Économie du développement (1). le sous-développement

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Economie

du développement

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T H Ê M ÉMIS C O L L E C T I O N D I R I G É E P A R M A U R I C E D U V E R G E R

."- S C I E N C E S É C O N O M I Q U E S

PATRICK¡t .UILLAUMONT

Economie

du développement 1 / Le sous-développement

P R E S S E S U N I V E R S I T A I R E S D E F R A N C E

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ÉCONOMIE DU DÉVELOPPEMENT

PLAN DES 3 TOMES

TOME 1 / LE SOUS-DÉVELOPPEMENT

Chapitre 1 / Développement, sous-développement et économie du déve- loppement.

Chapitre 2 / Caractéristiques incertaines : l'introuvable indicateur syn- thétique.

Chapitre 3 / Caractéristiques essentielles : l'insatisfaction des besoins fondamentaux.

Chapitre 4 / Caractéristiques secondes : les structures socio-économiques du sous-développement.

Chapitre 5 / Variétés du sous-développement : différentes relations de l'homme avec la nature.

TOME 2 / DYNAMIQUE INTERNE DU DÉVELOPPEMENT

Chapitre 1 / Accumulation et développement. Chapitre 2 / Mouvement de la population et développement. Chapitre 3 / Qualités de la population et développement. Chapitre 4 / Pouvoir et développement.

TOME 3 / DYNAMIQUE INTERNATIONALE DU DÉVELOPPEMENT

Chapitre 1 / Commerce international et développement. Chapitre 2 / Financement international et développement.

ISBN 2 13 038913 9

Dépôt légal — 1 " édition : 1985, aep^ià^ça.

( 0 Presses Universitaires de France / 108, boulevard Saint-Germain, 75008

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Sommaire

REMERCIEMENTS 15

INTRODUCTION 17

BIBLIOGRAPHIE GÉNÉRALE 21

AVERTISSEMENT 29

CHAPITRE 1. — Développement, sous-développement et économie du développement 31

1 / Le développement, comme catégorie logique 35

1. Emergence du concept 35

A / Confusion terminologique initiale 35 B / Distinction progressive de fait 38 C / Quelques définitions anglo-saxonnes 39

2. Définition formelle du développement 42

A / Développement, croissance et progrès selon François Perroux 42

B / Nécessité et limites des définitions formelles 45

2 / L'essence du développement et du sous-développement 47

1. Le développement et le sous-développement définis par référence aux besoins fondamentaux de l 'homme 48

A / Niveau descriptif et normatif 49 B / Niveau explicatif 50

2. Conséquences épistémologiques des définitions proposées 52

A / Une problématique des ressources humaines 52 B / Une réponse aux questions préalables : homogénéité,

universalité et finalité des concepts . . . . . . . . . . . . . . . 54

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C / Des questions philosophiques « ouvertes » : dévelop- pement et évolution de l 'humanité 56

a / Développement et rationalité, 56 ; b / Dévelop- pement, moralité et liberté, 57 ; c / Développement et religion, 60.

3 / L'économie du développement 62

1. Phases et tendances 62

A / Origine et essor initial 62 B / Evolution ultérieure : années 60 et 70 65

2. S ta tu t actuel et principales options mé thodo log iques . . . . 73

A / Place du développement dans la science économique, les autres sciences sociales et dans l 'opinion 73

B / Options méthodologiques principales 77

CHAPITRE 2. — Caractéristiques incertaines du sous-développement. L'introuvable indicateur synthétique 91

1 / Le niveau de vie apprécié à par t i r du revenu p a r tête 92

1. Signification at tendue du revenu par tête 93

A / Choix préalable de l ' indicateur parmi les agrégats de la comptabilité nationale 93

a / Aux pr ix du marché ou au coût des facteurs, 94 ; b / Bru t ou net, 95 ; c / Intér ieur ou national, 96.

B / Utilisation de l ' indicateur 97

a / Les écarts de niveau, 97 ; b / Les écarts de croissance, 99.

2. La signification réelle du revenu par tê te 111

A / La na ture équivoque du f lux mesuré 111 a / Une double incerti tude t enan t au calcul d 'un

rappor t moyen, 111 ; b / Nature arbitraire des biens et services mesurés, 114.

B / Les difficultés de comparaison 117 a / Comparaisons intertemporelles : de la croissance

au développement ou les coûts de la croissance, 118 ; b / Comparaisons internationales : du t aux de change à la parité des pouvoirs d 'achat ou à chacun sa vérité des prix, 121.

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2 / Le niveau de vie apprécié à partir d'indicateurs sélectionnés... 131

1. La méthode empirique : le niveau de vie établi à part i r d'indicateurs sélectionnés en fonction de leur signification statistique 134

A / Les indicateurs, moyen de « retrouver » le revenu par tê te 134

a / Estimation du revenu par tête correspondant à la mesure traditionnelle, 135 ; b / Estimation du revenu par tête correspondant à la parité des pouvoirs d 'achat , 137.

B / Les indicateurs, moyen de mesurer directement le « développement socio-économique » 139

a / La méthode de McGranaham, une théorie de l'empirisme, 139 ; b / Portée de l'analyse, 143.

2. La méthode déductive : le niveau de vie établi à part i r d'indicateurs sélectionnés en fonction de leur signification intrinsèque 144

A / Au dépar t les besoins : une classification et des indi- cateurs 146

a / Besoins fondamentaux et besoins supérieurs, 146 ; b / Indicateurs, indices indicateurs et indices de compo- sants, 146.

B / Vers l'indice synthétique : l 'inévitable arbitraire de la pondération 148

a / Modes de pondération, 148 ; b / Sensibilité et comparaison des résultats, 150.

CHAPITRE 3. — Caractéristiques essentielles : l'insatisfaction des besoins fondamentaux 157

1 / Les besoins physiques fondamentaux : l'état de l'alimentation et de la santé 163

1. L 'é ta t de l 'alimentation 163

A / Nature des carences alimentaires 164

a / Une distinction traditionnelle : sous-nutrition et malnutrition, 164 ; b / Définition et évaluation de

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la faim par la FAO : leur relativité, 169 ; c / La mal- nutri t ion dans son environnement socio-économique : carences, maladies, rareté, traditions, 172.

B / L'évolution de la situation alimentaire des pays en développement 175

a / L'évolution de la production alimentaire par habi tant et le rôle des échanges internationaux, 176 ; b / Les changements apportés pa r la révolution verte et d 'autres innovations agro-alimentaires, 184 ; c / L'exem- ple de la sécheresse au Sahel : accident ou symp- tôme ?, 187 ; d / La Conférence mondiale pour l'Alimen- tat ion (1974) et l 'évolution des idées sur la sécurité alimentaire mondiale, 192.

2. L 'é ta t de la santé 195

A / Indicateurs et évolution de l 'é ta t sanitaire 196

a / Les indicateurs indirects ou indicateurs de moyens, 196 ; b / Les indicateurs de résultat : morta- lité et morbidité, 199.

B / Signification des faits observés et normes correspon- dantes 210

a / Universalité du besoin, 210 ; b / Indétermina- tion du minimum vital et des coûts de l 'homme cor-

respondants, 212.

2 / Les besoins psychiques fondamentaux : l'éducation, l'activité et la participation 214

1. L 'é ta t de l 'éducation 215

A / Notions et indicateurs traditionnels : alphabétisation, scolarisation 215

a / Croissance de l 'analphabétisme, 216 ; b / Les indicateurs de scolarisation : d ' importants progrès apparents, 218.

B / Limites des critères traditionnels 226

a / Incerti tude quant à la qualité de l'enseigne- ment, 226 ; b / Variété culturelle des modes d'accès à la connaissance et des connaissances elles-mêmes, 227.

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2. L'activité ou l 'é tat de l'emploi et la participation 230

A / L'activité et l'emploi : sous-emploi et sous-dévelop- pement 230

a / L'activité ou l'emploi comme besoin fonda- mental, 230 ; b / L'emploi et son évolution, 234 ; c / L' interprétation du sous-emploi, 240.

B / La participation sociale et politique 244

a / La participation politique générale selon Adel- man et Morris : le problème des indicateurs, 245 ; b / La participation sociale au niveau local selon Meister : le problème du degré d'intervention exté- rieure, 247 ; c / La participation populaire selon le BIT : le problème de sa signification en t an t que besoin essentiel, 249.

CHAPITRE 4. — Caractéristiques secondes : les structures socio- économiques du sous-développement 263

1 / Le degré d'industrialisation 264

1. L'industrialisation comme extension d 'un secteur 265

A / Théorie et évolution des trois secteurs 266

a / La théorie et ses hypothèses, 266 ; b / Evolution effective des trois secteurs, 268.

B / Interdépendance de l 'agriculture et de l 'industrie dans le développement 277

a / Le rôle des termes d'échanges intérieurs, 278 ; b / L'agriculture nécessaire à l 'industrie, 279 ; c / L'in- dustrie nécessaire à l 'agriculture, 280.

2. L'industrialisation comme mode d'activité 281

A / L'économie industrialisée 282

a / L'industrialisation, comme développement des « échanges interindustriels », 282 ; b / L'industrialisa- tion, comme diffusion de techniques « modernes », 283.

B / La société industrielle 284

a / La notion de société industrielle, 284 ; b / Société industrielle et développement, 285.

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2 / La dépendance économique à l'égard de l'extérieur 286

1. La dépendance par le commerce et la technologie 294

A / La dépendance par les exportations 299 a / Le volume des exportations, 300 ; b / La struc-

ture des exportations par produits, 303 ; c / L'orienta- tion géographique des exportations, 310.

B / La dépendance par les importations et la technologie. . 312 a / Dépendance pour l ' investissement et l ' innovation

technologique, 313 ; b / Dépendance pour la consom- mation, 318 ; c / Dépendance géographique, 323.

2. Dépendance par les capitaux 324 A / Aspects globaux : le poids des capitaux étrangers dans

les économies sous-développées 325 a / L'importance du stock de capitaux étrangers, 326 ;

b / L' importance des f lux de capitaux étrangers, 330.

B / Aspects structurels et spécifiques 336 a / L'origine géographique des capitaux, 336 ;

b / La dépendance à l 'égard des sociétés multinatio- nales, 339 ; c / La dépendance à l 'égard du personnel étranger, 340.

3 / L'inarticulation et le dualisme 341

1. L'inarticulation : des formes et des degrés variés 342

A / Le concept d ' inarticulation 342 a / Absence d 'unité de prix, 343 ; b / Absence de

propagation du flux, 343 ; c / Absence de propagation de l 'information, 344.

B / Mesure et étendue du phénomène : inarticulation et semi-articulation 345

a / Indicateurs de la monétarisation, 345 ; b / Indi- cateurs de moyens de communication, 348 ; c / Evo- lution et formes de l ' inarticulation, 350.

2. Le dualisme : schématisation commode d 'une réalité non générale 351

A / Le concept de dualisme 351

a / Le dualisme social, 353 ; b / Le dualisme tech- nique, 354.

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B / L'étendue du phénomène : dualisme ou p lura l i sme. . . 360

a / Indicateurs de dualisme, 360 ; b / Ampleur du phénomène, 362 ; c / Du dualisme au pluralisme ou à l'hétérogénéité, 363 ; d / Dualisme et inarticulation, 364.

4 / L'inégalité 366

1. L'inégalité comme caractéristique du sous-développement 367

A / Formes et degrés de l'inégalité 367 a / L'analyse en termes de coefficients synthéti-

ques, 368 ; b / L'analyse par tranches de popula- tion, 370 ; c / La notion de pauvreté absolue, le nombre et la proportion des pauvres, 373.

B / L'évaluation de la croissance et des projets compte tenu de l'inégalité : de nouvelles mesures 375

a / Une évaluation corrigée de la croissance, 376 ; b / Une évaluation corrigée des projets, 378.

2. Causes de l'inégalité et lien avec le développement 379

A / Facteurs de l'inégalité : un bref aperçu 380 a / Causes économiques : inégalité et dualisme, 381 ;

b / Causes sociopolitiquee : inégalités et structure de classes, 384.

B / Le faux dilemme justice-croissance : l'inégalité obstacle au développement 386

a / L'absence de lien statistique apparent entre l'inégalité et le rythme du développement, 386 ; b / Les raisons douteuses de l 'opposition traditionnelle, 387 ; c / Renversement des termes du débat, 389.

CHAPITRE 5. — Variétés de sous-développement : différentes relations de l 'homme avec la nature 401

1 / Les conditions naturelles : pays bien ou mal « dotés » 404

1. Situation géographique : climat et localisation 405

A / Variétés géographiques apparentes 405 a / Trois continents : variétés géographiques ou his-

toriques ?, 405 ; b / Localisation : pays côtiers et pays de l ' intérieur, 406.

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B / Le problème du climat : du déterminisme à l'ignorance 407 a / Le climat, une idéologie ?, 408 ; b / Problèmes

posés par la situation intertropicale, 409.

2. Ressources naturelles : le problème des dotations 411

A / L'inégalité des dotations 411 a / Les pays pétroliers et les autres, 412 ; b / Autres

pays riches en ressources naturelles, 415. B / Relativité des dotations 416

a / Des dotations changeantes, 417 ; b / Des dota- tions aux effets variables, 418.

2 / La dimension : pays grands et pays petits 419

1. Critères et réalité de la dimension des économies sous- dé veloppées 420 A / Trois critères principaux : justification du critère

démographique 420 a / La dimension géographique : superficie, 420 ;

b / La dimension économique : le produit, 421 ; c / La dimension démographique : le chiffre de la popula- tion, 422.

B / Répartition des économies sous-développées entre pays à grande et pays à faible population 423

a / Le Tiers Monde : une majorité de petits pays, 423 ; b / La majorité de population du Tiers Monde dans de grands pays, 425.

2. Conséquences de la dimension 425 A / Conséquences économico-politiques : quelques avan-

tages de la dimension 426 a / Moindre coût : économies dues à la dimen-

sion, 426; b / Production plus diversifiée, 427 ; c / Dé- pendance économique moindre à l'égard de l'exté- rieur, 427.

B / Conséquences sociopolitiques : problèmes et risques de la dimension 427

a / Moindre aide extérieure, 428 ; b / Problème de l'inégalité, 428 ; c / Moindre unité nationale, 429.

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3 / La densité : pays surpeuplés et pays sous-peuplés. Une dis- tinction obsolescente 430

1. Les critères du surpeuplement et du sous-peuplement : le recours à la théorie du chômage déguisé 431 A / Les divers critères concevables 431

a / La position par rapport au maximum, 432 ; b / La position par rapport à l'optimum, 433 ; c / L'exis- tence d'un excédent de main-d'œuvre ou chômage « déguisé », 434.

B / La notion de chômage déguisé : sa relativité 436 a / Chômage déguisé et autres catégories de chô-

mage, 436 ; b / Relativité du chômage déguisé à une durée et à une intensité normales de travail, 438 ; c / Relativité au coût social d'utilisation de la main- d'œuvre : chômage déguisé réel et potentiel, 440.

2. Observation du chômage déguisé et ampleur du surpeu- plement, 442 A / Modes d'observation du chômage déguisé 443

a / Enquêtes sur le travail et l'emploi dans une région déterminée, 443 ; b / Comparaison des niveaux de production en fonction des différences de densité, toutes choses égales d'ailleurs, 445.

B / Etendue incertaine du chômage déguisé et implication pour la politique 447

a / Chômage déguisé et surpeuplement incer- tains, 448 ; b / Implications pour la politique, 449.

INDEX . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 459

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Remerciements

Dans cet ouvrage dont la matière a fait l'objet de nombreuses années d'enseignement une part vient de ce qu'ont apporté les étudiants par leurs réactions et observations, dont le nombre a crû avec le temps... Ils doivent être les premiers remerciés.

Le soutien principal et le plus permanent, qui fut aussi une collaboration étroite à plusieurs parties du livre, fut naturellement celui de ma femme. Plusieurs enseignants ou chercheurs à l'Université de Clermont I et au CERDI (Centre d'Etudes et de Recherches sur le Développement international), Gérard Chambas, Marielle Deméocq, Jacky Mathonnat, ont lu la majeure partie de l'ouvrage dans une version intermé- diaire et ont permis par leurs observations de nombreuses améliorations ; R. Barlow (Université du Michigan), B. Franck (Université de Caen), J.-C. Bertholon, L. Pilandon (Université de Clermont) ont relu et critiqué utilement certaines parties. Françoise André, chercheur au CERDI, a participé efficacement à la mise au point de nombreux tableaux ; Françoise Hubidos, ingénieur à la Faculté des Sciences économiques, a apporté un concours décisif à l'établissement des bibliographies ; Annie Cohade, Françoise Casajus-Gil et Sylvette Prévost ont patiemment transformé des signes illisibles et maintes fois remaniés en un texte parfaitement dactylographié. Que tous trouvent ici le témoignage de mon profond remerciement. Ils n'ont pas seulement apporté leur concours, ils ont par leurs encouragements évité l'abandon.

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Introduction

Faut-il encore enseigner « l'économie du développement » ? Peut-on encore écrire un livre ainsi intitulé ? Au cours des

nombreuses années qu'a duré la préparation du présent ouvrage, bien des modes intellectuelles se sont succédé sur le sujet du développement. Selon l'une d'elles les pays en développement sont si variés que leur étude d'ensemble ne se justifie plus. D'un côté il y aurait les principes généraux de l'économie, de l 'autre ce qu'il est convenu d'appeler les « aires culturelles », entités requérant des analyses pluridisciplinaires spécifiques.

Entre les deux l'économie du développement a justement pour but d'appliquer ou d'adapter les principes généraux de l'économie à des situations spécifiques sur le plan social, géo- graphique ou historique. Elle s'intéresse aux caractères géné- raux, ainsi qu'aux variétés du sous-développement, aux raisons générales, mais aussi particulières, qui font qu'une économie se développe ou ne se développe pas.

Ce dont convainc la succession des cycles d'idées, c'est de la nécessité de rechercher, au-delà des modes, les éléments généraux et permanents d'une analyse économique du déve- loppement. L'utilité des autres sciences sociales pour l'analyse des changements associés à ce que l'on appelle le développement économique est certes reconnue et référence est ici maintes fois faite à ces autres disciplines. Mais le besoin d'une analyse économique du développement, qui est la justification de cet ouvrage, n'est pas atténué pour autant. On peut même consi- dérer que l 'apport des autres sciences sociales à l'étude du

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développement est d 'autant plus productif que celles-ci s'arti- culent à une meilleure analyse économique.

Cet ouvrage s'apparente au genre des « principes » : l 'accent y est mis sur les concepts, les hypothèses, les relations, plus que sur les comparaisons d'expérience. Toutefois la présen- tation des hypothèses et des relations s'appuie fréquemment, mais avec une contraignante limite de place, sur les recherches empiriques, de plus en plus nombreuses, qui se rapportent au sujet, et, aussi souvent que possible, sur les principales sta- tistiques qui permettent de comparer la situation, eu égard à la question traitée, d'économies inégalement développées.

Manuel d'économie du développement, l'ouvrage s'adresse en priorité aux étudiants en économie qui ont choisi cette matière au cours de leurs études. Tous ne sont pas destinés à travailler dans le domaine du développement, quel que soit au demeurant le besoin d'économistes du développement. Aussi convient-il ici d'indiquer ce que sont les principales fonctions de l'économie du développement dans la formation d 'un éco- nomiste. A mon sens, il en est principalement trois :

— une fonction « d'ouverture » : l'économie du développement constitue un élargissement du champ d'analyse habituel de l'économiste : elle amène en effet d'une part à analyser des variables plus nombreuses et diversifiées que cela est d'ordinaire le cas (notamment les variables démographiques, l'éducation, la santé, les structures sociales et politiques...), d'autre part à porter une attention à des économies diffé- rentes de celles des pays industrialisés ; elle exerce à la perception des différences, et, espère-t-on ainsi, au respect d'autrui ;

— une fonction de « miroir » : le Tiers Monde est en effet le

reflet, parfois amplifié, des problèmes des pays industria- lisés ; l'économie du développement n'est pas tant l'économie

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de pays en développement que l'économie d'un certain type de problèmes et de changements, que l'on retrouve, de façon inégalement aiguë, dans tout pays : ainsi le regard porté sur d'autres économies peut-il renouveler le regard porté sur l'économie dans laquelle on vit ' ;

— une fonction de « responsabilité » : le Tiers Monde est influencé par le fonctionnement des économies industria- lisées ; l'analyse de cette influence ne peut être ignorée des économistes non spécialistes du développement, et doit être menée, tant elle fait l'objet de controverse, sur des bases empiriques et pas seulement théoriques ; elle doit en tout cas être conduite avant que ne soit répondu à la question « que faire ? », réponse si souvent utopique ou sceptique !

Chacun de ces trois volumes correspond plus particulière- ment à l'une de ces trois fonctions : d'abord regarder, ou décrire avec des concepts appropriés, ce qu'est le sous-développement, expliquer ensuite et progressivement comment différentes variables internes agissent dans la dynamique du développe- ment, enfin montrer comment cette dynamique du développe- ment se situe dans un ensemble de relations économiques inter- nationales, lesquelles l'influencent profondément. Ces trois volumes regroupent dix chapitres et sont résumés dans le sommaire placé en tête de chacun d'eux. Le premier commence par un chapitre introductif relatif aux notions mêmes du déve- loppement, sous-développement et d'économie du dévelop- pement.

1. On entend souvent dire que les concepts de l'économie occidentale ne sont pas « transposables » aux économies en développement ; la raison en est sou- vent, comme on le verra sur plusieurs exemples, par exemple le sous-emploi, qu'ils sont inadaptés pour l'économie occidentale elle-même, et que ce sont les concepts mis au point pour des économies en développement qui méritent d'être transposés aux économies industrialisées...

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Bibliographie générale

Ouvrages écrits ou traduits en f r ança i s

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(avec une bibliographie de G. Caire). Aydalot (Ph.), Essai sur la théorie du développement, Cujas, 1971. Badouin (R.), Les agricultures de subsistance et le développement économique,

Paris, Pédone, 1975. Bairoch (P.), Diagnostic de l'évolution économique du Tiers Monde 1900-1968,

Gauthier-Villars, 3e éd., 1969. — Le Tiers Monde dans l'impasse, Paris, Gallimard, coll. « Idées », 1971. Balandier (G.), Sens et puissance, Paris, PUF, « Bibliothèque de Sociologie

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catif d'action, 1981 (Rapport Berg). Baran (P.), Economie politique de la croissance, trad. franç., Paris, Maspero,

1967. Barre (R.), Le développement économique, analyse et politique, Cahiers

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Cujas, 1968.

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Ouvrages en langue anglaise

En langue anglaise, parmi de multiples ouvrages on retiendra principa- lement, outre les ouvrages traduits indiqués précédemment : Balassa (B.), The Newly Industrializing Countries in the World Economy,

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Revues publ iées en langue f r ança i se

Revues spécialisées

Annales économiques, série Développement, publiées par l'Université de Clermont I, Cujas.

Cahiers de l'ORSTOM, série Sciences humaines. Civilisations, Institut international des Civilisations différentes, Bruxelles. Cultures et Développement, revue internationale des Sciences du Développe-

ment (Université catholique de Louvain). Mondes en développement, publié par I'ISMEA. Tiers Monde, revue de IEDES, PUF. Voir aussi certains numéros spécialisés des Cahiers français, « Le Tiers

Monde et nous », n° 167, septembre-octobre 1974 ; « Le Tiers Monde face à lui-même », n° 168, novembre-décembre 1974.

Problèmes économiques, numéros spéciaux.

Revues de vulgarisation

Actuel Développement (a remplacé à compter de 1974 Coopération et Déve- loppement).

Croissances des Jeunes Nations, Paris.

Revues publ iées en p lu s i eu r s langues, dont le français, par des organisations internationales

Céres, revue de la FAO. Finances et Développement, publication du Fonds monétaire et du groupe de

la Banque Mondiale. Forum du Développement, publié par le Centre d'Information économique et

sociale de l'ONU. Industrialisation et Productivité, revue de l'ONUDI. Journal de la Planification et du Développement, Nations Unies. Nouvelles et Opinions sur le Développement, publié par la Banque Mondiale,

Banque Mondiale.

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Revues en langue anglaise

Development and Change, Insti tute of Social Studies, La Haye. Development Dialogue, A journal of international development cooperation

(in cooperation with the Latin American cooperation) with the Latin American Insti tute for Transnational Studies (ILET).

Economic Development and Cultural Change, University of Chicago. IDS Bulletin, Inst i tute of Development Studies, University of Sussex. International Development Review (Revue internationale du developpement),

Revue de la société internationale pour le developpement. Journal of Developing Areas, Western Illinois University. Journal of Development Economics, North Holland. Journal of Development Studies, Franck Cass, Londres. Development Policy Review, The Journal of the Overseas Development Ins-

t i tute (bi-annuel), anciennement ODI Review, Sape Publications. The Developing Economies, Quarterly Journal of Insti tute of Developing

Economies, Tokyo. Third World Quarterly, Third World Foundation for social and economic studies. World development, Pergamon Press.

S o u r c e s d ' i n f o r m a t i o n s t a t i s t i q u e g é n é r a l e

Banque Mondiale, Rapport sur le développement dans le monde (annuel). — World Bank Atlas (annuel). — Rapport annuel. — World Tables, 1976, 1980, 1984. Fonds monétaire international, Rapport annuel. — International Financial Statistics (mensuel). — World Economic Outlook (annuel). OCDE (Comité d'Aide au Développement), Coopération pour le développement,

Efforts et politiques poursuivis par les pays membres du Comité d'Aide au Développement (annuel).

OCDE, Répartition géographique des ressources financières mises à la disposition des pays en développement, publication régulière.

ONU, Etude sur l'économie mondiale (annuel). — Bulletin mensuel de statistiques. — Annuaire statistique. ONU/CNUCED, Manuel de statistique du commerce international et du dévelop-

pement, publication bi-annuelle, dernières éditions, 1979,1981,1983,1984. UNMSD/OtNUDS, Research Data Bank of Development, Indicators, Genève,

3 vol., 1976.

Page 29: Économie du développement (1). Le sous-développement
Page 30: Économie du développement (1). Le sous-développement

Avertissement

Le premier tome de cet ouvrage est consacré aux carac- téristiques du sous-développement. Il vise à décrire le sous- développement dans son unité et sa diversité. Il est ainsi l'occasion de présenter un certain nombre de concepts fonda- mentaux de l'économie du développement, repris dans les tomes 2 et 3. Plus que dans les volumes ultérieurs, l 'attention est portée sur les instruments d'analyse statique qui permettent d'analyser le sous-développement comme un état à un moment donné ; mais les variations de cet état, les rythmes de déve- loppement y sont naturellement examinés.

Ce volume est constitué de cinq chapitres :

— un chapitre est consacré aux différentes recherches, en partie infructueuses, d'un indicateur synthétique du niveau et du rythme de développement, notamment à l'usage fait dans ce but du revenu par tête (chap. 2) ;

— le chapitre suivant (chap. 3) vise à décrire le niveau de développement à partir de la satisfaction des besoins fon- damentaux (alimentation, santé, éducation, activité...), critère mis en avant dans le chapitre introductif (chap. 1) et dont l'histoire est ici retracée ;

— un chapitre est ensuite consacré aux caractéristiques du sous-développement, qualifiées par commodité de secondes, à savoir les structures socio-économiques qui sont en rela-

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tion plus ou moins étroite avec le sous-développement (degré d'industrialisation, degré de dépendance à l'égard de l'extérieur, inarticulation ou dualisme, inégalité des revenus) ; le dernier chapitre du volume (chap. 5) vise à montrer les principales variétés de sous-développement non mises en évidence dans les chapitres précédents, essentiellement les variétés d'ordre géo-économique (problème des ressources naturelles) et d'ordre démo-économique (pays dit « sur- peuplés » ou « sous-peuplés »).

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Chapitre 1

D É V E L O P P E M E N T S O U S - D É V E L O P P E M E N T

ET É C O N O M I E DU D É V E L O P P E M E N T

Le développement apparaît à la fois comme un problème éminemment actuel et comme un souci constant de l'humanité.

La question du développement est posée dès l'invitation de la Genèse, elle l'est lorsque survient la révolution néolithique, lorsque les moines du XIIIe siècle défrichent l'Europe, lorsque aujourd'hui il faut faire vivre Calcutta, la brousse voltaïque, le sertao brésilien... L'économie du développement apparaît elle-même comme une recherche extrêmement récente en même

temps qu'une part profonde de l'économie politique dès son origine. Pour certains la physiocratie serait une « théorie du développement » (Robbins, 1968), La richesse des nations, un traité de développement, mais les premiers mercantilistes espagnols traitaient aussi du développement et avant eux d'autres peut-être...

Impossible de situer dans l'histoire le développement et la pensée qui s'y rapporte sans une définition, sans déjà même une conception de ce qu'il est. Précaution universitaire tradi- tionnelle, le préalable de la définition apparaît inévitable pour cette question comme pour bien d'autres. En matière même de

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développement, plusieurs questions de méthode se posent qui n'apparaissent en fait que comme des questions de vocabulaire — ce qui ne veut évidemment pas dire que les discussions en matière de développement se ramènent à un problème de vocabulaire.

Ainsi s'est-on depuis longtemps préoccupé de savoir s'il y avait « unité ou pluralité du phénomène développement » (Lhomme, 1966), si du développement et du sous-développe- ment un concept n'était pas premier et l 'autre second et sans intérêt (Aron, 1966), si le développement et le sous-développe- ment n'étaient pas des notions trop « occidentales » et « ethno- centriques », si le développement était souhaitable ou ne l 'était pas... Questions pour préambule, mais qui ont elles-mêmes pour préalable le choix d'une définition. Quelques réponses provi- soires peuvent néanmoins être données dès à présent :

a / Unité ou pluralité : si le développement a un sens, celui-ci doit être univoque. Certes les modalités, les formes du développement peuvent être multiples : on pourra distinguer par exemple, et sans préjuger d'une typologie, un développe- ment à l'anglaise, à la chinoise, à l'ivoirienne... Mais la nature même du développement est commune à toutes ces formes. Il en va pareillement pour le sous-développement.

b / Développement et sous-développement : les deux concepts sont complémentaires et doivent être définis conjointement, de façon homogène. L'un désigne un processus, l 'autre un état, dont le processus fait s'éloigner. Il n 'y a pas de limite a priori à ce processus et aucun pays n'est parfaitement développé : il se peut même que les pays dits aujourd'hui développés le paraissent bien peu dans quelques siècles. Le sous-développe- ment est lui-même un état connaissant des degrés variésl.

1. Différents classements sont opérés p a r les organisat ions in ternat ionales . comme on le verra plus loin (chap. V).

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Mais on refuse de considérer que la notion de sous-développe- ment soit péjorative, pas plus que l'expression pays sous- développés. Certaines métaphores, largement utilisées pour désigner ces pays, notamment dans les organisations interna- tionales, et devenues courantes, ne sont souvent qu'une forme de ce que Myrdal appelait la « diplomatie du vocabulaire » : pays en voie de développement ou plus simplement « en déve- loppement » (developing countries) comme s'il s'agissait de l'ensemble des pays qui se développent le plus. D'autres expres- sions simples ou couramment admises peuvent néanmoins être utilisées (pays pauvres, Tiers Monde...). Certes dans le terme « sous-développement », le préfixe peut évoquer des références inégalement valables : caractères du développement constatés ailleurs, possibilités internes de développement, voire normes de développement..., c'est l'objet même d'une définition de sélectionner les références qui sont valables.

c / Le risque d'ethnocentrisme en la matière est évident et doit être scrupuleusement évité : le sous-développement n'est pas une simple différence par rapport à la situation des pays industrialisés d'aujourd'hui, ni un simple retard pour atteindre une situation à laquelle d'autres sont déjà arrivés. Répétons-le : les formes du développement sont variées et ne se limitent pas nécessairement aux formes que l'histoire a livrées jusqu'ici. L'histoire illustre des relations susceptibles de se répéter, mais elle-même, on le sait, ne se répète pas. Le développement est un processus historique et doit donc être apprécié de façon très relative. Ce qui vaut pour la définition vaut aussi pour l'explication : les facteurs du développement sont variés et l'absence de ceux qui se sont manifestés hier ne constitue pas autant d'obstacles pour aujourd'hui (Hirschman, 1966) ; cer- tains facteurs ici peuvent même être obstacles ailleurs et inversement.

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d / L'ultime question du « souhaitable » ou du « non-souhai- table » est plus que toute autre une question de définition. Si la définition du développement est neutre, objective, sans référence normative, la question peut être posée. Disons même, plus la définition est étroite, circonscrite au domaine matériel et mesurable, plus les réserves peuvent naître sur le bien-fondé du développement. Les critiques à l'égard de la croissance, les appels lancés pour en modérer le rythme, principalement d'ailleurs avant que celui-ci involontairement ne fléchisse, se sont fait entendre essentiellement parce qu'ils s'appliquaient à un phénomène bien plus restreint que le développement. A l'opposé une définition normative élimine la question. Nous verrons qu'on ne peut définir le développement indépendam- ment de toute finalité, mais que celle-ci, pour être conciliable avec la pluralité des cultures, doit reposer sur des valeurs à vocation universelle.

Il faut donc définir selon les principes qui viennent d'être indiqués. Mais, pour cela, deux niveaux sont à distinguer :

— celui où apparaissent les concepts, où ils se différencient sur le plan logique, niveau des définitions formelles ;

— celui, où dans le cadre précédemment fixé, le contenu des notions se révèle, où s'ébauchent des hypothèses explica- tives et où se dégage l'essence même du développement.

I n fine pourra être présenté le s tatut actuel de l'économie du développement.

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1 / Le développement, comme catégorie logique

Il ne s'agit pas ici de faire un inventaire des multiples défi- nitions proposées, mais de voir comment progressivement le concept de développement s'est imposé à l 'attention des éco- nomistes et quelle définition formelle en a découlé. Une défi- nition du développement par rapport à d'autres catégories de changement a été ainsi présentée par François Perroux, puis largement adoptée dans la littérature de langue française.

1 1 ÉMERGENCE DU CONCEPT

La notion de développement s'est progressivement dégagée d'une série de termes qui constitue le vocabulaire du change- ment social depuis l'origine même de l'économie politique. Il n'est pas sûr d'ailleurs que la confusion terminologique qui régnait naguère ait été autrefois aussi grande.

A / Confusion terminologique initiale

Peu importe que le terme de développement n'apparaisse pas chez les Physiocrates ou chez les classiques. L'idée en était exprimée autrement. L'idée même de progrès qui a précédé de peu l'économie politique classique donnait une perspective

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philosophique aux « améliorations » économiques et l'expres- sion de « progrès matériel », comme le note Arndt (1981), servit souvent à désigner le développement. Etudier les causes de la « richesse des nations », c'était étudier les conditions du développement. Aujourd'hui d'importants ouvrages ou articles en matière de développement prennent pour titre l'inverse de celui de Smith, c'est-à-dire pour notre propos l'équivalent : La pauvreté des nations (Cairncross (1963), Gendarme (1974), Myrdal (1968)).

Quant au terme même de développement (Entwicklung), il fut utilisé en des sens d'ailleurs variés et qui ne nous rappro- chent pas nécessairement du concept aujourd'hui utilisé (voir Laurentin (1969), Arndt (1981)).

Avant même qu'un vocabulaire précis fût établi, la dyna- mique classique était délaissée et la pensée économique s'orien- tait vers les problèmes d'équilibre plutôt que vers ceux de changement. Avec des exceptions notables cependant, au cœur même de la pensée néo-classique : Marshall, Schumpeter, ce dernier ayant publié en 1911 une Théorie du développement économique (traduit en français sous le titre Théorie de l'évo- lution économique). Quant au renouveau de la dynamique suscité ensuite par la pensée keynésienne, il ne s'intéressa pas initialement au développement. Mais les fondements de la pensée néo-classique et keynésienne devaient se retrouver ultérieurement dans certaines analyses du développement.

C'est après la seconde guerre mondiale qu'apparaît une littérature spécifique sur le développement. Née de la cons- cience des problèmes gigantesques posés par les pays qu'à la suite de Sauvy on va bientôt qualifier de Tiers Monde — à savoir essentiellement l'Afrique, l'Asie et l'Amérique latine — la littérature sur le « sous-développement » va connaître une expansion brusque et rapide. Les premiers ouvrages impor- tants en la matière ont à peine trente ans. Mais aujour-

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d'hui existe une immense littérature dont la croissance a été très rapide et la valeur, très inégale.

Parallèlement, précédant même la littérature sur le déve- loppement, se développait une importante recherche sur la croissance. Ce serait une vue trompeuse des choses que de différencier l'une et l'autre simplement par les pays auxquels respectivement et principalement elles s'appliquent.

Si l'on peut distinguer en fait deux corps d'études diffé- rents, les termes qui y sont employés se confondent souvent. Prenons les titres de quelques-uns des ouvrages les plus marquants publiés durant les années 50 en matière de déve- loppement : celui de Nurkse (1953) se référait aux « pays sous-développés », mais Lewis : Theory of Economic Growth (1955) (Théorie de la croissance économique) ; Leibenstein : Economic Backwardness and Economic Growth (1955) (Retard économique et croissance économique) ; Rostow : The Stages of Economie Growth (1958) (Les effets de la croissance écono- mique) se réfèrent à la « croissance » (growth), tout comme les articles et ouvrages d'auteurs tels que Harrod, Domar, Solow. Ils traitent cependant de ce que l'on convient maintenant d'appeler le « développement », de même que le livre plus ancien et pionnier de Colin Clark intitulé Les conditions du progrès économique (lre éd., 1941). Lorsqu'en 1964 Hahn et Mat- thews présentent dans l' Economic Journal un vaste panorama de la théorie de la « croissance », accompagné d'une biblio- graphie d'environ 300 titres, il n'est presque pas fait référence aux articles et ouvrages importants de la théorie du dévelop- pement (une exception cependant parmi les ouvrages : Lei- benstein est mentionné dans la bibliographie). Un même terme sert donc, comme il est fréquent en langue anglaise, à désigner deux notions différentes, en tout cas deux thèmes d'études différents.

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B / Distinction progressive de fait

Comment se fait donc en fait la différenciation entre étude de la croissance et étude du développement ? On peut, en se référant principalement à la littérature anglo-saxonne, qui est la plus importante en la matière et ne fait guère alors de distinction terminologique, tenter de dégager les critères sui- vants pour différencier de façon toute empirique les deux types d'étude.

— Indicateur :

• croissance : produit total ou produit par tête ; • développement : le produit par tête, mais aussi d'autres

indicateurs, considérés souvent sur une plus longue période, on dira qu'il s'agit d'une notion « multidimen- sionnelle ».

— Variables :

• croissance : un petit nombre de facteurs quantifiables et pour cela principalement économiques ;

• développement : facteurs plus variés, non exclusivement économiques (ex. : facteurs sociologiques) ; des données de la théorie de la croissance deviennent des variables (ex. : santé) ou des variables autonomes deviennent des variables induites (ex. : population).

— Méthode :

• croissance : assez formalisée (modèles), souvent mathé- matique ;

• développement : moins formalisée, plus « littéraire », plus qualitative, du fait même du plus grand nombre de facteurs étudiés et de la complexité de leurs relations ; mais la formalisation n'est pas exclue : on verra d'ail- leurs qu'elle s'est développée.

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— Pays ou points d'application :

• croissance : notion appliquée (lorsque l'étude n'est point seulement théorique) principalement, mais non exclusive- ment, aux pays industrialisés ;

w développement : paraît s'appliquer principalement aux pays sous-développés, mais non exclusivement et de moins en moins.

En fait ces quatre types de critères, utilisés ici pour une analyse historique plutôt que logique, ont une signification variée. Les deux derniers sont purement empiriques et corres- pondent à une réalité en voie d'atténuation : de plus en plus les méthodes ont paru se rejoindre et la théorie du dévelop- pement a semblé s'appliquer aux économies les plus diverses (telle est déjà par exemple la position de Bruton dans ses Principles of Development Economies) (1965).

C / Quelques définitions anglo-saxonnes

L'ambiguïté du vocabulaire devait cependant être levée, en partie du moins, dans la littérature anglo-saxonne où elle était, de par la richesse même de celle-ci, la plus évidente. Quelques définitions données dès la fin des années 50 puis plus récemment en témoignent, prises parmi des ouvrages particulièrement connus.

a / Higgins, Economic Development (lre éd., 1959) : « Le développement est un accroissement manifeste dans le revenu total et le revenu moyen par tête, diffusé largement parmi les groupes professionnels et sociaux (occupational and income groups), qui dure au moins deux générations et devient cumu- latif » (p. 199).

Deux idées importantes pour la compréhension du dévelop- pement sont ici ajoutées à celle de simple croissance :

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— l'idée de diffusion des accroissements de revenu parmi les groupes sociaux ;

— l'idée de durée et de caractère cumulatif : idée reprenant celle de croissance auto-entretenue qu'avait déjà présentée Rostow.

b / Kindleberger, Economic Development (lre éd., 1958) : « De façon implicite dans l'usage courant et explicite dans ce qui suit, la croissance économique signifie plus de production et le développement économique implique à la fois plus de production et des changements dans les aménagements tech- niques et institutionnels au moyen desquels ce supplément est obtenu » (p. 3 de la 2e éd., 1965).

Ici le développement englobe la croissance, son analyse est celle des conditions dans lesquelles la croissance peut être obtenue et par conséquent être maintenue, ce qui rejoint la seconde idée de la définition précédente. On retrouvera des définitions voisines dans la littérature de langue française.

c / Pour Hagen (Economic Development, lre éd., 1968), le développement c'est « l'accroissement de la productivité » (p. 5) mais il est précisé que c'est un « processus continu », qui « peut continuer indéfiniment » (« il n'y a pas de pays développés ») et qui résulte de facteurs très variés parmi les- quels les facteurs sociologiques ont une place importante.

d / Pour Bruton enfin, dont on a déjà noté l'ambition très générale des Principles (1965), « l'idée que le développement est un concept multidimensionnel est naturellement extrê- mement importante, mais il ne paraît pas nécessaire de recher- cher avec insistance une mesure multidimensionnelle. Dans presque tous les cas le produit par tête est un substitut effi- cace... ». Ce qui fait pour Bruton la spécificité de l'analyse du

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développement c'est l'étude de « la façon dont la croissance devient une caractéristique permanente de l'économie ». Le problème du développement c'est celui de parvenir à « la croissance automatique » (built into it growth). Ce problème « ne peut être résolu à l'intérieur des frontières traditionnelles de l'économie » (p. 5).

Ces diverses définitions du développement ont un trait commun, celui d'ajouter à l'idée de croissance celles des condi- tions dans lesquelles la croissance peut être durablement obtenue ; l'étude de facteurs plus variés que ceux de l'analyse traditionnelle de la croissance en découle : l'allongement de l'horizon temporel retenu entraîne l'élargissement du champ de l'analyse économique. On retrouve ici ceux des critères empiriques de différenciation des analyses de la croissance et du développement qui avaient un fondement logique, ceux qui ont trait aux différences entre les indicateurs, les variables pris en compte. En revêtant une telle dimension l'étude du développement paraît retrouver l'ampleur de certaines ana- lyses classiques : de Smith, de Say par exemple ou de Stuart Mill à qui Gaston Leduc comparait Arthur Lewis en préfa- çant l'édition française de la Théorie de la croissance économique (1963). Mais cette dimension n'est point acquise en refusant l 'apport de la théorie de la croissance : celle-ci au contraire, et spécialement dans la littérature jusqu'à présent évoquée, tend à façonner comme de l'intérieur la théorie du dévelop- pement, lui servant d'appui et de référence. Ainsi malgré les définitions, l'ambiguïté demeure et pour une part est sans doute irréductible.

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2 1 DÉFINITION FORMELLE DU DÉVELOPPEMENT

Un effort important a été fait en France, notamment par F. Perroux et à sa suite, pour préciser la notion de déve- loppement et les notions qui s'y rapportent. Notions assez largement admises maintenant et qui ont situé le développe- ment comme catégorie logique. Cet ensemble de définitions, dont se rapprochent certaines de celles qu'ont données d'autres auteurs, permet d'apprécier la nécessité mais aussi les limites de toute définition formelle du développement et du sous- développement. Précisons tout de suite que François Perroux ne s'en tient pas à de telles définitions.

A / Développement, croissance et progrès selon François Perroux

Les définitions de ces termes ont été présentées à diverses reprises dans des articles et ouvrages de François Perroux et résumées dans un article de Tiers Monde (1966).

Laissons de côté l' expansion, « accroissement temporaire et réversible dans une grandeur donnée ».

La croissance est définie comme un « accroissement durable

de la dimension d'une unité économique, simple ou complexe, réalisé dans des changements de structures et éventuellement de système et accompagné de progrès économiques variables » (Tiers Monde, 1966, p. 239). La définition renvoie d'une part au produit (dimension d'une unité complexe), d'autre part à la notion de progrès sur laquelle on reviendra bientôt.

Le développement est « la combinaison des changements mentaux et sociaux d'une population qui la rendent apte à accroître cumulativement et durablement son produit réel global » (Etudes, 1961 ; Tiers Monde, 1966). L'ordre de priorité (le sens même de l'analyse) est inversé : l 'accent est mis sur les

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changements de structure2, les modifications sociales qui condi- tionnent la croissance et permettent qu'elle soit, comme chez Higgins, « durable », « cumulative ».

Mais on trouve ailleurs cette autre définition qui bien que proche de la précédente lui ajoute un élément nouveau : le développement est considéré comme « les changements des structures mentales et des habitudes sociales qui permettent la croissance du produit réel global et qui transforment les progrès particuliers en un progrès du tout social » (Economie des Jeunes Nations, 1962 ; Tiers Monde, 1966). Le dévelop- pement doit donc nécessairement déboucher sur le progrès, à la différence de la croissance qui ne suppose aucune nécessité de cet ordre.

Il faut donc préciser cette autre distinction que fait Fran- çois Perroux entre les progrès et le progrès économique. Les « progrès » sont particuliers, partiels, éthiquement neutres ; ainsi, les progrès techniques : accroissement de productivité dans une branche, apparition d'un produit nouveau. Le pro- grès économique au contraire revêt une certaine finalité, il implique une amélioration véritable pour la société. Il résulte « de la propagation de la nouveauté aux moindres coûts humains et à la vitesse optimum dans un réseau d'institutions dont le sens s'universalise » (ailleurs : « dont le sens soit intelligible à tous »). Ses trois « composantes » sont : la « création », la « pro- pagation » et la « signification ». Par sa signification, par « l'optimalité » de sa vitesse de propagation, le progrès cesse d'être une notion neutre. La signification rejoint d'autre part

2. On notera par comparaison la distinction faite entre croissance et dévelop- pement par les médecins et psychologues de l'enfant : selon une définition de Needham (1964), la croissance se rapporterait simplement à la taille, le dévelop- pement serait la croissance plus la différenciation. Cf. C. B. Hindley, L'influence du développement physique sur le développement psychologique, in Duyckaert et al., Milieu et Développement (1972), p. 9.

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l'idée de diffusion que contenait la définition du développe- ment donnée par Higgins.

Ainsi le développement, selon l'une des définitions qu'en donne François Perroux, doit-il entraîner le progrès économique. Mais l'idée de progrès conserve, semble-t-il, une certaine spé- cificité, qui lui vient d'ailleurs en partie de son origine au « siècle des Lumières » : idée de continuité, de durée (caractère « indéfini »), idée de conformité à un objectif, en tout cas d'amélioration. Mais quel objectif ? Amélioration par rap- port à quoi ? Avec quelle finalité ?

Perroux précise : « Le progrès s'analyse en termes de liberté. » Une position semblable apparaît chez Gaston Leduc ou encore chez D. Goulet (1971) qui substitue au terme de développement celui de « libération »... La conception du progrès économique de F. Perroux ne doit pas être confondue toutefois avec d'autres notions de progrès, celle de Raymond Aron (1966), par exemple, qui concerne le progrès scientifique, notion purement instru- mentale et neutre, ce progrès, celui de la « rationalité », pou- vant servir à des fins très variées, l'extermination d'un groupe humain, aussi bien que la lutte contre la faim.

C'est donc à une certaine conception du progrès éco- nomique que Perroux veut lier le développement. Parmi des auteurs proches de François Perroux, et reprenant tout ou partie de ses définitions, certains distinguent nettement déve- loppement et progrès, marquant la finalité propre à celui-ci (Passet (1969)), d'autres au contraire mettent l'accent sur la finalité inhérente au développement (Lebret (1961), Aus- truy (1972)) :

— ainsi pour Passet : « Le progrès est un développement qui s'effectue dans le sens d'objectifs prédéterminés » ;

— pour Austruy : le développement est un « mouvement qui bouleverse fondamentalement une société pour permettre

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l'apparition, la poursuite et l'orientation de la croissance vers une signification humaine » (Le scandale du dévelop- pement, p. 103) ;

— pour L. J. Lebret3 : « En tant qu'action, le développement n'est autre chose qu'un faisceau, dans une évolution coor- donnée et harmonisée, de passages d'une phase moins humaine à une phase plus humaine... » (Dynamique concrète du développement, p. 141).

Soit. Encore faut-il préciser en quoi consiste ce « plus humain » auquel se réfèrent les deux dernières définitions.

B / Nécessité et limites des définitions formelles

Les définitions qui viennent d'être présentées montrent l'existence du développement en tant que catégorie logique. Elles sont en cela nécessaires ; elles explicitent et rationalisent ce qu'une analyse du contenu de la littérature faisait déjà apparaître. Elles appellent toutefois, sinon un choix, une synthèse et une indication des limites qui résultent de leur caractère formel.

La croissance sera définie comme l'augmentation du pro- duit global et du produit par tête pendant une période rela- tivement longue. Le rythme (c'est-à-dire le taux), la finalité et les conditions peuvent en être variés. La définition même du produit peut varier.

Parallèlement, sera désigné par le terme développement le processus par lequel un pays devient ou est capable de croître de façon durable, autonome et convenablement répartie entre groupes sociaux, ou encore l'ensemble des changements qui per- mettent une croissance durable, autonome et convenablement

3. L. J. Lebret, dominicain, fut le fondateur d'Economisme et Humanisme.