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CHRONIQUE COLLOQUE " LE XVII' SIèCLE ET L'ÉDUCATION" Les 29, 30 et 31 janvier 1971 s'est tenu, à Marseille, le premier collo- que régional organisé sous le patronage de la Société d'Etude du XVII- siècle, par son vice- président M. Roger Duchêne, professeur de littér ature française à la faculté d'Aix, sur le thème « Le s. et l'Education ». La densité même des travaux rend difficile un résumé fidèle. Quelques jalons simplement.. . Disons-le d'abord, parce que ça semble bien avoir été l'opinion générale, ce colloque a é un succès. Succès de présence d'abord : soixante à cent personnes orâ régulièrement suivi les longues séances de travail, alors que beaucoup étaient encore occupées le ven- dredi par leurs tâches professionnelles. Succès d'audience aussi à en juger par l'éventail des origines géographiques des participants 1. Dans un rassemblement "régional", le Midi avait bien sûr une large part, mais il n'était pas seul. Parmi les auteurs des vingt et une communications qui, précisons·le en passant, étaient toutes des contributions origi nales cinq venaient d'Aix·Marseille, quatre de Toulouse, trois de chacune de-s universités de Grenoble, Montpellier et Paris, et un enfin, respectivement de Lyon, Nice et Orléans. Ii faudrait ajouter, pour être complet, que des congressistes s'étaient dérangés de Pau, Tours, Rennes, Caen, Clermont, Besançon, etc., la présence d'un collègue de Nimègue donnait même une dimension "internationale" aux débats . Le déroulement du colloque permit de suivre, par demj.jour. nées, des thèmes cohérents. Le vendredi matin : J'enseignement dans ses relations avec la rel igion; l'après- midi : les méthodes de l'enseigne- ment, de l'université à l'instruction populaire. La soie, consacrée aux arts, se déroula sur un mode pl us souriant sans doute, mais tout aussi riche. Elle commença par un exposé illustré de diapositives, sur les retables roussillonnais, l'éducation technique et ia forma t ion religieuse de leurs sculpteurs. Puis l'ensemble à cordes Aurélia Spadaro. permit d 'entendre des oeuvres peu jouées de Lulli, Gabrielli et Pachelbell, et d'apprécier l'enthousiasme communicatif et la "sonorité" de ce jeune sc Sans parler du pluri.disciplinaire . historiens, littér aires ct philo$oohes

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CHRONIQUE

COLLOQ UE " LE XVII ' SIèCLE ET L' ÉDUCATION"

Les 29, 30 et 31 janvier 1971 s'est tenu, à Marseille, le premier collo­que régional organisé sous le patronage de la Société d'Etude du XVII­siècle, par son vice-président M. Roger Duchêne, professeur de littérature française à la faculté d'Aix, sur le thème « Le XVII~ s. et l'Education ».

La densité même des travaux rend difficile un résumé fidèle. Quelques jalons simplement... Disons-le d'abord, parce que ça semble bien avoir été l'opinion générale, ce colloque a é lé un succès. Succès de présence d'abord : soixante à cent personnes orâ régulièrement suivi les longues séances de travail, alors que beaucoup étaient encore occupées le ven­dredi par leurs tâches professionnelles. Succès d'audience aussi à en juger par l'éventail des origines géographiques des participants 1 . Dans un rassemblement "régional", le Midi avait bien sûr une large part, mais il n'était pas seul. Parmi les auteurs des vingt et une communications qui, précisons·le en passant, étaient toutes des contributions originales cinq venaient d 'Aix·Marseille, quatre de Toulouse, trois de chacune de-s universités de Grenoble, Montpellier et Paris, et un enfin, respectivement de Lyon, Nice et Orléans. Ii faudrait ajouter, pour être complet, que des congressistes s'étaient dérangés de Pau, Tours, Rennes, Caen, Clermont, Besançon, etc., la présence d'un collègue de Nimègue donnait même une dimension "internationale" aux débats.

Le déroulement du colloque permit de suivre, par demj.jour. nées, des thèmes cohérents. Le vendredi matin : J'enseignement dans ses relations avec la religion; l'après-midi : les méthodes de l'enseigne­ment, de l'université à l'instruction popu laire. La soirée, consacrée aux arts, se déroula sur un mode plus souriant sans doute, mais tout aussi riche. E lle commença par un exposé illustré de diapositives, sur les retables roussillonnais, l'éducation technique et ia forma tion religieuse de leurs sculpteurs. Puis l'ensemble à cordes Aurélia Spadaro. permit d 'entendre des œuvres peu jouées de Lulli, Gabrielli et Pachelbell, e t d'apprécier l'enthousiasme communicatif et la "sonorité" de ce jeune

sc mM~nt Sans parler du caract~rc pluri.disciplinaire . historiens, littér aires ct philo$oo hes

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ensemble, dont le cadet n'a que 16 ans. Le samedi matin portait plutôt sur l'éducation au sens large, celle que dispensait le livre en particulier. Le samedi après-midi mettait sur la sellette les auteurs plus connus : Sconin et Racine, La Fontaine, Sorel, Horace "rapproché" par Charles Beys. Puis M. Jean Mesnard, professeur à la Sorbonne, donna une confé­rence publique sur « le XVII" siècle, époque de crise universitaire ». Ce qu'il en dit, fort solide et clair tout à la fois, n'était pas sans des résonan­ces très actuelles.

Autant que les exposés eux-mêmes, ce sont les débats et aussi les apartés qui ont été passionants : discussions de couloirs, de restaurant entre deux séances, échanges au cours de la réception à la Mairie, le samedi soir, informations surtout au cours de la séance du dimanche matin. En effet, dans la pensée de son organisateur, ce colloque ne devait pas être un moment fugitif, aussi intense et réussi fût*il, mais devait préparer un travail en profondeur, destiné à "promouvoir" les recherches sur le XVII' siècle.

C'est dans ce but que M. Ramière de Fortanier , archiviste de la vWc de Marseille, avait accepté de préparer pour le diman~he matin, avec l'aimable collaboration des conservateurs des a rchives départementales, des archives communales d'Aix, de la bibliothèque Méjanes, etc., une "présentation" de documents qui puissent inciter les chercheurs à de nouveaux travaux, en leur offrant un aperçu des possibilités locales tou~ chant à l'histoire de l'éducation. Il fallait surtout se connaître, savoir quels étaient les champs de recherches des dix*septièmistes présents ou représentés par leurs collègues, quels étaient les problèmes rencontrés. Ce fut l'objet de la table ronde qui suivit, séance plus austère peutooêtre que les précédentes, mais ni la moins utile, ni la moins fructueuse.

Après le discours de clôture, plein d'humour, prononcé par le prési* dent Georges Mongrédien, à la fin du banquet tenu au Cercle dcs muni· cipaux, deux perspectives très positives s 'ouvrent :

1 0 Les actes du colloque seront publiés sous les auspices de la Société d'Etude du XVII' siècle;

2 ~ Tout le monde a l'air décidé à recommencer. N'est-ce pas la meil* leure expression de satisfaction? Où et quand? cela reste à débattre. Marseille demeure, bien entendu avec joie, candidate pour accucilIir les travaux du second colloque sur le XVIIe siècle ...

Marcel BERNOS.

COLLOQUE D'AIX-MARSEILLE SUR L'HISTORIOGRAPHIE

22 - 24 septembre 1972

Le Centre d'Histoire de la pensée politique contemporaine de l'Uni* versité de Provence a entendu orienter sa recherche dans trois directions principales; la droite européenne et notamment méditerranéenne, l'anar· chisme et notamment dans les pays méditerranéens, l'historiographie. Sur ce dernier thème, il organise un colloque les 22, 23 et 24 septembre 1972.

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CHRONIQUE 211

Longtemps délaissée en France, l'historiographie retient de plus en plus de chercheurs, mais nous avons préféré, plutôt que de faire le point des diverses recherches entreprises, retenir deux thèmes qui posent à 1'Wstoriographie des problèmes très différents.

a) Un thème majeur installé dans la longue durée et intéressant, outre les idées politiques, la pensée religieuse et philosophique : l'his­toriographie de la Réforme, qui occupera les journées du 23 et du 24 sep­tembre à Aix-en·Provence.

b) Un second thème limité à la pensée politique, et de courte durée: l'historiographie du Second Empire, qui sera traité le 22 septembre à Marseille.

M. Philippe Joutard coordonnera les travaux sur la Réforme, M. Pierre Guiral, les travaux su r le Second Empire. Le secrétariat sera assuré par M",e Knibielher.

Pour donner aux recherches sur l'historiographie de la Réforme des limites raisonnables, on les situera plus spécialement dans l'évolu-tion de l'historiographie française; on étudiera: .

1 0 L'image de la Réforme dans la controverse catholique-protes­tante en France au XVIIe siècle.

2 0 Les libéraux français et la Réforme (en remontant aux origines de la pensée libérale, à Montesquieu, Voltaire, l 'Encyclopédie).

3 0 L'historiographie françai se contemporaine et la remise en cause des visions traditionnelles, grâce aux travaux étrangers sur la Réforme, notamment:

- les interprétations marxiste, wébérienne, psychanalytique, - l'attaque du père Denifle, - l'écho du barthisme. 4 0 La vulgarisation de l'histoire de la Réforme en France, dans les

romans, les manuels scolaires, les livres populaires.

Ces quatre questions occuperont les quatre demi-journées des 23 et 24 septembre. Un rapporteur sera désigné ultérieurement pour chaque question, d'après la liste des communications; chaque rapporteur aura pour tâche de résumer les communications reçues et d'engager la dis­cussion. Un président sera désigné pour chaque séance; il donnera en p riOlité la p<lrole aux auteurs des communications.

Pour l'historiographie du Second Empire, la réflexion pourrait s'orienter autour des thèmes suivants :

1) Les poètes, les écrivains et les premiers historiens républicains en face du Second Empire (Hugo, Taxile Delord, Zola, Anatole France).

2) Les historiens français, anglais, italiens, allemands en face du Second Empire.

3) Les historiens en face de quelques ques tions controversées. a) Le coup d'Etat. b) Le personnel politique. c) La politique mexicaine. d) La guerre de Sécession. e ) La question italienne. f) La question allemande.

L'organisation des séances du 22 septembre sera précisée u1térieu· rement.

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212 CHRONIQUE

SOUTENANCE DE THUE DE MICHEL VOVELLE

Le 18 juin 1971, notre collègue Michel Voyelle a soutenu, à Lyon, sa thèse de doctorat d'Etat, devant un jury composé de MM. Gascon (Lyon) président, LatreiUe (Lyon) rapporteur, Chaunu (Paris) et Agulhon (Aix).

Rarement sans doute, une soutenance se déroule dans cette ambiance d'amitié et avec une telle unanimité de louanges. Le récipiendaire exposa d'abord son projet, les difficultés qu'il avait rencontrées et sa démarche méthodologique. Si la déchristianisation, dont la définition même est l'objet de controverses, « éclata » au moment de la crise révolutionnaire, ce ne fut qu'au terme d'un processus d'assez longue durée. Pour en retracer le cours, compte tenu des résultats parfois un peu décevants de la sociologie religieuse régressive, M. VoveUe a utilisé une nouvelle source : les testa­ments. En Provence, pays de droit écrit, les teslaments fonnent une « base quantitative de prospection » de 400.000 pièces environ, autorisant un traitement sériel. En outre, la diversité des formules permet d'obtenir de nombreuses et précieuses indications sur les mentalités religieuses provençales au XVIII" siècle. Des 20.000 testaments étudiés, masse consi· dérable pour un travail « manuel », sans ordinateur, M. Voyelle a pu tirer des séries de courbes déjà intéressantes en eUes-mêmes, mais plus encore par leurs convergences. Sans doute avait-on des doutes, déjà, sur l'unani­mité de la pratique jusqu'à la Révolution, mais les signes de « retombée de la tension dévote » deviennent piES évidents, dans ce~!: c démonstrf<tion. à partir de 1750, et même de 1730, principalement dan::; !c milieu df;:; négociants. On relève pourtant des exceptions locales, en pays « jansé­nistes » par exemple. Et précisément, ces contrastes géogro:::,hiqucs et sociaux, entre masse et élite, citadins et ruraux, hommes ct femmes, sont l'un des aspects passionnants de cette thèse. IvL Vov.::ile termina son exposé en rendant hommage aux étudiants de maîtrise qui ont tr:i.v~iJ1é avec lui sur ces piSîcS Ilouvelles et souvent peu commodes.

M. le doyen Latreille, après avoir rappelé le « prodige de tr<t v;lil continu» exécuté dans un temps relativement bref et dans des condi tions particulièrement pénibles, exprima tout le bien qu'il pensait Je ces 700 pages denses et de bonne présentation. Il souligna avec humour le découragement du jt:.gt! devant une œuvre dans laquel1e toutes les objec· tions prévisibles on t été d 'avance réfutées ... et un dialogue s'établi t entre lui et le candidat sur un certain nombre de questions de méthode, touchant au testament proprement dit, aux témoins, à la manie testamentaire, mais aussi à des thèmes plus généraux comme la définition d'une mentalité baroque, ou l'intérêt de recourir davantage aux sources écrites tOl~chant fa spil'ilt.l<.l.li'l(": eu la tr..éoIogic (par cxcmpft::, en ce qui CGi.lCC'.'nc le }R!.rg'l­

taire). Une des difficultés dans l'utilisation des sources notariales pour retrouver les mentalités sous-jacentes il travers telle ou telle pratique, c'est de réussir à discerner les formules liées à des coutumes locales ou produites par la pressicn sodale, de celles qui gardent un sens religieux profond. Parfois on doit faire preuve d'extrême subtilité. Par exemp!e, pour reconnaître l'attitude religieuse des protestants devenus par force de « nouveaux convertis », et contrain ts d'utiliser les formula t icns de l'Eglise catholique, apostolique et romaine, on ne peut que remarqi.ler l'absence d'invocation à la Vierge.

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CHRONIQUE 213

L'intervention de M. Pierre Chaunu fut un grand moment de cette soutenance. Avec une vibrante sensibilité, expression à la fois d'une « vive excitation intellectuelle » et de la sincérité d'une sympathie, il dit sa joie d'avoir été appelé à juger ce qu'il considère comme « l'une des trois ou quatre œuvres de la décennie >, et grâce à laquelle « toute l'histoire religieuse et celle des mentalités à l'époque moderne va rebondir •. Il loua une méthode exemplaire : partant d'un problème, inventant un document, le traitant de manière appropriée. Les deux parties de l'ouvrage lui paraissent également neuves et bien venues; la première sur piété baroque et déchristianisation, la seconde sur les attitudes des Provençaux devant la mort. Mais celle-ci est peut-être la plus importante, car elle pose quantité de problèmes de mentalités : la façon de se comporter avec le « corps ,. mort, de l'intégrer ou de le rejeter hors de l'habitat humain, le deuil, etc., finalement le discours sur la mort qu'une civilisation peut tenir et qui est. pour M. Chaunu. un test de sa valeur.

Avec M. Maurice Agulhon. on parla surtout d'histoire sociale et provençale. L'accord fut complet sur les catégories proposées par M. Vovelle. conformes aux évidences de la vie sociale provençale. Il en dis­tingue dix: nobles, bourgeois d'office ou de profession libérale, bourgeois­rentiers (vivant noblement), négociants, le monde des métiers (l'échoppe et la boutique), les paysans aisés (ménagers) , les pauvres (travailleurs), les gens de mer (s'il y a lieu), les salariés (quand ils sont différents des artisans), et enfin les domestiques. A propos des confréries, M. Agulhon montra comment, avec une méthode différente de la sienne, en relevant toutes leurs traces dans des sources non spécifiques, M. Vovelle avait complété ses propres travaux, en élargissant le cadre déjà connu dans l'espace et dans le temps. Enfin, M. Agulhon revint sur les contrastes provençaux. Entre ville et campagne, l'opposition diffère de celle que l'on trouve dans le « nord », grâce à l'existence de gros villages, à forte population comportant une élite de bourgeois, roturiers, « non-<:apita­listes • (Marseille posant des problèmes particuliers). Les contrastes entre l'ouest et l'est demeurent plus difficiles à expliquer : la Provence orientale est-elle « italianisante » à cause de la proximité de l'Italie (le « test » niçois? mais le Piémont est très différent ... ), à cause d'un fond commun méditerranéen, ou, relativement, parce qu'elle est loin de Paris ? ..

Concluant les quatre heures de débats, le président, M. Gascon, refit, comme il le dit lui-même, unt: « gerbe ordonnée» des éloges déjà décernés. Et le jury, après avoir très brièvement délibéré, agréa le nouveau docteur avec la mention très honorable.

Il y a deux sentiments du jury que partagea le nombreux public de parents et d'amis, venus parfois de fort loin (Paris, Aix ... ) : d'abord la joie de voir couronnée, l'œuvre de notre ami Vovelle, ensuite l'impatience de la voir publiée. Provence Historique s'y associe bien sûr de grand cœur.

Marcel BERNOS.