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mercredi 7 mars 2018 LE FIGARO - N° 22 882 - Cahier N° 4 - Ne peut être vendu séparément - www.lefigaro.fr LA PME DU MOIS MÉCAMONT, CHAMPION DISCRET DES REMONTÉES MÉCANIQUES PAGE 7 Pour les salariés qui souhaitent se mettre à leur compte, devenir franchisé permet de mieux maîtriser les risques. Témoignages et conseils pratiques. PAGES 2 À 6 PHOTOS HERVÉ VOGT, G. MOLLARET/LE FIGARO Le curriculum vitæ qui valait 50 000 dollars Nous sommes en 1973. Un jeune étudiant américain de 18 ans griffonne un CV manuscrit. Une écriture en italique à l’esthétique banale se dessine à l’encre bleue. C’est celle du fondateur d’Apple, Steve Jobs, disparu en octobre 2011. À l’époque où il écrit ce fameux curriculum vitæ - dont on ignore le destinataire -, le père de la marque à la pomme ne se doute évidemment pas que, quarante- cinq ans plus tard, cette feuille de papier aurait une gloire posthume. Estimée 50 000 dollars, elle sera mise à l’encan entre le 8 et le 15 mars par une maison de vente aux enchères de Boston, RR Auction. qu’il soit aujourd’hui, Steve Jobs, qui vantait déjà ses compétences en « tech électronique » ou d’« ingénieur design », doit s’amuser de ce CV érigé au rang de pièce de musée. Quelle reconnaissance pour une simple feuille de papier commune à tout processus de recrutement ! Son acheteur le fera-t-il encadrer ? L’accrochera-t-il fièrement au mur de son bureau ou de son salon, avec autant de satisfaction que s’il s’agissait d’une lettre de Napoléon, d’un « placard » de Proust ou d’un autre CV, celui de l’artiste Jean- Michel Basquiat, décédé à 27 ans, qui a été adjugé… 50 000 euros sous le marteau de Sotheby’s en 2013. Notre CV numérique connaîtra- t-il la même destinée ? Se vendra- t-il à prix d’or en 2070 ou en 2080 ? Gagnera-t-il ses galons de document historique ? Quelle sera la valeur de nos profils LinkedIn ou Viadeo ? De nos comptes Twitter ou Instagram ? Sans compter tous les autres profils qui s’ajouteront au fil des décennies… Tous ces « e-CV » deviendront-ils, un jour ou l’autre, aussi vintage que ce bout de papier griffonné par l’étudiant Steve Jobs avant qu’il ne devienne l’un des plus grands entrepreneurs au monde ? Tant de questions qui demeurent pour le moment sans réponses. En revanche, cela m’a fait réaliser une chose essentielle : rien, dans ce curriculum vitæ, ne laisse deviner l’avenir glorieux et vertigineux de son auteur. Son écriture bleue pourrait être celle de n’importe quel étudiant de 18 ans plein d’espoir qui cherche sa voie. « On ne doit mettre son espoir qu’en soi-même », écrivait Virgile. Je vous laisse lire votre CV tel qu’il est aujourd’hui. Et en imaginer la suite ! QUENTIN PÉRINEL £@quentinperinel « Combien vaudra votre CV numérique en 2070 ou en 2080 ? Gagnera-t-il ses galons de document historique ? » LA VIE DE BUREAU Créer son affaire en franchise JURIDIQUE LES RÈGLES À RESPECTER AVANT DE PASSER AU TÉLÉTRAVAIL PAGE 7 À armes égales ÉDITORIAL Le prochain numéro du Figaro entrepreneurs paraîtra le 4 avril C ’est une formule qui, avec le temps, s’est bien rodée et bien implantée dans le paysage économique. Avec un nombre toujours crois- sant d’enseignes, la franchise permet chaque année à quelques milliers de personnes de se met- tre à leur compte. Elle donne la possibilité à des hommes et à des femmes de franchir le cap de la création d’entreprise dans un cadre bien établi. Mais ce n’est en aucun cas une recette mira- cle, une garantie de réussite. En s’alliant à un franchiseur, les candidats entrepreneurs bé- néficient d’un savoir-faire éprouvé, d’une enseigne répu- tée et de services mutualisés - à commencer par une centrale d’achat. Dans un monde où le commerce indépendant n’a pas la vie facile, la force du réseau permet de se battre à armes éga- les avec des enseignes intégrées. En se coulant dans le moule, les franchisés sont-ils pour autant de « véritables » entre- preneurs ? D’un strict point de vue juridique, ils restent des di- rigeants d’entreprise indépen- dants, créateurs de leur propre société. Surtout, la vie du fran- chisé reste celle de l’entrepre- neur qui, dans sa zone de cha- landise, doit batailler avec ses concurrents. Les naissances de nouvelles franchises sont aussi autant d’occasions de se lancer dans une aventure où rien n’est ga- gné d’avance. Quelle que soit l’enseigne sous laquelle ils ba- taillent, les franchisés conser- vent leur liberté d’entreprendre et leur liberté de réussir. BRUNO JACQUOT Sandra et Raphaël Faby se sont lancés dans la frite belge en Alsace.

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mercredi 7 mars 2018 LE FIGARO - N° 22 882 - Cahier N° 4 - Ne peut être vendu séparément - www.lefigaro.fr

LA PME DU MOISMÉCAMONT, CHAMPION DISCRET DES REMONTÉES MÉCANIQUES PAGE 7

Pour les salariés qui souhaitent se mettre à leur compte, devenir franchisé permet de mieux maîtriser les risques. Témoignages et conseils pratiques. PAGES 2 À 6

PHOTOS HERVÉ VOGT, G. MOLLARET/LE FIGARO

Le curriculum vitæ qui valait 50 000 dollars Nous sommes en 1973. Un jeune étudiant américain de 18 ans griffonne un CV manuscrit. Une écriture en italique à l’esthétique banale se dessine à l’encre bleue. C’est celle du fondateur d’Apple, Steve Jobs, disparu en octobre 2011. À l’époque où il écrit ce fameux curriculum vitæ - dont on ignore le destinataire -, le père de la marque à la pomme ne se doute évidemment pas que, quarante-cinq ans plus tard, cette feuille de papier aurait une gloire posthume. Estimée 50 000 dollars, elle sera mise à l’encan entrele 8 et le 15 mars par une maison de vente aux enchères de Boston, RR Auction.

Où qu’il soitaujourd’hui, Steve Jobs, qui vantait déjà ses compétences en « tech électronique » ou d’« ingénieur design », doit s’amuser de ce CV érigé au rang de pièce de musée. Quelle reconnaissance pour une simple feuille de papier commune à tout processus de recrutement ! Son acheteur le fera-t-il encadrer ?

L’accrochera-t-il fièrement aumur de son bureau ou de son salon,avec autant de satisfaction que s’il s’agissait d’une lettre de Napoléon,d’un « placard » de Proust ou d’un autre CV, celui de l’artiste Jean-Michel Basquiat, décédé à 27 ans,

qui a été adjugé… 50 000 euros sous le marteau de Sotheby’s en 2013.

Notre CV numérique connaîtra-t-il la même destinée ? Se vendra-t-il à prix d’or en 2070 ou en 2080 ? Gagnera-t-il ses galons de document historique ? Quelle sera la valeur de nos profils LinkedIn ouViadeo ? De nos comptes Twitter ou Instagram ? Sans compter tous les autres profils qui s’ajouteront

au fil des décennies…Tous ces « e-CV »

deviendront-ils, unjour ou l’autre, aussivintage que ce boutde papier griffonnépar l’étudiant SteveJobs avant qu’il nedevienne l’un desplus grandsentrepreneurs aumonde ? Tant dequestions quidemeurent pour le

moment sans réponses. En revanche, cela m’a fait

réaliser une chose essentielle : rien, dans ce curriculum vitæ, ne laisse deviner l’avenir glorieux et vertigineux de son auteur. Son écriture bleue pourrait être celle de n’importe quel étudiant de 18 ans plein d’espoir qui cherche savoie.

« On ne doit mettre son espoirqu’en soi-même », écrivait Virgile. Je vous laisse lire votre CV tel qu’il est aujourd’hui. Et en imaginer la suite ! ■

QUENTIN PÉRINEL£@quentinperinel

« Combien vaudra votre

CV numérique en 2070 ou en 2080 ? Gagnera-t-il ses galons de document historique ?»

LA VIE DE BUREAU

Créer son affaire en franchise

JURIDIQUELES RÈGLES À RESPECTER AVANT DE PASSER AU TÉLÉTRAVAIL PAGE 7

À armes égalesÉDITORIAL

➜Le prochain numéro du Figaro entrepreneurs paraîtra le 4 avril

C ’est une formule qui,avec le temps, s’est bienrodée et bien implantée

dans le paysage économique. Avec un nombre toujours crois-sant d’enseignes, la franchise permet chaque année à quelquesmilliers de personnes de se met-tre à leur compte. Elle donne la possibilité à des hommes et à desfemmes de franchir le cap de la création d’entreprise dans un cadre bien établi. Mais ce n’est en aucun cas une recette mira-cle, une garantie de réussite.

En s’alliant à un franchiseur,les candidats entrepreneurs bé-néficient d’un savoir-faire éprouvé, d’une enseigne répu-tée et de services mutualisés - à commencer par une centrale d’achat. Dans un monde où le commerce indépendant n’a pas la vie facile, la force du réseau permet de se battre à armes éga-les avec des enseignes intégrées.

En se coulant dans le moule,les franchisés sont-ils pour autant de « véritables » entre-preneurs ? D’un strict point de vue juridique, ils restent des di-rigeants d’entreprise indépen-dants, créateurs de leur propre société. Surtout, la vie du fran-chisé reste celle de l’entrepre-neur qui, dans sa zone de cha-landise, doit batailler avec ses concurrents.

Les naissances de nouvellesfranchises sont aussi autant d’occasions de se lancer dans une aventure où rien n’est ga-gné d’avance. Quelle que soit l’enseigne sous laquelle ils ba-taillent, les franchisés conser-vent leur liberté d’entreprendre et leur liberté de réussir.

BRUNO JACQUOT

Sandra et Raphaël Faby se sont lancés dans la frite belgeen Alsace.

mercredi 7 mars 2018 LE FIGARO

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2 DOSSIER

pôt… Jusqu’à s’intéresser finalement àla franchise.

« À un moment, dit Jérémie Lemon-nier, j’en ai eu assez des grandes struc-tures. J’avais envie de créer mon entre-prise. Mais lancer une idée nouvelle meparaissait compliqué. La franchise étaitune bonne solution. » Par ailleurs, il sa-vait que les banquiers dont il avait be-soin pour investir n’en seraient queplus faciles à convaincre. Mais com-ment choisir l’enseigne qui lui corres-pondait ? « Il faut arpenter les salons,rencontrer les franchiseurs, visiter desfranchises », conseille-t-il.

« Un dossier solide »Pour sa part, il a choisi le cambouis etl’odeur de l’huile chaude, alors qu’iln’avait jamais manipulé une clé à cli-quet : « Je me suis dit qu’il y aurait tou-jours des voitures à entretenir et j’ai pa-rié sur ma capacité d’adaptation. »Comme tout futur franchisé, il s’estposé une foule de questions : l’activité

me plaît-elle vraiment ? Suis-je capabled’assurer toutes les fonctions en cas debesoin ou d’absence d’un salarié ? Lesmoyens financiers dont je dispose sont-ils en adéquation avec ceux qu’exige lafranchise ? Puis-je investir sans mettreen danger mes proches ?

« Pour intégrer Midas, raconte Jéré-mie Lemonnier, il faut présenter un dos-sier solide et passer des entretiens de re-crutement. On doit dire comment on voitles choses, expliquer ce que l’on va faire.Le siège reçoit environ 700 postulantspar an, dont seulement 20 sont retenus.C’est sélectif, mais rassurant. »

Une fois son dossier accepté, Jérémiea passé six semaines dans des centresMidas pour apprendre le métier. Il a en-suite trouvé une banque partenaire, ensonnant au Crédit agricole. « Cela nesert à rien de courir partout. Il faut allervoir les banques locales, qui sont au plusprès du terrain », indique-t-il. Il pensaitpouvoir bénéficier d’aides à la créationd’entreprise. Non ! Un tout petit peu

trop aisé pour cela. « En France, il y aune ribambelle d’aides à la création.Mais les règles d’attribution sont telle-ment complexes qu’il y a de quoi jeterl’éponge rapidement », déplore-t-il.

Il a assumé ses 250 000 euros d’em-prunt, construit son local, embauchéimmédiatement trois personnes. Songarage a ouvert en 2014, un peu plustard que prévu dans son calendrier. Cequi lui a fait rater sa première saisond’activité. Explication : « L’entretienauto bat son plein du 15 juin au 15 sep-tembre. Les estivants partent en vacan-ces, les gens veulent soigner leur voiture.Je suis arrivé après. Un futur franchisédoit faire attention et ouvrir un peu avantle pic d’activité de l’année. »

« J’adore mon patron »Si Jérémie Lemonnier goûte aux joies del’indépendance, il en constate aussi lesdifficultés : « Il faut avoir un œil sévèresur la trésorerie. Parfois, on ne dort pasbien ! » Heureusement, il peut s’ap-puyer sur son franchiseur. Celui-ci luirend visite régulièrement pour l’infor-mer du marché, lui présenter les der-nières nouveautés numériques des vé-hicules, lui proposer des formations etdes opérations marketing.

« On imagine que la communicationest la dernière dépense à envisager…Erreur ! s’exclame Jérémie. Il faut allervers la clientèle, écouter ses besoins.Dans l’entretien automobile, nous devonsêtre totalement transparents sur les tra-vaux que nous effectuons et prendre letemps d’expliquer aux clients qui n’ontaucune notion de mécanique. » Aujour-d’hui, le temps des demi-pointes et desentrechats lui paraît bien loin. Son cen-tre Midas réalise 600 000 euros dechiffre d’affaires annuels, et JérémieLemonnier recrutera bientôt un qua-trième salarié. Créer des emplois estune satisfaction. « En dirigeant ma boî-te, dit le dirigeant, je n’ai plus l’impres-sion de travailler dans le vide. Et j’adoremon patron… C’est moi ! »

En 2017, 3 000 créateurs d’entreprise ont choisi la franchise

Jérôme Lemonnier et son centre autoMidas à Cournon-d’Auvergne ; Fran-çois Derome et sa boutique Rapid’Flo-re à Caen ; Pascal Bouvinet et Éric Noëlet leur magasin la Mie Câline àVerdun ; Sandra et Raphaël Faby etleur restaurant Friturr à Strasbourg …

Leur point commun ? Ces quatreentreprises, leurs créateurs les ontlancées en franchise. Chacun, en sui-vant un cheminement personnel, adécidé de jouer cette carte d’intégrerun réseau plutôt que de faire cavalierseul. Ils font partie des 3 000 person-nes qui, en France, ont fait ce choix

l’année passée. Au total, 74 500 fran-chisés - sous 2 000 enseignes activesen France - ont réalisé en 2017 unchiffre d’affaires global de 57 milliardsd’euros, selon les dernières donnéesde la Fédération française de la fran-chise (FFF).

620 000 emploisCette forme de commerce en réseauest en progression constante et régu-lière. Même la crise n’a pas freiné cettetendance, malgré un creux de l’activi-té en 2013, compensé par un rebonddès l’année suivante. En 2008, la FFF

recensait 1 228 réseaux. Leur nombre adonc progressé de plus de 60 % en dixans.

Ce dynamisme s’explique par la pla-ce particulière que la franchise a trou-vée dans l’Hexagone. « La France est lepremier pays européen par le nombre defranchises et de franchisés et elle occupele troisième rang mondial derrière lesÉtats-Unis et l’Australie », rappelleChantal Zimmer, déléguée générale dela FFF (lire son entretien p. 4). Au pointque Franchise Expo, dont la 37e éditionse tiendra à Paris du 25 au 28 mars,s’est imposé comme un carrefour in-

ternational. Cette année, 28 % des ex-posants sont étrangers, venant de 27pays.

Certes, les quelque 3 000 personnesqui ont choisi de se mettre à leurcompte l’an dernier en devenant fran-chisés, représentent une part margi-nale des entreprises nouvelles par rap-port aux 500 000 qui ont vu le jour l’andernier. En revanche, les entreprisesfranchisées créent des emplois, avec,en moyenne, 6,2 salariés par point devente. Au total, la franchise représente620 000 emplois. Ce qui est loin d’êtrenégligeable. B. J. ■

La France compte quelque 2 000 réseaux de franchise. Pour les salariés qui veulent lancer leur affaire, cette formule offre un cadre qui peut atténuer la prise de risque.

HENRI DE LESTAPIS

En enfilant ses chaussures de sécurité etsa combinaison de travail pour se ren-dre dans son atelier, Jérémie Lemon-nier, directeur du centre Midas deCournon-d’Auvergne (Puy-de-Dôme),se remémore parfois l’époque où il étaitpetit rat à l’Opéra de Paris… De l’Écolede danse au garage Midas, plus d’unevingtaine d’années se sont écoulées. Letemps de parvenir enfin à l’indépen-dance professionnelle dont il rêvait. « Àl’Opéra, nous étions dix admis sur millecandidats, se souvient-il. C’est là quej’ai commencé ma carrière. Mais je n’ysuis resté que deux ans. Ça n’était pasfait pour moi. »

Son parcours est ensuite une succes-sion de sauts de biche. De caractère jo-vial et curieux, habile de ses dix doigts,il s’est intéressé au travail du cuir, op-tion sellerie. Son savoir-faire l’a menéaux Haras nationaux, puis au centre derecherche et développement de De-cathlon. Il a ensuite dirigé des points devente de grandes surfaces, parmi les-quelles Cultura, Castorama, Brico Dé-

Jérémie Lemonnier, de l’Opéra de Paris à la réparation automobile

Jérémie Lemonnier, directeur du centre Midas de Cournon-d’Auvergne. MIDAS

ENTREPRENEZ !

Retrouvez sur « Le FigaroLive » notre émission« Entreprenez ! » vendredi 9 mars à 16 h 10. À suivre sur le figaro.fr et sur facebook.com/lefigaro

Franchise EXPO

Du 25 au 28 mars La 37e édition du salon international Franchise Expo se tiendra du dimanche 25 au mercredi 28 mars, à Paris, porte de Versailles (pavillon 2.2).

535 exposantsPlus de 35 000 visiteurs seront accueillis par 535 exposants : 462 enseignes et 73 prestataires (banques, assureurs, avocats…).

100 conférences Futur franchisé ou master franchisé, franchiseur, les visiteurs peuvent suivre un parcours adapté parmi les stands et les 100 conférences et ateliers. ➔ Pour en savoir plus : www.franchiseparis.com

Découvrez les aides financières de la Région surwww.iledefrance.fr/aides-entreprises

mercredi 7 mars 2018 LE FIGARO LE FIGARO mercredi 7 mars 2018

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HENRI DE LESTAPIS

À Verdun, les écoliers pensionnairesqui traînent leurs cartables à la sortie dutrain du lundi matin connaissent bien le15, rue Beaurepaire. Au comptoir deLa Mie Câline, dans une douce odeur depain grillé, ils s’offrent un croissantchaud comme ultime moment de ré-confort avant de réintégrer les murs deleur internat… Si certains sont devenusfamiliers des deux gérants du point devente, rares sont ceux qui connaissentleur passé mouvementé.

Pascal Bouvinet et Éric Noël sontd’anciens militaires de l’arme blindéecavalerie. Ils ont fait connaissance surla tourelle d’un char AMX 30. De la Côted’Ivoire au Kosovo, en passant par leLiban ou le Tchad, ils ont roulé leurbosse aux quatre coins du monde.« Nous avons vite sympathisé, et, malgrénos différentes affectations, nous ne noussommes plus jamais perdus de vue, ra-conte Pascal. Éric était même témoin àmon mariage. »

Selon la sensibilité de chacunLorsque l’un et l’autre plient définitive-ment leurs treillis camouflés, ils déci-dent de continuer à travailler ensem-ble. Ils songent un moment à monterune entreprise de travaux publics. Maisils entendent parler de ce magasinfranchisé à reprendre. À quelques pasde la gare, entre deux écoles et les rivesde la Meuse, le point de vente est biensitué. En outre, l’idée d’être adossé àune franchise leur paraît une solutionrassurante pour se lancer.

« Pour trouver une banque, racontePascal, nous sommes allés voir directe-ment le conseiller du Crédit agricole quis’occupait de l’ancien gérant de La MieCâline. Comme il savait que ça marchaitbien, il nous a tout de suite accompa-gnés. Mais nous avons également misnos billes dans l’affaire. » Depuis quatreans, les deux frères d’armes mènenttambour battant leur équipe de six

alors que Pascal résout les menus pro-blèmes techniques. « Mais nous sommestous les deux interchangeables et un peutouche-à-tout », conviennent-ils.

Pour dynamiser l’activité, ils ontajouté à leur boutique un local voisin.Ils l’ont aménagé en un espace de res-tauration d’une quarantaine de placesassises. « Nous avons le goût de la dé-brouille, du bricolage et de la récupéra-tion. Cela nous a servis pour les tra-vaux », sourit Éric. Avec un succèscertain, puisque, de 6 heures du matin à19 h 30, des employés, des collégiens,ou des passants s’y réfugient pour dé-vorer un sandwich ou discuter le boutde gras.

Un peu d’expérienceMalgré cela, comme dans tout com-merce, les chiffres de fréquentation va-rient d’un jour sur l’autre. La gestiondes stocks demande un peu d’expé-rience. Sortir une grille de croissants nese fait pas n’importe comment ; il fautlimiter les invendus. La consommationdépend de la saison, de la météo, dujour de la semaine, des vacances…

Pour les aider dans cette tâche, leurfranchiseur, implanté à Saint-Jean-de-Monts (Vendée), fournit un logiciel quiles informe sur les tendances et les chif-fres de l’année passée, au jour près.« Cela permet de se faire une idée. Maisça n’est pas une science exacte. C’est no-tre flair, et celui de l’équipe, qui a le der-nier mot », souligne Pascal. Trois ouquatre fois par an, ils se rendent auxréunions organisées par le franchiseur.Cela leur permet d’échanger avecd’autres franchisés, de partager leursproblèmes et leurs solutions.

En 2017, Pascal et Éric ont réalisé620 000 euros de chiffre d’affaires. Ilsseront libérés de leur emprunt dansdeux ans. « Nous devrions être un peuplus sereins après », confient-ils sanspour autant se départir de leur caractè-re volontiers rigolard. Ce qui démontrequ’entreprendre à deux, c’est souventplus joyeux et plus rassurant. ■

stocks, l’accueil… Essuyer les plâtresprésente un intérêt : la fratrie adaptele concept. « En plus de la vente à em-porter qui est le concept de base, nousavons installé des tables pour mangersur place, explique Raphaël qui seconsidère comme un franchisé actif.Nous ajoutons des desserts, notammentles gaufres. »

Reste que lancer une nouvelle chaî-ne exige du cran. « Il faut une annéepour convaincre, reconnaît Sandra. Enattendant, je travaille six jours sur sept.Les vendredi et samedi, je suis présentede 9 h 15 à 22 heures. Même si un salariém’accompagne 20 heures par semaine,c’est long et fatigant. Pour l’instant, jetiens le coup. Je suis une battante. »L’aînée des Faby ne touche aucun sa-laire : elle bénéficie jusqu’en avril del’aide de Pôle emploi au titre de lacréation d’entreprise.

Comme le ticket moyen ne dépassepas 10 euros, il faut attirer et fidéliseren masse étudiants, familles et em-ployés du centre-ville. Le casse-têteconsiste à communiquer vite et biensans se ruiner. Enfin, La Frituur doitsortir des frontières alsaciennes.

Christophe Fliegans sera présent pourla première fois au salon FranchiseExpo. Il table sur cinq à dix ouverturesannuelles. Une ambition raisonnable :il existe des surfaces de 45 m2 disponi-bles dans les centres-villes.

Le quadragénaire a aussi développéle food truck La Frituur qui exige unapport moindre : 12 500 euros de droitd’entrée et 40 000 euros pour le ca-mion. Ce deuxième « format » a faitses preuves aussi bien dans les quar-tiers de bureaux que sur les concertscomme les Eurockéennes de Belfort.« Les franchisés n’ont pas besoin d’êtredes pros de la restauration, assureChristophe Fliegans. L’important ?Être en phase avec l’esprit impertinentde la marque. L’aspect humain doitprimer. »

Le Strasbourgeois vise des implanta-tions à Paris, Lille et Lyon. Il doit agirvite face à la concurrence de Bintje &Zoet ou de Frite Alors ! réseau importédu… Québec. La conquête se fera sansles Faby. « Malgré notre envie d’ouvrird’autres Frituur, disent-ils, nous préfé-rons adapter et exploiter au maximumle restaurant d’Haguenau. » ■

Frère et sœur, Raphaël et Sandra Faby lancent la frite belge en Alsace

personnes. Grâce à leur passé de chefset leur bonne capacité d’adaptation, lesaut du lit aux premières heures dujour et le management ne leur parais-sent pas d’une grande difficulté.« Dans l’armée, décrypte Éric, on nebalance pas un ordre bêtement, parautoritarisme. On essaye de connaîtreles hommes et on sait qu’il faut parfoisdemander les choses différemment à l’unou l’autre pour obtenir un même résul-tat. Ces règles sont également valablesdans le civil. »

En revanche, les compères ont dûfaire l’apprentissage du four à pain, dela gestion des stocks et de la jonglerieavec les horaires de travail. « Travaillerà l’armée est plus facile qu’être chefd’entreprise. Il n’y a pas de problème decharges, de salaires, de chiffre d’affai-res… Il y a moins de pression à la fin dumois ! s’exclame Éric. Heureusement,nous nous appuyons ici sur une équipe defemmes formidables, sur lesquelles nouspouvons compter. »

Dans la boutique, les deux entrepre-neurs se partagent les tâches, selon lasensibilité de chacun. Éric se chargeplutôt de la gestion administrative,

Pascal Bouvinet et Éric Noël, du képi à la toque de boulanger

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François Derome confectionne ses bouquets dans les quartiers

AMAURY BUCCO £@AmauryBucco

Lorsque François Derome perd son em-ploi en 2012, il a 50 ans et une longue carrière de cadre dans l’audiovisuel der-rière lui. Pour se remettre rapidement sur pied, il s’inscrit à l’Association pour la valorisation des relations avec les pro-fessionnels (Avarap), avec une idée en tête, trouver un emploi dans ce qu’il sait faire : l’audiovisuel. « Mais, un jour, ra-conte François Derome, un intervenant de l’association m’a conseillé de regarder du côté de mes goûts plutôt que de me cantonner à mes compétences. » C’est alors, pour lui, comme une révélation, « une évidence ». Ce sera les fleurs, ces choses belles et éphémères qu’il aime passionnément depuis ses 15 ans. « Ce que je voulais surtout, c’était inscrire cettepassion dans un projet entrepreneurial et non pas seulement faire des bouquets ! »

Mais il y a un obstacle : François De-rome ne connaît rien à l’entrepreneu-riat et il aurait besoin d’un accompa-gnement. Trois semaines plus tard, il serend donc au salon Franchise Expo etaborde les deux acteurs en lice dans lemétier de fleuriste : Emova (MonceauFleurs, Rapid’Flore et Happy) et FloraNova (le Jardin des Fleurs, Oya et MonFleuriste Préféré). Il se présente avec uncredo : « Je veux être fleuriste ! »

Un magasin Rapid’Flore à CaenAprès plusieurs stages et des dizaines derencontres avec des professionnelspour mûrir son projet, c’est finalementle groupe Emova qui répond aux sollici-tations du quinquagénaire. Une oppor-tunité de création d’un magasin sousenseigne se présente au Mans (Sarthe).Le projet ne verra finalement pas lejour, faute de pouvoir trouver un bonemplacement pour le futur point devente. « Mais le lien avec Emova étaitdéjà tissé. J’avais su les convaincre quej’étais la bonne personne pour devenirfranchisé : mobile, passionné et volontai-re », explique François Derome. Il pré-pare et passe avec succès son CAP defleuriste en attendant que le groupe luifasse une nouvelle proposition.

Quelques mois plus tard, une secondeoccasion se présente. Ce sera la bonne.Un fleuriste vend son magasin, un ex-Rapid’Flore dans le quartier de la Grâcede Dieu à Caen (Calvados). « C’est là quej’ai conclu avec Emova : ils rachetaient cemagasin, le remettaient sous pavillonRapid’Flore. J’en devenais responsablesalarié, le temps de trouver les finance-ments pour racheter le fonds de commer-ce », détaille François Derome.

Mais, avec seulement 35 000 eurosd’apport personnel, il est loin des200 000 euros demandés par Emovapour le fonds de commerce, avec deslocaux entièrement remis à neuf.« Après des mois de recherche, j’ai fina-

lement croisé la route d’Impact Parte-naires… une rencontre décisive. »

Créé en 2008 par des dirigeants d’en-treprises et des investisseurs (Claude Bébéar, Gonzague de Blignières, Alain Joly, Gilles Cahen-Slavador, Patrick de Giovanni, Éric de Rothschild), trois ans après les émeutes urbaines, Impact Par-tenaires épaule des entrepreneurs ex-périmentés dans des zones commercia-lement délaissées : banlieues, zones de revitalisation rurale, départements d’outre-mer. L’objectif est de favoriser l’activité économique et la création d’emploi là où elle fait défaut. « Après le capital-développement, nous nous som-mes également tournés vers les débutants sous franchise, qui ont des garanties de succès plus élevées, grâce à l’accompa-gnement des enseignes », explique Ma-thieu Cornieti, président de la société degestion Impact Partenaires. Celle-ci bé-néficie de l’appui d’enseignes (Burger King, Carrefour Proximité, Éléphant Bleu, Pizza Hut, Speed, Émotta…).

Effet de levierLe projet de reprise du point de venteRapid’Flore par François Derome dansun quartier populaire de Caen a doncintéressé Impact Partenaires. Le fleu-riste a bénéficié d’un financement de95 000 euros sous forme d’obligations àbons de souscription d’actions. L’effetde levier lui a permis de contracter unemprunt bancaire de 118 000 euros etde racheter le fonds de commerce.

Le fonds d’investissement, qui gèreau total 110 millions d’euros apportéspar des investisseurs institutionnels(Bpifrance, Caisse des dépôts, Fondseuropéen d’investissement…) et unecentaine d’investisseurs privés, vise unobjectif d’ouvertures de 200 à 250 ma-gasins d’ici à cinq ans, soit la créationde 2 000 emplois. « Mais au-delà de lavocation sociale, explique Sébastien La-til, chargé d’affaires, notre but est ausside viser une rentabilité financière de l’or-dre de 2 à 3 %, ce qui vient nécessaire-ment en cas de réussite. » ■

PROPOS RECUEILLIS PARBRUNO JACQUOT [email protected]

Pour Chantal Zimmer, les salariés peu-vent plus facilement créer leur entre-prise grâce à la franchise.

LE FIGARO. - On dénombre plus de 2 000 réseaux de franchise en France. Qu’est-ce qui explique ce dynamisme ? Chantal ZIMMER. - La France est lepremier pays européen par le nombrede franchises et de franchisés et elleoccupe le troisième rang mondial der-rière les États-Unis et l’Australie. Cetteposition est la résultante des évolutionséconomiques des Trente Glorieuses. Ledéveloppement de la concurrence etl’essor des grandes surfaces ontconduit les commerçants à se profes-sionnaliser. Les premiers franchiseursont ainsi recruté des commerçants quiont pu donner plus de force à leur en-seigne et bénéficier de méthodes etd’outils auxquels ils n’avaient pas ac-cès tout seuls. La France a, en quelquesorte, pris une longueur d’avance,qu’elle a conservée. Dans l’Hexagone,

hayons de camion. Ses fondateurs- deux jeunes ingénieurs - ont constatéqu’il manquait un service spécifique, etils ont lancé une franchise.

La franchise n’est-elle pas source de conflit ? Dans la vie des affaires, il y a toujours euet il y aura toujours des litiges. Dans le cas de la franchise, les choses se sont améliorées, parce que le secteur s’est professionnalisé. Les franchiseurs comme les franchisés sont aujourd’hui mieux formés, chacun maîtrise son métier, cela réduit les conflits. Au sein de la FFF, nous avions mis en place une chambre de médiation dès 1990 qui traite une vingtaine de cas par an. De même, avec l’Académie de la franchise,nous menons des actions de formation à la fois pour les créateurs de réseaux et les franchisés. Le code de déontologie de la franchise fait son œuvre.

Comment se traduit cette professionnalisation ? Souvent, dans le passé, l’erreur desfranchiseurs a pu être de choisir com-me franchisés des gens du métier. De

plus en plus, ils sélectionnent des per-sonnes qui ont des compétences demanager, de gestionnaire et de com-mercial. Ils peuvent ensuite les formeraux particularités de leur activité.C’est une caractéristique de la fran-chise : grâce au savoir-faire, pilier dela franchise, on peut changer de mé-tier en minimisant les risques d’unereconversion. Qu’un franchiseur re-crute ainsi hors de sa profession estmême un signe de maturité de sa part.Un autre signe de cette professionna-lisation est le rôle de plus en plus im-portant des animateurs de réseau. Ilsveillent au respect du concept par lefranchisé et l’aident à corriger lespoints de faiblesses si nécessaire.

Quel est le bon équilibre dans cette relation ? Le socle de la franchise est l’allianceentre deux chefs d’entreprise. Le par-tage des rôles et les règles sont clairs.Le franchiseur, initiateur du réseau, estresponsable de sa pérennité et déter-mine la stratégie. Le franchisé en estl’ambassadeur. Sa responsabilité est detenir la promesse de l’enseigne.

« La franchise est l’alliance de deux entrepreneurs »Entretien avec Chantal Zimmer, déléguée générale de la Fédération française de la franchise.

contrairement à d’autres pays, 90 %sont des enseignes d’origine françaiseset 35 % des enseignes françaises sontimplantées à l’étranger.

La création d’entreprise a la cote actuellement. La franchise en profite-t-elle ? Selon l’enquête annuelle Franchise Banque populai-re/FFF/CSA, 39 % des Français sont tentés par la création d’entreprise et, parmi eux, 44 % par la fran-chise. Depuis une dizaine d’années, la création est de-venue une vraie option pour les salariés qui perdent leur emploi ou qui pensent àune reconversion parce que leur carrière ne leur donne plus satisfaction. Ainsi, 76 % des franchisés sont d’anciens salariés. C’est aussi une opportunité pour les femmes. Lorsqu’elles deviennent mères, elles doivent arbitrer entre vie privée et carrière. La franchise

permet de mieux concilier des responsa-bilités professionnelles et de mère de fa-mille, alors que pour les salariées la ma-

ternité peut être un frein.

Quels sont les secteurs les plus dynamiques ?L’hôtellerie, la restaurationrapide, la beauté et le bien-être arrivent en tête. Lafranchise reflète les évolu-tions socioéconomiques. Ledéveloppement de franchi-

ses de services à la personne- comme le maintien à do-micile ou les tâches ménagè-res - et les services aux en-treprises répondent à latendance actuelle d’externa-lisation ou de délégation.

Le marché ne risque-t-il pasd’être saturé ? La création de nouvelles en-seignes montre qu’il y a tou-jours de nouveaux marchés àdécouvrir. Je pense, par

exemple, à une société comme Hydro-parts, dont l’activité est l’entretien de

C’est une caractéristique de la franchise : on peut changer de métier en minimisant les risques d’une reconversion»CHANTAL ZIMMER

FFF

MARIE NICOT

Un portrait officiel du roi Baudouindaté de 1952, un logo en forme de cou-ronne, une bonne odeur de frites fraî-ches du jour, de fricadelle… Le décordécalé, chic et drôle de La Frituur ti-tille la passion bien française pour laculture belge. Aux fourneaux du res-taurant de 50 m2 d’Haguenau, près deStrasbourg, Sandra Faby, 44 ans, veilleau grain, sert les cornets de frites,tchache avec les habitués, passe lescommandes de pommes de terre -uniquement des bintjes - et consulteson « petit » frère, Raphaël, 41 ans.Même sourire, même dynamisme. LesFaby, qui ont investi en juin 2017 dansl’ouverture de La Frituur, partagentles risques. À l’origine, Raphaël, chefd’entreprise autodidacte, souhaitaitchanger d’activité. Après avoir reven-du sa société d’ambulance, il a suiviune formation en management et engestion de trois mois à la chambre decommerce et d’industrie (CCI) deStrasbourg et ouvert une pizzeria DeNico dans la capitale alsacienne. Alertépar le bouche-à-oreille, il craque pourLa Frituur.

L’enseigne créée en 2015 par Chris-tophe Fliegans, ex-ingénieur spéciali-sé dans l’hygiène et la sécurité, revisi-te les recettes du Nord. L’idée est néedans la tête du Strasbourgeois lorsqu’ilconstate par hasard le succès d’unebaraque à frites installée pour le mar-ché de Noël de sa ville. Tout comme le

burger, le bagel ou le sandwich fran-co-vietnamien Banh-mi, la frite chicfait recette. La Frituur profite de labelle santé du marché de la restaura-tion rapide. Selon le cabinet NPD, lafréquentation a augmenté de 2,3 % en2017 par rapport à l’année précédente.Les Français ont englouti pour55,6 milliards d’euros de repas pris surle pouce. Les adolescents et les sportifsadorent s’accorder un cheat meal, enfrançais un repas-triche. C’est une en-torse aux menus sains et équilibrés dela semaine. On oublie de compter lescalories d’un cornet de frites, les glu-cides d’une gaufre au sucre dans unmoment de régression et de partageentre amis.

Persuadé que « la friterie s’adapte àtoutes les villes », Raphaël convaincSandra, qui a travaillé pendant dix anscomme responsable de salle, de deve-nir les premiers franchisés du réseau.« Nous nous faisons confiance, expliqueRaphaël Faby. C’est important car l’en-trepreneuriat est difficile. On ne comptepas nos heures. Il faut un désir communpour réussir. »

Le duo investit 150 000 euros dont15 000 euros de droit d’entrée et at-tend un retour sur investissementdans trois ans. Il doit verser desroyalties d’un montant de 5 % sur lechiffre d’affaires hors taxe et de 1 %toujours sur le chiffre d’affaires horstaxes pour la communication. LesFaby ont décroché une « prime de ris-que » : une formation gratuite de troissemaines pour Sandra sur la doublecuisson à haute température, la ges-tion des ressources humaines, des

“Nous nous faisons confiance. C’est important car l’entrepreneuriat est difficile. On ne compte pas nos heures. Il faut un désir commun pour réussir”RAPHAËL FABY3

HIS

TOIR

ESPascal Bouvinet et Éric Noël sont d’anciens militaires de l’arme blindée cavalerie.

Raphaël et Sandra Faby, un frère et une sœur animés de la même passion.

François Derome devant son commerce de fleurs à Caen.

mercredi 7 mars 2018 LE FIGARO LE FIGARO mercredi 7 mars 2018

A

4 DOSSIER 5DOSSIER

RAPI

D’F

LORE

HENRI DE LESTAPIS

À Verdun, les écoliers pensionnairesqui traînent leurs cartables à la sortie dutrain du lundi matin connaissent bien le15, rue Beaurepaire. Au comptoir deLa Mie Câline, dans une douce odeur depain grillé, ils s’offrent un croissantchaud comme ultime moment de ré-confort avant de réintégrer les murs deleur internat… Si certains sont devenusfamiliers des deux gérants du point devente, rares sont ceux qui connaissentleur passé mouvementé.

Pascal Bouvinet et Éric Noël sontd’anciens militaires de l’arme blindéecavalerie. Ils ont fait connaissance surla tourelle d’un char AMX 30. De la Côted’Ivoire au Kosovo, en passant par leLiban ou le Tchad, ils ont roulé leurbosse aux quatre coins du monde.« Nous avons vite sympathisé, et, malgrénos différentes affectations, nous ne noussommes plus jamais perdus de vue, ra-conte Pascal. Éric était même témoin àmon mariage. »

Selon la sensibilité de chacunLorsque l’un et l’autre plient définitive-ment leurs treillis camouflés, ils déci-dent de continuer à travailler ensem-ble. Ils songent un moment à monterune entreprise de travaux publics. Maisils entendent parler de ce magasinfranchisé à reprendre. À quelques pasde la gare, entre deux écoles et les rivesde la Meuse, le point de vente est biensitué. En outre, l’idée d’être adossé àune franchise leur paraît une solutionrassurante pour se lancer.

« Pour trouver une banque, racontePascal, nous sommes allés voir directe-ment le conseiller du Crédit agricole quis’occupait de l’ancien gérant de La MieCâline. Comme il savait que ça marchaitbien, il nous a tout de suite accompa-gnés. Mais nous avons également misnos billes dans l’affaire. » Depuis quatreans, les deux frères d’armes mènenttambour battant leur équipe de six

alors que Pascal résout les menus pro-blèmes techniques. « Mais nous sommestous les deux interchangeables et un peutouche-à-tout », conviennent-ils.

Pour dynamiser l’activité, ils ontajouté à leur boutique un local voisin.Ils l’ont aménagé en un espace de res-tauration d’une quarantaine de placesassises. « Nous avons le goût de la dé-brouille, du bricolage et de la récupéra-tion. Cela nous a servis pour les tra-vaux », sourit Éric. Avec un succèscertain, puisque, de 6 heures du matin à19 h 30, des employés, des collégiens,ou des passants s’y réfugient pour dé-vorer un sandwich ou discuter le boutde gras.

Un peu d’expérienceMalgré cela, comme dans tout com-merce, les chiffres de fréquentation va-rient d’un jour sur l’autre. La gestiondes stocks demande un peu d’expé-rience. Sortir une grille de croissants nese fait pas n’importe comment ; il fautlimiter les invendus. La consommationdépend de la saison, de la météo, dujour de la semaine, des vacances…

Pour les aider dans cette tâche, leurfranchiseur, implanté à Saint-Jean-de-Monts (Vendée), fournit un logiciel quiles informe sur les tendances et les chif-fres de l’année passée, au jour près.« Cela permet de se faire une idée. Maisça n’est pas une science exacte. C’est no-tre flair, et celui de l’équipe, qui a le der-nier mot », souligne Pascal. Trois ouquatre fois par an, ils se rendent auxréunions organisées par le franchiseur.Cela leur permet d’échanger avecd’autres franchisés, de partager leursproblèmes et leurs solutions.

En 2017, Pascal et Éric ont réalisé620 000 euros de chiffre d’affaires. Ilsseront libérés de leur emprunt dansdeux ans. « Nous devrions être un peuplus sereins après », confient-ils sanspour autant se départir de leur caractè-re volontiers rigolard. Ce qui démontrequ’entreprendre à deux, c’est souventplus joyeux et plus rassurant. ■

stocks, l’accueil… Essuyer les plâtresprésente un intérêt : la fratrie adaptele concept. « En plus de la vente à em-porter qui est le concept de base, nousavons installé des tables pour mangersur place, explique Raphaël qui seconsidère comme un franchisé actif.Nous ajoutons des desserts, notammentles gaufres. »

Reste que lancer une nouvelle chaî-ne exige du cran. « Il faut une annéepour convaincre, reconnaît Sandra. Enattendant, je travaille six jours sur sept.Les vendredi et samedi, je suis présentede 9 h 15 à 22 heures. Même si un salariém’accompagne 20 heures par semaine,c’est long et fatigant. Pour l’instant, jetiens le coup. Je suis une battante. »L’aînée des Faby ne touche aucun sa-laire : elle bénéficie jusqu’en avril del’aide de Pôle emploi au titre de lacréation d’entreprise.

Comme le ticket moyen ne dépassepas 10 euros, il faut attirer et fidéliseren masse étudiants, familles et em-ployés du centre-ville. Le casse-têteconsiste à communiquer vite et biensans se ruiner. Enfin, La Frituur doitsortir des frontières alsaciennes.

Christophe Fliegans sera présent pourla première fois au salon FranchiseExpo. Il table sur cinq à dix ouverturesannuelles. Une ambition raisonnable :il existe des surfaces de 45 m2 disponi-bles dans les centres-villes.

Le quadragénaire a aussi développéle food truck La Frituur qui exige unapport moindre : 12 500 euros de droitd’entrée et 40 000 euros pour le ca-mion. Ce deuxième « format » a faitses preuves aussi bien dans les quar-tiers de bureaux que sur les concertscomme les Eurockéennes de Belfort.« Les franchisés n’ont pas besoin d’êtredes pros de la restauration, assureChristophe Fliegans. L’important ?Être en phase avec l’esprit impertinentde la marque. L’aspect humain doitprimer. »

Le Strasbourgeois vise des implanta-tions à Paris, Lille et Lyon. Il doit agirvite face à la concurrence de Bintje &Zoet ou de Frite Alors ! réseau importédu… Québec. La conquête se fera sansles Faby. « Malgré notre envie d’ouvrird’autres Frituur, disent-ils, nous préfé-rons adapter et exploiter au maximumle restaurant d’Haguenau. » ■

Frère et sœur, Raphaël et Sandra Faby lancent la frite belge en Alsace

personnes. Grâce à leur passé de chefset leur bonne capacité d’adaptation, lesaut du lit aux premières heures dujour et le management ne leur parais-sent pas d’une grande difficulté.« Dans l’armée, décrypte Éric, on nebalance pas un ordre bêtement, parautoritarisme. On essaye de connaîtreles hommes et on sait qu’il faut parfoisdemander les choses différemment à l’unou l’autre pour obtenir un même résul-tat. Ces règles sont également valablesdans le civil. »

En revanche, les compères ont dûfaire l’apprentissage du four à pain, dela gestion des stocks et de la jonglerieavec les horaires de travail. « Travaillerà l’armée est plus facile qu’être chefd’entreprise. Il n’y a pas de problème decharges, de salaires, de chiffre d’affai-res… Il y a moins de pression à la fin dumois ! s’exclame Éric. Heureusement,nous nous appuyons ici sur une équipe defemmes formidables, sur lesquelles nouspouvons compter. »

Dans la boutique, les deux entrepre-neurs se partagent les tâches, selon lasensibilité de chacun. Éric se chargeplutôt de la gestion administrative,

Pascal Bouvinet et Éric Noël, du képi à la toque de boulanger

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François Derome confectionne ses bouquets dans les quartiers

AMAURY BUCCO £@AmauryBucco

Lorsque François Derome perd son em-ploi en 2012, il a 50 ans et une longue carrière de cadre dans l’audiovisuel der-rière lui. Pour se remettre rapidement sur pied, il s’inscrit à l’Association pour la valorisation des relations avec les pro-fessionnels (Avarap), avec une idée en tête, trouver un emploi dans ce qu’il sait faire : l’audiovisuel. « Mais, un jour, ra-conte François Derome, un intervenant de l’association m’a conseillé de regarder du côté de mes goûts plutôt que de me cantonner à mes compétences. » C’est alors, pour lui, comme une révélation, « une évidence ». Ce sera les fleurs, ces choses belles et éphémères qu’il aime passionnément depuis ses 15 ans. « Ce que je voulais surtout, c’était inscrire cettepassion dans un projet entrepreneurial et non pas seulement faire des bouquets ! »

Mais il y a un obstacle : François De-rome ne connaît rien à l’entrepreneu-riat et il aurait besoin d’un accompa-gnement. Trois semaines plus tard, il serend donc au salon Franchise Expo etaborde les deux acteurs en lice dans lemétier de fleuriste : Emova (MonceauFleurs, Rapid’Flore et Happy) et FloraNova (le Jardin des Fleurs, Oya et MonFleuriste Préféré). Il se présente avec uncredo : « Je veux être fleuriste ! »

Un magasin Rapid’Flore à CaenAprès plusieurs stages et des dizaines derencontres avec des professionnelspour mûrir son projet, c’est finalementle groupe Emova qui répond aux sollici-tations du quinquagénaire. Une oppor-tunité de création d’un magasin sousenseigne se présente au Mans (Sarthe).Le projet ne verra finalement pas lejour, faute de pouvoir trouver un bonemplacement pour le futur point devente. « Mais le lien avec Emova étaitdéjà tissé. J’avais su les convaincre quej’étais la bonne personne pour devenirfranchisé : mobile, passionné et volontai-re », explique François Derome. Il pré-pare et passe avec succès son CAP defleuriste en attendant que le groupe luifasse une nouvelle proposition.

Quelques mois plus tard, une secondeoccasion se présente. Ce sera la bonne.Un fleuriste vend son magasin, un ex-Rapid’Flore dans le quartier de la Grâcede Dieu à Caen (Calvados). « C’est là quej’ai conclu avec Emova : ils rachetaient cemagasin, le remettaient sous pavillonRapid’Flore. J’en devenais responsablesalarié, le temps de trouver les finance-ments pour racheter le fonds de commer-ce », détaille François Derome.

Mais, avec seulement 35 000 eurosd’apport personnel, il est loin des200 000 euros demandés par Emovapour le fonds de commerce, avec deslocaux entièrement remis à neuf.« Après des mois de recherche, j’ai fina-

lement croisé la route d’Impact Parte-naires… une rencontre décisive. »

Créé en 2008 par des dirigeants d’en-treprises et des investisseurs (Claude Bébéar, Gonzague de Blignières, Alain Joly, Gilles Cahen-Slavador, Patrick de Giovanni, Éric de Rothschild), trois ans après les émeutes urbaines, Impact Par-tenaires épaule des entrepreneurs ex-périmentés dans des zones commercia-lement délaissées : banlieues, zones de revitalisation rurale, départements d’outre-mer. L’objectif est de favoriser l’activité économique et la création d’emploi là où elle fait défaut. « Après le capital-développement, nous nous som-mes également tournés vers les débutants sous franchise, qui ont des garanties de succès plus élevées, grâce à l’accompa-gnement des enseignes », explique Ma-thieu Cornieti, président de la société degestion Impact Partenaires. Celle-ci bé-néficie de l’appui d’enseignes (Burger King, Carrefour Proximité, Éléphant Bleu, Pizza Hut, Speed, Émotta…).

Effet de levierLe projet de reprise du point de venteRapid’Flore par François Derome dansun quartier populaire de Caen a doncintéressé Impact Partenaires. Le fleu-riste a bénéficié d’un financement de95 000 euros sous forme d’obligations àbons de souscription d’actions. L’effetde levier lui a permis de contracter unemprunt bancaire de 118 000 euros etde racheter le fonds de commerce.

Le fonds d’investissement, qui gèreau total 110 millions d’euros apportéspar des investisseurs institutionnels(Bpifrance, Caisse des dépôts, Fondseuropéen d’investissement…) et unecentaine d’investisseurs privés, vise unobjectif d’ouvertures de 200 à 250 ma-gasins d’ici à cinq ans, soit la créationde 2 000 emplois. « Mais au-delà de lavocation sociale, explique Sébastien La-til, chargé d’affaires, notre but est ausside viser une rentabilité financière de l’or-dre de 2 à 3 %, ce qui vient nécessaire-ment en cas de réussite. » ■

PROPOS RECUEILLIS PARBRUNO JACQUOT [email protected]

Pour Chantal Zimmer, les salariés peu-vent plus facilement créer leur entre-prise grâce à la franchise.

LE FIGARO. - On dénombre plus de 2 000 réseaux de franchise en France. Qu’est-ce qui explique ce dynamisme ? Chantal ZIMMER. - La France est lepremier pays européen par le nombrede franchises et de franchisés et elleoccupe le troisième rang mondial der-rière les États-Unis et l’Australie. Cetteposition est la résultante des évolutionséconomiques des Trente Glorieuses. Ledéveloppement de la concurrence etl’essor des grandes surfaces ontconduit les commerçants à se profes-sionnaliser. Les premiers franchiseursont ainsi recruté des commerçants quiont pu donner plus de force à leur en-seigne et bénéficier de méthodes etd’outils auxquels ils n’avaient pas ac-cès tout seuls. La France a, en quelquesorte, pris une longueur d’avance,qu’elle a conservée. Dans l’Hexagone,

hayons de camion. Ses fondateurs- deux jeunes ingénieurs - ont constatéqu’il manquait un service spécifique, etils ont lancé une franchise.

La franchise n’est-elle pas source de conflit ? Dans la vie des affaires, il y a toujours euet il y aura toujours des litiges. Dans le cas de la franchise, les choses se sont améliorées, parce que le secteur s’est professionnalisé. Les franchiseurs comme les franchisés sont aujourd’hui mieux formés, chacun maîtrise son métier, cela réduit les conflits. Au sein de la FFF, nous avions mis en place une chambre de médiation dès 1990 qui traite une vingtaine de cas par an. De même, avec l’Académie de la franchise,nous menons des actions de formation à la fois pour les créateurs de réseaux et les franchisés. Le code de déontologie de la franchise fait son œuvre.

Comment se traduit cette professionnalisation ? Souvent, dans le passé, l’erreur desfranchiseurs a pu être de choisir com-me franchisés des gens du métier. De

plus en plus, ils sélectionnent des per-sonnes qui ont des compétences demanager, de gestionnaire et de com-mercial. Ils peuvent ensuite les formeraux particularités de leur activité.C’est une caractéristique de la fran-chise : grâce au savoir-faire, pilier dela franchise, on peut changer de mé-tier en minimisant les risques d’unereconversion. Qu’un franchiseur re-crute ainsi hors de sa profession estmême un signe de maturité de sa part.Un autre signe de cette professionna-lisation est le rôle de plus en plus im-portant des animateurs de réseau. Ilsveillent au respect du concept par lefranchisé et l’aident à corriger lespoints de faiblesses si nécessaire.

Quel est le bon équilibre dans cette relation ? Le socle de la franchise est l’allianceentre deux chefs d’entreprise. Le par-tage des rôles et les règles sont clairs.Le franchiseur, initiateur du réseau, estresponsable de sa pérennité et déter-mine la stratégie. Le franchisé en estl’ambassadeur. Sa responsabilité est detenir la promesse de l’enseigne.

« La franchise est l’alliance de deux entrepreneurs »Entretien avec Chantal Zimmer, déléguée générale de la Fédération française de la franchise.

contrairement à d’autres pays, 90 %sont des enseignes d’origine françaiseset 35 % des enseignes françaises sontimplantées à l’étranger.

La création d’entreprise a la cote actuellement. La franchise en profite-t-elle ? Selon l’enquête annuelle Franchise Banque populai-re/FFF/CSA, 39 % des Français sont tentés par la création d’entreprise et, parmi eux, 44 % par la fran-chise. Depuis une dizaine d’années, la création est de-venue une vraie option pour les salariés qui perdent leur emploi ou qui pensent àune reconversion parce que leur carrière ne leur donne plus satisfaction. Ainsi, 76 % des franchisés sont d’anciens salariés. C’est aussi une opportunité pour les femmes. Lorsqu’elles deviennent mères, elles doivent arbitrer entre vie privée et carrière. La franchise

permet de mieux concilier des responsa-bilités professionnelles et de mère de fa-mille, alors que pour les salariées la ma-

ternité peut être un frein.

Quels sont les secteurs les plus dynamiques ?L’hôtellerie, la restaurationrapide, la beauté et le bien-être arrivent en tête. Lafranchise reflète les évolu-tions socioéconomiques. Ledéveloppement de franchi-

ses de services à la personne- comme le maintien à do-micile ou les tâches ménagè-res - et les services aux en-treprises répondent à latendance actuelle d’externa-lisation ou de délégation.

Le marché ne risque-t-il pasd’être saturé ? La création de nouvelles en-seignes montre qu’il y a tou-jours de nouveaux marchés àdécouvrir. Je pense, par

exemple, à une société comme Hydro-parts, dont l’activité est l’entretien de

C’est une caractéristique de la franchise : on peut changer de métier en minimisant les risques d’une reconversion»CHANTAL ZIMMER

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MARIE NICOT

Un portrait officiel du roi Baudouindaté de 1952, un logo en forme de cou-ronne, une bonne odeur de frites fraî-ches du jour, de fricadelle… Le décordécalé, chic et drôle de La Frituur ti-tille la passion bien française pour laculture belge. Aux fourneaux du res-taurant de 50 m2 d’Haguenau, près deStrasbourg, Sandra Faby, 44 ans, veilleau grain, sert les cornets de frites,tchache avec les habitués, passe lescommandes de pommes de terre -uniquement des bintjes - et consulteson « petit » frère, Raphaël, 41 ans.Même sourire, même dynamisme. LesFaby, qui ont investi en juin 2017 dansl’ouverture de La Frituur, partagentles risques. À l’origine, Raphaël, chefd’entreprise autodidacte, souhaitaitchanger d’activité. Après avoir reven-du sa société d’ambulance, il a suiviune formation en management et engestion de trois mois à la chambre decommerce et d’industrie (CCI) deStrasbourg et ouvert une pizzeria DeNico dans la capitale alsacienne. Alertépar le bouche-à-oreille, il craque pourLa Frituur.

L’enseigne créée en 2015 par Chris-tophe Fliegans, ex-ingénieur spéciali-sé dans l’hygiène et la sécurité, revisi-te les recettes du Nord. L’idée est néedans la tête du Strasbourgeois lorsqu’ilconstate par hasard le succès d’unebaraque à frites installée pour le mar-ché de Noël de sa ville. Tout comme le

burger, le bagel ou le sandwich fran-co-vietnamien Banh-mi, la frite chicfait recette. La Frituur profite de labelle santé du marché de la restaura-tion rapide. Selon le cabinet NPD, lafréquentation a augmenté de 2,3 % en2017 par rapport à l’année précédente.Les Français ont englouti pour55,6 milliards d’euros de repas pris surle pouce. Les adolescents et les sportifsadorent s’accorder un cheat meal, enfrançais un repas-triche. C’est une en-torse aux menus sains et équilibrés dela semaine. On oublie de compter lescalories d’un cornet de frites, les glu-cides d’une gaufre au sucre dans unmoment de régression et de partageentre amis.

Persuadé que « la friterie s’adapte àtoutes les villes », Raphaël convaincSandra, qui a travaillé pendant dix anscomme responsable de salle, de deve-nir les premiers franchisés du réseau.« Nous nous faisons confiance, expliqueRaphaël Faby. C’est important car l’en-trepreneuriat est difficile. On ne comptepas nos heures. Il faut un désir communpour réussir. »

Le duo investit 150 000 euros dont15 000 euros de droit d’entrée et at-tend un retour sur investissementdans trois ans. Il doit verser desroyalties d’un montant de 5 % sur lechiffre d’affaires hors taxe et de 1 %toujours sur le chiffre d’affaires horstaxes pour la communication. LesFaby ont décroché une « prime de ris-que » : une formation gratuite de troissemaines pour Sandra sur la doublecuisson à haute température, la ges-tion des ressources humaines, des

“Nous nous faisons confiance. C’est important car l’entrepreneuriat est difficile. On ne compte pas nos heures. Il faut un désir commun pour réussir”RAPHAËL FABY3

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Pascal Bouvinet et Éric Noël sont d’anciens militaires de l’arme blindée cavalerie.

Raphaël et Sandra Faby, un frère et une sœur animés de la même passion.

François Derome devant son commerce de fleurs à Caen.

mercredi 7 mars 2018 LE FIGARO

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6 DOSSIER

Bien choisir un réseau de franchise : une démarche méthodiqueLes candidats, surtout s’ils n’ont pas d’expérience d’entrepreneur, doivent prendre le temps avant de se lancer. De la motivation au choix d’une enseigne, un parcours en six étapes clés.

LEXIQUE APPORT PERSONNELL’apport personnel du franchisé couvre les sommes nécessaires au lancement de l’activité, soit 30 % du financement du projet. Il est complété par un prêt bancaire.La plupart des banques ont d’ailleurs développé un service de financement pourles franchisés.

CONTRAT DE FRANCHISEDans le contrat qui les lie pour cinq à dix ans, le franchiseur met à la disposition du franchisé (qui est un entrepreneur indépendant) une enseigne commerciale, lui transfère sonsavoir-faire et lui apporte son assistanceau démarrage et en cours d’exploitation.En contrepartie,le franchisé doit respecter l’identitéde la marque du franchiseur.

DIPLe document d’information précontractuel (DIP), instauré par la loi Doubin de 1989 (art. L. 330-3 du Code de commerce), fixe les éléments que le franchiseur doit porter à la connaissance du futur franchisé au plus tard vingt jours avant la signature du contrat de franchise.

DROIT D’ENTRÉEÀ la signature du contrat de franchise, le franchisé verse un droit d’entrée (ou redevance initiale forfaitaire). Il rémunère les services - comme la formation - apportés par le franchiseur au démarrage.

MASTER FRANCHISELa master-franchise consiste pour un franchiseur à accorder l’exclusivité de son enseigne à un master-franchisé sur un territoire donné. À charge pour lui de développer l’enseigne dans cette zone géographique et de recruter des franchisés.

REDEVANCESLe franchisé verse ensuite au franchiseur une redevance d’exploitation, généralement assise sur son chiffre d’affaires. Elle couvre la formation, la centrale d’achat… Une redevance spécifique peut s’appliquer à la communication et à la publicité du réseau.

➜ Pour en savoir plus : www.franchise-fff.com, www.observatoiredelafranchise.fr, www.toute-la-franchise.com

PRATIQUECÉLINE TRIDON

Ouvrir une franchise s’annonce commeune aventure unique. Mais pour que leprojet ait toutes les chances de réussir,il faut savoir identifier, entre autres, lesecteur d’activité, la zone géographiqueet, bien sûr, le franchiseur. Soit autantde critères à étudier de près et à ne pasprendre à la légère.

1 UN BILAN PERSONNELPERMET DE TESTER SA MOTIVATIOND’ENTREPRENEUROuvrir une franchise équi-

vaut à créer son entreprise, avec une différence cependant : on bénéficie du soutien d’un réseau et d’un franchiseur. Aussi, avant de se lancer dans cette aventure, chaque candidat ne doit pas moins s’interroger sur ses capacités à entreprendre : est-il prêt à prendre des risques ? Peut-il s’investir 50, 60 ou 70 heures par semaine ? Il doit se proje-ter et ne plus raisonner en salarié. D’autres qualités sont également néces-saires pour mener à bien ce projet : avoirla fibre commerciale, des compétences en management ou en gestion, une apti-tude à prendre des décisions, se préva-loir d’un bon relationnel… Il s’agit d’être actif, à tout point de vue. « Le franchisé ne peut pas se contenter d’ouvrir le magasin et d’attendre, souli-gne Emmanuel Jury, directeur associé ducabinet Progressium, spécialisé dans la création de franchise à Lyon. Il doit se faire connaître, être présent sur les ré-seaux sociaux, rejoindre une association de commerçants de quartier… L’objectif est d’adopter une démarche “push”. Pour y arriver, non seulement il faut bien se connaître, mais aussi avoir de l’instinct. » Un bilan personnel aidera le candidat à s’interroger sur ses forces et ses faibles-ses. Sorte d’introspection personnelle, cet examen servira à évaluer sa motiva-tion d’entrepreneur. Par ailleurs, certai-nes enseignes, très actives dans leur pro-cessus de recrutement, peuvent faire appel à des cabinets spécialisés pour s’assurer que le profil du candidat cor-responde bien à leur concept.

2 LE MONTANT DE L’APPORTFINANCIER ORIENTE LE CHOIX DE L’ACTIVITÉPour tout concept de

franchise, un apport financier est né-

cessaire. L’investissement est variableet dépend de plusieurs critères. Lepremier est le secteur convoité : unprojet de restauration assise se chiffre-ra rapidement à plusieurs dizaines demilliers d’euros, tandis que les servicesà la personne ne nécessitent ni mobi-lier spécifique, ni personnel supplé-mentaire. L’investissement requis seradonc moins important. Parmi lesautres éléments à prendre en compte :l’emplacement du futur bureau ou ma-gasin, l’aménagement et l’équipementnécessaires, les panneaux publicitai-res, l’enseigne et le droit d’entrée. Cedernier sert à financer l’animation desfranchisés et le développement du ré-seau (formation initiale, formationcontinue, entretien, assistance, com-munication…). « Il faut une adéquationentre son apport financier et le montagedu dossier. Pour un dossier de 200 000euros, il faut en moyenne 66 000 eurosd’apport », précise Christophe Bellet,président du cabinet de conseil pari-sien Gagner en Franchise. Une estimation au plus juste de l’ap-port financier déterminera les secteursà écarter d’emblée, mais aussi lechamp d’action possible du futur fran-chisé. Le projet comportant des ris-ques, l’environnement familial doitégalement être favorable à une telleentreprise. C’est pourquoi, pour choi-sir sa franchise, il faut s’assurer de dis-poser des fonds suffisants, mais aussise fixer un niveau de rémunération àatteindre. La rémunération mensuellerecherchée correspond-elle à celle quepeut apporter la franchise ?

3 LES AFFINITÉS AVEC L’ACTIVITÉIMPORTENT PLUS QUELA CONNAISSANCE DUSECTEUR Pour Cécile Peskine,

avocate associée au sein du cabinetd’avocats–conseil en réseaux, Linkea,les profils de franchisés sont variables.« Le franchisé peut être un jeune quisort des études et qui souhaite entre-prendre, dit-elle. Ce peut aussi être uninvestisseur qui, souvent, travaille avecplusieurs marques. Il n’est pas sur l’ex-ploitation physique des magasins maissur un investissement global. Le profil leplus classique reste celui du cadre en re-conversion qui veut monter son entre-prise tout en étant accompagné. »Ainsi, nul besoin d’être issu du secteurconvoité pour se lancer. En revanche,il faut une grande affinité avec le sec-teur ou les produits : le futur franchisédoit apprécier ce qu’il fait pour être

sûr de mettre toutes les chances deson côté. L’ouverture d’une franchise va de pairavec une formation. La plupart des ré-seaux n’exigent pas de connaissancestechniques particulières mais ils doi-vent transmettre un savoir-faire. « Lefranchisé est formé pour pouvoir absor-ber ce savoir-faire. Par exemple, mêmes’il connaît la restauration rapide, tou-tes les enseignes n’ont pas les mêmesmodes opératoires. Il faut donc les ap-prendre », commente Emmanuel Jury.L’ensemble du savoir-faire est maté-rialisé dans le « man-op » ou « manuelopératoire ». Toujours dans le cas de larestauration rapide, le document peutdécrire la composition des sandwichs,le fonctionnement de la caisse enregis-treuse, l’organisation du restaurant… La plupart des contrats de franchiseprévoient une obligation de formationinitiale, assurée par le franchiseur,ainsi que des journées de formationannuelle. Au candidat de suivre avecsérieux chacune de ces sessions pourmettre toutes les chances de son côté.

4 UNE ÉTUDE DE MARCHÉ ESTINDISPENSABLE POURS’ASSURER DE LAVALIDITÉ DU PROJET

Une fois le secteur d’activité identifié,il reste à préciser l’emplacement de lafuture franchise. Pour cela, il faut étu-dier en amont quelle est la concurren-ce déjà présente sur place. Ensuite, lechoix de la zone géographique aura unimpact sur le chiffre d’affaires de lafranchise : petite ou grande ville, cen-tre-ville, rue excentrée, banlieue,zone d’activité… Le candidat doit doncréaliser une étude de marché cohéren-te en se basant sur des chiffres con-crets (franchisés déjà en activité dansdes zones géographiques similaires,particularités du secteur prises encompte, niveau de vie des habitants,habitude de consommation des habi-tants…). Cela lui permettra de savoirs’il fait bonne route. Ces informationslui serviront également à étoffer sonbusiness plan, étape indispensabledans l’ouverture d’une franchise. Outre l’étude de marché, ce documentcontient la description du produit oudu service, des détails sur l’équipe en-visagée, l’aspect financier avec un bi-lan et un compte de résultat prévision-nel. Le business plan aidera le candidatà convaincre des partenaires finan-ciers de le soutenir et à faire la diffé-rence auprès d’un franchiseur.

5 LE CHOIX DU FRANCHISEUR REPOSESUR LES SERVICES QU’IL APPORTE AUX FRANCHISÉSSites spécialisés, salons an-

nuels, annuaire de l’Observatoire de la franchise… Sans oublier les sites Inter-net de chaque réseau : le candidat à la franchise peut facilement trouver les contacts des franchiseurs qui recrutent. Pour affiner son choix, à lui de s’inter-roger sur le degré d’accompagnement voulu. Toutes les enseignes ne sont pas également impliquées dans le soutien, au quotidien, des franchisés. Outre la formation initiale et la transmis-sion du manuel opératoire, le franchiseur peut intervenir avant, pendant et tout au long de l’activité du franchisé. À ce der-nier d’estimer s’il a besoin d’aide pour trouver son local, pour obtenir un prêt bancaire, pour former ses équipes… De plus, choisir son franchiseur, c’est aussi s’assurer de sa santé financière. C’est pourquoi le franchiseur est tenu de trans-mettre, à chaque candidat, le document d’information pré-contractuel (DIP). « L’erreur à commettre est de choisir une enseigne pour sa notoriété. Or, il faut avanttout qu’elle soit rentable, commente Em-manuel Jury. Dans le DIP, le franchiseur doit présenter de manière assez claire le chiffre d’affaires de l’enseigne et de ses succursales, sa masse salariale, etc. Dans l’idéal, une notice doit être livrée avec ce document : un futur franchisé ne peut pas toujours comprendre les comptes bruts. »

6UNE ENQUÊTE AUPRÈS DE SES FRANCHISÉSINFORME SUR LA QUALITÉ D’UN RÉSEAU Enfin, dernière étape, il est

important d’interroger d’autres fran-chisés de l’enseigne retenue : est-elleconforme à leurs attentes ? Sont-ilssatisfaits du savoir-faire qui leur a ététransmis ? De l’assistance au quoti-dien ? La clientèle est-elle au rendez-vous ? « Il ne faut pas hésiter àcontacter plusieurs franchisés de l’en-seigne, avec des formats de magasinset des implantations différents. Celapermet de prendre la température d’unréseau, c’est un préalable indispensa-ble », insiste Cécile Paskine. « Lecandidat doit démarcher lui-même lesfranchisés déjà en place, et pas uni-quement les contacts fournis par lefranchiseur », ajoute pour sa partChristophe Bellet. L’objectif ? Obte-nir une vision la plus objective possi-ble de l’enseigne retenue. ■

Source : FFF BPCE Banque populaire

20162004 2006 2008 2010 2012 2014

1 0371 228

1 4771 658

1 7961 900

2016

2017

2004 2006 2008 2010 2012 2014

43 68050 127

58 351

8 092

7 886

7 223

65 059 68 171 71 508

74 500

20162004 2006 2008 2010 2012 2014

7 083

2017 2 000

201757

Infographie

NOMBRE D'ENSEIGNES NOMBRE DE FRANCHISÉS

LES CINQ SECTEURS LES PLUS IMPORTANTS EN NOMBRE DE FRANCHISÉSQUI SONT LES FRANCHISÉS ?

CHIFFRE D'AFFAIRES GLOBAL, en milliards d’euros

La franchise en chiffres

0

500

1 000

1 500

2 000 1 900

835

0

20 000

40 000

60 000

80 000

36 773

30

35

40

45

50

55

60

41,73

4547,78 47,88

50,6851,45

55,1

Commerce alimentaire

Commerce hors alimentaireet hors textile

Services automobiles

Coiffure et esthétique

Équipement de la personneâge moyen à l'ouverture d'un premier magasin en franchise

57%43 %

Femmes Hommesétaient salariés avant de devenir franchisés

âge moyen des franchisés

36 ans

47 ans

74 % 14 950

LE FIGARO mercredi 7 mars 2018

A

7LA VIE DES ENTREPRISES

Simplifié et, surtout, structuré par une des ordonnances du 22 septembre 2017, le télétravail a été de nouveau modifié par la loi de ratification adoptée le 14 février. L’objectif est de favoriser cette modalité de travail, plébiscitée par la majorité des salariés et des entreprises qui y ont recours.

■ Il est recommandé de mettre en place le télétravail par accord collectif, même dans les PME et les TPE (où l’accord sera validé par un référendum interne). Son inclusion dans une définition globale de l’organisation du travail est déterminante. Elle devrait également englober le droit à la déconnexion, les astreintes, la charge de travail (et non plus seulement le temps de travail)… Seul un accord collectif permettra une telle réflexion associant partenaires sociaux, direction des ressources humaines, managers (qu’il faudra « éduquer » pour qu’ils sortent d’une culture de « présentéisme »), équipes informatiques, car l’accès à un « bureau virtuel » à distance pose bien entendu des problèmes de sécurité des données.

■ L’accord devra prévoir : ➔ les « postes éligibles » au télétravail, car tous ne le sont pas, les critères d’éligibilité des salariés (ancienneté minimale, autonomie, travail sur des données sensibles, distance domicile-travail…) ;- les conditions de passage au télétravail (nombre de jours par semaine) et de retour à un travail sans télétravail (« réversibilité ») ; ➔ les modalités d’acceptation de la mise en œuvre du télétravail (si un salarié demande à télétravailler, l’employeur doit motiver son refus), y compris pour du télétravail ponctuel (grève, intempéries, pollution, enfant malade, etc.) ; ➔ les plages horaires durant lesquelles le télétravailleur pourra être contacté, les modalités de contrôle du temps de travail et de la charge de travail du télétravailleur.

■ L’accord pourra aussi prévoir les éventuelles modalités de prise en charge des frais relatifs au télétravail au domicile du télétravailleur. À défaut de disposition, cette prise en charge est intégralement due. Chaque accord sera donc très différent d’une entreprise à l’autre, pour prendre en compte sa culture et ses impératifs d’organisation.

■ Enfin, à défaut d’accord collectif ou de charte, le télétravail pourra être prévu par le contrat de travail et même par simple échange d’e-mails. Mais il est préférable que cette dernière modalité ne soit utilisée que pour des cas précis et ponctuels.

Comment passer au télétravail

L’EX

PER

TISE

ÉTIENNE PUJOLAVOCAT ASSOCIÉ, STC PARTNERS

nécessaire et logique car le point crucial n’est pas la fabrication de ces câbles spé-ciaux mais la gestion de l’épissure et l’installation. Or, si on n’avance pas sur ce point, le marché se fera sans nous. »

Pourtant, le projet a failli capoter pourune raison que l’entreprise ne comprendpas bien elle-même. « Nous avions un accord avec la banque publique Bpifrance

pour un financement à hauteur d’environ 2,5 millions d’euros, raconte Hervé Blan-chard. Un jour, sans que je sache vrai-ment pourquoi, le conseil régional Occita-nie m’a averti qu’il prenait la main sur unepartie du financement prévu par Bpifran-ce mais sur une base revue à la baisse. » Le projet est donc dégradé de plusieurs centaines de milliers d’euros.

Outre le manque à gagner, l’entre-preneur affirme que la manœuvre ad-ministrative a retardé l’attribution de financements pour lesquels la société a perçu les premiers euros fin janvier alors que leur attribution avait été confirmée en… août 2016 ! Un délai in-compréhensible pour l’entreprise qui avait, sur foi des courriers reçus, engagé 700 000 euros, persuadée que l’argent public allait rapidement être versé.

«Je ne crache pas dans la soupe, ditencore Hervé Blanchard. Nous sommes reconnaissants de ces aides. Cependant, si l’entreprise a tenu le choc dans l’inter-valle, c’est parce qu’un actionnaire mino-ritaire a fait un apport en compte cou-rant. » Cet actionnaire, c’est Éric Carreel, ingénieur et cofondateur de plusieurs entreprises de technologie : Inventel (concepteur de la LiveBox d’Orange), de Withings (montres connectées), Sculpteo (impression 3D). « Sans lui, en raison des délais, le projet aurait avorté, et la santé financière de la société aurait été compromise », précise Hervé Blanchard. Malgré ces aléas, le banc d’essai sera installé dans les temps et pourra être inauguré en avril. ■

Hervé Blanchard, président de Mécamont Hydro. G. MOLLARET / LE FIGARO

Mécamont Hydro en cordée avec ArcelorMittal Sous-traitante du géant de l’acier, l’entreprise s’est lancée dans un important investissement avec son aide. Mais son financement n’a pas été de tout repos.

GUILLAUME MOLLARET £ @NewsdusudENVOYÉ SPÉCIAL À LANNEMEZAN (HAUTES-PYRÉNÉES)

LA PME DU MOIS C’est un métier de ni-che, une industrie de pointe qui ne portepas son nom. De l’extérieur, rien ne laisse deviner la haute technicité néces-saire pour poser les câbles d’une remon-tée mécanique. Et pourtant ! L’une des phases techniques les plus cruciales consiste à réaliser une épissure. Autre-ment dit, à entrelacer manuellement les extrémités d’un câble. « C’est une opé-ration très technique qui ne s’apprend pas à l’école. Peu de sociétés dans le monde font le même métier que nous », explique le président de Mécamont Hydro, Hervé Blanchard.

Implantée à Lannemezan (Hautes-Pyrénées) sur un site de Rio Tinto fermé en 2015, sa PME est l’installateur exclusifdes câbles de remontées mécaniques pour le compte d’ArcelorMittal, dont l’usine se trouve à Bourg-en-Bresse, au pied des Alpes. À Rio de Janeiro, à Pyeongchang (où viennent de s’achever les JO d’hiver), à Brest ou à Montmartre,partout où des câbles de transport Arce-lorMittal sont déroulés, ce sont les hom-mes de la PME pyrénéenne qui les ins-tallent.

Malgré sa rusticité apparente, ce mar-ché est en pleine mutation. Les fabri-cants tentent d’y ajouter des éléments pour allonger la durée de vie du câble mais aussi d’y introduire de la fibre op-tique. L’opération présente l’avantage de pouvoir connecter un territoire éloi-gné tout en épargnant à la montagne une longue et coûteuse saignée. Mais l’épissure est délicate lorsque le câble contient une fibre fragile qui menace de se briser lorsqu’il est déroulé.

Afin de s’entraîner à l’installation deces câbles innovants et d’évaluer au plus près leur durée de vie, Mécamont Hydroinvestit, à Lannemezan, 5 millions d’euros dans un banc d’essai « unique en son genre dans le monde », dixit Hervé Blanchard. Le banc d’essai sera installé dans un autre bâtiment de l’ancien site de Rio Tinto. Ce site, Hervé Blanchard le connaît bien. Il y a passé une bonne par-tie de sa carrière en tant que responsablede la production dans les années 1980. « En 1990, le groupe Pechiney, qui était propriétaire avant Rio Tinto, m’avait proposé la direction d’une usine en Sa-voie. Mais j’aimais bien les Pyrénées et j’ai eu l’opportunité de reprendre Méca-mont qui employait alors 4 salariés », se souvient l’entrepreneur, âgé de 68 ans. En vingt-huit ans, la PME, qui réalise 8 millions d’euros de chiffre d’affaires, est passée de 4 à 80 salariés.

Pour mener à bien son projet de bancd’essai, qui promet la création de 30 nouveaux postes, Hervé Blanchard a d’abord sollicité, en vain, un soutien de l’Europe. « Nous avons un papier qui at-teste de l’intérêt européen du projet car nous avons été retenus dans une liste de 17entreprises, explique le dirigeant. En re-vanche, on n’a pas touché un centime alors que les financements promettaient d’atteindre jusqu’à 70 % de l’investisse-ment. » Sans se démonter, l’entreprise a sollicité une école d’ingénieur toulou-saine, l’Icam, pour qu’elle l’aide à mon-ter un dossier de financement auprès du Fonds unique interministériel (FUI). Le pari est gagné cette fois pour ce projet nécessitant notamment le soutien d’un pôle de compétitivité.

ArcelorMittal, pour sa part, a décidéd’engager 525 000 euros dans le banc d’essai en cours de construction. « No-tre partenaire est très moteur et nous tire vers le haut, loue Frédéric Benoît, direc-teur technique d’ArcelorMittal à Bourg-en-Bresse. Investir à ses côtés est à la fois

“Nous sommes reconnaissants de ces aides. Cependant, si l’entreprise a tenu le choc dans l’intervalle, c’est parce qu’un actionnaire minoritaire a fait un apport en compte courant.”HERVÉ BLANCHARD, MÉCAMONT HYDRO

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