Master en Sciences Cognitives, spécialité Neurosciences Cognitives
EHESS/ENS/Université PARIS 5
Année scolaire 2011-2012
EXPLORATION DE LA FOCALISATION
SUR SOI CHEZ DES SUJETS DÉPRIMÉS
UNIPOLAIRES ET BIPOLAIRES
ÉTUDE COMPORTEMENTALE ET ÉTUDE PAR IMAGERIE PAR
RÉSONANCE MAGNÉTIQUE
FRÉDÉRIC BRIEND
Stage effectué au Centre Emotion (CNRS USR 3246)
Sous la direction du Pr. Philippe Fossati
«A celui qui pense pour le plaisir de penser s’oppose celui qui pense sous l’effet d’un
déséquilibre vital.»
Cioran, Sur Les Cimes Du Désespoir, 1933
Remerciements
En préambule à ce mémoire, je souhaite adresser mes remerciements les plus sincères
aux personnes qui m'ont apporté leur aide et qui ont contribué à l'élaboration de ce mémoire.
Je tiens à remercier tout particulièrement le professeur Philippe Fossati, qui en tant que
Directeur de ce mémoire, s'est montrée à l'écoute tout au long de la réalisation de ce projet.
Dépassant le cadre de ces écrits, il restera scientifiquement un des leviers originels de mon
nouvel aiguillage dans les neurosciences cognitives. Une rencontre engageant tout un avenir.
Mes remerciements s’adressent également à Pauline Delaveau, qui plus que collègue
de bureau a été mon guide dans la jungle de SPM. Merci également aux Dr. Christian Even et
au Dr. Marie-Laure Clery-Melin de l’hôpital Saint Anne qui ont très gentiment collaboré dans
le recrutement de ce projet.
Je tiens à exprimer ma reconnaissance envers mes autres collègues de travail, Farah,
Dorothée, Mariam, Gilles, Pierre, Christine, qui ont eu la gentillesse de m’ouvrir à la vie
sociale du laboratoire, vecteur essentiel à l’épanouissement de ce travail.
Enfin, j'adresse mes plus sincères affections à toute ma famille et mes Amis, qui m'ont
toujours soutenu et encouragé au cours de la réalisation de ce mémoire.
A l’expérience littéraire, et tous les patients que j’ai pu voir : à cette humanité
dégagée.
Résumé
Contexte La frontière entre les états dépressifs dans les troubles de l’humeur
bipolaires (BP) et unipolaires (UP) est définie uniquement par les caractéristiques cliniques.
Cela conduit parfois à des erreurs diagnostiques et à une certaine confusion pour définir des
stratégies thérapeutiques appropriées. Nous proposons ici à travers l’exploration d’activation
cognitive avec des tâches de référence à soi de dégager des marqueurs neurobiologiques et
cognitifs pouvant aider à mieux définir et différencier les dépressions BP des dépression UP.
Hypothèse Nous faisons d’une part l’hypothèse que les patients déprimés bipolaires
vont traiter les informations positives liées au self (traits de personnalité positifs dans la tache
de référence à soi, et souvenirs autobiographiques positifs) différemment des informations
négatives et différemment des patients déprimés unipolaires et d’autre part que lors de la
tâche de référence à soi, une activation accrue au niveau des structures corticales médianes
(CMS) postérieures gauches et du cortex frontal médian sera montrée pour les bipolaires et
unipolaires par rapport aux contrôles.
Sujets et Méthodes Deux études sont réalisées. Pour la première étude,
comportementale, 18 patients (unipolaires UP n=12, bipolaires BP n=6) ont été recrutés au
cours d'un épisode dépressif majeur (EDM). Une tâche de référence à soi à partir de matériel
verbal (jugement d’adjectif) et une tâche de mémoire autobiographique ont été utilisées pour
comparer les deux groupes. Pour la seconde étude, d’imagerie (IRMf), 10 sujets sains et 4
patients (unipolaires UP n=3, bipolaires BP n=1) ont été recrutés au cours d'un épisode
dépressif majeur (EDM). Une tâche de référence à soi en IRMf a été réalisée pour différencier
les patterns d’activation des CMS pour les déprimés (UP et BP) des sujets sains.
Résultats Dans l’étude comportementale, on observe que les patients bipolaires
traitent différemment les souvenirs de valence positives que les déprimés unipolaires. Dans la
partie IRMf nous avons mis en évidence une plus grande activation de la partie ventrale du
cortex préfrontal médian dans la condition de référence à soi chez les déprimés par rapport
aux témoins.
Mots-clés : Conscience de soi, focalisation sur soi, dépression, dérégulation
émotionnelle, structures corticales médianes.
Sommaire
I. CADRE THEORIQUE 7
1. Cadre théorique 8
1.1 Le concept du soi 8
1.1.1 Définition du soi 8
Une unité dichotomique 8
1.1.2 Le soi et sa relation à la mémoire 10
Mémoire et effet de référence à soi (SRE) 11
*Corrélats mnésiques des SRE 11
La mémoire autobiographique et le soi 11
*Modèle de la mémoire autobiographique selon Conway 12
*Méthodes d’évaluation de la mémoire autobiographique 13
1.2 Investigation du soi en neurosciences cognitives 15
1.2.1 Bases neurales de l’effet de référence à Soi 15
1.2.2 Corrélats cérébraux associés à la mémoire autobiographique 15
1.2.3 Les apports de l’imagerie cérébrale : Le pattern cérébral du self et les structures corticales médianes
(CMS) 16
1.3 La dépression comme modèle d’étude du soi 17
1.3.1 Physiopathologie de la dépression 17
1.3.2 Intérêt neuropsychologique de l’évaluation de la focalisation sur soi en clinique pour l’étude du soi
19
Focalisation sur soi dans la dépression 19
Effet de référence à Soi dans la dépression 19
Mémoire autobiographique et dépression 20
Etudes d’imagerie cérébrale sur le soi et la dépression 21
*Structures corticales médianes et dépression 21
*IRMf et distinction de la dépression unipolaire et bipolaire 21
2. Objectifs et hypothèses 23
2.1Objectifs 23
2.2 Hypothèses 23
II. DEMARCHE SCIENTIFIQUE 25
A. ETUDE COMPORTEMENTALE 25
1. Matériel et méthodes 26
1.1 Sujets 26
1.2. Paradigmes expérimentaux 26
1.2.1Tâche de référence à soi 26
Phase d’étude : encodage incident. 27
Phase de test : Reconnaissance 28
1.2.2 Test de mémoire autobiographique 28
1.3. Analyse des données comportementales 29
2. Résultats de l’étude 1 : étude comportementale comparant des déprimés unipolaires et bipolaires 30
2.1. Tâches de référence à soi 30
Effet SRE en fonction de la valence chez les bipolaires et les unipolaires 30
Sommaire
Recherche de traitement des mots différents selon la valence chez les bipolaires et les unipolaires 32
2.2. Tâche de rappel en mémoire autobiographique 33
Effet de la valence sur les scores des caractéristiques de la MA 33
3. Discussion : étude comportementale comparant des déprimés unipolaires et bipolaires 38
Tâche de référence à soi avec du matériel verbal 38
Tâche de mémoire autobiographique 38
B. ETUDE D’IMAGERIE 40
1 Matériel et méthodes 41
1.1. Sujets 41
1.2. Paradigme expérimental 41
Tâche de repos (Resting state) 41
Tâche de référence à soi en IRMf 42
1.3. Analyse des données d’imagerie 43
Acquisition et pré-traitement des données d’imagerie 43
Analyses statistiques 43
2 Résultats de l’étude 2 : Tâche de référence à soi en IRMf comparant des patients déprimés unipolaires et
bipolaires par rapport à des témoins 45
2.1 Profils des réponses d’activation 45
Activité cérébrale chez les sujets sains 45
Activité cérébrale chez les patients déprimés 47
Associations et dissociations fonctionnelles qualitative entre les groupes 49
3.2.2 Comparaison inter-groupe (déprimés vs témoin) 50
3. Discussion : étude d’imagerie comparant des sujets déprimés à des sujets sains au niveau des CMS 52
III. LIMITES GENERALES DES DEUX ETUDES 54
IV. CONCLUSION 56
REFERENCES 58
ANNEXE 67
Cadre théorique
8
1. Cadre théorique
1.1 Le concept du soi
1.1.1 Définition du soi
Une unité dichotomique
Le soi1 est un sujet de réflexion ancien au carrefour de la philosophie, de la
psychologie et plus récemment des neurosciences, il constitue donc un thème de choix en
sciences cognitives. Cependant là où les articles sur le self se concentrent sur sa nature, sa
structure, et son rôle, nous l’utiliserons plutôt en tant que méthode d’investigation pour
comparer la dépression unipolaire de la dépression bipolaire.
Le soi est une entité multiforme qui ne possède pas aujourd’hui de description claire et
précise (Klein, 2012). Ainsi, pour nous, le terme « soi » signifie « ce que (je) suis » (Legrand,
2004) c'est-à-dire ce à partir duquel on se représente et se détermine comme un individu
distinct d’autrui. Le « je » est ici mis entre parenthèses pour ne pas contraindre cette définition
du soi à la grammaire. Nietzsche déjà dans son œuvre Par-delà le bien et le mal. Prélude d'une
philosophie de l'avenir (1886), avait souligné la nature fictionnelle du « je » : « On disait :
« Je », condition, — « pense » attribut, conditionné. Penser est une activité, à laquelle il faut
supposer un sujet comme cause. On tenta alors, avec une âpreté et une ruse admirables, de
sortir de ce réseau ; on se demanda si ce n’était pas peut-être le contraire qui était vrai :
« pense » condition, « je » conditionné. « Je » ne serait donc qu’une synthèse créée par la
pensée même ».
La position de D. Dennett (1992) sur la nature fictionnelle du soi est intéressante à cet
égard. Ce dernier insiste en effet pour remettre en question l'unité du soi comme le centre de
gravité d'un objet, plus spécifiquement comme le centre de la fiction narrative que serait
l'autobiographie. Le soi serait le résultat de la recherche de cohérence des individus lorsqu'ils
se racontent leur propre histoire. Cette conception peut être rapprochée de celles de Hume
(1739) qui ne voyaient dans le soi qu’une agrégation d’expériences sensorielles.
Véridique ou illusoire, le soi repose sur la reconnaissance de soi-même à travers le
temps, comme le même « soi » qui a accompli un acte dans le passé et qui s'en souvient
maintenant. Ce qui est important à ce niveau est que notre expérience phénoménologique du
soi consiste à nous considérer comme des personnes étendues dans le temps, c'est-à-dire avec
un présent, un passé et un futur propres. Cette continuité correspondant à la série de différents
états mentaux reliés entre eux par des relations causales, la mémoire étant la plus importante
de ces relations (Legrand, 2004).
Locke est probablement le premier à analyser l'identité de la personne pour elle-même
et non pour ce qu'elle peut apporter à la connaissance. De nombreux concepts du self ont
ensuite été développés, souvent dichotomiques, sous forme de soi comme unité. Le terme
« unité » est à comprendre dans le sens de « unifié » et non de « un ».
1 D'une manière générale, tout au long de ce travail nous utiliserons de manière univoque le
terme de « soi », de « self », et d’identité.
Cadre Théorique
9
« En vérité, il n’est pas de soi, même le plus naïf, qui soit un. » (Hesse, 1927)
En 2000, Gallagher a regroupé les différentes conceptions de la notion de soi en deux
concepts : le soi minimal (minimal self) et le soi narratif (narrative self). Le concept de soi
minimal correspond à la conscience de soi en tant que sujet de l’expérience immédiate. Le
concept de soi narratif se rapproche des concepts de Dennett (1991) de self narratif et de
l’extended self de Damasio, c'est-à-dire de la représentation de soi en tant qu’objet de
connaissances étendues dans le temps. En psychologie, cette division avait été faite par James
(1890) qui opposait un « je » (agent actif et sujet de la connaissance) qui agit dans le présent
avec un « moi » (structure passive, objet de la connaissance) qui explique cette action dans le
temps. Ainsi le soi narratif est un objet de perception (Kristoff et al.,2011).
Dans ce travail, le terme de « soi » doit être entendu par convention comme se référant
au soi narratif et non au soi minimal.
Le soi est à la fois un ensemble de représentations personnelles que l’on a sur soi-
même et la conscience réflexive qui lui est inhérente. Il est à la base de notre identité et de
notre sentiment de continuité au cours du temps.
Conscience de soi et représentations de soi
Le self est un concept qui découle de l’intrication de deux notions : la conscience de
soi, qui nous permet de focaliser notre attention sur nous-mêmes et nos contenus mentaux, qui
correspondent à un ensemble de représentations protéiformes de soi (Pinku et al., 2006).
La conscience de soi est une conscience de soi positionnelle, c'est-à-dire que le sujet se
constitue comme son propre objet d’observation. C'est la conscience réflexive (self-
awareness). On peut ainsi résumer cette idée par la formule de Deleuze : « Qui est Je ?, c’est
toujours une troisième personne. » (Deleuze, 1991). Cette conscience de soi rend possible la
chronesthésie (capacité à voyager mentalement dans le temps par la conscience autonétique,
cf. ch 1.1.2) et ce à partir d’indices de soi que sont les représentations de soi.
Le self repose donc sur des contenus mentaux, des représentations mentales que l’on a
de soi. Dans la littérature, ces contenus ont été appelés « concept de soi » (Hattie , 2003 ;
Conway, 2005) ou encore « connaissances de soi » (Wilson et al., 2004) et « Event-specific
Knowledge » (Conway, 2002). C’est la connaissance que le sujet a de lui-même, de son
autobiographie, elle est donc indissociable de la mémoire.
A l’interrogation de « ce que (je) suis ?», il revient donc de focaliser notre attention
sur la récupération de nos contenus mentaux portant sur nous-mêmes, soit sur des
informations stockées en mémoire.
Récemment, Klein (2012) a proposé une simplification du soi en définissant et
élargissant les composants essentiels de ce qui sous-tend l’unité du self. Sept systèmes
distincts et en interaction réciproque sont ainsi identifiés comprenant :
Cadre Théorique
10
1. Des souvenirs épisodiques d’expériences personnelles
2. Des représentations synthétiques de nos traits de caractère
3. Des connaissances sémantiques de faits personnels
4. L’expérience d’une continuité dans le temps permettant de relier le « je » qui se
remémore au « je » de l’événement remémoré.
5. Un sens de l’agentivité et de la propriété nous permettant de croire et/ou nous
donnant le sentiment d’être l’auteur de nos propres pensées et actions.
6. Une capacité de réflexion sur soi (métacognition)
7. Un self spécifique permettant de nous présenter et reconnaître notre propre corps.
Il transparaît dès lors que le self est un concept se définissant comme une structure
dynamique de processus cognitifs sur des représentations de soi stockées en mémoire (Duval
et al., 2007). La relation entre la mémoire et le soi est donc primordiale (4 premiers points du
système de Klein), nous allons donc ci-dessous détailler plus en détail cette relation.
1.1.2 Le soi et sa relation à la mémoire
Le philosophe John Locke est le premier à tisser un lien entre la mémoire et le Soi :
«l’identité personnelle n’est rien sans la mémoire». Par les liens qu’elle établit entre passé et
présent, elle est le support fondamental du sentiment de continuité de notre existence au cours
du temps. Une personne est un objet historique, seule la mémoire, et plus spécifiquement la
mémoire autobiographique permet de construire et de maintenir la connaissance de soi-même
à travers le temps.
Dérivées des processus mnésiques de la psychologie cognitive, deux sortes de
représentations du soi sont stockées en mémoire : Les représentations sémantiques et
épisodiques de soi.
La première sorte est celle appelée « concept de soi » ou « connaissance de soi »
(Hattie, 2003 ; Wilson et al., 2004 ; Conway, 2005) (e.g : Je suis une personne travailleuse),
elles sont formées à partir de l’abstraction des expériences vécues. Ces premières
représentations permettraient d’avoir le sentiment d’un self atemporel. Elle forme ce que nous
appellerons le self-sémantique.
La seconde conception (« Event-specific Knowledge » (Conway & Pleydell-Pearce,
2000)), regrouperait des informations personnelles précises et spécifiques spatio-
temporellement, relatives aux ressentis phénoménologiques des personnes (e.g: Je me
souviens du goût du café pris pour me revigorer de la fatigue de besogner sur mon rapport le 4
juillet dans ma cité universitaire). Ces représentations forment une identité plus malléable du
soi, se modifiant au cours des expériences (Lövdén, 2003). Il en résulte ce que nous appelons
le self-épisodique.
Cette binarité des représentations de soi est appuyée par les données de la
neuropsychologie clinique (Klein et al., 2002). Détaillons maintenant les différents moyens
d’étudier le self-sémantique (mémoire sémantique personnelle, self-knowledge ou self-
concept), et le self-épisodique (Event-specific Knowledge).
Cadre Théorique
11
Mémoire et effet de référence à soi (SRE)
Toute personne a remarqué qu’une information le concernant est mieux mémorisée
qu’une autre (e.g : Le café en agissant sur le locus coeruleus et ses récepteurs béta-
noradrénergiques augmente ma concentration pour contrer ma fatigue), ce phénomène est
appelé « effet de référence à soi » (Self reference effect : SRE) et est décrit dans une
abondante littérature (Craik & Lockhart, 1972 ; Rogers et al, 1977; Klein et al, 1986).
Les sciences cognitives ont mis en place des expériences pour étudier ce phénomène
par des tâches de référence à soi (self-referential task). Une tâche de référence à soi consiste à
évaluer la relation à soi (self-relatedness) d’un stimulus, quelque soit sa nature (Northoff et
al., 2006). Par exemple il est demandé à un sujet s’il peut ou non s’appliquer un trait de
personnalité (condition personnelle). La réponse du sujet dépend de la représentation qu’il a
de lui-même, c’est-à-dire du soi narratif qu’il a construit. Si ensuite, via une tâche contrôle de
jugement des mots de manière générale et impersonnelle (« Est-ce qu’il est bien en général
d’avoir ce trait de personnalité? »), on propose un test de reconnaissance sur ces adjectifs
faisant suite à un encodage incident (le sujet n’est pas prévenu de la nécessité de mémoriser
les stimuli en vue d’une reconnaissance ultérieure), les mots encodés en condition personnelle
sont en général mieux mémorisés que les adjectifs encodés lors d’une tâche de désirabilité du
trait.
*Corrélats mnésiques des SRE
Le bénéfice mnésique de l’effet de référence à soi serait dû à l’effet conjoint d’une
élaboration (association d’informations à un item) et d’une organisation (mise en relation des
items entre eux) accrues (Symons & Johnson, 1997). Au-delà de sa construction, l’Effet de
Référence à Soi souligne le rôle du Self comme guide au traitement de l’information.
La mémoire autobiographique et le soi
William James en rapportant le ressenti de « chaleur » et « d’intimité » compris dans
le souvenir des expériences vécues et en affirmant que la conscience de soi remontant vers le
passé via le souvenir autobiographique permet de fonder le soi, est le premier à relier le self
avec la mémoire autobiographique (Piolino et al., 2002).
La mémoire autobiographique est définie comme la capacité à récupérer des
informations portant sur soi (Piolino et al., 2002). Elle comporte: des événements
autobiographiques relevant de la mémoire épisodique (Event-specific Knowledge ) et des faits
autobiographiques (« concept de soi », , « connaissance de soi » mais en plus le nom de ses
amis, des villes parcourues, ...) relevant de la mémoire sémantique. Ces composantes
épisodiques et sémantiques s’inscrivent donc dans les deux aspects du self en relation avec la
mémoire.
Il existe plusieurs modèles cognitifs des structures des représentations mnésiques
autobiographiques, mais celui qui fait le plus lien avec le self et qui est largement discuté et
enrichi dans la littérature est celui de Conway (Conway et pleydell-Pearce, Conway, 2001).
Cadre Théorique
12
*Modèle de la mémoire autobiographique selon Conway
La mémoire autobiographique est ici vue comme un modèle hiérarchique dont la
définition selon Conway lui-même est « une dynamique transitoire de constructions mentales
générées à partir d'une base de connaissances de soi sous-jacente » (Conway and Pleydell-
Pearce (2000)) et dont la structure est présentée en figure 1.
Ce modèle postule que l’accès à un souvenir autobiographique épisodique passe par un
processus de reconstruction. Cette reconstruction du souvenir utilise des matériaux
autobiographiques appartenant à trois niveaux de spécificité croissante : connaissances
associées à une période de vie (« quand j’étais étudiant »), à un événement général (« faire ses
leçons ») et à des détails perceptivo-sensoriels associés à un événement spécifique (« le regard
de fierté de mes parents lorsque j’ai obtenu un diplôme »). C’est ce niveau phénoménologique
du souvenir qui est appelé « Event-specific Knowledge » et qui est présenté au niveau de la
mémoire épisodique dans le schéma suivant (Fig. 1).
Toujours selon Conway et Pleydell-Pearce, la construction d’un souvenir
autobiographique est issue de la relation entre ces trois niveaux et de leur recontextualisation.
La mémoire autobiographique est donc modelée comme une « capacité à » et non une «
capacité » contenant des souvenirs particuliers.
Cette reconstruction serait sous le contrôle d’un système exécutif central (« working
self ») qui guiderait, en fonction de la cohérence et de la correspondance du self actuel,
l’encodage et la récupération des souvenirs
Le modèle de Conway a été rapproché de celui de Tulving dans le sens où ces deux
approches fondent la mémoire autobiographique sur un double aspect sémantique et
épisodique. Cependant, Tulving (1985) caractérise la restitution consciente de connaissances
indépendamment des contextes spatiotemporels d’acquisition (la mémoire sémantique) par un
niveau de conscience dit noétique, et la capacité de revivre une expérience avec son contexte
phénoménologique d’acquisition (la mémoire épisodique, ou « Event-specific Knowledge »)
par un niveau de conscience autonoétique.
Cadre Théorique
13
Figure 1: Structure hiérarchique de la mémoire autobiographique. (Conway, 2005)
Ce dernier niveau de conscience correspond à la reviviscence des événements, celle du
« je me souviens », il implique un voyage mental temporel (chronestésie). Il permet
l’encodage et le rappel des événements personnellement vécus avec leur contexte
phénoménologique d’acquisition : (« je me souviens de la frayeur de la présoutenance, je me
revois répondre aux questions »). La conscience noétique est caractérisée par la mémoire des
faits, celle du « je sais », elle permet l’encodage et le rappel d’informations dépourvues de
référence à leur contexte d’acquisition (« je sais que 6x3=18 »). La mémoire
autobiographique constitue donc une source du sentiment d’identité. Ces différents niveaux de
conscience sont évaluables avec des tests de mémoire autobiographiques.
*Méthodes d’évaluation de la mémoire autobiographique
Cadre Théorique
14
Il existe plusieurs méthodes pour explorer la mémoire autobiographique (la méthode
des mots-indices de Crovitz et Schiffman 1974, l’épreuve de fluence verbale
autobiographique de Dritschel et al., 1992, le questionnaire AMI de Kopelman et al., 2001),
mais la méthode guidée par les conceptions les plus récentes de la mémoire épisodique
(Tulving, 2002) et de la mémoire autobiographique (Conway, 2001) est le Test Épisodique de
Mémoire du Passé autobiographique (TEMPau, Piolino et al., 2003).
Ce questionnaire mesure la nature épisodique des souvenirs autobiographiques, et
distingue les aspects sémantiques des aspects épisodiques. De plus ce test est le premier test
standardisé de mémoire autobiographique qui permet aussi d’évaluer l’état de conscience
autonoétique/noétique (paradigme « je me souviens/je sais », Tulving, 2002) et le point de vue
(autrement appelé la perspective du self : paradigme « acteur/spectateur », Nigro et Neisser
1983) pour chaque souvenir évoqué par le sujet.
Ce test (dont les principaux traits sont résumés en tableau 1) se concentre sur le self-
épisodique, les rappels d’informations autobiographiques sont cotés selon le niveau de
précision et d'épisodicité en fonction de la spécificité cotée sur une échelle de 0 à 4 (i.e. :
détails des souvenirs et précision spatio-temporelle).
Le paradigme « je me souviens/je sais » (i.e., remember/know=R/K) comporte une
auto-évaluation où le sujet doit exposer s’il reconstruit un souvenir autobiographique en le
revivant (Remember); ou s’il le sait de manière plus automatique, sans le revivre (Know).
Gardiner (1998) a ajouté la réponse ‘je suppose’ (Guess) afin d’exclure ces réponses de
l’analyse. Pour plus de sensibilité, ce paradigme est proposé pour les émotions, les faits,
l’endroit et la date du souvenir.
Le paradigme « acteur/spectateur » (i.e., field/observer) permet d’évaluer le point
de vue du self dans le rappel de souvenirs en caractérisant sa représentation mentale
correspondante. Lors de l’évocation d’un souvenir, le sujet doit préciser s’il voit la scène de
ses propres yeux, comme s’il revivait l’événement en tant que sujet/acteur, ou s’il se voit lui-
même dans la scène et joue alors le rôle de spectateur.
Par convention un souvenir est défini comme épisodique si sa récupération
s’accompagne d’un sentiment de reviviscence (réponse R), de spécificités de détails (=4) et
d’un point de vue acteur.
Cadre Théorique
15
Tableau 1. Caractéristiques de la mémoire autobiographique en fonction de la nature
de l’information, d’après Piolino 2003.
Les neurosciences ont plus récemment pris part au débat autour du self, en cherchant
ses substrats neuronaux. La prochaine partie illustre brièvement ce champ discuté dans les
neurosciences cognitives.
1.2 Investigation du soi en neurosciences cognitives
1.2.1 Bases neurales de l’effet de référence à Soi
Les techniques d’imagerie cérébrale fonctionnelle (TEP, IRMf) ont permis
l’investigation non invasive des bases neurales associées au SRE (Craik et al, 1999). Via des
tâches contrôle de comparaison n’impliquant pas la référence à soi (e.g. Déterminer s’il s’agit
d’un trait de personnalité socialement désirable ou non), des travaux plusieurs fois répliqués,
ont montré l’activation préférentielle du Cortex Médian-préfrontal (CMPF) lors du traitement
de stimuli en condition personnelle (Fossati et al, 2003 : Cortex préfrontal médian droit
quelque soit la valence des traits de personnalité; Kelley et al., 2002 : Régions orbitomédiane
et dorsomédiane du cortex préfrontal).
1.2.2 Corrélats cérébraux associés à la mémoire autobiographique
Dans une méta-analyse portant sur 24 études d’imagerie cérébrale fonctionnelle,
Svoboda et al. (2006) ont montré que le rappel en mémoire autobiographique activait de façon
robuste les structures corticales médianes (CMS) incluant les structures temporales, ainsi que
la jonction temporo-pariétale. Les régions cérébrales les plus régulièrement activées sont le
cortex préfrontal ventro-latéral (reconstruction du souvenir), le lobe temporal latéral (aspects
sémantiques) et médial (aspects épisodiques, i.e. l’hippocampe pour la reviviscence (Piolino
et al., 2009) et l’amygdale pour la composante émotionnelle.
Cadre Théorique
16
1.2.3 Les apports de l’imagerie cérébrale : Le pattern cérébral du self et les
structures corticales médianes (CMS)
La mémoire autobiographique est associée à la mémoire du self. Elle est ce centre de
gravité qui forme le soi.
Le self est une entité multiforme qui dépasse les aspects uniquement mnésiques
(Klein, 2012). Northoff et Bermpohl (2004) appellent self un ensemble de processus cognitifs
de relation à soi mis en jeu dans diverses activités cérébrales comme la conscience, les
émotions, la perception ou encore la mémoire autobiographique. Ainsi, la mémoire n’est
qu’un des aspects du self. Ces processus sous-tendraient l’implication commune d’un réseau
cérébral médian impliquant à la fois le cortex préfrontal, le cortex cingulaire, le précunéus et
formant un réseau cérébral spécifique (Northoff and Bermpohl, 2004; Northoff et al., 2006 ;
Whitfield-Gabrieli et al., 2011). Ce réseau, appelé réseau du self, serait constitué de quatre
régions principales associées à des processus spécifiques (dessinés en Fig. 2):
1. Le cortex préfrontal ventromédial ou orbitofrontal médial : Représentation
intégrative des stimuli reliés à soi.
2. la partie dorsale du cortex cingulaire antérieur : Monitoring : Processus de haut
niveau (contrôle de fonctions exécutives en référence à ses propres performances ou
comportements)
3. le cortex préfrontal dorsomédial : Evaluation : Raisonnement explicite et évaluation
des stimuli en référence à soi
4. le cortex cingulaire post : Intégration et contextualisation des informations en
référence à soi dans un contexte spatio-temporel.
Du point de vue fonctionnel, les CMS sont plus actives au repos (« resting-state ») que
lors de tâches impliquant le traitement d’informations externes (Gusnard et al., 2001). Ces
structures sont alors rapprochées au réseau du mode par défaut (DMN) qui se compose d'un
ensemble de régions cérébrales préférentiellement activé lors de tâches internes (Gusnard et
al., 2007 ; Whitfield-Gabrieli et al.,2010).
Les CMS peuvent donc être étudiées par imagerie lors de tâches d’activation
(référence à soi) ou de désactivation (=activité au repos – activité lors de la tâche). Farb et al.
(2007) ont associé les CMS au soi narratif, résultats en accord avec les travaux de Northoff et
Bermpohl (2004).
Cadre Théorique
17
Figure 2 : Processus de référence à soi dans les structures corticales médianes
(CMS). OMPFC : cortex orbitofrontal médian (fragment de BA10, 11, 12). DMPFC : cortex
médian préfrontal dorsal (fragment de BA 9 et 10). AC : Cortex cingulaire antérieur
(fragment de BA 24 et 32). PC : cortex cingulaire postérieur (fragment de BA 23 et 31 +
cortex rétrosplénial en BA 29 et 31) et depuis 2006, le précunéus (partie médiane du cortex
pariétal).
La rareté de lésions focales du CMPF au sein des structures corticales médianes a
limité l’apport de la neuropsychologie dans l’identification des bases cérébrales de la
référence à soi (Summerfield et al., 2009). Toutefois, l’application de l’imagerie cérébrale
fonctionnelle au domaine des troubles mentaux a connu un essor parallèle à l’investigation du
soi. Ainsi, certains auteurs ont assimilé des troubles mentaux à des lésions cérébrales du soi
pour l’étudier sous l’angle de la neuropsychologie.
1.3 La dépression comme modèle d’étude du soi
1.3.1 Physiopathologie de la dépression
La dépression est un trouble de l’humeur caractérisé par un épisode dépressif majeur.
Le diagnostic d’un épisode dépressif majeur selon le DSM-IV (cf. Annexe 4) est basé sur la
persistance d’un état de tristesse en association avec des troubles de l’attention, de la
motivation, des troubles moteurs et de la rapidité mentale, du sommeil, de l’appétit et de la
Cadre Théorique
18
libido. On peut observer également une anhédonie, des signes d’anxiété, de culpabilité
excessive ou inappropriée, des idées de mort récurrentes avec des idées suicidaires (Spitzer et
al. 1992).
Les deux principaux diagnostics faisant suite à un trouble de l’humeur sont la
dépression unipolaire et la dépression bipolaire. La forme bipolaire est constituée
d’alternance d’épisodes maniaques ou hypomaniaques (manie : bipolaire de type I,
hypomanie : bipolaire de type II) et d’épisodes dépressifs séparés par un intervalle, ces phases
sont illustrées via l’encadré rouge de la figure 3. La forme unipolaire est quant à elle définie
par la survenue répétitive de phase dépressive illustrée ci-dessous via le rectangle violet.
Selon Cardoso de Almeida et Phillips, une approche dimensionnelle (génétique, moléculaire,
neuronale, et comportementale) des troubles de l’humeur permettrait de redéfinir la bipolarité
en termes de processus physiopathologiques sous-jacents et ainsi de différencier avec plus de
précisions la dépression bipolaire par rapport à la dépression unipolaire.
Figure 3 : A : Caractéristiques des troubles de l’humeur au cours de la
maladie. B : Approche dimensionnelle de la dépression bipolaire, affectant
différents processus pathophysiologiques : I : système de valence négative; II :
système de valence positive; III : système cognitif, IV : système de processus
Cadre Théorique
19
social, V : système de régulation/excitation, d’après Cardoso de Almeida et
Phillips, 2012
Afin de différencier ces deux troubles de l’humeur, des études se sont récemment
concentrées sur la dérégulation émotionnelle des bipolaires, plus spécialement sur
l’hyperréactivité émotionnelle comme endophénotype des patients bipolaires. A savoir des
réponses émotionnelles plus intenses pour les stimuli positifs (Johnson, 2005).
1.3.2 Intérêt neuropsychologique de l’évaluation de la focalisation sur soi en
clinique pour l’étude du soi
Les troubles de motivation, les déficits cognitifs et la tristesse persistante altèrent
l’identité et l’intégrité du soi des personnes dépressives et ce par un défaut de traitement de
l’information due à une trop grande focalisation sur soi au détriment de la focalisation sur
l’environnement (Northoff et al., 2011).
Focalisation sur soi dans la dépression
La focalisation sur soi peut être définie comme une tendance à s’engager dans une
tâche de référence à soi au détriment d’autres modes possibles de traitement de l’information
(Carver & Scheier, 1998). Chez les patients déprimés, on observe en effet une tendance
accrue à réfléchir sur leur implication personnelle dans les événements de vie. Ce biais
cognitif est relativement spécifique de la dépression (Mor & Winquist, 2002).
La focalisation sur soi peut être étudiée à partir de tâches de référence à soi (recherche
de biais de SRE) et par des tâches de mémoire autobiographique (biais de R/K, de spécificité
et de perspective du self).
Effet de référence à Soi dans la dépression
Le protocole expérimental le plus utilisé pour étudier la focalisation sur soi consiste à
mesurer la taille de l’effet de référence à soi en mémoire chez des sujets déprimés en
comparaison avec des sujets non déprimés. Derry et collaborateurs (1981) ont évalué
l'influence des opérations d'encodage sur le rappel d'adjectifs à connotations "dépressive" ou
"non-dépressive". Trois types de jugements sur les adjectifs étaient proposés au moment de la
phase d'étude. Les sujets devaient soit calculer le nombre de lettres des adjectifs, soit fournir
un synonyme des items cibles, soit préciser si les adjectifs pouvaient servir à les définir. Les
auteurs ont retenu trois groupes dans cette étude: un groupe de déprimés, un groupe de
malades psychiatriques non déprimés et un groupe de témoins. Les résultats indiquent un
rappel supérieur chez les déprimés pour les adjectifs à connotation dépressive et qui ont été
encodés dans la condition personnelle. Les sujets des deux autres populations évoquent plus
fréquemment les adjectifs autoréférents et à connotation "non dépressive". Aucune différence
n'émerge entre les trois groupes pour le nombre total de mots rappelés. Plusieurs autres
travaux ont évalué l’ERS dans la dépression et confirmé les résultats de Derry dans la
dépression unipolaire (Dozois et al., 2001 ; Kuiper et al., 1982). L’ensemble de ces travaux
Cadre Théorique
20
est aussi en accord avec le fait que les patients déprimés s’appliquent en général plus
facilement à eux-mêmes des adjectifs décrivant des traits de personnalité à connotation
négative que des adjectifs positifs (Murphy et al., 1999).
Mémoire autobiographique et dépression
Plusieurs biais cognitifs, répliqués dans la littérature sont retrouvés lors de tâches de
mémoire autobiographique chez des patients déprimés:
1. Effet de congruence à l’humeur (Williams et Scott, 1988, Park et al., 2002): les
patients déprimés rappellent plus de souvenirs négatifs que de positifs. Ce biais mnésique
n’étant pas dû à un excès d’événements négatifs ni à un jugement exagérément négatif que
porteraient les sujets déprimés sur leurs événements de vie (Blaney et al.,1986).
2. Un déficit global en mémoire autobiographique (Williams et Scott, 1995) affectant
la spécificité, la conscience autonoétique (Lemogne et al., 2006) et le point de vue.
-Spécificité : les performances des patients déprimés sont marquées par une
surgénéralisation des souvenirs (overgeneral recall : Williams et al., 1988 ; Lemogne et al.,
2006 ) : les patients déprimés rappellent significativement plus de souvenirs surgénénéralisés
que les sujets non déprimés. Ces souvenirs se réfèrent à des évènements répétés, c’est-à-dire
survenus plus d’une fois (« quand je travaillais mon rapport tous les soirs »), ou étendus,
c’est-à-dire ayant duré plus d’une journée (« mon année au CogMaster »). Cette
surgénéralisation correspondrait à l’inhibition par le système exécutif central de l’accès au
niveau « Event-specific Knowledge » selon le modèle de Conway (Lemogne et al., 2006).
-Point de vue : dans le travail de Lemogne et al, 2006 les patients déprimés adoptaient
préférentiellement un point de vue spectateur lors du rappel de souvenirs personnels positifs.
L’adoption d’un point de vue de spectateur lors du rappel en mémoire autobiographique est
généralement interprétée comme témoignant d’une focalisation sur soi accrue (Sutin &
Robins, 2008). Lors du rappel en mémoire autobiographique, le working self comparerait le
comportement passé du sujet avec celui qu’il aurait au moment du rappel dans un contexte
similaire. Si le comportement actuel est différent, cela entraînerait :
a) l’attribution du comportement passé à un soi ancien et
b) la reconstruction d’un point de vue de spectateur (focalisation sur soi).
Si le comportement actuel est identique, cela entraînerait au contraire :
a) l’attribution du comportement passé au contexte ancien et
b) la reconstruction d’un point de vue d’acteur (focalisation sur le contexte).
Selon cette interprétation, les patients déprimés auraient tendance à attribuer à un soi
passé leurs souvenirs positifs en rapport avec une focalisation sur soi plus importante
(Lemogne et al., 2006 ; Bergouignan et al., 2008).
-Conscience autonoétique : dans l’étude de Lemogne et al, 2006 les patients déprimés
avaient moins de réponse R que les sujets témoins pour les souvenirs positifs comme pour les
souvenirs négatifs.
Cadre Théorique
21
Peu d’études ont cherché à caractériser les performances mnésiques des patients
déprimés selon les caractéristiques cliniques de la dépression unipolaire ou bipolaire. Scott et
collaborateurs ont montré que la surgénéralisation lors de tâches de mémoire
autobiographique pouvait distinguer des patients bipolaires euthymiques (en dehors d’une
phase dépressive ou maniaque) par rapport à des sujets témoins. Le degré de surgénéralisation
était proportionnel au nombre d’épisodes thymiques antérieurs (Scott el al., 2000).
Tzemou et Birchwood en 2007 ont complété cette étude en montrant une tendance à la
surgénéralisation pour les bipolaires dans toutes les phases de la maladie, chose que Mansell
et Lam (2004) avaient déjà constaté mais seulement pour des souvenirs négatifs et non
positifs.
Aucune étude n’a comparé directement des patients unipolaires et des patients
bipolaires avec une tâche de mémoire autobiographique. A notre connaissance il n’existe
pas non plus d’études comportementales sur l’effet de référence à soi comparant des
patients bipolaires et unipolaires.
Etudes d’imagerie cérébrale sur le soi et la dépression
*Structures corticales médianes et dépression
Des données récentes sur la dépression ont montré un excès d’activation des structures
corticales médianes dans des tâches de référence à soi (Grimm et al., 2009 ;Yoshimura et al.,
2010 ; Lemogne et al., 2010).
Ces études sont supportées par les études de neuroimagerie cérébrale des symptômes
dépressifs impliquant un vaste réseau cérébral cortico-limbique comprenant l’hippocampe,
l’amygdale, le cortex préfrontal dorsolatéral, ventrolatéral et médian, ainsi que le cortex
cingulaire (Mayberg 2003). Ces résultats ont donné lieu à une méta-analyse récente de
Marchand (2012), soulignant que les CMS joueraient un rôle majeur dans la physiopathologie
des troubles de l'humeur.
Lemogne et collaborateurs en 2011, ont montré en accord avec les travaux de Sheline
et al en 2010 que la focalisation sur soi dans la dépression apparaîtrait comme un processus en
compétition avec le contrôle cognitif et la régulation des émotions et se traduirait par une
moindre inhibition du réseau mode par défaut.
Marchand et son équipe ont quant à eux montré en 2011 que les sujets bipolaires
avaient une activation significativement diminuée des CMS postérieurs gauches et du cortex
frontal en réponse à l'expression de visage heureux. Ils ont montré dans ce même article que
la sévérité de la dépression était positivement corrélée avec l'activation de la partie postérieure
des CMS. Ces études confirment les travaux antérieurs sur la bipolarité (Mahli et al., 2004 ).
De plus, Chen et son équipe (2010) ont montré dans une étude portant sur l’évaluation de
l’émotion faciale, que les patients bipolaires (en phase maniaque) par rapport à des témoins
appariés montrent une activation de l'hippocampe et de l'amygdale droite moins forte que les
témoins : deux régions clés de la mémoire autobiographique (Svoboda et al, 2006.);
*IRMf et distinction de la dépression unipolaire et bipolaire
Cadre Théorique
22
Différencier le trouble bipolaire de la dépression unipolaire est un défi clinique
majeur. L'identification de marqueurs objectifs de la bipolarité pourrait améliorer la précision
diagnostique de la dépression et ainsi optimiser la mise en place de traitements spécifiques. A
ce jour seulement quelques études de neuroimagerie fonctionnelle ont comparé directement
les déprimés unipolaires et les déprimés bipolaires (Taylor Tavares et al. 2008 ; Almeida et al.
2009 ; Almeida et al. 2010 ; Bertocci et al. 2011 ; Lawrence et al, 2004 ; pour revue : Cardoso
de Almeida et Phillips, 2012).
Ainsi par exemple Lawrence et al (2008) ont présenté à 11 sujets bipolaires déprimés
et 9 patients déprimés unipolaires des stimuli émotionnels (visages exprimant des émotions
négatives, positives ou neutres) pendant les acquisitions en IRMf. Un groupe de 11 sujets
contrôles était également inclus dans l’étude. Les patients déprimés bipolaires montraient une
réponse augmentée dans les régions sous-corticales et le cortex préfrontal ventrolatéral en
présence de visages émotionnels exprimant une expression modérée de peur, de tristesse ou
de joie. Les patients déprimés unipolaires réagissaient de façon exagérée uniquement aux
visages exprimant une tristesse modérée et avaient une réponse émotionnelle abrasée pour les
autres expressions faciales. Ces résultats confirment le caractère différent de la dépression
bipolaire de la dépression unipolaire, avec une hyperréactivité émotionnelle dans la bipolarité
et une sensibilité spécifique aux stimuli de tristesse dans la dépression unipolaire. Dans une
autre étude (Cardoso de Almeida et al., 2009), la même équipe sur un échantillon de 15
déprimés unipolaires et de 16 déprimés bipolaires à mise en évidence des différences de
connectivité à droite et à gauche entre l’amygdale et le cortex orbito-frontal lors de la
catégorisation de visages exprimant des émotions positives. Les résultats de ces études
soulignent les différences physiopathologiques entre la dépression unipolaire et les
dépressions bipolaires avec une sensibilité accrue aux stimuli émotionnels positifs dans
la dépression bipolaire. Il faut cependant noter qu’un faible nombre de patients a été évalué.
Cependant, alors que les CMS semblent jouer un rôle dans la physiopathologie de
la dépression uni et bipolaire, aucune étude n’a cherché à différencier les patients
unipolaires des patients bipolaires via des tâches IRM de référence à soi.
Dans ce travail nous allons dans un premier temps comparer les caractéristiques
comportementales des patients unipolaires et bipolaires via des tâches de référence à soi et de
mémoire autobiographique, puis dans un second temps nous allons comparer le pattern
d’activité cérébrale au repos et lors de tâches de référence à soi pour la dépression unipolaire
et bipolaire par rapport à des sujets sains.
Objectifs et hypothèses
23
2. Objectifs et hypothèses
2.1Objectifs
L’objectif majeur de ce travail est de mettre en évidence des marqueurs cognitifs et
neuronaux caractéristiques de la dépression bipolaire par rapport à la dépression unipolaire.
Ce travail comprend deux études : une étude comportementale (Etude 1) et une étude
en IRM fonctionnelle (Etude 2). Il comporte l’évaluation de patients déprimés unipolaires ou
bipolaires en phase aigüe (Etude 1 et 2) et des sujets témoins indemnes de troubles
psychiatriques (Etude 2).
Les expériences comportementales ont pour but de tester les processus de référence à
soi et de mémoire autobiographique chez des sujets uni et bipolaires.
Le protocole d’imagerie cérébrale (IRMf) visant à étudier les réseaux cérébraux de la
focalisation sur soi fait partie d’une étude transversale, multicentrique (hôpital de la Pitié-
Salpêtrière, hôpital Saint Anne, hôpital Fernand-Widal, et l’hôpital Chenevier Mondor)
évaluant des patients bipolaires et unipolaires en phase dépressive et des témoins indemnes de
troubles psychiatriques. L’étude vise à préciser le rôle des structures corticales médianes ou
réseaux du self dans un EDM pour des patients uni et bipolaires lors de tâches de référence à
soi et par rapport à l’activité cérébrale au repos.
2.2 Hypothèses
Etude 1 : étude comportementale comparant des patients déprimés unipolaires et
bipolaires
Cette étude comprend l’utilisation de deux tâches différentes : une tâche de référence à
soi utilisant du matériel verbal (traits de personnalité positifs et négatifs) et une tâche de
rappel en mémoire autobiographique à partir d’indices positifs ou négatifs.
Dans cette étude 1 nous faisons l’hypothèse générale que les patients déprimés
bipolaires vont traiter les informations positives liées au self (traits de personnalité positifs
dans la tache de SRE, et souvenirs autobiographiques positifs) différemment des informations
négatives et différemment des patients déprimés unipolaires. Cette hypothèse s’appuie sur les
données de la littérature ainsi que sur l’idée que la notion d’antécédents d’épisodes maniaques
ou hypomaniaques influence le traitement des informations liées au self des patients
bipolaires.
Résultats attendus dans la tâche de référence à soi :
En accord avec notre hypothèse, nous nous attendons à observer :
1) un effet SRE présent chez les patients bipolaires et unipolaires
2) un effet SRE plus marqué pour les mots positifs chez les bipolaires (par rapport aux
mots négatifs) et par rapport aux patients unipolaires
Objectifs et hypothèses
24
Résultats attendus dans la tâche de Mémoire autobiographique :
Spécificité (S)
Nous faisons l’hypothèse par rapport aux données de Tzemou et Birchwood en 2007 et
Lham et al., 2004 que les patients uni et bipolaires auront le même taux global de
surgénéralisation (soit peu de réponses spécifiques). Cependant nous nous attendons à ce que
les patients déprimés unipolaires soient plus spécifiques lors du rappel des souvenirs négatifs
que positifs et le contraire pour les patients bipolaires.
Conscience autonoétique (R et R_emotion)
Nous postulons que les patients bipolaires attribueront plus de réponses R que les
patients unipolaires pour les souvenirs positifs, et nous vérifierons cette tendance pour la
catégorie émotion au vue de leur dérégulation émotionnelle.
Point de vue (Spectateur)
La perspective du self n’a jamais été étudiée chez les bipolaires. Cependant, en accord
avec notre hypothèse nous prévoyons un score spectateur moins élevé pour les souvenirs
positifs chez les patients bipolaires par rapport aux patients unipolaires.
Episodicité (Ep)
En suivant nos hypothèses décrites ci-dessus nous postulons que les bipolaires auront
plus de souvenirs rappelés de manière épisodique (=spécifique, acteurs et réponses R) lors du
rappel de souvenirs positifs que les unipolaires.
Etude 2 : Tâche de référence à soi en IRMf comparant des patients déprimés
unipolaires et bipolaires par rapport à des témoins
Dans la seconde étude, nous avons utilisé l’IRMf pour comparer l’activation cérébrale
des structures corticales médianes de patients déprimés unipolaires, bipolaires, et de témoins
sains lors d’une tâche de référence à soi portant sur des images de différentes valences et
durant une phase de repos afin d’observer les régions associées et dissociés entre le réseau du
self et le réseau du mode par défaut (Lemogne et al., 2011).
Notre hypothèse basé sur les travaux de Lemogne et son équipe (2011), prédit que lors
de la tâche de référence à soi, une activation accrue au niveau des régions CMS postérieures
gauches et du cortex frontal médian sera montrée pour les bipolaires et unipolaires par rapport
aux contrôles.
Matériels et méthode étude comportementale
26
1. Matériel et méthodes
1.1 Sujets
20 patients ont été recrutés au cours d'un épisode dépressif majeur (EDM) dans les
Services Hospitalo-universitaires de Psychiatrie de l’Hôpital de la Pitié-Salpêtrière et de Saint
Anne, où ils ont été pris en charge et suivis au décours de cet épisode, puis répartis en deux
groupes de sujets (unipolaires UP n=13, bipolaires BP n=7). Les diagnostics ont été établis
selon les critères du DSM IV-TR (cf. Annexe 4) dans le cadre de leur prise en charge par les
praticiens hospitaliers du service.
Sur les 20 sujets qui ont participé à ce protocole (cf. Annexe 1): 18 ont été inclus, et 2
(un UP et un BP) ont été exclus secondairement dont un pour engagement erroné dans la
tâche et l’autre du fait d'un diagnostic ne s'intégrant pas dans le spectre de la dépression.
Les patients ont donné leur consentement à l’étude après une information détaillée.
1. Critères d’inclusion des patients :
Hommes ou femmes, dont l’âge est compris entre 18 et 55 ans et présentant un
Episode Dépressif Majeur selon le DSM-IV (cf. Annexe 4) dans le cadre d'un trouble de
l'humeur unipolaire ou de type bipolaire de type 1 et 2 (au moins 2 épisodes dépressifs
incluant l'épisode actuel).
Concernant l'EDM: Score de BDI>15 (dépression sévère). Patient Hospitalisé ou suivi
en consultation.
2. Critères de non inclusion:
- Troubles bipolaires avec cycles rapides : 4 cycles dans les 12 derniers mois.
- Caractéristiques psychotiques de l'EDM actuel.
- Comorbidités psychiatriques actuelles : Trouble de personnalité de type borderline,
TOC, Phobie sociale, trouble schizo-affectif.
- Abus et dépendance à l'alcool ou autres substances.
- Cure récente d'ECT (< 6 mois).
- Antécédents de traumatisme crânien sévère, affections neurologiques (SEP, Maladie
de Parkinson, AVC) ou maladies générale susceptible d'entrainer des anomalies à l'IRM et
d’affecter les capacités cognitives (Lupus, Maladie de Behcet).
1.2. Paradigmes expérimentaux
1.2.1Tâche de référence à soi
Le premier protocole utilisé est visible ci-dessous (Fig. 4) et se distingue en deux
phases : une phase d’étude (encodage) et une phase de test (reconnaissance). Le design de
cette tâche est adapté de l’étude de Lemogne et al, 2009. Le stimulus cible consiste en un
adjectif noir présenté sur un fond blanc via un écran d’ordinateur à l’aide du logiciel E-prime
(Psychology Software Tools, Pittsburgh, PA) sur un PC Windows. Les adjectifs utilisés sont
Matériels et méthode étude comportementale
27
issus d’une banque de mots validée pour la valence (absence d’ambiguïté) auprès d’une
population de 100 étudiants en Médecine (Choubani et al, 2006, Annexe 6).
Figure 4: Protocole expérimental
Phase d’étude : encodage incident.
La tâche des sujets consiste à effectuer un jugement « oui/non » sur chacun des mots
présentés de façon aléatoire, selon un paradigme unique pour chaque sujet. Les réponses
« oui/non » se font par système de touche sur le clavier numérique.
Deux conditions de jugement sont proposées au sujet :
-Condition personnelle : les sujets doivent juger si le mot, décrivant un trait de
personnalité positif ou négatif, peut s’appliquer ou non à eux-mêmes.
- Condition générale (décision sémantique de mots à valence émotionnelle): les
sujets doivent juger si les traits de personnalité décrivent ou non des traits de
personnalité socialement désirable.
Chaque mot est employé dans une seule condition (personnelle ou générale) et ne fait
donc l’objet que d’un seul jugement conditionnel. Afin d’éviter un effet de liste, les mots
décrivant des traits de personnalité sont répartis aléatoirement dans les conditions
personnelles et générales à travers les sujets.
Deux listes de 20 mots (10 mots positifs et 10 mots négatifs décrivant des traits de
personnalité pour les conditions générale et personnelle ; répartis aléatoirement) sont
attribuées à chaque condition de jugement. L’acquisition se fait en deux sessions de deux
listes (une liste pour chaque condition de jugement par session, répartie de façon aléatoire au
sein de chaque session pour chaque sujet, afin d’éviter un effet d’ordre). Le début d’une liste
est précédé des instructions (7 secondes) précisant visuellement la condition de jugement à
effectuer par le sujet (« condition personnelle » ou « condition générale »), de l’adjectif
pendant 1s puis d’une croix de fixation centrale pendant 2 secondes (Fig. 4). Une session dure
3 minutes avec une pause au milieu de chaque session. Soit une durée d’expérience d’environ
8 minutes.
Le dispositif de réponse enregistre le temps de réaction (TR) et la réponse du sujet
dans chaque condition.
Matériels et méthode étude comportementale
28
Phase de test : Reconnaissance
Après 5 minutes de repos, sans tâche mais avec discussion libre entre sujet et
expérimentateur, une tache de reconnaissance via E-prime demandant aux sujets de
reconnaitre les mots de la liste est réalisée. Pour cela, la série d’adjectifs est de nouveau
présentée au sujet, mélangée avec 40 adjectifs nouveaux (20 positifs et 20 négatifs), aussi
issus de la banque validée. Les items sont présentés séquentiellement à l’écran pendant 1
seconde suivie d’une période de fixation de 2 secondes. Le sujet doit utiliser le dispositif de
réponse pour discriminer les mots déjà vus des nouveaux en répondant par oui pour un mot
cible (déjà vu) ou non pour un distracteur (mot nouveau). L’ordre de présentation des adjectifs
est aléatoire mais le ratio nouveaux mots/anciens mots est identique pour tous les sujets
(40/80).
L’analyse de la reconnaissance repose sur l’indice de discriminabilité et le bais de
réponse selon Snodgrass & Corwin, 1988. Ces indices sont basés sur une théorie de la
discrimination à seuil haut pour laquelle les fausses reconnaissances résulteraient d’une
réponse au hasard. L'indice de discriminabilité, variant de 0 à 1, est Pr = % de
reconnaissances correctes - % de fausses reconnaissances. L'indice de biais est: Br = %
fausses reconnaissances/ (1-Pr). Quand Br= 0,5 le biais est nul ; quand Br<0,5 le biais est
conservateur (évite les fausses reconnaissances) ; quand Br>0,5 le biais est libéral (favorise
les fausses reconnaissances).
1.2.2 Test de mémoire autobiographique
Nous avons utilisé une version du TEMPau (Test Episodique de la Mémoire du Passé
autobiographique, Annexe 5) modifié d’après Bergouignan et al., 2008 que nous avons
informatisé, explorant la capacité des sujets à récupérer des événements personnels
spécifiques détaillés en fonction de cinq périodes de vie : la période de l’enfance et de
l’adolescence (« 0 »-17ans), la période de jeune adulte (18-30ans), au-delà de 30 ans, les cinq
dernières années exceptés les douze derniers mois ; les douze derniers mois, et ce en fonction
de 20 mots indices : 10 à valence positive et 10 à valence négative. Les sujets ont 60 s pour
décrire leurs réponses.
Le TEMPau modifié comprend :
1) l’autoévaluation de l’état de conscience autonoétique (Remember/Know/Guess)
pour le contenu émotionnel, factuel (quoi), spatial (où) et temporel (quand) (Guillery et al.
2000). L’analyse est ensuite faite sur la proportion de réponses R sur l’ensemble des contenus
pour les 20 souvenirs, ainsi que sur le score total des souvenirs selon les valeurs présentées
dans la grille d’évaluation suivante :
Réponses
Contenus Remember Know Guess
Matériels et méthode étude comportementale
29
Émotionnel 1 0 -1
Factuel 1 0 -1
Spatial 1 0 -1
Temporel 1 0 -1
2) l’autoévaluation du point de vue associée au souvenir (Acteur/Spectateur, (Nigro &
Neisser 1983; Robinson & Swanson 1993)). L’observation portera sur le pourcentage de
souvenir récupéré en vision spectateur.
3) l’hétéro-évaluation du niveau de spécificité du souvenir prenant en compte la
spécificité des détails et les détails phénoménologiques. Le niveau de spécificité des souvenirs
a été coté comme spécifique = 4 (évènement survenu une seule fois, et ayant duré moins
d’une journée), étendu = 3 (évènement survenu une seule fois, ayant duré plus d’une journée),
générique = 2 (classe d’évènements répétés), association sémantique = 1, et omission ou
événement répété = 0. Le score de spécificité, a été effectué en suivant la règle utilisée par
Barnard et al. (2006), à savoir le pourcentage de souvenirs côtés 4.
L’épisocidicité d’un souvenir, à savoir un souvenir qui est spécifique, rappelé en
perspective acteur et dont la somme des R/K/G>1 (cf. grille d’évaluation précédente), sera
aussi analysé.
Le TEMPau de passation longue, dure environ 90 minutes par sujet. La cotation de la
spécificité est réalisée en aveugle par deux cotateurs extérieurs.
1.3. Analyse des données comportementales
L‘ensemble des données comportementales, temps de réaction et réponses pour la
tâche de référence à soi, et souvenirs-réponses pour le test de mémoire autobiographique, a
été analysé à l‘aide du logiciel de traitement statistique R 2.9 (www.r- project.org/). Les
données provenant du logiciel E-Prime ont été exportées dans un format lisible par le logiciel.
Les comparaisons au sein des groupes et entre les groupes des données de la phase d’étude
(temps de réaction à l’encodage) et de la phase de test (indice de discriminabilité et temps de
réaction en reconnaissance) sont faites par le test de Scheirer-Ray-Hare (statistique non-
paramétrique) au lieu d’une ANOVA (Sokal and Rohlf, 2012), nos valeurs ne suivant pas une
distribution normale (pas d’homoscédasticité non plus). Les analyses post-hoc en cas de
significativité des effets principaux et des interactions utiliseront des tests non-paramétriques
de Mann–Whitney (intra-sujets), et des tests de Wilcoxon (intra-groupe).
Le seuil de significativité statistique est fixé à p-value < 0.05.
Résultats étude comportementale
30
2. Résultats de l’étude 1 : étude comportementale comparant des déprimés
unipolaires et bipolaires
Les analyses statistiques ont porté sur 18 patients (UP : n=12, BP : n=6). Les
caractéristiques démographiques et cliniques des patients sont présentées en Annexe 1.
Aucune différence significative entre les groupes n’est montrée pour l’âge (W=43, p=0,717),
le ratio d’homme (X²=0,117, p=0,732), le niveau socioculturel (W=30,5, p=0.478) et la
sévérité de la dépression (W=36,5, p=0,891) (cf. Annexe 1).
2.1. Tâches de référence à soi
En raison de la faible taille de nos échantillons nous avons utilisé dans nos analyses
statistiques des tests non paramétriques. Des tests de Scheirer-Ray-Hare (statistique non-
paramétrique) sont réalisés au lieu d’ANOVA (Sokal and Rohlf, 2012). Les analyses post-hoc
en cas de significativité des effets principaux et des interactions utiliseront des tests non-
paramétriques de Mann–Whitney (intra-sujets), et des tests de Wilcoxon (intra-groupes).
Effet SRE en fonction de la valence chez les bipolaires et les unipolaires
L’effet de référence à soi traduit la meilleure reconnaissance des items encodés en
condition self par rapport aux items encodés en condition générale.
Pour permettre une analyse avec le test de Scheirer-Ray-Hare qui n’autorise pas
d’inclure trois facteurs différents, nous avons défini un score de SRE correspondant au niveau
de reconnaissance en self – niveau de reconnaissance en général. Nous avons ainsi calculé un
score différent pour la valence positive (self pos – gen positif) et un score différent pour la
valence négative (self nég – gen négatif). De plus afin de prendre en considération le niveau
de fausse reconnaissance, nous avons défini un indice de discriminabilité (Pr = % de
reconnaissances correctes - % de fausses reconnaissances) (Snodgrass & Corwin, 1988).
Avec cet indice de discriminabilité en fonction de la valence (Self positif - Générale
positif, Self négatif - générale négatif) comme variable dépendante nous avons effectué une
première analyse avec un facteur groupe (unipolaire, bipolaire) et un facteur valence à deux
niveaux ((self- gen) positif, (self-gen) négatif)).
Le test de Scheirer-Ray-Hare sur l’indice de discriminabilité ne révèle aucun effet
groupe (H= 0.518, df= 1, p= 0.471), aucun effet valence (H= 1.236, df= 1, p= 0.266) et
aucune interaction groupe X valence (H= 1.421, df= 1, p= 0.233). Cela se traduit par
l’homogénéité des réponses des sujets sur le graphique ci-dessous (Fig 5).
Résultats étude comportementale
31
Figure 5 : Test de reconnaissance : Pourcentage de mots retrouvés de valeurs
positives en condition self et générale. Le pourcentage de mots retrouvés de valeurs négatives
suit la même tendance.
Dans un second temps nous avons répété l’analyse en utilisant les scores bruts de
reconnaissance correcte. Le test de Scheirer-Ray-Hare sur le score de reconnaissance correcte
ne révèle aucun effet groupe (H= 0.490, df= 1, p= 0.483), aucun effet valence (H= 3.272, df=
1, p= 0.070) et aucune interaction groupe X valence (H= 1.187, df= 1, p= 0.275).
Contrairement à nos hypothèses les patients déprimés bipolaires ne montrent pas de
SRE plus marqué pour les mots positifs.
Afin de vérifier qu’il y a bien un effet de référence à Soi à partir de notre tâche, nous
avons réalisé un test de Scheirer-Ray-Hare avec un facteur groupe et un facteur condition
(self, général) indépendamment de la valence.
Le test de Scheirer-Ray-Hare sur l’indice de discriminabilité ne révèle aucun effet
groupe (H= 0.801, df= 1, p= 0.370), aucun effet condition (H= 0.079, df= 1, p= 0.777) et
aucune interaction groupe X condition (H= 0.032, df= 1, p= 0.857).
Le test de Scheirer-Ray-Hare sur le score de reconnaissance correcte ne révèle aucun
effet groupe (H= 2.140, df= 1, p= 0.143), aucun effet condition (H= 0.184, df= 1, p= 0.667) et
aucune interaction groupe X condition (H= 0.285, df= 1, p= 0.593).
Nous n’avons donc pas observé d’effet de référence à soi dans notre étude. Les mots
encodés en self sont reconnus de la même manière que les mots encodés en général dans les
deux groupes. Même en faisant un pool de patients déprimés (n=18), on ne retrouve pas sous
le test de Wilcoxon de différence significative quant à la condition (p=0,545). Afin de savoir
si les sujets ont bien effectué la tâche nous avons évalué leurs temps de réaction pour faire le
jugement lors de l’encodage incident en condition self et générale, les résultats sont dans le
tableau 2. En général la condition self s’accompagne d’un temps de réponse plus élevé que
dans la condition générale.
Résultats étude comportementale
32
Self Générale Différence
moyenne (écart-type) en ms Self versus générale
nUP=12 nUP=12 Différence (%) W p-value
nBP=6 nBP=6
UP 1085 (368) 958 (306) 139 W=86505 p=0,005*
BP 1310 (567) 1170 (455) 126 W=22613 p<0,01*
Tableau 2 : Variation des temps de réaction en encodage pour les unipolaires et les
bipolaires
Nous pouvons observer que les patients UP et BP ont des temps de réaction plus
élevés en condition self ce qui suggère que les patients des deux groupes se sont correctement
engagés dans la tâche de référence à soi durant l’encodage incident.
Recherche de traitement des mots différents selon la valence chez les
bipolaires et les unipolaires
Afin de rechercher une différence de traitement des mots de valence positive entre les
unipolaires et les bipolaires, nous avons fait un test de Scheirer-Ray-Hare avec un facteur
groupe et un facteur valence (positive, négative) indépendamment de la condition self ou
générale. Nous avons ainsi effectué une analyse sur le temps de réaction à l‘encodage, la
reconnaissance, et sur l’indice de discriminabilité.
Le test de Scheirer-Ray-Hare sur le temps de réaction en encodage révèle un effet
groupe (H= 136.0, df= 1, p<0,01*), et un effet valence (H= 8.812, df= 1, p= 0.002*) mais pas
d’interaction groupe X (H= 0.000, df= 1, p= 0.984).
Le tableau 3 ci-dessous montre les moyennes des temps de réaction en reconnaissance
selon la valence (positive/négative).
a) + - Différence b) Sans valence
moyenne (écart-type) en
ms
moins versus
plus moyenne (écart-type)
en ms
nUP=12 nUP=12
Différence
(%) nUP=12
Différence
(%)
nBP=6 nBP=6 nBP=6 BP vs UP
UP 1094(490) 1190(531) 116 UP 1139(511) 578
BP 1662(1000) 1779(925) 96 BP 1717(966)
Tableau 3 : Différence des temps de réaction en reconnaissance entre les unipolaires et les
bipolaires ; a) Différence en intragroupe b) différence en intergroupe.
Il semblerait que les patients unipolaires et bipolaires reconnaissent plus lentement un
mot de valence négative. On observe aussi que les bipolaires répondent plus lentement que les
unipolaires.
Résultats étude comportementale
33
Aucun effet groupe (H= 1.170, df= 1, p= 0.279), aucun effet valence (H= 1.444, df= 1,
p= 0.229) et aucune interaction groupe X valence (H= 0.718, df= 1, p= 0.396) n’est montré
par le test de Scheirer-Ray-Hare sur l’indice de discriminabilité.
Au total avec la tâche de SRE, nous observons uniquement que les patients bipolaires
sont plus lents que les patients unipolaires que ce soit au moment de l’encodage ou de la
reconnaissance. Contrairement à notre hypothèse lors de cette tâche les patients déprimés
bipolaires ne traitent pas différemment les mots positifs des mots négatifs et ne présentent pas
de différences par rapport aux patients unipolaires. En raison d’un trop faible échantillon nous
n’observons pas d’effet de référence à soi.
2.2. Tâche de rappel en mémoire autobiographique
Effet de la valence sur les scores des caractéristiques de la MA
Afin de rechercher une différence de récupération des souvenirs positifs entre les
unipolaires et les bipolaires, nous avons fait des tests de Scheirer-Ray-Hare avec un facteur
groupe et un facteur valence sur les différentes variables définissant la performance au test de
MA. Les scores moyens des différentes variables sont donnés ci-dessous :
+ S E sp R ep
UP 67,44 (21,97) 0,72 (0,32) 55,4 (14,5) 57,1 (20) 30,0 (0,22)
BP 61,54 (24,74) 0,68 (0,35) 50,14 (29,81) 55,2 (19) 14,0 (0,15)
- S E sp R ep
UP 64,96 (19,81) 0,83 (0,22) 57,72 (23,16) 58,1 (17) 22,4 (20)
BP 37,15 (15,63) 0,36 (0,4) 54,2 (29,48) 41,6 (28) 9,4 (12)
Tableau 4 : Scores moyens (écart-type) des différentes variables du test de MA en fonction de
la valence pour les unipolaires et les bipolaires. S : Spécificité ; E : Score de réponse
Remember sur le contenu émotion ; sp : score de perspective spectateur ; R : pourcentage de
réponse Remember ; Score d’épisodicité. (En %, sauf pour E qui peut prendre les valeurs de -
1 à 1)
Spécificité (S)
Le test de Scheirer-Ray-Hare sur la spécificité montre un effet groupe (H= 4.408, df=
1, p=0.035*), mais pas d’effet valence (H= 8.812, df= 1, p= 0.152) et pas d’interaction groupe
X valence (H= 8.812, df= 1, p= 0.152). Cependant, en traçant le graphique des interactions
(Fig. 6) entre groupe X valence, nous observons que le score de spécificité est influencé par le
groupe et la valence. Nous supposons qu’il n’y a pas d’effet interaction groupe X valence
dans le test de Scheirer-Ray-Hare à cause de la trop grande dispersion des valences.
Résultats étude comportementale
34
Figure 6 : Exploration de l’interaction dans le test de Scheirer-Ray-Hare pour le
score de spécificité
Au vue de l’interaction sur le graphique (figure 6), nous dessinons le tableau x ci-
dessous regroupant les différences et les tests post-hoc pour le score de spécificité.
+ - Différence intragroupe
moyenne (écart-type) "+" versus "-"
nUP=12 nUP=12 Différence (%) V p-value
nBP= 6 nBP= 6
UP 67,4(21,9) 64,9(19,8) 2,5 V=25 p=0,812
BP 61,5(24,7) 37,1(15,6) 24,4 V=26 p=0,046*
UP BP Différence intergroupe
moyenne (écart-type) "UP" versus "BP"
nUP=12 nBP=6 Différence (%) W p-value
nUP= 12 nBP= 6
+ 67,4(21,9) 61,5(24,7) 5,9 W=26,5 p=0,432
- 64,9(19,8) 37,1(15,6) 27,8 W=13 p=0,035*
Tableau 5 : Variation des scores de spécificité intragroupe et intergroupe pour les
unipolaires et les bipolaires
Un effet de la valence est montré de manière intragroupe pour les bipolaires
(p=0.046*) et un effet groupe est révélé en valence négative (p=0.035*). Contrairement à
notre hypothèse les patients UP et BP n’ont pas le même taux de surgénéralisation et les
souvenirs des UP ne sont pas plus spécifiques lors du rappel des souvenirs négatifs.
Conformément à notre hypothèse les BP sont plus spécifiques pour les souvenirs positifs.
Cependant les UP sont plus spécifiques pour les souvenirs négatifs que les patients BP.
Conscience autonoétique (R global et Emotion)
R global (Proportion de réponses R sur l’ensemble des contenus : Emotion, Fait, Date
et Lieu) :
Résultats étude comportementale
35
Le test de Scheirer-Ray-Hare sur le score de R global n’indique aucun effet groupe
(H= 1.415, df= 1, p= 0.234), aucun effet valence (H= 0.600, df= 1, p= 0.4383) et aucune
interaction groupe X valence (H= 1.136, df= 1, p= 0.286).
Contrairement à notre hypothèse, les patients bipolaires n’attribuent pas plus de
réponses R que les patients unipolaires pour les souvenirs positifs.
Emotion (Proportion de réponses R sur le contenu Emotion) :
Le test de Scheirer-Ray-Hare sur l’Emotion révèle un effet groupe (H= 3.771, df= 1,
p=0.052*), mais pas d’effet valence (H= 0.266, df= 1, p= 0.605) et d’interaction groupe X
valence (H=2.495, df=1, p=1.114). Or pour les mêmes raisons que précédemment, en traçant
le graphique des interactions (Fig. 7) entre groupe X valence, nous observons que le score
d’Emotion est influencé par le groupe et la valence.
Figure 7 : Exploration de l’interaction dans le test de Scheirer-Ray-Hare pour le
score d’Emotion.
Le tableau 6 ci-dessous regroupe les différences et les tests post-hoc.
+ - Différence intragroupe
moyenne (écart-type) "+" versus "-"
nUP=12 nUP=12 Différence (%) V p-value
nBP= 6 nBP= 6
UP 0,72(0,32) 0,83(0,22) -0,11 V=7 p=0,271
BP 0,68(0,35) 0,36(0,4) 0,32 V=25 p=0,075**
UP BP Différence intergroupe
moyenne (écart-type) UP versus BP
nUP=12 nBP=6 Différence (%) W p-value
nUP= 12 nBP= 6
Résultats étude comportementale
36
+ 0,72(0,32) 0,68(0,35) 0,04 W=32 p=0,8044
- 0,83(0,22) 0,36(0,4) 0,47 W=11 p=0,021*
Tableau 6 : Variation des scores d’Emotion intragroupe et intergroupe pour les unipolaires
et les bipolaires
Il y a donc un effet de la valence, mais il dépend du groupe, en l’occurrence cet effet
est observé pour les bipolaires uniquement (tendance approchant le seuil de 5%, p=0.075**).
Un effet groupe et également montré pour la valence négative (p=0.021*). Contrairement à
notre hypothèse, les patients bipolaires n’attribuent pas plus de réponses R pour la catégorie
Emotion que les patients unipolaires pour les souvenirs positifs. On retrouve aussi que les
patients UP ont des scores R émotion plus élevés pour les souvenirs négatifs.
Spectateur (S)
Le test de Scheirer-Ray-Hare sur le score de R global n’indique aucun effet groupe
(H= 0.088, df= 1, p= 0.766), aucun effet valence (H= 0.342, df= 1, p= 0.5518) et aucune
interaction groupe X valence (H= 0.191, df= 1, p= 0.661). Cette absence de différence est
contraire à notre hypothèse.
Episodicité (ep)
Le test de Scheirer-Ray-Hare sur le score de R global indique un effet groupe (H=
4.631, df= 1, p= 0.031*), aucun effet valence (H= 1.140, df= 1, p= 0.285) et aucune
interaction groupe X condition (H= 0.013, df= 1, p= 0.971).
Le tableau 7 ci-dessous montre le sens de la différence entre les groupes. Les
unipolaires semblent avoir plus de souvenirs épisodiques que les bipolaires.
UP BP Différence intragroupe
moyenne (écart-type) UP-BP
nUP=12 nUP=12 Différence (%)
nBP= 6 nBP= 6
+ 30,0(22) 14,0(15) 6
- 22,4(20) 9,40(12) 13
Tableau 7 : Différences des scores d’épisodicité entre les unipolaires et les bipolaires.
Cette tendance est contraire à notre hypothèse de départ que les bipolaires ont plus de
souvenirs rappelés de manière épisodique (=spécifique, acteurs et réponses R) lors du rappel
de souvenirs positifs que les unipolaires.
Le graphique ci-dessous (Fig. 8) récapitule l’ensemble des différences caractéristiques
du test de mémoire autobiographique entre les unipolaires et les bipolaires.
Résultats étude comportementale
37
Figure 8 : Score des caractéristiques du test MA pour des déprimés uni et bipolaires
Discussion étude comportementale
38
3. Discussion : étude comportementale comparant des déprimés unipolaires et
bipolaires
L’objectif principal de cette étude était de trouver des marqueurs cognitifs permettant
de différencier la dépression unipolaire de la dépression bipolaire.
Tâche de référence à soi avec du matériel verbal
Lors de la tâche de référence à soi, contrairement à notre hypothèse, les patients
déprimés bipolaires ne traitent pas différemment les mots positifs des mots négatifs et ne
présentent pas de différences par rapport aux patients unipolaires. Ce résultat est biaisé du fait
que nous n’observons pas d’effet de référence à soi dans notre étude.
Une première raison à l’absence de SRE est liée à la taille de nos échantillons. En
effet, d’après les données de la littérature mettant en évidence une « taille de l’effet » de
l’ordre de 0.58 déviation standard entre la condition self et la condition générale lors d’une
tâche de reconnaissance (Symons et al., 1997), en testant l’hypothèse, de façon bilatérale de la
mise en évidence par un test t de Student d’une différence significative (au risque alpha=0,05
; risque bêta=0,2 ; puissance=0,80) entre les deux conditions, il aurait été nécessaire d’inclure
48 sujets minimum soit 24 dans chaque groupe.
Seul est observé un temps de réponse plus long pour les patients bipolaires par rapport
aux patients unipolaires que ce soit au moment de l’encodage ou de la reconnaissance. Cette
différence n’est pas due à la sévérité de la dépression puisqu’il n’y a pas de différence
significative sur les scores de BDI, mais une influence des traitements médicamenteux reste
possible.
A posteriori, une tâche de rappel libre aurait été préférée à la tâche de reconnaissance
pour différencier les unipolaires des bipolaires. Une diminution des performances mnésiques
est surtout mise en évidence dans les épreuves de rappel libre : il disparaît avec les procédures
de facilitation (rappel indicé, reconnaissance) (Baddeley et al., 1999).
Tâche de mémoire autobiographique
La mémoire autobiographique est la capacité à récupérer les expériences vécues dont
le soi est l’objet de connaissance (Piolino et al., 2003). La tâche de mémoire autobiographique
est ici utilisée pour comparer la dépression unipolaire de la dépression bipolaire.
Nous montrons que les patients bipolaires ont moins de spécificité pour les souvenirs
négatifs que les souvenirs positifs. Ce résultat est partiellement en accord avec notre
hypothèse. En effet nous ne mettons pas en évidence de différence entre les patients
unipolaires et bipolaires pour le niveau de spécificité des souvenirs positifs. Cependant les
patients unipolaires sont plus spécifiques que les patients bipolaires pour les souvenirs
négatifs. Ces résultats sont renforcés par l’étude du score R émotion. Globalement nos
résultats - préliminaires compte tenu de la taille de notre échantillon – suggèrent une
asymétrie dans le rappel des souvenirs négatifs et positifs dans la dépression unipolaire et
Discussion étude comportementale
39
bipolaire. Ce résultat est en accord avec l’étude de Mansell et Lam (2004) et confirme aussi
l’idée d’une différence entre la dépression unipolaire et bipolaire.
Selon Scott et son équipe (2001) le degré de spécificité serait proportionnel au nombre
d’épisodes thymiques antérieurs. Il serait utile d’évaluer le rôle de cette caractéristique
clinique lorsque nos échantillons seront plus importants.
Sur la base de nombreuses études corrélationnelles et expérimentales en psychologie
sociale, l’adoption d’un point de vue de spectateur lors du rappel en mémoire
autobiographique est généralement interprétée comme témoignant d’une focalisation sur soi
accrue (Sutin & Robins, 2008). Les unipolaires et les bipolaires présentant le même taux de
souvenirs récupéré en perspective spectateur, leur degré de focalisation sur soi est semblable.
Ce déficit du rappel des événements en point de vue acteur avait été montré par Kuyken &
Howel (2006) mais jamais chez des bipolaires. Tout se passe comme si les patients déprimés
étaient bloqués au niveau du « self-conceptuel » (défaut du self-épisodique et non du self
sémantique) du système de mémoire du self proposé par Conway avec une impossibilité
d’accès au dernier niveau : les Event-specific Knowledge (Conway & Pleydell-Pearce, 2000)
(cf figure 1).
Globalement aux deux tests utilisés dans cette étude 1, les déprimés bipolaires ne
montrent pas de différences de leurs connaissances sémantiques personnelles par rapport aux
unipolaires (tâche de référence à soi) mais il semble y avoir un défaut de mémoire épisodique
(tâche de mémoire autobiographique : moindre spécificité et moindre épisodicité de leurs
souvenirs) plus marqué par rapport aux déprimés unipolaires.
En résumé l’étude de la valence des souvenirs (positifs ou négatifs) lors de tâches de
rappel de mémoire autobiographique pourrait permettre de différencier les unipolaires des
bipolaires et pourrait constituer ainsi un marqueur cognitif différenciant ces deux catégories
de troubles de l’humeur.
.
Matériels et méthode étude d’imagerie
41
Ce protocole est complémentaire à l’étude comportementale de la focalisation sur soi, et
est inscrit dans un P.H.R.C (Programme Hospitalier de Recherche Clinique) sur l’étude des
réseaux fonctionnels de repos en IRMf comme biomarqueurs de la dépression unipolaire ou
bipolaire. Les patients participant à cette étude sont différents de ceux de la partie
expérimentale.
1 Matériel et méthodes
1.1. Sujets
4 patients ont été recrutés au cours d'un EDM dans le Service Hospitalo-universitaire
de Psychiatrie de l’Hôpital de la Pitié-Salpêtrière (cf. Annexe 2), où ils ont été pris en charge
et suivis au décours de cet épisode, puis répartis en deux groupes de sujets (unipolaires UP
n=3, bipolaires BP n=1). Les diagnostics ont été établis selon les critères du DSM IV-TR (cf.
Annexe 4) dans le cadre de leur prise en charge par les praticiens hospitaliers du service.
Le recrutement des sujets sains s’est fait via une annonce postée sur le site du RISC, et
via la liste de volontaire du Centre d’Investigation Clinique. 11 sujets ont participé à cette
étude, dont un qui a été exclu du protocole suite à la suspicion d’une sclérose en plaque.
1. Critères d’inclusion des patients :
Patients présentant un Episode dépressif majeur selon le DSM-IV (cf. Annexe 4) dans
le cadre d'un trouble de l'humeur unipolaire ou de type bipolaire de type 1 (au moins 3
épisodes dépressifs incluant l'épisode actuel).
Concernant l'EDM: Score à la MADRS > 22 Score à la YMRS < 12 Durée de
l'épisode <2 ans. Patient Hospitalisé ou suivi en consultation.
2. Critères de non inclusion:
Même critère que ceux en paragraphe 2.1.2, plus contre-indication à l’IRM.
3. Critères d’inclusion des témoins:
Indemnes de troubles psychiatriques et sans antécédents médicaux familial en
particulier de dépression et de troubles anxieux. Aucun traitement médicamenteux en cours (à
part traitement contraceptif). Les patients et les sujets ont donné leur consentement à l’étude
après une information détaillée.
1.2. Paradigme expérimental
Tâche de repos (Resting state)
Matériels et méthode étude d’imagerie
42
On peut étudier le resting-state network par l’activité effective (activations liées à la
connectivité lors du repos2) ou via les déactivations par rapport à une tâche expérimentale
(tâche de référence à soi).
Une IRMf de repos enregistre les variations du signal BOLD reflétant les variations
spontanées du signal indépendantes de toute stimulation externe. La consigne de la tâche de
repos donnée avant l’acquisition IRMf est dans notre étude : « Gardez les yeux fermés mais il
vous faut rester éveillé. Relaxez-vous et laissez vos pensées circuler librement. Essayez de ne
pas bouger »
Tâche de référence à soi en IRMf
Ce protocole est écrit d’après Lemogne et al., 2011 et présenté en figure 9. Les stimuli
consistaient en 144 photographies couleurs de valence émotionnelle positive, négative ou
neutre, dont 108 ont été utilisées au cours de l’IRMf et 36 lors d’une session d’exercice. Le
matériel utilisé est composé de 90 images positives, 90 images négatives et 90 images neutres
sélectionnées à partir de 2 banques de photographies dont l’intensité (arousal) et la valence
émotionnelle sont validés chez des sujets sains l’IAPS (Lang et al. 1997) et l’EPS (Empathy
Picture System, Geday et al. 2003, http://www.geday.net/eps, cf. Annexe 3). 45 images
neutres sont des photos d’extérieur, et 45 sont des images d’intérieur.
Trois conditions sont présentés: personnelle, générale et contrôle. Dans les conditions
personnelle et générale, autant d’images négatives que positives sont présentées aux sujets.
Dans la condition personnelle, les sujets répondaient s’ils pouvaient associer quelque chose de
personnelle à ces images (Grimm et al., 2009). Dans la condition générale, ils jugeaient si
l'image était positive ou négative. Chacune des photos soumises étant affectées aléatoirement
pour la condition. Dans la condition contrôle, des images neutres ont été présentées. Ils
devaient juger si la photo était prise à l'intérieur ou à l'extérieur. Dans toutes les conditions et
pour chaque image, les sujets ont répondu soit un «oui» ou «non» pour la condition
personnelle, un « positif » ou « négatif » pour la condition générale et une réponse
« extérieur » ou « intérieur » pour la condition contrôle via des boutons poussoirs
respectivement dans la main gauche ou droite.
Conditions Réponses
Personnelle oui non
Générale + -
Contrôle Intérieur Extérieur
2 Parfois nommé « rest » au long du rapport.
Figure 9: Design expérimental de l’expérience d’imagerie
Matériels et méthode étude d’imagerie
43
La tâche englobe un essai (run) effectué en dehors du scanner et trois runs durant
l’IRM. Chaque runs contient trois blocs. Chaque bloc étant associé à une seule condition.
L'ordre des conditions est contrebalancé selon les runs afin d'éviter de présenter la même
condition pour deux blocs consécutifs. Avant chaque bloc, la consigne rappelant la condition
est affichée durant 5s et suivie par une croix de fixation centrale durant 3,5s. Chaque bloc
contient 12 essais dont six images négatives et six images positives pour la condition
personnelle et générale et 12 images en extérieur ou intérieur pour les images neutres. Chaque
essai a consisté en une image affichée pendant 2,5s, suivie d'une croix de fixation de 3.5s. La
durée de chaque essai (soit 6s) a été calculée pour optimiser la réponse hémodynamique au
cours de l’échantillonnage de chaque bloc. Pour étudier le mode par défaut, chaque bloc
contient 6 événements nuls, constitués d'une croix de fixation pendant 2,5s. Les images et les
événements nuls sont mélangés de manière pseudo-aléatoire de telle sorte que les événements
de chaque type (c’est à dire positif, négatif, intérieur ou nul, extérieur ou nul) sont suivis l’un
de l’autre.
1.3. Analyse des données d’imagerie
Acquisition et pré-traitement des données d’imagerie
L’acquisition des données a été effectuée au CENIR (CEntre de NeuroImagerie de
Recherche) au moyen d’un scanner Siemens Trio 3T. 142 volumes ont été acquis pour chaque
run, avec un temps de répétition (TR) de 2,49 secondes et une taille de voxels fixées à
2x2x2mm. Une acquisition anatomique a également été réalisée. Le protocole a été présenté et
les réponses enregistrées à l’aide de scripts développés sous MatLab (www.mathworks.com).
Tous les traitements effectués sur les images ont été réalisés avec le logiciel SPM8 (développé
par le Wellcome Department of Cognitive Neurology, University College London, Royaume-
Uni http://www.fil.ion.ucl.ac.uk/spm/spm8.html) selon des procédures standards : Slice-
timing, réalignement des images, normalisation, ré-échantillonnage des images à une taille de
voxels 2x2x2mm.
Analyses statistiques
Les analyses statistiques des images fonctionnelles nous permettent de mettre en
évidence les régions du cerveau qui présentent une activité significativement plus élevée au
cours de l’exécution d’une tâche (e.g. condition self en référence à soi), qu’au cours de
l’exécution d’une autre tâche (e.g. condition intérieur/extérieur). Ces analyses se déroulent en
plusieurs étapes.
Dans un premier temps, une analyse statistique au niveau individuel est réalisée selon
une approche paramétrique, en utilisant un modèle linéaire généralisé appliqué à tous les
voxels (éléments de volume) du cerveau.
Au préalable, il faut construire le modèle prédictif de l’évolution des signaux
susceptibles d’être induits par la tâche. Chaque condition expérimentale est modélisée par une
Matériels et méthode étude d’imagerie
44
fonction de base (ou régresseur), selon une approche évènementielle, convoluée avec la
réponse hémodynamique canonique (addition des variations du signal, chacune modélisée par
une fonction hémodynamique, due à la présentation successive des stimuli). Les 6 paramètres
de mouvements du sujet, préalablement calculés par SPM, ont été rajoutés comme
covariables. Un filtre passe-haut est appliqué au modèle pour atténuer les dérives lentes du
signal dues au bruit physiologique. Le modèle est ensuite testé et ajusté en fonction des
données. Puis les contrastes entre la condition de référence à soi, la condition contrôle et la
condition de repos (présentation d’une croix de fixation) ont été estimés pour étudier
l’influence de ces conditions sur les variations du signal (self>contrôle, self>repos,
repos>contrôle et repos >self).
Dans un deuxième temps, une analyse de conjonction (par groupe) utilisant la méthode
de « conjonction null » (Nichols et al, 2005) a été réalisée selon l’approche par effet aléatoire
(« random effect ») qui prend en compte les variations inter-individuelles. Nous avons
focalisé notre analyse sur les régions médianes antérieures (cortex cingulaire antérieure et
cortex préfrontal médian) et postérieures (cortex cingulaire postérieur et précuneus) en
réalisant une approche en région d’intérêt. Pour cela, un masque, comprenant ces régions, a
été réalisé en utilisant l’atlas « Automated Anatomical Labelling » (AAL) inclus dans la boite
à outils Wake Forest University Pickatlas de SPM8. De façon similaire à l’équipe de
Withfield-Gabrieli (2011), nous avons réalisé une analyse de conjonction (p<0.05 non
corrigé):
* Entre les contrastes self>contrôle et repos>contrôle pour mettre en évidence
l’activation cérébrale commune à la référence à soi et au mode par défaut,
* Entre les contrastes self>contrôle et self>repos pour mettre en évidence l’activation
cérébrale spécifique à la référence à soi.
* Entre les contrastes repos>contrôle et repos>self pour mettre en évidence
l’activation cérébrale spécifique au mode par défaut.
De façon préliminaire, les différences statistiques d’activations des régions médianes
antérieurs et postérieures entre les conditions de référence à soi et de repos ont été testées
entre les deux groupes de sujets par une analyse de variance comprenant un facteur groupe
(témoins n=10/patients n=4) et un facteur condition (self>contrôle et repos >contrôle).
Résultats étude d’imagerie
45
2 Résultats de l’étude 2 : Tâche de référence à soi en IRMf comparant des
patients déprimés unipolaires et bipolaires par rapport à des témoins
2.1 Profils des réponses d’activation
Dans la seconde étude, nous avons utilisé l’IRMf pour comparer l’activation cérébrale
des structures corticales médianes de patients déprimés et de témoins sains lors d’une tâche de
référence à soi (observation du réseau du self) et durant une phase de repos (observation du
réseau du mode par défaut =rest). Le nombre de patients étant faible, nous distinguerons
uniquement les patterns d’activité du pool de patients déprimés (nUP=3, nBP=1) par rapport
aux témoins (n=10). Le seuil statistique pour l’ensemble des données est de p_non corrigé=
0.05.
Activité cérébrale chez les sujets sains
L’ensemble des résultats pour les témoins est présenté dans la figure ci-dessous (Fig.
10).
Figure 10: Régions activées pour le self (associer quelque chose de personnelle à des
images) et le repos (visualisation passive d’une croix de fixation) chez des sujets témoins
(n=10). Contraste entre les conditions en première et seconde colonne et conjonction en
Résultats étude d’imagerie
46
troisième colonne. a) Self et Rest > contrôle dans la région préfrontal médiane BA
(Brodmann Area) 10 et le cortex cingulaire postérieur BA 31; b) Self > contrôle et Rest dans
la région préfrontale médiale BA 9; c) Rest > Self et contrôle dans le cortex cingulaire
antérieur BA 24.
Référence à soi
Une plus grande activation au cours de la tâche de référence à soi par rapport à la tâche
contrôle (intérieur/extérieur) est retrouvée dans les régions habituellement associées à celle de
la référence à soi, incluant le Cortex PréFrontal Médian (CPFM), le cortex cingulaire
antérieur (ACC), et le cortex cingulaire postérieur (PCC). (Fig. 10 Self> contrôle) (Tableau
+).
BA x y z T score # voxels
Cortex cingulaire postérieur Gauche 31 -8 -48 26 3,77 444
Cortex cingulaire antérieur Droite 9&32 14 42 20 2,98 31
Gyrus frontal median Gauche 10 -8 52 -2 2,78 18
Gyrus frontal median supérieur Gauche 9 -10 44 32 2,76 21
Coordonnées (x,y,z) basées sur le MNI (Montreal Neurologic Institute). BA: Brodmann Area
Tableau 8: Région montrant une activation Self>contrôle chez les témoins
Mode par défaut
Il y a une plus grande activation durant le repos que dans la tâche contrôle des régions
typiquement associées au mode par défaut, incluant l’ACC étendu au CPFM, le PCC et le
précunéus. (Fig. 10 : Rest > contrôle) (Tableau 11).
BA x y z T score # voxels
Cortex cingulaire antérieur Droite 24 -2 34 6 3,58 496
Precuneus Droite 7 -6 -64 36 3,05 366
Coordonnées (x,y,z) basées sur le MNI (Montreal Neurologic Institute). BA: Brodmann Area
Tableau 11: Région montrant une activation Rest>contrôle chez les témoins
Association fonctionnelle
L’analyse de conjonction de la référence à soi et du repos (versus la tâche de contrôle)
révèle une activation commune au niveau de l’ACC étendu vers le CPFM ventral et du PCC.
(Fig. 10 : Self> contrôle & Rest > contrôle) (Tableau 12).
Dissociation fonctionnelle
L’analyse de conjonction de la référence à soi (versus Rest et la tâche de contrôle)
révèle une activation spécifique lors de la tache self du CPFM dorsal et du PCC. L’analyse de
conjonction du repos (versus Self et la tâche de contrôle) révèle une activation spécifique lors
de la tâche de repos de l’ACC. (Fig. 10) (Tableau 12).
Résultats étude d’imagerie
47
BA x y z T score # voxels
Région significative montrant une activation commune Self>contrôle et Rest>contrôle,
Cortex cingulaire postérieur Droite 31 10 -48 28 3,02 237
Cortex cingulaire antérieur/CPFM Droite 10 -8 52 -2 2,78 18
Région montrant une activation Self spécifique Self> contrôle & Self> Rest
Cortex cingulaire postérieur Gauche 29 -8 -46 8 2.64 54
Gyrus frontal médian supérieur Gauche 9 -8 46 34 2.45 18
Région montrant une activation Rest spécifique contrôle>contrôle & contrôle>self
Cortex cingulaire antérieur Gauche 24 -2 36 10 361 561
Coordonnées (x,y,z) basées sur le MNI (Montreal Neurologic Institute). BA: Brodmann Area
Tableau 12: Région significative dans l’analyse de conjonction chez les témoins
Activité cérébrale chez les patients déprimés
La figure ci-dessous regroupe les activations de l’expérience IRMf chez l’ensemble
des sujets déprimés (unipolaires (n=3) et bipolaire (n=1)). (Fig. 11)
Résultats étude d’imagerie
48
Figure 11: Régions activées pour le self (associer quelque chose de personnelle à des
images) et le repos (visualisation passive d’une croix de fixation) chez des sujets déprimés
(n=3 UP, n=1 BP). Contraste entre les conditions en première et seconde colonne et
conjonction en troisième colonne. a) Self et Rest > contrôle en région BA 10 et 31; b) Self >
contrôle et Rest en région BA 11; c) Rest > Self et contrôle : pas d’activation.
Référence à soi
Une plus grande activation au cours de la tâche de référence à soi par rapport à la tâche
contrôle (intérieur/extérieur) est retrouvée dans les régions habituellement associées à celle de
la référence à soi, incluant le Cortex PréFrontal Médian (CPFM), et le précunéus. (Fig. 11 :
Self> contrôle) (Tableau 13).
BA x y z T score # voxels
Gyrus frontal median droite 11 -6 54 -12 4,13 1272
Gyrus frontal median droite 10 10 48 14 2,96 139
Précunéus droite 31 -10 -56 30 3,37 55
Coordonnées (x,y,z) basées sur le MNI (Montreal Neurologic Institute). BA: Brodmann Area
Tableau 13: Région montrant une activation Self>contrôle chez des sujets déprimés (n=3
UP, n=1 BP)
Mode par défaut
Il y a une plus grande activation durant le repos que dans la tâche contrôle des régions
typiquement associées au mode par défaut, incluant le CPFM, et le PCC. (Fig. 11 : Rest >
contrôle) (Tableau 14).
BA x y z T score # voxels
Cortex cingulaire postérieur droite 31 -10 -52 28 3,43 141
droite 31 -6 -42 32 3,34 17
Cortex cingulaire antérieur droite 9 16 46 24 2,9 29
Gyrus frontal median droite 10 4 58 0 2,95 60
Coordonnées (x,y,z) basées sur le MNI (Montreal Neurologic Institute). BA: Brodmann Area
Tableau 14: Région montrant une activation Rest>contrôle chez des sujets déprimés
(n=3 UP, n=1 BP)
Association fonctionnelle
L’analyse de conjonction de la référence à soi et du repos (versus la tâche de contrôle)
révèle une activation commune au niveau du CPFM prégénual. (Fig. 11 : Self > contrôle &
Rest > contrôle) (Tableau 15).
Résultats étude d’imagerie
49
Dissociation fonctionnelle
L’analyse de conjonction de la référence à soi (versus Rest et la tâche de contrôle)
révèle une activation spécifique lors de la tache self du CPFM ventral. L’analyse de
conjonction du repos (versus Self et la tâche de contrôle) ne révèle pas d’activation spécifique
lors de la tâche de repos (Fig. 11) (Tableau 15).
BA x y z T score # voxels
Région significative montrant une activation conjonction Self>contrôle Rest>contrôle, Patients
Cortex cingulaire postérieur droite 31 -10 -54 28 3,4 48
Gyrus frontal median droite 10 4 58 0 2,95 60
Région montrant une activation Self spécifique Self> contrôle & Self> Rest, Patients
Gyrus frontal médian Gauche 11 -8 54 -12 331,0 3,03
Région montrant une activation Rest spécifique Rest>contrôle & Rest>self, Patients
Pas de clusters significatifs
Coordonnées (x,y,z) basées sur le MNI (Montreal Neurologic Institute). BA: Brodmann Area
Tableau 15: Région montrant une activation Rest>contrôle chez des sujets déprimés
(n=3 UP, n=1 BP)
Associations et dissociations fonctionnelles qualitative entre les groupes
La figure 12 ci-dessous regroupe les conjonctions self&Rest, Self spécifique
(Self>contrôle & Self>Rest), Rest spécifique (Rest>contrôle & Rest>Self) des déprimés
versus les sujets sains.
Résultats étude d’imagerie
50
Figure 12: Régions activées dans l’analyse de conjonction chez les unipolaires, les
bipolaires et les témoins. a)pour les déprimés (n=3 UP, n=1 BP);b) pour les sujets sains
(n=10)
L’ensemble des différences retrouvées entre les groupes en termes d’activation est
montré dans le tableau 16. Les patterns d’activation entre les témoins et les déprimés diffèrent
en plusieurs points. (Fig 12)
On ne retrouve pas de régions spécifiquement activées dans la tâche de repos par
rapport self. En condition self (self > rest et self > contrôle et conjonction) nous montrons une
activation spécifique au niveau du cortex préfrontal ventromédian chez les déprimés tandis
qu’elle est situé au niveau du cortex préfrontal dorsomédial chez les témoins, nous nous
intéresserons plus particulièrement à la différence d’activation du CMPF entre les deux
groupes de sujets selon la condition (self ou rest).
BA Déprimé T
Région significative montrant une activation conjonction Self>contrôle Rest>contrôle,
Cortex cingulaire antérieur Droite 10
X
Cortex cingulaire postérieur Droite 31
X X
Gyrus frontal médian/CPFM Gauche 9
X X
Région montrant une activation Self spécifique
Cortex cingulaire postérieur Gauche 29
X
Gyrus frontal médian (CPFM) Gauche 9
X X
Région montrant une activation Rest spécifique
Gyrus frontal médian Droite 10
X
Cortex cingulaire antérieur Gauche 24 X
Tableau 16: Différences d’activation au travers des différentes conjonctions pour les
déprimés (n=3 UP, n=1 BP) et les témoins.
3.2.2 Comparaison inter-groupe (déprimés vs témoins)
Afin de chercher à comparer l’activité cérébrale du groupe de patients (UP n=3, BP
n=1) vs les témoins, nous avons fait une ANOVA avec un facteur groupe à deux niveaux
(Témoin/dépressif) et un facteur condition à deux niveaux (self/Rest) (p=0,05 non corrigé).
Les analyses de conjonction montrant une différence d’implication du CMPF entre les
groupes au niveau de la condition self, nous nous concentrons uniquement sur l’interaction
groupe X condition.
L’ANOVA présenté en figure 13 met en évidence une interaction groupe x condition
au niveau de la partie ventral du CMPF (pic d’activation : -10,-44,-14, nombre de voxels :
167,F(1,24)=9.1 p<0.05). Les tests post-hoc de student révèlent une interaction Patient>témoins
x self >rest (pic d’activation : -10,-44,-14, nombre de voxels : 552, T(24)=3 p<0.05). Nous
montrons ainsi en figure 13 l’interaction suivante Patient (self>rest) > temoin (self>rest).
Résultats étude d’imagerie
51
Nous avons donc mis en évidence une plus grande activation de la partie ventrale du
cortex préfrontal médian dans la condition self comparée à la condition rest chez les patients
par rapport aux témoins.
Figure 13: Une plus grande activation du cortex préfrontal ventromédian (CPFMv)
en Self par rapport à Rest est montré uniquement pour les patients déprimés (n=3 UP, n=1
BP) par l’interaction groupe X condition.
Discussion étude d’imagerie
52
3. Discussion : étude d’imagerie comparant des sujets déprimés à des sujets sains
au niveau des CMS
Notre étude IRMf avait pour but initial de distinguer les patterns cérébraux au niveau
des CMS pour les patients bipolaires par rapport aux patients unipolaires comparés à un
groupe de sujets sains. Notre inclusion de patients étant trop faible nous avons décidés de les
regrouper en un groupe déprimé et de regarder les défauts d’activation des CMS par rapport
aux sujets sains.
Premièrement la tâche de référence à soi en IRMf pour les sujets sains permet
d’identifier les associations et les dissociations fonctionnelles dans les CMS entre le réseau du
self et le réseau du mode par défaut. Ces deux réseaux sont associés selon nos études au
niveau du CPFM ventral de l’ACC et du PCC (BA9 ,10 et 21) et répliques les découvertes de
la littérature (Qin et Northoff, 2011; Whitfield-Gabrieli et al., 2011). Ces réseaux sont
cependant dissociés en ce qui concerne le self spécifique et ce qui est spécifique au réseau du
mode par défaut.
L’activation spécifique du self dans notre étude est retrouvée dans la littérature au
niveau du CPFM dorsal (Whitfield-Gabrieli et al., 2011) et du PCC (Kelley et al., 2002 ;
Moran et al., 2006).
Concernant l’activation spécifique lors du repos, nous trouvons une activation au
niveau du cortex cingulaire antérieur (BA 24 tendant vers le CPFM en BA 10). Whitfield-
Gabrieli en 2011 avait quant à eux montré que le précunéus (BA7) était spécifique du réseau
de mode par défaut par rapport à celui du self. Notre activation au niveau de l’ACC doit
directement être due à notre tâche d’IRMf. En effet nous utilisons une tâche de référence à soi
avec des images de valences pouvant avoir un contenu émotionnel, alors que Whitfield-
Gabrieli et son équipe utilisaient une tâche de jugement de mots dépourvu de contenu
émotionnel. Moran et collaborateurs en 2006 ont cherché à différencier la composante
affective et cognitive du self, ils ont alors montré que l’ACC était spécifiquement activé pour
la composante émotionnelle du self (via la valence). Notre activation de l’ACC pour
l’activation spécifique du réseau par défaut doit donc être due au contenu émotionnel de nos
images marquant nos sujets même durant les périodes de fixation de la croix.
Malgré une divergence au niveau de la région d’activation spécifique au mode par
défaut (rest), ces résultats confirment l’étude de Whitfield-Gabrieli qu’il y a un système
neuronal commun entre les régions du self et du mode par défaut, ainsi que des régions
spécifiques du réseau du self et du réseau du mode par défaut.
Comparaison des CMS entre les témoins et les sujets déprimés
A partir de notre étude nous montrons également une plus grande activation de la
partie ventrale du cortex préfrontal médian dans la condition self chez les patients par rapport
aux témoins. Ces résultats vont dans le sens d’une augmentation du CMPF dans la dépression
lors des tâches de référence à soi (Lemogne et al., 2010 ; Yoshimura et al., 2010).
Discussion étude d’imagerie
53
Les résultats préliminaires comparant directement les déprimés aux témoins, valident
aussi l’idée que le cortex préfrontal médian ventral et dorsal peuvent être activés
différemment.
De plus on ne retrouve pas de régions spécifiquement activées dans la tâche de repos
par rapport au self. Ces résultats vont dans le sens de la revue de Lemogne et al (2011)
inférant à partir de quatre études sur la référence à soi et le CMPF dans la dépression que la
focalisation sur soi dans la dépression peut apparaître comme un processus en compétition
avec le contrôle cognitif et ce due à l’absence d'inhibition du réseau du mode par défaut.
(Sheline et al., 2010).
Limites
55
Plusieurs éléments peuvent limiter l’interprétation des résultats de nos deux études.
Tout d’abord le faible nombre de patients pour la tâche comportementale et pour la tâche
IRM.
Pour les tests comportementaux, l'absence de sujets contrôles sains ne nous permet pas
de confronter parfaitement nos résultats aux études antérieures sur les SRE. L'inclusion de
contrôles sains aurait permis de savoir si les sujets bipolaires présentent un profil
intermédiaire entre les unipolaires et les sujets sains.
Notre population d'étude comprend des patients qui sont sous traitements
médicamenteux. Notre étude ne prend pas en compte les éventuelles interactions que peuvent
avoir les médicaments avec les déficits cognitifs (e.g. ralentissement moteur) alors qu’elle
pourrait jouer un rôle sur les performances mnésiques (Glue et al., 1987). Notre étude devra
donc être répliquée sur des patients sans traitements.
Une tâche de référence à soi en IRM peut se faire sous deux angles : par du matériel
photographique, en jugeant si les photographies peuvent évoquer quelque chose de
personnelles ou bien via du matériel verbal en endossant ou non un trait de personnalité. Dans
le premier exemple (photographie), la relation à soi peut sembler essentiellement intrinsèque
(rajoutant la variable émotion) : le stimulus semble en lui-même relié ou non au sujet. Dans le
second exemple (adjectifs), la nature extrinsèque de la relation à soi du stimulus est plus
évidente : la réponse du sujet dépend de la représentation qu’il a de lui-même, c’est-à-dire du
soi narratif qu’il a construit.
Conclusion
57
Notre étude comportementale montre des différences de traitement des souvenirs selon
leur valence dans la dépression bipolaire par rapport à la dépression unipolaire. La variabilité
des réponses émotionnelles chez les bipolaires pourrait représenter un biomarqueur facilitant
le diagnostic différentiel entre dépression unipolaire et bipolaire. Ce champ d’investigation
peut donc déboucher sur des implications thérapeutiques concrètes. Après avoir inclue plus de
patients et de sujets, il sera intéressant de savoir si les résultats persistent ainsi que de savoir si
ce biomarqueur est un biomarqueur d’état, c'est-à-dire qu’il caractérise la phase aigue
dépressive de la bipolarité et n’est plus présent lors des phases de manie et euthymique, ou
bien s’il représente un biomarqueur trait présent quelle que soit la phase dans lequel se trouve
le patient bipolaire.
Concernant notre étude en IRMf, on trouve une plus grande activation de la partie
ventrale du cortex préfrontal médian dans la condition self chez les patients par rapport aux
témoins.
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Annexe
68
Annexe 1 : Caractéristiques des patients et témoins (étude comportementale)
Caractéristiques démographiques et cliniques Différence
moyenne (écart-type)
UP versus BP
UP (n=12) BP (n=6)
W ou X² p-value
Age à l'inclusion 51,63 (16,36) 49,71 (12,51) W=43 p=0,717
Sexe (H:F)
7H:5F
4H:2F
X²=0,117 p=0,732
Niveau Socioculturel (NSC)
4,54 (1,5)
5,14 (0,89)
W=30,5 p=0,478
BDI 19,09 (6,57) 20,57 (6,05) W=36,5 p=0,891
Tableau X : Caractéristiques démographiques et cliniques pour les tests comportementaux
Echelle de Beck (BDI : Beck Depression Inventory) : 0 à 3 : pas de dépression 4 à 7 : dépression légère
8 à 15 : dépression d'intensité moyenne à modérée
16 et plus : dépression sévère
Le BDI est une mesure des cognitions dépressives. Il comprend 13
groupes d’items, permettant d’évaluer l’intensité du syndrome
dépressif sur les deux dernières semaines.
NSC niveau
Aucun diplôme ou CEP 1
BEPC 2
CAP, BEP, équivalent 3
Bac, brevet ou
équivalent 4
Bac +2 5
Diplôme supérieur 6
Annexe
69
Annexe 2 : Caractéristiques des patients (étude d’imagerie)
Caractéristiques démographiques et cliniques
moyenne (écart-type)
UP (n=3) BP
(n=1) Témoin (n=10)
Age à l'inclusion 53.60(4.04) 35,00 44,5
Sexe (H:F) 0 :3 0 :1 2 :8
Niveau Socio-Culturel 4.33(1.73) 4 4
Age du 1er épisode 35(15.7) 20
Nombre d'EDM 3(0) 3
Nombre épisodes
maniaques 0(0) 2
Durée de la maladie 18.67(11,7) 15,00
YMRS 3,67(1,52) 3
MADRS 26.67(3.05) 26
BDRS 23(6.55) 21
Tableau X : Caractéristiques démographiques et cliniques pour le test d’imagerie
Echelle YMRS (Young Mania Rating Scale): YMRS=0 à 20 : Euthymie
YMRS=20 à 60 : Manie
Echelle MADRS (Young Mania Rating Scale): Score maximal de 60.
Annexe
70
Annexe 3 : Exemple de stimuli négatif, neutre et positif
Depuis la banque de photographie de l’EPS (Empathy Picture System, Geday et al. 2003,
http://www.geday.net/eps):
Stimulus à valence émotionnelle négative
Stimulus neutre
Stimulus à valence émotionnelle positive
Distribution du score de valence des images selon Geday et al,. Neuroimage 2003, où - :
indicateur de malaise et + : indicateur de confort, et où la valeur numérique "1" signifie "un
peu", "2" signifie "modérément", et "3" signifie "beaucoup". "0" étant l’état "neutre". Neg :
négatif, neu : neutre, pos : positif, sit : situation, face : visage pour un lot 1 et 2.
Annexe
71
Annexe 4 : Critères diagnostiques des troubles Psychiatriques
(DSM IV-TR)
Critères issus du DSM IV-TR (American Psychiatric Association 2003).
F3x.x [296.xx] Trouble dépressif majeur
A. Au moins cinq des symptômes suivants doivent
avoir été présents pendant une même période d'une
durée de deux semaines et avoir représenté un
changement par rapport au fonctionnement
antérieur ; au moins un des symptômes est soit (1)
une humeur dépressive, soit (2) une perte (l'intérêt
ou de plaisir) :
(1) Humeur dépressive présente pratiquement toute
la journée, presque tous les jours, signalée par le
sujet ou observée par les autres.
(2) Diminution marquée de l'intérêt ou du plaisir
pour toutes ou presque toutes les activités
pratiquement toute la journée, presque tous les
jours.
(3) Perte ou gain rie poids significatif en l'absence
de régime ou diminution ou augmentation de
l'appétit presque tous les jours.
(4) Insomnie ou hypersomnie presque tous les
jours.
(5) Agitation ou ralentissement psychomoteur
presque tous les jours.
(6) Fatigue ou perte d'énergie presque tous les
jours.
(7) Sentiment de dévalorisation ou de culpabilité
excessive ou inappropriée presque tous les jours.
(8) Diminution de l'aptitude à penser ou à se
concentrer ou indécision presque tous les jours.
(9) Pensées de mort récurrentes (pas seulement une
peur de mourir), idées suicidaires récurrentes sans
plan précis ou tentative de suicide ou plan précis
pour se suicider.
B. Les symptômes ne répondent pas aux critères
d’'Épisode mixte.
C. Les symptômes induisent une souffrance
cliniquement significative ou une altération du
fonctionnement social, professionnel.
D. Les symptômes ne sont pas imputables aux
effets physiologiques directs d'une substance ou
d'une affection médicale générale.
E. Les symptômes ne sont pas mieux expliqués par
un deuil, après la mort d'un être cher, les
symptômes persistent pendant plus de deux mois ou
s'accompagnent d'une altération marquée du
fonctionnement, de préoccupations morbides de
dévalorisation, d'idées suicidaires, de symptômes
psychotiques ou d'un ralentissement psychomoteur.
F31.x [296.5x] Trouble bipolaire I, Épisode le
plus récent dépressif
A. Épisode dépressif majeur actuel.
B. Au moins un antécédent d'Épisode maniaque ou
d'Épisode mixte.
C. les épisodes thymiques évoqués aux critères A
et B ne sont pas mieux expliqués par un Trouble
schizo-affectif et ils ne sont pas surajoutés à une
Schizophrénie, un Trouble schizophréniforme, un
Trouble délirant, ou un Trouble psychotique non
spécifié.
F31.8 1296.891 Trouble bipolaire II
A. Présence (ou antécédent) d'un ou de plusieurs
Épisodes dépressifs majeurs.
B. Présence (ou antécédent) d'au moins un Épisode
hypomaniaque.
C. Il n'a jamais existé d'Épisode maniaque ni
d'Épisode mixte.
D. Les symptômes thymiques évoqués aux critères
A et B ne sont pas mieux expliqués par un Trouble
schizo-affectif et ne sont pas surajoutés à une
Schizophrénie, un Trouble schizophréniforme, un
Trouble délirant, ou un Trouble psychotique non
spécifié.
E. Les symptômes entraînent une souffrance
cliniquement significative ou une altération du
fonctionnement social, professionnel, ou clans
d'autres domaines importants.
Annexe
73
Annexe 6 : Banque de mots validée utilisée pour le paradigme (Choubani et al,
2006)
Les mots soulignés sont les distracteurs lors de la phase de reconnaissance
Mots à valence
négative :
Agaçant
Agressif
Amoral
Arrogant
Borné
Brutal
Calomnieux
Complexe
Cruel
Cupide
Détestable
Egoïste
Ennuyeux
Envieux
Fainéant
Fourbe
Fuyant
Grossier
Haineux
Hargneux
Hautain
Impoli
Infidèle
Ingrat
Injurieux
Insultant
Intolérant
Irascible
Irritable
Jaloux
Lâche
Lugubre
Malhonnête
Malsain
Maussade
Médisant
Menaçant
Menteur
Méprisant
Mesquin
Négligent
Obscène
Odieux
Ordurier
Paresseux
Pénible
Perfide
Pervers
Peureux
Radin
Rancunier
Sadique
Sournois
Traître
Tricheur
Vaniteux
Vantard
Vicieux
Violent
Vulgaire
Mots à valence
positive :
Affectueux
Aimable
Altruiste
Amical
Attentif
Câlin
Chaleureux
Charitable
Charmant
Clément
Conciliant
Confiant
Cordial
Courageux
Courtois
Dévoué
Digne
Diplomate
Doux
Efficace
Equilibré
Fidèle
Franc
Fraternel
Galant
Généreux
Gentil
Gracieux
Hardi
Honnête
Honorable
Imaginatif
Indulgent
Intègre
Inventif
Joyeux
Juste
Loyal
Magnanime
Modeste
Optimiste
Ordonné
Patient
Performant
Poli
Ponctuel
Prévenant
Sage
Sensé
Serein
Serviable
Sincère
Sociable
Soigneux
Solidaire
Talentueux
Tendre
Tolérant
Vaillant
Vertueux