cahier louis bachelier n°15

9
AVEC LE CONCOURS DE CHARLES-ALBERT LEHALLE STÉPHANE CRÉPEY JEAN-PAUL LAURENT ANDRÉA PALLAVICINI ALBINA DANILOVA N°15 Novembre 2014 M a r c h é s f n a n c i e r s VERS UNE REDÉFINITION DES RISQUES LES CAHIERS

Upload: louisbachelierorg

Post on 21-Jul-2016

234 views

Category:

Documents


1 download

DESCRIPTION

Marchés financiers : vers une redéfinition des risques

TRANSCRIPT

Page 1: Cahier Louis Bachelier n°15

Avec le concours de

chArles-Albert lehAllestéphAne crépeyJeAn-pAul lAurentAndréA pAllAviciniAlbinA dAnilovA N°15 Novembre 2014

Mar

chés f nanciersVERS UNE

REDÉFINITION

DES RISQUES

LES CAHIERS

Page 2: Cahier Louis Bachelier n°15

LES CAHIERS LOUIS BACHELIER 32 LES CAHIERS LOUIS BACHELIER

Les plateformes électroniques vont-elles remplacer les teneurs de marché ?D’après un article de Charles-Albert Lehalle

Risque de contrepartie et conséquences sur le financement des banquesD’après un article de Stéphane Crépey

Comment évaluer les produits dérivés de gré à gré de façon pertinente ?

Quel impact aurait une taxation des transactions financières sur la volatilité du marché ?

D’après un article de Jean-Paul Laurent

D’après un article d’Albina Danilova

Quel est l’impact du collatéral sur la valorisation des dérivés ?D’après un article d’Andréa Pallavicini

PUBLICATION DE L’INSTITUT LOUIS BACHELIERPalais Brongniart28 place de la Bourse - 75002 PARISTél. 01 73 01 93 40www.institutlouisbachelier.orgwww.louisbachelier.org

CHEF DE PROJETCyril Armange

[email protected]

DIRECTEUR DE LA PUBLICATIONJean-Michel Beacco

RÉDACTRICE EN CHEFIsaure Du [email protected]

JOURNALISTECoralie [email protected]

CONCEPTION GRAPHIQUE, COUVERTURE ET RÉALISATIONGaël NicoletLa Cote Bleue10-12 place Vendôme - 75001 ParisTél. 01 44 76 85 85www.lacotebleue.fr

IMPRIMEURKava42, rue Danton - 94270 Le Kremlin-BicêtreTél. 06 14 32 96 87

Avec le concours de

chArles-Albert lehAllestéphAne crépeyJeAn-pAul lAurentAndréA pAllAviciniAlbinA dAnilovA N°15 Novembre 2014

Mar

chés f nanciersvers uNe

redéfiNitioN

des risques

LES CAHIERS

4

6

10

14

12

SOMMAIRE

INSTITUT

www.institutlouisbachelier.org

CRÉATION D’ÉQUIPES SCIENTIFIQUES D’EXCELLENCE

L’Institut Louis Bachelier constitue un dispositif unique réunissant, autour de partenariats industriels, les meilleures équipes de recherche en économie et mathématiques ; en atteste la labellisation LABEX (Laboratoire d’Excellence) obtenue par l’Institut Louis Bachelier dans le cadre de son projet Finance et Croissance Durable.

• Création de programmes de recherche en lien direct avec l’industrie financière : 30 chaires et initiatives de recherche ont été créées sous l’égide de l’Institut Europlace de Finance (EIF) et de la Fondation du Risque (FDR) depuis 2007, regroupant plus de 200 chercheurs.

• Gestion et montage de projets R&D innovants en collaboration avec le Pôle Finance Innovation.

• Contribution et soutien à l’émergence de nouvelles formations aux niveaux licence, master et doctorat en phase avec les besoins de la Place de Paris.

• Coopération avec des universités et centres de recherche français, européens, américains et asiatiques.

VALORISATION DE LA RECHERCHE

L’Institut Louis Bachelier assure la diffusion la plus large et la plus efficace des résultats issus de ses programmes de recherche auprès notamment des autorités de régulation françaises et européennes.

• Revue trimestrielle “Les Cahiers Louis Bachelier” qui présente des travaux de recherche issus de ses chaires et initiatives de recherche dans un langage accessible à un large public.

• Publication de discussion papers visant à éclairer les pouvoirs publics ainsi que les professionnels de la finance sur des sujets d’actualité.

• Portail de la “Recherche en Finance” en partenariat avec l’AGEFI.• Réseau communautaire de la recherche en finance :

www.louisbachelier.org

ESPACE DE RÉFLEXION ET DE DÉBATS À L’ÉCHELLEEUROPÉENNE

L’Institut Louis Bachelier est un véritable lieu de rencontre et de mise en relation destiné à favoriser les interactions entre le monde de la recherche et les acteurs économiques.

• Financial Risks International Forum : cette manifestation annuelle a pour objectif de présenter les meilleurs travaux de recherche internationaux et d’échanger, par le biais de débats et de tables rondes, sur les préoccupations des acteurs économiques.

• Les Semestres Thématiques : organisés sous forme de conférences, de séminaires et de cours, les semestres thématiques visent à favoriser les échanges entre académiques et professionnels sur une problématique commune.

• La journée des chaires : organisée annuellement, cette manifestation a pour but de confronter les travaux réalisés dans le cadre des chaires et initiatives de recherche de l’Institut Louis Bachelier.

• Les Matinales Scientifiques : ont pour objet de faire le point sur les derniers développements de la recherche en finance à travers les projets de recherche soutenus par l’Institut Europlace de Finance.

PROMOUVOIR, PARTAGER ET DIFFUSER LA RECHERCHE EN FINANCE

Créé en septembre 2008, l’Institut Louis Bachelier (ILB) est un centre de recherche en réseau de dimension internationale qui a pour objet de promouvoir, partager et diffuser la recherche et l’enseignement français en finance.

29%

19%

41%

11% Axe 1 : Finance et Développement Durable

Axe 2 : Finance des Transitions Démographiques et Economiques

Axe 3 : Risques & Régulation

Axe 4 : Finance Comportementale

RÉPARTITION DES 30 CHAIRES ET INITIATIVES DE RECHERCHE SELON LES QUATRE AXES STRATÉGIQUES DU LABEX FINANCE ET CROISSANCE DURABLE

ÉDITO

Ces dernières années, l’activité des marchés financiers a été profondément modifiée par les deux crises traversées (subprimes et dettes souveraines), avec une attention particulière portée au risque de contrepartie, au collatéral et au risque de liquidité. Les ajustements de valorisation (CVA et DVA), pour tenir compte du risque de défaut des parties dans des contrats de produits dérivés de gré à gré, ainsi que du coût de financement de ces contrats (coût de funding FVA), à comparer au coût des appels de marges dans le cadre du trading centralisé au travers de chambres de compensation, sont ainsi devenus des préoccupations essentielles des banques. Le marché des produits dérivés de crédit a aussi été largement affecté. Les marchés électroniques et le trading haute fréquence ont continué à prendre de l’ampleur, posant des questions cruciales et inédites sur les risques.

Les récentes évolutions réglementaires ne font que souligner davantage le besoin urgent de se munir d’outils quantitatifs pour mieux comprendre et gérer ces risques. La Chaire FBF Marchés en mutation vers une refondation des risques en finance, co-dirigée par Nicole El Karoui, Nizar Touzi (Ecole Polytechnique) et Monique Jeanblanc (Université d’Evry), est le fruit d’une synergie sur ces thèmes des équipes de recherche en mathématiques financières de l’Ecole Polytechnique (Centre de Mathématiques Appliquées) et de l’Université d’Evry (Laboratoire de Mathématiques et Modélisation d’Évry). La Chaire a pour ambition d’apporter des réponses appropriées à ces nouveaux challenges de modélisation et de calcul, pour contribuer à refonder la gestion des risques financiers, dans toutes leurs multiplicités et complexités.

Ce numéro des Cahiers Louis Bachelier met en perspective une sélection de travaux présentés par Charles-Albert Lehalle, Jean-Paul Laurent, Albina Danilova et Andrea Pallavicini à l’occasion des ateliers de la Chaire 2013-14, ainsi qu’un livre récent dans le domaine du risque de contrepartie: Counterparty Risk and Funding A Tale of Two Puzzles (S. Crépey et T.Bielecki, avec un dialogue introductif de D. Brigo ; Chapman & Hall/CRC Financial Mathematics Series, juin 2014).

Stéphane Crépey

Page 3: Cahier Louis Bachelier n°15

4 LES CAHIERS LOUIS BACHELIER LES CAHIERS LOUIS BACHELIER 5

Charles-Albert Lehalle

Actuellement “Senior Research Manager” à Capital Fund Management (CFM), Charles-Albert Lehalle est un expert de la microstructure de marché et du trading optimal. Ayant été res-ponsable monde de la recherche quantitative à Crédit Agricole Cheuvreux et responsable de la recherche sur la microstructure au département “Equity, Brokerage and Derivatives” de la banque d’investissement de Crédit Agricole, il a étudié avec attention les modifications de la microstruc-ture des marchés suite à la crise financière et depuis les évolutions réglementaires européennes et américaines de 2007 et 2004. Il siège au groupe de travail consul-tatif sur l’Innovation Financière de l’ESMA. Depuis peu, Charles-Albert est “visiting research” au département de mathématiques financières de Imperial College, à Londres.

BIOGRAPHIE

Les régulateurs encouragent la migration des transactions de gré à gré vers des plateformes d’échanges électroniques.

Si cette évolution accroît la trans-parence des opérations, elle remet également en cause le rôle tradi-tionnel des teneurs de marché et favorise l’essor du trading haute fréquence.

Dans ce nouveau cadre, il est im-portant de revoir la fonction des te-neurs de marché selon les besoins en liquidité.

À retenir

Les progrès informatiques et le boom d’internet ont considérable-ment modifié les marchés financiers. Les échanges électroniques se sont ainsi multipliés, et peu à peu, ces derniers prennent le pas sur les tran-sactions de gré à gré. Ce mouve-ment est encouragé par les régula-teurs qui voient dans cette nouvelle façon d’opérer un bon moyen de re-médier au manque de transparence. La crise a en effet révélé l’opacité de certaines transactions et le risque qui en découle. D’importantes posi-tions ont pu s’accumuler sur des ac-tifs sans que les autorités en soient alertées. Des réglementations ont donc suivi afin de migrer une partie des opérations de gré à gré vers les plateformes électroniques. L’objectif est clair : améliorer la visibilité de ces transactions et permettre ainsi de mieux les contrôler. La directive eu-ropéenne MIF (Marchés des instru-ments financiers), dont la deuxième version (MIF 2) est actuellement en cours d’implémentation, va d’ail-leurs dans ce sens. Mais paradoxe de la situation, cette migration pro-gressive des transactions vers les plateformes électroniques, censée sécuriser les marchés, a également favorisé l’essor du trading haute fré-quence. Une forme de trading qui suscite inquiétudes et critiques.

Des teneurs de marché encore utiles ?

C’est dans ce contexte de révision réglementaire que Charles-Albert Lehalle a analysé les récentes évolu-tions de la microstructure de marché et les questions que ces change-

ments font naître, en particulier sur le rôle des teneurs de marché et des traders haute fréquence. En acceptant de prendre une posi-tion à l’achat pour la revendre un peu plus tard, le teneur de marché facilite le lien entre acheteurs et vendeurs, et fournit de la liquidité. Mais grâce aux plateformes électroniques, la rencontre entre les deux parties est désormais facilitée. Les vendeurs peuvent plus aisément fractionner leurs achats ou leurs ventes, et réus-sir ainsi à placer leurs opérations. Le besoin de teneur de marché semble moins évident... L’auteur s’interroge donc sur la pertinence de leur inter-vention sur des marchés financiers massivement électroniques : les teneurs de marché sont-ils encore utiles, ou plus précisément quand le sont-ils réellement ? Poser cette question revient à examiner le niveau de liquidité : à quel moment est-il in-suffisant ? Comment les teneurs de marché peuvent-il l’accroître ?

Construire des segments de liquidité

La réponse est variable et doit s’entendre actif par actif. Certains produits sont assez volatiles et sen-sibles à de nombreux évènements extérieurs. Chaque nouvelle informa-tion a un impact sur le prix. Plus ces informations sont fréquentes, plus les cours sont fluctuants, et plus les teneurs de marché sont utiles. Ainsi, les actions sont influencées par une quantité d’information survenant de façon quasi quotidienne : sortie d’un nouveau produit, changement de stratégie, apparition ou disparition

Les plateformes électroniques vont-elles remplacer les teneurs de marché ?Les marchés financiers ont fortement évolué ces dernières années. Plus encadrés, ils utilisent aussi de plus en plus les plateformes électroniques, facilitant ainsi la rencontre entre acheteurs et vendeurs et accélérant la fréquence des transactions. Cette nouvelle structure remet en cause le rôle traditionnel des teneurs de marché : trouvent-ils encore leur utilité ? Comment redéfinir leur fonction sur des marchés massivement électroniques ?

d’un concurrent, etc. Pour de tels actifs, le rôle des teneurs de mar-ché est primordial mais également complexe à définir. Le processus de formation des prix étant continu, il est difficile de déterminer à quel mo-ment précis les besoins en liquidité sont importants. Au sein même des actions, des différences existent en termes de niveau de liquidité. A contrario, les taux de change sont relativement stables. Leur évolution est essentiellement liée aux chan-gements des taux directeurs des banques centrales. Les besoins de liquidité sont ponctuels et centrés sur ces périodes. L’intervention des teneurs de marché devraient donc se concentrer sur ces moments précis.

Traders haute fréquence : danger ou nécessité

Cette nouvelle organisation des mar-chés a également généré le déve-loppement de nouveaux acteurs. Soutenu par l’électronisation des transactions, les traders haute fré-quence prennent de l’ampleur. Un mouvement qui devrait continuer de croître avec la montée en puissance des bourses électroniques. En effet, plus les transactions électroniques progressent, plus la fréquence des transactions augmente. Cette accé-lération des échanges génère des interrogations quant aux possibles impacts négatifs des traders haute fréquence sur la stabilité du mar-ché. Sont-ils dangereux ? Faut-il les contrôler ? Le sujet fait débat.

Pour l’auteur, ces questions doivent être replacées dans le cadre, plus général, de la microstructure de mar-ché. Les traders haute fréquence gèrent, comme tout autre teneur de marché, une partie du jeu d’en-chère entre vendeurs et acheteurs, assurant une rencontre, à la millise-conde, entre l’offre et la demande : “A ce titre, ils ont leur utilité”,estime Charles-Albert Lehalle. “Toutefois, une réglementation est certainement nécessaire, mais elle doit s’appuyer sur la définition du métier de teneur de marché”.Autrement dit, l’enca-drement doit s’ajuster en fonction des besoins en liquidité. Les règles devraient être plus strictes pour des actifs très liquides, où les teneurs de marché doivent réellement prouver leur utilité, et plus souple pour les autres.Il s’agirait dans un premier temps de répartir les produits financiers au sein de segments de liquidité. Puis, dans un second temps, d’instaurer des règles adaptées à chaque ca-tégorie. “Le régulateur dispose de différents outils pour freiner ou accé-lérer les échanges, explique le cher-cheur. Les titres les plus liquides peuvent par exemple être soumis à un pas de cotation1 plus élevé, ou à des frais de transaction plus impor-tant.” Le débat sur les évolutions réglementaires ne doit en tous cas pas se limiter au cas particulier du trading haute fréquence, mais consi-dérer le marché et ses acteurs dans leur globalité afin de redéfinir au mieux le rôle de chacun.

Les règles doivent être plus strictes pour des actifs très liquides, où les teneurs de marché doivent réellement prouver leur utilité.

Le rôle des teneurs de marché évolue avec l’électronisation des échanges. Il doit être redéfini en fonction des segments de liquidité.

Cette nouvelle définition doit servir de base à l’encadrement des traders haute fréquence, qui ne doit pas être isolé du reste de la réglementation.

L’ouverture des données européennes aux chercheurs permettrait de réaliser des études comparatives et d’ob-jectiver le débat.

Recommandations

1. Ecart minimal entre deux cours de cotation directement consécutifs. La cotation peut par exemple évoluer centime par centime.

D. Weild, D. E. Kim, L. Newport (2013) “Making Stock Mar-kets Work to Support Economic Growth” .

Khalil Dayri, Mathieu Rosenbaum, (2012) “ Large tick assets: implicit spread and optimal tick size” .

Thierry Foucault, Christine A. Par-lour (2004) “Competition for Lis-tings” The RAND Journal of Eco-nomics, Vol. 35, No. 2.

Albert J. Menkveld (2013) “High Frequency Trading and The New-Market Makers” Journal of Finan-cial Markets, Vol. 16, No. 4., pp. 712-740.

Pour allerplus loin...Pour allerplus loin...

D’après l’ouvrage de Charles-Albert Lehalle et Sophie Laruelle “Market Microstructure in Practice” et un entretien avec Charles-Albert Lehalle.

Retrouvez l’article de Charles-Albert Lehallesur www.louisbachelier.org

Page 4: Cahier Louis Bachelier n°15

LES CAHIERS LOUIS BACHELIER 76 LES CAHIERS LOUIS BACHELIER

Le 15 septembre 2008, Lehman Brothers fermait officiellement ses portes. La chute du géant américain a mis fin au mythe de la banque insub-mersible, obligeant les acteurs finan-ciers à revoir leur gestion des risques. Les banques, comme les autres inves-tisseurs, peuvent désormais tomber en faillite. Résultat, le risque de défaut d’une contrepartie devient bilatéral et génère des besoins de couverture supplémentaires. Le financement des banques est également impacté. Si, auparavant, les établissements finan-ciers empruntaient et prêtaient au même taux, le taux sans risque, ils sont aujourd’hui confrontés à un coût d’emprunt plus élevé. Le pricing des taux n’est donc plus linéaire.

Gérer de nouveaux risques

Face à cette nouvelle configuration, les banques ont besoin d’outils inno-vants afin de calculer leurs frais de

financement. Quelles sont les consé-quences de ce nouveau pricing sur le financement des banques ? Comment inclure ces paramètres dans le calcul du coût de financement ? Comment gérer les spécificités de certains pro-duits comme les dérivés de crédit? Répondre à ces questions devient encore plus crucial avec le dévelop-pement du trading centralisé et des chambres de compensation. Face aux différents modes de trading (tra-ding centralisé et trading bilatéral), les banques doivent pouvoir réaliser une évaluation fine du coût respectif de chaque mode afin d’ajuster leur straté-gie. Les travaux de Stéphane Crépey et ses coauteurs visent à définir des méthodes pertinentes pour répondre à ces problématiques.

Des calculs de base…

Les chercheurs ont mené leurs travaux en plusieurs étapes. Tout d’abord, ils

Quand le risque devient bilatéral ou comment intégrer le nouveau contexte bancaireLa crise a révélé la fragilité des banques. Ces dernières doivent désormais intégrer leur propre risque de crédit dans la gestion de leur financement, comme de leurs couvertures. De nouvelles problématiques qui nécessitent de revoir les méthodes traditionnelles de calcul des ajustements liés au risque de contrepartie.

ont mis au point une technique mathé-matique capable de résoudre la pro-blématique de pricing non symétrique (conséquence de la différence entre le taux prêteur et le taux emprunteur). Basée sur l’approche à forme réduite en risque de crédit et sur la notion mathématique d’équation différen-tielle stochastique rétrograde (EDSR réduites), cette technique permet aux banques de calculer le coût de finan-cement de leurs opérations courantes. Toutefois, elle s’avère insuffisante pour des produits complexes soumis à des risques particu-liers. En effet, dans certains cas, les moments où la contrepartie a le plus de risque de faire défaut correspondent à ceux où la contrepartie garantit le plus d’argent. C’est ce qu’on appelle le “wrong way risk” ou risque de dépen-dance adverse. Les dérivés de crédit (CDSs et CDOs), en particulier, en sont l’illustration. Les phénomènes de contagion de crédit génèrent un effet de dépendance. Ainsi, si une banque fait faillite, l’établissement qui assure la couverture de son crédit a une forte probabilité d’être également en diffi-culté. Les deux parties dépendent des mêmes marchés. Or, les méthodes tra-ditionnelles d’EDSR réduites ne fonc-tionnent pas dans ce cas-là.

…aux opérations les plus complexes

En s’appuyant sur la méthode dite de copule, les chercheurs ont modélisé la dépendance des différentes par-ties. Le modèle définit la probabilité, à

l’instant t, que les deux parties fassent défaut en même temps. Il est ainsi possible d’évaluer la perte potentielle pour la partie ayant acheté le produit. La formule a ensuite été rendue dyna-mique afin de calculer le coût de la perte potentielle, à tout moment de la vie du produit. Enfin, les auteurs sont parvenus à marier la méthode de copules dyna-miques et celles d’EDSR réduites afin d’inclure à la fois la problématique de financement et le wrong way risk (risque de dépendance) dans le calcul

du prix de la cou-verture. Grâce à ce modèle, les banques peuvent ainsi calculer l’en-semble des frais liés à l’achat de produits dérivés.

Plus généralement, les travaux présen-tés apportent une réponse à la com-plexité des calculs des ajustements liés au risque de contrepartie (CVA, DVA, FVA). Les banques d’investis-sement revoient actuellement leurs méthodes d’évaluation de ces ajus-tements pour d’une part, mieux tenir compte de la volatilité des marchés, et d’autre part, inclure leur propre risque de crédit. La création d’un service dé-dié, le XVA desk, entre dans ce cadre et doit servir à collecter les données et définir les couvertures.

Les banques doivent pouvoir évaluer le coût respectif du trading bilatéral et du trading centralisé.

Les banques ne sont plus à l’abri de faire défaut et deviennent, elles aussi, des parties risquées. Ce nouveau profil bancaire amplifie le risque de contrepartie et complexi-fie les opérations de financement.

Les banques d’investissement ont besoin d’outils innovants afin de mieux gérer le risque de contrepar-tie et la couverture qui lui est asso-ciée. Elles doivent également pou-voir comparer les coûts respectifs du trading bilatéral par rapport au trading centralisé.

Une approche mathématique et numérique cohérente et efficace est possible.

À retenir

S. Crépey et T. Bielecki (avec un dialogue introductif de D. Brigo). “Counterparty Risk and Funding–A Tale of Two Puzzles”. Chapman & Hall/CRC Financial Mathema-tics Series, juin 2014.

Brigo, D., M. Morini, and A. Palla-vicini. “Counterparty Credit Risk, Collateral and Funding: With Pri-cing Cases For All Asset Classes”. Wiley, 2013.

S. Crépey. “Financial Modeling–A Backward Stochastic Differen-tial Equations Perspective”. Sprin-ger Finance Textbook Series, juin 2013Stéphane Crépey

Stéphane Crépey est pro-fesseur au département de Mathématiques de l’Université d’Evry, où il dirige le master d’in-génierie financière (master M2IF). Ses intérêts de recherche actuels sont la modélisation financière du risque de contrepartie, la finance numérique, ainsi que les ques-tions mathématiques connexes dans les domaines des équations différentielles stochastiques rétro-grades et équations aux dérivées partielles. Stéphane Crépey a également eu diverses activités de conseil dans le secteur ban-caire et l’ingénierie financière.

BIOGRAPHIE

Le livre “Counterparty risk and funding: a tale of two puzzles” développe une méthode de valorisation et de couverture du risque de contrepartie en présence de contraintes de financement. Cette méthode utilise des techniques mathématiques d’équations stochastiques différentielles rétrogrades (EDSRs) et d’équations aux dérivées partielles (EDPs), dans une approche à forme réduite du risque de défaut des deux parties du contrat. Pour le risque de contrepartie sur produits dérivés de crédit, des modèles de copules dynamiques sont proposés afin de capturer le wrong way risk associé (modèle de copule Gaussien dynamique ou de copule de Marshall-Olkin dynamique, i.e. modèle de défauts joints). Ces modèles de crédit dynamiques peuvent être associés aux techniques d’EDSR réduites précédentes afin de bien prendre en compte les coûts de financement associés, débouchant sur des problèmes en grande dimension qui seraient inaccessibles numériquement par des techniques plus usuelles d’EDPs.

Méthodologie

Mettre en place, au sein du front-office, un XVA desk chargé de collecter les données des différents trading desks et de calculer les corrections liées au risque de contrepartie et de funding. Privilégier une modélisation dynamique pour ces calculs.

Recourir pour ces modèles à des techniques d’équation différentielle stochastique rétrograde qui complètent utilement les techniques plus classiques d’équations aux dérivés partielles. Ceci vaut au plan théorique pour l’analyse du problème, mais aussi au plan numérique afin de répondre aux problématiques de grande dimension.

Les produits dérivés de crédit doivent faire l’objet d’un traitement spécifique : la dépendance adverse entre l’exposition sous-jacente et le risque de contrepartie crée une situation de wrong way risk.

Recommandations

D’après le livre “Counterparty risk and funding: A tale of two puzzles” de Stéphane Crépey, Tomasz R. Bielecki, Damiano Brigo et un entretien avec Stéphane Crépey.

Pour allerplus loin...Pour allerplus loin...

Retrouvez l’article de Stéphane Crépey

sur www.louisbachelier.org

Page 5: Cahier Louis Bachelier n°15

Si vous souhaitez vous abonner aux Cahiers Louis Bachelier, merci de contacter l’équipe del’Institut Louis Bachelier par courrier électronique à l’adresse suivante : [email protected]

Comme pour les Cahiers Louis Bachelier, si vous souhaitez vous abonner à la publication “Opinions & Débats”, merci de contacter l’équipe de l’Institut Louis Bachelier par courrier électronique à l’adresse suivante : [email protected], en précisant bien l’objet de votre message ainsi que vos coordonnées complètes.

Les articles publiés dans la série “Opinions & Débats” offrent aux spécialistes, aux universitaires et aux décideurs économiques un accès aux travaux de recherche les plus récents.

Ils abordent les principales questions d’actualité économique et financière et fournissent des recommandations en termes de politiques publiques.

Veillez à bien préciser l’objet de votre message ainsi que vos coordonnées complètes; vous recevrez ainsi chaque numéro par courrier postal à l’adresse communiquée.

SERVICE ABONNEMENT

NB : Le service abonnement vous est proposé gratuitement cependant chaque édition des Cahiers Louis Bachelier est limitée !

www.institutlouisbachelier.org www.labexlouisbachelier.orgD

E L

’IL

BC

AH

IER

SL

ES

N°1

Mie

ux c

om

pre

ndre

la

rec

herc

he e

n fin

ance

Ely

es J

oui

niFl

ore

nce

Juso

tA

ndré

Mas

son

Art

hur

Cha

rpen

tier

Sté

pha

ne V

illen

euve

Nic

ole

El K

aro

ui

CE

MB

RE

201

0

MIE

UX

CO

MP

RE

ND

RE

LA

RE

CH

ER

CH

E

EN

FIN

AN

CE

Ave

c le

con

cour

s de

C

hris

tian

de P

erth

uis

Pie

rre-

And

ré J

ouve

tS

uzan

ne S

haw

Bor

is S

olie

rR

apha

ël T

rotig

non

Gui

llaum

e B

oucu

lat

Jéré

my

Elb

eze

Mar

ia M

ansa

net-

Bat

alle

r

DE

L’I

LB

CA

HIE

RS

LE

S

MA

I 201

1

Num

éro

spéc

ial

ÉCON

OMIE

DU

CLIM

AT

N°2

MIE

UX

CO

MP

REN

DR

E

LA R

ECH

ERC

HE

EN F

INA

NC

ENu

mér

o sp

écia

l

Ave

c le

con

cour

s de

Aur

élie

n A

lfons

i

Nic

ole

El K

arou

i

Emm

anue

l Gob

et

Julie

n G

uyon

Cha

rles-

Alb

ert L

ehal

le

Niz

ar T

ouzi

Pet

er T

anko

v

DE L

’ILB

CAH

IER

S

LE

S

JUIL

LET

2011

N°3

CAHI

ER IL

B-FR

N3_

Mise

en

page

1 1

5/06

/11

15:

56 P

age1

MET

TRE

LA F

INANCE

AU SER

VICE

DE LA

SOCIÉ

TÉNu

mér

o spé

cial

Avec

le c

onco

urs

de

Stef

an A

mbe

c

Edou

ard

Challe

Patri

cia

Crifo

Chris

tian

Gollie

r

Sylv

aine

Por

et

Jean

Tiro

le

DE L

’ILB

CAHIE

RS

LE

S

SEPT

EMBR

E 20

11

N°4

Mars 2012

N°5

Risque systémiq

ue

Avec le c

oncours de

Bruno BiA

is

stéphAne crépey

christiA

n Gourié

roux

GAëlle le F

ol

Cahiers de l’ILB

Les

Juillet-A

oût 2012 N°6

Vieillissement et longéVité

Avec le concours de

Hélène XuAn

Brigitte dormont

roméo FontAine

cHristine cHevAlier

stépHAne loisel

nicole el KAroui

Cahiers de l’ILB

Les

Novembre 2012 N°7Microstructure des Marchés

Avec le concours de

cArole Gresse

chArles-Albert lehAlle

Frédéric AberGel

JeAn-PhiliPPe bouchAud

lAurence lescourret

MAthieu rosenbAuM

Cahiers de l’ILB

Les

INFO

RMATIO

NBOU

RSE

INTERPRÉTATION

INTU

ITIONVARIABLES

DÉCISIONS DES INVESTISSEURS

MO

DÉLISATIO

NOPPO

RTUN

ITÉS

AVERSION

INVESTISSEMENT

CONFIANCE

AMBIGUÏTÉ

CROYAN

CES DES AG

ENTS

INCERTITU

DES

STRATÉGIECOURS

PRIX

DO

UTE

CHO

IXÀ PRIO

RI

RENDEMENTSBIAIS COMPORTEMENTAUX

RESSENTI D

ES INVESTISSEU

RS

Risques

LES CAHIERS

Février 2013

N°8finance comportementale

Avec le concours de

FrAnçois derrienelyès JouinisébAstien Pouget

MArie-Aude lAgunAchristiAn gollier

Mars 2013

N°9

risque de liquidité Avec le concours deserges dArollesrené gArciA stéphAne crépey

olivier guéAnt

LES CAHIERS

Avec le concours de

vAninA Forget

PAtriciA criFo

christiAn gollier

edouArd chAlle

nicolAs treich

JeAn-Pierre PonssArd

sébAstien Pouget

N°10 mai 2013

LES CAHIERS

Développement Durable,

méthoDes quantitatives

Avec le concours de

IvAr ekelAnd

nIzAr TouzI

delphIne lAuTIer B

erTrAnd vIlleneuve

lucIAno cAmpI

emmAnuel G

oBeT

N°11 Octobre 2013

LES CAHIERS

évaluatio

n des Mo

dèles

MathéM

atiques en F

inance

Avec le co

ncours de

Pierre-l

ouis l

ions

olivier G

uéAnt

JeAn-Michel l

Asry

Julien PénAsse

N°12 Février 2014

LES CA

HIER

S

big

data

Av

ec le c

on

co

ur

s de

Je

An-M

ich

el l

As

ry

FA

ny d

ec

ler

ck

Je

An-c

yp

rie

n hé

AM

er

wA

n ko

ch

vA

len

tin pAtile

A

oM

Ar M

eh

di r

ou

sto

uM

i

th

ier

ry d

uc

hA

Mp

did

ier d

Avy

do

FF

N°13 M

ars 2014

LE

S C

AH

IER

S

Da

ns

la

te

De

s

inv

es

tis

se

ur

s e

t D

es

épa

rg

na

nt

s

Av

ec le c

on

co

ur

s de

Gu

y KA

plA

ns

Ki

lu

c Ar

ro

nd

el

Hip

po

lyt

e d’Alb

is

Milo b

iAn

cH

i

yA

nn

icK v

ios

sAt

n°14 Ju

illet 2014

LE

S C

AH

IER

S

Av

ec le c

on

co

ur

s de

ch

Ar

les-A

lbe

rt l

eh

Alle

st

ép

hA

ne c

pe

y

Je

An-p

Au

l lA

ur

en

t

An

dr

éA p

AllA

vic

ini

Alb

inA d

An

ilov

AN

°15 Novem

bre 2014

Marchés f nanciers

ve

rs

uN

e

re

fiN

itio

N

de

s r

isq

ue

s

LE

S C

AH

IER

S

Les Cahiers Louis Bachelier Opinions & Débats

Page 6: Cahier Louis Bachelier n°15

LES CAHIERS LOUIS BACHELIER 1110 LES CAHIERS LOUIS BACHELIER

Les produits dérivés de gré à gré re-présentent un marché considérable; et pourtant, leur évaluation est sujette à débat. Les méthodes utilisées, pas toujours transparentes, varient d’une banque à l’autre. Un choix qui n’est pas sans conséquence sur les comptes. Selon que l’approche choisie privilé-gie la “juste valeur”1 ou la “valeur pru-dente”2 , les obligations en termes de fonds propres réglementaires sont plus ou moins importantes. Les méthodo-logies utilisées ont donc une influence notable sur la mesure de la profitabilité et des risques de pertes sur les porte-feuilles, ainsi que sur la manière dont les banques apprécient et gèrent leurs

risques. Ainsi, plus un taux d’actualisa-tion est élevé, plus la valeur d’un por-tefeuille “typique” de produits dérivés de taux d’intérêt est faible. Une modi-fication, même minime, du taux d’ac-tualisation peut générer un impact de plusieurs centaines de millions d’euros sur les bilans des banques, à l’instar de ce qu’a connu JP Morgan. Début 2014, la banque d’affaires a enregistré une dépréciation d’1,5 milliard de dollars sur son portefeuille de produits dérivés OTC, suite à une réévaluation des coûts de financement. Les régulateurs, dont l’Autorité Bancaire Européenne, se sont saisis du sujet et planchent actuellement sur l’instaura-

Jean-Paul Laurent

Jean-Paul Laurent est professeur à l’université Paris 1 Panthéon – Sorbonne où il anime le pôle fi-nance du laboratoire de sciences de gestion. Il est également titu-laire de la chaire “Management de la modélisation” parrainée par BNP Paribas Cardif et membre du conseil scientifique du LABEX Régulation Financière (LABEX ReFi). Ses recherches portent sur la modélisation des risques financiers.

Comment évaluer les produits dérivés de gré à gré de façon pertinente ?Les méthodes d’évaluation des produits dérivés diffèrent d’une banque à l’autre. Des divergences qui ne sont pas sans conséquence puisqu’elles se répercutent directement sur les obligations en termes de fonds propres réglementaires, et donc sur les bilans des établissements. Face à ces constats, Jean-Paul Laurent et ses co-auteurs s’interrogent sur la méthode la plus pertinente pour évaluer les dérivés. Comment définir le taux d’actualisation des flux futurs en fonction des différents mécanismes de collateralisation ?

D’après la présentation “Panorama des problématiques actuelles relatives à l’évaluation des swaps” et un entretien avec Jean-Paul Laurent.

tion d’un cadre d’évaluation pour ces produits.

Définir une méthode pertinente

Les travaux de Jean-Paul Laurent et de ses co-auteurs s’inscrivent dans ce contexte. Ils visent à proposer des mé-thodes de valorisation des produits déri-vés, et à expliciter le cadre conceptuel ainsi que les hypothèses relatives à ces évaluations. La problématique est d’au-tant plus com-plexe que les contrats considé-rés sont variés : par exemple les appels de marge, destinés à diminuer le risque de contre-partie, peuvent être symétriques (chacune des parties peut être ame-née à transférer un dépôt de garan-tie appelé collatéral) ou asymétriques (l’une des deux parties bénéficie d’une exemption de l’obligation de mettre des fonds de côté, laissant l’autre exposée à un risque de contrepartie). De même, les devises et les taux de décote utilisés changent en fonction de l’accord bilaté-ral signé par les parties. Tout l’enjeu est donc de disposer de méthodes d’éva-luation pertinentes pour l’ensemble de ces contrats.La situation est en effet très hétérogène en fonction des contrats et des produits. L’évaluation des dérivés traités par les chambres de compensation est relati-vement simple, car elle s’appuie sur un marché liquide de référence. Le taux d’actualisation se déduit directement des cours de compensation utilisés pour calculer les appels de marge. Le modèle tend à passer au second plan.L’évaluation des produits non compen-sés est au contraire bien plus complexe. Elle ne s’appuie pas uniquement sur des données observables sur le mar-ché. Certaines informations, comme le

coût de financement des banques, ne sont pas aisément disponibles et ne peuvent pas non plus se déduire faci-lement de données de marché. Dans ce cas, l’évaluation dépend de paramètres dont la validité peut prêter à discussion.

Réduire les paramètres arbitraires

Dans un premier temps, les chercheurs ont réalisé une synthèse des principales méthodes utilisées, en faisant le lien

entre la métho-dologie d’évalua-tion, les prix des transactions et les taux observés sur les marchés. Puis, ils ont éla-boré un cadre de calcul pour l’évaluation des différents pro-

duits dérivés, soumis à des accords de collatéralisation.Le modèle proposé répond ainsi à plu-sieurs objectifs. D’une part, il garan-tit une cohérence entre les prix des produits négociés, quels que soient la contrepartie et le mode de collatéralisa-tion adopté (via une chambre de com-pensation ou via un accord bilatéral).D’autre part, il réduit au minimum le nombre de paramètres arbitraires utili-sés. Ces paramètres ne s’appuient pas directement sur les prix de marché, et sont donc difficilement vérifiables, alors que leur incidence sur la juste valeur ou la valeur prudente peut être consé-quente. En se basant au maximum sur les données de marché observables, en particulier sur les taux d’actualisa-tion communiqués par les chambres de compensation, le modèle réduit les risques d’erreur sur les évaluations des produits dérivés les plus complexes. Plus transparent, le cadre de calcul devient un véritable outil de pilotage du risque pour les banques et une source d’information plus fiable pour les régula-teurs et les analystes financiers.

Une modification du taux d’actualisation peut avoir un impact de centaines de millions d’euros sur le bilan des banques.

La méthodologie proposée adapte des travaux plus anciens sur l’évaluation des produits d’intérêt en présence de différents taux prêteurs et emprunteurs. Elle s’appuie sur le cadre classique d’évaluation, associé à une unique probabilité risque-neutre pour le compte d’épargne. Cette hypothèse est cohérente avec le grand nombre de produits traités, plus important que le nombre de facteurs de risque, ce qui permet une couverture des risques (redondance d’actifs). Si l’hypothèse d’observabilité d’un taux court instantané n’est pas très réaliste, elle constitue un simple intermédiaire de calcul ; les numéraires adaptés aux évaluations de produits dérivés collatéralisés étant quant à eux observables. En outre, cette méthodologie met l’accent sur l’impact de la variabilité des taux de décote du collatéral, ce qui permet d’analyser un grand nombre de situations pratiques. Enfin, dans les cas où l’évaluation d’un nouveau produit dépend du portefeuille existant de positions, les auteurs proposent un cadre théorique simplifié qui devrait permettre de faciliter les implémentations numériques.

Méthodologie

BIOGRAPHIE

Les modalités d’actualisation des portefeuilles de dérivés varient for-tement d’une banque à l’autre.

Or, la méthode retenue a un impact direct sur les fonds propres et les résultats des banques.

Une trop grande complexité quant aux méthodes d’évaluation peut avoir des incidences systémiques en créant un sentiment de défiance entre contreparties.

À retenir

Brigo, D., A. Capponi, A. Pallavi-cini and V. Papatheodorou, 2011, “Collateral margining in arbitrage-free counterparty valuation adjust-ment including re-hypothecation and netting”, working paper, de-partment of mathematics, King’s College.

Crépey, S., 2012, “Bilateral coun-terparty risk under funding constraints Part I: Pricing”, Ma-thematical Finance. doi: 10.1111/mafi.12004.

Laurent, J-P, P. Amzelek and J. Bonnaud, 2014, “An overview of the valuation of collateralized de-rivative contracts”, Review of Deri-vatives Research, (DOI) 10.1007/s11147-014-9098-8

Pour réduire le risque de modèle, il est préférable de s’appuyer au maximum sur des paramètres observables.

Les banques pourraient gagner à être plus transparentes, tant sur les méthodologies d’évaluation utilisées que sur les hypothèses retenues. Il s’agit néanmoins d’informations sensibles qui reflètent des choix stratégiques et des cultures d’entreprise spécifiques.

Il serait utile de comparer les pratiques des différents établissements bancaires, à un niveau international, afin d’éviter des arbitrages entre différentes réglementations nationales (même “level playing field”).

Recommandations

Pour allerplus loin...Pour allerplus loin...

1. Valorisation d’actifs et de passifs sur la base d’une estimation de leur valeur de marché ou de leur valeur d’utilité par actualisation des flux de trésorerie estimés attendus de leur utilisation. Source : Vernimmen/Les Echos.

2. La valeur prudente tient compte de l’incertitude des évaluations en juste valeur : cette incer-titude peut notamment provenir des données de marché utilisées pour les évaluations ou du risque de modèle. Source : Autorité Bancaire Européenne

Retrouvez l’article de Jean-Paul Laurent

sur www.louisbachelier.org

Page 7: Cahier Louis Bachelier n°15

LES CAHIERS LOUIS BACHELIER 1312 LES CAHIERS LOUIS BACHELIER

Andréa Pallavicini

Andrea Pallavicini est profes-seur invité au département de Mathématiques de l’Imperial College de Londres. Depuis 2011, il est également Head of Equity, FX and Commodity Models à la Banca IMI de Milan. Ses travaux portent sur les modèles de perte dyna-mique, l’évaluation des risques de contrepartie, les modèles de taux d’intérêt, et le pricing des produits dérivés exotiques.Il est titulaire d’une licence d’As-trophysique et d’un doctorat en Physique mathématique.

sactions de dérivés en intégrant les différents coûts de financement.Pour construire son modèle, l’auteur s’est d’abord appuyé sur les diffé-rentes règles réglementant les mé-canismes d’appel de marge. L’ISDA (Association Internationale des Swaps et Dérivés) et les chambres de compensation imposent certains standards. Parmi eux, l’obligation de rémunérer les comptes de collatéral à un taux d’intérêt spécifique, ou celle de distinguer les garanties en fonc-tion du marché de la transaction (cré-dit, matières p rem iè res , c h a n g e , etc.) en plaçant les montants de collatéral as-sociés sur des comptes distincts. Le chercheur a ensuite intégré les différents paramètres du coût de financement. Ce dernier dépend de nombreux facteurs, comme la stra-tégie de l’investisseur, sa qualité de crédit (credit quality) ou encore la po-litique du Trésor ; les taux des prêts du Trésor impactant directement les coûts de financements des investis-seurs.

…pour ajuster la valeur des porte-feuilles

“L’objectif n’est pas de trouver un prix d’équilibre pour l’ensemble du mar-ché mais de connaître le prix d’en-trée sur un marché, précise Andrea Pallavicini. En réalité, il n’existe pas de prix unique car les frais sont variables selon les acteurs. Le pro-

cédé peut être comparé au coût de construction d’une maison neuve. Chaque construction a un prix spéci-fique mais celui-ci est calculé selon une liste connue de paramètres”. Le modèle développé détermine ainsi la liste des coûts qu’un investisseur serait amené à payer durant toute la durée de vie du produit financier : de l’achat du titre, à sa revente, en in-cluant, entre les deux, les éventuelles fluctuations du marché.Grâce à cette méthodologie, les traders peuvent déterminer le coût

interne lié à la conclusion d’une transaction et connaître ainsi leur frais d’entrée sur un marché. Ces informations sont

indispensables afin d’estimer, au plus juste, la valeur des portefeuilles de dérivés.Elles sont également nécessaires au bon fonctionnement des politiques de régulation. Afin de réduire le risque de contrepartie, de plus en plus de transactions sont garanties par des systèmes d’appels de marge, gérés par les chambres de compensation. Pour être efficace, une telle procé-dure demande de bien évaluer les portefeuilles, et donc d’intégrer les coûts de financement sur toute la du-rée de vie du titre.

BIOGRAPHIE

La hausse des garanties pour les tran-sactions bilatérales et l‘importance ac-crue des chambres de compensation ont augmenté le montant des garanties négociées sur les marchés.

Les procédures d’appels de marge ont un coût: trouver et financer les garan-ties nécessaires.

Les coûts de financement devraient être incorporés au carnet d’ordre, afin de favoriser le financement des inves-tissements les moins coûteux.

À retenir

“Counterparty Credit Risk, Collate-ral and Funding with pricing cases for all asset classes”. D. Brigo, M. Mori-ni, and A. Pallavicini. Wiley, Chiches-ter, 2013.

“CCPs, central clearing, CSA, cre-dit collateral and funding costs valua-tion FAQ: re-hypothecation, CVA, clo-seout, netting, WWR, gap-risk, initial and variation margins, multiple dis-count curves, FVA?” D. Brigo and A. Pallavicini. Disponible sur SSRN.com et ArXiv.org, 2013.

“Nonlinear valuation under collateral, credit risk and funding costs: A nu-merical case study extending Black-Scholes”. D. Brigo, Q. Liu, A. Pallavici-ni, and D. Sloth. Disponible sur SSRN.com et ArXiv.org,2014

Quel est l’impact du collatéral sur la valorisation des dérivés ?

Toute protection a un coût. La règle vaut aussi pour le secteur financier. Afin d’éviter des faillites en cascade, le régulateur a encouragé l’utilisation de collatéral lors des transactions de dérivés. Ces actifs jouent le rôle de garantie contre le risque de défaut de la contrepartie. Les échanges de collatéral, qu’ils soient organisés par contrat (CSA) pour les opérations bi-latérales, ou traités par les chambres de compensation, ont ainsi considé-rablement augmenté ces dernières années. Si cette procédure vise avant tout à sécuriser les marchés, elle n’est pas sans conséquence pour les bilans des établissements finan-ciers. Les sommes en jeu sont en effet considérables et ne cessent de croître. La levée des fonds devient donc plus complexe et coûteuse, générant une augmentation du prix d’entrée sur le marché.

Définir les coûts d’entrée…

Reste encore à connaître précisément le montant de cette hausse. Quel est

le montant des coûts de financement liés à la constitution du collatéral ? Quelle méthode utilisée pour réaliser le calcul ? Au final, quel est l’impact des coûts de financement sur la va-lorisation des produits dérivés ? Les coûts de financement constituent en effet une composante directe de la valeur des dérivés mais demeurent difficiles à évaluer. Ils ne se résument pas toujours à un surcoût qui vien-drait simplement s’additionner au prix de transaction sans coût de finance-ment. C’est pourquoi un modèle spé-cifique d’évaluation est nécessaire. Andrea Pallavicini a ainsi développé une méthodologie qui considère les coûts de financement comme étant un ajustement de valeur à intégrer au portefeuille de négociation. La formule obtenue considère la couver-ture contre le risque de contrepartie (CVA et DVA) ainsi que le risque de dépendance (wrong-way risk effect). Applicable tant pour les transactions bilatérales que pour les transactions gérées par les chambres de compen-sation, elle permet d’évaluer les tran-

La gestion du risque de contrepartie s’est traduite par une utilisation accrue de collatéral. Mais les actifs, pouvant jouer ce rôle de garantie, deviennent rares et coûteux. Les investisseurs doivent pouvoir calculer ces frais supplémentaires afin d’adapter leur stratégie et ajuster la valorisation de leurs portefeuilles.

La méthode d’évaluation utilisée consiste à modéliser la couverture, le financement et les appels de marge grâce à une série de coupons qui seraient ajoutés au contrat dérivé. Selon les différents types de facteurs de risque sous-jacents, la formule d’évaluation générale peut s’adapter aux spécificités du contrat (comme le risque de dérive ou les délais de carence). En outre, les coûts de financement peuvent être séparés en plusieurs composantes, additives ou non, suivant les règles de résiliation et les procédures d’appel de marge choisies. Dans le cas des dérivés de taux d’intérêt, l’auteur obtient une décomposition explicite, à la fois pour les transactions bilatérales et pour les transactions effectuées via une chambre de compensation.

MéthodologieLes coûts de financement sont un problème majeur dans l’évaluation des produits dérivés, de par leur impact direct sur la politique de financement de la trésorerie.

La mise en place d’une méthodologie permettant d’inclure ces coûts au niveau des carnets d’ordres optimiserait les besoins de financement des banques. Cependant, il ne s’agit pas toujours d’un simple complément au prix calculé hors coûts de financement, cela requiert une toute nouvelle méthode d’évaluation des produits dérivés.

Les travaux d’Andrea Pallavicini proposent une extension du cadre général d’évaluation de ces produits afin d’y inclure les coûts de financement de manière cohérente.

Recommandations

D’après un entretien avec Andrea Pallavicini et l’article de Damiano Brigo et Andrea Pallavicini “Nonlinear consistent valuation of CCP cleared or CSA bilateral trades with initial margins under credit, funding and wrong-way”

L’objectif est de connaître le prix d’entrée sur un marché

Pour allerplus loin...Pour allerplus loin...

Retrouvez l’article d’Andréa Pallavicini

sur www.louisbachelier.org

Page 8: Cahier Louis Bachelier n°15

LES CAHIERS LOUIS BACHELIER 1514 LES CAHIERS LOUIS BACHELIER

Albina Danilova

Arrivée au département de Mathématiques de LSE en 2009, Albina Danilova est professeur associée.Auparavant, elle a exercé au sein de l’Université Carnegie-Mellon (Pittsburgh) ainsi que de l’Institut de Mathématiques de l’Université d’Oxford. Ses recherches portent sur l’asymétrie d’information, le pri-cing des dérivés, les calculs sto-chastiques, les délits d’initiés, le contrôle stochastique et la théorie d’équilibre.Albina Danilova est diplômée d’un Ph.D. du département Operations Research and Financial Engineering de l’Université de Princeton.

BIOGRAPHIE

Asymétrie d’information, volume de transactions, volatilité et liquidité sont étroitement liés.

Une taxe sur les transactions finan-cières augmente la volatilité par transaction, mais réduit simultané-ment le nombre de transactions. Elle diminue la volatilité durant les périodes de stabilité économique mais l’augmente durant les crises financières.

L’impact est en tous cas variable selon le produit financier et son ni-veau d’asymétrie d’information.

À retenir

Back, K., and S. Baruch (2004): “Information in Securities Markets: Kyle Meets Glosten and Milgrom,” Econometrica, 72(2), 433–465.

Glosten, L. R., and P. R. Milgrom (1985): “Bid, ask and transaction prices in a specialist market with heterogeneously informed tra-ders,” Journal of Financial Econo-mics, 14(1), 71–100.

Kyle, A. S., and A. A. Obizhaeva (2011a): “Market Microstructure Invariants: Empirical Evidence from Portfolio Transitions,” working paper.

Poursuivre les études sur la volatilité afin de mieux comprendre ce phénomène et pouvoir qualifier l’excès de volatilité.

Le modèle présenté fournit des bases pour d’autres analyses, notamment sur la relation empirique entre vola-tilité et volume de transactions, ainsi qu’entre volatilité et nombre de transactions.

Dans le cas de l’instauration d’une taxe sur les transactions financières, il serait recommander d’adapter le niveau de cette taxe au produit financier, en fonction des coûts de transaction et du degré d’asymétrie d’infor-mation.

Recommandations

Afin de mettre en exergue la relation entre liquidité, volume et nombre de transactions, volatilité et coûts de frottement sur les marchés, les auteurs utilisent un modèle de trading séquentiel avec les hypothèses suivantes : a) le flux d’informations privées est dynamique, b) les traders peuvent choisir s’ils interviennent sur le marché et pour quel montant, c) il existe des coûts de frottement, proportionnels au montant de chaque transaction et donc analogues à une taxe Tobin, et enfin d) le nombre de titres traités, le carnet d’ordres limites, la liquidité et la volatilité (stochastique) sont déterminés de façon endogène.Dans ce modèle, les traders observent le marché grâce à un processus de comptage faiblement exogène. Les auteurs relâchent par la suite cette hypothèse canonique en faisant tendre le taux d’arrivée des traders vers l’infini, de sorte à approximer un marché observé continûment. Ils étudient également le processus d’ajustement des prix à basse fréquence, via le comportement du marché lorsque le nombre de transactions par intervalle de temps tend vers l’infini.

Méthodologie

Quel impact aurait une taxation des transactions fnancières sur la volatilité du marché ?

Les soubresauts des prix des titres donnent des sueurs froides aux in-vestisseurs. La crise des subprimes a, plus que jamais, remis la question de la volatilité au cœur des préoc-cupations économiques. La crainte d’être confrontée à nouveau à une forte fluctuation des valeurs, et par conséquence à une baisse de la liqui-dité, ressort. C’est dans ce contexte qu’apparaissent des propositions de taxe Tobin sur les transactions finan-cières. Ces projets sont souvent pré-sentés comme des outils pour baisser la volatilité, et ainsi mieux appréhen-der et contrôler le risque financier des marchés. Mais comment réduire un phénomène encore mal compris aujourd’hui… Quels facteurs sont à l’origine de la volatilité ? Comment la quantifier et comment déterminer les excès ? Si certains éléments sont

connus, de nombreuses réponses manquent encore.

L’asymétrie d’information accroît la volatilité

L’étude d’Albina Danilova et de Christian Julliard vise à compléter ces connaissances afin de mieux com-prendre les causes de la volatilité. Elle se centre plus précisément sur les liens entre asymétrie d’information, coût de transaction, volume et nombre de transactions, volatilité et liquidité. Elle analyse également, d’un point de vue théorique, l’impact potentiel d’une taxe sur les transactions financières sur ces différents paramètres.Le premier point analysé porte sur la relation entre la qualité de l’information fournie au marché et la volatilité. Les auteurs constatent que la volatilité a

tendance à s’accroitre lorsque les écarts entre la valeur fondamentale d’un actif et les estimations des inves-tisseurs sont importants. A contrario, lorsque les investisseurs évaluent au plus près la valeur d’un titre, la volatili-té demeure faible. Le rôle de l’informa-tion est donc primordial pour assurer une juste formation des prix. Si l’asy-métrie d’information entre les traders est importante, les prix du marché de-viennent moins informatifs, ce qui aug-mente la volatilité et réduit la liquidité.

Les conséquences d’une taxe Tobin

Les auteurs ont ensuite analysé l’im-pact potentiel d’une taxation des tran-sactions financières. Les effets sont doubles. D’une part, la taxe augmente mécaniquement le coût de transac-tion et accentue, de ce fait, le bid-ask spread, à savoir l’écart entre le prix d’achat et le prix de vente d’un titre fixé par un teneur de marché. L’augmentation de cet écart implique une progression de la volatilité au ni-veau de chaque transaction et par conséquent une réduction de la liqui-dité. En ce sens, une taxe des tran-sactions financières aurait des effets négatifs sur le marché.Mais l’impact total s’avère en fait plus complexe à évaluer. Si la volatilité au niveau de chaque transaction aug-mente, cela ne signifie pas néces-sairement que le niveau global de la volatilité augmente. Il est en effet né-cessaire d’inclure le nombre de tran-saction dans l’analyse. Car la taxe a une deuxième conséquence : elle réduit le niveau d’activité du marché. Les coûts augmentant, les transac-tions baissent. Avec une taxe, la volati-lité par transaction est donc plus forte,

mais les opérations sont rares, tandis qu’en l’absence de taxe, la volati-lité par transaction est faible mais les ordres sont nombreux.

Des effets variables selon les actifs

Il est ainsi difficile, sur le plan théo-rique, de déterminer précisément l’im-pact d’une taxation des transactions financières sur les niveaux de volati-lité et de liquidité du marché. L’étude démontre néanmoins qu’une taxe ralentit le processus d’ajustement des prix. Lorsque la valeur fondamentale d’un actif évolue, un certain nombre de transactions est nécessaire pour que le prix du marché soit corrigé. Or, comme une taxation financière réduit le nombre d’opérations, le processus d’ajustement est plus long.Dans leur recherche, Albina Danilova et Christian Julliard n’émettent pas de jugement quant à la pertinence, ou

non, d’une t a x a t i o n des tran-s a c t i o n s financières. Ils mettent cependant en avant p l u s i e u r s

points. Si une telle taxe contribuerait à réduire la volatilité durant les pé-riodes de stabilité économique, elle l’augmenterait durant les périodes de crise, et irait donc à l’opposé du but recherché par les pouvoirs politiques. En outre, dans le cadre d’un projet de taxe Tobin, ils soulignent l’importance d’évaluer, en amont, l’impact d’une telle mesure via une analyse actif par actif ; les conséquences variant en fonction du degré d’asymétrie d’infor-mation et du niveau de friction. Il est donc primordial de mener des études complémentaires afin de mesurer ces deux paramètres pour les différents actifs.

Contrôler la volatilité et réduire ses excès sont devenus des enjeux centraux pour assurer le bon fonctionnement des marchés et limiter les risques systémiques. L’instauration d’une taxe sur les transactions financières est parfois présentée comme une réponse à ces problématiques. Mais connait-on réellement l’impact d’une telle mesure ? Quels seraient ses effets sur le niveau de transaction et le degré de liquidité ?

D’après l’article d’Albina Danilova et Christian Julliard “Information Asymmetries, Volatility, Liquidity, and the Tobin Tax”, ainsi qu’un entretien avec Albina Danilova.

Une taxe Tobin réduit la volatilité durant les périodes de stabilité économique mais l’augmente durant les crises financières.

Pour allerplus loin...Pour allerplus loin...

Retrouvez l’article d’Albina Danilova

sur www.louisbachelier.org

Page 9: Cahier Louis Bachelier n°15

Conc

eptio

n 4e d

e co

uver

ture

: Ale

x Ly

w w w . l o u i s b a c h e l i e r . o r g w w w . f b f . f r

Par STÉPHANE CRÉPEY

Université d’Évry Val d’Essonne

TABLE RONDE AVEC Claudio ALBENESE (Global Evaluation)

Jean-Jacques RABEYRIN (BNP PARIBAS) Chris KENYON (Lloyds Bank)

et Evelyne GUILLY (Banque de France)

MODÉRATEUR Ingrid Labuzan (Odémot)

Opinions et Débats : XVAÀ propos de CVA , DVA , FVA

et autres ajustements de marché

Présentation de la publication

INSCRIPTION :Mail à [email protected]

en indiquant Nom, Prénom, Établissement, Fonction.

MARDI 2 DÉCEMBRE 2014De 15h à 17h30

FÉDÉRATION BANCAIRE FRANÇAISE18, rue la Fayette 75009 Paris

R E N C O N T R E D E L A C H A I R E F B F"Marchés en Mutation - Vers une Refondation des Risques en Finance"

École Polytechnique et Université d'Évry Val d'Essonne