axa investment research north africa (august 2012)

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research&i nvest ment stra t egy R AXA Investment Managers - Research & Investment Strategy AXA Investment Managers – 22/08/2012 22 août 2012 WEEKLY COMMENT Du printemps à la renaissance arabe Points clés par Manolis DAVRDAKIS Les économies du MOAN en sont capables ! 0.00 0.05 0.10 0.15 0.20 0.25 0.30 Egypte Iran Jordanie Irak Maroc* Yémen Algérie* Tunisie* Syrie* % 0 2 4 6 8 10 12 14 16 18 20 22 Années Vitesse de convergence (coefficient beta) [G] Demi-période de convergence [D] Davantage de réformes structurelles sont nécessaires aux pays aspirant à un PIB par habitant égal à celui de la Turquie Beta-convergence entre les économies du MOAN et la Turquie Source : PennWorld Tables et Recherche AXA IM ! Le Printemps Arabe a entraîné une vague de violents soulèvements au Moyen-Orient et en Afrique du Nord (MOAN), le modèle économique dominant étant incapable d’absorber la croissance de la force de travail, avec pour conséquence une explosion du chômage des jeunes. ! ! ace et u PIB ! s ak) s (Maroc, Yémen, Algérie, Tunisie et Syrie). En Egypte et en Tunisie, pays initiateurs du soulèvement, le PIB a déjà regagné son niveau d’avant crise, revenant d’un niveau très bas. Cependant, enclencher une croissance durable demande un modèle économique plus effic inclusif, à même de réduire amplement et durablement le chômage. Les expériences d’autres pays en transition montrent qu’un « miracle de l’emploi », relevant le niveau d de façon permanente de 2%, est possible. Nous montrons que plusieurs économies du MOAN peuvent faire converger leur PIB par habitant ver celui de la Turquie, à condition d’engager de profondes réformes structurelles. Dans cette voie, certains pays (Egypte, Iran, Jordanie et Ir devront faire davantage d’efforts que d’autre

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L'économie marocaine est a 3 ans de retard sur la Turquie, selon une recherche par l'agence Axa (Août 2012)

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re s e arch&inve stmentstrategyR

AXA Investment Managers - Research & Investment Strategy

AXA Investment Managers – 22/08/2012

22 août 2012 WEEKLY COMMENT

Du printemps à la renaissance arabe Points clés

parManolis DAVRDAKIS

Les économies du MOAN en sont capables !

0.00

0.05

0.10

0.15

0.20

0.25

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Egyp

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Années

Vitesse de convergence(coefficient beta) [G]

Demi-période deconvergence [D]

Davantage de réformes structurelles sont nécessaires aux pays aspirant à un PIB par habitant égal à celui de la Turquie

Beta-convergence entre les économies du MOAN et la Turquie

Source : PennWorld Tables et Recherche AXA IM

! Le Printemps Arabe a entraîné une vague de violents soulèvements au Moyen-Orient et en Afrique du Nord (MOAN), le modèle économique dominant étant incapable d’absorber la croissance de la force de travail, avec pour conséquence une explosion du chômage des jeunes.

!

! ace et

u PIB

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ak) s

(Maroc, Yémen, Algérie, Tunisie et Syrie).

En Egypte et en Tunisie, pays initiateurs du soulèvement, le PIB a déjà regagné son niveau d’avant crise, revenant d’un niveau très bas.

Cependant, enclencher une croissance durable demande un modèle économique plus efficinclusif, à même de réduire amplement et durablement le chômage. Les expériences d’autres pays en transition montrent qu’un « miracle de l’emploi », relevant le niveau dde façon permanente de 2%, est possible.

Nous montrons que plusieurs économies du MOANpeuvent faire converger leur PIB par habitant vercelui de la Turquie, à condition d’engager de profondes réformes structurelles. Dans cette voie, certains pays (Egypte, Iran, Jordanie et Irdevront faire davantage d’efforts que d’autre

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EssentialsInvestment Research & Investment Strategy – Weekly comment – Manolis DAVRADAKIS

Un printemps arabe en pleine floraison Depuis décembre 2010, le monde arabe a vécu une vague de violentes manifestations et protestations, annonciatrice d’une nouvelle ère pour la région, connu sous le nom de printemps arabe. Ces soulèvements ont entraîné la chute de nombreux régimes autoritaires à l’issue d’une guerre civile (Lybie) ou de violentes émeutes prolongées (Tunisie, Yémen et Egypte). Les perturbations consécutives de la production et l’effondrement de l’industrie touristique ont fait nettement baisser le PIB réel en 2011, entre 61% pour la Lybie et 1% pour l’Egypte. La corruption gouvernementale, l’absence de liberté d’expression et les brutalités policières ont souvent été citées comme causes de l’insurrection. Toutefois, le printemps arabe a aussi des raisons économiques, que nous documentons dans cette note.

Les fondements économiques : de la dépendance aux hydrocarbures à l’assistance internationale…

Figure 1 La région MOAN, deuxième bénéficiaire de l’aide extérieure par habitant après l’Afrique sub-saharienne Aide extérieure nette par habitant, 2010

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ExtrêmeOrient

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en US$ courant

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Source : OCDE – Répartition géographique des ressources financières allouées aux pays en développement 2012 et Recherche AXA IM

Les économies du MOAN souffrent de trois maux : dépendance à l’exportation de matières premières, aux transferts d’argent de l’étranger et à l’aide internationale, et une administration omnipotente qui étouffe l’esprit d’entreprise. La Banque mondiale a calculé que les pays du MOAN reçoivent près de 10% du total mondial des fonds envoyés par les travailleurs migrants, sur la période 2000-2005. En revanche, ils ne reçoivent que 1% des investissements directs étrangers. En outre, la

région MOAN bénéficie du second plus fort taux d’aide extérieure par habitant par rapport aux autres économies mondiales (Figure 1). Ces simples faits sont à la fois symptômes et causes d’anémie économique.

En effet, les économies financées par ce type de revenus ne sont guère incitées à investir dans une croissance robuste et soutenue, car les flux de capitaux étrangers sont pratiquement garantis, tant que ces transferts sont ininterrompus. En résulte une dépendance politique accrue envers les pays donateurs et une forte sensibilité au cycle mondial, via les matières premières.

… un commerce intra-régional fragmenté… De plus, les échanges régionaux sont trop faibles pour alimenter la croissance, en diversifiant les exportations. L’absence d’initiative privée et les rivalités politiques entre pays arabes ont réduit le commerce intra-régional à la portion congrue, un comble pour une région réputée pour les talents commerciaux de ses habitants, et qui occupe une position stratégique au carrefour de l’Orient et de l’Occident. Notons qu’aucun pays du MOAN n’est enclavé et que tous ont donc accès au commerce maritime. Malgré ces atouts, le commerce intra-régional ne représente en moyenne que 8% des exportations en 2000, tandis que les importations en provenance des pays en développement hors MOAN atteignent 26% du total des importations (Figure 2).

Figure 2 MOAN : faible commerce intra régional Commerce intra-MOAN versus importation en provenance des pays émergents hors MOAN

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1960 1964 1968 1972 1976 1980 1984 1988 1992 1996 2000 2004 2008

% d'importation

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9

10% d'exportation

Importations en provenance de pays émergents hors MOAN, en % desimportations totales du MOAN [G]Commerce (exportations) intra-MOAN en % du total des exportations MOAN [D]

Source : Datastream et Recherche AXA IM

Les Etats arabes expliquent souvent cette situation par le fait qu’ils exportent des biens non complémentaires, les hydrocarbures. On peut

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objecter que le commerce de services est parfaitement complémentaire et pourrait donc bénéficier aux économies arabes.

… Faible entreprenariat… Enfin, la faiblesse du secteur privé dans la région MOAN nuit à l’allocation efficace des ressources, à la détermination des prix et la discipline de marché. Après l’effondrement de l’Empire ottoman, l’indépendance de certains pays arabes après la seconde guerre mondiale, et l’émergence du nationalisme arabe, bien des entreprises étrangères ont été nationalisées et l’activité économique est passée sous un contrôle étatique absolu.

L’absence d’institutions de qualité soutenant le processus de décision politique et le hiatus entre le droit officiel et son application, ont étranglé l’esprit d’entreprise dans la région, tout en renforçant le pouvoir de l’Etat. Ainsi, les entreprises syriennes ont-elles souffert de la décision de leurs autorités de couper les relations commerciales avec la Jordanie, l’Irak et l’Arabie Saoudite ; près des deux-tiers des managers en Egypte, au Liban et en Syrie notent que les délais pour l’obtention d’une licence varient selon le service auquel on s’adresse1. De fait, les services administratifs privilégient les sociétés qui sont en bons termes avec les administrations et les élites gouvernantes, et les entrepreneurs potentiels sont dissuadés par les obstacles bureaucratiques. Même le crédit bancaire, pourtant sur-collatéralisé en général, se concentre sur les grandes entreprises bien connectées, ce qui contraint les autres à l’autofinancement. Le résultat : les entreprises interrogées par la Banque Mondiale en Algérie, au Maroc, en Syrie, en Egypte, au Yémen et en Jordanie indiquent que 75% de leurs investissements sont financés par leurs propres fonds. Au Yémen, seulement 8% des entreprises ont recours au crédit bancaire.

La Figure 3 montre que, pour la facilité d’entreprendre, la région MOAN est classée 111ème sur 183 pays étudiés par la Banque mondiale, bien plus bas que l’OCDE et même que les économies à revenu intermédiaire en général. Les pays du Maghreb sont encore plus mal classés, sauf pour le respect des contrats et les lois sur les faillites. Leur principal point noir est

1 Malik A. & B. Awadallah (2011), “The economics of the Arab Spring," CSAE Working Paper Series, 23, Centre for the Study of African Economies, University of Oxford.

du coté de l’obtention de crédit pour les entreprises.

Figure 3 L’environnement institutionnel pour les entreprises est moins favorable dans le MOAN qu’ailleurs

Classement MOAN Maghreb*Revenu intermé-diare

OCDE

Facilité d’entreprendre 111 112 101 30

Démarrage d’entreprise 95 115 99 57

Enregistrement de propriétés 105 109 96 59

Obtention du crédit 125 128 89 41

Protection des investisseurs 98 92 89 63

Charges fiscales 93 129 101 62

Respect des contrats 104 92 98 37

Régime des faillites 105 79 104 27

* Maroc, Mauritanie, Tunisie et Algérie

Source : Banque mondiale – Doing business 2012 et Recherche AXA IM

… au détriment de l’emploi des jeunes et au bénéfice de l’économie au noir La faiblesse de l’entreprenariat ne facilite évidemment pas l’intégration d’une population active en forte croissance, gonflant ainsi le chômage des jeunes, cause essentielle des troubles sociaux qui déclenchèrent le printemps arabe. Comme le montre la Figure 4, la population active de la région MOAN croît plus vite que dans le reste du monde, y compris l’Afrique sub-saharienne.

Figure 4 Croissance vertigineuse de la population active au MOAN Croissance annuelle de la population active, 2000-2010, en %

0.8

1.2

2.1

2.8

3.2

0.0 0.5 1.0 1.5 2.0 2.5 3.0 3.5

OCDE hautsrevenus

Asie de l'Est etpacifique

Amérique latine etCaraïbes

Afrique sub-Saharienne

MOAN

Source : Datastream, Recherche AXA IM

Que le chômage des jeunes atteigne des records au MOAN n’est donc pas une surprise. (Figure 5). S’y ajoute un faible taux de participation, avec

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une population active représentant 48% des 15-64 ans, en raison d’un très faible taux de participation féminin (22%).

Figure 5 Le chômage des jeunes est très élevé au MOAN Taux de chômage des jeunes en %, 2011

0 5 10 15 20 25 30

Asie de l'Est

Asie du Sud

Afrique sub-saharienne

MONDE

Asie du Sud-Est & Pacifique

Amérique latine & Caraïbes

Europe centrale & du Sud-Est (hors UE) et

Economies développées & UnionEuropéenne

Moyen Orient

Afrique du Nord

Source : Nations Unies et Recherche AXA IM

Le poids exorbitant de l’Etat pousse les jeunes vers l’économie souterraine, les privant ainsi de filet de protection sociale. Notons que les pays où l’économie souterraine est la plus élevée (Figure 6) sont ceux où les émeutes du printemps arabe furent les plus violentes (Tunisie, Egypte, Libye, Yémen).

Figure 6 L’économie informelle est importante au MOAN Economie informelle, en % du PIB (2007)

17 18 19 19

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Jordanie Bahreïn Syrie MoyenneOCDE

Yémen Libye Egypte Tunisie15

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Source : Schneider Friedrich, Buehn Andreas & Montenegro Claudio E. (2010) 'New Estimates for the Shadow Economies all over the World', International Economic Journal, 24: 4, 443-461 et Recherche AXA IM

En Tunisie, d’où partit la révolte arabe, l’économie informelle représente 35% du PIB, près du double de la moyenne OCDE (19%).

Quel impact de la transition démocratique sur la croissance ? Les études économiques empiriques indiquent que les transitions démocratiques ont en général un effet positif sur la croissance et sa stabilité2. Nous avons estimé que le niveau du PIB réel par habitant augmente en moyenne de 2,4% dans les années qui suivent une transition démocratique3. Les PIB réels de la Tunisie et de l’Egypte ont d’ailleurs déjà retrouvé leurs niveaux d’avant les émeutes, après une forte chute courant 2011. Il apparaît même que la reprise y a été plus forte que dans la moyenne des pays qui ont connu une transition démocratique (Figure 7).

Figure 7 Forte reprise en Tunisie et Egypte

-2

-1

0

1

2

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t-10 t-9 t-8 t-7 t-6 t-5 t-4 t-3 t-2 t-1 t=0 t+1 t+2 t+3 t+4 t+5 t+6 t+7 t+8 t+9t+10

%(A)

-2

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8%(A)

Tous les pays* Tunisie Egypte

Croissance du PIB réel une décennie avant et après transition démocratique( t=0)

Source : Ahmed S. & N. Liouane (2012), “Transition démocratique et croissance économique : Quelles leçons pour les pays du printemps arabe?”, papier présenté au Forum annuel de l’Association des Economistes Tunisiens (ASECTU) Croissance, emploi et répartition dans le contexte de la mondialisation, 7-9 Juin; International Monetary Fund, et Recherche AXA IM

* Pays ayant expérimenté une transition démocratique entre 1975-2005

Il reste que les pays du MOAN ont encore beaucoup à faire pour relever leur niveau de vie et promouvoir une croissance durable. Nous utilisons la Turquie comme référence pour préciser ce point.

2 Wacziarg R. & D. Rodrik (2005), “Do Democratic Transitions Produce Bad Economic Outcomes?”, American Economic Review Papers and Proceedings, Mai, pp. 50-55. 3 Le calcul détaillé est explicité dans l’appendice.

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La Turquie comme modèle et référence pour les économies du MOAN Le Turquie offre l’exemple d’un pays essentiellement musulman qui renaquit de ses cendres après une grave crise bancaire en 2001 et entreprit ensuite d’ambitieuses réformes structurelles qui lui ont permis de résister à la crise financière mondiale. Plus intéressant encore, la Turquie est un pays où les autorités militaires et le gouvernement civil sont parvenus à partager le pouvoir, l’influence des premières ayant diminué depuis que le Parti de la Justice et du Développement (AK Parti) prit le pouvoir en 2002. Nous considérons que l’exemple turc fournit un bon plan de route pour les pays du printemps arabe, donnant des indications sur la dynamique et l’envergure des réformes structurelles nécessaires pour atteindre un PIB par habitant élevé.

Figure 8 Les pays du MOAN peuvent le faire !

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Egypte Iran Jordanie Irak Maroc* Yémen Algérie* Tunisie* Syrie*

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Années

Vitesse de convergence(coefficient beta) [G]

Demi-période deconvergence [D]

Davantage de réformes structurelles sont nécessaires aux pays aspirant à un PIB par habitant égal à celui de la Turquie

Beta-convergence entre les économies du MOAN et Turquie

Source: Penn World Tables et Recherche AXA IM

Nous avons estimé la vitesse de convergence du PIB par habitant entre les économies du MOAN et la Turquie (Figure 8). Plus le coefficient ‘beta’ est élevé, plus rapide est la convergence du PIB par habitant vers celui de la Turquie, et moindre est l’effort de réformes structurelles pour y parvenir. Les astérisques indiquent une ‘beta-convergence’ significativement différente de zéro au niveau de 5%4. Il est intéressant de noter que les plus faibles vitesses estimées sont celles de l’Egypte et de l’Iran, d’ailleurs non significativement différentes de zéro. Pratiquement, si on extrapolait le passé, il

4 Le modèle et les détails de l’estimation de la beta-convergence sont explicités dans l’appendice.

faudrait vingt ans à l’Egypte pour réduire de moitié son écart avec la Turquie, et quatorze ans pour l’Iran. La convergence est plus rapide pour la Jordanie et l’Irak, avec des demi-périodes de huit et sept ans. Celle-ci tombe à trois ans pour le Maroc, le Yémen et l’Algérie et à 2,5 ans pour la Tunisie et la Syrie. Pour ce club des « rattrapeurs rapides », il est possible que l’effort de réformes structurelles à mettre en œuvre pour converger vers la Turquie soit moindre que pour les pays plus lents.

Un besoin de miracle pour l’emploi Les politiques économiques devront viser un modèle de croissance plus inclusif, où les effets positifs des réformes touchent une plus large fraction de la population, à la différence du passé. Les nouveaux dirigeants devront faire baisser le chômage de façon importante et pérenne, ce qu’on a pris coutume d’appeler des « miracles pour l’emploi ». Selon la Banque mondiale, les pays qui ont engagé ce type de réformes ont, en moyenne, ramené le taux de chômage de 14,5% à 8,8% en trois ans, et à 7,1% dans les quatre années suivantes. Les « miracles pour l’emploi » viennent avec un relèvement du niveau du PIB de 2%, et une montée du taux d’investissement.

Les « miracles pour l’emploi » vont aussi de pair avec une ouverture commerciale plus grande, et réduisent les risques de crise économique. Pour être durables, ils doivent donner la priorité à l’entreprenariat et tailler dans les tout-puissants services administratifs. Plus précisément, le cadre institutionnel devra être amélioré de façon à renforcer le système judiciaire, garantir le droit de propriété, élargir l’accès au crédit bancaire, favoriser l’ouverture financière et simplifier le droit du travail.

Ces miracles ne sont ni rares ni inimaginables. Selon la Banque mondiale, 43 expériences similaires se sont produits entre 1980 et 20085. Pour les économies du MOAN, elles apparaissent comme la seule voie susceptible de créer chaque année les quelques 4,5 millions d’emplois nécessaires pour absorber la croissance de la population active et faire baisser le chômage des jeunes.

5 Parmi les exemples les plus frappants : Algérie, Maroc, Bolivie, Barbade, Bulgarie et Lituanie. Cf. ‘The Middle East and North Africa: A Regional Economic Update’, Banque mondiale, Avril 2012.

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En ouvrant leurs frontières aux échanges, les pays du MOAN stimuleront le commerce régional et diversifieront leurs modèles de croissance trop dépendants des matières premières. Un cercle vertueux s’enclenchera alors, la croissance interne réduisant la dépendance aux aides étrangères, et le développement des relations commerciales régionales autorisant la réduction des budgets de défense, aujourd’hui les plus élevés du monde quand ils sont mesurés par habitant. Ainsi, les ressources publiques pourront être réallouées vers des usages plus productifs.

subventionnés pour l’alimentation et l’énergie chez les importateurs de pétrole, et des salaires élevés dans le secteur pétrolier chez les exportateurs. De ce fait, les importateurs ont accumulé des déficits publics élevés et les exportateurs sont affectés par la volatilité des cours mondiaux, qui peut même rendre leur situation budgétaire précaire.

En conclusion, les économies du MOAN ont le potentiel pour relever leurs PIB par habitant à un niveau similaire à celui de la Turquie, pour peu que le printemps arabe soit propice à des réformes structurelles d’ampleur visant à une croissance de l’emploi forte et durable. Il en résulterait un paradigme de croissance à la fois plus inclusif socialement et plus durable.

Enfin, les politiques de redistribution du revenu devront être profondément réformées, de façon à augmenter l’efficacité de la dépense publique. La redistribution traditionnellement favorisée dans les pays du MOAN se fonde sur des prix

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Appendice i. Croissance et démocratisation

Nous estimons un modèle de panel avec effets fixes pour le PIB par habitant (PPA en US$) en utilisant comme variables explicatives l’ouverture commerciale (moyenne des exportations et importations en % du PIB), et un indicateur mesurant l’intensité démocratique des institutions (POLITY 2) pour un échantillon de 52 pays qui ont connu une transition démocratique entre 1975 et 2010. Les données sont tirées des PennWorld Tables6 et du Centre for Systemic Piece, qui supervise le projet Polity. Notre estimation indique que la transition démocratique à un effet positif et significatif sur le PIB par habitant supérieur à celui de l’ouverture commerciale. Numériquement, une transition démocratique majeure, calibrée à une augmentation de 6 unités de l’indice POLITY 2, augmente le PIB par habitant de 0,41% (=6x0,07). Si cet effet se produit en un an, il correspond à une augmentation du PIB de 2,4%, considérant que la croissance moyenne de la population dans notre échantillon est de 2% par an.

ii. Convergence du PIB des pays du MOAN vers celui de la Turquie

Nous suivons la méthodologie de Barro et Sala-i-Martin (1992)7 pour calculer la vitesse de convergence du PIB par habitant (en PPA) des pays du MOAN vers celui de la Turquie, en estimant pour chaque pays de l’échantillon l’équation suivante :

MOANtMOAN

t

TurquietMOANMOAN

MOANt

Turquiet

PIBPIB

PIBPIB

!"# $%%&

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*$+%%

&

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*,

-

-

1

1lnln

où ( ) sont les PIB par habitant en PPA de la Turquie (du pays du MOAN) à Turquie

tPIB MOANtPIB

l’année t, est l’opérateur différence première; ln le logarithme népérien et , ! le terme d’erreur. La période d’estimation est 1950-2009 et l’échantillon MOAN comprend : Algérie, Bahreïn, Egypte, Iran, Irak, Jordanie, Koweït, Liban, Libye, Maroc, Oman, Qatar, Arabie Saoudite, Syrie, Tunisie, Emirats Arabes Unis et Yémen. L’échantillon est limité aux pays pour lesquels en moyenne au cours des cinq dernières années, l’écart entre les PIB/h du pays considéré et de la Turquie est positif, de façon à mesurer la convergence vers la Turquie et non pas l’inverse, ce qui a exclut : Bahreïn, Koweït, Liban, Oman, Qatar, Arabie Saoudite et Emirats Arabes Unis. Un coefficient ßMOAN négatif indique une convergence vers la Turquie positive. La Figure 9 montre yMOAN = -ßMOAN. La demi-période (ou demi-vie) de convergence citée dans le texte et montrée dans la Figure 9 se calcule ainsi :

)1ln()5.0ln(

MOANpériodedemi.-

+-

6 Heston A., R. Summers & B. Aten, PennWorld Table Version 7.0, Center for International Comparisons of Production, Income and Prices at the University of Pennsylvania, Mai 2011 7 Barro R.& Sala-i-Martin X. (1992), “Convergence”, Journal of Political Economy, 100 (2), pp. 223-251.

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