analyse Économique et stratégie d'entreprise
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U N I V E R S I T E S F R N C O P H O N E S
J
R E F
ANALYSE ECONOMIQUE
ET STRATGIE
D'ENTREPRISE
Daniel Souli
E D I C E F / A U P E L F
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UNIVERSITES FRANCOPHONES
R E F
ANALYSE
CONOMIQUE
ET STRATGIE
D'ENTREPRISE
Daniel Souli
E D I C E F
58 ,
rue Jean-Bleuzen
92178 VANVES Cedex
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Dans la srie : CO NO M IE, GESTION
(EDICEF-AUPELF)
Com ptabilit prive (G.
Castellino, P. Romelaer)
Le m arch des changes et la zone franc
(D. Marteau, X. Brcken, D. Tang)
Pratique du marketing en Afrique
(R. de Maricourt, A. Ollivier)
Gestion financire de l'entreprise et dveloppement financier
{E. Cohen)
Dette extrieure et ajustement structurel (M.Raffinot)
Analyse conomique et stratgie d'entreprise
(D. Souli)
La matrise des budgets dans l'entreprise (//.
Bouquin)
(NEAS-AUPELF, diffusion EDICEF)
conom ie politique pou r l'Afrique
(M. Diouf)
Diffusion ED ICEF ou ELLIPSE S selon pays
EDICEF, 1992
ISBN 2-850-69753-2
ISSN 0993-3948
En application de la loi du 11 mars 1957, il est interdit de reproduire intgralement ou partiellement le pr-
sent ouvrage sans autorisation de l'diteur ou du Centre Franais de l'exploitation du droit de copie (6 bis rue
Gabriel-Laumain - 75 010 Paris).
Cette reproduction, par quelque procd que ce soit, constituerait donc une contrefaon sanctionne par les
articles 425 et suivants du Code Pnal.
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Plan de l'ouvrage
Introduction
i l
Chapitre1: Des en treprises l'Entreprise
1.
LA DIVERSITE DES ENTREPRISES 15
1.1. Les statuts juridiqu es
15
1.1.1. Les formes juridiq ues 16
1.1.2.Les droits de proprit 17
1.1.2.1. Le statut des propritaires 17
1.1.2.2.La pluralit des formes des droits de proprit 20
1.2. La diversit des dim ension s 21
1.3. La nature des activits 22
1.4. La varit des structures de march 23
1.5. La pluralit des produ its 25
1.6. L'organisation interne 26
2.LE CONCEPT D'ENTREPRISE 27
2.1.m ergence et organisation des entreprises 28
2.1.1.L'apparition des entreprises 28
2.1.1.1.L'apport de Coase 28
2.1.1.2. La critique d'Alchian et Dem setz
30
2.1.1.3.L'analyse de W illiamson 31
2.1.1.3.1.Le rle des cots de transaction 31
2.1.1.3.2. L'importancedes actifs spcifiques 33
2.1.2. La diversit des organisation s internes des entreprises 35
2.1.2.1. L'efficacit des formes structurelles 35
2.1.2.1.1.
Les critres d'efficacit
35
2.1.2.1.2. Les form es structurelles
37
La forme fonctionnelle 37
La forme mu ltidivisionnelle 37
La forme adaptable 39
La forme innovatrice 39
2.1.2.2. Structures internes et cots de transactions 40
2.2.
Les progrs rcents de l'analyse
42
2.2.1.
La concurrence 42
2.2.2. La mu ltiproduction 43
2.2.3.Les analyses stratgiques 43
2.2.4. Le facteur humain 43
2.2.5.La gestion des entreprises 44
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PLAN DE L'OUVRAGE
Chapitre 2 : Taille et concentration
1.LA DIVERS ITE DES TAILLES 45
1.1. La mesure 45
1.1.1. La varit des indicateurs de dimen sion 45
1.1.1.1. Les indicateurs rels 46
1.1.1.1.1.
Indicateurs mesurs en imits physiques
46
1.1.1.1.2.Indicateurs mesurs en units montaires 47
1.1.1.2.Les indicateurs financiers 47
1.1.2.Le choix des critres 48
1.1.3.Les relations entre critres 48
1.1.3.1. Les tudes empiriques 49
1.1.3.2.
Les tudes conomtriques
5 0
1.2 .L'explication de la diversit des tailles 5 1
1.2.1. Les diffrentes catg ories d'co nom ies d'che lle 5 2
1.2.2.Les conomies d'che lle relles 5 3
1.2.2.1. Les conomies d'chelle dans la production 5 3
1.2.2.1.1. La
spcialisation
5 3
1.2.2.1.2. L'indivisibilit des qu ipements
5 4
1.2.2.1.3. Le cas de la production en sries 5 4
1.2.2.1.4.La taille minimum optimale
5 5
1.2.2.2.
Les autres conomies d'chelle relles
5 7
1.2.3.
Les conomies d'che lle montaires 5 9
1.2.4.Le concept de taille critique 5 9
1.2.5.Dim ensions et nom bre des tablissements 60
2
LA CONCENTRATION DANS LA BRANCHE 61
2.1.La mesure de la concentration 62
2.1.1.Les problmes mthodologiques 62
2.1.2. Le choix d'un indice de concentration , 63
2.1.3.Les rsultats emp iriques 66
2.1.4. La concentration dans l'conom ie 66
2.2. Concentration et stratgie d'entreprise 67
2.2.1.Les facteurs explicatifs de la concen tration 67
2.2.1.1.
Concentration et croissance 67
2.2.1.2. Les modalits de la croissance 68
2.2.2. Cycle de vie du prod uit, stratgie d'entre prise et concentration 69
Annexes
73
Chapitre 3 : La dynamique des relations avec l'environnement
1. LA CO NCURRENCE 8 7
1.1. La concen tration 87
1.2. La croissance du secteur 87
1.3. Le poids des cots fixes 8 8
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PLAN DE L'OUVRAGE
1.4. L'indivisibilit d u capital 8 8
1.4.1. Co t moyen et indivisibilit du capital 8 9
1.4.2.Pluralit des techniques et trappe d'investiss em ent 91
2.LA DIFFUSION DU PROGR S TECHNIQUE 94
3.LES RELATIONS AVEC LES FOU RNISSEURS ET LES CLIENTS 97
3.1 Politique comm erciale et march 97
3.2.
Le pouvoir de ngociation 98
3.3. La rduction de l'incertitud e 99
3.4. Les relations producteurs - distributeurs 100
4.
LES RELATIONS AVEC LES BAILLEURS DE FONDS
100
5. LA CON CURRENCE DES PRODU ITS DE SUBSTITUTION 101
6. LES ENTRANTS POTENTIELS 102
7. LE RLE DE L'TAT 103
Annexe 105
Chapitre 4 : Politique commerciale et diffrenciation
1.
LA PUBLICITE 108
1.1. Publicit et demande 108
1.1.1. La mesure de la publicit 108
1.1.2.Les effets de rm anence 109
1.1.3.
L'efficacit de la pub licit 111
1.1.4.Le budget optimal 112
1.2. Publicit et demande la firme 114
2.
LA DIFFRENCIATION OBJECTIVE 115
2.1.D ema nde et diffrenciation objective 116
2.1.1.
La segmentation des marchs 117
2.1.2. Diffrenciation et concu rrence 119
2.1.3.
La politique de diffrenciation 121
2.2. Conformit aux norm es et modification des caractristiques 1
22
2.2.1.Gestion de la qualit 122
2.2.2. La modification des norm es 126
2.3. La mesure des changem ents de qualit 128
2.3.1.
Les prix hdon istes 128
2.3.2. Rsultats emp iriques 130
3.PUB LICIT, QUALIT ET INFORMATION 131
3.1. La recherche d'informations
131
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PLAN DE L'OUVRAGE
3.2.
Imperfection et asymtrie de l'information 133
3.3.Publicit et information 134
4.
POLITIQUE DE DIFFRENCIATION ET CONCURRENCE
OLIGOPOLISTIQUE 138
4.1.
Concurrence et oligopole 138
4.2.
L'action par la diffrenciation objective 138
4.3.L'emploi de la publicit 139
Annexe 141
Chapitre 5 : M ultiproduction et stratgie de p roduits
1.PRODUITS ET FIRMES PLURIPRODUCTRICES 143
2. LA MULTIPRODUCTION CONTRAINTE 147
2.1.Les causes lies aux objectifs
147
2.1.1.La pluralit des objectifs 147
2.1.2 . La ralisation des objectifs 148
2.2.Les causes tenant l'offre
149
2.2.1.Les contraintes nes de la techniqu e 149
2.2.2. Le rle des facteurs de production 150
2.2.2.1.Facteur capital et multiproduction 15 1
2.2.2.2. Les ca uses tenan t V excdent de facteur travail 15 2
2.3. Les causes tenant la deman de 15 3
2.4.La spcificit de la firme multiproductrice 15 3
2.4.1. Les relations dans la production 154
2.4.2. Les relations dans la demande 15 4
3.
LA POLITIQUE DE MULTIPRODUCTION HORIZONTALE 15 6
3.1.
La diffrenciation
15 7
3.1.1. La nature de la diffrenciation 157
3.1.1.1.
D finition 15 7
3.1.1.2. Mesure 15 8
3.1.2. Origines et mo dalits des politiques de diffrenciation 159
3.1.2.1.
Les causes de la diffrenciation
15 9
3.1.2.2. Les modalits 161
3.1.3.Avantages et limites de la politique de diffrenciation 162
3.2.La diversification 164
3.2.1.La nature de la diversification 164
3.2.1.1.D finition
164
3.2.1.2. Mesure 165
3.2.2. Causes et mo dalits des politiques de diversification 166
3.2.2.1.
Les raisons de la diversification
166
3.2.2.2. Modalits de la diversification 168
3.2.3.Avantages et limites de la politique de diversification 170
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PLAN DE L'OUVRAGE
Chapitre 6 : L'intgration verticale
1.
DFINITION ET MESURE DE L'INTGRATION VERTICALE
173
1.1. La nature de l'intgration verticale 173
1.2. Mesure 174
2.
LES EXPLICATIONS TRADITIONN ELLES 175
2.1.
Raisons lies la rduction des cots 175
2.2.
R aisons stratgiques 177
2.2.1.Les anticipations 177
2.2.2 . Les pratiques anticoncurrentielles 178
2.2.3.
L'volution des marchs 181
3.
DYSFONCTIONNEMENT DES MARCHS ET INTGRATION
VERTICALE 18 3
3.1.
Le rle des actifs spcifiques
18 3
3.2.
changes marchands et externalits 185
4.
LES LIMITES DE L'INTGRATION VERTICALE 186
5. ENTRE LE M ARCH ET LA FIRM E INTGRE
18 8
5.1.Les restrictions verticales 18 9
5.1.1.
Le prix de revente impos 189
5 .1.2. Les contrats de franchise 190
5.2.
Coopration et partenariat 190
Annexe 194
Chapitre 7 : Les barrires l'entre
1.
DEFINITION ET MESURE 195
2.
LES BARRIRES STRUCTURELLES 197
2.1.
conomies d'chelle et effet de pourcentage 197
2.2.
La diffrenciation
200
2.3.
L es avantages absolus de cots 201
2.4.Les barrires institutionnelles 202
3.
STRATGIE D'ENTREPRISE ET BARRIRES L'ENTRE
202
3.1.
La publicit 203
3.1.1.
L'influence de la publicit 203
3.1.2. Stratgie et publicit 205
3.2.
La diffrenciation objective 206
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PLAN DE L'OUVRAGE
3.3. La recherche-dveloppemen t 209
3.4. Cap acits de production excden taires et barrires l'entre 209
4.MENACES STRATGIQUES ET BARRIRES L'ENTRE 213
5. BARRIRES LA SORTIE ET BARRIRES L'ENTRE 216
Annexe 218
Chapitre 8 : Les ressources humaines dans l'entreprise
1.TYPOLO GIE DES PROCESSUS DE DCISION 222
1.1. Les structures des dcisions
222
1.2. La classification des dcisions 223
1.2.1. La classification par niveau 223
1.2.2 La classification par mthodes 226
1.2.3.
La classification par frquence 226
1.3. Les correspo ndan ces entre tapes et classifications 227
2.
L'IMPERFECTION DES DCISIONS 228
2.1. Objectifs, rationalit limite et rsolution des problmes 228
2.1.1.
La formation des objectifs 228
2.1.2. La rationalit limite 229
2.1.3.La zone d'acceptabilit 230
2.1.4. La rsolution squentielle des problmes 232
2.2.
La rduction de l'incertitude 232
2.2.1.
Les mthodes de rtroaction 233
2.2.2. Les procdures de ngociation 233
2.2.3.
Les procdures standards 234
2.2.4. Le transfert du risqu e 234
2.3. La recherche de la solution des problmes 234
2.3.1.
La motivation 235
2.3.2. La navet 235
2.3.3.Les biais 236
2.4.
Les mcanismes d'apprentissage 236
2.4.1.
La modification des objectifs 236
2.4.2. La transformation des procdures de recherche 236
3.LE SLACK DANS LES ORGANISATIONS 23 7
3.1. Le rle du slack 237
3.1.1.
La productivit du slack 237
3.1.2. La cohsion de l'entrep rise 238
3.1.3.La protection contre les fluctuations de l'environnement 238
3.2. La dissymtrie de l'volution du slack 239
3.3.Importance et localisation du slack 240
8
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PLAN DE L'OUVRAGE
3.3.1.
Ag e et slack 240
3.3.2. Structure interne et rpartition du slack 241
4.
POUVOIR ET DPENSES DISCRTIONNAIRES
243
Chapitre 9 : M archs financiers et OPA
1.
LA THORIE M ANAGERIALE 246
1.1. Droits de proprit et pouvoir de dcision 246
1.1.1. Les objectifs de l'entreprise 247
1.1.2.Droit et pouvoir dans l'entreprise 248
1.2. Le rle du march financier
249
1.2.1. Les offres publiqu es d'acha t 249
1.2.2.Le fonctionnement des OPA 25 0
1.3. Un modle de comp ortement 25 1
1.4. Les prolongements de la thorie 25 4
1.5. Vrifications empiriques 25 5
2.POUVOIR FINANCIER ET OPA HOSTILES 25 7
2.1.L'origine des OPA hostiles 25 8
2.1.1.
Les facteurs conomiques favorables 25 8
2.1.2. Le financement des OPA 25 9
2.1.3.
Les nouveaux comportements 260
2.2. Le droulement d es OPA hostiles 261
2.2.1. L'attaque 261
2.2.2. La dfense 262
2.3. Les consquences 264
2.4.
L'apport de la thorie 266
Annexes 269
Bibliographie
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Introduction
La mode, dans les entreprises, est actuellement la stratgie. Le discours des dirigeants
des grandes firmes, et celui des consultants de haute vole, est empli d'expressions comme
planification stratgique, analyse stratgique, segmentation stratgique,... Dans l'esprit de
ces responsables, l'laboration
d'une
stratgie consiste en une rflexion long terme orien-
te vers l'action, qui
s'oppose
aux spculations abstraites et donc striles des conomistes
universitaires, plus soucieux de la cohrence que du ralisme de leurs modles. Il n'est pas
possible de leur donner totalement tort, si l'on se rfre
l'tat
de la thorie acadm ique d'il
y a quelques annes. L'analyse conomique de l'entreprise tait inexistante, et la microco-
nomie se limitait, pour l'essentiel, l'tude des marchs. Des changements profonds sont
intervenus depuis peu, qui ont permis de concilier, au moins partiellement, la rigueur uni-
versitaire et le souci d'aborder, de manire crdible, l'tude des situations relles. Cette vo-
lution, qui est l'annonce d'un rapprochement entre les proccupations concrtes des dci-
deurs et la rflexion acadmique, ne peut tre comprise que si elle est replace dans son
contexte historique.
Bien q u'il ait exist quelques travau x prcu rseurs, il est possible de situer la naissance de
la microconomie la fin du sicle dernier avec le dveloppement, en conomie, du cou-
rant de pense n o-classique.
Pendant longtemps, le champ de la microconomie
s'est
limit la thorie des marchs,
sur lesquels se rencontraient une demande manant des acheteurs potentiels et une offre
gnre par des producteurs, souvent abusivement qualifis d'entreprises. Le problme
essentiel tait d'an alys er les caractristiques du fonctionnem ent de quelques structures par-
ticulires de march, qui se distinguaient, sur le fond, par l'existence d'une concurrence
entre firmes d'intensit variable. Les deux situations de rfrence taient, d'une part la
concurrence pure et parfaite, d'autre part le monopole. L'objectif poursuivi par ces tudes
tait de dterminer l'impact sur l'quilibre conomique gnral et sur le bien-tre collectif
de l'existence de ces diffrentes catgories de march s. Un des thm es centraux de la tho-
rie no-classique est en effet que le libre jeu des mcanismes de la concurrence conduit
spontanment l 'co nom ie une situation d'optimum
collectif.
Ce modle no-classique peut, dans sa forme la plus simple, apparatre rducteur
l'extrme pour de nombreuses raisons, dont les principales sont les suivantes :
- l'entreprise est un simple lieu de production o les facteurs (travail, capital, consom ma-
tions intermdiaires) sont combins pour donner naissance un produit fini,
- toutes les transactions (achat de facteurs, vente de produits) se droulen t sur des marchs,
c'est--dire l'extrieur de l'entreprise. Sauf cas exceptionnel, ces marchs sont supposs
tre concurrentiels,
- la firme est dirige par un entrepreneur, qui en est en mme temps le propritaire. L'entre-
preneur est un agent conomique parfaitement rationnel, capable, chaque instant, de
prend re les dcisions op timales. Il est en outre parfaitement inform,
- l'objectif dela firme est celui de l'entrep reneur : la maximisation du profit.
Pour l'conomiste no-classique l'entreprise est une bote noire. Il n'y a pas lieu de
s'interroger sur les modalits de son fonctionnement interne puisque, par hypothse, les
dcisions de l'entrepreneur sont optimales.
11
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INTRODUCTION
Ces choix optimaux s'effectuent en tenant compte de deux contraintes.
Au niveau interne, ils'agitde la relation technique entre la quantit de facteurs utilise
et la quantit de produits obtenu e. Cette relation est appele fonction de production. En pre-
nant en considration le prix des facteurs, il est possible de valoriser la fonction de prod uc-
tion. On tablit ainsi une relation en tre les quan tits produites et le co t de leur produc tion.
Ce tte relation est la fonction de co t.
Au plan externe, l'entreprise est confronte aux mcanismes des marchs sur lesquels
elle s'approvisionne (marchs des facteurs) et sur lequel elle vend (march du produit).
Ce m odle, labo r entre la fin du sicle dernier et le dbut de celui-ci, donne une vision
extrmement simple, pour ne pas dire simpliste, de l'entreprise. Il a fallu pourtant attendre
le milieu des annes 1930 pour que les premires amliorations soient apportes la tho-
rie des marchs. Ce n'est qu' partir de 1960 que l'on assiste un rel dveloppement de
l'cono m ie d 'entreprise qui se traduit, si ce n'est p ar une rupture avec le modle no -clas-
sique, du moins par la remise en cause d'un nom bre important des hypothses explicites et
implicites sur lesquelles il repose. La dmarche utilise est telle qu'il existe nanmoins, en
permanen ce, des rfrences ce modle.C'estbien souvent par opposition ou par analogie
avec lui que sont dfinies les situations tudies.
Les principales critiques ont port, de manire gnrale, sur le caractre trop mcaniste
du modle, et plus particulirement sur les points suivants :
- Les structures de march env isages (concurrence pure et parfaite, monopole) reposen t
sur des hypothses peu vraisemblables. Elles sont en particulier trop souvent non perti-
nentes pour l'tude de situations relles. Il est notamment difficile de rendre compte des
phnom nes de pouvoir. De mm e, le problme de l'apparition de no uveaux con currents ou
du dpart d'entreprises est largement nglig.
- Le travail est considr comme un facteur de produc tion identique aux autres. On nglige
ainsi le fait que l'entrep rise est au ssi, et peut- tre avant tout, une organ isation h um aine . Elle
possde sa propre structure et ses propres modalits de fonctionnement interne. De par
l'autonomie dont ils jouissent, les hommes qui la constituent chappent en partie au dter-
minisme simple du modle no-classique. En outre, les dcideurs ne sont ni parfaitement
rationnels, ni parfaitement informs. La complexit croissante des problmes de gestion
implique ncessairement une dlgation des responsabilits, et donc des pouvoirs dans
l'entreprise.
- La rfrence l'entrepreneu r, d irigeant-propritaire, pouvait tre admissible dans le
cadre des cono mies d e la fin du sicle dernier. Elle ne
l'est
plus de nos jours. On assiste de
plus en plus une sparation entre la proprit et la direction des entreprises, et un rle
croissant des marchs financiers. Il en rsulte des consquences importantes en termes
d'objectifs poursuivis par les entreprises et de contrle du comportement de leurs diri-
geants. Ces phnomnes ne sont pas sans exercer une influence certaine sur les choix stra-
tgiques des firmes.
- Une hypothse constante de la thorie no-classique est que l'entreprise ne fabrique et ne
vend qu'un seul produit:elle est mo noproductrice. L'observation mon tre au contraire que
la presque totalit des firmes sont multiproductrices. Cette multiproduction peut prendre
deux formes principales : la multiproduction horizontale et l'intgration verticale. Dans le
premier cas, l'entreprise fabrique et vend plusieurs produits distincts. Dans le second, elle
dc ide de transformer un produ it qu 'ell e vendait auparavan t (intgration avale) ou de fabri-
quer un facteur qu'elle achetait antrieurement (intgration amont). La prise en considra-
tion de la multiproduction conduit s'interroger sur le rle des entreprises dans l'organisa-
tion de l'activit conom ique.
12
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INTRODUCTION
- Enfin, dans l'univers no -classique, les pouvoirs pub lics s'abstiennent, autant que faire
se peut, d'intervenir danslejeu con om ique. Il est loin d'e n avoir toujours t ainsi, surtout
dans un pass rcent. On assiste nanmoins actuellement, dans un certain nombre de
branches, un dsengagement de l'tat. C e processus, connu sous le nom de drglemen-
tation, transforme de manire importante les mcanismes de la concurrence et la situation
des firmes sur les marchs conce rns. Un effet induit de ce libralisme se trouve dans cer-
taines caractristiques actuelles du fonctionnement des marchs boursiers.
L'ambition de cet ouvrage est de prsenter des analyses rcentes relatives un certain
nombre de ces aspects. Le champ concern est vaste, et, de m anire volontaire, l 'accent a
t mis sur l'tude de diverses facettes du comportement des entreprises. Il n'y a donc
aucune prtention l 'exhaustivit, et des thmes importants, comme la thorie de la pro-
duction ou le phnomne de drglementation, ne sont pas abords.
Les dveloppements qui y figurent prennent souvent la thorie no-classique comme
point de dpart. La connaissance de cette dernire constitue donc un pralable ncessaire
la comprhension de la dm arche et des raisonnem ents
1
.
Un souci permanent de l'auteur est de montrer que l'cono mie n'est p as simplement une
construction abstraite, mais que ses concepts peuvent tre utiliss pour l'tude des com-
portements rellement adopts par les entreprises. Pour cette raison, les rfrences des
situations concrtes sont nombreuses. Si beaucoup d'exemples sont amricains ou britan-
niques, c'est tout simplement que ces pays sont ceux o les travaux thoriques et empi-
riques sur l 'cono mie d'entreprise et les domaines connex es ont t le plus dvelopps. La
mme raison explique la position dominante occupe par la littrature anglo-saxonne dans
la bibliographie.
Enfin, on a limit autant que possible le recours la formalisation mathmatique. Ce
n'est que dans les cas o elle s'avre utile pour tablir un rsultat ou clairer un raisonne-
ment qu'e lle a t utilise. En d'autres term es, les mathmatiques sont considres comm e
un auxiliaire de l'analyse co nom ique, qui ne peuvent, en aucun cas, prtendre s'y substi-
tuer. Cette opinion, qui ne fait certes pas l'obje t d 'un consensus denos
jours ,
est nanmoins
partage par un certain no mbre d'experts minents.Lejury Nobel d'cono mie a, de nom-
breuses reprises, couronn des chercheurs dont les travaux ne comportent pas, ou peu,
d'quations, ce qui ne nuit en rien leur qualit scientifique. Ce fut le cas, notamment, de
B.Ohlin en 1977, et de R. Coase en 1991.
1.
La lecture d'un bon manuel de microconomie est donc conseille. Pour les lecteurs dj familiers avec la thorie
des marchs, Krouse (1990) est une rfrence que l'on peut recommander.
13
-
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Chapitre 1
Des entreprises l'Entreprise
D'au cun s ont pu, aju ste titre, affirmer que, si les entreprises existent depuis longtem ps,
la notion d'Entreprise est, elle, une cration rcente. En effet, depuis des sicles, les entre-
prises sont des acteurs essentiels des processus de production et d'ch ang es. M ais ce n'e st
que depuis peu qu'elles font l'objet d'tudes systmatiques de la part des spcialistes des
Sciences Sociales, notamment des conomistes et des gestionnaires. Il n'y a qu'un sicle
environ qu'a dbut l'effort d'abstraction ncessaire la construction d'un concept assez
gnral pour embrasser la diversit des entreprises relles, mais assez pertinent pour pr-
tendre apporter des rponses satisfaisantes aux problmes pratiques qui se posent elles.
On peut tout d'abord constater de faon empirique l'extrme varit des organisations,
qualifies d'entreprises, qui interviennent dans le processus conomique. Il importe ainsi,
dans un premier tem ps, de mettre cette diversit en vidence, et d'en tudier les diffrentes
facettes. Ce n'est qu ' l 'issue de cette tape prliminaire, destine souligner la com plexit
des entits appeles entreprises, qu'il deviendra possible de justifier le recours au concept
analytique d 'Entreprise, et de se pencher sur les multiples dimensions q u'i l prsente.
1.
LA DIVERSIT DES ENTR EPRISES
L'observation du fonctionnement des conomies modernes conduit reconnatre la
grande htrognit des entits regroupes sous le vocable unique d'entreprise. Les l-
men ts qui les diffrencient sont nom breux, et l'on ne retiendra ici que quelques-uns des plus
importants : leur statut juridique, leur taille, la nature de leurs activits, les marchs aux-
quels elles s'adressent et les modalits de leur organisation interne. Il n'est pas possible de
retracer ici dans le dtail cette grande diversit. On se bornera donc en souligner les
aspects essentiels.
1.1. Les statuts juridiqu es
Les pouvoirs publics ont trs tt rglement l'organisation et le droulement des activi-
ts comm erciales (Hicks, 1969), et, notammen t, les modalits de fonctionnement des entre-
prises. Un premier aspect qui permet de d istinguer en tre les firmes concerne naturellemen t
les rgles juridiques qu i leur sont applicab les. Il existe, dans ce dom aine, deux critres prin-
cipaux de classification. Le premier est li la forme juridique des statuts adopts, le
second, qu i recoupe en partie le prcdent pour des raisons historiques, la nature des dro its
de proprit, telle que la conoivent les conomistes et les gestionnaires.
15
-
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5 ENTREPRISES A L'ENTREPRISE
1.1.1. Les formes juridiques
On peut distinguer, en France
1
, entre plusieurs catgories d'entreprises, dont on n'vo-
quera ici que les principales
2
:
- Les entreprises individu elles, qui se confondent avec les personnes physiq ues.
- Les socits, qui bnficient de la personn alit mo rale, et sont donc distinctes de leurs
propritaires et de leurs dirigeants. Il en existe quatre grands types principaux : les socits
de personnes, les socits de capitaux (essentiellement socits responsabilit limite
(SARL) et socits anonymes (SA)), les socits civiles et les socits coopratives ou
mutualistes. Les deux premires formes de socits sont dites socits commerciales
3
.
- Les associations rgies par la Loi de 19 01, but non lucratif (en princ ipe).
- Les adm inistrations et les collectivits territoriales qui participent la produc tion et aux
changes sous des formes diverses : administrations proprement parler (Poste, France
Tlcom jusqu' une date rcente), tablissements publics et commerciaux (RATP, EdF,
etc.),
rgies.
Il est noter que, dans cette dmarche, aucune distinction n'est effectue sur la base du
statut public ou priv du propritaire. La BNP ou Air France, dont les capitaux sont totale-
ment ou trs majoritairement dtenus par
l'tat,
sont classs dans les socits anonymes.
Si l'on excepte l'influence des facteurs institutionnels (administrations notamment) et
socio-politiques (mutuelles et coopratives), le choix de la forme juridique est li l'im por -
tance de l'entreprise et la nature de son activit. Pour les seules activits de type com-
mercial , le critre dterminant est en gnral celui de la dimension. Il existe, notamment,
des rgles formelles de fonctionnement et de contrle d'autant plus contraignantes que la
responsabilit patrimoniale directe des propritaires est moins engage. L'existence de
seuils minima de capital social selon le type de socit en est une illustration.
Tableau 1. - Form e jurid ique, respo nsabilit des associs et capital social
Type de socit
Socit de personnes
SARL*
SA
Responsabilit des associs
Illimite
Limite aux apports
Limite aux apports
Montant m inimum du capital social
0 F
50 000F
250 000F
* Les entreprises impersonnelles responsabilit limite (EURL) ne se distinguent en rien sur ce point des SARL traditionnelles.
Cette situation traduit simplement le fait que le capital social constitue une forme de
garantie pour les tiers cranciers de l'entr epris e :plus la responsabilit perso nnelle des pro-
pritaires est faible, et plus la garantie offerte par la socit elle-mme (personne morale)
doit tre importante.
La rpartition des entreprises franaises par forme juridique et par taille (m esure par le
nombre de salaris
4
) est donne dans le tableau suivant. L'INSEE assimile les socits de
1.
Des analogies troites avec la situation franaise existent dans la majorit des pays,
sauf,
naturellement dans ceux
qui ont connu un rgime de proprit collective des moyens de production et d'conomie planifie.
2.
Il n'est pas question d'exposer dans le dtail les caractristiques juridiques des diverses sortes d'entreprises. Sur ce
point, voir, par exemple, Guyon (1986).
3.Commercial est pris ici au sens du droit par opposition
civil.
Les activits com merciales constituent l'essentiel des
activits conom iques.
4.
La pertinence de ce critre de dimension est analyse dans le chapitre 2.
16
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19/292
LA DIVERSIT DES ENTREPRISES
personnes po ur lesquelles existe une transparence fiscale et une responsabilit illimite des
associs, aux personnes p hysiques.
Tableau 2. - Forme juridique et taille des entreprises franaises (1990)
Forme juridique
Personnes physiques
SARL
SA
Associations Loi
de 1901
Socits civiles
Administrations
Autres
Total
0 - 9
1 760 144
479 783
74 925
144 589
319 165
104 742
117 379
3 000 727
1 0 - 4 9
14
910
62 227
5 5 5 99
12
701
3 749
6 157
6 115
161458
Nombre de salaris
5 0 -199
28 2
4 037
17 090
2 400
199
2 213
2 160
28 381
20 0-499
10
406
3 199
42 1
39
638
69 5
5 408
500 -1 99 9
111
1 4 5 1
15 1
72
44 5
33 2
2 562
Plus de
2000
1
12
330
7
3
77
73
5 03
Total
1 775 347
546 576
1525 94
160 269
323 227
114 272
126 75 4
3 199 039
Source : INSEE
On constate d'abord que 94 % des entreprises recenses sont de petite taille (moins de
9 salaris). On rem arque aussi, l'intrieur de chaque c lasse de taille, des relations privil-
gies entre statut juridique et dimensions. En particulier, les entreprises individue lles dom i-
nent l'ensemble des petites entreprises (moins de 9 salaris) alors que, au-del de 50 sala-
ris, la forme juridique la plus frquente est la socit anonyme. La France se distingue
d'autres pays europens (notamment l'Allemagne) par l 'importance du nombre de firmes
de relativement faible taille dans l'ensemble des socits anonymes : prs de 86 % des SA
occupent moins de 50 salaris. Cette situation est d'autant plus surprenante que les rgles
formelles de fonctionnement et de contrle des socits anonymes sont lourdes et contrai-
gnantes, et font que ce statut est mal adapt aux firmes de petite dimension.
Un second critre de dissociation est li la nature des prop ritaires de l'entrep rise et au
type de droits dont ils disposent.
1.1.2. Les droits de prop rit
En ce domaine, deux aspects principaux sont retenir: le premier concerne les agents
qui dtiennent les droits de prop rit, le second porte sur les prrogatives et obligations qui
sont attaches ces droits.
1.1.2.1. Le statut
des
propritaires
Dans cette optique, on est conduit distinguer le secteur public, le secteur priv et, en
situation intermdiaire, le secteur mutualiste et
coopratif.
L'conomie franaise se singularise par l'importance de son
secteur public
qui regroupe,
outre les activits industrielles et commerciales des administrations, les entreprises natio-
nalises et d'cono mie mixte. Si l 'on excepte quelques avatars anciens des pouvoirs rga-
liens traditionnels (surtout l'armement et les PTT), le secteur public industriel et commer-
cial
s'est
dvelopp partir de la fin de la Prem ire Guerre M ondiale. Sa croissance
s'est
17
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DES ENTREPRISES A L'ENTREPRISE
traduite par trois vagues importantes de nationalisations en 1936-1937, 1945 -1946 et 198 2.
Un pointd'arrt cette expansion a t marqu par les privatisations de 1987.
Le poids du secteur public dans
l'conomie
franaise est consid rable. Il a t large me nt
augm ent par les nationalisations de 198 2, qui ont notamment con cern 10 grands group es
industriels, 36 banqu es, et 2 tablissements financiers d'impo rtance.
Tableau 3. - Poids du secteur public dans l'conomie franaise
(en pourcentage du total)
%
Emploi
Valeur ajoute
Exportations
Investissements
Avant 1982
13
21
11
29
Aprs 1982
16
28
23
36
Source : INSEE
L'importance du secteur public est trs variable selon les branches. Elle est particulire-
men t considrable dans les tlcomm unications (8 3 %) et les transports (46 %) et au
contraire extrmement faible pour les services marchands non financiers. On retrouve cette
diversit de situations
l'intrieur
mme du secteur industriel.
Tableau 4. - Poids du secteur public dans l'industrie
(en pourcentage du total)
nergie
Effectifs
Valeur ajoute
Investissements
Exportations
Biens intermdiaires
Effectifs
Valeur ajoute
Investissements
Exportations
Biensd quipement
Effectifs
Valeur ajoute
Investissements
Exportations
Biens de consommation
Effectifs
Valeur ajoute
Investissements
Exportations
Total activits industrielles
Effectifs
Valeur ajoute
Investissements
Exportations
1982
80,60
82,60
91,10
29,00
22,00
25 ,90
39,30
39,30
29,10
33,00
38 ,40
36,00
3,70
5 ,30
8,00
6,50
24,00
32,40
5 8 ,70
32,70
1985
78 ,60
8 8 , 6 0
8 8 , 7 0
43,70
22,90
28 ,70
47,40
45 ,90
29,20
30,90
36,10
36,30
3,90
5 ,30
7,60
7,60
24,40
35 ,20
5 4 , 5 0
35 ,70
Source : INSEE
18
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LA DIVERSIT DES ENTREPRISES
Les privatisations de 198 7
1
ont port essentiellemen t sur des entreprises nationalises en
1982;les deux excep tions notables sont la Socit Gnrale et
TF1.
Comme l'implique une
saine logique conomique, ces firmes appartiennent au secteur concurrentiel et prsentent
des perspectives satisfaisantes de rentabilit. En effet, remplacer un monopole public par
un mo nopole p riv ne peut tre que prjudiciable la collectivit. D'autre part, peu d'ache -
teurs seraient prtspayer pour une firme dont les seules perspectives d 'avenir sont un dfi-
cit permanent
2
.
La spcificit du
secteur mutualiste et coopratif
tient dans le fait que la proprit de
l'entreprise appartient ses socitaires, qui sont ses clients ou son personnel. Le principe qui
se trouve l'origine de l'apparition de cette forme de firme est celui de la solidarit entre
agents partageant des intrts et des objectifs communs, et dsireux d'chapper, dans une
certaine m esure, la logique de la recherche individuelle du profit, considre par certains
comme le trait dominant des conomies de march. De ce fait, mutuelles et coopratives
sont, en droit, sans but
lucratif.
On trouve, en France, des organisations de ce type dans la
quasi totalit des secteurs d'activit :banques (Crdit Mutuel, CNCA), assurances (MA1F,
etc.),
agriculture (coopratives d'achat, de production
3
et de vente), grande distribution
(Coop), production industrielle (SCOP:Socits coopratives ouvrires de p roduction). De
mm e que la nature de leurs activits, la dimension de ces firmes est extrmem ent d iverse.
Pour le
secteur priv
enfin, un aspect important prendre en com pte est la nationalit des
entreprises (ou plus prcisment l'origine nationale de leurs capitaux). La mondialisation
de certains marchs, la constitution de la CEE et la perspective de l'ouverture du March
Unique en 1993 font
que,
de plus en plus, des entreprises trangres s'implan tent en France
et des firmes franaises l'tranger. En 198 5 , les entreprises participation trangre repr-
sentaient 16,6 % des effectifs employs en France, 23 ,8 %des ventes hors taxe et 15 % des
investissements.
Cette pntration est trs variable selon les branches, comme le montrent les exemples
suivants.
Tableau 5. - Taux de pntration ries entrep rises participation trangre
dans certains secteurs de l'economie franaise (en pourcentage du total)
Secteur
Sidrurgie
Mtallurgie
Chimie de base
Parachimie
Pharmacie
Machines-outils
quipement industriel
Matriel de traitement de l'information
Matriel lectronique mnager et professionnel
Construction aronautique
Construction automobile
Instruments de prcision
Imprimerie, presse, dition
Effectifs
8 ,1
34,0
37,2
47,3
47,8
32,4
23,2
51 ,4
26,7
7,1
17,6
30,0
10,5
CA HT
7, 8
22,5
42,7
54,3
49,0
33,4
28 ,2
69,8
32,0
4 , 4
16,3
36,6
16,5
Investissements
6,9
30,9
37,2
54 ,2
54,9
44,6
30,2
64,9
27,8
4, 2
12,4
35 ,8
13,8
VA ht
6, 5
11,4
39,4
52,2
51,7
31,3
24,8
67,2
24,5
5 ,9
15 ,89
32,3
14,8
Source : INSEE
1.
En ralit, les privatisations ont eu lieu entre septembre 1986 et janvier 1988 .
2.Souli (198 8 ) dveloppe une analyse conomique du processus de privatisation et prsente les principales caract-
ristiques des oprations de ce type ralises en France pendant la priode 198 6-1988 .
3.En Savoie ou dans le Jura, l'essentiel de la production de fromages est traditionnellement ralise dans des coop-
ratives, appeles fruitires.
19
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DES ENTREPRISES A L'ENTREPRISE
Ces participations trangres sont, pour une large part, originaires des pays de la CEE.
Ce p ourcentage ne peut qu 'tre appel crotre dans l'avenir.
Tableau 6. - Origine gographique des participations trangres
dans les entreprises franaises
Allemagne (RFA)
Belgique-Luxembourg
Danemark
Espagne
Italie
Pays-Bas
Royaume-Uni
CE E
Europe
Etats-Unis
Japon
Tous pays
Participation majoritaire
Effectifs
(milliers)
106
36
3
1
24
43
63
276
36 9
203
11
636
C A H T
(milliards F)
97,2
34,1
2, 5
0,9
20,9
50 ,4
57 ,7
263,9
341,8
228 ,7
9, 0
631,7
Investissements
(milliards F)
3, 9
1,4
0,2
1,0
2, 3
2, 5
11,3
14,5
10,0
0, 5
27,1
Participation majoritaire
+ minoritaire
Effectifs
(milliers)
116
44
3
1
30
46
70
310
41 9
220
13
717
C A H T
(milliards F)
105,8
39,8
2, 6
1,2
24,4
52 ,8
64,4
291,2
382,7
240,9
10,5
695,4
Investissements
(milliards F )
4, 6
1,5
0, 2
0, 1
1,2
2, 4
2, 8
12,7
16,6
10,7
0, 6
30,3
Source : 1NSEE
A la diversit des propritaires d'entreprises, il convient d'associer celle des caractris-
tiques des droits de proprit.
1.1.2.2. La pluralit des formes des droits de proprit
La question se pose essentiellement pour les socits de capitaux, dont les crances et
dettes ne se confondent pas avec celles des associs. Le problme est alors non seulement
de dfinirlesdroits de ces derniers (qui peuvent tre nombreux), ma is aussi ceux des cran -
ciers de l'entreprise, qui n 'ont plus pou r garantie le patrimoine d es associs. Les socits
de capitaux ont une autre caractristique : les titres reprsentatifs des droits de proprit
sont cessibles, et le plus souvent, pour les grandes socits par actions, ngociables sur un
march.
Sur le plan historique, on trouve deux groupes d'anc tres aux socits modernes de capi-
taux. Avant mm e le xv
e
sicle, la proprit des navires de M diterrane tait souvent divi-
se en parts qui taient cessibles. Il en allait de mme en Europe pour certaines mines de
cuivre et d'argent, ou pour les moulins de la rgion de Toulouse (Braudel, 1979). Mais il
semble bien que les associs aient t responsables, sur leurs biens propres, des dettes de
l'entreprise
1
. D'autre part, au dbut du xvi
e
sicle, sont apparues les socits en comman-
dite (Braudel, 1979). Elles se caractrisaient par l'existence de deux catgories d'associs.
Certains d'entre eux, les com man ditaires se bornaient fournir des fonds et ne participaien t
1. Pour le ngoce maritime, le problme de la responsabilit personnelle des associs ne se posait gure dans les faits,
puisque la perte maximale qu'ils pouvaient subir n'excdait pas la valeur du navire et de sa cargaison, c'est--dire le
mon tant des fonds dj engags. Bien entendu, si une partie des fonds avait t emprunte titre personnel par un des
associs , ce dernier en restait redevable envers son crancier.
20
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LA DIVERSITE DES ENTREPRISES
pas la gestion ; en contrepartie, ils n'taient p cuniairement responsables q u' hauteur du
montant de leurs apports. Les autres associs, les comm andits, graient l'entreprise et leur
responsabilit tait illimite.
L'mergence de socits de capitaux, au sens moderne de l 'expression, n'a t que
tardive. On l'explique, gnralement, par la croissance des financements ncessaires au
dveloppement des activits conomiques. La recherche de capitaux a entran une aug-
mentation corrlative du nombre des associs qui n'intervenaient pas directement dans la
gestion. Ils auraient donc refus de participer financirement aux oprations,s'ils avaient
t tenus pour responsables au-del des apports effectus. O n comprend ainsi l'apparition
des comm andites. Mais, comm e le soutiennent Ekelund et Tollison (19 8 0), une autre condi-
tion devait tre remplie po ur exercer un attrait suffisant sur les dtenteurs de capitaux et les
dirigeants des entrep rises : il fallait perm ettre un transfert facile des parts sociales. La ce s-
sibilit des titres prsente l'avantage, pour les bailleurs de fonds, de limiter la dure tem-
porelle de leur engagem ent financier une priode qui peut tre infrieure celle de la vie
de l'entreprise. Les dirigeants ont en outre la possibilit de se retirer sans qu'il en rsulte
pour autant la dissolution de la socit, ce que n'autorisait pas le systme de co mm andite.
Mais il ne suffit pas, cet gard, d'affirmer le principe de la cessibilit des titres ; il faut
aussi organiser un march sur lequel les changes se droulent dans des conditions satis-
faisantes pour les diffrents acteurs.
La com binaison d e la responsabilit limite aux a pports et de la ngociabilit des titres a
permis l'apparition des socits de capitaux modernes, dont une caractristique essentielle
est la distinction qui existe entre leur personne morale, et les personnes physiques et
morales dtentrices des titres de proprit.
Les droits attachs ces titres sont, en gnral, de deux sortes : un droit sur les rsultats
de l'entreprise, et un droit de regard sur sa gestion. Les progrs des techniques financires
et juridiques font que ces deux aspects ne sont plus, com me ils l'taient l'origine, indis-
sociablement lis. 11 existe des actions droit de vote multiple, et des titres (certificats
d'investissement, titres subordonns dure indtermine) que l'on peut assimiler des
actions sans droit de vote, mais avec un droit prfrentiel sur les dividen des. Parfois la pos-
sibilit de transformer des crances obligataires en titres de proprit (obligations bon de
souscription d'action) est aussi offerte.
La ngociabilit des titres est elle-mme variable pour des raisons juridiques et cono-
miques. Les statuts de la socit peuvent la limiter (clause d'agrment, par exemple, qui
impose que tout nouvel associ soit agr par l'assemble gnrale). Surtout, il peut ne pas
exister de march pour certains titres. Seules les actions des socits prsentant une surface
et des garan ties suffisantes sont admises la cote des B ourses de v aleurs.
1.2. La diversit des dimensions
Un second critre important de diffrenciation entre les entreprises se trouve dans leurs
dimensions. Les problmes soulevs par la mesure de taille sont particulirement com-
plexes et seront dvelopps d ans le chapitre suivant. Il est nanmoins possible de don ner ici
un rapide aperu des diffrences existant dans ce dom aine. Les donnes relatives aux entre -
prises imp oses au bnfice net rel (BRN) co nstituent une excellente illustration de l 'ht -
rognit des firmes en tenn e de dimensions.
2 1
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DSENTREPRISES A L'ENTREPRISE
Tableai
Effectifs
salaris
0
1
2 - 4
5 - 9
10-19
20 - 49
50 -99
100-199
200-499
5 00-999
1 000- 1 999
2000- 4999
5 000- 9999
10000 -19 999
20 000 -49 999
5 0 000 et plus
Ensemble
i 7.
Nombre et dimension
Nombre
d'entreprises
87 539
56 189
137 420
128 721
57
347
47 657
12670
6
25 1
35 79
1
197
494
266
69
16
19
6
539 440
Effectifs
totaux
0
56 189
400 025
873 250
783 833
1 483 908
890 127
874 044
1 091 354
8 23 793
685 468
816 180
465 312
232 036
5 69 315
911412
10956246
des entreprises imposes au bnfice rel net (1987)
Effectifs
moyens
0
1
3
7
14
31
70
140
305
68 8
1 388
3 068
6 744
14 5 02
29 964
15 1902
20
CA
(ht)
(millions)
233 986
90 5 8 8
343 891
634 48 2
581 936
1
271 137
772 138
678 309
899 261
670 126
572 263
746 002
471 841
191 35 7
343 696
474 560
8975573
CA (ht)
moyen
finillinnci
IIHIIIUllo^
2,67
1,61
2,50
4,93
10,15
26,67
60,94
108 ,51
251,26
5 5 9 , 8 4
1 158 ,43
2 804 ,52
6 838 ,28
11 95 9,81
18 089,26
79 093,33
16,64
Capital
social
(total
en millions)
166 95 0
2 5 8 1 6
45 188
5 6 95 2
36 323
7 4 8 1 1
52 621
49 268
89 959
56 202
5 4 5 5 6
62 828
37 529
15 903
101 406
98 035
/
024 347
Capital
social
(moyen
en millions)
1,91
0,46
0,33
0,44
0,63
1,57
4,15
7 ,88
25 ,14
46,95
110,44
236,20
543,90
993,94
5 337,16
16 339,17
1,90
Source : INSEE
1.3. La na ture des activits
La nature des activits des entreprises constitue un lmen t majeur pour les distinguer les
unes des autres. La plupart des classifications en ce domaine reposent sur des dissociation s,
se distinguant par des degrs de finesse diffrents, du produit intrieur brut (PIB).
Une division des plus classiques est due
Colin Clark, qui rpartit la production natio-
nale en trois grands secteurs. Le secteur prima ire regroupe les activits lies l'agricu lture
la pche et
l'extraction des ressources naturelles. Le secteur seconda ire correspond
l'industrie au sens large, c'est--dire
la transformation des produits de base en produits
finis.Q uant au secteur tertiaire, il regroupe les autres activits, c'est--dire essentiellemen t
les services.
Tableau 8. Structure du P.I.B. franais
(en pourcentage du total)
Anne
1835
1900
1950
1963
1971
1975
1980
1985
1990
Agriculture
50,0
35.0
15,0
9,0
6,7
5 ,6
4, 5
4, 1
3,7
Industries
25 ,0
37,0
47,0
47,0
42,4
40,7
39,5
37,5
31,1
Services
25 ,0
28 ,0
38 ,0
44,0
50 ,9
53,7
56 ,0
5 8 , 0
65 ,2
Source: INSEE
22
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7/23/2019 Analyse conomique Et Stratgie d'Entreprise
25/292
LA DIVERSITE DES ENTREPRISES
Cette dmarches'avreutile pour l'tude en longue p riode de la croissance d es cono-
mies nationales. La transformation des activits conomiques implique, pour que les com-
paraisons temporelles soient possibles, que l'on ait recours des catgories suffisamment
larges pour conserver leur identit globale et rester distinctes au cours du temps. L'incon-
vnient de cette procdu re est le corollaire de l'ava ntage prcd ent. On est condu it regrou-
per, l 'intrieur d'un mm e secteur, des activits tout fait h trognes, la fois synch ro-
niquement et diachroniquement. Sur ce dernier point, les mutations les plus importantes
intervenues depuis un sicle et demi concernent surtout le poids et la nature des services.
Certains auteurs ont mme suggr, cet gard, d'introduire un secteur quaternaire, o
figureraient les services technologie avance et forte valeur ajoute.
Les organismes de statistiques, qui prsident l'laboration de la com ptabilit nationale,
procd ent, de leur ct, des dissociations plus fines de la production nationale. En France ,
l 'INSEE propose 4 niveaux compatibles, qui sont, par degr de finesse croissant, les sui-
vants : niveau 15 , niveau 4 0, niveau 100 et niveau 600. Le chiffre associ chaq ue niveau
correspond approximativement au nombre de branches retenues dans la dissociation. Il est
noter, cet gard, qu'a ux tats-Unis, il existe un niveau 2 00 0.
Il importe de souligner qu'accrotre la finesse de la dcomposition, c'est--dire le
nom bre des branches, ne prsente pas que des avantages. On o btient certes une information
plus dtaille sur la situation de l'conomie un instant donn, mais, en contrepartie, on
rduit les possibilits de comparaisons dans le temps. La mutation des activits cono-
miqu es impose qu e, de ma nire frquente, une nouve lle dfinition statistique soit donne
aux branches, p our que les catgories retenues correspond ent la ralit, en volution qua-
litative permanente, du contenu de la production
1
.
11 faut enfin remarquer que les dissociations les plus fines de la comptabilit nationale
restent souvent trop grossires pour permettre l'analyse des stratgies d'entreprises,
notamment en matire de politique de produits
2
. Co mm e, nanm oins, elles constituentl'une
des rares sources de statistiques utilisables, les donnes de la comptabilit nationale sont
souvent employes dans les travaux e mpiriques. Un problm e constant des conom istes est,
en effet, que faute de pouvo ir utiliser les informations dsires parce qu'e lles n 'exis ten t pas,
ils doivent se contenter de recourir celles qui sont disponibles. Il convient, dans cette
situation frquente, de faire preuve de la plus extrme prudence dans l'interprtation des
rsultats des tudes appliques
1
.
1.4. La varit des struc ture s de march
Les entreprises sont confrontes des environnem ents con currentiels imm diats qui peu-
vent tre trs divers. La thorie noclassique les caractrise uniquement par le nombre des
firmes qui interviennent sur le march et par le nombre des acheteurs.
1. Il faut aussi tre trs prudent dans le cas des branches dont le nom ne change pas, mais pour lesquelles le produit et
le processus de production connaissent des mutations profondes. Les exemples en sont nombreux, de la sidrurgie
l'aronautique en passant par l'automobile.
2.En comptabilit nationale, la dfinition statistique des branches repose sur celle des produits.
3.Le chapitre 2, entre autres, donne l'occasion de mettre en lumire certains des aspects mthodologiques et empi-
riques de celte question.
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7/23/2019 Analyse conomique Et Stratgie d'Entreprise
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DES ENTREPRISES A L'ENTREPRISE
Tableau 9. - Les structures de march dans la thorie noclassique
^^~~^^^ Nombre
^ ^ ^ ^ d e vendeurs
Nombre
^ ^ - ^ ^ ^
d'acheteurs
^ ^
Un
Faible
Infini
Un
Monopole
bilatral
Monopole
contrari
Monopole
Faible
Oligopole
contrari
Oligopole
bilatral
Oligopole
Infini
Monopsone
Oligopsone
Concurrence
pure et parfaite
Les situations le plus souvent tudies sont celles qui figurent sur la dernire ligne du
tableau 9, o le nombre des acheteurs est lev. La libert stratgique des entreprises dif-
fre alors considrablement entre les cas extrmes dcrits par la thorie no classique. En
concurrence pure et parfaite, le pouvoir de la firme sur son environnement est nul.11es t au
contraire trs important dans le cas du monopole. Il devient alors possible, en introduisant
quelques hypothses complmentaires, de dfinir la nature de l'quilibre du march en
fonction du seul nombre des firmes.
Pour ne s'en tenir qu'aux cas habituellement abords (nombre lev d'acheteurs), les
situations relles de march apparaissent plus complexes qu'elles ne sont dcrites par les
modles traditionnels. Il s'avre, en effet, ncessaire de prendre en considration trois
caractristiques supplmentaires : l'ingalit de la taille des entreprises, la diffrenciation
des produits et l 'imp ortance des barrires l 'en tre.
Ne tenir compte que du seul nombre des firmes n'e st justifi que si l 'on retient, au moins
de manire implicite, l 'hypothse d'galit des dimensions. Bien que certaines dmarches
thoriques concluent une tendance l 'galisation des tailles, en raison, notamment, du
rle des conomies d'chelle
1
, l 'observation empirique met en vidence la persistence de
diffrences dans les dimensions.11est certain que ce phnomne influence le drouleme nt
du processus concurrentiel, qui n'obit pas aux mmes rgles selon qu'il y a ou non des
firmes en position dominante sur le march.
D'autre part, il est rare que les produits vendus soient homognes, c'est--dire que les
acheteurs se trouvent dans l'incapacit de les distinguer. La diffrenciation, au contraire,
pennet aux firmes d'acqurir quelques lments de monopole et d'chapper partiellement
au dterminisme des mcanismes de march en s'attachant une demande qui leur est
propre
2
. C 'est l que se trouve la source principale du pouvo ir limit des petites entreprise s.
Enfin, il ne faut jamais oublier que la situation de concurrence n'est pas fige, mais au
contraire volutive. L'importance relative des dimensions des firmes et le degr de diff-
renciation des produits changent au cours du temp s. Surtout, de nouv elles entreprises pn-
trent sur les march s, et d'autres les quittent. Les barrires l'entre et la sortie jou en t un
rle central dans ce processus d'apparition et de disparition. Leur importance constitue
don c, elle aussi, une des dimensions des structures des marchs.
1. Voir chap itre 2.
2.Le chapitre 4 est consacr l'tude de certains aspects de la politique de diffrenciation.
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LA DIVERSIT DES ENTREPRISES
Une illustration partielle des contrastes existant, en la matire, entre les diffrentes
branches, est donne par les statistiques relatives aux disparitions d'entreprises.
Tableau 10 . - Disparitions d'entreprises dans quelques secteurs de l'conom ie franaise
Secteur d 'activit (Nomenclature NAP)
Industrie (ensemble)
dont :
Production de biens d'quipement
Production de biens intermdiaires
Production de biens de consommations
Btiment et gnie civil
Commerce
Transports et tlcommunications
Htels, cafs, restaurants
Services marchands rendus principalement aux entreprises et divers
Services marchand s rendus principalement aux particuliers
dont :
Rparation et commerce de l'automobile
Ensemble
1980
3 231
5 5 6
65 0
2 025
3 795
5 147
62 7
1905
1394
1276
672
17 375
1989
5 8 66
1 177
98 2
3 707
8 741
10
839
1535
4
401
4 998
3662
1623
40042
Source : INSEE
II convient donc de conserver l'esprit que la concurrence ne se limite pas aux seules
firmes imp lantes sur le march. L'existence de candidats l 'entre et l 'apparition de nou-
veaux concurrents ne sont pas sans exercer une influence certaine sur les comportements
adopts par les entreprises
1
.
1.5. La pluralit des produits
Un autre lment de distinction entre les firmes rside dans la varit des produits
qu'elles fabriquent.
Une prem ire classification porte sur le nom bre des produits offerts. O n est ainsi con duit
sparer les firmes monoproductrices des entreprises multiproductrices. D'un point de vue
mthodologique, une difficult majeure apparat alors, lie la multiplicit des dfinitions
que l'on peut donner du produit. Le degr de pluriproduction dpend, en effet, du concept
prcis que l'on utilise. Le problme se pose empiriquement pour les tudes ap pliques. La
question, dans ce cas, est alors de dterminer si l'activitd'uneentreprise relved'uneou
de plusieurs branch es
2
. La rponse dpen d, en tre autres, de la finesse de la dissociation sta-
tistique utilise:telle firme, qui est monobranche dans la nomenclature de niveau 100, peut
devenir m ultibranche d ans la nomenclature de niveau 6 00. Sur le plan thorique, la dfini-
tion du produit pertinente pour l'analyse des politiques d'entreprise conduit constater que
la trs grande majorit des firmes sont multiproductrices
3
.
1. L'importance de cette question est telle que le chapitre 6 lui est consacr.
2.Par dfinition mme du secteur, une entreprise est toujours monosectorielle, quelle que soit la finesse de la disso-
ciation.
3.Ce constat est l'origine de l'existence des chapitres 5 et 6.
25
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DES ENTREPRISES L'ENTREPRISE
Un autre aspect important, en la matire, conce rne la nature mm e de la m ultiproduction.
Les diffrents produits fabriqus peuvent tous tre vendus sur des marchs (multiproduc-
tion horizontale), ou tre, en partie, transforms dans l'entreprise (intgration verticale).
Dans le premier c as, il peut exister des similitudes plus ou m oins prononces entre les dif-
frents produ its offerts (gamm es de produits et gammes de produ ction).
Un point complmentaire du prcdent est li l'internationalisation des activits des
entreprises. Une firme peut se limiter au march national, ou intervenir sur des marchs
extrieurs soit en y exportant, soit en s'y implantan t. Elle peut aussi installer dans certains
pays des units dont la production est, pour l'essentiel, destine tre rexporte. Le dyna-
misme international des entreprises constitue une condition importante non seulement de
leur dveloppem ent, mais, de plus en plus, de leur survie mm e. La forme extrm e de cette
ouverture internationale est la multinationalisation : l'entrep rise, mme si ses capitaux sont
majoritairement originaires d'u n seul pays, a rparti ses activits de production et de ventes
dans p lusieurs pays. Il lui est possible d'allger ainsi le poids des contraintes po litiques et
conomiques nationales,sauf,peut-tre, dans son pays d'origine .
1.6. L'organisation interne
Un dernier lment de diversit entre les firmes met en jeu leurs modalits d'organisa-
tion interne. On d istingue, ce sujet, quatre m odalits principales. Les structures ado ptes
par la majorit des entreprises se rattachent, qu elques v ariantes prs, l'une de ces q uatre
catgories. De manire formelle, on les reprsente par un organigramme qui dfinit les
comptences de chaque membre de l'organisation, et l'articulation des pouvoirs dans
l'entreprise . Il convient nanm oins d'tre prudent cet gard, car il arrive que la ralit des
pouvoirs diffre de sa reprsentation formelle.
La structure pyramidale
(ou hirarchique) est calque sur l'organisation militaire.
Chaque subordonn n'a qu'un seul suprieur direct, qui le dirige et le contrle dans toutes
ses activits. Cette structure exige que la comptence des chefs soit suffisamment large
pour qu'ils puissent exercer efficacement leurs responsabilits. Elle est donc particulire-
ment adapte aux petites entreprises.
La structure fonctionnelle repose sur le principe de spcialisation des responsabilits
dans l'entreprise, sur la base des principales fonctions qui y sont assures : production,
commercialisation, finances, administration gnrale, etc. Chaque dpartement est dirig
par une personne com ptente dans le champ couve rt. Le revers des gains d'efficacit dus
cette spcialisation est que seul le responsable au plus haut niveau possde une vision
d'ensemble de la firme, et a la possibilit de coordonner les diffrentes fonctions. Pour
runir les com ptences n cessaires, il lui faut s'ap puy er sur un groupe de conseillers experts
qui ne sont bien souvent autres que les responsables des diffrentes fonctions. U n incon v-
nient majeur vient du fait, qu'en raison mme de leur spcialisation, il est difficile, voire,
impossible, de comparer les performances des diffrents dpartements constituant l'entre-
prise. Ce type d'organisation, longtemps privilgi en France, est bien adapt aux entre-
prises industrielles de taille mo yenn e.
La structure multidivisionnelle
est apparue aux tats-Unis en 1925. Les deux premires
firmes l'avoir adopte sont General Motors d'une part, Dupont de Nemours d'autre part.
Cette organisation se caractrise par une certaine dcentralisation. Chaque d ivision est res-
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LE CONCEPT D'ENTREPRISE
ponsable de la gestion de la totalit des oprations courantes relatives aux activits qu'elle
poursuit ;elle constitue aussi un centre de profit au tonome. Le rle de la direction gnrale,
dgage des contraintes de la gestion quotidienne, est de dfinir les axes de dvelopp ement
stratgique de l'entreprise. La structure multidivisionnelle convient bien aux trs grandes
entreprises, ou aux firmes fortement multiproductrices.
La structure matricielle
est trs particulire, en ce sens qu'elle procde d'une organisa-
tion selon deux dimensions. Chaque mem bre de l'organisation dpend de deux suprieurs
hirarchiqu es. Le premier, fonctionnel, e st li aux comptences de l'individ u. Le second est
le responsable de la mission laquelle participe, temporairement, le membre de l'organisa-
tion. Cette forme d'organisation est adapte aux besoins des entreprises dont l'activit
consiste raliser des projets successifs. Une quipe, runissant les comptences nces-
saires,
est constitue pour chacun des projets accomplir, sous l'autorit d'un responsable.
Lorsque le projet est achev, chaque membre de l'quipe est remis la disposition de son
suprieur fonctionnel qui l'affecte, selon les besoins, un nouveau projet.
Il faut enfin noter qu 'il existe parfois, sur ce sujet, un dcalage en tre le point de vue des
juristes et celui des conom istes. Plus prcisment, l 'entit conom ique con sidre comm e
une entreprise unique peut tre constitue de plusieurs socits distinctes, unies par des
relations de participation. Cette situation est frquente pour les structures multidivision-
nelles.
Mais le droit franais ne reconnat pas encore le concep t de groupe.
La diversit des entreprises est donc grande, et elle porte sur de multiples aspects. Il
convient, nanmoins, de souligner cet gard que nombre de points de diffrence sont
interdpendants : le choix de l'organisation interne, par exemple, est partiellement li la
taille et la nature des activits ; les structures de march sont, dans une certaine mesure,
la consquence des politiques adoptes par les firmes. Nous allons maintenant montrer
comment, partir de cette htrognit du monde rel, il a t possible de dgager le
concept unitaire d 'Entreprise.
2.
LE CONCEPT D'ENTREPRISE
Le concept d'En treprise, tel qu 'il s'affirme actuellement, a t progressivement construit
partir des travaux des thoriciens de l'conomie et de la gestion. Le problme mthodo-
logique principal qu'il a fallu rsoudre tient ce que ce concept doit tre suffisamment
gnral pour englober la diversit des entreprises existantes, et en mme temps suffisam-
ment proche de la ralit pour tre utile l'tude de cas concrets. Le constat de la varit
des situations relles effectu plus haut conduit une conclusion d 'impo rtance :l'entreprise
est, de toute vidence, une entit com plexe et mu ltidimensionnelle. Le concept d'En treprise
doit donc, lui aussi, prsenter cette multiplicit de facettes. Les dvelopp eme nts rcen ts des
sciences conomiques ont permis d'enrichir progressivement le modle lmentaire de la
thorie noclassique, en introduisant de nouveaux aspects qui en taient absents. Malgr
des amliorations certaines, il ne faut pas se cacher que des progrs importants restent
accomplir pour dfinir un concept d'Entreprise qui soit rellement satisfaisant.
Avant de souligner les apports les plus marquants de la rflexion thorique, il convient
de s'interroger sur les raisons mmes de l'existence des entreprises.
27
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DES ENTREPRISES A L'ENTREPRISE
2.1. mergence et organisation des entreprises
L'un des objets des sciences conom iques est l'tud e de la manire dont sont utilises les
ressources rares. Com me l'a soulign Hicks (1969), deux mcanismes principaux peuvent
prsid er cette allocation : le prlvement (ou redistribution) et l'chan ge (ou m arch). La
grande diffrence entre ces deux situations est que, dans la premire, les dcisions sont
prises de manire administrative ou autoritaire, alors que, dans la seconde, les agents
concerns effectuent des choix libres en s'appuyant sur un systme de prix
1
. Depuis fort
longtemps, ces deux modalits coexistent. Dans les conomies modernes, la premire a
pou r rle de corriger les dysfonctionnements des march s, tant du point de vue de l'effica-
cit conomique que de celui de l'quit sociale. Au niveau macroconomique c'est donc
l'intrt de la collectivit qui est concern.
Cette explication en termes de recherche d'un optimum collectif ne peut pas tre trans-
pose au niveau microconomique. Pourtant, on y rencontre aussi la coexistence des deux
mo des d'allocation . L es entreprises sont, en effet, des entits qui procdent des changes
marchands avec leur environnement, mais l'intrieur desquelles les transactions s'effec-
tuent sur une base administrative. Cette situation est suffisamm ent particulire pour q u'o n
lui consacre quelques dveloppements. tudier le problme de l'existence des entreprises
cond uit, dans une second e tape de la rflexion, s'interrog er sur le rle de leurs structures
internes.
2.1.1.
L'apparition des entreprises
Dan s un article, demeur clbre aju ste titre, Coase
2
(1937) a non seulement abord la
question de l'apparition des firmes en tant qu'acteurs dans le processus conomique, mais
y a aussi apport des lments de rponse, qui ont t l'origine de dveloppements ult-
rieurs fructueux.
2.1.1.1. L'apport de Coase
Le point de dpart de l'analyse de Coase est que le recours au systme de prix implique
l'apparition de cots, contrairement ce que soutient la thorie noclassique des marchs.
Ces cots relvent de deux catgories : certains sont lis la recherche des informations
pertinentes, les autres la conclusion de contrats.
En effet, contrairement aux hypo thses habituellement introduites, l'information sur les
ma rchs est imparfaite. La proposition de K aldor (1934), selon laquelle les prix pertinents
sont connus de tous les individus , n'est certainement pas vrifie dans la ralit. Il
imp orte donc aux acteurs de se procurer l'information sur les prix dont ils ont besoin pou r
prendre leurs dcisions. Ce cot peut tre rduit, mais non pas limin, par l'organisation
des marchs ou l'apparition de spcialistes qui vendraient les informations.
La seconde source de cots tient au fait que toute transaction ralise sur un march
implique la conclusion d'un contrat implicite ou explicite. L'augmentation du volume des
changes conduit celle du nombre des contrats court terme, ce qui, lorsque les transac-
1.
L'existence de prix suppose celle d'un ou plusieurs numraires, mais pas ncessairement de monnaie. Le troc est un
systme dans lequel les acteurs changent librement leurs produits.
2.
Ronald Coase a t le laurat du prix Nobel d'conomie en
1991.
Il a souvent regrett que son article soit beau-
coup cit et peu utilis (Coase, 1972).
28
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LE CONCEPT D'ENTREPRISE
tions sont rptitives, entrane une croissance rapide des co ts. On pourrait envisager, dans
cette dernire ventualit, de remplacer la squence des contrats court terme identiques
par un contrat unique long terme. Mais, l'incertitude quant l'volution venir de la
situation et l'impossibilit de prendre en compte l'ensemble des ventualits pouvant se
produire
1
, rendent ce mode d'organisation inefficace, en ouvrant la voie des interprta-
tions diffrentes des clauses contractuelles.
Il s'avre, alors, intressant d'avoir recours une forme particulire de contrat. Les four-
nisseurs des ressources acceptent, moyennant une rmunration fixe ou variable, d'obir
aux instmctions de l'acheteur, dans le cadre de limites prtablies. Fixer ces limites consti-
tue alors l'essentiel du contenu du contrat. Il apparat ainsi un e relation d'auto rit librement
accepte, qui constitue l'essence mme de l'entreprise. Cette modalit d'organisation des
transactions est d'autant plus utile que la ressource en cau se est un service, et en particulier
le travail. Elle permet de rduire le cot des changes par rapport ce qu'impliqu erait l'uti-
lisation du march, et prsente en outre l'avantage de faciliter l'adaptation aux change-
ments de l'environnement puisque l'accord ne porte que sur des principes gnraux, les
dtails devant tre fixs ultrieurement, c'est--dire en fonction des circonstances.
Coase dveloppe donc l'argument selon lequel il s'avre plus efficace, c 'est--dire moins
coteux, de raliser l'allocation des ressource s par la voie administrative que par le systme
de prix. Il explique ainsi les raisons de l'apparition des entreprises. En gnralisant cette
dmarche, on comprend ausi pourquoi la plupart d'entre elles deviennent multiproduc-
trices : ce qui est vrai pour un seul produit le reste dans le cas o la firme en fabrique
plusieurs. Il peut donc tre prfrable d'avoir une entreprise unique fabriquant plusieurs
produits qu 'un ensemble de firmes mo noproductrices.
Une question reste encore pendante : pourquoi entreprises et march continuent-ils
coexister, alors mme que la premire modalit d'organisation du processus conomique
s'avre suprieure la seconde ? La rponse apporte sur ce point relve plus de l'intuition
(appuye sur une dduction) que d'une analyse rigoureuse. Coase estime que lorsque la
taille d'une entreprise augmente, le cot marginal de la transaction interne crot, et qu'il
arrive un moment o il est gal celui de l'change ralis sur le march. 11devient prf-
rable, dans cette ventualit, d'avoir recours ce dernier. Deux raisons principales sont
avances l'appui de cette proposition. La premire est qu 'il existe, au-del d 'une certaine
dimension, des rendements dcroissants dans la gestion, dus la fois la difficult d'orga-
niser une transaction supplm entaire et une allocation d e moin s en moins efficace des fac-
teurs de production
2
. La seconde raison est que le prix de certains facteurs (en fait le tra-
vail) peut crotre avec la taille, car les avantages non mo ntaires (nature des resp onsabilits,
libert d'action, modalits de contrle, etc.) lis l'emploi sont plus importants dans les
petites entreprises que dans les grandes. Ce discours, dans une certaine mesure prmoni-
toire, n'est m alheureusement pas tay par un raisonnem ent convaincant.
On ne saurait reprocher un travail de pionn ier de prsente r quelques lacunes et insuffi-
sances. Coase a ouvert la voie des recherches qui ont permis une meilleure comp rhen-
sion, non seulement de ce qu'es t l'entreprise, mais aussi de certains aspects de ses mo dali-
ts de fonctionnement. Ce sont les plus marquants de ces travaux qu'il convient d'exposer
maintenant.
1.
Ce dernier aspect est li aux limites des capacits cognilives de l'homme. Il est l'origine de ce que les behavio-
risles ont appel rationalit limite . Sur ce point, voir notamment March et Simon (195 8 ), Simon (1960) et Cyert
et March (1963).
2.
Williamson (1970) propose un modle mettant en relation l'efficacit de la gestion et la taille des entreprises.
29
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DES ENTREPRISES L'ENTREPRISE
2.1.1.2. La critique d Alchian et Dem setz
Les propositions avances par Coase ont fait l'objet d'un e critique de la part d 'Alchian
et Demsetz (1972), qui prsentent une autre explication de l'existence des entreprises.
Selon ces auteurs, le contrat de travail ne diffre en rien de ceux que peuvent conclure sur
le ma rch deux agents indpendants. De la mm e faon qu e l'on peut assigner un em ploy
telle ou telle tche, on peut dem ander son picier un bote de thon l'hu ile ou un p aquet
de pain sous cellophane. L'autorit n'es t don c pas l'apanag e des relations l'intrieur de la
firme. La faiblesse de cet argument est vidente. Le prix que dem ande l'picier dpend du
produit qu'il fournit, mais la rmunration de l'employ est dtermine avant la dfinition
prcise des activits qu'il doit effectuer dans le cadre des limites fixes par le contrat.
La thse dveloppe par A lchian et Dem setz pour expliquer l'apparition des entreprises
est plus intressante, quoiqu e de porte limite. Pour eux, ce sont la nature du p rocessus de
production et la difficult de mesurer la contribution de chaque facteur qui sont l'origine
de l'existence des firmes.
Dans certains cas, il est avantageux d'organiser des quipes, parce que leur production
est suprieure la somme de celles que raliseraient les membres de l'quipe
s'ils
agis-
saient de manire indpendante. Le gain de productivit s'explique parce qu 'il y a com bi-
naison, e t non pas simp le addition, des efforts des mem bres. De manire formalise, si X
et Xj sont les quantits de travail fournies par les individus i et j la fonction de production
de l'quipe, Z(Xj,Xj), est telle que l'on a :
Z(X,Xj) > Z(Xj) + Zj(Xj)
ce qui implique que cette fonction n 'est p as separable en
X
et
X,
et que, par consquent,
0 .
Le chargement des camions est un exem ple classique de cette situation. Se po se alors le
problm e de la dtermination des rmun rations individuelles, que le march ne peut effec-
tuer que de manire imparfaite. Le m arch ne dispose, en effet, d'informations que sur les
rsultats de l'activit de l'quipe dans son ensem ble, et non pas sur les modalits prcises
de son fonctionnement interne
1
. Il ne peut donc fixer qu'une rmunration globale, sur la
base de la production totale. L'intrt individuel de chaque mem bre de l'quip e est alors de
rduire son effort. Si un lment de l'quipe travaille moins, la production totale s'en res-
sentira. Mais la diminution consqu ente de la rmu nration sera rpartie entre les diffrents
membres, et non pas totalement supporte par celui qui en est l'origine, en raison de
l'existence de cots d'identification des comportements. Cette externalit conduit chaque
individu fournir un effort moindre que s 'il tait seul
2
. Cette attitude tant celle de tous les
membres de l'quipe, la production totale diminue et la rmunration de chacun devient
infrieure ce qui est individuellement optimal
3
.
1. Ce qui importe l'acheteur sur le march, c'est ce qu'il obtient, et non pas la manire dont ce rsultat est atteint.
2.
L'analyse des choix individuels entre travail (et donc rmunration) et loisir constitue l'un des thmes dvelopps
par la thorie du consommateur. Voir, par exemple, Henderson et Quandt (1958), ou Roux (1988).
3.Chaque membre de l'qu ipe a intrt rduire son effort, condition que les autres maintiennent le leur. Si tout le
monde adopte un comportement de paresse, il y aura de nouveau correspondance entre l'effort et la rmunration in-
dividuelle. Mais l'quilibre s'tablira un niveau infrieur celui de l'optimum individuel (situation d'isolement).
Chacun a donc intrt travailler plus, condition que les autres le fassent aussi. Mais, en l'absence de pouvoir de
contrle et de dcision dans l'qu ipe, il est impossible de garantir qu 'il en sera ainsi.
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LE CONCEPT D'ENTREPRISE
II est possible d'viter l'apparition de cette situation peu satisfaisante pour
tous.
Il suffit,
pour cela, de mettre en place un mcanisme de contrle interne l'quipe, permettant de
mesurer la contribution de chacun et de fixer son salaire en consquence. On fait ainsi dis-
paratre les externalits qui taient l'origine des compo rtements individualistes. Pour vi-
ter que le contrleur ne soit lui-mme tent de cder la paresse, sa rmunration doit tre
prleve sur l'augme ntation du revenu total que sa prsence permet d'obtenir. Il est, de ce
fait, fortement incit accrotre au maxim um la production de l'quipe. L e contrleur doit
aussi avoir le pouvoir de mettre fin unilatralement la participation d'un individu
l'quipe, s'il estime le comportement de cette personne incompatible avec l'intrt collec-
tif. Il faut, enfin, qu'il ait la possibilit de vendre l'ensemble des droits prcdents, dont la
valeur est, en principe, lie au flux actualis des revenus futurs que son action permet de
gnrer. Le modle ainsi dfini est celui de l'entreprise capitaliste.
En introduisant des variantes dans les droits dont dispose le contrleur, Alchian et Dem-
setz ont pu tendre leur analyse d'autres types d'organisations comme les coopratives,
les firmes autogres ou les entreprises socialistes. Ils ont ainsi pens proposer une thorie
globale de l'origine des firmes.
2.1.1.3.
L'analyse de Williamson
Williamson (1975) a critiqu la dmarche prcdente, qu'il estime de porte limite.
Selon lui, elle ne permet pas de proposer une explication gnrale de l'apparition des orga-
nisation s, et, en particulier, de celle des organisations co mplexes . Elle justifie , dans certains
cas,
l'existence d'unit s de production de petites dimensions, mais jam ais celle de grand es
entreprises.
En effet, les situations de non-sparabilit semblent beaucoup moins frquentes que ne
le laissent entendre Alchian et Demsetz. Une preuve en est, selon Williamson, que dans
nombre d'ateliers, il existe des stocks de produits intermdiaires entre les diffrents postes
de travail. Il ne pourrait pas en tre ainsi si la fonction de production n'tait pas separable.
En outre, le phnom ne, localis aux diffrentes tapes du processus de production, n e peut
concerner que les tablissements, et non les firmes dans leur globalit.
2.1.1.3.1. Le rle des cots de transaction
La position adopte alors par Williamson (1975 ) consiste reprendre la voie ouverte pa r
Coase, et l'approfon dir, en tudiant de m anire plus fine la nature des cots de transac -
tion. Il s'attache analyser les phnom nes qui rendent difficiles et coteuses la conce p-
tion et l'excution la satisfaction des parties en prsence de contrats complexes. Selon
lui,
la conjonction de facteurs lis l'environnement d'une part, au comportement des
dcideurs d'autre part, est l'origine des dysfonctionnements des marchs. Plus prcis-
ment, le couplage de l'incertitude et de la complexit avec la rationalit limite, et celui
du petit nombre avec l'opportunisme interdisent le bon droulement des changes sur les
marchs.
La rationalit limite caractrise des comportem ents qui visent tre rationnels, m ais n'y
parviennent pas, en raison de limitations imposes par la neurophysiologie et le langage
humains. Les premires limitations se manifestent par la capacit borne des individus
recevoir, stocker et traiter les informations, et les secondes par le fait qu 'il n'existe pas tou-
jours de mod es d'expression permettant de transmettre sans ambigut d'autres personnes
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DES ENTREPRISES L ENTREPRISE
des connaissances, des instructions ou des sentime nts
1
. Mais ces limites de la rationa lit ne
jouent un rle contraignant que dans la mesure o elles sont atteintes, c'est--dire dans les
situations o l'environn em ent se caractrise par un degr lev de complexit ou d'incerti-
tude.
Dans cette ventualit, il s'avre difficile, voire impossible, de rdiger des contrats
prvoyant tous les cas possibles, et dfinissant avec prcision, p our chacun d 'entre eux, les
attitudes adopter. L'organisation administrative conduit alors raliser une conomie
considrable sur la rationalit limite, en permettant l'utilisation de processus de dcision
adaptatifs et squentiels. Il n'est plus ncessaire d'envisager, a priori, l'ensemble des v-
nements possibles. Il suffit, chaque instant, de concentrer l'attention sur ceux qui se pro-
duisent rellement, ou dont la probabilit d'apparition devient trs leve.
Selon W illiamson, l 'opportunism e largit l 'hypo thse classique de recherche de l'utilit
maxim ale par les agents conom iques, en y introduisant des considrations d 'ordre strat-
gique. Cela implique, n otammen t, que le recours la ruse en constitue un des a