application des techniques civilistes aux valeurs mobilieres
DESCRIPTION
le recours aux techniques civilistes pures ou aspirés des mécanismes civilistes appliquées aux valeurs mobilières permet de réaliser des opérations financières ou des opérations de marché, ...TRANSCRIPT
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Universit de Lille II Droit et santFacult de sciences juridiques, politiques et sociales
LAPPLICATION DES TECHNIQUES CIVILISTES
AUX VALEURS MOBILIERES
Antoine DESPINOYDEA de Droit des Contrats option Droit des Affaires
Anne universitaire 2000-2001
Septembre 2001
Mmoire de DEA sous la direction de Madame Marie-Christine MONSALLIER
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LAPPLICATION DES TECHNIQUES CIVILISTES
AUX VALEURS MOBILIERES
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Liste des principales abrviations utilises
Al. AlinaANSA Association Nationale des Socits par
ActionsArt. ArticleAss. Pln. Assemble plnire de la Cour de cassationBull. Civ. Bulletin des arrts de la Cour de cassation,
chambre civileBull. Joly Bulletin JolyCA Cour dappelCass. Cour de cassationCass. Civ. Chambre civile de la Cour de cassationCass. Com. Chambre commerciale de la Cour de cassationCf. confrec. civ. Code civilc. com. Code de commerceCJ Comit JuridiqueCom. Chambre commercialeD. Recueil DallozDefrnois Rpertoire du notariat DefrnoisDP Dalloz PriodiqueDr. Socits Droit des socitsd. EditionFasc. FasciculeG.P. ou Gaz. Pal. Gazette du PalaisI.R. ou Inf. Rap. Informations RapidesJ.C.P., d. E. Jurisclasseur Priodique, dition entrepriseJ.C.P., d. G. Jurisclasseur Priodique, dition gnraleJ.C.P., d. N. Jurisclasseur Priodique, dition notarialeJO Journal officielJour. Soc. Journal des socitsL.G.D.J. Librairie Gnrale de Droit et de
JurisprudenceLoc. cit. Loco citatoObs. ObservationsOp. cit. opus citatum (ouvrage cit)P.A. Petites AffichesRp. RpertoireReq. Chambre des RequtesRev. RevueRev. Jurisp. Com Revue de Jurisprudence CommercialeRev. Soc. Revue des SocitsR.J.D.A. Revue de Jurisprudence de Droit des AffairesR.T.D. Civ. Revue Trimestrielle de Droit CivilR.T.D. Com. Revue Trimestrielle de Droit CommercialS. SireyS.A. Socit AnonymeS.A.R.L. Socit Responsabilit LimiteSpc. Spcialementt. 1 ou t. 2 Tome 1 ou Tome 2Trib. Tribunal
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Sommaire
Introduction
1re partie : Les finalits des techniques civilistes appliques aux valeurs
mobilires
A Lamnagement des prrogatives de lassoci
1. Les caractres de la qualit dactionnaire
2. Lamnagement de la participation la vie sociale
B - La mise disposition dactions des administrateurs ou des membres
du conseil de surveillance
1. Le prt dactions
2. La vente rmr et la cession dactions en blanc
2me partie : La limitation des amnagements conventionnels
A Linadaptation des techniques civilistes classiques
1. Limperfection des techniques civilistes visant la mise
disposition dactions
2. La faveur de la pratique pour le portage ou une convention sui
generis
B Les limites poses par les rgles issues du droit des socits
1. Lordre public socitaire 2. Lintrt social
Conclusion
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INTRODUCTION
Depuis toujours on a discut sur le point de savoir si la nature des socits
commerciales ressortait plutt de la thorie de linstitution ou plutt de la libert
contractuelle laisse aux parties. La nature de la socit oscille entre ces deux
conceptions. Le dbat emporte de nombreuses consquences pratiques. Si dans un
premier temps cest la thorie institutionnelle qui a domin, on constate depuis
quelques annes un regain de faveur pour la thorie contractuelle en raction une
lgislation juge trop contraignante1. La pratique ainsi quune grande partie de la
doctrine se montre extrmement favorable lamnagement du fonctionnement des
socits, en particulier des socits par actions, qui le permettent plus aisment.
Cest dans ce cadre de regain de contractualisation de la vie de la socit que
sinscrit la question de lapplication de techniques civilistes aux valeurs mobilires,
lments spcifiques aux socits commerciales, au droit des socits. La
contractualisation des valeurs mobilires est un des lments les plus utiles
lassouplissement de la vie socitaire, favorisant lactivit des affaires.
La contractualisation des valeurs mobilires par lapplication de techniques
proprement civilistes marque une volont de libert contractuelle qui doit
saccommoder des spcificits du droit des socits. Deux courants saffrontent
donc.
Les rdacteurs du Code civil comme du Code de commerce envisageaient la socit
comme un contrat. Larticle 1832 du code civil disposait (jusqu la loi du 11 juillet
1985) que La socit est un contrat . Le code de commerce navait consacr
que 46 articles aux socits, la loi du 24 juillet 1867 en comprenait une soixantaine.
Selon cette conception dessence anglo-saxonne, cest la libert contractuelle qui
doit dominer, sous rserve de lordre public des articles 6 et 1134 du Code civil. Tout
ce qui nest pas expressment interdit doit tre autoris. Comme tout contrat, elle
doit donc avoir, par exemple, un objet licite. La loi de 1994 instaurant la socit par
actions simplifie marque le regain de la thorie contractuelle ces dernires annes
en laissant une trs grande libert aux parties.
1 Monsallier (M.-C.) : Lamnagement contractuel du fonctionnement de la socit anonyme, L.G.D.J, 1998 ;Guyon (Y.) : Trait des contrats, Les socits, Amnagements statutaires et conventions entre associs, L.G.D.J.,4me dition, 1999, n 8.
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La conception de la socit peut aussi tre dinspiration lgale ou institutionnelle. Elle
suppose alors une subordination des intrts particuliers aux fins poursuivies par la
socit. Selon la dfinition de linstitution dHauriou, la socit sentendrait alors
comme une organisation emprunte dautorit visant la satisfaction dune ide mre.
Cette conception germanique a inspir la loi de 1966 qui a instaur un systme dune
grande rigidit et laisse une large place lordre public et lintrt alors que ce
systme peut aussi tre plus ou moins marqu et seulement fixer les rgles
gnrales en laissant une place la libert des parties. Ainsi sexplique que la
socit et le droit des associs ne soient pas figs par lacte constitutif de la socit,
mais puissent tre modifis par une dcision ultrieure. Larticle 24 de la loi du 8 aot
1994 abaissant le quorum des assembles gnrales extraordinaires est une
manifestation de cette thorie. Cette conception justifie les nombreuses interventions
lgislatives visant surveiller lactivit des socits dans la vie conomique. La loi du
11 juillet 1985 est la conscration officielle de cette thorie. La socit est
maintenant institue et non plus constitue. Selon Monsieur le Professeur
Guyon, cette modification terminologique doit sexpliquer par lapparition de la socit
unipersonnelle plutt que par une vritable volont de faire triompher la thorie
institutionnelle.
Face cette rigidit des rgles, la pratique a tent de rintroduire des espaces de
libert contractuelle pour faciliter la rapidit et la souplesse de la vie des affaires.
Cette place laisse la libert peut passer par des amnagements statutaires ou par
des conventions extra-statutaires, comme les conventions de vote, les
amnagements dans lorganisation interne des organes des socits, la conclusion
de conventions visant augmenter la stabilit des dirigeants cest dans cet esprit
que se dveloppent les techniques envisages appliques aux valeurs mobilires.
La pratique a, pour ce faire, utilis les valeurs mobilires qui permettent entre autres
dacqurir la qualit dactionnaire dune socit, de participer la vie socitaire et
daccder aux fonctions lectives, en leur appliquant un certain nombre de
techniques connues. Cest cette application de techniques civilistes aux valeurs
mobilires qui sera lobjet de notre tude ; il convient den dfinir les contours avec
prcision.
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1) Dfinition des termes du sujet
Lintitul du sujet de cette tude comprend deux expressions qui mritent dtre
dfinies afin de mieux les cerner et de mieux envisager les frontires de ce mmoire.
Les valeurs mobilires
- Elments de dfinition des valeurs mobilires
Les valeurs mobilires expression que nous devons au pralable dfinir- sont trs
nombreuses et reoivent des applications varies. Toutes ne font pas lobjet de la
contractualisation des socits telle que nous lenvisageons. Il convient donc den
dresser un rapide inventaire et de ne se concentrer que sur celles intressant notre
matire.
Selon la doctrine - qui reprend la dfinition donne par le rglement gnral de la
SICOVAM et par la circulaire du 8 aot 1983 relative au rgime des valeurs
mobilires, Le terme de valeurs mobilires sentend dun ensemble de titres de
mme nature, cots ou susceptibles de ltre, issus dun mme metteur et confrant
par eux-mmes, des droits identiques leurs dtenteurs ; et tous les droits dtachs
dune valeur mobilire, ngociables ou susceptibles de ltre (droits de souscription
ou dattribution) sont assimils une valeur mobilire 2. Ou encore plus simplement
ce sont les titres de capital ou de crance, ngociables confrant des droits
identiques par catgorie . Et pour conclure, la vision du romancier que cite Monsieur
le Professeur Cozian :
- Quest-ce que ces actions, je ne comprends pas bien ? demanda Ivan
Matvevitch.
- Cest une invention allemande ! dit Tarantiev, agressif. Par exemple, un
arnaqueur trouve un procd pour construire des maisons qui rsistent au feu. Il
dcide de btir toute une ville : il a besoin dargent. Alors, il met en vente des
bouts de papier, disons de cinq cent roubles chacun ; une foule dimbciles les
achte et les revend les uns aux autres. Le bruit court que lentreprise marche
bien, le prix des papiers monte ; ou quelle marche mal, et tout seffondre. Il te
reste des bouts de papier, mais ils ne valent plus rien. Tu demandes : o est la
ville ? On te dit quelle a brl, quelle na pas t acheve et que linventeur sest
2 Merle (Ph.) : Droit commercial, les socits commerciales, Dalloz, 7me dition, 2000, n 267.
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sauv avec ton argent. Voil ce que cest que les actions ! (I. Gontcharov,
Oblomov, Lge dhomme, p. 382)3.
La loi n88-1202 du 23 dcembre 1988 relative aux organismes de placement
collectif en valeurs mobilires et cration de fonds communs de crances dispose,
en son article 1er, que Sont considres comme valeurs mobilires () les titres
mis par des personnes morales publiques ou prives, transmissibles par inscription
en compte ou tradition, qui confrent des droits identiques par catgorie et donnent
accs, directement ou indirectement, une quotit du capital de la personne morale
mettrice ou un droit de crance gnral sur son patrimoine .
La nouvelle catgorie des instruments financiers , introduite par la loi du 2 juillet
1996 regroupe les actions et autres titres donnant accs, directement ou
indirectement, au capital ou aux droits de vote, transmissibles par inscription ou
tradition et les titres de crance qui reprsentent chacun un droit de crance sur
la personne morale qui les met, transmissibles par inscription en compte ou
tradition, lexclusion des effets de commerce et des bons de caisse . Il apparat
donc que les valeurs mobilires existantes sont des instruments financiers4.
- Les caractristiques des valeurs mobilires
Les lments de dfinition nous permettent de dterminer les caractristiques des
valeurs mobilires, ce qui est important de dterminer pour bien comprendre dans
quel cadre se fera lapplication de techniques proprement civilistes. Ce sont des
biens meubles. Elles sont incorporelles puisque nayant pas dexistence matrielle. Il
est aussi admis, et cest l une qualit sur laquelle nous aurons loccasion de revenir
et qui pose problme pour lapplication aux actions du prt de consommation, que ce
sont des biens non consomptibles, cest dire qui ne se consomment pas par le
premier usage. Les valeurs mobilires sont des titres ngociables facilement
transmissibles par virement de compte compte, et des titres fongibles, cest dire
interchangeables contre des titres de mme catgorie et valeur. Elles sont
susceptibles de procurer des revenus : soit parce que leur titulaire est un associ ;
soit parce quil est un crancier.
3 Cozian (M.), Viandier (A.) et Deboissy (Fl.) : Droit des socits, Litec, 13me dition, 2000, n1067.4 Ripert (G.) et Roblot (R.), par Delebecque (Ph.) et Germain (M.) : Trait de droit commercial, tome 2, L.G.D.J,15me dition, 1996, n1734 et s.
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- Liste et classifications des valeurs mobilires
Il est impossible de dresser une liste exhaustive des valeurs mobilires existantes
depuis la loi n 85-1321 du 14 dcembre 1985 qui a consacr la libert dmettre des
valeurs mobilires hors des cadres prvus par la loi, en autorisant lmission de
valeurs innomes.
La plupart des valeurs mobilires sont les actions mises par les socits anonymes
qui ne peuvent se constituer sans. La plupart des socits anonymes nmettent
dailleurs que des actions. On distingue donc les actions sous toutes leurs formes,
les parts de fondateurs, les obligations, les certificats dinvestissement, les valeurs
mobilires composes et les bons de souscription autonomes, et enfin, les titres
participatifs.
Les parts de fondateurs ou parts bnficiaires sont des titres ngociables mis par
les socits par actions, destines faire participer certaines personnes aux
bnfices raliss par la socit en contrepartie de services rendus gnralement au
moment de la constitution de la socit ou dune augmentation de capital. La loi du
24 juillet 1966 a interdit lmission de parts de fondateurs nouvelles compter du 1er
avril 1967.
La loi du 3 janvier 1983 a cr un nouveau produit financier en fractionnant laction
en deux titres diffrents : le certificat dinvestissement et le certificat de droit de vote.
Les droits pcuniaires et politiques sont spars. Toutes les socits par actions
peuvent mettre ce type original de valeurs mobilires sans toutefois dpasser le
quart du capital social. Les certificats dinvestissement sont des titres ngociables.
Leurs titulaires ont droit toutes les sommes mises en distribution par lassemble
gnrale. Ils peuvent obtenir communication des documents sociaux dans les
mmes conditions que les actionnaires5.
Le certificat de vote quant lui nest pas une valeur mobilire. Il ne peut tre cd
quavec un certificat dinvestissement ou au porteur dun certificat dinvestissement.
Laction est alors reconstitue. Cest le titulaire du certificat de vote qui est le titulaire
des droits politiques attachs laction. Il peut notamment participer aux assembles
dactionnaires et y voter, obtenir la communication des documents sociaux,
demander la dsignation dun expert de gestion.
5 Article L. 283-2 de la loi de 1966 et art. L. 228-32 du Code de commerce.
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La loi du 3 janvier 1983 a instaur un cadre trs souple pour rgir les valeurs
mobilires composes et les bons de souscription autonomes. Selon larticle L. 228-
91 al. 1 du Code de commerce reprenant lancien article L. 339-1 al. 1 de la loi de
1966, les valeurs mobilires composes sont celles qui donnent droit par
conversion, change, remboursement, prsentation dun bon ou de toute autre
manire, lattribution tout moment ou date fixe de titres qui, cet effet, sont ou
seront mis en reprsentation dune quotit du capital de la socit mettrice .
Les titres participatifs sont aussi issus de la loi du 3 janvier 1983. Ce sont des titres
ngociables revenu variable, ne pouvant tre mis que par les socits par actions
du secteur public, les socits anonymes coopratives, les banques coopratives ou
mutualistes, les tablissements publics caractre industriel et commercial, les
socits coopratives agricoles. Les porteurs de titres participatifs sont, comme les
obligataires, regroups de plein droit dans une masse dote de la personnalit
morale dont la finalit est la dfense de leurs intrts. Ils peuvent obtenir
communication des documents sociaux.
Ces titres sont moins rpandus que les actions et les obligations.
Les obligations sont des titres ngociables mis par une socit qui emprunte un
capital important, long terme, et divise sa dette en un grand nombre de coupures6.
Lobligataire nest pas associ mais des droits dans la socit lui sont reconnus.
Lobligation soppose laction en ce que lactionnaire est un associ de la socit
alors que lobligataire est un crancier. La dfense des intrts de lobligataire est
assure par une masse laquelle il est intgr de plein droit. Leur mode
dintervention dans la vie sociale de la socit dont ils sont cranciers est donc trs
particulier. Lassemble constitue de la masse des obligataires dlibre sur les
dcisions prises par la socit pouvant les concerner. Lvolution lgislative rcente
a cr de nouveaux types dobligations, les obligations composes, dont le rgime
les rapproche des actions. A linverse des obligations dites simples, certaines
obligations composes peuvent offrir la possibilit leur titulaire dacqurir la qualit
dactionnaire : il sagit des obligations convertibles en actions et des obligations
6 Ripert (G.) et Roblot (R.) par Germain (M.) et Vogel (L.) : Trait de droit commercial, Tome 1, L.G.D.J., 17me
dition, 1998, n 1779.
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changeables en actions. Les obligations convertibles en actions permettent leur
titulaire de devenir actionnaire dans les conditions fixes lors de lmission. Ce type
dobligations est trs intressant pour les obligataires qui pourront devenir
actionnaire si la situation de la socit est florissante. Les obligations changeables
contre des actions ont t introduites par la loi de 1966. Ce type dobligations na que
trs peu de succs en raison des lourdes contraintes lors de leur mission. Enfin, les
obligations avec bons de souscription dactions (O.B.S.A), introduites par la loi du 3
janvier 1983. Les bons de souscription sont dtachables de l'obligation et
ngociables indpendamment de celle-ci. Ces obligations donnent ouvrent la
possibilit leur titulaire de souscrire aux actions mises par la socit dans les
conditions fixes par le contrat dmission.
Sans conteste la catgorie la plus importante de valeurs mobilires est reprsente
par les actions. Le plus souvent ce sont les seules valeurs mobilires mises par les
socits. Cest la catgorie qui retiendra le plus notre attention. Le terme action
dsigne le droit de lassoci dans une socit anonyme ou dans une socit en
commandite par actions et dsigne aussi le titre ngociable qui reprsente ce droit.
La valeur nominale de chaque action reprsente une quote-part du capital social. Les
actions peuvent tre nominatives ou au porteur. On distingue une grande varit
dactions que lon peut classer suivant leur forme, la nature de lapport quelles
reprsentent ou ltendue des droits quelles confrent : les actions nominatives ou
au porteur, les actions de numraire ou dapport, les actions de capital et les actions
de jouissance, les actions ordinaires et actions de priorit, les actions dividende
prioritaire sans droit de vote. Cette dernire catgorie dactions est soumise un
rgime trs particulier. Pcuniairement, les actionnaires dtenteurs de ces titres ont
une priorit sur les actionnaires ordinaires pour la distribution dun premier dividende.
Cette catgorie dactionnaires voit ses prrogatives extra-pcuniaires rduites. Ils
sont en effet priv du droit dassister aux assembles dactionnaires et dy voter. Une
rserve toutefois, ils peuvent, certaines conditions, retrouver ce droit si les
dividendes prioritaires dus au titre de trois exercices nont pas t intgralement
verss. Les porteurs dactions dividende prioritaire sans droit de vote bnficient du
droit linformation, du droit de demander la dsignation dun expert de gestion ou
encore de mettre en uvre une procdure dalerte.
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Les actionnaires ordinaires voient leurs droits trs tendus, nous ne les reprendrons
pas tous ici pour mieux y revenir plus tard, quand nous examinerons les prrogatives
des actionnaires. Les droits des actionnaires se divisent en droits politiques et
pcuniaires.
Quelques prcisions ont t apportes par la jurisprudence7, certains titres posant
problme. Les billets ordre mis par les banques8, les bons de capitalisation mis
par une socit (simples contrats individuels dont la valeur diffre dun bon
lautre)9, les bons de rcupration attribus aux cranciers chirographaires dune
socit en faillite par le repreneur10, ne sont pas des valeurs mobilires. Alors quau
contraire et de faon assez surprenante sont considrs comme des valeurs
mobilires les grosses notaries cres en srie11 et les bons de trsorerie mis en
srie12.
Une catgorie de titres ne fait pas partie des valeurs mobilires, il sagit des parts
sociales. Les parts sociales sont le droit que lassoci reoit en contrepartie de son
apport. Ce droit reprsente une fraction du capital social et dtermine les
prrogatives de lassoci 13. Les parts sociales ne sont pas des valeurs mobilires,
il est d'ailleurs interdit aux SARL dmettre des valeurs mobilires. Les droits des
associs dans le capital social, cest--dire les parts sociales, ne peuvent pas tre
reprsents par des titres ngociables14. Cependant il sagit bien l de titres
donnant ou pouvant donner accs, directement ou indirectement, au capital ou aux
droits de vote tel que la loi du 2 juillet 1996 peut lentendre. Les associs, ont
des droits et des obligations proches des actionnaires. Les parts peuvent dans une
certaine mesure faire lobjet de certains amnagements contractuels communs avec
les actions pour obtenir un rsultat semblable. Les conventions portant transfert
temporaire de parts sociales sont trs rares et sans intrt. Pour le cas de la
convention de portage, par exemple, la ncessit dobtenir un agrment de
7 La jurisprudence en question est cite par : Cozian (M.), Viandier (A.) et Deboissy (Fl.) : op. cit, nous enindiquerons les rfrences.8 Cass. Req., 17 aot 1869 : D.P. 1870, I, 33.9 Cass., 7 mai 1912 : S. 1914, I, 489, note Wahl (A.).10 Cass. Req., 19 juin 1945 : S. 1947, I, 145, note Bastian (D.).11 Cass. Com., 11 janv. 1954 : Bull. Civ., III, n11.12 Cass. Crim., 15 juin 1954 : J.C.P., 1955, 8724, note D.B.13 Lexique de Termes juridiques, Dalloz, 10me dition.14 Ancien article 43 de la loi de 1966, article L. 223-12 du Code de commerce.
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lassemble gnrale, lunanimit dans les socits en nom collectif, la double
majorit des trois quarts des parts sociales et de la moiti des associs de la SARL,
va rendre trs hasardeuse la pratique du portage des droits sociaux mis par ces
personnes morales. A supposer que le porteur obtienne lagrment lors de la cession
de titres qui lui est faite par le donneur dordre, la convention de portage risque de se
voir paralyse par le jeu de la procdure dagrment lors de la rtrocession des titres
du porteur au bnficiaire. La contractualisation des parts sociales peut aussi servir
devenir associ et accder aux fonctions de grance.
Notre tude sattachera aux valeurs mobilires permettant lacquisition de la qualit
dactionnaire dans les socits de capitaux et damnager le fonctionnement des
socits. Il sagira donc des actions.
Aprs avoir cern examin quelles valeurs mobilires seront tudies, il convient de
savoir ce quil se cache derrire lexpression techniques civilistes .
Les techniques civilistes
Par techniques civilistes il faut tout dabord entendre les techniques contractuelles
tires du Code civil, autres que les contrats classiques, et permettant damnager le
fonctionnement de la socit. Beaucoup des contrats prvus par le Code civil ne
retiendront pas notre attention en raison de leur absence de spcificit : la vente, la
donation, les testaments, le dpt et le squestre, les srets. Retiendront donc
notre attention : lusufruit, les rgles gouvernant lindivision, le prt, la vente
rmr, le prt et, dans une certaine mesure, parce quil permet damnager le
fonctionnement du vote, le mandat.
Dautres techniques contractuelles cres par la pratique et dinspiration civiliste
doivent tre envisages. Il sagit du portage, de la pension livre et de la
convention de croupier.
- Essai de classifications
Il est ncessaire de sessayer regrouper ces techniques pour mieux en comprendre
les utilits, ce qui sera une bonne mthode pour les tudier. Il est possible de les
examiner au regard des consquences quelles emportent quant la proprit des
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valeurs mobilires15. La plus grande catgorie se compose des contrats emportant
transfert temporaire des titres : il sagit de la vente rmr, du prt, du crdit-bail,
du portage et de la pension livre. La convention de croupier emportant quant elle
alination partielle . Lusufruit et lindivision sont des techniques pour lesquelles
des personnes ont des droits concurrents sur le mme bien.
- Dfinition des termes employs
Il est important de bien dfinir ces techniques pour mieux en cerner les mcanismes.
Elles se rassemblent en plusieurs groupes : ceux emportant transfert temporaire de
valeurs mobilires et ceux pour lesquels plusieurs personnes exercent des droits
concurrents sur ces titres.
- Le plus important est celui des contrats emportant transfert temporaire de
valeurs mobilires.
Le plus connu de ces contrats est le prt. La premire chose que nous enseigne
lexamen de larticle 1874 du Code civil, est quil existe deux sortes de prts : celui
des choses dont on peut user sans les dtruire, il sagit du prt usage , aussi
appel commodat, et celui des choses qui se consomment par lusage quon en fait,
il sagit du prt de consommation , appel plus simplement prt. Une section du
Code civil est consacre chaque prt, chacun ayant son propre rgime. Larticle
1875 du Code civil dfinit le prt usage comme le contrat par lequel lune des
parties livre une chose lautre pour sen servir, la charge par le preneur de la
rendre aprs sen tre servi . Contrairement ce qui est dispos pour le prt de
consommation, essentiellement gratuit en ne pouvant porter que sur des choses
consomptibles, le prteur demeure propritaire de la chose prte 16. Ce type de
prt nimplique donc aucun transfert de possession ni de proprit. Nous verrons que
cette caractristique est fondamentale pour dcider que le prt usage nest pas
applicable aux actions. On lui prfrera le prt de consommation, rgi par les articles
1892 et suivants du Code civil qui le dfinit comme un contrat par lequel lun des
parties livre une autre une certaine quantit de choses qui se consomment par
lusage, la charge par cette dernire de lui en rendre autant de mme espce et
quantit . Ce type de prt emporte transfert de proprit comme en dispose larticle
15 Guyon (Y.) : Trait des contrats, Les socits, Amnagements statutaires et conventions entre associs,L.G.D.J., 4me dition, 1999, n 251 et s.16 Article 1877 c. civ.
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1893 : Par leffet de ce prt, lemprunteur devient propritaire de la chose
prte . Pour une partie de plus en plus importante de la doctrine le prt de
consommation serait inadapt au prt dactions17. Ainsi pour M. le professeur
Guyon18, ni le prt usage ni le prt de consommation ne conviennent
vritablement au prt de titres . M. Lucas est aussi svre, Le contrat de prt
emprunt du Code civil pour organiser des transferts temporaires de valeurs
mobilires est manifestement inadapt 19. Pour ces auteurs, la vente rmr
nest pas plus adapte20.
La vente rmr ou rmr est une forme de vente avec facult de rachat pour le
vendeur. Elle est rgie par les articles 1659 1673 du Code civil. Il sagit dun
pacte par lequel le vendeur se rserve de reprendre la chose vendue, moyennant
la restitution du prix principal et le remboursement des frais. Le rmr doit
sanalyser comme une vente sous condition rsolutoire, en effet, lexercice du rmr
annule rtroactivement la vente. On distingue le rmr de la pension livre en ce
que la pension implique une obligation rciproque de racheter et de revendre les
titres alors que le rmr noffre quune option en faveur du vendeur.
Enfin, le portage, qui a la faveur de la doctrine. Trois approches du portage peuvent
tre envisages. Il peut sagir, dune part, de la convention par laquelle un
emprunteur cde son prteur, en garantie du prt, la proprit dactions ou
dobligations, tant convenu que les titres seront transfrs lchance et aprs
remboursement du prt. Dautre part, le portage peut tre entendu comme la
convention par laquelle le titulaire de titres, actions ou obligations, les cde un
tiers, lequel soblige les rtrocder un prix et un terme convenu21. Enfin, M.
Guyon nous donne une dfinition limpide du portage, celle que nous retiendrons pour
17 Ainsi par exemple : Huguet (H.) : Mise disposition dactions au profit de personnes physiques afin de leurpermettre dexercer des fonctions dadministrateurs ou de membres du conseil de surveillance dans les filialesnon cotes dun groupe, Dr. Socits, mars 1999, p. 5 ; Lucas (F.-X.) et Neau-Leduc (P.) : Mise dispositiondactions des administrateurs ou des membres du conseil de surveillance, Actes Pratiques, Socits, nov.-dc.1999, p. 7.18 Guyon (Y.) : op. cit. n 259.19 Lucas (F.-X.) : Les transferts temporaires de valeurs mobilires, pour une fiducie de valeurs mobilires,L.G.D.J., 1997, n 471 et s.20 Par exemple : Perrot (A.) : La vente rmr de valeurs mobilires, R.T.D. com., 1993, p. 1, pour qui lapension-livre serait un bon substitut au rmr.21 Schmidt (D.) : Les oprations de portage de titres de socits, in Les oprations fiduciaires, Feduci-L.G.D.J.,1985, p. 29.
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notre tude. Le portage est une convention par laquelle une personne (le porteur)
accepte, sur demande dune autre personne (le donneur dordre) de se rendre
actionnaire dune socit, par acquisition ou souscription dactions, tant convenu
quaprs un certain dlai ces actions seront transfres une personne dsigne,
pour un prix fix ds lorigine 22. Le porteur est donc un propritaire temporaire qui
doit transfrer la proprit au terme convenu la personne dsigne, elle-mme
tenue dacqurir, des conditions fixes ab initio. Le bnficiaire peut tre le
donneur dordre lui-mme.
Trs proche du portage, la pension-livre ne concerne que les titres cots et nest
accessible quaux personnes morales. Cet instrument na fait lobjet daucune
dfinition lgale. Il sagit dun instrument de trsorerie permettant au dtenteur de
titres de se procurer un financement ou un dtenteur de liquidits de raliser un
placement, contre une remise temporaire de titres 23. La Banque de France a rdig
une convention de place qui dfinit la pension comme une opration par
laquelle, une personne (le cdant) cde une autre personne (le cessionnaire), des
effets publics ou privs, les valeurs mobilires ou les titres de crances ngociables
() et par laquelle le cdant et le cessionnaire sengagent rciproquement, le
premier les reprendre, le second les rtrocder, pour un prix et une date
convenus . Cette technique ne concernant quexclusivement le droit boursier et
financier ne sera pas abord dans le cadre de cette tude.
- Lusufruit et lindivision sont les techniques contractuelles pour lesquelles
diffrentes personnes ont des droits concurrents sur les mmes biens.
Lusufruit, dfinit par larticle 578 du Code civil, est le droit de jouir des choses dont
un autre la proprit, comme le propritaire lui-mme, mais charge den
conserver la substance . Lusufruit est un droit rel, au maximum viager, confrant
son titulaire lusage et la jouissance dune chose qui appartient autrui, ou dun droit
dont une autre personne est titulaire24. Deux personnes ont des droits concurrents
sur les titres dmembrs : lusufruitier et le nu-propritaire. Lusufruitier a lusage de
22 Guyon (Y.) : op. cit., n 254.23 Auckentaler (F.) : Les transferts temporaires de titres sur les marchs de largent, Thse Montpellier, 1993,n340 et suivants.24 Mazeaud (H.) et (L.), Mazeaud (J.) et Chabas (F.) : Les biens, Droits de proprit et ses dmembrements,Montchrtien, 5me dition, 1994, n1646 et suivants.
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la chose (usus) et le droit den percevoir les fruits (fructus), mais il na pas le pouvoir
den disposer, labusus est la prrogative du propritaire. Lusufruit peut rsulter dun
vnement indpendant de la volont des parties ou dune convention entre elles. Il
peut porter sur des valeurs mobilires, mais cette transposition aux droits incorporels
se fait malaisment. Si le droit de lusufruit ne fait aucun cas de lusufruit de valeurs
mobilires, le droit des socits sy est fortement intress. La rpartition des droits
politiques et pcuniaires entre lusufruitier et le nu-propritaire est organise par la loi
mais une part de libert est laisse. Des difficults ont pu natre sur le point de savoir
lequel des deux avait la qualit dassoci, lequel pouvait assister et voter aux
diffrentes assembles. Nous examinerons ces difficults loccasion de ltude plus
approfondie de lusufruit.
Les valeurs mobilires peuvent tre soumises un rgime dindivision. Plusieurs
personnes, les indivisaires, ayant toutes la qualit de propritaire sur une quote-part.
Un des caractres fondamentaux de lindivision, telle quorganise par les articles
815 et suivants du Code civil est dtre temporaire, cest pour cela que la loi n 76-
1286 du 31 dcembre 1976 a organis aux articles 1873-1 et suivants le rgime de
lindivision conventionnelle, qui permet ceux qui exercent des droits sur des biens
indivis de se maintenir en indivision et de passer des conventions relatives
lexercice de ses droits. On peut alors sinterroger sur le point de savoir qui a la
qualit dassoci ou dactionnaire, qui donc participe aux assembles, y vote
Une dernire technique sera envisage, la convention de croupier, qui depuis la loi
du 4 janvier 1978 ayant abrog larticle 1861 du Code civil est un contrat innom
sapparentant la socit en participation. Il sagit dun contrat emportant alination
partielle de valeurs mobilires. La convention de croupier est laccord par lequel un
associ partage avec un tiers les bnfices et les pertes qui rsultent de sa
participation une socit. Elle permet un associ de partager avec un tiers la
socit les rsultats positifs ou ngatifs des droits sociaux sans avoir obtenir le
consentement des autres actionnaires ou associs. La convention de croupier peut
aussi servir pour un actionnaire obtenir un prt dont le principal et les intrts
seront pays par les dividendes. Ainsi les pouvoirs politiques et pcuniaires font
lobjet dun amnagement entre les parties.
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Ces techniques contractuelles peuvent recevoir diffrentes applications, autres que
celles daccder au statut dassoci et de participer activement la vie sociale.
2) Lamnagement conventionnel des valeurs mobilires
Deux types damnagements sont possibles. Les conventions tudies peuvent
servir rpondre des besoins financiers ou amnager le fonctionnement de la
socit.
- Applications pratiques ressortant de ncessits financires
Les autres applications rserves ces techniques sont dordre financier. Les
motivations des parties rpondent des soucis de scurit et de libert25.
Le rmr, le prt et la pension peuvent servir rpondre un besoin de scurit,
afin de recomposer son actif, pour placer des liquidits en bnficiant dune garantie
ou encore faire face un besoin de livraison 26.
Certains organismes de placement ou dassurance sont soumis des contraintes
relatives la composition de leurs actifs. Recourir ces techniques leur permet de
les respecter. Le recours des techniques emportant transfert temporaire de valeurs
mobilires peut servir assurer la livraison de titres quune partie sest engage
livrer mais dont elle ne dispose pas, loccasion par exemple dune opration
darbitrage ou de contrepartie. Larbitrage peut tre dfini comme lopration qui
consiste tirer parti dun cart de prix existant entre deux marchs27. Selon le
vocabulaire Capitant la contrepartie est le fait, par celui auquel il est donn mandat
de vendre ou dacheter une marchandise, de se porter lui-mme acqureur ou
vendeur de cette marchandise . La contrepartie vise amliorer la liquidit en
permettant aux intermdiaires dacheter ou de vendre pour leur propre compte, les
titres offerts ou demands par leurs clients.
25 Auckentaler (F.) : Les transferts temporaires de titres sur les marchs de largent, thse Montpellier, 1993, p.48 et s.26 Lucas (F.-X.) : Les transferts temporaires de valeurs mobilires, pour une fiducie de valeurs mobilires,L.G.D.J, 1997, n 30 et s.27 Auckentaler (F.) : op. cit., p. 82.
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La remise de titres par le biais dun transfert temporaire peut servir dans lopration
o lessentiel est la ralisation dun prt ou dun placement. Le transfert de proprit
permet la constitution dune garantie, en confrant au crancier un droit de proprit
dpendant du remboursement de la dette28. Cette technique a t mise au point pour
pallier les imperfections du nantissement de titres qui nopre pas de transfert de
proprit29. Les dlais de ralisation du gage sont aussi incompatibles avec
limpratif defficacit des oprations financires.
Les transferts temporaires de valeurs mobilires servent aussi pallier les risques de
liquidit, que sont pour un acheteur de titres, de ne pas tre livr lchance
convenue parce que son vendeur ne dispose pas des titres. Un tiers va donc fournir
au vendeur la provision de titres ncessaire la livraison, charge pour lui de
restituer des titres semblables terme. Dans cette hypothse, le transfert de titres
nest pas la contrepartie dun prt ou dun placement despces mais vise grer le
risque de dfaillance du vendeur de titres dans sa livraison. Ces solutions sont les
plus adaptes aux exigences de ce type doprations. La solution du rachat en
bourse des actions livrer se montre dfavorable au vendeur de titres. Si le vendeur
savre dfaillant, lacheteur peut demander sa socit de bourse la mise en route
de la procdure de rachat pour les livrer lacheteur. Si le prix est infrieur celui
convenu entre les parties, le manque gagner sera support par le vendeur
dfaillant. On comprend lintrt de transferts temporaires de titres.
Les transferts temporaires de titres sinscrivant dans le cadre financier permettent de
suivre des objectifs de rentabilit ou de gestion fiscale. Le transfert temporaire de
titres peut servir, pour les investisseurs institutionnels disposant dimportants stocks
de titres, amliorer la rentabilit de leur portefeuille. Ils percevront ainsi les coupons
et autres droits attachs aux titres et les intrts propres rmunrant leur mise
disposition. Lintrt fiscal dun transfert temporaire de titres attrait limputation du
crdit dimpts attachs aux titres et lalternative entre la perception dun revenu ou
la ralisation dune plus value30.
28 Malaurie (Ph.) et Ayns (L.) : Droit civil, Les srets, La publicit foncire, 8me dition, 1997, Editions Cujas,p. 287 et s.29 Fasquelle (D.) : Le nantissement des valeurs mobilires, R.T.D. com., 1995, p. 1.30 Pour des dtails sur les intrts fiscaux des transferts temporaires de valeurs mobilires : Lucas (F.-X.) : op.cit., n 34 et Auckentaler (F.) : op. cit., p. 96 et s..
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De leur ct lindivision et lusufruit, quand ils ne sont pas la consquence
dvnements dpendants de la volont des parties, ne sont pas utiliss pour des
oprations financires. Les parts sociales et les actions prsentent des aspects
politiques et pcuniaires, ils reprsentent donc la valeur des apports raliss, se
prtant ainsi aisment aux situations comportant concurrence de droit, mais aussi
des prrogatives attaches la personne qui saccommodent moins bien avec la
coexistence dune pluralit de personnes ayant des droits identiques ou diffrents sur
un mme titre31.
Lamnagement contractuel du fonctionnement des socits nest pas intress en
premier lieu par les applications financires de ces techniques.
- Plan
Quand des personnes utilisent ces techniques cest avec le dessein dviter de
requrir des agrments pour devenir associ dune socit, ou encore pour
amnager laccs dune personne aux assembles, son droit de vote. Plus
intressant encore sont les amnagements des valeurs mobilires visant la mise
disposition dactions des administrateurs ou des membres du conseil de
surveillance. L se situe le grand enjeu de ces dernires annes o les fonctions de
direction des socits des grands groupes se sont professionnalises. Ces
mcanismes ne sont dailleurs pas sans voquer pour nous la thorie conomique
de lagence32 et ses systmes dincitation. La relation dagence, qui se propose de
donner une vision contractuelle de la firme, peut tre dfinie comme un contrat par
lequel une ou plusieurs personnes (le principal) engage une autre personne (lagent)
pour excuter en son nom une tche quelconque qui implique une dlgation dun
certain pouvoir de dcision lagent. Selon cette thorie, dont les principaux auteurs
sont Charreaux, Fama, Jensen et Meckling, la forme la plus efficiente dorganisation
socitaire est la socit par actions, dont la forme la plus aboutie serait, en droit
franais la socit anonyme directoire et conseil de surveillance, car elle permet la
mise en place efficace des dispositifs de hirarchie, de surveillance, lamnagement
du droit de vote et le contrle des mandataires (1re partie).
31 Lecene (M.) : Les parts et actions dune socit commerciale qui appartiennent plusieurs personnes, ThseBordeaux, 1992, n 7.
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Ce courant contractualiste, fortement soutenu par la pratique des affaires en raction
un systme rigide, et par la loi depuis lapparition de la SAS, aussi sduisant soit-il,
nest pas sans limites.
Lapplication de techniques civilistes des outils propres au droit des socits ne se
fait pas sans heurt. Ces techniques se rvlent le plus souvent inadaptes. La
doctrine a pu proposer des types de conventions sui generis pour chaque but
recherch. Les limites la libert contractuelle sont aussi poses par les rgles
impratives du Code civil, les grands principes du droit des socits, ou encore et
surtout par lordre public et lintrt social. La doctrine peut peut-tre nous proposer
des solutions plus adaptes pour contourner ces diffrents obstacles (2me partie).
Plan :
1re partie : Les finalits des techniques civilistes appliques
aux valeurs mobilires
2me partie : La limitation des amnagements conventionnels
32 Coriat (B.) et Weinstein (O.) : Les nouvelles thories de lentreprise, in Droits de proprit et relationdagence. La nouvelle orthodoxie noclassique, pp. 77-107.
-
1re partie : Les finalits des techniques civilistes appliques
aux valeurs mobilires
La plupart des techniques contractuelles numres peuvent intervenir diffrents
stades de la vie sociale en fonction du but recherch dans lopration, tandis que
dautres sont rserves des usages plus spcifiques. Une personne qui veut
participer la vie dune socit, doit dabord en devenir actionnaire. Le nouvel
actionnaire (par exemple la personne qui ne devient actionnaire que dans le but de
devenir administrateur) comme lactionnaire plus ancien utilisent les mmes
techniques quand ils souhaitent organiser leur participation la vie sociale.
La personne dj actionnaire va utiliser ces diffrentes techniques contractuelles
pour amnager sa participation la vie sociale en amnageant les prrogatives
politiques et pcuniaires accordes par les actions, concernant laccs aux
assembles, le droit de vote, la reprsentation, la perception des dividendes (A).
Pour une personne qui nest pas encore actionnaire, laccession cette qualit a le
plus souvent comme fin laccession aux fonctions de direction de la socit. Afin de
permettre cette personne dexercer ces fonctions, tout en conservant la possibilit
de rcuprer les actions lui confies. La mise disposition dactions un
administrateur ou un membre du conseil de surveillance se fait le plus souvent par
le biais de techniques emportant transfert temporaire de valeurs mobilires (B).
A Lamnagement des prrogatives de lassoci
Les droits et devoirs des associs sont nombreux. La participation une socit se
rvle souvent complexe et ncessite parfois lamnagement des droits dont le titre
est le support (2). Ces amnagements ne peuvent se comprendre quen tudiant la
teneur des prrogatives confres par les valeurs mobilires (1).
1. Les caractres de la qualit dactionnaire
Les prrogatives de lactionnaire sont nombreuses (a), et prsentent certaines
particularits lorsque les actions font lobjet damnagements conventionnels (b).
-
a) Les prrogatives de lassoci
Lassoci bnficie de droits politiques et pcuniaires. Les droits de lactionnaire sont
dautant plus importants que celui-ci est majoritaire ou fait partie dun regroupement
dactionnaires.
Ltude des caractres fondamentaux communs toutes les socits commerciales
nous permet didentifier les associs. Mais peut-on utiliser le terme dassoci pour les
socits par actions ? Sattacher aux critres donns par M. Viandier33 sur les
associs en matire de socit anonyme peut surprendre la lecture du trait de
Ripert et Roblot34, le mot associs nest jamais employ pour dsigner les
actionnaires, car ce qui les lie la socit ce nest pas le contrat de socit, mais la
dtention dun titre ngociable . Mais quand M. Viandier dfinit la notion dassoci,
cest bien ce quil y a de commun aux associs des socits de personne et aux
actionnaires quil tudie. Pour M. Merle lactionnaire est bien un associ : les droits
des actionnaires sont en revanche multiples, tant lis sa qualit dassoci 35.
Ltude de M. Viandier sur la notion dassoci nous permet de mieux dfinir
lactionnaire, de mieux en identifier les lments qui lui attribuent cette qualification.
Deux thories saffrontent au sujet de la dfinition classique de la notion dassoci :
la thorie classique et celle de M. Viandier qui se propose dactualiser les critres de
dfinition.
Le rappel de ces grands principes nous sera utile pour examiner la validit des
techniques contractuelles que nous tudierons.
Selon la thorie classique, lassoci est lapporteur ayant vocation aux pertes et aux
bnfices, il est caractris par un certain affectio societatis.
Cette thorie considre que la qualit dapporteur, essentielle, se confond avec celle
dassoci. Chaque associ doit obligatoirement faire un apport, mme si la socit
laquelle il appartient nest pas dote de la personnalit morale. Lapport est le bien,
(somme dargent, immeuble, fonds de commerce) dont lassoci confre la
proprit ou la jouissance la socit et en contrepartie duquel il reoit des parts ou
actions. Larticle 1843-2 al. 1 du Code civil dispose aussi que Les droits de chaque
associ dans le capital social sont proportionnels ses apports lors de la constitution
33 Viandier (A.) : La notion dassoci, Thse Paris, 1978.34 Ripert (G.) et Roblot (R.) par Germain (M.) et Vogel (L.) : Trait de droit commercial, Tome 1, L.G.D.J.,17me dition, 1998, n 1504.
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de la socit ou au cours de lexistence de celle-ci . Les apports peuvent se diviser
en trois catgories selon leur nature : les apports en numraire, en nature ou en
industrie.
Les associs partagent les bnfices ou profitent de lconomie rsultant de
lexploitation de la socit. En contrepartie ils sengagent contribuer aux pertes36.
Par application de ce principe, larticle 1844-1 alina 2 du Code civil prohibe les
clauses lonines en disposant que La stipulation attribuant un associ la totalit
du profit procur par la socit ou lexonrant de la totalit des pertes, celle excluant
un associ totalement du profit ou mettant sa charge la totalit des pertes sont
rputes non crites . Cette exigence participe aussi de laffectio societatis, souvent
prsent comme une volont de collaborer intresse. Le sens du mot bnfice a
subi une double volution. De bienfait, son premier sens, il est devenu gain ralis
dans une opration ou une entreprise 37, et, lorsque Pothier crit qu il est de
lessence du contrat de socit que les parties se proposentde faire un gain ou un
profit 38, il exprime ainsi la ncessit, pour chacune des parties, davoir vocation
aux bnfices. Lide de gain sest ensuite dilue pour absorber celle dconomie, ce
que consacre larticle 1832 dans sa rdaction postrieure 1978. Le concept de
perte a subi la mme volution, celle-ci ayant toujours t considre comme le
contraire du bnfice.
Un autre lment caractrise le contrat de socit mme sil ne figure pas
expressment larticle 1832 : laffectio societatis, qui est lintention de sassocier. Il
sagit plus dun sentiment que dun concept juridique.
M. Viandier ne se satisfait plus des critres classiques que sont la pluralit
dassocis, la vocation aux bnfices, la contribution aux pertes et laffectio
societatis, pour dfinir lassoci alors que ces critres sont ceux du contrat de
socit39. Pour M. Viandier les nouveaux critres dterminants sont les apports et le
droit dintervention de lassoci dans la vie sociale.
35 Merle (P.) : op. cit. n293.36 Article 1832 du Code civil dans sa rdaction modifie par la loi n 78-9 du 4 janvier 1978.37 Dfinition courante de dictionnaire.38 Pothier : Trait du contrat de socit, n 12.39 Viandier (A.) : op. cit., n 153.
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M. Viandier relve certaines discordances entre la qualit dapporteur et celle
dassoci, notamment en cas dindivision40 et dusufruit41 ou de prt dactions42. Nous
aurons loccasion dexaminer plus prcisment ses griefs.
- Les droits politiques de lactionnaire
Une srie de droits extra-pcuniaires est attribue lactionnaire.
Un des droits fondamentaux de lactionnaire est celui de faire partie de la socit, et
de rester associ. Lactionnaire a le droit de participer aux assembles gnrales et
dy voter afin de prendre part aux dcisions collectives, cest ce qua rcemment
affirm la Cour de cassation dans larrt Chteau dYquem du 9 fvrier 199943 :
tout associ a le droit de participer aux dcisions collectives et de voter et les
statuts ne peuvent droger ces dispositions . Ce principe nest pas sans susciter
de difficults dans les situations o des personnes exercent des droits concurrents
sur des valeurs mobilires. La Cour de cassation distingue le droit de participer aux
assembles du droit de vote. En cas dusufruit, le nu-propritaire et lusufruitier sont
convoqus aux assembles mais seul lun dentre eux vote.
Lactionnaire bnficie dun droit linformation permanent quil exerce lors des
assembles gnrales. Cette information mane surtout du commissaire aux
comptes et attrait aux rsultats et aux comptes sociaux.
Lactionnaire a le droit de ngocier ses actions, support de droits pcuniaires.
- Les droits pcuniaires de lactionnaire
Ce sont le droit au dividende et le droit une part de lactif social. Le dividende est la
part de bnfices que la socit distribue chacun des actionnaires et dont le
montant est fix par lassemble gnrale ordinaire annuelle. Lactionnaire na pas le
droit dexiger que chaque anne un dividende lui soit vers mais simplement il ne
peut tre priv indment de son droit sur les bnfices et sur les rserves. Lors de
laugmentation du capital de la socit en numraire, les actionnaires disposent dun
40 Viandier : op. cit., n 19.41 Viandier : op. cit., n 20.42 Viandier : op. cit., n 24.
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droit prfrentiel de souscription aux actions nouvelles afin de rparer le prjudice
que lactionnaire subit du fait de cette augmentation de capital.
Ce sont la rpartition de ces droits que les parties cherchent amnager en
appliquant aux valeurs mobilires certaines techniques civilistes.
b) Le sort des prrogatives de lassoci lors damnagements conventionnels
Les prrogatives pcuniaires comme politiques de lactionnaire subissent quelques
amnagements quand sont appliques aux valeurs mobilires les techniques
tudies.
- le sort des prrogatives pcuniaires
Les prrogatives pcuniaires de lassoci peuvent faire lobjet damnagements par
linstauration dune convention de croupier qui faisait lobjet des dispositions de
lancien article 1861 du Code civil : Chaque associ peut, sans le consentement de
ses coassocis, sassocier une tierce personne relativement la part quil a dans la
socit ; il ne peut pas, sans ce consentement, lassocier la socit, lors mme
quil en aurait ladministration . Si cette disposition a t abroge en 1978, il ne fait
pas de doute que la convention de croupier est valable, ne serait ce quen raison de
lautonomie de la volont. La convention de croupier permet donc un associ de
partager avec un tiers les bnfices et les pertes qui rsultent de sa participation la
socit. Pour cette opration, lassoci na pas requrir le consentement des autres
associs comme ce pourrait tre le cas pour une cession de titres. La convention de
croupier revt le plus souvent la forme dune socit en participation, elle na aucun
effet lgard de la socit qui est tiers la convention. La participation de lassoci
est partage avec le croupier mais lactionnaire demeure toujours lassoci, le
croupier, qui monte en croupe derrire lassoci 44, na aucune autre prrogative
attache la qualit dactionnaire et na donc aucun droit linformation ni
dimmixtion dans les affaires sociales. A linverse, il nest tenu lgard de la socit
aucune des obligations qui incombent normalement aux associs.
43 Cass. Com., 9 fvr. 1999, SCA du Chteau dYquem c/ de Chizille et a : J.C.P., d. E., 1999, p. 724, noteGuyon (Y.) ; Bull. Joly 1999, p. 566, n 122, obs. Daigre (J.-J.) ; Rev. Socits 1999, p. 81, note Le Cannu (P.) ;Dr. Socits 1999, n 67, note Bonneau (Th.).44 Merle (Ph.) : op. cit., n 46, p. 69.
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La convention de croupier ne permet pas tous les amnagements et ne doit pas
conduire contourner les rgles statutaires gouvernant la vie sociale et concernant
lentre de nouveaux actionnaires dans la socit. Par exemple, il a t jug quune
convention de croupier portant sur la majorit des parts dune S.N.C. peut, en raison
des droits confrs au croupier, aboutir une cession dguise de parts, laquelle
serait nulle en raison de labsence dautorisation des autres coassocis45.
Ce type de convention est donc valable dans la limite o il ne permet pas de
contourner les rgles lgales ou statutaires de la socit. Elle est une illustration de
la dissociation quil est possible doprer entre le titre qui demeure lassoci et les
prrogatives pcuniaires cdes au croupier.
Les amnagements des prrogatives des actionnaires sont marquants en cas
dusufruit ou de coproprit dactions, ce sont alors les droits politiques de lassoci
qui font lobjet de spcificits que nous allons examiner brivement.
- Le sort des prrogatives politiques de lassoci
Les prrogatives de lassoci les plus importantes en la matire sont le droit
linformation et le droit dexercer des actions sociales.
Larticle L. 225-117 du Code de commerce46 et larticle 1855 du Code civil47 prvoient
que tous les actionnaires ont droit dobtenir communication des documents sociaux
et de poser des questions sur la gestion sociale. Ce droit appartient chacun des
copropritaires dactions indivises, au nu-propritaire et lusufruitier dactions48.
Le droit dexercer les actions sociales49, cest dire dexercer des actions en justice
contre les dirigeants sociaux, appartient tout associ : aux indivisaires et au nu-
propritaire. Lusufruitier, priv de cette qualit, peut en revanche exercer laction
individuelle rendant la rparation du prjudice personnel quil pourrait tirer de
45 CA Paris, 19 fvrier 1979 et Trib. de com. Paris, 12 mars 1979, Rev. Socits, 1980, p. 284, note Randoux(D.).46 Article L. 225-117 du Code de commerce, codifiant larticle L. 170 de la loi de 1966 : Tout actionnaire a ledroit, toute poque, dobtenir communication des documents viss larticle L. 225-115 et concernant les troisderniers exercices, ainsi que des procs-verbaux et feuilles de prsences des assembles tenues au cours de cestrois derniers exercices .47 Art. 1855 du code civil : Les associs ont le droit dobtenir, au moins une fois par an, communication deslivres et des documents sociaux, et de poser par crit des questions sur la gestion sociale auxquelles il devra trerpondu par crit dans le dlai de un mois .48 Lecene (M.) : Les actions et parts dune socit commerciale qui appartiennent plusieurs personnes,Thse Bordeaux I, 1992, n 433, p. 397.49 Lecene (M.) : op. cit., n494-509, pp. 457-472.
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laction ou de lomission dun dirigeant. Lusufruitier et les indivisaires peuvent agir
pour le prjudice subi par la socit du fait des dirigeants, sils remplissent les
conditions requises pour exercer ces actions, savoir le pourcentage de titres
minimum exig.
2. Lamnagement de la participation la vie sociale
Deux techniques civilistes sont principalement utilises pour lamnagement
conventionnel des valeurs mobilires dans le cadre de la participation la vie
sociale : la coproprit dactions et lusufruit. Par lapplication de ces conventions,
plusieurs personnes ont des droits concurrents sur les mmes titres, il est alors
dlicat de dterminer avec prcision laquelle dentre elles a accs aux assembles
gnrales et laquelle peut y exercer son droit de vote. Le mandat est utilis pour
lexercice du droit de vote dactionnaires souhaitant le dlguer.
a) Les amnagements conventionnels organisant laccs aux assembles gnrales
La coproprit, lusufruit et le gage de valeurs mobilires ont des incidences sur le
droit daccs aux assembles gnrales. La dtermination de la personne pouvant
assister aux assembles suppose la dtermination pralable de celle ayant la qualit
dassoci.
- La coproprit dactions
La coproprit dactions est une indivision organise par deux rgimes : le rgime
lgal de lindivision de droit commun faisant lobjet des dispositions des articles 815
et suivants du Code civil, et le rgime de lindivision prvu aux dispositions des
articles 1973-1 et suivants du mme code50. La coproprit dactions peut avoir soit
une origine involontaire et subie, cest le cas notamment quand des hritiers
recueillent des actions dans une succession, soit une origine volontaire et avoir fait
lobjet dune convention, cest par exemple lhypothse dun club dinvestissement. Il
est possible aux indivisaires dont la coproprit nest pas voulue mais subie
50 Storck (M.) : Les groupements de copropritaires dactions, Rev. Socits 1983, p. 293.
-
dorganiser son fonctionnement par une convention en dfinissant avec une grande
souplesse le rgime qui leur sera applicable.
Dans les socits anonymes, les actionnaires nont quun poids proportionnel la
part dactif quils dtiennent. Ils peuvent dsirer se regrouper avec dautres pour
poursuivre trois objectifs. Ils peuvent souhaiter se rassembler pour exercer en
commun leurs prrogatives et constituer ainsi un pouvoir stable au sein des
assembles gnrales. Ils peuvent aussi dsirer se regrouper afin de grer en
commun leurs droits sociaux en faisant appel un professionnel qui tirera une
rentabilit optimum de leur participation en capital. Les actionnaires peuvent enfin
chercher donner la socit un caractre ferm en restreignant les possibilits de
ngociation des actions.
Les actionnaires pourraient opter pour un autre mode de regroupement que la
coproprit. La constitution dune association, dune socit cran revtant la forme
dune socit anonyme ou la constitution dun syndicat pourrait aussi donner leur
groupement le caractre stable et organis quils dsirent. Cependant ces types de
groupements se heurtent trois principes fondamentaux du droit des socits :
lincessibilit du droit de vote qui doit tre exerc individuellement, la libre cessibilit
des actions que contrarie lengagement des actionnaires ne pas cder leurs
actions afin dassurer la stabilit du groupement, et lintrt social que doivent suivre
les actionnaires, intrt social qui risque de ne pas saccorder avec celui du
groupement.
Pour ces raisons, la coproprit, qui au contraire de ces regroupements na pas la
personnalit morale51, a la faveur des actionnaires tendant se runir. Celle-ci leur
permet de donner au groupement un caractre ferm, permet lexercice en commun
de leurs prrogatives dactionnaires. La coproprit dactions ne rencontre pas les
problmes de licit des autres types de regroupement. Elle est aussi un moyen
daction rapide, discret et secret, dune grande simplicit et dun faible cot.
Lorganisation conventionnelle de lindivision permet aux copropritaires de prvoir
lavance le rgime des relations quils auront entre eux ou quil existera entre eux et
la socit anonyme.
51 Elle doit cependant remplir de nombreuses conditions de validit pour ne pas courir le risque dunerequalification en socit en participation ou socit cre de fait : Storck (M.) : op. cit. n 11 et s.
-
Lindivision dactions pose la dlicate question de la personne pouvant accder aux
assembles, ce qui revient sinterroger sur qui dtient la qualit dactionnaire,
puisque larticle L. 225-113 du nouveau Code de commerce (ancien article 166 de la
loi de 1966) suppose la qualit dactionnaire pour accder aux assembles
gnrales. La question a t tranche par la jurisprudence en 1980, dans une
dcision rendue par la premire chambre civile de la Cour de cassation le 6 fvrier
198052. Lintrt pratique de la dtermination de la personne ayant la qualit
dactionnaire apparat notamment pour le dcompte du nombre minimum de sept
actionnaires53, dans lapplication dune clause dagrment aux cessions dactions
consenties des copropritaires dactions, dans la dsignation dun indivisaire
comme administrateur de la socit anonyme54
Deux possibilits avaient t proposes par la doctrine55. La premire solution
consistait dnier aux indivisaires la qualit dassoci au nom du principe
dindivisibilit des droits sociaux, les indivisaires avant le partage nayant de droits
que sur une quote-part dtermine et une vocation devenir associ56. Cette
solution ntait pas satisfaisante, elle aboutissait reconnatre la qualit dassoci
lindivision qui na pas la personnalit juridique. Une seconde solution avait t
propose par MM. Mercadal et Janin, qui prconisaient de reconnatre la qualit
dassoci tous les indivisaires. M. Viandier sest ensuite ralli cette opinion de
bon sens, opinion cependant critique par une partie non ngligeable de la doctrine
qui estimait quelle heurtait le principe dindivisibilit des droits sociaux.
52 Cass. 1re Civ., 6 fvr. 1980 : Rev. Soc., 1980, p. 521, note Viandier (A.) ; R.T.D. Com., 1980, p. 353, obs.Alfandari et Jeantin (M.) ; Rev. Soc., 1981, p. 346, note J.G. ; D., 1981, Inf. Rap., p. 36, obs. Bousquet.53 Article L. 225-1 du nouveau Code de commerce (ancien article 73).54 Nous le verrons en dtail, larticle L. 225-25 du nouveau Code de commerce, ancien article 95 de la loi de1966, impose dtre actionnaire pour tre administrateur.55 Lecene (M.) : Les parts et actions dune socit commerciale qui appartiennent plusieurs personnes, ThseBordeaux I, 1992, n 355 et s.56 Lecene (M.) : op. cit. n 356 qui cite Marin (X.) : Rep. Soc., v. Actions, n 38 et Champaud (M.) : R.T.D.Com., 1969, p. 509, n 8 ;Flour (Y.) : La qualit dactionnaire et lindivision, Rev. Soc., 1999, p. 569 qui cite Escarra et Rault : Lessocits commerciales, Sirey, 1951, n 588 ; Hamel et Lagarde, Trait de droit commercial, D. 1954, n 588 ;Ripert et Roblot : Trait lmentaire de droit commercial, t. 1, n 1152.
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Cest fort logiquement que la jurisprudence, attache au principe dindivisibilit des
droits sociaux, sest dans un premier temps refuse reconnatre aux indivisaires la
qualit dassoci57.
La dcision rendue par la premire chambre civile de la Cour de cassation le 6
fvrier 1980 marque un revirement de jurisprudence, revirement jug partiel58. Cet
arrt, qui dissocie le titre dassoci dune socit de lexercice des prrogatives qui y
sont attaches59, dcide que chaque indivisaire doit tre investi de la qualit
dassoci, ce qui est une nouveaut en jurisprudence, mais maintient les anciennes
restrictions relatives lexercice des droits attachs cette qualit.
En lespce, une socit civile immobilire avait t cre par quatre frres laquelle
ils ont fait apport dun immeuble indivis entre eux. Une clause statutaire prvoyait
quen cas de dcs de lun des frres, la socit se continuerait entre le ou les
survivants et les hritiers des associs dcds. Les quatre frres dcdent. Les
parts sociales se trouvent en indivision entre les hritiers des associs fondateurs.
Certains dentre eux demandent la dissolution de la socit en justice. Les juges du
fond rejettent leur demande au motif que la succession du dfunt ntait ni liquide,
ni partage, que ses droits dans la socit civile immobilire taient reprsents
par un administrateur judiciairement commis et que (ses hritiers) ntaient donc pas
membres de la socit, leurs droits indivis dans la succession ne leur confrant pas
la qualit de coassocis . Un pourvoi est form contre larrt de cour dappel. La
Cour de cassation rejette le pourvoi en dcidant que si contrairement ce qua
retenu larrt attaqu, les hritiers dun associ dcd ont lorsquil a t stipul que
la socit continuerait entre eux, la qualit dassoci, il nen rsulte pas pour autant
que tant que dure lindivision entre ces hritiers chacun deux puisse exercer
librement les droits attachs cette qualit ; et attendu que la Cour dappel nonce
bon droit que les cohritiers, avant le partage, ne peuvent disposer de tout ou partie
des choses communes, les liquider ou en changer la destination sans laccord de
tous les intresss et que laction tendant la dissolution de la socit civile
immobilire dpasse le domaine des simples actes dadministration .
57 Cass. Com., 9 oct. 1972 : D., 1973, p. 273, note Burste (J.-J.), cit par Lecene (M.) : op. cit., n 359.58 Lecene (M.) : op. cit., n 361.59 Monsallier (M.-C.) : Lamnagement contractuel du fonctionnement de la SA, L.G.D.J., 1998, n 325 et s.,spc. N 331.
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Cette solution concilie le droit de lindivision et les exigences du droit des socits,
respectant ainsi lindivisibilit des droits sociaux. Par cet arrt la qualit dassoci ou
dactionnaire est reconnue chacun des indivisaires. Cependant les copropritaires
dactions nen ont pas toutes les prrogatives, ils sont en quelque sorte des
actionnaires diminus 60. Larrt de 1980 ne reconnat pas, par exemple,
lindivisaire la possibilit de demander la dissolution de la socit. Les actes
dadministration et de disposition ncessitent une action commune, ils ne pourront
tre exercs que par le mandataire unique de lindivision ; les actes conservatoires
pourront ltre de chacun des indivisaires. Individuellement, ils ont un droit
linformation, ont la possibilit dexercer seul un contrle de la gestion sociale en
effectuant des actes conservatoires.
Il convient de distinguer le droit daccs des indivisaires aux assembles gnrales
et leur droit de vote. En vertu de larticle 125 alina 2 du dcret du 23 mars 1967,
chacun des copropritaires dactions indivises doit tre convoqu aux assembles
gnrales et peut y assister. Le droit de vote nappartient pas, lui, individuellement
chaque indivisaire.
La mme question relative laccs aux assembles gnrales se pose en cas
dusufruit dactions.
- Lusufruit dactions
Au contraire de lindivision rsultant dune coproprit dactions, lusufruitier et le nu-
propritaire ont des droits ingaux et indpendants. Longtemps nglige par la
doctrine la question de savoir qui a la qualit dassoci en cas dusufruit dactions
nest apparue en France quen 1970 avec la publication du Mmento des Editions
Francis Lefebvre rdig par messieurs Mercadal et Janin et consacr aux socits
commerciales. La qualit dassoci na pas fait lobjet de srieuses contestations et il
est admis en doctrine61 comme en jurisprudence quelle est attribue au nu-
propritaire des actions.
60 Expression de Madame Monsallier (M.-C.) : op. cit., n 332.61 A titre dexemples : Monsallier (M.-C.) : op. cit., spc. n341 et 344 ; Merle (Ph.) : op. cit., n 27 et 278 ;Mercadal (B.) et Janin (Ph.) : Socits commerciales, Mmento Francis Lefebvre, n 117 ; Viandier (A.) : Lanotion dassoci, L.G.D.J, 1978, n 478 et s.
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Si nous pouvons admettre que lusufruitier a laffectio societatis et quil participe aux
bnfices et aux pertes, nous ne pouvons nier quil na pas la qualit dapporteur, or
il est gnralement admis que cest cette qualit qui permet de dterminer qui est
lassoci. Seul le nu-propritaire peut tre considr comme apporteur car il est
rput seul propritaire des droits sociaux. A lappui de ces arguments, un argument
textuel tir de larticle 1844-5 alina 2 du Code civil. Ce texte est relatif la runion
en une seule main des parts sociales dune socit et dispose que lappartenance
de lusufruit de toutes les parts sociales la mme personne est sans consquence
sur lexistence de la socit . Pour les auteurs favorables ce courant, si les parts
ou actions devaient se trouver runies dans les mains dun seul nu-propritaire, la
socit devrait alors tre considre comme nayant plus quun seul associ, peu
importe alors le nombre dusufruitier62.
Les dcisions reconnaissant au nu-propritaire la qualit dassoci sont plus ou
moins explicites. Un arrt de la troisime chambre civile de la Cour de cassation en
date du 5 juin 197363 avait dcid quen cas de reprise par une socit dun
immeuble donn bail rural, la loi exige seulement que lexploitant soit membre de
cette socit ; la cour dappel a retenu bon droit quun nu-propritaire avait cette
qualit . De la mme manire un arrt de la cour dappel de Paris en date du 22
janvier 197164 avait pu dcider que peu importe que lintress nait pas lusufruit des
parts, car en tant que nu-propritaire il nen reste pas moins le vritable associ et le
seul propritaire des parts.
Cependant certains auteurs comme Monsieur Cozian65, Monsieur Derrup66 ou
Madame Regnaut-Moutier67 plaident en faveur de la reconnaissance de la qualit
dassoci lusufruitier. Ces auteurs retiennent que dans certains cas lusufruitier
peut tre apporteur lui-mme, ce qui ne justifie pas forcment que la qualit
62 Lamy Socits commerciales, n 220, cit par Lecene (M.) : op. cit. n 360.63 Cass. 3me Civ., 5 juin 1973, Bull. Civ., 1973, III, n 403, p. 291, cit par Merle (Ph.) : op. cit., n 278.64 Paris, 22 janvier 1971 : D., 1971, p. 571, note Guyon (Y) ; Rev. Soc., 1971, p. 413, note D.B.T., cit parLecene (M.) : op. cit., n 374.65 Cozian (M.) : Du nu-propritaire ou de lusufruitier, qui a la qualit dassoci ?, J.C.P., d. E, n 28-29, n374, p. 339.66 Derrup (J.) : Un associ mconnu : lusufruitier de parts ou actions, Les Petites Affiches, 13 juillet 1994, n83, p. 15 ; Derrup (J.) : De lineptie de refuser lusufruitier la qualit dassoci, Defrnois, 1997, art. 36514, p.290.67 Regnaut-Moutier (C.) : Vers la reconnaissance de la qualit dassoci lusufruitier de droits sociaux ?, Bull.Joly, 1994, 320, p. 1155.
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dassoci lui soit reconnue mais qui justifie quon remette en question le seul critre
des apports. Dans dautres cas il peut arriver que lusufruitier soir lui-mme investi
de certaines prrogatives normalement dvolues au nu-propritaire. Lusufruitier a
ainsi droit aux dividendes, il peut se substituer au nu-propritaire en cas de
dfaillance de celui-ci dans lexercice du droit prfrentiel de souscription.
Lusufruitier peut demander communication des documents sociaux en vertu de
larticle L. 225-18 du nouveau Code de commerce reprenant lancien article 171 de la
loi de 1966, enfin les articles L. 225-110 du Code de commerce et larticle 1844
alina 3 du Code civil organisent son droit de vote.
La qualit dassoci appartient donc au nu-propritaire ce qui conditionne laccs aux
assembles gnrales. Lalina 1er de larticle 1844 est impratif comme le laisse
supposer lalina 4 qui nautorise de droger quaux alinas 2 et 3 de larticle. Il
apparat que seuls la rpartition du droit de vote entre le nu-propritaire et lusufruitier
et le droit daccs de lassoci aux assembles peuvent faire lobjet damnagements
contractuels. Il y a bien une distinction entre le droit de vote et laccs aux
assembles. La Cour de cassation sest prononce sur la porte de larticle 1844 du
Code civil loccasion de son arrt De Gaste du 4 janvier 199468. Dans lespce
soumise aux juges, les usufruitiers et les nus-propritaires de parts dun groupement
forestier sopposaient au sujet dune clause statutaire. Deux poux avaient cr un
groupement forestier et avaient donn la nue-proprit des droits sociaux leurs
enfants, tout en conservant lusufruit. Afin dorganiser le fonctionnement des
assembles, une clause statutaire prvoyait la reprsentation du nu-propritaire
par lusufruitier qui avait seul le droit de participation et de vote toutes les
assembles gnrales, mme extraordinaires ou modificatives des statuts, quelle
que soit la nature de la dcision prendre . Les enfants, nus-propritaires,
contestrent la validit de cette clause en sappuyant sur larticle 1844 alina 1er du
Code civil. Les premiers juges accdrent leur demande, la cour dappel rendit un
arrt infirmatif contre lequel un pourvoi en cassation fut form. La Cour de cassation
casse larrt de cour dappel sur le visa de larticle 1844 du Code civil aux motifs
68 Cass. Com., 4 janvier 1994 : Bull. civ., IV., n 10 ; Dr. Socits, mars 1994, n 45, note Bonneau (Th.) ;J.C.P., 1994, d. E., Conseils fidal, p. 131, obs. Guengant (A.) ; Defrnois 1994, art. 35786, p. 556, obs. LeCannu (P.) ; Rev. Soc., 1994, p. 278, note Lecene-Marenaud (M.) ; Daigre (J.-J.) : Un arrt de principe : le nu-propritaire de droits sociaux ne peut pas tre totalement priv de son droit de vote (A propos de larrt de Cass.Com., 4 janvier 1994, Bull. Joly, 62, p. 249.
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qu en statuant ainsi, alors que si selon larticle 1844 alina 4 du Code civil, il peut
tre drog lalina 3 du mme article qui est relatif au droit de vote, et quil tait
donc possible aux statuts litigieux de prvoir une drogation sur ce point, aucune
drogation nest prvue concernant le droit des associs et donc du nu-propritaire
de participer aux dcisions collectives tel quil est prvu lalina premier dudit
article, la cour dappel a viol le texte susvis .
Deux interprtations de cet arrt sont possibles en fonction de linterprtation donne
de lexpression participation aux dcisions collectives . Il est permis de penser
que la solution dicte par cet arrt signifie que les statuts peuvent attribuer
lintgralit des droits de vote lusufruitier mais ne sauraient priver le nu-propritaire
du droit de participer aux assembles, voire dy exprimer ses ides. Il est aussi
permis den dduire que la Cour de cassation a entendu rserver au nu-propritaire
son droit de voter aux assembles extraordinaires. Si larrt rendu dans laffaire de
Gaste ne concernait pas les socits par actions il est permis de penser que cette
solution peut leur tre tendue. Selon certains, la prudence commanderait de
convoquer automatiquement le nu-propritaire aux assembles mme sil ny exerce
pas de droit de vote. Pour le comit juridique de lANSA69, une telle interprtation va
au-del des textes. Larticle 125 du dcret du 23 mars 1967 relatif la convocation
des actionnaires nominatifs prcise que lorsque les actions sont greves dusufruit,
le titulaire du droit de vote est convoqu et le comit juridique en dduit que seul
le titulaire du droit de vote doit tre convoqu. Nous ne nous rangeons pas cette
opinion et estimons que les droits du nu-propritaire doivent faire lobjet dune
protection particulire en toutes circonstances.
Ainsi en cas dusufruit dactions, laccs aux assembles, ordinaires ou
extraordinaires, ne peut jamais tre refus au nu-propritaire, il nen est pas de
mme de lusufruitier qui na pas la qualit dactionnaire.
La remise dactions en gage prsente quelques particularits.
- La remise dactions en gage
69 Comit juridique de lANSA avis du 1er juin 1994.
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Le gage portant sur des actions est le contrat par lequel un dbiteur remet son
crancier la possession dactions pour garantir le paiement dune dette. Par le gage
seule la possession des actions est transmise au crancier et non la proprit. Or
cest la proprit des actions, la qualit dactionnaire, qui conditionne laccs dun
individu lassemble dactionnaires. Cest la solution quil est permis de dduire
implicitement de larticle L. 225-110 du Code de commerce dispose que Le droit de
vote est exerc par le propritaire des titres remise en gage . Dans une opration
de gage, le dbiteur ayant transfr la possession de ses actions en est toujours
propritaire, il peut donc seul participer aux assembles d'actionnaires.
Nous pouvons maintenant dterminer quelles personnes ont accs aux assembles
dans les diffrentes hypothses envisageables, mais qui exerce rellement le droit
de vote au sein de ces assembles ?
b) Les amnagements conventionnels de lattribution du droit de vote
En prsence dune coproprit dactions, tous les indivisaires ont la qualit
dactionnaire, ils ne peuvent en revanche pas tous exercer leur droit de vote, qui
dans cette situation peut faire lobjet dun amnagement conventionnel. Dans une
situation dusufruit dactions, laccs aux assembles peut tre amnag dans la
limite o le nu-propritaire ne peut se le voir interdire. Il est donc possible que nu-
propritaire et usufruitier soient prsents la mme assemble ou que lun
seulement y soit. Ce type de situation entrane des difficults quant lattribution du
droit de vote.
- La coproprit dactions
Les copropritaires dactions ne peuvent pas tous exercer leur droit de vote dans les
assembles, cest ainsi que lon justifie la rgle dicte par larticle L. 225-110 alina
2 du Code de commerce, codifiant larticle 163 de la loi de 1966, qui dispose que
Les copropritaires dactions indivises sont reprsents aux assembles gnrales
par lun deux ou par un mandataire unique. En cas de dsaccord, le mandataire est
dsign en justice la demande du copropritaire le plus diligent . Cette rgle est
juge imprative : lalina 4 de cet article prvoit la possibilit de droger lalina
premier, contrario aucune drogation lalina 2 nest possible.
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Les dispositions de la loi envisagent deux possibilits : soit les indivisaires
choisissent un reprsentant parmi eux, soit ils le choisissent parmi les autres
actionnaires ou dsignent une personne trangre la socit. Le choix du
reprsentant mandataire des indivisaires parmi eux ne pose pas de difficults. Par
contre on peut penser que la seconde hypothse entre en contrarit avec larticle L.
225-106 du Code de commerce70 qui organise ainsi la reprsentation de
lactionnaire : Un actionnaire peut se faire reprsenter par un autre actionnaire ou
par son conjoint . Cette disposition est dordre public tel quil ressort de lalina 5
dudit article71. Il serait excessif de retenir que les dispositions de larticle L. 225-106
et L. 225-110 sont incompatibles. En effet les deux formes de reprsentation en
question ne sont pas de mme nature. Ainsi dans lhypothse de la dsignation dun
mandataire en cas dindivision dactions, la reprsentation mise en place ne doit
pas tre apprhende comme un mandat ordinaire, mais comme une manire de
pallier labsence de personnalit morale de lindivision. Il en rsulte que le
reprsentant des copropritaires dactions peut tre un actionnaire ou une personne
trangre la socit 72.
Il convient dexaminer quels seront les pouvoirs du mandataire ainsi dsign en
fonction quil aura reu une mission de reprsentation gnrale et durable ou quil
aura reu une mission ponctuelle limite la runion dune assemble. Dans le
premier cas, le mandataire de lindivision sera considr comme un organe de
dcision, ayant un rle actif, dans le second cas, il sera plus un organe dexcution
au mandat plutt impratif, remplissant ainsi une mission passive.
Le mandataire peut exercer son droit de vote de manire active, il sera considr
comme un organe de dcision. Les actionnaires peuvent nommer un grant de
lindivision qui peut ne pas tre choisi parmi eux ni parmi les actionnaires. Ce grant
fera seul usage du droit de vote des indivisaires pendant non pas une seule
assemble mais pour toute la dure de la convention dindivision. Il aura, en effet,
pendant toute cette dure les pouvoirs que la loi accorde aux poux sur lindivision
communautaire. Le reprsentant des indivisaires pourra donc accomplir, sans
70 Article 161 de la loi de 1966.71 Il sagissait de lalina 3 de larticle 161.72 Monsallier (M.-C.) : op. cit., n 390, p. 159.
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autorisation particulire, les actes dadministration et de disposition titre onreux73,
or le droit de vote na jamais t considr comme un acte de disposition titre
gratuit. Le grant de lindivision doit dfendre les intrts de lindivision mme si
ceux-ci sont en contradiction avec lintrt social.
Le mandataire peut linverse tre considr comme un organe dexcution, nayant
pas dans ce cas de pouvoirs gnraux et durables. Cette mission est plus passive.
Dans cette configuration, le vote se dcompose en deux tapes. Dans un premier
temps, les actionnaires membres de lindivision se regroupent pour discuter et
adopter la majorit ou lunanimit une dcision qui sera excute dans un
second temps par leur reprsentant. Le reprsentant des actionnaires sigera
lassemble gnrale o il ne fera que transmettre le vote des actionnaires
copropritaires.
Il convient dexaminer la question plus dlicate de lattribution du droit de vote en cas
dusufruit dactions.
- Lusufruit dactions
La difficult en matire dusufruit est de savoir comment, entre lusufruitier et le nu-
propritaire, se fait la rpartition du droit de vote. La clef de rpartition du vote entre
les deux intervenants fait lobjet de dispositions textuelles. Le droit commun prvoit
larticle 1844 du Code civil que si une part est greve dusufruit, le droit de vote
appartient au nu-propritaire, sauf pour les dcisions concernant laffectation des
bnfices, o il est rserv lusufruitier . Larticle L. 225-113 du Code de
commerce codifiant lancien article 166 de la loi de 196674, issu de la loi du 5 janvier
1988 dispose en son alina 1er que Le droit de vote attach laction appartient
lusufruitier dans les assembles gnrales ordinaires et au nu-propritaire dans les
assembles gnrales extraordinaires . Lalina 4 de ce texte, ajout par la rforme
de 1988 prvoit la possibilit pour les statuts de droger ce premier alina. Ainsi le
lgislateur a supprim la rigidit qui caractrisait jusqualors larticle 166 de la loi en
73 Article 1873-6 civ. alina 2 : Le grant administre et exerce, cet effet, les pouvoirs attribus chaquepoux sur les biens communs . Larticle 1421 civ. dispose que : Chacun des poux a le pouvoir dadministrerseul les biens communs et den disposer, sauf rpondre des fautes quil aurait commises dans sa gestion. 74 Pour un commentaire de ce texte : Koering-Joulin (R.) et Schmidt (D.) : Larticle 163, alina 1, de la loi n 66-537 du 24 juillet 1966 sur les socits commerciales, Mlanges Bastian, p. 135.
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laissant une possibilit damnager la rpartition du vote par une stipulation
statutaire. Les parties pourront donc convenir ensemble dun amnagement du vote
mais la libert contractuelle nest pas totale. Larticle L. 225-110 semble sattacher
un critre organique, le droit de vote est attribu en fonction de lassemble qui se
runit alors que larticle 1844 du Code civil privilgie un critre substantiel : la teneur
des dcisions adoptes en distinguant celles qui ont trait laffectation des bnfices
et les autres.
Les intrts du nu-propritaire et de lusufruitier sont souvent contradictoires. Par
exemple, le nu-propritaire cherche valoriser la socit, la rendre rentable,
favoriser son dveloppement en mettant par exemple les bnfices en rserve ou en
les investissant. Lusufruitier cherchera de son ct rentabiliser au maximum le
dmembrement de proprit son profit en augmentant le montant des dividendes
au prjudice de la mise en rserve.
La rpartition de larticle L. 225-110 ne respecte pas ce quauraient command les
rgles classiques de lindivision attribuant comptence lusufruitier pour ce qui
ressortait de lusus et du fructus et au nu-propritaire pour ce qui ressortait de