bhagavad gita in french language - international gita society
TRANSCRIPT
Bhagavad Gita in French Language
Chapitire Table des MatiĂšres
00 Introduction Ă la Bhagavad GĂźtĂą 10 La Manifestation de lâAbsolu
01 Le Dilemme dâArjuna 11 La Vision de la Forme Cosmique
02 La Connaissance Transcendantale 12 La Voie de DĂ©votion
03 La Voie de Karma Yoga (Action,
Altruisme) 13 La Création et le Créateur
04 Renonciation par la Connaissance 14 Les Trois Gunas (Tempéraments) de la
Nature
05 La Voie de la Renonciation 15 La Personne SuprĂȘme
06 La Voie de la MĂ©ditation 16 Les Ătats Divins et DĂ©moniaques
07 La Connaissance de Soi et
lâIllumination 17 La Triple Foi
08 LâĂternel Brahman (Esprit) 18 La Moksa (LibĂ©ration) par le
Renoncement
09 La Connaissance SuprĂȘme et le Grand
MystĂšre 00
Le Message dâAdieu du Seigneur
Krishna
Also visit:http://www.gita.be/french.htm
"Text courtesy of American Gita Society (AGS), www.gita-society.com."
All works of AGS may be used without a written permission
for non-commercial purposes only. Text under " " must appear on
your website or wherever IGS material is used.
This translation in French is from the English Gita of the IGS
by
Philippe De Coster, DD, president
GITA SOCIETY OF BELGIUM
Parklaan, 81
B9000, GENT
BELGIUM
E-mail contact: [email protected]
La Bhagavad Gßtù en Français
traduit par Philippe L. De Coster D.D.
suivant le Sanscrit et l'Ćuvre
de
Ramananda Prasad, Ph.D.
INTRODUCTION Ă LA BHAGAVAD GĂTĂ
Message Ă lâHumanitĂ© :
Aujourdâhui, aprĂšs deux guerres mondiales, lâhistoire semble rĂ©pĂ©ter ses leçons Ă
lâhumanitĂ© dâune voix plus forte que jamais parce que la turbulence et la souffrance sont
gĂ©nĂ©ralement inhĂ©rentes Ă lâhistoire politique, affectent directement ou indirectement des
sections toujours plus grandes de lâhumanitĂ©. Et, pourtant, il ne semble pas que ces leçons
aient Ă©tĂ© mieux apprises quâavant. Pour un esprit rĂ©flĂ©chi, plus poignante et plus navrante
que les nombreux exemples individuels de souffrance que fournit lâhistoire rĂ©cente un peu
partout dans le monde, est lâĂ©trange et tragique monotonie de conduite qui pousse
lâhumanitĂ© Ă un nouvel accĂšs de folie quâon appelle la guerre. Le mĂȘme vieux mĂ©canisme
est de nouveau en marche, lâinteraction de la convoitise et de la crainte. A ce monde malade
et vraiment insensĂ© quâest la nĂŽtre, vient un enseignement ancien de vĂ©ritĂ© et de sagesse
Ă©ternelle, de conduite infaillible, quâest la Doctrine de la Bhagavad GĂźtĂą, rĂ©sumĂ© des livres
SacrĂ©s de lâHindouisme. Elle vient avec la question ardente, pleine de bienveillance, mais
calme et discrĂšte, de savoir si, cette fois, lâhumanitĂ© sera prĂȘte Ă saisir la main secourable
que le Seigneur Krishna et Arjuna ont tendu Ă lâhumanitĂ© souffrante Ă travers
lâEnseignement Ă©ternel, en particulier de la GĂźtĂą. Ou bien le monde attendra-t-il encore
jusquâĂ ce quâil ait rĂ©ussi Ă conjurer une Ă©preuve encore plus macabre que la derniĂšre
guerre mondiale et dâaujourdâhui dans bien de pays dans le monde qui peuvent se terminer
par le dĂ©clin final de lâhumanitĂ©, tant matĂ©riel que spirituel ? Le message du Seigneur
Krishna vient au monde comme un moyen dâaide efficace aux afflictions et problĂšmes
actuels et comme un remĂšde radical contre le mal. Le dialogue du Seigneur Krishna et son
charretier Arjuna, vieux de 3000 ans, cette vraie sagesse est toujours jeune et toujours Ă la
portĂ©e de lâesprit ouvert qui atteint pĂ©niblement ses hauteurs en Occident, mais qui a une
Ă©poque de dĂ©clin religieux a quand-mĂȘme chance dâĂȘtre Ă©coutĂ©.
Principaux commentaires :
La Bhagavad Gßtù, « Le Chant du Seigneur », occupe une place unique parmi les Saintes
Ăcritures de lâInde, et en est le rĂ©sumĂ©. La GĂźtĂą affirme lâunitĂ© de la vie et sert
parfaitement de guide pour lâhomme dâaujourdâhui de part les quatre coins du monde, de
toute race et culture, grùce à son approche pragmatique de la vie qui en fait un véritable
guide. La GĂźtĂą ne nous cache rien, car elle met lâhomme devant les faits de la vie en tant
que champs de bataille, car rien ne sâaccomplit sans efforts. Dans la lutte de la vie, le petit
livre de 700 versets invite lâhomme Ă dĂ©couvrir lâaction juste au cĆur mĂȘme de lâexistence.
La vie elle-mĂȘme est une alternance de trois Ă©tapes, la crĂ©ation, la prĂ©servation, et la
destruction, qui sont indissociable de lâactivitĂ© incessante de lâĂ©ternel recommencement de
la Nature comme le déroulement des quatre saisons. La Gßtù est une porte ouverte vers la
vie intérieure et à la fois extérieure, nous aidant à nous maintenir dans cette vie, croßtre et
nous renforcer, prendre conscience, en nous apprenant Ă fonctionner suivant lâattitude
juste, inspirĂ©e par lâamour grĂące Ă la perception de lâExistence Ă©ternelle, le SuprĂȘme
Absolu.
Le Seigneur Krishna délivre son enseignement à Son ami Arjuna, qui représente dans la
GĂźtĂą lâhomme de hier, aujourdâhui et demain, celui qui Ă travers les Ăąges ne change pas
mais qui doit changer en se formant, car il porte en lui la faculté de se brancher bien au-
delà du visible et du tangible. Arjuna a un problÚme précis à régler au début de la Gßtù, et
le Seigneur Krishna se contente Ă lâaider, Ă nous aider aujourdâhui Ă le rĂ©soudre nous
aussi.
La vie est un mystÚre insondable, mais la Gßtù nous fait découvrir les grandes valeurs de la
vie. Les manifestations de la vie sont actuellement déroutantes, non seulement par leur
infinie multiplicité, mais aussi par des contradictions, des oppositions, des conflits qui
laissent supposer une anarchie complÚte. Des théories patiemment élaborées, des lois
savamment Ă©tablies sâeffondrent brusquement par une nouvelle constatation qui
bouleverse les observations précédentes. Et, pourtant, la vie obéit aux lois cosmiques,
comme tout ce qui existe. La vie est la Loi elle-mĂȘme, et ses principes sont simples. Mais on
ne peut en dĂ©couvrir le mĂ©canisme, dans lâinfinitĂ© des rouages, des piĂšces de ressorts, de
leviers, des canalisations Ă©lectriques et humorales qui sâenchevĂȘtrent, des multiples inter
rĂ©actions chimiques, biochimiques et Ă©lectrochimiques, de lâaction des radiations
cosmiques, lumineuse, telluriques, électo-magnétiques de toutes sortes de toutes puissances,
de toutes provenances, qui sâenchevĂȘtrent et se conjuguent ou se contrarient et se
bousculent dans un vĂ©ritable carrousel, en un chaos oĂč il est impossible de se reconnaĂźtre.
Mettez-vous sur le plan spirituel de la GĂźtĂą et alors tout sâĂ©clairera. Axez vos recherches
sur la vie spirituelles de la Bhagavad GĂźtĂą et vous trouverez la solution que vous cherchez
vainement dans lâattachement aux fruits de votre labeur. Lâenseignement de la GĂźtĂą est
clair : lâaction dans la sociĂ©tĂ© ne peut pas ĂȘtre Ă©vitĂ©e, et le monde des objets (samsara) ne
peut pas ĂȘtre niĂ©. Bien au contraire, nous devons lâutiliser intelligemment, en mettant tous
nos efforts dans le dĂ©tachement (lâaction dĂ©sintĂ©ressĂ©e), car il nous donne un moyen
dâĂ©liminer les tendances Ă©goĂŻstes qui voilent le Soi.
En ces « Temps Nouveaux » aujourdâhui, pendant que les anciennes valeurs de nos parents
disparaissent, la GĂźtĂą nous invite Ă mĂ©diter sur la VĂ©ritĂ© Une. Câest par la mĂ©ditation, ce
que nous verrons plus loin, que lâhomme en tant que personnalitĂ©, est touchĂ© par la
vibration du Moi Spirituel (lâĂme), cherche Ă lâatteindre en Ă©liminant le moi Ă©goĂŻste de
maniĂšre de sâĂ©lever au-delĂ de lâattachement matĂ©riel. Câest par la mĂ©ditation ou
lâextension du concret Ă lâabstrait, que la conscience Causale est pĂ©nĂ©trĂ©e, et lâhomme
durant cette période finale, devient le Moi Spirituel et non plus la personnalité.
La Bhagavad Gßtù est postérieure au grand mouvement incarné par les Upanisads
primitives, et antérieure à la période de développement des systÚmes philosophiques et de
leur rĂ©daction en sutras. Ses constructions archaĂŻques et dâautres rĂ©fĂ©rences internes nous
induisent Ă penser que le merveilleux petit livre est une Ćuvre de lâĂšre prĂ©chrĂ©tienne, dont
la date pourrait ĂȘtre fixĂ©e 5 siĂšcles avant JĂ©sus Christ, malgrĂ© que le texte ait pu subir des
altĂ©rations par la suite (Indian Philosophy, Vol. I, pages 522-25). La Bhagavad GĂźtĂą tend Ă
inculquer deux choses Ă lâindividu : dâabord, lâoubli de soi, puis lâaction. Ce que nous
croyons que Dieu nous inspire de faire demande cependant Ă ĂȘtre contrĂŽlĂ©, et câest ici
quâintervient la nĂ©cessitĂ© de recourir aux avis et aux conseils de la GĂźtĂą, le meilleur gourou
ou PĂšre spirituel. Câest au niveau de la GĂźtĂą que le yogi (le dĂ©vot ou mĂ©ditant) soumettra sa
rĂšgle de vie personnelle. La GĂźtĂą en mains, le souci dominant devra ĂȘtre, rĂ©pĂ©tons-le, de
suivre de prĂ©s la volontĂ© du SuprĂȘme Absolu. Le renoncement qui nous est demandĂ© nâa
pas dâautre sens. Câest un renoncement Ă lâorgueil, Ă lâobstination dans les idĂ©es purement
personnelles et fausses, au caprice, Ă lâimpressionnabilitĂ©, en vue de marcher sans entrave
dans la voie des yogis ou dévots et de parvenir à cet amour dont les intuitions et les désirs
ne feront plus quâun avec la sagesse et lâamour du Seigneur Krishna. De lâĂ©tude de la GĂźtĂą
et de son application Ă la vie naĂźtra la croyance quâil y a un seul Esprit et non plusieurs ;
que nous ne pouvons pas vivre pour nous seuls, mais que nous devons arriver à réaliser
quâil nây a pas de sĂ©parativitĂ© et quâon ne peut se soustraire au karma collectif de la race Ă
laquelle on appartient et, finalement, que nous devons penser et agir conformément à cette
croyance. Tout cela, seul le SuprĂȘme Absolu, Dieu, peut rĂ©aliser en nous, dans la lumiĂšre
de sa sagesse et la force de sa grùce. Le yogi (le dévot) est celui ou celle qui attend tout du
SuprĂȘme Absolu en se mettant sous lâabri de lâenseignement de la GĂźtĂą. Il ou elle ne va dans
la solitude que pour se placer plus directement dans le rayonnement du foyer divin par un
mode de vie, et la mĂ©ditation dâaprĂšs la GĂźtĂą. Lâhomme dâaujourdâhui proclame sa volontĂ©
dâunir tous les hommes par une seule Ăcriture, un seul SuprĂȘme Absolu, une seule
philosophie et un devoir unique. La Bhagavad GĂźtĂą apporte tout cela.
Lâhistoire du MahĂąbhĂąrata :
La Srßmad Bhagavad Gßtù, ou « le Chant Divin du Seigneur », est une partie du
MahĂąbhĂąrata, lâune des grandes Ă©popĂ©es de lâInde. De par le trĂ©sor de sagesse quâil
contient, le Mahùbhùrata est appelé « le cinquiÚme Veda ». La rédaction de la Gßtù est
attribuée à Vyasa, le compilateur légendaire du Mahùbhùrata. A cette époque donc,
prospĂ©rait au Nord de lâInde un royaume, BhĂąrata, qui Ă©tait rĂ©gnĂ© par PĂąndu, le plus jeune
de deux frĂšres. LâaĂźnĂ© en effet, DhrtarĂąstra, ne pouvait monter sur le trĂŽne, car il Ă©tait
aveugle depuis sa naissance.
Le roi Pùndu était marié à deux épouses, Kuntß et Madrß. La premiÚre eut trois fils :
Yudhisthira, BhĂźma et Arjuna. La seconde femme eut deux autres fils, Nakula et Sahadeva,
des jumeaux. Dhrtarùstra, par contre avait épousé Gùndhùri, qui par respect pour son
mari aveugle, sâĂ©tait volontairement bander les yeux, et ainsi elle partageait son sort.
Un jour le roi PĂąndu tua tout accidentellement un brahmane, et pour expier cette faute, il
dĂ©cida e se retirer dans la forĂȘt et dây accomplir une vie dâascĂšse. Ses fils furent confiĂ©s aux
soins de BhĂźsma, lâoncle de PĂąndu et de DhrtarĂąstra. Ce dernier plus tard devint roi Ă la
mort de PĂąndu. Le maĂźtre dâarmes des fils de PĂąndu (les PĂąndavas) et de ceux de
DhrtarĂąstra (les Kauravas) Ă©tait le brahmane Drona. Les fils de PĂąndu et de DhrtarĂąstra
grandirent et furent Ă©levĂ©s ensemble ; cependant, lâaĂźnĂ© des PĂąndavas, Yudhisthira, Ă©tant
acceptĂ© par tous, fut considĂ©rĂ© lâhĂ©ritier lĂ©gitime au trĂŽne.
Au fil de lâhistoire, les PĂąndavas et les Kauravas dĂ©veloppĂšrent leurs compĂ©tences
respectives. Yudhisthira Ă©tait lâincarnation mĂȘme de la vĂ©ritĂ©, de la vertu, de lâhonnĂȘtetĂ©.
BhĂźma Ă©tait dâune force surhumaine et toujours prĂȘt Ă se battre. Arjuna, ami, disciple et
dĂ©vot du Seigneur Krishna, incarnait lâidĂ©al de lâhĂ©roĂŻsme et de lâesprit chevaleresque.
Tous les frĂšres des PĂąndavas se distinguaient par la noblesse de leur caractĂšre, et ils firent
preuve par la suite de courage et de tolérance quand vinrent les épreuves. Les frÚres
Kauravas par contre, au nombre de cent, Ă©taient tout le contraire. LâaĂźnĂ©, Duryodhana
Ă©tait mĂ©chant, cruel et dâun esprit tortueux. Il savait absolument et depuis trĂšs longtemps
que son rival pour le trĂŽne Ă©tait Yudhisthira, de lĂ sa jalousie grandissante.
Le jour arriva oĂč Yudhisthira fut couronnĂ© comme prince hĂ©ritier, ce qui provoqua la joie
par tout le royaume, grùce à sa droiture et bonté. Duryodhana, jaloux, monta un complot
pour faire périr les cinq Pùndavas. Le plan fut favorisé par le roi régnant Dhrtarùstra, qui
attachĂ© Ă son fils ne pouvait rĂ©sister, Ă©choua. Les frĂšres PĂąndavas nâosĂšrent pas retourner
rapidement Ă la cour, par crainte des persĂ©cutions. Ils habitaient la forĂȘt pendant un
certain temps, et câest lors de ce sĂ©jour quâArjuna obtint la main de la princesse DraupadĂź,
grĂące Ă sa manipulation extraordinaire de lâarc. Tous retournĂšrent ensuite Ă la cour de
Dhrtarùstra en exigeant que justice leur soit faite. Ils demandÚrent que la moitié du
royaume leur soit donnĂ©e, et DhrtarĂąstra accepta, cependant sous lâimpulsion de
BhĂźsma. Les PĂąndavas Ă©levĂšrent leur nouvelle capitale Indraprastha (prĂšs de la Delhi
actuelle). Le royaume de Yudhisthira, bien gouverné, devint rapidement prospÚre. Le
Seigneur Krishna Ă©tait lâami des PĂąndavas, et il conseillait Yudhisthira dans son
administration. Arjuna avait aussi Ă©pousĂ© SubhadrĂą, la sĆur de Krishna, et câest ainsi que
les deux amis devinrent trĂšs proches.
Duryodhana ne pouvait supporter de voir la prospérité de ses ennemis, et son envie ne
connut plus de bornes lorsquâil fut invitĂ© au couronnement du roi Yudhisthira. La gloire
du roi Yudhisthira, et la splendeur de sa capitale Indraprastha, lui devenaient intolérables
et il jura de causer la perte des Pùndavas. Dans ses plans obscures, il fut aidé par son oncle
Sakuni : ce dernier jouait aux dĂ©s, Ă©rudit dans lâart de tricher et de gagner bien attendu.
Duryodhana invita Yudhisthira Ă une partie de dĂ©s. Yudhisthira sây rendit, attirĂ© par
lâamour du jeu. Sakuni jouait pour Duryodhana, et inĂ©vitablement gagna. Dans sa
faiblesse, Yudhisthira peu Ă peu mit en jeu tout ce quâil possĂ©dait, y compris son royaume,
ses frĂšres, et mĂȘme son Ă©pouse! CâĂ©tait le triomphe de Duryodhana grĂące Ă Sakuni, tout en
insultant les Pùndavas devant toute la cours horrifiée. Finalement, Dhrtarùstra accorda la
pleine libertĂ© aux PĂąndavas, et tous sâen retournĂšrent.
Duryodhana en fureur, ne pouvant pas tolérer ce retournement de situation, persuada son
pĂšre dâinviter les PĂąndavas Ă une nouvelle partie de jeu de dĂšs. Le perdant devrait cette
fois partir dans la forĂȘt, et vivre une vie dâaustĂ©ritĂ© pendant douze ans, et rester inconnu la
treiziÚme année, au risque sinon de devoir encore mener cette vie pendant douze autres
annĂ©es. Yudhisthira accepta la partie de dĂ©s et lâenjeu, et de nouveau perdit !
Les frĂšres PĂąndavas vĂ©curent douze ans dans la forĂȘt, pratiquant des austĂ©ritĂ©s,
rencontrant des sages, en écoutant leur enseignement. Puis ils passÚrent la treiziÚme année
de leur exil au royaume dur roi Virùta, sous des déguisements divers : Draupadi en
servante de la reine, et Arjuna en eunuque maĂźtre de danse, Yudhisthira en courtisan du
roi, le distrayant par son habileté aux dés, et Bhßma en cuisinier. Cela leur réussit de ne pas
ĂȘtre dĂ©couverts pendant cette derniĂšre phase et treiziĂšme annĂ©e de leur exil, et cela malgrĂ©
les recherches acharnées de Duryodhana, les Pùndavas revinrent à la cour de Dhrtarùstra
réclamant leur royaume. Duryodhana refusa encore de leur donner le moindre morceau de
territoire. Il fit des alliances avec dâautres rois puissants en vue dâune guerre Ă©ventuelle. Le
Seigneur Krishna fit des tentatives de réconciliation, mais Duryodhana ne céda point et son
pĂšre nâeut pas le courage ni lâintelligence de lâarrĂȘter dans cette folie. La guerre fut ainsi
inévitable.
Le Seigneur Krishna joua un rĂŽle majeur dans ce conflit de longue haleine, bien quâIl prit
le parti de ne pas combattre. Sollicité à la fois par les Pùndavas, il donna à Duryodhana son
armĂ©e, et Ă la demande dâArjuna, il accepta de conduire son char pendant la bataille. Les
armĂ©es se trouvĂšrent le jour dit sur le champ de bataille du KurukĆetra, et Arjuna
demanda alors au Seigneur Krishna de mener son char au milieu des deux armées, afin
quâil puisse Ă©valuer les forces prĂ©sents. Quant-il fit lâarmĂ©e adversaire, puissante et remplie
dâamis et de parentĂ©s, Arjuna fut saisi de malheur et son seul et unique recours fut de se
tourner vers son ami Krishna, et câest ce que constitue en forme de dialogue, la « Bhagavad
Gßtù ». La grande guerre du Mahùbhùrata fut effroyable, et les Kauravas furent
complÚtement anéantis. Yudhisthira, pendant trente-six ans, régna avec justice sur le
royaume réunifié et prospÚre.
Lâeffort de lâhomme a sa place dans lâabandon total au SuprĂȘme Absolu ; abandon qui ne
sait ĂȘtre dĂ©nuĂ© nâintention ni dâeffort. La doctrine de la GrĂące Divine ne doit pas
sâinterprĂ©ter comme une Ă©lection spĂ©ciale ; car, une telle conception contredirait la
tendance gĂ©nĂ©rale de la GĂźtĂą Ă affirmer que le SuprĂȘme Absolu est « identique pour tous les
ĂȘtres ». Donc, ne cherchez le SuprĂȘme Absolu, ni dans un lieu, ni dans lâespace. Fermez les
yeux de votre corps, en chaĂźnez votre imagination, et descendez en vous-mĂȘme par la
mĂ©ditation, louange et priĂšre : vous ĂȘtes ainsi en communion avec le SuprĂȘme Absolu.
Lâhomme est contemplatif par destination et par structure, et dâune connaissance innĂ©e qui
participe Ă celle du SuprĂȘme Absolu Lui-mĂȘme, par lâĆil de la foi le voyant face Ă face dans
la ferveur dâune crĂ©ation parfaite visible et invisible, lâamour bĂ©atifique. Le connaĂźtre, câest
lâobjet suprĂȘme de notre intelligence faite pour la VĂ©ritĂ© Une, et Lâaimer, câest le tout de
notre volonté avide du bien.
Nâest-il pas Ă©trange que le yogi construit pour sâĂ©panouir dans la concentration, la
mĂ©ditation et la contemplation qui le dilate Ă la mesure du SuprĂȘme Absolu, et prĂ©fĂšre
lâaction dĂ©tachĂ©e qui le ramasse sur lui-mĂȘme dans la volontĂ© de vaincre et dâarriver au
Salut, le Nirvana oĂč il nây a plus de retour dans le monde physique. Essayons de percevoir
dans la Bhagavad GĂźtĂą quelque chose de ces Ă©changes de VĂ©ritĂ© Une, dâamour et de
pratiques spirituelles dans le dialogue entre le Seigneur Krishna et Arjuna. Aucune joie
humaine ne peut se comparer Ă cette fĂ©licitĂ© divine. Le yogi comprend quâelle nâest pas un
bien Ă©tranger Ă lui-mĂȘme, moins encore une thĂšse Ă dĂ©chiffrer dans la littĂ©rature ou un
spectacle lointain dont lâinaccessible splendeur rendrait sa vie Ă©rĂ©mitique ou la vie tout
court dans le monde plus maussade.
La MĂ©ditation dans la GĂźtĂą :
Le yoga sous les formes proposĂ©es dans la GĂźtĂą ne peut ĂȘtre considĂ©rĂ© uniquement comme
un acte prĂ©cis, dâune durĂ©e plus ou moins courte, mais prĂ©suppose la vie entiĂšre, dans les
enceintes de lâermitage ou ashram, ou en-dehors dans la vie familiale et de la sociĂ©tĂ©, tous
se consacrant Ă lâexercice spirituel pour finalement atteindre le Nirvana (la libĂ©ration des
cycles incessants de transmigration). En effet, celui qui entreprend cette voie, est saisi dâun
intense dĂ©sir de libĂ©ration. Il sây prĂ©pare par une vie intĂšgre et dâaustĂ©ritĂ©, pour certains
mĂȘme ascĂ©tique, baignĂ©e dans la ferveur et la gĂ©nĂ©rositĂ© de lâesprit, suivant les grands
principes moraux (yama) propres aux ascĂštes et les observances (niyama) diverses
dĂ©crĂ©tĂ©es par le âdharmaâ de chacun. « Lâhomme sage doit toujours observer le yama,
mais non le niyama, car celui qui nâobĂ©it pas au premier, alors quâil observe le second,
devient un proscrit. » (Manusmrti 4.204)
Les yama et les niyama sont :
(1) La non-violence
(2) La vĂ©ritĂ© envers tous les ĂȘtres
(3) Lâabstention de vol
(4) Le célibat ou la maßtrise des sens
(5) Lâabstention dâavarice
(6) La purification interne et externe
(7) Le contentement
(8) LâaustĂ©ritĂ© ou la renonciation
(9) LâĂ©tude des Saintes Ăcritures
(10)La dévotion totale à Dieu
(Yoga Sutra 2.30-32)
Câest par la mĂ©ditation ou par le retrait que lâhomme apprend la signification de lâesprit, la
Force Vitale, qui sâapplique finalement Ă tous le corps, et au-delĂ , jusquâĂ rien ne reste sauf
le SuprĂȘme Esprit Lui-mĂȘme. Câest par la mĂ©ditation ou lâextension du concret Ă lâabstrait
que la conscience Causale est pĂ©nĂ©trĂ©e, et lâhomme devient finalement le Moi supĂ©rieur et
non plus la personnalitĂ©. Câest par la technique de la mĂ©ditation que lâhomme en tant que
personnalitĂ© est touchĂ© par la vibration de lâEgo, en cherchant Ă lâatteindre et Ă amener la
conscience égoïque de plus en plus bas, de maniÚre à inclure consciemment le moi inférieur
au supérieur.
Comme on a dĂ©jĂ pu comprendre, lâĂ©tude de la Bhagavad GĂźtĂą nâest plus seulement pour
nous une occasion dâaccroĂźtre nos connaissances livresques, mais on y trouve Ă©galement un
manuel pratique de dévotion et de spiritualité qui, avec des faciles transpositions de termes,
est utilisable dans le cadre de la plupart des religions, y compris le Christianisme. La
mĂ©ditation dans la GĂźtĂą est pour tous et chacun individuellement, en dehors ou Ă lâintĂ©rieur
de lâĂ©rĂ©mitisme ou le cĂ©nobitisme, car les pratiques spirituelles et morales sont de toute
façon assimilées aux austérités. Dans le chapitre 17, 14-19, ces austérités sont divisées en
trois catĂ©gories : corporelles, verbales et mentales. Les austĂ©ritĂ©s corporelles consistent Ă
rĂ©vĂ©rer les Dieux, les Brahmanes, les gourous et les sages par la puretĂ©, lâintĂ©gritĂ©, la
chastetĂ© et le refus de faire le mal. Les austĂ©ritĂ©s verbales consistent Ă sâexprimer en
paroles de bonté et de vérité et à pratiquer en permanence la récitation sacrée. Les
austĂ©ritĂ©s mentales consistent en sĂ©rĂ©nitĂ© de lâesprit, bienveillance, silence et maĂźtrise de
soi. Par contre, les sévÚres austérités physiques sont condamnées.
Voici donc le dit passage traduit directement en français de la version du Dr. Ramananda
Prasad :
« Le culte des rĂ©gnants cĂ©lestes (Devaâs), le prĂȘtre, le gourou, et les sages ; la puretĂ©, la
droiture, le cĂ©libat, et la non-violence, sont considĂ©rĂ©s comme lâaustĂ©ritĂ© des actes. (17.14)
La parole non offensive, qui est vĂ©ridique, agrĂ©able, bĂ©nĂ©fique, et qui sâapprĂȘte Ă lâĂ©tude
rĂ©guliĂšre des Ă©critures est appelĂ©e lâaustĂ©ritĂ© de la parole. (17.15)
La sĂ©rĂ©nitĂ© du mental, la douceur, lâĂ©quanimitĂ©, le contrĂŽle du soi, et la puretĂ© des pensĂ©es,
est appelĂ©e lâaustĂ©ritĂ© de la pensĂ©e. (17.16)
Cette triple austérité mentionnée ci-dessus (de la pensée, la parole, et les actes) pratiquée
par des yogis persĂ©vĂ©rants, avec une foi inĂ©branlable, sans dĂ©sir dâen rĂ©colter les fruits, est
dit dâappartenir au tempĂ©rament bontĂ©. (17.17)
LâaustĂ©ritĂ© pratiquĂ©e pour obtenir le respect, lâhonneur, la rĂ©vĂ©rence, et pour la cause de
gloire extĂ©rieure qui sâappuie sur lâinstabilitĂ© et lâĂ©phĂ©mĂšre est dit dâappartenir au
tempérament passion. (17.18)
LâaustĂ©ritĂ© pratiquĂ©e avec une obstination stupide, ou en se torturant, ou pour causer du
tort aux autres, et dite dâappartenir au tempĂ©rament ignorance. (17.19) »
La technique de la méditation démontrée dans la Gßtù est appelée « dhyùna », méditation
prolongée, la septiÚme étape du yoga, évoluant progressivement dans ce cadre, intÚgre petit
Ă petit dâautres pratiques yoguiques. La mĂ©ditation « dhyĂąna » est une des pratiques
religieuses fondamentales et frĂ©quentes dans lâhindouisme dâaujourdâhui, et par le monde.
Les plus avancés dans la vie spirituelles la pratiquent plusieurs heures chaque jour, tandis
que ceux qui sont engagĂ©s dans lâactivitĂ© du monde trouvent tout de mĂȘme le temps, si ce
nâest quâun moment bref, de se recueillir devant lâimage sacrĂ© du Seigneur Krishna ou
autre, mĂȘme un symbole sacrĂ© et de mĂ©diter sur lui, y concentrant tout leur esprit et leur
mental. Chaque acte important de la vie hindoue, chrétienne ou autre devrait commencer
par un moment de méditation, une priÚre ou un chant méditatif.
Au fait, la pratique de la méditation est triple :
(1) Elle relie et aligne la personnalitĂ© du yogi ou dĂ©vot au Soi supĂ©rieur ou lâEgo.
(2) Elle unit le yogi ou dĂ©vot avec le crĂ©er visible et lâinvisible, le microcosme dans
le macrocosme.
(3) Elle maintient le yogi ou dĂ©vot en communion avec le SuprĂȘme Absolu.
Dans la Bhagavad Gßtù, le chapitre 6, les versets 10 à 17 donne la méthode de méditation,
quâon connaĂźt dĂ©jĂ de nom, et que lâon nomme «DhyĂąna yoga » (yoga de la mĂ©ditation). Le
succÚs dans la méditation est directement proportionnel à la tranquillité intérieure et donc
Ă la maĂźtrise de soi dont le yogi ou dĂ©vot fait preuve dans la vie quotidienne. Il nâatteint cet
Ă©quilibre quâaprĂšs avoir dĂ©laissĂ© la fiĂšvre de possĂ©der et lâenvie dâacquĂ©rir. Nous devons
nous libérer de cette préoccupation constante qui nous conduit à planifier sans cesse de
nouveaux moyens pour accroĂźtre nos possessions.
Comme on lâentend dans la GĂźtĂą, le dĂ©tachement (ou, lâattachement dans le dĂ©tachement),
câest le bienfait de la solitude du yogi, tels que le silence et lâabandon, comme nous allons
voir plus tard. Câest la virginitĂ© du cĆur, le dĂ©pouillement de lâattachement, mĂȘme des
faveurs du SuprĂȘme Absolu en ce quâelles ont de savoureux. La douceur, câest lâinaltĂ©rable
patience au dedans et au dehors, lâamour paisible des volontĂ©s contrariantes du SuprĂȘme
Absolu et de ses instruments, hommes et choses. La justice, câest le dĂ©sir lancinant du
SuprĂȘme Absolu, quâil attise lui-mĂȘme et qui opĂšre dâadmirables fruits de saintetĂ©. La
misĂ©ricorde, câest lâintuition perspicace et affectueuse de lâindigence humaine, jusquâau
besoin dây porter secours ; la tendre compassion pour la faiblesse des autres. Câest
lâindulgence qui comprend, pardonne tout et relĂšve avec des paroles et de gestes de bontĂ©.
La puretĂ©, câest lâaversion pour le mal et la laideur, la crainte dâoffenser le SuprĂȘme
Absolu et sa CrĂ©ation visible et invisible, le courageux effort de sâĂ©loigner du pĂ©chĂ©, et la
vigilance hĂ©roĂŻque pour en Ă©viter de nouvelles, la passion pour le SuprĂȘme Absolu primant
toute intention, priĂšre instante de purification. La paix, câest au dedans de soi et au dehors
la tranquillitĂ© de lâordre dans le respect de la hiĂ©rarchie des valeurs.
Le yogi, le dĂ©vot, celui ou celle qui sâest lancĂ© dans la pratique de la mĂ©ditation, a une
maniÚre privilégiée de le faire, qui relÚve de son état religieux, se vouant ainsi au culte du
SuprĂȘme Absolu, Dieu. Tous les exercices spirituels, ressortissants dâune vie de mĂ©ditation
sont « Adoration et Louange ». Lâadoration authentique est difficile Ă lâhomme dont elle
devrait ĂȘtre la respiration. Il lui manque sans doute le sens profond de la transcendante
MajestĂ© du SuprĂȘme Absolu et de lui-mĂȘme. Dans la mĂ©ditation, les divines perfections
sont contemplĂ©es, lâidĂ©e dâIncarnation Divine Ă©tant acceptĂ©e dans lâhindouisme autant que
dans le christianisme car, en fait, chacun est en quelque sorte une incarnation divine,
puisque la VĂ©ritĂ© SuprĂȘme imprĂšgne chaque crĂ©ature et sâexprime envers elle. Plus lâesprit
est pur, plus le rayonnement de cette Essence divine resplendit.
Il est maintenant raisonnable de faire parler le Seigneur Krishna dans ses indications
concernant la pratique de la méditation. Les versets, chapitre 6. 10-17 sont une traduction
minutieuse de la version anglaise du Sanskrit par Dr. Ramananda Prasad :
Un yogi, assis dans la solitude et seul, doit constamment sâefforcer de contempler le
SuprĂȘme Ătre aprĂšs avoir mis son mental et les sens sous contrĂŽle, libĂ©rĂ© du dĂ©sir et de
droit de propriété. (6.10)
Il ou elle devrait sâasseoir dans un endroit propre, sur un siĂšge stable qui est ni trop haut
ou trop bas, couvert dâherbe sacrĂ© KuĆa, dâune peau de daim, et dâune Ă©toffe superposĂ©es.
LĂ , assis (dans une position confortable), concentrant son mental sur Dieu, et maĂźtrisant ses
pensées et les activités des sens, mettra en pratique la méditation pour sa propre
purification. (6.11-12)
La personne doit sâasseoir, la taille, la colonne vertĂ©brale, la poitrine, le cou et la tĂȘte
droites, immobiles et dâaplomb ; le regard et le mental fermement fixĂ©s sur lâextrĂ©mitĂ© du
nez, sans regarder autour de soi ; serein et sans crainte, mettant en pratique le célibat ; le
mentale sous contrĂŽle, pensant Ă Moi, et Mâatteignant comme le dessein suprĂȘme. (6.13-14)
Ainsi, exerçant toujours le mental fixé sur Moi, le yogi dont le mental est soumis atteint la
paix de Brahma-nirvana et vient Ă Moi. (6.15)
Ce yoga nâest pas possible, O Arjuna, pour celui qui mange trop ou qui ne mange pas du
tout ; pour celui qui dort trop ou qui se tient éveillé. (6.16)
Mais, pour la personne qui est modéré dans sa nourriture, son délassement, ses travaux,
son sommeil et lâĂ©veil, le yoga de mĂ©ditation dĂ©truit toute souffrance. (6.17)
La mĂ©ditation (dhyĂąna) est une assimilation Ă lâobjet : celui qui mĂ©dite perd sa propre
conscience de soi pour ne devenir conscient que de lâobjet sur lequel il mĂ©dite.
(a) Sur la forme cosmique du SuprĂȘme Absolu : La mĂ©ditation sur la forme
cosmique et la forme personnelle du SuprĂȘme Absolu sont les deux
manifestations importantes de la forme au cĆur mĂȘme du SuprĂȘme Absolu. Des
deux, on considĂšre que la seconde est plus pratique que la premiĂšre, car elle est
le SuprĂȘme Absolu dans sa forme la plus comprĂ©hensible pour la plupart des
humains. La forme de purusa est la manifestation cosmique originale du
SuprĂȘme Absolu ; tandis que sa forme personnelle est sa manifestation dans ses
avatars. La mĂ©ditation sur la forme cosmique de Dieu, le SuprĂȘme Absolu, est
essentiellement une contemplation de toutes les choses créées, un regard porté
sur elles de façon Ă voir leur signification profonde en relation avec le SuprĂȘme
Absolu. Câest au fait un retour Ă la forme originelle de la crĂ©ation. Les objets
considĂ©rĂ©s comme ĂȘtres sĂ©parĂ©s et indĂ©pendants sans rĂ©fĂ©rence au SuprĂȘme
Absolu perdent toute signification, deviennent un vain rĂȘve, un monde du maya,
qui distrait et trompe en enfonçant lâhomme dans son ignorance. Le dhyĂąna est
donc la mĂ©thode par excellence pour vaincre lâignorance en parvenant au point
central, base de toute la création, dans lequel toute chose est unifiée, toutes les
choses sâarticulent comme les diffĂ©rents membres dâun mĂȘme corps.
(b) Sur la forme personnelle du SuprĂȘme Absolu : De mĂȘme que la
mĂ©ditation sur la forme cosmique du SuprĂȘme Absolu est considĂ©rĂ©e comme
plus difficile que sur la forme personnelle, la mĂ©ditation dont elle fait lâobjet est
censĂ©e dâĂȘtre ainsi dâun niveau presque exceptionnel Ă celle sur la forme du
SuprĂȘme Absolu, comme nous allons lire plus bas dans la GĂźtĂą. On pourrait dire
que la mĂ©ditation sur la forme personnelle de Dieu nâest quâune prĂ©paration Ă
celle sur la forme cosmique, ou la transition progressive de formes plus simples Ă
des formes plus parfaites. On discerne un approfondissement aussi bien dans les
objets de la mĂ©ditation que dans ses formes mĂȘmes, chacune rĂ©clamant au yogi
ou dĂ©vot davantage de concentration pour finalement atteindre lâunion
(Samadhi) avec lâobjet contemplĂ©.
Si vous ĂȘtes vraiment dĂ©tachĂ© de tout et constamment orientĂ© vers le SuprĂȘme Absolu
mĂȘme par le dĂ©sir, vous nâaurez pas besoin de paroles. Le Seigneur Krishna interprĂšte
cette tension amoureuse dans la GĂźtĂą, qui traduit jusque dans votre chair lâĂ©lan de votre
ĂȘtre assoiffĂ©. Les divines perfections que le yogi ou dĂ©vot contemple ne lui arrachent quâun
mot oĂč passe toute lâextase de son Ăąme parce quâelles lui apparaissent Ă©blouissantes dans
lâunitĂ© et lâinfinitĂ© du SuprĂȘme Absolu, le mot sacrĂ© « AUM », que nous allons voir plus
loin. Tout dâabord, en ce qui concerne la mĂ©ditation sur la forme cosmique et sur la forme
personnelle, la GĂźtĂą dit au chapitre 12 :
Arjuna dit : De ces trĂšs fermes dĂ©vots qui Tâadorent (comme Krsna, Ton aspect personnel),
et de ceux qui adorent Ton aspect impersonnel, lâĂtre Ăternel (Brahma) ; lesquels ont la
meilleure connaissance du yoga ? (12.01)
Le Seigneur SuprĂȘme dit : Les trĂšs fermes dĂ©vots (Bhaktas) qui adorent avec une foi
suprĂȘme en fixant leur mental sur Moi comme Dieu personnel, je les considĂšre comme
Ă©tant les meilleurs yogis. (12.02)
La rĂ©alisation du Soi est plus difficile pour ceux qui fixent leur mental sur lâĂtre Ăternel
(Brahma) impersonnel et non manifesté ; car, le non manifesté est trÚs difficile à saisir pour
les ĂȘtres incarnĂ©s. (12.05)
Câest pourquoi, fixe ton mental sur Moi, et laisse ton intellect demeurer uniquement sur
Moi (par la mĂ©ditation et la contemplation). Ainsi, tu Mâatteindras certainement. (12.08)
La mĂ©ditation peut ĂȘtre considĂ©rĂ©e comme une sorte de participation Ă la vie du SuprĂȘme
Absolu dans sa forme cosmique ; ou, dans les pas de la GĂźtĂą, le Seigneur SuprĂȘme Krishna,
en tant quâaspect personnel du SuprĂȘme Ătre. Dans la mĂ©ditation, le yogi ou dĂ©vot se
dĂ©couvre lui-mĂȘme dans la vie transcendantale du Seigneur SuprĂȘme Krishna.
MĂ©ditation -I
Une simple technique de méditation est exposée ici :
(1) Lavez votre visage, yeux, mains, et pieds ; et asseyez-vous dans un lieu propre,
silencieux, et sombre, empruntant nâimporte quelle position confortable, avec la
tĂȘte, le cou, et la colonne vertĂ©brale droite et verticale. La musique ni lâencens sont
recommandables pendant la mĂ©ditation. Lâheure et le lieu pour la mĂ©ditation
devraient ĂȘtre fixĂ©s au prĂ©alable. Observez les yama et les niyama (voir page 6),
comme étant les bons principes de vie, autant en pensées, paroles, et actions.
Quelques exercices yogiques sont nécessaires. Minuit, matin et soir sont les
meilleurs moments pour méditer 15 à 25 minutes chaque jour.
(2) Souvenez-vous du nom ou de la forme du dieu personnel (Isht Dev) en qui vous
croyez, tout en implorant Son ou Sa bénédiction.
(3) Fermez vos yeux, et faites cinq Ă dix respirations lentes et profondes.
(4) Fixez votre regard, lâintellect, et Ă©motions au-dedans le centre du thorax, le siĂšge
du cĆur causal, et respirez lentement. Chantez mentalement « So » lorsque vous
aspirez, et « Hum » lorsque vous expirez. Pense que câest la respiration elle-mĂȘme
qui retentit les sons « So et Hum » (Je suis Cet Esprit). Visualisez mentalement et
poursuivez la voie respiratoire par les narines, jusquâau centre situĂ© entre les
sourcils, en descendant jusquâau centre de la poitrine, ou les poumons. Nâessayez
pas de contrĂŽler ou de conduire votre respiration, mais suivez le cours naturel de
votre respiration.
(5) Dirigez votre volontĂ© tout en pensant que vous vous Ă©mergez dans lâinfinie espace
dâair que vous respirez. Si la pensĂ©e sâĂ©carte du rythme respiratoire entamĂ©,
recommencez Ă partir de lâĂ©tape (3). Soyez rĂ©gulier, et persistez sans remettre au
lendemain.
Informez-nous de vos problĂšmes avec cette technique.
Quelques activités profitables lors de la méditation.
Lors de la pratique de la mĂ©ditation, le mental doit ĂȘtre possĂ©dĂ© par les activitĂ©s suivantes :
(1) La premiĂšre est celle de lâintention, du dĂ©sir, ou la ferme rĂ©solution. Câest un dĂ©sir
suprĂȘme, ou une prĂ©fĂ©rence pour le contrĂŽle dans une certaine direction, telle que
la mĂ©ditation. Pour que lâon puisse atteindre le but de la mĂ©ditation, il faut
souhaiter et ĂȘtre rĂ©solu Ă Ă©viter toutes les pensĂ©es erronĂ©es et mondaines, tous les
Ă©tats dâesprit qui sont des empĂȘchements Ă la mĂ©ditation, tout ce qui rend
lâattention confuse ou vacillante. Il faut que le but visĂ© soit la tranquillitĂ©, la
connaissance transcendantale et la sagesse deviennent le désir ultime et le but de
lâesprit.
(2) La seconde activitĂ© nĂ©cessaire est dâavoir de la sincĂ©ritĂ© et du zĂšle. Cela veut dire
que lâon observera les prĂ©ceptes yama et les niyama avec une sincĂ©ritĂ©
persévérante.
(3) La troisiĂšme des activitĂ©s nĂ©cessaire est celle de lâattention vigilante et de la
rĂ©miniscence. Cela veut dire que lâon doit toujours avoir prĂ©sente Ă lâesprit la
nature vide et décevante du monde présent avec toutes ses tromperies et ses
souffrances et quâil faut toujours chĂ©rir la VĂ©ritĂ© Une et de la valeur de
lâIllumination rĂ©sultant de la pratique de la mĂ©ditation.
(4) La quatriĂšme activitĂ© nĂ©cessaire du mental est lâacuitĂ© de la vision profonde. Il faut
réfléchir en comparant les plaisirs du monde avec ceux que nous procurent la
pratique de la mĂ©ditation. Les attractions fascinantes terrestres arrivent souvent Ă
cacher la souffrance et lâirrĂ©alitĂ©. La vision pĂ©nĂ©trante Ă©veillera la conviction que la
pratique de la méditation fait gagner.
(5) La cinquiÚme activité du mental est la clarté et la concentration sur une idée
unique, par exemple celle de la forme cosmique ou personnel du SuprĂȘme Absolu,
Dieu. Cela veut dire que lâon doit clairement comprendre la vĂ©ritable nature du
monde qui produit la douleur ce qui est abominable ; et, en mĂȘme temps il faut
reconnaĂźtre que la tranquillitĂ© et lâintelligence du mental produites par la
méditation sont trÚs précieuses et honorables.
OM (AUM) â GAYATRI â OM TAT SAT:
Les mantras, sont des saints proverbes, mots, hymnes des VĂ©das, ou priĂšres issues des
textes sacrés. Au sens exotérique un mantra est la partie la plus ancienne des Védas, la
seconde partie de ce qui est composé par les Brahmanes. Le mot mantra signifie, la faculté,
ou pouvoir psychique qui conduit Ă la perception ou Ă la pensĂ©e. Un mantra peut aussi ĂȘtre
une vibration sonore spirituelle, qui a pour effet de libĂ©rer lâĂȘtre en purifiant le mental de
ses souillures et tendances matĂ©rielles. Ainsi, en langage mĂ©taphysique, câest la parole fait
chair, ou âGrĂąceâ objectif de la DivinitĂ©. Câest Ă©galement un arrangement de mots ou de
syllabes, disposĂ©s de telle sorte, quâĂ leur Ă©noncĂ© rythmiques des vibrations sont conçu. Par
exemple, OM (AUM) est une vibration sonore spirituelle qui représente la forme
impersonnelle de la Vérité Une.
OM (AUM) est une syllabe mystique reprĂ©sentant lâunivers entier dans sa forme
manifestĂ©e (le monde des noms et des formes) et non manifestĂ© (le Principe SuprĂȘme
invisible, substratum cosmique). La syllabe âOMâ (AUM), est le plus grand « mantra » de
tous les Vedas. La syllabe âOMâ est constituĂ©e de trois sons : âAâ, âUâ, âMâ, chacun
reprĂ©sentant respectivement lâĂ©tat de veille, le rĂȘve et le sommeil profond. Le prolongement
du son âMâ reprĂ©sente le quatriĂšme Ă©tat de conscience « turĂźya » (lâĂ©tat transcendant), et le
silence entre chaque âOMâ est lâInfini. Le âOMâ est le mot de gloire, du Moi spirituel
(lâĂąme) en nous, et lâespĂ©rance de la gloire par la libĂ©ration finale. Lorsque le âMotâ est
correctement prononcĂ©, il sâensuit un rayonnement resplendissant de la DivinitĂ©, car le son
fait Ă©galement entrer en manifestation lâĂąme incarnĂ©e (macrocosmique ou microcosmique),
étant le saint mot par lequel la lumiÚre radieuse intérieure est visible sur terre. OM (AUM)
est le Mot libérateur de la conscience; correctement compris et utilisé, le Mot Sacré délivre
lâĂąme des bornes de la forme de ce monde.
Je suis Bhrgu parmi les grands Sages ; Je suis le monosyllabe et son cosmique OM parmi
les mots ; Je suis Japa-yajna parmi les disciplines spirituelles (yajna) ; et Je suis lâHimalaya
parmi les immobiles. (10.25)
Lorsquâune personne quitte le corps physique en contrĂŽlant tous ses sens ; fixant le mental
sur Dieu, et Prùna dans le cerveau ; engagée dans des pratiques yoguiques ; en méditant
sur Moi et en prononçant OM â le monosyllabe et son sacrĂ©, force de lâĂternel Ătre
(Brahma) â il atteint la demeure SuprĂȘme. (8.12-13)
Le mot sacrĂ© âOMâ (AUM) est la voie la plus directe pour constituer un canal servant Ă la
transmission du pouvoir, autant efficace dans la méditation individuelle que collective lors
dâun Satsang par exemple, ou autre rassemblement de caractĂšre religieux. Parmi les
vibrations spirituelles câest le âOMâ (AUM) qui reprĂ©sente le SuprĂȘme Absolu dans tout
lâunivers visible et invisible jusque dans le plus intime de lâhomme. En effet, le divin habite
au plus intime de lâĂȘtre humain oĂč lâon ne peut pas Ă©teindre sa lumiĂšre. Il est la clartĂ©
intérieure, le témoin caché, ce qui perdure impérissablement de naissance en naissance,
non touchĂ© par la mort, le dĂ©clin ou la corruption. La grĂące du SuprĂȘme Absolu est Sa vie
mĂȘme, et elle est sans cesse dĂ©versĂ©e dans le monde de bien des maniĂšres et Ă des niveaux
divers. Câest donc le but de la GĂźtĂą de procurer aux yogis et dĂ©vots des canaux pour cette
effusion de force divine tel que le mot sacré, et de les préparer à profiter pleinement.
Apprendre Ă Ă©noncer âOMâ (AUM) est une prĂ©paration inconsciente Ă lâactivitĂ© de la
crĂ©ation spirituelle, notamment son accoutument dans le cerveau sans quâil soit Ă©noncĂ©.
Pour rĂ©ussir, ne faut-il pas Ă©tablir une progression graduĂ©e dâun Ă©tat dâactivitĂ© physique Ă
un état de tranquillité mentale !
Je suis Brhatsana parmi les hymnes SĂąma. Je suis GĂŁyatrĂŻ parmi les mantras VĂ©diques, Je
suis Novembre-DĂ©cembre parmi les mois, Je suis le printemps parmi les saisons. (10.35)
Le GĂŁyatrĂŻ Mantra dont le rĂŽle est dâordre majeure dans la civilisation VĂ©dique, est
considĂ©rĂ© comme la manifestation sonore Brahman. Brahma en est lâinitiateur, et câest par
une filiation spirituelle quâil fut, Ă partir de Lui transmis. Le GĂŁyatrĂŻ est composĂ©e de trois
vers, chacun de huit syllabes. CĂŽte Ă cĂŽte avec le mot sacrĂ© âOMâ (AUM), nul nâa Ă©tĂ© aussi
glorifiĂ© que le GĂŁyatrĂŻ et aucun âmantraâ nâa eu le privilĂšge dâĂȘtre chantĂ© par tant de
dévots, et depuis si longtemps.
Aum Bhûr Bhuvah Svah
Aum Tat Savitur varenyam bhargo devasya dhĂźmahi
Dhiyo yo nah prachodayĂąt
Aum
Ce qui traduit :
Aum O CrĂ©ateur de lâunivers
Puissions-nous recevoir Votre SuprĂȘme LumiĂšre qui dĂ©truit le pĂ©chĂ©
Puissiez-vous guider notre intellect dans la bonne direction.
Aum
La vie sur terre est une manifestation matĂ©rielle de la force suprĂȘme et solaire de GĂŁyatrĂŻ.
Ce qui signifie que le GĂŁyatrĂŻ mantra exerce son influence sur divers niveaux de
lâexistence : physique, mental et Ă©motionnel. Câest pour cela, indĂ©pendamment de notre
bagage culturel ou croyance scientifique, inattentif Ă nos croyances religieuses, nous
chantons GĂŁyatrĂŻ mantra, en lâabsorbant et le mĂ©ditant car il possĂšde la puissance pour
ouvrir les écluses de plus hauts capacités intellectuelles et créatives. Le Gãyatrï mantra se
chante individuellement ou en chĆur 108 fois avec un rosaire qui sây apprĂȘte. Pour
comprendre comment un mantra peu avoir une telle importance, nous devons connaĂźtre un
peu ce que lâon pourrait appeler la physique des mondes supĂ©rieurs, et les lois qui rĂ©gissent
ces forces puissantes et la maniĂšre de les utiliser, ce qui au fait la GĂźtĂą nous fait
dĂ©couvrir. Le GĂŁyatrĂŻ mantra est le Seigneur Krishna Lui-mĂȘme ; et en chantant ce
mantra comme Arjuna son charretier, nous lui confions la lutte, Lui tendant les armes, les
reines et du gouvernement.
« OM TAT SAT » est dit dâĂȘtre le triple nom de lâĂternel Ătre (Brahma). Les personnes
avec des qualités Brahmaniques, les Vedas, et le service désintéressé (Seva, Yajna) ont été
crées dans les temps anciens de et par Brahma. (17.23)
Par consĂ©quent, actes de sacrifice, de charitĂ©, et dâaustĂ©ritĂ© prescrits par les Ăcritures,
commencent toujours par lâarticulation « OM » chez les connaisseurs du SuprĂȘme Ătre
(Para-Brahma). (17.24)
Divers types de sacrifice, de charitĂ©, et dâaustĂ©ritĂ© sont accomplis par les chercheurs de
libĂ©ration (MokĆa) en articulant « TAT » (ou, Il est le tout) sans viser Ă la rĂ©compense.
(17.25)
Le mot « SAT » est employé dans le sens de la Réalité et de la Bonté. Le mot « SAT » est
aussi utilisé pour un acte favorable, O Arjuna. (17.26)
La foi dans le sacrifice, la charitĂ©, et lâaustĂ©ritĂ© est aussi appelĂ©e « SAT ». Le service
dĂ©sintĂ©ressĂ© pour plaire au SuprĂȘme, est appelĂ© en vĂ©ritĂ© « SAT ». (17.27)
OM TAT SAT. Sur chaque plan du systĂšme solaire, le SuprĂȘme Absolu dĂ©verse Sa
LumiĂšre, Sa Force et Sa Vie ; et, câest naturellement sur les plans supĂ©rieurs que lâeffusion
de force divine peut nous ĂȘtre confiĂ©e dans toute sa plĂ©nitude sur le plan mental, ce qui fait
dĂ©couvrir la mĂ©ditation et lâutilisation des mantras. OM TAT SAT reprĂ©sente la VĂ©ritĂ©
Absolue, Dieu Lui-mĂȘme, le SuprĂȘme Absolu, et reflĂšte en trois mots lâaspect de lâunique
RĂ©alitĂ©. « OM » reprĂ©sente le Soi transcendantal et pur, lâAbsolu, qui est le Substratum
Infini sur lequel se maintiennent les projections du corps, du mental, et de lâintellect. Le
terme « TAT » est utilisĂ© pour indiquer le But Ăternel, Immuable et Parfait. « TAT »
désigne la source dont tout a émergé, en laquelle tout existe et tout se dissoudra à la fin. Le
mot « SAT » signifie âexistenceâ : câest le Principe dâExistence fonctionnant Ă travers tout
ce qui est perçu, ressenti et pensé dans notre vie.
Donc, invoquer « OM » exprime lâAbsolu transcendantal ; « TAT », la VĂ©ritĂ© Universelle ;
« SAT » le concept. « OM TAT SAT », est la Réalité une en trois parties qui permettent
dâĂ©lever notre esprit et de purifier notre activitĂ© dans le monde. De ce triple dĂ©signation
coule la vie divine avec une plénitude incomparablement grande sur le plan mental et de
lâintuition. Cependant, ainsi pour tout ce qui se rapporte Ă la spiritualitĂ© de la GĂźtĂą ou
autres, des expériences répétées et des investigations patiemment poursuivies, nous
montrent que le vrai succĂšs nâarrive que lorsque le yogi ou dĂ©vot y est totalement ouvert
par une conduite de vie pure et irrĂ©prochable Ă la quĂȘte du SuprĂȘme Absolu. Lorsque la
pensĂ©e ou le sentiment dâun homme est Ă©goĂŻste, lâĂ©nergie produite se meut en courbe
fermée et revient inévitablement se verser sur son propre plan ; mais lorsque la pensée ou
le sentiment est parfaitement altruiste, lâĂ©nergie sâĂ©lance en une courbe ouverte et ne
revient pas dans la direction habituelle, mais passe dans le plan au-dessus, trouvant sa
place nĂ©cessaire Ă lâexpansion requise. Un courant illimitĂ© de force Ă©levĂ©e est toujours prĂȘt
Ă se dĂ©verser dans et par le yogi ou dĂ©vot qui sâoffre Ă Lui, comme lâeau dâun rĂ©servoir qui
abreuve les assoiffés.
Le terme « OM » est prononcĂ© au moment oĂč ceux qui suivent la vie intĂ©rieure, sâadaptent
aux valeurs divines en entreprenant les actes de sacrifice, la charitĂ© et lâaustĂ©ritĂ© ou
lâascĂšse. Ce sont des Ă©tapes prĂ©liminaires pour devenir compĂ©tent en matiĂšre de
méditation, comme :
1. LE REPENTIR, câest-Ă -dire se rendre compte de ses imperfections et faire
de sincĂšres efforts pour les surmonter.
2. LâABSTINENCE de ce que lâon considĂšre comme faux et de ce qui, Ă nos
propres yeux, nous dégrade.
3. LE RENONCEMENT, câest-Ă -dire renoncer au sens de possession, aussi
bien pour les choses matérielles que pour les affections.
4. LâAUSTĂRITĂ, câest-Ă -dire rĂ©duire au minimum ses besoins matĂ©riels.
LâaustĂ©ritĂ© nâimplique pas un manque, pour personne ; le manque
tourmente lâĂąme.
5. LA CONFIANCE AU SEIGNEUR SUPRĂME, câest-Ă -dire la patience face
aux instabilités de la vie. Prenez tout ce qui vous arrive comme venant du
Seigneur SuprĂȘme et tout sera bienvenu.
Nous savons dĂ©jĂ que le mot « TAT » reprĂ©sente la VĂ©ritĂ© Universelle et indique lâunitĂ© de
toutes les crĂ©atures vivantes. Si lâon garde dans le mental les intĂ©rĂȘts de la famille, on oublie
son intĂ©rĂȘt personnel, et lâaccomplissement des actions avec lâattitude mental juste et
désintéressé.
Le mot « SAT » signifie à la fois la réalité et bonté, et les actions dignes de louanges, et a
aussi trait au substratum unique, la Réalité Absolue, « SAT ». Le verset 27
explique comment le mot « SAT » est utilisé pour désigner « Brahman ». Ce mot est
Ă©galement employĂ© pour indiquer la foi et la dĂ©votion dâun yogi ou dĂ©vot face au sacrifice,
lâaustĂ©ritĂ© ou lâascĂšse et la charitĂ©. « OM TAT SAT » invoque le concept du SuprĂȘme
Absolu (OM), de lâUniversel (TAT) et du RĂ©el (SAT), « Brahman » Infini. Dans tout ce
quâaccomplit le yogi ou dĂ©vot, le but suprĂȘme « OM TAT SAT » est invoquĂ©, servant Ă
parfaire toute action, et confÚre à toute chose la plénitude. Le souvenir du Divin exalte
lâĂ©clat et la gloire de nos motifs. Le don de soi au SuprĂȘme Absolu signifie consacrer au
SuprĂȘme Absolu toutes ses actions et Lui offrir son mental. De mĂȘme quâun filet dâhuile,
versĂ© dâun rĂ©cipient dans un autre, coule sans interruption, de mĂȘme le yogi ou le dĂ©vot
déverse toute sa vie en Dieu ou « OM TAT SAT ».
Il y a trois degrĂ©s dans le don de soi Ă Dieu. Le premier, câest de penser quâIl est tout,
lâesprit immanent en tout. Le deuxiĂšme, câest de penser quâIl est dans le mental, câest-Ă -
dire quâIl est manifestĂ© dans le mental exactement comme lâĂ©lectricitĂ© se manifeste partout
mais plus particuliĂšrement dans lâampoule qui donne la lumiĂšre. Le troisiĂšme degrĂ©, câest
la conviction quâIl est mon Moi rĂ©el, Lui et Moi sommes un. Le premier de ces degrĂ©s
sâapplique Ă la mĂ©ditation et Ă la douceur, le deuxiĂšme Ă la mĂ©ditation et Ă la maĂźtrise du
mental et le troisiĂšme câest le but de la mĂ©ditation. Patanjali dĂ©clare dâailleurs : « Le don de
soi Ă Dieu mĂšne Ă lâabsorption spirituelle ».
Le SuprĂȘme Seigneur Krishna (Krsna). Le Seigneur Krishna est le personnage
principal dans le Mahùbhùrata. Il est né à Mathurù, dans le clan des guerriers Vrni, nom
dâun ancĂȘtre du Seigneur Lui-mĂȘme. Krishna est le fils de Vasudeva et de DevakĂź sa mĂšre.
Sa naissance avait été menacée car son oncle qui était roi, suite à une prédiction obscure,
tuait tous les enfants que sa sĆur mettait au monde. Câest ainsi que Krishna fut enlevĂ© Ă sa
mÚre dÚs sa naissance, emmené à Gokula, et confié à des parents adoptifs. Beaucoup
dâĂ©vĂ©nements miraculeux marquĂšrent la jeunesse de Krishna parmi les bergers. Il Ă©tait trĂšs
intelligent, plein de joie de vivre, et jouait merveilleusement de la flĂ»te Ă lâenchantement de
tous. A lâĂąge de douze ans, il revint Ă MathurĂą et vainquit le roi despotique, faisant preuve
dâune force absolument surhumaine. Ensuite, il construisit Ă DvĂąrakĂą une ville, et il y
établit un royaume. En réalité, il ne monta jamais sur le trÎne, mais prodigua ses conseils
en toutes les matiĂšres concernant le bon dĂ©roulement dâun royaume, et dans les
négociations diplomatiques les plus délicates. Son entourage, autant que les citoyens du
royaume et bien au-delĂ reconnaissaient tous quâIl Ă©tait exceptionnel et absolument divin.
Il fut la réalisation divine qui marqua toute Sa vie, de plus Il était un exemple pour le
monde entier de hier, aujourdâhui et demain. En effet, une fois que lâon est parvenu Ă la
rĂ©alisation du SuprĂȘme Absolu, rien ne peut nous faire tomber de cet Ă©tat de conscience
Ă©levĂ©. Il nâexiste pas de profit plus grand que celui-lĂ . Le Seigneur Krishna vivait comme
son enseignement dans la Gßtù. Il pratiquait le détachement, aimant, servant
inlassablement autrui sans attendre les fruits de son action, en parfait yogi, et engagé dans
toutes les activités humanitaires, tout en restant observateur des événements. Krishna fut
plus quâun chef de clan, Il Ă©tait le Guide Spirituel et le Dieu SuprĂȘme de toujours. Il ne
cessa de dire Ă son charretier et ami, Arjuna : « LĂšve-toi et combats ! » Câest suivant la
notion spirituelle quâil faut comprendre cet ordre, et jusquâĂ nous aujourdâhui, et non
rĂ©servĂ© aux guerriers dâautrefois mais Ă lâhumanitĂ© toute entiĂšre, Ă bien mener la bataille
de la vie. Krishna, par les paroles de la GĂźtĂą nous apprend Ă maintenir notre esprit dans ce
mĂȘme Ă©tat que Lui-mĂȘme a menĂ©, afin dâatteindre la libĂ©ration, le Nirvana, la Grande
Illumination pour toujours. Et, dans la GĂźta, la philosophie de vie quâIl nous propose pour
arriver Ă la plus haute perfection, câest lâamour de Dieu le SuprĂȘme Absolu, lâobĂ©issance Ă
Ses prĂ©ceptes divines, le cĂ©libat ou le contrĂŽle des sens, lâaustĂ©ritĂ©, le dĂ©tachement, la
mĂ©ditation, lâoraison, le silence, la paix.
PrasĂąda:
PrasĂąda, qui signifie grĂące ou misĂ©ricorde, est un rituel dâoffrande lors dâun Satsang, dâune
rĂ©union religieuse ou dâun culte Hindou. Câest de la nourriture dâabord offerte au Seigneur
Krishna, ou à une autre divinité et redistribuée ensuite aux yogis ou dévots comme une
bénédiction. Le Seigneur Krishna accepte cette nourriture de la part de ses fidÚles pour
autant que les dons soient offerts avec amour et dévotion ; et, ensuite Lui aussi les
consacres pour les partager avec Ses bien-aimés en guise de purification et de bénédiction.
Toutes les religions recommandent aux fidĂšles de faire des offrandes comme dâailleurs
dans la ChrĂ©tientĂ©, dont la cĂ©lĂ©bration Eucharistique dans les Ăglises Apostoliques et
Ăpiscopales (Catholiques, Orthodoxes, Anglicanes), et la Sainte CĂšne chez les Protestants
dâaprĂšs 1 Corinthiens 11. 23-29 de la Bible. Par notre rituel que lâon nomme âprasĂądaâ
dans lâHindouisme, câest notre offrande Ă Dieu ou Ă un avatar, que ce soit le Seigneur
Krishna ou autre divinitĂ©, mĂȘme JĂ©sus Christ, pour redevenir enfin le partage entre fidĂšles,
disciples, yogis ou dévots peut importe la qualification ou le nom.
Quiconque Mâoffre une feuille, une fleur, un fruit, ou de lâeau avec dĂ©votion ; Jâaccepte et
mange cette offrande de dĂ©votion venant dâun cĆur pur. (GĂźtĂą 9.26)
« Eucharistie » vient du grec eucharistia, que lâon traduit par « action de grĂąces », et utilisĂ©
dans le Nouveau Testament de la Bible pour traduire le terme hĂ©breu berakah, lâaction de
grĂące prononcĂ©e par les Juifs pieux sur toutes choses, et ne lâest certainement pas au sens
Ă©troit dâun remerciement Ă©goĂŻste. « PrasĂąda » est Ă©galement une eucharistie qui purifie.
Mais, ce « prasĂąda » (eucharistie) ne purifie, ne nourrit et ne fait pas lâunitĂ© avec lâavatar,
que si lâoffrande est vĂ©cue dans la foi et dans lâamour, dans une concorde sans tiraillement.
La foi et la charitĂ© sont une participation de lâamour inlassable dont prasĂąda est le gage, et
ainsi se traduit toute la dynamique de ce rite de partage. La mentalitĂ© dâaujourdâhui
pourrait sâĂ©tonner que le SuprĂȘme Absolu ait besoin dâobjets aussi insignifiants quâune
cuillerĂ©e dâhuile pour la lampe, un cierge, un âmandirâ (temple), ou Ă©glise. Le verset 9.26 ci-
dessus montre que les objets matĂ©riels offerts nâont aucune valeur, sauf la dĂ©votion avec
laquelle lâoffrande est faite, que ce soit une feuille, une fleur, un fruit ou simplement de
lâeau. Dans un temple ou un simple coin rĂ©servĂ© chez soi Ă la mĂ©ditation, le Seigneur
accepte lâoffrande faite dans un esprit de pure dĂ©votion. Bien attendu, le SuprĂȘme Absolu
nâa pas besoin de nos libĂ©ralitĂ©s pour augmenter ou maintenir Sa gloire. Tout ce que nous
Lui prĂ©sentons ne vient-il pas de Lui ? Autant quâun amoureux cueille une fleur pour la
donner Ă sa bien-aimĂ©e ; de mĂȘme le yogi ou dĂ©vot cueille une fleur pour offrir au Seigneur
Krishna. Prasùda est une réalité vivante, vivifiante car purificatrice, une énergie, une
puissance. Le Seigneur Krishna, la représentation humaine de Dieu, aprÚs avoir montré
quâIl se trouve Ă lâorigine de la crĂ©ation, quâIl est comme Avatar le CrĂ©ateur autant que la
crĂ©ation, est donc vĂ©ritable objet de tous les sacrifices. Le Seigneur SuprĂȘme rĂ©vĂšle
quelques dons Ă offrir en offrande, non seulement par le soi personnel mais aussi par
âprasĂądaâ. Le Seigneur Krishna, tout comme JĂ©sus de Nazareth, le Messie (le Christ) des
ChrĂ©tiens, trois mille ans plus tard, est le centre et le nĆud de lâhistoire, Dieu Lui-mĂȘme
incarné, désireux se voir présenter en oblation, la nourriture devenant céleste, spirituelle et
divine. Si, en effet, nous voulons nous dĂ©vouer au Seigneur Krishna, et par consĂ©quent Ă
lâenseignement de la GĂźtĂą, par le culte de dĂ©votion, et nous purifier ainsi pour atteindre le
but de lâexistence, notre offrande sera valide.
Celui qui aime le Seigneur Krishna Lui offrira tout ce quâIl dĂ©sire, en mettant en pratique
les prĂ©ceptes de la GĂźtĂą, donc ce que le SuprĂȘme Seigneur a enseignĂ© dans le dialogue avec
Arjuna. PrasĂąda est une offrande de produits naturels que produit la terre, ce que nous
retrouvons dans le rite Eucharistique Catholique, par exemple, lorsque les dons sont offerts
Ă Dieu Ă lâoffrande : « Tu es bĂ©ni, Dieu de lâunivers, Toi qui nous donnes ce pain et ce vin
(jus de raisins non alcoolisĂ©), fruits de la terre et du travail des hommes, pour quâils
deviennent le pain et le vin (jus de raison non alcoolisĂ©) du Royaume Ăternel. » Pour la
briÚveté, nous avons jumelé les deux offrandes, celle du pain et le jus de raisin (produit de
base pour faire le vin), de plus que de nos jours les deux espĂšces (le pain sur patĂšne et le vin
dans le calice) sont trĂšs souvent offertes en mĂȘme temps. Naturellement, les Catholiques et
Orthodoxes ajoutent à leur « prasùda », la « consécration » qui fait partie de la priÚre
eucharistique oĂč Ă lieu la transsubstantiation (comment le Christ se rend prĂ©sent sous les
deux espÚces de pain et de vin), dogme vivement contesté de nos jours. Malgré que le dogme
infaillible ( ?) de la « Présence Réelle » sous les deux espÚces soit vérité pour les uns ; pour
les autres, le pain et le vin simplement symbolisent lâĆuvre rĂ©demptrice du Christ, pendant
que le peuple de Dieu sâunit au Christ et devient âunâ en Lui, contemplant en esprit et vĂ©ritĂ©
Sa mort et résurrection (dogme chrétien universel).
PrasĂąda nous unit Ă©galement au SuprĂȘme Absolu dans la personne du Seigneur Krishna,
ou autre avatar, mais une immolation spirituelle comme dans chez les Catholiques et
Orthodoxes nâexiste pas. Simplement, le Seigneur Krishna est prĂ©sent lĂ oĂč Il est invoquĂ©.
La troisiÚme et derniÚre partie de la célébration Eucharistique est la communion, lorsque
les espÚces bénies et consacrées sont distribuées aux fidÚles comme don salutaire. La priÚre
spĂ©cifiquement du prĂȘtre Ă la communion mentionne, « quâelles soutiennent mon esprit et
mon corps et me donne la guĂ©rison. » Dâabord, nous donnons au Seigneur Krishna notre
offrande, puis nous recevons de Lui, et avons ainsi communion avec Lui. Toutes les
religions insistent sur lâimportance de lâoffrande, sans que le fidĂšle Ă lâimpression quâil fait
un sacrifice lorsquâil donne quelque chose. Quand dans la derniĂšre partie de prasĂąda, celle
de la « communion », nous allons chercher ce que le Seigneur nous donne, soit une feuille,
une fleur, un fruit, ou de lâeau pour nommer quelques espĂšces seulement, une telle
nourriture nâest pas diffĂ©rente de Krishna Lui-mĂȘme. DâoĂč lâurgence logique pour ceux qui
participent à prasùda en offrant des présents au Seigneur, finalement partagent aux dons
du Seigneur Krishna Lui-mĂȘme, se conformant toujours plus pleinement a Lui, en se
mettant davantage sous lâabri de Sa plĂ©nitude.
Il est clair quâune offrande nâest pas efficace que si elle est offerte avec dĂ©votion et par un
mental pur, devenant ainsi un facteur dâĂ©volution spirituelle. Sans ceci, lâoffrande est nulle
et non avenant. Celui qui aime le Seigneur Krishna, Lui offre ce quâIl dĂ©sire, et non ce quâIl
Lui déplaßt. A ce propos, la Gßtù dit :
Les justes, qui mangent le restant du service désintéressé (Seva, Yajna) sont libérés de tous
pĂ©chĂ©s, mais les impies qui cuisinent seulement pour eux-mĂȘmes (sans dâabord Mâen offrir,
ou partager avec les autres), vraiment mangent le péché. (Gßtù 3.13)
Les ĂȘtres vivants subsistent des aliments de grains ; les grains sont produits par la pluie ; la
pluie arrive (comme une faveur des DĂ©vas) si le devoir est accompli en tant que service
désintéressé (Seva, Yajna). Le devoir est prescrit dans les Védas. Les Védas viennent de
Brahma (lâĂternel Ătre). Par consĂ©quent, le Brahman omniprĂ©sent est toujours prĂ©sent
dans Seva. (3.14-15)
Il est dĂ©fendu dâoffrir au Seigneur Krishna de la viande, du poisson ou des Ćufs, ce quâIl
accepterait dâailleurs jamais. Dans le verset 9.26 (voir plus haut), Il confirme que seuls, une
feuille, un fruit, une fleur, et lâeau, Lui est agrĂ©able, mais Il ne mentionne en aucun cas,
viande, poisson et Ćufs. Seuls les lĂ©gumes, cĂ©rĂ©ales, fruits (boissons non alcoolisĂ©s de fruits),
lait (beurre et fromage), et lâeau composent une nourriture substantielle pour lâĂȘtre
humain, ce que le Seigneur Krishna recommande Lui-mĂȘme. Si lâon ne respecte Son dĂ©sir,
comment se croire encore attachĂ© et uni dâune maniĂšre indissoluble au Bien-AimĂ©
Seigneur !
Voilà comment se révÚle cette théologie mystique de la Gßtù, et cet amour secret que
portent les yogis et les dĂ©vots dans lâĂąme pour monter jusquâau SuprĂȘme Absolu. Lâamour
est comme le feu ; il sâĂ©lĂšve toujours vers le haut pour atteindre le centre de sa sphĂšre, le
CĆur spirituel du Seigneur. Offrons au Seigneur Krishna les fruits de la terre, et
préparons Lui des plats végétariens simples et savoureux pour offrir devant Son Image, Sa
Forme dans Son sanctuaire, que ce soit un mandir (temple), ou un lieu de mĂ©ditation dâune
habitation, une salle oĂč se tient satsang, en se prosternant et en Le priant dâaccepter notre
humble offrande, ce qui nous permet de progresser sur la voie spirituelle. Câest en effet une
grande merveille et une chose vraiment suave et douce que le Seigneur tient en rĂ©serve Ă
ceux qui accomplissent leurs devoirs et de lâoffrande faite mĂȘme de soi, dans un sentiment
dâamour. RĂ©pĂ©tons le, le SuprĂȘme Absolu nâa pas besoin de nos offrandes pour augmenter
ou maintenir Sa gloire, car toutes choses viennent de Lui. Le Seigneur accepte lâoffrande de
celui ou celle qui désire Lui plaire en faisant offrande des fruits de la terre et de notre
travail (nos efforts). Le facteur dominant de prasùda, dans la préparation, la présentation,
et finalement lâoffrande, ne sont que pour exprimer notre amour pour le Seigneur Krishna.
Le verset 9.27 suivant, confirme :
O Arjuna, quoique tu fasses, quoique tu manges, quoique tu offres comme oblation au feu
sacrĂ©, quoique charitĂ© tu donnes, quelle que soit lâaustĂ©ritĂ© que tu pratiques, accomplis tout
en offrande Ă Moi. (9.27)
Le SuprĂȘme Absolu a Ses Desseins. MĂȘme au point de vue naturel Il veut que nous
perfectionnons, et Il nous conduit Ă ce sommet de perfection par la GĂźtĂą. Au point de vue
métaphysique surtout, notre cause est tout à fait claire et certaine. On se procure ces
devoirs dans la joie de la foi et en pénétrant dans la retraite mystérieuse de la méditation
oĂč la foi devient vie, et dans le dĂ©tachement comme lâenseigne la GĂźtĂą.
Philippe De Coster, D.D.
The International Gita Society
Cette société internationale pour la diffusion de la Bhagavad Gßtù fondée en 1984, est
enregistrĂ©e aux Ătats Unies dâAmĂ©rique comme « International Gita Society » (abrĂ©gĂ©e
âIGSâ). Câest une association absolument sans but lucratif, taxe exempte en tant quâinstitut
spirituel, sous la Section 501 (c) (3) du Code. LâadhĂ©sion comme membre est totalement
gratuite. Tous sont bienvenus.
Les Actions et Objectives de la IGS sont :
Publier et distribuer, « La Bhagavad Gßtù » dans un langage simple et
compréhensif.
Fournir un cours par correspondance, soutenir, guider et encourager
lâenseignement de la GĂźtĂą comme maniĂšre de vivre.
Une Ă©dition de poche de la GĂźtĂą est gratuitement disponible en langue anglaise, traduit du
Sanscrit par le Dr. Ramananda Prasad. Une traduction de cette version anglaise est en
préparation. Vous pouvez également copier la Gßtù aux adresses suivantes :
gita-society.com/
ou
gita4free.com/
Dr. Ramananda Prasad, Ph. D.D.
Le Dr. Prasad, un ingĂ©nieur graduĂ© de lâInstitut Indien de Technologie Ă Kharagpur, en
Inde, obtint son grade M.S. Ă lâUniversitĂ© de Toronto, et un Ph.D. comme ingĂ©nieur civil Ă
lâUniversitĂ© dâIllinois. Il retrouve sa racine Ă Bihar (Inde) prĂšs de Bodh Gaya. Il travaille
dans la recherche et lâenseignement, comme ingĂ©nieur consultant pour diffĂ©rentes
entreprises, autant pour le gouvernement dâĂtat et FĂ©dĂ©raux aux Ătats Unis dâAmĂ©rique. Il
travailla comme superviseur à la Division Ouest de la Marine Américaine avant de prendre
sa retraite. Il est aussi professeur ingĂ©nieur civil de lâUniversitĂ© dâĂtat âSan Joseâ, et
professeur adjoint de Religion et de Psychologie au CollÚge de « Union Institute of
Cincinnati » à Ohio. Il publia plusieurs pages dans les journaux de la Société Américaine
des IngĂ©nieurs Civils. Le Dr. Prasad comprend confirmer lâimmense contribution et
guidance de la part de ses gourous sur sa voie spirituelle, lui offrant le privilĂšge de
commencer lâĂ©tude de la GĂźtĂą et de Kriya Yoga. Ils sont : Swami Prabhupada, Swami
Chinmayananda, Swami Dayananda Sarasvati de Rishikesh, Swami Harihar, et
Paramahamsa Hariharanandaji ;
Le Dr. Prasad est le membre fondateur de différentes organisations sans but lucratif à San
Francisco Bay Area comme le âVedic Dharma Samajâ, qui a maintenant un temple Hindou
Ă Fremont ; Ramayan Sabha, et le Centre Universel de Yoga Ă San Francisco. Il est le
fondateur du « International Gita Society » en 1984, qui a comme but de servir lâhumanitĂ©
par lâenseignement de la Bhagavad GĂźtĂą et autres Ăcritures, tout en Ă©tablissant lâharmonie
entre toutes les cultures, races, religions, Foi Mondiale par lâenseignement immortelle des
grands maĂźtres spirituels et Ăcritures majeurs. Sa traduction « La Bhagavad GĂźtĂą » (Le
Chant de Dieu), est maintenant Ă sa quatriĂšme Ă©dition, et est obtenue gratuitement sur
Internet en Sanscrit, Hindou et en Anglais.
Il est aidé par son épouse Sadhana Prasad, une grande dévote du Seigneur Shiva. Il a une
fille, Madame Reeta Raina, épouse du Dr. Abhinav Raina, M.D. ; et un fils célibataire,
Sanjay Prasad qui dirige les activitĂ©s de lâIGS, et prĂ©voit de devenir un Docteur en
Ostéopathie.
Le Dr. Prasad prit sa retraite en Mars 2000, afin de se consacrer entiĂšrement Ă la
propagation du message de la GĂźtĂą avec lâaide et la coopĂ©ration de personnes qui partagent
le mĂȘme idĂ©al et organisation.
Pour la lecture de la GĂźtĂą en langue anglaise, que vous pouvez Ă©galement copier :
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Pour acheter le livre en anglais :
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Ăcrivez-nous :
PrĂȘtre, ou une personne de la classe des intellectuels en Inde.
La sĂ©paration du monde fait lâascĂšte. Elle va si loin pour lui quâelle le coupe de la sociĂ©tĂ©
des hommes et femmes, fussent-ils ses Ă©mules dans la recherche du SuprĂȘme Absolu, et
quâelle le fait vivre dâune façon continue avec lâAbsolu seul, nâayant de contact avec les
autres que ceux quâimposent le besoin ou la charitĂ©.
Si nous oubliions le SuprĂȘme Absolu, si notre vie intĂ©rieure se repliait sur elle-mĂȘme, si elle
ne tendait quâĂ une expĂ©rience du divin destinĂ©e Ă nous satisfaire nous-mĂȘmes, nous ne
serions plus dignes de la GĂźtĂą et du nom de yogi, de dĂ©vot et dâascĂšte suivant notre
vocation.
Pour lâappelĂ© par vocation, le yogi (lâermite), lâentrĂ©e dans la solitude dâune forĂȘt ou du
désert est trÚs certainement un instant solennel. Vous quittez le monde normal des relations
sociales pour lâinconnu de la solitude. LĂ , il faut commencer par des arrachements, des
brisements, peut-ĂȘtre des reniements. On nâaccomplit pas sans larmes cette universelle et
parfois définitive rupture avec ce qui nous était le plus cher. On trouvera bon la solitude,
tout en affrontant lâaustĂ©ritĂ©, mais lâanachorĂšte Ă travers les Ăąges en quĂȘte du SuprĂȘme
Absolu dĂ©finit la solitude dâune terre aride et ravinĂ©e, terre de sĂ©cheresse et de tĂ©nĂšbres,
terre que nul homme ne parcourt, oĂč rarement lâhomme se fixe. Finalement, grande est la
paix intĂ©rieure, vivant suivant lâenseignement de la GĂźtĂą.
DâaprĂšs des statistiques peu rĂ©centes quand-mĂȘme datant de quelques annĂ©es, environ trois
cents ermites, hommes et femmes, vivent en France. Ils Ă©taient une vingtaine en 1960. De
ces hommes et de ces femmes â de ces femmes surtout â qui choisissent de tout quitter pour
vivre dans la prĂ©caritĂ© matĂ©rielle, la solitude et le silence. Tous Ă la recherche du SuprĂȘme
Absolu. Hindouistes, bouddhistes, juifs, chrĂ©tiens et mĂȘmes musulmans ont toujours su
quâun des chemins vers la Transcendance â peut-ĂȘtre le plus court et certainement le plus
difficile â se trouvait dans la solitude dite dĂ©sert. Mais, en Occident depuis deux siĂšcles,
rares Ă©taient ceux qui lâempruntaient. Au fait, pour la plupart dâentre nous, la solitude, le
dĂ©sert nâest pas un cadre, il est un Ă©tat dâĂąme. En cela gĂźt sa difficultĂ© dans le monde. Le
centre de la solitude, câest vous en qui cette absence de lâhomme et de ses vanitĂ©s crĂ©e une
premiĂšre zone de silence. Sur la steppe, il nâest quâun bruit : le gĂ©missement du vent. Câest,
dit le proverbe arabe, le dĂ©sert qui pleure parce quâil voudrait ĂȘtre prairie ! Ainsi de vous,
terre aride et sans eau, qui supplie le SuprĂȘme Absolu dây faire pleuvoir sa rosĂ©e. Le souffle
du SuprĂȘme Esprit doit seul se faire entendre.
KuĆa: herbe Ă longues feuilles pointues et coupantes que long utilise dans les rituels.
Purusa : Le Moi spirituel ; Le moi incarnĂ©. Le mot signifie aussi : lâhabitant dans la citĂ©,
câest-Ă -dire dans la corps. Il dĂ©rive du sanscrit « pura » qui signifie citĂ© ou corps et du
« usa », un dérivé du verbe « vas » habiter.
Dans le premier livre de la Bible, la GenĂšse, lâallĂ©gorie de la crĂ©ation relate, « Au
commencement, Dieu créa les cieux et la terre. La terre était informe et vide ; il y avait des
tĂ©nĂšbres Ă la surface de lâabĂźme, et lâesprit de Dieu se mouvait au-dessus des eaux. » (Gen.
1.1-2)
Avatars: Dieu, une ou autre de Ses Ă©manations plĂ©niĂšres ou lâun de Ses reprĂ©sentants,
âdescenduâ du monde spirituel dans le monde matĂ©riel pour rĂ©tablir les principes de la
religion, par exemple le Seigneur Krishna, MoĂŻse, JĂ©sus, Mohammed, pour en citer
quelques uns.
Par exemple, mĂ©diter sur lâeffigie du Seigneur Krishna.
Le repas doit ĂȘtre pris depuis quelques heures afin que la digestion soit accomplie. Le corps
doit ĂȘtre parfaitement propre autant que les vĂȘtements.
Se retirer dans une chambre tranquille oĂč lâon est assurĂ© de nâĂȘtre dĂ©rangĂ© par aucune
intervention ni aucun bruit. En Orient, on trouve souvent dans des maisons mĂȘmes peu
fortunées, une chambre réservée exclusivement pour la méditation. Si on le peut, se mettre
dehors sous un arbre, mais sâassurer toujours la plus grandes tranquillitĂ©.
Au fait, pour les dĂ©butants, il est bon avant de commencer la mĂ©ditation, de sâexercer
quotidiennement à demeurer assis de la maniÚre souhaitée pendant 5, 10, 15 minutes, afin
de discipliner le corps et nâavoir plus Ă sâen occuper quand ils commenceront la mĂ©ditation.
On doit le faire chaque jour Ă la mĂȘme heure.
Ou, les yeux légÚrement baissés, pour limiter le champ de vision, ou complÚtement fermés,
si on peut le faire sans cĂ©der au sommeil. Lâattention doit ĂȘtre concentrĂ©e entre les sourcils.
Beaucoup de personnes font confusion entre les idées et les pratiques de la respiration du
Yoga des Hindous. Il est ainsi utile de donner certaines explications sur les exercices
Hindous de respiration rythmique, mais lâon doit se rendre compte que seuls deux exercices
Yogiques : la respiration dite de purification et la respiration rythmique sont sans danger
pour nous. Le yoga est une science expĂ©rimentĂ©e qui permet Ă chacun dâobtenir un contrĂŽle
inusitĂ© de son corps et de son esprit. Le mot « Yoga » employĂ© dans lâHindouisme veut dire
lâunion avec Brahma, le SuprĂȘme Absolu, lâĂtre SuprĂȘme, et quand on respire, le corps
absorbe avec lâair une force appelĂ©e « PrĂąna » (Ă©nergie vitale) qui est latente dans
lâatmosphĂšre.
(1) Respiration Purificatrice.
Pour purifier le systÚme respiratoire, cet exercice est indiqué :
Fermez la narine droite, en la comprimant sur le cÎté avec un doigt. Aspirez
alors par la narine gauche. Renvoyez lâair aspirez en exhalant par la narine
droite ; recommencez en comprimant la narine gauche et en aspirant lâair par la
narine droite, et ainsi de suite. Les voies respiratoires seront ainsi nettoyées de
lâacide carbonique et autres impuretĂ©s. Si la rĂ©tention du souffle indiquĂ©e est
trop longue pour certains, nous conseillons :
Aspirer en comptant huit ;
Retenir le souffle en comptant quatre.
Expirer en comptant huit.
Rester sans respirer (vide) en comptant quatre.
(2) Respiration Rythmique.
Voici un exercice trÚs estimé :
Vider les poumons en comptant six.
Rester sans respirer en comptant trois.
Remplir les poumons et le thorax en comptant six.
Retenir lâair en comptant trois.
Il ne faut pas que les comptes de la respiration soient plus rapides, ni plus lents
que le battement du cĆur. Cette respiration doit ĂȘtre rythmique, et deviendra
par la suite automatique. Un conseil, il vaut mieux commencer par cette pratique
respiratoire en dehors des heures saintes de mĂ©ditation pour sây habituer. On
doit comprendre que plus tard on peut augmenter le nombre des comptes et
retenir la respiration plus longtemps, mais si un débutant essaie la rétention du
souffle, il se peut quâil ressente des vertiges ou autres troubles. Il faut toujours se
rappeler que le motif de cette respiration est de purifier le corps, de fortifier le
systĂšme nerveux et de calmer le mental, mais en Ă©vitant tout surmenage.
Les deux exercices dont partie du « Prùnùyùma » pratiqué dans les systÚmes Yogiques des
Hindous.
Compagnie (sanga) des maĂźtres et des sages qui sont ancrĂ©s dans la VĂ©ritĂ© (Sat). Câest aussi
la compagnie de ceux en quĂȘte de connaissance spirituelle.
Filiation spirituelle, ou succession disciplique (paramparÄ) : Succession de maĂźtres
spirituels qui ont transmis, sans lâaltĂ©rer, lâenseignement originel du Seigneur jusquâĂ nos
jours, ce que au fait la Bhagavad GĂźtĂą reprĂ©sente en tant que Sainte Ăcriture. Dans la
ChrĂ©tientĂ© Apostolique (Catholique, Orthodoxe, Anglicane et autres), et dâaprĂšs leur
enseignement, par le souffle de lâEsprit, le jour de la PentecĂŽte, un peuple « spirituel » est
nĂ©, dont JĂ©sus est le premier-nĂ© et le Roi. LâĂglise ChrĂ©tienne est donc nĂ©e, et lâapĂŽtre
Pierre avant les autres apÎtres, dÚs ce moment, est entré dans son rÎle d⠫ économe des
mystĂšres de Dieu » suivant lâenseignement de JĂ©sus Christ. Câest Ă partir des apĂŽtres,
quâen premiĂšre instance lâĂglise de JĂ©rusalem fut, pendant un certain temps, toute lâĂglise
de JĂ©sus Christ ; et, de lĂ Antioche et puis Rome, et cette mĂȘme succession apostolique ou
disciplique ininterrompue jusquâĂ nos jours par les Ă©vĂȘques.
En Anglais :
Oh, Creator of the universe
May we receive thy supreme sin-destroying light
May thou guide our intellect in the right direction
Aum
MokĆa : LibĂ©ration, nirvana, Mukti.
Trois mille ans aprĂšs, marquant le dĂ©but dâune nouvelle Ăšre pour la religion Abrahamique
par la naissance du Messie promis, rejetĂ© jusquâĂ nos jours par ceux qui attendent encore
Sa venue, et accepté par les autres de la Nouvelle Alliance, Jésus de Nazareth, fils de Marie
et du pÚre adoptif Joseph, le roi Hérode dans sa tyrannie fit massacrer les nouveaux nés,
afin dâĂȘtre certain de la mort de lâEnfant Messie de Bethlehem.
A lâĂąge de douze ans, JĂ©sus de Nazareth monta avec ses parents Ă JĂ©rusalem comme chaque
annĂ©e pour la fĂȘte de PĂąques. Au moment de repartir aprĂšs la fĂȘte, lâenfant JĂ©sus resta
dans la citĂ©, pour discuter avec les docteurs dans le temple, et tous ceux qui lâentendaient
Ă©taient stupĂ©fiĂ©s de son intelligence et de ses rĂ©ponses. AprĂšs Ă Nazareth, il resta soumis Ă
ses parents. Ici, la narration Ă©vangĂ©lique sâarrĂȘte jusquâĂ lâĂąge de trente ans environ
lorsque Jésus commença sa vie publique.
Incarnation divine (littĂ©ralement) âdescenteâ. Dans la tradition vishnouite, ce mot dĂ©signe
les incarnations de Visnu au nom de dix venant rĂ©tablir lâordre dans le monde : Matsya (le
Poisson), KĂ»rma (la Tortue), VarĂąha (le Sanglier), Narasimha (lâHomme-Lion), VĂąmana
(le Nain), Parasurùma (Rùma portant une hache), le Seigneur Rama, Balarùma (frÚre aßné
de Krishna), le Seigneur Krishna (Krsna), et pour terminer Kalki qui doit venir Ă la fin de
notre Ăšre actuelle. Le Bouddha est parfois aussi inclus dans cette liste, et mĂȘme JĂ©sus
comme incarnation de Dieu fait homme.
Il est impĂ©rieux de dire que toute boisson alcoolisĂ©e nous est absolument interdit. Sâen
abstenir, signifie que le yogi ou dĂ©vot a vraiment compris le dessein du SuprĂȘme Absolu
pour chacun de nous. Lâalcool fait dĂ©raisonner mĂȘme les Sages. Sâabstenir dâalcool et de
drogue (flĂ©au des temps actuels), offre au SuprĂȘme Absolu quelque chose de son propre
mouvement dans la joie du SuprĂȘme Esprit, retranchant ainsi Ă son corps un âinterditâ
dans lâexaltation du dĂ©sir spirituel. Il est donc impĂ©rieux de faire de notre cĆur une carte
blanche oĂč la SuprĂȘme Sagesse divine puisse y graver ce quâIl Lui plaira. Combien est-il
pénible pour un yogi ou dévot de passer des heures entiÚres dans la méditation, muettes,
humbles, soumises, et ne pas vouloir comprendre le rĂ©el motif de lâinterdiction. LâĂąme
arrive Ă la libĂ©ration par la purification opĂ©rĂ©e en elle par le SuprĂȘme Seigneur Lui-mĂȘme.
Pour situer en bref, âPhilippe De Costerâ sur le plan religieux et spirituel, il est un graduĂ© en thĂ©ologie
protestante. Il fut Ă©lĂšve Ă lâInstitut Biblique de Bruxelles (1960) ; il reçut en 1970 un certificat de fin dâĂ©tudes
en mĂ©taphysique chrĂ©tienne de lâ « Unity School of Christianity, Leeâs Summit, Missouri, USA » ; obtint un
diplÎme au London Bible College, Northwood, Londres en 1984, et accepté depuis lors comme ancien élÚve de
cette institution. Entretemps, il poursuivit un programme dâĂ©tude âextra murosâ de rĂ©adaptation thĂ©ologique
avec une faculté de théologie universitaire Américaine, et obtenu le degré de « Bachelier en Théologie » en
1980 au Southeastern University, Greenville, South Carolina par lâintermĂ©diaire du Pasteur Diederik D. J.
Quatannens, Professeur à la Faculté Théologique Protestante de Bruxelles, AumÎnier Général des institutions
pénitentiaires belge ; et, responsable Européen pour la Southeastern University. En 1979, il reçut le titre
âhonoris causaâ Anglo-saxon de âDocteur en DivinitĂ©â, dâoĂč les initiales âD.D.â, confĂ©rĂ© par lâInstitut St.
Ephrem à Stockholm, SuÚde, suite à un travail de recherche et traité théologiques important. Depuis 1963
environ, il sâest toujours intĂ©ressĂ© Ă la mĂ©ditation, Ă la vie Ă©rĂ©mitique et, fut mĂȘme le fondateur dâune telle
institution en Belgique sous lâabrĂ©viation âOMESAâ, lâĂ©sotĂ©risme notamment Hindou ; et, il eut depuis 1974
une haute fonction dans le Vieux Catholicisme Romain et Latine (hors Rome). Le 1e Octobre 1991, il fut reçu
comme oblat sĂ©culier Ă lâAbbaye BĂ©nĂ©dictine Saint Pierre (Catholique Romaine), Steenbrugge, lez Bruges
(Belgique), par feu Dom Livien, prieur de la dite Abbaye. Il jouissait ainsi des privilĂšges spirituels de lâOrdre
Bénédictin. Le PÚre Dom Livien-Frans Biebuyck mourut le 5 Février 1998. Désormais, à la retraite depuis
Janvier 2000, il sâoccupe unique de propager la Bhagavad GĂźtĂą et la MĂ©ditation (comme toujours dâailleurs
depuis les années soixante), tout en vivant son idéal de vie semi érémitique, puisque il est situé en ville.
ĆRÄȘMAD BHAGAVAD-GÄȘTÄ
Chapitre 1
LE DILEMME DâARJUNA
DhrtarĂąstra dit : O Samjaya, assemblĂ©s au champs saint de KurukĆetra et dĂ©sireux de
combattre, que firent mon peuple et les PÄndavas ? (1.01)
Samjaya dit : Voyant la formation de bataille de lâarmĂ©e des PÄndavas, le Roi Duryodhana
sâapprocha de son gourou, et prononça ces paroles : (1.02)
O MaĂźtre, regarde cette puissante armĂ©e des fils de PÄndu, alignĂ©e en formation de bataille
par ton talentueux disciple, le fils de Drupada. (1.03)
Il y a plusieurs héros et puissants archers, égaux à Bhīma et à Arjuna en guerre comme
YuydhÄna, VirÄ«ta, et le grand guerrier Drupada ; DhrsĆŁaketu, CekitÄna, et le Roi hĂ©roĂŻque
de KÄshi ; Purujit, Kuntibhoja, et le grand homme Ćaibya. Le vaillant YudhÄmanyu, le
formidable Uttamauja, le fils de SubhadrÄ, et les fils de DraupadÄ«, tous de grands guerriers.
(1.04-06)
INTRODUCTION DES COMMANDEURS DE LâARMĂE
Reconnais aussi, O Meilleur des « deux-fois-nés », ceux qui sont les plus remarquables de
notre cÎté. Pour ton information, je vais nommer les commandeurs de mon armée ainsi :
(1.07)
Toi-mĂȘme, BhÄ«Ćma, Karna, le victorieux, KĆpa, AĆvatthÄmÄ, Vikarna, fils de Somadatta, et
bien dâautres hĂ©ros qui ont risquĂ© leur vie pour moi. Ils sont armĂ©s avec diverses armes, et
tous sont habiles dans le combat. (1.08-09)
Notre armĂ©e commandĂ©e par BhÄ«Ćma, est invincible ; pendant que leur armĂ©e, protĂ©gĂ©e par
Bhīma est facile à conquérir. Par conséquent, vous tous qui vous tenez dans vos divisions
respectives sur tous les fronts, protĂ©gez seulement BhÄ«Ćma. (1.10-11)
LA GUERRE DĂBUTE AU SON DE LA CONQUE
Le puissant BhÄ«Ćma, lâhomme le plus ancien de la dynastie des Kurus, rugit comme un lion,
et souffla bruyamment dans sa conque, apportant la réjouissance à Duryodhana. (1.12)
AprĂšs que les conques, les gongs, les timbales, les tambours, et les trompettes retentirent
ensembles, la commotion fut immense. (1.13)
Alors le Seigneur KĆĆna et Arjuna, assis dans un grand char attelĂ© Ă des chevaux blancs,
soufflÚrent dans leurs conques célestes. (1.14)
KĆĆna souffla dans Sa conque, PÄncajanya ; Arjuna souffla dans sa conque, Devadatta ; et
Bhīma, le faiseur de formidables actions, souffla dans sa grande conque, Paundra. (1.15)
O Seigneur de la Terre ; le Roi YudhiĆĆŁhira, fils de Kunti, souffla dans sa conque appelĂ©e
Anantavijaya ; pendant que Nakula et Sahadeva soufflĂšrent dans leurs conques respectives
SughoĆa et ManipuĆpaka. Le Roi de KÄĆÄ«, le puissant archer ; SikhandÄ«, le grand guerrier ;
DhĆĆĆŁadyumma, VirÄta, lâinvincible SÄtyaki, le Roi Drupada, les fils de DraupadÄ«, et le
puissant fils de SubhadrÄ, soufflĂšrent dans leurs conques respectives. (1.16-18)
Le mugissement tumultueux, rĂ©percutant de par la terre et le ciel, dĂ©chira le cĆur des
Kauravas. (1.19)
ARJUNA DĂSIRE INSPECTER LâARMĂE ENNEMIE QUâIL VA DEVOIR AFFRONTER
Voyant les fils de Dhrtarùstra rangés en ordre pour commencer la bataille, pendant que
dĂ©jĂ les projectiles volaient ; Arjuna dont lâĂ©tendard portait lâemblĂšme du Seigneur
HanumÄna, prit son arc et sâadressa au Seigneur KĆĆna : O Seigneur, je Tâen prie arrĂȘte
mon char entre les deux armées, pour que je puisse observer ceux qui sont rangés ici
ardents pour le combat, contre lesquels je suis engagé dans cet acte de guerre. (1.20-22)
Je dĂ©sire observer tous ceux qui sont prĂȘts Ă servir, rassemblĂ©s ici pour livrer bataille,
apaisant ainsi le fils perfide de DhrtarĂąstra. (1.23)
Samjaya dit : O Roi ; Seigneur KĆĆna, Ă la requĂȘte dâArjuna, jâai placĂ© le meilleur des
chars au milieu des deux armĂ©es, en face de BhÄ«Ćma, Drona, et les autres Rois ; et dit Ă
Arjuna : « Vois les Kurus rassemblés. » (1.24-25)
Arjuna vit lĂ ses oncles, grands-pĂšres, des maĂźtres, des oncles maternels, frĂšres, fils, petit-
fils, et camarades. (1.26)
LE DILEMME DâARJUNA
Voyant aussi les beaux-pÚres, les compagnons, et tous ses parentés se trouvant dans les
rangs de deux armĂ©es, Arjuna fut envahi dâune grande compassion et dit
douloureusement : O KĆĆna, voyant tous mes proches rangĂ©s dĂ©sireux de se battre, mes
membres fléchissent et ma bouche se dessÚche. Mon corps tremble et mes cheveux se
dressent. (1.27-29)
Lâarc me glisse des mains et ma peau brĂ»le intensĂ©ment. Ma tĂȘte est prise de vertige, je me
sens incapable de me tenir debout, et O KĆĆna, je ne vois que funestes prĂ©sages. Je ne vois
pas lâutilitĂ© de tuer mes parentĂ©s dans cette guerre. (1.30-31)
Je ne dĂ©sire pas la victoire, ni les plaisirs, ni royaume, O KĆĆna. A quoi bon le pouvoir, ou
les plaisirs, ou mĂȘme la vie, O KĆĆna ? Car, tous ceux pour qui nous dĂ©sirons le royaume,
les jouissances et les plaisirs sont rangés ici en bataille, renonçant à leur vie et à leurs
richesses. (1.32-33)
Je ne souhaite pas de tuer les maĂźtres, oncles, fils, grands-pĂšres, oncles maternels, beaux-
pĂšres, beaux-frĂšres, et autres parentĂ©s qui sont prĂȘts Ă nous tuer, mĂȘme pour la
souverainetĂ© des trois mondes, et encore moins pour ce royaume terrestre, O KĆĆna. (1.34-
35)
O Seigneur KĆĆna, quels plaisirs pourront ĂȘtre nĂŽtres en tuant les fils de DhrtarĂąstra ? En
tuant ces criminels nous commettrons que le péché. (1.36)
Par conséquent, nous ne pouvons pas tuer nos cousins frÚres, les fils de Dhrtarùstra.
Comment pourrions-nous ĂȘtre heureux aprĂšs avoir tuĂ© les nĂŽtres, O KĆĆna ? (1.37)
MĂȘme si ils sont aveuglĂ©s par la convoitise, ne voient aucun mal Ă dĂ©truire leur famille, ou
de péché en trahissant leurs amis. Comment ne pas nous détourner de ce péché, nous qui
voyons clairement le mal dans la destruction de la famille, O KĆĆna ? (1.38-39)
ARJUNA DĂCRIT LES MĂFAITS DE LA GUERRE
Les traditions immémoriales familiales et les codes de conduite périssent avec la
destruction de la famille. LâimmoralitĂ© prĂ©vale dans la famille Ă cause de la destruction des
traditions familiales. (1.40)
Et lorsque lâimmoralitĂ© prĂ©vale, O KĆĆna, les femmes de la famille deviennent
corrompues ; quand les femmes sont corrompues, beaucoup de problĂšmes sociaux
sâĂ©lĂšvent. (1.41)
Ceci mĂšne la famille et les tueurs de la famille en enfer, Ă cause que les esprits de leurs
ancĂȘtres sont dĂ©gradĂ©s, privĂ©s des offrandes cĂ©rĂ©moniales de riz et de lâeau. (1.42)
Les qualitĂ©s Ă©ternelles dâordre social et des traditions familiales de ceux qui dĂ©truisent leur
famille sont ruinĂ©es en commettant le pĂ©chĂ© de lâillĂ©gitimitĂ©. (1.43)
On nous a racontĂ©, O KĆĆna, que les personnes dont les traditions familiales sont dĂ©truites,
demeure pour longtemps en enfer. (1.44)
HĂ©las ! Nous sommes prĂȘtes Ă commettre un grand pĂ©chĂ©, en cherchant Ă massacrer nos
proches par convoitise du plaisir de la royauté. (1.45)
Il serait préférable pour moi que les fils de Dhrtarùstra me tuent dans la bataille les armes
en mains, pendant que je suis désarmé et sans résistance. (1.46)
EN AVANĂANT ON ENDURCIT, ET MALGRĂ LâENDURCISSEMENT ON PEUT
DEVENIR DâILLUSIONNĂ
Samjaya dit : Ayant dit ceci en plein champ de bataille, abandonnant arc et flĂšches, Arjuna
sâassit dans son char lâesprit accablĂ© de douleur. (1.47)
Ainsi prend fin le premier chapitre intitulĂ© « Le dilemme dâArjuna » dans les UpaniĆad de
la BhagavadgÄ«tÄ, lâĂ©criture de yoga, touchant la science de lâAbsolu dans la forme du
dialogue entre SrÄ«kĆĆna et Arjuna.
Le monde est un champ de bataille pour une lutte morale. Le débouché décisif séjourne
dans le cĆur des hommes oĂč les batailles se livrent chaque jour et Ă tout instant.
Lâascension du visible Ă lâinvisible ou du dedans, de la souffrance au mental, a lieu par la
voie du dharma, cette action gouvernée par la loi essentielle de la propre nature de chacun.
MĂȘme dans notre vie corporelle, câest par la pratique du dharma ou la morale juste, que
nous parvenons Ă cet Ă©tat de sĂ©curitĂ© oĂč toute difficultĂ© culmine dans une joie intĂ©rieure
que le monde ne peut offrir. La vie dans le monde est un Ă©colage, lâĂ©cole des saints yogis et
dĂ©vots, ce que signifie « ĂȘtre dans le monde mais pas du monde » oĂč la flamme sacrĂ©e de
lâesprit ne se laisse jamais Ă©teindre. Le monde est le lieu oĂč nous Ă©puisons notre karma
(action qui se prolonge par des conséquences) et accomplissons ainsi la tùche comme une
vocation de construire notre Ăąme. Le champ saint de KurukĆetra et de bataille est celui du
droit, parce que le Seigneur qui est le protecteur du dharma, y est activement présent. La
vie est une bataille contre lâesprit du mal. Le processus crĂ©ateur est une tension perpĂ©tuelle
entre deux incompatibles, chacun dressĂ© contre lâautre. Par leur mutuel conflit, lâĂ©volution
progresse et le but de lâunivers sâaccomplit. Ce monde comporte des Ă©lĂ©ments
dâimperfections, de mal et dâirrationalitĂ©, et il est notre devoir par lâaction du dharma, de
le changer. KurukĆetra est le champ de la pĂ©nitence et de la discipline (Manu, II, 19 et 20).
Ătablir une distinction trĂšs nette entre vie spirituelle et vie sociale (matĂ©rielle) nâest pas une
chose facile, car la vie spirituelle conditionne profondĂ©ment lâautre, et vice versa. La vie
yogique nâest pas un but en soi, mais doit amener le yogi ou dĂ©vot Ă abandonner beaucoup
de choses et de sâaligner aux saintes Ă©critures comme la Bhagavad-GĂźtĂą, afin dâaboutir plus
rapidement quâautrement Ă la libĂ©ration ou le Nirvana. La solitude de lâascĂšte, du yogi ou
dévot, est une aide à une vie consacrée au silence et à la méditation afin de parvenir à cette
contemplation pure.
O Meilleur des « deux-fois-nés », est celui qui a reçu le cordon sacré, celui qui est né deux
fois dans la chair Ă la naissance, et lors de la conversion ou lâinitiation Ă la vie de lâesprit.
Nous naissons dans le monde naturel, tandis que la seconde naissance est celle de lâesprit.
Lâhumain naĂźt enfant de la nature et croĂźt jusquâĂ la stature spirituelle pour devenir un
enfant de la lumiĂšre.
Dans toute la littĂ©rature hindoue et bouddhiste le char symbolise lâorganisme
psychophysique, ou la discipline qui Ă©tudie et cherche Ă quantifier les sensations
provoquĂ©es par des excitations dĂ©terminĂ©es. Les coursiers sont les sens, les rĂȘnes leur
maĂźtrise mais le cocher, le guide, est lâesprit, le Soi vĂ©ritable, Atman. KĆĆna le cocher est
lâesprit en nous. (Katha Upanishad, III, 3)
Arjuna est conduit par des conventions sociales et par la moralité de sa culture et non par
une vision personnelle de la Vérité. Il lui faut détruire les symboles de cette moralité
extĂ©rieure et acquĂ©rir la force intĂ©rieure. Ses anciens instructeurs qui lâont guidĂ© dans la
vie doivent ĂȘtre tuĂ©s avant quâil puisse acquĂ©rir la sagesse de lâĂąme, alors mĂȘme que les
ennemis sont des agresseurs, nous ne pouvons pas les tuer. On ne peut pas commettre un
pĂ©chĂ© en reprĂ©sailles dâun autre pĂ©chĂ©. M.B., Udyogaparva, 38, 73, 74 : « ConquĂ©rez la
colĂšre des autres par la non-colĂšre ; les mĂ©chants par la saintetĂ©, lâavare par des dons, la
fausseté par la vérité ».
Quand nous nĂ©gligeons les archĂ©types dâidĂ©aux incarnĂ©s dans les traditions immĂ©moriales,
troublant ainsi lâĂ©quilibre social, nous introduisons donc le chaos dans le monde.
Les paroles dâArjuna sont prononcĂ©es dans lâagonie et la charitĂ©. Son mental est sur la
frontiÚre entre le matériel et le spirituel. Il lutte pour arriver à une solution, comme
lâhomme a toujours fait, et pourtant il est inapte Ă prendre une dĂ©cision Ă cause de son
incapacitĂ© de comprendre sa propre nature, celle des autres et du cosmos. Il met lâaccent
sur la douleur humaine et la dĂ©tresse matĂ©rielle quâimplique la guerre, malgrĂ© que le but
essentiel de la vie ne soit pas la poursuite du bonheur et lâaisance matĂ©rielle. LâĂąme est
attirĂ©e par le SuprĂȘme Absolu hors des sentiers de la persuasion, de lâinstruction et de
lâentendement, parce que dans ceux-ci, lâamour des choses divines est trop imparfait, et il y
dĂ©pend trop de crĂ©atures, il y ressemble Ă des gouttes dâeau qui tombent lâune aprĂšs lâautre
et par intervalles. Nombreux sont ceux pour qui cette philosophie est sans rapport avec la
vie. Deux voies conduisent au SuprĂȘme Absolu. Lâune se sert de la rĂ©flexion et du
raisonnement, lâautre de la foi simple et de la connaissance gĂ©nĂ©rale et confuse. La
premiĂšre sâappelle « mĂ©ditation » ; la seconde la contemplation, le recueillement intĂ©rieur
dans son sens le plus profond et acquise. La premiĂšre est pour ceux qui commencent et
persévÚrent ; la seconde pour ceux qui sont plus avancés dans la vie yogique. La premiÚre
est sensible, la seconde plus pure et profondément spirituelle. Plus on est dans
lâindĂ©pendance des crĂ©atures, plus on sâappuie sur le SuprĂȘme Absolu, et sur Ses
inspirations secrÚtes, par le moyen de la foi pure, le détachement, et la charité ferme,
confiant et véhément. Il faut donc que la charité prenne les devants, se
dĂ©pouillent dâapprĂ©hensions de toutes sortes ; que le yogi ou dĂ©vot aime son Seigneur pour
ce quâIl est, et non pour ce que lâimagination lui en prĂ©sente. Lâauteur de la GĂźtĂą nous
donne par le dialogue entre KĆĆna et Arjuna lâexpression dramatique du sentiment de la
PrĂ©sence Divine en lâhomme. Plus le mental de lâhomme sâĂ©lĂšve, plus il se dĂ©tache des
objets sensible. Bien des Ăąmes viennent jusquâĂ la porte de la contemplation, mais il y en a
peu qui passent, soit faute dâun bon gourou, ou parce quâelles ne se soumettent pas Ă Dieu
avec une entiĂšre confiance. Quand Arjuna est tentĂ© de sâabstenir de son devoir divin, la
PrĂ©sence en lui, son inspiration la plus authentique, lui rĂ©vĂšle la voie Ă©tablie aussitĂŽt quâil a
pu écarter les subtiles suggestions de son moi inférieur. Quand le mental considÚre avec
attention les mystĂšres de foi comme dĂ©crits dans la GĂźtĂą, ce quâil considĂšre en dĂ©tail,
essayant dâen dĂ©couvrir la vĂ©ritĂ©, il expĂ©rimente que le cĆur le plus intime de son Ăąme est
aussi le centre divin de tout lâunivers, le microcosme dans le macrocosme. Le soi le plus
profond dâArjuna est KĆĆna. Seul celui qui, vouĂ© au Seigneur KĆĆna, possĂšde la grandeur
dâĂąme et la tendresse de cĆur dâArjuna. Nul est aussi proche du SuprĂȘme Absolu, Dieu,
que soi-mĂȘme et pour parvenir Ă Lui nous nâavons besoin quâun cĆur ardent et lâintention
pure. Arjuna se tient dans sa solitude et nudité sans intermédiaire en face de son Seigneur.
Il y a dans une telle situation une continuelle communion entre le SuprĂȘme Absolu et
lâhomme, qui permet un dialogue se poursuivant jusquâĂ ce quâune harmonie complĂšte soit
atteinte. Le yogi ou dévot peut connaßtre soit par une habitude acquise à force de
raisonnement, soit par des lumiĂšres divines particuliĂšres. Le SuprĂȘme Absolu nâest jamais
éloigné de nous, il est tout proche. Il est ni un spectateur détaché ou un juge lointain de la
cause en cours, mais un ami. Le Seigneur veut que par la spiritualité autant que par le
secours de Sa grĂące on fasse naĂźtre dans notre cĆur la lumiĂšre dans les tĂ©nĂšbres, le silence
dans le tumulte, la solitude mĂȘme au milieu de la foule, lâoubli dans la misĂšre, la force dans
la faiblesse, le courage dans la crainte, la résistance au milieu des tentations, et la paix dans
la guerre. Le chapitre premier sâachĂšve dans lâabattement et la souffrance, et cela aussi est
appelĂ© Yoga, car cette obscuritĂ© de lâĂąme est un pas important sur la voie de la spiritualitĂ©.
Arjuna traverse une phase de grande tension intĂ©rieure, mais lorsquâil se dĂ©tache de ses
obligations sociales et demande pourquoi il lui faut accomplir le devoir que la société attend
de lui, il passe au delĂ de son moi socialisĂ© et prend pleine conscience de lui-mĂȘme en temps
quâhomme seul et dĂ©pouillĂ© de tout. Lorsque le Seigneur veut conduire lâĂąme par la voie
mystique, Ă la connaissance et Ă lâamour de la Loi intĂ©rieure, Il la fait passer parfois par
des sentiers arides et ténébreux. En ce qui concerne Arjuna, sa nouvelle liberté crée en lui
un profond sentiment dâanxiĂ©tĂ©, de solitude, de doute et dâinsĂ©curitĂ©. Cependant, pour quâil
retrouve sa fonction et son efficacitĂ©, il faut quâil dĂ©passe les sentiments. La conclusion
mentale est le point de dĂ©part de la recherche spirituelle, et lâattitude nĂ©cessaire pour que
les graines de la GĂźtĂą puissent ĂȘtre semĂ©es et les fleurs de la perfection cueillies. Croissance
et activité sont les principales caractéristiques de la vie dans son ensemble, aussi bien sur le
plan physique que sur le plan spirituel.
Chapitre 2
LA CONNAISSANCE TRANSCENDANTALE
Samjaya dit : Le Seigneur KĆĆna prononça ces paroles Ă Arjuna ayant les yeux affligĂ©s et
pleins de larmes, envahit de compassion et de désespoir. (2.01)
Le SuprĂȘme Seigneur dit : Comment un tel dĂ©couragement a-t-il pu sâemparer de toi en ce
moment ? Ce nâest pas convenable pour un Aryen (ou une personne dont le mental et les
actions sont nobles). Câest dĂ©shonorant, et ne conduit pas une personne au ciel, O Arjuna.
(2.02)
Ne te laisse pas aller Ă la couardise, O Arjuna, car cela ne te convient pas. Chasse cette
faiblesse insignifiante de ton cĆur et lĂšves-toi pour le combat, O Arjuna. (2.03)
ARJUNA CONTINUE SON RAISONNEMENT CONTRE LA GUERRE
Arjuna dit : Comment pourrais-je dans le combat lancer des flĂšches Ă BhÄ«Ćma et Drona,
qui sont dignes de ma vĂ©nĂ©ration, O KĆĆna ? (2.04)
Vraiment, mieux voudrait vivre dans ce monde dâaumĂŽne plutĂŽt que dâabattre ces nobles
gourous, car en les tuant je ferais que profiter des richesses et plaisirs souillées de sang.
(2.05)
Nous ne connaissons pas quel alternatif soit mieux pour nous, combattre ou quitter.
Dâailleurs, nous ne savons pas si nous allons conquĂ©rir ou quâils nous conquĂ©rront. Nous ne
devrions pas, ne fus que souhaiter, de vivre aprÚs avoir tué les fils de Dhrtarùstra qui sont
dressés devant nous. (2.06)
Mes sens sont envahis par la faiblesse de la pitié, et mon mental est confus quant au devoir
(Dharma). Je Te demande de me dire en toute certitude quâelle est la meilleure. Je suis Ton
disciple. Instruis-moi, qui aie trouvé refuge en toi. (2.07)
Je ne vois pas quâacquĂ©rir un royaume sans rival et prospĂšre sur cette terre, ou mĂȘme la
seigneurie sur les régnants célestes (Devas) dissiperaient la douleur qui dessÚche mes
sens. (2.08)
Samjaya dit : O Roi, aprĂšs avoir parlĂ© ainsi au Seigneur KĆĆna, le puissant Arjuna dit Ă
KĆĆna : je ne combattrai pas, et il resta silencieux. (2.09)
O Roi, le Seigneur KĆĆna, esquissant un sourire, dit ces paroles Ă Arjuna dĂ©couragĂ© au
milieu des deux armées. (2.10)
LES ENSEIGNEMENTS DE LA GĂTĂ DĂBUTE PAR LA VRAIE CONNAISSANCE DU
SOI ET DU CORPS PHYSIQUE
Le Seigneur SuprĂȘme dit : Tu pleures pour ceux qui ne sont pas dignes dâĂȘtre lamentĂ©s, et
pourtant tu prononces des paroles de sagesse. Le sage ne se lamente ni pour les vivants ni
pour les morts. (2.11)
Il nây eut jamais un temps que ces monarques, toi, ou moi cessĂšrent dâexister, et nous ne
pourrons jamais cesser dâexister dans lâavenir. (2.12)
Tout comme lâentitĂ© vivante (AtmĂą, JĂźva, JĂźvĂątma) acquiert lâenfance, un corps jeune, et un
corps de vieillesse durant cette vie ; de mĂȘme elle acquiert un autre corps aprĂšs la mort. Le
sage nâen est pas troublĂ©. (Voir aussi 5.08) (2.13)
Les contacts des sens vers les objets appropriés engendrent la chaleur et le froid, la douleur
et le plaisir. Ils sont transitoires et impermanents. Ainsi, apprends Ă les endurer, O Arjuna.
(2.14)
Car une personne calme â qui nâest pas affectĂ©e par ces sensations, et est ferme dans la
douleur et le plaisir, se rend digne de lâimmortalitĂ©, O Arjuna. (2.15)
LE SOI EST ETERNEL, LE CORPS EST TRANSITOIRE
LâEsprit invisible (Sat, AtmĂą) est Ă©ternel, et le monde visible (y compris le corps physique)
est transitoire. La réalité de ces deux est vraiment perçue par les voyants de la vérité. (2.16)
LâEsprit (AtmĂą) par qui tout cet univers est pĂ©nĂ©trĂ©, est indestructible. Personne ne sait
dĂ©truire lâimpĂ©rissable Esprit. (2.17)
Les corps de lâĂ©ternel, immuable, et incomprĂ©hensible Esprit sont pĂ©rissables. Par
conséquent, livre bataille, O Arjuna. (2.18)
Celui qui pense quâAtmĂą (Esprit) peut tuer, et celui qui pense quâAtmĂą est tuĂ©, les deux
sont ignorants. Parce quâAtmĂą ne tue ou est tuĂ©. (Un verset parallĂšle se trouve dans KaU
2.19) (2.19)
LâEsprit (AtmĂą) ne naĂźt jamais et ne meurt jamais en aucun temps. Il ne commence pas
d'ĂȘtre, ou ne cesse pas dâexister. Il est ingĂ©nĂ©rĂ©, Ă©ternel, permanent, et ancien. LâEsprit
nâest pas dĂ©truit lorsque le corps est dĂ©truit. (Voir aussi KaU 2.18) (2.20)
O Arjuna, comment une personne qui sait que lâEsprit (AtmĂą) est indestructible, Ă©ternel,
ingĂ©nĂ©rĂ©, et immuable, tue quelquâun ou provoque quelquâun dâĂȘtre tuĂ© ? (2.21)
LA MORT ET LA TRANSMIGRATION DE LâĂME
Tout comme un homme revĂȘt des vĂȘtements neufs aprĂšs avoir laissĂ© les anciens ; de mĂȘme,
lâentitĂ© vivante (AtmĂą, JĂźva, JĂźvĂątma) acquiert de nouveaux corps aprĂšs avoir rejetĂ© les
vieux corps. (2.22)
Les armes ne peuvent pourfendre cet Esprit (AtmĂą), le feu ne le brĂ»le pas, lâeau ne le
mouille pas, et le vent ne le dessĂšche. LâAtmĂą ne peut ĂȘtre coupĂ©, brĂ»lĂ©, mouillĂ©, ni
asséché. Il est éternel, omniprésent, inchangé, immuable, et ancien. (2.23-24)
Lâesprit (AtmĂą, le Soi) est dit ĂȘtre inexplicable, incomprĂ©hensible, et immuable.
Connaissant cet Esprit comme tel, tu ne devrais pas tâaffliger. (2.25)
Bien que tu penses que cette entité vivante ou corps prend naissance et meurt
perpĂ©tuellement, mĂȘme alors, O Arjuna, tu ne devrais pas tâaffliger ainsi. Car la mort est
certaine pour ce qui est né, et la naissance est certaine pour ce qui meurt. Par conséquent,
tu ne devrais pas te lamenter sur lâinĂ©vitable. (2.26-27)
Tous les ĂȘtres, O Arjuna, sont non manifestĂ©s â invisibles aux yeux physiques â avant la
naissance et aprĂšs la mort. Ils se manifestent seulement entre la naissance et la mort. Y a-t-
il lĂ de quoi sâaffliger ? (2.28)
LâESPRIT INDESTRUCTIBLE TRANSCENDE LE MENTAL ET LA PAROLE
Certains voient lâEsprit comme une merveille, dâautres le dĂ©crivent comme merveilleux,
dâautres entendent parler de lui comme dâune merveille. MĂȘme aprĂšs avoir entendu le
concernant, peu de gens le connaĂźt. (Voir aussi KaU 2.07) (2.29)
O Arjuna, lâEsprit qui demeure dans le corps de tous les ĂȘtres est Ă©ternellement
indestructible. Par conséquent, tu ne devrais pas pleurer pour personne. (2.30)
LE SEIGNEUR KĆĆNA RAPPELLE ARJUNA DE SON DEVOIR COMME GUERRIER
Ayant Ă©gard Ă ton propre devoir en tant que guerrier, tu ne devrais pas ĂȘtre indĂ©cis. Car, il
nây a rien de plus heureux pour un guerrier quâune guerre juste. (2.31)
Seulement les guerriers favorisĂ©s, O Arjuna, reçoivent lâopportunitĂ© dâune telle guerre non
préméditée, qui est comme une porte ouverte vers le ciel. (2.32)
Si tu ne veux pas combattre cette guerre juste, alors tu manqueras Ă ton devoir, tu perdras
ta rĂ©putation, et tu tâaffligeras le pĂ©chĂ©. (2.33)
Les hommes raconteront perpétuellement ta disgrùce. Pour les honorables, le déshonneur
est pire que la mort. (2.34)
Les grands guerriers penseront que tu tâes retirĂ© de la bataille par crainte. Ceux qui tâon
hautement estimés, perdront leur respect pour toi. (2.35)
Tes ennemis prononceront beaucoup de paroles injurieuses et mépriseront ta capacité. Que
peut-il y avoir de plus douloureux ? (2.36)
Tu iras au ciel si tué au combat (répondant au devoir), ou victorieux tu jouiras du royaume
terrestre. Par conséquent, debout donc, décidé à combattre, O Arjuna. (2.37)
ConsidĂ©rant le plaisir et la souffrance, le gain et la perte, la victoire et la dĂ©faite de la mĂȘme
façon, engage-toi dans ton devoir. En accomplissant ton devoir, tu ne commettras pas de
péché. (2.38)
LE SCIENCE DE KARMA-YOGA, LâACTION DâDĂSINTĂRESSĂE
La sagesse de la connaissance transcendantale tâa Ă©tĂ© transmise, O Arjuna. Maintenant
Ă©coute la sagesse de Karma-yoga, le service dĂ©sintĂ©ressĂ© (SevÄ), car en y Ă©tant pĂ©nĂ©trĂ© tu
seras libĂ©rĂ© des chaĂźnes de lâaction (Karma). (2.39)
Dans le Karma-yoga aucun effort nâest jamais perdu et il nây a pas dâeffet adverse. MĂȘme
la moindre pratique de cette discipline protĂšge lâhomme de la grande peur de la naissance
et de la mort. (2.40)
Un Karma-yogi tient une détermination résolue vers la réalisation de Dieu, O Arjuna, mais
les dĂ©sires sont innombrables et diverses de lâhomme qui travaille pour jouir des fruits de
son activité. (2.41)
LES VEDAS TRAITENT LâASPECT MATĂRIEL ET SPIRITUEL DE LA VIE
Les mal guidĂ© prend plaisir dans le chant mĂ©lodieux de la VĂ©da â sans comprendre le vrai
objectif des VĂ©das â rĂ©flĂ©chit, O Arjuna, comme si il nây a rien dâautre dans les VĂ©das que
des rituelles avec la seule raison dâobtenir les jouissances cĂ©lestes. (2.42)
Ils sont dominĂ©s par les dĂ©sirs matĂ©riels, et considĂšrent lâacquisition cĂ©leste comme Ă©tant le
but le plus Ă©levĂ© de la vie. Ils sâengagent dans des rites spĂ©cifiques pour cause de prospĂ©ritĂ©
et de jouissance. La renaissance est le résultat de leurs actions. (Voir aussi KaU 2.05, IsU
09) (2.43)
La dĂ©termination rĂ©solue de la rĂ©alisation du Soi nâest pas formĂ©e dans le mental de ceux
qui sont attachés aux plaisirs et au pouvoir, dont le jugement est obscurci par ces activités
ritualistes. (2.44)
Une partie des Vedas traite les trois modes ou états (Gunas) de la Nature matérielle.
LibĂšre-toi des paires dâopposĂ©s, restes toujours Ă©quilibrĂ© et indiffĂ©rent Ă toutes pensĂ©es
dâacquisition et de prĂ©servation. LĂšve-toi au-dessus des trois Ă©tats, en pleine conscience, O
Arjuna. (2.45)
Pour la personne dont le Soi est rĂ©alisĂ© les VĂ©das sont aussi utiles quâun petit rĂ©servoir
dâeau lorsque lâeau dâun Ă©norme lac devient disponible. (2.46)
THĂORIE ET PRATIQUE DU KARMA-YOGA
Tu as AdhikÄra (droit, privilĂšge) simplement sur tes devoirs respectifs, mais pas de
contrĂŽle ou de revendication sur les rĂ©sultats. Les fruits du travail ne peuvent pas ĂȘtre ton
motif. Tu ne devrais jamais ĂȘtre inactif. (2.47)
Accomplis ton devoir le mieux possible, O Arjuna, par ton mental attaché au Seigneur,
abandonnant le souci et lâattachement intĂ©ressĂ© aux rĂ©sultats, et reste calme dans le succĂšs
et lâĂ©chec. LâĂ©quanimitĂ© du mental est appelĂ©e Karma-yoga. (2.48)
Le travail accompli avec des motifs égoïstes est trÚs inférieur au service désintéressé ou le
Karma-yoga. Câest pourquoi sois un Karma-yogi, O Arjuna. Ceux qui travaillent pour
jouir des fruits de leur labeur sont vraiment malheureux. (Car lâhomme nâa pas de contrĂŽle
sur les résultats). (2.49)
Un Karma-yogi devient dans cette vie mĂȘme libĂ©rĂ© du vice autant que de la vertu.
Sâefforcer de travailler le mieux possible sans ĂȘtre attachĂ© aux fruits du travail est appelĂ©
Karma-yoga. (2.50)
Les Sages Karma-yogis sont libĂ©rĂ©s des chaĂźnes de la renaissance en renonçant Ă
lâattachement intĂ©ressĂ© aux fruits de tout travail, pour atteindre ainsi lâĂ©tat de bĂ©atitude
divine. (2.51)
Lorsque ton intellect aura complĂštement franchi le voile de confusion, alors tu deviendras
indiffĂ©rent aux Ăcritures que tu connais et Ă celles quâil te reste Ă connaĂźtre. (2.52)
Lorsque ton intellect, rendu confus par les opinions contradictoires et la doctrine ritualiste
des VĂ©das, restera ferme et inĂ©branlable dans la concentration sur le SuprĂȘme Ătre, ainsi
tu atteindras lâunion avec le SuprĂȘme Ătre en Ă©tat dâextase (SamÄdhi). (2.53)
Arjuna dit : O KĆĆna, quelles sont les marques dâune personne illuminĂ©e (Sthita-prajna)
dont lâintellect est ferme ? Quelle est la façon de parler dâune personne dotĂ©e dâun intellect
stable ? Comment une telle personne sâassied et marche ? (2.54)
LES MARQUES DâUNE PERSONNE QUI SâEST RĂALISĂE
Le Seigneur SuprĂȘme dit : Lorsquâun ĂȘtre est complĂštement libre de tous dĂ©sirs du mental
et est satisfait avec lâĂternel Ătre (Brahma) par la joie de lâĂternel Ătre, ainsi cet homme
est appelé un illuminé (Sthita-prajna), O Arjuna. (2.55)
Une personne dont le mental est impassible au chagrin, qui ne sollicite pas les plaisirs, et
qui est complĂštement libĂ©rĂ©e de lâattachement, de la peur, et de la colĂšre, est appelĂ©e Sthita-
prajna â un sage dâun intellect ferme. (2.56)
Ceux qui nâont aucun attachement ; qui ne sont pas transportĂ©s dans lâobtention des
résultats désirés, ni troublés par des résultats inopportuns ; leur intellect est considéré
comme fermement Ă©tabli. (2.57)
Lorsque quelquâun retire complĂštement ses sens des objets de perception comme une
tortue retire ses membres dans sa carapace pour se protĂ©ger, alors lâintellect dâune
personne est considéré comme fermement établi. (2.58)
Le dĂ©sir pour les plaisirs sensuels sâĂ©vade lorsque lâhomme sâabstient de jouissance
sensuelle, bien que le goût envers la jouissance sensuelle subsiste. Cette envie disparaßt
aussi chez la personne qui a connu le SuprĂȘme Ătre. (2.59)
LE DANGER DES SENS NON RESTREINTS
Les sens sans repos, O Arjuna, emportent fortement le mental, mĂȘme dâune personne sage
sâefforçant vers la perfection. (2.60)
Lâhomme devrait fixer son mental sur Moi dans une douce contemplation, aprĂšs avoir mis
les sens sous contrĂŽle. Son intellect devient fermement Ă©tabli, lorsque ses sens se trouvent
complÚtement maßtrisés. (2.61)
Lâhomme dĂ©veloppe lâattachement aux objets des sens, en pensant Ă ces objets de sens. Le
dĂ©sir envers les objets de sens vient de lâattachement aux objets de sens, et la colĂšre vient
des désirs inaccomplis. (2.62)
Lâillusion ou les idĂ©es sauvages parviennent de la colĂšre. Le mental est dĂ©sorientĂ© par
lâillusion. Le raisonnement est dĂ©truit lorsque le mental est dĂ©sorientĂ©. Lâhomme sâĂ©gare du
droit chemin lorsque le raisonnement est détruit. (2.63)
LâOBTENTION DE LA PAIX ET DU BONHEUR PAR LE CONTRĂLE DES SENS ET DE
LA CONNAISSANCE
Une personne disciplinée, se mouvant parmi les objets des sens sous contrÎle et libérée de
tout attachement et de toute aversion, atteint la tranquillité. (2.64)
Toutes les souffrances sont dĂ©truites en atteignant la tranquillitĂ©. Lâintellect dâune telle
personne tranquille devient vite complĂštement ferme et unie Ă lâĂternel Ătre (Brahma).
(2.65)
Il nây a pas de connaissance du Soi, ni de perception du Soi chez ceux qui ne sont pas unis Ă
lâĂternel Ătre (Brahma). Sans la perception du Soi il nây pas de paix, et sans paix il nây a
pas de bonheur. (2.66)
Le mental, lorsque contrĂŽlĂ© par les sens vagabonds, emporte lâintellect comme la tempĂȘte
qui dĂ©rive un vaisseau en mer de sa destination â le rivage spirituel. (2.67)
Par consĂ©quent, O Arjuna, lâintellect dâune personne devient ferme lorsque les sens sont
complÚtement retirés des objets des sens. (2.68)
Le yogi, la personne modĂ©rĂ©e, se tient Ă©veillĂ© lorsquâil fait nuit pour les autres. Il fait nuit
pour le yogi lorsquâil voit tous les autres Ă©veillĂ©s. (2.69)
Lâhomme atteint la paix intĂ©rieure don le mental a dissipĂ© tous les dĂ©sirs sans crĂ©er
moindre perturbation mental, comme lâeau dâune riviĂšre qui se dĂ©verse en plein ocĂ©an sans
le perturbé. Celui qui désire les objets matériels ne trouve jamais la paix. (2.70)
Celui qui abandonne tous dĂ©sirs, et devient libĂ©rĂ© de tout aspiration et dâĂ©motion quant au
« je » et « moi », atteint la paix. (2.71)
O Arjuna, ceci est lâĂ©tat superconscient (BrÄhmÄ). Atteignant cet Ă©tat, lâhomme nâest plus
abusĂ©. Une fois parvenu dans cet Ă©tat, mĂȘme Ă la fin de la vie, la personne atteint Brahma-
nirvÄna (ou, devient un avec lâabsolu). (2.72)
Ainsi prend fin le deuxiÚme chapitre intitulé «La Connaissance Transcendantale » dans les
UpaniĆad de la BhagavadgÄ«tÄ, lâĂ©criture de yoga, touchant la science de lâAbsolu dans la
forme du dialogue entre SrÄ«kĆĆna et Arjuna.
La pitiĂ© dâArjuna nâa rien de commun avec la compassion du SuprĂȘme Absolu. Câest une
forme de bienveillance de soi, le recul de ses nerfs devant un acte qui lui commande de faire
du mal Ă ses proches. Arjuna se dĂ©tourne ainsi de son devoir, mais le Seigneur KĆĆna le
désapprouve.
Les Aryens, dâaprĂšs quelques uns, sont ceux qui acceptent un type particulier de culture
intérieure et de pratique sociale, qui insistent sur le courage, la courtoisie, la noblesse et la
justice.
KĆĆna essaie de libĂ©rer Arjuna de ses doutes, et rappelle aussi la doctrine de
lâindestructibilitĂ© du soi, en appelle Ă son sentiment de lâhonneur et Ă ses traditions comme
guerrier, lui rĂ©vĂ©lant ainsi le dessein du SuprĂȘme Absolu, tout en indiquant comment
lâaction doit ĂȘtre entreprise dans ce monde. VoilĂ pourquoi il y a des Ăąmes qui sont
toujours Ă©crasĂ©es, mĂȘme par des riens (et surtout par des riens) parce que ces riens sont au-
dessus de leurs forces ; et il y en a dâautres qui sont toujours debout et vaillantes, parce que
leurs forces spirituelles sont Ă la hauteur de toute Ă©preuve.
Si nous nous reprĂ©sentons les victimes de toutes les pages sanglantes de lâhistoire, si nous
entendons les cris dâhommes, femmes et enfants jusquâĂ nos jours, voyons ces mille formes
de destruction, dâoppression et dâinjustice. Nul cĆur animĂ© de charitĂ© humaine ne peut
goĂ»ter la joie dans ces conquĂȘtes souillĂ©es de sang.
Il est nĂ©cessaire que le monde nous laisse au cĆur un grand vide. Ce vide câest la place du
SuprĂȘme Absolu. Arjuna nâest pas poussĂ© seulement par le dĂ©sespoir, lâanxiĂ©tĂ© et le doute,
mais aussi par lâardent dĂ©sir de certitude. Reposez-vous dans le bien du SuprĂȘme Absolu. Il
y a en effet un sommeil qui ne repose pas ; et il y a un autre sommeil qui opÚre la détente de
lâĂȘtre. Le sommeil dans le SuprĂȘme Absolu, le sommeil de lâĂąme qui sâen remet pleinement
Ă Lui de tous ses soucis et de toutes ses peines, voilĂ le sommeil qui est repos. Comme
Arjuna, le yogi ou dĂ©vot doit comprendre sa misĂšre et son ignorance, et en mĂȘme temps
ĂȘtre anxieux de faire la volontĂ© du SuprĂȘme Absolu, et de dĂ©couvrir ce quâelle est.
Le sourire de KĆĆna indique quâil perce Ă jour lâeffort de rationalisation dâArjuna, ce
quâon appelle aujourdâhui pensĂ©e-dĂ©sir. Mais je ne suis pas abattu parce que je suis
imparfait⊠et je ne veux pas que tu sois découragée parce que la perfection, cet oiseau
rare, cet oiseau du SuprĂȘme Ătre, sâest encore dĂ©robĂ©e Ă tes poursuites. Non, pas de
dĂ©couragement, prĂ©cisĂ©ment pour continuer ta poursuite. La perfection de la terre câest
cette poursuite et câest le courage de la continuer jusquâau bout et malgrĂ© tout. Je te
conseille de sourire à tes défauts, quand tu les regardes. Je te conseille de sourire à tes
qualitĂ©s, Ă tes efforts, Ă tout ce quâil y a de bon en toi, et Ă en remercier le Seigneur KĆĆna
qui tâa tout donnĂ©, Dieu Lui-mĂȘme.
On explique briĂšvement dans le verset 2.38, la sagesse de la philosophie du SÄnkhya. « ConsidĂ©rant le plaisir
et la souffrance, le gain et la perte, la victoire et la dĂ©faite de la mĂȘme façon, engages-toi dans ton devoir. En
accomplissant ton devoir, tu ne commettras pas de pĂ©chĂ©. » (2.38) Le SÄnkhya est un systĂšme enseignĂ© par
lâavatÄra Kapila, qui procĂšde par lâĂ©tude analytique de lâĂąme spirituelle conçue comme distincte des vingt-
quatre Ă©lĂ©ments de la nature matĂ©rielle. Aussi, systĂšme dâanalyse purement matĂ©riel du monde phĂ©nomĂ©nal
dans ses diverses manifestations, mis en forme par Kapila. SÄnkhya-yoga est la voie de lâapprofondissement
du moi spirituel comme distinct du corps matĂ©riel. Il a pour effet dâamener lâĂȘtre au bhakti yoga (lâamour
pour le SuprĂȘme Absolu par le service de dĂ©votion), oĂč il peut alors sâengager dans les activitĂ©s spirituelles
qui lui sont propres. Le Bhakti yogi applique lâamour et la dĂ©votion pour le Seigneur, que caractĂ©rise
lâengagement une fois purifiĂ©, des sens de lâĂȘtre distinct au service des Sens du Seigneur. Le silence mystique,
il y en a trois. Le premier est celui des paroles ; le second, celui des désirs ; le troisiÚme, celui des pensées. Le
premier est parfait, le second est plus que parfait encore, le troisiĂšme lâest davantage. Le silence des paroles
sert à acquérir la vertu ; celui des désirs à trouver le repos ; celui des pensées, à parvenir au recueillement
intĂ©rieur. Câest au silence, Ă lâabsence de dĂ©sirs et de pensĂ©es quâon reconnaĂźt le vĂ©ritable silence mystique
pendant lequel le SuprĂȘme Absolu parle Ă lâĂąme, se communique Ă elle, et lui enseigne la plus sublime, la plus
parfaite des sciences. VoilĂ , ce que enseigne la Bhagavad GĂźtĂą, la pratique par lâabandon de soi au Seigneur
SuprĂȘme, le Seigneur KĆĆna, Ă travers les activitĂ©s dĂ©votionnelles que le livre enseigne. Pour finir, SÄnkhya ne
se rapporte pas au systĂšme de Kapila mais Ă lâenseignement des Upanishads.
LâĂȘtre humain se rend capable de lâimmortalitĂ© en passant par une sĂ©rie de naissances et de
morts. Les changements quant au corps ne signifient pas des changements de lâĂąme.
Aucune de ces incarnations nâest permanente. La renaissance est une loi de la nature. Les
incarnations semblent essentielles Ă lâĂ©volution de lâĂąme.
La vie Ă©ternelle est diffĂ©rente de la survie aprĂšs la mort, la rĂ©incarnation qui est accordĂ©e Ă
tout ĂȘtre incarnĂ©. Ătre sujet au chagrin et Ă la douleur, ĂȘtre troublĂ© par les Ă©vĂ©nements
matĂ©riels, ĂȘtre dĂ©tournĂ© par eux du sentier du devoir quâil faut suivre, indique que nous
sommes encore victimes de lâignorance.
LâĂȘtre psychique est le vijnÄna qui sert de base Ă la triple manifestation en corps (anna), en
vie (prÄna), en en mental (manas). Quand le corps physique disparaĂźt, les gaines vitale et
mentale subsistent et sont le vĂ©hicule de lâĂąme.
Notre existence est brĂšve et la mort est certaine. LâinĂ©vitabilitĂ© de la mort ne sait pas
justifier le meurtre, le suicide ou la guerre. Nous ne pouvons pas délibérément désirer la
mort des autres sous le prétexte que tous les hommes doivent mourir. La loi des
renaissances nâencourage pas les meurtres, les massacres et les guerres inutiles, mĂȘme si en
certaines circonstances afin de prĂ©server la paix et lâordre dans la sociĂ©tĂ©, lâhomme doit
faire usage de lâarmement militaire.
Lâexistence du Soi plus subtil que le corps, les Ă©motions et lâintellect, est une idĂ©e difficile Ă
concevoir pour le « Je suis » (lâego). Lâindividu peut, cependant, atteindre la perfection
spirituelle grĂące Ă la pratique de certaines disciplines et techniques. Une citerne, si
profonde soit-elle, se remplit toujours lorsque le ciel y dĂ©verse la pluie, donc quâil se confie
au SuprĂȘme Absolu, en se conformant Ă ses devoirs dans le dĂ©tachement, qui se trouve Ă la
base mĂȘme de la perfection. Il expĂ©rimentera ainsi une merveilleuse extase au-delĂ de
toutes sensations.
LâEsprit, est ce lieu de repos, le royaume de toutes perfections et de toutes les beautĂ©s spirituelles. LĂ , une
lumiĂšre divine Ă©claire les mystĂšres de la foi ; lĂ se trouvent lâhumanitĂ© profonde, la rĂ©signation entiĂšre, la
puretĂ©, la simplicitĂ©, lâinnocence de la colombe, la modestie extĂ©rieure, la libertĂ© dans le Seigneur KĆĆna et la
puretĂ© du cĆur qui sâen suit. Bien que la vĂ©ritĂ© du Soi soit libre dâaccĂšs pour lâhumanitĂ© toute entiĂšre, seules
les rares ùmes y parviennent, qui consentent à en payer le prix en discipline de soi, persévérance et
renoncement. La vérité est ouverte à tous, mais beaucoup ne ressentent aucune inclination à la chercher ; et,
parmi ceux qui ont lâinclination il y a le doute et lâhĂ©sitation ou qui rebutent Ă cause des difficultĂ©s. Seules les
rares ùmes réussissent à braver les obstacles pour parvenir au but.
La lutte doit ĂȘtre entreprise dans un esprit de sĂ©rĂ©nitĂ©, sans cĂ©der au bruyant dĂ©sir de
changement, dâĂȘtre Ă la merci des variations affectives, mais en accomplissant lâĆuvre qui
nous est assignĂ©e dans la situation oĂč nous sommes appelĂ©s.
Le Seigneur KĆĆna distingue le vrai karma de la piĂ©tĂ© ritualiste. Les sacrifices du Veda sont
destinĂ©s comme rĂ©compenses matĂ©rielles. La Bhagavad GĂźtĂą nous propose de renoncer Ă
tout désir et à tout effort égoïste, et de faire de la vie entiÚre un sacrifice offert avec une
dĂ©votion rĂ©elle. Il est bon de choisir un gourou, un maĂźtre spirituel quâon dĂ©sire imiter et
pour lequel on aura beaucoup de dévotion. Si un gourou veut avoir un ministÚre riche en
moissons spirituelles, quâil ne recherche pas la conduite des Ăąmes, car les Ăąmes viendront Ă
lui au moment opportun. Le vĂ©ritable moyen dâagir utilement, câest de ne pas faire le
maßtre ni de chercher à le paraßtre. Peu de paroles et de raisonnements sont nécessaires
pour produire de grands effets, si un maĂźtre spirituel souhaite sincĂšrement que ses disciples
aiment la vertu et que leur amour pour le SuprĂȘme Absolu soit pur et parfait. Sachez aussi,
quâil nây a pas de meilleur gourou que la GĂźtĂą. LâĂąme en qui naĂźt lâabstraction pourra
marcher Ă sa perte, si elle tombe entre les mains dâun gourou sans expĂ©rience lui
conseillant la discipline spirituelle. Tout cela nous prouve combien, dans la voie mystique et
spirituelle, un guide expĂ©rimentĂ© est nĂ©cessaire. Pour sâarmer conter certains gourou, allez
Ă lâadresse suivante : http://www.gita-society.com/guru4.htm
Le verset 2.47 bien connu contient le principe essentiel du désintéressement. Quand nous
accomplissons notre tĂąche, quelle soit comme paysan ou ouvrier, chanteur ou penseur, nous
serons dĂ©tournĂ©s du dĂ©sintĂ©ressement si nous pensons Ă la renommĂ©e, ou aux revenus ou Ă
toute autre considération extérieure. Mais rien ne vaut excepté la bonne volonté,
lâaccomplissement du dessein de Dieu.
On doit agir avec une sĂ©rĂ©nitĂ© sans Ă©gale et dans lâindiffĂ©rence pour les rĂ©sultats. La
personne qui agit en vertu dâune loi intĂ©rieure est Ă un degrĂ© plus Ă©levĂ© que celui dont
lâaction est Ă la merci de ses fantaisies.
Un Karma yogi sâĂ©lĂšve au-dessus de la morale et de sa distinction entre le bien et le mal ; il
est libĂ©rĂ© de lâĂ©goĂŻsme et par consĂ©quent incapable de mal. La GĂźtĂą yoga est aussi lâĂ©galitĂ©
du mental dans le succĂšs ou lâĂ©chec, chez lui qui est engagĂ© dans lâaccomplissement de ses
devoirs, tandis que son mental demeure en le SuprĂȘme Absolu.
Sthita-prajna : situation au plus haut niveau de la conscience mentale.
Commentaires sur les versets 2.54 -55. Lorsque lâĂąme est anĂ©antie, lorsquâelle est
complĂštement dĂ©pouillĂ©e, elle goĂ»te dans son ĂȘtre supĂ©rieur une paix profonde et un
dĂ©licieux repos, car câest dans « la PrĂ©sence » quâil demeure. Dans cet heureux Ă©tat, elle ne
veut, elle ne dĂ©sire que ce que veut et dĂ©sire le Seigneur KĆĆna, et câest dans cet esprit que
lâĂąme accepte tous les Ă©vĂ©nements, travaux et angoisses, ainsi que les consolations et les
plaisirs. Une Ăąme entrĂ©e dans le ciel de la paix se sent pleine du SuprĂȘme Absolu, comblĂ©e
de dons surnaturels, parce que le pur amour est son appui, et quâelle se plaĂźt dans la
lumiĂšre comme dans les tĂ©nĂšbres, dans le jour comme dans la nuit, dans lâaffliction comme
dans la consolation.
Lorsque lâĂąme est dominĂ©e passionnĂ©ment par les plaisirs de ce monde, sa mĂ©moire est
perdue, son intelligence obscurcie Ă tout ce qui est normal et naturel dans le cadre de la
crĂ©ation et par consĂ©quent des lois cosmiques, et lâhomme va Ă sa ruine. Ce qui est
nĂ©cessaire nâest pas lâisolement forcĂ© du monde, ni la destruction de la vie sensible, mais
une retraite Ă lâintĂ©rieur. HaĂŻr les sens est aussi critiquable que les aimer.
Quand tous les humains sont attirĂ©s par lâĂ©clat des objets des sens, le sage est concentrĂ©
dans la rĂ©alitĂ©. Il est Ă©veillĂ© Ă la nature du rĂ©el, Ă lâĂ©gard de laquelle le mondain est endormi
ou indiffĂ©rent. Lâhomme nâest dans lâillusion que quand il suit ses convoitises ou ses
attraits, ses raisonnements, ses connaissances ou ses affections. Quelle heureuse fortune
pour le yogi ou dévot de pouvoir ce délivrer de la maison de la sensualité mal dirigée. Le
plan des contraires qui est le jour ou lâĂ©tat dâactivitĂ© pour le mondain, est nuit, tĂ©nĂšbres de
lâĂąme, pour le yogi ou dĂ©vot.
Brahma-nirvÄna, câest lâextinction de lâego dans le plus haut Moi intĂ©rieur spirituel ; mieux
encore, lâimmersion du moi personnel dans lâexistence infinie. LâĂąme ne saurait parvenir Ă
lâunion intime et affective avec le SuprĂȘme Absolu, si le cĆur nâest pas net, si les sens ne
sont pas purifiés. Il faut pour y atteindre que la mémoire soit vide, le mental éclairé, la
volontĂ© soumise et ardente, car le SuprĂȘme Absolu Ă©tant la puretĂ©, la lumiĂšre et le repos
mĂȘme, ne peut accepter que lâĂąme totalement pure, le savoir juste, dĂ©tachĂ©e, attentive et
paisible. Le nirvana, câest la libĂ©ration ultime de lâĂąme qui lâunit Ă©ternellement au SuprĂȘme
Absolu, Dieu le Seigneur KĆĆna.
Chapitre 3
LA VOIE DE KARMA YOGA (Action, Altruisme)
Arjuna dit : Si tu considĂšres que lâacquisition de la connaissance transcendantale est
prĂ©fĂ©rable Ă celui du travail, pourquoi alors mâincites-tu Ă mâengager dans cette terrible
guerre, O KĆĆna ? Apparemment, tu sembles confondre mon mental par des paroles
contradictoires. Donne-moi, en toute certitude, un moyen par lequel je puisse atteindre le
SuprĂȘme. (3.01-02)
Le Seigneur SuprĂȘme dit : Dans ce monde, O Arjuna, il y a une double voie de discipline
spirituelle comme Je lâai dĂ©jĂ dit dans le passĂ©. La voie de la connaissance du Soi (JnÄna-
yoga) pour les contemplatifs, et la voie du travail dĂ©sintĂ©ressĂ© (SevÄ, Karma-yoga) pour les
actifs. (3.03)
Lâhomme nâatteint pas la libĂ©ration des chaĂźnes de Karma en sâabstenant de travailler.
Personnes atteint la perfection en renonçant simplement au travail. (3.04)
Car, personne ne peut demeurer, ne serait-ce quâun instant sans action. Chacun est
contraint dâagir â vraiment sans aide â par les forces de la nature. (3.05)
Le simulateur, qui refrĂšne ses organes dâaction mais se complaĂźt mentalement dans la
jouissance des sens, est appelé un hypocrite. (3.06)
ON DEVRAIT SERVIR LES AUTRES
Celui qui contrĂŽle les sens par le mental et lâintellect Ă©duquĂ©s et purifiĂ©s, engageant les
organes dâaction au service dĂ©sintĂ©ressĂ©, est supĂ©rieur, O Arjuna. (3.07)
Accomplis ton devoir prescrit, car vraiment le travail vaut mieux que de rester inactif.
MĂȘme le maintien de ton corps ne peut sâeffectuer sans travail. (3.08)
Les ĂȘtres humains sont liĂ©s par la chaĂźne Karmique des activitĂ©s, Ă lâexception de ceux
accomplies par le service dĂ©sintĂ©ressĂ© (SevÄ, Yajna). Par consĂ©quent, O Arjuna, libĂšre-toi
de lâattachement Ă©goĂŻste aux fruits du travail, et accomplis avec efficacitĂ© ton devoir comme
un service qui Mâest rendu. (3.09)
SâENTRAIDER EST UN PREMIER COMMANDEMENT DU CRĂATEUR
BrahmÄ, le crĂ©ateur, au commencement crĂ©a les ĂȘtres humains ensembles avec le service
dĂ©sintĂ©ressĂ© (SevÄ, Yajna, sacrifice), et dit : Par Yajna (en servant) tu prospĂšreras et Yajna
satisfera tous tes désirs. (3.10)
Nourris les rĂ©gnants cĂ©lestes (Devas) par le service dĂ©sintĂ©ressĂ© (SevÄ, Yajna), et les Devas
te nourriront. Ainsi, vous nourrissant mutuellement, tu atteindras le but SuprĂȘme. (3.11)
Les rĂ©gnants cĂ©lestes (Devas), nourris par le service dĂ©sintĂ©ressĂ© (SevÄ, Yajna), te
donneront les objets désirés. Celui qui jouit des dons des Devas sans rien leur offrir en
retour est vraiment un voleur. (3.12)
Les justes qui mangent les restes du service dĂ©sintĂ©ressĂ© (SevÄ, Yajna) sont libĂ©rĂ©s de tous
les pĂ©chĂ©s, mais les impies qui prĂ©parent la nourriture pour eux seuls (sans dâabord Mâen
offrir, ou partager avec autrui) vraiment mangent le péché. (Voir aussi RV 10.117.06)
(3.13)
Les ĂȘtres vivants sont nĂ©s de la nourriture de graines, les grains sont produits par la pluie,
la pluie vient (comme une faveur des Devas) si le devoir (Karma) est accompli en tant que
service dĂ©sintĂ©ressĂ© (SevÄ, Yajna). (Voir aussi 4.32) Le devoir est prescrit dans les VĂ©das.
Les VĂ©das viennent de Brahman (lâĂternel Ătre). Donc, le Brahman omniprĂ©sent est
toujours prĂ©sent dans la SevÄ. (3.14-15)
Celui qui ne Mâaide pas Ă maintenir la roue de la crĂ©ation en mouvement par le devoir
sacrificiel (SevÄ), et se complaĂźt dans les plaisirs sensuels, cette personne dans le pĂ©chĂ© vit
en vain, O Arjuna. (3.16)
Lâhomme qui se rĂ©jouit uniquement dans lâĂternel Ătre (Brahman), qui fonde ses dĂ©lices
dans lâĂternel Ătre, et qui trouve le contentement dans lâĂternel Ătre seul, est une
personne qui a rĂ©alisĂ© le Moi, pour qui il nây a pas de devoir. (3.17)
Une telle personne nâĂ aucun intĂ©rĂȘt, ni dans lâaction ou lâinaction. Celui qui a rĂ©alisĂ© le
Moi ne dĂ©pend de personnes pour aucun intĂ©rĂȘt qui soit sien (sauf de Dieu). (3.18)
LES DIRIGEANTS DEVRAIENT MONTRER LâEXEMPLE
Par conséquent, accomplis ton devoir efficacement et sans attachement égoïste aux
rĂ©sultats, car en accomplissant le travail sans attachement, lâhomme atteint le SuprĂȘme
Ătre. (3.19)
Le Roi Janaka et autres ont atteint la perfection (ou, la réalisation du Soi) par le service
désintéressé (Karma-yoga) seul. Toi aussi accomplis ton devoir en vue de guider le monde,
et pour le bien-ĂȘtre universel de la sociĂ©tĂ©. (3.20)
Quoi que fasse une noble personne, dâautres suivent. Quelque soit le modĂšle quâils
représentent, le monde suit. (3.21)
O Arjuna, il nây a rien dans ces trois mondes (ciel, terre, et les rĂ©gions infĂ©rieures) que Je
doive faire, ni rien Ă obtenir qui nâait Ă©tĂ© obtenu ; pourtant Je reste engagĂ© dans lâaction.
(3.22)
Si Je ne suis pas inlassablement engagĂ© dans lâaction, O Arjuna, les hommes de toutes
maniĂšres suivraient Ma voie. Les mondes pĂ©riraient si Je cessais dâagir, Je serais la cause
de confusion et de destruction pour tous les hommes. (3.23-24)
QUE DEVRAIT FAIRE LE SAGE Ă LâIGNORANT
Comme lâignorant agit avec attachement aux fruits du travail, O Arjuna, de mĂȘme
lâhomme sage travaille sans attachement pour le bien-ĂȘtre de la sociĂ©tĂ©. (3.25)
Le sage ne devrait pas troubler le mental des ignorants qui sont attachés aux fruits du
travail, mais lâilluminĂ© devrait inspirer les autres par lâaccomplissement de tous travaux,
sans attachement intéressé. (Voir aussi 3.29) (3.26)
TOUTES LES ACTIONS SONT LES ACTIVITĂS DE LA NATURE
Tous les travaux sont accomplis par lâĂ©nergie et la force de la nature ; mais Ă cause de
lâignorance illusionniste, les gens assument en ĂȘtre les faiseurs. (Voir aussi 5.09, 13 :29, et
14.19) (3.27)
Celui qui connaßt la Vérité, O Arjuna, quant au rÎle des forces de la nature et leur activité,
ne devient pas attachĂ© Ă lâactivitĂ©. Une telle personne sait que ce sont les forces de la nature
qui agissent avec leurs instruments â nos organes. (3.28)
Ceux qui sont Ă©garĂ©s par la force illusoire (MÄyÄ) de la Nature deviennent attachĂ©s aux
fonctions des forces de la Nature. Les sages ne devraient pas troubler le mental des
ignorants dont la connaissance est imparfaite. (Voir aussi 3.26) (3.29)
Accomplis ton devoir en Me dédiant toutes actions avec une orientation spirituelle mentale
libĂ©rĂ©e de tout dĂ©sir, dâattachement, et de fiĂšvre mentale. (3.30)
Ceux qui pratiquent constamment Mon enseignement â avec foi (ou, avec une pleine
attention et sincĂ©ritĂ©) et ne se fiant pas Ă la critique â sont libĂ©rĂ©s des chaĂźnes du karma.
Mais, ceux qui méprisent Mon enseignement et ne le pratique pas, considÚre les comme
dénués de toute connaissance, inanimés, et perdues. (3.31-32)
Tous les ĂȘtres suivent leur propre nature. MĂȘme les sages agissent dâaprĂšs leur propre
nature. Quelle est alors lâutilitĂ© de la restriction des sens ? (3.33)
DEUX PIERRES DâACHOPPEMENT SUR LA VOIE DE LA PERFECTION
Lâattachement et lâaversion (RÄjÄ et DveĆa) pour les objets de sens rĂ©sident dans les sens.
Que nul ne vienne sous le contrĂŽle de ces deux, car vraiment ils sont deux pierres
dâachoppement majeures, sur la voie de la rĂ©alisation du Soi. (3.34)
Le travail infĂ©rieur et naturel de lâhomme est prĂ©fĂ©rable au travail supĂ©rieur dĂ©naturĂ©. Il
est préférable de mourir en accomplissant son travail naturel. Le travail dénaturé produit
beaucoup trop de tension. (Voir aussi 18.47) (3.35)
LE DĂSIR EST Ă LâORIGINE DU PĂCHĂ
Arjuna dit : O KĆĆna, par quoi lâhomme est-il poussĂ© Ă commettre le pĂ©chĂ©, tout comme
contre son gré et forcé contre sa propre volonté ? (3.36)
Le SuprĂȘme Seigneur dit : Câest le dĂ©sir (KÄmÄ) nĂ© de la passion (Rajo Guna) qui devient
colĂšre (lorsque inaccompli). Le dĂ©sir est insatiable et est un grand dĂ©mon. Sache que câest
le grand ennemi. (3.37)
Comme le feu est enveloppé par la fumée, comme un miroir est recouvert de poussiÚre et
lâembryon par lâamnios, de mĂȘme la connaissance de Soi (Brahma-jnana) sâobscurcit par le
désir. (3.38)
O Arjuna, la connaissance de Soi (Brahma-jnana) sâenveloppe ainsi par lâinsatiable feu du
dĂ©sir, lâĂ©ternel ennemi du sage. (3.39)
Les sens, le mental, et lâintellect sont, dit-on, le siĂšge du dĂ©sir (KÄma). KÄma â en
contrĂŽlant les sens, le mental, et lâintellect â Ă©gare la personne de la connaissance du Soi
(Jnana). (3.40)
Par consĂ©quent, O Arjuna, en contrĂŽlant dâabord les sens, dĂ©truis ce dĂ©mon du dĂ©sir
matériel qui ruine la connaissance et la réalisation du Soi. (3.41)
COMMENT CONTRĂLER LE DĂSIR
On dit que les sens sont supĂ©rieurs au corps, le mental supĂ©rieur aux sens, lâintellect
supĂ©rieur au mental, et AtmĂą (Esprit) supĂ©rieur Ă lâintellect. (Voir aussi KaU 3.10, et GĂźtĂą
(6.07-08) (3.42)
Connaissant le Soi (AtmĂą) comme Ă©tant supĂ©rieur Ă lâintellect, et contrĂŽlant le mental par
lâintellect (qui est purifiĂ© par des pratiques spirituelles), on doit tuer le dĂ©sir (KÄma) cet
ennemi puissant, O Arjuna. (3.43)
Ainsi prend fin le troisiĂšme chapitre intitulĂ© «La Voie de Karma Yoga » dans les UpaniĆad
de la BhagavadgÄ«tÄ, lâĂ©criture de yoga, touchant la science de lâAbsolu dans la forme du
dialogue entre SrÄ«kĆĆna et Arjuna.
Une succession disciplique, tradition, ou actions sont authentiques quand elles Ă©veillent une
rĂ©ponse adĂ©quate Ă la rĂ©alitĂ© quâelles prĂ©sentent, et valables quand le mental vibre en
rĂ©ponse Ă sa prĂ©sentation. Lâintention est toujours nĂ©cessaire, comme caractĂšre de la
connaissance, et plus gĂ©nĂ©ralement de toute la psychologie humaine, qui fait quâelle
sâoriente sur un objet qui lui est transcendant. La phĂ©nomĂ©nologie moderne, Ă la suite de
Husserl, a montrĂ© comment la considĂ©ration de lâintention est essentielle Ă toute
comprĂ©hension de lâacte de connaĂźtre, de confĂ©rer, et de faire.
Le Seigneur KĆĆna distingue, deux grands types de chercheurs : les introvertis dont la
tendance naturelle est dâexplorer la vie spirituelle intĂ©rieure, et les extrovertis dont
lâinclination naturelle va vers lâaction dans le monde extĂ©rieur. En autres termes, le
mystique (yogi, dévot) de la vie intérieure traite avec la vie évoluante du Dieu intérieure,
ainsi du centre Ă la pĂ©riphĂ©rie. Le mystique monte par lâaspiration et une intense dĂ©votion
vers le SuprĂȘme Absolu macrocosmique et microcosmique, ou le MaĂźtre quâil reconnaĂźt. Le
mystique (yogi, dĂ©vot) extroverti, sâoccupe de la forme et de la manifestation extĂ©rieure du
SuprĂȘme Absolu du dedans au dehors, et Ćuvre par lâactivitĂ©. Correspondant Ă ces deux
caractĂšres nous avons le yoga de la connaissance pour ceux dont lâĂȘtre intĂ©rieur cherche
lâessor de la contemplation intĂ©rieure, et le yoga de lâaction pour les Ăąmes Ă©nergiques qui se
lancent vers lâaction. Cependant, cette distinction nâest pas finale, car nous sommes tous, Ă
nos degrés divers, à la fois introvertis et extrovertis. Pour la Bhagavad Gßtù la voie des
Ćuvres est un moyen de libĂ©ration tout aussi valable que celle de la connaissance ; et lâune
et lâautre est destinĂ©e Ă ces deux classes. Elles ne sont pas exclusives mais complĂ©mentaires.
La voie est un seul tout, impliquant des phases diffĂ©rentes. Lâaction dĂ©sintĂ©ressĂ©e, câest
simplement libĂ©rer de lâĂ©nergie cosmologique. Exemple : « Dans lâaction dâabord, jâadhĂšre
Ă la puissance crĂ©atrice du SuprĂȘme Absolu ; je coĂŻncide avec elle ; jâen deviens, non
seulement, lâinstrument, mais le prolongement vivant. » Agir dans le dĂ©sintĂ©ressement,
câest Ă©galement sâunir au SuprĂȘme Absolu. Mais, sâunir, câest se transformer en un plus
grand que soi. Agir dans le dĂ©tachement, câest finalement sortir du matĂ©riel, de lâimmĂ©diat,
de lâĂ©goĂŻsme, pour avancer dans la VĂ©ritĂ© Une qui constamment Ă©volue. Autant comme
introvertis et extrovertis, nous appliquons notre volonté à la réalisation du progrÚs. Encore,
dans la vie intĂ©rieure, câest le Seigneur qui opĂšre. La vie pleine de dĂ©votion et de vertu
devient plus forte ; les liens se rompent ; les imperfections disparaissent ; les passions
sâĂ©vanouissent et lâĂąme se trouve libre. Dans la voie extĂ©rieure, on sâefforce Ă©galement
dâaccomplir sans cesse des actes vertueux, on essaie par tous les moyens dâarracher le vice,
de dĂ©raciner lâun aprĂšs lâautre de la nature humaine les attachements.
Dans le Nouveau Testament de la Bible, lâapĂŽtre Paul pareillement Ă©crit : « Si quelquâun ne
veut pas travailler, quâil ne mange pas non plus. » (2 Th.3.10) La loi naturelle est que nous
sommes liés par les résultats de nos actes dans le détachement. Tout acte a ses réactions
naturelles, et ainsi est source dâenchaĂźnement Ă la vie de chaque jour, lequel renvoie lâĂąme
au monde du devenir et empĂȘche son union avec le SuprĂȘme Absolu Ă travers la
transcendance cosmique. Par consĂ©quent, ce qui est exigĂ©, ce nâest pas le renoncement Ă
lâaction, mais lâabandon total aux dĂ©sirs Ă©goĂŻstes.
Tant que nous vivrons des vies incarnĂ©es, nous ne pourrons Ă©chapper Ă lâaction.
SevÄ : service dĂ©sintĂ©ressĂ© Ă lâhumanitĂ©. Yajna : (Yajnya, Yagnya) : Sacrifice, service,
SevÄ, actes mĂ©ritoires, un rituel VĂ©dique (3.9).
Des dieux (voir chapitre 7)
Brahman : le RĂ©el SuprĂȘme, indivisible et infini, hors de quoi rien dâautre rĂ©ellement
nâexiste.
Brahma-nirvÄna : extinction de lâego dans le plus haut Moi intĂ©rieur spirituel.
BrÄhmÄ«-sthiti : Ă©tat de stabilitĂ© en Brahman.
Lâaction a sa racine dans lâImpĂ©rissable. Sans lâaction du SuprĂȘme Absolu, le monde
tomberait en ruines. Nous lisons dans le Rg-Veda (X, 90) que lâUnique Purusa fut offert en
sacrifice, et que ses membres furent dispersĂ©s dans toutes les rĂ©gions de lâespace. Câest par
la grande action que le plan du monde est maintenu. Lâaction est une nĂ©cessitĂ© mentale
aussi bien que physique pour les ĂȘtres incarnĂ©s.
La conception Védique du sacrifice et le service désintéressé sont comme un échange entre
les dieux (devas) et les hommes dans le cadre plus large de lâinterdĂ©pendance des ĂȘtres dans
le Cosmos. Les actes accomplis dans un esprit sacrificiel sont agrĂ©ables au SuprĂȘme
Absolu. Dieu est le contenu de tous les sacrifices. LâapĂŽtre Paul (Bible) : « Je vous exhorte
donc, frĂšres, par les compassions de Dieu, Ă offrir vos corps comme un sacrifice vivant,
saint, agrĂ©able Ă Dieu, qui sera de votre part un culte raisonnable. (Rom. 12.1) » Lâamour
de soi-mĂȘme est comme un monstre, il faut le vaincre, et ce nâest que par cette victoire
quâon arrive au sommet de la montagne de Paix, le NirvÄna (la libĂ©ration des cycles
interminables de transmigration). Le sacrifice est le SuprĂȘme Absolu, et la loi de la vie.
LâĂȘtre individuel et le cosmos sont interdĂ©pendants, ayant un constant Ă©change entre les
deux.
Janaka fut le Roi de MithilÄ et le pĂšre de SitÄ, femme de RÄma. Le Roi Janaka gouverna en
abandonnant le sentiment personnel dâĂȘtre lâagent. Samkara lui-mĂȘme dit que Janaka et
les autres agirent pour que le peuple ne puisse pas sâĂ©garer, convaincus que leur sens seuls
Ă©taient engagĂ©s dans lâactivitĂ©.
La GĂźtĂą souligne que les sages sont les pionniers qui tracent les voies suivies par les autres.
Lâhomme imite les modĂšles fixĂ©s par ces Ă©lites.
La vie du SuprĂȘme Absolu et la vie de tous les jours ne sont pas opposĂ©s lâune Ă lâautre.
Le SuprĂȘme Absolu, par son activitĂ© ininterrompue, maintient le monde et lâempĂȘche de
retomber dans la non-existence.
Quâon ne trouble personne. Il ne faut pas affaiblir la dĂ©votion religieuse, quelle quâelle soit.
Le devoir, le sacrifice et la charitĂ© semblent ĂȘtre Ă la base de toutes les religions. Le
caractĂšre absolu de la doctrine thĂ©ologique de nâimporte quelle religion est incompatible
avec le caractĂšre mystĂ©rieux de la VĂ©ritĂ© Une au fondement dâune religion. La foi est plus
grande que la croyance.
LâĂąme vivante Ă©garĂ©e sâattribue Ă elle-mĂȘme les actes de Prakrti. Prakrti : Nature, Ă©nergie
créatrice. (Gßtù 7.4) Prakrti et ses modes représentent les limites de la liberté humaine telles
que la force de lâhĂ©rĂ©ditĂ© et la pression du juste milieu. Le moi expĂ©rimental est le produit
des actions, de mĂȘme que lâensemble du processus cosmique rĂ©sulte de lâopĂ©ration des
causes.
Nous ne pouvons en aucun cas troubler ceux qui agissent sous lâimpulsion de la Nature. Il
faut les libérer en temps opportun, et petit à petit de la fausse identification du soi avec
lâego soumis Ă la nature. Le vrai soi est le Soi divin, Ă tout jamais libre et conscient de soi.
Le faux soi est lâego qui est portion de la nature, et reflĂšte les activitĂ©s de Prakrti.
En nous abandonnant au Seigneur SuprĂȘme qui prĂ©side Ă lâexistence et Ă lâactivitĂ©
cosmique, nous sommes appelĂ©s Ă nous engager dans lâaction, le travail.
Verset 33 nous invite Ă dĂ©couvrir notre ĂȘtre vĂ©ritable et Ă lui donner expression. Prakrti
est lâĂ©quipement mental avec lequel nous naissons, qui est le rĂ©sultat de nos actes passĂ©s, et
dont lâactivitĂ© doit suivre son court, pour finalement abandonner toutes les impulsions
nĂ©fastes. Si nous voulons atteindre la perfection, il faut que nous soyons forts dâune
certaine assurance en la miséricorde divine, dans toutes nos imperfections et dans toutes les
fautes oĂč nous pourrions succomber. Au court de la vie, câest par les petites chutes que le
SuprĂȘme Absolu, notre Seigneur, nous fait Ă©viter les grandes, et nous sommes ainsi rendus
humbles et vigilants, ce dont nos Ăąmes ont vraiment besoin. Saint Augustin, ce grand sages
connu de par le monde dit : « Ascendamus etiam per vitia et passiones nostras. (Pour
monter au ciel, servons-nous mĂȘme de nos vices et de nos passions.) » Lâhomme doit agir
conformément à la compréhension. De point de vue de notre incarnation largement
comprise dâailleurs, le dĂ©tachement, le renoncement devient avant tout le fait de ne pas
chercher tant de choses, mais de chercher dans toute chose ce qui est plus grand , plus
parfait et donc plus pure.
Finalement, pour rĂ©sumer, ce chapitre expose la nĂ©cessitĂ© dâaccomplir lâaction sans aucun
attachement Ă©goĂŻste pour ses rĂ©sultats, en vue dâassurer le bien du monde. Câest le
détachement, non par coupure, mais par traversée et sublimation. La spiritualité non plus
par nĂ©gation ou Ă©vasion, mais par Ă©mergence. Câest le bien du monde en comprenant que
lâĂ©nergie active appartient aux modes de Prakrti ou au SuprĂȘme Absolu lui-mĂȘme.
Chapitre 4
LA VOIE DE LA RENONCIATION PAR LA CONNAISSANCE
Le SuprĂȘme Seigneur dit : Jâai enseignĂ© ce Karma-yoga, la science Ă©ternelle de lâaction
correcte, au Roi VivasvÄn. VivasvÄn lâa enseignĂ© Ă Manu. Manu lâa enseignĂ© Ă IkĆvÄku.
Ainsi, transmis de lâun Ă lâautre en succession disciplique les saints Rois ont connu ce
(Karma-yoga). A la longue la science de Karma-yoga sâest perdue sur cette terre.
Aujourdâhui, Je te dĂ©cris cette mĂȘme ancienne science, car tu es Mon dĂ©vot et ami sincĂšre.
Karma-yoga est vraiment un secret suprĂȘme. (4.01-03)
Arjuna dit : Postérieure a été ta naissance, mais antérieure dans les temps anciens fut la
naissance de VivasvÄn. Comment donc pourrais-je comprendre que Tu as enseignĂ© ce yoga
au début de la création ? (4.04)
Le SuprĂȘme Seigneur dit : Toi et Moi avons pris de nombreuses naissances. Je Me souviens
de toutes, O Arjuna, mais toi tu ne tâen souviens pas. (4.05)
Bien que Je sois Ă©ternel, immuable, et le Seigneur de tous les ĂȘtres ; nĂ©anmoins, Je Me
manifeste en contrÎlant Ma propre Nature matérielle en usant Mon énergie potentielle
divine (Yoga-mÄyÄ). (Voir aussi 10.14) (4.06)
Chaque fois quâil y a un dĂ©clin du Dharma (Justice) et une prĂ©dominance du Adharma
(Injustice), O Arjuna, alors Je Me manifeste. Jâapparais de temps en temps pour la
protection du bien, la transformation des mĂ©chants, et pour lâĂ©tablissement de lâordre
mondial (Dharma). (Voir aussi TR 1.120.03-04) (4.07-08)
Celui qui comprend vraiment Mon apparition transcendantale et Mes activités (de la
crĂ©ation, maintenance, et dissolution), atteint Ma demeure suprĂȘme et ne naĂźt plus aprĂšs
avoir quitté ce corps, O Arjuna. (4.09)
En prenant refuge en Moi, devenant pleinement absorbés en Mes pensées et purifiés par le
feu de la connaissance du Soi ; nombreux sont ceux libĂ©rĂ©s de lâattachement, la peur, la
colĂšre, et qui ont atteint le salut (Mukti). (4.10)
LA VOIE DE LâADORATION ET DE LA PRIĂRE
Quelle que soit la maniĂšre dont les hommes Me rendent un culte, Jâaccomplis leurs dĂ©sirs
en conséquence. Les hommes Me rendent un culte pour des motifs différents. (4.11)
Ceux qui aspirent le succÚs dans leur travail ici-bas, rendent un culte aux régnants célestes
(Devas). Le succÚs dans le travail se réalise trÚs vite dans le monde humain. (4.12)
LA RĂPARTITION DU TRAVAIL EST BASĂE SUR LâAPTITUDE DES PERSONNES
Les quatre divisions â basĂ©es sur lâaptitude et la vocation de la sociĂ©tĂ© humaine ont Ă©tĂ©
crĂ©es par Moi. Bien que je sois lâauteur de ce systĂšme, divisionnaire du travail, on devrait
savoir que Je ne fais rien (directement) et que Je suis Ă©ternel. (Voir aussi 18.41) (4.13)
LâactivitĂ© ne Mâaffecte pas, car Je nâai pas de dĂ©sir pour les fruits du travail. Celui qui
comprend et pratique complĂštement cette vĂ©ritĂ© nâest pas liĂ© au Karma. (4.14)
Les anciens aspirants à la libération se sont également engagés à accomplir leurs devoirs
avec connaissance. Par conséquent, tu devrais accomplir ton devoir comme firent les
anciens. (4.15)
LâACTION ATTACHĂE, DĂTACHĂE ET INTERDITE
MĂȘme les sages sont troublĂ©s quand il sâagit de dĂ©terminer ce que sont lâaction et lâinaction.
Par consĂ©quent, Je vais clairement tâexpliquer ce quâest lâaction afin que, le sachant, on soit
libéré du mal de la naissance et de la mort. (4.16)
La vraie nature de lâaction est difficile Ă comprendre. Par consĂ©quent, lâhomme devrait
connaĂźtre la nature de lâaction attachĂ©e, de la nature dĂ©tachĂ©e de lâaction, et aussi la nature
de lâaction interdite. (4.17)
UN KARMA-YOGI NâEST PAS ASSUJETTI AUX LOIS KARMIQUES
Celui qui voit lâinaction dans lâaction, et lâaction dans lâinaction, est une personne
intelligente. Cette personne est un yogi et a tout accompli. (Voir aussi 3.05, 3.27, 5.08 et
13.29) (4.18)
Une personne dont les désirs sont devenus désintéressés ayant été consommés dans le feu de
la connaissance de Soi, est appelée un sage par les hommes avisés. (4.19)
Celui qui a abandonnĂ© lâattachement Ă©goĂŻste aux fruits du travail, et reste toujours satisfait
et ne dĂ©pend de personne sauf de Dieu, une telle personne bien quâil soit engagĂ© dans
lâactivitĂ©, ne fait absolument rien, et ne court pas le risque de la rĂ©action Karmique. (4.20)
Celui qui est libéré des désirs, dont le mental et les sens sont sous contrÎle, et qui a renoncé
Ă tout droit de propriĂ©tĂ©, ne sâattire pas le pĂ©chĂ© â ni la rĂ©action Karmique â en agissant
avec son corps. (4.21)
Satisfait de ce qui vient dâune façon naturelle par Sa volontĂ©, sans affection des paires des
opposĂ©s, libĂ©rĂ© de lâenvie, Ă©quanimitĂ© dans le succĂšs et lâĂ©chec, alors quâil est engagĂ© dans le
travail, un tel Karma-yogi nâest pas liĂ© au Karma. (4.22)
Celui qui est libĂ©rĂ© de lâattachement, dont le mental est fixĂ© dans la connaissance du Soi,
qui travaille dans un esprit de service (SevÄ) au Seigneur, tous les liens Karmiques dâune
telle personne philanthropique (Karma-yogi) sont dissoutes. (4.23)
LâĂternel Ătre (Brahman) est lâoblation. Brahman est le beurre clarifiĂ©. Lâoblation est
versée par Brahman dans le feu de Brahman. Brahman sera réalisé par celui qui considÚre
tout comme (une manifestation, ou) un acte de Brahman. (Voir aussi 9.16) (4.24)
DIFFĂRENTS TYPES DE PRATIQUES SPIRITUELLES OU SACRIFICES
Certains yogis accomplissent le service du culte aux régnants célestes (Devas), alors que
dâautres offrent le sacrifice par le soi dans le feu de lâĂternel Ătre (Brahman) en
accomplissant le sacrifice de la connaissance du Soi. (4.25)
Certains offrent leur ouĂŻe et les autres leur sens en sacrifice dans le feu de la maĂźtrise,
dâautres offrent le son et dâautres les objets des sens (comme sacrifice) dans le feu des sens.
(4.26)
Dâautres offrent toutes les fonctions des sens, et les fonctions des cinq bio-impulsions
(PrÄna) comme sacrifice dans le feu de la maĂźtrise de soi, allumĂ© par la connaissance du
Soi. (4.27)
Dâautres offrent la richesse, leur austĂ©ritĂ©, et leur pratique du yoga en sacrifice, tandis que
les ascĂštes aux vĆux sĂ©vĂšres offrent leur Ă©tude des Ăcritures et leur connaissance en
sacrifice. (4.28)
Ceux qui sont engagĂ©s dans des pratiques yogiques, parviennent Ă lâĂ©tat essoufflĂ© dâextase
(SamÄdhi) en offrant lâinhalation dans lâexhalation, et lâexhalation dans lâinhalation en
sacrifice (en utilisant de brefs techniques respiratoires KriyÄ). (4.29)
Dâautres restreignent leur nourriture, et offrent leurs inhalations en leurs inhalations. Ils
sont tous des connaisseurs en sacrifice, et sont purifiés par leur sacrifice. (4.30)
Ceux qui accomplissent le service dĂ©sintĂ©ressĂ© (SevÄ, Yajna) obtiennent le nectar de la
connaissance qui dĂ©coule de leur sacrifice et atteignent lâĂternel Ătre (Brahma). O Arjuna,
mĂȘme ce monde nâest pas un lieu heureux pour celui qui nâoffre aucun sacrifice, quelle
serait alors sa part dans lâautre monde ? (Voir aussi 4.38, et 5.06) (4.31)
Plusieurs types de disciplines spirituelles sont déployés dans les Védas. Sache que tous sont
nĂ©s de Karma ou de lâaction du corps, du mental et des sens. Sachant cela, tu obtiendras le
salut (MokĆa, NirvÄna). (Voir aussi 3.14) (4.32)
ACQUĂRIR LA CONNAISSANCE TRANSCENDANTALE EST SUPĂRIEUR Ă LA
PRATIQUE SPIRITUELLE
Le sacrifice de la connaissance est supĂ©rieur quâaucun sacrifice matĂ©riel, O Arjuna. Car,
toutes actions sans exception culminent dans la connaissance. (4.33)
Cherche la connaissance transcendantale dâune personne qui a rĂ©alisĂ© le Soi en te
prosternant humblement, par la recherche sincĂšre, et par le service. Les sages qui ont
rĂ©alisĂ© la VĂ©ritĂ© tâinstruiront. (4.34)
Quand tu auras connu la science transcendantale, O Arjuna, tu ne seras plus aussi confus.
Avec cette connaissance tu verras la création toute entiÚre dans ton Soi, et ainsi en Moi.
(Voir aussi 6.29, 6.30, 11.07, 11.13) (4.35)
MĂȘme si une personne est la plus grande de tous les pĂ©cheurs, il traversera quand-mĂȘme
lâocĂ©an du pĂ©chĂ© par le seul radeau de la connaissance du Soi (Brahma-jnÄna) (4.36)
De mĂȘme que le feu ardent rĂ©duit le bois en cendre, le feu de la connaissance du Soi
(Brahma-jnÄna) rĂ©duit en cendres les liens de Karma, O Arjuna. (4.37)
LA CONNAISSANCE TRANSCENDANTALE EST AUTOMATIQUEMENT RĂVĂLĂE AU
KARMA-YOGI
En vĂ©ritĂ©, il nây a pas de purificateur plus grand dans ce monde que JnÄna, la vraie
connaissance du SuprĂȘme Ătre (Para-Brahman). Celui qui devient purifiĂ© par Karma-yoga
découvre la connaissance au-dedans, évidemment en temps opportun. (Voir aussi 4.31, et
5.06, 18.78) (4.38)
Lâhomme plein de foi, qui est sincĂšre dans les pratiques yoguiques ; et, qui a le contrĂŽle des
sens, acquiert la connaissance transcendantale. Possédant cette sagesse, il parvient
directement Ă la paix suprĂȘme. (4.39)
Lâirraisonnable, lâhomme sans foi, lâincroyant (lâathĂ©e) pĂ©rit. Ni dans ce monde, ni dans
lâautre, aucun bonheur nâest pour lâincroyant. (4.40)
LA CONNAISSANCE TRANSCENDANTALE ET LE KARMA-YOGA SONT LâUNE ET
LâAUTRE NĂCESSAIRE POUR NIRVANA
Les Ćuvres (Karma) ne lient pas celui qui a renoncĂ© au travail â en renonçant aux fruits du
travail â par Karma-yoga, et dont les doutes (concernant le Soi) sont complĂštement dĂ©truits
par Viveka, lâapplication de la connaissance du Soi, O Arjuna. (4.41)
Par consĂ©quent, tranche avec lâĂ©pĂ©e de la connaissance de Soi, le doute en ton mental nĂ© de
lâignorance, et que tu aies recours au Karma-yoga, ainsi lĂšve-toi et combats, O Arjuna.
(4.42)
Ainsi prend fin le quatriÚme chapitre intitulé «La Voie de la Renonciation par la
Connaissance » dans les UpaniĆad de la BhagavadgÄ«tÄ, lâĂ©criture de yoga, touchant la
science de lâAbsolu dans la forme du dialogue entre SrÄ«kĆĆna et Arjuna.
Une succession disciplique est vraiment authentique quand elle éveille une réponse
adĂ©quate Ă la rĂ©alitĂ© quâelle prĂ©sente. Elle est seulement valable quand notre mental vibre
en rĂ©ponse Ă sa prĂ©sentation. Si ce rĂ©sultat nâest pas atteint la grĂące passe outre, et choisit
de nouveaux instructeurs. Les grands instructeurs nâaffichent aucune exigence Ă
lâoriginalitĂ© ; ils affirment seulement quâils enseignent la VĂ©ritĂ© Une de toujours, qui est la
norme dĂ©finitive que lâon retrouve Ă la base de toutes les religions et philosophies.
Chaque fois quâil y a une nĂ©cessitĂ© sur terre, le Divin descend jusquâau niveau terrestre
pour lâĂ©lever Ă un degrĂ© supĂ©rieur. Le SuprĂȘme Absolu descend pour que lâhomme puisse
monter. Les religions thĂ©istes, qui non seulement croient en Dieu, SuprĂȘme Absolu, mais
qui également attribuent leurs lois à Dieu, ont quelque peu varié entre elles quant au sens
de la révélation. Le concept de révélation semble, chez elles, se réduire à deux notions de
base : ou bien Dieu, le SuprĂȘme Absolu, envoie Son message, par un ange ou directement
dans lâesprit de lâĂ©lu, par lâinspiration, ou bien Dieu sâincarne dans un homme, et câest par
la bouche de celui-ci que Dieu parle comme par le Seigneur KĆĆna, agit par ses mains, et
dĂ©sire par son cĆur. Le Seigneur KĆĆna est un AvatÄr, la descente du Divin dans le monde
humain. Chaque fois que pĂąlit la justice, et que croĂźt lâinjustice, le SuprĂȘme Absolu vient
par intermĂ©diaire, et dĂ©voile la forme dâexistence Ă laquelle les Ăąmes humaines doivent
sâĂ©lever. La naissance de lâĂȘtre sans naissance signifie la rĂ©vĂ©lation du mystĂšre dans lâĂąme
des hommes. Le SuprĂȘme Absolu, bien quâingĂ©nĂ©rĂ© et immortel, se manifeste en une forme
humaine pour triompher des forces de lâignorance et de lâĂ©goĂŻsme. LâAvatar accomplit une
variĂ©tĂ© de fonctions dans le dĂ©veloppement cosmique, et confirme quâil nây a pas
dâopposition dans tout lâunivers entre la vie spirituelle et la vie naturelle. Si notre monde
est imparfait et sous lâempire des sens et du mal, notre devoir yogique est de le sauver pour
le SuprĂȘme Esprit ; en prĂ©sentant Ă lâhumanitĂ© un modĂšle de vie spirituelle Ă lâexemple du
Seigneur KĆĆna, de Bouddha, de MoĂŻse, de JĂ©sus, et de Mohammed pour en citer quelques
uns. En rĂ©sumĂ©, lâAvatar indique la voie par oĂč les hommes pourront sâĂ©lever de leurs
modes dâexistence animale (nâest pas exagĂ©rĂ© de dire), Ă un mode dâexistence spirituelle. Il
y va de pacifier le sanctuaire du cĆur qui devrait donc ĂȘtre le soin principal, et exercice
continuel, afin que le SuprĂȘme Absolu puisse en faire Sa demeure. La paix profonde ne
peut naĂźtre que par la transformation intĂ©rieure. Il nây a pas dâautres armes ni dâautre
dĂ©fense pour lâhomme, que la dĂ©votion par la mĂ©ditation, la priĂšre, et le recueillement en la
Présence divine.
La libération.
Le but de lâincarnation nâest pas simplement de maintenir lâordre du monde mais aussi
dâaider lâhumain Ă rendre sa nature parfaite. LâĂąme libĂ©rĂ©e est vive, illuminĂ©e, et devient
sur terre, une image vivante du SuprĂȘme Infini. Plus le SuprĂȘme Esprit trouve lâĂąme bien
disposĂ©e et dĂ©vote, plus Il lâĂ©claire. Il est absolument vrai que Dieu, le SuprĂȘme Absolu
donne aussi Ses lumiÚres pendant la méditation, mais ces lumiÚres sont peu de chose,
comparées à celles répandues dans un mental absorbé et purifié par le feu de la
connaissance de Soi. Lâascension de lâhomme en Dieu est aussi le but de la descente de
lâInfini dans lâhumanitĂ©. Le yogi, le dĂ©vot, lâĂąme contemplative, une fois quâil a acceptĂ© la
VolontĂ© Divine dans sa vie, par exemple dâaprĂšs lâenseignement de la GĂźtĂą et les Ăcrits
VĂ©diques, de vivre en prĂ©sence du SuprĂȘme Seigneur, persiste dans cette dĂ©termination,
tant quâil nâa pas de volontĂ© contraire. Thomas dâAquin dit : « Non enim oportet quod qui
propter Deum aliquod iter arripuit, in qualibet parte itineris de Deo cogitet actu. » Ce qui
veut dire, « Pour celui qui est entré dans une voie pour obéir à Dieu, il est inutile de penser
Ă chaque pas Ă son Seigneur. » Le contemplatif rĂ©alise la prĂ©sence du SuprĂȘme Absolu en
toutes choses, que ce soit Ă©couter, parler ou manger, et travailler.
Ne craignez rien, le SuprĂȘme Absolu agit toujours pour la purification de votre Ăąme, lui
faire sentir sa misÚre, et lui faire comme toucher du doigt le néant de toutes les passions, et
de tous les dĂ©sirs dĂ©rĂ©glĂ©s. Dieu purifie les Ăąmes quâIl appelle Ă Lui, se servant de lâĂ©preuve
comme dâune lime pour enlever la rouille de lâorgueil, de lâavarice, de la vanitĂ©, de
lâambition mal orientĂ©, de la prĂ©somption, et de lâamour-propre. Mais, ce verset 11, met en
relief la large catholicitĂ© de la philosophie religieuse de la GĂźtĂą. Le SuprĂȘme Absolu
accueille chaque aspirant avec faveur et accorde Ă chacun aprĂšs lâĂ©preuve, le dĂ©sir du
cĆur. Lorsque le dĂ©vot se trouve au milieu de ces tourments, lâaffliction, la souffrance, Dieu
nâĂ©teint pas lâespĂ©rance en personne mais il aide toutes les espĂ©rances Ă grandir selon leur
nature. MĂȘme ceux qui adorent les divinitĂ©s vĂ©diques avec sacrifices, et en attendant une
rĂ©compense obtiennent ce quâils cherchent par la grĂące du SuprĂȘme Absolu.
Comme les anciens accomplirent lâĆuvre fixĂ©e par la tradition, Arjuna est appelĂ© Ă faire
son devoir de guerrier.
Autant que nous travaillons dans un esprit de dĂ©tachement notre mental nâest pas troublĂ©.
Le détachement devient avant tout le fait de ne pas chercher tant de choses, mais de
chercher dans toute chose ce qui est plus grand quâelle et au-delĂ dâelle, - qui permet
dâaimer les choses sans y rester, qui permet de les dĂ©passer tout en les emmenant avec soi.
Nous nous abstenons des actes nĂ©s du dĂ©sir et accomplissons notre devoir dâĂąme en liaison
avec le SuprĂȘme Absolu. Le dĂ©tachement est dâĂȘtre en parfaite harmonie avec lâidĂ©e de
notre incarnation, en laquelle se rĂ©sume la GĂźtĂą. Ainsi, la vĂ©ritable inactivitĂ© consiste Ă
conserver lâĂ©quilibre intĂ©rieur et Ă ĂȘtre libre de tout attachement, en cherchant dans toutes
choses et dans tout ĂȘtre ce qui est plus grand quâeux et au-delĂ dâeux. Aimer les choses et
les ĂȘtres sans sây complaire ; les dĂ©passer tout en les emportant avec soi et en les
transfigurant. Lâinaction des ignorants, due Ă la perversitĂ© et Ă lâignorance, Ă©quivaut Ă
lâaction. Lâaction du yogi ou dĂ©vot (sans dĂ©sir) porte le mĂȘme fruit que le renoncement.
Quand lâhomme est dĂ©barrassĂ© de ses dĂ©sirs passionnelles et de sa volontĂ© personnelle, il
devient un miroir qui reflÚte la volonté divine, et devient ainsi un vrai instrument du
SuprĂȘme Seigneur.
On reconnaßt le yogi ou le dévot à ses actions et à ses paroles. Maßtre absolu de ses passions
et de ses actes, il est toujours Ă©gal Ă lui-mĂȘme, tel un fleuve clair et paisible qui reflĂšte
exactement la Sagesse dâen haut.
Gßtù 4.25-32 : La connaissance de beaucoup de vérités ne rend ni plus saint ni plus sage, on
ne le devient quâen les mettant en pratique.
Le but est la sagesse salutaire qui nous donne la libertĂ© de lâaction et nous libĂšre des
chaĂźnes des Ćuvres. La saintetĂ© ne consiste pas Ă se former de Dieu des conceptions
sublimes, mais Ă Lâaimer et Ă renoncer Ă lâattachement.
Les sages nous enseigneront la vĂ©ritĂ© si nous nous approchons dâeux dans un esprit de
service et dâenquĂȘte respectueuse. Tant que nous nâaurons pas atteint le Divin intĂ©rieur, il
nous faut agir suivant les conseils de ceux qui ont eu lâexpĂ©rience du SuprĂȘme Absolu. Chez
les sages, la raison illuminĂ©e est une Ă©lĂ©vation simple et sublime de lâesprit ; et câest avec
une vision nette quâil considĂšre tout ce qui est au-dessous de lui, et ce qui concerne sa vie et
sa maniĂšre dâĂȘtre. Câest cette Ă©lĂ©vation qui rend lâĂąme spirituelle, simple, pleine de lumiĂšre
et de sĂ©rĂ©nitĂ©, et qui lâisole de toutes crĂ©atures. Le cĆur des ĂȘtres humbles et doux est
transformĂ© par la raison illuminĂ©e dans une paisible violence, il est alors rempli dâune paix
et dâune sĂ©rĂ©nitĂ© sans mesure. Câest elle dont le sage dit quâelle amĂšne avec elle toutes
sortes de biens. « Venerunt mihi omnia bona pariter cum illa (Tous les biens me viendront
avec elle). » Cependant, nous devons combiner la dévotion envers le sage avec le droit le
plus Ă©tendu de libre examen et de recherche. LâobĂ©issance aveugle Ă une autoritĂ© extĂ©rieure
est rejetĂ©e. Il y a aujourdâhui des gourous et autres, qui exigent de leurs dĂ©vots ou disciples
une obĂ©issance irrĂ©flĂ©chie Ă leurs ordres, croyant que la mort de lâintellect est la condition
de vie de lâesprit. Beaucoup dâĂąmes naĂŻfs et simples dâesprit sont attirĂ©s vers eux, non pas
tant par leur pouvoir spirituel que par la publicitĂ© de leurs agents et lâinclination gĂ©nĂ©rale
pour la nouveautĂ©, la curiositĂ© et lâexcitation. Cela est contraire Ă la tradition hindoue qui
insiste sur la recherche personnelle, comme lâenseigne la GĂźtĂą. Lâopinion dâautrui gouverne
la plupart des hommes, et leur jugement se base trÚs vite sur les idées fausses que leur sens
et leur imagination leur présentent. Le vrai gourou, qui ne demande rien en retour pour
son instruction spirituelle, lui, nâĂ©tablit son jugement que sur la VĂ©ritĂ© Une et Absolue, qui
demeure en lui, et qui fait quâil entend tout, quâil conçoit tout, quâil pĂ©nĂštre tout, puisquâil
sâĂ©lĂšve spirituellement au-dessus de tout ce qui est, au-dessus de lui-mĂȘme, le SuprĂȘme
Absolu.
La foi nâest pas, bien sĂ»r, la seule adhĂ©sion intellectuelles aux dogmes dâune religion. Câest
dans un sens beaucoup plus riche, et va au-delĂ de toute religion, notamment la croyance
au SuprĂȘme Absolu chargĂ©e de tout ce que la connaissance de cet Ătre Adorable peut
susciter en nous de confiance en sa force bienfaisante. Câest la conviction pratique que
lâUnivers, entre les mains de CrĂ©ateur, continue Ă ĂȘtre lâargile dont Il pĂ©trit Ă son grĂ© les
possibilitĂ©s multiples. La foi est nĂ©cessaire Ă lâacquisition de la connaissance, et nâest
certainement pas croyance aveugle. Elle est le reflet dans le Moi empirique de lâintelligence
qui rĂ©side au plus profond de notre ĂȘtre. La foi ne naĂźt que de la foi, il nây a pas dâun cĂŽtĂ© la
raison, et de lâautre la foi. Actions de foi de plus en plus Ă©levĂ©es, oĂč le monde a un sens, et
ce sens est activĂ© par le mental, et qui se fait par lâunification, ce qui signifie lâadhĂ©sion Ă la
Vérité Une spécialement décrite dans la Gßtù. Jnana, la connaissance, est pure de toute
doute ; tandis que la connaissance intellectuelle qui dépend des données sensorielles et de
lâinfĂ©rence logique connaĂźt le doute et le scepticisme. Ce nâest pas dans le fait de donner un
enseignement, mais dans la pratique de cet enseignement que consiste la libération. Il faut
vivre sa vie intérieure et la posséder progressivement. La connaissance de Soi et divine
rĂšgne rarement dans le cĆur de ceux qui se plaisent aux spĂ©culations de la science
humaine ; mais lorsque la connaissance de Soi et la science se trouvent rĂ©unies, câest une
rencontre merveilleuse. La voie qui y mĂšne est la foi et la maĂźtrise.
Viveka : la force de lâanalyse et de discrimination.
Ă Arjuna est ici demandĂ© dâaccomplir lâaction Ă lâaide de la connaissance et de la
concentration. Le doute en son cĆur concernant le combat est le produit de lâignorance. Ce
doute sera dĂ©truit par la connaissance de Soi, pour enfin savoir ce quâil doit faire.
Chapitre 5
LA VOIE DE LA RENONCIATION
Arjuna dit : O KĆĆna, Tu loues la connaissance transcendantale (SÄmkhya, Karma-
samnyÄsa) et aussi, lâaccomplissement du service dĂ©sintĂ©ressĂ© (Karma-yoga). Dis-moi en
toute certitude, laquelle des deux est la meilleure. (5.01)
Le Seigneur SuprĂȘme dit : La voie de la connaissance du Soi (Karma-samnyÄsa) et la voie
du service dĂ©sintĂ©ressĂ© (Karma-yoga, SevÄ) mĂšnent tous deux au but suprĂȘme. Mais des
deux, Karma-yoga est supĂ©rieur au Karma-samnyÄsa. (5.02)
Une personne devrait considĂ©rer comme vrai un SamnyÄsÄ« (renonciateur) qui ne dĂ©daigne
ni ne désire. Il est facilement libéré des chaßnes Karmiques en devenant affranchi des
paires des opposés, O Arjuna. (5.03)
LES DEUX VOIES MĂNENT AU SUPRĂME
Lâignorant â non le sage â considĂšre la voie de la connaissance de Soi (Karma-samnyÄsa) et
la voie du service dĂ©sintĂ©ressĂ© (Karma-yoga), comme sâil sâagissait de deux choses
distinctes. La personne qui est fermement Ă©tabli dans lâun des deux obtient le fruit des
deux. (5.04)
LâĂ©tat oĂč arrive le renonciateur (SamnyÄsÄ«), le Karma-yogi atteint Ă©galement le mĂȘme
destin. Câest pourquoi, celui qui voit la voie de la renonciation et la voie du travail
désintéressé comme identiques, voit vraiment. (Voir aussi 6.01 et 6.02)) (5.05)
Mais, la vraie renonciation (SamnyÄsa), O Arjuna, est difficile Ă atteindre sans Karma-
yoga. Un sage harmonisé par le Karma-yoga atteint trÚs vite Brahman. (Voir aussi 4.31, et
4.38) (5.06)
Le Karma-yogi dont le mental est pur, dont le mental et les sens sont sous contrĂŽles, et qui
perçoit le mĂȘme Ăternel Ătre (Brahman) en tous les ĂȘtres nâest pas liĂ© au Karma mĂȘme sâil
est engagé dans le travail. (5.07)
UN TRANSCENDANTALISTE NE SE CONSIDĂRE PAS COMME ĂTANT LE FAISEUR.
Le sage (ou SamnyÄsÄ«) qui connaĂźt la vĂ©ritĂ© pense : « Je ne fais absolument rien. » En
voyant, entendant, touchant, sentant, mangeant, marchant, dormant, respirant, parlant,
saisissant et rejetant, ouvrant et fermant les yeux, un SamnyÄsÄ« croit que ce sont
uniquement les sens qui opĂšrent sur leurs objets. (Voir aussi 3.27, 13.29, et 14.19) (5.08-09)
UN KARMA-YOGI TRAVAILLE POUR DIEU
Celui qui fait son travail comme une offrande au Seigneur, abandonnant tout attachement
intĂ©ressĂ© aux rĂ©sultats â nâest pas affectĂ© par la rĂ©action Karmique ou le pĂ©chĂ© comme la
feuille de lotus qui nâest mouillĂ©e par lâeau. (5.10)
Les Karma-yogis accomplissent lâaction â sans attachement Ă©goĂŻste â avec leur corps,
mental, intellect, et sens pour leur purification. (5.11)
Un Karma-yogi atteint la fĂ©licitĂ© SuprĂȘme en abandonnant les fruits du travail ; pendant
que dâautres, qui sont attachĂ©s aux fruits du travail, se lient au travail Ă©goĂŻste. (5.12)
LA VOIE DE LA CONNAISSANCE
Une personne qui a complÚtement renoncé aux fruits de tous travaux, demeure heureuse
dans la CitĂ© Ă Neuf Portes, sans agir ni engendrer lâaction. (5.13)
Le Seigneur ne crĂ©e pas lâobligation de lâaction, ni lâincitation dâen ĂȘtre lâauteur, ni
lâattachement aux rĂ©sultats des actions parmi les hommes. Tout est lâĆuvre des forces
(Gunas) de la Nature. (5.14)
Le Seigneur ne prend pas la responsabilité des actes bons ou mauvais de quiconque. La
connaissance du Soi est enveloppĂ©e par le voile de lâignorance, câest pourquoi les hommes
sâĂ©garent (et accomplissent des actes mauvais). (5.15)
La connaissance transcendantale dĂ©truit lâignorance sur le Soi, et rĂ©vĂšle le SuprĂȘme, tout
comme le soleil révÚle la beauté des objets de ce monde. (5.16)
Les personnes dont le mental et lâintellect sont totalement absorbĂ©s dans lâĂternel Ătre
(Brahman), qui sont des dévots confirmés de Brahman, qui ont Brahman comme leur
suprĂȘme destin et unique refuge, et dont les impuretĂ©s sont dĂ©truites par la connaissance de
Brahman, ne prennent plus naissance. (5.17)
LES MARQUES SUPPLĂTIVES DâUNE PERSONNE ILLUMINĂE
Le sage illuminĂ© (en percevant le Seigneur en toutes choses) voit le BrÄhmana cultivĂ© et
humble, un paria, mĂȘme une vache, un Ă©lĂ©phant, ou un chien dâun Ćil Ă©gal. (Voir aussi
6.29) (5.18)
Tout est accompli dans cette vie mĂȘme dont le mental est Ă©quanime. Une telle personne a
rĂ©alisĂ© lâĂternel Ătre (Brahman), car lâĂternel Ătre est parfait et impartial. (Voir aussi
18.55, et ChU 2.23.01) (5.19)
Celui qui nâest pas exaltĂ© en obtenant quelque chose dâagrĂ©able, ni sâafflige lorsquâil
obtient quelque chose de dĂ©sagrĂ©able, dont le mental est ferme, qui nâest pas troublĂ©, et qui
est connaisseur de lâĂternel Ătre (Brahman), une telle personne est Ă©tablie en Brahman.
(5.20)
Une telle personne qui est en union avec lâĂternel Ătre (Brahman) devient dĂ©tachĂ©e aux
plaisirs sensuels externes en dĂ©couvrant la joie du Soi par la contemplation, et jouit dâune
félicité transcendantale. (5.21)
Les plaisirs sensuels sont vraiment une source de misÚre, et qui ont un début et une fin. Par
conséquent, le sage, O Arjuna, ne se réjouit pas des plaisirs sensuels. (Voir aussi 18.38)
(5.22)
Celui qui est capable de résister aux impulsions du désir ou de la colÚre au moment de la
mort est un yogi, et une personne heureuse. (5.23)
Celui qui trouve le bonheur dans lâĂternel Ătre (Brahman), se rĂ©jouit de Brahman en lui,
et qui est illuminĂ© par la connaissance du Soi, ce yogi atteint Brahma-nirvÄna, et parvient
au SuprĂȘme Ătre (Para-Brahman). (5.24)
Les voyants dont les péchés (ou imperfections) sont détruits, ayant tranchés le doute par la
connaissance du Soi (JnÄna), dont le mental est disciplinĂ©, et qui sont engagĂ©s au bien-ĂȘtre
de toutes les crĂ©atures, atteignent le SuprĂȘme Ătre (Para-Brahman). (5.25)
Ceux qui sont libérés du désir et de la colÚre, qui ont conquis le mental et les sens, et qui
ont dĂ©couvert le Soi, atteignent facilement Brahma-nirvÄna. (5.26)
LA TROISIĂME VOIE â LA VOIE DE LA MĂDITATION DĂVOTIONNELLE ET LA
CONTEMPLATION.
Le sage est vraiment libéré en renonçant à toutes jouissances des sens, fixant les yeux et le
mental (au point noir imaginaire) entre les sourcils, Ă©galisant le souffle de lâinspiration et
celui de lâexpiration dans les narines (par les techniques KriyÄ), tenant les sens, le mental,
et lâintellect sous contrĂŽle, obtenant le salut (Mukti) comme le but suprĂȘme, devenant ainsi
libéré du désir, de la colÚre, et de la peur. (5.27-28)
Mon dĂ©vot atteint la paix en Me (ou, KĆĆna, le SuprĂȘme Ătre (Para-Brahma)) connaissant,
comme celui qui jouit des sacrifices et des austĂ©ritĂ©s, le grand Seigneur de tout lâunivers, et
lâami de tous les ĂȘtres. (5.29)
Ainsi prend fin le cinquiÚme chapitre intitulé «La Voie de la Renonciation» dans les
UpaniĆad de la BhagavadgÄ«tÄ, lâĂ©criture de yoga, touchant la science de lâAbsolu dans la
forme du dialogue entre SrÄ«kĆĆna et Arjuna.
Voie de lâapprofondissement dans la connaissance du moi intĂ©rieur distinct du corps
matériel.
Renoncement aux fruits de lâacte dans lâaccomplissement du devoir.
Lâaction dans la conscience et prĂ©sence du Seigneur KĆĆna. Le Karma Yoga est un des
premiers échelons du yoga, et aide le yogi ou dévot à se défaire progressivement de toute
souillure matérielle en lui apprenant à purifier ses actes.
Tout dâabord, Karma est la loi de la nature selon laquelle toute action matĂ©rielle, bonne ou
mauvaise, entraĂźne obligatoirement des consĂ©quences, lesquelles ont pour effet dâenchaĂźner
toujours davantage lâĂąme vivante Ă lâexistence matĂ©rielle et au cycle des morts et des
renaissances. Karma, câest Ă©galement son acception la plus gĂ©nĂ©rale, ainsi que les
consĂ©quences de lâaction. SamnyÄsa, signifie le renoncement aux fruits des actes dans
lâaccomplissement du devoir.
Le service dĂ©sintĂ©ressĂ© Ă lâhumanitĂ©.
La voie du SÄmkhya implique renoncement au travail, c.Ă .d. travailler dans un esprit de
dĂ©tachement, et celle de Karma-yoga insiste pour quâon les accomplisse, dans un esprit qui
convient. Il ne suffit pas pour atteindre le salut, dâĂȘtre un jnani (une personne qui rĂ©alise la
connaissance de Soi), de connaßtre son identité spirituelle, il faut mettre la théorie en
pratique, seul moyen de briser les chaĂźnes qui nous gardent prisonniers de la matiĂšre. Il
faut se vaincre soi-mĂȘme, rĂ©sister Ă ses sentiments, mĂ©priser ses faux raisonnements, obĂ©ir,
se taire, et suivre les saints conseils que la Gßtù nous donne, afin de déraciner la convoitise
et les désirs déréglés.
Câest-Ă -dire, le froid et le chaud, le plaisir et la douleur, le malheur et le bonheur, etc.
Le vrai yogi de lâaction est aussi le vrai « renonçant », car il accomplit lâaction dans un
esprit de détachement.
Karma-samnyÄsa et Karma-yoga dĂ©signent la voie intellectuelle et le renoncement Ă
lâaction.
Le yogi ou dĂ©vot qui vit selon les normes du samnyÄsa et renonce Ă tout pour servir le
Seigneur.
Le vĂ©ritable yogi ou dĂ©vot du renoncement nâest pas celui qui demeure totalement inactif,
mais celui dont le service est accompli dans un esprit de détachement. Le renoncement est
une attitude mentale, le rejet du dĂ©sir, tandis quâon agit. La vĂ©ritable action est celle dâoĂč
tout dĂ©sir a Ă©tĂ© Ă©liminĂ©. Quand des actions son accomplies par le sage ou par lâignorant,
lâacte extĂ©rieur est le mĂȘme, mais la comprĂ©hension interne diffĂšre. Au fait, il faut que
lâĂąme soit purifiĂ©e par le feu de lâĂ©preuve pour quâelle puisse sâunir au SuprĂȘme Absolu.
Nous sommes invités à prendre conscience du Soi en nous, qui est pur, libre, et distinct des
Ă©lĂ©ments matĂ©riels. Les principes constitutifs du Moi sont impermanents, câest-Ă -dire, cette
fraction de la personnalitĂ© qui Ă©quilibre les forces auxquelles lâindividu est soumis, avec ses
propres impulsions (tendances profondes), sa morale, face à la réalité éphémÚre du monde
extérieur.
La GĂźtĂą nous incite, non pas Ă renoncer au travail, mais Ă lâaccomplir en lâoffrant au
SuprĂȘme Absolu, en qui seul est lâimmortalitĂ©. Renoncer Ă notre attachement ; se
soumettre au service désintéressé ; lutter continuellement contre ses passions, sont des
vertus que beaucoup de gens enseignent mais que peu pratiquent. Quand nous renonçons Ă
notre attachement Ă lâĂ©go fini, Ă ses prĂ©fĂ©rences et Ă ses aversions, et plaçons nos actions
dans lâĂternel, nous acquĂ©rons le vrai renoncement, qui est compatible avec une libre
activitĂ© dans le monde. La plupart de ceux qui se sont engagĂ©s dans la voie spirituelle nây
restent que tant quâils savourent encore le miel de la premiĂšre ferveur ; mais cette douceur
se dissipe, Ă mesure quâils sâavancent sur la voie de la connaissance. Ils voient sâĂ©lever
lâorage des tentations ; ils prĂ©voient la sĂ©cheresse, alors ils sâen retournent, signe Ă©vident
quâils se cherchaient eux-mĂȘmes et nâaspiraient ni Ă Dieu ni Ă la perfection. Celui qui
renonce Ă lâattachement agit, non pour son moi Ă©phĂ©mĂšre et fini, mais pour le Soi dans
chaque humain.
Les neuf portes sont les yeux, les oreilles, les narines, la bouche et les deux organes
dâexcrĂ©tion et de gĂ©nĂ©ration. LâĂąme ne saurait parvenir Ă lâunion intime et affective avec le
SuprĂȘme Absolu (Dieu), si le cĆur nâest pas net, si les affections ne sont pas purifiĂ©es. Il
faut pour y atteindre que la mĂ©moire soit vide, lâesprit Ă©clairĂ©, la volontĂ© soumise et
ardente, car le SuprĂȘme Ătre Ă©tant la puretĂ©, la lumiĂšre et le nirvana mĂȘme, ne peut faire
Sa demeure que dans une Ăąme pure, attentive, paisible et dĂ©sintĂ©ressĂ©. Ce cĆur purifiĂ©
nâest possĂ©dĂ© que par ceux qui cultivent en eux-mĂȘmes lâamour du Seigneur avec un soin
jaloux. Le SuprĂȘme Absolu est le mĂȘme en tous les ĂȘtres : dans les animaux, les hommes, et
les religieux (les BrÄhmanas). La lumiĂšre de Brahman Ă©claire tous les corps et nâest pas
affectée par leurs différences.
Celui qui sâest libĂ©rĂ© de lâillusion des sens et qui vit dans lâĂternel Absolu jouit de la fĂ©licitĂ©
transcendantale. Notre attitude en face du SuprĂȘme Seigneur sera dĂ©terminĂ©e par
lâapprĂ©ciation saine de ce quâIl est Ă notre Ă©gard, de ce que nous sommes au sien, de ce quâil
a prescrit et sous quels efforts de notre part. Nous sommes des créatures, car nous tenons
tout du SuprĂȘme Ătre : le corps, lâĂąme, la vie, la durĂ©e, les influences, les directions, le jour
de notre mort, tout enfin. A ce titre, Dieu a sur nous un droit absolu de propriété et
dâautoritĂ©. Il nây a rien lĂ qui nous puisse effrayer. Câest la joie, la plus haute joie de la
crĂ©ature de reconnaĂźtre cette souverainetĂ© divine et de sâabandonner Ă ce pouvoir
arbitraire. Et, jamais le SuprĂȘme Seigneur ne nous fait plus dâhonneur que lorsque Il
dispose de nous à son gré, sans nous demander conseil, sans paraßtre soupçonner,
seulement quâil y aurait une hĂ©sitation dans notre volontĂ© ou un frĂ©missement dans notre
chair. Le sage voit le SuprĂȘme Absolu dans tous les ĂȘtres, et acquiert la qualitĂ©
dâĂ©quanimitĂ© qui caractĂ©rise Dieu.
Le détachement en tout ce que nous faisons, dont résulte la paix intérieure, la liberté et la
joie peut-ĂȘtre obtenu dĂšs ici-bas sur la terre et pendant notre vie incarnĂ©e. Ce conformer au
SuprĂȘme Absolu est faite de connaissance et de fidĂ©litĂ©. Nous entendons de nouveau ce
principe quâil nous faut prendre conscience dâun SuprĂȘme Absolu toujours prĂ©sent, ainsi,
au sein mĂȘme de la vie humaine, le NirvÄna est accessible. Le yogi, le dĂ©vot parvient Ă
lâunitĂ© de sa conscience avec le SuprĂȘme Absolu en lui, et lâĂąme qui a acquis la sagesse et la
paix est Ă©galement remplie dâamour et de compassion. Les deux aspects de la religion, le
personnel et le social, sont soulignés dans la Gßtù. A titre personnel, nous devons découvrir
la SuprĂȘme PrĂ©sence en nous, et y laisser pĂ©nĂ©trer tout lâhumain, aussi socialement, tout en
essayant de vivre dans une communautĂ© soumise Ă lâimage de Dieu. Câest la conviction
surnaturelle de la SuprĂȘme PrĂ©sence qui mettra de lâordre en nous, et dans la sociĂ©tĂ©.
Sages visionnaires.
Le bĂ©nĂ©fice le plus rĂ©el du procĂ©dĂ© est renfermĂ© dans le procĂ©dĂ© lui-mĂȘme. Sans doute il
nous fera obtenir miséricorde ; sans doute une solution, une indication pratique nous sera
fournie, nous lâaccueillerons les yeux fermĂ©s, sans discussion et sans rĂ©serve; mais, sa vraie
efficacité est ailleurs. Il nous établit dans la simplicité, dans la loyauté absolue, il crée
lâunitĂ© profonde de notre vie, la conformitĂ© entre le dedans et le dehors. Certaines petites
roueries secrÚtes ne résistent pas au parti pris de tenir toujours son ùme comme un livre
ouvert, de nây porter que ce que le SuprĂȘme Absolu et chacun y peuvent lire et ainsi parler.
Dieu nâest pas le lointain rĂ©gent du monde mais un ami intime prĂȘt Ă nous faire triompher
du mal si seulement nous plaçons notre foi et fidélité en Lui.
Chapitre 6
LA VOIE DE LA MĂDITATION
UN KARMA-YOGI EST UN RENONCIATEUR
Le SuprĂȘme Seigneur dit : Celui qui accomplit le devoir qui lui incombe sans dĂ©pendre des
fruits (pour jouissance personnelle) est un renonciateur (SamnyÄsÄ«) et un Karma-yogi.
Lâhomme ne devient pas un yogi simplement en sâabstenant de travailler. (6.01)
O Arjuna, ce quâils appellent renoncement (SamnyÄsa) est aussi connu comme Karma-
yoga. Personne ne devient un Karma-yogi sâil nâa pas renoncĂ© aux motifs Ă©goĂŻstes de
lâaction. (Voir aussi 5.01, 5.05, 6.01, et 18.02) (6.02)
LA DĂFINITION DU YOGA
Pour le sage qui cherche de parvenir Ă lâĂ©tat de yoga (de mĂ©ditation, ou de lâĂ©quanimitĂ© du
mental), il est dit que le Karma-yoga en est le moyen. Pour celui qui a atteint le yoga,
lâĂ©quanimitĂ© devient le moyen (pour la rĂ©alisation du Soi). Dit-on, quâune personne a
atteint la perfection yoguique lorsquâ il ou elle nâa plus de dĂ©sir pour les jouissances
sensuelles, ou lâattachement aux fruits du travail, et a renoncĂ© Ă tous les motifs Ă©goĂŻstes.
(6.03-04)
LE MENTAL EST LE MEILLEUR AMI AUTANT QUE LE PIRE ENNEMI
Lâhomme doit sâĂ©lever â et ne pas se dĂ©grader â par son propre mental. Le mental seul est
son ami autant que son ennemi. Le mental est lâami de celui qui le contrĂŽle, et le mental
agit comme ennemi de celui qui ne le contrĂŽle pas. (6.05-06)
Celui qui a le contrĂŽle sur le soi infĂ©rieur â le mental et les sens â reste calme au chaud et le
froid, le plaisir et la douleur, dans lâhonneur et le dĂ©shonneur, et demeure toujours ferme
au Soi suprĂȘme. (6.07)
Une personne est nommée un yogi qui possÚde la connaissance du Soi et la réalisation du
Soi, qui est Ă©quanime, qui a le contrĂŽle sur le mental et les sens, et pour qui une motte de
terre, une pierre, et lâor sont tous identiques. (6.08)
Une personne est considérée comme supérieure qui est égale pour les compagnons, les amis,
les ennemis, ceux qui sont neutres, les arbitres, les haineux, les parentés, les saints, et les
pécheurs. (6.09)
LES TECHNIQUES DE MĂDITATION
Un yogi, assis dans la solitude et seul, doit constamment sâefforcer de contempler le
SuprĂȘme Ătre aprĂšs avoir mis son mental et les sens sous contrĂŽle, libĂ©rĂ© du dĂ©sir et de
droit de propriété. (6.10)
Il ou elle devrait sâasseoir dans un endroit propre, sur un siĂšge stable qui est ni trop haut
ou trop bas, couvert dâherbe sacrĂ© KuĆa, dâune peau de daim, et dâune Ă©toffe superposĂ©es.
LĂ , assis (dans une position confortable), concentrant son mental sur Dieu, et maĂźtrisant ses
pensées et les activités des sens, mettra en pratique la méditation pour sa propre
purification. (6.11-12)
La personne doit sâasseoir, la taille, la colonne vertĂ©brale, la poitrine, le cou et la tĂȘte
droites, immobiles et dâaplomb ; le regard et le mental fermement fixĂ©s sur lâextrĂ©mitĂ© du
nez, sans regarder autour de soi ; serein et sans crainte, mettant en pratique le célibat ; le
mentale sous contrĂŽle, pensant Ă Moi, et Mâatteignant comme le dessein suprĂȘme. (6.13-14)
Ainsi, exerçant toujours le mental fixé sur Moi, le yogi dont le mental est soumis atteint la
paix de Brahma-nirvana et vient Ă Moi. (6.15)
Ce yoga nâest pas possible, O Arjuna, pour celui qui mange trop ou qui ne mange pas du
tout ; pour celui qui dort trop ou qui se tient éveillé. (6.16)
Mais, pour la personne qui est modéré dans sa nourriture, son délassement, ses travaux,
son sommeil et lâĂ©veil, le yoga de mĂ©ditation dĂ©truit toute souffrance. (6.17)
Il est dit, quâune personne a atteint le yoga, lâunion avec lâĂternel Ătre (Brahman), lorsque
le mental parfaitement discipliné, est libéré de tous désirs, et complÚtement uni au
Brahman en SamÄdhi. (6.18)
Une lampe abritĂ©e (par lâĂternel Ătre) du vent (des dĂ©sirs) ne vacille pas ; cette similitude
est utilisĂ©e pour dĂ©finir le mental disciplinĂ© du yogi qui pratique la mĂ©ditation sur lâĂternel
Ătre (Brahman). (6.19)
Lorsque le mental discipliné par la pratique de la méditation atteint la quiétude, en quoi
lâon devient satisfait avec lâĂternel Ătre (Brahman) en Le contemplant dans un intellect
purifié. (6.20)
En quoi lâon Ă©prouve une infinie fĂ©licitĂ©e qui est seulement perçue par lâintellect, et est par-
delĂ lâatteinte des sens. AprĂšs avoir rĂ©alisĂ© lâĂternel Ătre (Brahman), lâon nâest jamais
séparé de la Réalité Absolue. (Voir aussi KaU 3.12) (6.21)
Ce qui, ayant obtenu la réalisation du Soi, on ne regarde aucun gain supérieur à atteindre.
LâĂ©tablissement dans la rĂ©alisation du Soi nâest pas Ă©branlĂ© mĂȘme par la plus grande
calamité. (6.22)
LâĂ©tat de dissolution de lâassociation avec la souffrance est appelĂ© yoga. Ce yoga devrait
ĂȘtre pratiquĂ© avec une ferme dĂ©termination, et sous aucune rĂ©serve mentale. (6.23)
On atteint graduellement la tranquillité du mental en abandonnant totalement tous désirs
Ă©goĂŻstes, et en maĂźtrisant complĂštement les sens des objets de sens par lâintellect, tenant le
mental entiĂšrement absorbĂ© dans lâĂternel Ătre (Brahman) au moyen dâun intellect bien
formĂ© et purifiĂ©, ne pensant Ă rien dâautre. (6.24-25)
Tout ce qui fait errer le mental sans repos et instable, on devrait ramener doucement Ă la
rĂ©flexion du Seigneur KĆĆna, la SuprĂȘme PersonnalitĂ© de la DivinitĂ©. (6.26)
QUI EST UN YOGI
La suprĂȘme fĂ©licitĂ© est pour le yogi qui a rĂ©alisĂ© le Soi, dont le mental est calme, de qui les
dĂ©sirs sont sous contrĂŽle, et qui sâest libĂ©rĂ© de tous pĂ©chĂ©s (ou fautes). (6.27)
Un tel yogi exempt de pĂ©chĂ©s, qui engage constamment son mental et intellect au SuprĂȘme
Ătre (Brahman), atteint aisĂ©ment lâinfinie fĂ©licitĂ© en contact avec Brahman. (6.28)
Car en percevant lâĂternel Ătre omniprĂ©sent (Brahman) demeurant dans tous les ĂȘtres, et
tous les ĂȘtres demeurant en lâĂternel Ătre, le yogi qui est en union avec lâĂternel Ătre, voit
chaque ĂȘtre dâun Ćil Ă©gal. (Voir aussi 4.35, 5.18) (6.29)
Ceux qui Me voient en tout et qui voient tout en Moi, ne sont pas séparés de Moi, et Je ne
suis pas sĂ©parĂ© dâeux. (6.30)
Les non-dualistes qui Mâadorent, Moi qui rĂ©side en tous les ĂȘtres, demeurent en Moi, de
quelque façon leur mode de vie. (6.31)
Il est le meilleur yogi qui voit tous les ĂȘtres Ă lâimage de son propre ĂȘtre, et qui est sensible Ă
la douleur ou le plaisir des autres comme pour lui-mĂȘme, O Arjuna. (6.32)
DEUX MĂTHODES POUR MAĂTRISER LE MENTAL TURBULENT
Arjuna dit : O KĆĆna, Tu as dit que le yoga de la mĂ©ditation est caractĂ©risĂ© par
lâĂ©quanimitĂ© du mental, mais Ă cause de lâinquiĂ©tude du mental je ne discernes pas lâĂ©tat
stable du mental. Parce que le mental est vraiment instable, turbulent, fort et obstiné, O
KĆĆna, je pense que le mental est aussi difficile Ă maĂźtriser que le vent. (6.33-34)
Le SuprĂȘme Seigneur dit : Sans aucune doute, O Arjuna, le mental est sans repos et
difficile à refréner, mais il est dompter par la pratique spirituelle constante et vigoureuse
dans la persévérance et le détachement, O Arjuna. (6.35)
Jâen conviens que le yoga est difficile pour celui dont le mental nâest pas maĂźtrisĂ©.
Néanmoins, le yoga est accessible aux personnes dont le mental est dompté grùce à des
efforts bien dirigés. (6.36)
LA DESTINATION DU YOGI SANS SUCCĂS
Arjuna dit : Le fidĂšle qui sâĂ©carte de la voie de la mĂ©ditation, et est incapable dâatteindre la
perfection yoguique Ă cause du mental insoumis â quelle est la destination dâune telle
personne, O KĆĆna ? (6.37)
Ne pĂ©rissent-ils pas comme un nuage qui se dĂ©chire, O KĆĆna, ayant perdus autant (le yoga
et le Bhoga, les jouissances célestes et mondaines), privés de support et égarés sur la voie de
la réalisation du Soi ? (6.38)
O KĆĆna, Toi seulement es capable de dissiper totalement ce doute en moi. Car nul autre
que Toi, peut dissiper ce doute. (Voir aussi 15.15) (6.39)
Le SuprĂȘme Seigneur dit : Il nây a pas de destruction, O Arjuna, pour un yogi dans ce
monde ou dans lâautre. Un transcendantaliste ne vient jamais Ă mal, Mon cher ami. (6.40)
Le yogi qui a échoué dans la voie du yoga renaßtra dans une maison des pieux et prospÚres
aprÚs avoir atteint le ciel et y séjournant pendant de longues années, ou un tel yogi est né
dans une famille de yogis douĂ©s de sagesse. Une naissance semblable est vraiment difficile Ă
obtenir dans ce monde. (6.41-42)
LĂ , il ou elle retrouve la connaissance acquise dans la vie antĂ©rieure, et sâefforce Ă nouveau
vers la perfection, O Arjuna. (6.43)
Le yogi qui nâa pas abouti, est instinctivement poussĂ© vers lâĂternel Ătre (Brahman) par la
vertu des impressions (SamskÄra) des pratiques yoguiques dans les vies prĂ©cĂ©dentes. MĂȘme
le chercheur de yoga â lâunion avec Dieu â dĂ©passe ceux qui effectuent les rituels VĂ©diques.
(6.44)
Le yogi qui poursuit assidûment ses efforts, devient complÚtement libéré de tous péchés (ou
imperfections) aprĂšs avoir poursuivi graduellement des perfections en de nombreuses
incarnations, atteint la SuprĂȘme Demeure. (6.45)
QUI EST LE MEILLEUR YOGI
Le yogi est supĂ©rieur Ă lâascĂšte. Le yogi est supĂ©rieur aux Ă©rudits VĂ©diques. Le yogi est
supérieur aux ritualistes. Par conséquent, O Arjuna, devient un yogi. (6.46)
Je considĂšre, le yogi consacrĂ© â qui affectionnĂ©ment Me contemple avec une foi suprĂȘme, et
dont le mental reste absorbé en Moi est le meilleur de tous les yogis. (Voir aussi 12.02 et
18.66) (6.47)
Ainsi prend fin le sixiĂšme chapitre intitulĂ© «La Voie de la MĂ©ditation» dans les UpaniĆad
de la BhagavadgÄ«tÄ, lâĂ©criture de yoga, touchant la science de lâAbsolu dans la forme du
dialogue entre SrÄ«kĆĆna et Arjuna.
Un Karma-yogi est un renonciateur (6.01-02)
Le Seigneur KĆĆna va maintenant exposer la doctrine complĂšte du Divin, dans sa
manifestation cosmique, plutĂŽt que dans sa manifestation humaine uniquement. Aussi,
nous ne devons pas nous borner Ă la connaissance de lâAbsolu sans relation; câest-Ă -dire,
nous devons comprendre Sa manifestation dans le multiple. Le SuprĂȘme Absolu (Ătre) est
partout, autant dans lâhomme que dans la nature, mais Il nâest certainement pas limitĂ© par
eux.
La définition du yoga (6.03-04)
Nous vivons dans un monde, dont beaucoup parmi nous ne sentent mĂȘme pas le besoin de
la perfection, et vivent de jour en jours, et Ă bout portant, sans poser trop de questions sur
le vrai motif de la vie. Par contre, de ceux qui sâefforcent pour voir la vĂ©ritĂ© et parvenir au
but, quelques uns au fait réussissent. La vérité du macrocosme dans le microcosme, et vice
versa, dâoĂč lâimportance de lâhomme, nâest pas autre chose que la cohĂ©rence totale de
lâUnivers par rapport Ă chaque point de lui-mĂȘme. Pourquoi suspecter ou mĂȘme sous-
estimer cette cohĂ©rence parce que nous sommes nous-mĂȘme lâobservateur et lâacteur ? Par
la GĂźtĂą, lâhomme dĂ©couvre lâimportance du Moi (Soi) intĂ©rieur, cette organisme spirituel,
animĂ©, en Ă©tat de naissance, et qui permet lâincorporation rĂ©elle de lâhomme au SuprĂȘme
Ătre (lâAbsolu). Pour lâensemble de ceux qui participent effectivement, par la grĂące, Ă la
vie cosmique de Dieu, la montĂ©e, de lâhomme, Ăąme vivante sâachĂšvera lorsquâil aura atteint
le NirvÄna, ou la libĂ©ration dĂ©finitive de la naissance et de la mort. Nâoublions jamais,
lâhomme est une espĂšce comme les autres, mais encore et surtout il est une espĂšce plus que
les autres. Ici, le yoga est important, comme la définition du yoga le montre trÚs clairement
dans les verstes 3 et 4. La GĂźtĂą nous donne un yoga complet, large, flexible, et riche de voie
dâaction, qui inclut plusieurs phases du dĂ©veloppement de lâĂąme et de son ascension vers le
NirvÄna (la libĂ©ration).
Les différents yogas sont des applications spéciales de la discipline intérieure qui mÚne à la
libĂ©ration de lâĂąme, et quâil faut accomplir par lâeffort conscient. Arjuna signifie lâĂąme
humaine à la recherche de la perfection et de la paix. La connaissance métaphysique se
transforme en réalisation grùce au yoga, la technique de concentration. DÚs les temps trÚs
anciens, le mot âyogaâ a Ă©tĂ© employĂ© pour dĂ©crire des pratiques et des expĂ©riences dâun
certain ordre qui sont devenues des diffĂ©rentes techniques dâenseignement comme le JnÄna,
le Bhakti et le Karma.
Le JnÄna-yoga est la voie de la connaissance. La personne qui emprunt cette voie
sâefforcera dâatteindre la perfection spirituelle en cultivant la connaissance, par
lâĂ©tude des Ăcritures et des auteurs mystiques et spirituels.
Le Bhakti-yoga est la voie de dĂ©veloppement de lâamour pour Dieu, en son Ă©tat pur,
sans la moindre action intĂ©ressĂ©e (Karma). Il constitue lâĂ©tape finale du yoga tel que
lâenseigne la Bhagavad GĂźtĂą, dans la pratique de lâabandon de soi au SuprĂȘme
Absolu, par le Seigneur KĆĆna. Car, Bhakti ou la dĂ©votion est une relation de
confiance et dâamour envers un dieu. Le culte de lâinmanifestĂ© est difficile Ă
comprendre pour lâhomme de la rue, bien quâil y ait des exemples de grands
advaitins (non-dualistes), qui ont donné à la réalité impersonnelle une grande
chaleur de continu affectif. Lâadoration du dieu personnel est recommandĂ©e comme
Ă©tant la voie la plus facile, ouverte absolument Ă tous dans ce monde. Le sacrifice
dâamour nâest pas si difficile que lâaccord de la volontĂ© avec le dessein divin, ou la
discipline ascĂ©tique par lâeffort persistant du mental.
Le Karma-yoga aide le yogi et le dévot à se défaire progressivement de toute
souillure matĂ©rielle en lui apprenant Ă purifier ses actes. Le mot âKarmaâ dĂ©signe
cette loi selon laquelle lâhomme est le rĂ©sultat de ses actes passĂ©s. La loi du Karma
est la force vitale de la philosophie du VedĂąnta : elle permet Ă lâhomme dâĂȘtre empli
de courage et de dynamisme, et dâatteindre le but de lâexistence humaine. La
solution que la GĂźtĂą adopte nâĂ©vacue pas le monde comme une illusion ni lâaction
comme un piĂšge. Elle recommande Ă lâhomme vivant dans ce monde une vie
pleinement active et une vie intĂ©rieure ancrĂ©e dans le SuprĂȘme Ătre. Dans cette vie,
il faut savoir renoncer. Tant que lâaction est fondĂ©e sur de fausses prĂ©misses, elle lie
lâĂąme individuelle. Par contre, la GĂźtĂą enseigne le dĂ©tachement des dĂ©sirs et non pas
lâabstention du travail, lâaction en gĂ©nĂ©rale.
Le yoga nâest pas destinĂ© Ă dĂ©truire quelque partie que ce soit de lâinstrument
psychologique mais Ă lâentraĂźner, Ă le transformer et Ă lâutiliser dâune maniĂšre juste.
Maladie, échec, malheur et toutes situations négatives résultant des actions passées
(Karma) peuvent ĂȘtre modifiĂ©s par un mental concentrĂ© et purifiĂ© surtout du
désintéressement, mais tout cela représente bien peu de choses sans la paix du mental et le
dĂ©sir dâaider autrui.
Le mental est le meilleur ami autant que le pire ennemi (6.07-09)
Ce passage du chapitre 6 se rĂ©fĂšre Ă la rĂ©glementation et Ă lâajustement du mental, avant
de passer aux techniques de la mĂ©ditation. En ce qui concerne DhyÄna (mĂ©ditation), il y a
trois Ă©tapes Ă suivre en rĂ©glant le mental : (1) lâentrĂ©e dans la mĂ©ditation ; (2) la pratique ;
(3) la sortie de la mĂ©ditation. DĂšs lâentrĂ©e, le mental doit ĂȘtre vidĂ© et tranquillisĂ©. Le
courant des pensées dont nous sommes à moitié conscients, toutes les pensées vagabondes et
confuses doivent ĂȘtre arrĂȘtĂ©es. Il faut Ă©viter que ces pensĂ©es vagabondes se lĂšvent de
nouveau, il faut également éviter tous les états du mental défavorables ou mauvais, tel que
le découragement, la faiblesse des résolutions, le manque de contrÎle ou la tension excessive
du mental. Nâoublions jamais, que câest le SuprĂȘme Ătre qui donne lâĂȘtre toute chose et qui
est toute chose. Les existences du monde sont maintenues en un tout par le SuprĂȘme Ătre.
Ainsi, notre mental doit se trouver attentif au Seigneur KĆĆna, car tant que les activitĂ©s
agitĂ©es du mental sont arrĂȘtĂ©es la tranquillitĂ© durera. Si le mental est rĂ©glĂ© et ajustĂ© il ne
tombera pas en somnolence et il nâira pas Ă la dĂ©rive. Quant Ă la tension excessive du
mental cela peut ĂȘtre le rĂ©sultat de notre effort sincĂšre de pratiquer la concentration ; nous
aurons exagĂ©rĂ© lâeffort et nous nous serons servis de moyens incorrects. Le rĂ©sultat est que
le cerveau se fatigue, avec les consĂ©quences de maux de tĂȘte et de la poitrine. Si le contrĂŽle
mental est trop relĂąchĂ©, il peut devenir terne et lâattention se disperser, le corps ne sera
plus tenu droit, la bouche se trouvera peut-ĂȘtre ouverte et peut baver, tandis que lâon sera
vaincu par le sommeil. Dans ce cas il faut renouveler lâattention et lâeffort de contrĂŽler le
mental, car celui-ci et le corps peuvent sâaider mutuellement dans la rĂ©ussite de la
mĂ©ditation. Il faut pour rĂ©ussir, Ă©tablir une progression graduĂ©e dâun Ă©tat dâactivitĂ©
physique à un état de tranquillité mentale. Ainsi que la respiration doit devenir douce et
silencieuse, le courant de lâactivitĂ© mentale doit pareillement devenir doux et inaperçu. On
doit par la suite rĂ©gler et ajuster les activitĂ©s du corps jusquâau moment oĂč la tranquillitĂ©
et la paix intĂ©rieure sâĂ©tablissent.
Pour rĂ©gler le mental pendant quâil demeure en mĂ©ditation, il y a trois façons de le rĂ©gler.
(1) On doit se servir du cerveau pour concentrer le mental Ă chaque instant, et il faut
trouver des expédients habiles pour prolonger le temps de la méditation de vingt, trente
minutes, et mĂȘme six heures des vingt-quatre de la journĂ©e. (2) Il faut pouvoir rĂ©gler et
ajuster les conditions pour quâelles soient les meilleures possibles pendant toute la durĂ©e de
la méditation. Si cependant le corps devient trop détendu ou trop tendu, ou relùché, il faut
immédiatement le redresser et le rendre attentif. Il se peut que notre corps reste droit, mais
que la respiration devienne mauvaise, soit contractée, ou époumonée ou assez forte pour
ĂȘtre entendue. Il faut tout de suite corriger ceci et la rendre douce, rĂ©guliĂšre, silencieuse. (3)
Il se peut aussi que bien que le corps et la respiration soient bien rĂ©glĂ©s, le mental sâen aille
à la dérive, ou sombre, ou se relùche ou comme un arc soit trop tendu. Il faut aussitÎt
ajuster. Il nây a pas dâordre fixe pour rĂ©gler les trois (le corps, la respiration et le mental), il
faut simplement régler et réajuster celui qui se trouve déréglé. Tant que nous pratiquons la
mĂ©ditation, il faut tenir ces trois sous obĂ©issance et dans un Ă©tat dâharmonie. La mĂ©ditation
avec comme guide la GĂźtĂą, il nây aura aucun empĂȘchement Ă lâobtention de lâIllumination,
le portail du NirvÄna. DĂ©vouons nos vies Ă lâardeur du Seigneur KĆĆna, dâautant plus que
nous avons accepté la Gßtù comme rÚgle de vie.
KuĆa : herbe Ă longues feuilles pointues et coupantes que long utilise dans les rituels.
Les techniques de la méditation (6.10-26).
Asseyez-vous tranquillement, le matin, à midi ou le soir, ou à une heure désignée par vous,
dans une position confortable et stable, que ce soit sur un coussin posĂ© sur le sol, ou mĂȘme
une chaise. La colonne vertĂ©brale, le cou et la tĂȘte doivent ĂȘtre dressĂ©s en ligne droite
verticale, le menton rentré. Les meilleurs moments pour méditer sont le matin de bonne
heure et le soir avant dâaller se coucher mais quels que soient lâheure et le lieu choisis, il
faut sây tenir dans toute la mesure du possible car un rythme sâĂ©tablit ainsi et une habitude
spirituelle se crĂ©e qui augmente le pouvoir et lâefficacitĂ© de la mĂ©ditation. Assis dĂ©tendu,
concentrez vos pensées sur le point entre les deux sourcils qui est un centre de conscience
trĂšs important, appelĂ© âAjnaâ. Le corps est comme un bateau gouvernĂ© sur lâocĂ©an de la vie
par le mental qui en est le capitaine et qui le dirige en partant de ce point entre les sourcils
que lâon peut comparer au pont. La conscience universelle elle-mĂȘme est situĂ©e dans ce
centre bien quâil ne faille pas le confondre avec la position des glandes du corps physique
qui fonctionnent sur un plan de conscience plus bas. Concentrez et localisez le mental sur
ce point. Placez-y le noms du Seigneur KĆĆna (Krishna), ou remplacer par le mot de
puissance âOMâ, le symbole de tout ce quâil y a de plus haut et de plus beau. Parfaitement
dĂ©tendu, fixez votre mental sur le Seigneur Krishna (un autre avatĂąr ou dieu mĂȘme dâune
religion différente) ou sur le Nom « OM » (AUM) pendant cinq à dix minutes. Pendant
quelques jours, cela risquera de probablement vous ennuyer et vous manquerez
dâenthousiasme. Mais vous devrez ĂȘtre patient et persĂ©vĂ©rer dans lâeffort. Si vous
accomplissez cette pratique pendant quelques mois sans attendre aucun résultat tangible,
vous verrez une nouvelle lumiĂšre sâanimer dans votre mental et vos pensĂ©es prendront une
direction nouvelle. Concentrez-vous toujours sur la GĂźtĂą, et donc la VĂ©ritĂ© Une et Ăternelle
qui imprĂšgne tout.
Une fois par jour, à un moment résolu, faites un examen de conscience minutieux et
impartial et notez soigneusement les points faibles les plus importants de votre caractĂšre.
Soyez pour vous mĂȘmes un juge sĂ©vĂšre, sans aucun dĂ©couragement Ă©motif et mettez de cĂŽtĂ©
tous vos préjugés. Chaque jour, prenez un de vos points faibles et décidez-vous à en
triompher. Nâayez pas de remords, nâen soyez pas attristĂ© mais simplement soyez rĂ©solu Ă
vous maĂźtriser. DĂ©terminez aussi quelle est la vertu exactement Ă lâopposĂ© de la faiblesse
que vous dĂ©sirez extirper et mĂ©ditez sur ce sujet. Cela implique dâexclure toute autre
pensée du mental. Si possible, consacrez au moins dix minutes par jour à cet exercice, et
faites-le quotidiennement au mĂȘme moment et prenez-y intĂ©rĂȘt. Le soir, avant dâaller vous
coucher, interrogez-vous pour savoir jusquâĂ quel point vos efforts ont Ă©tĂ© couronnĂ©s de
succÚs. Ne vous découragez pas si vous ne réussissez pas directement, mais imprégnez votre
mental de courage, de confiance en vous.
1. Les repas et lieu de mĂ©ditation. Le repas doit ĂȘtre pris depuis quelques heures afin
que la digestion soit accomplie et le corps ainsi que les vĂȘtements doivent ĂȘtre
parfaitement propres. Le rĂ©gime alimentaire ne doit pas ĂȘtre lourd, lâalcool est
interdit. Se retirer dans une chambre tranquille oĂč lâon est assurĂ© de nâĂȘtre dĂ©rangĂ©
par aucune intervention ni aucun bruit. Trouvons une chambre réservée
exclusivement pour la méditation, qui sera votre sanctuaire. Le silence est
absolument nécessaire.
2. La posture. SâĂ©tablir dans une position aisĂ©e nâoccasionnant aucune gĂšne, position
que lâon puisse conserver sans fatigue, ou douleur, pendant un temps long. La
position classique des Orientaux avec les jambes croisées est à peu prÚs impossible
pour les Occidentaux. Son but est de ralentir la circulation dans les membres
infĂ©rieurs, afin quâun afflux de sang plus important soit dirigĂ© vers le cerveau, ce
qui facilite sa plus grande activitĂ©. Lâoccidental moins assoupli, devra donc Ă faute
de mieux, sâasseoir sur une chaise ou un tabouret (ou, banc de mĂ©ditation), ayant
soin de garder le buste droit (la colonne vertĂ©brale et la tĂȘte doivent ĂȘtre en ligne
droite), les mains reposant sur les cuisses paumes ouvertes (ou, la main droite
reposant paume ouverte sur la main gauche). Les yeux légÚrement baissés, pour
limiter le champ de vision, ou complÚtement fermés, si on peut le faire sans céder au
sommeil. Lâattention doit ĂȘtre concentrĂ©e entre les sourcils. Pour les dĂ©butants, il est
utile avant de commencer les mĂ©ditations, de sâexercer quotidiennement Ă demeurer
assis de cette maniĂšre pendant 5. 10, 15, 20 minutes, afin de discipliner le corps et
nâavoir plus Ă sâen occuper quand la mĂ©ditation commencera. Comme dĂ©jĂ dit, on
doit le faire chaque jour Ă la mĂȘme heure, ainsi quâon le fera au dĂ©but de la
méditation.
La respiration. Beaucoup de personnes font confusion entre les idées et les pratiques de la
respiration du Yoga des Hindous. Il est ainsi utile de donner certaines explications sur les
exercices Hindous de respiration rythmique, mais lâon doit se rendre compte que seuls deux
exercices Yogiques : la respiration dite de purification et la respiration rythmique sont sans
danger pour nous. Le yoga est une science expĂ©rimentĂ©e qui permet Ă chacun dâobtenir un
contrĂŽle inusitĂ© de son corps et de son esprit. Le mot « Yoga » employĂ© dans lâHindouisme
veut dire lâunion avec Brahma, le SuprĂȘme Absolu, lâĂtre SuprĂȘme, et quand on respire, le
corps absorbe avec lâair une force appelĂ©e « PrĂąna » (Ă©nergie vitale) qui est latente dans
lâatmosphĂšre.
(1) Respiration Purificatrice.
Pour purifier le systÚme respiratoire, cet exercice est indiqué :
Fermez la narine droite, en la comprimant sur le cÎté avec un doigt. Aspirez
alors par la narine gauche. Renvoyez lâair aspirez en exhalant par la narine
droite ; recommencez en comprimant la narine gauche et en aspirant lâair par la
narine droite, et ainsi de suite. Les voies respiratoires seront ainsi nettoyées de
lâacide carbonique et autres impuretĂ©s. Si la rĂ©tention du souffle indiquĂ©e est
trop longue pour certains, nous conseillons :
Aspirer en comptant huit ;
Retenir le souffle en comptant quatre.
Expirer en comptant huit.
Rester sans respirer (vide) en comptant quatre.
(2) Respiration Rythmique.
Voici un exercice trÚs estimé :
Vider les poumons en comptant six.
Rester sans respirer en comptant trois.
Remplir les poumons et le thorax en comptant six.
Retenir lâair en comptant trois.
Il ne faut pas que les comptes de la respiration soient plus rapides, ni plus lents
que le battement du cĆur. Cette respiration doit ĂȘtre rythmique, et deviendra
par la suite automatique. Un conseil, il vaut mieux commencer par cette pratique
respiratoire en dehors des heures saintes de mĂ©ditation pour sây habituer. On
doit comprendre que plus tard on peut augmenter le nombre des comptes et
retenir la respiration plus longtemps, mais si un débutant essaie la rétention du
souffle, il se peut quâil ressente des vertiges ou autres troubles. Il faut toujours se
rappeler que le motif de cette respiration est de purifier le corps, de fortifier le
systĂšme nerveux et de calmer le mental, mais en Ă©vitant tout surmenage.
Les deux exercices dont partie du « Prùnùyùma » pratiqué dans les systÚmes Yogiques des
Hindous. Lâhomme est une rĂ©plique de lâUnivers : de mĂȘme quâil y a dans lâunivers des
systĂšmes solaires et galactiques et dâautres encore, de mĂȘme sont-ils reprĂ©sentĂ©s dans
lâhomme. Ce nâest pas tout car il y a une correspondance directe entre lâhomme et tous les
centres du Cosmos. Comme il est dit que le SuprĂȘme Absolu rĂ©side dans le Ciel bien quâIl
soit en toutes choses et est toute choses, ainsi rĂ©side-t-il dans le cĆur de lâhomme dans Sa
forme personnelle et dans le centre du cerveau dans Sa forme impersonnelle. Lorsque,
détendu, vous aurez respiré maintes fois et que vous aurez ouvert vos structures
physiologiques et mentales au cosmos tout entier avec lequel elles sont reliées, vous
éprouverez une sorte de paix que le monde ne peut fournir, une sorte de délectation qui ne
sont pas créées par le contact des sens avec quelque objet que ce soit.
Une simple technique de méditation est exposée ici :
(1) Lavez votre visage, yeux, mains, et pieds ; et asseyez-vous dans un lieu propre, silencieux, et
sombre, empruntant nâimporte quelle position confortable, avec la tĂȘte, le cou, et la colonne
vertĂ©brale droite et verticale. La musique ni lâencens sont recommandables pendant la mĂ©ditation.
Lâheure et le lieu pour la mĂ©ditation devraient ĂȘtre fixĂ©s au prĂ©alable. Observez les yama et les
niyama (voir page 6), comme étant les bons principes de vie, autant en pensées, paroles, et actions.
Quelques exercices yogiques sont nécessaires. Minuit, matin et soir sont les meilleurs moments pour
méditer 15 à 25 minutes chaque jour.
(2) Souvenez-vous du nom ou de la forme du dieu personnel (Isht Dev) en qui vous croyez, tout en
implorant Son ou Sa bénédiction.
(3) Fermez vos yeux, et faites cinq Ă dix respirations lentes et profondes.
(4) Fixez votre regard, lâintellect, et Ă©motions au-dedans le centre du thorax, le siĂšge du cĆur causal, et
respirez lentement. Chantez mentalement « So » lorsque vous aspirez, et « Hum » lorsque vous
expirez. Pense que câest la respiration elle-mĂȘme qui retentit les sons « So et Hum » (Je suis Cet
Esprit). Visualisez mentalement et poursuivez la voie respiratoire par les narines, jusquâau centre
situĂ© entre les sourcils, en descendant jusquâau centre de la poitrine, ou les poumons. Nâessayez pas
de contrĂŽler ou de conduire votre respiration, mais suivez le cours naturel de votre respiration.
(Consulter également, « Introduction à la Bhagavad Gßtù »)
Qui est un yogi (6.27-32). Le yogi ou le dévot véritable et humble tient pour peu de chose
tout ce qui est dans le monde, aussi bien que sa propre personne, et, se confiant en Dieu,
sâabandonne Ă Lui. Cet homme vĂ©ritablement humble supporte patiemment et en silence
les souffrances intĂ©rieures, il avance ainsi rapidement, en peu de temps, comme lâesquif
poussĂ© par le vent. Le yogi ou le dĂ©vot trouve le SuprĂȘme Absolu partout ; quâon lâinjurie,
quâon le mĂ©prise, que les hommes le couvrent dâopprobres, il accepte tout avec sĂ©rĂ©nitĂ©,
lâĂąme en paix. Il nâest pas troublĂ© par ses imperfections quâil essaie de corriger, quoiqu il
soit pĂ©nĂ©trĂ© de douleur jusquâau fond de lâĂąme dâavoir offensĂ© le SuprĂȘme Absolu et
Seigneur quâil aime. Il ne se tourmente pas non plus du regret de ne pouvoir accomplir de
grandes choses, car il se met toujours en face de son néant et de sa misÚre ; bien plus, il
sâĂ©tonne de pouvoir rĂ©aliser un seul acte vertueux et il rend grĂące au SuprĂȘme Seigneur de
ce quâIl le lui permet, en se disant que câest le Seigneur qui fait tout, Ă©tant continuellement
mĂ©content de ce quâil fait lui-mĂȘme. Pour le yogi ou le dĂ©vot en contact avec le SuprĂȘme
Absolu, Il nâest plus une simple rumeur ou une aspiration vague, mais une rĂ©alitĂ© vivante,
avec laquelle nous sommes en contact positif. La religion nâest pas affaire dialectique, mais
fait dâexpĂ©rience. Plus profonde est lâexpĂ©rience de la rĂ©alisation de Soi, plus Ă©tendue est sa
comprĂ©hension. Une fois unis au SuprĂȘme en nous, nous le sommes aussi avec lâĂ©volution
totale de la vie.
Deux mĂ©thodes pour maĂźtriser le mental turbulent 6.33-36). Arjuna comprend quâil y a dans la nature
humaine un Ă©lĂ©ment important dâobstination et de violence, dâhĂ©sitation et de volontĂ© personnelle. Nous
sommes enclins Ă fermer les yeux aux dĂ©fauts de notre nature et Ă endurcir nos cĆurs contre la lumiĂšre.
Arjuna demande aussi ce quâil advient de lâĂąme qui tente et Ă©choue. La dĂ©faite est temporaire, car celui qui
commence bien parvient Ă ses fins. La dĂ©votion au SuprĂȘme Seigneur est lâun des plus sĂ»rs moyens pour
purifier la volontĂ© et lâintellect.
Jouissances matérielles.
La destination du yogi sans succĂšs (6.37-45). La question dâArjuna se rapporte Ă lâavenir
de ceux qui meurent sans ĂȘtre en conflit avec la SuprĂȘme et Ăternelle BontĂ©, tout en ne
sâĂ©tant pas maĂźtrisĂ©s suffisamment pour contempler la magnificence de la PuretĂ© Ăternelle.
Est-ce que lâalternative est entre un ciel Ă©ternel et un enfer Ă©ternel comme les religions de
Foi Abrahamiques font croire, oĂč y a-t-il une chance pour ces Ăąmes de marcher vers la
perfection aprĂšs la mort ? Quâarrive-t-il Ă ces nombreuses Ăąmes qui nâont pas rĂ©ussi Ă
suivre le sentier de yoga jusquâĂ la fin ? Leurs efforts sont-ils entiĂšrement inutiles ? Vaut-il
la peine de commencer une entreprise que lâon nâest pas capable dâachever ? Aucun
homme dont la vie est honnĂȘte ne veut venir Ă mal ; et, aucune Ăąme bonne ne peut avoir
une fin mauvaise, comme prĂ©tendent les religions qui prĂȘchent, « en dehors de notre Foi, il
nây a pas de salut ». Le SuprĂȘme Absolu connaĂźt nos faiblesses et les efforts que nous
faisons pour les surmonter. Il nây a pas lieu de dĂ©sespĂ©rer, car mĂȘme lâĂ©chec ici-bas est un
succĂšs, et aucun effort sincĂšre ne va sans rĂ©compense. LâĂ©volution sur la voie qui mĂȘme Ă la
libĂ©ration est lente et lâon peut avoir Ă le suivre pendant bien des existences terrestres, mais
nul effort est perdu. Maßtre Eckhart écrit : « Si tu ne pÚches pas en intention mais
seulement en capacité, vraiment tu as fait tout le nécessaire aux yeux de Dieu ». Johann
Wolfgang von Goethe : « Pour celui qui sâefforce et recommence, la rĂ©demption est
toujours possible. » Les desseins de Dieu ne seront pas accomplis tant que tous les ĂȘtres
humains ne seront pas sauvés par le pardon, la repentance et la maßtrise, et rendus à la
SuprĂȘme Demeure. Chaque Ăąme sera ramenĂ©e au SuprĂȘme Ătre qui lâa crĂ©Ă©e Ă son image.
Lâamour de Dieu est harmonie, et câest que la GĂźtĂą enseigne, et nous donne la foi, et
lâespĂ©rance pour le salut assurĂ© de tous.
Quel est le meilleur yogi ? (6.46-47). Simplement ceci, le meilleur yogi est le grand dévot
(Bhakta). Yoga ou lâunion avec le SuprĂȘme Absolu obtenue par Bhakti-yoga est le But
SuprĂȘme. Dirige-toi, donc aspirant, yogi, dĂ©vot, Ăąmes vivante, dirige-toi dĂšs maintenant
sans distraction vers cet heureux Ă©tat. Le Seigneur tâappelle ; Pourquoi encore hĂ©siter ?
Câest au fond de ton cĆur quâIl veut te renouveler, te changer, tâenrichir, te vĂȘtir, te rĂ©vĂ©ler
la voie de la libĂ©ration, tout en Ă©tant plein dâallĂ©gresse, de joie, de calme et de paix.
LâEssence du SuprĂȘme Ătre, aussi en nous est de la nature de lâUnivers Cosmique donc
incrĂ©Ă© et indestructible, câest ce quâil faut RĂ©aliser.
Chapitre 7
LA CONNAISSANCE DU SOI ET LâILLUMINATION
Le SuprĂȘme Seigneur dit : O Arjuna, Ă©coute comment tu Me connaĂźtras pleinement sans
douter, ayant ton mental absorbé en Moi, prenant refuge en Moi, et en accomplissant des
pratiques yoguiques. (7.01)
LA CONNAISSANCE MĂTAPHYSIQUE EST LâULTIME CONNAISSANCE
Je vais te rĂ©vĂ©ler la connaissance du Soi (JnÄna) ainsi que lâillumination (VijnÄna), de sorte
que, quand on la connaĂźt, il nâest rien qui reste Ă connaĂźtre. (7.02)
LES CHERCHEURS SONT PEU NOMBREUX
Parmi de milliers de personnes, Ă peu prĂšs un seul sâefforce vers la perfection dans la
rĂ©alisation du Soi. A peine une personne parmi ceux qui sâefforcent avec succĂšs Me
comprend vraiment. (7.03)
DĂFINITIONS DE LA MATIĂRE, LA CONSCIENCE, ET LâESPRIT
Le mental, lâintellect, lâego, lâĂ©ther, lâair, le feu, lâeau et la terre sont les huit
transformations ou divisions de Mon Ă©nergie matĂ©rielle (PrakĆti). (Voir aussi 13.05) (7.04)
LâĂ©nergie matĂ©rielle est Ma Nature infĂ©rieure (AparÄ-Ćakti, PrakĆti, matiĂšre). Connais
mon autre Nature supĂ©rieur (ParÄ-Ćakti, CetanÄ, PuruĆa, Esprit) par laquelle lâunivers
entier est soutenu, O Arjuna. (7.05)
LE SUPRĂME ESPRIT EST LA BASE DE LA MATIĂRE, LA CONSCIENCE, ET
LâESPRIT
Sache que toutes les crĂ©atures sont Ă©voluĂ©es de cette double Ă©nergie ; et, Je suis â le
SuprĂȘme Ătre (Para-Brahma, KĆĆna) â lâorigine autant que la dissolution de lâunivers tout
entier. (Voir aussi 13.26) (7.06)
Il nây a rien de plus haut que Moi, O Arjuna. Tout dans lâunivers est liĂ© en Moi, le SuprĂȘme
Ătre (Para-Brahman ParamÄtma), comme des joyaux liĂ©s sur un fil (dâun collier). (7.07)
LE SUPRĂME ESPRIT EST LA BASE DE TOUT
O Arjuna, Je suis la saveur dans lâeau, Je suis la lumiĂšre dans la lune et le soleil, Je suis la
syllabe OM dans tous les VĂ©das, le son dans lâĂ©ther, et la virilitĂ© dans les ĂȘtres humains. Je
suis le doux parfum dans la terre. Je suis la chaleur dans le feu, la vie des ĂȘtres vivants, et
lâaustĂ©ritĂ© des ascĂštes. (7.08-09)
O Arjuna, sache que Je suis le germe Ă©ternel de toutes les crĂ©atures. Je suis lâintelligence
des intelligents, et lâĂ©clat des brillants. (Voir aussi 9.18 et 10.39) Je suis la force du fort qui
sâest dĂ©muni du dĂ©sir et de lâattachement intĂ©ressĂ©. Je suis le dĂ©sir (KÄma) dans les ĂȘtres
humains qui vivent en accord avec la justice (Dharma) (pour la seule raison sacrée de la
procréation), O Arjuna. (7.10-11)
Connais les trois modes (Gunas) de la Nature matĂ©rielle â la bontĂ©, la passion, et
lâignorance â qui Ă©manent aussi de Moi. Je ne suis pas dĂ©pendant, ou affectĂ© par les Gunas,
mais les Gunas sont dépendants de Moi. (Voir aussi 9.04 et 9.05) (7.12)
Les ĂȘtres humains sont trompĂ©s par les aspects diffĂ©rents de ces trois modes (Gunas) de la
Nature matĂ©rielle ; câest pourquoi, ils ne Me connaissent pas comme Ă©tant Ă©ternel, et au-
delĂ des Gunas. (7.13)
COMMENT VAINCRE LA FORCE DIVINE ILLUSOIRE (MAYA)
Ma force divine (MÄyÄ), formĂ©e par les trois Ă©tats (Gunas) du mental, est trĂšs difficile Ă
vaincre. Seuls ceux qui se sont abandonnĂ©s Ă Moi peuvent facilement franchir ce MÄyÄ.
(Voir aussi 14.26, 15.19, et 18.66) (7.14)
QUI CHERCHE DIEU ?
Les malfaisants, les ignorants, les ĂȘtres vils qui sont attachĂ©s Ă la nature dĂ©moniaque, et
dont leur force de discrimination a Ă©tĂ© enlevĂ©e par la force divine illusoire (MÄyÄ) ne
Mâadorent ni Me recherchent. (7.15)
Quatre types de vertueux Mâadorent ou Me recherchent, O Arjuna. Ils sont : les affligĂ©s, le
chercheur de la connaissance du Soi, celui qui poursuit la richesse, et lâilluminĂ© qui a
expĂ©rimentĂ© le SuprĂȘme. (Voir aussi TR 1.21.03) (7.16)
Parmi eux, le dĂ©vot illuminĂ© (JnÄni-bhakta), qui se maintient toujours uni Ă Moi, dont la
dĂ©votion nâa quâune seule ambition, est la meilleure. Car, Je suis extrĂȘmement cher pour
lâilluminĂ©, et lâilluminĂ© Mâest trĂšs cher. (7.17)
Tous ces chercheurs sont vraiment nobles; mais, Je considÚre le dévot illuminé comme Moi-
mĂȘme, car celui qui est stable rĂ©side dans Ma suprĂȘme demeure. (Voir aussi 9.29) (7.18)
AprĂšs de nombreuses naissances lâilluminĂ© a recours Ă Moi en rĂ©alisant que tout est
vraiment, Ma manifestation (ou, du SuprĂȘme Ătre). Une aussi grande Ăąme est trĂšs rare Ă
trouver. (7.19)
Les personnes dont le discernement sâest emportĂ© vers de maints dĂ©sirs, dominĂ©es par leur
impression Karmique (SamskÄra), ont recours aux rĂ©gnants cĂ©lestes (Devas) et pratiquent
des différents rites religieux. (7.20)
LE CULTE Ă UNE DIVINITĂ EST AUSSI LâADORATION DE DIEU
Quelle que soit la divinitĂ© (en empruntant nâimporte quel nom, forme, et mĂ©thode) quâon
adore avec foi, Je fais que cette foi soit ferme envers cette divinitĂ©. DotĂ©s dâune foi stable, ils
sâengagent dâadorer cette divinitĂ©, et obtiennent leurs souhaits par cette divinitĂ©. En vĂ©ritĂ©,
ces souhaits sont accordés par Moi seul. (7.21-22)
De tels gains matĂ©riels obtenus par les ĂȘtres humains de petite intelligence sont
temporaires. Les adorateurs des régnants célestes (Devas) vont aux Devas, mais Mes dévots
viennent sûrement à Moi. (7.23)
DIEU PEUT ĂTRE VU DANS L'EFFIGIE DE NâIMPORTE QUELLE FORME DE CULTE
DĂSIRĂ
Les ignorants, privés de comprendre Ma forme transcendantale (ou existence), immuable,
incomparable, et incomprĂ©hensible â assument que Je, le SuprĂȘme Ătre (Para-Brahman),
qui suis sans forme prend des formes ou sâincarne. (7.24)
VoilĂ© par Ma force divine (MÄyÄ), Je ne me rĂ©vĂšle pas aux ignorants qui ne connaissent et
ne comprennent pas Ma forme transcendantale, ingénérée, éternelle et personnalité (et en
Me considérant sans forme). (7.25)
Je connais, O Arjuna, les ĂȘtres du passĂ©, du prĂ©sent, et ceux Ă venir, mais nul ne Me
connaĂźt vraiment. (7.26)
Tous les ĂȘtres de ce monde sont dans lâignorance totale Ă cause des paires des opposĂ©s
trompeuses, nĂ©es du dĂ©sir et de lâaversion, O Arjuna. Mais les personnes aux actions
dĂ©sintĂ©ressĂ©es, dont le Karma ou le pĂ©chĂ© a pris fin, sont libĂ©rĂ©es de lâillusion des paires des
opposĂ©es et Mâadorent, fermement Ă©tablies dans les vĆux. (7.27-28)
Ceux qui sâefforcent vers la dĂ©livrance des cycles de la naissance, la vieillesse, et de la mort,
en trouvant refuge en Moi, connaissent le Brahman (lâĂtre Ăternel) ; la nature de
Brahman ; et Karma, la force créative de Brahman. (7.29)
Les personnes stables qui Me connaissent comme lâUnique dans les ĂȘtres matĂ©riels
(AdhibhĆ«ta), les Ătres Divins temporels (Adhidaiva), et la Super Ăme (Adhiyajna) mĂȘme
au moment de leur mort, Mâatteignent. (Voir aussi 8.04) (7.30)
Ainsi prend fin le septiĂšme chapitre intitulĂ© «La Connaissance de Soi et lâIllumination» dans les UpaniĆad de la BhagavadgÄ«tÄ, lâĂ©criture de yoga, touchant la science de lâAbsolu
dans la forme du dialogue entre SrÄ«kĆĆna et Arjuna.
Le Seigneur KĆĆna expose maintenant la doctrine de Dieu non plus dans sa manifestation
humaine, mais cosmique.
Nous ne devons pas nous limiter Ă la connaissance du SuprĂȘme Absolu sans relation, mais
comprendre Sa manifestation dans le multiple, dans lâhomme et la nature. Bien quâIl ne
soit pas limité par eux.
Parmi les milliers de personnes qui Ă©coutent et comprennent le contenu de la GĂźtĂą autant
que du VedĂąnta tout entier, quelques-unes essayeront dâen vivre lâenseignement. MĂȘme
parmi les érudits, les théologiens comme on dit en Occident, et les chercheurs sur la voie
mystique et spirituelle, sont trĂšs rares qui rĂ©alisent le Soi. Il est plus facile dâenseigner, que
de vivre lâenseignement soi-mĂȘme. Et, pourtant, on ne sait enseigner que si on a vĂ©cu
lâenseignement soi-mĂȘme. Arjuna, et tous les Ă©tudiants de la GĂźtĂą ne sont que quelques uns
dans la masse, mais groupe trĂšs important, surtout Ă lâheure actuelle pour le salut du
monde. Que serait le monde, sans le soutient de ceux qui se dévouent au service
désintéressé, et qui connaissent la force de la pensée positive, donc de la priÚre qui englobe
toute la vie dévotionnelle dans la Gßtù. Laissant parler les PÚres Chrétiens du Désert,
notamment Cassien, « La fin que se propose le moine, toute la perfection de son cĆur,
rĂ©side dans la continuitĂ© dâune priĂšre ininterrompue. » Cassien nâĂ©tait en cela que lâĂ©cho de
lâĂvangile de JĂ©sus Christ : « JĂ©sus leur adressa une parabole, pour montrer quâil faut
toujours prier, et ne point se relĂącher. (Luc 18.1) » Et, lâapĂŽtre Paul sâĂ©cria : « Priez sans
cesse. 1 Thess.5, 17) Cela veut simplement dire, que toute la vie doit devenir priĂšre par la
vie dĂ©votionnelle dans le dĂ©tachement le plus complet, tout en Ă©tant attachĂ© au SuprĂȘme
Absolu. LâHindouisme, autant que le Christianisme ĂvangĂ©lique, sont des religions de la
priĂšre, car ils sont des religions de la foi et de la grĂące, parce quâils mettent Ă la premiĂšre
place lâĆuvre dĂ©sintĂ©ressĂ© de Dieu en lâhomme et que, le travail dĂ©sintĂ©ressĂ© de lâhomme
lui-mĂȘme, il le regarde comme lâĆuvre de Dieu agissant en lâhomme et par lui. Quand on a
compris combien nous sommes dĂ©pendants du SuprĂȘme Absolu, combien nous avons
besoin de Lui, la vie autre que celle de la priĂšre ne peut exister.
La GĂźtĂą montre comment le SuprĂȘme Ătre sâexprime sous la forme de cet univers de
pluralitĂ©, dans lâĂ©treinte de la matiĂšre. Dans ce verset et le suivant, KĆĆna cite tous les
Ă©lĂ©ments qui, dans un ĂȘtre vivant et le cosmos, constituent la matiĂšre de lâEsprit. Dieu est
non seulement proche des hommes, mais Il est Ă©galement prĂ©sent en eux-mĂȘmes, dans leur
propre conscience. La notion de lâexpansion du Cosmos est trĂšs rĂ©cente. Elle date du
vingtiĂšme siĂšcle seulement. Les anciennes civilisations nâavaient aucun moyen de constater
lâexistence dâun tel phĂ©nomĂšne. Aussi, la question de savoir si le Cosmos Ă©tait fixe ou non,
ne fut jamais posĂ©e. On nâavait pas de raison de sâinterroger sur quelque chose qui
nâexistait pas. Le ciel Ă©tait plutĂŽt synonyme de ce qui est vaste et immuable. Les
observations cĂ©lestes de lâĂ©poque avaient une importance propre en raison des influences
astrologiques quâon attribuait aux diffĂ©rents astres. On connaissait bien sĂ»r le cortĂšge des
sept planĂštes (Mercure, VĂ©nus, Mars, Saturne, Jupiter, Lune et Terre), ainsi que les
constellations figurĂ©es par des personnages ou des animaux lĂ©gendaires. Ce nâest que plus
tard quâon introduisit les fondements de lâastronomie. En dehors des Ă©toiles et des
planÚtes, le ciel recelait quelques points diffus auxquels les anciens avaient donné le nom de
nĂ©buleuses. Lâune dâelles situĂ©e dans la Constellation dâAndromĂšde fut dĂ©crite selon les
sources Occidentales pour la premiĂšre fois en 1612 par lâastronome allemand, Simon
Marius, qui lâaurait comparĂ©e à « une lueur semblable Ă la flamme dâune chandelle, vue Ă
travers un disque de corne. » En 1867, un astronome Américain du nom de Abbe, se basant
sur les observations dâautres astronomes, dont William Herschel, ainsi que sur les
hypothÚses du philosophe Emmanuel Kant publiées dans son « Histoire naturelle et théorie
des Cieux » (1755), admit que certaines nĂ©buleuses pouvaient ĂȘtre situĂ©es en dehors de
notre Galaxie, et constituer elles-mĂȘmes des galaxies. Ces prĂ©visions sâavĂ©rĂšrent exactes.
Elles furent confirmées par les observations menées en 1923/1924, par Edwin Hubble,
grùce au télescope du Mont Wilson (Californie), avec lequel il parvint à distinguer des
Ă©toiles dans la NĂ©buleuse dâAndromĂšde. DĂšs lors la nĂ©buleuse qui Ă©tait vue comme une
lueur, devient une galaxie. Cependant, les rĂ©sultats sont lĂ et la thĂ©orie de lâexpansion ne
souffre plus de nos jours dâaucun doute. Mais que de moyens matĂ©riels et humains nâaura-
t-il pas fallu mobiliser pou arriver Ă des conclusions aussi audacieuses qui marquent dâune
pierre blanche les acquis scientifiques du 20Ăšme
siĂšcle ! Ce nâest pas peu dire, ce siĂšcle a Ă©tĂ©
si fertile en découvertes remarquables.
Les versets 5 Ă 7, expriment lâUnitĂ© dans la VĂ©ritĂ©, et la multiplicitĂ© qui lâexprime est une
vĂ©ritĂ© dâordre infĂ©rieur, mais certainement pas une illusion. Le SuprĂȘme Absolu est IĆvara,
le Seigneur personnel de lâunivers en qui sont contenues les Ăąmes vivantes et conscientes, et
la nature inconsciente les unes comme lâautre sont considĂ©rĂ©es comme Sa Nature
supĂ©rieure et infĂ©rieure. Il est la vie et la forme de tous les ĂȘtres. Le SuprĂȘme Ătre inclut la
totalitĂ© de lâinconscient dans sa nature infĂ©rieure et la totalitĂ© du conscient dans sa nature
supĂ©rieure. Cette thĂ©orie, dite âunion crĂ©atriceâ est la thĂ©orie qui admet que, dans la phase
Ă©volutive actuelle du Cosmos, tout se passe comme si lâUn se formait par unifications
successives du Multiple. Cette union créatrice suppose un foyer créateur préexistant, bien
que ce dernier se dĂ©couvre seulement au niveau de lâunitĂ© finale sur le plan des
phĂ©nomĂšnes. Pour le yogi ou dĂ©vot sincĂšre, la rĂ©solution du multiple Ă lâun sâopĂšre en
supprimant le multiple, lâunitĂ© nâa rien de commun avec ce multiple dont il faut se sĂ©parer
(MÄyÄ). Lâincarnation de lâĂąme dans le corps, dans la vitalitĂ© des sens, le mental et
lâintelligence, constitue lâĂ©go, qui utilise le cadre matĂ©riel comme champ de son activitĂ©. Il
nâest aucun autre principe au delĂ du SuprĂȘme Absolu. Câest Lui qui donne lâĂȘtre Ă toute
chose et qui est toute chose. Les existences du monde sont maintenues en un tout par le
SuprĂȘme Esprit comme les perles le sont au fil dâun collier.
Il nây a de mystique que lorsque le mental cherche Ă rĂ©soudre lâopposition entre unitĂ© et
multiplicitĂ©, lorsquâil y a aspiration Ă lâunitĂ© (pas de mystique du pluralisme). La rĂ©solution
du multiple Ă lâun sâopĂšre en supprimant le multiple. LâunitĂ© nâa rien de commun avec ce
multiple dont il faut se sĂ©parer (MÄyÄ) ; câest-Ă -dire, on arrive Ă lâUnitĂ© en dissipant par
Ă©vasion ou suppression de lâillusion de MÄyÄ, le Multiple.
Le moyen de remporter cette victoire est de montrer toujours une ferme rĂ©solution dâobĂ©ir
au SuprĂȘme Absolu, pendant que notre cĆur demeure libre et dĂ©chargĂ© de soucis
matériels, nous livrant aux paroles de la Gßtù, ou à un pÚre spirituel (gourou) réalisé. Une
ùme obéissante à la parole du Seigneur, possÚde toutes les vertus. Il faut franchir le monde
de mÄyÄ qui est la source de toute erreur.
Si la sĂ©paration du monde de mÄyÄ, Ă elle seule, fait le yogi ou dĂ©vot, câest elle, Ă plus forte
raison, qui fait lâascĂ©tique. LâascĂ©tisme des temps nouveaux est lâĂ©tat de perfection
religieuse et de puretĂ© spirituelle, qui nâest pas obtenu par une ascĂšse visant Ă supprimer la
matiĂšre, mais par une ascĂšse tendant Ă la spiritualiser et Ă la sublimer. Sans les
mortifications interdites dans la GĂźtĂą, lâascĂ©tisme va si loin pour lui quâelle le coupe de la
sociĂ©tĂ© des hommes, fussent-ils ses rivaux dans la recherche du SuprĂȘme Absolu, et quâelle
le fait vivre habituellement avec le SuprĂȘme Ătre seul, nâayant de contact avec les autres
que ceux quâimposent la nĂ©cessitĂ© quotidienne ou le service dĂ©sintĂ©ressĂ©, cette charitĂ© pure.
Bien sĂ»r, tous ne sont pas appelĂ©s Ă la vie ascĂ©tique. Il nây a pas deux ascĂšses en prĂ©sence,
lâune de dĂ©veloppement, et lâautre de mortification. Mais il y a deux phases aptes Ă sâallier
dans un Ă©quilibre souple et mobile. Toutefois, ascĂštes ou dĂ©vots tous sont appelĂ©s Ă sâunir
avec lâUnique Soi de toutes choses, Dieu. Car, tant que nous cherchons, nous nous trouvons
dans le monde de la dualité. DÚs que nous avons atteint la connaissance de Soi, la dualité
nâest plus. Dans la sphĂšre de la connaissance de Soi, lâopĂ©ration divine rĂšgne en absolue
souveraineté.
Toutes les formes sont des formes du SuprĂȘme Absolu ; les adorer câest adorer le SuprĂȘme,
celui qui confÚre toutes les récompenses. Cette importante doctrine ne peut que favoriser
lâunion entre les religions mondiales, et dĂ©jĂ enseignĂ©e par beaucoup de thĂ©ologiens
mystiques experts en cette science, car nous avons tous un seul et mĂȘme MaĂźtre, le SuprĂȘme
Absolu qui finalement en un temps le plus critique de lâhumanitĂ© envoie Son avatar
(incarnation divine) pour nous mener à la libération.
Parce quâil nâest pas facile de connaĂźtre le SuprĂȘme Ătre transcendant, nous recourons Ă
des aspects de Dieu et leur offrons notre culte. Nous obtenons les résultats que nous
cherchons, car le SuprĂȘme Ătre est patient Ă lâĂ©gard de nos limitations. Il accepte nos
priĂšres et y rĂ©pond, au niveau mĂȘme oĂč nous nous approchons de Lui. Aucune dĂ©votion
nâest sans valeur. Peu Ă peu, le dĂ©vot mĂȘme tout inculte quâil est, cherchera son salut dans
le SuprĂȘme Seigneur et sâapprochera de Lui en esprit et vĂ©ritĂ©. Ceux qui sâĂ©lĂšvent Ă
lâadoration du SuprĂȘme Ătre transcendant, en toute humilitĂ©, et obĂ©issance en
accomplissant son devoir, expĂ©rimentent lâĂ©tat le plus Ă©levĂ©. Pour se consacrer
profondĂ©ment Ă la vie dĂ©votionnelle, il faut une grande humilitĂ©, car un cĆur orgueilleux,
Ă©pris de lui-mĂȘme, ne sent pas le besoin du SuprĂȘme Seigneur. Un saint ermite disait : « On
ne prie bien que du jour oĂč lâon a compris quâon nâest quâun homme faible, un homme
comme les autres : un â propre Ă rien â, et quâon ne se regarde plus comme digne
dâintĂ©resser qui que ce soit. La vie dĂ©votionnelle, câest dĂ©jĂ sâoublier soi-mĂȘme, se compter
pour rien en face du SuprĂȘme Absolu, câest dĂ©jĂ prier. Ce qui suit, Ă toujours Ă©tĂ© la rĂšgle
dâor de lâauteur : « Cherchez premiĂšrement le royaume et la justice de Dieu ; et toutes ces
choses vous seront donnĂ©es par-dessus. » (Matthieu 6.33) La vie dĂ©votionnelle, câest se
mettre dans la prĂ©sence du SuprĂȘme Absolu, « la priĂšre sans cesse » en accomplissant son
devoir.
Les aspects matériels.
Les formes que nous imposons au Sans Forme sont dues Ă nos limitations. Nous nous
détournons de la contemplation de la réalité ultime pour nous attacher à des
reconstructions dâeffigies. Tous les dieux ou devas, Ă lâexception de SuprĂȘme Absolu
lâInmanifestĂ©, sont des formes quâon Lui impose. Dieu nâest pas un Dieu parmi beaucoup
dâautres, Il est lâUnique. Il y a, quand-mĂȘme, lieu de faire la diffĂ©rence entre le CrĂ©ateur
de lâunivers, dont lâĆuvre est plus extraordinaire que celle de lâhomme et le fait que celui-ci
soit dotĂ© de facultĂ©s qui lâĂ©lĂšvent au dessus de la matiĂšre. Lâhomme dispose dâune primautĂ©
absolue sur la matiĂšre et ne saurait en aucun cas lui vouer un culte quelconque qui le
rabaisserait dans sa dignitĂ©. Câest le SuprĂȘme Absolu seul qui peut Ă©lever lâĂąme de la
mĂ©ditation Ă la contemplation. Le SuprĂȘme Absolu est lâunique chemin que les Ăąmes
peuvent vraiment progresser.
Chapitre 8
LâĂternel Brahman (Esprit)
Arjuna dit : O KĆĆna, qui est lâĂternel Ătre (Brahman) ? Quâest-ce que lâAdhyÄtma, ou la
nature de lâĂternel Ătre ? Quâest ce que Karma ? Qui sont les ĂȘtres mortels (AdhibhĆ«ta) ?
Et, qui sont les Ătres divins (Adhidaiva) ? Qui est la Super-Ăąme (Adhiyajna), et comment
demeure-t-Elle dans le corps ? Et, comment au moment de la mort, es-Tu connaissable par
ceux qui ont maĂźtrisĂ© leur mental, O KĆĆna ? (8.01-02)
LA DĂFINITION DU SUPRĂME ESPRIT, ESPRIT, ĂME INDIVIDUELLE, ET KARMA
Le SuprĂȘme Seigneur dit : Lâimmuable AtmĂą (Esprit) est nommĂ© Brahman (Ăternel Ătre).
La nature (y compris la force inhérente de cognition et du désir) de Brahman est appelée
AdhyÄtma. La force crĂ©ative de Brahman qui occasionne la manifestation de lâentitĂ©
vivante (Jīva) est appelée Karma. (8.03)
Les ĂȘtres mortels sont appelĂ©s AdhibhĆ«ta. Les expansions de la Divine PersonnalitĂ© â
comme NÄrÄyana, MahÄ-viĆnu, ÄȘĆvara, etc. â sont appelĂ©es les Ătres Divins (Adhidaiva). Je
suis le Super-Ăąme (Adhiyajna) rĂ©sidant dans le corps comme le suprĂȘme rĂ©gnant (ÄȘĆvara),
O Arjuna. (8.04)
THĂORIE DE LA RĂINCARNATION ET DE KARMA
Quiconque se souvient exclusivement de Moi en abandonnant le corps au moment de la
mort, Mâatteint ; de cela il nây a aucun doute. (Voir aussi PrU 3.10) (8.05)
Quelque soit lâobjet auquel un homme se souvient au moment quâil quitte son corps Ă la fin
de la vie, il atteint cet objet, O Arjuna, sây Ă©tant toujours absorbĂ© dans cette mĂȘme pensĂ©e
(la personne se souvient de cet objet Ă la fin de la vie, et lâatteint). (Voir aussi ChU 3.14.01)
(8.06)
UNE SIMPLE MĂTHODE DE RĂALISATION DE DIEU
Par consĂ©quent, souviens-toi Ă tout moment de Moi et fais ton devoir. Tu Mâatteindras
certainement si ton mental et intellect sont toujours fixés sur Moi. (8.07)
En Me contemplant dans un mental sans défaillance, qui est discipliné par la pratique de la
mĂ©ditation, celui-ci atteint le SuprĂȘme Ătre, O Arjuna. (8.08)
Quiconque mĂ©dite sur le SuprĂȘme Ătre (Para-Brahman) â comme lâomniscient, lâancien
des jours, le régnant, plus subtil que le subtil (et plus grand que grand), le soutien de tout,
lâinconcevable, par lui-mĂȘme brillant comme le soleil, et transcendantal ou au-delĂ de la
rĂ©alitĂ© matĂ©rielle â Ă lâheure de la mort tenant le mental immobile et dĂ©votieux ; conduisant
le courant de lâĂ©nergie vitale (PrÄna) au milieu des deux sourcils pour sây fixer par la force
du yoga ; atteint KĆĆna, la SuprĂȘme Personne Divine. (Voir aussi les versets 4.29, 5.27, 6.13,
et YV 31.18, KaU 2.20) (8.09-10)
Je vais dâenseigner briĂšvement le processus pour atteindre la suprĂȘme demeure que les
connaisseurs de la Véda appellent immuable ; cela, en quoi les ascétiques entrent, libérés de
lâattachement, dĂ©sireux de mener une vie de cĂ©libataire. (8.11)
ATTEINDRE LE SALUT EN MĂDITANT SUR DIEU AU MOMENT DE LA MORT
Celui qui quitte le corps physique en maĂźtrisant tous les sens ; fixant le mental sur Dieu, et
PrÄna dans le cerveau ; engagĂ© dans les pratiques yoguiques ; mĂ©ditant sur Moi et
prononçant OM â le monosyllabe sacrĂ©, force de lâĂternel Ătre (Brahman) â il atteint la
suprĂȘme demeure. (8.12-13)
Je suis facilement à atteindre, O Arjuna, par ce yogi toujours inébranlable qui pense
toujours à Moi et dont le mental est indifférent à tout autre objet. (8.14)
Mâayant atteint, ces grandes Ăąmes ne reprennent plus naissance dans ce monde misĂ©rable
et transitoire, car ils ont atteint la plus haute perfection. (8.15)
Les habitants de tous les mondes â jusquâĂ et y compris le monde de BrahmÄ, le crĂ©ateur,
sont sujets Ă la misĂšre des naissances et des morts rĂ©pĂ©tĂ©es. Mais, aprĂšs Mâavoir atteint, O
Arjuna, celui-ci nâa plus Ă naĂźtre. (8.16)
TOUT EST CYCLIQUE DANS LA CRĂATION
Ceux qui savent que le jour du crĂ©ateur (BrahmÄ) dure mille Yugas (ou 4.32 billions
dâannĂ©es) et que sa nuit dure aussi mille Yugas, ils sont les connaisseurs du jour et de la
nuit. (8.17)
Toutes les manifestations Ă©mergent de la Nature matĂ©rielle primaire (Adi PrakĆti ou
Avyakta) Ă lâarrivĂ©e du jour de BrahmÄ (CrĂ©ateur), et elles sâabsorbent Ă nouveau dans
cela mĂȘme, Ă la venue de la nuit de BrahmÄ. (8.18)
Cette mĂȘme multiplicitĂ© dâĂȘtres vient encore et encore Ă lâexistence lors de lâarrivĂ©e du
grand jour du crĂ©ateur (BrahmÄ) ; et se dissout, inĂ©vitablement, Ă lâarrivĂ©e de la nuit de
BrahmÄ. (8.19)
Il y a une autre existence transcendantale et Ă©ternelle â plus Ă©levĂ©e que la Nature matĂ©rielle
changeante (PrakĆti) â qui ne pĂ©rit pas lorsque tous les ĂȘtres crĂ©es pĂ©rissent. Ce qui est
appelĂ© lâĂternel Ătre non manifestĂ© (Avyakta AkĆara Brahma). Ce qui est aussi connu
comme Parama-dhÄma, la demeure suprĂȘme. Ceux qui atteignent Ma suprĂȘme demeure
ne renaissent plus. (8.20-21)
DEUX VOIES DE BASE POUR LE DĂPART DU MONDE
Cette demeure suprĂȘme, O Arjuna, est conquise par une dĂ©votion infaillible pour Moi qui
existe au-dedans de chaque ĂȘtre, et par qui tout cet univers est pĂ©nĂ©trĂ©. (Voir aussi 9.04 et
11.55) (8.22)
O Arjuna, Je vais maintenant te retracer les différentes voies par lesquelles pendant la
mort, les yogis quittent pour revenir ou ne pas revenir. (8.23)
Le feu, la lumiÚre, la clarté du jour, la quinzaine de la lune croissante et les six mois du
solstice du soleil vers le nord â sâĂ©loignant de la voie de ces rĂ©gnants cĂ©lestes (Devas), les
yogis qui connaissent lâĂternel Ătre (Brahman) atteignent Brahman. (Voir aussi ChU
4.15.05, 5.10.01, BrU 6.2.15, PrU 1.10, et IsU 18) (8.24)
La fumée, la nuit, la quinzaine sombre de la lune, et les six mois du solstice méridional du
soleil â sâĂ©loignant de ces voies, la personne juste atteint la lumiĂšre lunaire (ou, le ciel) et
réincarne. (Voir aussi 9.21, ChU 5.10.03-05, BS 3.01.08) (8.25)
La voie de la lumiĂšre (de la pratique spirituelle et la connaissance du Soi) et la voie des
tĂ©nĂšbres (du matĂ©rialisme et lâignorance), elles sont, dit-on, les deux voies Ă©ternelles du
monde. Lâune mĂšne au salut (Mukti, NirvÄna) et par lâautre on renaĂźt. (8.26)
LA CONNAISSANCE TRANSCENDANTALE MĂNE AU SALUT
Connaissant ces deux voies, O Arjuna, un yogi ne sâĂ©gare jamais. Par consĂ©quent, O
Arjuna, sois toujours ferme dans le yoga. (8.27)
Le yogi qui connaĂźt tout cela passe par delĂ les mĂ©rites de lâĂ©tude des VĂ©das, de celles qui
rĂ©sultent des sacrifices, des austĂ©ritĂ©s, et de la charitĂ©, atteint Parama-dhÄma, la Demeure
SuprĂȘme et Ăternelle. (8.28)
Ainsi prend fin le huitiĂšme chapitre intitulĂ© «LâĂternel Brahman (Esprit)»
dans les UpaniĆad de la BhagavadgÄ«tÄ, lâĂ©criture de yoga, touchant la science de lâAbsolu
dans la forme du dialogue entre SrÄ«kĆĆna et Arjuna.
LâĂternel Ătre pĂ©nĂštre tous les ĂȘtres crĂ©Ă©s, tous les sacrifices, tous les dieux et toutes les
Ćuvres, car ce sont lĂ les diverses expressions des dieux. Câest ainsi, que ce chapitre sâest
ouvert par des questions sur la dĂ©finition prĂ©cise des mots utilisĂ©s par le Seigneur KĆĆna.
De plus, Arjuna veut aussi savoir comment on peut réaliser le Soi au moment de la mort.
Une fois de plus, la rĂ©ponse est simple, notamment par la parfaite maĂźtrise de soi grĂące Ă
une vie de pratique spirituelle.
Brahman est lâexistence immuable, ingĂ©nĂ©rĂ©e, sur lequel repose tout ce qui vit, se meut et a
son ĂȘtre. Le Soi est lâEsprit dans lâhomme, autant que dans la nature. Brahman est le Soi, le
Principe de Conscience qui illumine le corps, le mental, et lâintellect pendant le sĂ©jour de
lâhomme de la naissance Ă la mort et Ă travers toutes les vicissitudes de lâexistence. Karma
est lâimpulsion crĂ©atrice qui donne naissance aux formes de la vie, mais nâest pas seulement
un mouvement produit par un effort, quâon nomme « action ». Câest quelque chose de plus
profond, de plus subtil et de divin. Le SuprĂȘme Ătre se trouve derriĂšre chaque intellect, qui
finalement sâaccomplit dans la production des ĂȘtres et des choses, et cette force spirituelle
subtile est appelĂ©e « Karma » (action qui se prolonge par des consĂ©quences). Dans lâaction,
lâhomme adhĂšre Ă la puissance crĂ©atrice de Dieu, en coĂŻncidant avec elle, pour en devenir
non seulement lâinstrument, mais le prolongement vivant. La « MĂ€ndĂŒkya UpaniĆad »
affirme que tandis que lâAbsolu est indescriptible et comparable avec personne, le Dieu
vivant est le rĂ©gent du monde, lâĂąme incarnĂ©e. La distinction entre divinitĂ© et Dieu, Dieu
Absolu et Dieu personnel, Brahman et Isvara, est Ă©noncĂ©e clairement dans cette UpaniĆad.
Le Dieu personnel est le Dieu cosmique, tandis que Brahman est la réalité trans-cosmique.
IrrĂ©sistiblement, autour de nous, par tous les accĂšs de lâexpĂ©rience et de la pensĂ©e,
lâUnivers va se liant organiquement et gĂ©nĂ©tiquement sur lui-mĂȘme. Le Dieu cosmique, qui
sâincarne en lâhomme suffi Ă remplir notre cĆur et Ă satisfaire notre mental. Il y a
lâimmuable Divin : Brahman ; il y a le Dieu personnel, et Isvara, lâobjet de toute dĂ©votion.
Dans le cĆur de chaque ĂȘtre vivant, rĂ©side le Super-Ăąme.
Les techniques de la mĂ©ditation et la dĂ©votion permettent dâentretenir dans le mental la
flamme de lâaspiration divine, afin quâau moment ultime, lâĂȘtre mĂ©dite sur le Soi.
Lâimportance de lâĂ©tat dâĂąme au moment de la mort est soulignĂ©e dans les UpaniĆads :
ChÄndogya III, 14, PraĆna III, 10 ; ce qui confirme, que nous penserons Ă Dieu au moment
de la mort, que si nous lâavons dĂ©jĂ adorĂ© prĂ©alablement. LâĂąme va Ă ce sur quoi elle a Ă©tĂ©
concentrĂ©e pendant les derniers moments de la vie. Psychologiquement, et câest dâautant
plus vrai, nous devenons ce que nous pensons. Nos pensĂ©es dâautrefois dĂ©terminent notre
naissance présente, et nos pensées présentes déterminent la naissance à venir.
Dans son Ă©ternelle vision de soi et dans sa sagesse.
Aucune religion dans le monde ne peut servir lâhumanitĂ© si elle ne donne pas de
recommandations pratiques. Le Seigneur KĆĆna donne ici (8.7-11) une instruction pouvant
guider lâhomme dans sa vie de chaque jour autant que dans son dĂ©veloppement spirituel,
afin dâĂ©lever la qualitĂ© de lâexistence. Et, oui, nous devons prendre part Ă lâĆuvre de
lâhumanitĂ©, tout en conservant notre conscience de lâĂ©ternitĂ©, notamment la prĂ©sence
continue de SuprĂȘme Ătre immuable maintenant et toujours. Toutes les actions de notre vie
doivent ĂȘtre abandonnĂ©es Ă Dieu qui embrasse, pĂ©nĂštre et donne signification Ă notre
existence. Ce nâest pas la repentance lors de la mort qui nous sauvera mais lâexercice
constant, et la consĂ©cration totale au SuprĂȘme Absolu (Ătre). Quand le SuprĂȘme Absolu
rĂ©pand Sa lumiĂšre dans une Ăąme, elle y produit deux effets : elle lui fait voir dâabord la
grandeur du Seigneur, et les paroles sont incapables de rendre la profondeur de lâabĂźme oĂč
lâĂąme se trouve plongĂ©e, lorsque ensuite elle se rend compte de sa misĂšre. Les mots ne
peuvent exprimer lâardeur avec laquelle elle souhaite que tout le monde connaisse son
nĂ©ant. La vaine gloire et la complaisance pour soi-mĂȘme sont si loin de sa pensĂ©e, que
toutes les grĂąces quâelle reçoit du SuprĂȘme Ătre ne sont pour elle que des effets de la
misĂ©ricorde divine. Cela nâest possible quâĂ ceux qui choisissent le pouvoir du yoga. Il ne
sâagit pas de quelque Ă©nergie mystĂ©rieuse qui ne peut ĂȘtre dĂ©voilĂ© quâĂ quelques uns ; mais,
câest plutĂŽt le feu intĂ©rieur qui sâembrasse quand lâindividu se retire complĂštement des
agitations pour sâancrer dans le SuprĂȘme Absolu. Le verset 11 rappelle au yogi toutes les
prĂ©cautions Ă prendre pour Ă©viter les obstacles dans la pratique dâune vie consacrĂ©e au
SuprĂȘme Ătre, et dans la pratique de la mĂ©ditation. Il est tout Ă fait naturel que la montĂ©e
graduelle vers la perfection spirituelle, fait aussi découvrir les obstacles autant que le
moyen de les franchir. Le pratiquant de la méditation doit se libérer de ses attachements au
monde, car plus les dĂ©sirs sont nombreux, plus le mental sâĂ©gare. La persĂ©vĂ©rance dans le
non attachement amÚne le yogi à découvrir rapidement, une force intérieure, un calme et
une efficacitĂ© que produit Ă©galement la mĂ©ditation, lui permettant dâabsorber son mental
entier dans la rĂ©alisation de Soi en lui-mĂȘme. La GĂźtĂą toute entiĂšre est le chant de la
renonciation, câest-Ă -dire un dĂ©tachement sain et crĂ©atif produit par la connaissance du
Soi, et la discrimination dans les sens, « je suis dans le monde, non pas de ce monde » (vivre
détaché des rudiments de ce siÚcle).
Nous savons déjà depuis le chapitre 5.13, que le corps est appelé la cité aux neuf portes. Le
mental confinĂ© dans le cĆur indique que ses fonctions sont arrĂȘtĂ©es. Le yoga Ćastra nous
enseigne que lâĂąme passe du cĆur au Brahmarandhra (le septiĂšme chakras) dans la tĂȘte
par suĆum nÄndi et de lĂ sâĂ©chappe, pour sâunir au SuprĂȘme Ătre. Le son du OM ou AUM
est une combinaison de trois sons primeurs : A, U, M. AUM est la source de tous les sons
quâon puisse prononcer. Par consĂ©quent, câest le symbole sonique qui rĂ©pond le mieux au
SuprĂȘme Ătre (Brahman). Câest lâimpulsion majeure qui tient actif nos centres nerveux qui
contrĂŽlent les fonctions corporelles. Paramahansa Yogananda dit que le son OM (AUM) est
la vibration du moteur cosmique. La Bible dit : « Au commencement était la Parole (OM,
AMEN, ALLAH), et la Parole était avec Dieu, et la Parole était Dieu ». (Jean 1.1) Les yogis
acceptent cette vibration sonique et cosmique comme étant un son, ou un mélange sonique
de fréquences variées. La méditation omnique, mentionnée ici par le Seigneur est une
technique puissante et sacrée utilisée par les saints et sages de toutes les religions. Le son
OM (AUM) combine les six derniÚres étapes de Patanjali en trois étapes, schéma qui
sâobtient chez nous gracieusement en nous Ă©crivant, mais seulement aprĂšs avoir pratiquĂ© la
méditation ci-dessous pendant plusieurs mois.
Une simple technique de méditation est exposée ici :
(1) Lavez votre visage, yeux, mains, et pieds ; et asseyez-vous dans un lieu propre, silencieux, et
sombre, empruntant nâimporte quelle position confortable, avec la tĂȘte, le cou, et la colonne
vertĂ©brale droite et verticale. La musique ni lâencens sont recommandables pendant la mĂ©ditation.
Lâheure et le lieu pour la mĂ©ditation devraient ĂȘtre fixĂ©s au prĂ©alable. Observez les yama et les
niyama, comme étant les bons principes de vie, autant en pensées, paroles, et actions. Quelques
exercices yogiques sont nécessaires. Minuit, matin et soir sont les meilleurs moments pour méditer
15 Ă 25 minutes chaque jour.
(2) Souvenez-vous du nom ou de la forme du dieu personnel (Isht Dev) en qui vous croyez, tout en
implorant Son ou Sa bénédiction.
(3) Fermez vos yeux, et faites cinq Ă dix respirations lentes et profondes.
(4) Fixez votre regard, lâintellect, et Ă©motions au-dedans le centre du thorax, le siĂšge du cĆur causal, et
respirez lentement. Chantez mentalement « So » lorsque vous aspirez, et « Hum » lorsque vous
expirez. Pense que câest la respiration elle-mĂȘme qui retentit les sons « So et Hum » (Je suis Cet
Esprit). Visualisez mentalement et poursuivez la voie respiratoire par les narines, jusquâau centre
situĂ© entre les sourcils, en descendant jusquâau centre de la poitrine, ou les poumons. Nâessayez pas
de contrĂŽler ou de conduire votre respiration, mais suivez le cours naturel de votre respiration.
(5) Dirigez votre volontĂ© tout en pensant que vous vous Ă©mergez dans lâinfinie espace dâair que vous
respirez. Si la pensĂ©e sâĂ©carte du rythme respiratoire entamĂ©, recommencez Ă partir de lâĂ©tape (3).
Soyez régulier, et persistez sans remettre au lendemain.
Une méthode simple de méditation figure au verset 14 pour ceux qui ne peuvent pas suivre la voie
conventionnelle de méditation :
Je suis facilement à atteindre, O Arjuna, par ce yogi toujours inébranlable qui pense toujours à Moi et dont le
mental est indifférent à tout autre objet. (8.14)
La Bible (lâapĂŽtre Pierre) dit : « Mais il est une chose, bien-aimĂ©s, que vous ne devez pas
ignorer, câest que, devant le Seigneur, un jour est comme mille ans, et mille ans comme un
jour. » 2 Pierre 3.8)
DâaprĂšs les VĂ©das, la crĂ©ation est un cycle sans commencement et sans fin, et il nâa rien qui
présuppose une premiÚre création.
« Sâils sâen font dans la flamme, la lumiĂšre, le jour, la quinzaine brillante de la lune et des
mois de la lumiĂšre croissante du soleil, ceux qui connaissent Bra hman, vont Ă
Brahman. » (8.24)
Le yogi ou dĂ©vot essaie de vivre en sâidentifiant avec le SuprĂȘme Esprit (Purusha) qui est en
lui. Un tel disciple de la VĂ©ritĂ©, au moment de la mort, vient Ă penser Ă lâobjet de
contemplation de sa vie entiÚre, et il se dirige vers le monde de ses pensées. En entretenant
des pensĂ©es nobles toute sa vie, lâhomme suit aprĂšs la mort le chemin de lâĂ©volution, la voie
du SuprĂȘme Absolu, qui est celle de la libĂ©ration graduelle.
« Mais sâils sâen font dans la fumĂ©e, la nuit, les semaines sombres de la lune et les mois des
jours décroissants de la lumiÚre du soleil, ils entrent la lumiÚre lunaire, et retournent dans
le monde de la mort. » (8.25)
Au fait, les versets 24 et 25 montrent, que celui qui pendant sa vie sâefforce de sâĂ©lever au-
dessus des enveloppes de la Nature matérielle et de ses identifications avec elle, atteint les
plans spirituels supĂ©rieurs dâoĂč, dans le flot de son progrĂšs spirituel, il atteint la libĂ©ration,
le NirvÄna (ou lâexistence infinie). En revanche, sâil se plaĂźt aux plaisirs mondains et de la
sensualitĂ©, il doit revenir pour satisfaire ses instincts dans ce monde, oĂč tout est Ă nouveau
possible, oĂč il peut sâĂ©lever ou sâabaisser.
La vie est un conflit entre la lumiÚre et les ténÚbres. La premiÚre conduit à la libération, la
seconde Ă la renaissance. Les modes de vie peuvent ĂȘtre divisĂ©s en deux grandes catĂ©gories :
le profane et le sacrĂ©. Le premier concerne ceux qui sâattachent aux choses matĂ©rielles, la
satisfaction dépendant du nombre de désirs contentés. Le second, le sacré, est adopté par
ceux dont lâintellect est toujours Ă la recherche de quelque chose de plus grand que la
nature matĂ©rielle, ou de plus profond que la surface de la vie. La Bible dit (lâapĂŽtre Jean) :
« Celui qui est en vous est plus grand que celui qui est dans le monde. » (1 Jean 4.4)
Considérant la réalisation de Dieu comme objet et le but de la vie, dont la perfection, la
paix et la libertĂ© Ă©ternelles en sont les fruits, le yogi ou dĂ©vot passe outre lâĂ©tude des VĂ©das,
les sacrifices, les austérités et la charité (les dons), car il a franchi, et parvient au but
suprĂȘme. Une fois que lâon est parvenu Ă la rĂ©alisation de Dieu, rien ne peut nous faire
tomber de cet Ă©tat de conscience Ă©levĂ©. Il nâexiste pas de profit plus grand que celui-lĂ .
Chapitre 9
La Connaissance SuprĂȘme et le Grand MystĂšre
Le SuprĂȘme Seigneur dit : Je vais te rĂ©vĂ©ler, Ă toi qui ne tâadonnes pas Ă lâincrĂ©dulitĂ©, le
plus profond secret de la connaissance associĂ© Ă lâexpĂ©rience transcendantale. Connaissant
cela, tu seras dĂ©livrĂ© des misĂšres de lâexistence du mal. (9.01)
LA CONNAISSANCE DE LA NATURE DU SUPRĂME EST LE GRAND MYSTĂRE
La connaissance du Soi est souveraine entre toutes les connaissances ; elle est le plus
profond secret et vraiment sacrĂ©e, pouvant ĂȘtre discernĂ©e par lâinstinct, se conformant Ă la
justice (Dharma), est trĂšs facile Ă pratiquer, et Ă©ternelle. (9.02)
O Arjuna, ceux qui nâont pas de foi en cette connaissance ne Mâatteignent pas, et suivent
les cycles de naissance et de mort. (9.03)
Cet univers entier est une expansion de Moi. Tous les ĂȘtres dĂ©pendent de Moi (comme une
chaĂźne dĂ©pend de lâor, et les produits laiteux du lait). Je ne dĂ©pends pas dâeux (car Je suis le
plus grand de tous). (Voir aussi 7.12) (9.04)
Vois la force de Mon divin mystĂšre ; en rĂ©alitĂ©, Je ne dĂ©pends pas dâeux - le protecteur et
crĂ©ateur de tous les ĂȘtres â, et ils ne dĂ©pendent pas de Moi. (Au fait, la chaĂźne en or ne
dĂ©pend pas de lâor, malgrĂ© que la chaĂźne nâest autre que or. Aussi, la matiĂšre et lâĂ©nergie
sont distinctes autant que identiques). (Voir aussi BP 2.09.34 â 36) (9.05)
Comprends que tous les ĂȘtres sont en Moi (sans contacte ou sans produire un effet
quelconque), comme le vent puissant, soufflant partout, demeurant Ă©ternellement dans
lâespace. (9.06)
THĂORIE DE LâĂVOLUTION ET DE LâINVOLUTION
Tous les ĂȘtres sâĂ©tablissent en Mon Adi PrakĆti (nature primaire matĂ©rielle) et Ă la fin dâun
Kalpa (ou, un cycle de 4.32 billions dâannĂ©es), O Arjuna, Je les crĂ©e Ă nouveau au
commencement du prochain Kalpa. (9.07)
Je crĂ©e la multitude entiĂšre des ĂȘtres Ă mainte et mainte reprise avec lâaide de Ma Nature
matĂ©rielle (PrakĆti ou MÄyÄ). Câest ĂȘtres se trouvent sous le contrĂŽle des modes (Gunas) de
la Nature matĂ©rielle (PrakĆti). (9.08)
Les actes de la création ne Me lient pas, O Arjuna, car Je reste indifférent et détaché de ces
actes. (9.09)
LâĂ©nergie cinĂ©tique divine MÄyÄ â avec lâaide de la Nature matĂ©rielle (PrakĆti) â crĂ©e sous
Ma supervision tous les objets animés et inanimés, et par ce moyen la création poursuit sa
ronde, O Arjuna. (Voir aussi 14.03) (9.10)
LES VOIES DES SAGES ET DES IGNORANTS SONT DIFFĂRENTES
Les personnes ignorantes Me mĂ©prisent lorsque Jâapparais dans la forme humaine, ne
connaissant pas Ma nature transcendantale comme le grand Seigneur de tous les ĂȘtres (et
Me considĂšrent comme le plus commun des mortels). Car, vains sont leurs espoirs, vains
leurs actes, et vaine leur connaissance ; et, possĂšdent des aptitudes affolantes (TÄmasika)
(Voir 16.04-18) des démons cruels et avides (et, ils sont incapables de Me reconnaßtre).
(9.11-12)
Mais les grandes ùmes, O Arjuna, qui possÚdent des qualités divines (Voir 16.01-03) Me
connaissent comme Lâimmuable ; aussi en tant que cause matĂ©rielle et efficace de la
crĂ©ation, et Mâadorent dâun amour unique et entier. (9.13)
Les personnes de ferme dĂ©termination Mâadorent avec ardeur et persĂ©vĂ©rance dans la
dĂ©votion, en chantant sans cesse Mes gloires, dĂ©terminĂ©es de Mâatteindre, se prosternant
devant Moi avec dévotion. (9.14)
Certains Mâadorent par le sacrifice de la connaissance. Dâautres adorent lâUnique comme
Celui qui est en tout (sans dualité), comme le maßtre de tout (ou, dualité), et le multiple
tourné dans toutes les directions. (9.15)
TOUT EST LA MANIFESTATION DE LâABSOLU
Je suis le rituel, Je suis le sacrifice, Je suis lâoffrande, Je suis lâherbe, Je suis le mantra, Je
suis le beurre clarifiĂ© (GhÄ«), Je suis le feu, et Je suis lâoblation. (Voir aussi 4.24). Je suis le
soutien de lâunivers, le pĂšre, la mĂšre, et le grand-pĂšre. Je suis lâobjet de la connaissance, le
syllabe sacrĂ© OM, et aussi le Ćg, le Yajur, et le SÄma VĂ©da. Je suis le but, le soutien, le
Seigneur, le TĂ©moin, la Demeure, le Refuge, lâAmi, lâOrigine, la Dissolution, la fondation
du substrat, et la semence immuable. (Voir aussi 7.10 et 10.39) (9.16-18)
Je dispense la chaleur, Jâenvoie et retiens la pluie. Je suis lâimmortalitĂ© autant que la mort,
Je suis aussi lâAbsolu (Sat ou AkĆara) et Ă la fois le temporel (Asat ou KĆara), O Arjuna.
(Le SuprĂȘme Ătre est devenu le tout, voir aussi 13.12) (9.19)
ATTEINT LE SALUT PAR LâAMOUR DĂVOTIONNEL
Ceux qui accomplissent les rituels prescrits dans les trois VĂ©das, les buveurs du nectar de
dĂ©votion (Soma), et purifiĂ©s de leurs pĂ©chĂ©s (fautes), Mâadorent en faisant de bonnes
actions (Yajna) pour aller au ciel. Par leurs actes mĂ©ritoires, il en rĂ©sulte quâils vont au ciel
et jouissent des plaisirs des dieux. (9.20)
Ils retournent au monde des mortels, aprÚs avoir savouré le vaste monde des jouissances
cĂ©lestes â aprĂšs y avoir Ă©puisĂ© le bĂ©nĂ©fice de leur bon Karma (Punya). ConformĂ©ment aux
injonctions des trois VĂ©das, ces personnes travaillent aux fruits de leurs actions, et ils sont
pris dans le cycle de la naissance et de la mort. (Voir aussi 8.25) (9.21)
Jâapporte personnellement tous bien spirituel et matĂ©riel Ă ces dĂ©vots inĂ©branlables qui se
souviennent constamment de Moi, et Mâadorent dans une contemplation dĂ©cidĂ©e. (9.22)
O Arjuna, mĂȘme les dĂ©vots qui adorent les divinitĂ©s avec foi, rendent un culte Ă Moi, bien
que dâune maniĂšre impropre. (9.23)
Car Je, le SuprĂȘme Ătre (Para-Brahman), suis le seul bĂ©nĂ©ficiaire de tous les cultes
sacrificiels (Yajna), et le Seigneur de lâunivers. Mais Mon peuple ne connaĂźt pas Ma vraie
nature transcendantale. Câest pour cela quâils tombent (dans les cycles rĂ©pĂ©tĂ©s de naissance
et de mort). (9.24)
Les adorateurs des rĂ©gnants cĂ©lestes (Devas) vont aux Devas, ceux qui vĂ©nĂšrent les ancĂȘtres
vont aux ancĂȘtres, et ceux qui adorent les esprits vont aux esprits, mais Mes dĂ©vots
viennent Ă Moi (et ne naissent plus). (Voir aussi 8.16) (9.25)
LE SEIGNEUR ACCEPTE ET MANGE LâOFFRANDE DâAMOUR ET DE DĂVOTION
Quiconque Mâoffre une feuille, une fleur, un fruit, ou de lâeau avec dĂ©votion ; Jâaccepte et
mange cette offrande de dĂ©votion venant dâun cĆur pur. (Voir aussi BP 10.81.04) (9.26)
O Arjuna, quoique tu fasses, quoique tu manges, quoique to offres comme oblation au feu
sacrĂ©, quoique charitĂ© tu donnes, quelle que soit lâaustĂ©ritĂ© que tu pratiques, accomplis tout
en offrande Ă Moi. (Voir aussi 12.10, 18.46) (9.27)
Tu seras libĂ©rĂ© de lâenchaĂźnement â bon ou mauvais â de Karma par cette attitude de
renonciation complĂšte (SamnyÄsa-yoga). Devenant libre, tu parviendras Ă Moi. (9.28)
Le Moi est prĂ©sent en tous les ĂȘtres et ne favorise personne. Quant Ă Moi, nul nâest
dĂ©testable ou cher. Mais, ceux qui Mâadorent avec amour et dĂ©votion sont trĂšs proches de
Moi, et Je suis trĂšs proche dâeux. (Voir aussi 7.18) (9.29)
IL NâY A PAS DE PĂCHEUR IMPARDONNABLE
MĂȘme si le plus grand pĂ©cheur dĂ©cide de Mâadorer avec une dĂ©votion exclusive et par
amour, il doit ĂȘtre considĂ©rĂ© comme un saint, ayant pris la rĂ©solution correcte. (9.30)
Une telle personne devient rapidement une Ăąme juste et atteint la paix Ă©ternelle. Tiens pour
certain, O Arjuna, que Mon dévot ne périra ni tombera jamais. (9.31)
LA VOIE DE LâAMOUR DĂVOTIONNELLE EST PLUS FACILE
Quiconque â aussi les femmes, les marchants, les ouvriers, et les malfaisants â sait atteindre
la demeure suprĂȘme tout en se livrant simplement Ă Ma volontĂ© avec amour et dĂ©votion, O
Arjuna. (Voir aussi 18.66) (9.32)
Combien plus dĂšs lors est-il facile pour les saints brahmanes et les saints royaux pieux
dâatteindre le SuprĂȘme Ătre. Câest pourquoi, ayant obtenu cette vie humaine transitoire,
emplie de tristesse, on devrait Mâadorer avec amour et dĂ©votion. (9.33)
Fixe ton mental sur Moi, sois Mon dĂ©vot, adore-Moi, et incline-toi devant Moi. Ainsi, uni Ă
Moi en Me mettant comme dessein suprĂȘme et seul refuge, tu Mâatteindras certainement.
(9.34)
Ainsi prend fin le neuviĂšme chapitre intitulĂ© «La Connaissance SuprĂȘme et le Grand
MystĂšre» dans les UpaniĆad de la BhagavadgÄ«tÄ, lâĂ©criture de yoga, touchant la science de
lâAbsolu dans la forme du dialogue entre SrÄ«kĆĆna et Arjuna.
La sagesse, entre toutes les sagesses, le secret entre tous les secrets.
Nous tenons Ă notre disposition les moyens diffĂ©rents et complĂ©mentaires dâobtenir la
vĂ©ritĂ©, dont lâexpansion intuitive et intellectuelle du mental. Ainsi, il nous est loisible
dâacquĂ©rir la sagesse, la connaissance, la pĂ©nĂ©tration du rĂ©el et une profonde apprĂ©hension
de la nature des choses. Les philosophies religieuses démontrent que Dieu existe, mais que
la connaissance de Dieu est indirecte. Les grands mystiques proclament quâils ont perçu la
réalité de Dieu dans les profondeurs de leur ùme et que leur connaissance est directe.
Cependant, pour que Dieu vienne produire ces touches dâunion, il nous convient de purifier
le mental de toutes les jouissances du désir et des sens. Le mental, étant donc transformé en
Dieu, ne peut plus recevoir lâimpression des formes et des connaissances mondaines. Dans
cet état, toutes les opérations de la mémoire et autres puissances sont divinement
transformĂ©es Ă la rĂ©alitĂ© du SuprĂȘme Absolu. Dieu, en effet, les possĂšde, comme le MaĂźtre
absolu, par la suite de la transformation en Lui. DĂ©sormais, Dieu nous meut et nous
commande divinement, suivant Son SuprĂȘme Ătre et Sa volontĂ©. Celui qui sâunit au
SuprĂȘme Absolu ne fait quâun avec Lui. Au fait, commençons de voir le SuprĂȘme Absolu
comme étant notre propre Moi, par notre mental développé, purifié à son diapason.
La connaissance suprĂȘme est celle de lâidentitĂ© de KĆĆna, le Seigneur incarnĂ©, avec
Brahman, la source de toute existence. Dans la derniĂšre Ă©tape, le Samadhi, luira sur nous
(du dedans au dehors) si, dans la certitude de cette Divine Présence, nous adorons
lâIncarnĂ©. Le « Samadhi » dont lâautre nom est « connaissance », câest lâoubli de toute
activitĂ© mentale en rendant tout dâabord la pensĂ©e immuable, puis en identifiant la
conscience au Seigneur. La contemplation directe du SuprĂȘme Absolu cosmique est plus
difficile. Les humains sans foi qui refusent dâaccepter la VĂ©ritĂ© Une, nâobtiennent pas la
libĂ©ration (NirvÄna), mais reviennent Ă la naissance.
Pacifier le sanctuaire du cĆur devrait donc ĂȘtre notre soin principal, notre exercice
journalier par la méditation et les pratiques spirituelles de la Gßtù, par exemple. La paix
profonde ne peut naĂźtre que par lâactivitĂ© spirituelle intĂ©rieure. Quand arrivera ce qui est
parfait, la claire vision, la connaissance du SuprĂȘme Absolu complĂštera lâĆuvre divin en
nous. La rĂ©alitĂ© suprĂȘme transcende de trĂšs loin les choses qui sont dans lâespace et le
temps, et qui sont quâapparences.
En un mot, ne perdez jamais courage ; ne vous affligez pas quand vous serez dans
lâabattement ; recherchez la paix intĂ©rieure, car Dieu sâactivera en votre Ăąme lorsque le
calme y rĂ©gnera. Chaque vertu est par elle-mĂȘme paisible, douce et forte, et produit dans
lâĂąme qui la possĂšde : la paix, la douceur et la force.
Hors de Son action, ils retournent en Son immobilité et Son silence.
Le SuprĂȘme Ătre, fonctionnant Ă travers la Conscience Cosmique, est le CrĂ©ateur ; et, le
mĂȘme principe absolu sâexprimant Ă travers lâindividu, Ăąme vivante, mentalement autant
quâintellectuellement, est le soi individuel, lâego (samsÄrin). Lâego est soumis Ă la loi de
Karma et, en conséquence, contraint malgré lui de prendre naissance dans la vie cosmique.
En autres termes, le SuprĂȘme Ătre, Se multiplie Ă travers la nature matĂ©rielle, pour
provoquer Ă nouveau la manifestation cosmique. La nature nâest autre que la manifestation
de lâĂ©nergie infĂ©rieure du SuprĂȘme Ătre. La loi du « Karma » est incontournable : telle
action, telle rĂ©action. LâĂternel Ătre nâest motivĂ© ni par lâattachement, ni par lâaversion,
quand Il anime le « PrakĆti » (Ă©nergie crĂ©atrice) et projette la multitude des ĂȘtres vivants.
Lâhomme ne peut se comprendre que dans la mesure oĂč, dĂ©passant son corps de
constructions tangibles, nâest finalement dĂ©finissable dans le SuprĂȘme Ătre. Bien que le
SuprĂȘme Ătre dirige la crĂ©ation et la dissolution comme conscience et guide, Il nâest pas
impliquĂ© en elles, parce quâIl dĂ©passe la procession des Ă©vĂ©nements cosmiques. Comme la
crĂ©ation est lâĆuvre de la nature qui appartient au SuprĂȘme Ătre (Dieu), Il doit ĂȘtre
considéré comme immanent en elle, et aussi sous son aspect pleinement cosmique.
Dâinnombrables individus naissent, croissent, agissent, souffrent, meurent et renaissent,
mais le Soi universel, le SuprĂȘme Ătre est Ă jamais libre. Lâhomme recueille le fruit de ses
actions, et il est liĂ© par ses actes passĂ©s, mais le SuprĂȘme Ătre est Ă jamais libre. Cette
Ă©volution qui commence Ă lâaurore cosmique pour ĂȘtre rĂ©absorbĂ© Ă la nuit cosmique, qui
finalement porte tous les vivants vers une plus grande concentration, et par conséquent
vers un psychisme toujours plus dĂ©veloppĂ©. Au verset 10, KĆĆna est reprĂ©sentĂ© comme le
Soi universel qui pĂ©nĂštre le crĂ©e et lâincrĂ©Ă©, et soutient tous les ĂȘtres, et pourtant les
transcende et en mĂȘme temps nâest pas affectĂ© par eux. Comment, dans ces conditions le
SuprĂȘme Ătre, il y a environ cinq mille ans (le Dieu Cosmique) sâincarna dans la personne
du Seigneur KĆĆna, et trois mille ans aprĂšs dans le Christ pour notre adoration et
libĂ©ration. Le SuprĂȘme Ătre est prĂ©sent Ă Sa crĂ©ation, et il lâa maintient, et que les
Seigneurs KĆĆna, le Christ, et autres grands avatars, en sâincarnant, relient Ă leur tour la
crĂ©ation Ă son CrĂ©ateur, le but royal de leur venue ici-bas. Le SuprĂȘme Ătre considĂ©rĂ©
comme terme de lâĂ©volution, de la crĂ©ation tout entiĂšre du monde et de lâeffort humain, Ă
lâintĂ©rieur desquels Il agit depuis les origines sans que Sa PrĂ©sence puisse se dĂ©voiler
totalement. Nous ne voyons de lâhomme que son corps extĂ©rieur et non pas la DivinitĂ© en
lui. Nous voyons lâapparence extĂ©rieure, non la rĂ©alitĂ© intime. Et pourtant, ce qui fait et
classe lâhomme dâaujourdâhui surtout, câest dâĂȘtre devenu capable de voir, non seulement
dans lâEspace et dans le Temps, autant que dans la DurĂ©e, ou dans lâEspace-Temps, grĂące
au mental spiritualisĂ© de lâhomme. Ce qui affecte Ă ce moment nos vies, câest que le mental
de lâhomme a cessĂ© dâĂȘtre anti-matiĂšre, extra-matiĂšre, pour devenir trans-matiĂšre. La
spiritualitĂ© ne saurait plus Ă nos yeux sâopĂ©rer en rupture, ni en discordance avec la
matiÚre, mais en traversée et émergence de celle-ci. Ceci a un sens, si nous appliquons
lâattachement dĂ©sintĂ©ressĂ©, car reconnaĂźtre le SuprĂȘme Ătre sous son dĂ©guisement terrestre
exige un effort. Tant que nous ne tournerons pas notre existence entiĂšre vers le SuprĂȘme
Ătre, que nous ne franchirons pas les limites de la Nature phĂ©nomĂ©nale pour retrouver la
conscience universelle qui nous fait vivre dans la Divine Présence, nous serons en proie à la
fascination des choses finies.
JugĂ©s dâaprĂšs le critĂšre Ă©ternel et divin.
Câest-Ă -dire « quâils tendent vers la nature des Asura et des Rakshasa » - une classe
dâĂ©lĂ©mentaux mauvais ; selon certains, ces hommes participaient « du caractĂšre des
constituants les plus inférieurs de la nature ».
Nous ne voyons de nos semblables que lâaspect extĂ©rieur et non pas la DivinitĂ© en lui. Nous
voyons lâapparence extĂ©rieure, non la rĂ©alitĂ© intĂ©rieure. Dâailleurs la Bible dit : « Et
lâĂternel dit Ă Samuel : Ne prends point garde Ă son apparence et Ă la hauteur de sa taille,
car je lâai rejetĂ©. LâĂternel ne considĂšre pas ce que lâhomme considĂšre ; lâhomme regarde Ă
ce qui frappe les yeux, mais lâĂternel regarde au cĆur. (1 Samuel 16.7). ReconnaĂźtre le
SuprĂȘme Ătre sous son dĂ©guisement terrestre exige un effort. Tant que nous ne tournerons
pas notre ĂȘtre entier vers le SuprĂȘme Ătre, nous serons en proie des choses finies, et
spirituellement aveugles. Tout cela nous prouve combien, dans la voie mystique et
spirituelle, un guide tel que la GĂźtĂą dâune part, et un gourou (maĂźtre spirituel) sĂ©rieux et
dĂ©sintĂ©ressĂ© dâautres part sont nĂ©cessaires. Si nous tenons notre nature divine et intĂ©rieure
éveillée, nous manifesterons notre vraie conscience de Soi, étant donné que notre nature
entiÚre est tournée vers le Divin, pendant que toute notre vie devient une adoration
continue au SuprĂȘme Ătre. Lâopinion dâautrui gouverne la plupart des hommes, et leur
jugement se base sur les idées fausses que leur sens et leur imagination leur présentent. Le
sage, le yogi ou dĂ©vot, lui, nâĂ©tablit son jugement que sur la VĂ©ritĂ© Une, qui demeure en lui,
et qui fait quâil entend tout, quâil conçoit tout, quâil pĂ©nĂštre tout, puisquâil sâĂ©lĂšve au dessus
de tout ce qui est, au dessus de lui-mĂȘme.
Le sacrifice VĂ©dique est interprĂ©tĂ© comme une offrande de tout notre ĂȘtre, un don entier de
soi au Soi SuprĂȘme et Universel. Ce que nous recevons de Lui nous Lui rendons. La Bible
dit : « Je vous exhorte donc, frÚres, par les compassions de Dieu, à offrir vos corps comme
un sacrifice vivant, saint, agréable à Dieu, ce qui sera de votre part un culte raisonnable. »
(Romains 12.1) Autrement parlant, quiconque est dévoué à la dévotion et au service de
KĆĆna doit ĂȘtre considĂ©rĂ© comme ayant accompli tous les sacrifices recommandĂ©s dans les
VĂ©das. La vĂ©ritĂ© du SuprĂȘme Absolu est Sa sagesse qui commande tout lâordre cosmique de
la crĂ©ation et du gouvernement de la Nature matĂ©rielle. Se consacrer Ă Lui, le SuprĂȘme
Ătre, et de Lâaimer a des consĂ©quences immenses pour notre vie et celle dâautrui. (Encore
ceci Ă ajouter, le culte des images peut seulement ĂȘtre employĂ© comme moyen dâapproche
vers le Divin, et pour nous faciliter lâidĂ©e de Sa Divine PrĂ©sence. Autrement, les effigies sont
sans valeur.) Rien nâest plus propre Ă affirmer notre foi et espĂ©rance que la conviction
profondĂ©ment gravĂ©e dans le yogi ou dĂ©vot, nous tous, que rien nâest impossible au
SuprĂȘme Absolu, et quâIl exauce nos priĂšres, sous quelque forme que nous lâadorons.
Durant ma vie entiĂšre, jâai appliquĂ© ce que jâappelle la « RĂšgle dâOr », qui se lit dans la
seconde partie de la Bible : « Cherchez premiÚrement le royaume et la justice de Dieu ; et
toutes ces choses vous seront données par-dessus. » (Matthieu 6.33) Méditez, adorez,
contemplez, ainsi vous demeurez en Sa PrĂ©sence. Et, lâĂ©vangĂ©liste ajoute : « Ne vous
inquiĂ©tez donc pas âŠ. », au verset suivant. Le don de soi Ă Dieu signifie Lui consacrer
toutes ses actions et Lui offrir son mental. De mĂȘme quâun filet dâhuile, versĂ© dâun rĂ©cipient
dans un autre, coule sans interruption, de mĂȘme le yogi ou dĂ©vot dĂ©verse toute sa vie en
Dieu le SuprĂȘme Absolu (Ătre) ou simplement « OM » (AUM). Il a une constante dĂ©votion
envers Lui sous la forme OM (AUM) sâil ne peut accepter aucune autre forme.
La vie dans ce monde est une occasion offerte pour dĂ©velopper la Nature divine de lâĂąme Ă
travers des instruments imparfaits.
Le SuprĂȘme Ătre prend sur Lui les fardeaux et les soucis de ses yogis et dĂ©vots. La
méditation qui mÚne à la contemplation simple, pure, inspirée et parfaite, est une révélation
intime, par lâexpĂ©rience que Dieu fait de Lui-mĂȘme, de Sa BontĂ© car Il est parfait, de Sa
Paix et de Son Amour. Vous ne saurez boire ce divin nectar si vous ne faites des progrĂšs
dans la vertu et le renoncement, et si vous ne vous efforcez de rendre votre Ăąme ferme dans
la paix, dans le silence, dans lâoubli et dans la solitude intĂ©rieure.
Le Seigneur aime dâĂȘtre aimĂ© par Son dĂ©vot. Un cĆur consacrĂ© Lui est doux, loin des
rituels compliqués, seule offrande qui est agréable à Dieu, quant à la dispensation de Sa
grĂące. On devrait manger la nourriture aprĂšs lâavoir dâabord offerte Ă Dieu, « car nous te
rendons grùce pour tous Tes bienfaits Dieu tout-puissant ». A Son tour, le Seigneur mange
la nourriture offerte par ses dĂ©vots. Le mental est purifiĂ© lorsquâon se nourrit de la
nourriture dâaccueil offerte au Seigneur. Si pauvre que soit lâoffrande, elle est acceptable
au Seigneur si elle est faite avec amour et sincĂ©ritĂ©. La voie qui mĂšne Ă lâĂternel Ătre ne
passe pas par les subtilités de la métaphysique ou des rituels compliqués, mais par le simple
don de soi-mĂȘme symbolisĂ© dans lâoffrande dâune feuille, dâune fleur, dâun fruit ou mĂȘme
de lâeau. Ce qui est indispensable, câest lâadoration du cĆur. Le sujet a Ă©tĂ© traitĂ©
longuement dans notre « Introduction à la Bhagavad Gßtù », sous la rubrique « Prasùda ».
La mĂ©moire que nous gardons du SuprĂȘme Ătre en Sa faveur, et que nous invoquons incite
le Seigneur à avoir mémoire de nous. Il convient à tout dévot de louer le Seigneur en tout
lieu et en tout temps pour rappeler toujours, comme il se doit, le souvenir de Ses bienfaits.
La course Ă lâhonneur est un feu qui dĂ©truit tout yoga et austĂ©ritĂ©. La force illusoire de
lâĂ©nergie divine cinĂ©tique (MÄyÄ) est terrible. Elle trahit tous, y compris les yogis, sauf si
tout se fait pour Dieu seul par le don de soi, et par la consécration de tous les actes au
SuprĂȘme Absolu. Les flots des tĂąches de chaque jour doivent sâĂ©couler Ă travers lâadoration
de Dieu. Lâamour de Dieu nâest pas une Ă©vasion hors des peines de la vie, mais une
consécration au service du TrÚs-Haut.
Plus on est dĂ©tachĂ© de tout et recueilli en soi-mĂȘme, plus on est en Ă©tat de comprendre sans
effort ce qui est trĂšs Ă©levĂ©, car on reçoit alors du ciel le don de lâintelligence. Un cĆur pur,
simple et constant dans le bien ne se laisse pas dissiper par la variété des soins, et des
occupations extĂ©rieures : parce quâen toutes choses, il nâenvisage que la gloire du SuprĂȘme
Ătre, sans se rechercher soi-mĂȘme. Un yogi ou dĂ©vot vertueux et fidĂšle au Seigneur rĂšgle
dâavance intĂ©rieurement les actions extĂ©rieures quâil doit faire.
Le Seigneur nâa ni ami ni ennemi, car Il est impartial, et ne damne ou nâĂ©lit personne La
seule voie pour gagner Son amour est la foi et lâadoration. Pourquoi diffĂ©rer toujours dans
lâaccomplissement des bonnes rĂ©solutions ? « LĂšve-toi et commence dĂšs maintenant ; dis-toi
Ă toi-mĂȘme : il est temps dâagir et de combattre, voici le temps de se corriger. »
Il y a des pécheurs et des péchés qui sont impardonnables, mais le feu de la repentance
sincÚre brûle tous les péchés. Le Saint Coran dit : « Et celui qui croit en Allah et accomplit
de bonnes Ćuvres, il lui effacera ses mauvaises actions et le fera entrer dans des Jardins
sous lesquels coulent les ruisseaux oĂč ils demeurent Ă©ternellement. VoilĂ lâĂ©norme succĂšs !
(Sourate 64) Chaque saint a un passĂ©, et chaque pĂ©cheur Ă un avenir. YogÄnanda dit : « Un
saint est un pécheur qui ne cÚde jamais. » La Bible dit : « Quiconque croit en lui a la vie
Ă©ternelle. » (Jean 3.15) Des actes de priĂšres jaculatoires (Japa), dâaustĂ©ritĂ©, de service et de
charitĂ© accomplies sans motif intĂ©ressĂ© savent rĂ©parĂ©s les actes mauvais, ainsi lâobscuritĂ©
sâĂ©vanouit Ă lâaurore. (MB 3207.57).
La GĂźtĂą transcende toutes les distinctions de race, de sexe ou de caste, et met lâaccent sur
les valeurs spirituelles. Son Ă©vangile dâamour est ouvert Ă toute lâhumanitĂ©, inclus les
membres de toutes les castes, aussi bien quâaux hors-castes. Ce texte exprime lâopinion
dominante au moment de la composition de la GĂźtĂą, mais aujourdâhui aussi nous pouvons
en tirer une leçon.
Le verset 33, autrement compris ; mĂȘme ceux qui, en raison de leurs vies passĂ©es, souffrent
dâincapacitĂ©s diverses et sâadonnent Ă des poursuites mondaines peuvent surmonter leurs
faiblesses et parvenir au SuprĂȘme Absolu. La voie est plus facile pour ceux des Brahmanes
et des sages royaux qui sont spirituellement favorables.
Dans la méditation directe sur le Soi, le yogi ou dévot médite sur les grandes maximes qui
enseignent la non-dualité comme « Tu es cela » (Tat Twam Asi) et « Je suis Brahman »
(Aham Brahmasmi). Câest la forme la plus Ă©levĂ©e de la mĂ©ditation. Le mystique, le yogi ou
le dĂ©vot doit mĂ©diter attentivement sur son propre Soi qui, bien quâinvisible, est pourtant
la seule rĂ©alitĂ© ; et bien que manifeste dans lâunivers extĂ©rieur est pourtant de la nature de
la conscience subjective. Le « Samadhi », câest lâoubli de toute activitĂ© mentale en rendant
tout dâabord la pensĂ©e immuable puis en identifiant la conscience au Brahman.
Chapitre 10
La Manifestation de lâAbsolu
Le Seigneur SuprĂȘme dit : O Arjuna, Ă©coute une fois de plus Ma parole suprĂȘme, que Je
vais te dire pour ton bien, parce que tu Mâes trĂšs cher. (10.01)
DIEU EST LâORIGINE DE TOUT
Ni les régnants célestes (Devas), ni les grands sages connaissent Mon origine, car Je suis
lâorigine de tous les Devas et aussi des grands sages. (10.02)
Celui qui Me connaĂźt comme le Non-NĂ©, sans commencement, et comme le SuprĂȘme
Seigneur de lâunivers, celui-lĂ est considĂ©rĂ© comme intelligent parmi les mortels, et sera
libĂ©rĂ© de lâenchaĂźnement de Karma. (10.03)
La discrimination, la connaissance de Soi, la libĂ©ration de lâĂ©garement, le pardon, la vĂ©ritĂ©,
le contrÎle du mental et des sens, la tranquillité, le plaisir, la souffrance, la naissance, la
mort, la crainte, le courage, la non-violence, lâĂ©quanimitĂ©, le contentement, lâaustĂ©ritĂ©, la
charitĂ©, la renommĂ©e, lâopprobre â ces diverses qualitĂ©s des ĂȘtres humains procĂšdent de
Moi seul. (10.04-05)
Les sept grands sages, et les plus anciens quatre Sanakas et les quatorze Manus, dâoĂč sont
nés toutes les créatures du monde, émanent de Mon énergie potentielle. (10.06)
Celui qui connaĂźt vĂ©ritablement Mes manifestations et Mes pouvoirs yoguiques, Mâest uni
par une dĂ©votion inĂ©branlable. Il nây a aucun doute Ă ce sujet. (10.07)
Je suis lâorigine de tout. Tout Ă©mane de Moi. Comprenant cela, les sages mâAdorent avec
amour et dévotion. (10.08)
Les dévots intelligents se maintiennent toujours satisfaits et joyeux. Leurs pensées restent
absorbĂ©es en Moi, et leurs vies entiĂšrement donnĂ©es Ă Moi. Ils sâĂ©clairent mutuellement en
sâentretenant constamment de Moi. (10.09)
LE SEIGNEUR DONNE LA CONNAISSANCE Ă SES DĂVOTS
Je dĂ©livre la connaissance et la comprĂ©hension des sciences mĂ©taphysiques â Ă ceux qui Me
sont toujours unis et Mâadorent avec amour â par quoi ils viennent Ă Moi. (10.10
Demeurant dans leur psyché intérieure en tant que conscience, mû de compassion Je
dĂ©truis lâobscuritĂ© nĂ©e de lâignorance par la lumineuse lampe de la connaissance
transcendantale. (10.11)
Arjuna dit : Tu es le SuprĂȘme Ătre, la SuprĂȘme Demeure, le SuprĂȘme Purificateur,
lâĂternel Divin Ătre, le Premier des dieux, le Non-nĂ©, lâOmniprĂ©sent. Tous les sages Tâont
proclamĂ©. Le divin sage NÄrada, Asita, Devela, VyÄsa, et Toi-mĂȘme Tu me le dĂ©clares.
(10.12-13)
PERSONNE NE SAIT CONNAĂTRE LA VRAIE NATURE DE LA RĂALITĂ
O KĆĆna, je crois que tout ce que Tu mâas dit est vrai. O Seigneur, ni les rĂ©gnants cĂ©lestes
(Devas), ni les démons comprennent complÚtement Ta nature réelle. (Voir aussi 4.06)
(10.14)
O CrĂ©ateur et Seigneur de tous les ĂȘtres, Dieu de tous les rĂ©gnants cĂ©lestes (Devas),
SuprĂȘme personne, et Seigneur de lâunivers, Toi seul Te connais par Toi-mĂȘme. (10.15)
En vĂ©ritĂ©, Toi seul peux Ă©noncer intĂ©gralement Tes propres divines gloires â les
manifestations â par lesquelles Tu existes imprĂ©gnant tous les univers. (10.16)
Comment puis-je Te connaĂźtre, O Seigneur, par la contemplation constante ? Sous quelle
forme de manifestation dois-je penser Ă Toi, O Seigneur ? (10.17)
O Seigneur, explique-moi de nouveau en détail, Ton pouvoir yoguique et Ta gloire, car je
ne me rassasiĂ© pas dâĂ©couter Tes paroles douces comme du nectar. (10.18)
TOUT EST UNE MANIFESTATION DE LâABSOLU
Le SuprĂȘme Seigneur dit : O Arjuna, Je vais maintenant tâexpliquer Mes plus hautes
prééminentes manifestations divines, car Mes manifestations sont sans fin. (10.19)
O Arjuna, Je suis lâEsprit (AtmĂą) siĂ©geant dans la psychĂ© intĂ©rieure de tous les ĂȘtres. Je
suis le commencement, le milieu, et la fin de tous les ĂȘtres. (10.20)
Je suis ViĆĆu parmi les (douze) fils dâAditi, Je suis le soleil resplendissant, Je suis MarÄ«ci
parmi les rĂ©gnants supernaturels de lâair, Je suis la lune parmi les Ă©toiles. (10.21)
Je suis SÄmaveda parmi les VĂ©das, Je suis Indra parmi les rĂ©gnants cĂ©lestes (Devas), Je suis
le mental parmi les sens, Je suis la conscience des ĂȘtres vivants. (10.22)
Je suis Siva parmi les Rudras, Je suis Kubera parmi les YakĆas et les dĂ©mons, Je suis le feu
parmi les Vasus, et Je suis Meru parmi les montagnes. (10.23)
Parmi les prĂȘtres, O Arjuna, sache que Je suis le chef BĆhaspati. Je suis Skanda parmi les
gĂ©nĂ©raux de lâarmĂ©e. Je suis lâocĂ©an parmi les Ă©tendues dâeau. (10.24)
Je suis BhĆgu parmi les grands sages ; Je suis le monosyllabe et le son cosmique OM parmi
les mots ; Je suis Japa-yajna parmi les disciplines spirituelles (yajna) ; et Je suis lâHimÄlaya
parmi les immobiles. (10.25)
UNE BRĂVE DESCRIPTION DES MANIFESTATIONS DIVINES
Je suis lâarbre banyan parmi les arbres, NÄrada parmi les sages, Citraratha parmi les
Gandharvas, et le sage Kapila parmi les Siddhas. (10.26)
Sache que parmi les chevaux je suis UccaihĆravas, manifestĂ© au temps du surgissement de
lâocĂ©an nĂ© du nectar, AirÄvata parmi les Ă©lĂ©phants, et parmi les hommes Je suis le Roi. Je
suis le foudre parmi les armes, KÄmadhenu parmi les vaches, et Je suis le cupidon de la
procrĂ©ation. Parmi les serpents, Je suis VÄsuki. (10.27-28)
Je suis ĆeĆanÄga parmi les NÄgas, Je suis Varuna parmi les dieux des eaux, et les AryamÄ
parmi les mÄnes. Je suis Yama parmi les divinitĂ©s rĂ©gnantes. Je suis PrahlÄda parmi la
progéniture des Daityas, Je suis le temps entre les calculateurs, le lion parmi les animaux,
et Garuda parmi les oiseaux. (10.29-30)
Je suis le vent parmi les purificateurs, et le Seigneur Rama parmi les guerriers. Je suis le
crocodile parmi les poissons, et le saint Gange parmi les riviĂšres. (10.31)
Je suis le commencement, le milieu, et la fin de la création, O Arjuna. Parmi les sciences Je
suis la science du suprĂȘme Moi. Je suis la logique des logiciens. (10.32)
Je suis la lettre « A » de lâalphabet. Je suis le nombre duel entre les composĂ©s. Je suis le
temps infini (AkĆaya KÄla). Je suis le prĂ©servateur de tous, et Jâai multiples faces dans
toutes les directions (ou, Je suis omniscient). (10.33)
Je suis la mort qui saisit tout, et aussi lâorigine des ĂȘtres futures. Je suis les sept dĂ©esses
(Devis) ou anges gardiens ayant la prĂ©sidence sur sept qualitĂ©s â la gloire, la prospĂ©ritĂ©, la
parole, la mĂ©moire, lâintelligence, la fermetĂ© et le pardon. (10.34)
Je suis BĆhatsÄma parmi les hymnes SÄma. Je suis GÄyatri parmi les mantras VĂ©diques, Je
suis Novembre-DĂ©cembre parmi les mois, Je suis le printemps parmi les saisons. (10.35)
Je suis le jeu des tricheurs ; lâĂ©clat de tout ce qui resplendit ; la victoire des victorieux ; la
résolution des résolus ; et, la bonté des bons. (10.36)
Je suis VÄsudeva parmi les descendants des VĆĆnÄ«, Arjuna parmi les PÄndavas, VyÄsa
parmi les sages, et UĆanÄ parmi les poĂštes. (10.37)
Je suis la force des dirigeants, Je suis la science politique de ceux qui recherchent la
victoire, Je suis le silence des choses secrĂštes, et la connaissance du Soi des connaissants.
(10.38)
Je suis lâorigine ou la semence de tous les ĂȘtres, O Arjuna. Il nây a rien dâanimĂ© ou
dâinanimĂ©, qui puisse exister sans Moi. (Voir aussi 7.10 et 9.18) (10.39)
LA CRĂATION VISIBLE NâEST QUâUNE PETITE FRACTION DE LâABSOLU
Il nây a pas de fin Ă Mes manifestations divines, O Arjuna. Ce que Je tâai exposĂ© nâest
quâune brĂšve description de lâĂ©tendue de Mes manifestations divines. (10.40)
Tout ce qui est douĂ© de gloire, dâĂ©clat, et de force, sache que câest la manifestation dâune
trĂšs petite fraction de Ma splendeur. (10.41)
Quelle est lâutilitĂ© dâune connaissance aussi dĂ©taillĂ©e, O Arjuna ? Je soutiens
continuellement cet univers tout entier par une simple fraction de Ma force divine (Yoga-
mÄyÄ). Voir aussi ChU 3.12.06) (10.42)
Ainsi prend fin le dixiĂšme chapitre intitulĂ© «La Manifestation de lâAbsolu» dans les
UpaniĆad de la BhagavadgÄ«tÄ, lâĂ©criture de yoga, touchant la science de lâAbsolu dans la
forme du dialogue entre SrÄ«kĆĆna et Arjuna.
Le SuprĂȘme Ătre est lâĂternel ingĂ©nĂ©rĂ©, et est aussi le Seigneur du monde bien quâIl nâait
pas de naissance, pendant que toutes les existences dérivent de Lui. Plus on invoque le
SuprĂȘme Ătre, et plus quâon gagne de stabilitĂ© dans le service de dĂ©votion. La paix dâune
telle ùme aussi pure, le contentement de son mental, sa sérénité et son calme intérieur est si
intense, quâil brille mĂȘme au-dehors, comme un rayon lumineux et une Ă©tincelle du
SuprĂȘme Absolu.
Tous ces diffĂ©rents Ă©tats de lâĂȘtre rĂ©sultent du karma passĂ©. Le SuprĂȘme Ătre est
indirectement responsable, mĂȘme pour la douleur et les souffrances du monde. Ătant le
Seigneur du monde, Il le dirige, sans pourtant ĂȘtre affectĂ© par le bon ou le mauvais.
Les yogis ou dĂ©vots, les ĂȘtres humains atteignent finalement la libĂ©ration par les moyens de
leur propre mental qui sont conservés purs, transparents, sans souillure, frais et clair, et
sans tache, conscients de leur unitĂ© avec le SuprĂȘme Ătre, participant Ă lâĆuvre du monde
qui est la manifestation du SuprĂȘme Ătre.
Le SuprĂȘme Ătre (Dieu) agit sur le monde pour le bien de lâhomme, mais Lui-mĂȘme en
demeure sĂ©parĂ©. Quand lâamour et la connaissance sont prĂ©sents, lâĂ©ternel dessein est
accompli dans lâindividu.
Arjuna accepte la vĂ©ritĂ© de ce qui a Ă©tĂ© dĂ©clarĂ© et proclame sa conviction que KĆĆĆa qui lui
parle, est le SuprĂȘme Ătre, lâAbsolu et lâIndĂ©pendant, auquel nous pouvons nous Ă©lever par
lâabandon de nous-mĂȘmes. La vie intĂ©rieure est, en effet, non seulement action, mais aussi
confrontation, confrontation du sujet avec dâautres sujets. De cette confrontation franche
et sans arriĂšre-pensĂ©es naĂźt le vrai dialogue, qui se trouve Ă la racine de lâamitiĂ© et de
lâamour. La connaissance transcendantale est rĂ©vĂ©lĂ©e par Dieu, les sages en sont les
témoins, et Arjuna les vérifie de sa propre expérience.
La vie intĂ©rieure authentique ne se confond pas avec lâintrospection. Le vrai yogi ou dĂ©vot
nâest ni un narcissique ni un introverti. La vraie vie intĂ©rieure consiste Ă sortir finalement
de soi en allant vers lâautre. Si lâon reste enfermĂ© dans sa citadelle intĂ©rieure, lâon tourne en
rond. LâĂ©lan vers lâautre, câest lâautre nom de lâamour. Il nây a donc pas de vie intĂ©rieure
sans amour. Dialogue, amour, vie intérieure, action désintéressée sont les quatre piÚces
dâune tĂ©tralogie. Et, cette tĂ©tralogie est une bonne fondation pour la philosophie du sujet,
quâil nous appartient de construire ensemble. La GĂźtĂą nâĂ©tablit pas dâopposition entre
Brahman et le monde, la réalité ineffable et son inadéquate expression. Elle donne une
vision spirituelle de lâensemble ; elle mentionne lâindĂ©finissable, lâInmanifestĂ© immuable,
lâImpensable, lâAbsolu qui transcende toute dĂ©termination empirique. Cependant
lâadoration du SuprĂȘme Absolu est difficile aux ĂȘtres incarnĂ©s. Il est plus facile
dâapprocher le SuprĂȘme Ătre Ă travers ses relations avec le monde, car cette mĂ©thode est
plus naturelle. Le SuprĂȘme Ătre est le Seigneur personnel qui rĂ©git lâactivitĂ© multiple de la
nature qui rĂ©side au cĆur de chaque crĂ©ature.
La Bible entretient des paroles semblables : « JĂ©sus Christ (Dieu Lui-mĂȘme) est le mĂȘme
hier, et aujourdâhui, et Ă©ternellement. » (HĂ©breux 13.08) Et, dans lâApocalypse : « Je suis
lâalpha et lâomĂ©ga, le commencement et la fin. » (Apo. 21.6a) AtmĂą (Esprit) nâa pas de
commencement et appartient au SuprĂȘme Ătre (Para-Brahman) comme la lumiĂšre du soleil
appartient au soleil (BS 2.03.17). Para-Brahman et lâĂternel Brahman (AtmĂą) sont comme
le soleil et la lumiĂšre du soleil, diffĂ©rents autant que pas diffĂ©rents (BS 3.02.28). LâEsprit
(AtmĂą) dans les ĂȘtres vivants sâappelle CetanÄ ou le rĂšgnent suprĂȘme (IĆvara). Le mĂȘme
Esprit qui soutient lâunivers est appelĂ© Brahman. AtmĂą est diffĂ©rent du corps comme le feu
est diffĂ©rent du bois. AtmĂą, la conscience universelle, ne sait pas ĂȘtre vue par les sens, le
mental, et lâintellect ; car les sens, le mental, et lâintellect tiennent leur force et fonctionnent
Ă partir dâAtma seulement (KeU 1.06). AtmĂą se trouve Ă la base et maintient chaque forme
de force, de mouvement, dâintellect, et la vie dans cet univers. Câest cette force qui permet Ă
lâhomme de voir, dâentendre, de sentir, de penser, dâaimer, dâhaĂŻr, et de dĂ©sirer les objets.
Les dieux de lâair, les Maruts.
Les Aditis sont des dieux VĂ©diques. Bien que le SuprĂȘme Ătre soit en toutes choses, Il est
plus Ă©vident chez les uns que chez les autres. Le monde est un ordre ascendant. Le SuprĂȘme
Absolu se révÚle plus dans la vie que dans la matiÚre, dans la conscience plus que dans la
vie, et plus encore dans les saints et les sages. Des expressions similaires figurent dans les
VĂ©das (RV 4.26.01 et 9.96.06)
Le SÄmaveda est mentionnĂ© comme un ouvrage principal des VĂ©das Ă cause de sa beautĂ©
musicale.
Japa (répétition silencieuse de mots sacrés) est considéré en ces temps comme étant la plus
ancienne et la méthode la plus efficace pour la réalisation de Soi, suivant la confirmation de
TulasÄ«dÄsa, NÄnak, le Seigneur Caitanya, PrabhupÄda, et autres. La rĂ©pĂ©tition mentale
(Japa) constante avec foi du TÄraka mantra â OM Sri RÄma, Jai RÄma, Jai Jai RÄma â
poussera les vibrations soniques dans les diverses couches du mental, et y fonctionnant
comme Ă©touffeur, pour prĂ©venir ainsi lâarrivĂ©e des vagues de pensĂ©es et dâidĂ©es nĂ©gatives.
La mĂ©ditation est lâextension et le stade supĂ©rieur de Japa. On doit dâabord pratiquer Japa
avant de sâengager dans la mĂ©ditation transcendantale. Swami Harihar dit : Il ne devrait
avoir aucun dĂ©sir de sâacquĂ©rir des objets de ce monde en Ă©change de la rĂ©pĂ©tition du nom
divin. La force spirituelle du nom divin ne devrait pas ĂȘtre utilisĂ© pour la destruction du
pĂ©chĂ©, mais devrait avoir recours uniquement Ă la rĂ©alisation divine. Le SuprĂȘme Ătre se
révÚle plus dans la vie que dans la matiÚre, dans la conscience que dans la vie, et plus
encore dans les saints et les sages. Le saint TulasÄ«dÄsa dit : Place la lampe du nom du
Seigneur prÚs de la porte de ta langue, si tu désires la lumiÚre au-dedans et au-dehors. Le
nom est plus grand que les aspects impersonnel et personnel de lâĂternel Ătre (Brahman),
car la force du nom contrĂŽle les deux aspects de Brahman (TR 1.21-26). Gourou NÄnak
dit : Le meilleur de tous les efforts est de se souvenir et de répéter le nom de Dieu.
Ou, AĆvattha, un saint figuier, lâarbre banyan ou pipal.
Kapila fut le fondateur de la philosophie Samkhya.
La vache qui exauce tous les vĆux.
Serpents venimeux.
Serpents non venimeux dâune espĂšce lĂ©gendaire douĂ©s, dit-on, de parole et de sagesse.
Le Juge des morts.
Des ĂȘtres semi humains.
AkĆaya KÄla, le temps infini, est aussi nommĂ© AkÄla PuruĆa ou KÄla NirÄnjana. Câest la
forme du Seigneur KĆĆĆa dans le temps.
« Je suis le jeu des tricheurs », comme exemple pris par KĆĆĆa pour faire comprendre Ă
Arjuna la nature du Soi.
Le grand arbre figuier banian (AĆvattha), avec ses nombreuses branches, feuilles, fleurs,
fruits, et semences, proviennent dâune toute petite semence dans la forme non manifestĂ©e,
pour se manifester par la suite et devenir un arbre. De mĂȘme, toutes les manifestations
(Jagat) en lâĂternel Ătre (Brahman) dans la forme non manifestĂ©e, se manifestent pendant
la création, et deviennent non manifestée encore et encore pendant la dissolution. Le fruit
se maintient cachĂ© dans la semence, et la semence est le fruit ; de mĂȘme Dieu demeure dans
chaque ĂȘtre humain et chaque ĂȘtre humain en Dieu (SuprĂȘme Ătre).
La variĂ©tĂ© dans tout lâunivers, en commençant par les plus hauts rĂ©gnants cĂ©lestes (Devas),
jusquâĂ la moindre insecte, et mĂȘme le grain de sable, ne sont rien dâautre que la
manifestation de lâUnique et mĂȘme Absolu.
Toutes choses sont soutenues par le SuprĂȘme Absolu (SuprĂȘme Ătre, Dieu), la beautĂ© et la
splendeur Le rĂ©vĂšlent plus quâautre chose. Tout acte dâhĂ©roĂŻsme, toute vie de sacrifice,
toute Ćuvre de gĂ©nie, est une rĂ©vĂ©lation du Divin. Les moments mĂ©morables dans la vie
dâun homme sont inexplicablement plus grands que le mental fini de lâhomme. Le cosmos
nâest quâune rĂ©vĂ©lation partielle de lâinfini ; sa lumiĂšre nâest quâon rayon de la splendeur
divine. La lumiĂšre transcendantale du SuprĂȘme Absolu a son domaine par delĂ ce cosmos,
au delĂ du temps et de lâespace.
Chapitre 11
LA VISION DE LA FORME COSMIQUE
Arjuna dit : Mon illusion sâest dissipĂ©e par les paroles profondes de sagesse que Tu as
prononcĂ©es â par compassion pour moi â concernant le suprĂȘme secret de lâĂternel Ătre
(Brahman). (11.01)
O KĆĆna, jâai entendu de Toi en dĂ©tail sur lâorigine et la dissolution des ĂȘtres, et de Ta
gloire immuable. (11.02)
LA VISION DE DIEU EST LâULTIME FIN DU CHERCHEUR
O Seigneur, Tu es comme Tu lâas dĂ©clarĂ©, mais je dĂ©sire voir Ta divine forme cosmique, O
SuprĂȘme Ătre. (11.03)
O Seigneur, si Tu penses quâil est possible pour moi de voir Ta forme universelle, ainsi, O
Seigneur des yogis, montre moi Ta forme transcendantale. (11.04)
Le SuprĂȘme Seigneur dit : O Arjuna, contemple Mes centaines par milliers et multiples
formes divines de différentes couleurs et de formes. (11.05)
Voir les Ădityas, les Vasus, les Rudras, les AĆvins, et aussi les Maruts. Contemple, O
Arjuna, ces multiples merveilles jamais vues auparavant. (11.06)
O Arjuna, vois maintenant la crĂ©ation entiĂšre â animĂ©e et inanimĂ©e, et aussi tout ce que tu
désires voir, toutes unifiés en Mon corps. (11.07)
Mais, tu ne sais pas Me voir avec ton Ćil physique ; câest pourquoi, Je te donne lâĆil divin
afin de voir Ma puissance et gloires souveraines. (11.08)
LE SEIGNEUR MONTRE SA FORME COSMIQUE Ă ARJUNA
Samjaya dit : O Roi, ayant dit ceci ; le Seigneur KĆĆna, le grand Seigneur de la force
mystique du yoga, rĂ©vĂ©la Sa forme suprĂȘme et souveraine Ă Arjuna. (11.09)
Arjuna vit la Forme Universelle du Seigneur pourvue de nombreuses bouches et yeux,
plusieurs visions merveilleuses, avec dâabondants ornements divins et brandissant de
beaucoup dâarmes divines. Portant des guirlandes et des apparats, embaumĂ©es de parfums
et dâonguents cĂ©lestes, plein de prodiges, le Dieu infini ayant le visage tournĂ© de tous cĂŽtĂ©s.
(11.10-11)
Si la splendeur de milliers de soleils Ă©clatait soudainement dans le ciel, alors elle ne serait
mĂȘme pas comparable Ă la splendeur de cet Ătre sublime. (11.12)
Arjuna vit lâunivers entier avec ses divisions multiples, mais rassemblĂ©es en unitĂ© (toutes en
une, et une en toutes) dans le corps transcendantale de KĆĆna, le Seigneur des rĂ©gnants
célestes (Devas). (Voir aussi 13.16, et 18.20) (11.13)
ON POURRAIT NE PAS ĂTRE PRĂPARĂ, OU QUALIFIĂ, POUR VOIR LE SEIGNEUR
(En voyant la forme cosmique du Seigneur) Arjuna fut empli dâĂ©merveillement ; et les
cheveux dressĂ©s, courba la tĂȘte devant le Seigneur et pria les mains jointes. (11.14)
Arjuna dit : O Seigneur, je vois en Ton corps tous les régnants supernaturels (Devas) et une
multitude dâĂȘtres, tous les sages, et les serpents cĂ©lestes, le Seigneur Ćiva autant que le
Seigneur BrahmÄ assis sur le lotus. (11.15)
O Seigneur de lâunivers, je Te vois partout en Ta forme infinie, avec plusieurs bras,
estomacs, faces et yeux. O Forme Universelle, Je ne vois ni Ton commencement, ni le
milieu, ni la fin. (11.16)
Je Te vois avec Ta couronne, Ta massue, Ton disque ; et une masse de radiance difficile Ă
discerner, rayonnant de toutes parts comme lâincommensurable lumiĂšre du soleil et le feu
ardent. (11.17)
Je crois que Tu es le SuprĂȘme Ătre (Para-Brahman) quâil faut rĂ©aliser. Tu es lâultime
support de lâunivers. Tu es lâĂternel Ătre (Brahman, AtmĂą, Esprit), et le protecteur de
lâordre Ă©ternel (Dharma). (11.18)
Je Te vois comme puissance infinie, sans commencement, milieu, ou fin ; aux bras
innombrables, dont Tes yeux sont le soleil et la lune, et Ta bouche un feu ardent, Ă©chauffant
lâunivers de Ta radiance. (11.19)
O Seigneur, lâespace entier entre le ciel et la terre dans toutes les directions est empli par
Toi. Voyant Ta forme merveilleuse et terrifiante, les trois mondes (Lokas) tremblent de
frayeur. (11.20)
Des légions de régnants supernaturels entrent en Toi. Certains avec les mains jointes
chantent dans la crainte Tes noms et Tes gloires. Une multitude de Maharsis et de Siddhas
sâĂ©crient en Tâadorant avec de nombreuses louanges. (11.21)
Les Rudras, les Adityas, les Vasus, les SÄdhyas, les ViĆvadevas, les AĆvins, les Maruts, le
UĆmapÄs, les Gandharvas, les YakĆas, les Asuras, et les Siddhas â tous ces ĂȘtres cĂ©lestes Te
regardent dans lâĂ©merveillement. (11.22)
Voyant Ta forme infinie avec une multitude de bouches, yeux, bras, cuisses, pieds,
estomacs, et de terribles dents, les mondes sont terrifiés, et moi aussi, O Seigneur Puissant.
(11.23)
ARJUNA A PEUR DE VOIR LA FORME COSMIQUE
En voyant Ta forme resplendissante et colorée touchant le ciel ; Ta bouche grande ouverte
avec des yeux immenses et brillantes ; jâai peur et ne trouve ni paix ni courage, O KĆĆna.
(11.24)
Voyant Tes bouches, et Tes dents effroyables comme le feux de la dissolution cosmique, je
ne peux plus mâorienter et ne trouve le rĂ©confort. Accorde-moi Ta grĂące ! O Seigneur des
rĂ©gnants cĂ©lestes (Devas), refuge de lâunivers. (11.25)
Les fils de DhĆtarÄstra avec la troupe des rois ; BhÄ«Ćma, Drona, et Karna et aussi les chefs
guerriers de notre camps, se précipitent dans Tes bouches effrayantes avec les dents
terribles. On voit certains pris entre les dents avec leurs tĂȘtes broyĂ©es. (11.26-27)
Ces guerriers du monde des mortels entrent dans Tes bouches flamboyantes comme les
flots impĂ©tueux de nombreuses riviĂšres coulent vers lâocĂ©an. (11.28)
Tous ces gens se précipitent rapidement dans Tes bouches pour la destruction, comme les
mites sâĂ©lancent en grande vitesse dans un feu ardent pour y pĂ©rir. (11.29)
Tu lÚches tous les mondes avec Tes bouches flamboyantes, les dévorants de toutes parts. Ta
radiance puissante remplit lâunivers entier avec Ă©clat et le brĂ»le, O KĆĆĆa. (11.30)
Dis-moi, qui es-Tu dans une telle apparence terrifiante ? A Toi mes salutations, O meilleur
des rĂ©gnants cĂ©lestes (Devas), accorde-moi Ta grĂące ! Je dĂ©sire Te comprendre, O Ătre
Primordial, car je ne connais pas Ta mission. (11.31)
LE SEIGNEUR DĂCRIT SES FORCES
Le SuprĂȘme Seigneur dit : Je suis la mort, le destructeur puissant du monde. Je suis venu
ici pour dĂ©truire tout ce monde. MĂȘme sans ta participation dans la guerre, tous les
guerriers rangĂ©s en armĂ©es opposĂ©s cesseront dâĂȘtre. (11.32)
Par consĂ©quent, lĂšve-toi et acquiers la gloire. Vaincs tes ennemies, et jouis dâun royaume
prospÚre. Tous ces guerriers ont déjà été détruits par Moi. Tu es seulement un instrument,
O Arjuna. (11.33)
Tue Drona, BhÄ«Ćma, Jayadratha, Karna, et dâautres grands guerriers qui ont dĂ©jĂ Ă©tĂ© tuĂ©s
par Moi. Ne crains pas. Tu vaincras certainement tes ennemis dans la bataille ; ainsi,
combats ! (11.34)
LES PRIĂRES DâARJUNA Ă LA FORME COSMIQUE
Samjaya dit : Ayant entendu ces paroles de KĆĆna ; lâArjuna couronnĂ©, tremblant, les
mains jointes, prosternĂ© avec crainte, parla Ă KĆĆna dâune voie entrecoupĂ©e. (11.35)
Arjuna dit : Il est exacte, O KĆĆĆa, le monde trouve ses dĂ©lices et se rĂ©jouit en Te glorifiant.
Les dĂ©mons Ă©pouvantĂ©s sâenfuient dans toutes les directions. Les lĂ©gions des Siddhas se
prosternent et Tâadorent. (11.36)
Comment ne se prosterneraient-ils pas devant Toi, O grande ùme, Toi le créateur
primordial, qui est plus grand que BrahmÄ, le crĂ©ateur des mondes matĂ©riels ? O Seigneur
infini, O Dieu de tous les rĂ©gnants cĂ©lestes (Devas), O demeure de lâunivers, Tu es Sat
(Ăternel) et Asat (Temporel), et le SuprĂȘme Ătre (Para-Brahman) qui se trouve au-delĂ de
Sat et Asat. (Voir aussi 9.19, et 13.12 pour un commentaire) (11.37)
Tu es le Dieu Primordial, la Personne la plus ancienne. Tu es le refuge ultime de tout
lâunivers. Tu es celui qui connaĂźt, lâobjet de la connaissance, et la demeure suprĂȘme.
Lâunivers entier est pĂ©nĂ©trĂ© par Toi, O Seigneur de la forme infinie. (11.38)
Tu es VÄyu, Yama, Agni, Varuna, SasÄnka, et BrahmÄ, de mĂȘme le pĂšre de BrahmÄ.
Salutations Ă Toi mille fois, encore et encore salutations Ă Toi. (11.39)
Mes salutations à Toi, en face de Toi et derriÚre Toi. O Seigneur, mon obéissance à Toi de
toutes parts. Tu es infini en pouvoir et la force incommensurable, Tu pénÚtres tout et Tu es
en tout. (11.40)
Te considĂ©rant imprudemment comme un ami, et ignorant Ta grandeur, je Tâai appelĂ© par
inadvertance O KĆĆna, O YÄdava, O Ami, etc., simplement par affection ou par
inconscience. (11.41)
Quelle que soit la façon dont jâai pu Tâavoir insultĂ© par plaisanterie ; pendant le jeu,
couchĂ© ou assis, ou au repas, seul ou parmi les autres ; O KĆĆna, lâincommensurable, je
Tâimplore pardonne-moi. (11.42)
Tu es le pĂšre de ce monde animĂ© et inanimĂ©, et le plus grand gourou quâon puisse adorer. Il
nâen existe pas un qui puisse TâĂ©galer dans les trois mondes ; et qui pourrait Te surpasser ?
O Ătre incomparable en gloire. (11.43)
Par consĂ©quent, O Seigneur adorable, je cherche Ta misĂ©ricorde en mâinclinant et
prosternant mon corps devant Toi. Comme un pĂšre pour son enfant, un ami pour son ami,
et un Ă©poux pour son Ă©pouse, O Seigneur. (11.44)
Je suis heureux de contempler ce qui nâa jamais Ă©tĂ© vu auparavant, mais mon mental est
accablé par la peur. Par conséquent, O Dieu des régnants célestes (Devas), le refuge de
lâunivers, aie pitiĂ© de moi ; et montre-moi cette forme (Ă quatre bras). (11.45)
IL EST POSSIBLE DE VOIR DIEU DANS LA FORME DE SON CHOIX
Je désire Te voir couronné, portant la massue et le disque dans Ta main. Par conséquent, O
Seigneur aux milliers de bras et la forme universelle, apparais je Tâen supplie avec Ta
forme Ă quatre bras. (11.46)
Le SuprĂȘme Seigneur dit : O Arjuna, Ă©tant satisfait de toi, Je tâai montrĂ© par Mes propres
forces yoguiques, cette forme suprĂȘme, lumineuse, universelle, infinie, et primordiale de
Moi, et qui avant nâa jamais Ă©tĂ© vue par un autre que toi. (11.47)
O Arjuna, ni lâĂ©tude des VĂ©das, ni les sacrifices, ni la charitĂ©, ni les rituels, ni les austĂ©ritĂ©s
sévÚres permettent à quiconque de Me voir dans cette forme cosmique, sauf nul autre que
toi dans ce monde humain. (11.48)
LE SEIGNEUR MONTRE Ă ARJUNA SES QUATRE BRAS ET LA FORME HUMAINE
Ne sois pas perturbé ou déconcerté en voyant une telle forme terrible qui est Mienne.
Libéré de la crainte et le mental joyeux, contemple maintenant la forme à quatre bras.
(11.49)
Samjaya dit : Ayant ainsi parlĂ© Ă Arjuna, KĆĆna rĂ©vĂ©la Sa forme (Ă quatre bras). Et,
assumant Ă nouveau Sa forme humaine douce, le Seigneur KĆĆna, le Grand Ătre, consola
Arjuna si terrifié. (11.50)
Arjuna dit : O KĆĆna, en revoyant Ta gracieuse forme humaine, je suis apaisĂ© et je reviens
Ă moi. (11.51)
LE SEIGNEUR PEUT ETRE VU PAR LA DEVOTION DOUCE
Le SuprĂȘme Seigneur dit : Cette forme (Ă quatre bras) de Moi que tu as vu est vraiment
difficile Ă apercevoir. MĂȘme les rĂ©gnants cĂ©lestes (Devas) aspirent de voir cette forme.
(11.52)
Ma forme (Ă quatre bras) que tu viens de voir, ne peut ĂȘtre aperçue ni par lâĂ©tude des
VĂ©das, ou par lâaustĂ©ritĂ©, ou par des actes de charitĂ©, ou par des pratiques rituelles. (Voir
aussi KaU 2.23) (11.53)
Ce nâest que par une dĂ©votion inĂ©branlable, que Je peux ĂȘtre vu dans cette forme, quâon
peut Me connaĂźtre vraiment, et aussi Mâatteindre, O Arjuna. (11.54)
Celui qui accomplit tous travaux pour Moi, et qui Me voit comme le suprĂȘme but ; qui est
Mon dĂ©vot, qui nâa pas dâattachement, libre de toute inimitiĂ© envers les ĂȘtres ; Mâatteins, O
Arjuna. (Voir aussi 8.22) (11.55)
Ainsi prend fin le onziÚme chapitre intitulé «La Vision de la Forme Cosmique» dans les
UpaniĆad de la BhagavadgÄ«tÄ, lâĂ©criture de yoga, touchant la science de lâAbsolu dans la
forme du dialogue entre SrÄ«kĆĆna et Arjuna.
Le mirage ou lâillusion que les choses du monde existent par elles-mĂȘmes et se soutiennent,
quâelles vivent et existent en dehors du SuprĂȘme Ătre est impensable.
O Toi aux yeux pareils aux feuilles de lotus.
La grandeur de la rĂ©vĂ©lation du SuprĂȘme Absolu est accordĂ©e Ă Arjuna parce quâil
comprend la signification rĂ©elle du processus et de la destinĂ©e cosmique. Cette vision nâest
pas un mythe ou une légende, mais une expérience profonde. Voici les effets que la vision
du SuprĂȘme produit dans lâĂąme. Elle donne la quiĂ©tude, la lumiĂšre, une joie intĂ©rieure
inexplicable propre Ă lâĂ©tat de gloire, la suavitĂ©, lâamour, lâhumilitĂ©, lâattrait vers le
SuprĂȘme Absolu, lâĂ©lĂ©vation du mental dans le Divin, suivant Son bon plaisir.
Une vision intérieure profonde.
Les yeux humains ne voient que les formes extĂ©rieures ; lâĂąme intime nâest vue que par
lâĆil du mental (esprit). Il est un type de connaissance que nous pouvons acquĂ©rir par nos
seuls efforts : la connaissance fondĂ©e sur lâactivitĂ© des sens et lâĂ©laboration intellectuelle.
Et, une autre sorte de connaissance est possible lorsque nous sommes sous lâinfluence de la
grùce, ainsi ouvert à la perception directe des réalités divines. La vision divine est un don
du SuprĂȘme Absolu, et se produit au moment mĂȘme oĂč elle est prĂ©sente Ă lâimagination,
confĂšre et infuse Ă lâĂąme les connaissances, lâamour et la suavitĂ© qui plait Ă Dieu. Cette
vision nâest pas une construction mentale mais la rĂ©vĂ©lation dâune vĂ©ritĂ© qui transcende
lâintelligence finie.
Câest la transfiguration de KĆĆĆa oĂč Arjuna voit toutes les crĂ©atures du monde visible et
invisible unies dans la Forme Divine. LâĂvangile relate une transfiguration semblable
(Matthieu 17.1-8 ; Marc 9.2-10 ; Luc 9.28-36), celle de Jésus, au bas de la montagne entouré
de trois apÎtres, Pierre, Jacques et Jean son frÚre. Jésus, transfiguré, Il le fit avec deux
prophĂštes de lâAncien Testament, MoĂŻse et Elie. On y trouve aussi des remarques
identiques comme dans la Gßtù 11, notamment, lorsque la transfiguration fut terminée,
JĂ©sus sâapprochant des ses disciples, dit : « Relevez-vous, et soyez sans crainte. »
« QuÊ autem sunt, a Deo ordinata sunt » (ce qui existe a été ordonné par Dieu) (Bible,
Rom. 13.1) Arjuna a la vision de lâUn dans le multiple et du multiple dans lâUn. Toutes
choses demeurent ce quâelles sont et pourtant toutes sont changĂ©es. Il y a Ă©tonnement de
voir disparaĂźtre le paysage du monde quotidien, fondu dans les autres. De toute maniĂšre, la
vision est une rĂ©vĂ©lation du SuprĂȘme Absolu, le potentiel de toute vie terrestre.
Mode de salutation des hindous. Ici, Arjuna prie et adore.
Les Uragas sont censĂ©s ĂȘtre des serpents ; mais ceci doit se rapporter aux grands MaĂźtres
spirituels (de Sagesse), appelés souvent serpents.
La vision du SuprĂȘme Ătre Ă©tend lâhorizon du yogi ou dĂ©vot, le transportant au delĂ des
confusions et des souffrances de la terre. NĂ©anmoins, la crĂ©ation du SuprĂȘme Ătre, nous le
savons, ne se borne pas Ă la planĂšte âTerreâ, qui nâest quâune portion insignifiante du
cosmos. Arjuna y voit lĂ toute une hiĂ©rarchie immense dâhabitants cĂ©lestes, qui au fait
remplit tout lâunivers, par la seule grĂące du Seigneur. LâaccĂšs de la vision spirituelle dans
la vision humaine amĂšne Ă des agrandissements de la vision du SuprĂȘme Absolu.
Les légions spirituelles adorent la gloire du Seigneur, et sont ainsi perdues dans une
contemplation extatique, et comme disent les Chrétiens au rite Eucharistique : « Saint !
Saint ! Saint, le Seigneur, Dieu de lâunivers ! Le ciel et la terre sont remplis de ta gloire. »
Les ĂȘtres aveuglĂ©s par leur ignorance, prenant le monde visible comme la seule rĂ©alitĂ© se
ruent Ă leur destruction, pendant que le SuprĂȘme Ătre le permet, parce quâils subissent les
effets de leurs propres actes. Vouloir un acte câest aussi vouloir ses consĂ©quences. Nos
activitĂ©s libres nous astreignent Ă leurs rĂ©sultats. Parce que cette loi de cause et dâeffet est
lâexpression de la conscience divine, on peut dire que le Divin applique la loi. KĆĆĆa par Sa
conception de la forme universelle indique que le cosmos tout entier dans son immensité, sa
beautĂ© et sa terreur aussi ; avec ses dieux, ses Ăąmes Ă©lues, ses animaux, ses plantes, est lĂ
dans la plĂ©nitude de la vie du SuprĂȘme Ătre. Dieu ne peut pas se mouvoir hors de Lui-
mĂȘme, ayant tout en Lui. Nous, les ĂȘtres humains, dont la pensĂ©e va vers la logique,
sommes attirés tantÎt par un objet, tantÎt par un autre. Nous pensons consécutivement,
mais lâintelligence suprĂȘme connaĂźt tout dans lâunitĂ©. Elle est hier, aujourdâhui et demain.
Le SuprĂȘme Ătre assume la responsabilitĂ© Ă la fois de la crĂ©ation et de la destruction. La
GĂźtĂą ne soutient pas la doctrine familiĂšre des croyances Abrahamiques (Adamiques) que,
Dieu étant responsable de tout ce qui est bien, la responsabilité de tout ce qui est mal repose
ainsi sur Satan. Si Dieu est responsable de lâexistence dans ce monde qui est Ă©phĂ©mĂšre, Il
est aussi de tout ce que la vie ici-bas implique comme lâexistence elle-mĂȘme, la crĂ©ation,
lâangoisse et finalement la mort. Dieu a la maĂźtrise du temps parce quâIl est extĂ©rieur ; nous
aussi obtiendrons la maĂźtrise du temps si nous nous Ă©levons au-dessus du temps et du
tangible. Ătant la force intĂ©rieure, le SuprĂȘme Ătre voit plus loin que nous, car il sait
comment tous les événements sont conduits, et manifestement Il montre à Arjuna que des
causes mises en mouvement pendant des années tendent maintenant vers leurs effets
naturels et que ceux-ci ne peuvent ĂȘtre gĂȘnĂ©s par aucune action prĂ©sente. La destruction de
ses ennemis est irrévocablement décidée par des actes commis il y a longtemps. Toute
protestation, tout effort de volontĂ© propre pour sây opposer, sont vains.
Le SuprĂȘme Ătre prĂ©voit et ordonne toutes choses, et Arjuna doit nâĂȘtre que lâinstrument
entre les mains du SuprĂȘme Absolu, qui poursuit ses desseins au moyen dâune immense
Ă©volution. Arjuna sâabuse lui-mĂȘme, sâil croit vraiment quâil peut agir suivant son propre
jugement imparfait ! LâĂąme personnelle ne peut pas agir Ă lâencontre des avantages
spirituels. En refusant de prendre les armes, Arjuna est coupable de soupçon, mais
seulement Ă lâoccasion. (Voir aussi 18.58) KĆĆĆa semble soutenir la doctrine Calviniste
(ChrĂ©tienne) de la prĂ©destination en soulignant la complĂšte impuissance et lâinsignifiance
de lâindividu, la futilitĂ© de sa volontĂ© et de son effort. La dĂ©cision est dĂ©jĂ prise, Arjuna ne
peut absolument rien faire pour la changer. Il est un instrument impuissant entre les mains
de Dieu. Et, pourtant, nous trouvons aussi cette autre thĂšse que Dieu nâest pas une volontĂ©
arbitraire et changeante mais quâil est absolument amour et justice. Comment rĂ©concilier
ces deux thĂšses. La notion thĂ©ologique qui est exprimĂ©e ici, est celle dâun Dieu agissant seul
et ayant tout prévu, qui suscite en nous un sentiment de dépendance complÚte envers Lui. Il
suffit que nous allons considĂ©rer le processus cosmique dans son entiĂšretĂ© comme nâĂ©tant
autre chose que le dĂ©veloppement dâun plan prĂ©dĂ©terminĂ©, de quelque chose qui est dĂ©jĂ
prĂȘt. On ne nie pas ici lâimprĂ©visibilitĂ© des actes humains, qui nâaffirme le sens profond
dâune Ă©ternitĂ© en laquelle tous les moments du temps, passĂ©s, prĂ©sents et futurs, sont
prĂ©sents au SuprĂȘme Esprit. DerriĂšre ce monde de lâespace et du temps, lâinterpĂ©nĂ©trant
tout entier, est le plan et le dessein créateur de Dieu. Il nous faut comprendre ce plan
suprĂȘme et mettre notre satisfaction Ă Le servir dans le dĂ©tachement, et le service
désintéressé.
Dans une extase dâadoration et dâangoisse aussi, Arjuna exalte le SuprĂȘme Seigneur. Il voit
non seulement la puissance temporelle de ce monde et du temps, mais aussi la Présence
Divine, et cette unique réalité éternelle qui gouverne le cosmos. Si la vie sans morale
engendre la froide solitude et lâincertitude, la foi en Dieu et notre Ă©tat dâĂȘtre en lui
procurent lâĂ©panouissement et lâextase, pouvant laisser parler lâĂąme dans une totale
contemplation. Lorsque lâĂąme a dĂ©jĂ formĂ© lâhabitude de raisonner sur les mystĂšres de la
vie spirituelle en sâaidant de lâimagination, en se servant des idĂ©es corporelles, aprĂšs avoir
Ă©tĂ© portĂ©e dâobjet en objet et de connaissance en connaissance, lorsque aprĂšs avoir acquis
une petite partie de ce quâelle souhaite, elle sâĂ©lĂšve jusquâau CrĂ©ateur. Celui-ci prend
lâĂąme par la main.
Le SuprĂȘme Absolu est partout, comme cette belle priĂšre le dit si bien, et qui a
spirituellement transformĂ© en 1963 lâauteur de cette cet ouvrage :
La lumiĂšre de Dieu mâentoure;
Lâamour de Dieu mâinonde;
La puissance de Dieu me protĂšge;
La présence de Dieu me garde;
LĂ oĂč je suis Dieu est !
Il nâest aucun lieu oĂč Il nâest pas (Voir MuU, II, 2. 11 et ChU VII, 25) On trouve souvent
rĂ©pĂ©tĂ© dans les Ă©critures, cette vĂ©ritĂ© que nous sommes les crĂ©atures du SuprĂȘme et quâIL
habite en chacun de nous.
La vision de Dieu dĂ©termine chez le yogi ou dĂ©vot un profond sentiment dâindignitĂ© et de
péché.
Il ne faut pas considĂ©rer le SuprĂȘme Absolu comme un mystĂšre transcendant, mais comme
une réalité toute proche de nous. Dieu conçu comme un PÚre est non seulement une
conception familiÚre Chrétienne mais Hindoue aussi.
La lumiÚre qui brille à jamais par delà les mondes est aussi la lumiÚre intérieure,
lâinstructeur et lâami prĂ©sent dans son propre cĆur.
Câest la forme de ViĆĆu dont KĆĆna est une incarnation, quâArjuna lui demande de
reprendre.
Cette vision nâest pas le but final de la quĂȘte humaine, autrement la GĂźtĂą sâachĂšverait ici.
La vision passagĂšre doit devenir expĂ©rience permanente. Lâextase ou samÄdhi nâest ni la
fin, et surtout pas un élément essentiel de la vie yoguique. Les éclairs lumineux, les envois
extatiques, doivent ĂȘtre transmuĂ©s en foi permanente.
La GĂźtĂą ne sâachĂšve pas aprĂšs la terrible expĂ©rience de la vision spirituelle. Arjuna a perçu
le grand secret de lâAtmĂą transcendant, Ă la fois source de tout ce qui existe et pourtant
immuable. Le SuprĂȘme Absolu est lâarriĂšre plan de lâincessante procession des choses
finies. Arjuna a vu cette vérité, et il lui reste à vivre en elle par la transmutation de tout son
ĂȘtre en une acceptation volontaire de la VolontĂ© Divine. Une vision passagĂšre, si rĂ©els et
permanents quâen soient les effets, nâest certainement pas le but final. Câest la puissance
divine qui Ćuvre, et cette Ćuvre surpasse toute intelligence.
Chapitre 12
LA VOIE DE DĂVOTION
DOIT- ON ADORER UN DIEU PERSONNEL OU UN DIEU IMPERSONNEL ?
Arjuna dit : De ces dĂ©vots dâune fermetĂ© constante qui Tâadorent (en tant que KĆĆna, Ton
aspect personnel), et ceux qui adorent Ton aspect impersonnel, lâĂternel Ătre (Brahman) ;
lesquels ont la meilleure connaissance du yoga ? (12.01)
Le SuprĂȘme Seigneur dit : Ces dĂ©vots avec un zĂšle constant (Bhaktas) qui Mâadorent avec
une foi suprĂȘme en fixant leur mental sur Moi en tant que Dieu personnel, Je les considĂšre
les plus parfaits yogis. (Voir aussi 6.47) (12.02)
Ceux qui adorent lâĂternel Ătre (Brahman) immuable, indĂ©finissable, invisible,
omniprésent, inconcevable, inchangé, et immobile ; restreignant tous les sens, en toutes
circonstances indifférents, engagés dans la bienveillance des créatures, ceux-la aussi
Mâatteignent. (12.03-04)
LES RAISONS MENANT A LâADORATION DâUNE FORME PERSONNELLE DE
DIEU
La rĂ©alisation du Soi est plus difficile pour ceux qui fixent leur mental sur lâĂternel Ătre
(Brahman) impersonnel et non manifesté, car la compréhension du non manifesté est
difficile Ă atteindre par les ĂȘtres incarnĂ©s. (12.05)
Mais ceux qui Mâadorent avec une dĂ©votion inĂ©branlable Me considĂ©rant comme leur Dieu
personnel, Mâoffrant toutes actions, se dĂ©diant Ă Moi comme le SuprĂȘme, mĂ©ditant sur
Moi ; et, qui fixent leur pensées sur Ma forme personnelle, Je les sauverai rapidement du
monde qui est un océan de mort et de transmigration, O Arjuna. (12.06-07)
QUATRE VOIES VERS DIEU
Par conséquent, fixe ton mental sur Moi, et laisse ton intellect demeurer en Moi seul (par la
mĂ©ditation et la contemplation). AprĂšs, tu mâatteindras certainement. (12.08)
Si tu es incapable de fixer ton mental fermement sur Moi, cherche alors de Mâatteindre, O
Arjuna, par la pratique dâune discipline spirituelle quelconque (SÄdhanÄ) qui tâest
convenable. (12.09)
Si tu es incapable de rĂ©aliser une des disciplines spirituelles (SÄdhanÄ), veille alors Ă
accomplir ton devoir pour Moi (comme instrument, faisant toutes les actions uniment pour
Moi, sans motifs intéressés). (Voir aussi 9.27, 18.46) (12.10)
Si tu es incapable de travailler pour Moi, alors prend simplement refuge en Ma volonté, et
renonce (lâattachement Ă , et lâanxiĂ©tĂ© pour) aux fruits du travail le mental maĂźtrisĂ© et
serein (en apprenant dâaccepter tous les rĂ©sultats comme une grĂące (PrasÄda) venant de
Dieu). (12.11)
KARMA-YOGA EST LA MEILLEURE VOIE POUR COMMENCER
La connaissance des écritures est meilleure que la pratique rituelle ; la méditation est
meilleure que la connaissance scripturaire ; TyÄga, ou la renonciation (Ă lâattachement
égoïste) aux fruits du travail est meilleure que la méditation ; car, la paix suit
immĂ©diatement TyÄga. (Voir plus sur la renonciation aux versets 18.02, et 18.09) (12.12)
LES ATTRIBUTS DâUN DĂVOT
Celui qui est sans haine envers tous les ĂȘtres, qui est aimable et compatissant, libre de la
notion du « je » et du « moi », qui reste égal dans la souffrance et le plaisir, qui pardonne ;
et le yogi qui est toujours satisfait, qui a maßtrisé son mental, se réservant une conviction
ferme, dont le mental et lâintellect sont abandonnĂ©s Ă Moi, qui est Mon dĂ©vot, Mâest cher.
(12.13-14)
Celui de qui le monde nâest pas agitĂ© et qui nâest pas agitĂ© par les autres, qui est libĂ©rĂ© de la
joie, de lâenvie, de la peur, et de lâanxiĂ©tĂ©, lui aussi Mâest cher. (12.15)
Celui qui est sans dĂ©sir, pure, habile, impartial, et nâest pas affligĂ© par lâanxiĂ©tĂ© ; qui
renonce Ă ĂȘtre lâauteur de toute action ; un tel dĂ©vot Mâest cher. (12.16)
Celui qui ne se réjouit ni se chagrine, qui ne chérit ni déteste, qui a renoncé au bien et au
mal, et qui est empli de dĂ©votion, Mâest cher. (12.17)
Celui qui reste le mĂȘme envers lâami ou lâennemi, dans lâhonneur ou le dĂ©shonneur, le froid
ou le chaud, dans le plaisir ou la douleur ; qui est libre de tout attachement ; qui est
indiffĂ©rent Ă la censure ou lâĂ©loge, qui garde le silence, qui est satisfait avec ce quâil
possĂšde, qui nâest pas attachĂ© Ă un lieu (un pays, ou une maison), qui garde la sĂ©rĂ©nitĂ©, et
est plein de dĂ©votion, cette personne Mâest cher. (12.18-19)
ON DEVRAIT SINCEREMENT ESSAYER DE DEVELOPPER DES
QUALITES DIVINES
Mais ces dĂ©vots fidĂšles, qui font de Moi leur but suprĂȘme et suivent (ou essaient de
développer sincÚrement) le susmentionné nectar des valeurs morales, Me sont trÚs chers.
(12.20)
Ainsi prend fin le douziĂšme chapitre intitulĂ© «La Voie de DĂ©votion» dans les UpaniĆad de la
BhagavadgÄ«tÄ, lâĂ©criture de yoga, touchant la science de lâAbsolu dans la forme du dialogue
entre SrÄ«kĆĆna et Arjuna.
Que ce soit en Orient ou en Occident, la plupart des mystiques cherchent lâunion avec le SuprĂȘme Absolu,
unique, impersonnel, et sans relation avec lâunivers bien que tout soit crĂ©e par Lui. Dâautres cherchent lâunitĂ©
avec le Dieu personnel manifesté dans le monde humain et la nature. On se demanderait, lesquels on la plus
haute connaissance du Yoga ? Allons-nous renoncer Ă toutes les manifestations et tendre vers lâimmuable
inmanifestĂ© ou bien nous consacrer Ă la forme manifestĂ©e, le Seigneur KĆĆĆa ou autres dieu hindous, MoĂŻse,
Bouddha, JĂ©sus Christ, et jâen passe, pour Ćuvrer Ă leur service ? Est-ce le SuprĂȘme Absolu que nous devons
adorer ? Le verset 2, donne la rĂ©ponse. Le Seigneur KĆĆĆa rĂ©pond clairement que ceux qui adorent le
SuprĂȘme Ătre dans Sa forme manifestĂ©e ont une plus haute science du yoga. La Bhagavad GĂźtĂą affirme que le
SuprĂȘme Absolu est aussi le Dieu personnel qui crĂ©e le monde perceptible au moyen de Sa nature (PrakĆti). Il
rĂ©side dans le cĆur de tout ĂȘtre, Il jouit des sacrifices (le dĂ©tachement, le service dĂ©sintĂ©ressĂ©, les rituels), et Il
est le Seigneur de tous les sacrifices, aussi de ceux qui se donnent eux-mĂȘmes comme sacrifice (vie consacrĂ©e).
« Car Je, le SuprĂȘme Ătre (Para-Brahman), suis le seul bĂ©nĂ©ficiaire de tous les cultes sacrificiels (Yajna), et le
Seigneur de lâunivers. Mais Mon peuple ne connaĂźt pas Ma vraie nature transcendantale. Câest pour cela
quâils tombent (dans les cycles rĂ©pĂ©tĂ©s de naissance et de mort). » (GĂźtĂą 9.24) Il incite nos cĆurs Ă la dĂ©votion
et Il exauce nos priĂšres. « Quelle que soit la divinitĂ© (en empruntant nâimporte quel nom, forme, et mĂ©thode)
quâon adore avec foi, Je fais que cette foi soit ferme envers cette divinitĂ©. DotĂ©s dâune foi stable, ils sâengagent
dâadorer cette divinitĂ©, et obtiennent leurs souhaits par cette divinitĂ©. En vĂ©ritĂ©, ces souhaits sont accordĂ©s
par Moi seul. » (GĂźtĂą 7.21-22) Il entre en relation personnelle avec nous dans lâadoration et la priĂšre.
Angélus Silesius (Johannes Scheffler), mystique polonais (1624-1677), qui répéta les idées
de MaĂźtre Eckhart, croyait lui aussi au SuprĂȘme Absolu comme le Dieu cosmique, et Le
plaça ainsi :
Dieu est mon centre quand je Lâenferme en moi ;
Et ma circonférence lorsque je me fonds en Lui.
Je sais que sans moi
Dieu ne sait vivre en aucun moment ;
Si je devrais mourir (dâaprĂšs les doctrines Abrahamiques sur la mort), ainsi IL
Ne serait plus survivreâŠ
En moi est Dieu le feu
Et moi en Lui la lumiĂšre ;
En commun est notre vie,
A part nous ne pourrions vivre.
(La doctrine de la renaissance explique beaucoup de choses)
La recherche du Dieu transcendant est plus difficile que lâadoration du SuprĂȘme Seigneur.
Dans lâAvadhĆ«tagĂźtĂą, DattÄtreya on lit : « Comment puis-je me prosterner devant celui qui
est sans forme, indiffĂ©renciĂ©, pure bĂ©atitude et indestructible, qui a de Lui-mĂȘme au
moment de Lui-mĂȘme et en Lui-mĂȘme rempli toutes choses. » Le SuprĂȘme Ătre nâoffre pas
une prise facile au mental, et la voie est plus difficile. Nous parvenons au mĂȘme but plus
facilement et plus naturellement par la voie de la dévotion au Dieu personnel en nous
tournant vers Lui par tous nos moyens : connaissance, volonté et sentiment.
Le SuprĂȘme Ătre est celui qui dĂ©livre et qui sauve. Quand nous fixons notre coeur et notre mental en Lui, Il
nous arrache de lâocĂ©an de la mort, et nous accorde le NirvÄna, lâexistence infinie. Le sentier de la dĂ©votion
convient mieux Ă celui dont la nature nâest pas plongĂ©e dans le stricte ascĂ©tisme. Il dĂ©pend, dâailleurs, de
notre tempérament que nous adoptions la voie de dévotion, la voie des actions, ou la voie du renoncement. Il
est Ă©vident que le choix dâune des trois voies, nâexclut pas les autres. Les trois voies ont rapports aux trois
mondes du verset suivant : O Seigneur, lâespace entier entre le ciel et la terre dans toutes les directions est
empli par Toi. Voyant Ta forme merveilleuse et terrifiante, les trois mondes (Lokas) tremblent de frayeur. »
(Gßtù 11.20) Les trois voies sont unifiés dans le corps du Seigneur : « O Arjuna, vois maintenant la création
entiĂšre â animĂ©e et inanimĂ©e, et aussi tout ce que tu dĂ©sires voir, toutes unifiĂ©s en Mon corps. » (GĂźtĂą 11.07)
SÄdhana : Nâimporte quelle pratique spirituelle qui mĂšne Ă la rĂ©alisation du Soi. Par
exemple, si une condition spirituelle nâapparaĂźt pas directement ou sâavĂšre difficile, il nous
faut essayer une autre méthode pour atteindre le but, ou choisir une autre pratique
spirituelle, par exemple une des trois voies déjà citées. Néanmoins, nous ne pouvons jamais
perdre courage, en apprenant à pratiquer la concentration pour nous préparer
graduellement Ă diriger fermement notre mental vers le SuprĂȘme Absolu. Concernant la
concentration, le mot sanskrit est Dharana dont la racine veut dire maintenir ou supporter.
Il signifie canaliser le cours du mental vers un seul point. On commence en général par se
concentrer sur un objet grossier ou subtil. Ensuite, le yogi peut méditer sur la pensée elle-
mĂȘme et sur le Soi. Pour chacun de ces cas, les Ă©tapes suivantes sont DhyĂąna (la mĂ©ditation)
et Samadhi (la contemplation). Pour dĂ©buter, le processus est le mĂȘme que pour la
concentration sur un objet grossier. Pour pratiquer la concentration, le yogi ou dévot
choisit un objet, une fleur par exemple, et il concentre toute son attention sur elle. Sa
dimension, sa couleur, sa forme, son poids et tous ses autres attributs doivent ĂȘtre rĂ©duits Ă
un point que le yogi ou dévot doit garder devant lui comme idée. Toute pensée particuliÚre
sur la couleur de la fleur ou sa forme ou sur nâimporte quoi dâautre dĂ©clencherait une
succession dâidĂ©es que le yogi ou dĂ©vot dĂ©sire Ă©viter. La tradition yoguique veut que le
meilleur point de concentration pour le mental soit la forme du MaĂźtre Spirituel qui
reprĂ©sente le Seigneur, le centre de lâidĂ©ation cosmique. Sâil nâa pas de MaĂźtre Spirituel,
sauf la GĂźtĂą en tant que sainte Ă©criture, il se concentre sur la forme de lâune des
Incarnations du SuprĂȘme Seigneur (KĆĆĆa, MoĂŻse, Bouddha, le Christ, etc. et mĂȘme sur le
mot sacrĂ© OM). OM (AUM) reprĂ©sentant la VĂ©ritĂ© peut ĂȘtre visualisĂ© comme Ă©crit dans le
cĆur du yogi ou dĂ©vot. Ces pratiques permettent dâatteindre des degrĂ©s de conscience plus
élevés.
Si la concentration est difficile, en raison des tendances extériorisantes du mental ou en
raison des circonstances de notre vie, toutes les actions doivent ĂȘtre accomplies par amour
pour le Seigneur. Ainsi le yogi ou dĂ©vot sâĂ©veille Ă la conscience de la rĂ©alitĂ© Ă©ternelle.
La dĂ©votion est supĂ©rieure Ă la connaissance, et lâaction dĂ©sintĂ©ressĂ©e est supĂ©rieure Ă la
dĂ©votion. Celui qui comprend ce principe du VĂ©danta doit ĂȘtre considĂ©rĂ© comme le
meilleur yogi. La dévotion, la méditation et la concentration sont plus difficiles que le
renoncement aux fruits de lâaction. Ce renoncement dĂ©truit les causes de conflit et produit
un état de calme et de paix intérieure qui est le vrai fondement de la vie spirituelle. Bhakti
Yoga conduit à la dépendance de la connaissance et de la méditation, à la dévotion du coeur
et Ă la consĂ©cration totale de toutes les Ćuvres au SuprĂȘme Absolu.
Lorsque nous voyons le SuprĂȘme Absolu en toutes choses, surviennent lâĂ©galitĂ© dâĂąme,
lâabandon des dĂ©sirs Ă©goĂŻstes, le don de notre ĂȘtre entier au SuprĂȘme Esprit qui demeure
dans le cĆur, et lâamour pour tous les ĂȘtres. Une fois ces qualitĂ©s prĂ©sentes, notre dĂ©votion
est parfaite, et nous sommes les yogis ou dĂ©vots de Dieu. Miracle dâamour ! Le SuprĂȘme
Absolu, dans Sa SaintetĂ©, veut se communiquer Ă mon Ăąme, et sâunir Ă mon Ă©tat dâĂȘtre !
Allons nous rassasier à ce prasùda céleste ! Allons nous consumer dans ce brasier ardent,
pour devenir un mĂȘme esprit avec le SuprĂȘme Seigneur ! Qui nous arrĂȘte ? Qui pourrait
nous en détourner ?
Chapitre 13
LA CRĂATION ET LE CRĂATEUR
LA THEORIE DE LA CREATION
Arjuna dit : La Nature matĂ©rielle (PrakĆti) et lâĂtre Spirituel (PuruĆa), que sont le champ
et le connaisseur du champ, le savoir et lâobjet du savoir, voilĂ ce que jâaimerais savoir, O
KĆĆna.
Le SuprĂȘme Seigneur dit : O Arjuna, ce corps physique, lâunivers en miniature, est aussi
appelé le champ ou la création. Celui qui connaßt la création est appelé le créateur (ou
Atmù) par les voyants de la vérité. (13.01)
O Arjuna, sache que Je suis le créateur de toute la création. La vraie connaissance du
créateur et de la création est, selon Moi la connaissance transcendantale (ou
métaphysique). (13.02)
Ce quâest la crĂ©ation, quelle est sa nature, quelles sont ses transformations, dâoĂč vient-elle,
qui est le créateur, et quels sont Ses pouvoirs, entends tout briÚvement de Moi. (13.03)
Les voyants ont indépendamment décrit la création et le créateur de multiples façons par
des hymnes VĂ©diques, et aussi par les versets convaincants et conclusifs de la Brahma-
SĆ«tra. (13.04)
La Nature matĂ©rielle primaire (Ădi PrakĆti ou Avyakta), lâintelligence cosmique (Mahat),
la conscience « je » ou lâego, les cinq Ă©lĂ©ments de base, les dix organes, le mental, les cinq
objets des sens ; ainsi que le désir, la haine, le plaisir, la douleur, le corps physique, la
conscience, et la dĂ©termination â tel est briĂšvement la description du champs entier avec ses
transformations. (Voir aussi 7.04) (13.05-06)
LES QUATRE NOBLES VERITES LA MĂTHODE VERS LE NIRVANA
LâhumilitĂ©, la modestie, la non-violence, le pardon, lâhonnĂȘtetĂ©, le service rendu au gourou,
la puretĂ© (en pensĂ©es, paroles et actions), la fermetĂ©, la maĂźtrise de soi ; lâaversion envers
les objets des sens, lâabsence de lâego, la rĂ©flexion constante sur la douleur et la souffrance
inhérentes à la naissance, la vieillesse, la maladie, et la mort ; (13.07-08)
Le dĂ©tachement, lâabsence de dĂ©pendance Ă lâĂ©gard du fils, lâĂ©pouse, le foyer, etc. ;
lâĂ©quanimitĂ© infaillible devant les Ă©vĂ©nements dĂ©sirables et indĂ©sirables ; et une dĂ©votion
inĂ©branlable envers Moi par une contemplation ne visant quâun seul but, le goĂ»t pour la
solitude, la répugnance pour les foules et les commérages ; la fermeté dans l'acquisition de
la connaissance de lâĂternel Ătre (Brahman), en voyant partout le SuprĂȘme Ătre
omniprĂ©sent (Par-Brahman, KĆĆna) â telle est la connaissance. Le contraire est
lâignorance. (13.09-11)
DIEU EST EXPLIQUĂ EN PARABOLES, ET PAS AUTREMENT
Je vais complĂštement te dĂ©crire lâobjet de la connaissance, sachant quâelle procure
lâimmortalitĂ© Ă lâhomme. Le SuprĂȘme Ătre (Para-Brahman) sans commencement, dit-on,
est ni Ă©ternel (Sat), ni temporel (Asat). Voir aussi 9.19, 11.37, et 15.18) (13.12)
LâĂternel Ătre (Brahman) a partout des mains, des pieds, des yeux, des tĂȘtes, des bouches,
et des oreilles, car Il est immanent et omniprésent. (Voir aussi RV 10.81.03, ShU 3.16)
(13.13)
Il perçoit tous les objets des sens sans les organes physiques des sens ; détaché, et cependant
de tout le support ; dĂ©pourvu des trois modes (Gunas) de la Nature matĂ©rielle (PrakĆti), et
nĂ©anmoins jouissant des Gunas de PrakĆti (en devenant une entitĂ© vivante (JĂźva)) (13.14)
Il est Ă la fois intĂ©rieur et extĂ©rieur des tous les ĂȘtres, animĂ©s et inanimĂ©s. Il est
incomprĂ©hensible Ă cause de Sa subtilitĂ©. Et, par Son omniprĂ©sence, Il est trĂšs proche â
rĂ©sidant dans la psychĂ© intĂ©rieure de lâhomme, et pourtant trĂšs loin â dans la Demeure
SuprĂȘme (Parama-dhÄma). (13.15)
Il est indivis, et pourtant Il semble existĂ© comme si divisĂ© parmi les ĂȘtres. Il apparaĂźt en tant
quâobjet de la connaissance comme : BrahmÄ, le crĂ©ateur ; ViĆnu, le support ; et Ćiva, le
destructeur de tous les ĂȘtres. (Voir aussi 11.13, et 18.20) (13.16)
Para-Brahman, la Personne SuprĂȘme, est la source de toutes les lumiĂšres. On le dit quâIl se
trouve au-delĂ les tĂ©nĂšbres (de lâignorance de MÄyÄ). Il est la connaissance du Soi, lâobjet
de la connaissance du Soi, et Il siĂšge dans la psychĂ© intĂ©rieure (ou, le cĆur causal comme
conscience (Voir aussi 18.61)) de tous les ĂȘtres. On Le rĂ©alise par la connaissance du Soi
(JnÄna, TÄratamya- JnÄna, Brahman-vidyÄ). (Voir aussi 15.06 et 15.12, et MuU 3.01.07,
ShU 3.08) (13.17)
Ainsi la crĂ©ation autant que la connaissance et lâobjet de la connaissance ont Ă©tĂ© briĂšvement
dĂ©crits par Moi. Ayant compris ceci, Mon dĂ©vot atteint Ma suprĂȘme demeure. (13.18)
UNE DESCRIPTION DE LâESPRIT SUPREME, DE LâESPRIT, DE LA
NATURE MATERIELLE, ET DES ĂMES INDIVIDUELLES
Sache que la Nature matĂ©rielle (PrakĆti) et lâĂtre Spirituel (PuruĆa) sont tous deux sans
commencement. Toutes les manifestations et les trois dispositions du mental et de la
matiĂšre appelĂ©es modes ou Gunas sont nĂ©es de PrakĆti. PrakĆti, dit-on, est la cause de
production du corps physique et des organes (de perception et dâaction). PuruĆa
(Conscience), dit-on, est la cause de lâexpĂ©rience du plaisir et de la douleur. (13.19-20)
LâĂtre Spirituel (PuruĆa) jouit des trois modes (Gunas) de la Nature matĂ©rielle (PrakĆti) en
sâassociant avec PrakĆti. Lâattachement aux Gunas (due Ă lâignorance causĂ©e par le Karma
prĂ©cĂ©dent) est la cause de la naissance de lâentitĂ© vivante (JÄ«va) en de bonnes ou mauvaises
matrices. (13.21)
LâĂternel Ătre (Brahman, AtmĂą, Esprit) dans le corps est aussi appelĂ© le tĂ©moin, le guide,
le soutien, le sujet de lâexpĂ©rience, le grand Seigneur et aussi le Soi SuprĂȘme. (13.22)
Ceux qui comprennent vraiment lâĂtre Spirituel (PuruĆa) et la Nature matĂ©rielle (PrakĆti)
avec ses trois modes (Gunas) nâont plus Ă renaĂźtre quel que soit leur maniĂšre de vie. (13.23)
Certains perçoivent la super-Ăąme (ParamÄtmÄ) dans leur psychĂ© intĂ©rieure par le mental et
lâintellect qui ont Ă©tĂ© purifiĂ©s soit par la mĂ©ditation, ou par la connaissance mĂ©taphysique,
ou par Karma-yoga. (13.24)
LA FOI SUFFIT POUR ATTEINDRE NIRVANA
Dâautres, nĂ©anmoins, ne connaissent pas les yogas de la mĂ©ditation, la connaissance, et des
oeuvres; mais ils accomplissent le culte divin avec foi suivant les Ă©critures des saints et des
sages. Ils transcendent aussi la mort en vertu de leur foi ferme Ă ce quâils ont entendu.
(13.25)
Tout ce qui naĂźt - animĂ© ou inanimĂ© â comprend les comme Ă©tant nĂ©s de lâunion entre le
champ (PrakĆti ou matiĂšre) et le champ du connaisseur (PuruĆa ou Esprit), O Arjuna.
(Voir aussi 7.06) (13.26)
Celui qui voit le mĂȘme Ă©ternel et SuprĂȘme Seigneur demeurant en tant quâEsprit (AtmĂą),
Ă©quitablement prĂ©sent dans chaque ĂȘtre mortel, voit vraiment. (13.27)
Percevant lâunique et mĂȘme Seigneur Ă©galement prĂ©sent dans chaque ĂȘtre, il ne nuit
personne ; car tout est tous. Sur ce, il atteint la demeure suprĂȘme. (13.28)
Celui qui voit que toutes actions sont accomplies par les forces (Gunas) de la Nature
matĂ©rielle (PrakĆti) seule, ne considĂ©rant pas soi-mĂȘme (ou lâAtmĂą) comme Ă©tant lâacteur,
cette personne comprend vraiment. (Voir aussi 3.27, 05.09, et 14.19) (13.29)
Lorsquâun homme dĂ©couvre multiples variĂ©tĂ©s dâĂȘtres et leurs idĂ©es reposer dans lâUnique
et jaillissant de cette rĂ©alitĂ© seule, il atteint le SuprĂȘme Ătre (Para-Brahman). (13.30)
LES ATTRIBUTS DE LâESPRIT (BRAHMA)
Nâayant pas de commencement et dĂ©pourvu des trois modes de la Nature matĂ©rielle,
lâĂ©ternel super-Ăąme (ParamÄtmÄ) â bien que rĂ©sidant dans le corps comme entitĂ© vivante
(JĂźva) â nâagit pas et nâest pas affectĂ©, O Arjuna. (13.31)
Comme lâespace omniprĂ©sent nâest pas affectĂ© du fait de sa subtilitĂ© ; de mĂȘme, lâEsprit
(AtmĂą) demeurant dans tous les corps, nâest pas affectĂ©. (13.32)
De mĂȘme quâun seul soleil illumine le monde entier ; ainsi, lâĂternel Ătre illumine (ou
donne la vie à ) la création entiÚre, O Arjuna. (13.33)
Ceux qui perçoivent - avec lâĆil de la connaissance du Soi â la distinction entre la crĂ©ation
(ou le corps) et le crĂ©ateur (ou lâAtmĂą), et connaissent aussi la technique de libĂ©ration de
lâentitĂ© vivante (JĂźva) du piĂšge de lâĂ©nergie divine illusoire (MÄyÄ), atteignent le SuprĂȘme.
(13.34)
Ainsi prend fin le treiziÚme chapitre intitulé «La Création et le Créateur» dans les
UpaniĆad de la BhagavadgÄ«tÄ, lâĂ©criture de yoga, touchant la science de lâAbsolu dans la
forme du dialogue entre SrÄ«kĆĆna et Arjuna.
Ce verset ne se trouve pas dans maintes Ă©ditions, car Ćamkara ne le commente pas. Si on
lâaurait inclus dans la Bhagavad GĂźtĂą, elle aurait 701 et non 700 versets, qui est le nombre
traditionnellement accepté. Le Dr. Ramananda Prasad ne traduit pas ce verset, mais nous
lâavons introduit ici pour information seulement, en dehors de la numĂ©ration habituelle.
La Nature matĂ©rielle (PrakĆti) est lâactivitĂ© inconsciente et lâĂtre Spirituel (PuruĆa) la
conscience inactive. Le corps est appelĂ© le champ oĂč les Ă©vĂ©nements surviennent comme la
croissance, le dĂ©clin et la mort, toute la vie de lâhomme sur terre. Le principe conscient,
inactif et détaché, inférieur à tous les états actifs comme un témoin, est le connaisseur du
champ (PuruĆa). Telle est la distinction familiĂšre entre la conscience et les objets dont cette
conscience sâoccupe. PuruĆa (super-Ăąme, AtmĂą, Esprit ou Ă©nergie, lâĂtre Spirituel, le
Seigneur de tous les ĂȘtres et de lâunivers, voir 7.05) est la lumiĂšre de la conscience, et le
connaisseur de tous les objets. Le tĂ©moin nâest certainement pas le mental individuel
incarné, mais la conscience cosmique pour laquelle le cosmos entier est un objet. Il est posé
et Ă©ternel, et nâa pas besoin de lâusage des sens et du mental pour ĂȘtre conscient. PuruĆa,
principe dâunion ; puissance de synthĂšse et de sublimation du multiple, laquelle seule lie en
soi et relie entre eux les Ă©lĂ©ments constitutifs du monde. Sens irrĂ©versible de lâĂ©volution
universelle, transformation au cours de laquelle la matiĂšre sâintĂ©riorise, Ă©tat supĂ©rieur pris
en nous et autour de nous par lâĂ©toffe de lâunivers. Dans le monde des phĂ©nomĂšnes, PuruĆa
ne se manifeste pas Ă lâĂ©tat pur, mais par un processus de spiritualisation. Quand nous
essayons de comprendre la nature de lâĂąme humaine, nous pouvons la considĂ©rer de deux
points de vue : du point de vue du principe divin ou de la nature élémentaire. Au fait,
lâhomme est un ĂȘtre contradictoire et double, libre et enchaĂźnĂ© ; il est divin tout en
possĂ©dant les signes de sa chute, notamment sa descente dans la nature. En tant quâĂȘtre
tombĂ©, lâhomme est dĂ©terminĂ© par les forces de PrakĆti. Mais lâhomme qui a compris et qui
veut Ă©voluĂ©, dĂ©sire surmonter sa nature tombĂ©e. La rĂ©alisation du Soi dâun tel homme
devient ainsi son idĂ©al, car il sait que lâĂȘtre humain est lâunion de lâuniversel infini et de
lâuniversel particulier. Lâuniversel infini constitue la synthĂšse du centre ultime (douĂ© dâune
puissance unitive sans limites), et de la totalité complexe qui trouve en lui son foyer radical.
Lâunivers particulier (microcosme), est la figure du cosmos (macrocosme) en voie
dâunification laborieuse et personnalisante, par laquelle une poussiĂšre dâĂąmes, distinctes du
SuprĂȘme Absolu, mais suspendues Ă Lui, sây incorporent peu Ă peu. Ainsi, le sujet se
remplit dâun contenu universel, rĂ©alisant lâunitĂ© dans la totalitĂ© au terme du voyage des
renaissances. Le caractĂšre spĂ©cifique de lâhomme nâest pas la possession de traits
communs, deux yeux et deux mains, mais celle du principe intime qui pousse Ă lâacquisition
crĂ©atrice dâun contenu qualificatif de la vie, lui-mĂȘme portĂ© au plus haut point de ses
possibilités.
LâallĂ©gorie de la CrĂ©ation dans le premier livre de la Bible, la GenĂšse (Chapitres 1 Ă 3),
dont la chute (chap.3) de lâhomme, variablement interprĂ©tĂ©e dans la doctrine chrĂ©tienne et
pendant trĂšs longtemps mot par mot littĂ©ralement, se traduit simplement par lâoubli de
lâimage divine en lâhomme en laquelle est la libertĂ©, et lâabsorption dans lâobjectif, qui est
nĂ©cessitĂ©. Lâhomme, essentiellement, nâappartient pas Ă la nature, il est lâesprit qui
interrompt la continuitĂ© de la nature. Ćamkara (impression, influence ; effet dâune action ;
rite ou cĂ©rĂ©monie sacrĂ©e ; aussi, un certain nombre de Ćamkara sont prescrits pour
lâindividu depuis la conception jusquâĂ sa mort) maintient que le SuprĂȘme Seigneur paraĂźt
ĂȘtre SamsÄrin, en raison de la manifestation cosmique, tout comme le « je » individuel
semble lié à sa reconnaissance avec le corps.
La Bhagavad GĂźtĂą suggĂšre quâelle expose que les vĂ©ritĂ©s de les VĂ©das, les UpaniĆads et le
Brahmas Ć«tra, plus tard systĂ©matisĂ©es par BÄdarÄyana. Les hymnes vĂ©diques sont appelĂ©s
chants rythmés.
Le corps physique, les formes sensorielles avec lesquelles nous identifions le sujet
appartiennent Ă lâaspect objectif. Lâego est une construction artificielle obtenue par
abstraction de lâexpĂ©rience consciente. En autres termes, lâego dĂ©signe le psychisme dans la
mesure oĂč il tend Ă se centrer, donc Ă sâindividualiser, câest-Ă -dire Ă devenir personnel et
par le pĂ©chĂ© mĂȘme (fautes et faiblesses) incommunicable avec le SuprĂȘme Esprit. Rien dans
ce monde objectif nâa une rĂ©alitĂ© authentique. La volontĂ© se laisse entraĂźner par des attraits
et sentiments dâamour-propre. Dans le temporel elle dĂ©sire possĂ©der bien des choses ; elle
sâattache plus Ă un objet quâun autre ; elle tombe dans certaines prĂ©somptions, dans
lâestime dâelle-mĂȘme, dans les points dâhonneur auxquels elle est trĂšs sensible, et dans une
foule de bagatelles qui rappellent les rudiments de ce monde. Lorsque lâhomme, rĂ©solu Ă
croire que Dieu est en lui, résolu à ne rien faire ou vouloir que par ce Dieu, doit se
contenter de cette foi et de cette intention dans tous les actes et exercices comme le
démontre la Gßtù.
DâaprĂšs la doctrine de SÄmkhya (BP 3.26.10-18, 11.22.10-16), lâĂternel Ătre (Brahman) expĂ©rimente vingt-
cinq transformations de base dans lâordre et comme suit : PuruĆa (lâĂtre Spirituel, CetanÄ, IĆvara), et les
vingt-quatre transformations dâAdÄ« PrakĆti (Ănergie totale, Mahat) : le mental (Manas), lâintellect (Buddhi),
pensĂ©es errantes (Citta), et la conception de lâindividualitĂ© (AhamkÄra) ; les cinq Ă©lĂ©ments de base
(lâespace ou les Ă©lĂ©ments subtils, lâair, le feu, lâeau et la terre) ; les cinq sens dâobjets ( le son, le touchĂ©, la vue,
le goĂ»t et lâodorat) ; les cinq organes des sens (lâoreille, la peau, les yeux, la langue, et le nez) ; et les cinq
organes de lâaction (la bouche, les mains, les jambes, lâanus, et lâurĂštre). Le SuprĂȘme Intellect (Mahat) est
connu sous une variĂ©tĂ© de noms dont les fonctions sont actives dans le corps. On lâappelle le mental (Manas)
lorsquâil pense et par le touchĂ©, lâintellect (Buddhi) lorsquâil raisonne, les pensĂ©es errantes (Citta) par lâacte
du souvenir et en vagabondant dâune pensĂ©e Ă lâautre, et lâego (AhamkÄra) lorsquâil prĂ©tend ĂȘtre lâauteur, et
lâindividualitĂ©. Le mot Antah-karaĆa, les sens subtils se rapportent Ă tous les quatre : Manas, Buddhi, Citta,
et AhamkÄra. Ce sont au fait les empreintes karmiques (SamskÄra) qui finalement dĂ©cident avec lâaide de
Manas et Buddhi. Lorsque Mahat rĂ©alise le fonctionnement dans le corps, on lâappel la bio-impulsion (Force
vitale, PrÄna). Le SuprĂȘme Esprit ou Conscience (Para-Brahman, Dieu) se manifeste comme Ă©nergie et
matiĂšre. La matiĂšre et lâĂ©nergie ne sont que des formes condensĂ©es de la Conscience. DâaprĂšs Einstein le
mental et la matiĂšre sont des Ă©nergies ou PrÄna. Sri Ramana Maharshi dit : Le mental est une forme
dâĂ©nergie. Il se manifeste en tant que monde.
Une telle consĂ©cration de lâĂȘtre au SuprĂȘme absolu ne nous interdit pas dâavoir avec les
nÎtres des relations normales et suivies, de leur témoigner notre affection avec une totale
simplicitĂ©, et de leur venir en aide si besoin est. Elle ne sâoppose pas non plus, elle appelle
plutÎt, de grandes et profondes amitiés ; amitiés dans lesquelles la complémentarité des
sexes peut jouer un rĂŽle important. La juste prudence quâil faut garder en pareille matiĂšre
ne doit jamais dĂ©gĂ©nĂ©rer en une crainte, en un raidissement qui ne sauraient ĂȘtre
dommageables Ă lâĂ©panouissement total de notre ĂȘtre. Si notre cĆur est plein du Seigneur,
il sâĂ©panchera tout naturellement en une bienveillance attentive Ă lâĂ©gard de ceux que nous
rencontrerons ; il ne craindra pas de témoigner une affectueuse tendresse à ceux ou à celles
avec qui nous liera une humanitĂ© spirituelle dâidĂ©al dans la recherche du SuprĂȘme Absolu.
Indivis dans les choses divisĂ©es. Toutes choses viennent du SuprĂȘme Absolu, sont soutenues
et reprises par Lui. « Par lui, avec lui et en lui, à toi, Dieu le PÚre tout-puissant ⊠»
(acclamation finale de la priĂšre eucharistique de la Messe Catholique).
La LumiĂšre demeure au cĆur de tous les ĂȘtres, cette flamme ou Ă©tincelle divine dont
parlent les mystiques des religions. Une ùme entrée ainsi dans le ciel de la paix se sent
pleine de Dieu.
LâĂąme vivante, lâĂȘtre humain, le yogi ou dĂ©vot arrive Ă lâunion dâaprĂšs le degrĂ© plus au
moins grand de ses aptitudes, et ce degrĂ© nâest pas le mĂȘme pour toutes. Il dĂ©pend de son
dĂ©tachement Ă lâattachement matĂ©riel, et comme disait le Christ, « ĂȘtre dans le monde mais
pas de ce monde », ainsi il dĂ©pend de la grĂące que Dieu accorde Ă chacun. Quant Ă lâĂąme
qui nâarrive pas Ă une puretĂ© conforme Ă la capacitĂ© que Dieu lui a donnĂ©e, elle ne
parviendra jamais Ă la satisfaction vĂ©ritable ; elle nâa pas encore opĂ©rĂ© dans ses puissances
de dépouillement et le vide qui sont exigés pour atteindre le pure Samùdhi, la réalité
spirituelle ici-bas, avant goût du Nirvana, la libération et existence définitive. La voie pour
aller au SuprĂȘme Absolu, est une voie sainte, une voie de puretĂ© et de pure foi. Il nây a
aucune connaissance ni conception métaphysique, qui puisse dans notre condition mortelle
de la naissance Ă la mort, servir de moyen pour cette haute union dâamour de lâĂąme avec le
SuprĂȘme Ătre. Le verset 18, autrement et plus libĂ©ralement traduit, rĂ©sume ce que nous
avons voulu dire : « Lorsque le mystique voit le Divin intĂ©rieur et Ă©ternel, il revĂȘt la nature
divine dans ses traits de libertĂ©, dâamour et dâĂ©galitĂ© ; parvenant ainsi Ă Mon Ă©tat. »
Comme le SuprĂȘme Absolu est Ă©ternel, ses PrakĆtis le sont aussi. Possesseur des deux
PrakĆtis, la nature et lâĂąme, IĆvara (le MaĂźtre Absolu, lâĂ©nergie omniprĂ©sente de KĆara
PuruĆa. ParameĆvara est lâexpansion de AkĆara Brahman au-delĂ IĆvara, Dieu ou le
SuprĂȘme Absolu) est la cause de lâorigine de la conservation et de la dissolution de
lâunivers. La GĂźtĂą ne regarde pas PrakĆti et PuruĆa comme des Ă©lĂ©ments indĂ©pendants
comme le fait SÄmkhya mais comme des formes infĂ©rieures et supĂ©rieures du mĂȘme
SuprĂȘme Ătre. Le corps et les sens sont produits par PrakĆti et lâexpĂ©rience du plaisir et de
la douleur par PuruĆa, lorsquâil est soumis Ă certaines limites. La nature bĂ©ate du Soi est
souillée par la joie et la douleur à cause de son identification avec les objets de la nature.
Toute la vie est un dialogue entre le Soi et le non-soi. Suivant Ćamkara leur union est de la
nature dâadhyÄsa (la pratique), lâidentification de lâun avec lâautre, et lorsque la confusion
est dissipĂ©e, lâenchaĂźnement prend fin.
Le don de soi Ă Dieu signifie Lui consacrer toutes ses actions et Lui offrir son tout, corps,
Ăąme et mental. Lâhumain a une constante dĂ©votion envers Lui sous la forme de OM (AUM)
sâil ne peut accepter aucune autre forme. Il y a trois degrĂ©s dans le don de soi Ă Dieu. Le
premier, câest de penser quâIl est tout et englobe tout, le SuprĂȘme Esprit immanent en tout.
Le deuxiĂšme, câest de penser quâIl est dans le mental, câest-Ă -dire quâIl est manifestĂ© dans
le mental exactement comme lâĂ©lectricitĂ© se manifeste partout mais plus particuliĂšrement
dans lâampoule qui donne la lumiĂšre. Le troisiĂšme degrĂ©, câest la conviction quâIl est mon
Moi rĂ©el, lui et Moi sommes un, et câest ce que le Christ a dit : « Moi et PĂšre sommes un ».
(Jean 10.30) Le premier de ces degrĂ©s sâapplique Ă la mĂ©ditation et Ă la bienveillance, le
deuxiĂšme Ă la mĂ©ditation et Ă la maĂźtrise du mental et le troisiĂšme câest le but de la
mĂ©ditation. Le don de soi Ă Dieu mĂšne Ă lâaustĂ©ritĂ© et Ă lâĂ©tude des saintes Ăcritures ; en
elles-mĂȘmes, ne conduisent pas nĂ©cessairement au don de soi mais si le yogi ou dĂ©vot est
sincĂšre, les tendances Ă lâaustĂ©ritĂ© et Ă lâĂ©tude apparaissent dâelles-mĂȘmes. Pratiquer
lâaustĂ©ritĂ©, lâĂ©tude des saintes Ăcritures et le don de soi au SuprĂȘme Absolu, Ă la VĂ©ritĂ©
balaient les cognitions erronées qui se trouvent sur la voie de la perfection. Ces cognitions
erronĂ©es sont : lâignorance, lâĂ©goĂŻsme, la haine, lâattachement, se cramponner Ă la Nature
matĂ©rielle. Toutes sont des ramifications de lâignorance qui est dĂ©finie comme « la
cognition erronĂ©e de lâĂ©ternitĂ©, de la puretĂ©, de la joie et du soi dans ce qui est temporel,
impur, douloureux et qui nâest pas le Soi. » Lorsque les cognitions erronĂ©es sont actives,
elles consolident lâaction des trois gunas, dĂ©clenchent le courant des causes et des effets
(Karma) et produisant action, naissance, mort et enchaĂźnement. Lorsquâelles cessent dâĂȘtre
actives, les facultĂ©s ultra-cognitives sâĂ©veillent par la mĂ©ditation et le yogi ou dĂ©vot aperçoit
la vraie lumiĂšre qui est la nature du Soi. Ainsi, le Soi, lâEsprit est Ă©tabli en Sa propre
Nature qui est puretĂ© et bĂ©atitude. LâĂąme vivante qui est vraiment embrasĂ©e dâamour de
Dieu, le SuprĂȘme Absolu, se laisse perdre aussitĂŽt Ă tout le crĂ©Ă© pour se retrouver avec plus
de gain dans Celui quâelle aime. Celui qui voit le SuprĂȘme Esprit universel dans toutes
choses devient lui-mĂȘme universel.
Dans la vraie connaissance du Soi, une personne nâest pas lâacteur mais le tĂ©moin. Il est le
spectateur, non lâacteur. Les actions affectent le mental et lâintelligence mais pas le Soi.
Quand on remonte la variĂ©tĂ© de la nature et de son dĂ©veloppement au niveau du SuprĂȘme
Absolu qui est Ă©ternel, on entre soi-mĂȘme dans lâĂ©ternitĂ©.
Le connaisseur du champ illumine la totalitĂ© du champ, le monde en devenir. Le SuprĂȘme
Absolu aime extrĂȘmement les biens moraux et les bonnes Ćuvres dĂ©sintĂ©ressĂ©es, et Il les
accomplit dans le temporel autant que dans le spirituel, et dans lâĂ©ternitĂ©. Le yogi ou dĂ©vot
doit se rĂ©jouir, non pas seulement de faire des Ćuvres dĂ©sintĂ©ressĂ©es et dâavoir des saintes
coutumes, mais dâagir uniquement par amour pour le SuprĂȘme Seigneur, sans autre
considération.
Chapitre 14
LES TROIS GUNAS (TEMPĂRAMENTS) DE LA NATURE
Le SuprĂȘme Seigneur dit : Je vais tâexpliquer encore cette connaissance suprĂȘme, la
meilleure de toutes les connaissances, sachant que tous les sages ont obtenu la suprĂȘme
perfection aprĂšs cette vie. (14.01)
Ceux qui ont pris refuge en cette connaissance transcendantale, atteignent lâunicitĂ© avec
Moi ; et ne naissent pas au temps de la création, ni sont affligés au temps de la dissolution.
(14.02)
TOUS LES ETRES SON NĂS DE LâUNION ENTRE LâESPRIT ET LA MATIERE
Ma Nature matĂ©rielle (PrakĆti) est la matrice de la crĂ©ation, en elle Je place la semence (de
la Conscience ou PuruĆa) dâoĂč la naissance des ĂȘtres, O Arjuna. (Voir aussi 9.10) (14.03)
Quelles que soient les formes produites dans les différentes matrices, O Arjuna, la Nature
matĂ©rielle (PrakĆti) est leur mĂšre (donneuse du corps) ; et Je, lâĂtre Spirituel ou PuruĆa,
suis le pĂšre (la semence ou le donneur de vie). (14.04)
COMMENT LES TROIS MODES DE LA NATURE MATERIELLE NOUENT LâESPRIT
ET LâĂME AU CORPS
Sattva ou la bontĂ©, Rajas ou la passion, lâactivitĂ© ; et Tamas ou lâignorance, lâinertie â ces
trois modes (Estropes, Gunas) de la Nature matĂ©rielle (PrakĆti) enchaĂźnent lâĂąme Ă©ternelle
et individuelle (JĂźva) au corps, O Arjuna. (14.05)
Parmi ceux-ci, le mode bontĂ© (Sattva) cause lâillumination et est bon, car il est pur. Sattva
enchaĂźne lâentitĂ© vivante (JĂźva) par lâattachement au bonheur et Ă la connaissance, O
Arjuna sans péché. (14.06)
Arjuna, sache que le mode passion (Rajas) est caractérisé par la passion, et est la source du
dĂ©sir et de lâattachement. Rajas lie lâentitĂ© vivante (JĂźva) par lâattachement Ă lâaction (ou,
les fruits du travail) ; (14.07)
Sache, O Arjuna, que le mode ignorance (Tamas) â le trompeur de lâentitĂ© vivante (JĂźva) â
est nĂ© de lâinertie. Tamas lie JĂźva par la nĂ©gligence, la paresse, et le sommeil excessif.
(14.08)
O Arjuna, le mode bontĂ© attache lâhomme au bonheur (apprenant Ă connaĂźtre lâĂternel
Ătre (Brahman)), le mode passion attache Ă lâaction, et le mode ignorance attache Ă la
négligence en enrobant la connaissance du Soi. (14.09)
LES CARACTERISTIQUES DES TROIS MODES DE LA NATURE
La bontĂ© prĂ©vaut en subjuguant la passion et lâignorance ; la passion prĂ©vaut en
subjuguant la bontĂ© et lâignorance ; et lâignorance prĂ©vaut en subjuguant la bontĂ© et la
passion, O Arjuna. (14.10)
Lorsque la lumiĂšre de la connaissance du Soi resplendit par tous les sens (ou portes) du
corps, alors on doit comprendre que la bonté prédomine. (14.11)
O Arjuna, lorsque la passion est prĂ©dominante ; lâaviditĂ©, lâactivitĂ©, lâengagement dans les
actions intĂ©ressĂ©es, lâinquiĂ©tude, lâexcitation, etc. apparaissent. (14.12)
O Arjuna, lorsque lâinertie est prĂ©dominante ; lâignorance, lâinactivitĂ©, la nĂ©gligence,
lâĂ©garement, etc. apparaissent. (14.13)
LES TROIS MODES SONT AUSSI LES VEHICULES DE TRANSMIGRATION DE LâĂME
INDIVIDUELLE
Celui qui meurt pendant que la bontĂ© domine, parvient au ciel â le monde pur des
connaisseurs du SuprĂȘme. (14.14)
Celui qui meurt pendant la dominance de la passion, il renaĂźt attachĂ© Ă lâaction (ou du type
utilitaire) ; et en mourant dans lâignorance, il renaĂźt parmi les crĂ©atures dĂ©nuĂ©es de raison.
(14.15)
Le fruit dâune bonne action, dit-on, est bĂ©nĂ©fique et pure, le fruit de lâaction passionnelle
est la douleur, et le fruit de lâaction de lâignorance est la paresse. (14.16)
La connaissance du Soi naĂźt du mode bontĂ© ; lâaviditĂ© vient du mode passion ; et la
nĂ©gligence, lâillusion, et la lenteur mentale Ă©mergent du mode ignorance. (14.17)
Ceux qui sont établis dans la bonté vont au ciel ; les personnes passionnées renaissent dans
le monde des mortels ; et les ignorants, qui résident dans le mode ignorance le plus bas
(Tamo Guna), vont vers des planĂštes infĂ©rieures ou lâenfer (ou reprennent naissance
comme créatures inférieures). (14.18)
ATTEINDRE LE NIRVANA APRES AVOIR PASSĂ AU-DELĂ DES TROIS MODES
MATERIELS DE LA NATURE
Lorsque les visionnaires perçoivent quâil nây a pas dâautre agent que les forces de lâĂternel
Ătre â les modes (Gunas) de la Nature matĂ©rielle ; et connaissent ce qui est plus haut et au-
delĂ des Gunas ; alors ils atteignent le salut (Mukti). (Voir aussi 3.27, 5.09, et 13.29) (14.19)
Lorsque celui qui transcende (ou sâĂ©lĂšve au-delĂ ) des trois modes de la Nature matĂ©rielle
qui crĂ©ent (et/ou prennent naissance dans) le corps, celui-ci atteint lâimmortalitĂ© ou le salut
(Mukti), et est libéré des douleurs de la naissance, de la vieillesse, et de la mort. (14.20)
LE PROCESSUS POUR Sâ ELEVER AU-DELA DES TROIS MODES
Arjuna dit : Quelles sont les marques de ceux qui ont transcendé les trois modes matériels
de la Nature, et quel est leur comportement ? Comment transcende-t-on les trois modes
matĂ©riels de la Nature, O Seigneur KĆĆna ? (14.21)
Le SuprĂȘme Seigneur dit : Celui qui ne mĂ©prise pas la prĂ©sence de lâillumination, lâactivitĂ©,
et lâillusion, et ne les dĂ©sire pas non plus quand ils sont absents ; qui se tient comme tĂ©moin
sans ĂȘtre affectĂ© par les modes (Gunas) de la Nature matĂ©rielle (PrakĆti) ; et reste
fermement attachĂ© au Seigneur sans hĂ©sitation â sachant que seuls les modes de la Nature
matĂ©rielle (Gunas ou PrakĆti) agissent. (14.22-23)
Celui qui dépend du Seigneur et est indifférent envers la douleur et le plaisir ; pour qui la
motte de terre, la pierre, et lâor sont semblables ; pour qui le plaisant et le dĂ©plaisant sont
identiques ; dont le mental est ferme, qui reste calme envers le blĂąme et la louange, et celui
qui ne change pas dans lâhonneur et le dĂ©shonneur, qui se maintient impartial envers les
amis et ennemis, et qui a renoncĂ© au sens initiative dâaucune action, sâest Ă©levĂ©, dit-on, au
dessus les modes de la Nature matérielle. (14.24-25)
LES LIENS AUX TROIS MODES SAVENT ETRE ROMPUS PAR LâAMOUR
DEVOTIONNEL
Celui qui Me rend service avec amour et une dévotion sans défaillance transcende les trois
modes de la Nature matĂ©rielle, et devient apte Ă sâabsorber en Brahma-nirvÄna. (Voir aussi
7.14 et 15.19) (14.26)
Car, Je suis la base de lâĂternel Ătre immortel (Brahman), de lâordre Ă©ternel (Dharma), et
de la félicité absolue (Ananda). (14.27)
Ainsi prend fin le quatorziÚme chapitre intitulé «Les Trois Gunas de la Nature» dans les
UpaniĆad de la BhagavadgÄ«tÄ, lâĂ©criture de yoga, touchant la science de lâAbsolu dans la
forme du dialogue entre SrÄ«kĆĆna et Arjuna.
Le chapitre 14 est la description des gunas (les trois modes de la Nature matérielle),
marquĂ©e de raisonnement sÄmkhya, par un goĂ»t de classification extrĂȘmement clair.
Partant du principe que, dans lâordre naturel, tout est composĂ© des trois gunas -
tempĂ©raments constitutifs de la prakĆti â pour en conclure quâĂ lâĂ©tat Ă©voluĂ©, lâun des
gunas lâemporte sur les deux autres, confĂ©rant Ă tout ce qui existe sa coloration
particuliĂšre. La notion de lâ Ăternel Ătre immortel (Brahman), matrice de tout
lâunivers, remonte aux UpaniĆhads ; dont lâimage est reprise aux versets 3 et 4, mais en
subordonnant le Brahman au PuruĆa. Cette position est Ă nouveau mentionnĂ©e au dernier
verset 27. Quant Ă la thĂ©orie des gunas elle-mĂȘme, elle se prĂ©sente sous la forme la plus
classique. Il nây a nullement question de faire disparaĂźtre les deux derniers dans
lâimmaculĂ©e lumiĂšre du mode bontĂ©, cause dâillumination et de puretĂ©, car le verset 20
enjoint de dĂ©passer les trois tempĂ©raments â producteurs du corps, et gĂ©nĂ©rateurs de
renaissances. LâĂ©galitĂ© dâesprit doit, elle aussi (au verset 22-23), sâexercer Ă lâĂ©gard de tous
les tempĂ©raments. Nous voulons rappeler le lecteur, que PrakĆti est lâactivitĂ© inconsciente
et puruĆa la conscience inactive. Le corps est aussi appelĂ© le champ oĂč les Ă©vĂ©nements
surviennent ; la croissance, la vieillesse, et la mort sây produisent. Le principe conscient,
inactif et détaché, dépendant à tous les états actifs comme un témoin, est le connaisseur du
champ. Telle est la distinction familiĂšre entre la conscience et les objets dont cette
conscience sâoccupe. Le Seigneur KĆĆna est la lumiĂšre, le connaisseur de tous les objets. Le
tĂ©moin nâest pas le mental individuel incarnĂ©, mais la conscience cosmique pour laquelle le
cosmos entier est un objet. Il est calme et Ă©ternel, et nâa pas besoin de lâusage des sens et du
mental pour ĂȘtre conscient. KĆĆna est le SuprĂȘme Seigneur, non lâun des objets du monde.
Il est dans tous les champs ; différencié par les conditions particuliÚres, depuis Brahman le
crĂ©ateur jusquâau brin dâherbe, bien quâIl soit lui-mĂȘme dĂ©nuĂ© de toutes limitations et
incapable de définition conceptuelle.
La vie Ă©ternelle nâest pas la dissolution dans un indĂ©finissable SuprĂȘme Absolu, mais la
rĂ©alisation de lâuniversalitĂ© et de la libertĂ© de lâesprit Ă©levĂ© au-dessus du mouvement
expĂ©rimental. Son Ă©tat nâest plus affectĂ© par les processus cycliques de crĂ©ation et de
dissolution, Ă©tant supĂ©rieur Ă toutes les manifestations. LâĂąme sauvĂ©e devient semblable au
Divin et acquiert un ĂȘtre immuable, Ă©ternellement conscient du SuprĂȘme Seigneur, qui
prend des formes cosmiques diverses. Le mystique sâunit en essence avec ce quâil cherche, il
perçoit le Divin dans sa conscience et dans sa vie intĂ©rieure autant quâextĂ©rieure.
Rappelons-nous les paroles du Christ, « Soyez donc parfaits, comme votre PÚre céleste est
parfait. » (Matthieu 5.48) Il faut que lâĂąme soit purifiĂ©e par le feu de lâĂ©preuve pour quâelle
puisse sâunir Ă Dieu, jouir du SuprĂȘme Bien et devenir cĂ©leste, de terrestre quâelle Ă©tait.
Ce verset affirme que toute existence est une manifestation du SuprĂȘme Ătre, la Semence
cosmique.
PrakĆti est la mĂšre, et le SuprĂȘme Ătre (Dieu) est le PĂšre de toutes les formes vivantes.
Parce que PrakĆti est aussi de la nature du SuprĂȘme Ătre (Dieu), Il est en mĂȘme temps le
PĂšre et la MĂšre de lâUnivers, la Semence et la Matrice de tout lâUnivers. Le SuprĂȘme Esprit
fertilise nos vies, et en fait ce quâIl veut quâelles soient. Le SuprĂȘme Absolu (Ătre, Esprit,
Dieu) vous prend par la main ; câest Lui qui vous conduit comme on conduit un aveugle
dans les tĂ©nĂšbres de ce monde vers un but et par un chemin bien tracĂ©, et oĂč jamais, malgrĂ©
tout le secours que vous auraient prĂȘtĂ© vos yeux et vos pieds, vous nâauriez rĂ©ussi Ă
marcher.
Ce qui conduit lâapparition de lâĂąme immortelle dans le cycle de la naissance et de la mort
est la puissance des trois modes (Gunas) de la Nature matérielle. Ils sont les fondamentaux
premiers de la Nature matérielle, les bases de toutes les substances. On les appelle Gunas
(les trois modes de la Nature matĂ©rielle), parce quâils sont toujours Ă la dĂ©pendance du
PuruĆa, du SĂąmkhya, du Seigneur KĆĆna.
Sattva ne nous libÚre pas du sentiment du moi. Il engendre aussi le désir, bien que ce soit
pour de nobles intentions. Tant que nous ne cesserons pas de penser et de vouloir par le
sentiment de lâego, nous ne serons pas libĂ©rĂ©s.
Les modes de la Nature matĂ©rielle sont tous les trois prĂ©sents dans tous les ĂȘtres humains,
quoique Ă des degrĂ©s diffĂ©rents. Nul nâen est exempt, et dans chaque Ăąme, il y a lâun ou
lâautre qui prĂ©domine.
Quand notre mental est illuminé et les sens stimulés, Sattva prédomine.
La poursuite passionnée de la vie et de ses plaisirs résulte de la prédominance de Rajas.
LâĂąme Ă©volue Ă travers ces trois degrĂ©s ; elle sâĂ©lĂšve de la torpeur inerte et de la soumission
de lâignorance, par la lutte contre les jouissances matĂ©rielles, Ă la poursuite de la
connaissance et du bonheur. Se renoncer, se soumettre aux autres par le service
dĂ©sintĂ©ressĂ© ; lutter continuellement contre ses passions ; faire le contraire de ce que lâon
dĂ©sire et de ce que lâon aime, sont des vertus que beaucoup de maĂźtres spirituels (gourous)
enseignent, mais que peut pratiquent. Lâamour pour soi-mĂȘme est comme un monstre, il
faut le vaincre, et ce nâest que par cette victoire quâon arrive au but final. Tant que nous
nâaurons pas atteint le but suprĂȘme, notre Ă©volution est incomplĂšte. LâidĂ©al le plus haut est
de dépasser le niveau matériel pour atteindre le spirituel.
Conscient de l'objectivitĂ© du SuprĂȘme Absolu, Il voit les changements de la Nature sans sây
laisser impliquer. Les modes de la Nature matérielle (Gunas) sont alors transmués en
illumination pure, en activité divine et en calme parfait.
Mais laissez les gunas de la Nature faire toutes les actions.
Action gouvernée par la loi essentielle de la propre nature de chacun. Le dharma est une loi
morale juste.
Félicité, bénédiction.
Chapitre 15
LA PERSONNE SUPRĂME
LA CRĂATION EST COMME UN ARBRE CRĂĂ PAR LES FORCES DE MAYA
Le SuprĂȘme Seigneur dit : Ils parlent de lâĂ©ternel arbre banian qui a son origine en haut
dans le SuprĂȘme Ătre (Para-Brahman) et ses branches en bas dans le cosmos, dont les
feuilles sont les hymnes VĂ©diques. Celui qui comprend cet arbre est le connaisseur des
VĂ©das. (Voir aussi KaU 6.01, BP 11.12.20-24, et GĂźtĂą 10.08) (15.01)
Les branches de cet arbre cosmique de MÄyÄ (lâillusion) se rĂ©pandent sur tout le cosmos.
Lâarbre est nourrit par les trois modes (Gunas) de la Nature matĂ©rielle (PrakĆti) ; les
plaisirs des sens sont ses bourgeons ; et ses racines de lâego et du dĂ©sir sâĂ©tendent en bas
dans le monde humain, engendrant lâenchaĂźnement Karmique. (15.02)
COMMENT COUPER LâARBRE DE LâATTACHEMENT ET ATTEINDRE LE SALUT EN
TROUVANT REFUGE EN DIEU
La vraie forme de cet arbre nâest pas perçue ici sur terre, ni son commencement, sa fin, ou
son existence. Ayant coupé les fortes racines du désir de cet arbre par la puissante hache de
la connaissance du Soi et le détachement, pensant ainsi : « Je prend refuge en cette
personne primordiale, dont émane la manifestation antique », recherchant donc cette
demeure suprĂȘme en quĂȘte du lieu dâoĂč il nây a plus de retour (vers le monde des mortels).
(15.03-04)
Ceux qui sont libĂ©rĂ©s de lâorgueil et de lâillusion, qui ont vaincu le mal de lâattachement,
qui demeurent constamment dans le SuprĂȘme Soi, tous dĂ©sirs (KÄma) calmĂ©s, affranchis
des dualités du plaisir et de la douleur, atteignent le but éternel. (15.05)
Le soleil nâĂ©claire pas en ce lieu, ni la lune, ni le feu. Câest Ma suprĂȘme demeure. Ayant
atteint ce lieu, lâhomme ne revient plus (dans le monde temporel). (Voir aussi 13.17 et
15.12, et KaU 5.15, ShU 6.14, MuU 2.02.10) (15.06)
LâĂME INCARNĂE EST LA SATISFAITE
LâĂąme Ă©ternelle individuelle (JĂźvatmĂą) dans le corps des ĂȘtres vivants est, vraiment, Ma
part intĂ©grale. Elle est associĂ©e avec les six facultĂ©s sensorielles â le mental inclus â de
perception, et les active. (15.07)
Tout comme lâair emporte le parfum de la fleur ; de mĂȘme, lâĂąme individuelle (JĂźvatmĂą)
sâempare des six facultĂ©s sensorielles du corps physique, les emporte dans la mort vers un
autre corps physique qui sâacquit dans la rĂ©incarnation (par la force de Karma). (Voir
aussi 2.13) (15.08)
LâentitĂ© vivante (JĂźva) jouit des plaisirs des sens expĂ©rimentant les six facultĂ©s sensorielles,
usant les oreilles, le toucher, la vue, le goĂ»t, lâodorat, et le mental. Les ignorants ne
perçoivent pas le dĂ©part de JĂźvĂą du corps, ou quâelle y reste pour se satisfaire aux plaisirs
des sens en sâassociant aux modes de la Nature matĂ©rielle. Mais ceux qui ont lâĆil de la
connaissance du Soi le voient. (15.09-10)
Les yogis sâefforçant dâatteindre la perfection, voient lâentitĂ© vivante (JĂźva) demeurer dans
leur psyché intérieure (comme conscience) ; mais les ignorants, et ceux dont la psyché
intĂ©rieure nâest pas pure, ne La voient pas malgrĂ© leurs efforts. (15.11)
LâESPRIT EST LâESSENCE DE TOUT
LâĂ©nergie de la lumiĂšre qui vient du soleil illumine le monde entier ; et, qui est aussi dans la
lune et dans le feu ; sache que cette lumiĂšre est Mienne. (Voir aussi 13.17 et 15.06) (15.12)
PĂ©nĂ©trant la terre, Je soutiens tous les ĂȘtres avec Mon Ă©nergie ; devenant la sĂšve lunaire, Je
nourris toutes les plantes. (15.13)
Ătant devenu le feu digestif, Je rĂ©side dans le corps de tous les ĂȘtres vivants ; et, en
Mâunifiant aux souffles vitaux (PrÄnÄ et ApÄna), Je digĂšre tous les types de nourriture ; et
(15.14)
Je siĂšge dans le psychisme intĂ©rieur de tous les ĂȘtres. La mĂ©moire, la Connaissance de Soi,
et la dissipation du doute et des notions injustes (en arguant sur lâĂternel Ătre ou en extase
(SamÄdhi)) viennent de Moi. Je suis en vĂ©ritĂ© ce qui doit ĂȘtre connu (par lâĂ©tude) dans tous
les VĂ©das. Je suis, vraiment, lâauteur du VedÄnta, et le Connaisseur des VĂ©das (15.15)
QUELS SONT LE SUPREME ESPRIT, LâESPRIT, ET LâĂME INDIVIDUELLE ?
Il y a deux entitĂ©s (PuruĆas) dans le cosmos : le Divin Ătre faillible et temporel (KĆara
PuruĆa), et lâĂternel Ătre infaillible (Brahman, AkĆara PuruĆa). Tous les ĂȘtres crĂ©Ă©s sont
sujets au changement, mais lâĂternel Ătre ne change pas. (15.16)
Il y a encore une autre PersonnalitĂ© SuprĂȘme de la DivinitĂ© (au-delĂ du temporel et de
lâĂ©ternel) appelĂ© la RĂ©alitĂ© Absolue ou ParamÄtmÄ qui soutient autant le temporel que
lâĂ©ternel (KĆara et AkĆara) en imprĂ©gnant les trois sphĂšres planĂ©taires (Lokas), Il est le
Seigneur Ă©ternel (IĆvara). (15.17)
Puisque Je suis au-delĂ du temporel (KĆara) et de l'infini (AkĆara) ; par consĂ©quent, Je suis
cĂ©lĂ©brĂ© dans ce monde et dans la Veda comme le SuprĂȘme Ătre (Para-Brahman,
ParamÄtmÄ, PuruĆottama, lâAbsolu, la VĂ©ritĂ©, Sat, le Super-Ăąme, etc.) (Voir aussi MuU
2.01.02) (15.18)
Celui qui est sagace, et qui Me saisit vraiment comme le SuprĂȘme Ătre (PuruĆottama),
connaĂźt toutes choses et Mâadore de tout son ĂȘtre, O Arjuna. (Voir aussi 7.14, 14.26, et
18.66) (15.19)
Ainsi, cette science de la connaissance du Soi la plus secrĂšte tâas Ă©tĂ© expliquĂ©e par Moi, O
Arjuna sans pĂ©chĂ©. En comprenant cela, un homme accĂšde Ă lâĂ©veil, et il a accompli tous
ses devoirs, O Arjuna. (15.20)
Ainsi prend fin le quinziĂšme chapitre intitulĂ© «La Personne SuprĂȘme» dans les UpaniĆad
de la BhagavadgÄ«tÄ, lâĂ©criture de yoga, touchant la science de lâAbsolu dans la forme du
dialogue entre SrÄ«kĆĆna et Arjuna.
Ashvattha (arbre pipal), arbre sacrĂ©, symbole de lâunivers qui, bien quâapparemment
dĂ©truit et ensuite recrĂ©Ă©, ne prend jamais fin, car il est semblable au courant de lâĂ©volution.
Le MahĂąbhĂąrata compare le processus cosmique Ă un arbre qui peut ĂȘtre abattu par la
puissante Ă©pĂ©e de la connaissance. Comme lâarbre a son origine en le SuprĂȘme Absolu
(Ătre), on dit quâil a ses racines en haut. Comme il sâĂ©tend dans le monde, on dit que ses
branches descendent. Le monde est un organisme vivant en union avec le SuprĂȘme.
LâascĂšte, le yogi, le dĂ©vot se dĂ©tachant du monde objectif prend refuge dans la personne
primordiale dâoĂč Ă©manent les Ă©nergies cosmiques. La GĂźtĂą est trĂšs claire au sujet de la vie
spirituelle ou mystique, vous ne parviendrez jamais à cet état heureux de félicité par les
mortifications que vous vous imposerez, et dans ce sens ni par des actes Ă©goĂŻstes. Il faut que
le SuprĂȘme Seigneur vous purifie intĂ©rieurement, quâIl vous exerce comme Il le jugera Ă
propos, Lui seul sachant comment purifier les ùmes de leurs défauts secrets. Si, constante
est votre persĂ©vĂ©rance, le SuprĂȘme vous dĂ©livrera de votre attachement Ă©goĂŻste aux biens
de ce monde. Il vous purifiera mĂȘme de votre attachement aux biens surnaturels, tels que :
communications intérieures, ravissements, extases, et autres grùces que nous considérons
souvent comme le soutien et la consolation de lâĂąme, ce qui est absolument faux et
illusoire. Il est nĂ©cessaire de faire de votre cĆur une carte blanche oĂč le SuprĂȘme Ătre
puisse graver ce quâIl lui plaira.
Ce verset se rĂ©fĂšre Ă lâascĂšte, le yogi immuable accessible aux pratiques ascĂ©tiques. Que de
choses Ă purifier dans une Ăąme, avant quâelle atteigne le sommet de la perfection. Le
SuprĂȘme Absolu (Ătre) opĂ©rera en vous, vous prĂ©parant dâune maniĂšre simple et passive,
sans que vous le sachiez, mais en vous faisant passer par le feu des Ă©preuves si vous ĂȘtes
tellement attachĂ© aux choses de ce monde. Tout ce quâIl demande de vous, câest que vous y
consentiez et que vous obéissiez sans murmure aux rÚgles de la Gßtù.
Le corps subtil accompagne lâĂąme dans ses pĂ©riples Ă travers lâexistence cosmique.
Ou, VaiĆvÄnara (par le feu de la digestion), qui signifie « qui est commun Ă tous les
hommes » ; dans les UpaniĆhads entre autres, on rencontre un feu qui porte ce nom.
Lâaffirmation du verset 15, « Je suis, vraiment, lâauteur du VedÄnta », venant renforcer
celle du chapitre 13.4 sur les aphorismes du Brahman, semble confirmer la date
relativement tardive de ses passages.
Pour la Bhagavad Gßtù, ce monde en mouvement est une création du Seigneur éternel. Le
SuprĂȘme Ătre accepte le monde et agit en lui. Dans son aspect cosmique, le SuprĂȘme est
IĆvara, la Personne la plus haute, PuruĆottama, le Seigneur de lâUnivers qui rĂ©side dans le
cĆur de toutes les crĂ©atures.
La connaissance conduit à la dévotion. Celui qui ne travaille pas au détachement intéressé,
et ainsi au renoncement nâest pas vraiment libre et ne saurait recevoir les vĂ©ritĂ©s et les
lumiĂšres du SuprĂȘme Esprit. Pour tendre Ă la connaissance de la Science Mystique, il ne
faut se mĂȘler que des choses oĂč notre devoir nous appelle, et encore avec beaucoup de
prudence.
Ayant passĂ© au-delĂ des gunas, et arrivĂ© au SuprĂȘme Absolu (Brahman), on accĂšde comme
lâaffirme en conclusion le chapitre 15, Ă la Demeure SuprĂȘme. Personne SuprĂȘme,
fondement du Brahman. Le chapitre 15 est consacré à la « Discipline de cette Personne
SuprĂȘme ». Les trois premiers versets traitent du figuier sacrĂ©, lâarbre cosmique dont les
racines sont au ciel. Le verset 7 dĂ©clare que chaque ĂȘtre vivant est une parcelle de la
Personne SuprĂȘme, parcelle qui entraĂźne avec elle les organes de la connaissance et le sens
interne et les fait ainsi entrer dans un corps ou lâabandonner. Il y a dans les versets 7 et 8
comme un ressouvenir de lâenseignement des UpaniĆads sur le souffle (PrĂąna), mais dans
les versets 9 et 12, il y rĂ©sonne plutĂŽt lâĂ©cho des spĂ©culations sur lâĂtman. Cependant,
comme toujours tout au long de la GĂźtĂą, on en revient, Ă lâaide dâimages anciennes, Ă la
personnification de lâAbsolu, et le Seigneur KĆĆna rappelle au verset 13 que câest Lui le
soutien de tous les ĂȘtres.
Chapitre 16
LES ĂTATS DIVINS ET DĂMONIAQUES
UNE LISTE DE QUALITĂS DIVINES MAJEURES Ă ĂDUQUER POUR
ARRIVER AU SALUT
Le SuprĂȘme Seigneur dit : LâintrĂ©piditĂ©, la puretĂ© de la psychĂ© intĂ©rieure, la persĂ©vĂ©rance
dans le yoga de la connaissance du Soi, la charitĂ©, la maĂźtrise des sens, le sacrifice, lâĂ©tude
des Ă©critures, lâaustĂ©ritĂ©, lâhonnĂȘtetĂ© ; la non-violence, la vĂ©ritĂ©, lâabsence de colĂšre, le
renoncement, la sĂ©rĂ©nitĂ©, lâabsence de calomnie, la compassion Ă lâĂ©gard des ĂȘtres,
lâabsence de convoitise, la gentillesse, la modestie, la pondĂ©ration, lâĂ©clat de la vigueur, le
pardon, lâendurance, la puretĂ©, lâabsence de malice et de lâorgueil excessif â sont les (vingt-
six) qualités de ceux doués de vertus divines, O Arjuna. (16.01-03)
UNE LISTE DE QUALITĂS DĂMONIAQUES QUI DEVRAIT ĂTRE ABANDONNĂE
AVANT DE COMMENCER LâITINĂRAIRE SPIRITUEL
O Arjuna, les marques de ceux qui sont nés avec des qualités démoniaques sont :
lâhypocrisie, lâarrogance, lâorgueil, la colĂšre, la duretĂ©, et lâignorance. (16.04)
Les qualitĂ©s divines mĂšnent au salut (MokĆa), les qualitĂ©s dĂ©moniaques, dit-on, conduisent
aux chaßnes. Ne te chagrine pas, O Arjuna, tu es né avec des qualités divines. (16.05)
IL Y A SEULEMENT DEUX TYPES DâĂTRES HUMAINS â LES SAGES ET LES
IGNORANTS
En principe, il y a deux types ou castes dâĂȘtres humains dans ce monde : les ĂȘtres divins, et
les démoniaques. Les divins ont déjà été décrits en détail, maintenant apprends de Moi ce
qui concerne les démoniaques, O Arjuna. (16.06)
Les humains de nature dĂ©moniaque ne savent pas ce quâil faut faire et ce quâil ne faut pas
faire. On ne trouve en eux ni pureté ou bonne conduite, ni véracité. (16.07)
Ils disent que le monde est irréel et sans fondement, sans Dieu, et sans ordre. Le monde est
seulement causĂ© par lâunion sexuelle de lâhomme et de la femme et rien dâautre. (16.08)
Soutenant ces conceptions athéistes erronées, ces ùmes dégradées - de faible intelligence et
aux actions cruelles â sont nĂ©es en ennemis pour la destruction du monde. (16.09)
En proie Ă des dĂ©sirs insatiables, remplies dâhypocrisie, dâorgueil, et dâarrogance ; tenant
des vues erronĂ©es dues Ă lâillusion ; ils agissent par des motifs impurs. (16.10)
ObsĂ©dĂ©s dâinnombrables soucis qui nâont de termes quâĂ leur mort, considĂ©rant la
gratification des sens comme le but suprĂȘme, persuadĂ©s que la jouissance des sens est tout
ce quâil faut. (16.11)
Enchaßnés par des centaines de liens de désir et adonnés à la convoitise et à la colÚre ; ils
luttent pour sâamasser des richesses par des moyens illĂ©gaux pour satisfaire les jouissances
sensuelles. Ils pensent : (16.12)
Jâai gagnĂ© ceci aujourdâhui, jâaccomplirai ce dĂ©sire, telle richesse est mienne, et jâaurai
encore plus de richesse dans lâavenir. (16.13)
Cet ennemi a Ă©tĂ© tuĂ© par moi, et je tuerai encore dâautres. Je suis le Seigneur. Jâai toute
jouissance. Je suis parfait, fort et heureux ; (16.14)
Je suis riche et nĂ© dâune famille noble. Qui dâautre mâest Ă©gale ? Jâoffrirai des sacrifices, je
donnerai des aumĂŽnes, et je me rĂ©jouirai. Ainsi, Ă©garĂ© par lâignorance ; (16.15)
TroublĂ©s par de multiples caprices ; pris dans les filets de lâillusion ; adonnĂ©s Ă la
jouissance des plaisirs sensuels ; ils sombrent dans un enfer infĂąme. (16.16)
InfatuĂ©s dâeux-mĂȘmes, obstinĂ©s, emplis de prĂ©tention et intoxiquĂ©s par leurs richesses ; ils
accomplissent des sacrifices (Yajna) qui nâont de tels que le nom et avec ostentation, au
mépris des injonctions scripturaires. (16.17)
Ces gens malignes sâadonnent Ă lâĂ©goĂŻsme, la puissance, lâarrogance, la convoitise, et la
colĂšre ; et Me haĂŻssent Moi lâhabitant de leurs propres corps et ceux des autres. (16.18)
LA SOUFFRANCE EST LE DESTIN DES IGNORANTS
Je prĂ©cipite sans cesse ces ĂȘtres haineux, cruels, pĂ©cheurs, et gens vulgaires en de cycles de
naissances, et dans des matrices démoniaques. (16.19)
O Arjuna, accédant de naissance en naissance dans des matrices démoniaques, les égarés
sâenfoncent au plus bas de lâenfer sans jamais rĂ©ussir Ă Mâatteindre. (16.20)
LE DĂSIR, LA HAINE, ET LA CONVOITISE SONT LES TROIS PORTES DE LâENFER
Le dĂ©sir, la haine, et la convoitise sont les trois portes de lâenfer menant lâindividu Ă sa
perte (ou lâesclavage). Par consĂ©quent, il faut les abandonner toutes trois. (Voir aussi MB
5.33.66) (16.21)
Celui qui est libĂ©rĂ© de ces trois portes de lâenfer, O Arjuna, pratique ce qui est bon pour lui
ou elle, et par consĂ©quent atteint la demeure suprĂȘme. (16.22)
ON DOIT SUIVRE LES INJONCTIONS SCRIPTURAIRES
Celui ou celle qui agit sous lâinfluence de ses dĂ©sirs, dĂ©sobĂ©issant aux injonctions
scripturaires, nâatteint jamais ni la perfection, ni le bonheur, ni la demeure suprĂȘme.
(16.23)
Par consĂ©quent, que les Ă©critures soient pour toi lâautoritĂ© qui dĂ©termine ce qui doit ĂȘtre
fait et qui ne doit pas ĂȘtre fait. Tu dois accomplir ton devoir dâaprĂšs les injonctions
scripturaires. (16.24)
Ainsi prend fin le seiziÚme chapitre intitulé «Les Etats Divins et Démoniaques» dans les
UpaniĆad de la BhagavadgÄ«tÄ, lâĂ©criture de yoga, touchant la science de lâAbsolu dans la
forme du dialogue entre SrÄ«kĆĆna et Arjuna.
Le chapitre 16 offre une classification des diffĂ©rentes catĂ©gories dâĂȘtre en divins et
dĂ©moniaques (Ăąsuriques), dâoĂč son titre : « Les Ătats Divins et DĂ©moniaques ». Les trois
premiers versets Ă©noncent les vertus â positives ou nĂ©gatives â toutes dâessence sĂąttvique
(lâexistence dans la perfection de son excellence), qui caractĂ©risent les ĂȘtres de la condition
divine. On retrouve là , en arriÚre-plan, des idées appartenant à un Sùmkhya préclassique :
faire prédominer le sattva sur les deux autres modes de la Nature matérielle. On ne parle
ensuite ni de rajas (trouble sur le plan psychologique, le domaine de lâaffectivitĂ© et de
lâactivitĂ©), ni de tamas (lâengourdissement, lâinertie), Ă propos des ĂȘtres Ăąsuriques, mais la
mention du sattva dans la catégorie opposée semble les rejeter tous deux du cÎté
dĂ©moniaque. Peut-ĂȘtre est-il sous-entendu â et ce sera la doctrine des SĂąmkhya KĂąrikĂą (53-
54) â quâentre le monde des dieux imprĂ©gnĂ© de sattva et celui des animaux, oĂč domine le
tamas la crĂ©ation humaine est, par nature, rĂąjasique, mais ce nâest Ă aucun moment
exprimĂ© ici et il semble que, dans lâun et lâautre cas, lâespĂšce humain soit seule en cause. La
vie Ă©ternelle nâest pas la dissolution dans un indĂ©terminable absolu, mais la rĂ©alisation de
lâunitĂ© de lâesprit Ă©levĂ© au-dessus du mouvement expĂ©rimental. Son Ă©tat nâest plus affectĂ©
par les processus cycliques de création et de dissolution, étant supérieur à toutes les
manifestations. LâĂąme ayant atteint lâimmersion du moi personnel dans lâexistence infinie,
le NirvĂąna, devient semblable au Divin et acquiert un ĂȘtre immuable, Ă©ternellement
conscient du SuprĂȘme Seigneur, qui prend des formes cosmiques diverses. Si nous Ă©tions
uniquement des produits de la nature, nous ne pourrions pas atteindre le NirvĂąna.
LâapĂŽtre Paul aux Galates Ă©crivit : « Je dis donc : Marchez selon lâEsprit, et vous
nâaccomplirez pas les dĂ©sirs de la chair. Car la chair a des dĂ©sirs contraires Ă ceux de
lâEsprit, et lâEsprit en a de contraires Ă ceux de la chair ; ils sont opposĂ©s entre eux, afin
que vous ne fassiez point ce que vous voudriez. Si vous ĂȘtes conduits par lâEsprit, vous
nâĂȘtes point sous la loi. Or, les Ćuvres de la chair sont manifestes, ce sont lâimpudicitĂ©,
lâimpuretĂ©, la dissolution, lâidolĂątrie, la magie, les inimitiĂ©s, les querelles, les jalousies, les
animositĂ©s, les disputes, les divisions, les sectes, lâenvie, lâivrognerie, les excĂšs de table, et les
choses semblables. Je vous dis dâavance, comme jâai dĂ©jĂ dit, que ceux qui commentent de
telles choses nâhĂ©riteront point le royaume de Dieu. Mais le fruit de lâEsprit, câest lâamour,
la joie, la paix, la patience, la bonté, la bénignité, la fidélité, la douceur, la tempérance ; la
loi nâest pas contre ces choses. » (Galates 5.16-23 dans la version de Louis Segond)
Lorsque lâĂąme sâidentifie avec les modes de la nature, elle oublie sa propre Ă©ternitĂ© et utilise
le mental, lâĂ©nergie vitale et le corps pour des fins Ă©goĂŻstes. Pour nous Ă©lever au-dessus de
lâesclavage nous devons transcender les modes de la nature, et ainsi avoir part Ă la nature
libre et incorruptible de lâEsprit. Pour se perfectionner, on sâefforce, dans la voie extĂ©rieure
dâaccomplir sans cesse des actes vertueux, on essaie par tous les moyens dâarracher le vice,
de dĂ©raciner lâun aprĂšs lâautre de la nature humaine les attachements intĂ©ressĂ©s. Dans la
vie intĂ©rieure, câest le SuprĂȘme Seigneur qui opĂšre. Le recueillement plein de dĂ©votion et la
vertu deviennent plus forts; les liens se rompent; les imperfections disparaissent; les
passions sâĂ©vanouissent et lâĂąme se trouve libre. Les vertus traditionnelles de la dĂ©votion
hindoue sont ici rassemblĂ©es pour dĂ©crire une vie âspirituelle et divineâ. Les asuras (ĂȘtres
hostiles dans le monde mentale) sont habiles et Ă©nergiques, mais souffrent dâun Ă©goĂŻsme
exagĂ©rĂ©, et nâont ni scrupules moraux, ni visĂ©es spirituelles.
Ce verset 8 rejette lâathĂ©isme et tout ce qui se rapproche du matĂ©rialisme, dans la condition
démoniaque, quant aux versets 18-20, ils prouvent nettement que, contrairement à ce qui
sera la doctrine classique, les natures ùsuriques sont bien distribuées parmi les hommes.
Câest la doctrine matĂ©rialiste qui nous convie Ă manger, boire et ĂȘtre joyeux, car la mort est
certaine, et il nây a rien au delĂ .
La tentation de conquĂ©rir la puissance et dâexercer la souverainetĂ© se rencontre partout.
Câest la disposition de dominer sur les autres qui a fait lâesclavage de lâhomme. LâĂąme
spirituelle rejette la tentation comme JĂ©sus lâa fait par trois fois dans le dĂ©sert au dĂ©but de
son ministÚre. Par contre, les ùmes démoniaques acceptent de telles fins et exaltent
lâorgueil, la vanitĂ©, la cupiditĂ©, la haine, la brutalitĂ©, comme des vertus.
Pour conclure ce chapitre (versets 23-24) exprime sa rĂ©vĂ©rence envers la tradition puisquâil parle des
prescriptions des traitĂ©s. Il se peut quâil y ait lĂ , Ă©tant donnĂ© lâemploi du terme kĂąma (dĂ©sir ou libido), un
ressouvenir de la PraĆna UpaniĆad, p.1, 13 et 15. Le verset 13 de lâUpaniĆad, notamment dit : « PajĂąpati est le
jour et la nuit ; ceux-lĂ gaspillent le souffle qui, par voluptĂ©, sâunissent de jour. La rĂšgle brahmanique est
quâils sâunissent de nuit. »
Chapitre 17
LA TRIPLE FOI
Arjuna dit : Quelle est la condition de dévotion de ceux qui accomplissent des pratiques
spirituelles avec foi, mais sans poursuivre les injonctions scripturaires, O KĆĆna ? Est-ce
dans le mode bontĂ© (SÄttvika), passion (RÄjasika), ou ignorance (TÄmasika) ? (17.01)
LES TROIS SORTES DE FOI
Le SuprĂȘme Seigneur dit : La foi naturelle des ĂȘtres incarnĂ©s est triple : bontĂ©, passion, et
ignorance (SÄttvika, RÄjasika, TÄmasika). Ecoute maintenant ce que Jâai Ă te dire Ă ce
propos. (17.02)
O Arjuna, la foi de chacun est en accord avec sa propre disposition naturelle (gouvernée
par les impressions Karmiques). Lâhomme est fait par sa foi. Il peut devenir ce quâil
souhaite ĂȘtre (sâil contemple sans cesse lâobjet de son dĂ©sir avec foi). (17.03)
Les personnes dans le mode bonté adorent les régnants célestes (Devas) ; ceux dans le mode
passion adorent les régnants surnaturelles et les démons ; et ceux dans le mode ignorance
adorent les fantĂŽmes et les esprits. (17.04)
Ceux qui pratiquent des austérités sévÚres sans suivre les prescriptions des écritures ; qui
sont pleins dâhypocrisie et dâĂ©goĂŻsme ; qui sont poussĂ©s par la force du dĂ©sir et de
lâattachement ; qui torturent insensĂ©ment les Ă©lĂ©ments de leurs corps, et Moi aussi qui
rĂ©side dans leur corps, sache quâils sont des personnes ignorantes de nature dĂ©moniaque.
(17.05-06)
LES TROIS SORTES DE NOURRITURE
La nourriture préférée par chacun de nous relÚve aussi de trois sortes, comme le sont les
sacrifices, les austérités, et la charité. Ecoute maintenant la distinction entre eux. (17.07)
Les aliments qui accroissent la longévité, la vertu, la force, la santé, le bonheur, et la joie,
sont savoureux, substantiels, et nutritifs. Ces aliments sont préférés par les personnes qui
appartiennent au mode bonté. (17.08)
Les aliments qui sont amÚres, aigres, salés, trÚs chaudes, piquantes, sÚches, et brûlantes ; et
qui causent la douleur, le chagrin et la maladie ; sont préférés par les personnes du mode
passion. (17.09)
Les aliments que préfÚrent les personnes appartenant au mode ignorance sont gùtés, sans
saveurs, affadies, pourries, faites de restes, et impures (comme la viande et lâalcool). (17.10)
LES TROIS SORTES DE SACRIFICE
Le service dĂ©sintĂ©ressĂ© (SevÄ, Yajna) prescrit par les Ă©critures, et accompli sans dĂ©sir pour
le fruit de lâaction, avec une foi et conviction fermes en tant que devoir, appartient au mode
bonté. (17.11)
Le service dĂ©sintĂ©ressĂ© (SevÄ, Yajna) qui est accompli superficiellement avec la pensĂ©e des
avantages, appartient au mode passion, O Arjuna. (17.12)
Le service dĂ©sintĂ©ressĂ© (SevÄ, Yajna) qui est accompli contrairement aux Ă©critures, dans
lequel aucune nourriture nâest distribuĂ©e, qui se fait en lâabsence de mantra, vide de foi, et
sans dons, on dit, dâappartenir au mode ignorance. (17.13)
AUSTERITES EN PENSEES, PAROLES ET ACTIONS
Lâadoration des rĂ©gnants cĂ©lestes (Devas), le prĂȘtre, le gourou et le sage ; la puretĂ©,
lâhonnĂȘtetĂ©, le cĂ©libat, la non-violence, sont considĂ©rĂ©s comme lâaustĂ©ritĂ© de lâaction. (17.14)
La parole qui nâest pas offensive, qui est vraie, agrĂ©able, bĂ©nĂ©fique, et qui est utilisĂ©e pour
lâĂ©tude rĂ©guliĂšre des Ă©critures est appelĂ©e lâaustĂ©ritĂ© de la parole. (17.15)
La sĂ©rĂ©nitĂ© du mental, la bienveillance, lâĂ©quanimitĂ©, la maĂźtrise de soi, et la puretĂ© de
pensĂ©e, sont nommĂ©es lâaustĂ©ritĂ© de la pensĂ©e. (17.16)
LES TROIS SORTES DâAUSTĂRITĂS
Cette triple austĂ©ritĂ© susmentionnĂ©e (de pensĂ©e, de parole, et dâaction) pratiquĂ©e par les
yogis avec une foi suprĂȘme, sans dĂ©sir pour les fruits (rĂ©sultats), est considĂ©rĂ©e comme
étant du mode bonté. (17.17)
LâaustĂ©ritĂ© pratiquĂ©e pour gagner le respect, lâhonneur, la vĂ©nĂ©ration, et par dĂ©sir de gloire
extĂ©rieure se donnant aux rĂ©sultats incertains et temporaires, dit-on, dâappartenir au mode
passion. (17.18)
LâaustĂ©ritĂ© pratiquĂ©e avec une obstination stupide, ou en se torturant soi-mĂȘme, ou en
faisant du mal aux autres, est dĂ©clarĂ©e ĂȘtre du mode ignorance. (17.19)
LES TROIS SORTES DE CHARITE
La charitĂ© confĂ©rĂ©e en tant que devoir, Ă un candidat digne dont on nâattend rien en retour,
au moment et Ă lâendroit appropriĂ©s, est considĂ©rĂ©e ĂȘtre la charitĂ© du mode bontĂ©. (17.20)
La charitĂ© accomplie Ă contrecĆur, ou dans lâespoir de recevoir quelque chose en retour,
ou dans lâattente de quelque bĂ©nĂ©fice, dit-on, ĂȘtre du mode passion. (17.21)
La charité rendue en un lieu et à un moment inconvenables, et à des personnes indignes ;
sans respect ou avec dĂ©dain Ă lâĂ©gard de la personne qui reçoit, dit-on, ĂȘtre du mode
ignorance. (17.22)
LE TRIPLE NOM DE DIEU
« Om Tat Sat », dit-on, ĂȘtre le triple nom de lâĂternel Ătre (Brahman). Les personnes avec
des qualitĂ©s Brahmaniques, les VĂ©das, et le service dĂ©sintĂ©ressĂ© (SevÄ, Yajna) furent crĂ©es
dans les temps anciens par et pour Brahman. (17.23)
Par consĂ©quent, les actes de sacrifice, de charitĂ©, et dâaustĂ©ritĂ© prescrits dans les Ă©critures
commencent toujours en Ă©nonçant « OM » par les connaisseurs du SuprĂȘme Ătre (Para-
Brahman). (17.24)
Les diffĂ©rentes sortes de sacrifice, de charitĂ©, et dâaustĂ©ritĂ© sont accomplies par les
chercheurs du salut (MokĆa) en Ă©nonçant « Tat » (ou Il est tout) sans attendre une
récompense. (17.25)
Le mot « Sat » est utilisé dans le sens de la Réalité et de la bonté. Le mot « Sat » est aussi
employé pour désigner un acte louable, O Arjuna. (17.26)
La foi dans le sacrifice, la charitĂ©, et lâaustĂ©ritĂ© est aussi appelĂ©e « Sat ». Le service
dĂ©sintĂ©ressĂ© pour la cause du SuprĂȘme est sĂ»rement appelĂ© « Sat ». (17.27)
Tout ce qui est accompli sans foi â que ce soit le sacrifice, lâaustĂ©ritĂ©, ou nâimporte quel
autre acte â est appelĂ© « Asat ». Cela nâa pas de valeur, ni ici ou dans lâau-delĂ , O Arjuna.
(17.28)
Ainsi prend fin le dix-septiĂšme chapitre intitulĂ© «La Triple Foi» dans les UpaniĆad de la
BhagavadgÄ«tÄ, lâĂ©criture de yoga, touchant la science de lâAbsolu dans la forme du dialogue
entre SrÄ«kĆĆna et Arjuna.
Ce chapitre qui traite de âLa Triple Foiâ se rapproche de la doctrine classique en ce quâil
envisage les conséquences de la prédominance de chacun des trois modes de la Nature
matĂ©rielle. Mais câest dans la condition humaine quâil en Ă©tudie les rĂ©percussions, en
particulier en ce qui concerne la foi dâun individu et son comportement religieux dans les
trois prescriptions héritées des époques antérieures : sacrifice, austérités et charité. Arjuna
commence par une question touchant ceux qui ont rejeté les observances des traités, mais
possĂšdent la foi, qui dans lâhabituelle perspective hindoue, sont des renonçants. La foi nâest
pas lâacceptation dâune croyance, mais un effort vers la rĂ©alisation du Soi, par la
concentration des Ă©nergies du mental sur un idĂ©al donnĂ©. La foi est la pression de lâEsprit
sur lâhumanitĂ©, la force qui pousse lâhumanitĂ© vers le mieux, non seulement dans le
domaine de la connaissance, mais dans lâordre entier de la vie spirituelle. La foi, en tant
que sens intime de la vĂ©ritĂ©, indique lâobjet quâune lumiĂšre plus vive illuminera plus tard.
AprĂšs tout, la derniĂšre et la plus indiscutable des preuves de toute foi religieuse est
lâĂ©vidence du cĆur. La joie et la paix intĂ©rieure sont les fruits du SuprĂȘme Esprit et ne
sâobtiennent que par la rĂ©signation au plus profond du cĆur.
Puissances élémentales.
Esprits des morts.
Le Seigneur KĆĆna rĂ©plique en disant que la foi, comme les autres sentiments humains,
revĂȘt une coloration diffĂ©rente selon quâelle est plus particuliĂšrement affectĂ©e par lâun ou
lâautre des constituants naturels (verset 5) ; avec pour corollaire cette affirmation qui
reproduit une vieille notion : celui qui connaĂźt le SuprĂȘme Seigneur (Brahman), et donc
croit en Lui, sâidentifie au SuprĂȘme Seigneur. Il semble, dâaprĂšs la classification du verset
4, que les Yakshas (rĂ©gnants naturelles, ou classe dâĂȘtres dĂ©moniaques) et les RĂąkshassas
(famille dâĂȘtres dĂ©moniaques, ou ĂȘtres hostiles dans le monde vital moyen) nâaient pas
vraiment ici un caractÚre démoniaque ; mais les versets 5 et 6 vont rétablir la notion
Ăąsurique (asura, ĂȘtre hostile dans le monde mental) du chapitre prĂ©cĂ©dent ; en mĂȘme
temps, ils condamnent les austĂ©ritĂ©s excessives : la dĂ©votion prĂȘchĂ©e dans la GĂźtĂą est une
voie de confiance et non dâefforts pĂ©nibles. Les mĂ©thodes dâaustĂ©ritĂ©s excessives jusquâĂ la
torture de soi suivies par certains par ostentation, telles que le port de cilices, ou lâinfliction
de blessures, sont ici condamnées. La faiblesse physique produit parfois des hallucinations,
que lâon confond avec des visions spirituelles. La discipline de soi nâa rien Ă voir avec la
torture de soi. La vraie discipline du corps par la pratique de la propreté, etc. est indiquée
au verset 14, notamment la pureté intérieure et extérieure.
Les versets de 7 à 10 répartissent les nourritures préférées de chacune des trois catégories; il ne faut pas
oublier lâimportance de la nourriture dans la perspective traditionnelle, spirituelle ou mystique. On mange
pour vivre; on prend ce qui est nĂ©cessaire pour soutenir le travail et faire face aux obĂ©diences; et lâon garde
toujours cette disposition de bonne Ă©ducation, dâhygiĂšne et de sacrifices qui nous fait demeurer en deçà de la
satiété. Le manger ne peut pas devenir pour nous une préoccupation majeure dans notre vie, un souci
constant et cruel mĂȘme. Les seules fonctions de la nourriture sont dâaccroĂźtre la vie, de purifier le mental et
de se donner un corps sain et vigoureux. Maints diététiciens choisissent les aliments qui nous servent le mieux,
comme les produits laitiers, le sucré (avec mesure), le riz complet, le blé, les fruits et les légumes. Tous ces
aliments sont purs, et sâĂ©loignent fort des choses impures comme la viande et lâalcool. Les aliments
substantiels que mentionne le verset 8 nâont pas de lien avec la graisse fournie par lâabattage des animaux.
Les graisses animales sont suffisamment fournies dans le lait et ses produits comme le beurre et les fromages,
ainsi que dâautres produits semblables, qui donnent des graisses animales sous une forme qui exclut toute
nĂ©cessitĂ© de tuer dâinnocents animaux, et amis de lâhomme. La seule maniĂšre saine dâobtenir les matiĂšres
grasses nĂ©cessaires Ă lâhomme vient du lait et du potager (huile dâolives, par exemple). On trouve les
protéines dans les pois cassés, le blé complet, etc. Un tel régime doit rester équilibré, contenir assez de
protĂ©ines pour pouvoir Ă la perpĂ©tuelle reconstruction de lâorganisme. Il le sera aisĂ©ment si on place Ă sa base
du pain de froment complet ou du blĂ© sous une autre forme, du riz Ă©galement complet (riz brun), et si lâon y
ajoute du fromage ; et, avec modération, des légumineuses : haricots, pois, lentilles, graines de soja, etc. On
trouve beaucoup de protéines dans les noix, noisettes, cacahuÚtes et autres fruits oléagineux. Quant aux fruits
et légumes, on les mangera de préférence frais, produits dans le pays et en leur saison. Ils conservent mieux
leurs vitamines sâils sont consommĂ©s crus. Autant que possible, lâhuile et les autres graisses vĂ©gĂ©tales ne
seront ni portĂ©es Ă Ă©bullition, ni mĂȘme trop Ă©chauffĂ©es : mieux vaut les ajouter crues aux aliments dĂ©jĂ cuits.
Il faut en tout cas Ă©viter les fritures, qui sont de vĂ©ritables poisons. Dâune façon gĂ©nĂ©rale, prĂ©fĂ©rer une cuisson
lente Ă une cuisson trop rapide. On veillera Ă ne pas abuser du sel et des condiments irritants pour lâintestin.
Le sucre, de son cĂŽtĂ©, ne doit ĂȘtre pris que modĂ©rĂ©ment, et de prĂ©fĂ©rence sous forme de miel, de cassonade ou
de candi. On aura grand soin de bien mùcher la nourriture, surtout les féculents (pain, riz, légumineuses,
etc.), qui ont besoin dâĂȘtre bien imprĂ©gnĂ©s de salive pour ĂȘtre convenablement assimilĂ©s. Il va de soi quâil est
interdit de consommer tout boissons alcooliques.
Hymne VĂ©dique ou priĂšre issue dâun texte sacrĂ©.
Les versets 11, 12, et 13 se partagent de la mĂȘme façon que pour la nourriture aux versets
précédents.
Sattvique.
Rajasique.
Tamasique.
Les versets de 14 Ă 19, pourraient se raccorder directement au verset 6 car ils indiquent
comment, dans cet enseignement, lâascĂšse doit ĂȘtre intĂ©riorisĂ©e et comment elle sâexprime
dans le comportement de lâindividu, son langage et son attitude mentale. AprĂšs exaltation
de ce quâest lâaustĂ©ritĂ© de nature sattvique, on expose le dĂ©roulement du mĂȘme processus
dĂ©terminĂ© par passion (18) et lâignorance (19).
OM ! (Le son originel reprĂ©sentant la RĂ©alitĂ© spirituelle suprĂȘme.) La syllabe mystique qui
rĂ©sume tous les VĂ©das et symbolise le SuprĂȘme Ătre (Brahman) est donnĂ©e ici (au verset 23)
avec deux autres monosyllabes TAT et SAT. « Tat » (Cela) est le pronom démonstratif que
lâon assimile au SuprĂȘme Ătre, dans la formule tat tvam asi, « tu es cela ». Quant à « Sat »
(ĂȘtre, existence, bien), participe prĂ©sent de la racine AS, ĂȘtre, il signifie littĂ©ralement
« lâexistant » mais on le traduit ordinairement par « Ătre » opposĂ© au Non-Ătre (asat). Par
extension, Sat reprĂ©sente aussi ce qui est en excellence : dâoĂč le sens de « bon », « saint »,
qui explique les derniers versets.
Les remarques du verset 28 sur lâasat signifient que lâoeuvre accomplie sans les conditions
requises non seulement ne sont pas bonnes mais, quâen tout Ă©tat de cause, elles nâexistent
pas, elles sont « non-ĂȘtre ».
Chapitre 18
LA MOKĆA (LibĂ©ration) PAR LE RENONCEMENT
Arjuna dit : Je dĂ©sire connaĂźtre la nature de SamnyÄsa et TyÄga, et la diffĂ©rence entre les
deux, O Seigneur KĆĆna. (18.01)
LA DEFINITION DE LA RENONCIATION ET DU SACRIFICE
Le SuprĂȘme Seigneur dit : Les sages considĂšrent SamnyÄsa (Renonciation) comme Ă©tant la
renonciation complĂšte des actions Ă©goĂŻstes. Les sages dĂ©finissent TyÄga (Sacrifice) comme
« abandon », lâabandon Ă lâattachement Ă©goĂŻste aux fruits de tout action. (Voir aussi 5.01,
5.05, et 6.01) (18.02)
Certains philosophes disent que toute action est pleine de fautes et devrait ĂȘtre abandonnĂ©e,
pendant que dâautres disent que les actions de sacrifice, de charitĂ©, et dâaustĂ©ritĂ© ne
devraient pas ĂȘtre abandonnĂ©es. (18.03)
O Arjuna, apprend Ma conclusion concernant le sacrifice. Le sacrifice, dit-on, est de trois
sortes. (18.04)
Les actes de service, de charitĂ©, et dâaustĂ©ritĂ© ne devraient pas ĂȘtre abandonnĂ©s, mais
devraient ĂȘtre accomplis, car le service, la charitĂ©, et lâaustĂ©ritĂ© sont les purificateurs des
sages. (18.05)
MĂȘme ces actions obligatoires devraient ĂȘtre accomplies sans attachement aux fruits. Ceci
est Mon conseil suprĂȘme et dĂ©finitif, O Arjuna. (18.06)
LES TROIS TYPES DE SACRIFICE
Le renoncement au devoir est vraiment impropre. Lâabandon de lâaction obligatoire est
due Ă lâillusion, et est dĂ©clarĂ© dâappartenir au mode ignorance. (18.07)
Celui qui abandonne le devoir parce que câest difficile, ou par peur de la souffrance
physique, nâobtient pas les bĂ©nĂ©fices du sacrifice, accomplissant ainsi un sacrifice dans le
mode passion. (18.08)
Lâaction obligatoire accomplie comme devoir, renonçant Ă lâattachement Ă©goĂŻste et Ă ses
fruits, son abandon est considéré comme sacrifice dans le mode bonté, O Arjuna. (18.09)
Celui qui nâhaĂŻt pas le travail dĂ©sagrĂ©able, ni est attachĂ© au travail agrĂ©able, est considĂ©rĂ©
comme renonciateur (TyÄgi), il est imbu du mode bontĂ©, intelligent, et libĂ©rĂ© de tous les
doutes touchant le SuprĂȘme Ătre. (18.10)
Les ĂȘtres humains ne savent pas sâabstenir complĂštement Ă lâaction. Par consĂ©quent, celui
qui renonce complĂštement Ă lâattachement Ă©goĂŻste aux fruits de toutes actions est considĂ©rĂ©
comme un renonciateur. (18.11)
Le triple fruit des actions â dĂ©sirable, indĂ©sirable ou mĂ©langĂ© Ă©choit aprĂšs la mort
seulement Ă celui qui nâest pas un renonciateur (TyÄgi), mais jamais Ă un TyÄgi. (18.12)
LES CINQ CAUSES DE NâIMPORTE QUELLE ACTION
Apprends de Moi, O Arjuna, les cinq causes comme énoncées dans la doctrine Sùmkhya,
pour lâaccomplissement de toutes les actions. Ce sont : le corps physique, le siĂšge de
Karma ; les modes (Gunas) de la Nature matĂ©rielle, lâauteur ; les onze organes de
perception et dâaction, les instruments ; les diffĂ©rentes fonctions PrÄnas (bioimpulsions) ;
et, le cinquiÚme constitue les divinités qui président (les onze organes). (18.13-14)
Quelle que soit lâaction accomplie par lâhomme, bonne ou mauvaise, par sa pensĂ©e, son
discours, et le corps, ce sont lĂ les cinq causes. (18.15
Par consĂ©quent, lâignorant qui considĂšre comme seul agent son corps ou son Ăąme due Ă la
connaissance imparfaite, nâa rien compris. (18.16)
Celui qui est libĂ©rĂ© de la notion Ă©gocentrique, et dont lâintellect nâest pas souillĂ© par le dĂ©sir
de la rĂ©colte ; quand bien mĂȘme il tuerait tout ce monde, il ne tue pas et nâest pas liĂ© par
lâaction de tuer. (18.17)
Le sujet, lâobjet, et la connaissance de lâobjet sont le triple moteur (ou poussĂ©e vitale) dâune
action. Les onze organes ; lâacte, et lâagent ou les modes (Gunas) de la Nature matĂ©rielle
sont les trois composants de lâaction. (18.18)
LES TROIS TYPES DE CONNAISSANCE
JnÄna (la Connaissance du Soi), Karma (lâAction), et KartÄ (lâAgent), dit-on, sont les trois
types dâaprĂšs la doctrine SÄmkhya relative Ă la thĂ©orie des Gunas. Apprends comme il
convient ce qui les concerne. (18.19)
La connaissance par laquelle on perçoit la RĂ©alitĂ© immuable dans tous les ĂȘtres comme
indivise dans le divisé ; telle connaissance est du mode bonté. (Voir aussi 11.13, et 13.16)
(18.20)
La connaissance par laquelle on voit les multiples réalités de différents types parmi tous les
ĂȘtres, distincts les uns des autres, considĂšre cette connaissance appartenant au mode
passion. (18.21)
La connaissance irrationnelle, sans fondement et sans mĂ©rite qui sâattache Ă un seul effet
singulier (tel que le corps) comme si câĂ©tait le tout ; telle connaissance est dĂ©clarĂ©e
dâappartenir au mode tĂ©nĂ©breux de lâignorance. (18.22)
LES TROIS TYPES DâACTION
Lâaction obligatoire accomplie sans attraction ni aversion, et sans motivations Ă©goĂŻstes et
attachement au désir du fruit, dit-on, est du mode bonté. (18.23)
Lâaction accomplie avec lâego, ou par des motivations Ă©goĂŻstes, et avec beaucoup trop
dâeffort ; est dĂ©clarĂ©e ĂȘtre du mode passion. (18.24)
Lâaction entreprise par illusion ; sans Ă©gard pour les consĂ©quences, les pertes, la souffrance
infligĂ©e aux autres, et de la force quâelle requiert, dit-on, est du mode ignorance. (18.25)
LES TROIS TYPES DâAGENT
Un agent qui est libre dâattachement, affranchi de lâĂ©goĂŻsme, douĂ© de rĂ©solution et
dâenthousiasme, inaffectĂ© par le succĂšs ou lâĂ©chec, est appelĂ© bontĂ©. (18.26)
Lâagent qui est poussĂ© par la passion, qui dĂ©sire les fruits de son travail, qui est avide,
violent, impure, et qui est affecté par la joie et la douleur, est appelé « passionné ». (18.27)
Lâagent indisciplinĂ©, vulgaire, obstinĂ©, mĂ©chant, malhonnĂȘte, paresseux, dĂ©primĂ©, et
hésitant, est appelé ignorant. (18.28)
LES TROIS TYPES DâINTELLECT
Ecoute maintenant la triple division de lâintellect et de la fermetĂ©, selon les modes de la
Nature matérielle, comme Je vais te les exposer pleinement et séparément, O Arjuna.
(18.29)
O Arjuna, lâintellect par lequel on comprend la voie de lâaction et la voie de la renonciation,
lâaction juste ou fausse, ce quâon doit craindre et ce quâon ne doit pas craindre, la servitude
et la libération, cet intellect est du mode bonté. (18.30)
Lâintellect par lequel on ne sait pas distinguer entre la justice (Dharma) et lâinjustice
(Adharma), lâaction juste ou fausse ; cet intellect est du mode passion, O Arjuna. (18.31)
Lâintellect â qui enveloppĂ© par lâignorance â accepte lâinjustice (Adharma) comme justice
(Dharma), et voit toutes choses en lâenvers, est du mode ignorance, O Arjuna. (18.32)
LES TROIS TYPES DE RESOLUTION, ET LES QUATRE BUTS DE LA VIE
HUMAINE
La fermetĂ© inĂ©branlable par laquelle on manipule les fonctions du mental, PrÄna
(Bioimpulsions), et des sens pour la réalisation de Dieu; cette détermination est du mode
bonté, O Arjuna. (18.33)
La fermeté avec laquelle une personne, en aspirant aux fruits du travail, se relie avec grand
attachement au Dharma (le devoir), Ă Artha (la richesse), et Ă KÄma (le plaisir) ; cette
détermination, O Arjuna, est du mode passion. (18.34)
La fermetĂ© avec laquelle une personne stupide nâabandonne pas le sommeil, ni la peur, ni le
chagrin, ni le dĂ©sespoir, ni lâinsouciance ; cette dĂ©termination est du mode ignorance, O
Arjuna. (18.35)
LES TROIS TYPES DE PLAISIR
Et maintenant apprends de Moi, O Arjuna, quelles sont les trois sortes de plaisir. Le plaisir
par lequel lâhomme se rĂ©jouit grĂące aux rĂ©sultats des pratiques spirituelles mettant une fin
Ă toutes souffrances. (18.36)
Le plaisir qui apparaßt comme un poison au début, mais qui se révÚle comme nectar à la
fin, provient de la grùce de la connaissance du Soi, et est du mode bonté. (18.37)
Les plaisirs sensuels apparaissent au commencement comme un nectar, mais deviennent du
poison Ă la fin ; tels plaisirs appartiennent au mode passion. (Voir aussi 5.22) (18.38)
Le plaisir qui brouille lâhomme au dĂ©but comme Ă la fin ; provient du sommeil, de la
paresse, et de lâinsouciance ; ce plaisir, dit-on, appartient au mode ignorance. (18.39)
Il nây a aucun ĂȘtre, ni sur terre ou au ciel parmi les rĂ©gnants cĂ©lestes (Devas), qui soit libre
des trois modes (Gunas) de la Nature matĂ©rielle (PrakĆti). (18.40)
LA RĂPARTITION DU TRAVAIL DEPEND DE LA CAPACITE DE LâHOMME
La rĂ©partition du travail en ces quatre catĂ©gories â BrÄhmana, KĆatriya, VaiĆya, et ĆĆ«dra
â dĂ©pend aussi des qualitĂ©s inhĂ©rentes de la nature des personnes (ou des dispositions
naturelles, et pas vraiment du droit de naissance de quelquâun), O Arjuna. (18.41)
Les intellectuels qui soutiennent la sĂ©rĂ©nitĂ©, la maĂźtrise de soi, lâaustĂ©ritĂ©, la puretĂ©, la
patience, lâhonnĂȘtetĂ©, la connaissance transcendantale, lâexpĂ©rience transcendantale, la foi
en Dieu sont rangĂ©s parmi les BrÄhmanas. (18.42)
Ceux qui ont les qualitĂ©s de lâhĂ©roĂŻsme, de vigueur, de fermetĂ©, de dextĂ©ritĂ©, le non-
abandon du champ de bataille, la charité, et les capacités administratives, sont appelés
KĆatriyas, ou protecteurs. (18.43)
Ceux qui sont bons en agriculture, Ă lâĂ©levage du bĂ©tail, le commerce, la nĂ©gociation,
lâindustrie, sont appelĂ©s des VaiĆyas. Ceux qui ont la capacitĂ© de servir ou qui travaillent
dans la manutention de tout genre sont classĂ©s parmi les ĆĆ«dras. (18.44)
L'ACQUISITION DU SALUT PAR LE DEVOIR, LA DISCIPLINE, ET LA
DEVOTION
On peut atteindre la plus haute perfection en sâattachant Ă son travail naturel. Ăcoute Moi
maintenant, comment on atteint la perfection en sâengageant Ă son travail naturel. (18.45)
On atteint la perfection en adorant le SuprĂȘme Ătre dâoĂč procĂšdent tous les ĂȘtres, et dont
est pĂ©nĂ©trĂ© tout cet univers â par lâaccomplissement de son propre devoir pour Lui. (Voir
aussi 9.27, 12.10) (18.46)
Mieux vaut suivre son propre travail naturel inférieur, que le travail supérieur anormal
mĂȘme rĂ©alisĂ© correctement. En accomplissant le travail prescrit par sa propre nature
inhĂ©rente (sans motifs intĂ©ressĂ©s), on nâencourt pas de pĂ©chĂ© (ou, la rĂ©action Karmique).
(Voir aussi 3.35) (18.47)
On ne doit pas abandonner son travail naturel, mĂȘme sâil est imparfait ; car toutes les
entreprises sont enveloppĂ©es de dĂ©fauts, comme le feu lâest par la fumĂ©e, O Arjuna. (18.48)
La personne dont le mental est toujours vide dâattachement Ă©goĂŻste, qui a maĂźtrisĂ© son
mental et ses sens, et qui a affranchi tous les dĂ©sirs ; atteint la suprĂȘme perfection de libertĂ©
face Ă lâenchaĂźnement Karmique, en renonçant Ă lâattachement intĂ©ressĂ© aux fruits du
travail. (18.49)
Apprends de Moi briÚvement, O Arjuna, comment celui qui est arrivé à une telle perfection
(ou la libĂ©ration de lâenchaĂźnement Karmique) atteint la SuprĂȘme Personne, le but de la
connaissance transcendantale. (18.50)
DotĂ© dâun intellect purifiĂ©, maĂźtrisant le mental par une ferme dĂ©termination, se
dĂ©tournant du son et autres objets des sens, rejetant lâattraction et lâaversion ; vivant dans
la solitude, mangeant légÚrement, tenant sous contrÎle le mental, la parole, et les organes
dâaction, toujours absorbĂ© dans le yoga de mĂ©ditation, prenant refuge dans le
dĂ©tachement ; et ayant abandonnĂ© lâĂ©gotisme, la violence, lâarrogance, le dĂ©sir, la colĂšre, et
lâinstinct de possession ; il devient paisible, libĂ©rĂ© de la notion du « je et moi », et ainsi
digne pour sâunir au SuprĂȘme Ătre (Para-Brahman). (18.51-53)
AbsorbĂ© dans le SuprĂȘme Ătre (Para-Brahman), lâhomme serein ne sâafflige ni ne dĂ©sire ;
devenant impartial envers tous les ĂȘtres, il obtient Mon ParÄ-Bhakti, lâamour dĂ©votionnel
le plus élevé. (Voir aussi 5.19) (18.54)
Par la dĂ©votion lâhomme comprend vraiment ce que Je suis et qui Je suis dâessence.
Mâayant connu dans Mon essence, il pĂ©nĂštre immĂ©diatement en Moi. (18.55)
Un Karma dĂ©vot atteint par Ma grĂące MokĆa, la demeure Ă©ternelle et immuable â mĂȘme en
accomplissant toutes ses actions â prenant simplement en Moi son refuge, (Me confiant
toutes ses actions dans une douce dévotion). (18.56)
Me dĂ©diant sincĂšrement toutes les actions, prends Moi comme but suprĂȘme, et dĂ©pend
complĂštement de Moi. Fixe constamment ton mental sur Moi, en recourant au Karma-
yoga. (18.57)
Lorsque ton mental se fixe sur Moi, tu surmonteras toutes les difficultés par Ma grùce.
Mais si tu ne mâĂ©coutes pas Ă cause de ton ego, tu pĂ©riras. (18.58)
LâENCHAINEMENT KARMIQUE
Si te laissant aller par lâego tu penses : Je ne combattrai pas ; ta rĂ©solution est vaine. Car ta
propre nature te contraindra (au combat). (18.59)
O Arjuna, tu es contrĂŽlĂ© par les impressions Karmiques de ta propre nature (SamskÄra).
Par consĂ©quent, tu feras â mĂȘme contre ta volontĂ© â ce que par Ă©garement tu ne dĂ©sires pas
faire. (18.60)
NOUS DEVENONS LES MARIONNETTES DE NOTRE PROPRE LIBRE ARBITRE
Le SuprĂȘme Seigneur rĂ©side comme chef (ÄȘĆvara) dans le cĆur causal (ou la psychĂ©
intĂ©rieure) de tous les ĂȘtres, O Arjuna, les amenant Ă lâaction (ou Ă travailler Ă leur Karma)
comme une marionnette (du Karma) montée sur une machine. (18.61)
Empli de douce dĂ©votion, cherche refuge en le SuprĂȘme Seigneur seul (KĆĆna ou ÄȘĆvara), O
Arjuna. Par Sa grĂące tu atteindras la paix suprĂȘme et lâĂternel Demeure (Parama-dhÄma).
(18.62)
Ainsi, tâai-Je exposĂ© la connaissance plus secrĂšte que tous les secrets. AprĂšs y avoir rĂ©flĂ©chi,
fais ce que tu veux. (18.63)
LA VOIE DE LâABANDON, EST LA VOIE ULTIME VERS DIEU
Ăcoute une fois de plus Mon grand secret, Ma parole suprĂȘme. Tu Mâes trĂšs cher, par
conséquent, Je te dirai ce qui est bon pour toi. (18.64)
Fixe ton mental sur Moi, sois mon dévot, offre-Moi ton service, prosterne-toi devant Moi, et
tu Mâatteindras certainement. Je te le promets, car tu es Mon trĂšs cher ami. (18.65)
Mettant tous les actes méritoires (Dharma) sur le cÎté, abandonne-toi uniquement et
complÚtement à Ma volonté (avec une foi ferme et la douce contemplation). Je te libérerai
de tout pĂ©chĂ© (ou, des chaĂźnes de Karma). Nâaie pas de peine. (18.66)
Tu ne devrais jamais exposer cette connaissance Ă celui qui est dĂ©nuĂ© dâaustĂ©ritĂ©, et qui nâa
pas de dévotion, qui ne désire pas écouter, ni à celui qui Me méprise. (18.67)
LE PLUS HAUT CULTE A DIEU, ET LA MEILLEURE CHARITE
Celui qui propagera la philosophie suprĂȘme secrĂšte (ou, la connaissance transcendantale de
la Gßtù) parmi Mes dévots, accomplira pour Moi le plus haut service dévotionnel, et Me
viendra avec certitude (atteindra Parama DhÄma). (18.68)
Nulle autre personne ne Me rend un service plus agrĂ©able que lui, et personne dâautre ne
Me sera plus cher sur terre. (18.69)
LA GRĂCE DE LA GITA
Je serai adorĂ© par le sacrifice de la connaissance (JnÄna-yajna) parmi ceux qui Ă©tudieront
notre dialogue secret. Telle est Ma promesse. (18.70)
Quiconque écoute ceci, (le dialogue sacré sous la forme de la Gßtù) avec foi et sans dérision,
il sera dĂ©livrĂ© du pĂ©chĂ©, et atteindra le ciel â les hauts mondes de ceux dont les actions sont
pures et vertueuses. (18.71)
O Arjuna, as-tu tout bien écouté avec un mental concentré ? Est-ce que ton illusion née de
lâignorance a Ă©tĂ© complĂštement dissipĂ©e ? (18.72)
Arjuna dit : Par Ta grĂące mon illusion est dĂ©truite, jâai recouvrĂ© la connaissance du Soi,
ma confusion (concernant le corps et lâAtmĂą) est dissipĂ©e et jâobĂ©irai Ton commandement.
(18.73)
Samjaya dit : Ainsi ai-je entendu ce merveilleux dialogue entre le Seigneur KĆĆna et
MahÄtmÄ Arjuna, qui a fait se dresser mes cheveux sur la tĂȘte. (18.74)
Par la grĂące du (gourou) sage VyÄsa, jâai entendu ce plus secret et suprĂȘme yoga
directement de KĆĆna, le Seigneur du yoga, qui lâa Ă©noncĂ© Lui-mĂȘme (Ă Arjuna) sous mes
propres yeux (de clairvoyance confĂ©rĂ© par le sage VyÄsa). (18.75)
O Roi, en commémorant encore et encore ce merveilleux et sacré dialogue entre le Seigneur
KĆĆna et Arjuna, je tressaillis de joie Ă chaque moment ; et (18.76)
Me rappelant chaque fois, O Roi, cette merveilleuse forme de KĆĆna je suis Ă©merveillĂ© et je
mâen rĂ©jouis sans cesse. (18.77)
LA CONNAISSANCE TRANSCENDANTALE AUTANT QUE LâACTION SONT
NĂCESSAIRES POUR UNE VIE ĂQUILIBRĂE
LĂ oĂč sera KĆĆna, le Seigneur du yoga (ou Dharma dans la forme de lâĂ©criture (ĆÄstra)), et
Arjuna avec les armes (ĆÄstra) du devoir et de protection, il y aura Ă©ternellement
prospérité, victoire, bonheur, et moralité. Telle est ma conviction. (18.78)
Ainsi prend fin le dix-huitiĂšme chapitre intitulĂ© «La MokĆa par le Renoncement» dans les
UpaniĆad de la BhagavadgÄ«tÄ, lâĂ©criture de yoga, touchant la science de lâAbsolu dans la
forme du dialogue entre SrÄ«kĆĆna et Arjuna.
DĂšs la premiĂšre question dâArjuna le sujet du chapitre est indiquĂ© : il sâagit pour terminer de la discipline du
renoncement, ou la MokĆa (libĂ©ration) par le renoncement. Le PÄndava Ă©tablit une distinction entre le
renoncement pure et simple et lâabandon du fruit des actes. DâaprĂšs le Seigneur KĆĆna, il apparaĂźt que
lâabandon a une portĂ©e plus large que le renoncement. La GĂźtĂą insiste, non pas sur le renoncement Ă lâaction,
mais sur lâaction accomplie dans le renoncement Ă lâĂ©gard du dĂ©sir. Câest lĂ le vrai SamnyÄsa ; Dans ce
verset, SamnyÄsa est employĂ© pour renoncement Ă toutes les actions, et TyÄga pour le renoncement au fruit
de toutes les actions. Ce nâest pas par Karma, ni par la descendance, ni par la richesse, mais par TyÄga ou
abandon, que MokĆa (la libĂ©ration) est obtenue. La GĂźtĂą souligne encore, que lâĂąme libĂ©rĂ©e peut rester dans
lâaction, mĂȘme aprĂšs sa libĂ©ration ; et contredit lâopinion que, toute action procĂ©dant de lâignorance, lâaction
cesse quand survient la sagesse. Pour le Seigneur KĆĆna, il est faux que celui qui agit soit en esclavage et que
celui qui est libre ne puisse plus agir.
Ce verset 3 nous ramÚne aux propos des premiers chapitres. Ici, la démarcation est faite
entre les actions en gĂ©nĂ©ral et les Ćuvres agaces qui bĂ©nĂ©ficient dâun statut spĂ©cial.
Le Seigneur KĆĆna va rĂ©pondre au sujet de cette derniĂšre sorte dâactions â sacrifice, austĂ©ritĂ© (ascĂšse) â qui
ne doivent pas ĂȘtre rejetĂ©es. Lâinertie, le non-agir, nâest pas lâidĂ©al. Lâaction dĂ©nuĂ©e de tout dĂ©sir Ă©goĂŻste, de
toute espĂ©rance de gain, accomplie dans la notion que « je nâen suis pas lâauteur », « je mâabandonne Ă
lâunivers », est lâidĂ©al placĂ© devant nous. La GĂźtĂą nâenseigne pas le renoncement complet aux actions, mais
simplement la conversion de toutes les actions en « action sans dĂ©sir, ou lâaction dĂ©sintĂ©ressĂ© ».Contrairement
Ă lâopinion que toute action devrait ĂȘtre abandonnĂ©e parce quâelle conduit Ă lâenchaĂźnement, la GĂźtĂą affirme
que le sacrifice, la charitĂ© et lâaustĂ©ritĂ© (lâascĂšse ou la vie Ă©rĂ©mitique) doivent ĂȘtre maintenus.
Le Seigneur KĆĆna est nettement favorable Ă la pratique du Karma Yoga. Lâaction ne doit
pas ĂȘtre rejetĂ©e, mais il faut lâaccomplir sans attachement Ă©goĂŻste ou attente de rĂ©compense.
MokĆa ne dĂ©pend pas de lâinaction ou de lâaction extĂ©rieure ; mais la possession dâune
vision impersonnelle et dâun renoncement profond au « moi ou je ».
Elles aussi suivent une classification accordée aux modes (gunas) de la Nature matérielle ;
ce nâest, en somme, quâune reprise du chapitre prĂ©cĂ©dent, si ce nâest quâon insiste tout
spécialement sur le caractÚre du devoir prescrit.
Les versets 10, 11 et 12 Ă©tablissent de nouveau la diffĂ©rence entre le rejet de lâacte et celui
simplement du bĂ©nĂ©fice qui pourrait sây attacher.
Lâhomme libĂ©rĂ© agit en tant quâinstrument du SuprĂȘme Esprit et pour le maintien de
lâordre cosmique. Il accomplit mĂȘme des actions terribles sans aucun but Ă©goĂŻste, ni dĂ©sir,
mais parce que câest le devoir prescrit. Ce qui importe nâest pas lâacte, mais lâesprit dans
lequel il est accompli. Cela ne signifie pas que nous sommes libres de commettre des crimes
avec impunité. Celui qui vit dans la conscience spirituelle supérieure ne sentira pas le
besoin de faire le mal. Les actions mauvaises sont le fruit de lâignorance et de la conscience
sĂ©parĂ©e ; de la conscience de lâunitĂ© avec le SuprĂȘme Absolu. Seul, le bien domine,
notamment la non-violence.
Le fruit de lâacte ici dĂ©crit est un fruit Karmique qui mĂ»rit aprĂšs que lâĂąme individuelle a quittĂ© le corps.
Repartis en pleine atmosphĂšre spĂ©culative les versets 13 Ă 17 esquissent une thĂ©orie de la causalitĂ© quâils
disent empruntĂ©e au SĂąmkhya. Une fois de plus, lâexposĂ© ne coĂŻncide pas vraiment avec celui des KĂąrikĂąs
(sorte de textes mnémotechniques en vers. Dans la plupart des cas, les Kùrikùs sont postérieures aux Sûtras).
Pour celles-ci la véritable cause, la cause initiale, sera la spontanéité de la nature à laquelle la Bhagavad Gßtù
a fait allusion précédemment mais dont elle ne parle pas ici. Quant à la liste des cinq causes, dans la
perspective des Kùrikùs, les quatre premiÚres ne sont que des simples antécédents successifs : pouvoir, agent,
instrument employĂ© par lâagent et gestes nĂ©cessaires Ă lâexĂ©cution ; en ce qui concerne la cinquiĂšme â le destin
â elle nâen parle pas. Le mot « destin » peut aussi revĂȘtir dans la perspective humaine lâaspect du hasard ; la
ĆvetÄĆvatara UpaniĆad â autre texte du SĂąmkhya non classique â le rĂ©pudiait expressĂ©ment (versets 1 et 2).
Dans lâĂ©numĂ©ration de la GĂźtĂą on pourrait ĂȘtre tentĂ© de penser quâil sâagit dâabord essentiellement de la
causalité sacrificielle, par conséquent le passage aurait des résonances trÚs traditionnelles dans la
perspective : on doit exĂ©cuter les actes prescrits. Mais au verset 16, lâĂ©clairage se rapproche beaucoup plus de
celui oĂč baignent les explications classiques : la causalitĂ© est simplement dâordre naturel et le principe naturel
y est tout Ă fait Ă part, comme lâaffirmait le chapitre 3, verset 27 ; cela contredit le chapitre 13, verset 20 oĂč
lâon concĂ©dait Ă la monade spirituelle un rĂŽle de cause en tant quâassumant la fonction du sujet affectif.
A partir du verset 18, il sâagit dâune activitĂ© psychologique Ă tendances intellectuelles et
non plus dâactivitĂ© sacrificielle. On y donne, comme les trois Ă©lĂ©ments incitant Ă lâaction, le
pouvoir de connaĂźtre, le connaissable, et lâagent individuel de la connaissance. A ces trois
éléments, les trois qualités confÚrent chacune leur coloration spéciale. Leur triple influence
sâexerce aussi sur le jugement (voir Ă©galement les versets 30 Ă 33), la forme de tĂ©nacitĂ© de
lâindividu (les versets 33 Ă 35) et mĂȘme sur le « bien-ĂȘtre » de chacun (les versets 36 Ă 39).
Le âbien-ĂȘtreâ traduit le mot sukha, rendu frĂ©quemment par son sens fort de « bonheur »,
mais dont la signification premiĂšre est beaucoup plus proche dâun Ă©tat de « bien-aise ».
Ce verset rĂ©serve une surprise sur le plan de lâinterprĂ©tation des doctrines. La thĂ©orie
classique, celle qui transparaßt dans les textes rencontrés antérieurement est celle des
qualitĂ©s indissolublement liĂ©es entre elles et dont lâunion constitue la nature. Lorsquâelles
demeurent en Ă©quilibre, la nature reste Ă lâĂ©tat involuĂ©; quand lâĂ©quilibre est dĂ©truit, la
nature indistincte se transforme en la multiplicité du distinct. On dit ici expressément les
trois modes de la Nature matĂ©rielle, alors que, normalement ils nâen sont pas nĂ©s puisquâils
lui sont coexistants et forment sa trame mĂȘme.
Les versets de 41 Ă 44 donnent Ă penser quâon a tentĂ© lâĂ©bauche dâune classification des
castes suivants les modes (gunas) de la Nature matérielle, bien que ce ne soit pas
nommément exprimé.
Les notions développées aux versets 45 à 50 offrent une annotation du verset 35 au chapitre
3 ; le verset 47 le reprend dâailleurs presque terme Ă terme.
Ces versets de 51 Ă 53 donnent une description de lâhomme de bien (cf. 2, 55-59), celui qui
est apte Ă atteindre le Brahman est trĂšs proche du portrait du yogi (6.10-14) et de
lâĂ©numĂ©ration des vertus synonymes de connaissance (13.7-11).
Ici, une notation intĂ©ressante : le svadharma (la loi dâaction propre dâun individu), devoir
individuel de caste exerce une force contraignante dans le domaine de la réalisation, ce
nâest pas seulement une obligation morale.
Le Seigneur dans la rĂ©gion du cĆur physique, le cĆur causal, rappelle des passages
Upanishadiques mais il faut noter que les rapports entre lâAbsolu personnifiĂ© et le cĆur
seront bien plus importants plus tard chez les SivaĂŻtes du KasmĂźr, notamment, oĂč le
Seigneur (Siva, cette fois) nâest pas seulement prĂšs du cĆur mais le cĆur mĂȘme de chaque
ĂȘtre et le cĆur de lâunivers tout entier. En finale, le Seigneur KĆĆna revient sur le point
central des cultes de Bhakti : vraimentâŠ, tu Mâes cher ; câest sur cette inclination du
Seigneur pour le fidĂšle que sâappuiera la dĂ©votion Visnouite.
La recommandation limitative de ce verset est traditionnelle ; on la trouvait dĂ©jĂ â quoique sous une forme
lĂ©gĂšrement diffĂ©rente â en fin de la ChÄndogya UpaniĆad. Quant aux promesses concernant ceux qui
propagent, apprennent par cĆur ou simplement entendent le texte de ce saint dialogue, elles formeront par la
suite, la conclusion de presque tous les traités dévotieux.
Arjuna exprime ici au Seigneur KĆĆna sa docilitĂ© et, en consĂ©quence, son aptitude retrouvĂ©e Ă combattre.
Les trois versets précédents répondent aux premiers : Samjaya enclÎt le dialogue entre
quelques versets dâun rĂ©cit cadre. Il dit quâil a entendu tout lui-mĂȘme mais ajoute que
grĂące Ă VyÄsa, il lâa appris, VyÄsa, « le compilateur ». VyÄsa a accordĂ© Ă Samjaya la facultĂ©
de voir et dâentendre Ă distance tout ce qui avait lieu sur le champ de bataille, pour quâil
puisse le rapporter au Roi aveugle DhrtarĂąstra. Le dialogue de KĆĆna et dâArjuna, et
lâexpĂ©rience du SuprĂȘme Absolu, ne sont pas des propositions philosophiques, mais des
faits spirituels. Nous nâapprenons pas leur signification en les racontant seulement, mais en
y réfléchissant dans un esprit de priÚre et de méditation.
Lâenseignement de la Bhagavad GĂźtĂą est âyogaâ; son instructeur est âyogeĆvara », le
Seigneur du Yoga, KĆĆna. Quand lâĂąme humaine est illuminĂ©e et unie au Divin, la fortune
et la victoire, le bien-ĂȘtre et la moralitĂ© sont assurĂ©s. Nous sommes invitĂ©s Ă unir la vision
(yoga) et lâĂ©nergie (dhanub) et Ă ne pas laisser la premiĂšre dĂ©gĂ©nĂ©rer en folie ni la seconde
en sauvagerie. Les grandes « centralités » de la Religion, comme le baron von Hugel aimait
Ă les appeler, les immenses rĂ©alitĂ©s de la vie divine, sont Yoga, lâexpĂ©rience du SuprĂȘme
Absolu par lâadoration et lâentiĂšre soumission Ă sa volontĂ© , et dhanub, la participation
active Ă lâĂ©volution du plan cosmique. La vision spirituelle et le service social doivent aller
ensemble. Le double but de la vie humaine, la perfection individuelle et lâefficacitĂ© sociale,
sont ici définis
EPILOGUE
LE MESSAGE DâADIEU DU SEIGNEUR KĆĆNA
Le Seigneur KĆĆna, la veille de Son dĂ©part de lâarĂšne de ce monde, aprĂšs avoir terminĂ© la
tĂąche difficile dâĂ©tablir la justice (Dharma), donna Son dernier discours dâadieu Ă Son
cousin frĂšre Uddhava, qui fut Ă©galement Son plus cher dĂ©vot et adepte. A la fin dâun long
sermon contenant plus de mil versets (BP 11.06-29) Uddhava dit : O Seigneur, je pense que
la poursuite du yoga comme Tu lâas exposĂ© Ă Arjuna, et maintenant Ă moi, est trĂšs difficile,
au fait, pour la plupart du monde, car cela entraßne le contrÎle des sens indisciplinés. Je
Tâen supplie, raconte-moi briĂšvement, simplement, la voie facile vers la rĂ©alisation de Dieu.
Le Seigneur KĆĆna, Ă la requĂȘte de Uddhava, donna les essentiels de la rĂ©alisation du Soi
pour les ages modernes, comme suit :
(1) Accompli ton devoir pour Moi le mieux possible sans aucun motif Ă©goĂŻste
dâaprĂšs tes capacitĂ©s, et souviens-toi toujours de Moi â avant de commencer un
travail, et au terme dâune tĂąche, et pendant ton inactivitĂ©.
(2) Prend lâhabitude de voir toutes les crĂ©atures comme Moi-mĂȘme en pensĂ©es, en
paroles et en actions ; et incline-toi devant eux.
(3) Ăveille ton Kundalini sakti dormant et saisit â par lâactivitĂ© du mental, des sens,
la respiration, et les Ă©motions â que la puissance de Dieu est en tout temps
prĂ©sente en toi, et quâIl accomplit constamment toute Ćuvre, en t'usant comme
simple instrument.
Yogiraj Muntaz Ali dit : Celui qui se connaĂźt entiĂšrement comme simple instrument et lieu
dâaction de mĂšre Nature (PrakĆti, le mental), sonde la VĂ©ritĂ©. La cessation de tous dĂ©sirs en
réalisant la vraie essence du monde et du mental humain est la réalisation du Soi.
Paramahamsa Hariharananda Giri dit : Dieu est en tout, et au-delĂ toutes choses. Par
conséquent, si tu veux Le réaliser, tu dois Le chercher et Le voir en chaque atome et chose,
dans les fonctions corporelles, et en chaque ĂȘtre humain dans un comportement de
dédicace.
Uddhava fut illuminĂ© en Ă©coutant les paroles du Seigneur KĆĆna, qui lui conseilla dâaller Ă
BadrikÄshrama dans les HimÄlayas oĂč il y resta toute sa vie comme un SamnyÄsa,
pratiquant la mĂ©ditation, la contemplation, et le Japa en rĂ©citant le mantra du BhÄgavata :
Om Namo BhÄgavate VÄsudevÄya.
Lâessence de la rĂ©alisation de Dieu est rĂ©sumĂ©e dans les quatre versets de la BhÄgavata
MahÄ PurÄna (BP 2.09.32-35) comme suit :
Le SuprĂȘme Seigneur KĆĆna dit : O BrahmÄ, celui qui tient Ă Me connaĂźtre, la SuprĂȘme
PersonnalitĂ© Divine, le Seigneur SrÄ« KĆĆĆa, devrait seulement comprendre que Jâexistais
avant la crĂ©ation, que Jâexiste dans la crĂ©ation, et tout autant aprĂšs la dissolution. Toute
autre existence nâest rien de plus que Mon Ă©nergie illusoire (MÄyÄ). Jâexiste au-dedans de
la crĂ©ation et en mĂȘme temps en dehors de la crĂ©ation. Je suis le SuprĂȘme Seigneur qui
rĂšgne, et qui est partout, en tout, et en tout temps.
Harih AUM tatsat Harih AUM tatsat Harih AUM tatsat
ĆrÄ« KĆĆĆÄrpanam astu Ćubham bhĂ»yĂąt.
AUM ĆÄntih ĆÄntih ĆÄntih
Ce livre est offert au Seigneur SrÄ« KĆĆĆa.
Puisse-t-il nous bénir tous avec Bonté, Prospérité, et Paix.