même qu’une actualisation de la politique de l’innovation implantée par le PQ en 2001).
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Il faut par ailleurs noter que Chesbrough, dont les références relèvent essentiellement des relations entre les firmes multinationales et les entreprises (privées et publiques) avec lesquelles elles collaborent, ne fait jamais référence à l’impact de son modèle d’affaires sur les systèmes nationaux d’innovation. Le CST reprend à son compte l’ensemble des documents de l’OCDE afférents à l’innovation ouverte, publiés depuis 2008, et y ajoute un certain nombre d’articles scientifiques (dont des études de cas) qui complètent son argumentaire sur les bénéfices et les obstacles des grandes tendances de l’innovation ouverte dans le monde. Il apparaît cependant que, dans la très grande majorité des études de cas présentées dans le rapport du CST, ce sont surtout les bénéfices qui l’emportent alors que les obstacles sont peu documentés. Ainsi, quand le CST traite des stratégies nationales et des institutions supranationales dont se dotent les pays européens qui se réclament de l’innovation ouverte, dont le European Center for Open Innovation, on y apprend que ce dernier a « pour mission de contribuer à l’élaboration et à la diffusion des connaissances liées à la notion d’innovation ouverte dans les milieux d’affaires européens », ou alors que « la Norvège, le Danemark, l’Autriche et la Belgique ont récemment joint leurs efforts pour conduire une étude visant à mieux comprendre l’innovation ouverte et ses impacts sur la performance des entreprises et sur l’action des pouvoirs publics » (CST : 12). Le problème, c’est que la plupart des ministères et des agences publiques des pays de l’OCDE se livrent à ce genre de veille stratégique où des analystes gouvernementaux et des consultants de firmes privées multiplient les rapports nationaux et financent les workshops supranationaux (au sein de l’Union européenne), qui convergent tous vers la promotion d’un concept performatif proposé par l’OCDE, et l’institutionnalisation de mesures statistiques nécessaires à la comparaison internationale avec les États-‐Unis.
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LA RÉGULATION MINISTÉRIELLE DES HAUTS FONCTIONNAIRES : UN ENJEU ADMINISTRATIF Le dépôt du budget Bachand avait été précédé par la mise en place hautement médiatisée d’un comité consultatif d’économistes (coprésidé par le ministre des Finances, lui-‐même doté d’un doctorat en sciences économiques de Harvard), dont Claude Montmarquette et Robert Gagné qui étaient respectivement PDG du CIRANO et spécialiste en économétrie au sein du même centre de recherche. Ce comité d’experts avait été mandaté pour rédiger trois fascicules (entre novembre 2009 et février 2010) afin de conseiller le ministre quant à l’atteinte de l’équilibre budgétaire des finances publiques du gouvernement Charest. L’étude de ces fascicules est fort révélatrice de l’orientation économique de ses auteurs et des objectifs visés par leurs recommandations au ministre. Les références aux analyses statistiques de l’OCDE sont récurrentes et portent la marque autorisée de sa gouvernance, en particulier lorsqu’il est question de la gouvernance des soins de santé publique : « De façon générale, les pays de l’OCDE ont opté pour un ministère fort et des structures régionales légères, ou à l’inverse pour un ministère léger et une structure régionale plus élaborée. Le Québec fait les deux » (Comité consultatif : 3). On y souligne le fait que cette double fonctionnalité rend la structure de financement beaucoup moins efficace et que par conséquent cela affecte la performance publique du système de santé dans son ensemble. Même constat pour l’éducation, où l’on propose une décentralisation des structures administratives et une débureaucratisation des allocations financières par le biais d’une coopération avec les firmes privées, toujours dans le but encore très fortement souligné d’améliorer la performance en faisant jouer la concurrence au sein même du système d’éducation public. Au même moment, les signataires d’un Pacte pour le financement concurrentiel des universités faisait paraître un document (lui aussi amplement médiatisé), favorisant la hausse des droits de scolarité afin de pallier les déficits structurels des universités. Deux des signataires du Pacte étaient aussi membres du CIRANO et l’un d’eux était en plus affilié à l’Institut économique de Montréal (IEM), une organisation qui s’est fait connaître par ses prises de position contre la politique de l’innovation inaugurée par le gouvernement du Parti québécois au début des années 2000. En santé comme en éducation, les experts du comité consultatif recommandent donc au ministre des Finances de miser sur la création d’agences publiques plus autonomes : ce qui, dans le jargon du new public management, constitue une référence implicite au principal-‐agent problem, théorisé par Hood et Pollitt, quand il s’agit de « modifier la répartition du pouvoir et de l’autorité au sein des institutions de la fonction publique et de transformer les cultures et les sous-‐cultures des institutions publiques » (Pollitt : 7). D’où la fameuse formule du ministre Bachand sur la révolution culturelle que le dépôt de son budget allait provoquer dans l’administration publique. Le fait que l’actualisation de la SQRI ait été ainsi reportée, alors même qu’elle devait être pleinement inscrite dans la matrice économique du budget, ne doit pas faire oublier qu’elle y est déjà anticipée : c’est en effet Clément Gignac (ancien économiste en chef de la Banque nationale) qui a bénéficié de la
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responsabilité de la piloter, après avoir succédé à Raymond Bachand à la tête du ministère du Développement économique, de l’Innovation et de l’Exportation (MDEIE). La réaction procédurale du PDG du FQRNT, qu’on pouvait lire sur le site web de ce conseil subventionnaire, est à cet égard fort révélatrice de ce qu’on peut anticiper des nouvelles relations qui vont se structurer entre hauts fonctionnaires sous-‐ministériels et gestionnaires des agences publiques dans l’actualisation de la SQRI. On y apprenait que le FQRNT allait continuer de fonctionner selon les indicateurs élaborés, les cibles visées et les résultats escomptés dans son Plan d’action (2008-‐2009) et dans son Plan stratégique (2007-‐2010), qui sont des documents officiels d’abord adoptés par les membres du conseil d’administration et adressés au MDEIE. Or l’une des dimensions stratégiques de la budgétisation de ces plans (typiques de la reddition de comptes afférente au new public management) portait précisément sur l’impact que la SQRI avait eu sur le Fonds, en termes d’investissements à la formation et à la recherche, entre les années 2007 et 2009. Le PDG se disait confiant que le ministre allait respecter l’autonomie de cette planification dans le contexte de la fusion du FRSQ, du FQRSC et du FQRNT. Tout comme pour le Conseil de la science et de la technologie, chaque conseil subventionnaire avait été mandaté pour soumettre au MDEIE ses recommandations spécifiques quant à l’actualisation de la SQRI. De toute évidence, l’exercice de comptabilité prospective auquel se sont livrés les gestionnaires de chacune des ces agences publiques n’a pas reçu l’accueil ministériel escompté.
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LES CHAMBRES DE COMMERCE : VERS DE NOUVEAUX OUTILS DE PLANIFICATION ET DE GESTION Loin d’être une simple procédure budgétaire de comptabilité en termes de réduction des coûts administratifs, l’actualisation de la SQRI fait de l’innovation ouverte une nouvelle technique de gestion des externalités de la connaissance imposée aux chercheurs universitaires. On en trouve un précepte dans l’argumentaire des réponses de la Fédération des chambres de commerce du Québec (FCCQ) adressées, à l’automne 2009, au Groupe-‐conseil sur l’actualisation de la SQRI (mandaté par le ministre Gignac pour l’aviser). À la question posée : « Dans l’actuelle stratégie, quelles sont les mesures qui vous sont apparues les plus efficaces et qui méritent d’être maintenues? À l’inverse, lesquelles devraient faire l’objet d’une révision approfondie ou être abolies? », la FCCQ répond que « prises individuellement, les différentes mesures qui composent la Stratégie québécoise de la recherche et de l’innovation sont intéressantes. Dans le quotidien d’une entreprise désireuse d’investir en innovation et en R&D, elles apparaissent cependant, prises ensemble, comme étant trop nombreuses, trop fragmentées et trop complexes » (FCCQ : 22). Cette référence à la simplification des procédures de demande de subvention est typique de l’incidence des techniques de gestion visant à débureaucratiser la culture organisationnelle des agences publiques de financement de la recherche dans leurs relations avec les universités. L’objectif de la SQRI, poursuit la FCCQ, est d’aider à stimuler l’investissement au sein des firmes : « or, le nombre élevé de programmes différents, jumelé à leur fragmentation, entraîne des coûts administratifs qui pourraient plutôt être investis en recherche et développement. Concrètement, les entreprises doivent généralement procéder à des assemblages de programmes qui parfois poursuivent des objectifs incompatibles pour obtenir un soutien gouvernemental adéquat. Cela s’avère ardu et nécessite la mobilisation de plusieurs ressources » (FCCQ : 22). De sorte que « cette problématique décourage également plusieurs entrepreneurs qui préfèrent alors ne pas effectuer de demande. De même, pour certaines entreprises, la complexité des formulaires, jumelée aux conditions qu’il importe de rencontrer, ne justifie pas le temps consacré à la préparation d’un dossier. La mesure visant à défrayer une partie du salaire d’un chercheur est d’ailleurs un exemple de cette problématique » (FCCQ : 22). Cette dernière remarque sur la rémunération salariale est fort révélatrice des relations de knowledge brokering (Mayer : 2010) que les managers des firmes veulent entretenir avec les chercheurs universitaires dans le cadre contractuel des externalités de la connaissance.
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L’ENTREPRENEURSHIP ACADÉMIQUE : ENTRE FINANCEMENT PUBLIC ET FINANCEMENT PRIVÉ En parallèle à la SQRI, l’examen de la nouvelle architecture (juin 2010) des programmes de subvention du Conseil de recherches en sciences humaines du Canada (CRSH) révèle un premier impact de cette rhétorique de la simplification procédurale, ne serait-‐ce que par l’usage sémantique de ce concept d’architecture qui renvoie directement au lexique des managers des télécommunications. On y traite systématiquement de la souplesse et de l’efficacité des nouveaux programmes et d’un processus allégé de soumission des demandes, visant à minimiser les obstacles que pouvaient rencontrer les chercheurs au moment de rédiger leurs projets. On y fait état de nouveaux programmes de financement en partenariat faisant appel à la mobilisation et à la diffusion des connaissances dans un contexte multisectoriel où l’interdisciplinarité et la commercialisation auront un rôle majeur à jouer, entre autres en utilisant les réseaux sociaux pour rejoindre les citoyens dans les métropoles comme en région. Le financement des équipes de recherche en partenariat (jusqu’à 500,000$ sur cinq ans), dont on dit qu’il sera simplifié et regroupé en grandes catégories, comporte toutefois une contrainte budgétaire obligeant les équipes de chercheurs à fournir l’assurance d’obtenir une contribution extérieure des partenaires correspondant à la moitié du budget global : que ces partenariats soient négociés avec des agences publiques ou avec des firmes privées, tant au Canada que sur la scène internationale (ce qui n’est pas sans rappeler la façon de faire des top management teams de R&D au sein des firmes multinationales). Dans le domaine des nouvelles technologies de l’information et de la communication, comme dans ceux de la recherche biomédicale et des sciences de l’environnement, les ministères font de plus en plus appel à des consultants en marketing, mais aussi à des expertises académiques et juridiques pour être en mesure d’agir de façon coopérative face aux problèmes qu’ils cherchent à régler : qu’il s’agisse du phénomène du logiciel libre mobilisant des collectifs en ligne qui visent à contester de façon endogène l’industrie numérique ou bien des groupes de patients atteints du cancer qui veulent faire avancer plus rapidement la découverte d’une thérapie génique, en passant par les diverses collectivités locales qui revendiquent un renforcement législatif de la protection de leurs territoires, comme dans le cas des régions forestières. C’est ce que le rapport du CST appelle « la face citoyenne de l’innovation ouverte », en expliquant dans son dernier chapitre que « l’ouverture accrue du processus d’innovation qui se manifeste en direction du marché et des consommateurs possède une facette citoyenne », sans compter qu’elle « donne également aux citoyens et aux usagers de nouvelles occasions d’influencer les processus d’innovation et les décisions » (CST : 95). Et en se basant sur une étude du CEFRIO, qui démontre que les jeunes de la génération des 12-‐24 « ne voudront pas faire carrière dans un environnement qu’ils considèrent comme fermé », le rapport en conclut que « tous ces éléments qui stimulent l’innovation conduite
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par la demande sont de nature à transformer la culture scientifique et technique en une culture citoyenne de l’innovation » (CST : 95). Le CST indique que l’innovation ouverte « pose de nouveaux défis de gouvernance du système national d’innovation » et en appelle à « la production d’indicateurs de suivi et de mesure, et la reconnaissance de la contribution des chercheurs parmi les critères d’évaluation de leur dossier professionnel et de recherche ». Ce type d’argumentaire s’inscrit parfaitement dans les topiques managériales des articles que faisait paraître à la même époque la revue R&D Management (juin 2010) dont l’un qui s’intitule précisément « Identification of competencies for professionals in open innovation teams » (un numéro thématique d’ailleurs publié sous la responsabilité de Henry Chesbrough). La question est de savoir si cette ouverture des équipes de recherche universitaire à la gouvernance (tant publique que privée) des techniques de management et aux externalités de connaissance des firmes multinationales peut vraiment mener à une culture citoyenne de l’innovation. Car dans le cas de l’innovation ouverte, ̶ et c’est ce qui distingue ce concept de celui de système national d’innovation ̶, peu de chercheurs universitaires s’entendent sur sa définition et sur son appropriation concrète. La première tentative d’en faire une synthèse au niveau empirique des firmes (« How open is innovation? » parue dans Research Policy en 2010) en arrive à la conclusion suivante :
There has been a range of important papers published on the topic and it is timely to take stock on where the research stands to advance it further. Our review shows that a variety of definitions and focal points are used, but that these do not yet cohere into a useable analytical frame. The absence of such a framing device makes it difficult to compare and evaluate the advantages and disadvantages to openness at the level of the firm (Dahlander et Gann : 1).
Ce que démontre par ailleurs leur étude bibliométrique, c’est que ce sont d’abord les scholars en management des technologies (publiant dans des revues extrêmement spécialisées comme R&D Management et Research Technology Management) qui s’en sont emparés et qui en ont assumé la légitimité académique au sein des innovations studies. Cette étude très exhaustive retrace toutes les publications indexées dans le Thomson’s ISI Web of Knowledge portant sur le concept d’innovation ouverte jusqu’en août 2009. Un tout premier constat analytique s’est vite imposé (qui peut d’ailleurs étonner dans le contexte de la recherche académique) :
To date, the literature has been imbalanced in its strong focus on benefits of openness. Thus, we also pay close attention to disadvantages. We suggest that these factors might affect reasons why some firms gain and others lose from openness (Dahlander et Gann :2).
Puisque des firmes qui ont opté pour l’innovation ouverte, dans leurs relations avec d’autres entreprises, n’ont pas obtenu les bénéfices anticipés, il y aurait dès lors lieu de s’interroger sur l’impact de ce type d’alliances quand ce sont les universités qui sont les partenaires
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commerciaux de ces firmes privées. En devenant fournisseurs de connaissances auprès des firmes multinationales, les universités se placent en situation de rivalité, non plus académique, mais de concurrence commerciale (les unes par rapport aux autres) pour la conquête incessante de marchés nationaux, régionaux et mondiaux. C’est là que prennent toute leur importance les techniques du nouveau management public qui cherchent à mesurer les corrélations entre les stratégies incitatives des conseils subventionnaires et leur impact sur la productivité des chercheurs universitaires. Dans un article de Research Policy (« University research funding and publication performance : an international comparison »), Auranen et Nieminen commentent cette situation en des termes à la fois analytiques et réflexifs :
Hand in hand with the rise of the new public management and expanding global techno-economic competition, an increasing prominence has been given to the idea that university systems employing output incentives and competition mechanisms are more efficient and productive than systems in which such incentives and mechanisms are employed less or not at all. While there is some evidence of the short-term usefulness of incentives and competition, country-specific comparative information on research performance in relation to the scope and scale of competition seems to be largely missing (Auranen et Nieminen : 822).
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L’OCDE ET LA RESPONSABILITÉ MINISTÉRIELLE DE LA GOUVERNANCE PUBLIQUE Quand en 2003 Henry Chesbrough, le directeur exécutif d’un centre de recherche de la Hass School of Business (University of California, Berkeley), fit paraître un ouvrage dont le titre était à lui tout seul un programme de prospective technologique et financière : Open Innovation : The New Imperative for Creating and Profiting from Technology, le titre en question semblait reprendre le concept d’open source déjà en vogue, aux États-‐Unis, depuis la parution en 1988 d’un livre (The Sources of Innovation) d’Eric von Hippel. Or il n’en était rien, puisque Chesbrough revendiquait la propriété intellectuelle d’un concept adapté à une approche théorique et empirique fort différente dont on retrouvait les préceptes dans un autre article paru la même année : « The logic of open innovation : Managing intellectual property », publié dans la California Management Review. Alors que le modèle d’innovation de Von Hippel faisait plutôt appel aux usagers des nouvelles technologies, Chesbrough s’intéressait quant à lui aux diverses alliances externes des multinationales avec les firmes leur servant de partenaires (les laboratoires publics et les spin-‐offs universitaires étant d’ailleurs alignés dans cette catégorie des fournisseurs de main-‐d’œuvre, d’idées et de techniques innovantes). Von Hippel disait se réclamer de la démocratisation de l’innovation, alors que Chesbrough proclamait sa commercialisation. Au moment où l’OCDE publie en 2008 son document intitulé Open Innovation in Global Networks et organise des conférences internationales au sein des pays membres, il existait déjà une vaste littérature scientifique en majeure partie très favorable au concept et au modèle d’affaires configurés par Chesbrough, en particulier dans les revues académiques consacrées au management de l’innovation et au commerce international. Ces articles couvraient autant l’industrie des télécommunications que celle des biopharmaceutiques, bien que les études de cas de Chesbrough (financées par la Harvard Business School) avaient été menées sur les relations organisationnelles de gouvernance et de performance entre des firmes multinationales comme Xerox et ses spin-‐offs. Le processus de responsabilisation des gouvernements à l’égard des réseaux mondiaux d’innovation s’est institutionnalisé lorsque la Directorate for science, technology and industry (DSTI) de l’OCDE a organisé, en janvier 2009 à Paris, un symposium dont le bilan fut formulé en ces termes :
This symposium was held at OECD headquarters in Paris and examined the phenomenon of global open innovation from the perspective of companies and research organisations in France and Europe. Bringing together business representatives from leading companies such GE Research, IBM, Deutsch Telekom, as well as public research organisations like the Pasteur Institut and INRIA, it also assessed the international variations in open innovation practices. Such variations are important to take into account in order to understand the diffusion of open
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innovation practices and the policies to promote in order to fulfil the promises of the open innovation paradigm. (OECD : Website, January 2009).
On y proclame que les gouvernements des pays de l’OCDE sont dorénavant confrontés à de nouveaux défis, à des réformes et à des mesures mettant à contribution leur habilité à administrer et à gérer la gouvernance et la performance de leurs systèmes nationaux et régionaux d’innovation à un niveau global. Le document est d’autant plus explicite quant aux objectifs prioritaires et aux missions assignées aux administrateurs et aux managers publics des différents ministères impliqués :
Using a case study approach and empirical analysis, the OECD project on Globalisation and open innovation reviewed the trends and drivers behind open innovation and shed light on some of the policy implications for governments, higher education and public research and the business environment.
Ce qui caractérise cette dernière affirmation concernant l’innovation ouverte, c’est la rela-‐tion induite entre l’enseignement supérieur, la recherche publique et le monde des affaires.
Ce qui peut sembler paradoxal dans la volonté de l’OCDE d’utiliser le modèle d’affaires théorisé par Henry Chesbrough (principalement cité, depuis 2003, dans les textbooks des chercheurs des business schools) et de l’appliquer dès lors aux politiques de l’innovation (instaurées par les managers publics dans l’administration des ministères, des agences et des universités), c’est qu’il s’agit de faire appel à une planification budgétaire et financière (relevant des techniques du nouveau management public) qui puisse englober la prestation des agences gouvernementales et la gestion de la recherche académique. Le nouveau management public est de l’avis même de ses deux principaux théoriciens, Christopher Hood et Christopher Pollitt, un vaste ensemble de techniques très disparates mais revendiquant les mêmes méthodes pour tous les problèmes managériaux observés. En Grande-‐Bretagne, dans les années 1990, certaines de ces techniques ont donné lieu au mouvement de la politique des preuves (evidence-‐based policy) dont les objectifs étaient de doter les ministères et les agences publiques de financement de la recherche d’un instrument d’évaluation basé sur des indicateurs de mesure d’une extrême précision quant aux résultats quantifiables des subventions accordées aux chercheurs, et en particulier aux équipes de recherche interdisciplinaire : en somme, permettre aux policy-‐makers de prendre des décisions rigoureuses quant au transfert des connaissances académiques vers la santé publique et les services sociaux. De sorte que, toutes choses étant égales par ailleurs, autant les programmes de recherche biomédicale les plus pointus que les programmes de recherche en sciences économiques les plus abstraits, puissent servir à résoudre de façon rationnelle des problèmes posés à la société à des coûts acceptables pour les usagers et selon les choix de ces derniers en tant que clients et citoyens. Une relation évidente devait être construite entre les chercheurs des laboratoires universitaires et les professionnels des services publics, tant en biologie moléculaire qu’en travail social, en tenant compte du contexte local des besoins exprimés, afin d’être en mesure de se livrer à des recherches et des pratiques rigoureuses.
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Un document stratégique du gouvernement britannique de la fin des années 1990 est explicite sur la nécessité d’obtenir de bonnes informations basées sur des sources fiables :
This Government’s declaration that ‘what counts is what works’ is the basis for the present heightened interest in the part played by evidence in policy-making policy decisions should be based on sound evidence. The raw ingredient of evidence is information. Good quality policy making depends on high-quality information, derived from a variety of sources : expert knowledge; existing domestic and international research; existing statistics; stakeholder consultation; evaluation of previous policies; new research, if appropriate; or secondary sources, including the internet (UK Cabinet Office : Website, December 1999).
Les managers publics ont donc la responsabilité d’incorporer des objectifs quantifiables de bonne gouvernance aux programmes de recherche et ils sont imputables d’une reddition de comptes axée sur le modèle de la médecine des preuves (evidence-‐based medecine) appliqué à l’évaluation de la performance des groupes de recherche.
L’une des premières études statistiques d’un scholar ayant tenté d’évaluer empiriquement les réformes du nouveau management public et leurs objectifs stratégiques de rendre plus efficiente la gestion de l’administration des universités, a été entreprise par Torben Schubert et est parue en 2009 dans Research Policy :
It was demonstrated that many new public management instruments have a positive influence on research efficiency. In any case, this depends on the definition of what research activities actually comprise. Evaluations are a reasonable mechanism to enhance publishing activities. Goal agreements and the existence of research councils push the research units in the direction of increased transfer and teaching efficiency. High competencies of the chancellors and presidents as well as the non-existence of strict personnel quotas contribute positively almost everywhere (Schubert : 1233).
La démonstration de Schubert, chercheur au Fraunhofer Institute Systems and Innovation Research (Karlsruhe, Allemagne), portait exclusivement sur les universités allemandes :
We conclude that new public management may exert considerable positive effects on university research if not employed blindly. We have also provided hints on how a university may choose its particular governance model with respect to its mission. Summarising, the new public management reforms have proved useful in guarantee-ing a more effective spending of governmental resources (Schubert : 1225).
Pour être en mesure de comprendre le tournant paradigmatique de l’innovation ouverte, théorisée par Chesbrough en 2003 et dont l’OCDE a entrepris de faire la promotion en 2008, il faut revenir au concept de système national d’innovation qui avait précisément été, tout au long des années 1990 et 2000, le paradigme des politiques de l’innovation dans l’ensemble des pays membres, et plus particulièrement au sein des ministères responsables en titre de la politique scientifique (et technologique) : une dénomination devenue statutaire depuis la publication du rapport de Vannevar Bush aux États-‐Unis.
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Pour la plupart des gouvernements en question, cette politique de l’innovation (qui intègre la politique industrielle et la politique de l’enseignement supérieur) s’est construite sur la base du concept de système national d’innovation et des pratiques organisationnelles que ce cadre conceptuel présuppose comme avantage compétitif quant à la croissance économique. UNE GLOBALISATION DES POLITIQUES DE L’INNOVATION BASÉE SUR LA TECHNOLOGIE
Depuis le début des années 2000, l’OCDE considère que cette politique de l’innovation s’est globalisée et que les pays en transition (ex-‐pays de l’Europe de l’Est), tout comme les pays en développement (ex-‐pays du Tiers-‐monde) et les pays en émergence (la Chine et l’Inde en particulier), peuvent se doter de systèmes nationaux d’innovation adaptés à la gouvernance de leurs propres institutions (plutôt que de se soumettre aux mécanismes traditionnels du transfert technologique Nord-‐Sud). C’est ce que l’OCDE appelle la troisième génération des systèmes nationaux d’innovation. Or, malgré l’importance de cette politique publique fondée sur le rôle stratégique de la science et de la technologie à l’échelle internationale, et de son impact national, régional et local sur la croissance économique endogène des pays qui en font un usage institutionnel, très peu d’analyses ont été menées portant sur la place spécifique de l’innovation organisationnelle dans le management des technologies. Et alors même que la conceptualisation et les effets institutionnels de cette politique de l’innovation relèvent de trois groupes d’agents (les experts-‐consultants de l’OCDE, les fonctionnaires des agences gouvernementales et les chercheurs universitaires), il faut constater que seuls quelques scholars spécialisés en sciences économiques se sont donnés la tâche de reconstruire la généalogie historique permettant de comprendre les causes de ce phénomène et de fournir quelques pistes de recherche, en prenant le spectre des cas extrêmes de la politique de l’innovation de la Suède et du Soudan dans le contexte de cette globalisation des modèles de troisième génération dont l’OCDE fait la promotion au sein des gouvernements des pays membres et de ceux qui veulent y adhérer. C’est dans ce contexte de comparaison internationale que l’OCDE dresse régulièrement des tableaux de bord visant à classer les systèmes nationaux d’innovation essentiellement basés sur l’innovation technologique. Les chercheurs universitaires ayant tenté de globaliser le classement des systèmes nationaux d’innovation ont constaté que les places demeurent récurrentes à chaque actualisation des indicateurs et que l’on retrouve toujours la Suède et les pays scandinaves dans les toutes premières positions et les pays africains comme le Soudan aux derniers rangs.
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En somme, si la politique de l’innovation fondée sur l’innovation technologique s’est globalisée et si elle mobilise un nombre relativement important d’analystes parmi les experts des organisations internationales, les fonctionnaires et les chercheurs au sein de l’ensemble des ministères et des disciplines, les études sur l’implantation des techniques du nouveau management public au sein des systèmes nationaux d’innovation restent extrêmement limitées, toutes choses étant égales par ailleurs, tant en Suède qu’au Soudan. Cela relève, d’une part, de l’incapacité des experts de l’OCDE à complexifier leur analyse de l’innovation technologique en-‐dehors des sciences économiques (dont le management des technologies) et, d’autre part, du peu d’intérêt manifesté par les policy makers et les scholars à entreprendre des analyses qui sortent des limites de leur conception de l’innovation technologique comme matrice institutionnelle de l’ensemble des pratiques innovantes au sein de l’économie du savoir (knowledge-‐based economy). De sorte que les études en science, technologie et société (STS) sont toujours absentes de la littérature scientifique afférente aux études en science, technologie et innovation (STI), tant dans les rapports de l’OCDE que dans les documents ministériels des pays membres. C’est dans ce contexte qu’un débat a été lancé par des chercheurs en STS et en STI à propos de la façon d’aborder la politique de l’innovation : (1) en tant que scholars rattachés à des centres de recherche universitaire et (2) en tant qu’experts auprès des policy makers officiant au sein des organisations internationales, des ministères et des agences publiques de financement de la recherche académique. Du côté des STS, le débat a été lancé par un article d’Andrew Webster paru dans un numéro spécial de la revue Science, Technology & Human Values (2007). Il s’agissait de persuader les membres de cette communauté épistémique de passer de la déconstruction (et de la socio-‐construction) de la science policy à sa reconstruction, considérée du point de vue d’un engagement envers la société, tout en préservant les acquis analytiques des études déconstructivistes (et socio-‐constructivistes) des dernières décennies. Du côté des STI, le débat a été entamé par un numéro spécial de la revue Research Policy (2009) visant à mieux définir la constitution même de cette communauté épistémique de scholars, composés presque essentiellement d’économistes évolutionnistes ayant fait la promotion des systèmes nationaux d’innovation auprès de l’OCDE et de ses pays membres. Les auteurs de l’éditorial (Morlacchi et Martin) suggèrent de prendre en considération une troisième communauté épistémique, les théoriciens et les praticiens des TIM (technology of innovation management). En somme, les STS veulent se préoccuper davantage de la science policy et y engager leur expertise déconstructiviste (et socioconstructiviste) en l’adaptant à la nouvelle conjoncture des relations université-‐industrie-‐gouvernement, alors que les STI veulent élargir leurs préoccupations d’experts économiques de la science policy en se rapprochant davantage des autres disciplines des sciences sociales dont plus particulièrement le management des technologies et la sociologie des organisations. On peut toutefois penser que les TIM vont progressivement s’intégrer aux STI, tout comme les philosophes et les historiens des sciences se sont intégrés aux STS dans la procédure gouvernementale qui a mené de la reconfiguration du concept de politique scientifique et technologique à celui de politique de l’innovation.
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L’IMPLICATION DES CHERCHEURS DANS LA CONSTRUCTION DES POLITIQUES DE L’INNOVATION L’objectif de ce débat serait donc d’examiner les arguments et l’implication de ces deux communautés épistémiques de chercheurs en STS et en STI du point de vue de leurs relations avec la science policy : comment inscrire et saisir les trajectoires de ces chercheurs et de leurs centres de recherche depuis la genèse de la politique scientifique de 1945, en passant par la politique de R&D, jusqu’à l’implantation de la politique de l’innovation des années 1990. Il s’agirait dès lors d’analyser les arrangements institutionnels, les accords contractuels et les instruments de mesure dont se sont dotées ces deux catégories de scholars pour se construire une posture (ou refuser cette posture) au sein des universités, des firmes et des ministères, mais aussi parmi les organisations internationales (dont l’OCDE) dédiées à la politique de l’innovation dans les 20 dernières années. L’existence d’un réseau de chercheurs universitaires se reconnaissant comme spécialistes de ce qui pourrait devenir une nouvelle discipline des sciences sociales (ou une sous-‐discipline des sciences économiques), à savoir les innovation studies, a été révélée par une enquête de Fagerberg et Verspagen publiée dans Research Policy (2009). Or, en recoupant cet indicateur statistique avec les entrevues semi-‐structurées menées par Naubahar Sharif publiées dans Research Policy (2006), tant avec les scholars qu’avec les experts de l’OCDE regroupés au sein de la Directorate for Science, Technology and Industry (DSTI), on peut noter qu’autour de ces différentes écoles de pensée ou tendances concurrentes, l’économie évolutionniste est celle qui rassemble le plus grand nombre de chercheurs, mais surtout que c’est à travers cette tendance qu’on retrouve les théoriciens les plus influents tant auprès des experts de l’OCDE, des agences gouvernementales que des chercheurs académiques spécialisés dans les topiques de la politique de l’innovation et du système national d’innovation. De ces entrevues menées avec les principaux chercheurs académiques qui ont publié les ouvrages, les articles et les rapports ayant joué un rôle stratégique dans la conceptualisation et la promotion du système national d’innovation au sein de la DSTI, il ressort que l’objectif de ces chercheurs (dont certains agissaient aussi à titre d’experts) visait à opposer le cadre analytique de l’économie évolutionniste au modèle néo-‐classique qui dominait alors les études économétriques des économistes à l’emploi de cette division administrative de l’OCDE. Deux tendances divergentes semblent avoir émergé entre, d’une part, les experts de l’OCDE (Freeman, Nelson, Lundvall, Edquist) qui ont institutionnalisé la pratique du système national d’innovation au sein de la DSTI et, d’autre part, des chercheurs suédois (Carlson et Jacobsson) chargés d’aviser leur gouvernement concernant la nécessité de mieux définir le cadre théorique du concept opératoire de système national d’innovation et de donner plus de rigueur à son application dans le contexte actuel de la globalisation des politiques de
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l’innovation, tant parmi les pays de l’OCDE (comme la Suède) que dans les pays en développement (comme le Soudan). Les chercheurs se demandaient aussi si les systèmes d’innovation sont déjà présents dans chaque pays (quel que soit son degré d’industrialisation) ou s’il fallait au contraire prendre la décision administrative de les mettre en place (dans le cas de pays comme l’Algérie qui se situent dans la phase postcoloniale de leur accès à l’indépendance ou d’anciens pays de l’Est comme la Hongrie dont le développement économique relevait de la planification soviétique). En Suède, c’est la création de Vinnova (Swedish Agency for Innovation Systems) en 2001 qui va doter ce pays d’une politique de l’innovation basée sur le concept de système national d’innovation. Bo Carlsson et Staffan Jacobsson, deux des principaux chercheurs universitaires ayant participé aux travaux théoriques qui vont mener à l’adoption de cette politique par le gouvernement suédois, expliquent que le point de départ de ce projet provenait d’une initiative de la Swedish Academy of Engineering Sciences et visait à consolider les compétences techniques et industrielles des firmes suédoises, initiative à laquelle Carlsson et Jacobsson étaient liés depuis la fin des années 1970 et qui impliquait des entrepreneurs, des ingénieurs, des économistes et des policy-‐makers. Puis Carlsson et Jacobsson se sont retrouvés avec d’autres chercheurs académiques (en sciences économiques, ingénierie, management et sociologie) au sein d’un projet intitulé Sweden’s Technological System and Future Competitiveness lancé à la fin des années 1980 et qui donnera lieu à la production de trois rapports (parus en 1995, 1997 et 2002). Les travaux de ce groupe vont être discutés au sein du champ universitaire suédois mobilisant plus particulièrement les instituts de recherche en management industriel et en sciences économiques de la Chalmers University of Technology et le Reseach Policy Institute de la Lund University. Les travaux menés par ces chercheurs, qui portaient sur les systèmes d’innovation considérés comme des systèmes sectoriels, ayant chacun sa propre dynamique industrielle en termes de recherche et développement (R&D), ont été élaborés en parallèle avec l’émergence et l’institutionnalisation du concept de système national d’innovation au sein de la DSTI. C’est l’adoption de ce concept par les administrateurs de l’OCDE qui aurait incité les fonctionnaires du gouvernement suédois (et plus particulièrement ceux du ministère de l’Industrie) à adopter la rhétorique de l’innovation technologique comme facteur principal de croissance économique. L’implantation de ce concept opératoire par le ministère de l’Éducation (qui s’y opposait), son impact organisationnel sur l’évaluation de la recherche par les pairs au sein des universités et sur le financement de la recherche académique par les conseils subventionnaires, a provoqué un virulent débat à la fin des années 1990. Mais en 2001, le gouvernement suédois tranchait la question en créant Vinnova qui deviendra l’agence managériale du système national d’innovation. Dans un numéro de Policy Studies, Elise Ramstad (une agente de la Finnish Funding Agency for Technology and Innovation), propose une étude qui stipule que la priorité accordée à l’innovation technologique se maintient au sein des agences gouvernementales :
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Studies of innovation systems and policies have tended to focus on scientific and technological innovation; organisational innovations continue to receive scant attention in many countries. The purpose of this article is to study the front-runner countries in organisational innovation activities, in this case Germany, Norway, Sweden and Finland, as well as the ways in which they have integrated organisational innovations as a part of broader innovation policies. The evaluation framework consists of four levels: (1) governmental and strategic level; (2) ministerial level; (3) research and development (R&D) programme level; and (4) performance level (Ramstad : 533).
Les scholars doivent donc aviser les policy-‐makers de la nécessité impérative de reconfigurer la place de l’innovation organisationnelle au sein des systèmes nationaux d’innovation et son rôle stratégique dans la gouvernance ministérielle de l’administration publique. La singularité de cette étude pour les innovation studies serait la suivante:
This article discusses innovation systems' similarities and differences from the organisational innovation point of view and suggests future recommendations for policy-makers. Although the results show that the countries studied support organisational innovation R&D projects and programmes, only Finland and Sweden have been able to create broad-based innovation strategies at the governmental level that include organisational innovation. Even so, a stronger political commitment is needed to foster a comprehensive approach to innovation and support the legitimacy of organisational innovation. In the future, it will be necessary to systematically embed an organisational innovation perspective into innovation systems throughout the governmental, ministerial, R&D programmes and performance levels. To enhance learning concerning innovation activities in Europe, a concrete tool for a joint learning platform in the field of innovation activities is also presented (Ramstad : 533).
La Suède et la Finlande sont donc ici présentées comme les deux pays les plus avancés de l’OCDE quant au management public des politiques de l’innovation.
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LES SYSTÈMES NATIONAUX D’INNOVATION EN PHASE AVEC LA NOUVELLE GESTION PUBLIQUE Cependant, des politologues comme Christopher Pollitt et David Hart ont montré que la gouvernance des techniques du nouveau management public et l’internationalisation des systèmes nationaux d’innovation ne sont pas transférables ou exportables de façon aussi évidente que les experts de l’OCDE (et principalement ceux qui sont rattachés à la DSTI) ont pu le penser ou le laisser croire. Professeur de management public à la faculté des sciences sociales de la Erasmus University of Rotterdam, Pollitt a lui aussi été consultant à l’OCDE mais pour une autre division administrative, la Directorate for Public Governance and Territorial Development (DPGTD) : la conclusion de ses diverses études comparatives visait à montrer la très grande difficulté institutionnelle qu’il y avait à vouloir exporter les réformes du management public britannique aux Pays-‐Bas ou celles de la Nouvelle-‐Zélande en Suède. Il cite de nombreux cas où des gouvernements, conseillés par leurs managers publics, étaient persuadés que des techniques rigoureuses, basées sur des indicateurs statistiques, étaient suffisantes pour imposer une réforme : ou encore le cas de chercheurs très sceptiques à l’égard d’une de ces techniques qui se sont malgré tout laissés persuader de les appliquer sous prétexte que des réformes étaient à ce point urgentes qu’il valait mieux prendre le risque de les essayer plutôt que de ne rien faire et de laisser les choses se dégrader. Ainsi, les techniques managériales de benchmarking, très populaires dans les agences publiques en Grande-‐Bretagne, étaient compliquées à appliquer en Tanzanie compte tenu d’un régime présidentiel très centralisé et de l’instabilité budgétaire et financière du pays. Les techniques du nouveau management public, malgré la prétention des managers, peuvent conduire à des échecs si elles ne sont pas contextualisées. De même, dans un article paru en 2009 et publié dans Reseach Policy (« Accounting for change in national systems of innovation : a friendly critique based on the US case »), le politologue américain David Hart (professeur à la School of Public Policy de la George Mason University) concluait son étude par une provocation amicale à l’égard de ses collègues européens :
National systems of innovation researchers have long recognized, of course, that countries such as the United States and Denmark are diverse units of analysis. This diversity, on the one hand, provides explanatory leverage, but it also substantially complicates the analysis. The challenge of diversity within national systems of innovation research will become greater as more large innovation systems arise in places like India, China, and the European Union. Indeed, if one can say that there is a global innovation system, it is more like that of the U.S. than Denmark (Hart : 653).
Enfin, une étude parue dans Technology in Society, visant à comparer les politiques de l’innovation de deux pays insulaires appartenant à des cultures très différentes (Taiwan et
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l’Irlande), en arrive à la conclusion que dans le cas du premier, le système national d’innovation a été planifié de haut en bas (top-‐down), alors que dans le cas du second, le processus a été administré du bas vers le haut (bottom-‐up) : mais ce qui manque à ce type de recherche, c’est précisément l’analyse des techniques de management public qui ont contribué à la gouvernance et à la mise en œuvre de ces deux politiques de l’innovation. (Lin, Shen, Chou : 2010).
L’INTERDISCIPLINARITÉ ET LE MANAGEMENT STRATÉGIQUE DES ÉQUIPES DE RECHERCHE L’innovation ouverte s’inscrit dans l’incitation à l’entrepreneurship au sein des équipes de recherche (research groups) intégralement reliée à l’interdisciplinarité (deux mesures incitatives majeures des programmes de subvention des agences publiques) qui ont fait l’objet d’une abondante production scientifique ces dernières années : que ce soit au sein du champ universitaire en tant que tel (administrateurs et chercheurs), qu’au niveau des ministères et des agences gouvernementales. Et ce, dans toutes les disciplines académiques (des sciences de la nature aux humanités, en passant par le génie et les sciences sociales) qui sont susceptibles de produire des résultats pouvant mener à leur commercialisation. Cette problématique est non seulement amplement discutée à partir d’arguments réflexifs (parfois controversés), mais elle a aussi donné lieu au perfectionnement progressif d’instru-‐ments de mesure quantitative comme la scientométrie et la bibliométrie. La raison en est que, dans le contexte de l’innovation ouverte et de la globalisation des politiques de l’innovation, le travail de recherche en équipe, mené dans un contexte interdisciplinaire, se doit de participer à la reconfiguration innovante du financement public et privé de la science et de la technologie : Henry Etzkowitz a même doté l’un de ses articles (paru dans Research Policy) d’un titre provocateur : « Research groups as quasi-‐firms : the invention of the entrepreneurial university ». (Etzkowitz : 2003) Pour délimiter la définition et la mesure de l’interdisciplinarité (et ce qui la distingue de la notion de multidisciplinarité), Porter, Cohen, Roessner et Perreault, coauteurs d’un article publié en 2007 dans Scientometrics (« Measuring researcher interdisciplinarity »), proposent de considérer la première à partir de son degré d’intégration des connaissances et des pratiques impliquées dans une recherche qui mobilise plusieurs chercheurs, alors que la seconde suppose un patchwork de disciplines dont le degré d’intégration des connaissances et des pratiques est beaucoup moins restrictif pour les chercheurs impliqués. En somme, c’est ce qui pourrait distinguer une équipe de recherche (composée de trois ou quatre chercheurs provenant de diverses disciplines), d’un centre de recherche ou d’un regroupement stratégique impliquant un plus grand nombre de chercheurs couvrant un spectre de disciplines beaucoup plus variées, et exigeant une infrastructure plus vaste et
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donc plus dispendieuse. Les auteurs proposent une nouvelle modélisation bibliométrique pouvant servir à l’évaluation du caractère interdisciplinaire de différentes spécialités académiques (dont le spectre passe de la physique des basses températures à la biologie moléculaire). Deux cas de figure ont été abondamment étudiés ces dernières années : (1) celui de la recherche universitaire en équipe assumant sa comparabilité avec les chercheurs d’une petite firme en compétition pour l’obtention du financement de leur recherche (que cette dernière soit fondamentale ou appliquée et que ce financement soit public ou privé), et (2) celui des membres d’une équipe interdisciplinaire dont la recherche se distingue de celle effectuée par ceux d’un centre de recherche (ou d’un regroupement stratégique). Dans les deux cas, c’est le degré de spécificité et d’innovation du travail de recherche en équipe qui suppose un financement ajusté à son propre niveau d’efficience. Les nouveaux programmes de recherche en équipe administrés par les conseils subventionnaires, dans tous les pays de l’OCDE, stipulent que ces équipes sont subventionnées pour des périodes pouvant varier d’un pays à l’autre, que ce financement soit ou non récurrent. Les gestionnaires de ces programmes considèrent que les résultats de la recherche doivent donner lieu (1) à des publications interdisciplinaires dans des revues internationales prestigieuses ou (2) à des déclarations d’invention, des concessions de licences et des dépôts de brevets. Dans de telles perspectives de succès à la fois académique et commercial, rien n’empêcherait donc une petite équipe de chercheurs de se transformer en entreprise (spin-‐off) ou en centre de recherche. Ces équipes pourront dès lors passer à un autre stade de gouvernance et de financement hautement compétitif pour lequel elles auront acquis leur posture d’academic inventors as brokers. Il va sans dire que les étudiants (à la maîtrise, au doctorat et au postdoctorat), intégrés à ces équipes de chercheurs, profiteront largement de l’expertise managériale et des connaissan-‐ces interdisciplinaires d’un tel contexte de recherche (relevant tout autant, il faut le préciser, de la recherche scientifique que de l’innovation technologique). Une étude biblio-‐métrique menée au Canada par Lebeau, Laframboise, Larivière et Gingras, parue en 2008 dans Research Evaluation et intitulée « The effect of university-‐industry collaboration on the scientific impact of publications: the Canadian case (1980-‐2005) », révèle que les articles paraissant dans des publications scientifiques, ayant comme coauteurs des chercheurs universitaires et des chercheurs industriels, reçoivent un niveau de citations relativement plus élevé que les articles rédigés par des auteurs ne se livrant pas à ce type de collabo-‐ration science-‐industrie. Et cela, dans des disciplines aussi variées que la physique, la recher-‐che biomédicale, la médecine clinique, la chimie et l’ingénierie (pour la période 2001-‐2005). On trouve une autre confirmation de cette tendance dans une étude scientométrique portant sur les capacités de réussite des équipes de chercheurs académiques qui collaborent avec des laboratoires industriels : ils seraient en mesure de mieux performer auprès des conseils subventionnaires, si on les compare aux chercheurs individuels qui se consacrent exclusivement à la recherche universitaire. Leur taux de succès aux concours est plus élevé, leur productivité scientifique est plus performante et ils reçoivent une meilleure
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reconnaissance institutionnelle de la part des administrateurs de leurs universités respectives. Au Québec, il faut mettre en parallèle cet ensemble de données avec les résultats d’une récente enquête statistique publiée par le CNSC-‐FEUQ, sous la direction de Jean Nicolas et Jean-‐Pierre Robitaille, et qui indique que le marché traditionnel des doctorants (les universités) n’est plus en mesure de les absorber dans leur totalité : seulement 38% d’entre eux se retrouvent dans une unité ou dans une discipline reliée à la recherche fondamentale.
LA PLACE DE L’INTERDISCIPLINARITÉ DANS LES RÉSEAUX MONDIAUX DE L’INNOVATION OUVERTE Pour illustrer ces transformations qui touchent aux fondements mêmes des disciplines académiques, on ne peut s’empêcher de faire référence au rapport publié par le Global Forum Science (sous l’égide de l’OCDE) qui s’intéresse à la formation et à la recherche en mathématiques : la conclusion du rapport est que le rôle des mathématiciens au sein des équipes interdisciplinaires des laboratoires industriels sera au cœur de la recherche scientifique et de l’innovation technologique des prochaines décennies. La distinction ancestrale entre mathématiques pures et mathématiques appliquées perdrait ainsi de sa pertinence auprès des chercheurs et des étudiants qui se retrouvent dans des firmes faisant de la recherche en imagerie médicale et en nanoélectronique. Les mesures incitatives des conseils subventionnaires viseraient, selon un certain nombre de chercheurs académiques, à institutionnaliser le travail de recherche en équipe en tenant compte du développement endogène des sciences de la nature et du génie : il ne s’agirait pas simplement de répondre à des exigences d’externalités économiques de la part des gouvernements (un retour sur l’investissement des fonds de recherche), mais bien de prendre en considération ce qu’est devenue la nouvelle production des connaissances à l’échelle mondiale. Autrement dit, il ne s’agirait pas de dédoubler les programmes de recherche en partenariat ou d’imposer aux chercheurs de travailler en équipe plutôt que de faire de la recherche individuelle, mais de prendre acte du fait que la recherche inter-‐disciplinaire est en train d’intégrer les disciplines et les sous-‐disciplines de la science et du génie. Pour tester empiriquement ce modèle opératoire de la recherche en équipe intégré dans un programme d’incitation à la collaboration, les auteurs d’un working paper (Crespi, d’Este, Fontana, Geuna) publié par le SPRU (Science and Technology Policy Research) en décembre 2008 et intitulé « The impact of academic patenting on university research and its transfer »), indiquent que les trois quarts des citations indexées dans les brevets industriels déposés aux États-‐Unis sont tirées d’articles parus dans des revues scientifiques, et que ce pourcentage n’a jamais cessé d’augmenter depuis la fin des années 1990. Au Québec, ces mesures incitatives sont vite devenues la matrice managériale des programmes de subvention et de bourses des trois fonds subventionnaires qui cherchent à
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favoriser et à renforcer la compétitivité des chercheurs québécois aux concours fédéraux dont on sait toute l’importance stratégique qu’ils accordent à l’interdisciplinarité, à la collaboration science-‐industrie et au taux de productivité (en termes de publications scientifiques) des chercheurs subventionnés. Et en ce qui concerne la productivité scientifique des étudiants, il pourrait être pertinent de s’attarder aux différentes enquêtes scientométriques qui tendent à montrer le déclin de l’impact des thèses de doctorat dans l’évaluation des publications des doctorants : plutôt que d’encadrer et de stimuler le dépôt et la soutenance d’une thèse, plusieurs chercheurs et administrateurs de la recherche encourageraient, au contraire, les candidats à publier quelques articles importants dans des revues prestigieuses (avec évaluation par les pairs), pendant leur période de scolarité. Dans le contexte de l’innovation ouverte, on peut supposer que le travail de recherche en équipe va de plus en plus participer de cette tendance, les chercheurs principaux ayant tout intérêt à cosigner de façon récurrente des articles avec leurs doctorants et postdoctorants (dont ceux qui sont intégrés aux firmes avec lesquelles se fait la recherche contractuelle). De façon plus spécifique, les articles portant sur le concept d’interdisciplinarité sont structurés en fonction des divers usages institutionnels de ce concept au sein du champ universitaire : autant il peut faire l’objet d’un débat épistémologique entre les chercheurs des diverses disciplines académiques (en sciences naturelles et en sciences sociales), autant il est utilisé de façon stratégique par les administrateurs de la recherche (en particulier les vice-‐recteurs) au sein des universités. Si l’on ne distingue pas, dès le départ, ces deux types d’usage institutionnel du même concept, on risque fort de se perdre en conjectures sur sa valeur épistémique. Et ce, même s’il peut arriver que pour le financement de la recherche, les chercheurs et les administrateurs aient des intérêts congruents à utiliser une rhétorique commune face aux fonds subventionnaires. Un deuxième critère de distinction doit être opéré, parmi les chercheurs, selon qu’ils appartiennent aux sciences naturelles, à la médecine et au génie ou qu’ils se situent du côté des sciences sociales et des humanités. La recherche disciplinaire étant rattachée à des départements depuis le XIXe siècle, l’apparition des centres de recherche au cours du XXe siècle n’a pas transformé (du moins pas aussi radicalement que le prétendent les promoteurs de l’interdisciplinarité) la configuration des structures départementales et la professionnalisation des professeurs-‐chercheurs et de leurs doctorants. Ainsi, même les disciplines émergentes comme les biotechonologies, qui font appel aux découvertes les plus récentes de la biologie moléculaire, semblent chercher à assurer leurs fondements scientifiques et institutionnels sur des bases disciplinaires (ou sous-‐disciplinaires). Et le fait que ces disciplines soient arrimées aux travaux menés au sein de centres de recherche publics ou aux laboratoires industriels des biotechnologies (qui en commercialisent les résultats sous formes de brevets et de licences) ne semble en rien restreindre leur intégration à des départements de type académique. Quant à savoir si les choses se passent différemment du côté des sciences sociales et des humanités, qui ne sont pas des sciences expérimentales (même si elles peuvent utiliser des méthodes de vérification empirique), la question se pose et demande une vigilance particulière, puisque
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ces disciplines (surtout dans le cas des humanités) se sont parfois constituées en réaction aux sciences naturelles et au génie, particulièrement à l’époque de la montée du positivisme dans le champ scientifique à la fin du XIXe siècle. Dès le milieu des années 1970, des organisations internationales comme l’OCDE et la Banque mondiale proposaient aux agences publiques de financement de la recherche des pays les plus industrialisés d’instaurer un régime performatif d’interdisciplinarité dans la division scientifique du travail au sein des universités et des entreprises. D’autres organisations internationales, comme l’UNESCO, ont relancé cette promotion de l’interdisciplinarité auprès des hauts fonctionnaires des instances gouvernementales et des administrateurs universitaires de la recherche dans les années 1980. La plupart des documents qui émanent des organisations internationales de ce type font aussi appel aux concepts de multidisciplinarité et de transdisciplinarité proposés par des chercheurs universitaires. Dans un rapport de l’OCDE, les travaux scientifiques de Jean Piaget seront invoqués pour démontrer que l’interdisciplinarité propre à son épistémologie génétique serait une méthodologie que ce spécialiste en psychologie du développement aurait opposée à la psychologie positiviste de la fin du XIXe siècle. Ce sont cependant les travaux empiriques des économistes de l’innovation qui vont, dans les années 1990 et 2000, promouvoir l’interdisciplinarité des sciences sociales en faisant paradoxalement de leur propre communauté épistémique les représentants d’une nouvelle discipline que Dominique Foray (un universitaire devenu consultant interne de l’OCDE) nommera l’économie de la connaissance. Du côté des administrateurs de la recherche, la promotion de l’interdisciplinarité s’est installée de manière incrémentale dans les plans stratégiques et le management institutionnel de l’ensemble des universités des pays de l’OCDE et de certains pays émergents (dont la Chine et l’Inde) : l’objectif étant de transposer dans l’administration de la recherche académique les externalités de connaissance des firmes privées et les normes de la gestion budgétaire des ministères.
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LES CENTRES DE RECHERCHE : UNE DIVISION MANAGÉRIALE DU TRAVAIL EN ÉQUIPE
Parmi les techniques du nouveau management public expérimentées au sein des pays de l’OCDE, on peut retracer les mesures incitatives induisant la programmation des centres de recherche basées sur le travail en équipe et visant la reconfiguration interdisciplinaire de leur membership. Et ce, dans une conjoncture où la rivalité entre les universités et la très forte compétition entre les centres de recherche pour l’obtention de leurs subventions, impliquent une planification et une coordination reliant les administrateurs universitaires aux chercheurs : les uns et les autres devant prendre en considération (pour des raisons à la fois scientifiques et stratégiques) les critères de division du travail en R&D imposés par les agences publiques pour le renouvellement des subventions. Une des difficultés récurrentes et spécifiques des centres de recherche, depuis leur création jusqu’à aujourd’hui, c’est leur double dimension interuniversitaire et interdisciplinaire, tant à l’échelle nationale qu’internationale, puisque les centres de recherche s’inscrivent dans une longue tradition universitaire impliquant à la fois les sciences naturelles, la médecine, le génie, les sciences sociales et humaines. Il est vrai, cependant, que cette tendance historique a connu une nette accélération et a pris des formes institutionnelles différentes au cours des 20 dernières années, en particulier dans le contexte général de la globalisation des politiques scientifiques et technologiques adoptées et financées par les gouvernements des pays de l’OCDE et des pays émergents au cours des années 1990 et 2000. Selon le modèle configuré par les agences publiques de financement, ce qui devrait dès lors caractériser les centres de recherche en sciences sociales et humaines et qui les juxtaposerait à tout un ensemble de centres de recherche dédiés aux sciences naturelles et au génie, c’est qu’ils intègrent en une seule unité organisationnelle des chercheurs aux orientations disciplinaires et aux appartenances départementales extrêmement variées (qui recouvrent tout le spectre des spécialités et des objets du champ universitaire dans le domaine des sciences sociales et des humanités) et dont les compétences devraient être reconnues à l’échelle internationale. Cependant, certains chercheurs ont noté que la plupart des centres de recherche en sciences naturelles et en génie, même s’ils se proclament interdisciplinaires et interuniversitaires, réunissent malgré tout des spécialistes dont les problématiques disciplinaires et départementales restent encore très marquées. Mais on exige des sciences sociales et des humanités qu’elles regroupent en différentes équipes de travail des spécialistes de l’histoire, de la sociologie et de la philosophie des sciences, de l’économie évolutionniste et du management de l’innovation technologique, des politiques publiques en éducation et des statistiques sociales sur l’enseignement supérieur : ce qui implique la mise en place d’arrangements institutionnels d’une très grande complexité.
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Pour illustrer la résistance administrative à ce type d’intégration de l’interdisciplinarité, on peut prendre le cas de figure de l’Université de Strasbourg qui possède plusieurs centres de recherche dont l’un regroupe des historiens, des sociologues et des philosophes des sciences (IRIST), un autre des économistes de l’innovation, du management et des technologies (BETA) ou encore des spécialistes des sciences de l’éducation et des professions (CRESS) : même si les professeurs (et leurs étudiants) de ces centres de recherche pourraient éventuellement coopérer entre eux sur des problématiques qui leur sont communes (et publier des articles en collaboration), ces centres demeurent autonomes quant à leur programmation, leur gestion et leur membership disciplinaire. Les agences exigent qu’un centre de recherche interdisciplinaire se dote d’une dynamique d’intégration de la diversité dont un cas de figure serait celui d’un philosophe spécialisé en épistémologie de la biologie pouvant se retrouver dans la même équipe de travail qu’un spécialiste en économie évolutionniste et en management des biotechnologies et un spécialiste des statistiques sociales sur la formation et l’emploi en sciences de la vie, les trois collègues en question étant en mesure de publier des articles à titre de coauteurs et de diriger en cotutelle les thèses de leurs étudiants au sein du même centre de recherche. D’où le caractère innovateur, au plan quantitatif et qualitatif, de ce type d’études qui vont de l’analyse scientométrique des articles en biologie moléculaire en passant par l’analyse économétrique de la propriété intellectuelle et des brevets commercialisés par les firmes de l’industrie biopharmaceutique jusqu’à l’analyse sociologique de la formation du personnel hautement qualifié (dont les bioéthiciens) en termes de santé publique. La même logique s’applique aux sciences cognitives quand il s’agit de conceptualiser et de mesurer l’émergence, l’institutionnalisation et le management de nouveaux objets de recherche intégrés à diverses technologies innovantes (dont l’imagerie par résonance magnétique et la tomographie par émission de positrons). La division interdisciplinaire des sciences cognitives implique, d’une part, des centres de recherche biomédicale constitués de neurologues, de neuropsychologues et de neurobiologistes partenaires de firmes pharmaceutiques et, d’autre part, des centres de recherche où des philosophes de la psychologie et de l’intelligence artificielle se consacrent à l’analyse épistémologique des concepts en sciences cognitives, alors que des historiens, des sociologues des sciences et des économistes de l’innovation s’intéressent au marché des thérapies commercialisées par les laboratoires de pharmacologie. En témoigne, le marché concurrentiel de la recherche clinique opérant selon une nouvelle régulation des relations entre diagnostics, pronostics, traitements et thérapies, basée sur des modèles de systèmes dynamiques : ce qui suppose une plus grande efficacité des choix administratifs et politiques dans l’évaluation des neurotechnologies, mais qui implique par ailleurs une plus grande augmentation des risques quant à la protection des usagers et des consommateurs de ces services et de ces produits en santé mentale. Et c’est sans parler du neuromarketing et des conflits d’intérêts financiers et moraux que cela implique pour la gouvernance politique et la gouvernance d’entreprise (on invoque
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alors la neuroéthique). La Chine se donne depuis déjà plusieurs années le mandat de financer les plus importants programmes de recherche universitaire et les infrastructures entrepreneuriales les plus performantes au monde en matière de neurosciences et de neurotechnologies. Dans ce contexte interdisciplinaire et partenarial, où la recherche en équipes peut se faire à proximité des laboratoires, la socialisation des doctorants se rapproche davantage de l’organisation professionnelle et de la division contractuelle du travail en sciences naturelles et en génie biomédical, que de la recherche individuelle (basée sur la curiosité intellectuelle) en sciences humaines et sociales. Afin que cette forme d’intégration interdisciplinaire soit reconnue par les administrateurs de la recherche, et financée par les agences publiques, il faut que des mécanismes structurels de coordination des équipes (et de diffusion de leurs travaux) soient planifiés selon des arrangements institutionnels qui respectent les limites disciplinaires et départementales des chercheurs. Et ce, dans le cadre réglementaire et juridique des diverses politiques universitaires auxquelles sont rattachés les professeurs et leurs étudiants (inscrits aux programmes de maîtrise et de doctorat), sans compter les postdoctorants qui seront appelés à intégrer ces équipes en tant que nouveaux chercheurs. Dans le contexte actuel des réseaux mondiaux de l’innovation ouverte, où les firmes multinationales considèrent les départements, les équipes et les centres de recherche universitaire comme des fournisseurs externes de connaissances et de services, ces nouvelles formes managériales d’intégration et de budgétisation des programmes de subvention et de bourses (mesurés à l’échelle internationale par des indicateurs scientométriques) risquent de confronter les chercheurs à des enjeux institutionnels et commerciaux dont ne traitent pas les documents de l’OCDE qui utilisent le modèle d’affaires issu des ouvrages de Henry Chesbrough (Chesbrough 2003, 2006). Dans un article paru en 2010 dans Technovation (« Organisational modes for open innovation in the bio-‐pharmaceutical industry: An exploratory analysis »), les auteurs de l’étude exposent le rôle stratégique de la phase d’identification des services scientifiques :
Purchase of scientific services, usually related to the lead identification and optimisation phases. Through this organisational mode bio-pharmaceutical firms externalise to specialised players, usually platform biotech firms and, although less frequently, universities and research centres, a specific phase of their innovation process (the lead optimisation activity), under a well-defined contractual agreement (Bianchi et al : 27).
Ces phases optimales, ces formes organisationnelles innovantes et ces accords contractuels reliant les firmes multinationales aux petites firmes nationales et aux centres de recherche universitaire intéressent au plus haut point les gestionnaires des conseils subventionnaires au sein des pays de l’OCDE, et plus particulièrement les agences publiques qui financent la recherche biomédicale. Dans le cas de l’innovation ouverte, les réformes du nouveau management public avaient déjà précédé la gouvernance des stratégies ministérielles auprès des agences publiques de financement de la recherche universitaire (selon le modèle du principal-‐agent problem).
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LES CONSÉQUENCES ADMINISTRATIVES DE LA SQRI SUR L’AUTONOMIE DES DISCIPLINES Ainsi, après le dépôt, en 2010, du budget Bachand annonçant, entre autres mesures administratives et financières, la fusion des trois conseils subventionnaires du Québec, seul le FRSQ a pris la décision de faire valoir son point de vue sur ce budget. Sur le site web du fonds, son PDG, Yves Joanette, a déclaré que « dans les discussions qui s'annoncent, le FRSQ défendra avec vigueur la vision historique du Québec et son rôle en matière de recherche en santé, au profit du bien-‐être de la population, de l'économie basée sur le savoir et du positionnement national et international du Québec » (FRSQ, site web, avril 2010).
Tout en situant la santé publique et la recherche biomédicale dans le contexte de la globalisation des politiques de l’innovation, il rappelle le rôle stratégique des centres de recherche dans leurs relations avec les firmes biopharmaceutiques : « Le FRSQ constate une reconduction de son budget à laquelle s'ajoute un montant de 3 M$ pour 2010-‐2011 afin de permettre à ses centres de recherche de pleinement jouer leur rôle de partenaire de l’entreprise biopharmaceutique, une mesure inscrite dans la stratégie biopharmaceutique dévoilée en novembre dernier à Québec ». Et le PDG de conclure :
Le FRSQ note de plus avec satisfaction que le gouvernement consacrera un budget global de 1,1 MM$ dans le cadre de l’actualisation de la Stratégie québécoise de recherche et d’innovation (SQRI). Le FRSQ compte sur cet investissement majeur afin de mettre en oeuvre les orientations stratégiques susceptibles d’être intégrées dans son plan stratégique 2010-2013. Le FRSQ attend donc avec impatience le dévoilement des détails de cet investissement majeur qui sera fait par le ministre Clément Gignac au cours des prochaines semaines (FRSQ, site web, avril 2010).
Ce qu’il faut retenir de l’argumentation du PDG du FRSQ, c’est sa volonté de maintenir la recherche biomédicale comme priorité du gouvernement dans le financement de la recherche universitaire : la fusion des trois conseils subventionnaires pourrait donc servir les intérêts du FRSQ dans le contexte de l’actualisation de la SQRI, qui relève des hauts fonctionnaires du MDEIE et non de ceux du ministère de la Santé. Il reste à savoir comment le paradigme de l’innovation ouverte changera les règles du jeu (bargaining power), compte tenu des capacités d’intégration des firmes multinationales qui considèrent les centres de recherche biomédicale comme des fournisseurs d’externalité de connaissance.
On peut dès lors constater que la procédure anticipée par l’actualisation de la SQRI aura eu une portée fatale sur la fusion du FRSQ, du FQRNT et du FQRSC et une incidence incertaine sur le rapatriement des administrateurs du Conseil de la science et de la technologie vers le MDEIE. Tout se passe comme si cette actualisation se révélait être une reconfiguration managériale du système national d’innovation du Québec, une mutation impérative de sa structure au sein des réseaux mondiaux d’innovation ouverte, dont l’OCDE fait la promotion auprès des ministères des Finances, de l’Industrie, du Commerce, de l’Éducation et de la Santé.
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LA RIVALITÉ INTERMINISTÉRIELLE COMME TECHNIQUE DE GESTION DES AGENCES PUBLIQUES Le bras de fer qui s’est mené entre le ministère de l’Éducation et l’Université McGill, en ce qui concerne la tarification du MBA que cette dernière impose à ses étudiants (locaux comme étrangers), illustre bien les relations conflictuelles induites par des objectifs opéra-‐tionnels contradictoires au sein des différents ministères d’un même gouvernement (au moment d’une réforme budgétaire aussi radicale que celle visée par le ministère des Finances), quand il s’agit d’une proximité avec le privé qui semble heurter les règles d’équité du financement public de la formation professionnelle.
Cette façon de placer les différents ministères d’un même gouvernement en rivalité les uns par rapport aux autres est une des diverses techniques de budgétisation décentralisée, basées sur des indicateurs de rendement (management accounting), qui visent à mieux contrôler et évaluer les performances des ministères et des agences publiques de finance-‐ment de la recherche (où l’on retrouve l’usage biaisé de techniques statistiques comme la bibliométrie modélisée par Eugene Garfield pour procéder à l’évaluation spécifique de la productivité scientifique). Il s’avère même que certains scholars s’activent pour conseiller aux policy makers d’utiliser exclusivement les indicateurs scientométriques afin de réduire les coûts de la traditionnelle évaluation par les pairs.
Ce qui peut provoquer des conflits au sein des cabinets ministériels, comme l’a démontré Minna Tiili dans un article portant sur la Finlande, et précisément intitulé « Strategic political steering: Exploring qualitative change in the role of ministers after new public management reforms » (paru dans International Review of Administrative Sciences). En Suède, c’est au moment de la création de la Swedish Agency for Innovation Systems (Vinnova), en 2001, que le ministère de l’Éducation s’est vu imposer une politique de l’innovation par le ministère de l’Industrie, malgré l’avis contraire adressé au gouvernement suédois par des experts universitaires spécialisés en innovation studies.
L’abolition du Conseil de la science et de la technologie (qui avait été créé en 1983 par le gouvernement du Parti québécois) s’inscrit donc elle aussi dans cette stratégie budgétaire de la nouvelle gestion publique, qui consiste à débureaucratiser la structure des agences dont le mandat est d’aviser les ministères qui en ont la tutelle, et de faire de la politique de l’innovation un instrument de gouvernance qui relève directement du premier ministre (comme en Finlande) ou du président (comme aux États-‐Unis).
Ainsi, aux États-‐Unis, le mouvement de la politique des preuves (evidence-‐based policy) a été lancé par un ambitieux programme de la National Science Foundation (NSF) : le Science of Science and Innovation Policy (SciSIP), suite à l’avis (science advisor to the president) remis au président Bush, en 2005, par John Marburger. Or, il est intéressant de noter que ce vaste programme de subvention, qui fait appel aux techniques d’évaluation de la recherche et aux outils de mesure des résultats les plus sophistiqués, ne fait pourtant aucune référen-‐ce au concept de système national d’innovation (pas plus qu’à celui de systèmes régionaux
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d’innovations). Les grands objectifs de cette plateforme de la politique des preuves (evidence-‐based platform for science policy) sont la création de bases de données et la construction d’indicateurs axés sur l’internationalisation des partenariats et l’interdisciplina-‐rité des communautés de pratique (science, gouvernement, industrie). Une attention toute particulière doit être accordée par les chercheurs aux externalités de connaissance (spillover effects) qui circulent entre les universités, les firmes et les laboratoires gouvernementaux.
Les références aux instruments de modélisation (mapping tools) du financement de la recherche, en corrélation avec les accords de coopération (collaborative agreements), proposés par des organisations internationales comme l’OCDE, sont soulignées à grands traits comme moyens efficaces pour amener les policy-‐makers à prendre les bonnes déci-‐sions visant l’optimisation de l’investissement gouvernemental. Dans ce contexte, le rôle des firmes est jugé comme fondamental : la collecte de données et la construction d’indica-‐teurs deviennent des techniques statistiques qu’il faut prendre en considération avec une extrême rigueur quand il s’agit d’investir dans des programmes de R&D comme la recherche biomédicale et les nanotechnologies. D’où la nécessité impérative de former une commu-‐nauté de pratique dédiée à la politique scientifique (advance the formation of a community of practice of the science of science policy). C’est ce à quoi sont convoquées les agences fédérales responsables du financement de la recherche intégrées sous le label Federal Interagency Task Group (ITG).
On peut faire l’hypothèse que c’est bien à ce type de formation d’une inter-‐agence au sein d’une communauté de pratique à laquelle le ministre Bachand a songé, lorsqu’il a pris la décision à la fois politique et financière de fusionner les trois conseils subventionnaires et d’abolir le Conseil de la science et de la technologie dans son budget. Il faut ici rappeler que le MDEIE, sous la gouverne du même ministre (avant qu’il n’accède par la suite aux Finances), avait déjà commencé à modifier et abolir certaines infrastructures reliées à l’investissement dans la recherche en R&D, dont Valorisation recherche Québec (VRQ) qui n’a pas vu son mandat renouvelé, alors que cette agence publique devait être (sous l’égide du Parti québécois) la pièce maîtresse de la commercialisation des résultats de la recherche universitaire : VRQ assumait le management stratégique du réseau des bureaux de transfert de technologies dans l’ensemble des universités du Québec.
La disparition de VRQ s’est opérée dans l’indifférence la plus totale, tant chez les gestionnaires universitaires des bureaux de transfert technologique qu’au sein des laboratoires privés des différentes entreprises qui en recevaient les subventions. Même chose pour les technopoles régionales chargées d’élaborer des tableaux de bord devant conduire à une meilleure coopération science-‐industrie sur le modèle entrepreneurial des clusters et des incubateurs de spin-‐offs dont l’OCDE avait fait la promotion au sein des systèmes nationaux (et régionaux) d’innovation des pays membres.
L’innovation ouverte étant devenue le nouveau paradigme du management public et du financement de la recherche académique axés sur les réseaux mondiaux des firmes multinationales, les agences publiques rattachées aux systèmes nationaux d’innovation semblent disparaître dans la même indifférence institutionnelle : elles seront remplacées par des experts et des cabinets de consultants plus aptes à se placer sous le contrôle administratif de la responsabilité ministérielle.
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CONCLUSION Dans sa présentation de la SQRI, en juin 2010, le ministre Gignac commença par rappeler qu’avec « des investissements de 1,2 milliard de dollars, la SQRI 2007-‐2010 a permis, notamment, le maintien et la création de milliers d'emplois de qualité, l'implantation d'entreprises technologiques et la création de plusieurs centres de transfert de technologie en vue de favoriser la commercialisation de produits novateurs ». Et que l’actualisation de cette stratégie en juin 2010 avait été le résultat d’une vaste consultation :
Nous nous sommes engagés à ouvrir notre économie sur le monde et à diversifier nos marchés. Le Québec possède tous les atouts pour prospérer dans un marché mondial de plus en plus compétitif. Entreprises, centres de recherche, organismes de valorisation et de transfert, chercheurs de haut calibre, main-d'œuvre et relève des plus qualifiées : la stratégie vise à rallier les efforts de tous vers des objectifs communs d'innovation et de prospérité. Je le réitère, la recherche et l'innovation font partie intégrante de ma vision du développement économique, soit : un Québec créatif, innovant, entreprenant et accueillant (MDEIE : site web, juin 2010).
Le budget Bachand, qui avait été déposé trois mois avant la Stratégie québécoise de la recherche et de l’innovation, postulait, selon les principes de l’innovation ouverte, que les résultats de la recherche académique (en sciences naturelles, en génie, en médecine et en sciences sociales) doivent servir à résoudre des problèmes concrets au sein de la société et viser à diminuer les coûts administratifs des services offerts aux usagers et aux citoyens. Mais comment évaluer l’efficience et l’efficacité de l’innovation ouverte à partir de cette réforme de l’architecture académique posée par la SQRI qui semble plus correspondre à des externalités administratives qu’à des besoins sociaux et civiques ?
Les nouveaux programmes de subvention des partenariats en innovation ouverte doivent être situés dans le contexte de régulation des instruments managériaux les plus récents, qui ont été implantés au sein des ministères pour reconfigurer la planification et la gestion de la recherche académique et mieux contrôler les hauts fonctionnaires au sein des agences publiques chargées de financer la collaboration entre les équipes de chercheurs du public et du privé. La nomination d’un chef scientifique et l’abolition des postes occupés par les PDG des trois fonds fusionnés en une seule agence dotée de son conseil d’administration, prévues dans le projet de loi 130 déposé à l’automne 2010, est la démonstration la plus efficace et la plus efficiente d’une adhésion du MDEIE au mouvement de la politique des preuves (evidence based-‐policy).
En effet, cet organisme « sera dirigé par un scientifique en chef du Québec à la suite d'un concours de recrutement, il sera nommé pour une durée de cinq ans. Son mandat sera d'assurer le leadership de Fonds Recherche Québec ainsi que l'efficacité de son fonctionnement, notamment en ce qui concerne les aspects interdisciplinaires et transsectoriels » (MDEIE). Son conseil d’administration devra être constitué de knowledge brokers (Meyer 2010) car ces « projets mobilisateurs entraîneront des investissements de 350 millions de dollars, dont la moitié proviendra de partenaires privés » (MDEIE).
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Il reste à savoir comment seront gérées ces structures administratives « transsectorielles » à travers les relations entre les principaux administrateurs et leur personnel dédié (dont les agents de programmes responsables des différentes disciplines de chaque fonds) au sein de cette fusion qui reconfigure le principal-‐agent problem : car il s’agit d’un modèle de management public emprunté à la gouvernance privée (« costs and benefits of inter-‐departemental innovation collaboration » (Cuijpers et al., 2010) qui vise à stimuler la performance des équipes de travail à l’intérieur des firmes les plus innovantes.
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LISTE DES SIGLES CEFRIO Centre francophone d’informatisation des organisations CIRANO Centre interuniversitaire de recherche, de liaison et de transfert des savoirs en
analyse des organisations CNSC-‐FEUQ Conseil national des cycles supérieurs de la Fédération étudiante universitaire
du Québec CRSH Conseil de recherche en sciences humaines du Canada CST Conseil de la science et de la technologie DPGTD Directorate for Public Governance and Territorial Development DSTI Directorate for Science, Technology and Industry FCAR Fonds pour la formation de chercheurs et l’aide à la recherche FCCQ Fédération des chambres de commerce du Québec FQRNT Fonds québécois de la recherche sur la nature et les technologies FQRSC Fonds québécois de recherche sur la société et la culture FRSQ Fonds de la recherche en santé Québec NSF National Science Foundation SPRU Science and Technology Policy Research SQRI Stratégie québécoise de la recherche et de l’innovation STI Science, technologie et innovation STS Science, technologie et société TIM Technology of Innovation Management VRQ Valorisation recherche Québec
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47
TABLE DES MATIÈRES
Avant-‐propos 3
Introduction 5
Le rôle des experts et des cabinets de consultants dans la nouvelle gestion publique 7
La régulation ministérielle des hauts fonctionnaires : un enjeu administratif 11
Les chambres de commerce : vers de nouveaux outils de planification et de gestion 13
L’entrepreneurship académique : entre financement public et financement privé 14
L’OCDE et la responsabilité ministérielle de la gouvernance publique 17
Une globalisation des politiques de l’innovation basée sur la technologie 20
L’implication des chercheurs dans la construction des politiques de l’innovation 22
Les systèmes nationaux d’innovation en phase avec la nouvelle gestion publique 25
L’interdisciplinarité et le management stratégique des équipes de recherche 26
La place de l’interdisciplinarité dans les réseaux mondiaux de l’innovation ouverte 28
Les centres de recherche : une division managériale du travail en équipe 31
Les conséquences administratives de la SQRI sur l’autonomie des disciplines 34
La rivalité interministérielle comme technique de gestion des agences publiques 35
Conclusion 37
Liste des sigles 39
Bibliographie 40
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