diableries et sorcellerie en savoie

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Page 1: Diableries et sorcellerie en Savoie
Page 2: Diableries et sorcellerie en Savoie

Michèle BROCARD-PLAUT

DIABLERIES e t

SORCELLERIE e n

SAVOIE

Editions HORVATH

Page 3: Diableries et sorcellerie en Savoie

Jeune sorcière avec son chapel de roses gambadant avec un bouc. (Cathédrale Saint-Etienne d'Auxerre)

Responsable de la publication Danièle R O B E R T © Editions Horvath

27, bd Ch. De Gaulle 42120 Le Côteau

I.S.B.N. 2.7171-0418-6

Page 4: Diableries et sorcellerie en Savoie

INTRODUCTION

« Ce n'est pas d'aujourd'hui, ni de la rouerie de quelque visionnaire que l'on tient qu'il y a des sorciers. Ils ont été découverts devant la venue du Messie, leur secte est antique et leur crime n'est pas nouveau. »

23 juillet 1682

La nuit tombe en juillet 1985, de brume fragmentaire les vapeurs se sont faites plus denses et le brouillard recouvre peu à peu toute la vallée. Un brouillard à vous tordre l'âme d'angoisse.

Deux maisons sur un replat, pas même un de ces hameaux dont la rue centrale semble un sombre couloir, au-dessus de cette bourgade savoyarde proche des stations de ski les plus réputées.

«Et ton voisin le sorcier ?

— On s'en accommode » me répond-on dans la bove restaurée depuis une trentaine d'années par des estivants. Leurs murs sont mitoyens de ceux d'une famille de sorciers réputée de père en fils depuis la nuit des temps, une des trois familles du pays qui possède encore le PETIT ALBERT, selon le commun bruit.

Nous redescendons doucement, en bavardant.

La sorcellerie ? personne n'en fait plus, cependant... une telle charme le feu, celle-ci a été arrêtée sur place par une force inconnue, les vaches de mon père se sont retrouvées attachées à deux dans la même chaîne, on avait du mal à les en dépétrer. Et la fromagerie X, depuis qu'ils ont la visite de Y, il y a trois ans, leur fromage, ce n'est pas tout à fait çà, ils ont sans arrêt des problèmes et sont bien ennuyés. Les reblochons de Madame untel gonflent comme des soufflés, elle les dégonfle avec son pique-feu chauffé au rouge. La sorcière ne peut pas mieux frapper dans ce pays producteur de lait et de produits fromagers. C'est d'ailleurs une voisine.

Je me retrouve plongée peu à peu dans le type même de récits qui se dérou- lent au long des interrogatoires des déposants ou témoins des procès de sorcellerie anciens que je viens de dépouiller pendant de longs mois.

On raconte, calmement, posément, et si les maléfices paraissent plus bénins, car tout s'affadit, ce sont les mêmes. On n'y croit pas vraiment, mais on ne s'explique pas, alors pourquoi pas ?

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Cette région aux habitants positifs, efficaces, n'échappe pas à un petit côté irrationnel. Quant aux temps anciens, la sorcellerie s'y portait bien, merci. Savoie et Haute-Savoie eurent leur épidémie de chasse aux sorcières, et c'est dans les Alpes-Occidentales qu'apparurent les premiers sabbats.

La sorcellerie est à la mode, qu'elle soit tour du diable ou indicateur de crise. Quel village n'avait pas, il y a une génération, son curé faiseur de physique ?On fait encore " bouillir les clous ", aussi bien pour le bon que pour le mauvais sort.

Et si la sorcellerie à l'ancienne mode se fait discrète, il suffit de jeter un regard sur les journaux illustrés et leurs publicités hétéroclites pour constater que le paranormal et les sciences occultes, non seulement ne sont pas morts, mais connaissent un regain d'intérêt. A pleines pages on vous propose de retrouver l 'amour perdu, ou de gagner à ces jeux qui coûtent peu mais peuvent "rapporter gros ", en cette période de crise économique.

Reculons dans le temps et laissons dérouler les images, aussi haut que l'on puisse remonter. Nous verrons souffrir des gens et des bêtes, les victimes, mais aussi les accusés, au long d'interminables procès entrecoupés de ques- tion ou torture, qui finissaient fort brutalement, souvent par le feu.

Au-delà de la curiosité, n'oublions pas qu'il s'agit d'histoires vécues dont bien des gens pâtirent, parfois jusqu'à en mourir.

Traité d'Ulric Moletor pour le prince Sigesmond, archiduc d'Autriche, fin X V siècle.

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C L I N D ' ΠI L D E L ' A U - D E L A

Où rencontrer le diable ?

P o u r qui souha i t e r e n c o n t r e r le diable, la nui t s ' impose .

Les lacs, les é tangs , les sources , f on t a ines sises dans des endro i t s écar tés

l ' a t t i rent , peu t - ê t r e en t an t que n e m e t o n , ces l ieux consac rés na tu re l s r e m o n -

tan t à la plus vieille re l igion du pays, mais aussi les c ime t i è re s où l 'on vient de p répa re r u n e fosse nouvel le , le pied d ' u n e p o t e n c e ou le faîte d ' u n e

m o n t a g n e . Il est possible de chois i r un c h a m p à trois angles , le ca r r e fou r de

trois c h e m i n s , q u o i q u e depu i s fort l o n g t e m p s des croix a ient é té p l an tées d a n s ces c r o i s e m e n t s à trois voies, d o n t les plus a n c i e n n e s c o n s e r v é e s en

Savoie son t go th iques . U n e chape l le e n ru ines o ù l 'on ne cé lèbre plus la messe et d o n t l 'autel n ' a plus sa pierre consac rée c o n v i e n t é g a l e m e n t .

Se m u n i r d ' u n e poule o u d 'un cha t no i r s sont parmi les me i l l eu r s m o y e n s de rassure r le d iab le sur ses i n t en t i ons et de le faire venir , car l o r sque le

Males t ioc paraît , il faut a b s o l u m e n t lui d o n n e r q u e l q u e chose .

S'il en t re chez vous , j e tez- lu i le balai de la ma i son , et la M a l a b ê t i e par t i ra avec ce cadeau .

En 1645 à Sain t -Jor ioz , le t é m o i n H e u s t a c e A m b l e t r en t r an t de nui t chez

lui a f f i rme avoir r e n c o n t r é le d iable en p e r s o n n e qui lui dit « j e te veux

prendre» . Il aura b e a u r ép l ique r « Non f e r a s à l ' a ide de Dieu et nonobs t an t tous

mes ennemis», le d iable le sui t j u s q u e près de sa d e m e u r e où il pa rv ien t t o u t « ensorcelé et hors d 'espri t à ne pouvoi r reconnaî t re sa ma i son» .

Au X X siècle, en Hau te -Savo ie , ce r ta ins vi l lageois r éun i s à la vei l lée p o u r

g rema i l l e r les noix savent e n c o r e fort b ien le faire appara î t re .

A u mi l i eu du siècle dern ier , ce r ta ins curés posses seu r s du Pet i t A lbe r t

é t a i en t censés faire para î t re le Males t ioc à vo lon té , ainsi q u e t o u t e s sor tes de vis ions aux yeux de leurs ouai l les é p o u v a n t é e s .

Les lieux voués au diable

A u x All inges, lo r sque l 'on est assis su r la pierre à Passet, on aperço i t vers l 'est sept pe t i tes m o n t a g n e s en cha îne , qui son t appe lées dans la rég ion les sept cacas du diable, Passet n ' é t a n t au t re q u e l 'un de ses n o m b r e u x n o m s . C l a u d e Seignol le ind ique que l 'on disait à u n e n f a n t t u r b u l e n t « reste t ran- quille petit Passe t» .

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A M o û t i e r s le m o n t Ga rgan , m o n t Sa in t -Miche l ou m o n t des Corde l ie rs , est c o u r o n n é par un é n o r m e roche r c revassé n o m m é le roc du Diable.

En M a u r i e n n e les aiguil les d 'Arves - les Trois Hu i l ions - son t un lieu

l égenda i re : leurs f lancs c o n t i e n n e n t des f i lons d ' o r qui fu ren t explo i tés au

X I X siècle pa r les m o n t a g n a r d s . Mais ces o rpa i l l eurs n ' é t a i en t pas é g a l e m e n t favorisés : seuls ceux qui é t a i en t en rappor t avec le diable, ou l 'un de ses

acolytes , ava ien t le privi lège d ' ape rcevo i r u n e f u m é e légère qui s ' échappa i t

des g i s e m e n t s r iches en p o u d r e aur i fère qui leur ind iquai t aussi le j o u r et l ' h e u r e favorables à leurs r echerches . T o u t e f o i s ces privilégiés passa ient aux

yeux des espr i ts forts de la région p o u r des c rédu les à l ' in te l l igence l imitée, et, p o u r pe ind re la s impl ic i té d ' u n indiv idu, on finit par dire qu' i l avait vu la f u m é e des Tro i s Hui l ions .

D a n s la val lée de Bozel , le d iab le t i en t u n e place i m p o r t a n t e dans cer ta ins récits qui se t r a n s m e t t a i e n t à la vei l lée : il é ta i t t an tô t vu sous les traits d ' u n

M o n s i e u r t rop beau , mais t rahi pa r ses p ieds de b œ u f , t an tô t sous l 'aspect d ' u n an imal cornu , bé l i e r ou bouc. Et il exis te au n o r d des prair ies du Sollège,

près du ru i sseau de ce nom, une gro t te à s ta lact i tes appe lée la g ro t te de la Sorcière , sorc iè re aux incan ta t i ons f abu leuses .

E n c o r e en 1875 o n r épugna i t à hab i t e r le châ t eau de Mares t , en H a u t e -

Savoie, gros b â t i m e n t gr isâ t re accolé d ' u n e t o u r carrée, car c ' es t là q u e t o u t e s

les sorc iè res du pays é ta ien t c e n s é e s ten i r le sabbat , Be l zébu th en p e r s o n n e v e n a n t p rés ide r leur a s semblée .

A Faverges on m o n t r a i t en 1885, au mi l i eu d ' u n pré ve rdoyan t , d e u x espaces c i rcula i res o ù a u c u n e h e r b e ne poussa i t j amais , d o n t la t r ad i t ion

popu la i re aff i rmai t q u e là se t e n a i e n t les r o n d e s infernales .

La b r ê c h e de la façade de la t o u r de Sal teur , à Barberaz , m a i s o n for te d a t a n t des X I V siècles, p e r s o n n e ne parv in t à la b o u c h e r car le d iab le

en leva i t c h a q u e nui t les p ier res q u e l 'on y avait placées.

Si n o u s d é b o r d o n s l é g è r e m e n t le cadre savoyard, en D a u p h i n é , le secret de la l i q u e u r de C h a r t r e u s e fut bel et b i en a r raché au diable : d a n s les gorges d u

F u r o n se t r o u v a i e n t des cave rnes p rofondes , difficiles d ' accès par h a u t e s eaux

car le d iable souha i t a i t e m p ê c h e r les cu r i eux d ' a c c é d e r au lieu où il dist i l lai t

ses l iqueurs , j u s q u ' à ce q u ' u n R é v é r e n d père C h a r t r e u x s'y r i sque et d é c o u v r e

le secre t de la l i queu r de la G r a n d e - C h a r t r e u s e . . .

U n e au t r e l égende r e m o n t e aux re l igions ce l t iques . A Gil ly-sur-Isère , o ù

l 'on d é c o u v r e depu i s u n e c e n t a i n e d ' a n n é e s de n o m b r e u x vest iges gallo- roma ins , existai t u n c h ê n e r appe lan t les cu l tes d ru id iques . A u t o u r de son

t ronc se t r o u v a i e n t p lus ieurs blocs de grani t f o r m a n t c romlech . Pou r faire

é b r a n c h e r ce chêne , il fallait e m p l o y e r u n é t r ange r au pays ignoran t de la

t r ad i t ion qui s'y rappor ta i t : de c h a q u e r a m e a u t o m b a n t sous la cognée du b û c h e r o n , le sang jail l issait . Le c h ê n e fut c e p e n d a n t aba t tu , avan t 1872, mais

l 'on fit p r u d e m m e n t appel à u n s o u r d - m u e t de passage à Gilly.

Les fées, lu t ins o u sa rvans - espr i ts follets - ne son t pas le p ropos de cet

ouvrage , tou te fo i s sachez q u e l o r s q u ' u n e v io l en te t raverse souff le du col du

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Chat sur le lac du Bourget, c'est la Chasse infernale du roi Arthur qui passe. Les habitants de la montagne proche craignaient au X I X siècle le roi Hérode, qui fréquentait le Grand-Bois, au-dessus duquel tournoient toujours les buses, et les grands-mères disaient que si l'on faisait la lessive durant la grande semaine - la semaine sainte - le roi Hérode viendrait boire le lissieu.

Dans les minières des Hurtières, en Maurienne, crosiers, farfadets, gnomes et goblins qui hantent les fosses jouaient mille tours aux mineurs et aux mulets qui transportaient le minerai, allant jusqu'à transformer l'or en granette.

Les fées ont leur fontaine au hameau de Montaugier, à la Motte-Servolex, qui sourd sous de grands rochers gris, au bord d'un pré semé de grosses pierres, et bien d'autres dans les deux Savoie.

A Saint-Foy-Tarentaise, entre le lac Noir et le mollard des Arandelles existe un trou profond, la bourna de le fai, dont les petites femmes noires avaient fait leur demeure. Jean-Louis Bradel raconte une légende les concer- nant : un jour, une femme de Pierre Giret leur ayant apporté du lait dans une pignata, une des fées lui rendit son récipient en lui recommandant de ne point regarder à l'intérieur avant d'être arrivée chez elle. La tentation fut trop forte et elle souleva le couvercle en chemin. Déception, elle n'y trouva que des feuilles de rhododendron qu'elle jeta dans le torrent. Quelques-unes restè- rent collées aux gouttes de lait. A la maison, elle entreprit de la nettoyer, les feuilles restantes s'étaient bel et bien changées en pièces d'or...

Toujours en Tarentaise, le trou des Fous a une origine bizarre : longtemps avant les adductions d'eau du X X siècle, les hameaux de Pralognan s'alimen- taient grâce à des canalisations de bois, mais, celui qui alimentait le hameau des Granges s'étant appauvri, on fit appel à un sourcier rebouteux réputé du Praz, qui promit de trouver de l'eau en échange du don d'une robe rouge et d'un fromage d'été. Il fit jaillir l'eau à l'orée de la forêt, au départ du sentier qui remonte des Granges au mont Bochor. Au lieu de le payer, les paysans ingrats le chassèrent à coups de pierres. Pendant qu'ils fêtaient l'eau retrouvée, le sorcier retourna de nuit vers le trou d'eau et y versa le contenu d'un flacon, l'eau bouillonna, diminua puis disparut, tandis qu'il s'éloignait en ricanant, levant le poing vers le village d'ingrats. Partiellement comblée, cette fosse subsiste, c'est le trou des Fous (Yves Sourzat, 1983).

Selon le dominicain Etienne de Bourbon - 1190-1261 - des démons allu-

maient des feux et lançaient des flammes sur une montagne de Tarentaise, dont ils furent définitivement chassés lorsque l'on érigea à son sommet une croix de bois.

A Tignes, enfin, le lac naturel, situé à 2 100 mètres d'altitude, a aussi sa légende : un vagabond soupçonné de sorcellerie, car il avait dans sa besace des diables de Bessans, passa par Tignes. On redoutait ses diableries et sa physique - nom donné à la magie en Savoie. Du reste, un respectable compte rendu au préfet de la Savoie, en 1811, précise bien que le «mendiant et la femme misérable sont à craindre, si on ne leur fait pas l 'aumône, ils peuvent donner toute espèce de maladie au bétail ». Effectivement il arrivait après son

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passage que le lait ne caille plus dans le cassett - chaudron - ou que l'on découvre deux vaches attachées au même licol.

Un matin de septembre, il arrive donc par le col du Palet. Tous le rejettent, sauf au premier chalet à gauche en allant au Val-Claret, où l'hôtesse compa- tissante ou plus prudente lui donne une soupe chaude et la possibilité de dormir dans la grange. Avant de se coucher, il la prévient : « Demain matin, quand l'étoile du berger se lèvera et que vous commencerez à traire vos vaches, vous entendrez un grand bruit d'avalanche, car il faut que ceux qui m'ont refusé l'hospitalité soient châtiés. Ne vous inquiétez pas. Quant à moi, je serai sur le chemin du col de Leisse. Bonsoir et à l'an prochain ». Le lendemain, il y eut un bruit gigantesque et la femme découvrit un beau lac bleu aux eaux limpides. (légende racontée par José Reymond). Or, dans le trou appelé l'Aoula - la marmite - près du port de voile, à un mètre de profondeur, se voient sous l'eau les restes d'un mélèze entier. Le lac devrait bien son origine à un effon- drement de terrain.

Les légendes de ce type abondent en Savoie, encore plus en Haute-Savoie, elles pourraient remplir un livre entier, mais diables et fées ne sont pas seuls à se manifester.

Revenants et maisons hantées

Le château de Sallenove - Sala Nova - en Haute-Savoie, est sis dans la commune de Marlioz, sur la butte qui domine le confluent des Usses. Il était en ruines, avec les armoiries des Sallenove et des Pingon. Une de ses salles porte le nom de chambre du Diable, au sommet du principal escalier, et il a fallu murer la porte qui ouvrait dans les combles pour couper court aux visites d'un spectre d'une espèce rare : un cheval tout armé, caparaçonné, écumant, qui disparaissait au dernier coup de minuit. Au temps des croisades, Berthe, la fille du comte de Genevois, avait tourné la tête du sire de Sallenove et du vidame de Chaumont qui se disputaient ses faveurs dans les joutes et les tournois.

Chaumont obtint le don d'amoureux merci, mais peu après son mariage il dut suivre son suzerain Amé de Savoie en Terre Sainte. Il fut parti trois ans et le sire de Sallenove inventa un stratagème pour s'introduire dans le château. Un soir d'été, Berthe voit arriver au pied des murailles un destrier et un chevalier portant les armes de Chaumont, qui sonne du cor et fait entendre le cri de guerre du vidame. Aux premiers mots, le chapelain reconnaît la voix de Sallenove, il fulmine un Vade retro énergique, maudit le chevalier félon dans sa personne, ses armes et son cheval. Aussitôt le tonnerre gronde, la tempête éclate. Le destrier devenu furieux repasse le pont levis, emporte son cavalier au milieu des éclairs et des rugissements de l'orage. La rivière des Usses qu'il faut traverser pour rentrer à Sallenove est subitement grossie par les torrents de pluie, il s'y précipite et disparaît sous les bouillons d'écume. C'est depuis lors que le coursier fantôme s'est souvent montré dans les combles du dit château, surtout par les nuits d'orage...

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Château de Sallenove Marlioz. (Dessin, Michèle Brocard)

Lucifugé Rofocale. ▶ (D'après le Dragon rouge, édition de 1521)

Sous les rochers à pic de La Corverie ou de La Courbière, existait à Saint- Pierre-de-Belleville en Maurienne un prieuré de Saint-Jacques fondé au V I siècle par le roi Gontran. Seul un petit édifice en ruines, bien transformé, le Temple, lui a survécu. C'était un oratoire sous le double vocable de saint Roch et saint Sébastien, et chaque 8 septembre on y célébrait une fête en l 'honneur de la Vierge. Le lundi de Pâques une affluence considérable descendait des villages alentour, après l'office avaient lieu un repas copieuse- ment arrosé, des danses et des plaisirs bruyants. La fête religieuse fut supprimée par les évêques scandalisés, mais l'oratoire n'était pas abandonné en 1872 : un être mystérieux semblait protester énergiquement contre cette suppression, c'était un moine revêtu de sa robe blanche qui se tenait pendant la nuit en dehors de la petite porte, comme pour exhorter les passants à la prière. Pour éviter de l'apercevoir, les paysans faisaient de longs détours.

Un soir de Toussaint, une femme de Doucy-Tarentaise revient à pieds de Saint-Oyen. Elle a fait les vendanges chez des amis, la nuit tombe, les cloches sonnent dans les hameaux alentour. Soudain, le long du Vion du Tsé, elle sent une présence derrière elle et se retourne : c'est le spectre d'un Pénitent blanc qui la suit. Il était simplement revenu pour aller se recueillir sur une tombe du cimetière (Yves Brêche).

Aix-les-Bains eut aussi son revenant. Longtemps le chemin qui est aujourd'hui l'avenue du Grand-Port fut signalé par une croix au lieu-dit Le Rondeau. Cette croix était l'objet d'un pèlerinage accompli tous les soirs par un capucin recouvert de son capuchon hermétiquement fermé. Il passait un quart d'heure pieusement agenouillé au pied de la croix, prenait chaque fois

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le même chemin puis disparaissait dans les champs. Un jour des esprits forts décidèrent de pénétrer le secret de son identité, mais lorsque le capucin se leva, se tourna de leur côté et laissa tomber son capuchon, il montra à nu un cou sans tête. De là naquit une croyance répandue au X I X siècle : en se rendant de nuit près de la croix du Rondeau, bien dominé par sa question, après une courte prière on entendait une voix sépulcrale vous répondre à minuit précise.

Mais les revenants courent encore.

Il y a moins de cinquante ans, un château de Haute-Savoie était encore hanté. Les enfants étaient effrayés par un fantôme qui pour être invisible n'en était pas moins inquiétant. Il s'annonçait par des bruits de pas et de chaînes, des froissements d'étoffes et un souffle chaud. L'aîné des fils s'étant installé

dans la chambre d'un ancien précepteur, où la présence semblait la plus manifeste, en particulier les nuits suivant un décès dans la commune, s'arma des pincettes et de la pelle à feu qu'il déposa sur sa table de nuit, bien décidé à frapper le visiteur. Quand le fantôme se manifesta, il ne les trouva pas, elles avaient été remises en place. Les parents crurent à une plaisanterie jusqu'au jour où la garde-malade de la grand-mère reçut aussi la visite du fantôme. Après mûre réflexion, la mère pensa qu'il s'agissait du fantôme d'un abbé qui avait été précepteur dans la famille, elle fit dire des messes pour le repos de son âme et celui des ouailles décédées dans la paroisse, et l'âme en peine ne se manifesta jamais plus.

"Sus, sus les diables..." Grand calendrier et compost des Bergers, Lyon, 1633.

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Quand à la revenante du Val d'Arly, bien actuelle, c'est une jeune motarde rousse qui fait de l'autostop sur la route de Megève. Quand un automobiliste s'apprête à la faire monter, il n'a que le temps d'apercevoir sa tête, elle disparaît aussitôt et tout le paysage de la vitre arrière s'efface dans la brume. Elle reviendrait à l'endroit même où elle fut accidentée.

Une histoire semblable court toute la Savoie, à ceci près que si l'autostop- peuse monte bien à bord, arrivée sur les lieux de son accident elle pousse un cri et disparaît.

Plus précis est le récit d'un médecin qui chargea sur la RN 90 vers Chapa- reillan une jeune fille taciturne. Arrivés près d'un pont, elle manifesta une grande frayeur, se fit déposer un peu plus loin, chez ses parents. Il pleuvait, l 'homme lui prêta son parapluie, mais, ne la voyant pas revenir pour le lui rendre, il alla jusqu'à la maison des parents, desquels il apprit que leur fille était morte un an plut tôt près de ce pont dans un accident de moto.

Et le château de Gilly-sur-Isère est toujours hanté par une dame blanche, que l'on dénomme la Princesse. Elle parcourt la nuit les couloirs de la demeure dans un bruissement d'étoffes et de pas feutrés.

Les maisons de sorciers ou hantées sont aussi de toutes les époques.

Une maison de Bourget-Villarodin, maintenant détruite, et qui possédait de belles peintures murales, avait été édifiée par un sorcier.

Toujours en Maurienne, vers Bessans, on pouvait encore voir en 1930 au hameau de La Chalpe la vieille maison de Devallon, au pied du collet de La Madeleine.

Devallon était un beau garçon brun de vingt ans, extraordinairement fort, qui tentait le diable. Celui-ci lui apparût un jour de tempête, alors qu'il s'était abrité dans une grotte : « Ecoute, tu auras la fortune, tu parviendras aux honneurs et durant cinquante ans tous tes désirs se réaliseront, à la seule condition que tu m'appartiennes au bout de ce temps ». Comment refuser ? Devallon accepta et le diable lui marqua le bras à l'aide d'une épingle. Le sang jaillit, Devallon y trempa sa plume et signa le pacte. Sa force devint surnatu- relle. Pour regagner son habitation il étendait son manteau sur l'Arc et se lais- sait descendre au fil de l'eau. D'un simple coup de couteau il abattait de forts mélèzes. Pendant son temps militaire, sous le roi Louis XV, il débloqua mystérieusement une forteresse dans laquelle son escadron se trouvait prisonnier. En récompense son capitaine le libéra de ses obligations, lui disant « va-t-en au diable».

De retour en Maurienne, tenaillé par le remord, il fit pénitence et récupéra une nuit de Noël son âme vendue au diable, puis il accomplit un pèlerinage jusqu'à Rome, emportant sur son dos la cloche de la chapelle Saint-Maurice de La Chalpe.

Beaucoup plus près de nous, certains lieux sont encore hantés ou abritent des faits étranges, parfois non loin de Chambéry. On a du mal à tenir dans une maison, même de construction récente, lorsque les casseroles volent à travers les pièces.

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Le diable conversant avec le roi, in Le temple de Satan.

La maison du Diable, à Chindrieux, n'est autre qu'un lieu-dit désignant un virage serré, entre Portout et Chanaz, avoisinant un vieux pan de mur cadastré à ce nom. Très ombragé, le verglas y est fréquent. En dix ans, de 1975 à 1985, neuf automobilistes y ont été mortellement blessés, les deux derniers accidents sont récents, mère et fille y ont trouvé la mort, et la grand-mère était déjà décédée à quelques mètres de là, il y a dix ans. Pourquoi ?

Quant à l'oratoire récent du lieu " A la fortune ", à Villette, une prédiction veut que si les travaux EDF le détruisent il y ait mort d'hommes...

Le phénomène des maisons hantées est toujours basé sur le même schéma traditionnel : un esprit frappeur ou domestique - qui peut être le sarvan ou follet savoyard - tourmente les occupants en provoquant des phénomènes sonores, en déplaçant meubles et objets, allant jusqu'à s'attaquer aux personnes elles-mêmes, mais sans risques graves, jusqu'au jour où l'on fait appel à un prêtre pour les chasser.

Les interventions épiscopales dans les demeures hantées furent très offi- ciellement admises jusqu'au XVIII siècle. Un exorcisme spécial intitulé Exorcismus domus a daemonio vexatae figure dans le Manuel du diocèe de Genève de 1724. Il fut couramment utilisé jusque vers 1869.

Mais les sorciers ?

Nous n'avons affaire ni à un esprit frappeur ni au diable en personne, mais à un être de chair et d'os, comme vous et moi, qui répand ses maléfices sur gens et bêtes.

Si l'on en croit le « Marteau des Sorcières » - Malleus maleficarum - publié en 1487, il fait « dépérir, s'étouffer et éteindre la progéniture des femmes, les petits des animaux, les moissons de la terre, les raisins des vignes et les fruits de la terre », « afflige et torture hommes, femmes et bêtes par des tourments cruels externes et internes, par ses infamies et maléfices.

Il était communément considéré comme un serviteur du mal.

Page 14: Diableries et sorcellerie en Savoie

VOUS AUREZ DÉSOBLIGÉ QUELQUE SORCIER

Pratiquer le maleficium, c'est agir par des moyens occultes, que l'on soit ou non lié au diable et membre d'une société secrète qui tient des sabbats ou assemblées périodiques.

Le monde de l'Antiquité connaissait tout du maleficium, que l'on pourrait, selon N. Cohn faire remonter à Sumer, et qui peut être considéré comme un « miracle pernicieux ».

Dans une société essentiellement montagnarde et paysanne qui lutte pour sa survie, dans un monde d'insécurité et de peur, le sorcier s'attaque aux inté- rêts du moi, de la famille et du clan, et à leurs principes vitaux :

- la santé des hommes et du bétail,

- la capacité de travailler,

- la fabrication du beurre et du fromage, source importante de revenus et produits de base alimentaire dans les pays savoyards,

- les récoltes, endommagées par les tempestiarii ou faiseurs de grêles, et les invasions de rongeurs,

- la procréation par le nouëment de l'aiguillette, qui rend les hommes impuissants, ou la mort des enfants en bas âge.

C'est le visage même du malheur, que l'on a tendance à expliquer par la religion et le recours à des interprétations magiques.

Le mal donné

Les procès de sorcellerie savoyards offrent, comme partout ailleurs, un éventail complet des atteintes aux gens, aux bêtes et aux biens.

Le premier jeteur de sort attesté habite un village proche de Chignin, on l'accuse de semer la peste, il mourra en 1394, mais la mémoire collective a la vie dure, car au début du X X siècle une famille portant le même nom, du même hameau, était encore réputée détenir de vieux ouvrages de sorcellerie.

Les procès de Viry, au milieu du X V siècle énumèrent aussi toute la gamme des maléfices. Dans les procès du Sénat existant aux Archives dépar- tementales de la Savoie, voici Clauda Masson, femme d'Aymé Faurax, âgée

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Sorcière par Quentin Metsys et Joachim Patenier (Tentation de saint Antoine). (Madrid, Musée du Prado)

de 75 ans en 1617, qui rend ses voisins impotents ou malades en leur mettant « les diables au corps». Elle fera mourir trois jeunes enfants d'un flux de ventre en leur donnant à manger des poires... En 1634, à Bellentre, Michelette Costerg soit Lombard, femme de Louis Marchand, maléficie une jeune fille de quinze ans, qui ressent des chaleurs extraordinaires, puis des sensations de froid, et devient enfin « toute roide ». Lorsqu'elle s'avise de vouloir la soigner, l'état de la malade empire.

A Cevins, entre 1615 et 1635, toute une famille, de la vraie «race de sorciers », les Dunant-Leysin, père, mère, quatre de leurs enfants et un petit- fils, sévit à tout va, mais avec une spécialité curieuse. Chaque fois qu'une de leurs victimes les rencontre, elle est, comme par hasard, entre autres symp- tômes, couvertes de cloques rouges ou blanches et prise de démangeaisons terribles, je commençais à me poser des questions, lorsqu'un des témoins décrivit une charmante scène d'épouillement entre époux Dunant. Ils étaient non seulement sorciers mais très vermineux. Effectivement on enfle, on est couvert de démangeaisons, on s'égratigne après chaque rencontre avec l'un d'entre eux, surtout s'il y a eu dispute préalable. L'une des maléficiées a été atteinte après que Colette Dunant lui ait donné à boire une écuelle de lait avec du pain trempé dedans. Cependant deux autres ont été victimes l'un d'un « éblouissement des yeux», l'autre n'a jamais pu « lever les yeux », sa mère ayant été maléficiée durant sa grossesse par la grand-mère qui lui avait donné du vin à boire.

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Quant à Pernette Fossoret, qui avait cependant d'excellentes relations de voisinage avec les femmes Dunant-Leysin, puisqu'en 1627 elle leur emprunta un berceau, après la naissance de son fils, ayant eu la malencontreuse idée de leur montrer ses mamelles, elle se retrouva couverte de cloques et son lait tari.

Pour la femme de Didier Costaz Claudet, qui eut la malchance de passer devant chez Colette au retour de sa messe de relevailles - quinze jours seule- ment après la naissance mais on était en pleine période des foins à rentrer - son lait tarit, sa petite fille n'eut plus de quoi se nourrir et mourut «six mois après toute éticque». De plus sa «forcelle rompit et purgea beaucoup de vil lai nie ».

C'est encore Colette, qui en se disputant avec Jane Prinier-Poentet «lui baille de ses volants à la cuisse senestre », et le lendemain Jane « ne pouvait aucunement se soutenir de la cuisse, et depuis est demeurée toujours en frénésie et comme étique».

Quant à Laurent Leysin, alors qu'il était syndic - l'équivalent du maire de nos jours - de Cevins en 1633, il se disputa avec Pernette Poentet, chez qui il était allé faire la lévation : la voilà galeuse pour un an.

Colette paraît la plus venimeuse, car c'est encore elle qui s'étant disputée à cause de leurs enfants lors de la distribution de l'aumône du Saint-Esprit le jour de la Pentecôte, en fèves, pain et vin, faite par le curial Dunant-Vallaz aux gens assis sur le mur du verger du seigneur de Cevins, un enfant Challand cesse de manger, devient somnolent, n'arrête pas de crier et reste en proie à des convulsions vingt-quatre heures durant «tout contrefait, le col retourné, bras et jambes tournés ».

La sorcière de Lovagny, Michèle Gursel, veuve de Nicolas Buffin, dont le procès eut lieu en 1636, est plus efficace, elle tue parfois.

Après une dispute son interlocuteur est « incommodé d'un bras», le reste trois semaines au bout desquelles « il crivit la nuit venue ».

Elle empêche de travailler un laboureur de trente-trois ans qui a pris en « amodiation un grangeage » qu'elle convoitait. Elle lui assure qu'il ne le travaillera jamais, de fait il se blesse à l'œil, en devient borgne, ce qui le contraint d'abandonner le grangeage.

L'épouse du curial de Montrottier, Alexandre d'Hérène, refuse de libérer de ses obligations son serviteur Marin, fils de Michèle, pour aider sa mère aux vendanges, et aussi de lui prêter des gerles... Aussitôt la femme prend mal à la cuisse dans sa vigne, ne peut plus travailler. Michèle qui la rencontre au cime- tière six semaines plus tard la juge suffisamment punie et lui affirme « Curiala, vous avez été bien malade, vous sera bientôt guérie », et le mal cesse.

Jacques Sattenod, un laboureur de cinquante ans la rencontre en menant sa charrue, le soc tombe à terre, il ne le retrouvera jamais, croyant que « le diable l'emporta ».

Quant aux jeunes enfants, elle les rend insensés. Les « deux petits enfants que la femme de Jacques Sattenod avait faits d'une même portée» deviennent

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insensés, l'un étant sourd, l 'autre «parfois tellement étourdi qu'il ne sait où il est, parfois tellement enragé qu'il grimpe aux murs ».

Louise Buffin, sa fille, donne des poires à la fille de ce pauvre Sattenod, qui ne peut dès lors plus cesser de remuer la tête.

Toutefois, si chaque fois que Michèle Gursel menace quelqu'un, il est bien connu « qu'il lui arrive ordinairement malheur », elle se laisse impressionner et revient sur les sorts donnés : quand voisins ou parents se fâchent à leur tour, elle vient elle-même désensorceler ses victimes, ou transfère le maléfice sur une bête de la maison.

Benoist Borreyron, du hameau d'Estrambey, à la Motte-Servolex, est un laboureur de quarante-quatre ans en 1644. Il est aussi le neveu d 'un autre sorcier, Claude Revillion, maréchal-ferrant au Bourget-du-Lac, qui fut brûlé avant 1639.

Il se dispute à propos d'une hache - detra - avec Pierre Mathieu dit Maréchal, dont la femme, Claude Vilan, devient la nuit suivante comme « frénétique et enragée ». Mais en général il s'attaque plutôt au bétail et à la basse-cour, et transfère souvent le mal des hommes sur les animaux.

A Saint-Jorioz, la famille Bontemps, sept personnes, sévit jusqu'en 1645, sur trois générations.

Le père, Nicolas, rend impotent après menaces Pierre Villan, qui va demeurer un an sans « se pouvoir aider d'aucun membre de son corps » ni se « lever pour aller aux nécessités ». Encore une incapacité de travail. Mais il s'attaque surtout au gros bétail, comme nous le verrons.

Estiennaz Girod, trente ans, femme de Laurent Beret, d'Arith-en-Bauges, est jugée en 1647-1648.

Elle en veut à sa nièce de vingt-huit ans, Oddinaz Cochet, femme de Jehan Morand. Elle la rend frénétique, avec des sensations de feu dans l'estomac et l'esprit tout troublé, en lui donnant à manger du pain avec du fromage blanc et des œufs. Oddinaz veut se précipiter, s'étrangler ou se mettre dans le four chauffé pour le pain.

Quant à Bernarde Viviand, il lui suffit de croiser la sorcière, elle est atteinte « d'une maladie et frénésie » durant deux ans. Son bébé de trois mois a également été malade.

Dix-sept ans après le procès de Michelette Costerg a lieu celui de Jeanne ou Genette Tresallet, de Bellentre. L'affaire concerne les hameaux du Revers et de Montcharvin. Elle a trente-six ans en 1651, est femme de Mathieu Chevrier, dont elle a un fils de dix ans, François. On la surnomme La Tappettaz.

Elle aime à tarir le lait des jeunes mères. A l'une elle touche les mamelles, sa petite-fille nourrie au lait de vache survivra jusqu'à ce que des enfants la promènent par le village. A-t-on rencontré Genette ? Le bébé enfle, désenfle, devient toute sèche et meurt au bout de quatorze semaines.

Le petit-fils de Françoise Darbel est maléficié pour un refus de prêt de

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Achevé d'imprimer en février 1986

sur les presses de

Dépôt légal : 1 trimestre 1986 N° Imprimeur : 256