d’ici et d’ailleurs - histoire vivanted’ici et d’ailleurs des chemins, il y en a plein né...
TRANSCRIPT
Luc Monastesse
D’ici et d’ailleursDes chemins, il y en a plein
Né en Abitibi en 1938, Luc Monastesse a étudié notamment en pédagogie,en psychologie et en relations humaines. Il a été, pendant une décennie,enseignant et animateur pour des classes de niveau secondaire, codi-recteur d’un centre de formation et d'apprentissage des beaux-arts au Cen-tre d’art de Saint-Lambert. Cette expérience lui a fait vivre l'éveil desjeunes en création artistique dans les domaines de la danse, de la musique,de la sculpture, de la peinture, etc. Il rencontre à l’occasion ses anciensélèves qui, aujourd’hui, poursuivent leur carrière dans l’enseignement etretransmettent à leur tour leurs découvertes et leur créativité pendantque d’autres ont choisi de faire carrière en musique et en sculpture. L’au-teur a également été, pendant huit ans, psychothérapeute auprès degroupes mixtes d’adultes en cheminement personnel.
L'art, une création de l'homme, une production dequelque chose de nouveau, ou du moins qui innoveà plusieurs points de vue. Dans ce milieu d’effer-vescence artistique, je ne pouvais qu’approfondirma sensibilité, consciemment ou inconsciemment,aux choses du senti, de « l’art poétique ». Il ne futréalisé que plus tard, en 1995 avec quelques écrits.J’en ai fait, avec le temps, un recueil, celui-ci.
Luc Monastesse
D’ici et d’ailleurs
Une œuvre de Luc Monastesse Éditeur : Roger Desautels – Les Éditions Histoire VivanteRévision linguistique : Robert PoirierConception graphique : Kathia BoissonnaultImpression : Sisca International
Les textes contenus dans cet ouvrage peuvent être reproduits à condition d’en demander lapermission à l’auteur. Les illustrations contenues dans ce livre ont été puisées dans diversesbanques publiques d’images et sont libres de droits.
Pour joindre l’auteur :Courriel : [email protected]éléphone : 450 669-3442
Les Éditions Histoire Vivante363, rue du Clos Tourmalin, bureau 302Prévost (Québec) J0R 1T0www.histoirevivante.ca514 994-7600
Dépôt légalISBN : 978-2-9805776-3-5
Luc Monastesse
D’ici et d’ailleursDes chemins, il y en a plein
Les Éditions Histoire VivanteLes Éditions Histoire Vivante
Avant-propos
Se reconnaître dans un texte, un passage et le faire sien C’est se faire un cadeau, c’est respirer amplement.
J’aimerais bien partager ce bonheur avec vous.
Souvent des mots reviennent en douceurOn y reconnaît les sons, la voixOn y reconnaît un calme profond Réconciliation intime et silencieuse.
Je vous invite à faire des trouvaillesSur les chemins qui vous sont offerts Souvent une porte d’entrée, un aperçuÀ l’occasion, une voie de guérison.
Quand quelqu’un me dit qu’il a été touché par les mots de mes poèmes,je me sens réconcilié avec mon essence, j’allais dire mon essentiel.
Du fond de mon cœur, je rejoins aussi mon âmeSi je réveille d’autres cœurs ce n’est pas une fin, un objectif,
mais un accomplissement.
Pourquoi écrire à mon âge, si ce n’est pour vous « dire » mon cœurC’est tout ce qui me reste.
Luc Monastesse
3
J’habitais ici
À demeurer ainsi entouréJe sentis mes contours et devinais mes alentoursJ’habitais l’autre et trouverai bien mon cheminJe devrai rebâtir ma nouvelle maison Ayant perdu un territoire bien gardéJe devrai trouver le mien dans un espace partagéPlus qu’un espace, une identitéChoisir mon nid, trouver de nouveaux contours
Je saurai à quoi je sympathiseEt dirai, j’habite ici en ma demeureOn pourra m’ébranler, me taquiner,je serai le mêmeOn viendra m’accoler des images,des idéesJe serai, au fond de moi, le mêmeConnaîtrai mes droits et territoires
Dans un ailleurs
5
Ma maison
Je devrais m’en réjouir, j’en ai deux dont l’une est à l’intérieur de l’autreCelle qui se montre en premier, la régnante, la bien-pensante
Celle du raisonnable, du connaissable en toutCelle de l’indispensable, de l’incontournable
L’autre, la moins visibleL’enclave secrète pour les retraitsLes peines comme les trésorsCelle du cœur et des émotions
Faut pas faire de mystères, c’est bien la demeure de mon âmeJe l’ai bien cachée, bien sûr, c’est mon refuge
Je l’ai meublée, entretenue à l’ombre
Le logeur que je suis parle rarement de l’une à l’autre La première ignore souvent la deuxième
Qui veut aller dans cette maison? on la connaît si peuPersonne ne semble intéressé à un tel ombrage
En attendant, je laisse planer des images sur elle, hantée de mystèresEn attendant il y a souffrances, mal à l’âme et turbulencesEn attendant je suis mesuré, compté, comparé, affronté
Je dois louvoyer, calculer, dénier et me cacherÊtre malade, être un autre, malade de moi
6
Une place
J’ai une place, ma place et je m’identifie à cet endroitJe créerai mon espace. Je passerai ma vie à en conquérir une autre
Je voyagerai. Je prendrai ici et là ma placeJ’occuperai, défendrai mon territoire, mon espace
Je lui donnerai une âmeOn lisait, il n’y a pas longtemps, sur une pancarte À l’entrée d’un village : ici, il y a 3252 âmes.
Je serai reconnu un homme, une femme de la mer, de la montagne De la forêt, de telle ou telle ville
On confirmera mon identité, j’aurai donné ma vraie imageOn me nommera, on m’aimera, je nommerai mes alentours
Je vivrai comme ça, tout le long de ma vie, d’une place à une autre à gag-ner mon espace
Je serai toujours en mouvement, je serai impermanent, et j’irai toujoursdans un ailleurs
Et serai toujours autrement en train de me rapprocher d’une autre viePour l’instant, ça va, ici maintenant. C’est le meilleur moment
Quoique ailleurs, c’est autrement. Je ferai de ces mots un autre espoirCe sera sans doute mon dernier poème, ici dans cet espace
Ailleurs
D’ici et d’ailleursLoin...Très loin, si loin
D’ICI
ET D’AILLEURS
7
Si près de mon nid
Quelle tendresse à peine effleuréeUne communion, un ressenti?
Un jeune cœur à l’écoute de son cœur d’origineIl lui a été donné de sentir sa mère blesséePar un fragile baiser, une odeur d’éternité
Comment pourrait-il oublier cette première caresseDéjà il est initié au sentiment amoureuxPour la vie il est connecté en son centre
8
Sous le parapluie
À me rassembler... J’ai le goût du rassemblement
J’ai trouvé un parapluie, mon compliceEt j’ai fait alliance avec lui
Sous cette ombrelle, par une chaude pluie d’étéAinsi à l’abri, la pluie devient amicale
Je me laisse, par elle, atteindre profondément
Le parapluie me fait ainsi un toit heureux
Moments d’intimité, moments de rassemblementQui me rendent capable d’incorporer
Un paysage tout entierJe me sens plus grand que l’espace où je suis
9
Cette pluie, je la laisse me pénétrerJ’ai la sensation d’avoir en dedans de moi
Un ciel, un horizon, des arbres et une belle averse
J’ai rétabli des liens intimes avec les chosesEt les choses sont entrées en moiJe suis devenu solidaire de ce qui
D’abord m’entoure
Je suis contenu dans un univers Que je contiens à mon tour
Ces affleurements dans l’air fraisCes murmures de ruisseaux naissants
Autant de sonorités qui n’en sont presque pas
Ma fragilité provoque en moi Le désir de les faire exister
Quand cela se vit avec les autresJe l’appelle tendresse
10
Quand cela se vit avec les chosesJe l’appelle poésie
Au milieu de cette pluieJe me déplace dans une bulle invisibleUne sorte de sphère dont j’ai apprisÀ connaître aussi le rayonnement
Pénétrant et pénétrableCommunicant et communicable
Dans ces aires de libertéJ’ai gagné à échanger de ma personne
À trouver le ton justeÀ projeter la voix de mon coeur
Il m’est venu aussi à savoir quoiJ’aimerais bien partager
Je devine aussi d’autres voix quiSeraient prêtes à un libre échange
Que je sens dans le mêmeEncerclement heureux
11
J’ai le goût de communier de ces rencontresDe ces forces vives et conscientes
Peut-être sous un autre grand parapluie
J’ai le goût de favoriser le dépôt de chaque bulleComme la goutte de pluie
Comme la note de cette musiqueElle viendra tomber dans un espaceQui lui sera réservé en son tempsSans précipitation sur la portée
J’ai idée de rassemblement de ces notesDe ces voix... prêtes à chanter
12
Enfants
Nous étions comme deux enfants Qui avaient chacun sa maison
L’ignorant pour quelques instantsNous étions tout contents de nous retrouver
Sans nous connaître, attirés dans un parc pour jouerTout à nous-mêmes capable de nous rejoindre
Car sans intentions, sans préjugésDans la simplicité, la candeur du jeu, des gestesSans amertume pour un temps, des enfants
Tout à la naissance, et pour chacun, une pré-conscienceÀ deux pas de son nid
13
Ma rivière
Lorsque, soudain, au gré des courantsJe me laisse emporter par une ouvertureC’est une rivière, m’appelant à plus de vie
Elle me reçoit tout enveloppanteMe laissant aussi tout à moi
Beaucoup d’espacePrendre mon erre, mon êtreJe me sens prêt à réapparaîtreÀ redonner de ma vigueur
Fort de cette paix intérieureJe vibre à ma vie avec le mouvementCe n’est plus tellement moi qui agisComme ce courant d’énergieDans lequel je baigne tout entier
14
Retour à la source
Me voici en attenteDans cette belle étendue d’eau
Petit lac ou grand bassinPlein de moi, plein d’amourJe retourne et me retourneDans ce clair-obscur
Calme et me rassemblantPrêt à partir, cherchant l’ouverture
Cajolant mes rives
Mes rives, par le fond, meGuérissant de vieilles blessures
Comme ces bras aimants qui m’entourent
En mon lac, je me recueilleJ’ai grand besoin de son intimitéJe sens se renouveler mes eauxEt se grossir de nouvelles sources
15
Vent de l’amour
Un beau milieu des champs de blé en vallonOù les rayons du soleil arrivent de plombPar cette heure du midi
Un seul refuge s’offre à moiPour me mettre à l’abriPas d’arbre, pas de forêt
Une maison toute vieilleAbandonnée
Assis, là, au beau milieu d’une pièceEn cette maison accueillanteEspère de tout mon être l’arrivéeDe cette brise caressanteJ’attends
Pour tout signe de vie, l’attente du ventJe ne sais quand, de quel côté il viendraJe ne peux décider de rien, tout semble éteint
Mais au fond de moi, j’ouvre mon cœurÀ tout ce que j’ai d’accueillantRepousse les intentions et fais espace
Aussi, je me fais tout attentif au moindre souffleJe fais place et anticipe déjà le rafraîchissementJ’attends
16
Le voile dans la fenêtre est tout droit vêtuRien ne bouge, aucun mouvement apparentDes deux côtés de la pièce, la maison a l’œilouvert
Dehors, sous le soleil ardentDes gerbes de blé attendent aussiDe plier sous le vent
De loin, une force s’organiseDes vagues successives se lèventEn ondulations dorées
Enfin! un léger mouvementBerce le voile de la fenêtreDe quel souffle es-tu?
L’ondulation s’étendElle vient me rejoindre en ma demeureEnfin la brise
Je suis touché et accepte la fraîche caresse Sur mon visage, sur tout mon être
Elle s’amplifie, respire sa force, sa profondeurPlus rien ne la retientElle devient le vent
Plein d’amourPlein d’ardeur à voyager
17
Une autre existence
Il est arrivé si jeune ce sentiment de bien-êtreD’un seul instant, dans la douceur de la nature
Ce sentiment d’une autre existence...Saisissant un lien... il ne vous quittera plusQuelqu’un d’autre dira un ange gardien
Ce sentiment restera gravé, vos jours durantPour le musicien c’est une note, un airPour un écrivain c’est un mot, une idée
Très jeune, ce cadeau est révélé
Il ne se raisonne pasIl ne s’apprend pas.Vous n’avez qu’à le bercer
Vous sentirez cette présence quiVous porte à son tour
18
Vibrations
Tout me suggère, l’espace, le voyage, la contréeDepuis quand, pour combien de temps, l’implacable durée...
Petits mondes, grands mondes... holà... oyez!?Tout m’appelle au mouvement, aux vibrations
La corde qui répond à sa voisine que le musicien a touchéeParfois je suis sur la même longueur d’onde
De si divers mondes
J’apprends d’abord par le sonMême à des distances sans nom
Je serais ion pour un très lointain voisin?
Mon ancêtre, son premier cri, premier souffle origine d’un sonD’autres fois, je peux vibrer aux sentiments les moins évidents
Humeurs, chagrins, paroles, menteries, hypocrisiesParfois, je pleure aux seules réminiscences de quelques états d’âme
Quel raffinement pour des émotionsAussi bien que pour le violon
Vous entendez?
19
Mon esprit
Mes idées viennent de mon espritSouvent c’est mon cœur dans une
enclavePar l’esprit je voyage dans les cœurs
Ils se connaissent bienParfois, plus à gauche qu’à droiteIls se rejoignent dans la tendresse
« L'amour sans éternité s'appelle angoisse :l'éternité sans amour s'appelle enfer »
Gustave Thibon
20
Ma voix
En raison de problèmes de santé je ne m’entends presque plusJe perds l’oreille et la voix. Je ne peux émettre ce que je n’entends plus
Ma voix, elle me quitte et recherche son échoÀ l’occasion, je lui trouve une enceinte
Pleine de lumière et de silenceEt ne vois que du beau, ou de son esprit
Voix parlée Voix chantée
Toute belle, la poésie devrait être entendueTout beau, le poème, encore mieux, serait chantéLà, au fond du corps s’amorcent les vibrationsC’est la voix de la vérité, de l’âme. La plus intime
21
Mon chef d’orchestre
Dans la tourmente ou en terrain hostile, mon cœur sera emportéOu en vagues de souffrances, ou en agression mentale, identités plaquées
Ou en direct, confondu, apeuré, perdant le sud... le nordMais je reste et dois rester en contact avec mon âme
Premier confident. Mon chef d’orchestre
Joie et paix incommensurable au fond de moiJe serai si fier de le retrouver, lui, qui sait la note
Oui! toujours fidèle, mon chef d’orchestre, demeuré le mêmeLui, toujours près de mon cœur, sait conduire l’ensemble
Une symphonie, une berceuse, un tango, qu’il sait harmoniser
Toutes ces vibrations, parfois discordantes en moiOuvrez votre cœur, vous trouverez ce compagnon en chef...
Toujours à l’écoute, parfois enfoui au tréfonds
22
Paroles reçuesÀ l’occasion je reçois des paroles d’amour, de pardon
Des paroles qui ressemblent à l’air que je respire, à l’eau que je bois On ne les cherche pas, elles nous sont données
Entre-tempsJe voudrais les engranger comme du bon blé mais la sagesse dirait d’en
faire des cadeauxOu de les semer. Ainsi elles fleuriront dans un autre lieu un autre temps
Ce sont souvent des paroles de réveils
Entre-tempsÀ l’opposé de celui qui ne parle et ne fait que pour son compteElles ne prétendent à aucune autorité sur une autre personne
Elles parlent souvent pour transmettre, témoigner d’une présenceD’une présence commune à tous, du plaisir qu’il y a à être avec un semblable
Entre-tempsJe leur ferai une enclave ou un endroit pour bien repousser
En s’adressant au cœur des hommes et des femmesElles s’adressent au cœur du logis...
Vous me rejoignez dans mon énergie première au centre de moiDans ce lien, en tout être je me reconnais
L’univers entier est ma maison
23
Les pieds bien en terre
Une forêt de grands arbresSapins, bouleaux, érablesPrésences d’une vie en terre
Tout unis de leurs racines à l’eauTout déployés de leurs feuilles à la lumière
Quelle assurance, quelle force ils m’inspirentCes grands traits d’unionCes grands hommes deboutEntre ciel et terre, plein de sèvePrêt à tant de souplesse et de grâce
J’avance à pas feutrés
En chêne ou en frêne je sens toute la vieQui passe en toi... grand solitaireJe t’ai vu, plié, résister à ces assautsÀ transformer la terre, tu t’embellisÀ résister à tout ce vent, tu t’affirmes
24
Mais sais-tu mon grand...Toute la paix, la richesse que tu suggères
Tel ce souffle dans ces longs corridorsOn se croirait dans une cathédraleOn les croirait tous liés par le même
Recueillement... ces grandsTel cet autre, tout en rameauxQui donne l’envie de s’y réfugierTellement il respire sérénité et repos
Quelle intimité que cette vie d’homme et de chosesnourri que je suis par ces infimes particulesd’air... de... rien, d’entrailles et de bien-aimés
Ici je prends racineIci je me sens reconnu et appuyé
Je bois à la même nature souterraineC’est sans doute là que je me tiens
Par la main à mon voisinJe participe de la même création
Le soleil réussi et quelques flèches de lumièresMais quelle fraîcheur, quelle légèreté
Dans ce pays de géants
Ma conscience se glisse dans ce lit de fagotsJe suis bien en terre
25
Présence de l’esprit
La langue de l’esprit c’est le silenceIl peut être assourdissant mais on y reconnaît une présence
On ne discute pas avec cette voix, on l’absorbe
Elle peut aussi passer, là, au milieu de vous comme la langue de feuQuelques-uns seront touchés
C’est pour ça que la conscience est la voix de l’âmeRésidente de cet ailleurs
Et que l’on peut ne pas l’entendreUn jour, un temps, la grâce vous rejoindra
Et vous serez l’hôte de cette bienheureuse présence.
26
Le bonheur
Qu’est-ce qui m’a touché aujourd’hui?Qui me paraissait être sensible à lui-même?Qui me semblait près de lui et s’exprimait?Quel était le bon côté de la mauvaise affaire?
Cette image m’est venueQue le bonheur est dans mon regardEt c’est à recommencer tous les jours
Et c’est quand le ciel va vous tomber dessus Que vous avez les deux pieds dans...
Et alors mon souvenir de ce cher compagnon du bonheurMe fait grâce de ne plus me quitter
J’en fais mon gardien et lui prends la main
J'ai compris que c'est dans ces moments Que souvent on lui ferme la porte alors que
Tout au contraire, on devrait la lui ouvrir bien grande
Il est facile d'être heureux quand tout va bien...C'est quand ça culbute
Que ça prend un peu de talent...
27
Doux secret
Comment n’ai-je pas trouvé plus tôtLe secret de mon âme?
Vibrer à la vie, me voir agir, me voir en vie
Qui pouvait me donner ce pouvoir de meSentir un peu plus, de dépasser la réalité?
Ma réalité toute nueJe crois avoir senti la simplicité de monÊtre transcendantal, le pouvoir de me voir
Penser, de me voir vibrer de toutes mes cordes
Ce recul qui m’est donné en vivant àFond et en plénitude un personnage de théâtre... par exemple...
Une réussite d’un projet de travailUne communication authentique
Une envolée de plaisirsL’ivresse du chanteurL’ivresse du bon vin
28
Un cahier pour ma fille
Un bel espace pour que tu te racontes, qui deviendra un miroir de ta vie Ton meilleur confident
Tu es jeune et grande, agile et forteC’est ce que je vois en premier par les fenêtres de ta maison
L’intérieur semble prometteur, tu nous laisses voir un peu de toiVibrante comme la corde d’un violon, simple et entière
Ta demeure la connais-tu?
Tu y trouveras des trésors de lumière et aussi des coins d’ombreCeux qui font mal
Ceux qui portent à réfléchirCeux qui nous font faire des arrêts
Ces côtés cachés, sensibles, irrationnels
Toute une vie pour parler de ses refuges Toute une vie pour mettre en lumière des sources de créativité intime
Tu n’en connaîtras que mieux les autresTu trouveras alors une action juste et le geste créateur
Tu seras alors libre de faire connaître ton âmeTu sauras de quoi elle est faite, tu l’auras écoutée en silence et en profondeur
C’est de là que pour toi et de toi, tu fais ta vieC’est de là que tu seras en vérité, ta personne
Connais-tu ta demeure?
Voici un grand cahier pour te décrire29
J’ai tant cherché
J’ai lu tant de livresJ’ai tant écouté de fous et de sotsPar moments j’en suis épuisé
J’ai traversé tant de contrées désertesOn y parlait fric, sexe, productionOn n’y parlait jamais tendresse
Je cherche tout simplementÀ me reposer dans ce grand jardin
Qu’est la terre, ma maison
J’ai simplement envie de vivreEt comme ce renard, d’être apprivoisé
Par moments je me sens les mainsSi vides de ne pouvoir
Partager ce cœur en dormancePour celui qui saura venir le réveiller
30
À mon frère
Comme la brise qui entre et nous caresse à sa guiseSans intention ni projet sur vous
L’amour entre les hommes se propage en secretÉtant fait de ce même mouvement discret
À ceux qui ont l’art d’écouter ces élans de rapprochementL’entrée en communication est douce et chaleureuseIls poursuivent leur initiation aux gestes amoureuxÉchangent des promesses en forme de caresses
Ce qui nous sépare est dans ma têteCe qui me rapproche est près de mon cœur
A demeuré dans mon cœurLa fine touche de ses émotions
A poursuivi son petit cheminSon amour pour la chose artistique
Dans le cœur et dans l’universCommuniquent les âmes sans mots ditsPour l’éternité se transmet le sens de la vie
C’est tout ce qui reste?Quelle belle vérité!
Louis-Marc, mon frère, est décédé àl’âge de 32 ans (moi j’en avais quinze)d’une fracture au cerveau à la suited’une chute survenue pendant unecrise d’épilepsie.
31
Luc Monastesse
D’ici et d’ailleursDes chemins, il y en a plein
Né en Abitibi en 1938, Luc Monastesse a étudié notamment en pédagogie,en psychologie et en relations humaines. Il a été, pendant une décennie,enseignant et animateur pour des classes de niveau secondaire, codi-recteur d’un centre de formation et d'apprentissage des beaux-arts au Cen-tre d’art de Saint-Lambert. Cette expérience lui a fait vivre l'éveil desjeunes en création artistique dans les domaines de la danse, de la musique,de la sculpture, de la peinture, etc. Il rencontre à l’occasion ses anciensélèves qui, aujourd’hui, poursuivent leur carrière dans l’enseignement etretransmettent à leur tour leurs découvertes et leur créativité pendantque d’autres ont choisi de faire carrière en musique et en sculpture. L’au-teur a également été, pendant huit ans, psychothérapeute auprès degroupes mixtes d’adultes en cheminement personnel.
L'art, une création de l'homme, une production dequelque chose de nouveau, ou du moins qui innoveà plusieurs points de vue. Dans ce milieu d’effer-vescence artistique, je ne pouvais qu’approfondirma sensibilité, consciemment ou inconsciemment,aux choses du senti, de « l’art poétique ». Il ne futréalisé que plus tard, en 1995 avec quelques écrits.J’en ai fait, avec le temps, un recueil, celui-ci.
Luc Monastesse