1er ACCÉLÉRATEUR DE PROJETS – 7 décembre 2010
De quoi parle t-on ?
L’équipe Liens.coop a été heureuse de présenter le 7 décembre 2010 une dizaine de projets lors d’un
accélérateur de projets au Comptoir Général. Ceci pour faciliter le développement de projets qui
mettent en place de nouveaux usages constitutifs de nouvelles pratiques de société pour le
mieux vivre ensemble. Ces projets s’intéressent au logement, l’alimentation, l’environnement, la
famille, l’emploi, le handicap et le lien social.
Cette rencontre a aussi été le résultat d’une année de travail qui a été lancée par la dynamique LIENS
qui devient un programme expérimental de la FING en 2011.
Les projets que les participants ont découverts sont parfois très décalés de la norme et des pratiques
habituelles. C’est justement parce que nous entrons dans des modèles d’organisation disruptifs,
où les porteurs ont su profiter des dernières technologies numériques pour développer de
nouvelles pratiques sociales. Ces porteurs nous aident à imaginer les moyens de "régénérer la vie
sociale, la vie politique et la vie individuelle" (Edgar Morin) en développant plus de lien, de
proximité, d'association.... En quelque sorte, ils vous proposent de nouveaux usages qui laissent
entrevoir les futures pratiques constitutives de notre société de demain.
Avec qui ?
70 participants aux compétences diverses ( entreprises, chercheurs, entrepreneurs, start-up, artistes,
collectifs, designers, innovateurs, etc..) se sont positionnés autour de porteurs de projet d'innovation
sociale durant trois sessions et tenteront de lui donner un coup de pouce. Les participants viennent
pour comprendre les projets d'innovation sociale en émergence, et aussi pour être acteurs de leur
accélération.
Pour quoi faire ?
Chaque participant fait des "propositions" aux porteurs : une étude ou un papier, une mise en relation,
un beta-test, une brique supplémentaire, un partenariat, une tribune, une aide à la promotion, etc. Des
pauses étaient prévues entre les sessions pour favoriser les échanges et poursuivre les
collaborations.
Les projets présentés :
Un jour à vendre
Mettre en relation les personnes qui désirent acquérir ou louer un bien avec la personne qui
posséde ou occupe ce bien.
L'objectif du projet est de bâtir, dans chaque commune, une place de marché dans laquelle
propriétaires et candidats se trouvent et créent la relation. Ce projet permet de stocker les intentions
des individus dans leur désir d'acheter ou de vendre un logement. Avec ces intentions qui sont
stockées dans le temps sur la plateforme, les vendeurs ou acheteurs peuvent rentrer en contact et
ainsi discuter des possibilités de passage à l'acte de vente ou d'achat. Le but est de faciliter la mobilité
tout en recréant du lien social entre les particuliers à l'échelle locale.
Objectif social : Solidariser
Thématique : Habitat
Pays de développement du projet : France
Stade du projet : Expérimentation
-> Site internet
Super Marmite
Un réseau social de proximité pour acheter et vendre vos petits plats faits maison
Ce projet vise à mettre en lien les personnes qui seraient prêtes à cuisiner pour les autres et ceux qui
sont à la recherche d'une nourriture maison abordable. Cette initiative utilise le réseau social pour
trouver les petits plats près de chez soi. Les commentaires et les notes des acheteurs de repas
deviendront des indicateurs de confiance et de reconnaissance des qualités culinaires de chacun.
Tout cela couplé à un outil de géolocalisation pour trouver les cuisiniers les plus proches.
Objectif social : Solidariser
Thématique : Alimentation
Pays de développement du projet : France
Stade du projet : Expérimentation
-> Site internet
Watch
Créer la plus grande communauté en ligne de sentinelles de l’environnement.
Offrir non seulement un espace local d’expression accessible à tous, experts comme simples
observateurs, mais aussi un outil de synthèse et de visibilité unique qui permettra d’extraire et de
hiérarchiser les actions et problématiques environnementales à partir des observations de la
communauté de sentinelles.
Objectif social : Mobiliser et inspirer
Thématique : Ecologie
Stade du projet : Conception
My Recycle Stuff
Réseau d'échange et de troc
My Recycle Stuff, un réseau d'échange et de troc sans transaction monétaire, pour échanger les
produits que l'on n'utilise plus. En plus d'être agréable et communautaire, ce site développe des outils
qui permettent par exemple de connaître l'éloignement de la personne avec qui l'échange se crée et
de déterminer son impact écologique.
Objectif social : Ressourcer
Thématique : Ecologie
Stade du projet : Programme en place
-> Site internet
Yoocasa
Un espace convivial, intime et sécurisé qui permet à l'enfant de continuer à développer ses
relations avec son entourage familial distant
En proposant d’aller plus loin dans l'échange que ce que propose Skype, et en permettant une plus
grande interactivité et une meilleure protection que les réseaux comme Facebook, Yoocasa offre aux
familles un système de visioconférence associé à un ensemble de services en ligne et de contenus
ludiques pour favoriser la continuité du contact avec la famille.
Objectif social : Solidariser
Thématique : Famille
Pays de développement du projet : France
Stade du projet : Programme en place
-> Site internet
IDACT
Le projet s'appelle IDACT (des idées aux actes) et il a pour but d'aider les personnes
malvoyantes à se déplacer dans les lieux publics au moyen de plans adaptés à leur handicap.
Le manque de plans adaptés pour utiliser les transports en commun et d'autres lieux est un réel
problème de mobilité et d'autonomie pour la population malvoyante. IDACT a développé une
application iPad contenant une base de donnée de plans en tirant partie des progrès technologiques
actuels comme le tactile, l'audio, le contraste et le zoom qui facilitent énormément la lecture des
déficients visuels. Des fonctions ludiques et pédagogiques pour faciliter la reconnaissance des lieux
ont été ajoutées.
Objectif social : Convivialiser
Thématique : Justice sociale
Pays de développement du projet : France
Stade du projet : Expérimentation
Financement intergénérationnel
Prêt sur hypothèque et mutualisation des intérêts
Des personnes âgées ayant des économies ou une maison qu'ils peuvent hypothéquer prêtent aux
jeunes générations, avec l'aide d'une banque mutualiste. Durant toute la durée du prêt, elles profitent
ainsi des taux d'intérêts comme complément de retraite. En cas de décès, la banque mutualiste
assure la continuité du prêt et récupère les intérêts pour créer un fond mutualisé à destination de
l'aide aux personnes âgées.
Objectif social : Solidarité
Thématique : Finance
Pays de développement du projet : France
Stade du projet : Conception
Courtage solidaire
Faciliter le courtage en ligne et reverser les commissions.
Ce projet vise à développer des sites facilitant l'aide à la recherche de crédit, placement, ou
assurances. Les commissions de courtage financier touchées sont alors à redistribuer par le
particulier à l'ONG de son choix.
Objectif social : Solidarité
Thématique : Finance
Pays de développement du projet : France
Stade du projet : Expérimentation
Everybody
Connaitre ses talents
Evaluation participative sur une plateforme web des compétences de chacun. C'est la communauté
d'amis ou de relations professionnelles qui va déterminer par différents moyens (commentaires, etc..)
les capacités de l'individu sur un sujet (ex : Savoir cuisiner, développer un programme, savoir prendre
soin, etc...). Cela permettra à ceux qui ont développé de manière autodidacte des compétences de
pouvoir les valoriser Pour les exclus du monde du travail et les sans diplômes, ce projet permettrait
de leur donner un moyen d'accès à un emploi par la reconnaissance de leurs compétences de
manière visible et crédible.
Objectif social : Mobiliser et inspirer
Thématique : Emploi
Pays de développement du projet : France
Stade du projet : Conception
La ruche qui dit oui
Organiser les achats directs entre producteur et consommateur locaux
Une kg de fraise : 3€ chez le producteur. 7€ au supermarché. "la ruche qui dit oui" propose un service
qui met en relation directement une communauté d'acheteurs avec un producteur local. A partir du
moment où un certain nombre de personnes vivant à proximité ont indiquées leur intention d'acheter
d'un produit sur la plateforme, une personne se charge de faire la réception puis la répartition des
produits directement du producteur vers le voisnage. Le site permet de mutualiser les intentions pour
faire de l'achat groupé et gérer la distribution, le tout à une échelle très locale.
Objectif social : Mobiliser et inspirer
Thématique : Alimentation
Pays de développement du projet : France
Stade du projet : Expérimentation
-> Site internet
Reconnect
Coffre-fort numérique
Les personnes en situation de précarité sont régulièrement confrontées à la perte ou au vol de leurs
papiers personnels les plus précieux (papiers d’identité, titres de séjour, de travail etc).
Les travailleurs sociaux passent ainsi de nombreuses heures à faire, refaire et rassembler les
documents administratifs personnels de leurs usagers afin de constituer les dossiers leur permettant
d’accéder à leurs droits. Le Coffre-fort numérique Reconnect est un outil de numérisation, de stockage
et de travail social visant à faciliter l’accès aux droits des plus précaires.
Objectif social : Démocratiser
Thématique : Justice sociale
Pays de développement du projet : France Stade du projet : Conception
Quels types de propositions pour les porteurs de projets ?
⇒ Idée de partenariats
⇒ Idée pour mieux communiquer
⇒ Idée pour gagner en visibilité
⇒ Idée pour utiliser les médias
⇒ Utiliser mieux les médias sociaux d’Internet
⇒ Idée pour toucher d’autres usagers
⇒ Mobiliser des compétences et des ressources
⇒ Mise en relation
⇒ Mesure de l’impact social et sociétal
⇒ Terrain d’expérimentation
⇒ Recherche de financement
⇒ Modèle économique
⇒ Système contributif, participatif
⇒ Système de monnaie complémentaire
⇒ Implication des entreprises
⇒ Pistes de partenaires opérationnels et technologiques
⇒ Éclairages juridiques
⇒ Opportunités d’action : réglementation, appel à projets
⇒ Rapprochement avec d’autres porteurs
⇒ Conseils de développement et d’amélioration
⇒ Conseils méthodologiques
⇒ Référencement
⇒ Astuces
⇒ Gagner en crédibilité
⇒ Idée d’outils, de plates-formes
⇒ Outils ludiques
⇒ Conseils en positionnement
⇒ Détournement d’usage
⇒ Proposition d’interface
⇒ Créer de la proximité
⇒ Système démocratique
⇒ Amélioration de la représentativité
⇒ Idée de tests croisés
⇒ Pistes de création de dynamiques autour du projet
⇒ Mobiliser les usagers
⇒ Se différencier
⇒ Dispositifs de logistique innovants
⇒ Réseaux, utilisation des communautés existantes
⇒ Priorisation des actions
⇒ Mise en garde
Quelques pistes pour mieux accompagner ces projets? Merci à François Malinvaud, porteur du projet ‘un jour à vendre’ pour ses conseils à ce sujet.
En ce moment historique de tension sociale et écologique et face au potentiel immense de ces
initiatives d'innovation sociale, de nombreuses opportunités sont à saisir par les réseaux
d'accompagnement, pouvoirs publics, associations et entreprises pour favoriser ces projets...
A ce sujet, voici quelques réflexions sur les moyens de mieux faire émerger et accompagner ces
projets d'innovation sociale :
Pour aider à la conception :
-> Des espaces de rencontre animés "ouverts" et multidisciplinaires (comme la Cantine, les
Carrefours des possibles).
-> Développer des méthodologies de co-création avec les usagers pour vivre, penser et agir avec.
-> Des financements "innovants" qui permettent au porteur de projet de mûrir et concevoir son
initiative avec du temps (aujourd'hui, ce sont les ASSEDIC qui financent l'innovation sociale)
-> Faciliter les collaborations entre projets (repenser les concours ou appels à projets sociaux qui
mettent en concurrence des porteurs de projet au lieu de les associer. Développer des lieux de
rencontres dans le réel ou sur le net entre les porteurs.
-> Amener vers les enjeux sociaux plus complexes (l'innovation sous contraintes sociales fortes est la
plus disruptive et est parfois adaptable à l’ensemble de la société )
-> Des passerelles pour passer le relais entre concepteurs et entrepreneurs... Un innovateur (celui qui
a trouvé le concept) n'est pas toujours un entrepreneur.
Pour aider à l'expérimentation :
-> Développer les communautés d'usagers, qui conçoivent, contribuent, utilisent, ou même financent
les projets.... de la conception à l'essaimage (exemple des communautés du logiciel libre...de
wikipédia...des "Transition Towns"). Souvent dans ces projets, le modèle économique se trouve
quand il y a un sentiment d'appartenance fort du projet au sein de la communauté (logique "libre", de
transparence, de confiance, de financement participatif).
-> Trouver des terrains d'expérimentation (où les projets peuvent être testés avec des usagers, de la
conception au développement, avec des méthodologies du design social, des méthodes de
développement agile, du dialogue social).
-> Créer des espaces de rencontre avec les entreprises et les collectivités locales pour nouer des
partenariats.
Pour aider au développement de l'entreprise :
-> Donner une légitimité nationale et une notoriété locale aux projets.
-> Favoriser l'accompagnement du projet (financement, hommes)
-> Avoir des professionnels de l'entrepreneuriat, capables de faire passer à l'échelle, essaimer le
projet...
-> Les modèles économiques sont totalement disruptifs. Il faut développer une ouverture d'esprit de la
part des financeurs. Citation d'un porteur de projet : l'innovation sociale est encore pensée en termes
économiques. Elle cherche à s’intégrer au tissu économique, plutôt qu’elle ne cherche à l’intégrer...
Or, l'innovation économique, qui prédomine actuellement, doit être au service de l'innovation sociale
(wikipédia n’a trouvé son modèle économique que quand il y a eu un sentiment d'appartenance fort de
la communauté au projet social).
En conclusion :
Le potentiel de développement est là, des opportunités sont à saisir par tout un chacun, nous avons
jeté des ponts en votre direction. Il s’agit maintenant de continuer ce travail et d’imaginer les
dispositifs innovants pour favoriser l’émergence et le développement de ces concepts, projets,
dynamiques et pratiques associées favorisant le mieux vivre ensemble.
À propos du programme "LIENS" de la FING pour 2011
Face à un tel potentiel d’innovations sociales et après une année passée à détecter des projets et
méthodologies innovantes, le programme LIENS va continuer à accompagner l'émergence de projets
d'innovation sociale qui favorisent le mieux vivre ensemble.
Mais comment permettre l'émergence de plus de projets qui répondent à des problématiques sociales
fortes, au point de faire des sujets sociaux un sujet d'innovation plutôt que de réparation ? A l’image
des projets comme IDACT, qui amènent des solutions utiles à tous ? Pour tenter d'y répondre, LIENS,
au-delà d'événements autour de projets existants, va organiser des groupes de travail qui permettront
l'émergence de projets socialement innovants en co-création avec des usagers soumis aux fragilités
les plus fortes. LIENS tentera ainsi d’agrandir le cercle des projets innovants en travaillant avec un
public plus large et sur un territoire donné, de façon à augmenter le cercle de création de projets
innovants socialement, et à faciliter le développement d’une notoriété locale aux projets.
Ces groupes de travail seront composés d’innovateurs sociaux, experts et usagers et travailleront à
partir d’un territoire de la ville de Paris.
En parallèle et dans la continuité de ce premier accélérateur de projets LIENS continuera de co-
organiser avec d’autres communautés des événements pour soutenir les projets.
Aussi un groupe de travail explorera avec le Groupe SOS et des acteurs du crowdfunding comment
mieux financer les projets aux différents stades d’avancement.
LIENS profitera par ailleurs d’une synergie avec Imagination for People et continuera ainsi de
bénéficier d’une veille continue sur les projets et les méthodologies innovantes.
Contacts :
FING – Programme LIENS : Eymeric Brunet-Lecomte, coordinateur du programme.
[email protected] - 0627641245
Imagination for People : Simon Sarazin, coordinateur France IP et en charge de la veille et de la
prospective pour LIENS.
[email protected] – 0684284240
Le programme LIENS est financé en 2010 par :
MANIFESTE LIENS
Nous percevons depuis quelques années l'émergence de concepts innovants qui favorisent le
développement de nouveaux projets pour le mieux vivre ensemble. Par les nouveaux usages qu’ils
développent, ces projets amènent de nouvelles pratiques culturelles qui nous intéressent dans la
mesure où elles favorisent un mieux vivre ensemble : une société plus en confiance, attentive à
l’autre, respectueuse de l’environnement, co-construisant un monde durable et créatif. Par exemple, la
location ou le troc d’objets entre particuliers, avec des projets comme My Recycle Stuff, Snapgoods
ou Zilok, nous réapprennent à échanger ou partager nos biens avec les autres. Ces pratiques
culturelles n’ont fondamentalement pas besoin des technologies numériques. Ce sont pour la plupart
des pratiques anciennes que les communautés humaines avaient développées pour des raisons
économiques, religieuses, morales ou de proximité. Néanmoins, ces pratiques ont été perdues au fil
de deux siècles d’industrialisation massive et de progrès technologiques sans précèdent. Pour
retrouver ces pratiques culturelles qui font société, de nombreuses voies y compris politiques sont
proposées. Notre propos n’est pas d’investir ce débat mais plutôt de comprendre quels usages des
technologies numériques sont constitutifs de pratiques culturelles favorisant le mieux vivre ensemble.
Ces technologies outillent comme jamais la communauté humaine à l’heure où celle-ci cherche à
recréer de la transparence, de la proximité, du lien.
En effet, la puissance des technologies relationnelles issues du numérique (réseaux sociaux, internet,
mobile...) est telle qu’elles permettent de développer de nouvelles pratiques sociales au sein de
communautés très larges (régionales, nationales, internationales..). Le numérique peut même
s’effacer une fois la pratique sociale enracinée (exemple : les Jeudi de la colocation à Paris où 500
personnes se réunissent chaque mois dans un même lieu pour trouver des colocataires).
Par essence les technologies relationnelles sont des leviers de capacitation, de créativité, de
collaboration et d’appropriation : "au niveau de la création, les technologies numériques nous outillent
de mieux en mieux et permettent à un plus grand nombre d’acteurs d’intervenir dans l’innovation. Au
niveau de l’appropriation, Internet permet une large diffusion et appropriation par le plus grand
nombre. Il facilite l’émergence de nouveaux modèles économiques et de nouvelles pratiques (Jean-
Michel Cornu)"
Ces nouveaux modèles permettent de débloquer des situations...Là où les individus n’arrivent plus à
travailler ensemble, ils peuvent faciliter la création de la confiance ; lorsque le lien social a été perdu,
ils permettent de reprendre contact ; dans l’immobilisme ils facilitent le passage à l’acte ; face à
l’individualisme ils favorisent la mutualisation des moyens, etc...
Certains de ces concepts innovants sont si puissants qu’il a par exemple fallu tout juste 10 ans pour
avoir 13 millions d'articles sur Wikipédia en 200 langues. Dans le cas de cette encyclopédie,
l’utilisation de la technologie wiki a favorisé la pratique de collaboration, qui s’est elle même
généralisée à tous les domaines, puisque, de plus en plus, nous savons collaborer pour construire
des projets. Finalement, ces technologies peuvent parfois être le moyen de s’opposer à certaines
pratiques courantes qui isolent les individus, et elles permettent au final de réinterroger l’ensemble de
la société.
Or, des projets basés sur des concepts innovants du même type que Wikipédia se développent par
centaines ces dernières années, et se répartissent sur des enjeux aussi variés que la santé, le
logement, l’alimentation, l’éducation, la démocratie et la finance... (Voir à ce sujet l’annexe ci-
dessous). Ils introduisent de nouvelles pratiques sociales comme le partage avec son voisinage, les
contributions libres autour de projets de communautés, l’accès à une démocratie participative, la
consommation collaborative, des échanges de services et de biens au niveau local, du financement
participatif, etc... Les projets qui favorisent ces pratiques nous donnent des pistes intéressantes pour
réapprendre à faire société et mieux vivre ensemble.
Les porteurs de projets qui se projettent sur le chemin du futur l'ont bien compris, il ne s'agit plus de
réparer les problèmes sociaux en appliquant des "rustines" (exemple : donner des encyclopédies
gratuites aux plus pauvres) mais d'innover pour introduire de nouvelles pratiques culturelles, capables
d’anticiper les enjeux de société (exemple : aujourd'hui, tout le monde peut contribuer à améliorer la
connaissance de l'encyclopédie wikipédia, et en bénéficier librement).
Pour que ces projets fonctionnent et aient un impact social maximal, nous pensons qu’ils doivent être
réalisés dans des logiques contributives (co-construction, où les usagers peuvent à la fois être
concepteurs, contributeurs, utilisateurs voir même financeurs...) et favoriser l’appropriation de
l’initiative par une communauté.
Prenons l’exemple de “Couchsurfing”, un projet d’une dizaine d’années qui a su miser sur le
développement d'une communauté pour fonctionner et qui est aujourd’hui le premier site
d’hébergement entre personnes. Dans cette initiative, la communauté d'usagers conçoit, organise le
projet, l’utilise, et le finance. On s’aperçoit alors que le modèle est très proche de ce qui s’est mis en
place avec les communautés de Wikipédia ou de Linux : L'individu peut à la fois contribuer à la
conception du service (exemple : il peut commenter pour améliorer la conception du projet), participer
au travail sur le projet (exemple : en étant ambassadeur, pour par exemple aider les nouveaux
arrivants), être usagé (en se logeant ou en logeant des personnes via la plateforme), et même
financer le projet (par du don ou une adhésion). L'accès libre et la transparence sur ce type de projet
permet de faire grandir la communauté d'usagers et donc le nombre de personnes prêtes à faire vivre
le projet, le définir, le financer... Nous sommes alors dans des milieux "associés", les milieux qui ont
permis le développement des projets collaboratifs de grande envergure dans le monde du logiciel et
qui maintenant sont en train de se répandre à tous les domaines : l'agriculture avec les AMAP, les
jardins partagés avec les AJONC, la cuisine avec des projets comme Super Marmite, la production
d'objets avec les Fablab... Ces systèmes permettent une production collective de richesses, tout en
laissant l'individu autonome et créatif. A travers ces modèles de coopération, nous ne sommes plus
juste des consommateurs qui "achètent et jettent sans connaître l'impact de ce mode de
consommation", ou alors des personnes dédiées à un emploi "où nous ne sommes qu'une force de
travail réalisant des procédures dont nous n'avons ni le contrôle ni la connaissance", ou bien des
"chercheurs qui conçoivent puis développent des procédures que l'on impose aux travailleurs".... Mais
nous devenons à la fois les concepteurs, travailleurs et les usagers, avec une compétence à produire
du savoir, qui permet dans le même temps, de grandir soi-même et de rendre plus puissant le groupe
au sein duquel nous contribuons...
Au niveau des modèles économiques, on trouve le modèle de financement à partir du moment où les
projets associent des communautés fortement impliquées (et c'est le cas de nombreux projets web),
en engageant les individus à tous niveaux (de la conception, à l'usage, à la production jusqu'au
financement). D'ailleurs,si l'on ne laisse pas à la communauté le choix de trouver le modèle
économique du projet auquel elle est associée, on n'est déjà plus dans des logiques de co-création, et
l'on perd l'idée du "milieu associé" où l'individu s'élève en même temps que le groupe....Par exemple,
le projet "couchsurfing.org" fonctionne par l'"adhésion libre" ainsi que le don de la part de la
communauté. Aujourd'hui, il est impensable de voir disparaître le projet Couchsurfing, parce que ses
usagers sont prêts à tout pour qu’ils continuent. Exactement à la manière de Paul Jorion, qui est
aujourd'hui le chroniqueur le plus indépendant et le plus au service de ses lecteurs (il ne sert ni la
publicité, ni des intérêts financiers extérieurs). Il enseigne à sa communauté autant qu'il apprend
d'elle, il suffit pour cela de voir les centaines de commentaires de chacun de ses articles....
Aujourd'hui, la communauté ne souhaite pas voir disparaître ce travail d’éditorialisation de Paul Jorion,
et est prête à le financer. C’est ce qu’elle fait depuis un an à travers le système de don que l'on peut
voir sur le site.
Le modèle de développement et le modèle économique que nous exposons autour de ces projets
permet de tendre vers une économie plus humaine et plus démocratique reposant sur des modèles
d’organisation co-conçus avec les personnes et donc plus durables et plus adaptés aux usages.
Certains chercheurs parlent d'ailleurs d'un nouveau modèle de société, basé sur une économie de la
contribution, qui pourrait-être une troisième voie au tout "état" ou au tout "marché".
C’est cette approche que nous souhaitons explorer à travers LIENS, en favorisant deux choses.
Premièrement, l’émergence de projets à partir des enjeux sociaux les plus lourds, car il nous est tout
simplement insupportable de baisser les bras face à tant de souffrances humaines. Et il se trouve que
c’est l’innovation sous contrainte qui est la plus disruptive et bénéfique à tous.
En second lieu, l'accompagnement collectif de ces nouveaux projets qui donnent de nouvelles
réponses aux enjeux sociétaux actuels.
ANNEXE : Quelques exemples de projets innovants socialement:
Pour donner quelques éléments plus concrets, voici, sur la thématique très spécifique de l'écologie,
une vingtaine de projets qui utilisent des concepts innovants :
-> La ruche qui dit oui : Système d'achat groupé pour les fruits et légumes. -
-> ELSY : Acheter et vendre des produits faits main.
-> BikeHacks : Tout sur le hacking de vélo.
-> Snapgoods : Location d'objets entre particuliers. -
-> Getaround : Partage de voitures consistant à permettre aux gens de louer leurs voitures quand
elles ne sont pas utilisées.
-> Terracycle : Site qui permet d'organiser la collecte de déchets qui sont rachetés à la personne, puis
recyclés et vendus en produits finis.
-> Le potiron : Plateforme permettant de revendre ou d’échanger ses produits de jardin.
-> Livemyfood : Aller manger chez ses voisins.
-> Super-marite : Revendre des parts de ses plats à son voisinage.
-> Foodzie : Place de marché de produits locaux.
-> 1bog : Se regrouper pour financer l'achat de panneaux solaires et comparer ses consommations.
-> Freecycle : Site de dons d'objets inutilisés (9 millions d'objets par an).
-> Watch : Projet de développement d'une communauté de sentinelles de l'environnement.
-> ThredUp : Système d'échange d'habits.
-> Zilok : Système de location de particulier à particulier.
-> Monextel : Système en ligne de recyclage de téléphones portables au profit d'associations.
-> Urban garden share : Partage de jardins pour cultiver ensemble.
-> Landshare : Partage de terres disponibles non utilisées.
-> Teachstreet : Partage de compétences dans un quartier.
-> Instructable : Des milliers de vidéos et des tutoraux pour apprendre à réaliser ses objets soi-même.
La liste pourrait s’étendre encore sur plusieurs pages… et le même type de compilation de concepts
innovants pourrait se faire sur d’autres thématiques, comme la santé, le logement, l'éducation, le lien
social, etc...