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Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques DREES SÉRIE ÉTUDES DOCUMENT DE TRAVAIL La régulation des professions de santé - études monographiques Allemagne, Royaume-Uni, Québec, Belgique, États-Unis Rapport final Yann BOURGUEIL, Ulrike DÜRR, Gérard de POUVOURVILLE, Sophie ROCAMORA-HOUZARD n° 22 mars 2002 MINISTÈRE DE L EMPLOI ET DE LA SOLIDARITÉ

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Direction de la recherche, des études,de l’évaluation et des statistiques

DREES

SÉRIEÉTUDES

DOCUMENTDE

TRAVAIL

La régulation des professionsde santé - études monographiques

Allemagne, Royaume-Uni, Québec,Belgique, États-Unis

Rapport final

Yann BOURGUEIL, Ulrike DÜRR,Gérard de POUVOURVILLE,

Sophie ROCAMORA-HOUZARD

n° 22 mars 2002

MINISTÈRE DE L’EMPLOI

ET DE LA SOLIDARITÉ

Remerciements

Les auteurs remercient en premier lieu les nombreuses personnes qui ont accepté de nousrencontrer dans les pays visités et ont consacré une partie de leur temps pour nous exposerleur travail et leur connaissance du sujet.

Nous remercions aussi Dr Kamel Malek qui a défriché les premières étapes et a participéactivement au stade initial de l’étude.

Enfin, nous tenons aussi à remercier les secrétaires du groupe image, Valérie Landsmann etKarima Kaci qui ont participé à ce travail dès le début, et ont permis sa finalisation.

Convention SÉSI - ENSP 98/17Groupe Image-ENSP14, rue du val d’Osne94 410 Saint-Maurice

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Sommaire

Introduction

La régulation des professions de santé en Allemagne 11I - La démographie médicale : état des lieux et outils de planification 151.1 - État des lieux : de nombreux étudiants en médecine, une forte densité médicale et une croissance du chômage médical 151.2 - Les outils de planification : diversité des modèles de projections utilisés selonles acteurs concernés (l’association des médecins conventionnés - médecins de caisses -et les caisses, d'une part, les chercheurs d’autres disciplines, d'autre part) 19II - La régulation de l’accès à la formation 212.1 - L’accès à la formation de base des médecins : une régulation déterminée par le principe d’accès pour tous à la formation médicale et par les capacités d’accueildes facultés de médecine 212.2 - La formation et l’accès aux spécialités 26III - La régulation du marché du travail : des restrictions conditionnées par l’obligationde financement du système de soins 353.1 - La régulation de l’accès au secteur ambulatoire 353.2 - La régulation de l’accès au secteur hospitalier 463.3 - Le rapprochement des deux secteurs de soins et ses implications sur le marchédu travail dans le secteur de la santé 503.4 - Les autorisations d’exercice de la médecine, en Allemagne, pour les étrangerssont définies par une loi fédérale 513.5 - La sortie du marché du travail 52Annexes Allemagne 53

La régulation des professions de santé au Royaume-Uni 65I - La démographie médicale : état des lieux et outils de planification 701.1 - État des lieux : une densité médicale faible, une proportion élevée de médecinsétrangers, une fuite des étudiants en cours d'étude évoquent une pénurie de médecins 701.2 - Les outils de la planification 75II - La régulation des effectifs au cours des études médicales : une planification à longet à moyen terme 772.1 - La régulation du nombre d'étudiants en médecine se fait à l'entrée des étudesuniversitaires (undergraduate studies), elle est contrôlée principalement par le niveaucentral du gouvernement 782.2 - La régulation du nombre d'étudiants, dans chaque spécialité, porte sur la périodedes « postgraduate studies », elle définit sur le moyen terme la masse des futursmédecins pour chaque spécialité qui seront sur le marché du travail 83III - La régulation du marché du travail : une régulation à court terme 893.1 - La régulation à court terme se décide au niveau local et non plus centraldepuis 1989 893.2 - Les acteurs de la régulation estiment leur besoin en professionnels à partirdes composants et déterminants de la force de travail et de leurs évolutions 96Annexes Royaume-Uni 101La régulation des professions de santé au Québec 117

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I - La démographie des professions de santé : état des lieux et outils de planification 124I.1 - État des lieux : pénurie relative des professionnels de santé et difficultésde répartition géographique notamment pour les spécialistes 1241.2 - Les outils de planification : recueil de données et modèles de projection 128II - Régulation avant ou pendant les études 1322.1 - Les décisions concernant le nombre d'étudiants à former chaque année et danschaque spécialité, sont prises par le ministère sur les conseils de la table deconcertation et du conseil médical du Québec 1322.2 - La formation en médecine 137III - La régulation du marché du travail 1413.1 - L'accès au remboursement des prestations par la RAMQ pour les médecins n'est paslimite dès que l'étudiant a validé son cursus de formation 1413.2 - Les mesures visant à réguler l’installation des médecins sont nombreuses car le payss’est trouvé rapidement confronté au problème de l'accès aux soins des collectivités ruraleset éloignées du Canada et a fortiori du Québec 1413.3 - La pénurie de médecins : un problème de productivité qui appelledes transformations sur les modes de rémunération des professionnels et l'organisationdu système de soins ? 1453.4 - La répartition des champs de compétence entre professions au Québec : le cas des infirmiers et des sages-femmes 1493.5 - La sortie du marché du travail ou les effets du succès des mesures incitatives à la cessation d'activité pour réduire les effectifs médicaux et leur durée de carrière 153Annexes Québec 154

La régulation des professions de santé en Belgique 173I - La démographie des professions de santé : situation actuelle et projections 1791.1 - État des lieux : pléthore des professionnels de santé et féminisation croissantedu corps médical 1791.2 - Méthodes de mesure et projections : l'évaluation des besoins cherche à estimerla force de travail plutôt que les effectifs, ce qui approche plus finement la capacité de production du corps médical, notamment dans le contexte de féminisationde la profession 181II - Régulation avant ou pendant les études ou comment anticiper les effets dunumerus clausus à l’agrément : une application différenciée selon les communautésen raison de la compétence en matière d'éducation qui est réservée aux communautés 1822.1 - L’installation du numerus à l’agrément en réaction à la pléthore 1822.2 - Le cursus francophone et son adaptation au numerus clausus 184III - La régulation du marché du travail 1883.1 - Régulation du marché de l’emploi avant l'installation : pas de régulation directedes effectifs une fois l’agrément obtenu 188Annexes Belgique 194

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La régulation des professions de santé aux États-Unis ou comment accompagner ledynamisme du marché de la santé 199I - La démographie médicale aux États-Unis : état des lieux et outils de planification 2051.1 - État des lieux : densité médicale moyenne à forte proportion de médecinsétrangers, associée à une expansion des professions paramédicales et au chômage1.2 - De nombreux outils de planification ont été élaborés aux États-Unis : depuis les années 90, a été développée une approche intégrée de l’estimation des besoinspour toutes les professions de santé 209II - La régulation des effectifs à l'entrée des études médicales et paramédicales 2192.1 - Le cas des médecins 2192.2 - Le cas des professions paramédicales 223III. - La régulation du marché de travail 224Annexes États-Unis 228

Conclusion 239

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Avertissement aux lecteurs

Le présent rapport rassemble pour les différents pays étudiés un ensemble d’informationsregroupées selon un plan d’analyse commun. La nature et la précision des informationsprésentées varient selon les pays en raison de l’accès plus ou moins aisé que nous avons euaux personnes ressources et aux informations décrivant les mécanismes de régulation àl’œuvre.

Notre propos initial ne visait pas la comparaison entre les pays pour dégager un modèleidéal de régulation des professions de santé. Dès le départ, nous nous sommes donnés commeobjectif de présenter comment dans d’autres contextes politiques et sanitaires, s’organise laquestion de la régulation des professions de santé qu’elle soit administrée ou non. Lesdonnées factuelles présentées en partie 1 pour chaque pays sont en partie expliquées par lesmécanismes de régulation présentés en partie 2 et 3.

Nous n’avons pas proposé de discussion générale dans le présent document, démarche quiest envisagée pour une publication ultérieure. Le lecteur qui s’intéresse au sujet de larégulation des professions médicales pourra utiliser le document comme une sourced’information parmi les nombreuses publications réalisées sur le sujet et nous espérons qu’il ytrouvera des éléments visant à alimenter une réflexion utile pour le cas de la France. Unmodèle idéal de régulation ne peut selon nous qu’émerger d’une réflexion collective franco-française mettant aux prises les représentants des organisations professionnelles, desorganismes de formation, de l’assurance maladie, de l’État et de chercheurs ayant investis cechamp depuis de nombreuses années.

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Introduction

La contribution des systèmes de soins à l'amélioration de la santé des populations passeprincipalement par les professionnels de santé et notamment les médecins qui en constituent,malgré la technicisation croissante des pratiques de soins, le levier principal d'action. Parceque le médecin est prescripteur, la démographie médicale fait l'objet dans la plupart des paysoccidentaux d'une attention soutenue, le plus souvent dans une perspective de contrôle desdépenses de santé.

Plusieurs travaux récents1 ont porté sur la démographie médicale en France, ce quitémoigne d'un intérêt croissant sur un sujet longtemps considéré comme résolu par la mise enplace du numerus clausus et du concours de l'internat de spécialité. Le vieillissement de lapopulation, les perspectives de réorganisation du système de soins par le biais des réseaux etdes restructurations hospitalières, l'émergence de nouveaux métiers, la féminisation de laprofession sont autant de facteurs qui pour les différents acteurs du système de soins françaisannoncent une pénurie grave de médecins à venir ou offrent des opportunités pour redéfinir lerôle et la place d'une profession médicale en questionnement sur son devenir2. Dans cecontexte, le SÉSI, devenu par la suite la Direction de la Recherche, des Études, del’Évaluation et des Statistiques du Ministère a souhaité mieux connaître comment, dans lesautres pays occidentaux, est abordée la régulation des professions médicales. Afin de décrireune grande variété de politiques de régulation, nous avons exploré différents pays choisis enraison de leurs positions contrastées : l'Allemagne, en raison de la ressemblance de sonsystème de protection sociale avec celui de la France et les récentes mesures prises delimitation à l'installation, le Royaume-Uni, en raison des mesures prises pour répartir aumieux l'offre de soins primaire, le Québec, en raison des problèmes spécifiques posés par laquestion de l'accessibilité géographique des soins sur un territoire extrêmement vaste, laBelgique, en raison de sa proximité géographique, historique et linguistique et les choix derégulation opposés à ceux faits par la France dans les années 60, et, enfin, les États-Unis, enraison de la place croissante prise par les professions intermédiaires dans la régulation desprofessions médicales. Pour permettre un essai de comparaison entre les pays, nous avonsadopté une grille commune d'analyse des mécanismes de régulation qui distingue troisgrandes familles de « règles du jeu » en matière d'emploi.

Les premières règles sont relatives à l’entrée dans une activité professionnelle donnée,démarrant avec le processus de formation aux métiers exercés. Les deuxièmes règles sontrelatives à l’entrée et à la mobilité sur le marché du travail, une fois la formation acquise. Latroisième série de règles est relative aux règles de sortie de l’emploi, que ce soit par le biais dela retraite ou par le biais de la conversion à un autre emploi.

1 J. Choussat et alii, « Rapport sur la démographie médicale », Rapport IGAS n° 96098 - septembre 1996. G.Nicolas, « Rapport sur l'adéquation entre les besoins hospitaliers et les effectifs en anesthésie réanimation,gynécologie-obstétrique, psychiatrie et radiologie », février 1998. Société Éval, « Expertise de la littératuremédicale sur les besoins en démographie médicale », URML Rhône-Alpes, janvier 1999. URCAM, « Lamédecine de ville, répartition géographique à venir : un enjeu de santé », septembre 2000, Conseil de l'Ordre.CREDES, « Démographie médicale française », situation au 1er janvier 2000.2 M. Arliaud, M. Robelet, « Réformes du système de santé et devenir du ‘ corps médical’ », Sociologie du travail,septembre 2000.

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1. La régulation de l’entrée dans l’activité

Le secteur sanitaire se caractérise par l’importance de la formation initiale commeprocessus de qualification ouvrant la porte aux emplois. L’étude des différents pays portedonc en premier lieu sur l’organisation de la formation professionnelle (règles d’accès,filières, longueur des cursus, financement des études, diplômes). Dans la plupart des paysdéveloppés, la formation aux emplois dans le secteur sanitaire est financée en grande partiepar des fonds publics. Cela implique l’existence de règles définissant le montant du budgetpublic de chaque pays dédié à ces financements. Ces règles s’appuient en général : a) sur desétudes prospectives relatives à l’estimation des besoins pour chaque métier, b) sur unprocessus de négociation entre pouvoirs publics et instances professionnelles aboutissant à latraduction de ces études en régulation des volumes formés. Cette régulation peut être expliciteet impérative (le numerus clausus médical à la française, qui va fixer in fine le nombre demédecins diplômés par an), ou indirecte (les subventions publiques aux écolesprofessionnelles conditionnent en grande partie leur capacité d’accueil). L’analyse desdispositifs de régulation inclut alors l’étude :

- des différentes filières professionnelles existantes à l’intérieur d’un métier (médecins,infirmières) ?

- des modalités d'études prévisionnelles de besoins et notamment comment ces étudesprennent en compte les trois logiques principales de la régulation démographique des emplois:la satisfaction des « besoins », le maintien de l’emplo i existant, le niveau du revenu desprofessionnels ?

- des groupes d’acteurs impliqués (pouvoirs publics, payeurs, instances professionnelles,syndicats, sociétés savantes, experts) et les modalités de leur implication.

- de l'utilisation des enseignements de ces études prévisionnelles pour réguler les flux deformation (existence ou non d’un numerus clausus, régulation par les frais de scolarité) et dudegré de finesse de cette régulation des flux de formation (la répartitiongénéralistes/spécialistes, et la régulation des flux de formation par spécialistes).

2.L'entrée et la mobilité sur le « marché de l’emploi sanitaire »

Ce terme emprunté à l’analyse économique recouvre deux dimensions principales. Lapremière dimension est relative à la nature des débouchés existants à l’issue de la formation eten cours de vie professionnelle, autrement dit à la gamme d’emplois offerts. Cette dimensionpeut elle-même s’analyser sur les axes suivants :

- la liste des métiers et la nature des emplois auxquels ouvre le processus de formation3.- Le degré de perméabilité entre ces métiers, le degré de substitution entre catégories de

personnels. En particulier, les rôles joués par les personnels en formation ou en stage dansl’ajustement à court terme de l’emploi (étudiants nationaux et étrangers).

- Les processus de création d’un nouveau métier. Celle-ci peut relever de deux logiques.Une logique du « besoin », une qualification nouvelle étant requise soit pour une fonctionnouvelle, soit à cause d’une innovation technique ; une logique de la concurrence, un métier

3 Par exemple, l’emploi médical en France comporte des fonctions de soins, mais aussi des fonctionsd’administration ou de contrôle (médecins inspecteurs de santé publique, médecins conseils de l’assurancemaladie). Cette analyse doit cependant aller au-delà de l’énumération des différents métiers, pour en préciser lecontenu. En particulier, selon les pays, la division du travail entre généralistes et spécialistes peut varier. EnAllemagne, le médecin généraliste peut effectuer une large gamme d’examens complémentaires au cabinet. EnAngleterre, le médecin généraliste peut effectuer des actes de petite chirurgie.

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nouveau étant crée pour se substituer partiellement à un métier existant avec une moindrequalification (donc un moindre revenu).

- Les modalités visant à maintenir le capital de compétences au cours du temps (formationcontinue, re-certification).

Il existe une interdépendance forte entre les caractéristiques du processus de formation etles règles du jeu en matière d’emploi en aval : si la formation conduit à la définition decompétences exclusives, alors le marché de l’emploi risque fort d’être cloisonné, avec peu depossibilités de reconversion. Ceci semble être la règle dans l’emploi sanitaire, qui secaractérise en outre par une forte barrière à la sortie, au sens de la reconversion dans un autresecteur d’activité, compte tenu de l’importance de l’investissement initial.

La deuxième dimension est relative à la régulation économique d’ensemble de ces emplois,et oppose une logique de marché à une logique d’emplois administrés (les deux pouvantcohabiter dans un pays donné). L’analyse porte alors sur les éléments suivants :

- la part de l'emploi qui relève plutôt d’une logique de marché administré (emplois publicsquelque soit l’employeur), et celle qui relève plutôt d’une logique de marché (libreinstallation, emplois privés) ;

- l'identification pour chaque secteur des règles spécifiques d’entrée sur le marché enparticulier les règles relatives à l’installation des professionnels, la nature des dispositifs (soitcontraignants, soit incitatifs) pour pousser les professionnels à s’installer dans des zonesgéographiques jugées sous-équipées (ou décourager l’installation dans des zones ditessuréquipés).

3. La régulation de la carrière

Derrière cet intitulé, on regroupe l’ensemble des règles qui déterminent la durée de lacarrière dans un emploi sanitaire. La première de ces règles concerne la fixation de l’âge de laretraite et le financement de celle-ci. Cela inclut la mobilisation de règles dérogatoires dansles deux sens, d’allongement de la durée totale de la carrière soit en cas de crise definancement des régimes de retraites, soit pour traiter une pénurie démographique, ou, àl’inverse, un raccourcissement de cette carrière.

Afin de préciser la nature des informations à rechercher au cours de l’enquête, nous avonschoisi de préciser les attentes des membres du comité4 de pilotage afin de compléter lecanevas du questionnaire devant être soumis aux interlocuteurs étrangers. Huit personnes ontété rencontrées et interviewées, le questionnaire a ensuite été proposé au comité de pilotage etrédigé définitivement en anglais (annexe 1). Parallèlement à ce travail d’entretiens, nousavons identifié un ensemble de personnes ressources5. Pour chaque pays, nous avons priscontact avec les personnes chargées de la démographie médicale au sein des administrations,des représentants d’organismes professionnels et des experts du champ considéré, en généraldes chercheurs. Chaque pays a fait l'objet d'une visite qui a permis de compléter par entretienles informations déjà collectées par courrier, relatives à l'état des lieux et l'organisation de la

4 M. Doo-Hu (DH- Praticiens Hospitalo-universitaires), Mme LAMBERT (DH- Praticiens hospitalo-universitaires), Mettendorf (DH - Évaluation de l’organisation hospitalière), Mme MERMILLIOD (DH -Système d’information), Demoullière (DH - Système d’information), Mme Gottely (SÉSI), M. Volovitch (MIRE),M. Vareille (DGS - sous-directeur chargé des professions de santé).5 Présentés en annexe de chaque pays, dans les différents pays choisis dans le cadre de l’étude.

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régulation des professions de santé. Le matériel recueilli a ensuite été mis en perspective aumoyen de la grille initiale distinguant comme autant de dimensions d'analyse les mécanismesde régulation à l'entrée dans la profession, puis à l'entrée sur le marché du travail et lesmécanismes de régulation du marché du travail, en cours et en fin d'exercice professionnel.

Les interlocuteurs rencontrés ont tous manifesté leur intérêt pour une approcheinternationale, notamment européenne, des politiques de régulation des professions de santé.Dans tous les pays visités, nous avons constaté de nombreuses réformes en cours, en généralde grande ampleur. Chaque pays est présenté selon un plan type comprenant une synthèse dusystème de santé, la situation démographique des professions de santé actuelle de chaquepays, les outils de projection démographiques utilisés et les différents mécanismes derégulation qui jouent aux différents temps de la vie professionnelle.

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Allemagne

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La régulation des professions de santé en Allemagne

La démographie médicale en Allemagne est caractérisée par une pléthore liée à l’absencede limitation à l’entrée des études de médecine. Cette situation induit une politique rigoureusede limitation à l’accès au secteur ambulatoire conventionné.

Introduction

L’évolution du système de santé allemand et du marché du travail dans le secteur de lasanté est fortement liée à celle des régimes d'assurance maladie. Ces derniers ont été instauréset rendus obligatoires par le chancelier allemand Bismarck, en 1889. Dans le systèmebismarckien, la protection maladie est liée au travail et financée grâce aux cotisationsprélevées, à part égale, entre les employeurs et les salariés. Ainsi, les politiques instauréessuite à l'augmentation des dépenses de la Sécurité sociale, avaient comme premier motif lavolonté de garantir l'équilibre comptable de l'assurance maladie, afin de préserver la stabilitédes taux de cotisation et donc, d'assurer un niveau de prise en charge sociale économiquementacceptable pour les entreprises.

Un système de protection sociale caractérisé par le fédéralisme et le corporatisme, qui rendles partenaires sociaux responsables de la gestion de l’assurance maladie.

Le système de « l’économie du marché social » (Soziale Marktwirtschaft) allemand estcaractérisé par le fédéralisme et le corporatisme avec une influence plus ou moinsimportante de l’État.

En matière de santé, l’État fédéral et les Länder se partagent les compétences. Au niveaufédéral, le ministère de la santé est responsable de la santé publique, de la formation et desconditions d’exercice des professionnels de la santé, de l’organisation et de la tutelle del’assurance maladie, de la législation relative aux médicaments, des modalités definancement et des principes d’organisation des hôpitaux.

Chaque gouvernement des Länder intègre un ministère de la santé, compétent en matièred’adaptation des directives fédérales.

La caractéristique du système allemand, c’est que l’État a délégué une partie de sespouvoirs aux corporations des caisses et à celles des médecins (KV) qui ont chacune uneadministration autonome. Ainsi, la gestion des caisses d’assurance maladie est placée sous laresponsabilité des partenaires sociaux représentés par leur corporation.

Les associations de médecins conventionnés (KV), regroupées dans l’union fédérale desmédecins conventionnés (KBV), constituent depuis 1931 les maillons intermédiaires entremédecins et caisses au niveau de chaque Land. Représentant des médecins conventionnésdans le secteur ambulatoire, elles négocient avec les caisses les conditions économiques etorganisationnelles de l’activité médicale dans ce secteur, telle que la rémunération desmédecins conventionnés (qui se fait proportionnellement au nombre d’actes effectués. L’Étatintervient, pour sa part, en fixant les principes directeurs de ces négociations. Ainsi, face àl’augmentation des dépenses, une enveloppe contenant la masse des honoraires de médecinsconventionnés fut instaurée en 1986.

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Il existe huit grands régimes d’assurance maladie constitués d’une multitude de caisses.Les quatre principaux sont le régime des caisses locales d’assurance maladie (AOK), lescaisses d’entreprises (BKK), des artisans et commerçants (IKK) et le régime des caissesagricoles (LKK). L’autonomie de gestion de l’assurance maladie implique que chaque caissesoit responsable de son équilibre comptable. Ainsi, le taux de cotisation varie en fonction desdépenses et des recettes de l’exercice précédent. Les prestations sont intégralement financéespar les cotisations. L’État ne subventionne que les chômeurs et, exceptionnellement, lesrégimes en déficit démographique. Jusqu’en 1993, il pouvait exister de grands écarts entre lestaux pratiqués par les caisses, date à laquelle un système de compensation a été introduit parla loi Seehofer. Les caisses sont depuis mises en concurrence (1996) et chacun peut,désormais, cotiser à la caisse de son choix.

Les usagers bénéficient du principe du tiers payant, à condition de consulter un médecinconventionné (adhérant à l’union des médecins conventionnés KV). Ils versent un ticketmodérateur forfaitaire par médicament prescrit, sauf les personnes en difficulté et les femmesenceintes. Jusqu’à un certain niveau de revenu, ils sont obligés de s’inscrire à une assurancemaladie. Au-dessus de ce seuil, ils sont libres de s’affilier, soit à un régime légal d’assurancemaladie, soit auprès d’une caisse d’assurance maladie privée.

L’accès aux études de médecine est déterminé par le principe d’accès pour tous à laformation et donc, principalement, par les capacités d’accueil des facultés de médecine.

L’Allemagne est l’un des pays qui accueille le plus grand nombre de nouveaux étudiantsen faculté de médecine chaque année. Un numerus clausus définit le nombre d’étudiantsadmis en médecine. La sélection est basée sur des critères non spécifiques aux études demédecine (moyenne obtenue au baccalauréat, le temps d’attente) ou sur des entretiens. Unorganisme national répartit, ensuite, les étudiants sélectionnés d’abord sur les régions, puis surles universités.

Toute tentative de régulation de la démographie médicale, par une diminution du nombred’étudiants admis en première année, se heurte au principe constitutionnel qui garantit unlibre accès aux études de son choix et le maintien des capacités d’accueil des universités (quisont sous la responsabilité des gouvernements des Länder). Ainsi, les ministères del’éducation des différents Länder s’opposent à toute diminution du nombre d’étudiants faceau Ministère de la Santé et l’Ordre des médecins qui y voient une menace pour la qualité desétudes de médecine. L’État fédéral garant de l’équilibre des comptes sociaux, s’appuie sur leseffets de demandes de soins induites par l’offre de médecins, démontrés par plusieurs études,pour mettre en œuvre des mesures de limitation du nombre de médecins formés. Pourl’instant, malgré la pléthore des médecins, le Ministère de la Santé reste réservé quant auxpossibilités d’une telle évolution de la régulation.

L’accès à la formation et au diplôme de spécialité, dont fait partie la médecine générale,est caractérisé par une insuffisance de stages hospitaliers et la nécessité d’avoir réalisé unnombre minimum d’actes pendant la formation, objectif difficile à atteindre pour lesétudiants.

Contrairement à la formation initiale des médecins, placée sous la responsabilité de l’État,la formation spécialisée est du ressort de l’ordre fédéral des médecins allemands. À ce stade,

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la formation n’est plus garantie et les étudiants doivent chercher eux-mêmes les lieux de stagenécessaires pour réaliser l’ensemble des actes requis pour la validation des diplômes despécialités. C’est donc, principalement, la loi de l’offre et de la demande qui régule cettepériode de leur formation. Le critère de masse critique d’actes à réaliser, pour obtenir le titrede spécialiste, est très controversé. Pour l’ordre des médecins, il induirait une inflation d’actesnon justifiés et préjudiciables pour le patient. Pour l’union des médecins conventionnés, lanotion de masse critique d’actes est une garantie de qualité des pratiques. De fait, ce niveaud’exigence constitue, indirectement, un frein à l’accès de la pratique de la médecine.

La formation en médecine omnipraticienne a évolué au cours des douze dernières années,pour devenir une spécialité à part entière. Son champ d’exercice, la médecine de famille, a étéredéfini par la loi 2000, votée fin 1999. Les nouveaux omnipraticiens seront formés durantcinq ans pour devenir des « gate-keepers », en référence au modèle danois et proche dumédecin référent en France.

Auparavant, des spécialistes tels que les internistes ou les pédiatres pouvaient exercer enmédecine de famille. À partir de 2006, seuls les médecins omnipraticiens pourront prétendreau titre de médecin de famille (Hausarzt). Ainsi, la loi vise à abolir la concurrence entremédecins spécialistes et médecins de famille en précisant leur champ d’exercice respectif.

La politique de régulation de l’accès à la médecine conventionnée ambulatoire constituele principal volet de la régulation de la démographie médicale en Allemagne

Depuis la création de la Sécurité sociale, l’organisation et l’accès à la médecineambulatoire conventionnée ont souvent été modifiés pour passer d’une admission illimitée, en1960, à une politique de restriction à l’installation totale prévue par la loi de 2000.L’application des mesures de planification au secteur ambulatoire conventionné est sous lecontrôle d’un comité paritaire de médecins et de caisses, tandis que la gestion directe relèvede la responsabilité des associations de médecins conventionnés (KV).

Les restrictions d’admission à la médecine ambulatoire conventionnée, imposées par la loide Seehofer, en 1993, avaient dans un premier temps comme objectif d’améliorer larépartition des médecins sur le territoire national. La loi a limité leur choix d’installation, touten garantissant la possibilité d’exercice en médecine ambulatoire conventionnée. Des seuilsde saturation, définis à partir du rapport entre le nombre d’habitants par médecin et ce, pourchaque spécialité, constatés en 1990 ont été appliqués pour neuf types de districts deplanification (caractérisés par la densité de la population). Des exceptions à la loi ont permisl’installation pour certaines spécialités, y compris dans les zones de planification « fermées »(ou saturées).

La loi de 2000 impose, depuis le début du mois de janvier, une limitation du principemême de l’installation. Désormais, les admissions à l’installation ne seront possibles qu’endessous du seuil de saturation, ce qui constitue une contrainte forte pour les professionnels.Un institut de recherche va être sollicité pour définir de nouveaux seuils basés sur des critèresplus « rationnels » et tenant compte du « besoin » en médecins. Leur application est prévuepour l’an 2003.

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La politique de régulation de l’accès au secteur hospitalier est étroitement liée auxcontraintes budgétaires pesant sur les hôpitaux et aux ratios de personnels, définis parl’association des hôpitaux allemands. Les récentes mesures de régulation dans le secteurambulatoire ont eu pour effet de rajeunir la structure par âge du personnel médical hospitalier.

I - La démographie médicale : état des lieux et outils de planification

1.1 État des lieux : de nombreux étudiants en médecine, une forte densité médicale etune croissance du chômage médical

1.1.1 Le nombre d'étudiants en médecine a augmenté régulièrement pour se stabiliserdepuis le début des années 90

Le rapport entre le nombre d’étudiants en médecine et le nombre d’habitants n’a cessé decroître entre 1970 et 1985, passant de 5 à 12 pour 10 000 habitants avant de se stabiliser,aujourd’hui, à environ 10 étudiants pour 10 000 habitants (ce qui représente environ 10 500étudiants admis chaque année, au niveau national, depuis 1992). Le taux de sélection desétudiants à l'entrée des études est d'environ 50 %.

Au niveau international, le nombre d’étudiants en médecine pour 10 000 habitants peut êtreencore plus élevé qu’en Allemagne comme en Autriche ou en Grèce, mais il peut aussi êtredeux à trois fois inférieures dans d’autres pays européens. Ainsi, au Royaume-Uni, le nombred’étudiants pour dix mille habitants est trois fois moins important qu’en Allemagne.

Tableau 1 : nombre d’étudiants inscrits aux six premières années de médecinepour 10 000 habitants en 1998

Pays Étudiants/10 000 habitantsAutriche 22,3

Grèce 11,8

Allemagne 10,2

Norvège 5,7

Finlande 5,3

France* 5,1

Royaume-Uni 3,3

Belgique 3,2

Danemark 1,9

Source : Statistisches Bundesamt

Le sexe ratio des étudiants en médecine est actuellement équilibré.Le nombre de médecins ayant obtenu leur diplôme est relativement constant depuis le

début des années 90. Dans les anciens Länder, en RFA avant la réunification, environ 9 800médecins sont diplômés chaque année. En ajoutant les nouveaux Länder, ce chiffre s’élève àenviron 11 300, ce qui correspond à peu près au nombre d'étudiants ad mis dix ans plus tôt.

*le chiffre français est estimé parles auteurs à partir d'un numerusclausus de 5 000 étudiants par anpour 60 millions d'habitants.

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1.1.2 La densité médicale en 1997 est l’une des plus élevées d’Europe

En 120 ans, la densité médicale a été multipliée par 10. Elle est passée de 3 110 à 290habitants par médecin.

En 1994, l'Allemagne était au septième rang mondial, en termes de densité médicale, aprèsl’Italie, l’Espagne, la Grèce, la Belgique, la Suisse et l’Autriche. En 1997, la densité médicaleen Allemagne la situait au deuxième rang mondial après l’Italie, ce qui traduit uneaugmentation rapide et importante.

Tableau 2 : nombre de médecins « exerçant »pour 100 000 habitants en 1997

Pays Nombre de médecins« exerçant » / 100 000 habitants

Italie 570Allemagne 464Espagne 428Grèce 396Belgique 378Autriche 360Suisse 321Suède 300Finlande 296Danemark 291France 282Pays-Bas 259USA 235Canada 217Irlande 211Royaume Uni 175

1.1.3 La répartition des médecins sur le marché de travail en 1998

Depuis 1945, le nombre de médecins actifs a triplé. En 1998, le nombre total de médecinsinscrits à l’ordre des médecins des Länder était de 357 700.

17

Figure 1 : le nombre de médecins en Allemagne sur le marché de travailet leur lieu d'exercice en 1998

Sources : Ordre fédéral des médecins et KV - 1998

On peut également noter une augmentation du nombre de femmes observe un

accroissement de nombre de femmes parmi le nombre total des médecins. En 1991, seulement35,6 % des médecins (et 33,6 % de ceux qui travaillaient) étaient des femmes. En 1998, lesfemmes représentent 38,7 % (et 36,4 % qui exercent).

1.1.4 Le rapport spécialistes/omnipraticiens s'est inversé au cours des trente dernièresannées

Le rapport spécialistes/omnipraticiens s’est inversé entre 1960 et 1997 pour atteindreenviron trois spécialistes pour deux omnipraticiens en 1997.

Tableau 3 : nombre et rapport des médecins spécialistespar rapport aux omnipraticiens exerçant entre 1960 et 1997

Année Total Spécialiste Omnipraticien1960* 79 350 32 382 (40,8%) 46 968 (59,2%)1980* 139 431 64 614 (46,3%) 74 817 (53,7%)1992 251 877 145 399 (57,7%) 88 656 (42,3%)1994 267 186 158 102 (59,2%) 90 224 (40,8%)1997 282 737 181 081 (64,0%) 101 656

(36,0%)

Chiffre en milliers

Secteurhospitalier

135.8

Autressecteurs

16.1

Administrationou corporation

10.5

Secteurambulatoire

124.6

Sans activitémédicale

70.7

Nombre total de médecins357.7

Médecinsfonctions

supérieures13.9

Médecinsprivés

4.1

Médecinsconventionnés

112.7

Médecinssalariés

7.8

Autresmédecins

121.9

Source : Ordre fédéral des médecins*seulement les anciens Länder de la RFA

18

1.1.5 La proportion de médecins parmi les professions de santé est très élevée enAllemagne

Sur le plan international, le rapport médecins/professions paramédicales est, depuis la finde la deuxième guerre mondiale (1952), plus important en Allemagne (1/2,6) qu’aux États-Unis (1/4,3) ou au Royaume-Uni (1/4,1). Ces différences se sont accentuées, malgré uneaugmentation des professions paramédicales en Allemagne. Ainsi, en 1988, le rapportmédecins/professions paramédicales a augmenté de 30 % en Allemagne contre 55 % auRoyaume-Uni et 110 % aux États-Unis 6.

Tableau 4 : les professionnels de santé à l’hôpital de 1991-1996en nombre

Les professions 1991 1995 1996Médecins 110 569 117 805 119 419Infirmiers 282 988 321 837 323 705Puéricultrices 39 667 41 006 41 845Aides-soignants 32 312 32 736 29 743Assistants médico-techniques

140 551 150 493 151 998

Sages-femmes 8 826 9 105 9 187Source : Statistisches Bundesamt

1.1.6 La proportion des médecins étrangers, environ 4 %, est à peu près équivalente àcelle de la France

En 1998, environ 13 386 médecins étrangers travaillaient en Allemagne, dont 44 % à l’hôpital et46 % en cabinet. Le nombre de médecins issus des pays de l’Union européenne tend à diminuer(27,3 % des médecins exerçant en Allemagne), alors que le nombre de médecins issus des autres paysde l’Europe (Pologne, Roumanie, Russie, Hongrie : 36,2 %) augmente. Environ deux tiers desmédecins étrangers viennent d’Europe, un quart d’Asie, 5 % d’Afrique et des États-Unis.

1.1.7 La population médicale est vieillissante en secteur ambulatoire et jeune à l'hôpital

Figure 2 : répartition des médecins dans le secteur ambulatoire et hospitalierau 31.12.1996 en Allemagne

Source : Ordre fédéral des médecins

À l’hôpital, les médecins âgés de 35 à 50 ans sont majoritaires. La plupart de ces médecinssont en formation spécialisée et n'ont pas fini leur cursus. Il en résulte que, dans les quinzeprochaines années, seulement 21 000 médecins hospitaliers vont atteindre l’âge de la retraite.

6 Source : in Marian Döhler : « Die Regulierung von Professionsgrenzen », page 45, 1997.

05

1015202530354045

Jusqu'à34 ans

de 35 à39 ans

de 40 à49 ans

de 50 à59 ans

de 60 à65 ans

plus de65 ans

âge

en %

Médecins en secteur ambulatoire

Médecins en secteur hospitalier

19

En secteur ambulatoire, la structure d’âge des médecins diffère significativement. 45 000médecins du secteur ambulatoire vont partir à la retraite au cours des quinze prochainesannées. 40 % des médecins installés en cabinet sont âgés de 50 à 65 ans.

1.1.8 Le nombre de demandeurs d'emploi en médecine augmente depuis quelquesannées et s’accentuera dans les années à venir

Auparavant, le chômage concernait uniquement les périodes transitoires de la vieprofessionnelle des médecins, comme le passage de l’AIP à la formation spécialisée ou lepassage des spécialistes nouvellement formés à un premier poste. Depuis 1994, le chômage delongue durée a cependant augmenté dans toutes les catégories de médecins (avec ou sansspécialités). Les femmes sont plus touchées que les hommes.

À l’avenir, si aucun changement de politique de régulation à l'installation n’intervient, letaux de chômage sera directement lié au nombre de médecin quittant le marché de travail pourdes départs à la retraite ou d’autres raisons. La structure d’âge des médecins est, en ce sens,significative. Jusqu’en 2001 et dans le cas où l’on tiendrait compte uniquement du facteurâge, 16 800 médecins partiront à la retraite, 53 800 nouveaux spécialistes vont arriver sur lemarché du travail et, pour 89 % d’entre eux qui devraient normalement exercer en cabinet ouà l’hôpital, seules 16 800 places seront disponibles à l'hôpital ou en ambulatoire. En 2001, lenombre de médecins demandeurs d'emploi devrait être de 31 000 en ambulatoire. On peutdonc s'attendre en 2001 à 31 000 médecins de plus en situation de demande d'emploi7.

Le taux de chômage des médecins est, toutefois, encore largement inférieur à la moyennenationale. Mais cette situation de sous-emploi est d’autant plus «regrettable », du point de vuedu ministère de la santé, que la formation des médecins coûte très chère. S’il regrette cetteévolution et devant l’impossibilité de réduire le nombre d’étudiants admis, il considère lechômage comme un risque personnel que l’étudiant prend en connaissance de cause, charge àlui de se trouver un travail à l’étranger ou dans des secteurs non traditionnels, comme parexemple dans l’industrie pharmaceutique.

1.2 Les outils de planification : diversité des modèles de projections utilisés selon lesacteurs concernés (l’association des médecins conventionnés - médecins de caisses - et lescaisses, d'une part, les chercheurs d’autres disciplines, d'autre part)

Les sources statistiques sont multiples. Les données statistiques sont recueillies chaque année, séparément, pour l’hôpital et pour

le secteur ambulatoire. Elles sont collectées par l’institut fédéral des statistiques, le« Statistisches Bundesamt ».

Les statistiques concernant les médecins en exercice, leur champ d’activité et leur

spécialisation sont publiées, chaque année, par les ordres des médecins. Les données sur lesautres professions du secteur de la santé sont estimées, sur la base d’une enquête annuelle parsondage et sont, donc, moins fiables.

7Flenker Ingo, Schwarzenau Michael Ärztliche Arbeitslosigkeit – Vom Fremdwort zum LangzeitproblemDeutsches Ärzteblatt 95, Heft 3, 16. Januar 1998, Köln.

20

On distingue deux types d'étude projective selon qu'ils s'intéressent au marché du travaildans le secteur de la santé ou à l'évolution des besoins de santé, à partir des évolutionsdémographiques de la population allemande.

1.2.1 - Les études projectives concernant le marché de travail

Elles sont effectuées par les caisses, en collaboration avec l'union fédérale des médecinsconventionnés (KBV).

Les indicateurs utilisés sont le nombre de médecins formés chaque année et le nombre depostes vacants :

- dans le secteur hospitalier, il correspond au nombre de sortants (départ à la retraite) oupostes nouvellement créés,

- dans le secteur ambulatoire, il est lié au nombre de zones de planification fermées, aunombre potentiel de médecins désirant s’installer dans un cabinet, au nombre de médecinsatteignant l’âge de la retraite (68 ans) ou encore aux réformes envisagées.

La conclusion de ces études dénonce une pléthore de médecins. Le nombre de candidatsadmis devrait rapidement diminuer, au risque de voir la situation actuelle empirer : on estimeaujourd’hui que les étudiants admis éprouveront beaucoup de difficultés à trouver une placesur le marché de travail.

1.2.2 Les études projectives concernant la démographie de la population allemande

Elles sont réalisées par les chercheurs en économie et sociologie de la santé. Lesindicateurs portent sur :

- l'évolution de la démographie de la population allemande,- l'augmentation de l’espérance de vie,- l'augmentation de la polymorbidité,- l'évolution des techniques médicales. Il résulte de ces études qu’à moyen ou à long terme, c’est-à-dire au cours des années 2020 -

2030, le besoin en médecins sera de nouveau très important. Il est donc nécessaire decontinuer à former le même nombre de médecins.

Ces deux positions sont actuellement discutées. Le ministère de la santé, garant de l’existence de la Sécurité sociale, se rapproche de la

première position, tandis que le ministère de l’éducation et des sciences, qui souhaitemaintenir le nombre d’universités ainsi que le niveau d’éducation, appuie davantage laseconde option.

21

II - La régulation de l’accès à la formation

On distingue, en Allemagne, la formation de base qui débouche sur le diplôme de médecinet la formation de spécialité qui concerne désormais tout médecin désirant pratiquer lamédecine. Le cursus est résumé dans le schéma ci-dessous. Nous avons choisi de présenterces deux étapes distinctement car elles mettent en jeu des acteurs et des processus derégulation différents.

Figure 3 : le cursus de formation médicale et ses différentes étapes

2.1 L’accès à la formation de base des médecins : une régulation déterminée par leprincipe d’accès pour tous à la formation médicale et par les capacités d’accueil desfacultés de médecine 2.1.1 Le cursus : de la formation de base jusqu'au diplôme d'état de docteur en médecine

La formation de base des médecins relève de la responsabilité de l’État fédéral, ce qui estune situation spécifique à la médecine.

Elle est réglementée, au niveau national, par la « loi sur la formation des médecins,Bundesärzteordnung » et la « réglementation fédérale des médecins, Approbationsordnungfür Ärzte » pour garantir la qualité et l’homogénéité de la formation. Le ministère fédéraldéfinit, alors, le contenu de la formation et prépare les examens.

Il y a 36 universités de médecine en Allemagne.

La formation médicale se déroule comme suit :

* période de stage – Arzt im Praktikum

ETUDIANT SPECIALISTEMEDECINAIP*

Formation de base

6 ans 3 à 6 ans1,5 ans

Formation de spécialiste

Examens d’ ETATExamens de

L’ORDRE DES MEDECINS

Diplôme d'Etat Diplôme de spécialiste

Formation en sous-spécialités

Formationcontinue

22

• une formation théorique poursuivie à l’université de médecine d’une durée d’au moinssix ans, complétée en dernière année par une formation pratique de 48 semaines dansdifférents hôpitaux.

• un stage de soins infirmiers d’une durée de deux mois, une formation de secourisme àeffectuer avant le début des études à l’université ou en dehors des heures d’enseignement.

La formation théorique se décompose, elle-même, en :

• une « formation de base » (Grundausbildung) regroupant différentes matières : physique,chimie, biologie, anatomie, psychologie et sociologie médicale. Elle est validée par unexamen permettant d’être admis en troisième année ;

• une « formation médicale » proprement dite de quatre ans avec des examens après lapremière, la troisième et la quatrième année. Elle vise à transmettre des savoirs cliniques etinclut, la dernière année, une formation pratique de 48 semaines, dont 16 semaines enchirurgie et 16 semaines en médecine. Les seize semaines restantes seront passées dans unautre domaine clinique, choisi par l’étudiant.

La réussite des trois examens mène au diplôme de médecine (diplôme d’État) reconnu danstous les pays de l’Union européenne.Ce diplôme permet un mode d’exercice restreint de la médecine sous le titre de « médecinstagiaire » (Arzt im Praktikum-AI). C’est seulement après 18 mois de « stage », que lestagiaire devient médecin en Allemagne.Ce stage « AIP » s’effectue soit à l’hôpital, soit dans un cabinet, soit dans un hôpital militaire,dans une prison ou encore dans une autre institution, mais il doit comporter une duréeminimum de 9 mois en secteur non opératoire et de 6 mois en service opératoire. Après ces 18mois et sous réserve de remplir certaines conditions (nationalité allemande ou appartenance àun pays européen ou apatride, capacités physiques et personnelles), le stagiaire acquiert« l’approbation »qui correspond à l’autorisation d’exercer sa profession de médecin.Au cours de la phase AIP, le médecin perçoit une rémunération mensuelle de 2 004,35 DM(chiffre de 1996) pour un temps de travail hebdomadaire de 38,5 heures. Cependant, ce tempsthéorique est souvent dépassé.Pour les candidats d’un pays tiers, la possibilité d’acquérir cette « approbation » est trèslimitée. L’approbation est délivrée par les autorités sanitaires des différents Länder. Ellepermet de s’inscrire dans une formation spécialisée de généraliste ou autre.En pratique, le diplôme de médecine ne permet pas d’exercer en médecineconventionnée en Allemagne.

2.1.2 Les critères d’admission des étudiants en médecine ne sont pas spécifiques à cetteformation

Comme pour tout étudiant qui souhaite s'inscrire à l'université après la réussite dubaccalauréat, le candidat aux études de médecine doit adresser son choix et les notes obtenuesau bac (Abitur) auprès de l'organisme fédéral chargé de répartir les étudiants, en fonction deleurs résultats, les places disponibles et leurs souhaits.

Les étudiants en médecine sont recrutés selon trois critères principaux.

23

a) la moyenne au baccalauréat

Soixante pour cent des places disponibles en université sont attribués par l'organismefédéral aux étudiants qui se présentent, chaque année, en fonction de leur moyenne aubaccalauréat.En effet, afin de garantir un système d’admission égalitaire (l’appréciation et la notation dubaccalauréat sont de la responsabilité de chaque Land et peut, de ce fait, présenter desinégalités au niveau fédéral). Un institut central (ZVS : Zentralstelle für die Vergabe vonStudienplätzen) répartit le nombre de places selon les Länder (16), définissant ainsi, pourchacun d’eux, un quota de personnes admissibles.

Le premier critère de sélection est la note obtenue au baccalauréat. Dans le cas où plusieursétudiants obtiendraient la même moyenne, d’autres critères sont étudiés, par ordred’importance :

- le temps d’attente d’une place en médecine,- le fait d’avoir fait ou non un « service », c’est-à-dire le service militaire ou civil, une

année de bénévolat dans un service social ou écologique, deux ans de travail dans uneassociation humanitaire, le soin d’un enfant ou avoir suivi une formation professionnelle,

- en dernier lieu, les étudiants sont départagés par tirage au sort.Les candidats sont classés et l’institut central pour la distribution des places en université(ZVS) sélectionne les candidats en fonction de ce classement, jusqu’à ce que les quotas parLänder soient complètement épuisés.

b) un quota en fonction du temps d’attente

Au niveau fédéral, plus de 20 % des places sont attribuées uniquement en fonction dutemps d’attente. Ce temps d’attente est fonction du nombre de semestres passés après laréussite du baccalauréat. Si plusieurs candidats ont le même « temps d’attente », l’institut seréfère, en premier lieu, à la moyenne obtenue au baccalauréat, puis aux services effectués etenfin, si nécessaire, il les départage par tirage au sort8.

c) une sélection directe à l’université par entretienLes universités de médecine ont le droit de choisir elles-mêmes 15 % de leurs étudiants.

Cette sélection se fait, principalement, sur entretien, la moyenne obtenue et le temps d'attentejouent un rôle mineur.

2.1.3 La distribution des candidats par région et par université se fait au niveau central

Après avoir déterminé les personnes admissibles, la « ZVS » affecte à chaque cand idat unlieu d’étude, en fonction de ses souhaits. Lorsqu’il y a plus de candidats que de placesdisponibles dans une université, d’autres critères entrent en jeu :

- les handicapés lourds sont prioritaires,- puis viennent les personnes mariées ou les candidats ayant un ou plusieurs enfants à

charge et qui veulent étudier à l’université la plus proche,- les personnes ayant des « liens » très importants avec la ville choisie,- enfin, celles qui vivent chez leurs parents, près de l’université.

8 Il n'y a pas de limitation du temps d'attente mais le candidat doit se présenter chaque semestre pour que sontemps d'attente soit comptabilisé.

24

2.1.4 Les étudiants étrangers sont soumis en majorité aux mêmes règles que les étudiantsallemands

Environ un dixième des étudiants admis en première année de médecine sont des étrangers.Les citoyens des pays de la Communauté européenne sont soumis aux mêmes procéduresd’admission que les candidats allemands. Ils doivent donc s’adresser directement à la « ZVS ».Il en est de même pour les enfants de ressortissants des pays de l’Union européenne, et pourceux qui n’en sont pas membres, si ces personnes ont travaillé ou travaillent en Allemagne.C’est, notamment, le cas pour les étudiants d’Islande, du Liechtenstein et de la Norvège.

Une des conditions d’admission à l’université est la maîtrise de la langue allemande.Tous les autres étrangers doivent se présenter directement à l’université de leur choix.

2.1.5 Un nouveau modèle de formation médicale mis en place depuis 1999

Depuis 1996-1997, un nouveau modèle de formation médicale a été mis en place dans lafaculté de médecine de Berlin. Il vise à améliorer qualitativement les études de médecine. Le succès de ce nouveau modèle a conduit à introduire une nouvelle clause dans laréglementation sur les études de médecine, permettant à d’autres universités de participer à ceprojet pilote. Les universités peuvent réorganiser le déroulement et, en partie, le contenu desétudes médicales.

Les bases de ce nouveau modèle sont : - un plus grand nombre de candidats sélectionnés directement par les universités, - un contact avec les patients dès la première année d’étude, - des stages médico-sociaux préalables aux études,- un travail en petits groupes,- un apprentissage orienté sur la résolution de problèmes.

2.1.6 La régulation de l’accès à la formation des médecins : une contradictionconstitutionnelle qui n’a pas encore été résolue

Les tentatives de régulation à ce premier niveau de la démographie médicale, par unelimitation plus forte de l'accès en faculté de médecine, n’ont jamais abouti en Allemagne carelles se heurtent à différents droits garantis par la loi fondamentale, en particulier, celui de laliberté du choix de sa profession, définie dans l’article 12 (freie Berufswahl).

La loi concernant les capacités d’accueil des universités (Kapazitätsrecht) découleégalement de cet article. D’après cette loi, l’accès à l’université ne doit être restreint qu’en casd’épuisement des possibilités de formation, créées et financées par des fonds nationaux. Elledoit aussi garantir une chance d’accès pour chacun grâce à une sélection et une distributiondes places en fonction de critères fiables tels qu'ils ont été présentés aux points 2.1.3. et 2.1.4.Ainsi, des règlements communs aux Länder (Kapazitätsverordnungen) définissent lesprocédés permettant d’identifier la capacité d’accueil et le nombre d’étudiants admissiblesdans chaque université.

25

Cette loi qui oblige l'État à financer la formation de médecins dans les facultés demédecine (art. 12) rencontre beaucoup de critiques de la part des universités de médecine etdu conseil de l’ordre des médecins car elle impose d’épuiser les capacités d’accueil ce quifreine les possibilités de limiter l’accès aux études de médecine.

Cette question est l’objet d’un véritable débat constitutionnel.

En termes de droit constitutionnel, le principe du droit à la liberté du choix de sa professionest en opposition avec un autre droit fondamental, celui de la garantie d'une Sécurité socialepour chacun (accès aux soins pour tous) selon le principe de « l’État social » (Sozialstaat).

Figure 4 : les acteurs institutionnels et les textes en jeu dans le débatsur la régulation à l'entrée des études

Des études menées en Allemagne montrent que les dépenses de la Sécurité sociale sont

influencées par l’offre en médecins9 (l’offre induisant la demande en consultation demédecins et en soins médicaux). Une réduction de l’accès aux études de médecine pourraitalors s’imposer. Cependant pour qu’un droit prévale sur l’autre, des arguments forts doivent

9 Ces études ont été utilisées pour justifier les mesures prises par la loi de Seehofer 1993 : « Begründung zumGSG, BT Drs : 12/3608 S.98 »; « Begründung des Gesetzentwurfs eines Gesetzes zur Reform der gesetzlichenKrankenversicherung ab dem Jahr 2000, Drs. 14/1245 zu §101 SGB V, S. 79)

« Etat Social »Droit à une Sécurité Sociale

pour tous ( stabilité des

contributions sociales)

Droit du « libre

accès aux études

de son choix »

Droit à une «offre » en places

dans les universités de

médecine de par la « loi sur les

capacités d’accueil en faculté

de médecine »

Art. 12 Art. 74/76

Ministère de la

santé

Ordre fédéral

des médecins

Garant de la qualité

de la formation

médicale et des

médecins

Ministère de l’éducation

des différents Länder

Ministère de la santé des

différents Länder

NIVEAU FEDERAL

NIVEAU DES LÄNDER

La loi fondamentale (GG)

Tribunal constitutionnel de

la République fédérale

26

être avancés. Il faut par exemple apporter la preuve que l’emploi d’autres mesures ne suffiraitpas à éviter une «menace » de la Sécurité sociale.

Pour l’instant et malgré la pléthore des médecins, l’État est peu intervenu à ce niveau derégulation et le ministère de la santé reste réservé quant à l’éventualité d’une telle évolution.

Pourtant, les effets de cette régulation, si elle était mise en place, ne pourraient êtreressentis sur le marché du travail qu’à moyen terme, après plusieurs années (6 ans environ),correspondant à la durée des études de médecine.

Les médecins, pour leur part, estiment qu’une limitation du nombre d’étudiants en

médecine est indispensable pour réaliser les réformes annoncées dans la nouvelle loi sur laformation de base (Approbationsordnung). Celle-ci vise à améliorer la qualité des études enrenforçant le travail en petits groupes au lit du patient et surtout en mettant davantage l’accentsur la formation pratique en général. Cette modification pédagogique impose d’adapter lenombre de places offertes en faculté de médecine ce qui correspondrait à une diminution de25 % par rapport au nombre de places actuelles. Elle se traduirait donc par un changement descritères définissant la capacité d’accueil des universités.

Cependant les ministères de la culture et de l’éducation des Länder10 - Kultusministeriumse sont opposés à cette réduction.

L’ordre fédéral des médecins a jugé ce refus comme «irresponsable », et fait valoir le fait

que la liberté de choix des études ne devrait pas engendrer une inflation d’examens cliniquessur un même patient dans les hôpitaux universitaires.

2.2 La formation et l’accès aux spécialités 2.2.1 L’ordre des médecins est responsable de la formation des spécialistes

L’organisation de la formation des médecins spécialistes relève de la responsabilité del’ordre fédéral des médecins allemands (Bundesärztekammer). Il définit le contenu, la durée,les objectifs de la formation et les titres des spécialités médicales. Il représente une personnemorale de droit public et doit donc se soumettre à un cadre juridique érigé par l’État.

À l’intérieur de ce cadre, il dispose d’un pouvoir décisionnel, mais reste néanmoins sous lecontrôle de l’État par le biais de ses services juridiques, aussi bien au niveau de chaqueministère des Länder, qu’au niveau du ministère fédéral de la santé.

L’ordre fédéral des médecins allemands défend les intérêts professionnels de tous lesmédecins exerçant en Allemagne. Il représente l’Union des dix-sept ordres de médecins desLänder. Chaque médecin doit s’inscrire dans l’ordre du Land où il demeure : qu’il travailledans un cabinet privé, à l’hôpital, dans les cliniques, dans l’industrie pharmaceutique ou qu’iln’exerce pas.

L’ordre fédéral des médecins est responsable :- du code de déontologie et de l’ordre des médecins,

10 Il y a trois secteurs dans lesquels la souveraineté des Länder reste à peu près absolue : la culture, l’éducationet l’enseignement. Il n’y a pas de ministère fédéral de l’Éducation et les tentatives de coordination des systèmesd’enseignement sont faites par les Länder eux-mêmes. C’est seulement au niveau du contenu de la formation enmédecine que le ministère de la santé fédéral a un mot à dire.

27

- des formations continues et complémentaires,- de l’assurance de la qualité des soins,- des prestations vieillesse des médecins retraités,- du barème des honoraires des médecins.

Cependant, l’ordre fédéral des médecins n’est pas hiérarchiquement supérieur aux ordresdes Länder. Il établit, par exemple, des directives et exerce un contrôle juridique sur les ordresdes différents Länder. Mais ces derniers peuvent décider de suivre ou non cesrecommandations.

Ils conservent un contrôle direct sur la formation spécialisée (c’est-à-dire celle qui a lieuaprès l’approbation) et l’exercice de la profession médicale. Ils tiennent aussi un registre desmédecins et exercent un pouvoir disciplinaire sur eux. Ils disposent, donc, d’une autonomiedans un cadre juridique défini.

Par ailleurs, les directives de l’ordre fédéral des médecins ne peuvent être mises enapplication que si les ordres des médecins des Länder les approuvent. En général, laformation spécialisée est réglementée de façon homogène dans les différents Länder, mais desdisparités existent. Par exemple, la médecine du sport est considérée, dans la plupart desLänder, comme une formation continue alors qu’elle se limite, pour d’autres, à une formationcomplémentaire de courte durée (qu’il est possible de suivre après une formation continue).Ceci restreint les possibilités d’exercice et soulève des problèmes de reconnaissance danscertains Länder. 2.2.2 Le cursus de la formation continue : un cadre unique pour les différentesspécialisations dans lequel est incluse la médecine générale

Actuellement, il existe 41 spécialités de médecine (annexe 1). La formation continue dure en moyenne entre 4 et 6 ans en fonction des spécialités.

À l’occasion de la dernière « journée nationale des médecins allemands » (DeutscherÄrztetag), une discussion portant sur le nombre de spécialités (Facharztrichtungen), futengagée. Leur nombre important les rend, effectivement, peu lisibles pour le public.Désormais, la réflexion de l’ordre des médecins se tourne vers une « dérégulation » de laformation des spécialistes, c’est-à-dire vers une redéfinition des différentes spécialités.

Pour ce faire, l’ordre des médecins doit s’assurer, dans un premier temps, de :- l’exactitude des appellations des spécialités,- l’intégration dans les règlements de formation, suivant les spécialités, de nouveaux

contenus et des formations auparavant facultatives et/ou la fusion de certaines spécialités,- enfin, des champs de compétence de chaque spécialité qui doivent être redéfinis.

Face à ce souhait de simplification, l’ordre des médecins cherche aussi à évaluer le risquede perdre la différenciation nécessaire à toute formation conduisant les médecins à l’exerciced’une spécialité de qualité : en regroupant des spécialités, une partie du contenu et de laqualité de la formation risque d’être perdue.

Par conséquent, les critères pour le maintien ou la création de nouvelles spécialités sontessentiellement :

- leur importance pour la prise en charge médicale de la population,

28

- leur compatibilité avec les directives européennes,- l’offre en lieux de formation. Ces questions de contenu de la formation continue relèvent clairement de la responsabilité

de l’ordre fédéral des médecins allemands.

Les formations complémentaires dans une sous-spécialité

Les sous-spécialités font l’objet d’une formation complémentaire et donnent le droit deporter un titre supplémentaire. Elles (exemple, la gastro-entérologie ou l’endocrinologie)correspondent à des savoirs, expériences, capacités particulières consolidés à l’intérieured’une spécialisation. Ces savoirs ou ces expériences sont exclusivement réservés aux titulairesdes sous-spécialités. Les titulaires des sous-spécialités doivent exercer (mais pasexclusivement) dans celles-ci, s'ils souhaitent afficher le titre correspondant.

Il faut souligner qu’un certain nombre de branches de la médecine interne, qui sontconsidérées dans d’autres pays comme des spécialités à part (endocrinologie, gastro-entérologie, hématologie, néphrologie, rhumatologie) sont, en Allemagne, des sous-spécialités. 2.2.3 L’accès à la formation des médecins spécialistes est limité par l'offre de formation

Il n’existe pas de mécanismes de régulation administratifs, ni quantitatifs, ni qualitatifsexplicites (directs) de l’accès à la formation des spécialistes. Mais les lieux de formationdisponibles sont largement inférieurs à la demande de spécialisation des jeunes médecins. Larégulation repose donc, principalement, sur un mécanisme de marché où la concurrence entreles candidats est forte.

La formation spécialisée ne comprend pas de programme de formation dans les universités,mais essentiellement une formation pratique, en tant que « médecin assistant » (Assistenzarzt). Elle est donc conditionnée par l’obtention de stages dans les hôpitaux ou chez les médecins« agréés ». L’accès à une spécialisation dépend, alors, d’une démarche personnelle et n’estplus garanti par l’État (le ministère de l’Éducation). Étant donné les restrictions de l’accès à lamédecine conventionnée ambulatoire et la politique de réduction des dépenses de la Sécuritésociale des dernières années, les places de formation deviennent de plus en plus rares(seulement environ 50 % des demandes peuvent être satisfaites). Les médecins occupant unposte dans un hôpital y restent et de nouvelles places ne sont plus financées. Il est difficile decouvrir l’ensemble des activités requises dans un seul et même hôpital, étant donné le peu deplaces disponibles. Les étudiants en cours de spécialisation sont donc dans l'obligation derechercher ; eux-mêmes, les lieux de formation nécessaires. L’accréditation des lieux de stages est réalisée par les ministères des différents Länder et estfonction de différents critères définis à l'échelon fédéral, comme le nombre de lits dans leshôpitaux et la présence de médecins (par exemple, de chefs de cliniques) agréés par l’ordredes médecins pour former les futurs spécialistes. Un hôpital peut se voir attribuer uneautorisation totale pour toute la durée de la formation pour une spécialité donnée (commec’est le plus souvent le cas pour les hôpitaux universitaires) ou une autorisation partielle (ex :deux ans pour les petits hôpitaux qui sont moins bien équipés). Ce dernier cas est de plus enplus fréquent et le médecin doit donc rechercher plusieurs lieux d’accueil pour poursuivre saformation et satisfaire aux exigences de l’ordre des médecins. Cette problématique a suscité une réflexion sur les possibilités de regrouper les hôpitaux, dansun but de complémentarité et afin d’offrir une formation complète aux médecins. Ce projet

29

étant encore loin d’être mis en application, les médecins partent souvent à l’étranger (Suisse,Autriche, France) pour compléter leur formation. Il est aussi fréquent que deux médecins separtagent un poste de formation spécialisée. Ils perçoivent donc un salaire minoré maistravaillent, en réalité, à temps plein à l’hôpital. Ces heures « supplémentaires » ne sontpourtant pas comptabilisées au niveau de leur formation. Certains médecins en arrivent mêmeà exercer « bénévolement » leur travail afin de pouvoir finir leur formation.

Le salaire mensuel moyen des médecins en cours de spécialisation est de 2 283,87 DMavec un supplément par mois de 106,70 DM et des congés payés d’une valeur de 500 DM.Les heures supplémentaires sont payées 13,77 DM la première année et 15,69 DM ladeuxième année11.

Le temps de travail légal en Allemagne varie selon les Länder : dans les nouveaux Länder,il est de 40 heures et de 38,5 heures dans les anciens. En outre, les médecins s’engagent àassurer des gardes d’urgence et font donc des heures supplémentaires. Ainsi, le nombred’heures de travail par semaine peut aller jusqu’à 60 heures. 2.2.4 Le principe de quantification des actes : un critère de spécialisation qui est au cœurd’un débat entre qualité de formation et limitation du nombre de médecins

La plupart des jeunes médecins désirent exercer dans un cabinet privé. Or, pour êtreconventionné, une spécialisation est exigée depuis 1993. Des lignes directives définissent lesconnaissances qu’un médecin doit avoir, notamment la nature et le nombre d’actes etd’examens qu’il doit avoir réalisés pendant sa formation. Pour s’inscrire à l’examen final desa spécialisation, il doit prouver aussi bien le contenu quantitatif que qualitatif de sa formation(par exemple: x IRM, y scanner, z cathéters centraux...).

Le critère de « masse critique » d'actes à réaliser pour obtenir le titre de spécialiste est très

critiqué par l’ordre et par les étudiants. Il induirait une inflation d’actes non justifiés parl'intérêt du patient. Aujourd'hui, l’Ordre fédéral des médecins est en faveur d'une diminution,voire d'une suppression, de la notion de masse critique. L'association des médecins conventionnés (KV), à l'inverse, attribue beaucoup d’importance àla notion de « masse critique » comme garantie de la compétence du médecin. La « KV » a défini dans des lignes directrices de qualité (Qualitätsbeurteilungsrichtlinien) lesvolumes d'actes que doit avoir effectué un médecin spécialisé pour être conventionné. Ainsi,pour pouvoir réclamer la rémunération de certains actes comme des traitements ou examensparticuliers, qui requièrent des connaissances et des expériences spécifiques, le médecin doitprouver qu’il remplit les conditions requises, c’est-à-dire qu’il a déjà effectué un certainnombre de ces actes. Les exigences, en nombre, de la KV sont parfois supérieures à celles del’ordre des médecins.

Au-delà de l'accès à la médecine conventionnée, la KV souhaite étendre le principe de« masse critique » au contrôle continu de la qualité et de la compétence des médecins. L’idéeest de quantifier les examens complémentaires et les opérations spécifiques réalisés chaqueannée afin de s’assurer de la continuité de ces pratiques. Dans le cas contraire, le médecinpourrait se voir retirer l’autorisation d’exercer celle-ci. Une telle mesure pourrait avoir des

11 chiffres du 30.4.96 ; source: Médecine and Medical Education in Europe, Gunther Eysenbach, éditionThieme, 1998, Stuttgart.

30

conséquences assez « dangereuses, voire perverses » selon l’ordre des médecins. Ainsi uncardiologue pourrait être incité à «produire » plus d’opérations et d’examens que nécessaire.

Au-delà de la garantie de qualité, le succès de la notion de masse critique auprès de la KVpeut s'expliquer par le fait qu'elle constitue un moyen de limiter la concurrence sur le secteurambulatoire. Les médecins conventionnés ont, en effet, peu d’intérêt à voir s’accroître lenombre de nouveaux médecins, avec lesquels ils devraient partager l’enveloppe budgétaire. On observe, donc, un conflit d’intérêt entre l’ordre des médecins et la KV, cette dernières’estimant de plus en plus « responsable » de l’accréditation des médecins spécialistes, à telpoint qu'en cas de suppression du critère de quantification des actes par l’ordre, la « KV »pourrait créer sa propre instance d’accréditation des nouveaux spécialistes désirant exercer enmédecine conventionnée ambulatoire.

Une telle évolution diviserait les médecins hospitaliers et les médecins du secteur

ambulatoire conventionné puisqu'ils ne seraient plus soumis aux mêmes critères dequalification. Pour le moment, la quantification des actes nécessaires pour obtenir le diplômede spécialiste reste en vigueur... 2.2.5 La médecine générale voit son champ d'activité précisé comme médecine defamille, spécialité à part entière

La médecine ambulatoire conventionnée est divisée en deux secteurs distincts :

• la médecine de famille (Hausärztliche Versorgung),

• la médecine spécialisée (Fachärztliche Versorgung).

D'après le « Sozialgesetzbuch » (l'équivalent du code social français), le « médecin defamille » joue un rôle primordial dans la réalisation des soins de santé primaire. Il estresponsable, entre autres, du suivi de ses patients et doit tenir compte de leur environnementsocial et familial, de la coordination des soins et des actions thérapeutiques, de l’évaluation etde la collecte des résultats des examens complémentaires, ainsi que des soins préventifs et derééducation.

31

Figure 5 : la régulation de l’accès à la médecine de famille et à la médecinespécialisée

en termes de formation et de possibilités d’exercice avant 1993

Jusqu’en 1992 (figure 5), tous les médecins « non spécialisés » (ohne Gebietsbezeichnung)et les médecins omnipraticiens, les pédiatres et les internistes pouvaient exercer en tant quemédecin de famille.

Pour les médecins non spécialisés, l’unique condition pour accéder à la médecineconventionnée en tant que médecin de famille et sous le titre de « médecin praticien » était desuivre un stage de préparation de 6 mois à la suite de la période « AIP » (1,5 ans après lediplôme d’État). Les deux années de formation ainsi réalisées, après les six premières annéesd'études de médecine essentiellement théoriques, étaient souvent jugées comme insuffisantespour exercer seul dans son propre cabinet, d’autant qu’il n’existait pas de limitation du champde compétence et d’activité du médecin de famille. Depuis 1987, le conseil de l'ordre a choiside restreindre le champ de compétence et d'activité de ces médecins praticiens.

La formation en médecine omnipraticienne (Allgemeinmedizin), jusqu'en 1992, duraitquatre ans, après l’obtention du diplôme de médecin « AIP ». Malgré la rémunération plusélevée qu'elle offrait, peu de médecins choisissaient cette spécialité car les possibilités destage offertes par les hôpitaux étaient insuffisantes. En pratique, les patients faisaient peu dedifférences entre un « Hausarzt omnipraticien » et un « Hausarzt médecin praticien ».

FORMATION DE BASE

FORMATION SPECIALISEE

6 mois 4 ans 6 ans

MédecinPraticien

(90%)

MédecinOmnipraticien

(10%)

Médecininterniste ou

pédiatre

Médecin de famille Médecin spécialiste

40% 60%

6 ans

1 ½ ans

Avant 1993

FORMATION NON-SPECIALISEE

AIPArzt im Praktikum

32

La formation des internistes sans sous-spécialité, d’une durée de 6 ans, permettaitd’exercer à la fois en tant que médecin de famille et interniste (en qualité de spécialiste,l'interniste peut en effet pratiquer les actes réservés aux spécialistes).

En 1993, la loi GSG (Gesundheitsstrukturgesetz) a rendu obligatoire la formation enmédecine omnipraticienne pour tout médecin choisissant ce champ d’activité. Le titre demédecin omnipraticien (Allgemeinarzt) était alors obtenu à la fin d'une formation pratique detrois ans, comprenant une formation théorique de 250 heures. Elle conditionne l’accès à lamédecine conventionnée. Par conséquent, la formation de médecin praticien (médecin sansspécialité) disparut.

Dans la même période, le champ professionnel de la médecine de famille (actes, examens

et prescriptions) a été réduit et redéfini dans les contrats passés entre les caisses et l’unionfédérale des médecins conventionnés (KBV). Cette délimitation du domaine d’activité de la médecine de famille fut accompagnée del'obligation, pour les internistes et les pédiatres, de choisir à partir de 1996, dans le cadre del'exercice conventionné, leur mode d’exercice, soit en tant que médecin de famille, soit en tantque pédiatre ou interniste.

Figure 6 : la régulation de l’accès à la médecine de famille et à la médecine spécialisée en termes de formation et de possibilités d’exercice depuis 1993

FORMATION SPECIALISEE

3 ans5 ans *

6 ans

MédecinOmnipraticien

MédecinInterniste ou

pédiatre

Médecin de famille Médecin spécialiste

ou

* Depuis 1999

Depuis 1996

33

En 1999, la durée de formation des spécialistes en médecine omnipraticienne a été portée àcinq ans. Le but n’est pas d’élargir son champ d’action, mais seulement d’accroître son champde connaissance. La loi 2000 veut attribuer, à ce nouveau médecin omnipraticien, unenouvelle fonction et prévoit, qu’à partir de 2006, seuls les médecins formés par cette voiepourront prétendre au titre de médecin de famille (Hausarzt). Figure 7 : la régulation de l’accès à la médecine de famille et à la médecine spécialisée

en termes de formation et de possibilités d’exercice à partir de 2006

Jusqu’à présent, les patients choisissent librement leur médecin : médecin de famille ouspécialiste. Le principe instauré en 1989 selon lequel l’accès aux spécialistes n’est possibleque sur prescription du médecin de famille (Hausarzt) n’est pas appliqué 12. En théorie, lespatients ne peuvent cependant pas changer de médecin pour une durée minimum de troismois. Aujourd’hui, les nouveaux médecins omnipraticiens sont formés dans la perspective d'exercerune fonction de « gate-keepers », en référence au modèle danois. Ce système introduirait uneincitation financière pour les patients, afin qu’ils consultent en premier lieu les médecins defamille qui les orienteraient, si nécessaire, vers un spécialiste, certaines spécialités comme lagynécologie resteraient directement accessibles. Ainsi, la loi esquisse un modèle proche del'expérience du médecin référent en France. L’objectif est d’éviter un « doctor hopping13 » etde réduire les coûts de la Sécurité sociale par un renforcement de la position du médecinomnipraticien, qui utilisera des moyens diagnostiques moins sophistiqués, donc parconséquent moins coûteux14. La loi 2000 offre la possibilité pour les caisses de proposer à

12 Information médicale et régulation de la médecine générale : une approche comparative - rapport d'étude -groupe Image ENSP - Janvier 1997. 13 Équivalent du nomadisme médical. 14 Il faut en effet rappeler que les médecins spécialistes en ville ont un équipement technologique très développé(scanner, cathétérisme, laboratoire d'analyse) et réalisent beaucoup d'actes en ambulatoire qui en France sontréalisés à l'hôpital soit en hospitalisation de jour soit en ambulatoire.

À partir de 2006 FORMATION SPÉCIALISÉE

5 ans 6 ans

MédecinOmnipraticien

Médecininterniste ou

pédiatre

Médecin de famille Médecin spécialiste

34

leurs clients cette nouvelle « formule ». Cette loi a été votée par le Bundestag15, puis par leBundesrat 16à la fin de l'année 1999.

Pour le conseil de l’ordre des médecins, une restriction (concentration) exclusive de lamédecine de famille sur les omnipraticiens pourrait signifier la fin de cette activité et cecipour différentes raisons. D'une part, les candidats à la médecine générale risquent d'être découragés par la longueur dela formation (cinq ans au lieu de trois ans) et les fortes difficultés à trouver des stagesformateurs à l’hôpital (deux années obligatoires), par la limitation importante du champd'activité et une rémunération qui reste inférieure à celle des spécialistes. Ces dernierspourraient être attirés par la spécialité de médecine interne (6 ans de formation) mieuxrémunérée, au champ d'activité plus large et dont les modes d'exercice comme de formation17

sont plus diversifiés. S’il est, en effet, possible d'exercer en ville ou à l'hôpital cette spécialité,la médecine omnipraticienne est, elle, limitée dans son exercice, au secteur ambulatoire. Cephénomène est d'ailleurs constaté depuis 1993. Le manque d'intérêt des jeunes médecins pourla médecine omnipraticienne est préoccupant puisqu'on estime le besoin de remplacement desmédecins omnipraticiens à environ 10 % au cours des prochaines années, en raison duvieillissement de cette catégorie de professionnels (départs à la retraite). D’autre part (et surtout), les débats publics semblent montrer que le système de médecinréférent est très mal perçu par la population, qui ne voit pas l’intérêt de consulter un médecinde famille dans le seul but d’être réadressé à un autre médecin (ex : quelqu’un qui a mal auxoreilles va directement chez le médecin ORL, ce qui est plus rapide). L’acceptation par lapopulation d’un tel changement semble peu probable. Le conseil de l’ordre estime donc leschances pour cette profession plutôt faible.

En 1997, conscientes du problème d'accès à la formation et sous la pression du conseil del'ordre de fédéral, les Caisses ont accordé une aide financière pendant deux ans pour assurer leprogramme de formation des nouveaux médecins omnipraticiens. Cette aide est constituéed'une dotation mensuelle de 2 000 DM pour chaque candidat se présentant à l'hôpital ou encabinet, pour être formé en médecine omnipraticienne. Ainsi, le ministère fédéral de la santés'est donné comme objectif d'inverser le rapport médecins généralistes/médecins internistes18

au sein de la médecine de famille. Aujourd’hui, en médecine de famille (Hausarzt), il y a troismédecins internistes pour deux médecins omnipraticiens (40/60 pour 100). Plusieurs enquêtes, réalisées dans les hôpitaux et auprès de médecins installés en ville, ontdémontré l’impact positif de cette mesure sur la création de nouvelles places de formation.

15 Les représentants du Bundestag sont élus pour une durée de 4 ans proportionnellement à leur populationrespectives et à la répartition des forces politiques au sein de chaque Land. 16 Les gouvernements des Länder participent au pouvoir législatif au Bundesrat qui est composé dereprésentants de membres de leur gouvernement. On distingue 2 catégories de lois en Allemagne : celles quin’ont pas d’incidences sur la vie des Länder et pour lesquelles le Bundestag a le dernier mot, et celles quidoivent nécessairement recevoir l’accord du Bundesrat. La loi 2000 dans sa forme actuelle, après plus d’un ande débat suivi de compromis, ne nécessite plus l’approbation du Bundesrat pour être appliquée. 16 La médecine interne regroupe en Allemagne la plupart des spécialités médicales françaises (annexe). 17 Les hôpitaux sont en effet plus enclin à former de futurs internistes qu'ils pourront recruter par la suite. 18 La médecine interne regroupe en Allemagne la plupart des spécialités médicales françaises sous forme desous-spécialités (annexes).

35

2.2.6 La formation continue des médecins : une exigence « déontologique » définie par lecode professionnel mais qui ne fait pas l'objet de contrôles

Le code professionnel des médecins précise que :• le médecin praticien est tenu de renouveler son savoir médical et de s’informer desderniers progrès réalisés dans son champ d’application ;• les méthodes appropriées d’une formation permanente sont :

- la participation à des programmes spécifiques de formation continue (congrès,séminaires, cours, colloques…),

- l’étude de la littérature professionnelle,- l’utilisation de techniques audiovisuelles et d’outils d’apprentissage ;

• le médecin doit s’assurer que la formation continue suivie suffit à l’exercice de saprofession ;• le médecin doit pouvoir prouver qu’il a répondu aux opportunités de formation continue

proposées.

Cependant, il n’existe pas d’organisme chargé du suivi et du respect de ces règles. Pour lemoment, les médecins n’encourent pas de sanction s’ils ne respectent pas ces règles.

III La régulation du marché du travail : des restrictions conditionnées parl’obligation de financement du système de soins

Les modalités de régulation de l'entrée sur le marché du travail, pour les médecins, sonttrès différentes entre médecine ambulatoire et médecine hospitalière.

3.1 La régulation de l’accès au secteur ambulatoire

On distingue deux secteurs d’activité en médecine ambulatoire.

le secteur non conventionné

Aucun mécanisme de régulation ne limite l’installation des médecins en cabinet privé.Cependant, toutes les prestations ne sont prises en charge par l’assurance maladie légale quesi elles sont délivrées ou prescrites par des médecins conventionnés. En dehors des situationsd’exception (urgence), si le patient consulte un médecin non conventionné, il devra prendretotalement en charge les dépenses occasionnées par la consultation (y compris lesprescriptions). 7 % des médecins travaillant dans le secteur ambulatoire ne sont pasconventionnés.

le secteur conventionné

93 % des médecins sont conventionnés. Leurs soins sont remboursés par le système légald’assurance maladie. Il existe 3 niveaux de régulation de l’activité médicale conventionnée :au niveau de l'installation des médecins, au niveau de l'activité médicale et au niveau deshonoraires par enveloppe globale. Nous aborderons principalement le niveau de la limitationde l'installation.

36

3.1.1 La régulation de l’accès au secteur de la médecine conventionnée ambulatoire : leniveau principal de régulation en Allemagne

3.1.1.1 Une histoire marquée par le rôle croissant des KV et l'apparition progressive denombreuses lois

Depuis la création de la Sécurité sociale, en Allemagne, il y a plus de 100 ans (1883),l’organisation et surtout l’accès des médecins au système de la médecine ambulatoireconventionnée ont souvent été modifiés. Nous en présentons les grandes étapes.

Jusqu'en 1931 les médecins négociaient individuellement leur admission et leurs tarifs avecles Caisses, souvent à leur dépends.

Suite à de longs conflits d’intérêts entre médecins et caisses, les unions professionnellesdes médecins conventionnés (KV : Kassenärztliche Vereinigungen) sont créées en 1931. Ellesreprésentent les médecins, à la fois au niveau des Länder et au niveau fédéral. Appelées aussi« associations de médecins de caisse », elles ont un statut de droit public et sont dotées d’unegestion autonome. Elles constituent un maillon intermédiaire entre les Caisses d’assurancemaladie et les médecins. Elles négocient, avec les caisses, les conditions économiques etorganisationnelles de l’activité médicale dans le cadre du droit social19. L’État intervient, poursa part, en fixant les principes directeurs de ces négociations.

En 1955, ces institutions et leurs rôles respectifs sont précisés par la loi sur les droits desmédecins conventionnés (GKAR : Gesetz über Kassenarztrecht) toujours en vigueur.

De 1955 à 1960, l'installation est limitée en fonction du « besoin » défini par la proportiond'adhérents à la sécurité sociale par médecin.

La loi de 1955 limite l'installation des médecins quand il y a moins de 500 adhérents desCaisses du régime légal d’assurances maladie par médecin et par district. Les lieux d’exercicesont fixés par les associations de médecins de Caisse des Länder (KV).

De 1960 à 1977, l’accès à la médecine conventionnée devient illimité.

En 1960, le tribunal constitutionnel de la République fédérale a jugé cette procédure delimitation de l'installation, définie en 1955, anticonstitutionnelle car incompatible avec la loifondamentale sur la liberté professionnelle (article 12, paragraphe 1, GG). Dès lors, lesmédecins étaient libres de s’installer à l’endroit de leur choix et de dispenser des soinsremboursés par la Sécurité sociale.

19 Les URML ont été créées en France en 1993 sur le modèle des unions professionnelles allemandes.

Médecins

conventionnés

Associations des

médecins de caisse

KV

Caisses d’assurance

maladie du régime

légal

37

Ce jugement eut pour conséquence une augmentation rapide du nombre de médecinsconventionnés (35 % jusqu’en 1975) et leur concentration dans les grandes agglomérations etautres villes attrayantes, aux dépens des régions rurales ou disposant de peu d’infrastructure.

De 1977 à nos jours, se met en place une politique d’équilibrage de la distribution desmédecins avec une planification qui met, tout d'abord, l'accent sur les régions déficitaires(Unterversorgungsplanung).

Devant l'importance des déséquilibres de densité médicale entre les régions, legouvernement crée, en 1976, un nouvel instrument de planification des besoins en médecinsde caisses20. Les Unions de médecins de caisses, associées aux représentants des caisses ausein d'une commission paritaire du Land, ont ainsi obtenu la possibilité de fermer les zonesconsidérées comme excédentaires à l'installation en faveur des zones sous-approvisionnées.Les régions déficitaires ont alors vu augmenter rapidement le nombre de médecins, même sidans le même temps, l’excédent dans les agglomérations s'accentuait, en raison de la fortepression démographique médicale.

De 1986 à 1992, cet effort de planification est complété par une planification qui metl'accent sur les régions excédentaires (Überversorgungsplanung).

La loi du 19 décembre 1986, pour l'amélioration de la planification des besoins enmédecins conventionnés, permis au gouvernement de justifier sa politique de régulation etd'atteinte à la liberté d'installation des médecins en se référant au besoin de protéger le bienpublic et, de fait, le fonctionnement du régime légal d'assurance maladie. Ces mesures furentjugées « acceptables » pour les médecins, car ces restrictions se limitaient à quelques régions.Selon ces critères, 50 % des districts de planification étaient encore libres.

La Commission d'admission (Zulassungsausschuss) de la KV d’un Land pouvait interdirel'installation de nouveaux médecins dans les régions où il existait un excédent supérieur à50 % au taux de référence calculé en fonction de la densité médicale observée en 1980 auniveau national.Une densité de médecins « acceptable » était définie pour chaque spécialité et district deplanification, ce dernier correspondant environ à un canton ou une ville autonome (kreisfreieStadt). Cette mesure semble avoir eu une efficacité limitée jusqu'en 1992.

En 1993, la réforme Seehofer (das Gesundheitsstrukturgesetz GSG) introduit uneplanification détaillée des besoins en médecins visant leur répartition optimale jusqu'en1999 (Bedarfsplanung).

3.1.1.2. La « GSG », actuellement en vigueur, a constitué une étape importante dont leslimites ont conduit à un nouveau projet pour 2000

La première étape de la GSG porte sur la planification des besoins en médecinsconventionnés en termes de répartition géographique, sans limitation du conventionnement.La deuxième étape, qui devait débuter en 1999, impose une limitation quantitative du nombrede médecins conventionnés. La figure 8 présente, de façon schématique, les mécanismes et lesacteurs de la limitation de l'accès à l'installation. 20 Bedarfsplanungsrichtlinien des Bundesausschusses der Ärzte und Krankenkassen.

38

Figure 8 : régulation de l’accès à la médecine conventionnée ambulatoire d’après laGSG

Contrairement à ce que le terme pourrait laisser entendre, la planification n'est pas fondéesur une évaluation détaillée des besoins « réels », mais vise principalement à réguler larépartition des médecins sur le territoire allemand. Tous les médecins arrivant sur le marchédu travail, jusqu'en 1999, peuvent s'installer mais sont limités dans le choix du lieud'installation par un plan de répartition.

Le cadre d'élaboration des plans est défini au niveau fédéral et appliqué par chaque Land.

Le comité fédéral des médecins et des Caisses définit les lignes directrices de cetteplanification. Les critères permettant de juger de l’excédent ou du déficit de praticiens enmédecine conventionnée sont explicités. Ces directives servent à l’application des procédés deplanification et de restriction d’admission par tous les Länder.

Elles déterminent :

NIVEAU FÉDÉRALComité fédéral des médecins et des caisses

è Lignes directives de la planification

(établissement et adaptation des nombres proportionnels)

KV

(association des médecins de caisse)

avec l’accord des caisses

Comité des médecins et des

caisses des Länders

NIVEAU DES LÄNDER

è Elabore la carte des

besoins

è Conseillent les médecins

è valide la carte des besoins

è surveille l’excédent ou le

déficit

è impose les restrictions

d’admission

KV :Commissions d’admission

è attribuent le droit d’exercer en

médecine conventionnéeMédecins

Demande

d’admission

L’UNION DES CAISSES

GESTION PAR LA PROFESSION MÉDICALE

CONTRÔLE PAR UNE

COMMISSION MIXTE

( CAISSES ET KV)

39

- le seuil de saturation médicale pour chaque type de district21, à partir du rapport entre lenombre d’habitants par médecin et pour chaque spécialité, constaté en 1990 (année deréférence),

- les différentes situations d'exception pour autoriser des médecins à s'installer au-delà duseuil de saturation, à savoir les besoins spécifiques d’ordre qualitatif ou les conditions dereprise d’un cabinet existant,

- les critères de répartition pour un bon équilibre entre médecins spécialistes et médecinsde famille.

En fonction de ces lignes directrices, chaque KV (Union de médecins de caisse) en accord

avec l'Union des Caisses des Länder, définit une carte des besoins (Bedarfspläne) pourchaque Land. Ces cartes font le bilan des effectifs et des besoins dans le but de garantirl’accès de tous les habitants à la médecine conventionnée.

Elles doivent préciser :- le nombre de médecins conventionnés en fonction de chaque spécialité,- les institutions hospitalières participant à la médecine conventionnée,- le volume et les caractéristiques des demandes et leur distribution géographique,- l’infrastructure.

Enfin, ces cartes servent aussi de base pour les services de conseil donnés par les KV. Tous lestrois ans, les KV, en collaboration avec les unions des caisses, doivent faire une évaluation deleurs expériences respectives et dresser un état des lieux de la médecine conventionnée. Ainsi, le comité des caisses et des médecins de chaque Land surveille les effectifs et indique àl'union professionnelle des médecins de caisse les lieux d'installation possibles, conformémentà la carte de besoins de chaque spécialité, pour tous les médecins souhaitant êtreconventionnés (figure 8). Le comité est juridiquement responsable des éventuelsdépassements. Sur une période donnée, il doit vérifier que le seuil de saturation n’a pas étédépassé de plus de 10 %. Si tel est le cas, le comité d’admission de la KV doit immédiatementmettre en place des restrictions d’admission. Ces restrictions concernent une spécialité et undistrict donné, elles doivent être publiées dans le journal de la KV du Land.

Toutes les données sont ensuite rassemblées et publiées, au niveau national, sous forme de

« cartes de planification » par l’union fédérale des médecins de caisse (annexe 2 et 3). En 1993, le comité fédéral des médecins et des caisses a défini un ensemble de quotas pourles spécialités suivantes :- médecine générale, - médecine interne,- ophtalmologie, - pédiatrie,- gynécologie, - neurologie,- médecine ORL, - orthopédie,- dermatologie, - radiologie,- urologie.

Depuis le 16 juin 1998, ont été ajoutés les psychologues psychothérapeutes et lespsychothérapeutes pour enfants et adolescents. Pour tous les autres groupes ou spécialités,aucune restriction d’admission n’a été définie. Cependant, le comité fédéral des médecins etdes caisses peut intégrer dans la planification de nouvelles spécialités, en fonction de 21 Il existe neuf types de districts de planification selon la densité de population.

40

l’évolution de leur nombre : si le nombre de médecins d’une spécialité dépasse 1 000membres au niveau national, un quota restrictif est aussitôt défini.

Depuis 1993, les quotas spécifiques ne sont plus définis uniquement au niveau de chaque

Land mais aussi selon les caractéristiques démographiques de chaque district deplanification et les critères d'aménagement du territoire.

Le découpage géographique a été réalisé par l’institut de recherche de l’aménagement duterritoire, à l’échelle d’une ville autonome (Kreisfreie Stadt) ou d’un canton (Landkreis)correspondant chacun à un district de planification. Chaque type de district a ainsi pu êtrecaractérisé en fonction de sa densité démographique et des formes d'habitat. Dix typesdifférents ont été définis, par ordre décroissant, par exemple :

- le premier type de district qui correspond à une agglomération de plus de 100 000habitants,

- le neuvième type de district qui correspond à des zones rurales de moins de 150 habitantspar km2. Pour chaque type et spécialité, a été défini un quota sur la base du rapport entre le nombred’habitants et de médecins au 31 décembre 1990.

L’idée d’origine, ayant conduit à ce découpage et à la définition de ces différents types,

prévoyait que le besoin, en termes de médecins généralistes, était proportionnellement plusimportant dans les zones rurales que dans les grandes agglomérations et inversement pour lesspécialistes, afin de garantir une offre de soins adaptée.

La réforme Seehofer a été anticipée en masse par les médecins, dépassant ainsi les

prévisions de planification. Entre l’annonce de la loi de 1993 et sa promulgation, de nombreux médecins ont anticipé

la limitation du lieu d’installation et ont investi le secteur ambulatoire, ce qui eut pour effet delibérer de nombreuses places à l'hôpital (annexes 4).

Après l’adoption de la loi de 1993, 40 % des zones de planification offraient encore des

possibilités d’installation. En 1997, il en restait encore 28 %. Certaines spécialités risquaientdonc de ne plus avoir de possibilités d’installation au niveau national. La loi de 1993 garantissait, dans sa première phase22 (jusqu’en 1999), l’accès à l’exercice dela médecine conventionnée. Le comité fédéral, chargé d’évaluer tous les trois ans les « seuilsde saturation par spécialité », a donc été rapidement amené à les adapter ou à définir d’autresmesures. En 1997, une nouvelle loi (2.NOG) ajoute une troisième exception qui concerne lesadmissions dans une zone soumise à restriction. Désormais, en plus d’une admissionexceptionnelle en fonction d’un besoin spécifique (« assurance qualité ») ou de la reprise d’uncabinet dans une zone « fermée », il est devenu possible d'admettre l'installation d'un médecinpour la formation ou l’extension d’une « association de médecins » au sein d’un cabinet, touten limitant le volume d’activité (« job-sharing »). Nous avons choisi de détailler ces exceptions à la loi, car elles constituent des mécanismes

22 La première phase (prévue jusqu’en 1999) portait sur une planification en termes de répartition géographiquesans limitation du conventionnement, la deuxième phase qui devait débuter en 1999 introduisait une limitationquantitative des médecins conventionnés.

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incitatifs à l’évolution des pratiques et, aussi, des moyens d'échapper à la régulation. Cesexceptions sont au nombre de trois. v l’admission en fonction d’un besoin spécifique : « assurance qualité »

- admission exceptionnelle d’attachés : si un hôpital offre un poste d’attaché et n’arrive pasà réaliser un contrat avec un médecin déjà admis dans la zone « fermée », il peut embaucherun médecin conventionné d’une autre zone de planification. Ce médecin sera donc admis etpourra même transférer son cabinet dans la zone « fermée » ;

- besoin local en médecin dans une zone de planification à l’intérieur de laquelle il existedes disparités (non homogène) ;

- besoin qualitatif spécifique : une certaine qualification est déficitaire dans une zonedonnée (ex : gastro-entérologue) ;

- formation d’un cabinet, regroupant plusieurs médecins, spécialisés dans un domaine (ex :oncologie) ;

- médecins pratiquant la chirurgie ambulatoire ;- médecins travaillant uniquement dans le domaine de la psychothérapie.

v la reprise d’un cabinet dans une zone « fermée »

Cette exception donne la possibilité aux médecins qui partent à la retraite de vendre leurcabinet à d’autres médecins même si cette zone est normalement fermée à toute nouvelleinstallation. Elle a été instaurée afin de préserver le droit à la propriété du médecin et de seshéritiers. Elle eut aussi pour conséquence de laisser perdurer l’excédent dans certainesrégions.

Les procédés de publication des offres d’emploi ou de reprise de cabinet sont les suivants :- publication dans un journal officiel,- tous les dossiers de candidature doivent être transmis au médecin sortant, à ses héritiers et

aussi au comité d’admission de la KV.Les conditions d’installation ou de candidature sont :

- une « approbation » comme médecin,- l’attestation de réussite d’une spécialisation d’au moins trois ans, en tant que « médecin

praticien » (EU), médecin généraliste ou spécialiste dans un autre domaine,- être âgé au plus de 55 ans.- Les candidats négocient avec le médecin ou ses héritiers la reprise du cabinet.- Le comité d’admission de la KV choisit un « repreneur» en tenant compte des critères

suivants :- capacité professionnelle,- la date « d’approbation »,- l’expérience professionnelle,- la situation du candidat : conjoint, enfant, ancien salarié ou partenaire du cabinet, ces

personnes sont souvent prioritaires afin de préserver la continuité de l’activité et de la relationde confiance déjà établie avec les patients,

- l’inscription sur la liste d’attente : dans toutes les zones soumises à des restrictionsd’admission, il existe des listes d’attentes propres à chaque spécialité,

- le comité d’admission, composé à parts égales de représentants des médecins et descaisses, désigne le repreneur.

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v une admission restreinte pour la formation ou l’extension d’un « regroupement demédecin » au sein d’un cabinet, avec une limitation du volume d’activité (job-sharing -Arbeitsteilung)

L’admission dans un cabinet « collectif » est soumise à plusieurs conditions :- avoir la même spécialisation,- s’engager à ne pas dépasser le volume d’activité préexistant ou déterminé au moment de

l’admission (le volume de l’activité est obtenu grâce au nombre de « points » correspondantaux différents actes médicaux recueillis par le cabinet).Le partage de l’activité est limité dans la durée. Il peut prendre fin après dix ans d’activité encommun (soit, de fait, un doublement de l’activité après la période de partage d’activité de dixans) ou lors de la levée des restrictions d’admission dans la zone concernée.L’âge limite pour effectuer la demande de « job-sharing admission » est de 55 ans.

Aujourd’hui, les possibilités d’installation en médecine libérale conventionnée tendent àêtre pratiquement nulles dans les agglomérations et de plus en plus restreintes en zone rurale.Parmi toutes les zones de planification, 22 % sont encore ouvertes, toutes spécialitésconfondues. Les chirurgiens (9 %) et les généralistes (49 %) aux deux extrêmes pour leszones de planification ouvertes à l’installation (source : KBV, voir annexes).

Il n’est donc pas possible de choisir librement son lieu d’exercice, même si celui-ci sembleêtre déterminant pour l’activité du médecin. Face à ces contraintes, les KV ont développé uneactivité de conseil, auprès des jeunes médecins, pour les aider à mesurer les risques ou lesavantages de leur installation dans une zone de planification donnée.

v le rôle des Services de conseil et d’orientation des KV

Ils procurent aux demandeurs les services suivants :

• des données d’ordre économique :- coût de l’installation d’un nouveau cabinet,- possibilité de reprise d’un cabinet,- possibilité de coopération avec d’autres médecins,- données sur l’évolution démographique : nombre, pyramide des âges,- autres caractéristiques de la population, définition de l’environnement économique etsocial,- infrastructure,- densité médicale (nombre de médecins pour chaque spécialité, densité spécifique,structure d’âge des médecins, capacité d’accueil des cabinets existants...),- possibilité de travailler à l’hôpital comme « attaché d’hôpital »,- etc.

• une aide personnalisée :- à la définition du mode d’exercice, seul ou en association,- sur les conditions de vie adaptées au médecin (confession, ressources culturelles, offre

culturelle et de loisir).

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En conclusion, la loi Seehofer, par ses mécanismes limitant l’accès à la médecineconventionnée, a eu pour effet d’une part, de freiner la croissance du nombre de médecinsexerçant en médecine conventionnée (le taux de croissance annuel de 3,2 % avant la mise enplace de la réglementation est passé à 1,2 % ces dernières années) et, d’autre part, depermettre une meilleure distribution sur le territoire national. Cependant, ni l’arrêt total de lacroissance, ni la réduction de l’excédent dans les zones de planification n’ont été obtenus.

La planification de la répartition géographique des médecins conventionnés correspond àla première étape prévue par la loi de 1993. Elle devait conduire, à partir de 1999, à unelimitation d’exercice en fonction de seuils de saturation par spécialité et par zone deplanification qui devenaient opposables avec un arrêt total des admissions en médecineconventionnée dans les « zones fermées ». Cette seconde étape devrait être mise en œuvre àpartir de l'année 2000. 3.1.2.3 À partir de l'an 2000, une nouvelle loi vise à introduire une limitation àl’installation sur des « critères rationnels »

La loi 2000 prévoit, désormais, une limitation à l'installation qui ne porte plus seulementsur le lieu mais aussi sur le principe même de l'installation. À l'avenir, les nouveaux médecinsne pourront pas tous s'installer pour travailler en médecine conventionnée. Les seuils desaturation, définis à partir de l'année 1990, ne seront plus modifiés jusqu'en 2003. Leministère fédéral pour la santé va solliciter un institut de recherche qui sera chargé, d’ici le 31décembre 2000, de créer une base de données permettant de définir de nouveaux seuils desaturation. Ceux-ci ne seront plus basés sur l’année 1990 mais sur des éléments permettant deprendre en compte le « besoin » en médecins. L’application de ces nouveaux seuils est prévuepour l’année 2003.

À partir du premier janvier 2000 et pour éviter les effets d'anticipation constatés en 1993,les admissions à l'installation ne seront possibles qu'en dessous du seuil de saturation. Unefois ces seuils atteints, les médecins ne seront plus autorisés à s'installer, sauf en cas de besoinlocal spécifique. Les conditions de reprise des cabinets seront restreintes et le comité fédéral des médecins etdes caisses définira, par directives, les cas où les cabinets médicaux seront fermés sanspossibilité de revente de clientèle. Le coût de fermeture sera réparti, à part égale, entre lescaisses et les KV. Cette mesure a pour objectif de diminuer les excédents constatés danscertaines zones.

Cette loi, limitant le droit à l'installation, est très controversée et suscite de nombreux

débats qui renvoient à des questions de droit constitutionnel.

Les restrictions d’installation en médecine libérale conventionnée vont à l’encontre dudroit fondamental sur la liberté d’exercer la profession de son choix. En 1960, le tribunalconstitutionnel suprême a défini une théorie en trois échelons, afin de juger si les atteintes à laliberté d’exercer sa profession sont constitutionnelles ou non. Il en ressort que plus l’atteinte àla liberté d’exercice est importante, plus elle doit être motivée. La réglementation actuelle, quipermet en principe l’accès à la profession tout en limitant le choix du lieu d’exercice,détermine les « conditions » de l’exercice et appartient donc au premier échelon selon lathéorie du tribunal. En effet, la protection de la stabilité financière de la sécurité sociale

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compte parmi les intérêts généraux reconnus et est, de ce fait, un argument de poids pourdéfendre la réglementation en vigueur. En raison de la relation entre le nombre de médecins etles dépenses de la sécurité sociale, démontrée par plusieurs études, le tribunal fédéral desaffaires sociales a déclaré constitutionnelle la réglementation produite depuis 1993.

Le projet de loi 2000 intéresse directement le troisième échelon, en limitant le nombre demédecins conventionnés. En 1960, ces restrictions d’admission objectives avaient été jugéesanticonstitutionnelles et justifiables seulement si elles étaient utilisées en réponse à un risque 23

important et probable pour un bien public majeur.

En 1998, les dépenses de la sécurité sociale s'élevaient à 235 milliards de DM avec un tauxde cotisation de 13,5 % du salaire, alors qu'elles n'étaient que de 8,9 milliards de DM en 1960avec un taux de cotisation de 8,4 %. Malgré le poids croissant des dépenses, le débat resteouvert sur la constitutionnalité des restrictions d’admission prévues par la loi 2000. Letribunal ne s’étant pas prononcé, le risque de jugement anticonstitutionnel demeure.

Le ministère de la santé doit donc aujourd’hui démontrer, non seulement la relation directe

entre les dépenses de la caisse de la Sécurité sociale et le nombre de médecins24, mais aussique d’autres mesures ne peuvent protéger, à elles seules ce bien public. À titre d’exemple,nous citerons :

- la budgétisation des honoraires des médecins a poussé ces derniers à effectuer des actes

supplémentaires hors enveloppe pour compenser une perte de salaire ; la mesure budgétaireétait donc insuffisante, à elle seule, pour diminuer les dépenses,

- une limitation des seules admissions dans les universités de médecine n’aurait pas d’effetimmédiat, ni d’effet direct sur les dépenses.

Aujourd’hui, les défenseurs de la loi 2000 font valoir que la limitation du nombre demédecins conventionnés prend son sens parce qu’elle est associée à d’autres mesures visant àaugmenter l'efficience du système de soins, telles que :

- la création de réseaux de soins,- un contrôle effectif de « l’économicité » de l’activité médicale

(Wirtschaftlichkeitsprüfung).

La Loi 2000, votée en décembre 1999, constitue un pas conséquent vers une réellelimitation du nombre de médecins conventionnés. Pour les médecins qui souhaitents’installer, les conséquences sont importantes car tous n’auront plus cette possibilité.Actuellement, environ 80 000 médecins spécialisés exercent en dehors de la médecineconventionnée, mais remplissent les conditions exigées pour une admission. S’y ajoutent,chaque année, environ 12 000 nouveaux spécialistes.

23 Source : Hiddemann, Till, Bedarfsplanung und Zulassungsmöglichkeiten in der vertragsärztlichen VersorgungDie BKK 8/99, Bonn. 24 Plusieurs études effectuées à la fois par le Ministère de la santé et l’unité de recherche de la principale caisse(Ortskrankenkassen) ont démontré ce lien et ont été citées dans plusieurs textes défendant cette loi :« Begründung des Gesetzentwurfs eines « Gesetzes zur Reform der gesetzlichen Krankenversicherung ab demJahr 2000», Drs : 14/1245 zu § 101 SGB V 79.

45

D’ici 2003, environ 5 400 places seulement seront disponibles alors que l’on estime lesdemandes potentielles à plus de 100 00025. 3.1.2 Des mécanismes de régulation des honoraires et du volume d’activité mis en placeface à l’explosion des dépenses de la Sécurité sociale

L’éventail global des honoraires par médecin a triplé entre 1965 (66 526 DM) et 1975(213 104 DM). Si l’on ajoute à ces honoraires les dépenses correspondant aux prescriptions,aux différents examens et à la consultation d’un autre spécialiste, les coûts par médecinconventionné s’élevaient en 1999 à environ un million de DM par an.

L’introduction en 1955, sous la pression des médecins, d’une rémunération à l’acte aurait

induit une augmentation excessive des dépenses de la sécurité sociale. Jusqu’à cette date, lesmédecins recevaient, tous les trois mois et sur présentation de la feuille de prise en charge, unforfait fixe par patient pour tous les actes et traitements effectués. Depuis 1955, avecl’obtention de « l’approbation 26», tous les actes pouvaient être facturés, ce qui n’incitait pasles médecins à utiliser des moyens de diagnostic simples. Par conséquent, dans beaucoup decabinets, l’utilisation d’électrocardiogrammes, de sonographies, d’échographies, d'appareilsde radiographie, etc. s'est développée. L'achat de ces appareils coûteux et leur nécessaireamortissement pourrait expliquer l'augmentation du volume d'actes. Par exemple, entre 1988et 1992, les coûts pour la sécurité sociale ont augmenté de 85 % pour les sonographies et de434 % pour les IRM. L’offre induisait ainsi la demande. D’après les experts, ce quimanquerait depuis des années, ce sont des démarches d’accréditation, de recherche de qualité,des référentiels de « bonne pratique ».

Face à l’explosion des dépenses de la sécurité sociale du secteur ambulatoire, Blüm, leministre de la santé, instaurait en 1986 l’enveloppe globale des honoraires et le contrôle del’économicité (Wirtschaftlichkeitsprüfung).

Cette politique se référait à la volonté de garantir l’équilibre comptable de l’assurancemaladie afin de préserver la stabilité des taux de cotisation et donc, d’assurer un niveau decharges sociales économiquement acceptable pour les entreprises. L’évolution des dépenses etdes cotisations étant supérieure à celle de la masse salariale, un accord a pu être trouvé, sousla pression des pouvoirs publics, entre les unions des médecins conventionnés et les caisses,instaurant le principe d’une rémunération des médecins sur la base d’une enveloppe globalefixe et collective.

Une enveloppe globale des honoraires limite les dépenses des médecins exerçant dans le

secteur ambulatoire conventionné.

25 Source «Bedarfsplanung und Zulassungsmöglichkeiten in der vertragsärztlichen Versorgung , TillHiddemann, Bonn », vgl. Begründung des Gesetzeentwurfs eines « Gestetzes zur Reform des gesetzlichenKranknversicherung ab dem Jahr 2000 (GKV-Gesundheitsreform ab dem Jahr 2000), Drs. 14/1245 zu § 101SGB V, zu §101, S.77). 26 Autorisation d’exercice en médecine conventionnée.

46

Figure 9 : système de santé, rapport quadrangulaire entre les acteurs

Source : « Information médicale et régulation de la médecine générale »: une approche comparative, rapport finalconvention MIRE-ENSP, n° 15/94

Selon ce principe, les caisses versent une enveloppe aux unions professionnelles. Cetteenveloppe renferme la masse des honoraires des médecins ambulatoires conventionnés par lasécurité sociale. Elle est le produit d’une somme forfaitaire par assuré, multipliée par lenombre d’assurés. Elle est indexée sur le développement de la masse salariale et tient compte,également, de l’évolution du progrès technique et des données épidémiologiques locales.

Les caisses versent l’enveloppe aux unions professionnelles qui la répartissent entre lesmédecins, en multipliant leur nombre d’actes par la valeur d’un point « flottant » : ce point,variable, calculé en fin de trimestre, est inversement proportionnel au nombre d’acteseffectués par l’ensemble des médecins. La certitude de la dépense est ainsi totale pour lescaisses, mais les médecins subissent une incertitude sur le prix unitaire de l’acte.

Beaucoup de médecins ont donc tenté de multiplier les actes pour compenser l’érosion du

point flottant. Certains actes, remboursés hors enveloppe (comme les actes de prévention, dela pharmacie ou de la radiologie), ont vu leur prescription augmenter considérablement. En1991, la masse des honoraires avait dépassé l’enveloppe, de 25 à 30 %, selon les Länder.

Depuis l’introduction de cette enveloppe, les médecins étaient aussi intéressés par la

limitation du nombre de médecins conventionnés. L’explosion de la démographie médicale(120 000 nouveaux médecins dans les dix années à venir), non accompagnée d’uneréglementation visant l’installation et le conventionnement, pourrait mettre en péril l’activitéet, donc, les revenus de certains médecins.

3.2 La régulation de l’accès au secteur hospitalier

Le secteur hospitalier regroupe des hôpitaux qui peuvent être publics, privés à but nonlucratif ou privés à but lucratif. La capacité totale est d’environ 657 000 lits à l’Ouest et140 000 lits à l’Est. 80 000 lits environ sont estimés excédentaires par l'État. Le secteurhospitalier emploie entre 1,2 et 1,3 millions de personnes. Les infirmiers et sages-femmes

Caisses Union des médecins

conventionnés (KV)

Assuré Médecins

conventionnés

Enveloppe globale

Remise des feuilles des soins trimestrielles

Cotisations (feuilles de soins

trimestrielles)Remise des feuilles des

soins trimestrielles

Répartition des

honoraires

Soins et prescriptions

Droits aux soins, feuilles de soins trimestrielles

47

exercent en quasi-totalité à l’hôpital. Les deux tiers des hôpitaux sont des hôpitaux généraux.La densité en lits est d’environ 8 pour 1 000 habitants. Le taux d’occupation est assez élevé(81 %)27. Les médecins sont rémunérés principalement sous la forme du salariat. Lesmédecins chefs peuvent, en plus, recevoir des patients privés dans leur service. Les« médecins attachés » ont un cabinet et travaillent à l’hôpital, principalement en région rurale.Il s’agit surtout de médecins spécialistes en ORL, gynécologie et en ophtalmologie. Ilspeuvent transférer directement leurs patients dans les hôpitaux. 3.2.1 Les capacités d'accueil et les possibilités d'emploi du personnel hospitalier médicalet paramédical sont largement influencées par le système de financement hospitalier

Depuis 1972, le mode de financement des hôpitaux, en Allemagne, est dual. Les coûtsd’investissement sont financés par les Länder, à partir de l'impôt et les frais d’exploitation parles caisses, à partir des cotisations sociales.

Figure 10 : le financement des hôpitaux : rôles respectifs des Lander et des Caisses

Les Länder décident, dans le cadre de la « planification des besoins en hôpitaux »

(Krankenhausbedarfsplanung), de la capacité d’accueil des hôpitaux et des investissementsnécessaires. Sur le plan local, les caisses doivent directement contracter avec les hôpitaux pour négocierles prix des journées hospitalières (Pflegesatzverhandlungen) destinés à financer les fraisd’exploitation, y compris les salaires du personnel médical et paramédical (environ 70 % desfrais généraux). Remboursés par les caisses sur présentation de leur activité en nombre de journées, leshôpitaux disposent d’une garantie de remboursement de toutes les dépenses nécessaires(Kostenerstattungsprinzip). Si les hôpitaux dépensent plus que la somme des forfaitsjournaliers, ils peuvent réclamer des subventions supplémentaires auprès des autoritésresponsables (Land, ville, église), ce qui ne les incite pas à réduire leurs dépenses (en termesde durées de séjour, etc. En pratique, ces dépenses supplémentaires sont souvent assumées parles caisses qui ont vu les dépenses hospitalières passer de 25,5 milliards de DM en 1980 à50 milliards de DM en 1992.

27 Source: « Les systèmes de santé en Europe », 1998.

Financement des hôpitaux

Länder Caisses - cotisations

sociales

Coûts d’investissement Frais d’exploitations

Financement des hôpitaux

48

Les caisses n’ont aucune influence sur la fixation du nombre de lits dans les hôpitaux, ni surla durée de séjour des malades à l’hôpital. Tous leurs efforts se sont alors concentrés sur lesfacteurs déterminants du forfait journalier et donc, essentiellement, sur la limitation de lacroissance du nombre de personnel par lit hospitalier. Les ratios de personnel par lithospitalier sont devenus l’un des outils de régulation principaux de l'offre d'emploi28 dans lesecteur hospitalier. Ainsi, face à toute tentative des hôpitaux d’augmenter les effectifs, lescaisses les renvoyaient aux référentiels élaborés par la fédération allemande des hôpitaux(Deutsche Krankenhausgesellschaft), publiés la première fois en 1951 et actualisées en 1955,1969 et 1974.

Ces données de référence, fournies à l’origine à titre indicatif, définissaient le rapport entrepersonnel soignant et médical par lit hospitalier et sont devenues la règle.

Les caisses s’opposent à toute modification de ces données qui ont été certes ajustéeslinéairement, compte tenu de la diminution du temps de travail, mais sans prise en compte desévolutions de la structure de la morbidité, pas plus que des nouvelles méthodes de traitementet de soin. Comme cette grille référentielle était appliquée, à la fois, au personnel médical etparamédical, le rapport médecin - soignant par lit hospitalier est resté relativement stabledurant toutes ces années. Ainsi, en 1953, il y avait un médecin pour 4,4 soignants contre unpour 4,6 en 1988, générant ainsi peu de possibilités d’emploi supplémentaire.

Les conséquences de ces arrangements institutionnels étaient, d’une part, que l’Allemagnes’est trouvée, au début des années 90, avec le double de lits hospitaliers pour 1 000 habitantspar rapport aux États-Unis 29, une durée d’hospitalisation relativement élevée par rapport auxautres pays européens, mais des effectifs en personnel soignant, par unité de prestation,comparativement bas avec une structure du personnel soignant presque constante. Ainsi, jusqu’en 1994, la part du personnel soignant par rapport à tous les employés del’hôpital était de 39 % contre 11 % chez les médecins. La moyenne était de 174 personnes àtemps plein pour 100 lits (contre 157 en 1991), un chiffre relativement peu élevé par rapport àd’autres pays18.

En 1993, la loi Seehofer introduit des grilles de référence qui définissent les niveaux desoins requis, en fonction du niveau de dépendance du patient. Le calcul du besoin enpersonnel soignant est ainsi plus facilement applicable et contrôlable. Quatre catégories de soins sont établies :

1ère catégorie de soins Le patient est autonome, c’est-à-dire qu’il est capable de mener seul les taches de la vie

quotidienne.

2ème catégorie de soins Le patient est limité dans son autonomie, du fait d’un handicap léger, et il a besoin d’aide

pour accomplir certaines taches de la vie quotidienne.

28 Rothgang Heinz Der Einfluss der Finanzierungssysteme auf Beschäftigungsstrukturen und – Voluminaenglischer und deutscher Krankenhäuser, Dissertation. Köln : Universität Köln, 1994.29 Référence: « Krankenversorgung »de Matthias Klein-Lange; in Das Public Health Buch, page 230.

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3ème catégorie de soins Le patient est limité dans son autonomie par un repos strict au lit et/ou un handicap majeur,

c’est-à-dire qu’il dépend de l’aide d'un tiers pour accomplir les tâches de la vie quotidienne.La nature et l’ampleur de l’aide nécessaire est fonction de la nature et de l’importance de seshandicaps, certains taches doivent être entièrement accomplies par un tiers.

4ème catégorie de soins Le patient est entièrement dépendant, c’est-à-dire que son autonomie est réduite à très peu

d’actes de la vie quotidienne. Il a besoin d’une aide permanente.

L’objectif de la loi de 1993 était d’augmenter la productivité des hôpitaux et d’améliorer lacomplémentarité des soins hospitaliers et ambulatoires, tout en garantissant la stabilité descotisations sociales. Ainsi, les budgets hospitaliers, établis sur la base des budgets de 1992,étaient fixés pour une durée de trois ans (1993-1995). La garantie d’un remboursement desdépenses hospitalières, quelle que soit l'activité, était supprimée. La croissance des coûts deshôpitaux liée à l’inflation, aux progrès médicaux ou à une augmentation des coûts dupersonnel hospitalier ne devait plus être supérieure à celle de la masse salariale.

Depuis 1996, le financement des frais d’exploitation par les caisses n’est plus basé sur un

prix de journée moyen unique, fixé au niveau du Land, mais sur les rémunérations forfaitairesfixées au niveau de chaque Land. Il s’agit de forfaits globaux (coût par pathologie et autresactivités), couvrant toutes les prestations (y compris les frais de personnel) d’un typedéterminé de traitement, et de forfaits partiels, rémunérant seulement les actes relatifs à uneaffectation secondaire ou intervenant après un premier motif d’hospitalisation. Les hôpitauxdisposent, désormais, d’un budget spécifique calculé sur la base de leur activité, décrite aumoyen d'un outil de type DRG's. Le montant des prestations devient indépendant de la duréed’occupation. La liste des forfaits est établie au niveau fédéral par décret. À chaque forfait est affectée unevaleur en points dont le montant est déterminé au niveau de chaque Land, afin de tenir comptedes spécificités régionales de coûts.

Selon l’ordre des médecins, les risques liés à un tel système de financement des hôpitaux et

à l’introduction d’une logique de marché et de concurrence 30 sont que les hôpitaux, tentés parla possibilité de faire des bénéfices, revoient, à la baisse, les normes de qualité, que ce soit entermes de moyens techniques ou de ressources humaines. L'ordre craint que les hôpitauxcherchent à diminuer, de plus en plus, la quantité de personnel médical et paramédical, tout enmaintenant leur volume d’activité. L’ordre des médecins regrette l’absence d’études, réaliséespar des institutions scientifiques, concernant la quantité et la qualité du personnel hospitaliernécessaire pour travailler à l'hôpital. Il estime indispensable l’élaboration de protocoles(guides) d’assurance qualité et la mise en place d’évaluations des effets de ce système definancement des hôpitaux.

30 Comme une sélection des patients selon leur coût et risque, ou une abstention de traitements innovateurs maistrop coûteux, d’examens onéreux…

50

3.3 Le rapprochement des deux secteurs de soins et ses implications sur le marché dutravail dans le secteur de la santé

En Allemagne, l’accès à l’hôpital (en dehors des soins d’urgence) est contrôlé par lesmédecins dispensant des soins ambulatoires. L’hospitalisation passe par la prescription d’unmédecin généraliste ou spécialiste. Traditionnellement, la médecine hospitalière et lamédecine ambulatoire sont nettement séparées : les hôpitaux n’offrent qu’exceptionnellementun service de consultation externe. Dans ce cas, la prise en charge hospitalière par l’assurancemaladie, fait l’objet d’une autorisation préalable. Les praticiens libéraux n’ont pratiquementjamais accès à l’exercice de la profession en secteur hospitalier.

Depuis quelques années, la séparation des deux secteurs est remise en cause. L’évolution démographique de la population allemande, l’augmentation de l’espérance de

vie, mais aussi de la polymorbidité des personnes âgées et le développement des maladieschroniques, ont fait évoluer les besoins de la clientèle des hôpitaux. Bien que suréquipés, leshôpitaux ne disposent pas de moyens adaptés à la prise en charge de cette clientèle.

Les contraintes externes de rationnement, imposées par l’État (en secteur ambulatoire:restrictions à l’installation, contrôle de l’ économicité, enveloppe globale ; en secteurhospitalier : budget limité), ou les contraintes de concurrence dues à l’introduction d’unelogique de marché (possibilité de réaliser des profits, obligation de justifier son volumed’activité et plus le nombre de lits, de « fidéliser » une clientèle), conduisent les hôpitaux etles médecins libéraux, à se rapprocher de plus en plus. Le modèle du développementautonome est donc remplacé, en partie, par un modèle de complémentarité des acteurs dusystème de santé. Des « organisations régionales en réseau » entre hôpitaux, médecinslibéraux, services sociaux et d’autres organismes de soins, commencent à voir le jour. Lesmédecins libéraux deviennent des points d’ancrage pour les hôpitaux, car c’est toujoursuniquement à partir de leurs prescriptions que les patients sont admis à l’hôpital. Le secteurhospitalier améliore alors les conditions de coopération avec le secteur ambulatoire, proposedes formations et tente, ainsi, de « gérer la concurrence » en recherchant des alliances pourplus de complémentarité31.

Depuis 1993 (loi GSG32), les hôpitaux ont la possibilité de dispenser des soins pré- et post-

hospitaliers et sont autorisés à réaliser certaines opérations en secteur ambulatoire. Cettepossibilité est controversée car une ouverture, non limitée, des hôpitaux aux soinsambulatoires serait contradictoire avec les restrictions d’installation et d’admission imposéesaux médecins libéraux. Ainsi, il est prévu, dans la loi 2000, que le fait de dispenser des soinsspécialisés, dans le secteur ambulatoire, par les médecins hospitaliers, resterait limité auxprestations hautement spécialisées et soumises à l’accord préalable des commissionsd’admission de la KV.

Les transformations de l'organisation du système de soins ouvrent de nouvelles voies decarrière pour les professions paramédicales. De nombreuses facultés proposent des études en« sciences de soins » ou en « sciences de la santé » ou en santé publique ouvertes auxprofessions paramédicales. Ces études permettent à ces professions d’évoluer, notamment,vers des activités de management, de gestion des établissements de santé et de gestion ou de 31 Par exemple, en ce qui concerne des soins de rééducation fonctionnelle hospitaliers ou ambulatoires. 32 Gesundheitsstrukturgesetz ou loi Seehofer.

51

suivi des démarches d’accréditation ou d’évaluation. Cependant, cette évolution n’est pasencore vraiment intégrée. Il n’existe pas encore assez de places, d’emplois disponibles pources nouveaux professionnels.

Les restrictions d’admission en secteur ambulatoire ont eu un fort retentissement sur le

secteur hospitalier.

La politique de restriction d’admission en ambulatoire a eu un effet immédiat sur le marchéde l’emploi dans le secteur hospitalier (annexe 4). Auparavant, les médecins se décidaientaprès leur spécialisation, soit pour une carrière hospitalière, soit pour un mode d’exercice enlibéral traditionnellement plus attractif surtout après quelques années d'exercice hospitalier.Suite aux restrictions d’admission et à la recrudescence des installations en ambulatoireinduits par la loi de 1993, la répartition structurelle et quantitative entre hôpital et cabinet s’estdavantage modifiée. Le départ de nombreux médecins qualifiés et expérimentés du secteurhospitalier a induit des difficultés non négligeables pour assurer des soins médicauxhospitaliers de qualité. Actuellement, la structure d’âge des médecins hospitaliers diffèresignificativement de celle des médecins installés

Ainsi, en décembre 1998, 45 % des médecins hospitaliers contre 5 % en secteurambulatoire conventionné avaient moins de 35 ans, 65 % contre 20 % avaient moins de 40ans et seulement 16 % contre 40 % avaient plus de 50 ans.

Aujourd’hui, dans le secteur hospitalier pourtant dégarni en 1993, le renouvellement des

postes de spécialistes à l’hôpital s’est affaibli et les postes de chef de clinique sont trèsdemandés. Les postes hospitaliers ne représentent plus seulement les étapes d’une carrière,mais un aboutissement. Le niveau de compétences exigé augmente. La concurrences’accentue entre les candidats et l’accès à une carrière hospitalière devient de plus en plusdifficile. Actuellement, seulement 30 % des médecins hospitaliers disposent d’un contrat àdurée indéterminée.

3.4 Les autorisations d’exercice de la médecine, en Allemagne, pour les étrangers sontdéfinies par une loi fédérale

Les conditions d’obtention d’une approbation, c’est-à-dire d’un droit d’exercer en tant quemédecin étranger, sont définies par une loi fédérale appelée aussi « le règlement fédéral desmédecins » (Bundesärzteordnung- BÄO).Les conditions d’exercice de la profession sont du ressort des Länder. Ce sont eux qui sontresponsables de l’attribution d’une approbation aux médecins étrangers.

Le règlement fédéral des médecins accorde quatre autorisations d’exercice de la

profession :- l’approbation comme médecin.Ont droit à une approbation comme médecin, les ressortissants de l’Union européenne et

les apatrides diplômés en Allemagne et ayant fait une « AIP » ou pouvant justifier d’uneformation ou d’un diplôme reconnu en Europe (cf. Europäische Richtlinien : lignes directricesde l’Union européenne) ou équivalent au diplôme allemand. Une personne appartenant à unpays tiers (hors union) et diplômé en Europe peut seulement, dans des cas exceptionnels,obtenir une approbation ;

52

- l’autorisation d’exercice limitée de la profession médicale.

Trois cas sont possibles :- une autorisation d’exercice pour un temps limité peut être donnée à un médecin d’un pays

tiers (non européen) si celui-ci désire acquérir une expérience professionnelle ou unespécialisation, ou encore à un médecin européen ayant effectué sa formation et obtenu sondiplôme dans un pays tiers et qui recherche une expérience pour faire valider son diplôme.Ces autorisations sont limitées à quatre ans et peuvent être restreintes à un domaine d’activitéprécis. Elles peuvent être renouvelées sous certaines conditions, comme la reconnaissance entant que réfugié ou le mariage à un(e) allemand(e). Cependant, vu les possibilités d’exercicede plus en plus restrictives en Allemagne, cette forme d’autorisation est de moins en moinsdélivrée aux médecins des pays tiers ;

- l’autorisation pour la réalisation de services dans le sens de l’article 60 du contrat CEE,- l’autorisation d’exercice dans des régions frontalières régulées par contrats bilatéraux.

3.5 La sortie du marché du travail

Depuis l’année 1999, l’âge limite de la retraite pour les médecins conventionnés est de 68 ans,avec des exceptions si le médecin a pratiqué depuis moins de 20 ans.Les KV peuvent inciter les médecins à partir à la retraite dès l’âge de 62 ans, en les aidantfinancièrement.

Pour les médecins travaillant dans le secteur hospitalier, l’âge de la retraite est fixé à 65 ans.

53

Annexes Allemagne

Annexe 1 : tableau des spécialités et sous spécialités.

Annexe 2 : le taux de saturation en pourcentages par district de planification ; spécialité :Chirurgiens.

Annexe 3 : le taux de saturation en pourcentages par dis trict de planification ; spécialité :médecins omnipraticiens/médecins praticiens.

Annexe 4 : secteur d’exercice occupé par les nouveaux médecins diplômés entre 1992 et1998.

Coordonnées des personnes contactées.

Bibliographie

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Annexe 1 : tableau des spécialités et sous spécialitésSpécialités Duréeminimum1 Médecine générale 5 ans2 Anesthésie 5 ans3 Anatomie 4 ans4 Médecine du travail 4 ans5 Ophtalmologie 5 ans6 Biochimie 4 ans7 Chirurgie générale

Sous-spécialités : Chirurgie vasculaire Chirurgie thoracique Chirurgie traumatologique Chirurgie viscérale

5 ans

+ 3 ans+ 3 ans+ 3 ans+ 3 ans

8 Diagnostic radiologique Sous-spécialités : Radiologie pédiatrique Radiologie neurologique

5 ans

+ 2 ans+ 2 ans

9 Obstétrique et gynécologie 5 ans10 Oto-rhino-laryngologie 5 ans11 Dermato vénéréologie 4 ans12 Chirurgie cardiaque

Sous-spécialité : Chirurgie thoracique

6 ans

+ 3 ans13 Génétique humaine 5 ans14 Médecine de l’hygiène et de l’environnement 5 ans15 Médecin interne

Sous-spécialités : Angiologie Endocrinologie Gastro-entérologie Hématologie et oncologie Cardiologie Néphrologie Pneumologie Rhumatologie

6 ans

+ 2 ans+ 2 ans+ 2 ans+ 2 ans+ 2 ans+ 2 ans+ 2 ans+ 2 ans

16 Chirurgie pédiatrique 6 ans17 Pédiatrie

Sous-spécialités : Cardiologie pédiatrique Néonatologie

5 ans

+ 2 ans+ 2 ans

18 Psychiatrie pédiatrique et psychologique 5 ans19 Pharmacologie clinique 5 ans20 Laboratoire médical 5 ans21 Microbiologie et épidémiologie des maladies infectieuses 5 ans22 Stomatologie 4 ans23 Neuropsychiatrie 6 ans24 Neurochirurgie 6 ans25 Neurologie 5 ans26 Neuropathologie 6 ans27 Médecine nucléaire 5 ans28 Santé publique 5 ans29 Orthopédie

Sous-spécialité Rhumatologie

6 ans

+ 2 ans

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Annexe 2 : le taux de saturation en pourcentages par district deplanification ; spécialité : chirurgiens

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Annexe 3 : le taux de saturation en pourcentages par district deplanification ; spécialité : médecins omnipraticiens/médecins praticiens

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Annexe 4 : secteur d’exercice occupé par les nouveaux médecins diplômésentre 1992 et 1998

58

Coordonnées des personnes contactées

Frau DiercksNorddeutscher Forschungsbund Public HealthMedizinische Hochschule Hannover30623 HannoverTel : 0049 511 532 4422 (secrétariat)

0049 511 532 4458 (ligne directe)

Verena HoppeBundesärztekammerHerbert-Lewin-Str. 150931 KölnPostfach 41 02 20Tel : 0049 221 40 04 [email protected]

Herr KloseWissenschaftliches Institut der AOKKortrijker Strasse 153177 BonnTel : 0049 228 843 129Fax : 0049 228 843 502

Frau MeyeZentralinstitut für kassenärztliche VersorgungHoninger Weg 11550969 KölnTel : 0049 221 4005 127Mail : [email protected]

Bund Deutscher HebammenPostfach 172476006 KarlsruhePrésidente : Magdalene WeissTel : 0049 721 98 18 90Fax : 0049 721 9818 920

Dr. rer. pol. Wolfdieter ThustKassenärztliche BundesvereinigungHerbert-Lewin-Str. 350931 Köln

Deutscher Bundesverband für PflegeberufeHauptstrasse 39265760 Eschborn

59

Herr NeuheisserDeutsche KrankenhausgesellschaftTeersteegenstrasse 940474 DüsseldorfTel : 0049 211 45 473 111

Frau Ötzel-KlöckerMinisterium für GesundheitFürstenwall 2540219 DüsseldorfTel : 0049 211 855 3124

Dr. Heinz RothgangUniversität BremenZentrum für SozialpolitikBarkhofParkallee 3928209 BremenTel : 00 49 421 218 4132E-mail : [email protected]

Bundesministerium für GesundheitAm Parkhof53170 Bonn

Stefan GörresUniversität BremenGrazer Strasse 2-628359 Bremen

60

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Zentralinstitut für die Verteilung von StudienplätzenWintersemester 199/2000ZVS Info, 1999, Dortmund

65

Royaume-Uni

67

La régulation des professions de santé au Royaume-Uni

Introduction

Contrairement à l’Allemagne et la Belgique, le système de santé du Royaume-Uni, leNational Health Service (N.H.S.), est un service public de santé financé principalement parl'impôt (82 % du budget) qui couvre la plus grande partie de la population. L’assurance privéene concerne qu’une très faible proportion de la population (seulement 12 % en 1994) et faitplutôt office d’assurance complémentaire. Souscrire une assurance privée ne dispensecependant pas de la contribution fiscale à l’assurance publique. Le NHS permet d’avoir droitaux soins et à la santé, de façon uniforme, pour tous les citoyens, indépendamment de leurstatut, revenu ou nationalité. L’accès aux soins médicaux est considéré comme un droitfondamental devant être garanti et protégé par l’État. Ainsi, la définition du budget attribué ausystème de santé est sous la responsabilité des pouvoirs publics.Ce contexte de limitation a priori des ressources allouées au système de soins, donne uneplace importante aux mécanismes de régulation de l'offre de soins, que ce soit dans ledomaine de l'organisation du système de soins ou dans celui de l'offre de soins, notammentdes professions de santé.

Traditionnellement, on distingue trois niveaux de planification :

Le niveau des soins primaires qui concerne les soins courants et de prévention (80 à 90 %des consultations 1) délivrés par les médecins généralistes qui ont un rôle de « Gate-Keeper »puisque l'accès aux soins spécialisés est conditionné par une visite préalable obligatoireauprès d'eux. Les médecins généralistes sont rémunérés, en grande partie, à la capitation.Celui des soins secondaires qui sont dispensés par les médecins spécialistes (pédiatres,neurologues, psychiatres, gynécologues ou chirurgiens…) exerçant exclusivement à l’hôpitalet majoritairement dans des hôpitaux de district, régions représentant de 50 000 à 500 000personnes.

Enfin, le niveau des soins tertiaires qui sont effectués par les médecins spécialistes dansdes hôpitaux plus spécialisés (par exemple, en chirurgie cardiaque, allergologie,immunologie …) et desservant une région de 500 000 à 5 millions de personnes.

La profession médicale, elle-même, fait l'objet d'une planification rigoureuse qui s'appuiesur des systèmes d'informations et des instances de concertations multiples. Cetteplanification distingue trois niveaux :

- une régulation à long terme, correspondant à la définition du nombre d’étudiants admisdans les facultés de médecine,

- une régulation à moyen terme, définissant le nombre d’étudiants admis dans chaquespécialité,

- enfin, une régulation à court terme, concernant le nombre et la structure des personnelsmédical et paramédical sur le marché du travail.

En 1978, face à une pénurie de médecins dénoncée par les usagers du système, legouvernement a mis en place un organe central de concertation et de conseil en la matière. 1 Bodenheimer und Grumach, 1995.

68

Depuis, différents comités formulent des recommandations fondées, en partie, sur desétudes projectives. Ils optent pour des scénarios intermédiaires, afin de limiter au maximuml’inflation de l’offre par crainte d’induire, du fait de la gratuité des soins, une demande tropimportante. Jusqu’aux années 90, le gouvernement central est entièrement responsable de laplanification de la démographie médicale, dont l’objectif est de fournir une offre adéquate enmédecins, en évitant les risques de surnombre et de chômage.

Le National Health Service a fait l'objet d'une réforme importante, au début des années 90,visant à introduire des mécanismes de marché au sein du système de soins considéré commetrop bureaucratique. L'accroissement de l'autonomie des acteurs, résultant de la séparationentre acheteurs et fournisseurs de soins, a des répercussions à la fois sur l’organisation dessoins, le champ d’activité du médecin et sur la structure du personnel hospitalier. Leséléments principaux de la réforme sont les suivants :

• Le « Health Authorities Act » (1995) fusionne les districts (Health Authorities) et les« Family Health Services Authorities » en un seul corps local, détenteur des budgets pour lessoins primaires et secondaires. Ces nouvelles « Health Authorities » deviennent acheteurs desprestations offertes par les hôpitaux.

• L’État incite les médecins généralistes à s’associer avec d’autres médecins, infirmiers oukinésithérapeutes pour former de grands cabinets collectifs et/ou pluridisciplinaires quireçoivent un budget équivalent à une grande partie des soins consommés par leur clientèle(General Practitionner Fundholders). Ces cabinets ont la possibilité de négocier avec les« Health Authorities » un budget destiné à financer une grande partie des prestationsnécessaires aux patients (soins infirmiers à domicile, examens complémentaires, consultationsde spécialistes), à l’exception des soins très onéreux, de longue durée ou d’urgence.

• Les hôpitaux se regroupent pour devenir des fondations autonomes (« trusts »), dont lebudget est fonction des prestations achetées par les « Health Authorities » et les cabinetscollectifs (GP Fundholders).

Ce nouveau système prévoit la négociation de conventions entre producteurs et acheteursde soins. Il crée deux niveaux de concurrence :

- entre médecins généralistes, le malade est libre de choisir son médecin généraliste enfonction des prestations qui lui sont offertes à l’intérieur du cabinet,

- entre hôpitaux (ou trusts), le médecin généraliste est libre de choisir comme« collaborateur » l’hôpital ou le trust qui lui propose les meilleures prestations aux meilleursprix.Dans ces conditions, tous doivent devenir plus attentifs à la qualité des services rendus aumalade et au bon usage des ressources limitées dont ils disposent.

Cette liberté accrue donnée aux « trusts » s’applique aussi aux recrutements du personnelmédical dans les hôpitaux. Dorénavant, les responsabilités en matière de régulationdémographique des professions de santé à court terme pour le marché du travail sont dévoluesaux « trusts » et non plus au niveau central.Dans le même temps, des nouvelles politiques (« New Deal » et « Hospital Doctors Trainingfor the Future ») ont introduit de nouvelles exigences de gestion des ressources humainespour les trusts, ainsi que des exigences en matière de formation. La durée de travail des

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étudiants diminue et les hôpitaux doivent se réorganiser pour pouvoir assumer la charge detravail.L’obligation, pour les « trusts », de gérer un budget, favorise l’emploi de personnel médical« intermédiaire », de préférence des médecins étrangers (qui représentent 24 % du corpsmédical) ou des médecins n’ayant pas pu accéder au statut de « consultant ». Ces « non-consultants » touchent des rémunérations inférieures, sont plus flexibles et acceptent unnombre plus important d’heures de travail. Les sociétés savantes (« Royal Colleges ») sontmécontentes de cette évolution qui signifie, pour elles, une perte considérable de la qualitéd’encadrement des étudiants en médecine.

En 1996, le gouvernement introduit une instance locale de réflexion et de conseil, le« Local Medical Workforce Advisory Group (LMWAGs) ». Constitué de représentants desdifférents partenaires, son objectif est d’engager un processus de réflexion et de décisionimpliquant tous les acteurs locaux. Cependant, son statut de conseiller, sans positionhiérarchique définie, ne lui permet pas de se substituer aux directeurs d’hôpital et d’imposerun changement de la politique de recrutement. Le gouvernement lui confie des missions, dontles modalités restent floues, avec une marge de manœuvre limitée. Le gouvernement a élaboréle « Quality Framework », équivalent des « guides de bonne pratique », qui propose desréférences, en termes de ressources humaines, afin d'encadrer la politique des hôpitaux.

La nouvelle politique de régulation du système de santé, mise en place par legouvernement « Blair », abolit la logique du marché interne. Le manque de coordinationgénérale entre fournisseurs et prestataires de soins, la fragmentation des niveaux de décision,les coûts administratifs engendrés, la quasi-absence de normes de qualité, la persistance d’unaccès inégalitaire aux soins pour les patients et de longues listes d’attente ont amené lenouveau gouvernement à remplacer la logique contractuelle par une logique de partenariat,centrée sur la création de réseaux de soins (« integrated care »).

Au-delà des transformations du système de soins et de leurs répercussions sur la régulationdes professions de santé, le gouvernement actuel constate qu’il y aura un manque importantde médecins britanniques dans les années à venir.

Le gouvernement Blair a annoncé la création de trois nouvelles facultés de médecine, pourfaire face aux inégalités régionales de l’offre de soins et à une demande accrue de médecinspar la population britannique.

Jusqu’à présent, le NHS préférait augmenter la productivité des médecins (et non leurnombre) et compenser un éventuel manque de personnel médical par des médecins étrangers,dont la proportion reste très élevée au Royaume-Uni. Les objectifs futurs visent à obtenir uneforce de travail non dépendante de l’immigration. Au début des années 1990, l’anciengouvernement a développé un système complexe d’aide à la décision comprenant des comitéschargés d’évaluer le nombre de nouveaux étudiants de médecine et de spécialistes danschaque filière, en fonction des plans agrégés par les « trusts ».

Avec la création de nouvelles universités, le NHS souhaite attirer des médecins dans deszones géographiques où persistent des pénuries, en créant des incitatifs d’ordre financier oudes possibilités d’effectuer de la recherche.

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Le gouvernement Blair a créé une nouvelle commission, « The Workforce PlanningReview », pour évaluer la politique de planification des ressources humaines (médicales etparamédicales), comprendre les mécanismes d’interaction entre elles et d’explorer les « zonesgrises » de substitution (« skill mix ») dans les hôpitaux. Depuis la création des « GPFundholders » et l’autonomisation des « trusts », le rôle des infirmiers et des sages-femmesest en expansion, exigeant une planification conjointe sur les trois niveaux (le long, moyen etcourt terme).

1 La démographie médicale : état des lieux et outils de planification

1.1 État des lieux : une densité médicale faible, une proportion élevée de médecinsétrangers, une fuite des étudiants en cours d'étude évoquent une pénurie de médecins

1.1.1 La densité médicale est l’une des plus basses d’Europe

La densité médicale est de 150 médecins pour 100 000 habitants, soit environ 102 000médecins pour tout le Royaume-Uni2. Si la situation n’est pas jugée alarmante, tous lesacteurs sont d’accord pour estimer qu’il y a une pénurie. Plusieurs indicateurs font état d’uneinadéquation entre l’offre et la demande, comme :

- les files d’attente en secteur hospitalier,- les postes de consultant non pourvus,- la réduction du nombre de candidats en médecine générale par rapport au nombre de

places offertes,- l’augmentation du nombre de médecins étrangers.

1.1.2 La profession se féminise

Le nombre de médecins de sexe masculin a peu évolué par rapport au nombre total demédecins. Au cours des dernières années, le nombre de femmes s’est accru dans les écoles demédecine : 60 % des étudiants sont, aujourd’hui, des femmes.Actuellement, 30 % des médecins généralistes (« GP principals ») sont des femmes et ce tauxaugmente constamment.En Angleterre et au Pays de Galles, il y a 21 474 GP de sexe masculin pour 9 141 femmes(1995).

1.1.3 Les études médicales font l'objet d'une sélection stricte et les abandons sontnombreux

Le nombre de bacheliers qui se présentent aux écoles de médecine a augmenté rapidementau cours des dix dernières années. Environ 50 % sont refusés, la moyenne des notes obtenuesen fin de secondaire est très élevée pour être admis.La densité des étudiants en médecine est de 3,3 pour 100 000 habitants (contre 5,1 en Franceet 10,2 en Allemagne). Le nombre d’admissions dans les universités est passé de 4 118 en1984 à 4 778 (dont 375 étudiants étrangers non-résidents) en 1995.

2 Source : Écosanté OCDE 1996).

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Même si les travaux sur la question ne s’accordent pas tous, on peut estimer que le tauxd’abandon, en cours de formation médicale, est d’environ 10 %, ce qui est considéré commeun chiffre élevé.

1.1.4 Les sorties du marché du travail

Le flux sortant de médecins est de 3,5 % par an, ce qui inclut les décès, les départs enretraite et les médecins n’exerçant plus (départ à l’étranger, reconversion…).On assiste, actuellement, à une diminution (de 17 % en 1974 à 13,7 % en 1988) du nombre deceux qui, cinq années après leur diplôme, ne pratiquent pas leur profession au Royaume-Uni.Dix ans après leur qualification, les estimations montrent que 16,5 % des médecins nepratiquent plus au Royaume-Uni, dont 81 % de femmes et 7,1 % travaillant à l’étranger.Le taux de départ en retraite anticipée augmente (1,2 % des consultants en 1994/1995, soit4,2 % de la tranche d’âge 50-59 ans).

1.1.5 Répartition par spécialité et modes de pratique

Le nombre d’étudiants débutant une formation de médecine générale a diminué de 15 % encinq ans.Le nombre de médecins a plus rapidement augmenté dans le secteur hospitalier (Hospital andCommunity Health Services ou HCHS) que dans le secteur ambulatoire (General MedicalServices ou GMS) et ceci, aussi bien pour les médecins britanniques que pour les médecinsétrangers. La part des médecins employés uniquement par le secteur non-NHS (médecineprivée, industrie, forces armées, départements gouvernementaux) reste faible. En fait, lamajorité y travaillent en complément d’un emploi dans le service public. Par conséquent, ilsfigurent aussi dans la base de donnée du NHS (7 000 n’y seraient pas enregistrés).

Tableau 1 : évolution du nombre de médecins dans le National Health Servicesur 20 ans (1976-1996) par type d’activité

1976 1986 1996 Accroissement annuelmoyen

Nombre de médecinsNHS

71 220 85 160 102 610 1,8%

Hospital consultants* 14 100 17 160 23 680 2,6%GP principals** 25 380 30 180 33 230 1,4%

Source : Key facts 1997. British Medical Association*grade le plus élevé dans la hiérarchie médicale hospitalière (équivalent français de PH)** grade le plus élevé en médecine générale (équivalent français de médecin généraliste maître de stage)

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Tableau 2 : répartition des médecins NHSpar type d’activité entre 1991 et 1996

1991 1996 Tauxd’accroissement

annuelHospitalconsultants

19 580 23 680 3,9%

GP Principals 31 630 33 190 1,0%Juniors doctors*** 29 930 34 360 2,8%Autres HCHSdoctors3

8 170 8 660 1,2%

Autres GMSdoctors4

2 810 2 730 -0,6%

Total 92 120 102 610 2,2%*** médecins en formation (équivalent français d'interne de spécialité ou de médecine générale)Source : Key facts 1997. British Medical Association

Tableau 3 : répartition des postes du personnel médical hospitalier en 1997

Hospital medical staffConsultants* 24 090Associate specialists* 1 540Staff grades* 3 050Registrar groups** 13 160Senior house officers** 17 560House officers** 4 170Hospital practionners*** 940Clinical assistants*** 6 860Autres*** 50Total 71 420

Source : Key facts 1997. British Medical Association*Carrer grades : postes définitifs d'exercice hospitalier, le garde de consultant étant le plus élevé.** Junior grades : postes de formation, *** Other hospital grades : postes hospitaliers intermédiaires.

Tableau 4 : répartition des postes du personnel médical ambulatoire en 1997

General PractionnersUnrestricted principals 32 480Restricted principals 110Assistants 600LIZ assistants and associates 300Trainees** 1 680Associates 50Ophtalmic medicalpractionners

790

Total 36 010Source : Key facts 1997. British Medical Association

** médecins généralistes en formation

1.1.6 Les médecins étrangers jouent un rôle important au Royaume-Uni

Le premier fait marquant est la proportion de médecins étrangers. Le Royaume-Uni, partradition mais aussi pour ajuster son contingent de médecins aux besoins, accueille beaucoupd’étudiants étrangers.

3 Médecins hospitaliers d’un autre grade que celui de consultant.4 Médecins du secteur ambulatoire n’ayant pas le titre de « principal ».

73

La proportion de médecins étrangers est passée de 21 % en 1991 à 24 % en 1996. Une partimportante de ces médecins sont des internes (« juniors doctors »). Ils ne sont pas répartis, àpart égale, dans toutes les spécialités et représentent, par exemple, plus de 50 % desgynécologues obstétriciens. Ceux qui ont obtenu le grade de consultant occupent surtout despostes en gériatrie, en psychiatrie et aux urgences. Le ratio de médecins étrangers varie de64 % parmi les « staff grades » (statut intermédiaire des médecins hospitaliers) à 15 % parmiles consultants (praticiens hospitaliers).

Tableau 5 : proportion de médecins étrangers au Royaume -Uni en 1991 et 1996

1991 1996 Taux d’accroissementannuel

Médecinsbritanniques

72 670 78 230 1,5%

Médecins étrangers 19 450 24 390 4,6%Total 92 120 102 610 2,2%

Source : Key facts 1997. British Medical Association

La plupart doivent quitter le Royaume-Uni dès la fin de leur formation. C’est la raison pourlaquelle le Royaume-Uni doit renouveler ses effectifs étrangers en formation.Depuis la nouvelle législation de 1985, les médecins de nationalité étrangère qui ne sont pasrésidents et qui souhaitent travailler en médecine générale doivent obtenir un permis detravail. Ils doivent, de surcroît, subir une inspection des services d’immigration et verser200 000 £ pour pouvoir pratiquer. Par conséquent, la population de médecins généralistes avieilli, les étudiants étrangers préférant devenir spécialiste et travailler à l’hôpital. Lesmédecins étrangers exerçant à l’hôpital jouissent d’un permis de travail libre mais limité à unepériode préalablement fixée. En 1997, à la suite du rapport « Hospital Doctors », les règlesd’immigration se sont assouplies pour garantir un permis libre de travail jusqu’à l’obtentionde l’examen final qui clôture la formation médicale, le « Certificate of Completion ofSpecialist Training » (CCST). Leurs études ne sont pas financées. Certains médecinstravaillant en hôpital obtiennent un statut particulier (settled status) qui leur permet de résiderau Royaume-Uni ou un permis de travail qui leur permet d’attendre d’obtenir le « settledstatus » en travaillant, mais sans recevoir de formation spécifique.En pratique, nombreux sont les médecins étrangers qui peuvent exercer au Royaume-Uni àl’issue de leur formation (un consultant sur sept est étranger).Afin de prévenir les effets d’une pénurie de médecins sur le marché du travail international(et, en particulier, issus des pays qui approvisionnent, pour une grande part, le Royaume-Uni)ou une « fuite » des médecins britanniques vers des pays offrant des salaires plus intéressants,le Royaume-Uni cherche à accroître son autonomie (self sufficiency). On entend par« autonomie », l’obtention d’un flux de départs à l’étranger, à l’issue des études de médecine,équivalent au flux d’étrangers arrivant pour entreprendre des études de médecine alorsqu’actuellement, le taux d’accroissement annuel du contingent étranger est de 4,6 %. Laproportion de médecins étrangers devra donc être stabilisée à son niveau actuel (24 % desmédecins praticiens au Royaume-Uni). Compte tenu de la situation actuelle, cette autonomiene peut être obtenue qu’à long terme. Dans ces conditions et dans le but de maintenir l’offreactuelle en médecins en exercice, il faudrait augmenter le nombre d’admissions en formationmédicale d’environ 1 000 étudiants par an.Toutefois, on estime que le risque de pénurie est faible car le Royaume-Uni recrute dans detrès nombreux pays. De plus, la reconnaissance mutuelle des qualifications médicales enEurope permet de considérer les médecins européens comme une source flexible« d’approvisionnement ».

74

1.2 Les outils de la planification

1.2.1 Les systèmes d’information sont abondants au Royaume-Uni

Depuis de nombreuses années, le NHS réalise une collecte régulière de données en routineet par enquêtes sur :

- le nombre de médecins employés pour chaque grade et dans chaque spécialité,- les flux d’entrants et de sortants pour chaque grade et dans chaque spécialité,- les tendances susceptibles d’influencer l’offre et la demande en médecins.

1.2.1.1 Les systèmes d’information et les données collectées en routine

les bases de données sur les médecins en activité

Les plans agrégés des trusts sont soumis aux « Regional Offices » (chapitre 3.1.3.). Cesplans incluent la composition détaillée des personnels et les besoins futurs sur cinq ans. L’ensemble des plans est réuni et soumis à l’Advisory Group on Medical Education, Trainingand Staffing (chapitre 2.2.1.).

Le système actuel ne garantit pas la validité des données fournies par les trusts. Le formatde ces plans n’est pas standardisé, ce qui gêne la comparabilité des données.

Des enquêtes transversales aléatoires, initiées par le Département de la santé, recensent,annuellement, la main d’œuvre des HCHS, des GMS et des universités. Mais, la base dedonnées du Département de la Santé comporte des contradictions en raison des changementsde définition, des comptes doubles, des confusions sur les terminologies comme entre« Équivalents Temps Plein » et nombre de personnes employées. Les données se cantonnent àdonner le nombre de médecins et l’accroissement net de ce nombre mais pas les flux précisd’entrants et de sortants pour chaque spécialité ou les flux entre le secteur hospitalier et lesecteur ambulatoire. De plus, le traitement des données dure dix mois. Donc, les résultats, basés sur les données lesplus récentes, ne sont pas disponibles lors des réunions des différents comités.

Le « Specialist Workforce Advisory Group » (chap. 2.2.2.), tout comme l’organisme qui le

précédait (le Joint Planning Advisory Committee), se retrouvent confrontés à la validité desdonnées disponibles. Leurs dernières conclusions faisaient état de grandes disparités entre lestrois sources d’informations dont ils disposaient : le recensement du Département de la santé,la base des doyens des facultés (post-graduate deans) et celles des sociétés savantes (RoyalColleges).

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les bases de données sur les étudiants en formation médicale

Les « post-graduates deans » tiennent des registres de l’ensemble des étudiants suivant lecursus de la formation de base, en fonction de leurs niveaux. Ces informations sont,notamment, utilisées par le « Specialist Workforce Advisory Group » pour planifier le gradede « registrar » (correspond, dans le système français, à la fin de l’internat et au début duclinicat).

Chaque société savante (Royal College) dispose également d’une base de données sur lesétudiants.

Les services d’inscriptions des universités et des sociétés savantes possèdent aussi leur

base de données. Ils collectent des informations sur l’ensemble des étudiants entrant enmédecine (âge, domicile, cursus antérieur, origine ethnique, classe sociale). La HigherEducation Statistics Agency recueille des données sur tous les étudiants entrant à l’université. 1.2.1.2 Les études spécifiques

Le NHS réalise également des travaux de recherche spécifiques, liés directement ouindirectement à la problématique de la régulation des professions de santé. Ces recherchesportent sur :

- l’impact des nouvelles réformes (les réformes « New Deal » et « Calman ») sur l’offre et

la demande en médecins, - l’impact de la « substitution » et de l’évolution technologique des télécommunications sur

la régulation des professions de santé, - les grandes tendances sociales dans les choix de carrière (ex : féminisation du corps

médical, changement de style de vie) et leur impact sur la démographie médicale.

Ces informations sont prises en compte dans la planification future de la main d’œuvre etdans le développement de nouvelles politiques, par exemple l’établissement de schémas dereprise d’activité pour les femmes après leur grossesse ou les bourses d'assistants évitant auxjeunes médecins d’avoir à acheter des locaux pour pratiquer.

Les difficultés évoquées ci-dessus ont conduit à engager une réflexion sur une méthode

plus adéquate de recueil des données. Il est prévu de faire un enregistrement de tous lesmédecins du Royaume-Uni, tous les cinq ans, incluant leur date de naissance, leur spécialitéet leur plan de carrière. Ce type de recueil donnera une photographie des professionnels desanté mais il ne permettra pas d’identifier les flux. La « British Medical Association » considère qu’il faut améliorer les collectes d’informationdéjà en place et développer de nouveaux travaux de recherche (sur les flux, la substitution, laproductivité, la flexibilité du travail). Les modèles de projection sont présentés aux chapitres 2.1.2 et 2.2.2.

76

Figure 1 : définition annuelle des quotas d’admission dans les universités de médecinepar le MSWAG et le NSH sur la base d’une estimation de la demande de médecinsdiplômés dans les prochaines années et des flux sortants – Estimation du nombre

spécialistes nécessaires par le SWAG

;

TRUSTSè ”plans agrégés

sur 5 ans”

HEALTH

AUTHORITIES

NHSè Enquêtestransversales

GENERALMEDICALCOUNCILèè Base de

données

MSWAG ET NHSèè Estimation du besoinen médecins sur 10 ans

SWAG ET NHSèè Estimation du besoin

en médecins parspécialité sur 5 ans

Ministère de l’Education et dessciences

Ministère de la SantéHigher Education Funding Councilèèquota annuel d’admission dans

les universités de médecine

POST

GRADUATEDEANS

èè registre des

médecins encursus de

spécialisation

ADMISSIONSERVICEèè Base de

données

Ministère de l’Education et dessciences

Ministère de la SantéHigher Education Funding Councilèèquota annuel d’admission dans

les spécialités de médecine

PREMIER NIVEAU DEREGULATION DE LA

DEMOGRAPHIE MEDICALE

=DEUXIEME NIVEAU DE

REGULATION DE LADEMOGRAPHIE MEDICALE

=

77

II - La régulation des effectifs au cours des études médicales : uneplanification à long et à moyen terme

Les principaux axes de régulation de la démographie médicale et, plus précisément, deseffectifs médicaux, se situent à l’entrée des études de médecine, stade de planification à longterme, puis au moment de l'accès aux formations spécialisées, stade de planification à moyenterme. Le processus de définition du nombre de places offertes aux deux grandes étapes de laformation médicale s'appuie sur des groupes de travail, des études spécifiques et un recueild'information en routine. Les mesures de planification ne sont pas uniquement quantitatives etportent aussi sur des actions visant à améliorer la qualité des formations et des conditionsd'exercice des étudiants et des futurs professionnels.

Le cursus des études médicales et ses débouchés au sein du NHS est résumé dans la figureci dessous.

Figure 2 : le cursus des études médicales et les grades correspondant à chaque étape

Staff grade

Associatespecialist

Undergraduate medicalstudent (5 ans)

Pre-Registration HouseOfficer (un an)

Senior House Officer(de la 2 è à 3è année)

(basic specialist training)

Specialist registrar(de la 4è à la 6 è année)

(higher specialisttraining)

Consultant(Hôpital)

General PraticeRegistrar

(1 an)

General Practionner(soins primaires)

Examenfinal : CCST

Non ConsultantCareer grade

• Career grades

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Depuis 1989, les postes intermédiaires (staff grades) placés sous la responsabilité desconsultants NHS se sont développés, ce qui remet en cause le statut de consultant. On constatedans la figure que le choix entre la filière de médecine générale et les filières de spécialités sefait tardivement, après un tronc commun de 8 à 9 ans d’études. Les statuts intermédiaires (nonconsultant career grades) sont accessibles aux différentes étapes du cursus général.

Nous aborderons, successivement, les processus de régulation à long et à moyen termes, endécrivant les instances de consultation et leur rôle, les méthodes de projection utilisées, lescaractéristiques du processus de formation et les difficultés rencontrées.

2.1 La régulation du nombre d'étudiants en médecine se fait à l'entrée des étudesuniversitaires (undergraduate studies), elle est contrôlée principalement par le niveaucentral du gouvernement

Il définit, sur le long terme, la masse totale de futurs médecins qui seront sur le marché dutravail qui se traduit par nombre équivalent au numerus clausus français.

Le comité d’experts, chargé de la régulation au cours des études médicales et confronté à lapénurie des effectifs, propose trois axes de développement pour une nouvelle régulation de ladémographie médicale :

• augmenter le nombre de places en université (le gouvernement s'y emploie depuis cinqans),

• recruter plus de médecins étrangers (cette option ne sera pas retenue, la volonté deformer suffisamment de médecins sur le territoire afin de ne pas dépendre de contingentsextérieurs est clairement affichée),

• limiter au maximum les flux sortants des professionnels de santé et notamment desétudiants en médecine ; il faut éviter les abandons en cours de cursus, leur nombre étantestimé à 10 % ; les flux réels ne sont pas calculés pour le moment et le coût de formation d'unétudiant étant très élevé, on recherche une efficience budgétaire et démographique du systèmede formation.

Les étudiants jugent que la formation est conservatrice, sans flexibilité et contraignante.

Des améliorations y sont actuellement apportées, qui permettront de retenir les étudiantsdans la filière : augmentation de la flexibilité, amélioration de la formation (en coordinationavec le GMC [General Medical Council], les universités et les collèges royaux),développement du rôle du conseil d’orientation et de carrière. Avec l’implantation denouveaux programmes de formation (Tomorrow’s Doctors, etc…) et une meilleure sélection,le taux d’abandon devrait diminuer (le taux ciblé est 8 %).

2.1.1 Le nombre d’étudiants admis en première année est décidé au niveau central avecl'aide d'un comité d'experts

Le Secrétaire d'État à la Santé s'appuie sur les recommandations du « Medical WorkforceStanding Advisory Committee » (MWSAC) pour définir le nombre d'étudiants admissiblechaque année dans les facultés de médecine.Le MWSAC, créé en 1992, après une succession d'instances de concertation (annexe 1) rendcompte directement au Secrétaire d’État à la Santé des développements et de l'adéquation de

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l’offre et de la demande en médecins au Royaume-Uni.Les recommandations du MWSAC (annexe 2) portent sur le nombre de futurs étudiants àadmettre, les modalités de formation, le nombre des étudiants étrangers, les conditions derecrutement et de formation ainsi que sur les systèmes d'information de suivi. Elles ont pourbut de garantir un nombre adéquat de médecins pour chaque spécialité, tous secteursconfondus. Le MSWAG apporte des conseils sur l’équilibre à respecter entre médecinsbritanniques et médecins étrangers, en tenant compte des ressources disponibles du « FundingCouncil’s Aggregate funding » (fonds pour les universités de médecine), des honoraires desmédecins étrangers et du financement de l’installation (équipement) des étudiants cliniciens.Le MWSAC s'apparente davantage à un comité d’experts qu’à un comité représentatif desdifférents partenaires. Les membres du comité, sélectionnés sur recommandations adresséesau Ministère, sont des professeurs d’université, des médecins praticiens et des membres del'administration du NHS à différents niveaux. Il se réunit tous les 2 ou 3 ans.Le troisième et dernier rapport dans lequel sont évalués les effets des changements depratique, de la substitution entre professions et de la productivité de la main d’œuvre, de lademande en médecins a été publié en décembre 1997. Le MWSAG recommande, dans cettepublication, d’augmenter de 1 000 places le nombre d’étudiants admis à suivre des études demédecine. Le chapitre suivant éclaire, en partie, les raisons de cette recommandation.

2.1.2 Le quota d'étudiants à admettre à l'entrée des études est en partie fondé sur lerésultat d'études projectives sur 20 ans

L’évaluation des besoins futurs en médecins et donc du nombre d’étudiants à former estune tâche hasardeuse. Le Royaume-Uni a opté pour un modèle de projection simple à deuxvariables agrégées, qui sont respectivement :

1. l’estimation du taux de croissance de la demande en médecins (cette estimation se faitsur une base historique, augmentation observée du nombre de médecins sur les vingtdernières années, médecins étrangers compris),2. l'estimation du flux des sortants (nombre de médecins qui sortent du marché dutravail).

Trois scénarios ont été construits pour chacune de ces deux variables, correspondant à troisvaleurs :

* estimation du taux de croissance de la demande en médecins fixé, respectivement, à1,4 %, 1,7 % et 2 % ;* estimation du flux des sortants dans le futur, fixé respectivement à 3,1 % (ce quicorrespond à une augmentation de la durée de carrière de 3 ans malgré l’augmentation dunombre de femmes), 3,3 % (hypothèse intermédiaire) et 3,5 % (hypothèse maximum).

En croisant ces deux variables, on obtient donc neuf cas de figure. Ces différents scénariosreflètent la prise en compte des changements de pratique, mais aussi les importantes réformessur l’organisation du NHS ces 10 dernières années. Si les avancées technologiques nécessitentplus de médecins, ce phénomène n’est pas prouvé et les expériences récentes, empiriques,font même état du contraire. Elles n’ont donc pas été considérées dans le modèle.Les prévisions du nombre d’étudiants à admettre en première année de médecine sontdéterminées, pour chacun des neuf cas de figure. Ainsi, pour obtenir le même effectif demédecins britanniques en 2020 qu'en 1997, il faudrait 0 admission supplémentaire dans le cas

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où le taux annuel d’accroissement en médecins nécessaires serait de 1,4 % et celui de sortantsde la profession de 3,1 %. Mais si, par exemple, le taux de demande est de 2 %, il faudra aumoins 2 000 entrées supplémentaires. Ainsi, les variations sont extrêmement importantesselon le type de scénario choisi. Le MWSAC a retenu un scénario intermédiaire : unaccroissement de la demande de 1,7 % et un taux de sortie de 3,3 %. Il faudra donc admettre1 000 étudiants supplémentaires, soit passer de 5 000 à 6 000 admissions sur trois ans(augmentation progressive). Le choix de ce scénario est motivé, en premier lieu, par lesobservations des commissions de planification dont les estimations du taux de croissance dela demande en médecins furent systématiquement en deçà de la réalité (1,8 % de taux réelversus des prévisions allant de 0,7 à 1,5 %), ce qui explique le recours croissant et nécessaireaux médecins étrangers. Ce scénario fut également retenu dans le but d’atteindre la « selfsufficiency » du Royaume-Uni, c’est-à-dire pour ne pas augmenter le nombre de médecinsétrangers.

Pourtant, le scénario retenu semble toujours sous-estimer le taux d'accroissement de lademande en médecins puisque celui-ci fut de 2,2 % sur les cinq dernières années. Du fait de lagratuité totale des soins (sauf les soins dentaires et quelques soins ophtalmologiques), touteaugmentation de l'offre crée une forte demande. Le MSWAG a donc proposé une offre futureminimale, au regard de la demande constatée historiquement, car les pouvoirs publicsredoutent l'escalade croissante de cette dernière. Globalement, l'ensemble des points discutéspar le MSWAG (féminisation de la profession, temps partiel, arrêt maternité...) ont déterminéle choix du scénario intermédiaire. Avec un tel taux de croissance de la demande, leRoyaume-Uni atteindra une densité médicale de 270 pour 100 000 habitants, ce quicorrespond à la moyenne actuelle des pays de l’OCDE, hors Royaume-Uni. Si la densitémédicale évolue selon la même proportion dans les pays de l’OCDE, le Royaume-Uniresterait toujours largement en deçà de la moyenne d’ici 2020.

Le comité de réflexion du MWSAC est attentif au risque de former des médecins ensurnombre. Mais, étant donnée la situation actuelle, ce risque est qualifié de limité.

Même si le futur est incertain et les évaluations hasardeuses, le MWSAC met l’accent sur lanécessité d’agir. Ces recommandations sont accueillies favorablement par le gouvernementqui a, d’ores et déjà, augmenté le nombre de places à l'entrée des études de médecine.

Le département central du NHS cherche à influer sur les processus de sélection à l'entréedes universités pour une meilleure répartition géographique, ethnique et sociale des médecinsen activité.

L’augmentation du nombre d’étudiants, prévue par le Département de la santé sur la basedes recommandations du MWSAG, ne pourra avoir lieu sans une augmentation dessubventions attribuées aux universités, voire sans la création d’universités nouvelles. Le lieude formation est souvent déterminant du lieu de pratique. En effet, la présence d'un « trust »ou d'une faculté sont des facteurs explicatifs du lieu d'installation des médecins. AuRoyaume-Uni, la plupart des médecins sont formés en Angleterre et en Écosse, peu en Irlandedu Nord et au Pays de Galles.Pour ces raisons, le Ministère de la Santé avait lancé un appel d’offre auprès de toutes lesuniversités capables d’accueillir des étudiants en médecine. Leurs offres ont ensuite étéétudiées, en fonction de leur capacité à gérer ce nouveau flux d’étudiants et en fonction de

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leur localisation, en favorisant les villes de taille moyenne afin d’obtenir une meilleurerépartition géographique des étudiants, selon la densité de la population. D’autres critères desélection sont proposés dans l'appel d'offre, afin d’obtenir une population étudiante plus« représentative » de la population britannique. Ces critères sont présentés dans l'annexe 2.

La formation des étudiants étrangers est financée sur des budgets qui ne sont pas issus desressources du NHS, ce qui n’est pas le cas pour les étudiants britanniques. S’il est doncpossible de jouer sur le nombre d’étudiants étrangers, pour éviter des pressions excessives surle NHS et ses finances, le MWSAG recommande pourtant de ne pas dépasser le taux de 7,5 %étudiants étrangers parmi les admis.

Les prévisions du MWSAG portent principalement sur des éléments quantitatifs maisabordent aussi la question de la qualité de la formation et des conditions de travail. Plusieursréformes des cursus de formation, comme celle présentée par le document « Tomorrow'sDoctors », centré sur la formation ou celle adaptant les cursus aux exigences européennes,comme la réforme « Calmann » jouent un rôle important dans la régulation de la professionmédicale. Nous présentons leurs effets dans les chapitres suivants.

2.1.3 - Les conditions d'accès aux études de médecine et les modifications du cursus des« undergraduate studies »

Pour accéder aux études médicales, chaque étudiant doit adresser une demanded’admission en faculté de médecine au service central universitaire des admissions (centraluniversity admission service), en spécifiant l’université à laquelle il souhaite s’inscrire. Lademande étant supérieure à l'offre, la sélection est alors réalisée au niveau de l’université,selon ses propres critères. Cependant, un cadre général des critères de sélection a été établi parle NHS pour introduire plus d'équité, notamment sur le plan financier. Le plus souvent, lasélection à l'entrée se fait sur dossier scolaire et, de plus en plus, sur entretien. Quelquesécoles de médecine font, par ailleurs, passer un examen d’entrée.

Le cursus des études médicales de base est défini par chaque université, en tenant comptedes recommandations relatives à la formation médicale de base formulées par le « GeneralMedical Council5 ». Ce dernier est chargé de fixer des normes en ce qui concerne la formationmédicale de base et les compétences exigées aux examens, d'une part, et de veiller au respectde ces normes, d’autre part. Le NHS finance les « undergraduate studies » via le « ServiceIncrement for Teaching » (SIFT) sur un budget équivalent, en 1998, à 1,2 billions de livressterling (soit environ 13,2 milliards de francs).

La formation médicale de base se déroule sur une durée de 5 ans. Jusqu’à la fin des années90, elle est divisée en deux phases, pré clinique et clinique.La formation théorique est dispensée dans les écoles de médecine qui dépendent desuniversités. Les méthodes de formation varient selon les écoles : cours magistraux, coursindividuels donnés par un directeur d’études, activités en petits groupes, travaux personnels,approches plus communautaires ou centrées sur des problèmes spécifiques.

La formation pratique des étudiants est dispensée dans des hôpitaux du NHS, agréés à ceteffet et rattachés aux écoles de médecine. De plus en plus fréquemment, elle est aussi réaliséedans d’autres hôpitaux locaux du NHS. La plupart des universités organisent aussi des stages 5 Organisme proche dans ses attributions du conseil de l’ordre des médecins.

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en médecine générale. Les étudiants travaillent à l’hôpital, en petits groupes, supervisés parun professeur ou un médecin spécialiste (consultant), assisté des membres de rang inférieur(grades intermédiaires).

Les étudiants ont la possibilité d’interrompre leurs études pour travailler durant une annéesur un projet de recherche scientifique.

Chaque école de médecine applique ses propres méthodes de contrôle des connaissancesmais celles-ci comportent généralement :

- un examen écrit, pratique et oral à la fin de la période pré clinique,- un examen écrit et oral à la fin de la période clinique, avec une évaluation des aspectspratiques sur la base de l’approche immédiate et du suivi des cas de malades présentés auxétudiants, et de l’analyse des données cliniques. L’évaluation continue est de plus en pluspratiquée, à tous les stades des études. Lors de l’examen final, l’examinateur doit s’assurerque l’étudiant a acquis suffisamment de connaissances et de capacités en pratique cliniquepour pouvoir, sans risque, donner des consultations pendant l’année de pré-exercice (Pre-Registration House Officer). Le jeune diplômé doit exercer dans des hôpitaux et à des postesagréés pendant douze mois, dont au moins quatre en médecine et quatre en chirurgie pourobtenir son inscription pleine et entière au registre des médecins tenu par le General MedicalCouncil.

Les récentes réformes des études médicales « undergraduate » visent à améliorer la qualitédes études pour limiter les flux sortants (en réponse à la pénurie) et assurer l’efficience dusystème éducatif

La réforme « Tomorrow’s Doctors » annule la distinction entre les périodes de formationpré clinique et clinique : les stages cliniques commencent, dorénavant, dès la première année.La réforme vise, surtout, à développer une aptitude d’apprentissage plutôt qu’un bagage de« par c œur ». Un plan de formation adapté, incluant les connaissances principales, lesaptitudes et attitudes appropriées est au centre de la réforme. Cette initiative permettrait deretenir des étudiants dans un cursus devenu plus attrayant.

Jusqu’à peu, il n’existait pas de critères nationaux en matière d’agrément des hôpitaux.Depuis 1997, le gouvernement cherche à renforcer le contrôle de la qualité de l’encadrementdes étudiants dans les hôpitaux. Depuis la réforme « Thatcher » et l’autonomisation des« trusts », l’État a délégué ses responsabilités, en matière de recrutement, aux hôpitaux. Cesderniers, obligés de respecter un budget, recrutent de plus en plus de médecins à des postesintermédiaires, moins coûteux et plus flexibles à leurs yeux. L’ordre des médecins voit, danscette évolution, une menace sur la qualité des études de médecine.

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2.2 La régulation du nombre d'étudiants, dans chaque spécialité, porte sur la périodedes « postgraduate studies », elle définit sur le moyen terme la masse des futurs médecinspour chaque spécialité qui seront sur le marché du travail

2.2.1 le nombre de spécialistes à former dans chaque spécialité est décidé au niveaucentral avec l'aide d'un comité représentatif, le cursus est géré en grande partie par les« post-graduate deans » (doyens)

Le « Specialist Workforce Advisory Group » (SWAG)Créé en 1995, ce comité dépend de « l'Advisory Group on Medical Education, Training

and Staffing » (AGMETS). Il conseille les ministres, le NHS, le Département de la Santé surles ressources humaines médicales et dentaires. Il comprend des membres de la « BritishMedical Association » (BMA), des représentants du système éducatif et du NHS. Il estresponsable de la régulation du nombre de médecins en formation pour chaque spécialité, ycompris la médecine générale. Il examine les données des effectifs, actuels et futurs, pourchaque grade, recueille l'avis d'experts pour chaque spécialité et élabore des recommandationssur le nombre de « Specialist Registrars » (période qui correspond, dans le système français, àla fin de l’internat et au début du clinicat) à former chaque année, afin d’assurer une offreadéquate dans chaque spécialité et à chaque qualification.

Les « Postgraduate Deans » (doyens) sont responsables du cursus spécialisé (postgraduatetraining). Ils gèrent entièrement les salaires (de base) des « Pre-Registration HouseOfficers », pour moitié ceux des « Senior House Officers » et « Specialist Registrars », lereste étant à la charge des « trusts » et des « purchasers » (acheteurs de soins : « GPFundholders » et « Health Authorities »).Ils assurent l’adéquation entre le nombre de postes et les besoins.Ils ont la possibilité d’annuler l’agrément de postes de formation si le « trust » ne possède pasles qualités requises de formation.

2.2.2 Le quota d'étudiants à admettre dans chaque spécialité est en partie fondé sur lerésultat d'études projectives

Le SWAG produit des études projectives en démographie médicale. Il estime le nombre de« Specialist Registrars » (internes chefs de clinique) à former dans chacune des spécialités, enélaborant un modèle d'adéquation offre-demande à 5 ans, qui est détaillé ci-dessous.

L'estimation de la demande considère :

1 - les sorties d'activité, ex : 100 consultants d'anesthésie se retirent chaque année, donc sur5 ans, on compte : 100 * 5 = 500 départs ;

2 - le taux de croissance du nombre de consultants souhaité, calculé sur la base de donnéesdu recensement (augmentation historique) et sur les recommandations des CollègesRoyaux pour chaque spécialité, ex : pour l'anesthésie, ce taux d'expansion est évalué à 5 %par an pour les 5 années à venir, soit 796 postes de consultants supplémentaires à ouvrirsur 5 ans ;

3 - l'impact de la réforme « Calman » (détaillée au chapitre 2.2.4) est pris en compte dansle modèle ; dans la mesure où le temps passé à d ispenser des soins a été diminué pour les

84

étudiants post-gradués, le nombre de consultants doit ponctuellement augmenter pourassumer les charges en soins supportées auparavant par les étudiants, le temps de formationet réussir l'implantation de la réforme, soit une augmentation de : 1 601 (effectifs actuelsd'étudiants en anesthésie) * 1/6 (réduction de leur temps de travail) =267 ;

4 - le temps d'attente d'un poste après validation du « Certificate of Completion ofSpecialist Training » (CCST) est en moyenne de 6 mois. Il faut donc compenser pendantcette période un nombre d'étudiants équivalents aux départs (500) et à l'augmentationd'effectifs souhaitée (796) divisé par le nombre de semestres de formation prévus par laréforme « Calman » (5 ans * 2 = 10 semestres), soit (500+796)/10 = 130 ;

5 - la demande en consultants d'anesthésie est donc de 1 693 (=500+796+267+130) surcinq ans.

L'estimation de l'offre prend en compte :

1 - le nombre d'étudiants éligibles pour une qualification proche (CCST), exemple enanesthésie : 53 ;

2- le stock total d'étudiants post-gradués dans chaque filière, exemple en anesthésie =1 467(comprend les 53 diplômables et les 3 % de départs annuels en cours de formation enanesthésie) ;

Ainsi, l'équation offre-demande est respectée si l'on augmente de 247 le nombre d'étudiantspost-gradués sur l’ensemble de la filière « anesthésie ». Si la formation dure cinq ans, il fautadmettre cinquante étudiants de plus chaque année. Cependant, le SWAG recommande de nepas augmenter les effectifs brutalement, en raison des capacités de formation des hôpitaux,des problèmes de financement et du nombre insuffisant, pour l'instant, de candidats éligibles(par exemple, pour l'anesthésie, les recommandations sont d'ouvrir 100 places).

Les recommandations du SWAG, au-delà des projections, intègrent différents facteurssupplémentaires :

- le nombre de « Specialist Registrars » (SpR) dont le Royaume-Uni a besoin,- la possibilité de financement de ces postes (ex : en 1996/1997, devant les difficultés et lerefus des « Health Authorities » et des « GP Fundholders » de financer les nouveauxpostes de SpR, le SWAG a proposé un financement à 50 % par les doyens et 50 % par les« trusts ». Ceux-ci trusts ne voient généralement pas ces postes comme une prioritébudgétaire,- les spécialités prioritaires (ex : anesthésie, urgences),- la capacité de formation des universités et hôpitaux (les doyens estiment que lesuniversités peuvent absorber l'augmentation du nombre de SpR),- l'impact sur les « General Medical Services » (l'augmentation du nombre de SpR ne

doit pas dépouiller la filière de médecine familiale) ; en 1997/1998, le SWAG a proposéune augmentation des postes de SpR de 850 pour respecter l'équilibre entre secteurhospitalier et ambulatoire.

85

Le rapport du SWAG met l'accent sur le taux de départ des étudiants, en cours de formationde spécialité. Ce taux est difficilement prévisible et introduit une incertitude forte dans lesestimations de l’offre.

Les projections, même à moyen terme, sont délicates à réaliser, notamment en raison deschangements induits par la réforme de 1989 qui a permis aux « trusts » de recruter dupersonnel moins qualifié que les consultants. Un exemple souvent évoqué est le surnombre degynécologues obstétriciens au Royaume-Uni, malgré les projections du SWAG. En effet,plusieurs centaines de consultants (600) en obstétrique vont se retrouver prochainement ensituation de demande d'emploi, sans possibilité de carrière. Les « trusts », depuis 1989, ontplutôt recruté des sages-femmes dans les maternités. Cette profession, bien structurée auRoyaume-Uni, a ainsi élargi son champ de compétences au sein des hôpitaux mais aussi dansle secteur ambulatoire, par le développement des maisons de naissance. Les obstétriciensrécemment formés ne trouvent pas de place dans les hôpitaux du NHS, ce qui pose unvéritable problème à l'administration centrale qui organise des groupes de travail locauxmultidisciplinaires pour définir des modes d'organisation entre professionnels permettant degarantir l'emploi de part et d’autre. La garantie de l'emploi est un engagement traditionnel del'administration vis-à-vis des professionnels.

2.2.3 Organisation du second cycle des études médicales : un quota pour chaquespécialité. Le contenu de la formation, déterminant dans le choix d'une spécialité, estdéfini par des comités réunissant de multiples acteurs

Ø les postes de « Pre-Registration House Officer » (PRHO)

Tous les étudiants « gradués » doivent travailler dans des postes agréés et être superviséspendant une année avant d’être inscrit comme médecins au « General Medical Council ». Ilssont alors PRHO (Pre-Registration House Officer) et reçoivent un salaire. Cette année sedivise habituellement en deux périodes de six mois ou, éventuellement, en trois périodes dequatre mois. La plupart des PRHO travaillent à l’hôpital (six mois en chirurgie générale et sixmois en médecine générale), mais le cursus devient plus flexible et il est possible de passerquatre mois en médecine générale. Le General Medical Council et les universités déterminentle contenu de la formation pendant cette année. Les doyens supervisent la formation. Lespostes sont agréés par les universités concernées. Les postes sont réservés, en premier lieu,aux étudiants du Royaume-Uni. Cette année n’est pas incluse dans le « post-graduatetraining » (formation spécialisée supérieure) qui ne débute, pour la médecine générale ou lesspécialités, qu’une fois les étudiants diplômés et enregistrés comme médecins par le« GMC ».Le cursus de spécialisation et ses différentes voies s'affirment à partir de la sixième annéed'étude et commence par une période de deux à trois années de spécialisation de base oùl'étudiant est un « Senior House Officer »

Après l’année de PRHO et l’inscription au registre des médecins, les étudiants deviennent« Senior House Officer » (SHO). Ils restent à ce grade pendant deux à trois ans et reçoiventune formation générale. Pendant ces années, ils passent les examens préparés par les Collègesroyaux, dont la validation est nécessaire pour accéder au grade supérieur. Le choix de laspécialité se prépare pendant cette période. Certains types de stages et examens sont requispour pouvoir accéder à une spécialité donnée. Ce choix est relatif dans la mesure où il existeune limitation, par quota, à l'accès aux spécialités. Les mieux classés, au terme des

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« undergraduate studies » choisissent leur stage en premier. Les facteurs liés au choix d’unespécialité sont multiples. On en retiendra quelques-uns, comme l'orientation de la formation (àvocation générale ou très médico-technique) dans une faculté, la pénibilité de la spécialité, leniveau de rémunération que la spécialité permet d'envisager. Une importante charge de travailest réalisée par les « Junior Doctors » en spécialisation. La formation médicale apparaîtorganisée, en partie, pour répondre aux besoins hospitaliers.

Ø la période de spécialisation définitive ou « higher specialist training » distingue :

l'enseignement de la médecine générale Les étudiants candidats à la médecine générale passent deux ans comme Senior House

Officers (SHO) à l’hôpital, puis un an en tant que GP Registrars en cabinet (le GP doit êtreagréé comme formateur). Les stages hospitaliers doivent couvrir au moins deux spécialitésparmi la pédiatrie, la médecine générale, la gériatrie, l’obstétrique, la psychiatrie ou lesurgences.

La formation est validée en tant qu’ « expérience de prescription » et « diplôme de fin destage accompli de façon satisfaisante ».

L’autorité responsable de la spécialisation, en médecine générale, est le JCPTGP (JointCommittee on Postgraduate Training for General Practice, organisme indépendant du« Royal College of General Practitionners » mais l’y faisant participer). Il décerne uncertificat d’expérience de prescription, le « Certificate of Prescribed Experience ». Leprogramme de formation est organisé, par les universités, sur les recommandations deconseillers régionaux en médecine générale qui connaissent les postes agréés. Un systèmed’évaluation des compétences (« Summative Assessment ») pour les « GP registrars » entrantdans la pratique est actuellement mis en place par le JCPTGP. Cet examen de fin d'étude faitpartie des points importants du renouveau et de l'amélioration de la formation. Il consiste enune évaluation des connaissances, des aptitudes à résoudre un problème, des compétencescliniques, des aptitudes à mener une consultation et un audit. Le test se fait par questionnaire àchoix multiple, un rapport écrit sur la pratique, une évaluation des compétences lors desconsultations et un rapport de l’enseignant formateur. À l’avenir, tous les « GPs » devrontpasser cet examen ou son équivalent.

les spécialités hors médecine générale Le grade supérieur est celui de « Specialist Registrar » et chaque spécialité a une formation

propre. Cette formation dure trois années. Le choix des postes est concurrentiel. Tous lesmédecins sont encouragés à faire de la recherche pendant leur formation spécialisée. Au termede la formation, l’étudiant obtient le CCST et le titre de « consultant ». Les « consultants » ontune responsabilité de soins et de formation vis-à-vis des « Junior Doctors ». Le contenu des études est défini par les organismes régulateurs (le GMC et le « SpecialistTraining Authority of the Royal Colleges » -STA-), les corps professionnels (les collègesroyaux), les universités (doyens), le Département de la santé et le NHS. Le STA a été créé en1996 pour veiller à l’application de la directive européenne 93/16/CEE concernant laformation médicale (European Specialist Medical Qualification Order). Il est composé de

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membres des collèges royaux, des facultés de médecine, du GMC, des doyens et de deuxreprésentants du Secrétariat d’État à la santé. Il revient aux collèges royaux de mener les examens appropriés, les évaluations régulières, depublier les livres de référence, d’inspecter les programmes de formation. Le STA s’assure queles activités et publications des collèges royaux sont conformes à la directive européennesuscitée. Il n’est pas responsable de la formation spécialisée en médecine générale.

Le STA remet le « Certificate of Completion of Specialist Training (CCST) » qui valide latotalité du cursus et le GMC en tient le registre. Il y a obligation légale pour tout médecinspécialisé de s’inscrire au registre du GMC, hormis les médecins exerçant uniquement dans lesecteur non-NHS. Les « Joint Higher Training Committees » conseillent le STA sur l’aptitudedu médecin, au regard de sa formation, à recevoir le CCST.

autres grades : filière en dehors des grades de consultants

Il existe d’autres possibilités, pour ceux qui ne veulent ou ne peuvent pas être consultants.Il s’agit des grades de carrières permanents (intermédiaires), permettant de pratiquer àl’hôpital, auxquels les étudiants accèdent après le grade de Specialist House Officer à la fin dela formation spécialisée de base sans suivre la formation spécialisée supérieure. Les « Associate Specialists » sont des médecins expérimentés dans la pratique hospitalièremais exercent sous la responsabilité des consultants. Les postes sont pourvus par nominationindividuelle et peuvent être créés quand le besoin s’en fait ressentir et que le poste ne requiertpas de consultant.

L’autorisation d’exercer est délivrée par le « General Medical Council » sans limitation etautomatiquement dès l'obtention de la qualification

Ø le « General Medical Council » (GMC) Cette institution opère l’enregistrement de tous les médecins. Un médecin souhaitant être

consultant au NHS doit figurer dans la base. Tout médecin enregistré par le GMC faitautomatiquement partie du NHS et voit donc ses prestations prises en charge. En fait, il y aobligation légale d’être inscrits au GMC, sauf pour les médecins n’ayant pas passé contratavec le NHS. Les médecins étrangers peuvent faire une demande d’enregistrement qui leur permettra depratiquer, sous contrôle, dans certains postes agréés.Le GMC a la possibilité de radier un médecin de sa liste et de lui retirer sa licence.

2.2.4 Les récentes réformes des études médicales spécialisées « postgraduate » visent àaméliorer la qualité des études pour limiter les flux sortants (en réponse à la pénurie) etassurer l’efficience du système éducatif

Depuis le début des années 90, plusieurs réformes se sont intéressées à l'organisation de laformation et aux conditions de travail des étudiants en médecine. Elles visent principalementà diminuer l'abandon des étudiants en cours de cursus.

Le New Deal (1991) a posé les limites du temps de travail par semaine (56 heures pour un

temps plein). Il a introduit deux nouveaux types d'organisation du travail (postes plein temps

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et mi-temps qui accompagnent le système précédent de « on-call rota ») et a réduit la chargede travail des « juniors doctors ». Ce texte a apporté des améliorations de leur environnementde travail (normes d’installation et de restauration). Cette réforme s'est construite autour de laqualité des soins et de la formation. Elle stipule également le nombre d’heures en continu à nepas dépasser (14 heures pour un temps plein) et le délai minimum de récupération (8 heurespour un temps plein). Depuis 1996, les contrats d’emploi pour les étudiants ne sont plusrédigés par l’État mais par les trusts, encadrés par les recommandations et la surveillance duNHS. Cette organisation peut gêner la mise en place des différents projets. Les doyens jouentun rôle important de contrôle de la qualité de la formation. Ils peuvent retirer le financementsi celle-ci leur semble inadéquate. La réduction du temps de travail ne peut se mettre en place sans mesures conjointes.

1. Des changements organisationnels : réduire au minimum la disponibilité des sallesopératoires en urgence, une seule salle d'admission par hôpital, une infirmière senior ou unautre praticien pour répondre aux appels d'urgence et éviter les interruptions lors des tempsde repos.2. Substitution de tâches : confier à un personnel non médical mais dûment formé destâches traditionnellement accomplies par les « juniors doctors » (préparation etadministration de médicaments en IV, ECG, sutures) ou à un personnel administratif(codage de données...).

Publié en 1993, le rapport Calman appelé officiellement « Hospital Doctors : Training forthe Future » avait pour but de limiter les abandons en cours de cursus, en diminuant la duréedes études et en augmentant la flexibilité de la formation. Il s'est traduit par :

- l’introduction de programmes de formation plus courts, plus structurés et de meilleurequalité, toujours organisés par les collèges royaux et avec un examen de validation (CCST)selon le principe de la directive européenne,- l’établissement d’un titre unique remplaçant les « Career » et les « Senior Registrars »,les « Specialist Registrars »,- l’introduction du CCST, nécessaire pour accéder à un poste de « Consultant »,- une formation flexible (notamment pour les SHO et SpR) avec aménagement du temps detravail et de formation.

Les « Juniors Doctors » (SHO et SpR) disposent de moins de temps pour la formation et letravail clinique, ce qui augmente la charge de travail des « Consultants ». Or, ces dernierssont aussi censés consacrer plus de temps à la formation des étudiants. Seul le recrutementd’un grand nombre de « Consultants » permettra d’implanter cette réforme avec succès. Le texte de la réforme indique, d’ailleurs, que les objectifs de cette réforme vont de pair avecl’augmentation du nombre de SpR. Comme les médecins accèderont au statut de « Consultant » plus précocement que leursprédécesseurs, ils seront moins expérimentés et devront suivre une formation médicalecontinue qui occupera, également, une partie de leur temps de travail clinique.

Le GMC a publié, en 1997, le rapport « The New Doctor » qui propose une amélioration dela qualité de formation des PRHO en médecine générale, pour réduire le nombre d’abandonsdes étudiants pendant cette année. Il est difficile d’évaluer l’impact de « The New Doctor »sur l’offre. Il est probable que cela ne change l’offre que dans les zones où il existait un déficitde formation.

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III La régulation du marché du travail : une régulation à court terme

3.1 La régulation à court terme se décide au niveau local et non plus central depuis 1989

La réforme du marché interne a diminué le contrôle central de la gestion des ressourceshumaines au sein du NHS avec des conséquences, considérées comme dommageables pour laqualité des services délivrés aux patients mais aussi pour la formation délivrée aux étudiantset la garantie de l'emploi, qui est une tradition du NHS. Un dispositif institutionnel spécifiqueintégré de planification des ressources humaines a été mis en place au cours des années 90dont la synthèse est présentée en annexe n° 1. Le but était d'améliorer la coordination de :

- la planification médicale et paramédicale,- la gestion des ressources humaines, la formation initiale et la formation continue,- les secteurs primaires et secondaires.

Plusieurs instances de conseils et de concertation ont été créées (LMWAG, Consortia, REDG)sans remettre en question le déplacement des pouvoirs induit par la réforme du marché interneet sans développer de système incitatif positif utilisable par les organismes chargés desuperviser et prévoir les besoins. La question de la régulation du marché du travail, dans lebut de garantir la qualité des soins et la qualité des formations, par l'encadrement des« trusts » reste une question importante et un sujet de réflexion et d'analyse actuel au sein duNHS.

3.1.1 - En secteur ambulatoire, la régulation de la répartition géographique des GPexiste depuis la création du NHS

Plusieurs acteurs administratifs et professionnels interviennent au niveau local (district). Les « Health Authorities » sont chargées des services de médecine générale (soins primaires),des besoins en personnel, en formation et de la réalisation des projections à cinq ans. Pourcela, elles consultent les professionnels médicaux localement. Ces informations sont utiliséespar les « Consortia » pour la planification des professions paramédicales et par les « HealthAuthorities » pour publier les postes vacants approuvés par le « Medical PracticeCommittee ».

Les « Medical Practice Committees », créés dès 1946, sont composés majoritairement demédecins généralistes (cinq des huit membres doivent être des GPs dont quatre en activité). Leur fonction est de contrôler, localement, la distribution des GPs sur le district. Traditionnellement, le souci des « MPC » est de ne pas être avoir plus de GPs que nécessairesur le district. Si le nombre de médecins généralistes dans une région donnée est jugé adéquatou excédentaire, ils peuvent refuser une nouvelle admission sur la liste des médecins détenuepar les « Health Authorities ». Les MPC jugent de l’adéquation offre/demande sur la base du nombre de patients enregistréspour chaque GP (équivalent temps plein avec une marge de 10 %). Quatre types de zone ont été ainsi définis en 1981 :

- les zones « désignées » correspondent aux régions où les médecins ont en moyenne 2 500patients inscrits sur leur liste,- les zones « ouvertes » correspondent aux régions où les médecins ont en moyenne 2 100à 2 500 patients inscrits sur leur liste,

90

- les zones « intermédiaires » correspondent aux régions où les médecins ont en moyenne1 700 à 2 100 patients inscrits sur leur liste,- les zones « restreintes » correspondent aux régions où les médecins ont une moyenne depatients inscrits sur leur liste inférieure à 1 700.

D'autres critères, tels que le caractère déshérité de la zone (« deprivation status ») et lesengagements extérieurs des GPs sont pris en compte. Les « Medical Practice Committees »peuvent ainsi déterminer les besoins en temps pleins et en temps partiels (la taille moyenned'une liste au Royaume-Uni est de 2 000 patients). Ces listes sont, cependant, remises encause car elles ne tiennent pas compte du profil du patient, de son risque et donc de sonbesoin potentiel en services médicaux. De nouveaux critères, plus fins, sont en coursd'élaboration, incluant la charge de travail du médecin généraliste et plus seulement sa liste depatients dans l'évaluation de l'adéquation de l'offre en médecins. Les « Medical PracticeCommittees » jouent donc un rôle important dans la régulation du marché du travail desmédecins généralistes. Cependant, la responsabilité de la répartition géographique revient aux« Health Authorities » qui acceptent, ou non, l'installation d'un nouveau médecin, la reprised'un cabinet ou son agrandissement. Les MPC sont devenus, en 1997, des organesconsultatifs.

Les « HA » et les « MPC » ont également hérité de rôles nouveaux dans le « NHS Primary

Care Act » de 1997. Cet acte donne aux trusts et aux GP la possibilité d’explorer les moyenspermettant d’augmenter la flexibilité locale dans la délivrance de soins, par le développementd'une plus grande collaboration interprofessionnelle pour intégrer médecine primaire,médecine spécialisée et prise en charge sociale. D’autres initiatives cherchent à intégrer lesavancées technologiques, les modes de communications nouveaux et les innovations enmatière de répartition des tâches au sein de projets pilotes.

3.1.2 Après une dérégulation importante avec l'introduction du marché interne, lesecteur hospitalier a récemment fait l'objet de réformes pour mieux ajuster la gestiondes ressources humaines à l'hôpital aux exigences de qualité définies au niveau nationalpar le « Quality Framework »

L’ensemble des institutions impliquées dans la régulation du marché du travail hospitalierest présenté sur la figure ci-dessous. Les liens entre ces différents acteurs y sont brièvementexpliqués.

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Figure 3 : le rôle des LMWAGS dans la régulation de la profession médicaleemployée par les trusts

Avant 1990 et la réforme « Thatcher », l'État central administrait les hôpitaux en régiedirecte par l'intermédiaire de l'administration régionale. Le niveau central fixait le nombre demédecins devant être recrutés et, en particulier, le taux de « non consultant career grades »,qui ne devait pas dépasser dix pour cent des médecins hospitaliers consultants. A leur créationen 1991, les hôpitaux regroupés en trusts ont acquis le statut d'établissements autonomespublics, dotés d’une personnalité morale et d'un patrimoine propre. Ils ont ainsi obtenu unniveau de liberté important quant à la gestion de leurs ressources humaines, qui devait faireappel à l’innovation, aux initiatives et à l’imagination. Or, le contrôle par les servicescentraux des différents grades des médecins (décrits dans le document « Achieving aBalance » en 1987) fut maintenu. Les trusts contournèrent ces règlements en engageant desmédecins qui n’appartenaient pas aux grades « standards » et créèrent, ainsi, des gradesambigus, inconnus des patients, sans y associer de niveaux de compétence définis,d’évolution de carrière ou de contenu du travail.

Suite à l'introduction du marché interne, les hôpitaux se trouvent confrontés à de nouvelles

responsabilités (gestion budgétaire, planification des ressources humaines et dudéveloppement, accréditation auprès des « Commissions of Health Improvement »,implantation des nouvelles réformes des études médicales...).

O FFICES REGIONAUX

T RUSTSLMWAGs

POSTGRADUATE

D EAN

H EALTH

A UTHORITIES

G P-F UNGHOLDERS

Forums

Plans agrégés sur 5 ans :stratégie des ressourceshumaines

Encadre et évalue les trusts dans lagestion des ressources humaine, les aideà intégrer les recommandations

Informent en cas deproblèmes de formation

NHS, MSWAG, SWAG, AGMETS

Organisent desforums de discussion

et de réflexionAcheteurs

Transmettent les plans et donnentdes prévisions sur 5 ans

recommandationsTransmet les

évaluations, donnentdes recommandations,

informent en cas deproblémes de

recrutement

Transmet lesdirectivesnationales

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Afin de s'assurer que la stratégie de gestion des ressources humaines des trusts s’accordeavec les objectifs nationaux, ceux-ci doivent soumettre des plans de gestion des ressourceshumaines et leur stratégie globale de développement prévue à cinq ans aux « RegionalOffices » (offices régionaux) qui révisent les plans de gestion des ressources humaines dechaque trust à la lumière des recommandations émanant des LMWAG. Si le LMWAG identifieune inadéquation entre la répartition des ressources humaines d’un trust et la politiquenationale, il en informe l’office régional qui négocie directement avec le trust6. Ces plans sontégalement soumis à l’AGMETS, via les offices régionaux, pour qu’ils élaborent la politiquenationale de formation médicale.

Les plans des trusts étant très hétérogènes et devant la crainte d'une dégradation de laqualité des soins et de la formation délivrée dans les trust, le niveau central a élaboré unréférentiel national pour les guider : le « Quality Framework ».

Le « Quality Framework » est conçu comme la pierre angulaire de la régulationdémographique au niveau local et remplace, à ce titre, le contrôle jusque là central du nombreet du type de médecins employés par les trusts.

Ce document propose un ensemble de références sur les conditions d'une bonne pratique,

au sein des différents établissements du NHS. Ces recommandations portent sur : - les conditions de la bonne pratique médicale, édictées par le « General MedicalCouncil », - les modèles de répartition des ressources humaines au sein des établissements(nomination des médecins aux postes de consultant, embauche de médecins remplaçants,ratios de personnels) et propose la répartition entre chaque grade de la main d'œuvremédicale au niveau national et pour chaque trust (annexe 3)7, - les moyens permettant d'identifier les blocages dans la promotion des carrières et devérifier l'équité des procédures d'embauche, - un guide de développement des démarches d'assurance-qualité précisant le rôle et laresponsabilité du « Medical Director », les conditions du maintien d'un niveaud'excellence, les méthodes d'audit clinique et la formation médicale continue (« ContinuingProfessionnal Development »), - un guide de gestion des problèmes (comme les accidents et les plaintes de patients,...).

Local Medical Workforce Advisory Groups (LMWAG)

6 En référence au « Quality framework »7 Sont proposés le ratio de consultants par rapport aux autres grades (junior doctors et career grades) dans 15spécialités différentes selon les différents types de trusts (tout trust confondu, soins aigus, soins mixtes, hôpitaluniversitaire de soins aigus et hôpitaux psychiatriques). Les trusts peuvent donc comparer la distribution de leurpersonnel par rapport à des trusts à activité similaire ou par rapport à l'ensemble des trusts et identifierd'éventuelles pénuries dans certains grades (exemple de tableaux en annexe1). Par exemple : pour l'ensembledes trusts, dans les services d'urgence, 37 hôpitaux emploient de 5 à 10 % de consultants parmi l'ensemble dupersonnel médical des urgences, 81 hôpitaux emploient 10 à 15 % de consultants. Ces ratios ne définissent enaucun cas un objectif à atteindre. Il s'agit de données évolutives qui servent de point de départ aux réflexions destrusts, des LMWAGs , aux Offices régionaux et aux acheteurs. Cependant, dans les hôpitaux à très faibleproportion de consultants, les LMWAGs et les acheteurs évaluent la capacité de chaque service à prodiguer dessoins spécialisés de niveau 'consultant'.

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Les LMWAG ont été créés en 1996. Ils s'apparentent à des comités de réflexion, d'expertiseet de conseil. Le gouvernement souhaitait engendrer un processus de réflexion visantl'amélioration de la gestion des ressources humaines, la formation des étudiants et la qualitédes soins. Ils ont un rôle d'expertise et de conseil sur les questions de recrutement, d'une part,et un rôle d'instance de débat local (échelle du district) sur le recrutement, l'organisation deséquipes de travail et les prévisions de personnel médical, d’autre part. Une centaine deLMWAG évaluent les besoins locaux de la population sur avis d'experts. Ils éclairent lesoffices régionaux sur les plans agrégés des trusts, promeuvent le dialogue entre les trusts et les« acheteurs » (« Health Authorities ») sur la qualité du personnel médical lors de forums denégociation. Ils guident les trusts dans leur stratégie en ressources humaines pour qu’ils intègrent leQuality Framework et inspirent les politiques nationales, telles que le « New Deal » et« Hospital Doctors - Training for the Future ». Il existe un LMWAG par « deanery » qui est l’entité géographique dont le doyen (des étudesspécialisées) est responsable. Les membres des LMWAG sont nommés par les directionsrégionales des parties intéressées : doyen (des études spécialisées), membres des collègesroyaux, universitaires, membres de la « British Medical Association ». Le LMWAG est encontact avec le NHS, via le directeur régional de santé publique qui lui transmet lesorientations de la politique nationale souhaitée et transmet les vues du LMWAG à l’officerégional.

Le LMWAG contribue à la mise en place de la politique nationale par un contact permanent

avec le SWAG, l'AGMETS et les REDG (Regional Education and Development Groups) et parles recommandations qu’il fait au MWSAC.

Le système présenté à la figure n° 3 était une manière d’harmoniser les besoins nationaux,en termes de démographie médicale, avec une certaine flexibilité de la délivrance de soins :

- d’un côté, les responsabilités et libertés des trusts en tant qu’employeurs et fournisseursde services,- de l’autre, la formulation et l’application de standards, en termes d’éducation par laprofession médicale et les sociétés savantes.

Si la responsabilité de la régulation, au niveau local, revient au « LMWAG », elle ne peut sefaire sans les informations fournies par les trusts, qui sont difficiles à convaincre. Les « LMWAG », qui peuvent revoir les plans d’un trust, s’en tiennent à des conseils. Ils n’ontpas le pouvoir d’agréer les postes, contrairement aux « Regional Medical ManpowerCommittees » (structures antérieures à la création des « LMWAG »). Ils n’ont donc pas demoyens incitatifs ou coercitifs pour faire appliquer les politiques nationales.

Les « Consortia » et les « Regional Education and Development Groups » (REDG) ont été

créés pour mettre en place une planification locale des effectifs et de la formation desparamédicaux et, aussi, afin de l’associer à la régulation des professions médicales.

L’une des priorités est d’améliorer l’articulation entre la régulation des professionsmédicales et la régulation des professions paramédicales. Les « Consortia » sont constitués dereprésentants des autorités publiques, des trusts et autres personnels de santé. Ils fournissentdes estimations des besoins en main d'œuvre paramédicale et, de ce fait, en formation. Cesrecommandations sont formulées par l'intermédiaire des « REDG ». Les « Consortia » ont la

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responsabilité de l’organisation de l’éducation et de la formation continue pour tous lesprofessionnels de santé paramédicaux (Guide to Workforce Planning in Consortia). Ils travaillent donc parallèlement aux « LMWAG » en supervisant et conseillant la régulationdes professionnels paramédicaux. Chaque consortium est représenté au sein du « REDG » quicomprend l’Office régional et un expert indépendant en éducation. Les « Consortia »soumettent aux « REDG » des propositions que ce dernier examine pour conseiller l’Officerégional.

Figure 4 : évaluation et planification des ressources humaines paramédicalespar les REG et les Consortia

L'évaluation des besoins en personnel médical et paramédical et en formations est donc

réalisées à l'échelon régional, par l'intermédiaire des « Consortia » et des « LMWAGs »,permettant ainsi une gestion intégrée des différentes professions.

l'effet de ce dispositif reste limité

Dans le système actuel, les « LMWAG » ne jouent pas de rôle direct dans la gestion desressources humaines des trusts. Face aux pressions financières et la pénurie de personnelmédical, les trusts continuent d’user de leur liberté de gestion du personnel en substituant,notamment, des tâches dévolues aux « consultants » à des internes en formation et desmédecins « staff grades » pour un coût inférieur. Ces derniers acceptent des tâchescontraignantes, telles que les gardes et sont utilisés pour pallier, à moindre coût, à la

ForumsForums

Regional Education Groups

CONSORTIA

Trusts

HEALTHAUTHORITIES

TRUSTS

HEALTHAUTHORITIES

CONSORTIA

Regional offices

Evaluation des ressourceshumaines paramédicales etdéfinition des besoins en

formation

Transmet des plans régionaux sur les effectifs et les besoins

Transmet lesévaluations locales etfait desrecommandations

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diminution du temps de travail des « juniors doctors ». La structure des ressources humaines àl'hôpital a donc été profondément modifiée depuis l'introduction du marché interne, ce quiinquiète la direction du NHS, qui craint un appauvrissement de la formation. La recrudescencedes grades « intermédiaires » à l'hôpital inquiète également les « consultants » et les futursspécialistes car les débouchés et les garanties de carrière s'amenuisent. Cette stratégied’emploi a fait diminuer le nombre de « consultants », sur lesquels reposaient pourtant lespolitiques nationales (exprimées dans le « New Deal » et « Hospital Doctors - Training forthe Future »). Une étude (« Health Policy and Economic Research Unit ») révèle que certainsétudiants estiment être insuffisamment encadrés durant leur formation et le quart des postesoccupés par les interviewés ne sont pas conformes aux agréments du « New Deal » qui prévoitune réduction du nombre d’heures de travail. Ainsi, les nouvelles responsabilités des trustsconcernant l’emploi des jeunes médecins gênent la mise en place d’une formation adaptée.

La réforme « Calman », qui prévoyait une augmentation du nombre de « registrars », estlimitée de la même manière par le système actuel, dans la mesure où les « post-graduatedeans » ne gèrent que 50 % du salaire des « registrars » et que l’autre moitié est gérée par lestrusts et les acheteurs qui sont parfois dans l’impossibilité de payer. Actuellement, legouvernement ne donne pas les fonds nécessaires à l’implantation de cette réforme. En 1997,5,7 millions de livres ont été consacrées à la création de 300 postes de « registrars » alors quel’augmentation recommandée par le SWAG était de 1 600.

Au vu des pressions financières qui s'exercent sur les trusts, il est peu probable que

l’organisation actuelle, en l’absence de levier statutaire ou financier, soit suffisammentrobuste pour atteindre les buts fixés. Les guides de pratique et la coopération ne peuventaboutir, dès lors que les trusts ne disposent pas des fonds nécessaires pour créer des postes etseraient face à une pénurie de médecins pour les pourvoir. 3.1.3 Le « Review Body on Doctors’ and Dentists’ Remuneration » mène une politique derémunération en déterminant le niveau moyen de revenu des médecins : il contribue àgommer les écarts qui valoriseraient trop un mode de pratique ou une spécialité

Le niveau de rémunération n’est pas, au Royaume-Uni, un déterminant fort sur le choix dela spécialité car les écarts sont limités (annexe 4). Il existe une politique de rémunération qui tient compte des besoins en effectifs et de leurrépartition entre GP et spécialistes. Le « Review Body on Doctors’ and Dentists’ Remuneration », créé en 1971, est un comitéindépendant, qui n’est pas composé de professionnels. Son rôle est de faire desrecommandations au Premier Ministre et au Secrétaire d’État à la Santé sur les niveaux derémunération des médecins et dentistes prenant part au NHS et sur l’augmentation annuelle deces rémunérations. La « British Medical Association » accorde une grande importance au faitqu’il reste indépendant. Le Review Body prend en compte :

- les besoins en médecins et dentistes, en termes d’embauche et de motivation,- les objectifs de rentabilité du Département de la Santé pour la délivrance de soins, telsqu’ils sont présentés par le gouvernement,- les fonds disponibles,- les objectifs gouvernementaux en matière d’inflation.

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Le « Review Body » prend en considération les politiques économiques du gouvernementet des représentants professionnels, ainsi que les projets de modernisation du système de santéet les nouvelles formes d'organisation du travail.

Le Trésor et la Banque d’Angleterre ne souhaitent pas qu’une augmentation supérieure à

4.5 % soit accordée si l’objectif du gouvernement, en matière d’inflation, reste à 2.5 %. Lesdifférentes parties présentent des points de vue très divergents que le « RBDDRB » prend encompte. La rémunération des praticiens reste comparable à celle d’autres professions. Le système ne présente pas de difficultés majeures pour l’embauche du personnel, sauf dansquelques spécialités, comme la psychiatrie et l’anesthésie, mais qui ne requièrent pas, pour lemoment, de politique de rémunération. Il faut considérer les nouvelles organisations du travailet la manière dont elles sont valorisées, notamment les départs à la retraites qui doivent êtrerepensés pour permettre aux anciens « consultants » de rester dans le NHS, s’ils le souhaitent. Les études des sociétés de conseil MORI et KPMG trouvent que la charge de travail des« consultants » a augmenté ces dernières années, à la fois en durée et en intensité. Le ver unepartie des pressions sur les « consultants » passe également par une meilleure reconnaissancefinancière. L’échelle de salaire des « consultants », spécialistes associés, « staff grade practioners » et« clinical assistants » devrait augmenter de 3,5 % (RBDDRB, 1999).

3.2 Les acteurs de la régulation estiment leur besoin en professionnels àpartir des composants et déterminants de la force de travail et de leursévolutions 3.2.1 Ampleur de la production : durée et charge de travail 3.2.1.1 Durée du travail

Pour la médecine primaire comme pour la médecine hospitalière, les évolutions souhaitéessont les mêmes : année sabbatique, mi-temps, mobilité en cours de carrière. Les médecinsveulent diminuer leur temps de travail.

« Primary Care : Delivering the Future » développe des initiatives, telles que : - schéma salarié au sein des « GMS » ; - schéma de « rétention » de médecins qui leur permet d’avoir une petite activité médicalesalariée et des cours de maintien de connaissances (600 GP sont dans ce cas) ; cette mesurepermet d’éviter les départs de médecins qui, sans chercher à arrêter totalement, ne veulentavoir qu’une activité très réduite.

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3.2.1.2 Volume d’activité fortement dépendant de modes de rémunération

v l’hôpital Le contenu de l’activité hospitalière se diversifie, sans augmentation sensible du nombre

de professionnels. La charge de travail et la pénibilité sont donc croissantes et empêchent lamise en place des nouvelles réformes. Jusqu’à présent, la charge de travail était massive pour les médecins du NHS. Les premièresmesures prises, face à la pénurie, furent, sous la contrainte budgétaire, non pas l’augmentationdes effectifs mais l’augmentation de l’efficience du travail. Cependant, si des gains deproductivité ont déjà été obtenus ces dernières années, malgré l’augmentation de la charge detravail non clinique (Continuing Professional Development, Continuing Medical Education,activités d’audit médical et clinique) de management comme l’animation d’équipespluridisciplinaires, il paraît difficile d’aller au-delà. On constate une baisse du moral des « consultants », due à la charge grandissante de travail etau fait que le nombre de consultants n’a pas augmenté comme il était prévu, lors de la mise enplace de la réforme « Calman » sur les formations.

v la médecine de soins primaires Il n’existe pas au Royaume-Uni de limitation du volume d’actes effectués : ni seuil

minimal, ni maximal. Les médecins hospitaliers sont salariés. Leur activité se diversifie (on assiste, d’ailleurs, à une augmentation du nombre de problèmestraités par les GP, par consultation). La rémunération des médecins de première ligne (annexe 3) se fait par la combinaison dequatre modes :

- forfait « per capita » (versement trimestriel en fonction du nombre de patients inscrits surliste du médecin, ajusté sur l’âge des patients),- paiement à l’acte pour certaines prestations comme les consultations hors du cabinet, lesvaccinations, les actes de dépistage…,- somme forfaitaire correspondant aux frais fixes des cabinets médicaux,- remboursement direct de certains frais comme les loyers, les charges sociales de certainsemployés, les médicaments distribués…

L’activité est fortement régulée au Royaume-Uni par les modes de rémunération. Par contre,le niveau des rémunérations, notamment entre GP et spécialistes, intervient peu (chap. 3.1.4). 3.2.2 Organisation des soins et pratiques médicales

Le temps et la charge de travail ne donnent qu’un aperçu grossier de la productionmédicale. En effet, les pouvoirs publics cherchent à mieux gérer et organiser la fonction de dispensateurde soins. Outre l’amélioration de la qualité des soins, diverses initiatives visent à maîtriser lescoûts. L’organisation du système de soins et le champ de compétence des professionnelsrégulent le contenu de l’activité médicale et, ainsi, le besoin en effectifs médicaux.

3.2.2.1 La « hiérarchisation des soins »

Le système britannique comporte deux niveaux principaux de soins qui sont : la médecinegénérale de première ligne, d’une part, la médecine spécialisée et le plateau techniqued’investigations (exclusivement hospitaliers), d’autre part. Le médecin généraliste a un rôle

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de « gate-keeper », c’est-à-dire qu’il contrôle l’accès à la médecine spécialisée, sauf pour lesurgences. Tout citoyen britannique doit s’inscrire sur la liste d’un cabinet de médecinsgénéralistes, mais il garde la possibilité de consulter dans le secteur privé. Il n’existe aucunerestriction au changement de médecin. Mais cette liberté est rarement utilisée, sauf en cas dechangement de lieu de résidence. Les politiques accordent donc un rôle primordial aux soins communautaires qui requièrent unnombre plus important de GP. 3.2.2.2 Les pratiques professionnelles encadrées par un champ de compétence

Le champ de compétence est principalement défini par les qualifications. L'ensemble desspécialités existantes est décrit à l’annexe 5. Ces compétences ne font pas l’objet de nouvelles validations en cours de carrière : jusqu’àprésent, il n’existe pas de procédures de re-certification, ni d’obligation de participer à laformation médicale continue (CME), à laquelle les GP prennent part sur la base duvolontariat.

Pourtant, les champs de pratique sont implicitement définis par les « trusts » et gardent des

contours flous. La liberté de substitution est limitée. Selon la situation locale, se mettent enplace des ateliers (« local workshops ») où les professionnels médicaux et paramédicauxdiscutent du partage des tâches et de la coordination des soins. Ces espaces de réflexion sontrécents et rien n'a été, pour le moment, mis en œuvre. L'un des exemples le plus souvent citéest celui de l'articulation du travail entre sages-femmes et obstétriciens, ces derniers étantactuellement en surnombre. La substitution apparaît comme un outil intéressant pour éviter l’inflation de la démographiemédicale. Mais la profession des infirmières connaît également une pénurie et peu d’entreelles souhaitent relayer les médecins. D’autre part, leur formation n’est pas adéquate pourmaintenir, dans le cadre d’une substitution, la qualité des soins et cela requerrait temps etargent. La substitution des tâches entre professions médicales et paramédicales (« skill mix »)apparaît comme un élément susceptible de pallier aux écarts entre offre et demande, du pointde vue des régulateurs. Sachant que les deux tiers des dépenses du NHS concernent les ressources humaines,l’utilisation optimale des forces de travail est centrale et fait apparaître la substitution commeune solution intéressante.

Un réel travail d’équipes pluridisciplinaires, dans lesquelles des rôles traditionnels et leurslimites se brouillent, se développe dans le secteur des soins primaires (surtout en médecinegénérale, réhabilitation, gériatrie, santé mentale) comme en témoigne l’importanteaugmentation du nombre d’infirmières employées. La médecine générale développe, de plus,des modes d’organisation du travail pluridisciplinaires, même si se développent dessubstitutions dans certaines spécialités (rôle des infirmières de néphrologie : « renal nurses »). Mais le recrutement d’infirmières en médecine générale semble plutôt élargir l’offre deservices que réduire la demande en médecins, ce qui invaliderait les effets de la substitution. Les recherches menées par l’Université de York montrent que seulement 5 % de la tâche d’unmédecin peut être déléguée et que, pour assurer la sécurité des services délivrés parsubstitution, il faut mettre en place des systèmes complexes. Dans les hôpitaux, la libre gestion des ressources humaines pousse les « trusts » à engager despersonnels ayant des aptitudes bien définies pour un travail spécifique. La substitution

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apparaît comme une solution pour réduire les heures de travail des « juniors doctors ». Celaest bénéfique pour le patient, pour les infirmières (individuellement), pour le développementde leur profession et pour les « juniors doctors » qui peuvent consacrer plus de leur temps àleur formation.

Cette substitution est-elle « coût efficace » ? Plusieurs études portent sur les « nurse practioners » : trois études ne trouvent pas de gain. Une quatrième trouve un gain dans l’un des sept sites de médecine générale étudiés. Pour les sages-femmes : deux études réalisées à l’hôpital montrent un léger gain dans un caset, dans la seconde, que le travail n’est pas partagé pour un seul patient mais entre les patients,les sages-femmes prenant en charge les cas à bas risque. Pour les « Nurse grade mix », une importante étude commandée par le Département de laSanté n’apporte pas, aujourd’hui, de conclusion claire. Si, en termes de coûts, les gains ne peuvent être prouvés, en termes de pénurie médicale, lasubstitution a de l’intérêt car elle permet de réduire le temps de travail des médecins, pallier àune pénurie, mieux répartir les tâches, développer les aptitudes des infirmières et autresprofessionnels de soins. Il existe, donc, des possibilités d’élever le niveau de pratique et derevaloriser certains métiers, tant médicaux que non médicaux. Mais la substitution n’estenvisagée, en période de pénurie, qu’à court terme car employer des médecins serait plus« coût-efficace ».

v le Royaume-Uni s’engage donc prudemment dans la substitution, en raison :

• des différences de culture, de langage et de perspectives entre les différentes professions,• des inquiétudes du public,

• de la législation qui ne définit pas de cadre de la pratique de la substitution,

• du besoin de changer la formation,

• du « MWSAC » qui ne pense pas que la substitution apportera une solution à la demandecroissante en médecins qui s’exprime dans le système de soins.

3.2.2.3 L’évolution des pratiques et des technologies modifie également l’offre et lesbesoins en professionnels de santé

Les changements de pratique ont un impact plus important sur le nombre de« consultants » que sur celui des étudiants en médecine : cet impact est relatif à la chirurgieambulatoire, aux durées de séjour plus courtes, à la multiplication des investigationsinvasives. Les évolutions récentes ont promu la fonction de dispensateur de soins dans les communautéslocales plutôt que dans les institutions, à domicile plutôt qu’à l’hôpital. Ces changements depratique augmentent la demande en GP.

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en résumé

L’évaluation des besoins en professionnels de santé est une tâche hasardeuse. LeRoyaume-Uni cherche à ne pas avoir trop de médecins. Ce raisonnement se fonde,essentiellement, sur les contraintes budgétaires que s’imposent les services de santénationaux. Comme l’évaluation de la demande varie fortement selon le modèle choisi, leRoyaume-Uni base principalement son action et ses décisions sur toute une articulationcomplexe d’institutions, à la fois locales et nationales, de réflexion, constituées d’experts etsouvent indépendantes. Ce vaste système, très structuré, n’apparaît pas, comme dans d’autrespays, être un pôle de négociation. La situation de pénurie, admise par tous, relève avant tout des contraintes budgétaires trèsstrictes, propres au système « NHS ». La liberté des trusts dans la gestion de leur personnel,combinée à l’absence de fonds pour implanter une politique nationale restent les barrières lesplus importantes à lever pour assurer une qualité de formation et de soins. Cette situation limite les propositions des différents comités. D’ailleurs, la réflexion entaméesur la démographie médicale porte, surtout, sur l’autonomie de la force de travail britannique,par rapport aux médecins étrangers. Le Royaume-Uni a cherché à maximiser la productivitédes médecins, bien avant d’en augmenter le nombre. Il met aussi en place un programme de« rétention » des médecins qualifiés et des étudiants dans la filière, surtout à l’aide denouvelles organisations du temps de travail.

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Annexes Royaume-Uni

Annexe 1 : organisation générale de la planification de la main d’œuvre médicaleau Royaume-Uni

Annexe 2 : recommandations du Medical Workforce Standing Advisory Committee : ThirdReport.

Annexe 3 : extrait du Quality Framework (NHS)

Annexe 4 : la rémunération des médecins

Annexe 5 : liste des spécialités reconnues au Royaume-Uni

Coordonnées des personnes contactées

Bibliographie

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Annexe 1

Organisation générale de la planification de la main d’œuvre médicale au Royaume-Uni

MWSAC- Medical Workforce Standing Advisory

Committee

Secretary of State for Health

AGMETS- Advisory Group on Medical Education,

Training and Staffing SWAG-

Specialist Workforce Advisory Group

Regional

Office Regional Directorof Public Health

Postgraduate

Dean

TRUSTS

Quality Framework

LMWAGS- Local Medical

Workforce AdvisoryPlanning Groups

REDGs - Regional Education and

Developpment Group Consortia

Purchasers

MPC- Medical Practice Committee

Control the distribution of GPs

Department of Health NHS Executive

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Annexe 2

7: Recommendations

Introduction

1) The current workforce is made up of combination of UK6qualified doctors and doctorsfrom the EEA and overseas. About 76 % of doctors are from the UK; but this proportion hasfallen in recent years. Our analysis suggests that the gap between demand and home supplywill become increasingly severe unless measures are taken to address the problem. Asoutlined in the Executive Summary (and more fully in the main text of this Report), it seemsalmost certain that short and medium-term measures (while themselves important) can onlyalleviate, but no resolve, the growing gap between demand and home supply. 2) We believe that the home share of medical workforce should be maintained at its presentlevel and preferably increased. A marked increase in medical student numbers seemsnecessary. The Government’s decisions on implementation should take account of the abilityof the educational sector to manage expansion, and the need to maintain quality and maximiseflexibility and value for money. We consider that all the main parties will need to worktogether to manage the key issues influencing demand and supply.

Our recommendations 3) Given the changes facing the NHS and higher education in the next 20 or 30 years and theuncertainties inherent in looking this far ahead, our recommendations are designed to providea flexible and cost-effective approach, which can be reappraised in the future as necessary. Medical school intake

1) The annual intake of medical students should be increased by about, 1,000 as soon aspossible and the most cost-effective manner.

Medical education

2) Clinical courses whit graduate entry should be developed, while ensuring that suchcourses comply with EEC Medical Directive 93/16/EEC.

3) Medical schools should continue their efforts to minimise the level of wastage fromcourses, thereby increasing the proportion of entrants that qualify as doctors.

Overseas students

4) While the intake of medical students is being increased by 1,000, the number ofundergraduate medical students from overseas should be held constant.

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Recruitment and retention

5) The NHS and other employers should give further attention to improving recruitmentand retention, for example, via improvements to training (in with the GMC, universitiesand the medical royal Colleges), career planning and counselling, and increased useflexible Working patterns, to maximise doctors’participation in the NHS.

6) The NHS, in conjunction with the GMC and the medical royal colleges, should aim toattract a sufficient number of high quality overseas doctors offering training of the samehigh standard as offered to home doctors.

Improved information and analysis

7) Further attention should be given to the need for better information and research, forexample, in relation to levels of wastage (particularly from medical school), skill mixchanges, demography, Working patterns (including skill substitution) and economicfactors, with a view to continuing to refine the approach and analysis in the future.

8) Given that the health and healthcare environment is continually changing, furtherconsideration should be given to the likely effects on the demand for doctors of policychanges, demography, Working patterns (including skill substitution) and economicfactors, with a view to continuing to refine the approach and analysis in the future.

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Annex A

Scope and form of proposals

All Higher Education and NHS institutions bidding for additional medical student placesshould provide information in the following form. Then information will be used to assess,and to compare, proposals from all institutions.

Proposals should not exceed 15 to 20 pages, 12 point script, plus the additional qualitymaterial specified at section 4 below. They should be self standing. Supporting materialmay be annexed, but Joint Implementation group considerations will rely upon the mainproposal.

1. Introduction and general outline of the proposal

Please indicate for each proposal:

1.1. Medical school:

1.2. NHS Executive Regional Office:

1.3. Principal NHS providers, identifying those actively involved in developingproposals:

Please describe:

1.4. the key aims of the course;

1.5. particular advantages of the course for its graduates and the NHS;

1.6. The timescale for the change – the period over which the new/additional intake, andincreased output of graduates will be phased (cross refer to Annex B);

1.7. outline of the additional resources required.

2 Strategic direction

Please describe:

2.1. The proposal’s links to the Higher Education Institution’s strategic objectives;

2.2. The HEI’s track record in providing medical education and/or the range andportfolio of courses on cognate areas:

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2.3. How the proposal will address each of the Joint Implementation Group’s objectives(please see Appendix 1).

3. Curriculum and course characteristics

Please describe:

3.1. how the proposal addresses the requirements of “Tomorrow’s Doctors” (please seethe Appendix 2);

3.2. course content, and, where appropriate, key changes from current provision,including novel and innovative features of the course;

3.3. detailed structure of each stage of the course by year;

3.4. principal learning methods to be used for each stage of the course.

4. Quality

Please confirm:

4.1. the current position regarding GMC approval.

Please describe:

4.2. the research and development record of the medical school, or where there is nomedical school, of disciplines cognate to medicine;

4.3. the provision of general and Welfare support to students in all phases of theircourses.

Please attach:

4.5. copies of and commentary on relevant external assessment reports at programmeand institutional level (including external GMC reports), and any relevant reportsfrom professional bodies, including, for institutions currently without medicalschool provision, material from disciplines cognate to medicine;

Please describe (or attach):

4.6. data on student outcomes in medicine, or for proposed medical schools, disciplinesrelated to medicine, including student progression and completion in HE separately:

4.7. first destination information and relevant employment data for medical graduateswhere appropriate.

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Note: responses on 4.5 to 4.7 should generally address data from, and reports completedin the last three years.

5. Facilities

Please describe:

5.1. the sites where each part of course will be located, incuding the location ofbiological and behavioural sciences and clinical training, and th IT andcommunications links between sites;

5.2. the numbers of clinical academic staff, currently engaged, additional recruitmentimplied by proposal, and anticipated ease of recruitment;

5.3. the staff time available per student from both the university and NHS for eachcomponent of course;

5.4. confirmation that there will be sufficient patients likely to be willing to support theproposed volume of medicinal education;

5.5. the university facilities required and available to support the proposal, includinglibrary an IT facilities, the additional costs implied and funding sources;

5.6. the quality and quantity of residential facilities for students undertaking clinicalplacements;

5.7. the availability of sufficient, high quality, students clinical placements hospital,community, and primary care settings, including numbers, locations, and types ofplacement.

6. Admission history, policy, and practice

Please summarise:

6.1. the medical school’s application history for the last three years, where appropriate,specifying numbers of places available, numbers of applications, and A level gradesof successful and, where known, unsuccessful candidates. For HEIs withoutmedical school, please outline the position for related disciplines;

6.2. data on the demographic profile of applicants and students admitted over the lasttwo years, and local initiatives and approaches to addressing any imbalances relating to:

6.2.1. race,6.2.2. gender,6.2.3. socio economic groups under represented in medicine.

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7. NHS Executive Regional Office comment

Regional Offices should comment on the information provided in Sections 1 to 6 above and inthe attached Annex E. Particular reference should be made to the viability of the bid in termsof the NHS facilities that will be required to support the new or additional students proposed.Comments should relate only to the proposal from this HEI, taking account of the existingdemands placed on NHS services by requirement to educate medical students. No referenceshould be made in the proposal to potential pressures that may arise fromm parallel proposalsfrom other HEIs.

8. Contact Information

Please indicate:

Name, organisation, address, and telephone number of person(s) completing thisproposal:

Name, organisation, address, and telephone number of person(s) from whomfurther information may be obtained:

Signature, and posts occupied by university, NHS and NHS Executive Regional Officeofficers contributing to this proposal:.

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Annexe 3

Extrait du Quality Framework (NHS) Distribution sur tous les hôpitaux de court séjour du pourcentage de consultants en anesthésieparmi :- l’ensemble des médecins,- les consultants et les médecins juniors (étudiants), les consultants et les autres grades (staff grade).

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Annexe 4

La rémunération des médecins

La rémunération nette annuelle sur (1996/1997) des GMP est de 43.500£.

Allocations de ressources et honoraires spéciaux pour les GPAllocations annuelles de base :

400 premiers patients : 3.120à chaque patient supplémentaire entre 401-600 : 7,80£à chaque patient supplémentaire entre 601-800 : 6,24£à chaque patient s upplémentaire entre 801-1000 : 4,68£à chaque patient supplémentaire entre 1001-1200 : 3,12£taux maximum à 1200 patients : 7.488£

Honoraires de capitation standard (par patient) :Patient <65 ans : 16,05£65-75 ans : 21,20£≥75 ans : 41£

Prime annuelle d’ancienneté :1er échelon : 465£2ème : 2.4253ème : 5.235

Honoraires supplémentaires (par patient)Zone déshéritée : (high deprivation area) : 11,20£

Zone moyennement déshéritée (medium deprivation area) : 8,4£Zone peu déshéritée (low déprivation area) : 6,45£

Honoraires de surveillance pédiatrique (par patient) : 11,65Registration fee (par patient) : 7,10Visites de nuit :

Allocation annuelle : 2.165£Honoraires par visite : 21,65

Honoraires cibles (par an)Immunisations enfants : max :2.340 min : 780Rappels : max :690 min :230Cytologie col utérin : max : 2.610 min :870

Vaccinations (par item) max : 5,65 min : 3,9Allocation promotion de la santé (par an) : 2.260Programmes de prise en charge de maladies chroniques (par an) : asthme : 395 diabète : 395Soins maternels (par patient) : 186Petite chirurgie (par session) : 116,80Allocation pour l’enseignement (par an) : 5 niveaux) de 470 à 2.360£Subvention de formation (par an) : 5.140

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GP à l’hôpitalHospital practionner (par nhd par an) : de 3.120 à 4.170Clinical assistant (par nhd par an) : 3.195Paye par lit (par lit) : 455,55Service accident : de 2.000 à 5.615£

CAREER GRADESConsultants (échelle sur 5 stades) : de 43.500 à 56.500£.Associate specialist (8 stades) : de 26.000 à 45.000£.Staff grade practionner : 23.500 à 35.000£

TRAINING GRADESSenior registrar : 25.000 à 31.500£Specialist registrar :21.500 à 31.500£Registrar : 21.500 à 26.000£SHO : 19.000 à 24.500£HO : 15.500 à 17.500£Les heures supplémentaires sont à 1/40 ème du salaire d’une semaine « standard »

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Annexe 5

Liste des spécialités reconnues au Royaume-Uni

Faculty of Accident & Emergency R C of SurgeonsAccident & Emergency medicine Cardio-thoracic surgery (thoracic surgery)

General surgeryR C of Physicians Neurosurgery (Neurological surgery)

Otolaryngology (ENT)Allergy Paediatric surgeryAudiological Madeline Plastic surgeryCardiology (Cardio-vascular disease) Trauma and orthopaedic surgery (Orthopaedicsurgery)Clinical genetics UrologyClinical neurophysiologyClinical pharmacology & therapeuticsDermatology R C of OphthalmologistsEndocrinology & diabetes mellitus Medical ophthalmologyGastro-enterology OphthalmologyGeneral (Internal) MedicineGenito-urinary medicine (Venereology)Geriatric medicine R C of Obstetricians & GynaecologistsInfectious diseases (Communicable diseases) Obstetrics & GynaecologyIntensive care medicineMedical oncologyNeurology R C of AnaesthetistsNuclear Anaesthetics (including Intensive care)MedicineOccupational medicineRehabilitation medicine (including Spinal injuries)Renal medicine (Nephrology) R C of PathologistsRespiratory medicine (Thoracic medicine) Chemical pathologyRheumatology Clinical cytogenetics & molecular genetics

Haematology (Haematology & bloodtransfusion)R C of Paediatrics & child Health Histopathology (morbid anatomy &histopathology)

Immunology (Immunopathology)Paediatrics Medical microbiology and virology (Medical

microbiology)Neuropathology (included with

Histopathology)R C of Radiologists

R C of PsychiatristsClinical oncology (Radiotherapy) Child & Adolescent psychiatryClinical radiology (Radiology) Forensic psychiatry

General psychiatry (Mental illness)Learning disability (formerly mental handicap)

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Faculty of Dental Surgery Old age psychiatryPsychotherapy

Additional dental specialitiesDental public healthEndodonticOral & maxillo-facial surgery Faculty of Public HealthOral SurgeryOrthodontics Public health medicine (Community medicine)Paediatric dentistryPeriodonticsProsthodonticsRestorative dentistry

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Coordonnées des personnes contactées

Pr Goldacre and Dr TrevorUnit of health care epidemiologyInstitute of health sciencesOxford OX37LF

B. UrryMedical Worforce StandingAdvisory CommitteeNHS Executive HQQuarry HouseQuarry HillLeeds LS2 7UE

G. BellordOrganisation of medical educationNHS Executive HQQuarry HouseQuarry HillLeeds LS2 7UE

D. Thomas et C. DayLocal Medical Worforce Advisory GroupsMedical Practices CommitteeNHS Executive HQQuarry HouseQuarry HillLeeds LS2 7UE

M. PatersonMedium term medical workforceNHS Executive HQQuarry HouseQuarry HillLeeds LS2 7UE

P. LovelandFinancial incentivesNHS Executive HQQuarry HouseQuarry HillLeeds LS2 7UE

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BibliographieHealth policy and economic research unitMedical Workforce Planning. Briefing . Note n° 8 : December 1997. British MedicalAssociation.

The Royal College of General PractitionersVocational Training and Continuing Medical Education. Site : www.rcgp.uk.

Goldacre M.Planning the United Kingdom’s medical workforce. BMJ 1998 ; 316 :1846-7.

General Medical CouncilGood medical practice. Site : www.gmc-uk.org.

Department of HealthPlanning the medical workforce. Third report of the Medical Workforce Standing AdvisoryCommittee, December 1997.

Health policy and economic research unitKey Facts 1997, Medical workforce in the NHS. British Medical Association. 1997.

The Specialist Training Authority of the Medical Royal CollegesGeneral information sheet 1. General information on the various routes of entry to theSpecialist Register (revised January 1998).

The Specialist Training Authority of the Medical Royal CollegesAnnual report 1997-1998.

International DepartmentHow things work in the UK. Information Pack for Overseas Doctors. British MedicalAssociation. 1997.

Twenty-eight Report 1999. Review Body on Doctors’ and Dentists’ Remuneration.Publié par The Stationery Office Limited.1999.

Health policy and economic research unit1997 DDRB Awrad. British Medical Association.

British Medical AssociationJunior Doctors Committee handbook for members 1998-1999.

Medical Practice CommitteeAnnual Report 1998/1999.

NHS ExecutiveQuality Framework for HCHS Medical and Dental Staffing. April 1997.Medicine and medical education in Europe. The Eurodoctor. Edited by GuntherEysenbach.p 520.

117

Québec

119

La régulation des professions de santé au Québec

Introduction

Le Québec est une province canadienne d'une superficie totale de 667 926 km2 etcomprend 7,5 millions d’habitants. La loi canadienne, en matière de santé, est fondée sur cinqprincipes appliqués dans toutes les provinces : accessibilité, universalité, intégralité(l’assurance privée ne peut couvrir des soins déjà couverts par l’assurance maladie publique),gratuité, administration publique. Le niveau des dépenses de santé est très élevé au Canada.En 1994, le pays se place en deuxième position, derrière les États-Unis, pour le ratio« dépenses de santé/PIB » et en troisième position pour les dépenses par habitant.Chaque province du Canada doit se conformer à ces cinq principes pour recevoir lefinancement fédéral dévolu à la santé (seul le Québec a la possibilité de prélever lesfinancements propres à la santé) 1.Les quatre points communs à tous les systèmes de santé provinciaux du Canada, qui seretrouvent au Québec, sont les suivants :

- le niveau « fédéral » finance partiellement les soins, protège la santé et l’environnement,mais la responsabilité des soins incombe aux provinces ;

- les gouvernements provinciaux administrent une assurance hospitalisation et uneassurance maladie universelle qui s’appelle, au Québec, la Régie d’assurance maladie duQuébec (RAMQ) ;

- les praticiens exercent majoritairement comme des entrepreneurs indépendants et sontrémunérés à l’acte ;

- les dépenses globales de soins et les tarifs des actes sont négociés entre les associationsmédicales et le Ministre de la santé.

Au Québec, la dépense totale de santé par habitant a progressé sans relâche depuis 1975(532 $ Ca par personne) et, en 1997, pour atteindre 2 383 $ Ca, ce qui correspond à 10 % duPIB.Le système de santé du Québec présente les mêmes caractéristiques que le système de santécanadien. L’État est le principal « recouvreur » de fonds et le principal payeur. La RAMQ estun organisme provincial et centralisé, qui détient le monopole de l'assurance maladie pour lessoins que l'État québécois prend en charge. Le secteur privé de l'assurance ne peut donc sedévelopper qu'en prenant en charge ce qui n'est pas couvert par le panier des biens et services.La RAMQ a été instituée au début des années 70 pour appliquer et administrer la Loi surl’assurance maladie. La couverture publique des dépenses de soins est de 73 %.Tous les médecins québécois sont affiliés à la RAMQ et sont principalement rémunérés àl'acte, qu'ils exercent en ville ou à l'hôpital. L'accès au médecin spécialiste n'est pasconditionné par le passage chez le médecin généraliste (omnipraticien). La plupart desmédecins spécialistes exercent à l'hôpital. Le Québec a mis en place des Centres locaux desanté communautaires (CLSC) qui rassemblent des professionnels de santé et des travailleurssociaux. Les médecins qui y exercent sont salariés.Les dix-huit Régies régionales (organismes régionaux décentralisés du ministère) administrentle réseau sanitaire, décident de l’allocation des budgets aux établissements et ont une missionde santé publique.

1 L’État de l’Alberta n’a pas suivi la règle de la loi fédérale et s’est vu retirer une partie de son financement.

120

Les universités sont placées sous la responsabilité du Ministère de l’Éducation et les hôpitauxsous la responsabilité du Ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS).

Au Québec, le Ministère de la santé est le plus important des ministères, car la santé est unmonopole d’état. Cette position confère au secteur « santé » un caractère politique majeur,notamment en raison des débats sur l’autonomie du Québec. En effet, les conditions« gagnantes » permettant, à terme, d'accéder à l'autonomie pour le Québec, annoncées par lespartisans de l'autonomie comprennent la maîtrise des dépenses publiques et, donc, en grandepartie les dépenses afférentes au système de santé. L'adoption par le Canada, dans les années70, d'un système de type « béveridgien » fortement piloté par l'administration et « rationné » apriori confie un rôle important au gouvernement provincial. La régulation de l'offre de soinset, notamment, de la force de travail constituent, dès lors, un levier d'intervention et un thèmede débat public importants.Les mesures d'incitations au départ à la retraite, dans le secteur public, ont eu un succèsinattendu dans le milieu de la santé, ce qui a engendré une pénurie brutale de médecins etd'infirmiers hospitaliers expérimentés avec, en corollaire, une augmentation des listesd'attente, phénomène amplement relayé dans les médias. Le gouvernement a ainsi augmentéde soixante-cinq places, le nombre d’admissions en médecine pour l’année 1999 (de 406 à471) contrairement aux avis et conseils multiples des différents organismes de concertation etd'études. Pour une grande part des interlocuteurs rencontrés, cette décision est interprétéecomme un souci de calmer l’opinion publique dans une logique de court terme. Cette criserécente ne doit pas masquer l'ensemble des mesures, outils et dispositifs mis en place depuis1970, au Québec, pour réguler la démographie médicale dont nous présentons rapidementl'histoire.

Jusqu’aux années 60, le système de santé se présente comme un amalgame de différentsservices médicaux et sociaux avec des responsabilités différentes. Les soins hospitaliers sontremboursés par le régime d’assurance - hospitalisation universel, mais les honorairesmédicaux restent à la charge des patients, sauf si ces derniers adhèrent à un régime privéd'assurance maladie. Le gouvernement du Québec s’abstient de contrôler les effectifsmédicaux et confie aux universités la responsabilité d’ajuster le nombre d’étudiants admis enmédecine et en spécialité à leur capacité d’accueil, aux besoins de la population et au marchédu travail.

Les années 60 et 70 sont caractérisées par l'accroissement des effectifs médicaux et par laspécialisation

En 1961, la Commission Hall constituée par le gouvernement canadien recommande definancer les systèmes de santé provinciaux par un plan conjoint des États fédéral etprovinciaux et d'augmenter l’offre en médecins, en particulier en médecine de soins primaires,par la création de facultés de médecine. Ces recommandations s'appuyaient sur les estimationsde croissance de la population qui s'avérèrent, en 1991, au-dessus de la réalité de 28 %(27,3 millions au lieu de 35). Pour augmenter le nombre de généralistes, le Canada et lesÉtats-Unis ont développé, dans les années 60, les départements de médecine familialeprésents dans toutes les écoles de médecine dès 1970. La mise en application de cesrecommandations s'est traduite, au Québec, par la création d'une nouvelle faculté de médecineen 1968 (université de Sherbrooke), une augmentation des étudiants dans les trois autresfacultés existantes et un accroissement important du nombre de médecins immigrants au coursdes années 60 et 70.

121

En 1970, la loi Castongay-Nepveu instaure une assurance maladie universelle (« la granderéforme ») qui sera mise en place après une forte crise publique. Finalement, la Régied'assurance maladie du Québec reprend les barèmes utilisés, à l’époque, par les assurancesprivées, ce qui satisfait les professionnels. Les hôpitaux, principalement sous la responsabilitéde communautés religieuses, passent sous la responsabilité de l’État.En 1971, le ministère québécois des affaires sociales développe la formation en médecineprimaire et augmente les effectifs formés dans cette filière. Devant la croissance très rapidedes dépenses, dans les années 70, le gouvernement cherche à limiter le nombre de médecins.À cette époque, 24 % des médecins en activité au Canada étaient étrangers, avec un pic à30 % en 1976. En 1975, la commission canadienne de planification de la force de travailrecommande de former des médecins canadiens en nombre suffisant pour ne pas dépendred’un contingent extérieur. Elle est suivie par le gouvernement fédéral, qui restreintl’immigration de médecins étrangers (1975). La maîtrise des coûts est complétée parl'introduction de mécanismes de limitation des dépenses des médecins, qui sont négociées en1976, à l'occasion de la première entente entre les associations professionnelles et l’État. LaFédération des médecins omnipraticiens du Québec (FMOQ) et la Fédération des médecinsspécialistes du Québec (FMSQ) négocient séparément, avec l’État et la RAMQ, le principed'une limitation du revenu possible des médecins. Il s'agit d'un plafond individuel de revenupour les omnipraticiens et d'une enveloppe collective pour les spécialistes. Ces limites sontfixées selon les objectifs de croissance de la masse monétaire, déterminés par le conseil dutrésor. En 1977, le ministère québécois a optimisé l'utilisation des ressources, en modifiant laclé de répartition des places de formation offertes entre généralistes et spécialistes, pour fairepasser la part des spécialistes de 60 % à 40 % et annonçant, ainsi, clairement la volonté dedévelopper un système de services médicaux composé d’une première ligne forte etcompétente.

Au cours des années 80, les effectifs et le taux de spécialisation sont limités par legouvernement. La répartition géographique des médecins devient une préoccupationgrandissante

En 1980, la seconde commission Hall de réflexion sur le système de soins canadienrecommande de diminuer le nombre d’étudiants en médecine. Au Québec, la Loi 27 (1982)tente de résoudre les problèmes de répartition géographique des médecins, en introduisant desincitatifs financiers positifs (tarifs de la RAMQ différents selon la zone d’installation). Cettemesure, visant à influer sur le choix des médecins, ravive l'opposition de ces derniers et denombreuses grèves sont organisées. En 1983, le ministère québécois ne finance plus qu’unnombre limité d’étudiants. Les universités sont contraintes de réduire leurs effectifs enformation.En 1984, le « Canada Health Act » fait des provinces le seul financeur de soins et interdit lasurfacturation. Le « Federal-Provincial Advisory Committee on Health Manpower »préconise une réduction du nombre de spécialistes et de généralistes. Le Québec introduit desincitatifs supplémentaires pour exercer en zone déficitaire. Le gouvernement propose despostes aux étudiants étrangers en zone déshéritée. L'effet des mesures incitatives est modéré,notamment pour les spécialistes qui restent concentrés dans les zones urbaines.En 1986, la création des contingentements régionaux devait limiter l’installation des jeunesmédecins dans les régions sur-dotées (Montréal, Sherbrooke, Québec). Chaque région élaboreun Plan régional d'effectifs médicaux et fixe le nombre de médecins qu’elle souhaite voirs’installer sur une période de 3 ans. Ce plan régional se fonde sur les plans de chaque hôpitalde la région (soumis aux régies régionales qui les approuvent).

122

En 1987, la « Table de concertation » pour la province du Québec est instaurée et annonceune pénurie. Mais, à cette période, le Ministère privilégia des mesures visant à améliorer laproductivité des médecins plutôt que l’augmentation brute des effectifs. Le processus demédicalisation de l’administration traduisait, aussi, la volonté du gouvernement d’améliorer laproductivité des services de santé. Les membres de la table sont nommés par le Ministred’après une liste proposée par la FMOQ, la FMSQ, la Fédération des médecins résidents duQuébec (FMRQ), les universités (doyens et recteurs), le Collège des médecins, l’Associationdes cadres des réseaux de la santé et les étudiants de médecine. Ils sont élus pour quatre ans.Quinze membres votent mais d’autres participent de droit ou sur proposition du Ministre (ilsne votent pas).En 1987, la répartition généralistes/spécialistes passe de 60/40 à 55/45. Cette baisse est due aufait que les soins primaires, au Québec, sont délivrés par des médecins généralistes et, aussi,par les gynécologues obstétriciens et les pédiatres. Le Québec assigne à chaque région unquota de médecins en institution, sur la base d’une équité de l’accès aux soins.

Les années 90 voient l’affirmation d’une régulation plus stricte et la création d'unenouvelle institution de conseil : le Conseil médical du Québec

En 1991, le rapport « Barer et Stoddart », qui a produit un cadre d’analyse des politiquesd’effectifs médicaux, propose à l’époque une réduction de 10 % du nombre d’admis enmédecine (annexe 1).Le Conseil médical du Québec, créé à la suite des négociations entre les professionnels et legouvernement, dans le cadre de la préparation de la loi 120 de 1991, est mis en place en 1993.Ce conseil, constitué de membres des différentes fédérations et syndicats, est l’interlocuteurdirect du gouvernement sur la question de la régulation des professions médicales.En 1995, le Québec ne rembourse qu’à hauteur de 70 % les médecins en zone urbaine ayantmoins de 10 ans de pratique, discriminant ainsi l’installation en ville par des mesuresdésincitatives.

En 1998, la clé de répartition généralistes/spécialistes atteint 50/50.

Pour Contandriopoulos et Fournier, en 1992, les données certaines, en termes deplanification de la main d'œuvre médicale, étaient les suivantes :

1) la croissance de la démographie médicale a été plus rapide que la croissance de lapopulation,

2) le médecin est la ressource la plus chère du système de santé,3) l’efficacité de certaines des interventions médicales n'est pas connue,4) le médecin a un rôle dominant dans le système, laissant peu de place aux interventions

d’autres professionnels ou médecins moins spécialisés.Le rôle essentiel joué par les médecins dans le système de soins fait qu’il est impossible, pourle gouvernement, de gérer de façon efficace le système de soins sans s’assurer que leurnombre, par spécialité et par lieu d’exercice, est adéquat, tout comme leur répartitiongéographique. Les responsables politiques au Québec ont surtout cherché à contrôler lacroissance des coûts des services médicaux et à améliorer la répartition géographique desmédecins. Si des résultats assez satisfaisants (même avec des effets secondaires de pénurie)ont pu être obtenu pour le premier point, des disparités importantes subsistent encore entre lesdifférentes régions.

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Pour répondre à ces objectifs, le dispositif légal qui a été progressivement mis en place auQuébec, depuis les années 70, pour planifier la main d’œuvre est important par son ampleur etpar la diversité des moyens d’action employés. Il comprend :

- le financement direct des facultés de médecine,- des négociations permanentes avec les médecins sur leurs conditions de rémunération,- une table de concertation permanente sur la planification de la main d'œuvre médicale.

Le Québec est arrivé à maîtriser la croissance des effectifs médicaux, essentiellement par laréduction des admissions et le contrôle de l’immigration des médecins étrangers.Selon les auteurs précédemment cités, « le modèle théorique sous-jacent au choix desméthodes de planification considère le médecin comme un producteur de servicesindépendant qui jouit par son statut professionnel d'une marge de manœuvre importante à lafois dans ses choix de carrière (spécialité, région de pratique et type de pratique) et dans seschoix de pratique (temps de travail, emploi de personnel, prescription de traitement, etc.).Théoriquement, il est possible en utilisant des incitatifs économiques d'orienter l'activité desmédecins. Ce raisonnement est à l'origine de toutes les modalités (annexe 2) qui visent àinciter par des moyens tarifaires et financiers à inciter à pratiquer dans telle ou telle région et àne pas dépasser un volume d'activité donné ».Ce modèle théorique est considéré comme trop limité, notamment parce qu'il réduit lecomportement du médecin à un comportement de maximisation de ses revenus, sans prendreen compte l'éthique professionnelle, le choix de l'environnement social et culturel ou leprestige social de telle ou telle forme de pratique. Les auteurs concluent, en 1992, àl'instauration probable de mesures coercitives visant à contrôler, en partie, le choix desmédecins pour satisfaire les exigences d'accessibilité et d'équité relatives aux soins.

En pratique, les mécanismes qui ont permis de concilier contrôle, orientation et autonomieprofessionnelle ont été :- la définition d’un champ de compétence exclusif pour les médecins,- la quasi-impossibilité de pratiquer en dehors du régime d’assurance maladie,- l'existence d’un tiers payant unique,- l’interdiction de la surfacturation (les tarifs sont encadrés),- la possibilité de salarier des médecins,- l'établissement d’un mécanisme de négociation continu sur les modalités de pratique et derémunération,- l'instauration d’une table permanente de concertation sur la planification,- la définition de quotas d’admission en médecine après recommandations de la table deconcertation,- le contrôle de l’immigration,- l’existence d’informations précises sur la main d’œuvre et l’activité des médecins,- la possibilité d’user par décret de moyens incitatifs pour que les médecins s'installent enzone éloignée et désincitatifs pour que les médecins ne s'installent pas en zone urbaine.

Mais, les interventions de plus en plus contraignantes de l’État ont entraîné des résistancesde la part de la profession médicale lorsqu’elles touchaient directement son autonomieprofessionnelle et le statut d’entrepreneur indépendant. Néanmoins, les associations misentsur le fait qu’il est préférable de s’adapter et de négocier que d’adopter une stratégied’affrontement.De plus, ces mécanismes sont aussi à l’origine des problèmes que le système connaît :- il faut repenser l’exclusivité de pratique des médecins,

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- il faut calculer des budgets sur la base de la croissance de la population et non sur celle desmédecins,- il faut amplifier les mécanismes de concertation et de négociation,- il faut instaurer un processus itératif de planification.

En effet, la planification n’est pas uniquement technique. Les mesures économiques sontinsuffisantes et les mesures coercitives sont difficiles à appliquer, dans un pays où le respectdes libertés individuelles est une valeur primordiale. La planification se fait à long terme etdoit donc être itérative.

Il s’agit d’une entreprise complexe qui repose sur la compréhension des comportements etdu rôle de nombreux acteurs. Le ministre est responsable de l’accessibilité des services. Leconseil du trésor cherche à limiter le nombre de médecins et à augmenter l’efficience. Lesfédérations cherchent à garantir les revenus.L’expérience du Québec, en termes de planification de la main d’œuvre, est doncparticulièrement riche.

I La démographie des professions de santé : état des lieux et outils deplanification

I.1 État des lieux : pénurie relative des professionnels de santé et difficultés derépartition géographique notamment pour les spécialistes

1.1.1 La densité médicale est l'une des plus basses des pays occidentaux malgré unecroissance régulière des effectifs médicaux québécois pour limiter la croissancedémographique par immigration

La densité de médecins, au Québec, en 1994 (208 médecins pour 100 000 habitants) estlégèrement supérieure à la moyenne canadienne (195) mais le Canada se situe parmi les paysoù la densité est la plus basse. La densité médicale a augmenté régulièrement de 198 (1986) à216 (1994) médecins pour 100 000 habitants. La croissance des effectifs a été extrêmementrapide entre 1970 et 1985. Cette augmentation fait suite à la création de l’assurance maladieuniverselle, en 1970, qui rendait général l’accès aux soins et qui accrut fortement la demande.En 20 ans, le nombre de médecins a doublé (entre 1972 et 1994), passant de 7 498 à 15 122.Mais cette augmentation, sur le long terme, ne doit pas masquer la baisse du taux decroissance du nombre de médecins, initiée dès 1988. Cette limitation de la croissance résultede la diminution du nombre d’étudiants admis en première année de médecine et de lalimitation drastique et organisée de l’immigration. Le nombre d’admissions en médecine adiminué de 30 % en quinze ans, passant de 631 en 1982 à 457 en 1996.D’après un récent rapport de l’Institut canadien de l’information sur la santé (ICIS), le nombrede médecins a diminué entre 1994 et 1996. Conjugué à l’augmentation de la population, cerepli survient pour la première fois au Canada. Le ralentissement de la croissance des effectifsest davantage attribuable à l’augmentation des départs, notamment le succès des mesuresincitatives aux départs en retraite des fonctionnaires auprès des médecins hospitaliers (en1998, 8 % des médecins et des infirmiers ont quitté les hôpitaux prématurément) qu’à unebaisse du nombre d’entrées. La situation de pénurie aiguë et la médiatisation qui a suivi ontconduit le ministère à augmenter significativement le nombre d’étudiants admis en premièreannée de médecine en 1999.

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1.1.2 Le ratio généralistes/spécialistes est proche de un

La proportion de spécialistes a diminué depuis 1972 (60 % des médecins), pour atteindre50,6 % en 1994, soit 7 234 omnipraticiens (OP) et 7393 spécialistes.

1.1.3. La population médicale québécoise se féminise et vieillit

La baisse du nombre de nouveaux médecins a entraîné un vieillissement des effectifs. Lesspécialistes sont plus âgés que les omnipraticiens et la proportion de femmes y est inférieure.Parmi les spécialistes inscrits à la RAMQ, plus de 1 sur 9 est âgé de 65 ans ou plus. En 1994,les femmes constituent plus du quart des médecins en exercice : le tiers des OP et près de 1spécialiste sur 5.

Figure 1 : proportion de femmes depuis 1980 dans chaque spécialité

Pour la première fois, les femmes, représentent plus de 60 % des admissions en médecine,en 1992. L’augmentation du nombre de femmes dans la profession médicale est unphénomène structurel important dont on commence à ressentir les effets, en termes dedisponibilité des services.

Selon les projections effectuées par le Collège des médecins du Québec, le vieillissementet la féminisation de la profession ralentiront, vers 2005, la croissance de la disponibilité desservices médicaux.

0

10

20

30

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50

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80

%

1980 1984 1988 1992 1994 1998

Année

Spécialistes

Omnipraticiennes

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Figure 2 : nombre d’heures consacrées aux soins des patients en 1994 au Québec

1.1.4 Les médecins étrangers constituent un moyen d’ajustement à court terme dans unpays à tradition d’immigration forte

La proportion de médecins diplômés hors Québec, en 1994, est de 17,5 %. L’ajustementdes effectifs médicaux se fait, aujourd’hui, pour une faible partie par l’accueil de médecinsétrangers. Le taux annuel moyen de croissance des médecins diplômés hors Québec étaitnégatif (- 0,6 %) en 1994.

Les médecins formés à l’étranger entrent au Canada de diverses façons.

• Ils sont recrutés dans des postes de formation en résidence post-doctoraux lorsque troppeu de canadiens veulent se spécialiser dans un domaine particulier et que les programmescontinuent d’être ouverts pour satisfaire les besoins. Cette possibilité a été fermée au débutdes années 90.

• Il s’agit de stagiaires étrangers munis de visas qui s’engagent à rentrer dans leur paysd’origine après avoir terminé leur formation en résidence.Ils sont recrutés par les universités dans des « circonstances spéciales » (cooptation locale).

• Ils sont recrutés par des collectivités rurales ou éloignées qui ont des difficultés à recruterdes diplômés en médecine canadiens. Souvent, ils n’ont pas terminé la formation post-doctorale nécessaire (la plupart des provinces exigent au moins une année de formation post-doctorale au Canada pour être membre en règle du Collège). Ils sont donc « admisconditionnellement », à condition qu’ils exercent à certains endroits pendant une périodedonnée.

• Ils sont admis au Canada dans le cadre d’un programme de réunification des familles oucomme réfugié. Ce groupe de diplômés étrangers rencontre de nombreuses difficultés pourobtenir le droit d’exercer. Cela concerne peu de médecins.

39,8

37,4

40,5

34,4

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40

41N

om

bre

d'h

eu

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spécialistes Omnipraticiens

homme

femme

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Historiquement, seule la quatrième des cinq voies proposées a vraiment attiré des médecinsen région éloignée. Toutefois, ces médecins ne signent pas de contrats à vie. Comme leurshomologues canadiens, un grand nombre préfèrent s’établir en milieu urbain et ils semblent,dans de nombreux cas, se servir du passage obligé par une région éloignée comme d’unraccourci pour obtenir un statut d’immigrant et, finalement, pratiquer où ils le souhaitent. LeQuébec n’est donc pas en faveur de l’intensification systématique du recrutement de diplômésétrangers.

1.1.5 Les formes d’exercice sont multiples, le médecin considéré comme travailleurindépendant exerce aussi bien en ville qu’à l’hôpital

En pratique, hormis une dizaine de médecins qui exercent en pratique libre, Tous lesmédecins sont inscrits auprès de la RAMQ, qu’ils exercent en ville ou à l’hôpital. Les lieuxd’exercice se sont diversifiés de façon significative, notamment pour les omnipraticienscomme l’attestent les statistiques publiées par le collège des médecins en 1994 :

- 43 % du temps de travail des OP est consacré à la pratique en cabinet,- 8 % du temps est consacré à la pratique en CLSC (Centre local de santé communautaire),- 28 % en milieu hospitalier.

La pratique des omnipraticiens au Québec est beaucoup plus diversifiée qu’en France,notamment en milieu rural (pratique des accouchements, petite chirurgie, urgence…).

En conclusion, pour l’ensemble de nos interlocuteurs, le Québec se trouve actuellementdans une situation d’offre insuffisante, tant pour les effectifs médicaux, qu’infirmiers (listesd’attente dans les hôpitaux). Pour certains, ceci est lié à un manque de médecins et pourd’autres, à une faible productivité de ces derniers. Les médecins installés en ville seraienttentés par une pratique dite de « fast food medicine ».Jusqu’en 1995, la FMOQ (la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec) estimait queles omnipraticiens étaient trop nombreux.La FMSQ (la Fédération des médecins spécialistes du Québec), quant à elle, estime que leQuébec connaît une pénurie de spécialistes.

La position du Conseil médical du Québec sur le dossier des effectifs médicaux estpartagée.Le Québec vit une pénurie relative car les mesures visant à améliorer l'efficience du systèmede soins (comme la hiérarchisation des soins), l’évaluation de la pertinence des actes etl'introduction de nouveaux modes de rémunération n’ont pas encore été introduits2.Le Ministère de la santé et des services sociaux partage cet avis. Le gouvernement, plus ancrédans une logique à court terme, cherche surtout à anticiper et à prévenir les crises, quand il estinterpellé dans les médias, à cause de l’accroissement des files d’attente. La focalisation dudébat politique sur les problèmes d’accès aux soins est caractéristique d’un système de type« beveridgien », rationné a priori.

2 Il n’existe pas en effet au Québec de limitation à l’accès aux soins spécialisés par un passage obligatoire chezle généraliste. De même, il n’est pas nécessaire de s’abonner auprès d’un médecin généraliste comme auRoyaume-Uni.

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1.2 Les outils de planification : recueil de données et modèles de projection

1.2.1 La collecte des données est faite à l'occasion d'une enquête annuelle riched’informations

Les données sur la population des médecins proviennent des fichiers nominatifs du Collègedes médecins qui, de par ses attributions légales, tient un registre des individus ayant le droitd’exercer la médecine dans la province. À l'occasion du renouvellement annuel de leuradhésion, le Collège des médecins du Québec réalise une enquête sur l'activité des médecins(temps de travail, répartition des tâches).

Les données de la RAMQ sont accessibles à tous et standardisées. Elles recensent l’activitémédicale rémunérée à l’acte.

Les données sur le suivi de cohortes dans les programmes de résidence sont recueillies ettraitées par la Conférence de recteurs et présidents des universités du Québec (CREPUQ)depuis 1992.

1.2.2 Les modèles de projection : depuis 1987, le Québec utilise un modèle perfectionnéprenant à la fois en compte l’offre et la demande de soins ; ce modèle est régulièrementréactualisé3

Avant la création de la table de concertation (1987), la planification se faisait sur la base dela comparaison de ratios médecins/population avec ceux d’autres provinces et d’autres pays.

les hypothèses de base de la démarche de planification sont les suivantes

Il a été postulé que le nombre de médecins, en 1986, était suffisant pour répondre auxbesoins de la population (décision d’un comité d’experts, notamment sur la base decomparaisons avec d’autres provinces et pays, en termes de densité médicale). En se basantsur le seul critère de la comparaison des ratios population/médecins actifs, le Québec n’étaitpas excédentaire, en 1986.La planification s’est alors construite autour d’objectifs pour l’ensemble de la province et derépartition géographique optimum.Il fut donc décidé de projeter l’état de l’offre et de la demande, en 1986, à moyen et longtermes. Nous présentons, ci-dessous, les deux modèles de projection selon qu’ils portent surl’offre ou la demande de soins.

le modèle de projection de l’offre

Les données sur la population des médecins proviennent des fichiers nominatifs du Collègedes médecins qui tient, de par la loi, un registre des individus ayant le droit d’exercer lamédecine dans la province. Ce permis est accordé aux détenteurs d’un diplôme de médecine(MD) ayant validé les examens de certification du Collège des médecins.

3 Estimation de l’évolution des effectifs médicaux requis et disponibles à l’aide de modèles de projectiondémographique ; Marc André Fournier, Groupe de recherches interdisciplinaires en Santé. Université deMontréal, 1995.

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En plus des données factuelles, fournies par les médecins lors de leur inscription, sur lescaractéristiques démographiques et des informations sur leurs qualifications professionnelles,cette banque comprend aussi les données du questionnaire annuel sur le temps consacré auxactivités professionnelles au cours de l’année écoulée.La projection de l’offre inclut tous les champs de la pratique médicale (clinique,enseignement, recherche, administration…). Cette projection consiste à estimer d’abordl’évolution démographique des effectifs.Concernant les effectifs, le modèle de projection de l’offre utilise l’approche des composantespar cohorte et comprend trois étapes.La première estime le nombre de survivants, pour chaque période quinquennale deprojection. Par exemple, elle estime en 1997 le nombre de survivants parmi les médecinsprésents en 1992. La projection des effectifs présents en 1992 est faite en appliquant auxsurvivants de chaque début de période une probabilité d’être encore présents cinq ans plustard. Cette probabilité de survie est calculée par groupe quinquennal d’âge pour huitcatégories de médecins : 1) leur statut (OP ou spécialistes), 2) leur sexe, 3) leur lieud’obtention du diplôme de médecine (Québec ou hors Québec). Ces différentes probabilitéssont calculées en prenant la proportion des effectifs de 1987 qui était encore présente en 1992.On calcule ainsi un effectif prévisionnel à cinq ans de médecins en exercice pour chacune deshuit catégories.La deuxième étape de la projection porte sur le nombre de nouveaux arrivants. Lesprojections considèrent séparément quatre catégories : les médecins diplômés du Québec, lesmédecins diplômés à l’extérieur divisés en trois catégories (diplômés dans une autre provincecanadienne ou aux États-Unis, diplômés hors Canada et États-Unis, ceux recrutésspécifiquement comme enseignants ou pour exercer en zone de pénurie). Le modèle estime,pour chacun de ces groupes, le nombre de nouveaux médecins et leur répartition par statut,âge et sexe au début de chacune des périodes de projection. Ceux-ci sont ajoutés auxsurvivants de 1992 et se voient attribuer, par la suite, la même probabilité de survie.

Ce modèle prend en compte ces différentes populations parce que leur probabilité d’êtreprésentes dans le système diffère. En effet, les taux d’installation au Québec sont plus élevéspour les médecins québécois que pour les autres, la part relative de chaque contingent,notamment les immigrés, varie dans le temps au gré des politiques gouvernementales ; lespolitiques gouvernementales visent aussi, depuis quelques années, à rendre l’admissiond’étudiants d’autres provinces conditionnelle à l’engagement de ne pas exercer au Québec,après leur formation.

La troisième étape consiste à pondérer ces effectifs, en fonction des niveaux d’activitéselon l’âge et le sexe, tels qu’ils ont été observés en 1986, année de référence. Cettetroisième étape permet ainsi de convertir les effectifs en médecins - équivalent - 1986,nouvelle variable nommée « disponibilité des services ». Il fut décidé, pour ce dernier volet,de se limiter à estimer l’impact des changements dans la structure d’âge et de sexe sur ladisponibilité des services. Cette dernière est mesurée par le nombre d’heures (activitéscliniques) consacrées aux soins des patients telles que déclarées dans le questionnaire par lesmédecins actifs en 1986. L’hypothèse forte est donc que les médecins vont avoir le mêmeniveau d’activité (productivité) dans le futur qu’en 1986, à groupes d’âge et de sexeéquivalents. Les niveaux d’activité, pour la partie non-clinique, furent calculés également enfonction de l’âge et du sexe. On considère actuellement que la part des activités non-cliniquesaugmente par rapport à la part des activités cliniques.

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le modèle de la demande

Une des méthodes visant à estimer les besoins en médecins est la méthode dite « de lademande », qui fut appliquée au Québec en ne considérant que l’âge et le sexe commefacteurs déterminants de l’évolution des besoins en services.Ce modèle a pour but de définir le niveau d’utilisation, à cinq ans, des services médicaux pargroupes de population caractérisés par sa tranche d’âge et le sexe. Il est mesuré en coût percapita de services rendus, en 1986, selon les données de la RAMQ (uniquement l’activitépayée à l’acte). Ces coûts sont standardisés pour éliminer l’effet de tarifs différents pour unmême acte selon le lieu où il a été dispensé (cabinet, hôpital…). La projection de la demandeà cinq ans prend uniquement en compte les variations de la population, par âge et par sexe,depuis 1986.Comme le modèle s’intéresse à l’estimation de la croissance du niveau de ressourcesconsommées à cinq ans, il fait l’hypothèse que les coûts mesurés, à partir de la base dedonnées de la RAMQ (uniquement le paiement à l’acte), sont représentatifs de l’ensemble descoûts (services cliniques rendus et payés au salaire et à la vacation).

En appliquant la consommation per capita de 1986 à la population selon l’âge et le sexedes années à venir, on obtient un nouveau volume total de services consommés à cinq ans. Cenouveau volume total, divisé par l’ancien, traduit à la fois l’effet de l’augmentation et duvieillissement de la population. Pour connaître la part du taux attribuable uniquement àl’augmentation de la population, il faut prendre la population estimée de l’année cible (1997,par exemple) et la diviser par la population de 1986. Pour connaître l’effet des changementsdans la structure d’âge et de sexe, il faut diviser le nouvel indice per capita par l’ancien.

Pour estimer à cinq ans la demande avec le modèle ci-dessus, un scénario de croissance dela population doit être défini, en prenant en compte un indice synthétique de fécondité et unsolde migratoire. Sur cette base, selon les hypothèses retenues pour la projection de lapopulation et en gardant constants les indices d’utilisation des services médicaux rémunérés àl’acte, on observe une variation de l’indice global des services « requis » en raison, d’une part,de la croissance de la population et, d’autre part, des changements démographiques.

La projection de la demande ainsi estimée est comparée à la projection de l’offre enmédecins équivalent 1986.

bénéfices et inconvénients de la mise en place du modèle

Ce modèle a été développé en concertation avec la plupart des intervenants du mondemédical, ce qui a permis d’obtenir un degré d’adhésion suffisant pour assurer sa crédibilitéauprès des décideurs. Le développement et l’utilisation du modèle ont permis d’accompagnerl’émergence du processus de planification et d’une expertise sur la question des effectifsmédicaux. Ces travaux ont permis de documenter les débats de la table de concertation sur lesdifférents facteurs ayant une influence sur l’évolution du nombre de médecins.Parce qu’il est constamment mis à jour, le modèle instaure une certaine dynamique au niveaude la connaissance et de l’action.

La Table de concertation a, cependant, apporté des améliorations aux méthodesd’estimation, notamment sur le degré de finesse des estimations de l’offre spécialisée. Elle aconsulté l’ensemble des associations de médecins spécialistes, en vue de connaître leurs

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estimations des effectifs qui leur seraient nécessaires. La Table recommande uneaugmentation appréciable et immédiate des cibles en spécialité.Les données sur le suivi des cohortes dans les « programmes de résidence » sont recueillies ettraitées par la Conférence de recteurs et présidents des universités du Québec (CREPUQ)depuis 1992.La politique des inscriptions en formations doctorale et post-doctorale est revue par leMinistère des services sanitaires et sociaux, tous les 3 ans, d’après les estimations du modèlede projection. En 1992, la responsabilité du développement du modèle de projection ne relèveplus du Groupe de recherche interdisciplinaire en santé de l'Université de Montréal maisseulement du Ministère des Services sanitaires et sociaux. Il y a apporté des changementsméthodologiques, sans que le jeu de la concertation n’ait pleinement joué son rôle. LeMinistère des Services sanitaires et sociaux a du revenir, alors, à la voie de la concertationpour lever les oppositions, comme en fait foi la création d’un groupe d’experts surl’évaluation des modèles de projection de l’effectif médical.Une analyse rétrospective (1983-1996) a permis de montrer que les prévisions s’étaientavérées passablement justes (surestimation de 0,5 % pour les omnipraticiens et de 2,5 % pourles spécialistes).L’estimation des « besoins », telle qu’elle est réalisée au Québec, revêt un caractère arbitrairepuisque, pour effectuer une comparaison entre offre et demande, plusieurs hypothèses sontrequises, telle que la détermination d’une année de référence où l’offre et la demande deservices médicaux seraient jugées en équilibre et serviraient de base pour statuer du niveau deservices à maintenir dans l’avenir.L’estimation des besoins futurs en médecins, par la méthode de la demande, soulève desréserves. En utilisant uniquement le nombre de visites ou de contacts, on ne tient pas comptede la nature des services rendus. En prenant les coûts comme unité de mesure, on doit fairel’hypothèse que le tarif de chaque acte est le reflet de la complexité de cet acte. On pose lepostulat suivant : la demande de services est indépendante de l’offre. Enfin, ce type deprojection n’anticipe pas ou seulement partiellement les changements épidémiologiques dansla population et les changements dans l’organisation du système de santé.Enfin, selon cette méthode d’évaluation des besoins futurs de services médicaux, seuls lacroissance de la population ou les changements de structure par âge peuvent faire varier leniveau de services requis.

En conclusion, la planification des ressources humaines dans le domaine sanitaire, auQuébec, doit être réexaminée. Le Québec entre dans une phase d’accélération de la pénurie demédecins, résultant essentiellement de deux événements distincts. Suite à la formation d’untrès grand nombre de médecins dans les années 60 et au début des années 70, un nombreimportant et non renouvelé de médecins arriveront à l’âge de la retraite au cours de ladécennie 2000 – 2010. De plus, l’émigration des médecins canadiens, notamment aux États-Unis, est croissante et réduit dangereusement le groupe de médecins actifs, en particulier pourles spécialités rares (neurochirurgie, par exemple). Ainsi, la réduction du nombre d’étudiantsformés, appliquée dans les années 90, aurait du l’être dans les années 80, assurant unemeilleure stabilité des effectifs médicaux. Devant les tendances actuelles, les décideurspolitiques doivent reconsidérer leur politique de planification, pour anticiper la pénurie quisera plus forte encore dans les années 2000.Les résultats des projections montrent, sans équivoque, qu’il faut tenir compte de l’impact dela féminisation et du vieillissement des effectifs médicaux sur la disponibilité future desservices.

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II Régulation avant ou pendant les études

2.1 Les décisions concernant le nombre d'étudiants à former chaque année et danschaque spécialité sont prises par le ministère sur les conseils de la table de concertationet du conseil médical du Québec

Nous présentons, dans ce chapitre, l'histoire de la régulation de la démographie médicale etle dispositif actuellement en place au Québec, en amont de l'arrivée sur le marché du travail.L'une des caractéristiques québécoises est l'accent, très particulier, mis pendant les études surles mécanismes visant à répartir au mieux les ressources humaines médicales sur le territoire.

la politique concernant la maîtrise des effectifs globaux d’étudiants en médecine se met enœuvre dans les années 70

Le gouvernement du Québec a joué un rôle croissant dans la régulation de l'offre de soinset, notamment, de la démographie médicale.Dans les années 70, c'est par le contrôle de l'immigration que l'État est intervenu pour limiterla croissance du nombre de médecins. Au début des années 80, le gouvernement a cherché àinverser le ratio omnipraticiens/spécialistes qui se situait à 42/58 en 1972 pour atteindre60/40. Le gouvernement est alors intervenu, en diminuant le financement par la RAMQ despostes de résidents en spécialité dans les hôpitaux. Ces objectifs sont aujourd’hui abandonnés,d’autant que la chirurgie générale, l’anesthésie et la psychiatrie sont des spécialités en crise,largement déficitaires. Pour le moment, les omnipraticiens composent 55 % du corps médical.La volonté du gouvernement serait d’atteindre 50/50.

Enfin, en 1986, le gouvernement intervient plus en amont de la formation, en modifiant lesconditions de financement des universités. Leur budget est désormais accordé pour un nombredéterminé d’étudiants, avec pénalités financières si les quotas ne sont pas respectés.Depuis le début des années 90, les responsables politiques visent à réduire davantage lenombre d’admissions en médecine et à accroître les contraintes à l’installation des étudiantshors Québec (qui représentent entre 10 et 15 % des étudiants) et réduire le nombre d’entréesde médecins formés à l’étranger.

le souci de la maîtrise des dépenses et de la maîtrise des effectifs médicaux fait place à lacrainte d’une pénurie

Très récemment, le processus s’est inversé. Pour la première fois en 1996 et de façon plusaiguë en 1999, le Québec connaît une décroissance des effectifs médicaux.Le gouvernement a décidé, pour l’année 1999, d’ouvrir 527 places en facultés de médecine(soit 66 de plus) qui ont été réparties entre les quatre facultés (Laval, Montréal, Sherbrooke etMc Gill).

Actuellement, le gouvernement fixe annuellement par décret le nombre d’admissions enmédecine pour les quatre facultés de médecine du Québec et le nombre de postes de résidencedisponibles par spécialité, tels que prévus dans sa politique triennale plus générale. Il procèdeà l’élaboration de sa politique, après avoir recueilli l’avis provenant de la « Table deconcertation permanente sur les effectifs médicaux », assisté par le « comité de suivi » et d’unavis du « Conseil médical du Québec » dont les rôles respectifs sont détaillés ci-dessous. La

133

figure n° 1 présente les mécanismes de décision, les différentes instances de concertation etleurs modalités d'interaction avec le Ministère de la santé et des services sociaux.

Figure 3 : la détermination des admissions en médecine et des postes de résidence(places en formation spécialisée par MSSS

La Table de concertation a été créée en 1987 en raison des désaccords existants entrefacultés de médecine, associations de médecins et gouvernement, et la forte poussée desrégions éloignées demandeuses d'un nombre suffisant de médecins, notamment pour lesspécialités primaires (psychiatrie, pédiatrie, médecine interne...). L’idée sous-jacente était que

Ministère de la Santé et des Services Sociaux

Table de concertation permanentesur la planification de l’effectifmédical au Québec

Comité de suivi

Conseil médical du

Québec

Admission en médecine

Admission dans les programmes de

résidence

SpécialitésA - B – C - D

5-7 ans de formation

MÉDECINE FAMILIALE2 ans de formation

Examens du Collège Médical du Québec

Permis d’exercice Permis et certificat de spécialiste

Quatre années de formation débouchant sur letitre de Medicinae Doctor

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la planification de la profession médicale ne pouvait uniquement reposer sur des décretsgouvernementaux, ni sur le libre arbitrage d’une profession dont le revenu provient de l’État.Les premiers travaux de la Table ont porté sur l'élaboration et l'analyse des résultats d'unprogramme de recherche sur les questions de régulation démographique des professions desanté. Cette démarche a permis de constituer une dynamique institutionnelle qui n'efface pasles oppositions et les divergences, mais permet à chaque acteur de parler le même langage.

Le mandat de cette Table est de faire des recommandations au Ministre de la Santé quecelui-ci soumet au conseil des ministres, après analyse par le Conseil du Trésor. Elles portentsur le nombre d’admissions et la répartition des postes entre spécialités. La Table estégalement responsable du contrôle de l’émigration des médecins.Elle est composée de représentants de la FMOQ (Fédération des médecins omnipraticiens duQuébec), la FMSQ (Fédération des médecins spécialistes Québec) la FMRQ (Fédération desmédecins résidents du Québec) l’Association des hôpitaux du Québec, la Conférence desrégies régionales, les universités (doyens et recteurs), le Collège des médecins du Québec, laFédération des centres locaux de santé communautaire, le Ministère de l’Éducation et leMSSS (Ministère de la Santé et des Services sociaux) qui la préside. Elle réunit ses membrestrois ou quatre fois par an et tente d’appuyer ses recommandations sur un consensus de sesparticipants même si, à l’occasion, des opinions divergentes mènent à l’organisation d’unscrutin ; chaque organisme n’a alors droit qu’à une seule voix, même s’il est représenté parplus d’un membre. Un plan triennal, avec réajustement annuel, détermine le nombre d'entréesen université de médecine et le nombre d'entrées en médecine générale et dans chaquespécialité.

La Table de concertation est animée depuis 1986 par un comité de suivi, créé afin defaciliter son travail. Il a pour fonction de préparer les recommandations et d’analyser, en sous-groupes de travail, les modèles de projection utilisés et les résultats des diverses étudesréalisées sur la question de la démographie. Son analyse se fonde sur la demande de soinsmanifestée par les centres hospitaliers et les régions, basée sur les caractéristiquesdémographiques des populations. Elle tient compte, également, des améliorationstechnologiques et des plans de répartition régionaux des médecins.

Du point de vue du Ministère, la Table de concertation est un lieu d’échange oùl’innovation est proposée avec trop de réticence, peut-être en raison de la cristallisation despositions des différents acteurs.

Le Conseil médical du Québec, institué en 1991 et mis en place en 1993, aspire àreprésenter les médecins dans leur diversité (âge, sexe, spécialistes/omnipraticiens, lieuxd’exercice). Il se veut le porte-parole des médecins, sans pour autant que les intérêts desdifférentes fédérations soient mis en avant. Il a pour objectif de conseiller les responsablespolitiques en leur proposant des solutions à long terme. Ses nombreux avis sont parfoisconsidérés comme audacieux et ne sont pas toujours suivis. C’est un organisme consultatifauprès du Ministre qui peut le solliciter sur toute question relative aux services médicaux.Les quatre champs de recherche du Conseil médical sont les suivants :

- organisation des services médicaux,- modalités de rémunération,- assurabilité des services (panier de soins pris en charge par la RAMQ),- effectifs médicaux (nombre et répartition).

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Les valeurs affirmées par son Président, sur lesquelles reposent les réflexions du Conseil sontles suivantes :

• le médecin est un libre entrepreneur.• La relation privilégiée entre le médecin et le patient doit subir un minimum

d’interférences notamment étatiques.• Le système de santé est suffisamment financé à l’heure actuelle (il existe une marge de

manœuvre importante pour améliorer l’efficience et la productivité du système).• Le médecin doit être responsabilisé. L’adoption d’enveloppes va de pair avec une

responsabilité assumée par le corps professionnel.Le Conseil médical du Québec se donne comme objectif de concilier ces valeurs paradoxales,pour sauvegarder le système de santé québécois face à la pression du modèle anglo-saxon des« Managed Care » et, notamment, par une entente entre fédérations et État historiquementbonne.

Pour les responsables du Conseil médical du Québec, la résolution des paradoxes dusystème passe par :

- l’organisation et la hiérarchisation des services (inexistante aujourd'hui),- la pertinence globale des actes,- l'adoption de nouvelles modalités de rémunération des médecins (première et deuxième

lignes).

Cet organisme joue un rôle important dans la fixation du nombre d’admissions enmédecine et dans chaque spécialité, par les conseils qu’il formule au Ministre et la révisiondes recommandations de la Table. Le nombre d’étudiants admis a diminué ces dernièresannées, en accord avec la Table de concertation et le Conseil. Mais, parallèlement, auraient duse mettre en place les propositions développées ci-dessus.En l’absence de mise en œuvre des solutions préconisées par le Conseil, l’augmentation dunombre d’admis, opérée en 1999, était donc nécessaire. Cependant, cette augmentation futtrès brutale et a aussi répondu à des impératifs politiques.

Les comités de spécialités et d’omnipratique se retrouvent dans chacune des spécialitéset sont constitués de directeurs des programmes de formation post-doctorale de chaque facultéet d’un représentant de l’association professionnelle ou de la fédération concernée (FMOQ ouFMSQ). Ils s’intéressent aux diverses questions de la formation des spécialités, analysent lesbesoins, le devenir professionnel, voire les perspectives d’emploi de chaque spécialité pourles années à venir.

la répartition des étudiants dans les différentes spécialités se fait selon les besoins estiméspour chacune d’entre elles

Chaque année, le gouvernement détermine le nombre d’admis en facultés de médecine :environ 90 % sont des étudiants québécois, 5 % des étudiants issus des autres provincescanadiennes et 5 % des étrangers. Ces admissions sont ensuite réparties sur les quatreuniversités (annexe n° 3, décret 685-98 du 20 mai 1998). L’université est pénalisée si elleadmet plus d’étudiants que le quota qui lui est attribué. Les étudiants diplômés moins ceux quiquittent le Québec déterminent le nombre d’étudiants admis en résidence. En 1998, le décretproposait 40 % des places de formation post-doctorale à la médecine familiale et 60 % à lamédecine spécialisée. La répartition par spécialité est réalisée selon les besoins estimés pourchacune d’elles. Le MSSS regroupe les spécialités en quatre classes (A, B, C et D) selon ledegré de pénurie ou de « gravité des besoins en effectif médical » (annexe 3). Cette

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classification, qui régit de façon rigoureuse le classement dans chacune des spécialités et ladirection du transfert entre elles, a pour but de favoriser la formation dans les spécialités oùles besoins sont les plus importants, sans pour cela mettre en péril les programmes deformation dans les autres. Le groupe A représente les spécialités ciblées par le Ministèrecomme nécessitant un plus grand nombre de spécialistes, alors que le groupe D regroupecelles où le recrutement doit être égal ou inférieur au niveau des années antérieures, le besoinen spécialistes y étant moindre. Un résident pourra, ainsi, passer du groupe D au groupe C, dece dernier au groupe B et de B vers A mais non l'inverse. Dans les trois premiers groupes, lesplaces sont transférables entre elles mais non vers le groupe D. Le Ministre, surrecommandation de la Table de Concertation, revoit régulièrement l'allocation des spécialités,et donc des programmes, d'un groupe à l'autre en fonction des effectifs médicaux dans chaquediscipline et des besoins de santé exprimés. La chirurgie générale, aujourd'hui rattachée augroupe B, était classée dans le groupe A en 1996. La pédiatrie, la microbiologie,l'infectiologie et l'endocrinologie ont été transférées de C vers D au cours des deux dernièresannées. La psychiatrie, classée en C en 1996, a rejoint aujourd'hui le groupe A (ces transfertssont repris en détail à l’annexe 4).

Tableau 1 : groupe de spécialités répertoriées par le MSSS

Les spécialités sont réparties en quatre groupes, la priorité du recrutement en résidence allant augroupe A.

Groupe A Spécialités ciblées par le MSSS comme nécessitant un plus grand nombre despécialistes. Les classes non comblées dans ces spécialités sont transférables entre elles et vers legroupe B.

Groupe B Spécialités prioritaires où le recrutement doit être favorisé. Les places sonttransférables entre elles ou au groupe A.

Groupe C Spécialités où le recrutement doit être maintenu à peu près au même niveaucompte tenu des besoins. Les places sont transférables entre elles ou aux groupes A et B.

Groupe D Spécialités où le recrutement doit être égal ou inférieur au niveau des annéesantérieures. Les places sont seulement transférables aux groupes A, B, et C.

Les règles de transfert entre spécialités permettent à l’étudiant de changer de spécialité, àcondition de choisir parmi les spécialités de la même classe que la sienne ou dans une classeoù les besoins sont plus urgents.

En pratique, quand chaque société savante est sollicitée, l’attitude est pour uneaugmentation du nombre de médecins. S’il suit les souhaits des sociétés savantes, le Ministèredevrait augmenter les admissions d’environ 400 étudiants, par rapport à ce qui est définiactuellement. Les spécialistes justifient le premier recours aux spécialistes par le moindreniveau de formation des omnipraticiens et la demande des usagers.Le nombre de futurs omnipraticiens est déterminé après définition du nombre total d’étudiantssouhaités en spécialisation. À l’heure actuelle, la clé de répartition est en faveur desspécialistes. Le nombre total de places proposées restant le même, le nombre d’omnipraticiensdiminue alors que les transformations du système, évoquées ultérieurement, requièrent denombreux omnipraticiens.

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2.2 La formation en médecine

2.2.1 Les principaux acteurs sont les facultés et le Collège des médecins du Québec

En 1970, l’enseignement post-doctoral, jusqu’alors dispensé dans les institutionshospitalières, est placé sous la responsabilité des universités, à la demande du Collège desmédecins. Auparavant, les candidats à l’internat devaient s’inscrire directement à l’hôpitalagréé de leur choix, qui veillait à l’organisation de l’enseignement.Désormais, les quatre facultés du Québec assument l’élaboration des programmes post-doctoraux : elles en établissent les objectifs, le contenu, les modes d’évaluation et depromotion ; elles fixent les modes et normes d’admission, les ressources nécessaires etidentifient les milieux d’apprentissage. Cependant, l’agrément des programmes post-doctoraux, devenus universitaires, relève toujours du collège des médecins. Les principauxcritères d’agrément des programmes portent sur la présence, en quantité suffisante, deressources cliniques, professorales et physiques, ainsi que sur la masse critique d’étudiants.Partant du principe que la répartition géographique des lieux de formation détermine larépartition des lieux d’installation, de nombreuses initiatives pédagogiques visent à permettreaux étudiants du premier cycle et des cycles supérieurs de travailler dans des régions rurales.L’effet de ces mesures, sur le recrutement et le maintien en poste dans ces régions, fait l’objetde recherches évaluatives.

le Collège des médecins du Québec

Il s’apparente au Conseil de l’ordre en France, il n’a pas de rôle syndical. Il veille à laqualité des actes et des services médicaux, dans l’intérêt du public. Afin de mener à bien cettefonction, le collège intervient, dès la formation initiale, notamment en agréant les programmeset les lieux de formation pré et post-doctorales. C’est lui qui, ultérieurement, octroie lecertificat d’immatriculation, le certificat de spécialiste (concerne aussi les Omnipraticiens) etles permis d’exercice. Il définit, ainsi, les conditions d’admission à l’exercice de la médecine.

Son Comité d’admission à l’exercice (CAE) a comme mandat, notamment :- de s’assurer que la formation médicale et post-doctorale prépare de façon adéquate àl’exercice médical ;- d’étudier toute question s’y rapportant, en particulier la planification des effectifs médicauxet les besoins de la population ;- d’étudier et d’approuver les critères d’agrément des programmes et lieux de formation post-doctorale et de formation médicale continue, étudier les rapports des visites d’agrément ;- d’étudier toute demande de reconnaissance ou de modification des spécialités ;- de déterminer la durée minimale et le contenu des stages de formation post-doctorale requisen vue de l’admissibilité aux examens menant à l’obtention du permis d’exercice et ducertificat de spécialiste.

Les réglementations du collège doivent être acceptées par le gouvernement (contrôlelégislatif).Le Collège des médecins du Québec accrédite les programmes universitaires des quatreuniversités québécoises, fait passer les examens et délivre les certificats.

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2.2.2 L’organisation de la formation des médecins au Québec

Figure n°4 : organisation de la formation pré et post-doctorale en médecine depuis 1988

Le premier cycle (pré-M.D.) se déroule sur quatre ans.

La sélection des étudiants se fait à l’entrée des études sur dossier et entretien, en respectantles quotas fixés par le décret. D'après une étude4 réalisée sur l'ensemble du Canada, lesétudiants qui parviennent aujourd'hui à entrer dans une faculté de médecine sont plus âgés etont complété un plus grand nombre d'années d'études que leurs prédécesseurs. Si une facultédépasse les quotas fixés, elle est pénalisée. En 1997, les quatre facultés se partageaient 453admissions en premier cycle. Les deux premières années sont dites « pré cliniques » et lesdeux années suivantes constituent l’externat. L’étudiant effectue, alors, des stages hospitaliersà temps plein, obligatoires et optionnels rotatifs. La méthode d’apprentissage par problème

4 Statistiques relatives à l'enseignement médical au Canada, Association des facultés de médecine du Canada,1998 (http://www.acmc.ca).

4 annéesde formation pré-doctorale (pré-M.D)

Formation post-doctorale (post-M.D.)

2 années de résidenceen médecine de famille

4 à 7 années de résidencedans le spécialité choisieparmi les 35 spécialitésreconnues au Québec

Examens professionnelsdu CMQ

Permis d’exercice de lamédecine au Québec enmédecine familiale

Certificat et spécialiste etpermis d’exercice de la

médecine au Québec enspécialité

Examens professionnelsdu CMQ

Doctorat en médecine (M.D)

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(APP) est une modalité pédagogique privilégiée, pour favoriser l’intégration desconnaissances, l’autonomie intellectuelle, le développement de stratégies d’apprentissagepersonnelles et l’aptitude au travail en équipe (étude de cas).Un certificat d’immatriculation, remis par le Collège des médecins permet aux étudiants defaire des actes sous surveillance au cours de leur formation.Au terme de ces stages, les étudiants reçoivent le diplôme universitaire de MD (medicinaedoctor). Ce dernier ne leur confère pas le droit de pratiquer. De 1990 à 1997, les admissionsont décru de 19 % (passant de 561 à 453), à la suite des mesures par le MSSS. En 1997, plusde la moitié des effectifs étaient des femmes.

Le recrutement des étudiants de différentes provenances peut jouer sur l’accessibilité dessoins. Par exemple, le recrutement d’étudiants vivant en zone rurale peut améliorer larépartition géographique des médecins, le recrutement d’étudiants appartenant à des minoritésethniques permet un meilleur accès aux soins pour les minorités concernées, le recrutementd’étudiants dont les parents appartiennent à des catégories socioprofessionnelles différentesoffre une plus grande diversité de cliniciens aptes à répondre à diverses demandes…L’importance de recruter ou d’admettre dans les écoles de futurs médecins ayant grandi enrégions rurales semble aujourd’hui clairement admise (il est préférable de recruter desmédecins qui veulent vivre dans ces régions plutôt que de recourir à des mesures coercitivesou à des incitatifs financiers).

l’organisation de la formation post-doctorale

Une fois le diplôme de Medicinae doctor acquis, l’étudiant doit réaliser une résidence pourobtenir le droit de pratiquer, d’une durée de deux ans en médecine familiale ou de quatre àsept ans dans l’une des trente-cinq spécialités reconnues au Québec ou des cinquante-septreconnues par le Collège royal des médecins et chirurgiens du Canada. En 1988, tous lesétudiants qui amorcent leur formation emprunteront l’une des deux voies d’accès au permisd’exercice, à savoir 2 ans de formation post-doctorale en médecine familiale ou une formationcomplète dans l’une des trente-cinq spécialités d’une durée moyenne de 5 ans.Ainsi disparaissent toutes les autres formes d’internat. Pour être admis en spécialité et enmédecine familiale, l'étudiant présente à la direction du programme auquel il veut participerun dossier comprenant, entre autres, des évaluations fournies par ses professeurs, ainsi qu'unquestionnaire où il décrit ses motivations, ses intérêts personnels et ses activités extrauniversitaires, le tout complété par un entretien qui permet un classement des candidatures.Environ la moitié des étudiants finissant leurs études de médecine auront accès auxspécialités. L’enseignement clinique est dispensé sous forme de stages, en hôpital ou encabinet.Le nombre de places, rémunérées par la RAMQ, dans ces programmes est fixé par décretgouvernemental. Les résidents sont payés par la RAMQ sur convention avec la Fédération desmédecins résidants du Québec.

on constate actuellement un attrait pour les programmes de formation en médecinefamiliale pour plusieurs raisons

En 1998, seuls 270 des 308 postes offerts aux résidents dans diverses spécialités étaientcomblés, une tendance à la baisse qui s'esquissait déjà en 1997, alors que seulement 310 des330 postes avaient trouvé preneurs. Au-delà du retard technologique qu'accusent plusieurshôpitaux en raison des compressions budgétaires, il semble que les jeunes médecins désertentles postes de spécialités en raison des contraintes d'installation régionales et du coût,

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finalement, élevé des études. En 1998, quatre-vingt-cinq médecins spécialistes se sontreconvertis à la médecine de famille.

L’allongement de la durée de la formation spécialisée, les examens de plus en plusnombreux et chers, ainsi que l’augmentation des frais de scolarité font en sorte qu’un médecina accumulé, en moyenne, une dette de plus de 50 000 $ Ca lorsqu’il débute sa pratique, mêmesi les frais de scolarité sont relativement faibles. En choisissant la médecine familiale, lemédecin peut rembourser son investissement plus tôt.Le fait que chaque hôpital ne soit pas agréé pour enseigner l’ensemble des spécialitésconcourt à déterminer le lieu de formation des résidents. Si les universités peuvent établir desnormes pour identifier et sélectionner les superviseurs de stage et accréditer les milieuxd’accueil, les programmes doivent, à terme, obtenir du Collège des médecins l’agrément denouveaux milieux de formation.

Le Conseil médical du Québec a consulté les étudiants débutant une formation post-doctorale, les étudiants déjà engagés, le Collège des médecins et les vice-doyens pourconnaître leur position stratégique par rapport aux programmes de formation. Ils étaientunanimes sur les causes de la pénurie. La rigidité des systèmes est dénoncée. Les transfertsd’un programme à l’autre sont limités, les universités manquent de souplesse (changement defaculté, stage hors CHU…). Le quota est trop strict comme le contenu de la formation. Cetterigidité est plus générale et inquiète les étudiants qui ont peur de voir leur autonomieprofessionnelle limitée. Le contexte général de maîtrise des dépenses fait naître desincertitudes chez les étudiants et notamment celle d’avoir un poste intéressant à la fin de leursétudes. La médecine familiale permet selon les étudiants de travailler plus librement.Au moment de leur choix de spécialité, les étudiants prennent désormais en considération lacharge de travail que telle ou telle spécialité impose d’autant plus que la profession seféminise. Enfin, l’introduction de la rémunération différenciée pour les nouveaux médecins,négociée entre le gouvernement et la FMSQ en 1995, désavantageait la médecine spécialisée,comme le décret de 1982 sur le niveau de rémunération en fonction du lieu d’exercice. Selonles étudiants, la formation ne semble plus adaptée aux réalités de la pratique médicale et àd’autres aspects comme le « virage ambulatoire5 ». En résumé, les étudiants reçoivent uneinformation déformée sur le potentiel d’avenir d’une spécialité et des conditionsprofessionnelles qui y sont rattachées.Le fait que les postes de spécialités ne trouvent pas systématiquement preneurs n’a riend’inquiétant. Mais, conjugué à d’autres facteurs comme la réduction du nombre annueld’admissions et celui de la croissance du mouvement des résidents d’une spécialité vers lamédecine familiale, ce phénomène soulève des interrogations.Face à ce constat, les règles de transfert entre spécialités au cours de la formation spécialisée,présentée au chapitre 2.1 (tableau 1), ont été établies. Le MSSS a consulté les régions pourconnaître leurs besoins en médecins sur les années 2000. Ces dernières ont remis desestimations très élevées afin d’assurer leur autosuffisance. Le Ministère a donc classé chaquespécialité dans une des quatre catégories : classe très prioritaire (A), prioritaire (B), stable (C),stable voire pléthorique (D). Les nouvelles règles ont alors permis aux résidents de changer despécialité, à condition de changer pour une spécialité de même classe que la sienne ou d’uneclasse où les besoins sont plus urgents.

5 Réforme de 1995 du système de soins suite à la commission Rochon visant le développement des soinsambulatoires et la fermeture d'hôpitaux.

141

III La régulation du marché du travail

3.1 L'accès au remboursement des prestations par la RAMQ pour les médecins n'est paslimite des que l'étudiant a validé son cursus de formation

Pour pratiquer au Québec, il faut avoir validé son cursus (certificat du collège desmédecins) et parler français (examen). Une fois leur cursus validé, les médecins reçoivent unnuméro d’identification qui sert, à la fois, de numéro d’exercice et de numéro de facturation.Chaque médecin québécois verse une cotisation annuelle obligatoire au Collège royal desmédecins du Québec (CMR).Peu d’étudiants étrangers en formation au Québec accèdent au droit d’exercice. Ils doiventrepartir, pour la plupart, dans leur pays d’origine.La pratique médicale est exclusive, il existe un organisme de reconnaissance pour le Canadaqui est le Collège royal pour les médecins spécialistes. Pour exercer en dehors du Québec, ilfaut être reconnu par le CRM. du Canada et réciproquement pour exercer au Québec.La liberté d'installation en pratique privée est un droit garanti par la charte canadienne desdroits et des libertés. Le mécanisme de limitation à l'installation, introduit par la Colombiebritannique, a fait l'objet d'un recours auprès de la cour suprême et a été invalidé au regard dela charte canadienne des droits et libertés.Une grande partie des spécialistes exercent au sein des établissements hospitaliers publics.

3.2 Les mesures visant à réguler l’installation des médecins sont nombreuses car le payss’est trouvé rapidement confronté au problème de l'accès aux soins des collectivitésrurales et éloignées du canada et a fortiori du Québec

De nombreuses mesures incitatives ont été développées et testées par les différentesprovinces du Canada et, notamment, le Québec. Un rapport canadien, publié en juin 19996,analyse le résultat des différentes actions menées et propose des actions structurelles àappliquer sur l'ensemble du Canada. De même, à l'échelon du Québec, le groupe de travailconsultatif ministériel sur les mesures incitatives destinées au recrutement et à la rétention desmédecins en régions éloignées et isolées a rendu son rapport en juin 1999.

Nous présentons, dans un premier temps, l'ensemble des actions développées au Québec etleur échelonnement dans le temps. Nous discuterons ensuite, à lumière des enseignements durapport Stoddart et Barer, l'impact de ces actions au Canada et les propositions qui endécoulent.

Il n’y a pas, au Québec, de mesures de limitation à l'installation mais plutôt des mesuresincitatives et désincitatives (les permis restrictifs d’installation concernent uniquement lesétrangers).

Trois types de mesures ont été adoptés pour améliorer la répartition géographique desmédecins dans les années 80.

En 1981-1982, la Loi 27 instaure des niveaux de tarifs différents pour les nouveauxmédecins au cours des trois premières années de pratique, selon leur lieu de travail (annexe 2). 6 Améliorer l'accès aux services médicaux nécessaires dans les collectivités rurales et éloignées du Canada : Lerecrutement et le maintien en poste en question - Morris L. Barer; Greg L. Stoddart - Document de travailpréparé pour le Comité consultatif fédéral-provincial-territorial des ressources humaines en santé.

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Dans les régions urbaines, les tarifs sont inférieurs et dans les régions déshéritées, les tarifssont plus élevés. D'autres incitatifs économiques pour tous les médecins travaillant en zoneéloignée sont associés, comme la prime à l’installation et la prise en charge des frais dedéplacement pour la formation médicale continue.Le territoire est découpé en quatre types de région auxquels correspond un niveau de tarif :

- universitaire (70 % de la rémunération pour les médecins débutants),- périphérique de Montréal et de Québec (70 % en établissement et 100 % en cabinetprivé),- intermédiaire (100 %),- éloignées et isolées (115 % pour les OP et 120 % pour les spécialistes).

Mais ces mesures n’ont eu pratiquement aucun effet sur l'installation des jeunes spécialistes.

En 1986, une part des places en spécialité est réservée à ceux qui s’engagent à allerpratiquer en zone éloignée. La moitié seulement de ces postes est pourvue.

Dans les années 1990, la loi 75 instaure des mécanismes visant à limiter le choix du lieu depratique pour les spécialistes par l'instauration des Plans régionaux d'effectifs médicaux(PREM). Les commissions médicales régionales doivent soumettre aux régies régionales,après sondage auprès des établissements, des PREM qui prévoient les besoins sur une basetriennale. Ces données sont ensuite collectées et analysées par le Ministère de la Santé et desServices sociaux, qui évalue l’offre et la demande de services, ainsi que les besoins régionauxpour chacune des spécialités.La planification du marché de l’emploi se fait donc au niveau régional avant d’être validée auniveau central (1990) et repose localement sur les Plans régionaux d’effectifs médicaux, quidoivent permettre de faire remonter les besoins par les régions. Chaque région fixe le nombrede médecins qu’elle souhaite voir s’installer sur une période de trois ans. Les PREM ont pourobjectif de faire converger vers la moyenne provinciale le ratio médecin/population danschacune des dix-neuf régions. Le MSSS détermine les objectifs de croissance des effectifs dechaque spécialité dans chaque région et, selon ces objectifs, valide ou refuse un PREM.Le plan de répartition du ministère s’appuie sur trois critères pour définir les inégalitésrégionales : le nombre de médecins en Équivalent temps plein par région, la consommation enmédecins cliniciens et la consommation attendue.Chaque région se voit « imposer » un quota qu’elle doit répartir entre établissements. Cesplans ne concernent pas l'exercice en cabinet privé. Cette mesure touche donc plus durementles spécialistes dont l’activité est essentiellement hospitalière.La création des contingentements régionaux devait limiter l’entrée des jeunes médecins dansles régions surdotées (Montréal, Sherbrooke, Québec) et permettre, ainsi, un meilleurdéploiement des ressources médicales dans le secteur hospitalier.

Cependant, les résultats des PREM sont limités, car ils ne concernent que les médecinsspécialisés au sein des hôpitaux, et leur élaboration ne prend en compte que le renouvellementet la sommation des besoins, sans travailler les aspects organisationnels.

Par ailleurs, de nombreuses mesures incitatives ont été adoptées par le gouvernement pouraméliorer la répartition géographique des médecins. Elles visent aussi bien le soutien financierde la formation, contre un engagement à pratiquer en région éloignée, que les primes àl'installation ou la facilitation des conditions d'exercice :

- des bourses de formation sont octroyées aux étudiants en médecine générale et enmédecine spécialisée en contrepartie de la reddition de services en régions périphériques àraison d'un an par tranche de 10 000 $ Ca reçus,

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- les primes d’installation sont versées (entre 5 000 et 10 000 $ Ca non imposables) uneseule fois, à condition que le médecin ne se soit jamais installé en région et qu’il exerce àplein temps. ; elles sont octroyées à tous les spécialistes et certains omnipraticiens en fonctionde l’éloignement,

- le « ressourcement » (formation résidentielle en ville) est financé, à raison de 20 joursouvrables, pour les médecins qui résident sur un territoire désigné et qui y exercent lamédecine,

- la prise en charge des frais de sortie, de déménagement et d’éloignement en territoireisolé,

- le « dépannage » est un programme qui vise à combler des besoins liés à l’absencetemporaire ou à l’insuffisance aiguë de médecins mais les établissements sur-utilisent cettepossibilité,

- le programme de « marketing de l'exercice en milieu éloigné » permet aux étudiantsd’aller visiter les régions et aux représentants des régions d’aller recruter les étudiants enmilieu universitaire,

- la décentralisation de la formation médicale (notamment par les stages pour les étudiantsde première, deuxième et troisième année), des stages d’externat ou de résidence en médecinefamiliale et des stages en formation spécialisée, en région périphérique,

- l'offre de postes réservés d’entrée en résidence, ces postes étant accordésconditionnellement à un engagement de pratiquer durant quatre ans en région périphérique,assortie de pénalités en cas de non-respect de l’engagement, pour les diplômés hors Québec,ces postes sont accordés conditionnellement à un engagement de pratiquer durant quatre ansen région périphérique (environ les 2/3 ont obtenu le permis d’exercice).

Malgré l'amélioration du ratio médecin/population sur toutes les régions du Québec, il estconstaté une pénurie de ressources médicales au Québec, particulièrement en région éloignée.Au 31 décembre 1998, le MSSS constate globalement un écart de 92 spécialistes et de 72omnipraticiens entre les effectifs autorisés des PREM et le nombre de postes non pourvus. Lesmesures incitatives actuelles ne peuvent plus attirer le nombre de médecins nécessaire aurenouvellement des équipes en place. Pour beaucoup d'observateurs, les mesures incitativesont été partiellement des échecs, même si peu d’entre elles ont fait l’objet d’une évaluation(postes réservés non pourvus, objectifs régionaux non atteints…). Ceci est, en partie, du à lanon-régulation du secteur ambulatoire, les étudiants ayant contourné ces mesures grâce auxpressions exercées en invoquant la pénurie dans certaines spécialités et de futurs enseignantsdans les régions universitaires. De plus, les mesures incitatives sont considérées comme desavantages acquis et ne sont pas remises en cause lors des négociations entre l’État et lesfédérations. Les médecins cumulent les différentes mesures incitatives. En réalité, le principaleffet des diverses formes de majoration des taux de rémunération pour le travail en milieurural ou éloigné est de récompenser ceux qui pourraient s’établir là de toute façon ou qui l’ontdéjà fait, pour des raisons principalement non financières.Des arrangements, fondés sur la promesse de service, ont été mis à l’essai pendant nombred’années et certains sont encore en vigueur. En vertu de ces arrangements, les étudiants et lesrésidents reçoivent des subventions, des prêts ou des bourses en échange de la promesse des’établir dans une région désignée, pour une période donnée, à la fin de leur formation. Lesparticipants utilisent souvent la possibilité qu’ils ont de payer une certaine somme pourrembourser la bourse octroyée et se dégager de leur promesse de service et, même lorsqu’ilsne le font pas, les programmes ont un effet limité sur le maintien en poste.

Le rapport Barer et Stoddart de 1999 fait le même constat sur l'ensemble du Canada etpropose plusieurs pistes de changement radicales, devant le constat de l'insuffisance des

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mesures économiques incitatives pour le maintien en poste en zone éloignée. Il propose enpremier lieu de repenser les modalités d'achat des services médicaux en « attribuant lesfonds pour les soins médicaux en fonction de la taille et des caractéristiques de la population àdes organismes tiers (régionaux ou locaux) qui passeraient contrats avec les soignants quiaccepteraient la responsabilité de s'occuper de ces populations ». Les modes de rémunérationdes professionnels pourraient être multiples et seraient négociés entre les contractants. Lesentrepreneurs ou les groupes de soignants seraient alors tenus pour responsables de la qualitéet de l'intégration des soins fournis aux populations dont ils ont accepté la responsabilité.L'effet sur l'installation des médecins et la nature des contrats passés sont étroitement liés à lafaçon dont les fonds sont attribués aux acheteurs (on peut imaginer une surdotation auxrégions éloignées en raison même de cet éloignement). Cette mesure, qui s'inspire desréformes du NHS avec l'introduction du marché interne, devrait s'appliquer sur l'ensemble duCanada pour être efficace.

Le rapport propose, ensuite le déploiement accru de personnel intermédiaire dans lesrégions isolées, comme les infirmières cliniciennes possédant une formation suffisante pourfournir une vaste gamme de services de soins primaires. Les infirmières cliniciennes seraientformées à offrir des soins primaires, avec une supervision médicale modérée (par téléphone),et les conditions de leur exercice seraient réglementées. De fait, les infirmières cliniciennesexistent au Canada depuis vingt ans, mais sont peu nombreuses. Le développement de cetteprofession a été freiné, à l'époque, par les organisations d'infirmières qui craignaient que cespostes soient prélevés sur des postes d'infirmières et par les associations médicales quis'inquiétaient de l'empiètement sur la profession. Les auteurs pensent que le débat politiquepeut être aujourd'hui engagé au Canada. Ils estiment que les infirmières cliniciennes serontmotivées pour s'installer en milieu rural, en raison de la plus grande indépendance de pratiquequ'elles pourront obtenir. La possibilité de les former directement en milieu rural semble aussiplus accessible que la formation, en milieu rural, des candidats aux études de médecine. Ilsnotent, toutefois, que l'option « infirmières cliniciennes » risque de représenter une dépensesupplémentaire si les médecins continuent de s'installer, en priorité, en ville.

La troisième option stratégique consisterait, pour les autorités provinciales etrégionales, à confier aux centres universitaires la responsabilité de la prestation deservices appropriés dans des régions rurales et éloignées désignées. Leur budget serait,bien entendu, augmenté en conséquence. Cette solution permettrait aux gouvernementsprovinciaux d'opter pour la gestion publique des services de soins éloignés. L'hypothèseprincipale qui sous-tend cette proposition est que les centres universitaires, ainsiresponsabilisés, seront alors très motivés pour apporter des modifications aux processusd'admission et de formation permettant de recruter et de maintenir en poste des professionnelsadaptés à l'exercice en zone éloignée. Les professionnels formés dans ces centres pourraientaussi garder un lien étroit, à distance, avec ces centres par le biais de la télémédecine. Dupoint de vue des auteurs, dans la mesure où les problèmes actuels de répartition des effectifsmédicaux découlent de processus de sélection qui ne permettent pas de repérer, comme il lefaudrait, les candidats qui pourraient éventuellement occuper des postes en région rurale oudu sentiment, de la part des médecins diplômés, qu'ils sont mal préparés pour pratiquer endehors des régions urbaines, il est légitime que les organismes de formation et de recherchesoient sollicités pour résoudre les problèmes de la population.

Les propositions du groupe de travail, sur les mesures incitatives destinées au recrutementet à la rétention des médecins en régions éloignées et isolées, au Québec, portentprincipalement sur des aménagements de mesures déjà engagées et sur de nouvelles mesures

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visant à recruter et former des autochtones dans les écoles de médecine. Les auteurs renvoientla question du maintien en région des professionnels de santé au développement économiqueet culturel global de ces mêmes régions.

En conclusion, il apparaît que les mécanismes incitatifs, d'ordre purement économique,sont insuffisants à inciter les professionnels à s'installer en zone éloignée. L'action, très enamont, sur les modalités de recrutement et de formation des professionnels au sens large,comme la décentralisation des modes de contractualisation entre acheteurs et offreurs desoins, apparaissent comme des voies d'action à privilégier.

3.3 La pénurie de médecins : un problème de productivité qui appelle destransformations sur les modes de rémunération des professionnels et l'organisation dusystème de soins ?

Le manque de ressources médicales, qui est invoqué devant l'importance des filesd'attentes, relève, pour certains observateurs et certaines institutions dont le Conseil médicaldu Québec, d'une évolution de l'ampleur et de la charge de travail des médecins. Ces derniersdiversifient beaucoup leur pratique et, comme dans beaucoup de pays, consacrent moinsd'heures à leur activité professionnelle. La pénurie de médecins constatée n'est alors pastoujours imputable au manque absolu de médecins et s'explique, en partie, par le fait que cesderniers sont moins disponibles ou se sont spécialisés dans des activités à forte valeur ajoutée.Plusieurs études ont montré que le nombre moyen d’heures travaillées avait diminué, de façoncontinue depuis les années 70, pour se stabiliser. Le nombre moyen d’heures consacrées auxsoins des patients est passé de 42,3 heures par semaine en 1984 à 38,5 heures en 1994, pourles omnipraticiens (de 40,6 à 39,4 heures pour les spécialistes). Les heures consacrées auxautres activités professionnelles ont, en revanche, augmenté. Même s’il existe toujours unécart entre les femmes et les hommes, pour ce qui est du nombre d’heures travaillées, cet écartse rétrécit (13 % en 1994 contre 20 % en 1984 parmi les OP).

3.3.1 Les modalités de rémunération des médecins et l'instauration d'enveloppesbudgétaires fermées : des pistes d'action pour améliorer l'accessibilité aux services quiont des effets sur la démographie médicale

En 1976, la négociation annuelle entre le gouvernement et les deux fédérations (FMOQ etFMSQ) porte désormais sur la détermination du niveau de la masse monétaire globale que legouvernement devra verser à l'ensemble des médecins de chaque fédération et plus seulementsur un objectif de revenu annuel brut par médecin avec révision en fonction des dépassementséventuels. Ce n'est qu'après s'être entendus sur une masse monétaire et, donc, sur le revenumoyen des médecins que les deux parties déterminent le tarif de chaque acte. Afin derespecter les objectifs de limitation de l'enveloppe, selon les objectifs de croissance de lamasse monétaire déterminés par le Conseil du Trésor, une régulation microéconomique parplafonnement individuel de revenu pour les médecins a été instaurée. Le mécanisme estdifférent entre omnipraticiens et spécialistes. Chaque omnipraticien est assujetti à unplafonnement trimestriel et individuel. Lorsque ce plafond est dépassé au cours du trimestre(33 % de plus que le revenu cible), tout acte supplémentaire n'est rémunéré qu'à 25 % de sontarif régulier. Ce système permet de pénaliser uniquement les médecins ayant une très forteactivité.

Depuis 1993, plusieurs mesures ont modifié les modalités de rémunération desomnipraticiens qui étaient, en 1970, principalement rémunérés à l’acte (95 % des médecins

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spécialistes et OP). Actuellement, plus de 50 % des OP sont indemnisés de façon mixte. Encabinet privé, ils sont surtout payés à l’acte tandis qu’à l’hôpital, ils reçoivent un salaire ou untarif horaire ou une rémunération à la vacation, surtout dans les hôpitaux psychiatriques et enCLSC (14 à 15 %).

La tarification horaire fut développée pour favoriser la diversité des pratiques des OP : versdes activités de santé publique, la participation à des réunions scientifiques, des activités deformation, les visites en centres de long séjour. Ce mode rémunération a « explosé » et lenombre de médecins pratiquant de cette façon est en augmentation. Parallèlement, on constateune baisse de la productivité. De plus, depuis 1993, les OP qui exercent depuis moins de dixans et dont plus de 50 % des revenus proviennent de leur cabinet privé sont assujettis à desActivités médicales particulières (AMP, tout service effectué dans un établissement autrequ’un CLSC) sinon leurs honoraires sont minorés de 30 % : les urgences des hôpitaux, lesprogrammes de prévention ou de maintien à domicile. Le but des AMP est la conception d’un« réseau intégré d’accessibilité aux soins généraux ».

Les spécialistes, quant à eux, perçoivent actuellement un forfait journalier à l'hôpital. LaFMSQ cherche à proposer de nouveaux modèles d’organisation des services et l’introductiond’une politique de rémunération mixte : un forfait pour un ensemble d’activités (médico-administratif, enseignement, clinique), journalier, auquel s’ajoute une rémunération partielle àl’acte. Un travail de pondération de la valeur relative des actes est effectué par ailleurs (de 0 à100 %). Cette rémunération aurait un effet très structurant sur l’organisation des soins parl’attribution des valeurs relatives, en fonction des actes (risque évoqué de spécialisation destâches et de diminution de la productivité). L’engouement pour ce type de rémunération estimportant et la spécialité de neurochirurgie teste, actuellement, ce mode de rémunération.

Les effets pervers des modes de rémunération actuellement mis en place et les risques desous-productivité et de partage des tâches entre médecins (bloc enseignants versus bloccliniciens) ont été évoqués par la plupart de nos interlocuteurs.La multiplication des formes de rémunération explique, aujourd'hui, les dépassementsd’enveloppe permanents ainsi que l’importance des listes d’attentes dans certaines spécialités,ce qui permet aux spécialistes de renégocier l’enveloppe, sans reverser les dépassements. Cesdépassements sont courants et le gouvernement ne s’y oppose pas, du fait des pressions(notamment) médiatiques. Pour certains observateurs, la rémunération à l’acte et la notion deplafond sont incompatibles, dans la mesure où les listes d'attentes sont contrôlées par lesprofessionnels et deviennent un outil de négociation.

Depuis 1995, le gouvernement québécois a imposé une croissance zéro des dépensespubliques pour trois ans, en décrétant une enveloppe fermée pour chaque ministère. Cettemesure est à l'origine des programmes d'allocation pour fin de carrière, qui ont un succèsimportant dans le secteur santé. Il s'agissait, en effet, de trouver des solutions pour financerl'arrivée des nouveaux médecins dans une enveloppe fixe, voire même en diminution, sanstoucher à la rémunération moyenne. La question de la démographie médicale a donc étéconfrontée à la limitation des ressources et c'est l'option visant à diminuer le nombre demédecins en exercice qui a été choisie. Ces compressions budgétaires s'accompagnent d'uneréforme du système hospitalier visant la réorganisation des services de soins : le virageambulatoire notamment. Elles ont aussi débouché sur la création des Départements régionauxde médecine générale (DRMG).

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3.3.2 L'organisation des soins et des pratiques médicales pour améliorer la disponibilitédes services a des effets sur la gestion des ressources médicales, notamment en médecinegénérale

Ces quatre dernières années, le virage ambulatoire (1997-1998) qui vise le développementdes interventions en ambulatoire et des modalités de prise en charge au domicile ou en CLSC(Centre local de santé communautaire) a induit des changements importants, comme lesfermetures et fusions d’hôpitaux (quatre hôpitaux sur six ont fermé dans la région de Trois-Rivières), et le départ des omnipraticiens de l’hôpital pour travailler en cabinet privé où sesont développées une plus grande technologie et l’hospitalisation à domicile. Dans le mêmetemps, des laboratoires se développent en ville mais, globalement, peu de spécialistes exercenten ambulatoire, les spécialités proportionnellement les plus représentées en ambulatoire sontla radiologie et la chirurgie plastique. En pratique, pour contourner les restrictions budgétaireshospitalières, les dirigeants hospitaliers sous-traitent au secteur ambulatoire (examensbiologiques, etc.).Les nouvelles techniques comme la chirurgie laser, l'IRM, la tomographie non prises encharge dans le panier de biens et services remboursés par la RAMQ, sont assurées par desorganismes privés et se développent dans le secteur ambulatoire.Les médecins sont amenés à modifier leurs pratiques, en composant avec des ressourcesdifférentes et en mettant à profit les nouvelles technologies. Parallèlement, des compressionsbudgétaires ont suivi ces transformations, tout comme les départs massifs en retraite, et ontgêné l’implantation de la réforme qui devait se faire sur une courte période. De plus, les listesd’attentes ont augmenté.

Le débat sur la hiérarchisation des soins visant une meilleure organisation a débouché surla création des départements régionaux de médecine générale, à l'initiative de la FMOQ.Actuellement, le patient est libre de consulter le médecin de son choix, généraliste ouspécialiste. Les omnipraticiens ont souvent une activité de deuxième ligne, puisque beaucoupont une pratique hospitalière, notamment aux urgences et plus encore s’ils pratiquent en zoneéloignée (4 000/7 000) : pratique de soins de première ligne à l’hôpital, par exemple, 70 lits demédecine familiale sur les six cent cinquante du CHU de Sherbrooke). On assiste,actuellement, à un chevauchement des soins de première et deuxième lignes (cardiologie,psychiatrie, obstétrique...). La FMSQ, dans ses négociations avec l’État et la RAMQ,positionne le spécialiste comme un médecin consultant.Les établissements ne sont pas hiérarchisés. Actuellement, des actions hospitalières sontengagées pour essayer de concentrer ou de mettre en commun des moyens et des ressourceshumaines, pour élargir la vocation des hôpitaux régionaux et obtenir des engagements decoopération plus importants entre établissements.En 1996, le comité sur la réorganisation des soins médicaux de première ligne concluait queles omnipraticiens devaient agir rapidement pour adapter leur pratique aux réalités nouvellesdu système de santé. Plusieurs aspects de la transformation du réseau concernent directementles omnipraticiens, notamment la hiérarchisation des services, la régionalisation del’organisation et de la gestion du système de santé.Le Conseil médical du Québec prône un système de passage obligatoire chez unomnipraticien (type « gate-keeper ») pour accéder à la consultation spécialisée et a engagéune recherche pour savoir quels modes de rémunération seraient les plus adaptés à cettenouvelle organisation des soins qui semble inéluctable. Le Conseil médical du Québecsouhaite, en effet, remettre aux professionnels l’organisation de leur pratique. Cette idée deresponsabilisation définirait la place du médecin, non plus comme celle d'un intervenantponctuel face à un problème de santé, mais comme un acteur assurant la santé d’une

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population. La question de l’urgence, qui a fait l’objet d’une production récente, aborde laquestion de la responsabilité du médecin vis-à-vis de la population et du prix à payer (ou pas)pour une limitation de sa liberté (engagement à assurer les urgences sur une durée donnée enéchange de quoi ?). Pour le CMQ, l’implication du médecin, vis-à-vis de la population, passepar la rémunération à la capitation. Mais, ce mode de rémunération pénalise l’accessibilité(liste pleine et files d’attente). Le conseil proposait donc un mode de rémunération composé à70 % de capitation et à 30 % de paiement à l’acte pour les omnipraticiens. La pratique enmédecine familiale s’étant fragmentée avec l’apparition des cliniques sans rendez-vous, laFMOQ a refusé cette proposition de rémunération à la capitation et a proposé la création desDRMG (Département régional de médecine générale), comme alternative aux propositions dehiérarchisation des soins et aux modalités mixtes de rémunération des omnipraticiens.

Créés en 1998, par une Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les servicessociaux, les DRMG sont des outils à la disposition des omnipraticiens pour leur permettred’améliorer l’accessibilité, la continuité et l’intégration des services de médecine généraledans les régions québécoises.Le DRMG se veut être, également, un instrument pour permettre une meilleure intégration desservices offerts dans les cabinets privés avec l’ensemble des services à la communauté.La proposition de la FMOQ de créer un DRMG répondait à un double objectif : doter lesomnipraticiens d’une voix régionale à l’intérieur du réseau public de santé, de façon similaireau département clinique d’un centre hospitalier et donner aux omnipraticiens le contrôle del’organisation des services qu’ils rendent à la population. En contrepartie, les omnipraticiensseraient responsables envers la population, via le conseil d’administration de la régierégionale, de cette organisation des services médicaux généraux.

Un DRMG est institué dans chaque régie régionale. Il est composé de tous lesomnipraticiens qui reçoivent une rémunération de la RAMQ et pratiquent dans la région, ycompris ceux qui pratiquent en cabinet privé.Le DRMG est un département administratif, chargé de l’organisation et de la planification desservices de médecine générale sur l’ensemble du territoire d’une régie régionale.Ses responsabilités sont les suivantes (Loi, art 417.2) :- faire des recommandations sur la partie du Plan régional des effectifs médicaux concernantles omnipraticiens et, une fois le plan approuvé par le Ministre, assurer la mise en place etl’application de la décision de la régie régionale,- définir et proposer un Plan régional d’organisation des services médicaux généraux (PROS)et assurer la mise en place et l’application de la décision de la régie régionale,- définir et proposer un réseau d’accessibilité aux soins médicaux généraux pouvant inclure leréseau de garde intégré et le programme de maintien à domicile, le tout devant s’inscrire dansle PROS,- faire des recommandations sur la liste des Activités médicales particulières,- évaluer l’atteinte des objectifs contenus dans le PROS et le PREM.

Par l’intermédiaire du DRMG, tous les omnipraticiens d’une région sont désormaisresponsables de la planification, de la mise en place et de la coordination des effectifs et desréseaux (services intégrés) de médecine générale qu’ils auront mise au service de lapopulation.La FMOQ a organisé un colloque, les 23 et 24 septembre 1999, sur le thème du Départementrégional de médecine générale qui doit désormais être mis en œuvre par les omnipraticiens.

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3.4 La répartition des champs de compétence entre professions au Québec : le cas desinfirmiers et des sages-femmes

Parallèlement à la baisse importante du nombre d’admissions en médecine et à la fermeturequasi-complète de la porte d’entrée des médecins étrangers, diplômés hors Canada et États-Unis, dans les programmes de formation post-doctorale après 1997, on assiste à une remise enquestion de la définition du champ d’exercice de la médecine, sous l’œil attentif des autresprofessionnels de la santé. Le partage des tâches reste peu abordé. Les infirmiers qui assurentle suivi des patients et la coordination des soins, dans le cadre de la réforme du « virageambulatoire » ont une organisation institutionnelle qui dote cette profession de diplômesuniversitaires et de centres de recherche spécifiques. Nous décrivons dans le paragraphesuivant la situation de la profession infirmière et l'émergence récente de la profession de sage-femme au Québec.

3.4.1 Les professions paramédicales : le cas des infirmiers

Depuis trente ans, co-existent une voie de formation par le lycée et une voie de formationpar l'université pour devenir infirmier au Québec.La première option qui débute avant le baccalauréat est choisie par 75 % des étudiants quisouhaitent devenir infirmier. Après une durée de trois ans, les étudiants obtiennent un diplômed’études collégiales. Vingt-cinq pour cent des candidats infirmiers passent par la filièreuniversitaire (après le baccalauréat) et obtiennent un diplôme universitaire après trois annéesd'étude. Les quarante-deux programmes collégiaux sont placés sous la responsabilité duMinistère de l’Éducation, tout comme la formation universitaire. Mais les universités (neufuniversités dont cinq petites) détiennent plus d’autonomie. Deux cinquièmes des diplôméscollégiaux complètent leur formation en université.

Plusieurs bouleversements importants ont modifié le marché du travail de la professioninfirmière au cours des dernières années. La loi de 1991, dénommée « loi sur la santé et lesservices sociaux », qui avait pour objectif de décentraliser la gestion des services sanitaires etsociaux au niveau de la région et de réduire les dispositifs hospitaliers, a entraîné unediminution importante des effectifs d’infirmiers en équivalents temps plein dans les centreshospitaliers et une augmentation des effectifs dans les CLSC. Au total, le service public adiminué ses effectifs de 1 190 infirmiers, ce qui a eu pour effet de diminuer le nombre desoffres d'emploi et de retarder le rajeunissement de la profession. De fait, la formation desinfirmiers ne correspondait plus aux changements engendrés par la réforme, ni aux exigences(gestion des soins par « case management », etc…) des nouveaux lieux de travail.Parmi les nouveaux diplômés, un infirmier sur quatre ne pratiquait pas. Beaucoup d’entre euxs’estimaient insuffisamment formés et 40 % choisissaient de continuer des étudesuniversitaires ou optaient pour un autre emploi.Actuellement seulement 3 % des infirmiers en exercice sont issus des universités.Une Table de concertation et de nombreuses commissions sur les effectifs infirmiers devaientfaire des propositions mais elles n’ont pas vraiment produit de recommandations. Il n’y avaitalors pas de réelle planification des effectifs paramédicaux.

En conséquence, en 1997, le départ massif d’infirmiers en retraite (suite au plan decessation d’activité du Ministère de la Santé) créa une pénurie relative pour la dispense dessoins et l’enseignement, d’autant que ces départs concernaient les infirmiers les plusexpérimentés.

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Le manque d’infirmiers est renforcé par une répartition géographique inégalitaire, difficileà combler vu le retard pris pour rajeunir la profession, l’expérience ou l’expertise requise et,les conditions de travail offertes. La pénurie place, aujourd'hui, les infirmiers dans de péniblesconditions de travail et les conduit à engager des mouvements de grève (aujourd’hui, 60 000infirmiers exercent au Québec, soit quatre infirmiers pour un médecin).

En réaction à cette situation, le gouvernement a augmenté, de façon importante, lesadmissions en école d’infirmiers (2 000) et a mis en place des mesures pour favoriser larétention des infirmiers ayant moins de 55 ans et ralentir le rythme des départs en retraite. Sonobjectif est d’instaurer un mécanisme continu de planification de l’offre d’infirmiers.

Depuis quatre ans, les commissions successives ont recommandé de développer laformation universitaire des infirmiers. Vu les inégalités persistantes d’accès aux soins, auQuébec comme au Canada, les gouvernements fédéral et provinciaux se sont posés la questiond’un éventuel élargissement du champ d’exercice des infirmiers. Pour l’instant, seul l’Ontariopossède des « nurse practitioners », mais des pratiques de substitution sont expérimentéesdans un des CLSC. De fait, le métier d'infirmier clinicien existe depuis vingt ans mais ne s'estpas encore beaucoup développé au Québec.

3.4.2 L’émergence d’une nouvelle profession au Québec : le cas des sages-femmes

Au Canada, la reconnaissance des sages-femmes est toute récente et nous exposonsbrièvement l'histoire de son émergence au Québec. Cette profession est légalisée, en Ontario,depuis janvier 1994 et en Colombie britannique depuis janvier 1998.De son côté, le Québec, qui avait choisi d’expérimenter la pratique de la sage-femme par lebiais de projets pilotes7, a finalement décidé, en 1999 conseillé par l’Office des professions duQuébec8, d’instaurer un ordre spécifique pour les sages-femmes.

De fait, les sages-femmes étaient présentes depuis le début de la colonie au Québec, maisla rareté des programmes de formation et la prise en main progressive des maternités par lesmédecins ont entraîné, graduellement, leur quasi-disparition.Au cours des décennies 70 et 80, simultanément au mouvement qui a vu se développer lesmaisons de naissance aux États-Unis, un mouvement de femmes québécoises s’est mis àréclamer les services de sages-femmes, arguant que la grossesse et les accouchements étaientdevenus trop médicalisés et déshumanisés. Les femmes québécoises désiraient avoir plus dechoix sur le suivi de la grossesse et le lieu d’accouchement et ce, d'autant que plusieurstravaux avaient révélé un nombre important de césariennes et d’épisiotomies au Québecrenforçant, ainsi, les thèses soutenues par les défenseurs de l'accouchement par les sages-femmes. À l'époque, la moitié des accouchements était effectuée par des obstétriciens etl’autre moitié par des omnipraticiens, mais systématiquement en milieu hospitalier. Unedizaine de sages-femmes exerçaient encore dans la clandestinité, réalisant les accouchementsà domicile et étaient directement rémunérées par leurs clientes. Comme il n’existait pas deformation officielle au Québec, les profils étaient très différents d’une sage-femme à l’autre :certaines avaient été formées à l’étranger, d’autres étaient autodidactes.

Cette situation aboutit à plusieurs scandales et le Collège des médecins attaqua les sages-femmes pour exercice illégal de la médecine.

7 Loi sur la pratique des sages femmes dans le cadre de projets-pilotes (1990).8 L’Office des professions du Québec réglemente et reconnaît les différentes professions, supervise les ordresprofessionnels et conseille le gouvernement.

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En 1980, deux associations de sages-femmes, l’une des sages-femmes diplômées, l’autre desautodidactes, sont créées. Leurs points de vue étaient assez divergents : les premièressouhaitant travailler dans un système réglementé, les secondes préférant une pratiquealternative.

Longtemps, la volonté politique et la demande populaire se sont opposées à la résistance,particulièrement forte au Québec, des associations médicales face à la venue des sages-femmes. La FMOQ et la FMSQ n’acceptaient cette forme de pratique qu’à des conditions trèsstrictes. Le Collège des médecins, dont l'une des missions est de protéger les usagers, ne sepositionnait pas en faveur des sages-femmes mais n’était pas totalement réfractaire à leurémergence.

Ainsi, en 1990, face à ces pressions divergentes, le Québec a choisi d’expérimenter lapratique « sage-femme » par le biais de projets pilotes soumis à une démarche d’évaluationrigoureuse. Cette expérimentation9 constituait un compromis politique acceptable entre lareconnaissance de la profession de sage-femme et le statu quo.

Le dépôt des candidatures, pour participer à ces projets, était très libre et la sélection a étéréalisée sur dossier, entretiens et examens cliniques. Sur cent candidatures, vingt ont étéacceptées. Cent trente-quatre critères de non-éligibilité au programme ont été définis etfaisaient office de loi.Les sages-femmes sélectionnées étaient :

- des sages-femmes diplômées d’autres pays, avec ou sans formation antérieured’infirmière et ayant pratiqué ou non leur profession au Québec, ou ayant pratiqué enobstétrique,- des infirmières ayant acquis un savoir-faire de sage-femme en suivant une formationcontinue offerte par des associations de sages-femmes ou d’autres organismes,- des personnes n’ayant pas de formation d’infirmières de formation, mais ayant appris lapratique en accompagnant une autre sage-femme (comme apprentie) ou ayant reçu uneformation continue non reconnue dans un établissement d’enseignement ou desautodidactes.

Une fois admises, toutes les sages-femmes ont bénéficié d'une mise à jour de leursconnaissances, réalisée sans la collaboration des médecins, les obstétriciens ayant exercé despressions pour que les médecins n’y participent pas. En pratique, certains médecins moinsréfractaires ont accepté de participer sur la base d’une entente informelle.La loi proposait la mise en place d’un maximum de huit projets pilotes. Ces projets pouvaientêtre soumis par un hôpital, un CLSC ou les deux, conjointement. Pour plusieurs raisons, dontl’opposition des associations médicales et les exigences de la loi quant à l’autonomie quedevaient avoir les sages-femmes, seuls les projets pilotes parrainés par les CLSC ont étéretenus, à l’exception d’un seul projet dans le grand Nord du Québec. La plupart des projetsse sont concrétisés, au cours de l’année 1994, et ont été choisis parce qu’ils pouvaient servircertaines régions éloignées.

Ces projets ont pris la forme de maisons de naissance, installées dans le même édificequ’un CLSC ou, le plus souvent, à proximité du CLSC. Une enveloppe budgétaire a étéaffectée par le gouvernement, pour la création de ces maisons de naissance (construction de

9 Évaluation des projets pilotes de la pratique des sages-femmes au Québec - Rapport final présenté au conseild'évaluation des projets pilotes de la pratique des sages-femmes - Université de Montréal; université de Laval;Octobre 1997.

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locaux, rémunération des employés, etc…), gérée par les CLSC. De trois à sept sages-femmessalariées et quelques puéricultrices y étaient embauchées pour chaque projet. Aucun médecinn’y a travaillé.Les femmes sans antécédents ou problèmes médicaux ou obstétricaux qui voulaient bénéficierdes services des sages-femmes ont été suivies en maison de naissance où, ensuite, ellesaccouchaient. En cas de problème, que ce soit durant la grossesse, l’accouchement ou aprèsl’accouchement, les clientes étaient dirigées vers des médecins ou transférées à l’hôpital leplus proche.

Un Conseil d’évaluation des projets pilotes a été créé pour les évaluer avec l’objectif deproposer des recommandations aux Ministres, au terme de l’expérimentation. Ce Conseild'évaluation était constitué par les différents groupes d’intérêt : sages-femmes, médecins,infirmiers, hôpitaux, CLSC, universités. Une équipe multidisciplinaire, issue de deuxuniversités et du Centre de Santé publique du Québec, était chargée d’effectuer une rechercheévaluative, destinée à aider le conseil à remplir son mandat.L’évaluation a porté sur la comparaison du coût, de la sécurité (mortalité, morbidité), de lasatisfaction des femmes, du recours aux interventions chirurgicales, de l’humanisation dessoins et de leur continuité par rapport aux services médicaux courants, ainsi que sur desfacteurs organisationnels, professionnels et sociaux. Elle s'est appuyée sur un dossierstandardisé élaboré spécifiquement. Un appariement sur des caractéristiques socio-démographiques et sur les niveaux de risque a été réalisé a posteriori (après l’accouchement).Les différences socio-démographiques entre les groupes étaient minimes.Globalement et dans les deux groupes (projets pilotes, d’une part et structures habituelles,d’autre part), les femmes étaient satisfaites des soins obtenus. Toutefois, les clientes de sages-femmes ont systématiquement répondu de façon plus positive (soins plus complets, demeilleure qualité, meilleur suivi, plus d’information, relation de confiance, appréciation dulieu d’accouchement) que les clientes des médecins, ce qui n'est pas surprenant dans lamesure où les femmes qui accouchent dans les maisons de naissance sont particulièrementmotivées. Les résultats ont été souvent révélateurs quant aux attitudes et aux attentes des deuxgroupes de clientes, à l’égard du système de santé et peuvent, en partie, expliquer l’opinionqu’elles se faisaient des services périnatals reçus. Les deux groupes n’accordaient pasforcément la même importance aux différentes dimensions de leur expérience de grossesse etd’accouchement.Les résultats révèlent que les coûts de l’option « sage-femme » sont sensiblement équivalents,voire légèrement inférieurs, à ceux de l’option « médecin » (frais de séjour inférieurs pour lesmaisons de naissance par rapport aux hôpitaux).La première année, l’activité fut faible (vingt accouchements).La « démédicalisation » de la grossesse était l’objectif poursuivi par les femmes québécoisesréclamant les services de sages-femmes. L’évaluation montre que le taux d’interventionsobstétricales pratiquées durant la grossesse ou l’accouchement a été plus faible pour lesclientes de sages-femmes (qui sont a priori des femmes qui présentent des risques plusfaibles). Plusieurs indicateurs ont été employés pour mesurer les problèmes de santé dans lesdeux groupes. Les probabilités d’accouchement difficile, de prématurité, de déchirure majeuredu périnée étaient plus faibles chez les clientes des sages-femmes. Cependant, dans lesmaisons de naissance, l’évaluation a mis en évidence une légère augmentation des morti-naissances et de la ventilation à la naissance.

Ce constat a conduit le gouvernement à mandater un groupe d’experts pour explorer cephénomène. Un manque de collaboration avec les médecins a été mis en évidence ; lestransferts étaient retardés, la sage-femme redoutant, peut-être, de perdre « sa patiente ».

153

Les médecins ont recommandé que les sages-femmes travaillent sous leur responsabilité, qu’iln’y ait pas d’accouchements qui aient lieu en dehors de l’hôpital et que les autodidactes nepuissent pas exercer.

Finalement, l’évaluation a conduit à la légalisation de la profession, en septembre 1999.Quatre-vingt dix pour cent des députés ont voté pour cette loi. À ce jour, la collaboration entremédecins et sages-femmes n’est toujours pas assurée alors que c'est bien ce qui paraît êtreprimordial, notamment en ce qui concerne la gestion des situations à risque. L’université qui aété choisie pour former les futures sages-femmes n’est pas liée à une faculté de médecine, cequi est regrettable selon plusieurs observateurs. Un ordre professionnel a été créé, il définirales critères de transfert et de compétences des sages-femmes.

3.5 La sortie du marché du travail ou les effets du succès des mesures incitatives a lacessation d'activité pour réduire les effectifs médicaux et leur durée de carrière

En 1997, pour obtenir un déficit public nul, le gouvernement a proposé une réduction de6 % de la masse salariale de l’administration. Les syndicats de la fonction publique ont optépour une réduction de 6 % des effectifs plutôt que de 6 % des salaires.Cette mesure, qui concerne tous les secteurs publics, a été étendue aux médecins dont lesconditions de mise à la retraite étaient particulièrement intéressantes. Le succès de cettemesure a dépassé les prévisions puisque environ 7 % des médecins et du personnel infirmierhospitalier ont quitté les hôpitaux (environ 1 200 médecins en ont bénéficié et 16 000personnes dans le secteur santé). Ces personnels étant souvent expérimentés, leur départ aconsidérablement perturbé le fonctionnement du système de soins. À tel point que lesautorités ont du rappeler certaines personnes qui avaient bénéficiées des mesures incitatives àla cessation d'activité.

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Annexes Québec

Annexe 1 : cadre d’analyse des effectifs médicaux - rapport Barer/Stoddart ; 1991.

Annexe 2 : recrutement des médecins : Carte des régions, Mesures négociées, Mesuresrégionalisées, Mesures ministérielles.

Annexe 3 : extrait de la Gazette officielle du Québec concernant la politique de déterminationdes postes de résidents en médecine disponibles dans les programmes de formation médicalepostdoctorale et la détermination de places dans les programmes de formation médicale deniveau doctoral pour les étudiants de l’extérieur du Québec pour 1998-1999.

Coordonnées des personnes contactées

Bibliographie

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Coordonnées des personnes contactées

M. Marc-André FournierGroupe de recherche interdisciplinaire en santéFaculté de médecine de MontréalSecteur Santé publique

Pr André-Pierrre ContandriopoulosGroupe de recherche interdisciplinaire en santéFaculté de médecine de MontréalSecteur Santé publique

Pr Régis BlaisGroupe de recherche interdisciplinaire en santéFaculté de médecine de MontréalSecteur Santé publique

Mme Suzanne KerrouacDoyenne de la Faculté de Sciences infirmièresUniversité de Montréal. C.P 6128Succursale centre-ville H3C 3J7MontréalQUEBECCANADA

M. Daniel PoirierMinistère de la Santé et des Services sociauxDirection des services médicaux et universitaires

Dr Juan-Roberto IglesiasPrésident du Conseil médical du QuébecGouvernement du QuébecMinistére de la Santé et des Services sociaux880, Chemin Sainte-FoyR-C G1S 2L2 QUEBECCANADA

M. CotelaisÉconomiste – permanent du conseil Médical du Québec.

Dr Jean RODRIGUEDirecteur général adjointFédération des Médecins omnipraticiens du Québec1440, rue Sainte-Catherine, bureau 1000H3G 1R8 MONTREALQUEBEC - CANADA

170

Dr LaroucheMédecin conseil en organisation de services médicauxConférence des Régies régionales de la Santé et des Services sociaux du Québec888, rue Saint-Jean, Bureau 400G1R 5H6 QUEBECCanada

Dr Desjardinsancien Président de la FMSQconseiller pour la conférence des régies régionales du QuébecGynécologue-Obstétricien

Dr Adrien DandivinoCollège des Médecins du Québec

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Bibliographie

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Collège des médecins du QuébecLes effectifs médicaux au Québec : mieux comprendre le passé pour envisager l’avenir.Situation de 1980 à 1994 et projections pour les années 2000. Avril 1997.

Collège des médecins du QuébecNouveaux défis professionnels pour le médecin des années 2000. Commission sur l’exercicede la médecine des années 2000, 277 p.

173

Belgique

175

La régulation des professions de santé en Belgique

Introduction

une situation pléthorique, issue d'un conflit ancien, qui a fait l'objet d'une récente politiquede régulation

Le système de santé en Belgique, comme le système français, est organisé sur le modèle« bismarckien » au sens où ce sont les partenaires sociaux qui gèrent la majeure partie desressources allouées au système de soins et collectées par un prélèvement obligatoire sur lessalaires. Toute personne habitant la Belgique doit être assurée auprès d'une des sept mutuellesexistantes et bénéficiera de l'un ou l'autre des deux régimes principaux qui sont : le régime destravailleurs salariés, d'une part, et le régime des travailleurs indépendants, d'autre part.L'Organisme national de la sécurité sociale qui peut être comparé à l'ACOSS en France(Agence centrale des organismes de sécurité sociale) collecte les cotisations auprès desentreprises et après compensation entre risques dans un fonds d'équilibre financier, verse àl'INAMI (Institut national d'assurance maladie invalidité) l'ensemble des ressources allouéesau système de soins. L'INAMI, qui dispose d'un service de contrôle médical, instaure lesnomenclatures d'acte, négocie les tarifs des honoraires médicaux (convention) et redistribueles ressources collectées aux cinq mutuelles à but non lucratif qui sont en prise directe avecleurs adhérents, un organisme publique 1 et la SNCB. Les caractéristiques des adhérents étantfortement différentes d'une mutuelle à l'autre, l'INAMI puis l'ONSS mettaient en commun lesexcédents et les déficits pour garantir la solidarité. Depuis 1995, l'INAMI verse les ressourcesaux mutuelles selon des règles de répartition qui prennent en compte, d'une part, 90 % desdépenses réellement réalisées par les mutuelles et, d'autre part, un montant normatiféquivalent à environ 10 % des dépenses calculé sur des caractéristiques propres à lapopulation couverte par chaque mutuelle (notamment l'âge, le sexe, le lieu d'habitation despersonnes affiliées à la mutuelle...). La part de ce montant, définie a priori, doitprogressivement passer à 30 %. Ce mode de répartition vise ainsi à responsabiliser lesmutuelles qui doivent financer leur déficit par rapport à leur budget prévisionnel, en prélevantdes cotisations complémentaires auprès de leurs affiliés. A l'inverse, en cas de solde positif,les mutuelles peuvent le conserver. La plupart des salariés, des travailleurs indépendants etdes retraités doivent s’affilier à la mutuelle de leur choix. L’assurance obligatoire et les tauxde cotisation appliqués par les caisses sont les mêmes, les mutuelles ne se font concurrence,pour attirer les nouveaux membres, que par les services complémentaires qu’elles offrent, laproximité géographique et la rapidité avec laquelle elles traitent les dossiers.

1 La caisse auxiliaire d'assurance maladie invalidité.

176

Figure 1 : organisation générale du système de protection sociale belge

Ministère de la Santé et des

Affaires sociales

Médecins dusecteur

ambulatoire

Médecins dessecteurs hospitaliers

Assurés

5 mutuelles +1 établissement

Public etla SNCB

INAMI

• Collecte les ressources• Supervise l’activité des mutuelles

• Dotation (39 %)• Fixe un budget national des frais hospitaliers d’exploitation

Cotisations

• Système de tierspayant

• Forfait journalierremboursable pardes mutuellescomplémentaires

• Système detiers garant

• Libre choix dumédecin

Remboursementdes frais

• Libre choix• cotisations

Enveloppe sur lesprix de journées, sur les examensbiologiques etradiologiques

Syndicatsmédicaux

• 90 % des dépenses réelles• forfait/ «risque» de la population couverte

Négociationtarifaire

Paiement àl’acte

Enveloppe surles prix de

journées, surles examensbiologiques etradiologiques

Paiement àl’acte

177

l'organisation du système de soins est proche de celle de la France avec une homogénéitédu mode de rémunération des médecins qu'ils exercent en ville ou à l'hôpital

Les médecins, pour la plupart, qu'ils exercent en ville ou à l'hôpital, sont rémunérés à l'acte,la valeur de ce dernier étant fixée par le biais d'une convention nationale entre syndicats demédecins et INAMI. Le patient consulte le médecin de son choix et peut accéder librementaux spécialistes et à l'hôpital. La médecine de ville est principalement libérale mais une formeminoritaire particulière d'organisation existe au travers des maisons médicales. Ces dernièresregroupent deux ou trois médecins avec, selon les cas, des professionnels paramédicaux ausein d'équipes multidisciplinaires. Les professionnels exerçant dans ces « maisons médicales »sont rémunérés par le biais d'un montant mensuel par patient suivi (capitation), les patientss'inscrivent pour une durée de trois mois minimum et bénéficient de l'exonération du ticketmodérateur. Cette forme d'exercice est peu développée (15 à 20 maisons médicales enBelgique).

l'organisation syndicale des médecins libéraux est proche de celle de la France avec unepartition selon les communautés et des relations traditionnellement conflictuelles entre lessyndicats et l'État belge. La question des effectifs médicaux fut l'un des enjeux principauxde ces conflits

Traditionnellement, le corps professionnel des médecins belges est divisé en deux grandssyndicats. L'ABSYM (l'Association belge des syndicats médicaux) historiquement le premiersyndicat ayant vocation à représenter l'ensemble des médecins. Il regroupe une partie desmédecins généralistes et la plupart des médecins spécialistes. Lors des dernières élections, en1998, auxquelles 78 % des médecins ont participé, l'ABSYM a recueilli 68 % des voix dont90 % des voix des spécialistes et 38 % des voix des généralistes. Le deuxième syndicat, plusrécent, représente essentiellement les médecins généralistes (62 % des voix de généralistes et10 % des voix des spécialistes). Intitulé le Cartel, il regroupe quatre organisations différentesdistinguant les médecins généralistes et spécialistes selon leur communauté francophone ounéerlandophone. Ce syndicalisme présente beaucoup de similitude avec l'organisationsyndicale française où se retrouve la division entre MG France et la CSMF (Confédérationsyndicale des médecins français).

Depuis les années 60, les négociations tarifaires entre syndicats et gouvernement ont, leplus souvent, débouché sur une impasse2. Le gouvernement souhaitait amener les médecins àaccepter d'autres modes de rémunération, moins dépendants du volume d'activité, sans succès.Cette logique d'affrontement aurait poussé le gouvernement à mener une politique de non-limitation des effectifs médicaux ayant pour conséquence une faible croissance de la valeur del'acte afin de limiter les retombées financières des effets de volume. Tous nos interlocuteursnous ont régulièrement cité un propos du ministre de la santé de l'époque, M. Le Burton :« On les aura par le nombre ».

une politique de régulation des effectifs médicaux récemment mise en place

Le souci de contenir les dépenses de santé, au demeurant plus faibles que dans bien despays européens (7 % du PIB, mais en augmentation) et la préoccupation visant à garantir leniveau de qualité des médecins formés ont remis la question de la régulation de ladémographie médicale sur le devant de la scène politique. 2 Les syndicats de médecins ont été traditionnellement défenseurs du paiement à l'acte comme principe de lamédecine libérale et s'opposaient aux politiques alternatives de rémunération des médecins.

178

En effet, la démographie des professions de santé est considérée comme pléthorique enBelgique et l'ensemble des personnes rencontrées partage le même avis sur le sujet et le mêmesouci de restriction des effectifs, cela après des années de lutte. Les mutuelles veulentdiminuer le nombre de médecins pour restreindre leurs dépenses. Les médecins veulentréduire leurs effectifs, sans plafonner l’activité, surtout pour préserver le paiement à l’acteauquel ils sont profondément attachés. Les représentants de l'administration avancent un soucide qualité des soins. D'ailleurs, les groupements professionnels, d’habitude si hostiles àl’intervention étatique, sont demandeurs d'une régulation administrée.Le gouvernement, face à ces pressions mais aussi par peur de voir diminuer la qualité dessoins, a donc récemment instauré un numerus clausus à l'agrément (autorisation d'exercice),limitant le nombre de médecins sous contrat avec l'INAMI, mais uniquement dans leurfonction de dispensateur de soins. Ce profond changement dans la régulation du marché del'emploi a des répercussions sur l'ensemble des étapes de la carrière médicale. La régulationdes professionnels s'organise, désormais, autour de ce numerus clausus à l'agrément, en amont(pendant les études médicales) et en aval (sur le marché du travail).

la mise en place de la première politique de limitation des effectifs : le développement enparallèle d'une expertise technique de la question et d'un processus de décision

Le gouvernement a institué une commission de la planification et de l'offre médicaleauprès du Ministère des Affaires sociales, de la Santé publique et de l’Environnement (loiportant dispositions sociales du 29/04/96).Cette commission est composée d'universitaires, de représentants de l'INAMI (voteconsultatif), d'experts de santé publique, de représentants du Ministère des Affaires sociales,des mutuelles, des représentants politiques des communautés. Les doyens des facultés demédecine en sont absents.

Cette commission a pour mission :- d’examiner les besoins en matière d’offre médicale, en ce qui concerne les médecins, les

dentistes et les kinésithérapeutes3,- d’examiner de manière continue l’incidence de l’évaluation de ces besoins sur l’accès aux

études,- d’adresser un rapport annuel aux Ministres sur la relation entre les besoins, les études et

l’accès aux stages requis afin de délivrer les titres professionnels.Les modalités de travail sur la planification peuvent aller d’une simple discussion, autour

d’un objectif cible suggéré d’emblée, à la mise en route d’un long processus d’évaluation desbesoins.La voie rapide fut utilisée en Belgique où un avis sur les médecins et les dentistes a du êtreremis « dans le mois ». Quant aux professions paramédicales, le programme gouvernementalen prévoyait aussi une « stricte maîtrise » mais, à la mi-1997, elles n’étaient l’objet d’aucunavis officiel.

3 L’évolution des besoins sera considérée en tenant compte des besoins relatifs aux soins médicaux, de la qualitédes soins et de l’évolution démographique et sociologique des professions concernées. Les propositions sontfaites au Ministre. Sur propositions conjointes des Ministres des Affaires sociales et de la Santé publique, le Roidétermine, après avis de la Commission de planification, le nombre global de candidats répartis parcommunauté, qui après avoir obtenu le diplôme de médecin, dentiste ou kiné ont annuellement accès àl’attribution des titres professionnels particuliers (agrément). Le Roi fixe aussi les critères pour la sélection descandidats à l’obtention de ces titres professionnels particuliers.

179

Les « nombres cibles » peuvent concerner les étudiants, les agréments à l’exercice (oul’accès à la formation complémentaire qui y conduit) et/ou les praticiens dont les prestationspourront être financées par les systèmes d’assurance.

En résumé, l'élément nouveau est l'introduction récente d'un numerus clausus à l'agrémentqui fait de la Belgique l'un des derniers pays de notre étude à limiter ses effectifs médicaux.En effet, l’affrontement des professionnels et du gouvernement sur le mode de rémunérationdes médecins (à l’acte) a nui à l’instauration d’un système de régulation des effectifsmédicaux et du marché du travail. Néanmoins, il est important de noter que la pléthore nesemble pas avoir pesé particulièrement sur l'augmentation de la part du PIB consacrée auxdépenses de santé, plusieurs mécanismes de maîtrise des dépenses ayant été conçus parailleurs. On peut donc s'interroger sur les motivations à l'origine de la mise en place dudispositif de régulation des effectifs ou sur les conditions de sa réalisation qui sont peut être àrelier à l'inertie du processus de décision politique, eu égard aux besoins du système de santé.

I La démographie des professions de santé : situation actuelle et projections

1.1 État des lieux : pléthore des professionnels de santé et féminisation croissante ducorps médical

1.1.1 Des effectifs globaux élevés

En 20 ans, les effectifs des personnels de santé ont doublé, voire triplé. Le rapportmédecins/infirmiers est très élevé (1/1,3) comparé aux autres pays européens, notamment leRoyaume-Uni (1/4,1).

Tableau 1 : évolution des effectifs des professionnels de santé entre 1973 et 1993

1973 1993 Indice 93(pour 1973 =

100)Médecins 16 754 35 182 210Dentistes 2 844 7 616 268Pharmaciens 6 122 13 363 218Accoucheuses 1 397 3 737 268Acousticiens 457 680 149Bandagistes 2 849 6 728 236Infirmiers 14 207 45 719 322Kinésithérapeutes

6 475 21 514 332

Source : Aspects socio-économiques des soins de santé en Belgique Institut belge de l’Économie de laSanté. 1998

1.1.2 Densité médicale

Le nombre de médecins (avec et sans pratique clinique) est de 4 pour 1 000 habitants (1,5pour les pharmaciens et 0,7 pour les dentistes). C’est l’une des densités les plus importantesd’Europe.

180

1.1.3 Ratio généralistes/spécialistes et répartition par sexe et selon l’âge

D’après le tableau 2, le rapport entre médecins généralistes et spécialistes est de 43/57 en1998. La proportion de spécialistes (avec pratique clinique) a augmenté légèrement, mais defaçon continue depuis 10 ans, passant de 52 % en 1988 à 57 % en 1998.

Tableau 2 : répartition des médecins (avec et sans pratique clinique)**

entre spécialistes et généralistes de 1987 à 1998

1987 1998 Indice pour1987=100

Généralistes 15 943 (14 371)* 18 842 (15.648)* 118 (109)3 097 3 482 112

Spécialistes 12 678 (12 969)* 17967 (17 552)* 142 (135)Total 31 718 (30 323)* 40 291 (36 682)* 127 (121)

Source : Statistiques concernant les médecins, situation au 31 décembre 1998. Ministère de la Santé Publique et del’Environnement.**Les chiffres entre parenthèses représentent le nombre de médecins actifs.** Les médecins sans pratique clinique représentent notamment les médecins fonctionnaires des ministères ou organismesparastataux, les médecins de mutuelle, les médecins du travail, les médecins ne pratiquant que la médecine préventive, lesmédecins chercheurs, les médecins n’exerçant plus.*** Équivalent des « internes » en France.

Figure 2 : répartition du corps médical entre les différentes tranches d’âgeet par sexe en 1998 (avec pratique clinique)

Source : Ministère de la Santé publique et de l’Environnement.

D’après la figure 2, la population médicale est jeune (les médecins en âge de pension,c’est-à-dire de plus de 65 ans, ne représentent que 11 % du corps médical).Le taux de féminisation parmi les médecins avec pratique clinique est enaugmentation : 28,6 % (39,5 % pour les médecins sans pratique clinique, soit tout confondu,29,6 %) en 1998.Cet état de fait se vérifie aussi parmi les étudiants. En 1ère année de médecine en 1995, 55 %des étudiants étaient des femmes.

0

500

1000

1500

2000

2500

3000

3500

4000

4500

25-29 30-34 35-39 40-44 45-49 50-54 55-59 60-64 65-69 70-74 75et+

âges

nombre

femmes

hommes

181

1.1.4 La part des médecins étrangers est modérée

En 1998, sont identifiés 37 566 médecins belges, 1 527 médecins de la CEE et 1 198 d’uneautre nationalité. La proportion de médecins étrangers est donc de 7 %.Si l'immigration reste faible, l'émigration de jeunes diplômés belges vers la France et lesPays-Bas est importante mais reste mal estimée.La place des étrangers, dans le cursus de formation médicale, augmente : en 1993, lesétudiants de médecine originaires de la CEE représentent 10 à 15 % des promotions demédecins des universités belges, auxquels s’ajoutent 6 à 12 % d’étudiants d’autres origines,obtenant l’autorisation d’exercer.

Les enjeux de la répartition géographique des médecins, en Belgique, se situent entrerégions linguistiques : la Flandre est moins médicalisée que la Wallonie. La question a prisune connotation politique, pourtant les différences s’atténuent et les besoins seraient plusimportants dans le sud du pays (Wallonie). D’ailleurs, la consommation médicale y estimportante. Mais globalement, le problème de répartition géographique des effectifs ne sepose pas en Belgique. En effet, la répartition géographique des médecins est plutôt un enjeuqui concerne les pays à population dispersée, ce qui n’est pas le cas de la Belgique.

1.2 Méthodes de mesure et projections : l'évaluation des besoins cherche à estimer laforce de travail plutôt que les effectifs, ce qui approche plus finement la capacité deproduction du corps médical, notamment dans le contexte de féminisation de laprofession

Dès 1973, le problème de l’excès de médecins, appelé pléthore en Belgique, est soulevé etles chercheurs élaborent des indicateurs pour le définir : Deliège (Offre et besoins enmédecins par région 1985-2005, Rapport au Ministère de la Santé publique, Bruxelles : UCL,SESA ; 1987) propose de considérer une situation comme pléthorique lorsque le taux demédecins inactifs, parmi l’ensemble des médecins, dépasse un certain seuil. Cet auteurpropose de mesurer la pléthore par rapport à la densité médicale française, pays comparable,ce qui conduit à estimer le trop plein en 2000 à 17 % des médecins actifs4. Elle propose,comme autre indicateur, le chômage latent (c’est-à-dire le nombre d’actes annuel inférieur àun seuil considéré comme « normal », compte tenu d’une durée de travail acceptable dans uncabinet donné).Sont aussi proposés pour évaluer la pléthore :

- les besoins de remplacement,- les revenus,- le nombre de consultations,- les déclarations des médecins (combien se considèrent sous-occupés ?),- la comparaison des densités médicales.

Mais les sources de données sont diverses, hétérogènes. Les différentes bases présentent descontradictions, expliquées par des modes de recueil différents, des définitions différentes, descomptes doubles.Il n'existe pas, actuellement en Belgique, de modèle prévisionnel de l'offre de soins, basé surune évaluation de la demande de soins. L'offre est calculée sur un modèle actuariel prenant encompte les entrées (nombre d'admis, immigration) et les sorties d'activités (retraites, décès,émigration, reconversion). 4 Deliège.D. Planification de l'offre médicale en communauté française et germanophone. Critères - Scénariosde besoins. Revue belge de la Sécurité sociale - 1er trimestre 2 000.

182

Les chercheurs5 souhaitent obtenir une courbe en Équivalent temps plein (ETP) qui approcheplus finement la force de travail, en Belgique, que la courbe des effectifs. Ils ont pour celaintégré au modèle actuariel des effectifs, la courbe de Saughmann de décroissance del’activité, en fonction de l’âge et du sexe (par exemple, les femmes travaillent 20 % d’heuresen moins et réalisent 30 % de prestations en moins). Il s'agit donc de multiplier ce coefficientd'activité par les effectifs.Bientôt, le modèle prendra en compte la durée conventionnelle du travail annuel pour lestravailleurs salariés.

Ainsi, la projection de l'offre permet d'évaluer la force de travail à venir. Mais, sansestimation de la demande, la commission de planification s'est donnée comme premierobjectif de stabiliser l'offre (en termes de force de travail et non d'effectifs) au niveau actuel.Cet objectif estime que la croissance de la demande pourra être absorbée par le surplus d’offreque l’on stabilisera d’ici là.Dans une publication récente (op. note 46), Deliège propose de répondre à la question dunombre de médecins diplômés à définir en 2007 pour la communauté francophone etgermanophone ainsi que le nombre de spécialistes en s'appuyant sur une modélisation quipermet d'estimer pour l'avenir (annexes n°1 et 2) :

- le nombre effectif de médecins, selon diverses hypothèses concernant les futursdiplômés ;

- le nombre souhaité de médecins actifs selon les diverses hypothèses (notamment à partirde la demande de soins) ;

- le nombre requis de nouveaux diplômés permettant d'obtenir le nombre souhaité d'actifs.

Trois scénarios sont proposés et discutés, le scénario modéré étant recommandé. L'auteurmet l'accent sur la pléthore qui aurait pu être évitée vers le milieu des années 1970 si « l'onavait sérieusement compris les conséquences à terme des flux croissants d'étudiants » et meten garde face à « la pénurie de médecins que l'on peut prévoir à terme si l'on en restait à neformer que 260 voire 240 médecins au-delà de 2006 ». Le nombre requis de nouveauxdiplômés à prévoir pour la communauté française d'après ses recommandations est de 362pour 2007-2008 et de 450 pour les 2009 à 2013.

II Régulation avant ou pendant les études ou comment anticiper les effetsdu numerus clausus à l’agrément: une application différenciée selon lescommunautés en raison de la compétence en matière d'éducation qui estréservée aux communautés

2.1 L’installation du numerus à l’agrément en réaction à la pléthore

la politique en matière d’éducation se définit au niveau communautaire (francophone ounéerlandophone). La politique en matière de santé se définit, par contre, au niveau fédéralDe 1945 à 1975, la Belgique qui se trouvait en situation de pénurie a créé de nouvellesfacultés de médecine, ce qui a permis d’accroître les effectifs médicaux. Actuellement, lacommunauté francophone compte cinq universités (2 à Bruxelles et 1 à Liège pour le cyclecomplet et 2 autres n’assurant que le 1er cycle des études à Namur et à Mons). Pendant cettepériode, les communautés, responsables du financement des universités, allouèrent des

5 Dercq JP, Briot JM, Somer A. Essai d’évaluation de l’impact du vieillissement et de la féminisation du corpsmédical belge sur sa force de travail. s.l., s.d : 18.

183

budgets aux facultés sans réelle limitation. La situation s’est alors progressivement inversée etune pléthore s’installa en Belgique.

De l’avis des experts rencontrés, le nombre de médecins est actuellement pléthorique. Faceaux diverses pressions, le gouvernement fédéral a décidé de limiter l’accès auconventionnement par un numerus clausus à l’agrément (« conventionnement »).Ce numerus clausus intervient après la fin des études et à l'entrée dans la vie professionnelle,puisqu’il apparaît après un minimum de neuf ans d’études médicales. Il s’explique,probablement, par le fait que les communautés, responsables de l’Éducation, ne souhaitaientpas réduire la capacité de formation de leurs universités, afin de demeurer attrayantes auxyeux des étudiants. De plus, une limitation efficace du nombre d’étudiants devrait être réaliséesur l’ensemble du territoire, pour éviter les contournements de la législation. En effet, si uneseule des communautés avait limité ses capacités d’accueil, les étudiants se seraient alorsretournés vers les autres communautés. Il n’était pas permis d’imaginer un accord sur lalimitation globale des effectifs à l’entrée des études entre ces communautés,traditionnellement opposées et qui sont même entrées dans un système de surenchère, entermes de nombre de places offertes aux étudiants en médecine. La régulation dût ainsi êtredéfinie au niveau fédéral, mais ce dernier ne pouvait agir qu’au niveau du conventionnement,la santé étant de sa compétence, contrairement à l’éducation.

Figure 3 : répartition des compétences selon le niveau fédéral ou régional

MINISTERE DE LA SANTE

• rôle de coordinationet de régulation générale

du système de santé

• responsable de la Santé Publique,

de la Médecine Sociale, et

des établissements de soins

• responsable des soins curatifs

Région flamande Région française

RESPONSABLE DE L’EDUCATION ? DES FACULTES DE MEDECINE

NIVEAU FEDERAL

Région de Bruxelles

Responsables de la prévention , de l’éducation sanitaire, de l’application des normes d’agrément

pour les hôpitaux, de la planification et des soins à domicile aux personnes âgées

NIVEAU REGIONAL

184

Cette répartition des compétences entre le niveau fédéral (la santé) et le niveau descommunautés (l’éducation) explique le choix de définir le numerus clausus au stade del'agrément par l'INAMI (niveau national) et non pendant ou avant les études médicales.L'instauration de ce numerus clausus à l'agrément (fixé par une commission ministérielled’évaluation des besoins) a conduit les universités à prendre des mesures visant à limiterl’accès aux études : fallait-il calquer le nombre de diplômés à former sur celui des futursagréments ? La plupart l’affirment, refusant que des médecins ne puissent exercer au termed’une formation longue et onéreuse. Ainsi, se met en place actuellement un concours d’entréedans les universités flamandes. La communauté francophone, quant à elle, a privilégié lasélection progressive, les étudiants s'étant opposés à la sélection des candidats, avant ou à lafin de la 1ère année de médecine. La régulation des effectifs globaux se fait, ainsi, sur les troispremières années du cursus.

2.2 Le cursus francophone et son adaptation au numerus clausus

Figure 4 : organisation des études de médecine

Les études de médecine comprennent un premier cycle (3 ans) menant au grade decandidat en médecine et un second cycle (4 ans) à l’issue duquel les candidats obtiennent letitre de docteur en médecine. Un troisième cycle complémentaire est indispensable pourobtenir l’agrément comme médecin généraliste ou médecin spécialiste. La durée de laformation spécialisée en médecine générale dure au minimum deux ans, avec un an maximumà l’hôpital (mais non obligatoire). Pour la spécialisation, la durée varie d’une discipline àl’autre (5 ans pour spécialités médicales et 6 ans pour les spécialités chirurgicales).

Doctorat 2

eme cycle

Médecine générale

ETUDIANT MEDECIN

Candidature 1 er

cycle

3 ans 2 à 6 ans

Docteur de médecine Diplôme de spécialiste ou de généraliste

4 ans

Choix en début de 3eme année

d’une orientation générale

M EDECINE GENERALE

M EDECINE SPECIALISEE

R ECHERCHE

SANTE PUBLIQUE

Formation spécialisée

3eme

cycle

185

Tableau 3 : nombre actuel d’étudiants en médecine (1996-1997)

Belges Etrangers Total1ère candidature 1 451 567 2 0186 annéessuivantes

8 677 2.805 11 482

Total 10 128 3.372 13 500

Nous décrirons, à chaque étape du cursus, les outils de régulation disponibles, qu’ils soientutilisés ou non, pour maîtriser les effectifs médicaux.

2.2.1 Le premier cycle : trois années de candidature

v conditions d’admission

Le bachelier peut se présenter en 1ère année de médecine, à condition d'avoir validé sesétudes secondaires. Celles-ci ne sont pas spécifiques aux études de médecine.

v la sélection des étudiants pour accéder au doctorat

Durant cette période, de trois ans, les étudiants passent chaque année des épreuvesd’attestation (importation d’un modèle d’évaluation britannique pour évaluer le « potentiel del’étudiant à exercer la médecine ») et des épreuves académiques (dites « classiques »).L’ensemble des points obtenus aux deux types d’épreuves est additionné et, si la sommedépasse un seuil fixé au préalable, l’étudiant est admis au cycle suivant. Les étudiants sontnotés sur un total de 300 points : 60 pour la 1ère candidature, 120 pour la 2ème et 120 pour la3ème. Si l’étudiant échoue à un examen, des pénalités sont retranchées des 300 points lors dupassage en deuxième session.La communauté francophone a choisi d’anticiper les échecs en fin de cursus, en acceptantchaque année un nombre de candidats égal au numerus clausus pratiqué à l’agrément, plus10 %. Les facultés accepteront en doctorat (2ème cycle) le chiffre arrêté du numerus clausus+10 %. Ces dix pour cent correspondent à des médecins non-prescripteurs. Les ét udiants sontinformés, dès la fin de leur candidature, qu’ils ne pourront exercer qu’en tant que tels. Parexemple, si le numerus clausus est fixé à 80, la communauté financera 88 places dedoctorants. Si 120 élèves réussissent les épreuves d’attestation et académiques à la fin de la3ème année de candidature, les 32 derniers ne seront, cependant, pas admis au doctorat.Ce nouveau système limitatif garde une flexibilité en amont, puisque les étudiants flamandsayant échoué à leur candidature flamande peuvent s’inscrire, de nouveau, à la candidaturewallonne (et vice versa), les systèmes éducatifs étant complètement cloisonnés.

v passerelles

Ce système, régulé à différents moments du cursus, a généré une réflexion sur lespasserelles professionnelles à développer en communauté francophone. Les réorientationssont possibles chaque année de candidature. Elles ne sont pas toutes définies, mais on peutciter une équivalence : vers un diplôme de candidat en sciences biomédicales moyennant uncomplément après la seconde candidature.La réflexion est amorcée concernant la création de nouveaux métiers tels que les « physicianassistants » et les « nurse practitionners ».

v information aux étudiants

186

Avant l’instauration du numerus clausus, les bacheliers étaient informés des difficultéséventuelles à l’exercice de la profession (chômage, rémunération, taux de sélection pendant lecursus…). Cette technique d’information/dissuasion6, avant les études, fut efficace enBelgique au début des années 80, mais son impact s’est étiolé faute de continuité.

v financement des études

Les frais de scolarité à la charge de l’étudiant sont relativement faibles en Belgique : àpeine 5 à 10 % de la somme versée par la collectivité. Quel que soit son milieu socio-économique, un bachelier peut accéder a priori aux études médicales.

v limitation du nombre d'étudiants étranger

L’accès d’étudiants étrangers, hors Union européenne, fut limité par des barrièresfinancières. Les étudiants de l'Union européenne pèsent sur le système universitaire belge etréduisent l’effet des mesures de numerus clausus prises à l’étranger, notamment en France.

2.2.2 Le second cycle : 4 ans de doctorat qui se terminent par la validation du diplômede docteur en médecine

v conditions d’accès

L’accès au doctorat de médecine est limité aux détenteurs du diplôme de candidat enmédecine qui sont classés en ordre utile pour l’obtention d’une attestation.La répartition des places de doctorat ouvertes entre chaque faculté est déterminée au proratadu nombre de doctorants formés dans chacune de ces facultés sur les dix dernières années,dans le respect du numerus clausus.

v à la fin de la 4ème année du second cycle, les étudiants obtiennent le titre de docteur enmédecine

La 4ème année d’études du second cycle peut être réalisée dans l’une des quatreorientations suivantes :

• médecine générale, les étudiants s’inscrivent pour cela en Centre universitaire demédecine générale (CUMG),

• médecine spécialisée, la sélection des spécialistes se fait par spécialité, au sein de chaqueuniversité, lors de la dernière année du doctorat ; le recrutement se fait beaucoup parcooptation et l’accès à une spécialité est limité par un nombre défini de postes et la sélectionse fait sur les résultats des années antérieures, la note obtenue lors des stages, une entrevueavec le candidat et les résultats d’une épreuve spécifique éventuelle (« concours ») ; lesconcours de spécialités sont organisés librement dans chaque faculté,

• orientation recherche,• orientation en santé publique (y compris la médecine du travail).

v règles de répartition généralistes/spécialistes

6 Deliège. D. Aspects socio-économiques des soins de santé en Belgique. Vade-mecum. Institut belge del’Économie de la Santé, févrie. 1998.

187

L’arrêté royal du 12 août 1985, fixe la répartition entre généralistes et spécialistes au tauxde 40 % de généralistes par promotion, pour pallier une diminution jugée nuisible desspécialistes. Cette nouvelle répartition a effectivement accru le nombre de spécialistes. Sansnouvelle intervention, la part des spécialistes augmentera encore.

2.2.3 Troisième cycle : formation post-universitaire pour la spécialisation

Outre le diplôme de docteur en médecine, une formation complémentaire de 3ème cycle estnécessaire pour pouvoir pratiquer la médecine générale ou spécialisée. Les enseignantsacquièrent le statut de professeur par convention entre les facultés et les praticienshospitaliers. Les facultés organisent, au travers de ces conventions, un réseau de stagesvalidant la formation médicale. Cette organisation du cursus a favorisé l’émergence d’uneélite médicale essentiellement hospitalo-facultaire.

En Belgique, la formation de 3ème cycle (de 2 à 6 ans) conduit à l’agrément commemédecin généraliste ou spécialiste. Cet agrément, dont l’accès est limité par un numerusclausus, est indispensable à une pratique médicale dans le cadre de l’INAMI. Il est possibled’exercer hors convention mais très peu de médecins choisissent d’exercer en honoraireslibres.

Outre la limitation de l’accès à une spécialité (limitation définie au sein de chaque faculté),la formation des spécialistes est régulée de façon indirecte en Belgique à l’aide de processusmultiples.

• L’agrément annuel des lieux de formation par l'État fédéral (commission d'agrément)Les services de stage sont agréés sur des critères fonctionnels et de qualité limitatifs.

• L’agrément annuel des maîtres de stage par l'État fédéral (commission d'agrément).

Le maître de stage doit avoir des qualités didactiques, cliniques et d’organisation. Il doitêtre agréé dans sa spécialité depuis au moins 8 ans et l’avoir pratiqué de façon active. Il nedoit former qu’un nombre limité de candidats. Il organise des réunions de groupe, au moinsune fois par semaine. Il est tenu d’établir, au moins une fois par an, un programme deformation en concertation avec le candidat. Il doit évaluer régulièrement les progrès ducandidat qu’il forme. Il informe, annuellement, la commission d’agrément du déroulement dela formation.Il assure le contrôle de certaines activités du candidat.La durée de travail, à l’exclusion des gardes, est au maximum de neuf heures par jour et dequarante huit heures par semaine. Un candidat spécialiste ne peut être affecté à plus d’unegarde sur trois week-ends, laquelle se déroule entre le samedi midi et le lundi matin. Le maîtrede stage veille à l’établissement d’une réglementation particulière régissant les rapportsjuridiques entre l’hôpital et les candidats, les conditions de travail et d’organisation desgardes, y compris les conditions financières. Cette réglementation est soumise à l’approbationdu Conseil supérieur des médecins spécialistes et des médecins généralistes. Une garde « surplace »donne droit à douze heures de repos pour le candidat. Outre les jours fériés légaux, lemaître de stage accorde un minimum de vingt jours de congés par an et s’engage à fairebénéficier les candidats spécialistes d’une rémunération équitable. Les maîtres de stage nesont pas obligatoirement affiliés à un hôpital universitaire.

• L’obtention du diplôme de spécialiste

188

Chaque étudiant doit rédiger son plan de formation, au début de son cursus de 3ème cycle,qui comporte toutes les signatures des maîtres de stage. Ce plan est soumis au ministère, dansles trois premiers mois précédant la formation de 5 ans.Le candidat spécialiste transmet à la commission d’agrément compétente, dans un rapportannuel, les données nécessaires permettant d’apprécier dans quelle mesure il a répondu à sesobligations (carnet de stage).Les commissions d’agrément, établies par le ministère, valident les diplômes de spécialistesd’après les carnets de stage. Les commissions d’agrément sont composées pour moitié par desuniversitaires et par des professionnels. Il en existe une par spécialité et par régimelinguistique. Le candidat spécialiste rédige, chaque année, un rapport confidentiel à l’intentiondu médecin fonctionnaire en charge de la direction de l’Art de guérir concernant les aspectsquantitatifs et qualitatifs de son stage qui sont, ensuite, utilisés pour évaluer le maître de stageet son service.

le financement des études est principalement assuré par l'État

Durant le 3ème cycle, les stages sont rémunérés par l’INAMI forfaitairement. 69 % desmédecins spécialistes en formation ont un salaire net mensuel qui varie entre 40 000 et60 000 FB, hors paiement des gardes (1% touche moins de 20 000, 25 % entre 20 et 40 000 et5 % entre 60 et 80 000 FB).

En conclusion, il apparaît que les outils de régulation des effectifs médicaux sont multiplesdurant les études de médecine. Mais pour obtenir une limitation réellement efficace deseffectifs, la Belgique devait mettre en place une régulation au niveau fédéral. Elle a choisid’instaurer un numerus clausus à l’agrément, ce titre est décerné par le ministère fédéral de lasanté. Néanmoins, si la régulation des effectifs globaux a été introduite, il n’existe pas encorede régulation fine entre spécialités, du moins au niveau central (elle existe localement, au seinde chaque faculté). Actuellement, peu de mesures sont mises en œuvre si une spécialité estdéficitaire. De plus, la réduction du nombre d’étudiants inquiète fortement le milieu médicaluniversitaire car les candidats jouent un rôle essentiel à l’hôpital (80 heures de travail parsemaine). À long terme, la réduction du nombre d’étudiants reviendrait à réduire aussi lenombre de médecins hospitaliers qui sont déjà au maximum des heures travaillées.

III La régulation du marché du travail

3.1 Régulation du marché de l’emploi avant l'installation : pas de régulation directe deseffectifs une fois l’agrément obtenu

3.1.1 L’accès à l'assurance « soins de santé » est automatique si le médecin est agréépour dispenser des soins, sinon l’accès est refusé

La possibilité d’exercer son art et de voir ses prestations prises en charge par l’assurancemaladie n’a guère été limitée dans la mesure où, dès qu'un médecin était diplômé par l'Ordre,il était automatiquement inscrit à l'INAMI. Il existe, néanmoins, quelques restrictions commedes actes de spécialité dont le remboursement par l’assurance « soins de santé » est réservéaux spécialistes concernés. Dorénavant, les agréments pour les médecins et les dentistesseront limités.

189

Comme nous l’avons vu dans le chapitre précédent, en effet, le gouvernement fédéral dontdépend la santé a instauré un numerus clausus, en 1997, négocié entre le ministère, lesuniversités et les professionnels mais sans la participation de l’INAMI. Il sera mis enapplication en 2004. Il limitera l’accès à la profession médicale. Cette limitation est fortementcontestée par les étudiants.La décision politique de mettre en place un numerus clausus s’est fondée sur les craintesd’une croissance, non maîtrisée, des coûts et sur les préoccupations malthusiennes du corpsmédical. Ce numerus clausus a pour but de réduire l’accès à la profession de 50 % par rapportaux effectifs actuellement acceptés.En Belgique, il a été décidé de ramener le nombre maximal de diplômés ayant accès àl’agrément à 700, 650 puis 600, respectivement pour les années 2004 à 2006, soit unediminution de 42 % (1 200 agréés actuellement). On vise ainsi à stabiliser le nombre demédecins agréés au niveau qu’il aura atteint à cette époque (environ 45 000 vers 2010, soit232 habitants par médecin).

Tableau 4 : les numerus clausus à l’agrément par communautépour les années 2004 à 2006

année 2004 année 2005 année 2006Communauté flamande 420 390 360Communautéfrancophone

280 260 240

Total 700 650 600

3.1.2 L'installation, une fois le médecin agréé, n’est ni limitée, ni orientée

La liberté d’installation reste totale, sauf pour les pharmaciens. Il n’existe pas de règles derépartition géographique.Cependant, un système d’aide à l’installation des médecins, fournit sur demande desinformations socio-démographiques qui aident à la décision.Pour les pharmaciens, le nombre d’officines ouvertes au public a été limité dès 74 selon lescritères suivants :

- un nombre maximum d’officines par commune, fixé en fonction de la taille de lacommune,

- la prévention d’une trop forte concentration de pharmacies dans un endroit donné,- la satisfaction des besoins de noyaux d’habitations isolées.

Le nombre d’officines ne peut dépasser 1/3 000 habitants (communes de plus de 30 000habitants), 1 pour 2 500 habitants (communes de 7 500 à 30 000 habitants) ou 1 pour 2 000habitants (communes plus petites). Si l’officine la plus proche se trouve (respectivement etpour chaque type de commune précédemment défini) à 5, 3 ou 1 km, une officinesupplémentaire peut être autorisée. Mais, depuis 1994, un moratoire de cinq ans a été imposé.

190

3.1.3 L'accès à l'emploi hospitalier pour les médecins est régulé par les normesd'agréments des services cliniques et les budgets hospitaliers

À l’hôpital, l’accès à l’emploi est défini par le nombre de postes ouverts. Ce nombre estdéterminé en fonction des normes de personnel, notamment via les normes d’agrément.Celles-ci sont peu développées. Ainsi, il n’existe pas de norme minimale de nombre demédecins par lit pour les établissements de soin ; seuls sont imposés un médecin et uneinfirmière en hygiène hospitalière et un cadre intermédiaire par 150 lits pour l’organisationdes soins.

Pour les services cliniques, les normes incluent souvent des clauses relatives au personnel.Outre la spécification de la spécialité du chef de service, il est seulement exigé que celui-citravaille pratiquement à temps plein (8/10). Certaines normes spécifient une permanence ouun service de garde ou la possibilité de faire appel, à tout moment, à des spécialistes dont lesqualifications sont énumérées. Quelques-unes établissent une norme en personnel médical,pour l’établissement, par service ou en fonction du nombre de lits. D’autres prévoient lanécessité de pouvoir collaborer avec des spécialistes, de façon générale ou en spécifiant leurqualification.Pour les services médico-techniques, la plupart des normes spécifient la qualificationobligatoire du médecin directeur (ou qui assume la surveillance) et exigent de lui uneformation particulière ou une expérience spécifique et une fonction à temps plein à l'hôpital.

En 1980, l’organisation politico-administrative de la Belgique a été profondémentremaniée.D’importantes fonctions ont été retirées à l’administration centrale pour être confiées auxcommunautés. Les autorités communautaires sont, désormais, responsables de l’applicationdes normes d’agrément pour les hôpitaux, ainsi que de la planification et, en partie, desinvestissements hospitaliers. Dans ce cadre, seul l’agrément a un fort impact sur la régulationdu marché de l’emploi hospitalier. Au-delà, les hôpitaux jouissent d’une grande autonomie.Les budgets des hôpitaux constituent le deuxième élément de régulation de l'emploi dans lesinstitutions (voire III.2.2).

3.2 La régulation du marché de l'emploi en cours d'exercice intervient par lesmécanismes visant à limiter les dépenses de soins et à garantir la qualité des soins

3.2.1 Les temps et les charges de travail des médecins sont élevés mais tendent àdiminuer

La durée de travail hebdomadaire des médecins juniors atteint actuellement 50 à 59 heurespour les candidats généralistes et 80 à 100 heures de travail pour les candidats spécialistes. Ladurée du travail est élevée, comparée au travail salarié dans les autres secteurs mais tend àdiminuer, comme pour toutes les autres professions.

La part des inactifs s’accroît dans les effectifs médicaux (14,3 % en 1994 versus 5,2 % en1975) et concerne autant les généralistes (16,7 %) que les spécialistes (14,7 %). Cephénomène est partiellement lié à la féminisation du corps médical, les femmes travaillant20 % de moins que les hommes en Belgique.La charge de travail directement relié au soin a fortement baissé (baisse d’activité de 30 %),surtout pour les généralistes. Mais les praticiens compensent la baisse d'activité de soins pardes activités autres, phénomène constaté dans d'autres pays.

191

Il n’existe pas de limite d’âge pour la retraite. Cependant, après 67 ans, la restriction del’activité est quelque peu obligée (convention médico-mutualiste) mais non mise en pratiquel’arrêté d’exécution n’ayant pas encore été signé.En Belgique, la création d’incitatifs à la cessation d’activité est prévue par la loi du 29 avril1996 mais les modalités d’application restent à définir et le corps médical s’y oppose.

3.2.2 Des mécanismes de limitation du volume des actes mis en place pour maîtriser lesdépenses de soins portent principalement sur la biologie et la radiologie

Les hôpitaux, comme les médecins sont principalement payés à l’acte et des modalités definancement forfaitaire et d’enveloppes ont été mises en place afin de maîtriser quelque peu lacroissance de certaines prestations techniques.En dehors des contrôles de l’assurance santé, le volume d'activité, non limité, dépendétroitement des modalités de rémunération.

Les hôpitaux ont deux sources de revenu : le budget universitaire, attribué par l’Éducationcommunautaire, et l’assurance santé.

L’INAMI paie les hôpitaux à l’acte ou au prorata de leur activité. Les structures de soinssont financées sur la base de la journée d’entretien qui varie selon leur activité décrite par lesrésumés cliniques minimums, les pathologies ICD DRG et les prélèvements sur les honorairesmédicaux (52 % de prélevé).En pratique, les objectifs budgétaires sont toujours dépassés. Deux enveloppes budgétaires ontété créées et attribuées pour la biologie et l’imagerie médicale en hôpital et en ambulatoire.Dans le secteur ambulatoire, quand l’enveloppe est dépassée, un remboursement collectifs’organise au prorata des chiffres d’affaires de chaque médecin. Dans le secteur, il n'existe pasde reversement.

Les médecins sont rémunérés à l’acte. Ils fixent, en négociation avec les mutuelles, lemontant de la lettre clé. Seuls les médecins exerçant à l'hôpital sont rémunérés à l'acte sauf enhôpital universitaire où ils sont salariés. Le médecin peut être conventionné ou non7, àl'hôpital, le malade est toujours remboursé. 20 % des médecins spécialistes sontdéconventionnés, ce secteur correspond au secteur « honoraires libres » en France.

Le rapport des revenus entre médecins généralistes et spécialistes se situe entre 1 à 1,4. Cetécart explique notamment l’attrait de la médecine spécialisée.

depuis quelque temps, les médecins peuvent se soumettre à une démarche d’accréditationce qui leur apporte des avantages en terme de rémunération

Des seuils d’activité minimale annuels ont été fixés pour bénéficier de l'accréditation. Parexemple, 500 contacts par an en anesthésie, 600 en psychiatrie et 1 500 en dermatologie et1 250 en médecine générale et pour 8 spécialités sur 24. Certains médecins ont une activitétellement basse que les pouvoirs publics craignent une baisse de la qualité des soins par baissede la qualification de ces médecins.

7 Le secteur conventionné équivaut au secteur I en France et le secteur non conventionné correspond au secteurII.

192

Des conférences de consensus et les prémices d’un contrôle de qualité par les pairs ont étéinstaurées dans le cadre de l’accréditation volontaire.Il ne faut pas confondre l’agrégation (autorisation indispensable et automatique si lesconditions requises sont remplies) avec accréditation : titre optionnel individuel qui permetdepuis 1994 d’obtenir une reconnaissance de qualité et de bénéficier à ce titre de tarifspréférentiels de l’INAMI (accords nationaux médico-mutualistes). Elle est à renouveler tousles 3 ans auprès de l’INAMI.

Les conditions d'accréditation sont les suivantes :- suivre une Formation Médicale Continue que finance le ministère,- seuil d’activité : minimum d’actes ou d’heures par semaine (13heures). En effet, la

pléthore de médecins a fait diminuer le niveau d’activité individuel mettant parfois en péril laqualité des soins,

- la tenue correcte des dossiers médicaux,- la participation à des discussions de groupe de pratiques « peer review » dans des

Groupes locaux d’évaluation médicale (GLEM) composé de 8 à 25 médecins en principemono disciplinaires et géographiquement concentrés. Chaque groupe peut s’organiser commeil l’entend ; 4 réunions annuelles doivent être organisées et chaque médecin doit participer à 2réunions au minimum mais tout reste à définir en ce qui concerne les critères, les normes etméthodes objectives d’assurance qualité.L’informatisation du cabinet n'est pas obligatoire.

3.2.3 L'organisation des soins et l'encadrement des pratiques médicales : des élémentsqui vont jouer à terme sur la régulation de la démographie médicale

Le temps de travail et la charge de travail ne donnent qu’un simple aperçu de l’activitémédicale. L’organisation des soins et le champ de compétence régulent le contenu del’activité médicale et, ainsi, modifient les besoins en médecin.

La spécialisation s’amplifie et se diversifie. Outre 27 spécialités médicales, spécifiées pararrêté royal, il existe huit titres accessibles aux seuls médecins déjà titulaires d’un autre titreprofessionnel. L’accès au financement des soins spécialisés par l’assurance est limité à ceuxqui sont du ressort de la spécialité du praticien (nomenclature pour chaque spécialité et sesconnexités mais qui sont peu définies) même si, légalement, un médecin peut tout faire. Dansles faits, le médecin spécialiste agréé est tenu de pratiquer exclusivement sa spécialité.Les compétences professionnelles ne font pas l’objet d’une re-certification (sauf pourl’accoucheuse) mais le maintien du capital de compétence est encouragé. La formationpermanente se renforce : l’accoucheuse y est tenue (1991).

Des projets favorisent les associations en raison des avantages attendus d’une pratique degroupe : réduction du coût moyen du loyer et des équipements, transmission d’expérience,possibilité de pratique à temps partiel.

les soins coordonnés sous la forme de réseaux sont très peu développés en BelgiqueLes maisons médicales payées au forfait concernant uniquement les soins primaires

s’apparentent aux réseaux de soins français. Les associations de santé intégrée, associantgénéralistes, kiné et infirmiers reçoivent des aides de la région wallonne en vue de prodiguerdes soins globaux, continus et intégrés et de jouer un rôle d’observatoire de la santé. Dessubventions facilitent la coordination de soins à domicile.

193

Diverses pressions visent aussi à favoriser l’échelonnement' des soins, sur des modalitésproches de celles du médecin « gate-keeper » en Angleterre. Il se ferait par une inscriptionchez le médecin généraliste avec passage obligatoire avant de consulter le spécialiste. Cettehiérarchisation des soins est actuellement en discussion mais les médecins spécialistes s'yopposent. Les mesures évoquées pour favoriser le développement de l' « échelonnement » seferaient via des subsides au travail d’équipe ou au dossier central ou des tarifs d'honorairesidentiques à celui du spécialiste pour la consultation, ainsi que la transmission obligatoire desprotocoles spécialisés vers le médecin de synthèse.

La substitution est peu abordée actuellement en Belgique où la profession infirmière estencadrée et contrôlée. La profession infirmière a été protégée par l’octroi d’un visa obligatoireà l’exercice de l’art infirmier et l’AR de 1974 a définit les activités qui relevaient de lacompétence des infirmiers. Enfin, l’AR de 1990 énumère les prestations techniques de soinsinfirmiers et la liste des actes qui peuvent être confiés par un médecin à un praticien de l’artinfirmier : infirmiers gradés ou brevetés, les détenteurs de diplômes, certificats ou formationsassimilés et les assistants en soins hospitaliers (ces derniers ne peuvent se substituer auxtaches de médecins). En ce qui concerne la formation, les critères imposent d’avoir effectuéaprès 10 ans de formation générale, 3 ans ou 4 600 heures de formation spécifique. EnBelgique, le graduat en soins infirmiers fait partie de l’Enseignement de plein exercice et detype court, tandis que le brevet est délivré dans le cadre de l’Enseignement professionnelsecondaire du 4ème degré. Ces 2 filières correspondent aux critères européens. L’organisationdes études étant de la compétence des Communautés, des divergences sont apparues : encommunauté française depuis 1993, l’enseignement de base dure 3 ans avec éventuellementune année de spécialisation ; en communauté flamande, la spécialisation peut être acquisedurant la formation de base. Les deux communautés ont mis fin à la formation d’assistants ensoins hospitaliers.

194

Annexes Belgique

Annexe 1 : le processus d’estimation des besoins d’après Deliège.

Annexe 2 : l’évaluation des besoins de 1994 à 2014 d’après Deliège.

Coordonnées des personnes contactées

Bibliographie

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196

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Coordonnées des personnes contactées

M. Jean-Paul DERCQConseiller généralMinistère des Affaires sociales, de la Santé publique et de l'EnvironnementC.A.E. - Quartier Vésale - 6491010 BRUXELLES BELGIQUE02/210 47 [email protected]

M. Pr. Didier MOULINDoyenFaculté de médecine Université catholique de LouvainAvenue Emmanuel Mounier 50,B-1200 BRUXELLES BELGIQUE(32 2) 764 50 [email protected]

M. F. PraetDirecteur d’administrationINAMIService soins de santéAvenue de Tervueren, 2111150 Bruxelles

Dr MoensSecrétaire généralAssociation belge des syndicats médicaux – ABSyMChaussée de Boondael, 61050 Bruxelles

Mrs Prof. DR. Rita SCHEPERSDépartement Sociologie KATHOLIEKE UNIVERSITEIT LEUVENE. Van Evenstraat 2BB-3000 LEUVEN BELGIQUE+32(0)16/32 31 [email protected]

Pr D. DeliègeUniversité catholique de LouvainÉcole de Santé publiqueDépartement de socio-économieClos de la Chapelle aux Champs 30.431200 Bruxelles

198

Bibliographie

Institut belge de l’Économie de la santéAspects socio-économiques des soins de santé en Belgique. Vade-mecum. fév 1998.

Arrêté royal du 29/08/1997 fixant le nombre global de médecins, réparti par Communauté,ayant accès à l’attribution de certains titres professionnels particuliers.

Dercq JP, Briot JM, Somer A.Essai d’évaluation de l’impact du vieillissement et de la féminisation du corps médical belgesur sa force de travail. s.l., s.d : 18.

Centre de traitement de l’informationStatistiques concernant les médecins, situation au 31 décembre 1998. Ministère de la Santépublique et de l’Environnement. 1998.

Le Matin : Médecine : le point sur le numerus clausus instauré lors des études. 24/06/1999.

Le Journal du médecinEnquête sur la formation des médecins spécialistes. Ministère des affaires sociales, de la santépublique et de l’environnement, février 1995.

OCDELa réforme des systèmes de santé. Analyse comparée de sept pays de l’OCDE. Études depolitique de santé n° 2. OCDE 1992

Arrêté ministériel du 30/04/1999relatif à l’agrément comme médecin généraliste en ce qui concerne l’application de lalégislation relative à l’assurance obligatoire contre la maladie et l’invalidité ainsi que le portdu titre de médecin généraliste.

Arrêté ministériel du 30/04/1999fixant les critères généraux d’agréation des médecins spécialistes, des maîtres de stage et desservices de stage.

199

États-Unis

201

La régulation des professions de santé aux États-Unis ou commentaccompagner le dynamisme du marché de la santé

Introduction

La santé aux États-Unis est un marché dynamique et attrayant pour de nombreuxopérateurs et, plus récemment, pour les organismes d'assurance gérant des dispositifsdélivrant des soins.L'échec des dernières réformes, visant à introduire une assurance maladie universelle, reflètel'importance du choix opéré depuis le début du vingtième siècle de limiter au maximuml'intervention de l'état fédéral et de confier au marché l'organisation du système de soins. Pourun Européen, ce dernier présente de nombreux paradoxes puisqu'il est à la fois à la pointedans de nombreux domaines, notamment technologique, et paraît considérablement en retardau regard de la santé de l'ensemble de la population américaine.Ainsi, en matière de santé publique, les spécialistes et les organismes chargés de « penser » larégulation du système de santé semblent courir après ses transformations, en cherchanttoujours à interpréter, pour les orienter, les choix des opérateurs économiques qui dominentfinalement le champ de la santé.À ce titre, l'étude des modalités de régulation des professions de santé est tout à faitillustrative. Les outils de planification des professions de santé paraissent sophistiqués etélaborés parce qu'ils sont conçus pour mettre de l'ordre a posteriori, en prenant en compte lacomplexité du marché de la santé où de multiples forces contradictoires interagissent. Cesoutils sont mis à la disposition des opérateurs que sont les « Managed Care Organizations »et c'est par ce biais que les organismes fédéraux, comme le Bureau of Health Professions(BHP), cherchent à orienter la gestion prévisionnelle des ressources humaines dans lesystème de soins.L'une des transformations majeures qui semble néanmoins se dessiner depuis plusieursannées, porte sur la position de la puissante Association des médecins américains (AMA)menacée dans son leadership historique sur le système de soins au profit des « Managed CareOrganizations ». En résumé, la rationalité économique, en prenant le pas sur la rationalitémédico-technique, modifie les modalités même de l'organisation du travail au sein desdispositifs de soins gérés par les assureurs. Ces modifications se traduisent par l'apparition deprofessions intermédiaires et la redéfinition des rôles et attribution entre spécialités médicales.Parce qu'il est soumis aux lois du marché et évolue rapidement, le système de soins américainpréfigure peut-être une part des changements à venir, notamment sur la délicate question de lasubstitution des professions dans l'organisation et la délivrance des soins dans les payseuropéens. C'est ce thème particulier de la substitution, sous l'effet des forces du marché, quenous avons cherché à décrire dans cette partie.

Après une présentation de l'histoire du système de soins américain et de la place occupéepar la gestion des ressources humaines, nous présenterons un bref état des lieux et nousdévelopperons, en détail, le modèle de projection récemment élaboré à la demande du« BHP » pour planifier, conjointement, l'offre de médecins avec l'ensemble des professionsassociées en soins primaires. Enfin, nous décrirons, au travers du cadre général de notre étude,les principales modalités de régulation des professions de santé.

Le système de santé américain, traditionnellement privé, s'est beaucoup développédepuis l'intervention de l'état fédéral. L'Association des médecins américains y joue un rôletraditionnellement important

202

Pour Élisabeth Chamorand[1], le système de santé américain fonde ses principes sousl'impulsion, à la fin du XIX ème siècle, d'une réflexion stratégique des industriels et del'Association des médecins américains qui s'exprime dans le rapport Flexner en 1910. De1910 à 1943, les neufs plus grandes fondations (Carnegie, Rockefeller,...) consacrent 154millions de dollars au regroupement d'universités et d'hôpitaux qui formeront, plus tard, les« Academic Health Centers », précurseurs des CHU installés en France, par la réforme de1958. Le système de soins s'organise alors à partir de l'initiative privée, sur le modèle de lascience et de la technique médicale. Les médecins sont principalement formés aux sciencesfondamentales et techniques. L'« American Medical Association » prend une place centraledans la réglementation de la profession. Ainsi, en 1914, « l'AMA » publie la première liste deshôpitaux susceptibles d'accueillir les diplômés des facultés pour une formation clinique.Elle va aussi régulièrement limiter le nombre d'étudiants admis à faire des études de médecineainsi que le nombre de médecins étrangers autorisés à exercer. Un projet d'élaboration d'uneassurance maladie universelle, présenté en 1915, échoue devant la coalition que forment lesorganisations de professionnels, les organismes d'assurances, les organisations patronales etl'industrie pharmaceutique. Dans les années 30, sous la pression des opposants au « NewDeal » et, en particulier, de « l'AMA », l'Administration Roosevelt renonce à tout projetd'assurance maladie universelle. Après la seconde guerre mondiale, cette politique delimitation des médecins est maintenue, « l'AMA » refusant tout financement fédéral desfacultés de médecine jusqu'en 1963, ce qui va permettre de maintenir un niveau derémunération des médecins élevé. La forte impulsion donnée par l'état fédéral à la recherchemédicale et scientifique privée, dans les années 50, va favoriser la tendance à la spécialisationdes médecins. Le pourcentage des médecins qui consacrent de trois à sept ans à se spécialiser,après huit années d'études universitaires, augmente et passe de 37 % en 1949 à 69 % en 1966,en l'absence de toute réglementation des pouvoirs publics1.

Les médecins regroupés au sein de « l'AMA » interviennent, ainsi, sur la formation desmédecins mais aussi sur la plupart des professions paramédicales sur lesquelles elle exerce uncontrôle déterminant. Le « Council on Medical Education » (CME) de « l'AMA » estofficiellement chargé d'approuver les programmes, d'homologuer les écoles et d'attester lescompétences des diplômés de huit professions et approuve la formation requise pour dix-huitmétiers de la santé, en 1972.

La création des fonds « Medicare » et « Medicaid » favorise le développement desétablissements de soins et l'augmentation du nombre de professionnels de santé sousl'impulsion de l'état fédéral

En 1965, sont créés « Medicare », fonds fédéral couvrant les plus de 65 ans, financéprincipalement par des prélèvements sur les salaires des actifs et les assurances privées, ainsique « Medicaid » qui prend en charge les indigents et handicapés, financé à part égale par leniveau fédéral et par les États dans une proportion qui varie selon la richesse des états (de 50 à83 %). Ce régime d'assurance maladie, universel et national, destiné aux personnes âgées ethandicapées devait être généralisé progressivement à toute la population. Mais la méfiancevis-à-vis de toute étatisation, le lobbying de l’industrie pharmaceutique et la résistance desmédecins empêchent son élargissement à toute la population.L'accès aux soins d'une population jusqu'alors peu couverte augmente rapidement les besoinsen hôpitaux et en soignants (les hôpitaux qui employaient 1 million de personnes en 1950 enemploient 3,3 millions en 1975). Le gouvernement fédéral encourage la croissance du nombre

1 Elisabeth Chamorand - Starr (R.°, 1982, P. 359).

203

de médecins par l'octroi de bourses aux étudiants et d'aides financières aux facultés quirecevaient jusqu’alors peu de fonds publics et accueillaient un nombre limité d’étudiants enmédecine. Pour faire face à la demande de soins, les hôpitaux recrutent alors de plus en plusd’étudiants et de résidents étrangers sans lesquels beaucoup de postes resteraient vacants. Aucours des années 1970-1971, les médecins, originaires principalement d'Asie du sud-est etd’Europe, représentent environ un tiers des médecins des hôpitaux. Dans ce contexte depénurie de médecins américains, les étudiants choisissent de plus en plus de se spécialiser, engrande partie à cause des différences importantes de rémunération, la médecine de soinsprimaires étant peu valorisée.Le personnel paramédical rassemble un grand nombre de grades différents et deprofessionnels aux formations académiques variées. En pratique, une même tâche peut êtreeffectuée par des personnes aux qualifications et grades différents. Les salaires desprofessions paramédicales sont très bas. Par conséquent, au début des années 80, seulement55 % des diplômées choisissent de travailler et le personnel hospitalier change fréquemment.Face à ce manque de professionnels de santé, la mise à disposition d’une offre de soinsminimale à toute la population est difficile. De grandes inégalités géographiques dans l’accèsaux soins persistent, car les médecins ne veulent pas exercer dans les régions où les personnessont peu ou pas assurées.

Sous la pression du mouvement pour l'égalité civique et devant le constat de déséquilibresimportants d'accès aux soins entre les zones rurales et urbaines, d'une part, et aussi entrecommunautés, d'autre part, le ministère de la santé finance le développement de centres desanté dans les communautés pauvres. À la fin des années 70, le congrès vote la création d'unservice de médecins salariés, chargé de fournir des soins primaires à des collectivitésdémunies de médecins (le « National Health Service Corps »). Ces médecins sont affectés aux« Community Health Centers » pour pallier le manque de médecins afro-américains,hispaniques et indiens. Des bourses sont réservées aux étudiants en médecine, en échanged'un engagement à exercer dans les zones déshéritées pendant deux années. Malgré cesmesures, il persiste un manque de « médecins pour les minorités » (« Minority Physicians »).Cette situation pousse le gouvernement à soutenir, financièrement et juridiquement, lacréation de nouveaux métiers, surtout orientés vers la médecine primaire. Ainsi, en 1969, dansle secteur médical fut créée une nouvelle spécialité de médecine primaire (« familypractice »). Dans le secteur paramédical, de nouveaux métiers « d’assistants médicaux »apparaissent, comme les « Physician Assistants » (PA) et les « Nurse Practitioners » (NP). Ilsse caractérisent par leur similitude avec le métier de médecin et leur orientation vers lamédecine primaire. Les « NP » et les « PA » peuvent dispenser environ de 70 à 80 % dessoins médicaux, y compris la prescription de certains médicaments et la réalisation de petitesinterventions chirurgicales. Entre 1966 et 1980, environ six mille nouveaux lieux deformation pour ces professionnels sont créés contre quarante dans le secteur médical.

À la fin des années 70, environ 10 % des Américains restent privés d'assurance médicale et20 % ont une couverture insuffisante en cas de maladie grave. Au même moment, les milieuxéconomiques s'inquiètent de l'augmentation des dépenses fédérales de santé, qui ont presquetriplé entre 1965 et 1980 et qui représentent 11,8 % du budget de l’état. L'entreprise Goodyearest à l'origine du « Washington Business Group on Health » (WBGH), organisationregroupant 145 dirigeants de grandes entreprises. Ce groupe souhaite « rationaliser » la ventede services médicaux dont le coût croissant, s'il contribue à la prospérité de l'industriebiomédicale, n'en pèse pas moins sur la compétitivité d'autres secteurs de l'économieaméricaine.

204

La restructuration du système de soins vers le développement des « Managed CareOrganizations » constitués en oligopoles : un effet important sur la régulation desprofessions de santé

Les grandes entreprises réagissent à l'augmentation des dépenses de soins, soit enn'assurant plus leurs salariés, soit en exigeant de leur part une participation plus importante aupaiement de la prime ou, encore en devenant assureurs pour diminuer leurs charges. Lavolonté de maîtriser les dépenses de santé se traduit par l'introduction de méthodes de pré-paiement prospectif des offreurs de soins. En 1982, les tribunaux donnent raison à laCommission fédérale sur le commerce (« Federal Trade Commission », FTC), chargée deveiller à l'application de la loi antitrust, qui reproche à « l'AMA » d'entraver la libreconcurrence et de faire obstacle au développement de nouveaux modes d'organisation et depaiement des soins médicaux. Les « HMO » (Health Maintenance Organization), proposéspar le président Nixon en 1971, sur l’initiative du Pr Enthoven, dans le but de rationaliser lagestion du système de soins, à partir de la concurrence entre offreurs de soins, se développentréellement à partir des années quatre-vingt, à la suite d’un ensemble de mesures incitatives.La caractéristique principale du « Managed Care » est la gestion directe des soins médicauxpar les financeurs, c’est-à-dire par les offreurs d’assurance maladie qui sont en concurrence.Tant les prestataires de soins que les patients doivent être incités à la plus grande efficience :

- les patients sont conduits directement ou indirectement (par des incitations financières) àconsulter des prestataires de soins affiliés à un réseau de soins,

- les prestataires sont conduits soit directement - par des recommandations du financeurquant au volume ou aux procédures de soins - soit indirectement - par leur mode derémunération et des incitations financières - à prendre en compte la contrainte économique.

Les « Managed Care Organizations » sont très différents. Le « HMO » est la forme la plustypique. Dans un « HMO », le producteur de soins est confondu avec l’assureur et prend doncà sa charge les dépenses de ses adhérents. Il a tout intérêt à ce que ses clients restent en bonnesanté ou guérissent au plus vite et consomment le moins possible de soins.La concurrence s’instaure entre les hôpitaux et entre les médecins. La médecine ambulatoirese développe et le taux d’utilisation des lits d’hôpitaux diminue. Devant l’incertitude surl’avenir, les hôpitaux recrutent de plus en plus d’infirmières polyvalentes à la place desmédecins et ne relèvent pas leurs salaires. Les infirmières « de base » sont souvent remplacéespar un personnel non qualifié.

Malgré les incitatifs financiers du gouvernement et l’augmentation très importante dunombre de médecins depuis les années 1970, les besoins non-couverts en médecine de soinsprimaires (médecine générale, pédiatrie, gynécologie) augmentent pour passer de 1 242 postesvacants en 1978 à 2 143 en 1991. Dans la même période, la population vivant dans les zonessous-médicalisées est passée de 27 à 36 millions.

Au début des années 90, le gouvernement tente, en vain, de mettre en place une assurancemaladie universelle pour un ensemble de prestations déterminées et de modérer la croissancedes dépenses de santé. Le projet prévoyait de privilégier les médecins de premier recours etd’encourager le développement des services dans les régions mal desservies. Legouvernement voulait renforcer les contrôles de qualité des prestations, en fonction desrésultats et non des actes et, ainsi, contrôler la concurrence.

Depuis l’échec de cette réforme, le développement des « MCO » s'accélère, notamment parle biais de rachats et de fusions entre « Managed Cares » dont la devise était, au milieu des

205

années 90 : « fusionner, intégrer, informatiser ». Les « MCO » mettent en place des mesuresd’encadrement très strictes des soins, pour contrôler les pratiques médicales et éviter lesdépenses jugées inutiles. Ils cherchent à revaloriser le travail des généralistes et les pratiquesde soins préventives, ce qui augmente le nombre d’étudiants de médecine qui s’orientent versla médecine générale et pousse certains médecins spécialistes à se reconvertir à la médecinegénérale. Les auxiliaires médicaux, sollicités par les « MCO », commencent à représenter uneforce de travail importante, de l’ordre d’un soignant non-médecin pour douze médecins et unpour quatre médecins généralistes.

Le développement de ces métiers complémentaires n’est pas sans contradictions. On nesait pas dans quelle mesure les auxiliaires médicaux se substituent vraiment à des médecinsgénéralistes en nombre insuffisant. Plusieurs rapports indiquent qu’ils subissent les mêmesincitations que les médecins et qu’ils sont souvent tentés de se spécialiser pour augmenterleurs revenus.

« Medicare », principal financeur des postes de médecins en formation au sein desétablissements de soins et qui représente traditionnellement un important (voir le seul) levierde régulation des professions de santé, voit son équilibre financier menacé par l’explosionannoncée du nombre d’ayants droit (liée à l’évolution démographique de la population) et parle renchérissement des soins.

Souvent annoncée mais jusque là non suivie, la réforme des études médicales aux États-Unis paraît être imminente, les conditions de son implantation et, notamment, les forces dumarché et non gouvernementales, apparaissent assez puissantes pour la faire accepter par uncorps de médecins de plus en plus inquiet de son avenir.

En résumé, la profession médicale, qui avait été associée à la consolidation du système desanté au début du siècle et s'était vue déléguer des pouvoirs importants lui permettant decontrôler en partie le système de soins, est peu à peu contestée et perd une partie de sonpouvoir avec le développement de la gestion des soins.La régulation de la démographie médicale semble désormais échapper à la profession, tout dumoins en partie. Après la rationalité scientifique et technique, c'est la rationalité économiquequi impose des règles nouvelles au marché constitué par la santé aux États-Unis.

I La démographie médicale aux États-Unis : état des lieux et outilsde planification

1.1 État des lieux : densité médicale moyenne à forte proportion de médecins étrangers,associée à une expansion des professions paramédicales et au chômage

1.1.1 Le nombre d’étudiants en médecine a augmenté régulièrement pour se stabiliserdepuis une dizaine d’années et les femmes représentent 40 % des nouveaux diplômés

Le nombre d’étudiants en médecine n’a cessé de croître entre 1950 et 1980, pour passerd’environ 5 500 étudiants à 15 500 diplômés chaque année2. Depuis, leur nombre s’est

2 Source : Association of American Medical Colleges, The Universal Healthcare Almanac ,1997-3, table7.11.1197.

206

stabilisé autour d’environ 15 500 nouveaux médecins chaque année, auxquels s’ajoutentenviron 1 600 nouveaux ostéopathes3.

Tableau 1 : évolution du nombre de diplômés des écoles de médecine « allopathique »,par sexe, entre 1975 et 1997 aux États-Unis

Année Nombred'écoles demédecine

Nombrede

diplômés

Nombrede

femmes

Pourcentagedes femmes

1950 NA 5 530 NA NA1960 NA 7 081 NA NA1970 NA 8 367 NA NA1975 114 13 634 2 212 16.21980 126 15 113 3 497 23.11985 127 16 318 4 904 30.11990 126 15 398 5 231 341995 125 15 888 6 232 39.21997 125 15 923 6 604 41.5

Source : Association of American Medical Colleges. AAMC Data Book, statistical Information Related to Medical Education,January 1998. Washington, DC, 1998. http://bhpr.hrsa.gov/healthworkforce/factbook.htm#Public Health.

1.1.2. La densité médicale est plus élevée qu’au Royaume-Uni et au Québec mais deuxfois moins importante qu’en Allemagne

Le rythme de croissance du nombre de médecins est plus rapide que celui de la populationgénérale et, de ce fait, le rapport médecin/population croît continuellement.La densité médicale était de 235 médecins pour 100 000 habitants en 1997. Elle était doncsupérieure à celle du Royaume-Uni (175) mais inférieure à celle des Pays-Bas (259) ou de laFrance (282) et a fortiori de l’Allemagne (464).

Tableau 2 : évolution de nombre médecins en activité entre 1950 et 1997pour 100 000 habitants aux États-Unis*

Année Nombre demédecins« actifs** »

Médecins pour100 000 Hbts

1950 208 997 135,11955 228 553 135,71960 247 257 134,91965 277 575 140,81970 311 203 149,61975 366 425 167,11980 435 545 188,31985 511 090 211,21990 572 660 226,11995 646 022 241,81997 684 605 251,6

* Estimations du Health Resources and services Administrations, Bureau of Health Professions -http://bhpr.hrsa.gov/healthworkforce/factbook.htm#Public Health.** Médecins impliqués dans les soins directs aux patients ou autres activités professionnelles en relation avec les soins(enseignement, recherche, administration) plus de 20 heures par semaine (le chiffre est différent du nombre de médecins enexercice, tableau n° 2).

On ajoute habituellement à ces chiffres les praticiens de médecine ostéopathique, aunombre de 35 000 en 1995, dont la moitié exercent en soins primaires. Ces médecins ne sontpas des « medical doctors » mais des « doctors of osteopathy », formés dans des facultésspécifiques et obtenant une autorisation d’exercer dans tous les états fédéraux. De même, les« chiropraticiens », qui sont environ 47 000 aux États-Unis en 1995, bénéficient d’uneformation universitaire permettant l’obtention du doctorat. Jusqu’aux années 70, « l’AMA »luttait contre cette « médecine alternative », mais sans succès, les chiropraticiens ayant prouvé 3 American Association of Colleges of Ostheopathic Medicine, The Universal Healthcare Almanac, 97-3, table7.11.2135.7.

207

leur efficacité dans le traitement des douleurs dorsales.

1.1.3 Environ un quart des médecins exerçant aux États-Unis sont des médecinsétrangers, les ethnies minoritaires sont sous-représentées

La proportion des médecins étrangers, par rapport au nombre total de médecins, estd’environ 23 % en 1995. Ces médecins viennent en grande partie des pays de l’Asie de sud-est et d’Europe.Les minorités sont mal représentées en médecine : alors que les Afro-Américains représententenviron 12,5 % de la population, le nombre de médecins noirs est seulement de 3 %. Demême, les hispaniques, qui constituent près de 10 % de la population américaine, nereprésentent que 4,5 % des médecins.

1.1.4 La plupart des médecins exercent en ambulatoire sous contrat avec lesétablissements de soins

En 1997, le nombre total des médecins qui travaillent aux États-Unis est de 756 710, 75 %sont des cliniciens. La proportion de médecins travaillant dans le secteur hospitalier à tempsplein (11 %) paraît faible mais peut être expliquée par le fait que de nombreux médecins ytravaillent seulement comme vacataires.Le nombre de médecins inactifs a augmenté pour passer de 21 449 médecins en 1970 à 72 300en 1995.

1.1.5 Le pourcentage de femmes, parmi la population médicale, augmente

On observe un accroissement du pourcentage de femmes par rapport au nombre total demédecins. Aux États-Unis, seulement 20 % des médecins sont des femmes (chiffre de 1995).Pourtant, comme le montre le tableau 1, la proportion de femmes, parmi les étudiants enmédecine, s’élève à 41,5 % en 19974.

1.1.6 L’expansion de la profession paramédicale a été plus importante que dans lesautres pays

4 Source : AAMC, 1998.

208

figure 1 : évolution du nombre de professionnels paramédicaux et autre personnel

par médecin en 30 ans pour la RFA, le Royaume-Uni et les États-UnisSource : Die Regulierung von Professiongrenzen - M. Döhler.

La croissance de la profession paramédicale a été plus forte aux États-Unis qu’enAllemagne ou au Royaume-Uni entre les années 50 et 80.

1.1.7 Dans le secteur paramédical, de nouveau métiers proches de celui de médecin ontété développés

1952 1949 1950 1984 1989 1988

figure n° 2 : infirmières spécialisées, mars 1996

6,3% des infirmières

70,993

53,799

6,534

30,386

nurse practitioner clinical nurse specialist nurse midwife nurse anesthesist

Source : rapport du NACNEP, 1996, HRSA

0

2

4

6

8

10

1 2 3 4 5 6Années

no

mb

re d

e p

aram

édic

aux

par

méd

ecin

autre personnel

personnel paramédical

1952 1949 1950 1984 1989 1988

RFA

RFARFA

RU

RURURU

USA

RFA

RU

USA

209

Dans la catégorie des infirmières spécialisées, sont incluses les « clinical nursespecialists », les « nurse aenesthetists », les « nurse midwives » et les « nurse practitioners ».Plus de 10 % des « nurse practitioners » sont également « nurse specialists ».

1.1.9 La répartition des « nurse practitioners » sur leurs lieux de travail en 1996

Figure 4 : distribution of NPs with NP position tyles,by employement setting mars 1996

Public health8,6%

Hospital out-patient10,3%

Hospital in-patient13,2%

Community centers14,4%

Physician practice36,2%

School health7,1%

Other6,5%

HMO3,7%

1.2 De nombreux outils de planification ont été élaborés aux États-Unis : depuis lesannées 90, a été développée une approche intégrée de l’estimation des besoins pourtoutes les professions de santé

Aux États-Unis, c’est la logique du « laissez faire »5 ou logique du marché qui a régulél’adéquation de l’offre de professionnels à la demande. Les modèles de projection des besoinsen professionnels de santé ont traditionnellement porté sur les médecins et les professionsparamédicales. Ils n’ont eu qu’un faible impact en raison de l’autonomie des universités et deshôpitaux universitaires, qui sont libres de définir le nombre d’étudiants qu’ils admettent enmédecine. Néanmoins, soucieux de garantir l’accès aux soins dans les zones sous-médicalisées et à la recherche de modèles d’organisation des soins plus efficients, legouvernement fédéral a cherché à favoriser, avec succès, le développement des soins depremière ligne en subventionnant6 le développement de nouveaux métiers de soins et deslieux de formation.

Dans le cadre de la réforme Clinton (1993), le congrès a mandaté le « National AdvisoryCouncil on Nurse Education and Practice » (NACNEP) afin qu’il évalue les effets de lapolitique fédérale menée depuis vingt ans et considérée comme insuffisante.

Les conclusions du groupe « Advisory Group on Workforce Projections » ont porté sur :- le nombre d’étudiants à former, le nombre d’écoles à créer et les fonds afférents,

5 Managing the US Health Care Workforce : Crating Policy Amidst Uncertainty. Steven A. Schroeder –Inquiry28 : 266-275 (Fall 1994).6 Federal support for the preparation of the nurse practionner workforce through title VIII. 1997, HRSA –Bureau of Health Profesions : Division of Nursing ; p 9.

210

- les modalités permettant d’optimiser l’emploi des « nurse practitioners » jusqu’alorslimité par les conflits de territoire et de pouvoir avec les autres disciplines,- les incitatifs à accorder aux « NP » afin que ceux-ci s’installent dans les zones sous-médicalisées, notamment en introduisant des incitatifs financiers fédéraux équivalents àceux des médecins,- la nécessité de créer les conditions du développement d’un travail en équipemultidisciplinaire ainsi qu’une approche intégrée de la planification des ressourceshumaines dans le système de soins.

C’est ce dernier point que nous avons choisi de présenter dans ce paragraphe.

Dans le cadre de la préparation de la réforme du système de santé, qui n’a d’ailleurs pas étéappliquée, l’administration de santé du premier gouvernement Clinton, suivant lesrecommandations du « Advisory Group on Workforce Projections », a entamé une réflexionvisant à diversifier les méthodes de délivrance des soins de santé primaire, notamment par lasubstitution entre médecins et non-médecins.

Afin d’améliorer les prévisions sur les besoins en professions de santé travaillant eninterdisciplinarité, le gouvernement fédéral a institué en 1994 le « Joint Primary CareWorkforce Working Group », groupe de travail interdisciplinaire, constitué par les membresdu « Council on Medical Education (COGME) », du « National Advisory Council on NursingEducation and Practice (NACNEP) » et du « Bureau of Health Professions ». Ce groupe a étémandaté pour examiner les besoins en « praticiens de santé primaire », en intégrant lesservices des médecins généralistes, des « Physicians assistants (PA) », des « NursePractitioners (NP) » et des « Certified Nurse Practitioners (CNP) ». Ces travaux ontdébouché sur la constitution d'un nouveau modèle d'estimation des besoins communs auxprofessions médicales et paramédicales, l'IRM (Integrated Requirement Model)7.

1.2.1 Le modèle intégré d'estimation des besoins

Ce modèle a été conçu pour fournir des estimations sur les besoins globaux en« praticiens » (« GP », « PA », « NP », « CNP »). Il prend en compte les hypothèsesd’évolution de la population, les hypothèses de couverture d’assurance maladie et leshypothèses d’évolution du système de santé, en particulier la généralisation des « ManagedCare Organizations »8.

La première version du modèle « IRM », qui portait essentiellement sur les soins depremière ligne, a montré a contrario un faible impact des « Managed Care » sur la demandeen professionnels de soins primaires. Ce résultat s’explique par le fait qu’ils influencent lesystème de soins, en privilégiant l’emploi de professionnels de soins primaires plutôt que desmédecins spécialistes. La diminution globale des effectifs n’est pas visible dans un modèlelimité au champ des soins primaires.Pour obtenir une vision complète et lisible des tendances de la demande globale, enspécialistes et en praticiens de santé primaire sur le marché du travail dans le domaine de lasanté, le groupe a donc choisi d’inclure les spécialistes dans le modèle.

7 Integrated Requirement Model Version 2 Tecnical Report, Vector Research, HRSA, 1998.8 Il est généralement admis que l’importance prise par les « managed care organizations» dans le système desoins depuis les années 80 et la compétition qu’ils exercent entre eux joue sur la demande en professionnels surle marché du travail de la santé.

211

un modèle qui intègre dix-huit champs de spécialité et concerne treize professions

Le modèle prend en compte dix-huit champs de spécialité, qui correspondent auxspécialités médicales et aux professions non-médicales. Les professions non-médicalesretenues sont celles dont le champ de compétence couvre une partie du champ médical pourune même spécialité. Les professionnels appartenant à ces catégories devaient aussi pouvoirtravailler de manière autonome, sans supervision directe d’un médecin et être reconnus par laloi (annexe 1).

Les dix-huit spécialités faisant objet de ces projections sont les suivantes :- l’anesthésie, - les maladies cardio-vasculaires- la médecine d’urgence, - la médecine générale « interne »,- la médecine générale « pédiatrique », - la médecine générale « de chirurgie »,- la médecine générale « de famille », - l’obstétrique/la gynécologie,- l’ophtalmologie, - la chirurgie orthopédique,- les autres sous-spécialités de médecine interne,- les autres spécialités,- les autres spécialités chirurgicales, - l’ORL,- la pathologie, - la psychiatrie,- l'anatomo-pathologie, - la radiologie,- l'urologie.

L’annexe 1 détaille, pour chaque spécialité, les professions non-médicales incluses dans lemodèle de prévision.

l’approche et la méthodologie utilisées pour l’élaboration du modèle « IRM »

Au niveau conceptuel, « l’IRM » utilise une approche par individu et peut être divisé entrois modules : un module « d’affectation de la population », un module « d’affectation despraticiens » et un module de calcul des « besoins intégrés en professionnels ».

Figure 5 : méthodologie utilisée par l’IRM (Integrated Requirements Model)

Population pour chaque mode de délivrance de soins

Structure du personnelpour chaque mode de

délivrancede soins

Calcul des« besoinsintégrés »

Estimation des « besoinsintégrés »

affectation des

« praticiens »

affectationde la population

212

1.2.1.1 Première étape : l'affectation de la population à quatre types différentsd'assurance

le modèle répartit la population entre les différents types d’assurances, regroupés en quatresous-groupes pour lesquels sont définis des ratios pour les différents personnels soignants

La population est caractérisée par le sexe, l’âge (supérieur ou inférieur à 60 ans), le lieud’habitation (rural, urbain) et le mode d’assurance maladie pour lequel dix types différentsd'assurance maladie sont distingués.

Figure 6 : recensement de la population selon différents critères

Description

Catégories Nombrede

variablesSexe homme, femme 2

Age 1-4, 5-17, 18-24, 25-44, 45-64, 65-74, 75,84, 85+ 8

Lieu urbain, rural 2

Typed’assurance

Staff HMO, IPA HMO, Medicaid Staff HMO, Medicaid IPAHMO, Medicaid FFS, Medicare FFS, Medicare Staff HMO,Medicare IPA HMO,No Insurance

10

Les différents types d’assurance maladie sont regroupés en quatre modes d’organisation,différenciés en fonction de la zone desservie, l'offre de soins variant en effet pour un mêmemodèle selon que la zone est rurale ou urbaine.

Figure 7 : les différents modes d’organisation de soins séparés en fonction de la zonedesservie

Urbain RuralStaff HMO Staff HMOIPA HMO IPA HMO

Fee-for-service Fee-for-serviceNo insurance No insurance

Les quatre catégories d’assurance maladie ( group/staff model HMO, IPA HMO, Fee-for-service et sans assurance) ont un impact différent sur l’utilisation des services de soins qui estlié aux comportements du médecin et du patient induits par le modèle. Ils se différencient,d'une part, dans leur degré d’intégration des professionnels de santé à l’organisation et leurparticipation aux gains et/ou pertes du « Managed Care » et, aussi, en fonction de la limitationde l’accès pour les bénéficiaires et de la part complémentaire que ces derniers doivent payeren plus de ce qui est pris en charge par le « Managed Care ».

les modalités d'assurance ont été distinguées en fonction du volume de soins que leursadhérents « consomment »

Les « HMO » diffèrent de toutes les autres assurances maladies parce qu’ils font partager,par différents moyens, le risque d’assureur avec les prestataires prenant en charge lesadhérents :

- soit par une rémunération à la capitation,

213

- soit par un système de bonus en cas de gains, de sanctions en cas de pertes de l’assuranceou de prescription de traitements considérés comme trop coûteux par les « HMO ».

Certains « HMO » ont aussi créé un réseau de soins (Preferred Providers Organizations)que les adhérents sont encouragés à consulter exclusivement. En contrepartie, les prestatairesdes réseaux de soins acceptent des mesures de contrôle de leur activité (détail au chapitre III).La réduction du nombre de prestations par les « PPO » (cf. chapitre III) est loin d’être aussiimportante que celles des « group/staff HMO ». Bien que les prestataires des « PPO »acceptent de se soumettre aux contrôles, une étude récente du « Congressional BudgetOffice »9 démontre que la réduction des coûts relève, principalement, des négociations sur lesprix des prestations et non sur leur nombre. Comme les incitatifs utilisés par les « PPO » etles « FFS » sont similaires, ces deux modes d’organisation d’assurance maladie ont étéregroupés pour ce modèle.

Les médecins travaillant pour les assurances maladies traditionnelles (Fee-for-service) sontrémunérés à l’acte et ne partagent pas le risque de l’assureur. Ils peuvent donc être amenés àmultiplier les services pour augmenter leur bénéfice.

Les « group/staff HMO » et « IPA HMO » sont distingués au sein des « HMO ». Lesprestataires ayant contracté avec un « group/staff HMO » soignent exclusivement lesadhérents de celui-ci. Les prestataires ayant contracté avec un « IPA HMO » restent libres desoigner les patients non-adhérents à ce « HMO ». Grâce à cette exclusivité, les « staff/groupHMO » ont ainsi plus de possibilité pour contrôler les prestataires que les « IPA HMO ».

Une étude réalisée par le « CBO »10 démontre une différence négative dans l’utilisation desservices médicaux de 21,9 % pour les adhérents des « staff/groups HMO » par rapport à ceuxdes assurances typiques « FFS » et de 3,6 % des « IPA » par rapport aux « Fee-For-Service ».

En 1995, plus de 22 % de la population américaine adhérait à un « HMO ». Cetteproportion est d’environ 49 % en 2000. De fait, la demande croissante d’adhésion aux« HMO » concerne principalement l’option « IPA HMO » (augmentation de 22,1 %).

Le taux d’adhésion à une « PPO » a augmenté, entre 1994 et 1995, d’environ 15 % (environ91 millions de bénéficiaires).

l’affectation de la population à chacun des quatre modèles d’offre de soins est estimée,pour l’année 1995, puis jusqu’aux années 2020

Figure 8 : la répartition de la population américaine sur les assurances maladies en 1995

< 65 ansUrbain

< 65 ansRural

> 65 ansUrbain

> 65 ansRural

FFS 52 % 69,1 % 86,4 % 95,7%IPA HMO 21,8 % 8,7 % 9,0 % 3,4 %Staff HMO 9,9 % 2,1 % 4,6 % 0,9 %Non assurés 16,3 % 20,1% N/A N/A

pour chaque type d’assurance, sont spécifiés le nombre, l’âge et le sexe de ses adhérents

9 Congressional Budget Office, 1996. CBO Memorandum : Managed Care and the Medicare Program.Washington, DC : Congressional Budget Office.

214

1.2.1.2 Deuxième étape : affectation des professionnels à chaque type de modèle

À chaque mode de délivrance de soins est alors attribuée une composition particulière depersonnel médical et soignant.Pour chaque type de praticien, est calculé un ratio pour les différents groupes de population,caractérisés par le sexe, l'âge et la zone d'habitation (rurale ou urbaine).

l'estimation de « staffing models » : le cas des médecins

Pour l’année de référence (1995), sont calculés des « staffing models » qui sont caractériséspar des ratios de « praticiens » nécessaires pour 100 000 personnes et définis pour chacun desquatre modes d’assurance et d’organisation de soins. Ce travail d’estimation a, non seulement,porté sur les médecins mais aussi sur les autres professions (treize, au total, sont intégréesdans le modèle). Les étapes de la modélisation sont détaillées ci-dessous pour le cas desmédecins.

Afin de définir le nombre de praticiens requis pour chaque mode d’organisation, lesauteurs du modèle ont, avant tout, recensé l’ensemble des praticiens exerçant aux États-Unis,selon la spécialité (dix-huit) et la zone (urbaine ou rurale). Ils ont aussi cherché à définir letaux de productivité de chaque médecin pour chaque spécialité.

Différentes bases de données ont été consultées pour estimer les ratios praticiens pour100 000 personnes (« staffing ratios ») et pour pouvoir fournir des moyens de comparaison.L’« American Medical Association »11 collecte, au niveau national, des données concernant lenombre de médecins en exercice pour chaque spécialité, en fonction de leur lieu d’installation(urbain, rural).

Pour estimer les besoins en médecins selon les différents modèles, le groupe de travails’est inspiré, entre autre, d’une enquête « National Ambulatory Medical Care Survey(NAMSC) » menée en 1990. Cette étude avait pour objectif d’évaluer s’il existait desdifférences significatives de productivité entre les médecins, en fonction du moded’organisation et de leur lieu d’installation (la productivité du médecin étant définie comme lamoyenne de consultations effectuées par un médecin dans un lieu d’installation donné). LaNAMSC analysait, pour un échantillon de malades, les caractéristiques socio-démographiques,les raisons et la durée des consultations, les sources de paiement. Cette étude ne permettait pasde mettre en évidence une différence au niveau du nombre annuel de consultations.Cependant, la durée de consultation a été utilisée comme indicateur de productivité. Lesauteurs du modèle ont donc pu définir le nombre moyen de minutes consacrées, par spécialitémédicale, à chaque patient, selon son sexe et son groupe d’âge (huit groupes d’âge).

Une fois constitués les fichiers définissant l’offre et la productivité moyenne des médecinsselon les dix-huit spécialités en zone urbaine et rurale, l’affectation des médecins auxdifférents modes d’organisation de soins a été faite en trois temps :

11 AMA= American Medical Association

215

1) l'estimation globale, en zone rurale et urbaine, du nombre de médecins nécessairescorrespondant au temps de consultation nécessaire pour 100 000 personnes d’un mêmegroupe d’âge et de sexe

Pour chaque zone d’exercice (urbain, rural) et chaque spécialité, les taux de productivité(temps nécessaire / 100 000 personnes) ont été appliqués à la population de référence (année1995) afin de calculer le temps nécessaire, en minutes, pour délivrer les soins à chaque sous-groupe (âge/sexe) de la population. Le temps nécessaire de consultation par sous-groupespermet de définir un nombre de médecins nécessaires. On obtient ainsi, pour chaque zone etpour chaque spécialité, le nombre de médecins nécessaires pour 100 000 personnescaractérisées selon leur âge et leur sexe.

Figure 9 : définition des rations de médecinspour 100 000 habitants

2) introduction de la répartition de la population dans les différents modèles d’assurancepour calculer un nombre moyen de médecins par spécialité en zone rurale et urbaine, pour100 000 personnes d’un même groupe d’âge et de sexe

Les ratios obtenus à l’étape précédente sont des moyennes nationales qui ne tiennent pascompte de la ventilation de la population dans les différents modèles d’assurance, ni de laproportion relative de chaque type de praticien dans les différents modèles d’organisation. Ladeuxième étape permet de calculer, par pondération portant à la fois sur la population et surles modes d’organisation de chaque modèle, les ratios de médecins pour 100 000 habitants enfonction de l’age, du sexe, de la zone (urbaine, rurale), de la spécialité et du type d’assurance.

Afin de calculer les ratios spécifiques pour chaque modèle d’organisation, les quatremodèles d’organisation (« Fee-for-services », « IPA », « staff model » et non-assurés) ont étéplacés sur une échelle dont la référence est le modèle « fee-for-services ». Les indicesspécifiques à chaque modèle ont été définis à partir de l’analyse de la littérature et ont étéconfrontés aux ratios moyens obtenus dans la première étape.

Offre en médecins1995

zone, spécialité

Médecins nécessairespour 100 000 personnes

âge, sexe, lieud’installation, spécialité

Population en 1995- âge- sexe

- lieu d’installation-

Procédure I

Durée de consultationmédicale pour 100 000

personnesâge, sexe, spécialité

216

Figure 10 : définition des rations de personnel non médicalpour 100 000 habitants

Le modèle est complété par l’ajout des autres professions pour lesquelles sont aussi définisl’offre en fonction de la zone (urbaine ou rurale), le mode d’exercice (soins primaires ousecondaires) et la spécialité. Pour chaque profession paramédicale et pour chaque spécialité,est défini un taux de substitution de praticien. C’est-à-dire la proportion d’activité réalisée parle médecin pouvant être réalisée par un autre professionnel de façon indépendante. Ce tauxest, en général, de 40 %.

l'estimation des « staffing ratios » pour les autres praticiens

Les données sur les autres groupes ont été obtenues auprès du « Medical College ofWisconsin ».

Indicateursd’assurance

maladiecatégorie assurance

Composition dupersonnel

- âge- sexe- lieu d’installation- spécialité- mode d’organisation

des soins

Population en 1995- âge , sexe- lieu d’installation- catégorie

d’assurancemaladie

Procédure II

Médecins nécessairespour 100 000personnesAge, sexe,

lieu d’installationspécialité

217

Tableau 3 : l’offre de praticiens autres constatée en 1995

Praticiens Offre en 1995Nurse Practitioners 49 500Physician Midwives 26 900Midwives 5 150Chiropractors 54 900Acupuncturists 7 360Naturopaths 1 260Optometrists 28 900Podiatrists 14 300Nurse Anesthesists 22 800Clinical NurseSpecialists

15 500

Clinical Social Workers 64 230Psychologists 65 000Psychiatric CNSs 2 620

La répartition de certains de ces praticiens aux lieux d’installation urbains et ruraux et auxmodes d’organisation des soins a été effectuée avec l’aide d’associations professionnelles etpar l’intermédiaire d’enquêtes.

1) Pour les « Physician Assistants » (Assistants médicaux)

Les pourcentages utilisés pour répartir les « PA » sur les zones rurales et urbaines ont étéobtenus par « l’American Academy of Physician Assistants (AAPA) ». Ces pourcentagesvarient en fonction de l’exercice des « PA » : médecine primaire ou spécialisée.

Répartition des « PA »

Secteur des soinsprimaires

Secteur des soinsnon primaires

Soins primaires(%)

Soins nonprimaires (%)

Urbain 10 892 13 924 71,13 % 88,28 %Rural 4 421 1 848 28,87 % 11,72 %Total 15 313 15 772 100 % 100 %

Les données du « Census Report on PAs 1995 » ont été utilisées pour distribuer les « PA »sur les 18 spécialités de « l’IRM ».La méthodologie utilisée pour estimer les ratios, par mode d’assurance, a été identique à celleutilisée pour les médecins.

2) Pour les « Nurse Practitioners »

Les chiffres concernant les lieux d’installation et de pratique des « NP » ont été obtenuspar le « Rural Information Center Health Service » (RICHS). Selon ces informations, en 1995,40 590 « NP » travaillaient en zone urbaine et 8 910 en zone rurale. Environ 79,2 %exerçaient dans une des spécialités de médecine générale/de famille, médecine généraleinterne, médecine générale pédiatrique ou obstétrique/gynécologique 12. Ces données,complétées par des chiffres déjà existants sur leur répartition sur les différents modesd’assurance maladie, fournissaient la base pour calculer les ratios.

Ainsi, la même méthode a été adoptée pour l’ensemble des spécialités et des professions.

12 The Nurse Practitioner, Volume 22, No.1, 1997, pp 14-17.

218

À chaque mode de délivrance de soins, selon la zone rurale ou urbaine, est alors attribuéeune composition particulière de personnel médical et soignant, pour chaque tranche d’âge enfonction du sexe et pour 100 000 personnes (annexes 2 ).

Tableau 4 : exemples de ratios de praticiens par 100 000 personnes,calculés pour chaque organisation de soins intégrés

PopulationCategories

Physicians

per 100000

NursePractitioners

per 100 00

ClinicalNurse

Specialistsper 100 000

PhysicianAssistantsper 100 000

femme 0-45-1718-2425-4445-6465-7475-8485+

homme 0-45-1718-2425-4445-6465-7475-8485+

Le modèle permet l’introduction de différentes hypothèses d’évolution.À titre d’exemple, les « HMO » accueillent actuellement une population plus jeune que les« fee-for-services ». Mais, si l’on utilise un scénario dans lequel la clientèle des « fee-for-services » (en particulier les adhérents de « Medicare ») se déplace vers les « HMO », lenombre global de professionnels de santé nécessaires sera augmenté automatiquement pourpouvoir satisfaire les besoins d’une population plus âgée.

les limites de cette méthodologie

Le modèle est basé sur des hypothèses simplifiées de substitution. Les ratios desubstitution sont définis sur des bases empiriques et ne s’appuient pas sur une description etconnaissance précises des actes réalisés par chaque profession.

Il est difficile d’obtenir les données de population, le type et le nombre de praticiensemployés dans chaque « HMO » ; si toutes ces données pouvaient être obtenues, il seraitpossible d’évaluer la « production de soins » pour chaque mode d’organisation des soins etpour les différents « réseaux de professionnels employés ». Par extrapolation, il serait aussipossible de développer des nouvelles combinaisons de personnel soignant, pas encoreobservées en pratique.

L’IRM a été utilisé par le NACNEO et la COGME pour calculer les besoins en prestatairesde soins primaires sous différentes hypothèses :

1) hypothèse d’un même accès aux soins qu’aujourd’hui mais prise en compte, dans lesprévisions, de l’évolution démographique de la population américaineconclusion : augmentation de 12 % du nombre de « NP »,

219

2) hypothèse de la création d’une couverture d’assurance maladie universelle et emploi depersonnel médical et paramédical dans les régions sous-médicaliséesconclusion : augmentation nécessaire de 24 % du nombre de « NP »,

3) instauration d’un ratio médecin/non-médecin = 0,5/1conclusion : il faudrait doubler le nombre de « NP » et de « PA ».

Toutes ces hypothèses montrent un besoin important à venir dans les professionsintermédiaires. Les auteurs plaident pour une surveillance prudente de ces tendances et pourl’identification des facteurs qui les influencent.

Avec le développement du « Managed Care », le recours croissant aux professions non-médicales, la concurrence de plus en plus importante sur le marché de travail médical, lesmédecins sont demandeurs d’une planification commune des ressources humaines permettantd’ajuster le nombre et le type de spécialités formées aux besoins réels.

II La régulation des effectifs à l'entrée des études médicales etparamédicales

2.1 Le cas des médecins

2.1.1 Le quota d’étudiants en médecine à admettre chaque année est du ressort desuniversités mais est en grande partie déterminé par les subventions de « Medicare » et« Medicaid »

Conformément aux traditions historiques et politiques, il n’existe pas d’instance centrale derégulation des professions médicales aux États-Unis, ni de mesure limitative comme unnumerus clausus. La détermination du nombre d’étudiants admis dans les universités demédecine et dans les spécialités relève de la responsabilité conjointe des universités et deshôpitaux universitaires et n’est pas du ressort de l’État. Les universités et écoles de médecinesont indépendantes. Seulement 74 des 125 écoles de médecine sont publiques. Les 51 écolesprivées ne reçoivent que 1 % (contre 18 % dans les écoles publiques) de leur budget de leurÉtat. 22 % de leurs fonds proviennent, cependant, de budgets fédéraux destinés à la rec herchemédicale (16 % dans les écoles publiques). « Medicare » contribue à hauteur de $7 millions au budget des universités et « Medicaid »pour 2 millions de $ 13. « Medicaid » et « Medicare » constituent donc des leviers importantsde régulation des effectifs médicaux.

Dans les années 1950-1960 et face à une demande croissante de médecins induite parl’évolution démographique de la population américaine et la création de « Medicare » et« Medicaid », le Congrès décide de subventionner les facultés de médecine. Il facilite aussil’entrée et les conditions d’exercice des médecins étrangers aux États-Unis.Rapidement, le nombre total de médecins a augmenté et plusieurs rapports dénoncent lesdangers d’une surproduction de médecins dans les écoles de médecine.En 1980, un rapport14 estimait qu’en 1990, les États-Unis auraient trop de médecins et queleur proportion, par rapport à la population, doublerait entre 1950 et l’an 2000. Le

13 Salsberg, E., State Strategies for Financing Graduate Medical Education, 1997, NEW YORK.14 Rapport du Graduate Medical Education National Advisory Committee (GMENAC).

220

gouvernement fédéral mit alors fin aux subventions directes des facultés de médecine(excepté « Medicare ») et tenta de limiter le nombre de diplômés d’universités étrangères.De leur côté, les universités de médecine, qui connaissaient alors des difficultés financières,cherchèrent à décourager les candidats, en augmentant les frais d’inscription, contraignantainsi les étudiants en médecine à s’endetter lourdement.Le projet de réforme du gouvernement Clinton prévoyait l’instauration de mécanismes derégulation des effectifs médicaux. Depuis son abandon, l’augmentation de la concurrence, àtous les niveaux du système de santé et les efforts croissants des « Managed Care » pourdiminuer les coûts, régulent la démographie médicale.

le marché de la santé, dominé par les « Managed Care », semble induire une diminution denombre de médecins à court terme

Cette situation pose de nombreuses questions quant à l’efficacité et à la possibilité desmécanismes du marché à réguler l’offre médicale. Certes les médecins changent de plus enplus leur projet professionnel, en raison du manque d’opportunités offertes par le marché detravail15. Ils se détournent des spécialités pour s’orienter vers la médecine primaire. Mais cette« régulation » se fait souvent tardivement et reste sans effets sur le nombre de médecinsformés.

Les associations médicales, d'étudiants et les universités de médecine appellent à ladéfinition d’un système central de régulation, s'appuyant sur l'hypothèse que l’offre enprofessionnels de santé serait plus adéquate si davantage d’information sur le marché detravail était disponible.Ces données pourraient être utilisées par les universités de médecine et par les étudiants dansleurs choix respectifs. Le système de régulation devrait tenir compte des changements dumarché de travail et refléter ces évolutions par une planification commune des besoins enmédecins et en non-médecins. Selon le COGME, cette planification devrait se faire encollaboration avec tous les États. Il recommande la création de « consortias » régionauxrassemblant tous les acteurs concernés par la question. Ces consortias devraient orienter leursrecommandations en fonction des priorités sanitaires de la région14.

15 COGME Physicien Workforce Policies : 14eme rapport, 1999.

221

les répercussions de l’expansion du « Managed Care » dans les hôpitaux universitaires

Jusqu’à maintenant, parmi les assureurs, seuls « Medicare » et « Medicaid » participaientaux frais de formation des étudiants dans les hôpitaux. Mais, conformément à la volontépolitique de diminuer le nombre de médecins formés, les fonds qu’ils réservent à la formationdiminuent de plus en plus.

Par ailleurs, leur budget est de plus en plus administré par les « Managed CareOrganizations ». Celles-ci sont peu incitées à payer les frais supplémentaires relevant de laformation des médecins dans les hôpitaux. La viabilité des institutions de formation est ainsiremise en cause14.Selon une étude récente16, les « MCO » estiment que les coûts des soins sont majorés de 5 à10 % dans les hôpitaux universitaires. Elles privilégient, donc, de plus en plus les soinsdispensés dans les institutions du secteur ambulatoire (ce qui diminue encore les ressourcesdes hôpitaux liées au nombre d’admissions). Face à cette évolution, certains états et écoles demédecine proposent des formations complémentaires dans le secteur ambulatoire. Depuis peu,ces formations sont aussi reconnues et subventionnées par « Medicare ».Afin de garantir la qualité de la formation médicale, le « COGME » recommande la créationd’un système de paiement commun, sollicitant tous les assureurs bénéficiant du système desoins et pas uniquement « Medicare ». Cet appel n’a pas encore été entendu17.

le cas des étudiants étrangers

Comme de nombreux hôpitaux ne souhaitent pas substituer, aux diplômés d’universitésétrangères, un personnel formé aux États-Unis dont le salaire serait beaucoup élevé, ilscontinuent à accroître le nombre de médecins étrangers exerçant sur le marché de travailaméricain18. Déjà en 1970-1971, les médecins étrangers représentent environ un tiers dunombre total de médecins des hôpitaux. De fait, à l’issue de leurs études, la majorité desdiplômés d’universités étrangères choisissent de s’installer définitivement aux États-Unis. Ilsreprésentent, en 1995, près d’un quart des 605 000 médecins qui y exercent.Les résidents (internes) étrangers représentent une force de travail considérable aux États-Unis. 4 800 internes étrangers sont chaque année en poste aux États-Unis, et 3 000 demandentà y rester après leur formation dans les hôpitaux américains. Les avertissements du « Councilon Graduate Medical Education » (COGME) ont suscité une demande d’interventiongouvernementale pour réguler le flux des étudiants, notamment en interdisant l’accès auxpostes de résidents (internes) aux étudiants étrangers. Au début des années 90, cesavertissements n’avaient pas été entendus car l’administration de santé estimait que le jeu dumarché suffirait à décourager les candidats aux études médicales.

Récemment, les recommandations du troisième rapport COGME semblent avoir étéreprises par les autorités américaines.Avec l’approbation des deux chambres législatives américaines, les « Foreign MedicalGraduates » ont été informés qu’ils ne pourraient rester en fonction après leur stage et lespostes pour les nouveaux arrivants ont été supprimés.

16 Gold, M.R. (1996), Effects of the growth of Managed Care on Academic Medical Centers and GraduateMedical Education, Academic Medicine, 71, 828-838.17 Cogme Physician Workforce Policies : 14eme rapport, 1999.18 « Le système de santé américain », E. Chamorand, p. 88.

222

2.1.2 La régulation de l’accès aux spécialités

les efforts des dernières années vont dans le sens d’un rééquilibrage du ratiogénéraliste/spécialiste par un subventionnement sélectif de « Medicare » et vers le soutienaux postes de formation dans les sites ambulatoires

Jusqu’au milieu des années 1990, la médecine de soins primaires (la médecine de famille,la médecine interne non spécialisée et la pédiatrie générale) n’attirait qu’un nombreinsuffisant de médecins : en 1992, le nombre d’internes se dirigeant vers cette filière étaittombé à 14,6 %.En 1991, une étude du bureau des soins primaires du DHHS (Department of Health HumanServices) indiquait que, malgré l’augmentation très importante des médecins, les besoins non-couverts en médecine de soins primaires (médecine générale, pédiatrie, gynécologie) avaientaugmenté, pour passer de 1 242 postes vacants en 1978 à 2 143 en 1991, la population vivantdans les zones sous-médicalisées étant passée, durant la même période, de 27 à 36 millions 19.

Différents facteurs peuvent expliquer l’attirance pour les spécialités dont, en priorité, ladifférence de rémunération entre spécialistes et généralistes. Mais d’autres critères entrent enjeu dans le choix d’une spécialisation. Ainsi, de nombreuses études ont été menées dans le butde définir les déterminants de ce choix.Ces études ont démontré que, pendant de nombreuses années, l’intérêt pour la médecineprimaire en début des cursus était grand mais qu’il diminuait avec le temps (surtout après lesstages cliniques). La majorité des étudiants qui ont choisi une carrière en médecine primairesont de sexe féminin, plus âgée, mariée, ayant des parents qui ne sont pas médecins et desattentes moins importantes par rapport au salaire, intéressée par une approche globale de leurspatients et moins attirée par le prestige, la haute technologie et la chirurgie. Les expériencesde stages et les institutions de formation, leur prestige ou leur mauvaise image, dans le cas dela médecine primaire, s'avèrent déterminants du choix d’une spécialité par les étudiants20.La restructuration des années 90 et le nombre croissant de malades assurés par les « ManagedCare » ont favorisé les reconversions de médecins spécialistes. Les « organismes de soinsintégrés - Managed Care Organizations ou MCO » ont, en effet, de forts besoins engénéralistes et déploient de nombreux mécanismes pour éviter le recours à des spécialistes,trop coûteux pour eux. Ils cherchent à revaloriser le travail des généralistes et mettent enplace, en 1992, un nouveau barème pour les actes concernant les patients couverts par« Medicare ». Ce barème, défini en fonction des coûts de production des actes médicaux,devrait relever les honoraires des généralistes. Comme le succès des jeunes médecins dépend,de plus en plus, d’un contrat avec ces organismes (77 % des médecins ont signé un contratavec un « MCO » en 1994) et que le ratio « médecins pour 100 000 habitants », utilisé par les« MCO », est inférieur à l’offre déjà existante, la concurrence sur le marché du travails’accentue.

Par conséquent, depuis 1995, de plus en plus d’étudiants deviennent généralistes et denombreux spécialistes reprennent des études pour se reconvertir en généralistes.Toutefois, cette restructuration n’a pas seulement pour effet de corriger la tendance à laspécialisation, elle entraîne aussi une transformation de la profession médicale tout entière.

19 E. Chamorand, Le système de santé américain, 1996.20 Determinants of primary care speciality choice : a non statistical meta-analysis of the literature ; Bland CJ,1995, University of Minnesota Medical School

223

En 1997, par l’intermédiaire du « Balanced Budget Act », le gouvernement a engagé uneréforme du système de répartition des fonds « Medicare » destinés à la formation desmédecins. Cette réforme a plafonné le budget réservé aux internes et a ajusté les fondshospitaliers à un ratio internes/lits hospitaliers. Ces enveloppes budgétaires limitent, ainsi, lenombre d’internes bénéficiaires des subventions de « Medicare », ce qui devrait découragerles étudiants de s’engager dans cette voie. Le montant de ces subventions varie en fonction dela spécialité et de la région (plus ou moins médicalisée). Les hôpitaux qui acceptent, dans undélai de cinq ans, de réduire volontairement de plus que 20 % le nombre total des internes etd’augmenter le nombre d’internes de médecine générale (la médecine de famille, la médecineinterne non spécialisée et la pédiatrie générale), bénéficient d’une période de transitiondurant laquelle leur budget est réduit progressivement, ce qui leur permet de les remplacer oude réorganiser les services21.

la politique de « Medicare » vise alors à diminuer les effectifs d’internes de spécialité, àaugmenter la spécialisation en médecine générale et à développer l’offre de formation dansles régions sous-médicalisées et dans les sites ambulatoires. Elle est soutenue par unfinancement supplémentaire des États

En 1999, le COGME recommande la mise en place d’un système d’information permanentsur le marché, incluant tous les acteurs (universités de médecine, hôpitaux universitaires,internes, étudiants en médecine, politiciens, États, assurances et la population générale) afind’orienter les choix de spécialités et de résidence. Cette planification devrait s’élargir auxprofessions paramédicales.

2.2 Le cas des professions paramédicales

L’augmentation du nombre des professions paramédicales et des effectifs résulte engrande partie d’une insuffisance d’offre médicale en santé primaire et d’une mauvaiserépartition géographique. Actuellement, cette évolution est renforcée par la mise enconcurrence des assureurs et des établissements de soins.

Le manque d’accès aux soins de santé primaire, d’une grande partie de la populationaméricaine, a été le principal moteur de développement de la profession infirmière et de lacréation de nouveaux métiers dans le secteur paramédical.

La mise en place de « Medicaire » et « Medicaid », en 1965, a augmenté la demande ensoins mais n'a pas permis de résorber les importantes disparités dans la répartitiongéographique des médecins. Des déficits, notamment dans les zones rurales ou sous-développées, où la population est le plus souvent peu ou mal assurée, se perpétuent en regardd’une croissance dans des zones déjà plus médicalisées, comme les grandes villes de la côteEst, en Floride et en Californie.

Face à cette situation et aussi dans l'objectif de diminuer les dépenses, de nouveaux métiersse créent. Ils se caractérisent, principalement, par leur orientation vers la médecine primaire etpar leur similitude avec le métier de médecin :

- les « Nurse Practitioners » (NP),- les « Physician Assistants » (PA).

21 Cogme Physician Workforce Policies : 14eme rapport, 1999.

224

Les « NP » et « PA » sont autorisés, selon les états, à dispenser environ 70-80 % dessoins/actes médicaux, dont la prescription de certains médicaments et la pratique de certainesinterventions chirurgicales22. Dans cet objectif, l’État fédéral a mis en place des recherches sur le rôle, la pratique et laproductivité des « NP ».

En 1971, l’État fédéral légitime ces différentes professions et encourage le développement

de « guidelines ». De nouvelles professions se créent alors rapidement, comme les « pediatricnurse practitioners », les infirmières spécialisées en gérontologie, les enseignants, les sages-femmes, les infirmières, « nurse specialists » ou « nurse midwives ». Des maisons de soinsinfirmiers voient le jour…

À l’époque, contrairement à ce que l’on aurait pu supposer, ces nouveaux métiers ne sontpas perçus comme une menace par les médecins, mais sont créés avec leur aide.

Traditionnellement, les médecins aux États-Unis exercent un contrôle sur les personnelssoignants. Le « CME » (Council on Medical Education) de « l’AMA » est officiellementchargé d’approuver les programmes, d’homologuer les écoles et d’attester les compétencesdes diplômés des professions paramédicales. Il approuve aussi chaque nouvelle formation etagrée les stages proposés par les hôpitaux. Dans les années 70 et 80, le développement denombreux métiers nouveaux se fait avec l’accord des médecins et même, parfois, à leurinitiative. L’idée était d’augmenter, avec l’aide de ces nouveaux assistants, la productivité descabinets de médecin. Ils espéraient être plus concurrentiels et compenser, en les employant, laperte économique due à l’installation dans une région « sous-développée » où potentiellementplus de personnes sont peu ou pas assurées.

Les organisations d’infirmières s’occupaient de garantir aux infirmières diplôméesd’université un statut professionnel par rapport aux autres catégories d’infirmières, formées endeux ans ou dans les hôpitaux, et un statut professionnel par rapport aux médecins. Au cours des années, les fonds fédéraux pour ces formations ont diminué, sauf dans lesrégions sous-médicalisées.

La formation de « Physician Assistant » dure de deux à trois ans. Elle se déroule au niveaud’un « college » et mène à un « bachelor of arts ». Le titre de « nurse practitionner » s’obtient après une qualification supplémentaire au diplômed’infirmière de base, à la suite d’une formation allant de quelques mois à deux ans.

III La régulation du marché de travail

le marché de travail, contrôlé de plus en plus par les organisations de soins intégrés,détermine l’emploi et la composition des ressources humaines dans le secteur de la santé

Il n’existe pas d’instance nationale de régulation des professions de santé sur le marché detravail.

22 E.S. …SKI et al, State Practice Environements and the Supplyof Physician Assistants, nurse practitioners andcertified nurse-midwives. The NESM, Nov 10, 1994 : 1266-1271.

225

Les législations, applicables aux médecins, sont propres à chaque État et n’obéissent auxdirectives que dans la mesure où chaque État en fait voter les principes par son propre corpslégislatif. Jusqu’à présent, ces directives sont souvent restées sans effet, d’autant plusfacilement que les administrations républicaines (Reagan, Bush) se sont prononcées pour unegrande liberté dans ce domaine et contre toute forme de régulation étatique, a fortiorifédérale.

Au début des années 90, le gouvernement Clinton prévoyait de réformer le système desanté américain, de le rendre accessible à toute la population et de mettre en place desmécanismes de contrôle. Depuis l’échec de cette réforme, le marché est de nouveau libre etles organismes d’assurance privée continuent leur expansion rapide dans le secteur de lasanté. Le secteur privé est dominé par les « Managed Care Organizations » ou organismes de soinsintégrés. Ces « MCO » sont caractérisées par des modèles de dispense des soins visant uneallocation des ressources et des moyens les plus efficaces possibles. Elles supposent qu’ilexiste, pour chaque patient, un traitement avec le meilleur rapport qualité/prix, en excluant lesprestations « non nécessaires ». Pour ceci, elles exercent des mécanismes de contrôle visant àmaîtriser/superviser/anticiper les comportements des acteurs du système de santé (prestatairesde soins, assurés, hôpitaux) quant à l’utilisation des services médicaux. Elles utilisentdifférents instruments, comme la budgétisation des hôpitaux, le paiement à la capitation etnon plus à l’acte, le « case management », des « guidelines » et la hiérarchisation des soinspar un système de « gate keeper ». Cette surveillance, rendue possible grâce aux progrès del’informatique, porte alors sur le volume des soins, leur coût, la prescription de certainesmarques de médicament, etc… Elle bouleverse complètement les traditions de recrutement,d’exercice et de paiement des médecins. Aujourd’hui, environ 75 % de la populationaméricaine est inscrite dans une « MCO ».

La figure suivante représente les grands types de « MCO » actuellement prédominants dumarché des assurances maladie :

Managed Care

Health Maintenance

Organization (HMO) Prefered Provider

Organization (PPO )

Exclusive Provider

Organization (EPO)

Group Model Staff

Model

Figure 11 : différents types de « Managed Care Organizations »

Source : Gesundheitssysteme zwischen Plan und Markt, J. Sommer

IndependantPractice

Association (IPA)

Pre-PaidGroup

Practice (PGP)

NetworkModel

Point-of-ServicePlans (POS)

226

Parmi eux, les « MCO » les plus typiques sont les « HMO » ou « Health MaintenanceOrganizations ».

Il s’agit d’organismes privés concluant des contrats avec des médecins libéraux

(« Independant Practice Association »), avec un cabinet collectif, une association demédecins (« Pre-Paid Group Practice ou PGP ») ou un réseau de plusieurs associations demédecins (« Network Model »)23. Ils diffèrent des assurances traditionnelles parce qu’ils font partager le risque d’assureur avecles prestataires de soins associés au « HMO », soit en rémunérant les médecins à la capitation,soit en employant un système de bonus et de sanctions (en fonction de l’utilisation ou non detraitements avec un rapport coût/efficacité …)

Ainsi, les médecins qui travaillent dans un cabinet collectif peuvent eux-mêmes investir etdevenir responsables d’une « PGP ». Ils sont alors payés à la capitation (pour chaquepersonne qu’ils prennent en charge) et répartissent les gains et les pertes entre eux. On parlealors de « Group Model ». Les médecins peuvent aussi devenir salariés d’une « HMO » type « Staff Model ». Dans cecas, celle-ci met à leur disposition tout l’équipement technique nécessaire. En général, ils sontsalariés et associés (participent) aux pertes et aux gains du « HMO » (avec des primes ou dessanctions en fonction des résultats financiers).

Les « Point of Service Plans » sont de plus en plus populaires aux États-Unis. L’assuré quichoisit cette option reste libre de consulter des prestataires en dehors du réseau des « HMO ».Dans ce dernier cas, seulement une partie des coûts sont remboursés.

A côté des « HMO », on retrouve un deuxième modèle important de « MCO » : les« Preferred Provider Organizations (PPO) ».

Il s’agit d’un partenariat, d’une association entre des médecins libéraux et un ou plusieurs

hôpitaux dans des « co-entreprises ». L’assureur, par exemple une grande entreprise oucompagnie d’assurance, achète des prestations à cette association qui, elle, ne participe pasaux risques financiers. En contrepartie, les participants acceptent à se soumettre à descontrôles stricts de qualité et de coût et proposent des prix avantageux. L’assuré a lapossibilité de consulter des médecins en dehors du réseau. Une « sous-option » de la « PPO » est l’« Exclusive Provider Organization », qui ne laissepas le choix à son assuré de consulter un médecin en dehors du réseau.

La figure suivante place les « MCO » en fonction de leur intensité d’organisation et decontrôle vis-à-vis des médecins.

23 Gesundheitssysteme zwischen Plan und Markt, Jürg Sommer, édition Schattenauer, 1999.

Plus de contrôle, plus de managed care +

227

Pour échapper au pouvoir des « HMO », les hôpitaux cherchent de plus en plus à faire descontrats avec les « IPA » ou créent leurs propres « HMO » et « PPO ». Néanmoins, la réorganisation du système de soins à partir des années 90, le développement dusecteur ambulatoire par les « MCO », les coupes dans les programmes « Medicaid » et, parconséquent, l’augmentation de la concurrence entre hôpitaux, menacent l’emploi de plus de100 000 salariés24. Les hôpitaux réduisent le personnel soignant et remplacent les infirmièrespar des aides-soignantes sans qualification. Le syndicat des travailleurs du secteur de la santédénonce la dégradation des soins à l’hôpital, laquelle est confirmée dans de nombreuxrapports.

Pour la majorité des infirmières, la généralisation des soins n’entraîne alors pas unerevalorisation de leur travail. Le recours à des intérimaires, la recherche de l’efficacitéclinique aux dépens de soins holistiques, autant que la faible rémunération et le manque desécurité de l’emploi, ne peuvent manquer de susciter un mécontentement grandissant généraldu personnel soignant qualifié25.

la croissance de la démographie médicale n’a pas permis de résorber les disparitésgéographiques ou sociales liées à une mauvaise répartition des médecins sur le territoireaméricain

L’excédent de médecins n’a pas permis de résorber les déficits qui existent encore auxÉtats-Unis, notamment dans des zones rurales ou sous-développées. La croissance la plusforte se retrouve dans des zones déjà les plus médicalisées, notamment dans les grandes villesde la côte Est, en Floride et en Californie (voir annexes). On constate que les inégalités géographiques s’accentuent et que l’accès aux soins estmédiocre. Différents facteurs peuvent l’expliquer :

- dans ces zones vivent plus de personnes peu ou pas assurées,- pas d’hôpitaux,- différence de rémunération.

L’objectif est d’améliorer l’accès aux soins de santé primaire grâce à :- la formation de médecins généralistes,- la création de nouveaux métiers.

24 Le système de santé américain, E. Chamorand, 1996, p.86.25 E. Chamorand, Le système de santé américain, 1996.

228

Annexes États-Unis

Annexe 1 : Liste des professions non médicales incluses dans le modèle d’estimation desbesoins intégrés

Annexe 2 : Liste des ratios de personnel médical et non médical et des ratios de substitutionpour chaque spécialité en fonction du lieu d’exercice et du modèle d’assurance pour chaquetranche d’âge pour 100 000 habitants.

Annexe 3 : Densités de médecins dans les dix États les plus médicalisés des États-Unis.

Coordonnées des personnes contactées

Bibliographie

229

Annexe 1 : liste des professions non médicales incluses dans le modèled’estimation des besoins intégrés

Exhibit 1-2: Nonphysician Clinicians Included in the IRM

Anesthesiology Ophthalmology• Certified Nurse Anesthetist • Optometrist• Physician Assistant• Acupuncturist

Cardiovascular Diseases Orthopedic Surgery• Nurse Practitioner • Physician Assistant• Clinical Nurse Specialist • Chiropractor• Physician Assistant • Acupuncturist

Emergency Medicine Internal Medicine Subspecialties• Nurse Practitioner • Nurse Practitioner• Physician Assistant • Clinical Nurse Specialist

• Physician AssistantGeneral Internal Medicine• Nurse Practitioner Other Specialties• Physician Assistant • Clinical Nurse Specialist• Chiropractor • Physician Assistant• Naturopath• Acupuncturist Otolaryngology

• Physician AssistantGeneral Pediatrics• Nurse Practitioner Pathology• Physician Assistant • Physician Assistant

General Surgery Psychiatry• Physician Assistant • Clinical Nurse Specialist

• PsychologistGeneral Family Medicine •• Clinical Social Worker• Nurse Practitioner• Physician Assistant Radiology• Chiropractor • Physician Assistant• Naturopath• Acupuncturist

Obstetrics Gynecology Urology• Nurse Practitioner • Physician Assistant• Certified Nurse Midwife• Physician Assistant• Acupuncturist

230

Annexe 2 : liste des ratios de personnel médical et non médical et des ratiosde substitution pour chaque spécialité en fonction du lieu d’exercice et dumodèle d’assurance pour chaque tranche d’âge pour 100 000 habitants

APPENDIX C : The IRM’s Staffing Models

This appendix present the IRM’s staffing model which are applied to the US population togenerate requirements. The column heading abbreviations are defined as follows.

NAME – The name of staffing model as it appears in the interface.

SPEC – The model specialty.

PRACT – The practitioner type.

PROD - The practitioner’s subtitution ratio.

m0 - The practitioner ratio for males ages 0-4.

m1 – The practitioner ratio for males ages 5-17.

m2 - The practitioner ratio for males ages 18-24.

m3 – The practitioner ratio for males ages 25-44.

m4 - The practitioner ratio for males ages 45-64.

m5 - The practitioner ratio for males ages 65-74.

m6 - The practitioner ratio for males ages 75-84.

m7 - The practitioner ratio for males ages 85 and older.

f0 - The practitioner ratio for females ages 0-4.

f1 - The practitioner ratio for females ages 5-17.

f2 - The practitioner ratio for females ages 18-24.

f3 - The practitioner ratio for females ages 25-44.

f4 - The practitioner ratio for females ages 45-64.

f5 - The practitioner ratio for females ages 65-74.

f6 - The practitioner ratio for females ages 75-84.

f7 - The practitioner ratio for females ages 85 and older.

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236

Annexe 3 : densités de médecins dans les dix États les plus médicalisés desÉtats-Unis

En nombre de personnes par médecins

État Année 1992Washington D.C. 142Massachussetts 263Maryland 267New York 278Connecticut 289Californie 332Vermont 340Rhode Island 354Hawaï 354Colorado 366

Source : Physician characteristics and distributionin the US, AMA, 1994.

237

Coordonnées des personnes contactées

Bastacky STANFORDChief, Spécial Projects and Data Analysis BranchBureau of HealthProfessions Division of Medicine Health Resources and ServicesAdministrationRoom 9A-21, Parklawn Building - 5600 Fishers LaneMD 20857 ROCKVILLE USA(301) 443 6326 [email protected]

Mrs Irène SANDVOLDDrPH, MSN, CNM, FACNMDepartment of Healh and Human Services Health Resources end Services AdministrationDivision of Nursing/Bureau of Health Professions - Room 9-36, 5600 Fishers LaneMd 20853 ROCKVILLE USA(301) 443 6333 [email protected]

Mr MD Dan BADENMedical OfficerArea Health Education Centers Branch - Bureau of Health Professions Health Resources &Services Administration5600 Fishers Lane - Room 9A-05MD 20857 ROCKVILLE USA(301) 443 6950 - (301) 443 0935 [email protected]

Mr Tzvi HAFTERHealth Care Financing Administration7500 Security Boulevard, Baltimore,Maryland 21244, USAPhone: (410) 786-3000

238

Bibliographie

National Advisory Council on Nurse Education and Practice. Report to the secretary ofthe department of Health and Human Services on the Basic Registered Nurse Workforce. USdepartment of Health and Human Services. HRSA - April 1996.

COUNCIL ON GRADUATE MEDICAL EDUCATION Eight Report : Patient Care,Physician Supply and Requirements : Testing COGME Recommandations, RevisedNovember 1996..

COUNCIL ON GRADUATE MEDICAL EDUCATION Eleventh Report : InternationalMedical Graduates, the Physician Workforce, and GME Payment Reforme, March 1998.

COUNCIL ON GRADUATE MEDICAL EDUCATION Fourteenth Report : CogmePhysician Workforce Policies : Recent Developments and remaining challenges in meetinigNational Goams, March 1999..

Integrated Requirements Model Version 2.0 Technical Report ; April 30, 1998. VectorResearch, Incorporated.

Le système de santé américain : poids du passé et perspectives; Élisabeth Chamorand. Lesétudes de la documentation Française - 1996.

239

Conclusion

La situation démographique médicale comme les politiques et les outils de la régulation decelle-ci apparaissent très contrastés selon les pays étudiés. Nous nous attacherons, dans cettecourte conclusion, à caractériser ces différences, proposer quelques pistes d'explication et,après un rapide rappel de l'ensemble des questions qui se posent dans tous les systèmes desanté des pays développés, nous proposerons quelques pistes de réflexion pour le contextefrançais.

L'ensemble des pays étudiés peut être ordonné selon l'importance des dispositifs derégulation de la démographie médicale aux différents temps que sont l'accès à la formation,l'accès au marché du travail et l'exercice sur le marché du travail.En suivant un ordre décroissant de développement des dispositifs de régulation, le Royaume-Uni se place en première position avec un modèle de régulation que nous qualifions demaximal, dans la mesure où la planification du nombre de médecins nécessaires est estimée àla fois à long et moyen termes, par discipline et à l'installation. Cette régulation fine etdéveloppée encadre ainsi étroitement la profession avec, en contrepartie, la garantie offerte àchaque étudiant en médecine de trouver une place dans le système de soins selon ses souhaitset capacités.En deuxième position et à un moindre niveau de développement des outils de régulation, nousplaçons le Québec, eu égard à la panoplie des outils et procédures en place, tels que lenumerus clausus à l'entrée des études, la régulation fine par spécialités et les réformes encours visant à réguler l'installation. L'objectif de cet appareillage réglementaire vise à estimeret former le nombre adéquat de professionnels au regard des besoins de la population selon unmodèle de planification. C'est aussi, parmi les pays étudiés, celui qui semble avoir le plusdéveloppé les mesures incitatives à l'installation en zone à faible densité de population avecun succès d'ailleurs relatif.Ces deux premiers pays 26 ont en commun l'intervention forte des instances de régulation dansla gestion du système de protection du risque social maladie. Les dépenses de santé y sontcontrôlées a priori et les besoins non-satisfaits s'expriment alors par l'importance des listesd'attentes d'accès aux soins qui deviennent, dès lors, un enjeu important dans les débats. Leproblème posé dans de tels contextes n'est pas de maîtriser la croissance des dépenses de santémais plutôt de répondre aux besoins exprimés par les listes d'attentes. Dans ces modèles quel'on peut qualifier de « rationalisés a priori », la maîtrise de l'offre de soins est importante etporte, tout naturellement, aussi sur les professions de santé et, particulièrement, la professionmédicale. Ces deux pays présentent alors, globalement, une offre médicale inférieure auxbesoins, ce qui pour certains est le signe d'une pénurie, et font appel largement à l'immigrationpour répondre aux besoins non-satisfaits en raison de leur fort pouvoir d'attraction. Dans lesdeux cas, ce sont les instances professionnelles plutôt qu'universitaires qui sont associéesétroitement aux dispositifs de régulation de l'offre et participent aux différentes instances dedécision. Les politiques de rémunération des professionnels encadrent les revenus qui sontnégociés a priori.Sur l'échelle des pays plus ou moins régulateurs, nous plaçons l'Allemagne et la Belgique entroisième et quatrième position. Ces pays ont mis en place des mécanismes de régulationmoins nombreux mais néanmoins sophistiqués, notamment pour l'Allemagne, qui jouentprincipalement au moment de l'installation. La mise en œuvre de mécanismes de régulation,en amont du processus de formation, est laissée aux communautés en Belgique ou aux Länder

26 Le Québec qui est une province du Canada est ici assimilé à une entité autonome pour organiser son systèmede santé et donc comparé aux autres pays.

240

en Allemagne, qui sont libres de répercuter sur leurs politiques d'enseignement les contraintesimposées pour maîtriser les dépenses du système d'assurance maladie, piloté à l'échelonfédéral. En Belgique, le numerus clausus à l'installation est alors répercuté différemmentselon les communautés auprès des universités, alors qu'en Allemagne, il est clairementassumé un excès de jeunes médecins à venir sur le marché du travail dû au décalage entre lacapacité d’accueil des universités de médecine des Länder, très nettement supérieure auxpossibilités de trouver un emploi.Ces deux pays présentent des systèmes de protection sociale comparables car financésprincipalement par les cotisations prélevées sur les salaires et gérées, en partie, par lespartenaires sociaux. Ils ont vu se développer des réformes visant à maîtriser les dépenses desanté et l'offre de soins. Il existe donc une rationalisation que nous qualifierons de« rationalisation a posteriori ». Ces pays sont caractérisés par une densité élevée demédecins que certains qualifient de « pléthore », et par des modalités de rémunération desmédecins à l'acte plus ou moins encadrées. Tout se passe comme si la régulation de l'offre desoins et sa dimension démographique avaient été installées tardivement dans l'histoire dusystème de santé mais aussi dans le processus de formation des professionnels.Les États-Unis, enfin, arrivent en cinquième position parce qu'ils présentent une situationfaiblement régulée à l'accès aux études ou au marché du travail sauf à considérer le poids nonnégligeable de Medicare dans le financement des postes de résidents par le biais des DRG27.

Ce sont actuellement principalement les Managed Care Organisations, à la recherched'efficience, qui introduisent des éléments de régulation sur le marché du travail enréaménageant l'offre de soins et l'organisation du travail qui lui est associée. L'organisationdes soins et la redéfinition de la place respective des différents professionnels qu'ellesinduisent semble constituer un facteur récent et important qui a des effets sur la démographiemédicale. Le modèle élaboré par le BHP vise à accompagner la réorganisation de l'offre desoins en prenant en compte le principe de la substitution entre les métiers du soin. Ce qui n'apu être fait par le plan Clinton, qui prévoyait entre autres une réorganisation de l'offre de soinsen faveur des soins de première ligne, semble donc être mis en œuvre par le biais du marché.Les facultés de médecine et les hôpitaux universitaires doivent suivre l'évolution de lademande et adapter leur offre de formation en conséquence.

La diversité constatée entre les pays peut s'expliquer au regard de trois dimensionsprincipales macro systémiques qui sont :

- l'introduction d'un acteur régulateur, différent du marché ou non, distinction quicaractérise les États-Unis par rapport aux autres pays ; en l'absence de régulateurs, ce sont lesjeux d'acteurs au sein d'un marché qui vont orienter les politiques de régulation desprofessions de santé. Autrefois principalement contrôlée par la profession, la régulation de ladémographie médicale paraît aujourd'hui dominée par les Managed Care. Quand la plusgrande partie des ressources consacrées au risque maladie est collectivisée, soit par l'état, soitdans le cadre d'un système paritaire, les mécanismes visant à réguler la démographie médicalesont plus développés et à l'échelon du pays dans son ensemble.

- l'organisation générale du système de soins au regard de la distinction classique entre

système de protection sociale béveridgien (financé par l'impôt et contrôlé par des instances étatiques

censées incarner l'intérêt général) et système de protection sociale de type bismarckien (financé par les

cotisations sociales et contrôlé par les partenaires sociaux dans une forme de démocratie sociale). Plus

27 Diagnosis Related Group, mécanisme de paiement forfaitaire ex ante à la pathologie mis en place par la

241

le système de protection sociale est régi par l'état, plus les mécanismes de régulation sont installés

précocement et interviennent à tous les niveaux. Dans le cas d'un système de protection sociale cogéré

par les partenaires sociaux, ces derniers agissent sur les leviers à leur disposition, à savoir

principalement le conventionnement.

- l'organisation politico-administrative du pays, notamment en ce qui concerne son niveaude centralisation. Dans le cas des pays décentralisés, comme l'Allemagne et la Belgique, lacompétence de l'éducation est du ressort des communautés et constitue alors un enjeu dansune logique communautaire qui rentre en contradiction avec l'objectif national de protectioncontre le risque maladie et de solidarité nationale. Les mécanismes de régulation de ladémographie apparaissent alors comme des compromis entre ces deux logiques.

On peut alors en déduire que les mécanismes de régulation de la démographie desprofessions de santé sont étroitement liés à l'histoire des systèmes de santé, à leur architectureinitiale et à la configuration générale de l'organisation administrativo-politique du pays,notamment la distribution des compétences concernant la santé et l'éducation entre le niveaucentral et le niveau régional.

En France, la régulation de la démographie est principalement réalisée par le numerusclausus lors de l'entrée à l'université et le concours de l'internat qui constitue une régulation deplus en plus fine, depuis la récente création de filières spécifiques pour l'anesthésie, lagynécologie obstétrique et la psychiatrie. Cette régulation précoce mais incomplète parcequ'elle ne porte pas sur l'accès au conventionnement, ni sur l'installation s'expliquecertainement par le caractère centralisé de l'organisation administrativo-politique de la Franceet le caractère « bismarckien » de son système de protection sociale. Les mécanismes derégulation ont été installés tardivement non sans mal et principalement sur le versant de laformation initiale, levier d'action contrôlé par l'état.

La France se situerait alors à mi-chemin entre les deux pays que l'on peut qualifier derégulateurs complets et les deux pays suivants que l'on peut qualifier de régulateursincomplets. Les récentes réformes, introduites par les ordonnances de 1996, et les réformesprécédentes vont dans le sens d'un plus grand pilotage du système de santé par les institutionspubliques telles que le parlement qui vote l'ONDAM et les Agences régionales del'hospitalisation qui ont désormais la tutelle sur l'offre de soins privée et publique avec pourmission de procéder aux restructurations et fusions entre établissements considérées commenécessaires. Les réformes visent aussi à transformer l'organisation de l'offre de soins par lebiais des réseaux de soins.Comme dans tous les pays étudiés, on assiste également à une féminisation croissante ducorps médical, une revendication des jeunes médecins à travailler dans d'autres conditions queleurs aînés, à la spécialisation des professionnels dans un contexte général d'urbanisationcroissante de la population et donc, bien entendu, aussi des médecins. Les thèmes de lapérinatalité et des urgences illustrent ces tendances et se traduisent généralement par desalertes à la pénurie de médecins et aux fermetures de structures hospitalières publiques etprivées qui s'annoncent et ce, d'autant plus que l'allongement de la durée de vie et son cortègede maladies chroniques vont exercer une pression croissante sur la demande de soins.

Eut égard aux évolutions qui semblent prendre place dans le système de santé français, le

Health Care Financing Administration pour s'assurer de la maîtrise de croissance des dépenses hospitalières.

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renforcement de l'appareil de régulation de la démographie des professions de santé paraît probable. À

la lumière des modèles étudiés, deux éléments importants semblent devoir être pris en compte pour

mieux réfléchir à une autre régulation de la démographie des professionnels en France, qui sont :

- le lien avec les transformations de l'organisation de l'offre de soins et de l'organisation dutravail qui s'opèrent actuellement au sein des projets de restructuration et des projets deréseaux de soins. La répartition des tâches et des fonctions des différents intervenants autourd'un patient pour un objectif de soin ou de santé qui s'opère sur le terrain d'expérimentationque constituent les réseaux de soins ou d'hôpitaux s'apparente à un rythme différent et dansune logique d'expérimentation aux réorganisations que pilotent les Managed Care aux États-Unis avec une finalité principalement économique et de façon brutale. Néanmoins, commeaux États-Unis, ces réorganisations peuvent être utilement prises en compte pour réfléchird'une façon plus globale à la planification du nombre de professionnels de santé nécessaires àl'avenir ;

- les modalités d'association du monde professionnel dans son ensemble, et pas uniquementdu monde universitaire, à une autre régulation de la démographie médicale. La participationdes instances représentatives professionnelles aux processus d'estimation, de planification etde formation des professionnels de santé est importante dans les pays qui mettent en place desmécanismes de régulation développés. On peut dès lors imaginer qu'une réorganisation desprocessus de régulation des professions de santé pourrait utilement s'accompagner d'uneredéfinition des modalités de partenariats avec les instances représentatives desprofessionnels.

Enfin, la régulation de la démographie des professions de santé s'inscrit dans un cadre quidoit aussi intégrer la régulation économique. Ainsi, en référence au modèle de l'entreprise, onne peut dissocier la politique de gestion des ressources humaines de la politique salariale. Lesystème de santé n'est pas une entreprise et les médecins ne sont pas des salariés mais destravailleurs indépendants. Il s'agit dès lors d'imaginer les conditions d'un partenariatpermettant d'articuler au mieux les exigences collectives d'égalité d'accès aux soins pour tousavec la préservation d'une indépendance de la profession assumant, par ailleurs, sa part deresponsabilité vis-à-vis de la nation. Tous les pays étudiés ont été et sont, d'une façon ou d'uneautre, confrontés à cet enjeu qu'ils ont résolu avec des arbitrages très différents selon les cas.