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8/9/2019 Magazine Croix-Rouge, Croissant-Rouge : le visage de lhumanit
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La guerre dans les ruesLemploi darmes hautement destructrices dans les villes viole-t-il le droit de la guerre ?
chapper la violenceAprs les guerres et les catastrophes, la violence prend racine dans certaines villes
Trouver refugePour les handicaps, sismes et inondations sont encore plus terriants
Le visage
de lhumanit
Croix-Rouge Croissant-RougeN U M R O 3 . 2 0 1 4 w w w . r e d c r o s s . i n t
L E M A G A Z I N E D U M O U V E M E N T I N T E R N A T I O N A L
D E L A C R O I X R O U G E E T D U C R O I S S A N T R O U G E
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Le Mouvement international de la Croix-Rouge
et du Croissant-Rouge comprend trois composantes:
le Comit international de la Croix-Rouge (CICR), la Fdration
internationale des Socits de la Croix-Rouge et du
Croissant-Rouge (FICR) et les Socits nationales.
Organisation impartiale, neutre et indpendante,
le Comit international de la Croix-Rouge
(CICR)a la mission exclusivement humanitaire
de protger la vie et la dignit des victimes de
conflits arms et dautres situations de violence,et de leur porter assistance. Le CICR sefforce
galement de prvenir la souffrance par la
promotion et le renforcement du droit et des
principes humanitaires universels. Cr en 1863,
le CICR est lorigine des Conventions de Genve
et du Mouvement international de la Croix-Rouge
et du Croissant-Rouge, dont il dirige et coordonne
les activits internationales dans les conflits
arms et les autres situations de violence.
La Fdration internationale des Socits
de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge
(FICR) est le plus vaste rseau humanitaire de
volontaires au monde. Il touche chaque anne,
travers ses 189 Socits nationales, 150 millionsde personnes. Ensemble, nous uvrons avant,
pendant et aprs les catastrophes et les urgences
sanitaires pour rpondre aux besoins et amliorer
les conditions dexistence des personnes
vulnrables. La FICR agit de faon impartiale,
sans distinction de nationalit, de race, de sexe,
de croyances religieuses, de classe ou dopinion
politique. Guide par la Stratgie 2020 son plan
daction collectif pour relever les grands dfis
de la dcennie en matire daide humanitaire etde dveloppement , la FICR est dtermine
sauver des vies et changer les mentalits.
Le Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rougeest guid par sept Principes fondamentaux :
humanit, impartialit, neutralit, indpendance, volontariat, unitet universalit.
Toutes les activits de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge poursuivent le mme objectif :aider ceux qui souffrent, sans discrimination aucune, et contribuer ainsi la paix dans le monde.
CICR
Fdration internationale des Socitsde la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge
Les Socits nationales de la Croix-Rouge et
du Croissant-Rougemettent en application les
buts et les principes du Mouvement international
de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge dans
189 pays. Elles y assument le rle dauxiliairesdes pouvoirs publics pour tout ce qui concerne
lhumanitaire et y conduisent des activits dans
des domaines tels que les secours en cas de
catastrophe, les services de sant et lassistance
sociale. En temps de guerre, elles fournissent
une assistance la population civile affecte et
apportent leur soutien aux services de sant de
larme, le cas chant.
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LA VILLE DE KENEMA, dans la troisimezone urbaine de Sierra Leone, est lunedes plus durement touches par laambe pidmique de maladie virus Ebola
en Afrique occidentale. Des quipes locales
et internationales de soignants de la Croix-
Rouge et du Croissant-Rouge sy activent,
risquant leur vie quotidiennement pour
que toute personne admise dans le centre
de soins durgence de la FICR bncie des
meilleures chances de survie. Le centre a ou-
vert ses portes en septembre la demande
du gouvernement sierra-lonais et il devrait
fonctionner pendant 12 mois.
Paralllement, depuis le mois de mars, des
milliers demploys et de volontaires Croix-
Rouge forms travaillent darrache-pied en
Guine, au Libria et en Sierra Leone pour in-former et mobiliser les communauts, pour
soigner les malades et pour inhumer les vic-
times sans risque et dans la dignit : autant
de tches essentielles pour juguler lpid-
mie. Ces agents sont les hros sur le front
dun effort mondial pour empcher Ebola de
stendre davantage encore. La Croix-Rouge
et le Croissant-Rouge ont aussi dispens une
prparation aux situations durgence et des
cours de formation dans 15 pays dAfrique
dj touchs ou exposs au risque.
Grce leur labeur, nous nirons par vaincre
cette maladie. Dores et dj, cependant, une
question cruciale simpose : et aprs ? Nous
contenterons-nous de pousser un grand sou-
pir de soulagement pour passer dautres
dossiers, ou saurons-nous tirer les leons de
cette pidmie sans prcdent ?
Si cette pidmie rvle une chose, cest bien
de quelle manire foudroyante une maladie
peut ravager des socits dpourvues de sys-tmes sanitaires solides et fonctionnels pour
dtecter les maladies, informer la population
et ragir rapidement lchelle ncessaire.
Mme dans les pays les plus avancs, la
ambe pidmique a rvl des lacunes en
matire de prparation, de formation et de
matriel. Dans ces tats fragiles, qui mer-
gent tout juste des tnbres de la guerre et
dannes dinstabilit politique, le manque
de lits dhpital, de personnel, dambulances
et dautres outils essentiels a fait que de
nombreuses personnes nont jamais t hos-
pitalises, mais renvoyes chez elles pour y
tre soignes par leurs proches, qui souvent
ont t contamins leur tour.
La crise a aussi mis au jour de graves lacunes
dans la capacit de raction des organi-
sations humanitaires internationales, des
organisations de sant et des donateurs. Une
importance excessive a t accorde au cours
des dernires annes la ralisation de pro-jets ciblant un problme ou une maladie, ou
axs sur des objectifs de sant spciques,
plutt que sur le dveloppement de sys-
tmes de sant fonctionnels, capables de
ragir une large gamme de catastrophes
sanitaires ou naturelles inattendues.
Le Mouvement de la Croix-Rouge et du
Croissant-Rouge continuera pauler les
communauts touches, avant, pendant et
aprs lpidmie, et soutenir le dveloppe-
ment des capacits des Socits nationales
en tant que partenaires de premier plan dans
les rseaux locaux de prparation et de pr-
vention.
Tout ceci ne suffi ra pas, cependant, sans in-
vestissements, aussi bien publics que privs,
dans des solutions long terme qui en-
globent lducation, la bonne gouvernance,
de meilleures infrastructures et des systmes
de sant qui fonctionnent bien. Il y faudra du
temps et de largent, certes, mais les cots delautre option des ambes meurtrires
toujours plus nombreuses sont encore
plus levs.
Linitiative lance dernirement par la Banque
mondiale an de crer un fonds durgence
dot de 20 milliards de dollars est un pas dans
la bonne direction. Cet investissement devrait
toutefois aussi contribuer au dveloppement
de systmes qui empcheront de futures
flambes, qui les dtecteront rapidement
lorsquelles se produiront et qui aideront les
communauts locales ragir par leurs propres
moyens. De nombreux tats fragiles auront
toujours besoin dune aide humanitaire ext-
rieure durant les situations durgence, mais le
dveloppement des capacits locales, bas sur
les connaissances locales et soutenu par elles,
pourrait grandement rduire ces besoins.
Au sein du Mouvement de la Croix-Rouge et
du Croissant-Rouge, nous uvrons depuis
de nombreuses annes au renforcement dela rsilience des communauts face aux ca-
tastrophes et aux urgences sanitaires. Face
des maladies mortelles telles que la dengue,
le cholra, le paludisme, le VIH/sida et Ebola,
la riposte rside presque invariablement dans
des solutions globales qui font appel la fois
aux communauts, aux collectivits locales et
aux gouvernements, ainsi quaux coles, aux
institutions mdicales locales et la socit
civile, en unissant les efforts de tous.
Alors que nous travaillons lradication dEbola
en Afrique occidentale et ailleurs, jexhorte la
communaut internationale dployer des
ressources une chelle qui rete lampleur
des diffi cults et des sacrices faits par ceux qui
se battent sur le front. Nous devons aussi garder
le regard tourn vers lavenir, pour que, une fois
ce au vaincu, nous puissions canaliser nos
nergies vers la prochaine tape : faire en sorte
que toutes les nations fragiles deviennent plus
saines, plus sres et mieux prpares.
Elhadj As Sy
Secrtaire gnral de la Fdration internationale des
Socits de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge.
Photo:FICR
Tirer les
leons dEbola
ditorial
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Appel lhumanitEn Irak et en Syrie, la prolifration de
groupes arms et les rcentes frappes
ariennes internationales ont aggrav
les consquences humanitaires des
conits et rendu plus diffi cile encore
lacheminement de laide humanitaire.
Les conits en Syrie et en Irak mettent
chaque jour en pril un nombre
toujours plus grand de personnes, a
dclar Dominik Stillhart, directeur des
oprations du CICR. Le CICR a lanc un
appel toutes les parties impliques
dans ces conits pour quelles
respectent le principe fondamental
de la dignit humaine, pargnent la
population civile les effets des hostilits,
et facilitent une action humanitaire
neutre, indpendante et impartiale.
Petites armes, grands effetsUn trait sur le commerce des
armes qui rglemente les transferts
internationaux darmes classiques est
entr dernirement en vigueur aprs
sa ratication par 50 pays. Les partisans
de ce texte, dont le CICR, affi rment
quil sagit dun progrs essentiel vers
la rduction des souffrances humaines
causes par la prolifration des armes
classiques, depuis les armes lgres
et les munitions jusquaux chars de
combat, avions de chasse et naviresde guerre. Lorsquils prennent des
dcisions sur des transferts d armes, les
pays doivent dsormais tenir compte
des consquences de leurs actes en
termes humanitaires.
Secours la frontireDes milliers de Libyens et de travailleurs
trangers ont fui en Tunisie pour
chapper aux affrontements arms
en Libye. Le Croissant-Rouge tunisien
a ouvert une base oprationnelle
proximit de la frontire pour fournir
de la nourriture, un appui psychosocial
et dautres services, avec laide de la
FICR et du gouvernement du Japon.
Le Croissant-Rouge libyen, lune des
rares organisations humanitaires
encore luvre en Libye, a fourni une
assistance mdicale et des secours
durgence depuis le dbut
des violences au mois de mai.
Face la dgradation des conditions
de scurit dans le pays, le CICR a
temporairement vacu ses employs
internationaux Tunis en juillet. Le
CICR a collabor avec le Croissant-
Rouge libyen, avec lappui de 130
collaborateurs locaux, pour apporter
une aide essentielle aux hpitaux du
pays, pour ragir aux urgences et pour
secourir les personnes dplaces.
Des militairesdbattent du DIHDes offi ciers suprieurs de 57 pays se
sont runis Xian (Chine) la n du
mois de septembre pour participer
latelier pour offi ciers suprieurs sur
les rgles internationales rgissant
les oprations militaires (SWIRMO)
2014. Dans un exercice de simulation,
les offi ciers avaient pour mission de
librer une petite le sous contrle
de lennemi tout en respectant le
droit international humanitaire (DIH).
Organis conjointement par le CICR
et lArme populaire de libration de
Chine, latelier SWIRMO 2014 a offert
aux militaires de haut rang une occasionsans pareil dchanger leurs expriences
sur la diffi cult dappliquer le droit
rgissant les oprations militaires.
Aujourdhui, le droit des conits arms
est confront de nombreux ds, il est
donc capital que les pays amliorent
la communication sur ce sujet, assure
Yan Jun, secrtaire gnral adjoint du
dpartement de politique gnrale
de lArme populaire de libration de
Chine.
Au Pakistan, la moussondclenche des inondationsLes pluies tardives de la mousson au
mois de septembre ont provoqu
dimmenses inondations dans de
vastes tendues du Pakistan, touchant
quelque 2 millions de personnes.
Lautorit nationale de lutte contre
les catastrophes a annonc que prs
de 44 000 foyers et plus de 600 000
hectares de cultures avaient t dtruits,
tandis que plus de 300 personnes ont
perdu la vie. La Socit pakistanaise
du Croissant-Rouge a immdiatement
distribu des vivres et des articles de
secours tentes, bches, trousses
darticles dhygine et ustensiles
quotidiens 13 000 familles. Kausar
Bibi, une femme ge de 40 ans,
raconte : Tout le village tait sous deux
mtres deau. Nous sommes vivants,
mais nous avons tout perdu.
Encore des migrantsdisparus en merLes mois rcents ont t lune des
priodes les plus meurtrires des
dernires annes pour les migrants
sur les mers. Plus de 750 personnes,
venant en majorit du Moyen-Orient
et dAfrique, se sont noyes en
Mditerranne en cherchant gagner
lEurope. Les migrants prennent souvent
la mer dans des bateaux de pche vieux
et surchargs qui parfois nont pas assez
de carburant pour gagner les rivageseuropens. Pendant que des Socits
nationales comme la Croix-Rouge
italienne dlivrent les premiers secours,
apportent une assistance mdicale et un
soutien psychosocial, la FICR en appelle
une meilleure coopration entre pays
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chosPersonne ne veut mapprocher. Les
gens ont peur. Ils refusent mme detoucher notre argent si nous voulonsacheter quelque chose au magasinou manger au restaurant.
Nelson Sayon, 29 ans, membre de lquipe
dinhumation sans risque et dans la dignit de la
Croix-Rouge du Libria dans la capitale du pays,
Monrovia, cit par le magazine Time.
1 : la longueur (en kilomtres) dune
charpe tricote la main la mmoire
des personnes disparues au Prou. En
aot, lcharpe a t drape autour dunbtiment du sige du CICR Genve
pour marquer la Journe internationale
des personnes disparues*.
44 : pourcentage de dcs lis
des catastrophes causes par les
inondations en 2013. Les inondations
sont le type de catastrophe qui fait le
plus de victimes chaque anne. Les
temptes ont caus 41 % des dcs
lis aux catastrophes en 2013**.
81 : pourcentage de personnes
touches par les catastrophes en 2013
vivant en Afrique**.
97 : pourcentage des enterrements de
victimes dEbola en Guine effectus
par la Croix-Rouge guinenne**.
529 : nombre de catastrophes signales
dans le monde entier en 2013, dont 337
catastrophes naturelles et 192 causes
par lhomme**.810 : nombre de catastrophes signales
en 2005, la pire anne en termes de
nombre dvnements signals depuis
que des archives ables existent**.
9533 : nombre de volontaires forms
pour faire face la ambe dEbola
entre mars et novembre 2014***.
102 000 : nombre dinterventions
chirurgicales ralises Gaza entre juillet
et septembre par les autorits mdicales,
pour partie avec le soutien du CICR*.
100 millions :estimation du nombre
de personnes touches par des
catastrophes en 2013 nettement
infrieur aux niveaux observs entre
2007 et 2011**.
Sources: * CICR; ** Centre de recherche sur lpidmiologie des catastrophes; *** FICR
Une anne peine aprs lun des typhons les plus puissants jamais enregistrs
aux Philippines, les efforts de relvement commencent porter leurs fruits. Maria
Redubla Liporada peut en tmoigner : elle est lune des milliers de bnciaires
qui ont reu une subvention en espces pour moyens de subsistance de la part
du Mouvement Croix-Rouge Croissant-Rouge. Elle a utilis largent pour metre
sur pied sa boulangerie. Sur cette photographie, elle traverse un cours deau pour
aller vendre des gteaux de riz dans son village Burauen, province de Leyte,
dans le centre des Philippines.
dorigine, pays de transit et pays de
destination pour prserver la dignit et
la scurit de tous les migrants, quel que
soit leur statut juridique.
La crise alimentairemenace en SomalieTrois ans aprs la dernire grave
crise alimentaire en Somalie, une
part toujours plus importante de la
population fait nouveau face de
graves problmes. Selon Mohamed
Sheikh Ali, qui coordonne les activits
du CICR dassistance et doptimisation
de la production alimentaire, Plusieurs
facteurs contribuent lmergence de
diffrentes situations problmatiques
ponctuelles dans le centre et le sud dupays, mais galement dans lextrme
nord de la Somalie. Les habitants les
plus durement touchs sont ceux qui
subissent les consquences combines
des chocs climatiques et de la violence
lie au conit.
Photo:CherylGagalac/FICR
Indice humanitaire
En bref...
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26. Mon histoire
18. Hors de la zone de tir
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Couverture : Un membre dune quipe dinhumation sans risque et
dans la dignit de la Croix-Rouge du Libria se prpare dsinfecter ledomicile dune personne dcde souponne davoir succomb lamaladie virus Ebola Monrovia (Libria). Photo : Victor Lacken/FICR
Photos sur cette page, de haut en bas : Katherine Mueller/FICR; Victor Lacken/FICR;Annibale Greco/CICR; Vladimir Rojas/FICR; Socit de la Croix-Rouge du Japon
En couverture 4Le visage de lhumanitCouverts de la tte aux pieds de vtements de protection,
les volontaires en premire ligne du combat contrela maladie virus Ebola reprsentent le plus grand espoirpour les personnes atteintes de cette maladie mortelleet pour la prvention dune pidmie mondiale.
Enterrer les morts dEbola 10Des quipes de jeunes volontaires sont luvre, souventdu matin la nuit tombe pour effectuer lune des tchesles plus critiques et les plus dangereuses dans la luttecontre la maladie : inhumer les corps des victimes.
Droit international humanitaire 12Des villes sous le feu
Tirs dartillerie, de mortier, bombes lches par avion,roquettes et missiles sont quelques-unes des armesparticulirement ltales et destructrices employesaujourdhui dans des zones urbaines densment peuples.
Focus 14La guerre dans les ruesAvec lurbanisation croissante sous toutes les latitudes,la guerre moderne se droule elle aussi de plus en plussouvent entre les immeubles dhabitation, dans les rues,les quartiers, les centres commerciaux et les marchs desgrandes villes. Ces images illustrent les rpercussions long terme et les cots de la guerre mene dans les villes.
Violences urbaines 18chapper la violenceDans le sillage de la guerre et des catastrophes naturelles,la violence a pris racine dans de nombreuses zones urbainesdAmrique centrale en proie la pauvret. Quatre Socitsnationales de la rgion viennent en aide aux jeunes quigardent lespoir dune autre voie mais cela suffi ra-t-ilpour tenir la violence lcart ?
4. Le visage de lhumanit
10. Enterrer les morts dEbola
14. La guerre dans les rues
Rduction des risquesdes catastrophes 23Trouver refuge
Vivre un tremblement de terre est une preuveterriante. Imagine-t-on ce quelle reprsente pourune personne mal voyante ou en chaise roulante ?Un programme de prparation aux catastrophes dela Croix-Rouge du Nicaragua, destin aux personneshandicapes, est un exemple des activits menes parles Socits nationales pour rduire les risques lisaux catastrophes naturelles ou dues lhomme.
150 ans daction humanitaire 24Aux sources de lHistoireEn janvier 2015, le CICR ouvrira ses archivesconcernant les oprations de la priode 1965-1975.
Pour les historiens qui tudient les conits de lan du XXesicle, cest une occasion sans pareil etpassionnante de mieux comprendre une poque quifut cruciale pour laction humanitaire.
Portraits 26Mon histoire Croix-RougeCroissant-RougeLe rcit mouvant dun agent de sant de longue datedu Mouvement, une histoire de vie, de mort et de sang,des souvenirs de la cration de la Croix-Rouge du Timor-Leste, et dautres rcits encore.
Supports dinformation 29Entre autres publications du Mouvement, le Rapport
sur les catastrophes dans le monde2014 de la FICRanalyse limpact de la culture sur la prparation auxcatastrophes, tandis que le CICR publie un guide surles enfants en dtention.
SommaireNUMRO 3 .2014 .www.redcross.int
Veuillez adresser vos articles, demandes de renseignementset toute correspondance :
Croix-Rouge, Croissant-RougeCase po stale 303, CH-1211 Genve 19, Suisse.Courrie r lectronique : [email protected] n ISBN 1019-9349
Rdacteur en chefMalcolm Lucard
Secrtaire de rdactionPaul Lemerise
dition franaiseDominique Leveill
MaquetteBaseline Arts Ltd., Oxford (Royaume-Uni)
Mise en pagesNew Internationalist, Oxford (Royaume-Uni)
ImpressionSur papier exempt de chlore par IRL Plus SA, Lausanne (Suisse)
Comit de rdactionCICR FICRMohini Ghai Kramer Benot CarpentierDorothea Krimitsas Pierre KremerSophie Orr Nina de Rochefort
Nous remercions chaleureusement les chercheurs et le personnel dappuidu CICR, de la FICR et des Socits nationales pour leur concours.
Croix-Rouge, Croissant-Rougeparat trois fois par an, en languesanglaise, arabe, chinoise, espagnole, franaise et russe. Il est tir plus de 70 000 exemplaires et d iffus dans 189 pays.
Les opinions exprimes nengagent que les auteurs des articles et neretent pas ncessairement lopinion du Mouvement internationalde la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge. Les articles non sollicitssont les bienvenus, mais ne seront pas renvoys.
La rdaction se rserve le droit de rcrire tous les articles. Les articles et lesphotographies non soumis au droit dauteur peuvent tre reproduits sansautorisation pralable; prire de citer Croix-Rouge, Croissant-Rouge.
Les cartes publies dans ce magazine ont une valeur strictementinformative et sont dnues de toute signication politique.
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Des milliers de volontaires ont le courage et lacompassion ncessaires pour regarder en facelun des aux les plus meurtriers. Cela suffi ra-t-ilpour arrter la maladie virus Ebola ?
OSMAN SESAY ne sait pas comment il acontract le virus. Il ne se souvient pas nonplus de son arrive au centre de soins dur-gence de la FICR Kenema (Sierra Leone), aprs cinqheures de route depuis son domicile Freetown.
Ce dont il se souvient, en revanche, cest davoir vu
les employs de la Croix-Rouge sapprocher de lui,
tous vtus de leur impressionnant costume de protec-
tion. Jai eu peur, reconnat cet homme de 37 ans, le
deuxime patient atteint de la maladie virus Ebola
parvenu au centre. Mais ils mont bien trait. son arrive, Osman tait lthargique, le regard
vitreux : un tat caractristique des personnes infec-
tes par cette maladie mortelle qui avait dj fait prs
de 2800 morts dans les trois premiers pays touchs :
la Guine, le Libria et la Sierra Leone ( lheure o ce
magazine est mis sous presse, le nombre total de morts
dpasse 5100, dont 8 au Nigria).
En deux semaines, Osman Sesay a vu 11 patients
emmens pour tre enterrs dans le cimetire nouvel-
lement cr. Lui a repris des forces. Ils mont parl et
mont donn des mdicaments et manger, raconte
Osman, brocanteur de profession. Ils se sont occups
de moi et mont aid rcuprer.
la n du mois de septembre, aprs deux tests
sanguins ngatifs, Osman est devenu la premire per-
sonne avoir survcu la maladie virus Ebola dans le
centre de la FICR. Je ne sais pas pourquoi jai survcu
et les autres pas, dit-il, mais je suis enchant de rentrer
chez moi.
Le mme jour, une llette de 11 ans, Kadiatu, elle
aussi parmi les premiers patients parvenir au centrede soins de Kenema, a t dclare gurie. Comme elle
avait sjourn dans la zone haut risque, Kadiatu a d
subir un bain au chlore suivi dune douche normale au
Le visage delhumanit
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Mme lhistoire dOsman, le survivant, na pas une
n entirement heureuse. Je suis content dtre en vie,
mais ma femme et mes ls jumeaux de trois mois sont
tous morts dEbola. Il me reste un ls de 13 ans. Je ne
sais pas sil est en bonne sant.
Visages dhumanit
Mme dissimuls par leur quipement de protectionindividuelle (EPI) le terme technique qui dsigne
lensemble combinaison, bottes, lunettes protectrices et
gants chirurgicaux en caoutchouc formant cet trange
scaphandre lunaire, les agents de sant qui saffairent ici
sont sans doute le plus authentique visage de lhumanit
dans la lutte contre ce au particulirement inhumain.
Cest cet attirail de cosmonaute qui permet des
personnes comme Brima Momodu Jr, inrmier commu-
nautaire de 28 ans, daider les patients avoir le plus
de chances de survie. Et malgr les barrires que ces
habits de protection placent entre ses patients et lui, il
fait tout son possible pour soulager leurs souffrances.
Certains de nos patients ici sont tout fait stables,
explique-t-il. Ils peuvent se verser de leau et se dpla-
cer dun endroit lautre. Ils parlent un peu. Nous en
avons aussi qui sont trs faibles. Ils ne peuvent rien
faire seuls. Manger leur est trs diffi cile; mme boire
de leau est diffi cile pour eux.
Je nourris mes patients parce que je veux quils
prennent des forces. Comme certains patients d-
fquent, urinent et vomissent sur eux, je dois au moins
faire leur toilette au lit pour quils se sentent rafrachis
et pour quils soient en meilleure sant. Aprs, je leurapporte des habits pour changer les vtements salis.
Au cours dune pause entre ses tours dans la zone
haut risque, il peut enlever son masque, respirer sans
entrave lair frais et dvoiler son visage, brillant de
sueur aprs 45 minutes dans son accoutrement touf-
fant. Je massois dehors pour respirer au moins un peu
dair frais et pour prendre un peu de repos. Jessaie de
rcuprer suffi samment pour retourner servir mes pa-
tients au mieux.
La sant de soignants comme Brima Momodu est
essentielle pour stopper cette maladie qui gagne rapi-
dement du terrain. La tche, pourtant, est terriblement
risque, difficile, prouvante et motionnellement
puisante. La plupart des agents de sant interrogs
ici disent quils se sentent en scurit grce leur EPI,
qui les couvre des pieds la tte, et aussi parce quils
respectent les protocoles appropris.
La zone haut risqueLes dangers, cependant, sont bien rels. Le virus ne
se transmet pas par voie arienne, mais par le contact
savon, pour liminer tout reste ventuel du virus. Ses
habits infects ont t dtruits, et elle a reu une robe
neuve et de nouvelles sandales.
Les histoires dOsman et de Kadiatu nourrissent
lespoir quil est possible, avec des soins, de survivre
Ebola. Cependant, ces rcits sont rares et peu nom-
breux face ce virus sans merci, contre lequel aucun
traitement nexiste et qui attaque les organes si vio-
lemment que la personne infecte est pour ainsi dire
saigne mort de lintrieur.
Les premiers symptmes ressemblent ceux du
cholra : maux de tte, vre, diarrhe, vomisse-
ments, mais ils peuvent aussi voquer le paludisme
ou un empoisonnement alimentaire. Pourtant, la
grande majorit des malades dEbola ne vivent pas
plus de quelques semaines. Un grand nombre dentre
eux narrivent jamais jusqu un centre de soins, et
presque tous ceux qui y parviennent emporterontavec eux, en guise dimages dtres humains, celle
dtrangers recouverts de la tte au pied dhabits de
protection blancs.
Supplment WebLe chlore est votre alliUn aperu de la formation ncessaire pour participer un mois la lutte anti-Ebola. Voir www.redcross.int.
JDe nouvelles recrues desquipes dinhumation sansrisque et dans la dignit de laSocit de la Croix-Rouge duLibria en cours de formation
Monrovia, la capitale du pays. Aveclaugmentation du nombre dedcs dus la ambe mortelle, laSocit nationale a d multiplierces quipes dans tout le pays.Photo: Victor Lacken/FICR
Ma premire
semaine ici a t une
exprience surraliste
de montagnes russes
entre la vie et la mort,
lespoir, le deuil, la
douleur et la joie.Lorsque je suis arrive
Kenema et au centre,
ma premire tche a
consist superviser
quatre enterrements.
Anine Kongelf, dlgue desant communautaire de la Croix-Rouge de Norvge, qui a travaill Kenema (Sierra Leone) enseptembre et en octobre
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direct avec les uides corporels dune personne infec-
te. La peau des soignants ne doit donc jamais tre
expose au toucher dun patient, ni la toux, un
ternuement, une goutte de sueur ou de vomi ni
mme au contact de ses propres gants.
Si une ouverture, mme minuscule, dans les EPI est
dcele pendant que lagent se trouve dans la zone
haut risque, il doit immdiatement quitter la zone desoins et enlever son quipement protecteur pour tre
vaporis de nombreuses reprises avec une solution
chlore.
Lun des pires dangers rside dans un instrument
quils utilisent tous les jours : les aiguilles employes
pour les prlvements sanguins. Pendant quils
effectuent ces prlvements un geste qui est ha-
bituellement de pure routine , comment viter de
penser un fait expos pendant leur formation : le
taux de survie, parmi les agents de sant piqus par
une aiguille infecte dans une zone de soins anti-Ebola,
est gal zro.
Le moindre faux mouvement peut donc tre mortel,
dans un environnement o la visibilit est limite, o
lurgence est de mise et o les patients ne matrisent
pas toujours leurs mouvements. Toutes les procdures
doivent tre accomplies lentement et avec une ex-
trme prudence.
De nombreux soignants, locaux ou internationaux,
ont contract le virus en travaillant dans ces conditions;
nombreux sont ceux qui en sont morts. Avec cette me-
nace toujours prsente, les agents de sant surveillent
leur sant en permanence : la moindre vre, le pluspetit mal de tte suscitent immanquablement une an-
goisse considrable.
Affronter la peurPour ceux qui manipulent les cadavres une tche
absolument essentielle pour empcher la mala-
die de se rpandre , le danger est tout aussi rel.
Edward Sannoh, jeune homme de 24 ans originaire
de Kenema, est membre dune quipe dinhumation
sans risque et dans la dignit : il recueille les corps
des patients dcds dans la zone haut risque et
les prpare pour la morgue. Le plus difficile, cest
quand on est dans la zone haut risque, explique-t-il.
On na pas la permission de sasseoir, de sallonger
ni de toucher les collgues. On ne doit toucher unmalade quen cas de ncessit. Sans cela, on ne peut
rien faire.
Avec lomniprsence de la mort, le sentiment de
peur est palpable parmi les patients comme au sein
des communauts qui ont dj perdu tant de leurs
membres cause de la maladie. Les gens sont terro-
riss, videmment, dit Edward Sannoh. Il y a encore
des gens qui ont peur de certains dentre nous, qui tra-
vaillons dans ce centre.
Pourtant, Edward ne perd pas courage. Je ne min-
quite pas de ce que les gens peuvent dire, parce que
jai t volontaire de la Croix-Rouge : mon premier prin-
cipe fondamental, cest lhumanit. Cest cela qui me
motive : je veux sauver la vie de nos frres et surs.
Cest le principe numro un de la Croix-Rouge.
Or, la peur dEbola suscite de vives motions dans
certaines des zones touches par la maladie et la me-
nace pesant sur les agents de sant est bien relle. Le
16 septembre, un groupe dhommes arms a attaqu
une dlgation de personnel de lutte anti-Ebola qui
comprenait des reprsentants du gouvernement, du
personnel mdical, des journalistes et des employs
de la Croix-Rouge alors quils travaillaient dans la com-munaut de Wom, au sud-est de la Guine. Sept
membres de la dlgation ont t tus, y compris des
agents de sant, des responsables locaux et des journa-
listes; deux personnes sont toujours portes disparues.
Un responsable de la section locale de la Croix-Rouge
guinenne a t gravement bless.
La mme semaine, dans la ville de Forcariah, au sud
de Conakry, la capitale guinenne, six volontaires de
lquipe dinhumation sans risque et dans la dignit
ont t attaqus par la population locale. Lun deux
a t bless, les autres ont fui pour se rfugier dans
la fort voisine. En rponse, la FICR et la Croix-Rouge
guinenne ont appel les gouvernements et les com-
munauts respecter le personnel humanitaire et
sanitaire, ajoutant que tous les actes entravant lac-
tion des personnes qui combattent cette pidmie
y compris les attaques contre les employs et les
volontaires ainsi que les protestations violentes et lin-
scurit au Libria et en Sierra Leone empchent
des communauts entires de bncier de laide dont
elles ont besoin.
Une crise mondialeDs le dbut de la crise, les personnes comme Brima
Momodu Jr et Edward Sannoh ont t en premire
ligne de la lutte contre cette pidmie, qui a commenc
6 | C R O I X R O U G E C R O I S S A N T R O U G E | N U M R O 3 . 2 0 1 4
KDes volontaires de la Croix-Rouge de Sierra Leone dsinfectentleur quipement de protectionaprs avoir lev le corps d unevictime dEbola son domicile Banjor (Libria).Photo: Victor Lacken/FICR
Je ne minquite pas de
ce que les gens peuvent
dire, parce que jai t
volontaire de la Croix-
Rouge : mon premier
principe fondamental,
cest lhumanit. Cestcela qui me motive :
je veux sauver la vie
de nos frres et surs.
Edward Sannoh(24 ans),volontaire de la Socit de laCroix-Rouge de Sierra Leone,originaire de Kenema, lune deszones les plus durement touchespar la maladie virus Ebola
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5
25
2
15
1
5
Nombre
decas
dans les districts ruraux priphriques de Guine pour
gagner ensuite le Libria et la Sierra Leone. Depuis, la
progression rapide de la maladie et lapparition de cas
au Nigria, en Espagne et aux tats-Unis a rapidement
fait comprendre aux dirigeants du monde entier que
cette ambe pidmique tait une menace non seu-
lement pour lAfrique occidentale, mais bien pour le
monde entier.
la date du 17 novembre 2014, le nombre de ma-
lades signals avait atteint le chiffre sans prcdent de
14 386, et plus de 5400 personnes taient dcdes
dEbola, selon lOrganisation mondiale de la Sant
(OMS). Aux tats-Unis, les Centres de lutte contre la
maladie estimaient au mme moment que si la am-
be se poursuivait au mme rythme, le nombre de cas
pourrait atteindre 1,4 million en janvier 2015.
Pourtant, il na pas t facile de mobiliser les forces
ncessaires pour faire face la progression dEbola.Les systmes de sant publique de Guine, du Libria
et de Sierra Leone, affaiblis par des annes de conits
prolongs, taient dpourvus des installations, du per-
sonnel et des quipements ncessaires pour contenir
la maladie.
Ebola a aussi mis en lumire de graves faiblesses du
systme mondial cr pour rpondre aux urgences
sanitaires. Une srie de coupes budgtaires et en
personnel au sein du Groupe de lOMS responsable
des situations durgence na pas amlior les choses;
en outre, de nombreuses organisations humani-
taires, y compris le Mouvement de la Croix-Rouge et
du Croissant-Rouge, manquaient de lexprience et
des systmes permettant de ragir rapidement aux
exigences particulires de cette maladie si virulente
(mme si les volontaires des Socits nationales locales
furent parmi les premiers ragir).
cela, une exception notable celle de Mdecins
sans Frontires (MSF), qui avait une exprience im-
portante du virus Ebola. Comme cette organisation
manquait aussi de moyens tant humains que nanciers
pour combattre la maladie seule, elle a fourni une for-
mation cruciale aux agents des autres organisations, ycompris les volontaires et les employs de la FICR et
des Socits nationales durant la monte en puissance
rapide de la raction du Mouvement.
Aujourdhui, plus de 7700 volontaires ont t for-
ms avec laide de la FICR, du CICR et des Socits
nationales de Guine, du Libria, du Nigria et de
Sierra Leone pour exercer dans les communauts
des activits de mobilisation sociale, dappui psycho-
social, dinhumation sans risque et dans la dignit, de
recherche des chanes de contacts infectieux, de trans-
port des malades et de gestion des cas cliniques. LaFICR a par ailleurs tendu ses activits de prparation
Ebola et dintervention 14 autres pays dAfrique occi-
dentale o la propagation de la maladie est dsormais
la plus probable. Depuis le dbut de lpidmie, plus
de 169 agents expatris ont t envoys sur place et six
appels durgence ont t lancs par la FICR.
Paralllement, le CICR, prsent en Afrique occi-
dentale depuis de nombreuses annes en raison des
conits dans la rgion, a fourni un soutien diversi, en
termes de technique, de matriel et de personnel, par
lintermdiaire de ses dlgations au Libria et en Gui-
ne (son bureau en Sierra Leone a t ferm en 2013).
Le CICR a aussi dploy 20 employs internationaux
supplmentaires dans la rgion, tout en renforant son
soutien aux Socits nationales et ses autres parte-
naires dans toute une gamme de secteurs, des soins de
sant la mdecine lgale, en passant par les moyens
techniques, la scurit conomique ou encore leau et
lhabitat.
Sur le terrain, cependant, nombreux sont ceux
qui jugent insuffisante la raction internationale.
Nous avons dsesprment besoin de davantage de
moyens, affi rme Friday Kiyee, membre de l une despremires quipes dinhumation sans risque et dans la
dignit Monrovia. Sans personnel sur le terrain pour
organiser, coordonner et informer, nous perdrons notre
temps. Ici, de nombreux hpitaux nont que trs peu de
personnel et les patients qui ont le plus grand besoin
dautres services mdicaux ne sont pas soigns.
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LDans la zone risque rduit ducentre de soins anti-Ebola de laFICR Kenema (Sierra Leone), lessoignants discutent des activitsde la journe. Dans la zone haut risque, des zones distinctessont rserves aux cas suspects,
probables et conrms et lesagents de s ant doivent travaillercouverts de la tte aux pieds parleur quipement de protectionindividuelle.Photo: Katherine Mueller/FICR
Libria
Guine
Sierra Leone
Supplment
WebVous trouverez surwww.redcross.intdes blogs
rdigs par des mdecins et
par dautres personnels de
sant dans les centres de soins
durgence de Sierra Leone.
Nombre de cas dEbola signals en Afrique occidentale depuis mars 2014
Source:Organisatio
nmondialedelaSant
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Friday Kiyee explique que le service local de sant
est aux abois. Il est urgent douvrir de nouveaux
centres de soins, dinstaller davantage de de lits,
damener plus de matriel, de personnel mdical et
de dispenser plus de formation. Lorsquune ambu-
lance est appele pour emmener un malade, il arrive
frquemment que le service de soins anti-Ebola soit
dj complet et que le patient soit renvoy chez lui.Ces gens vont mourir chez eux, explique-t-il, et quand
les patients dcdent la maison, leurs proches restent
en contact avec eux jusquau dernier moment, et
contractent le virus leur tour; le taux de dcs conti-
nue donc grimper.
Une culture du contact physiqueLune des tragiques ironies de ce drame est quavec
Ebola, lhumanit mme dont font preuve les familles
en soignant leurs proches et en prparant leur corps
lors de linhumation est lun des principaux facteurs de
transmission de la maladie. En Sierra Leone, il est de
coutume dembrasser les morts pour maintenir le lien
avec ses anctres.
Dans tous les pays touchs, le contact physique (em-
brassades, serrements de main, baisers) fait partie des
gestes quotidiens. Lun des messages vitaux que les
agents de sant diffusent est dviter tout contact avec
autrui. En Guine, la Commission nationale de lutte
contre Ebola dont la FICR et la Socit nationale font
partie a renforc ce message en envoyant des SMS
pendant les clbrations de lAd al-Adha, la priode
sainte du calendrier musulman (dite aussi Tabaskidans de nombreux pays dAfrique occidentale).
Les messages nous souhaitaient de bonnes ftes
de Tabaski, mais ils nous demandaient dviter de nous
toucher les uns les autres lors des salutations tradition-
nelles, pour freiner la propagation dEbola, raconte
Amadou, tudiant en mdecine Conakry. Je com-
prends la raison, mais cest bizarre de ne pas embrasser
mes proches en cette priode de lAd.
La culture locale a jou un rle important ds le
dbut de la crise. Bien des gens, en Afrique occidentale,
ont vu Ebola comme le fruit de la sorcellerie; dautres
souponnaient le vaudou. Comme de nombreuses
personnes consultent les gurisseurs traditionnels, la
raction sanitaire a inclus des contacts avec ce groupe.
Fallah James, du district de Kailahun (Sierra Leone), du-
rement touch par la maladie, en tmoigne.
Quand jai appris, en tant que chef des gurisseurs
traditionnels de mon district, quon pouvait attraper
la maladie par contact physique, jai cess de soigner
les patients, et jai conseill mes collgues de faire de
mme pour linstant, jusqu ce que nous ayons reu
une formation et des renseignements prcis sur Ebola,
pour viter que de nombreux membres de notre com-
munaut ne soient contamins.
La zone sans contactLa peur et lopprobre ne sont pas, pour autant,
lapanage de lAfrique occidentale. De nombreuses
organisations humanitaires ont eu beaucoup de mal
mobiliser et dployer des collaborateurs et des volon-
taires expatris pour cette mission risque et diffi cile,
en partie en raison des craintes dans les pays dorigine
parmi les collgues, les amis et la famille. Sajoute
cela le fait que les personnes qui partent sur le terrain
pour la FICR doivent tre prtes passer au minimumun mois sur place, quoi sajoute un sjour de trois se-
maines de quarantaine leur domicile pour sassurer
de labsence de symptmes.
Aprs que plusieurs agents de sant internationaux
ont t placs en quarantaine force leur retour de
mission en Afrique occidentale, le Mouvement a offi -
ciellement exhort les gouvernements garantir et
faciliter les dplacements des agents de sant qui se
rendent en Afrique occidentale ou qui en reviennent.
Le texte de la dclaration affi rme notamment : Lop-
probre ou la discrimination envers les travailleurs
sanitaires y compris leur mise en quarantaine sans
fondement scientique dbouchera invitablement
sur une crise des ressources humaines un moment o
nous avons un besoin vital de personnes qualies.
Anine Kongelf, de la Croix-Rouge de Norvge, gure
parmi les personnes qui ont rcemment relev le d.
Elle a accept deffectuer une tourne en Sierra Leone,
jugeant que son exprience dans la recherche de per-
sonnes exposes au cholra en Hati et dans laction
communautaire serait utile pour combattre Ebola.
Je moccupais de lpidmie de cholra, mais ce
ntait pas grand-chose par rapport ce que nous affron-tons ici, raconte Anine Kongelf, dont le travail en Sierra
Leone consistait coordonner les activits avec dautres
organisations an de retrouver les personnes exposes
LPour contribuer freiner lapropagation dEbola, les volontairesde la Croix-Rouge guinenne serendent dans les communauts etparlent directement aux habitantspour changer les attitudes et lescomportements qui pourraientdiffuser le virus. Photo: MoustaphaDiallo/FICR
Supplment Web45 minutes dans la zone haut risqueKevin Garcia, Croix-Rouge espagnoleJe commence mhabiller en enfilant ce qui dsormais nous parat presque une deuxime peau, le costume
EPI (...). Ds que jai revtu mon masque, je commence respirer comme dans une autre atmosphre. Lodeur
de neuf du masque misole de lodeur habituelle de chlore dans chacune des zones spares du site...
Je narrive pas
imaginer ce que
reprsente pour eux
le fait dtre amen ici
et dtre parqu dans
des zones connes,
avec des personnes aux
allures dextraterrestredambulant autour
deux.
Garth Tohms, spcialiste eau etassainissement volontaire auprsde la Croix-Rouge canadienne, quitravaille en Sierra Leone
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au virus, prises en charge, guries ou enterres, an de
surveiller lensemble des mesures prises pour les per-
sonnes infectes. Je navais jamais rien vu de tel.
Peu aprs son arrive, elle crivait sur un blog : Ma
premire semaine ici a t une exprience surraliste
de montagnes russes entre la vie et la mort, lespoir,
le deuil, la douleur et la joie. Lorsque je suis arrive
Kenema et au centre, ma premire tche a consist superviser quatre enterrements.
La triste vrit est que les tombes vont se multiplier
avec ladmission de nouveaux patients, dont certains
perdront la bataille contre le virus. Ce jour-l, lun des
corps inhums tait celui dun garon de 8 ans.
Les personnes qui travaillent directement avec les
patients ne sont pas les seules tre exposes au dan-
ger. Garth Tohms, volontaire auprs de la Croix-Rouge
canadienne, est lui aussi une rcente recrue interna-
tionale. Plombier de profession, il a pens que son
exprience et sa formation au travail avec des matires
dangereuses pour larme canadienne seraient utiles
dans son travail dexpert en eau et assainissement pour
aider le centre de soins durgence de Kenema. Il ex-
plique que mme les tches les plus simples, comme le
remplacement dune valve, peuvent devenir une tche
trs ardue lintrieur de la zone haut risque.
Le pire, ce sont les lunettes protectrices : elles se
couvrent vite de bue, ce qui rduit le temps que nous
pouvons passer lintrieur. Je les vaporise abondam-
ment de liquide antibue lintrieur, sans essuyer les
gouttes qui se forment. La vision est un peu oue, mais
je peux voir plus longtemps.
How de body ?Pour introduire un lment dhumanit dans son tra-
vail, Garth Tohms annonce son arrive aux patients de
lextrieur, et si possible ajoute une plaisanterie. Ainsi,
ils savent qui passe proximit deux et qui leur parle
derrire le masque, crit-il. Je narrive pas imaginer ce
que reprsente pour eux le fait dtre amen ici et dtre
parqu dans des zones connes, avec des personnes
aux allures dextraterrestre dambulant autour deux.
Comme dautres personnes qui travaillent ici, Garth
est aussi frapp par lhumanit dont il est tmoin chaque
jour entre personnes malades ou soumises une pres-
sion intense et terrorises. Malgr les rcits de violences
contre des agents de sant, il affi rme que nombreux
sont ceux ici qui apprcient leur travail, et que les habi-
tants locaux les saluent souvent avec un sourire aimable
et lapostrophe traditionnelle : How de body ?Sue Ellen Kovac, de nationalit canadienne, qui vient
de regagner Cairns, en Australie, aprs un mois pass
au centre de soins de Kenema, raconte quelle a t
frappe par la rsilience des personnes confrontes
cette catastrophe sans prcdent.
lhpital, nous avions une dame adorable, Lucy,
qui avait perdu son mari et tous ses enfants cause
dEbola. Pourtant, chaque matin, elle me saluait dun
large sourire et me demandait si jallais bien et si javais
bien dormi. How de body ? Quel courage ! Je matten-
dais aux ravages de la maladie sur les corps, mais pas
cette rsilience. Mon cur se brise devant les preuves
que subissent des personnes comme Lucy.
Les survivantsOn retrouve cette rsilience chez les survivants. Lun
des premiers Guinens survivre la maladie est Saa
Sabas, qui avait contract le virus en soccupant de son
pre malade. Aprs son transfert au centre de soins
anti-Ebola cr par MSF Guckdou (Guine), il sest
rtabli et a regagn son foyer, mais il a t victime
de lostracisme de ses voisins. Les gens mvitaient,
mme si je leur montrais mon attestation de sortie.Saa Sabas est maintenant volontaire pour la Croix-
Rouge guinenne. Il se rend dans les communauts
pour sensibiliser ses compatriotes sur la manire de
prvenir la propagation de la maladie et pour com-
battre des craintes et rumeurs courantes. Je suis lun
deux et je peux madresser eux dans une langue
quils comprennent, explique-t-il. Qui mieux que moi
peut leur parler dEbola ?
Ces survivants sont la preuve vivante quEbola peut
tre vaincu. Comme le raconte lun des agents de sant
qui sest occup de Kadiatu : Quand elle est sortie, elle
tait gurie, dlivre du virus, en scurit. Elle sest
retourne pour saluer de la main Haja une autre pa-
tiente qui stait occupe delle lintrieur et elle
est passe le long de la double clture orange.
Elle a salu de la main une dernire fois les autres
patients avant de sloigner et quelquun a demand :
How de body ?
Elle a rpondu : trs bien, et pour la premire fois
depuis des semaines, elle le pensait vraiment.
Cristina Estrada, Katherine Muelleret Malcolm Lucard
Cristina Estrada est responsable principale de lassurance-qualitdes oprations de la FICR, Katherine Mueller est responsable des
communications de la FICR pour la Zone Afrique de la FICR et Malcolm
Lucard est rdacteur en chef de Croix-Rouge, Croissant-Rouge.
KKadiatu (11 ans) fut la troisimepatiente au diagnostic dEbolaconrm admise au centre desoins nouvellement cr de la FICR Kenema (Sierra Leone). la n du mois de septembre,elle fut lun des premiers patientsdu centre dclar guri.Photo: Katherine Mueller/FICR
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AVANT LIRRUPTION DE LPIDMIE de maladie
virus Ebola qui ravage le Libria, Friday Kiyee
travaillait comme entrepreneur de pompes
funbres lhpital de la Rdemption de Monrovia, la
capitale : il a donc lhabitude de manipuler des cadavres.
Voir nos frres libriens mourir nous afflige
explique Friday, qui dirige lune des quipes dinhuma-
tion sans risque et dans la dignit de la Croix-Rouge du
Libria Monrovia. Notre travail consiste recueillir
les corps. a ne nous plat pas, mais le fait est quil faut
le faire, car sinon, le virus continuera se propager.
Sa journe de travail commence par une liste de
communauts o il doit se rendre pour lever les corps
des personnes souponnes dtre dcdes dEbola.
Son quipe (lune des six quipes actives dans le comt
de Montserrado) recueille en moyenne une quinzaine
de corps par jour. Le nombre augmente rgulirement
et la nature de la maladie rend les corps fortement
Enterrer les
morts dEbolaAu risque de leur vie, des quipes de volontairesde la Croix-Rouge travaillent sans relche chaquejour pour enterrer les victimes dEbola andviter dautres de connatre un sort similaire.
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contagieux, avec un virus qui tue plus de la moiti des
personnes quil contamine.
Depuis que nous avons commenc, la n du mois
de juillet, pas un jour na pass sans que nous ayons au
moins un corps recueillir, explique Friday Kiyee. Cela
nous obsde tous.
Son quipe a t forme par la Croix-Rouge, par M-
decins sans Frontires et par lOrganisation mondialede la Sant. Je risque ma vie, car la moindre erreur
je serai contamin. Nous ne pouvons que nous vtir
comme il faut et respecter toutes les procdures de
scurit avant daller lever un corps.
Cest ce souci du dtail, garantissant que tous les
membres de lquipe ont bien revtu leurs habits
protecteurs et que le dsinfectant est utilis gnreu-
sement et bon escient, qui a permis dviter que la
maladie ne touche des membres de lquipe, malgr la
contagion environnante.
Nous avons deux personnes charges de la dsin-
fection, explique Friday. Le dsinfecteur sale est celui
qui entre le premier pour dsinfecter la zone avant que
les autres ne viennent enlever le corps. Puis le dsinfec-
teur propre dsinfecte ceux qui sortent de la maison
ou du lieu de la leve du corps.
Les familles ne sont pas toujours contentes de voir
les corps de leurs proches emmens par des hommes
vtus dhabits de protection. Ce type de scne peut
crer de la confusion, du ressentiment, voire parfois de
lhostilit.
Avant demmener le corps, nous faisons un peu de
travail social, dit Friday. Nous appelons la famille et lacommunaut en deuil se rassembler et nous nous
prsentons, ainsi que lemblme de la Croix-Rouge.
Nous leur parlons et nous veillons rpondre leurs
questions avant demmener le corps.
Personne ne veut me ctoyerTout ne se droule pas toujours sans encombre. Un
journaliste du magazine Timese trouvait en compagnie
dune quipe de la Croix-Rouge du Libria lorsquils
ont t pris partie par une foule de villageois leur
demandant avec colre pourquoi ils venaient mainte-
nant chercher le corps alors que personne ntait venu
quand ils avaient demand une ambulance. Lun des
membres de lquipe, Nelson Sayon, 29 ans, a racont
Timeque de nombreux membres de lquipe avaient
aussi t mis lcart par leur communaut.
Personne ne veut mapprocher, crit le journal en
rapportant ses propos. Les gens ont peur. Ils refusent
mme de toucher notre argent si nous voulons acheter
quelque chose au magasin ou manger au restaurant.
En Sierra Leone, les quipes connaissent les mmes
diffi cults. Par fois, quand nous arrivons dans un vil -
lage, les habitants nous disent que nous amenons lamaladie, raconte Julius Tamba Kamanda, membre de
lquipe dinhumation sans risque et dans la dignit de
la Croix-Rouge de Sierra Leone. Il arrive quils nous
jettent des pierres et nous demandent de quitter la
ville.
Sans lassistance des chefs et des autres groupes
humanitaires qui les soutiennent et qui leur expliquent
que la communaut ne sera pas touche, ils ne nous
tolreraient pas, ajoute-t-il.
La journe de travail des quipes court parfois de
8 h du matin minuit, voire plus tard, en fonction desbesoins, et certaines dentre elles font face une autre
diffi cult : le manque de matriel essentiel.
Nous portons nous-mmes les corps jusquau ci-
metire pied, explique Julius Tamba Kamanda. Cest
puisant; cest pourquoi nous demandons quon nous
fournisse une civire pour faciliter notre tche.
Dernirement, son quipe a d transporter un corps
sur plus de 3 kilomtres pour parvenir jusquau cimetire.
Nous avons d nous arrter cinq reprises peut-tre
sur le chemin, ce qui peut entraner des retards et des
risques : lorsquon pose le corps par terre, sur des pierres,
le sac pourrait se dchirer et le virus se rpandre.
Les quipes sont aussi confrontes des personnes
endeuilles auxquelles il est demand de renoncer
leurs pratiques traditionnelles densevelissement. En
Sierra Leone, les communauts enterrent habituelle-
ment elles-mmes leurs proches, et il est de coutume
de serrer dans ses bras le corps des personnes d-
cdes pour garantir que le lien avec les anctres se
perptue. Or, cest aprs la mort que le virus Ebola est
le plus virulent.
Cest pourquoi, lorsque nous arrivons dans une
communaut pour prparer un corps lenterrement,aprs avoir parl avec les anciens, nous invitons main-
tenant la famille venir et assister la procdure,
explique Daniel James, coordonnateur de lquipe
dinhumation sans risque et dans la dignit pour la
Croix-Rouge de Sierra Leone.
Ils peuvent y assister sans danger de leur fentre. Ils
voient ainsi que nous traitons leur parent avec respect
et attention; sils le souhaitent, nous nous interrom-
pons pour quune prire soit rcite. La famille peut
ainsi participer et nous avons constat que cela permet
de dissiper certaines rumeurs quant la manire dont
nous nous occupons des corps.
La bonne nouvelle, poursuit Daniel James, est que
davantage de personnes sont informes de la manire
dont se diffuse le virus Ebola et de ce quelles doivent
ou ne doivent pas faire. De plus en plus de commu-
nauts signalent aux autorits les dcs domicile, ce
qui est une trs bonne chose.
Le travail est dangereux, explique-t-il, mais abso-
lument vital et il entend bien continuer. Je continue
travailler malgr tous les obstacles, parce que cest
indispensable.
Victor Lackenet Katherine Mueller
Victor Lacken est photographe et crivain; Katherine Mueller est
responsable des communications de la FICR pour la Zone Afrique.
JDes volontaires de la Croix-Rouge du Libria emportentle corps dune victime dEboladcde chez elle Banjor(Libria). Les membres de lquipetravaillent darrache-pied, souventdes premires heures de la journe
jusquaprs minuit, dans desconditions diffi ciles, frquemmentconfronts lhostilit et lopprobre, alors quils jouent unrle absolument essentiel pourstopper la propagation du virus.Photo: Victor Lacken/FICR
Parfois, quand nous
arrivons dans un
village, les habitants
nous disent que nous
amenons la maladie.
Il arrive quils nous
jettent des pierres etnous demandent de
quitter la ville.
Julius Tamba Kam anda, 21 ans,membre de lquipe dinhumationsans risque et dans la dignit de laCroix-Rouge de Sierra Leone
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Tirs dartillerie, de mortier,bombes lches par avion,roquettes et missiles : ces armesparticulirement ltales etdestructrices sont employestoujours davantage dans desconits qui ont pour thtredes zones urbaines densmentpeuples.
AVEC LURBANISATION CONSTANTE lchelle
de la plante, les guerres, elles aussi, frappent
de plus en plus souvent dans les villes. Dans ungrand nombre des conits actuels Gaza, Irak, Isral,
Libye, Syrie, Ukraine et dautres encore , les affronte-
ments se droulent dans les rues des villes, l o des
foules dhabitants se pressaient nagure dans des mar-
chs ciel ouvert, circulaient en voiture ou pied pour
se rendre au travail ou lcole.
Aujourdhui, bon nombre de ces paysages ur-
bains sont rduits des squelettes en ruines,
dforms, danciens immeubles de logements
et de zones commerciales, qui surgissent encore
au-dessus de monceaux de dbris et de ferrailles
tordues. Les survivants doivent naviguer dans ce
ddale pour se procurer leur pitance quotidienne.
Les destructions causes par les conits rcents sont
choquantes, mais que dire des consquences pour les
gens qui vivent dans un tel cadre de dvastation ?
Ces armes explosives sont conues pour des champs
de bataille et non pour des zones urbaines bties, a
dclar le prsident du CICR, Peter Maurer, devant lAs-
semble gnrale des Nations Unies en octobre.
Au vu des conits rcents, nous mettons srieuse-
ment en doute que ces armes puissent tre utilises
pour cibler avec une prcision suffi sante des objectifsmilitaires dans des zones peuples, ou mme que leurs
effets puissent tre limits comme le prescrit le droit
international humanitaire, a-t-il ajout. Il nest pas
question ici des armes elles-mmes, mais de savoir o
et comment elles sont utilises.
Un fait courantLes destructions massives dans de grandes villes ne
sont pas une nouveaut dans lhistoire de la guerre.
Le bombardement de la ville espagnole de Guernica
en 1937, et par la suite le bombardement de zones
tendues, y compris des centres urbains, pendant la
Seconde Guerre mondiale, ont suscit ladoption de
dispositions dans les Conventions de Genve de 1949
(renforces ultrieurement par les Protocoles addition-
nels de 1977) qui cherchaient limiter le nombre de
victimes civiles et interdire des pratiques telles que le
bombardement de zone sans discrimination.
Larticle 51 du Protocole additionnel I interdit les
attaques dont on peut attendre quelles causent
incidemment des pertes en vies humaines dans la
population civile, des blessures aux personnes civiles,
des dommages aux biens de caractre civil, ou une
combinaison de ces pertes ou dommages, qui seraient
excessifs par rapport lavantage militaire concret et
direct attendu.
La prohibition, au regard du droit, des at taques dis-
proportionnes et linterdiction qui en dcoule de la
destruction arbitraire de villes ou de villages, ou des d-vastations que ne justie pas la ncessit militaire sont
au cur du droit relatif la conduite des hostilits, ex-
pliquent John Borrie et Maya Brehm, deux experts dans
Des villessousle feu
Le nombre de victimes
civiles et lampleur
des destructions ont
atteint un niveau sans
prcdent dans la rgion
ces dernires annes.Robert Mardini, chef desoprations du CICR pour le Procheet le Moyen-Orient
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ce domaine, dans un article paru en septembre 2011
dans laRevue internationale de la Croix-Rouge.
Plus rcemment, de nouvelles conventions, qui in-
terdisent dautres armes explosives telles que les mines
terrestres et les armes sous-munitions sans ou-
blier un protocole la Convention relative aux armes
classiques qui exige des tats quils enlvent les restes ex-
plosifs de guerre , sont venues renforcer les argumentscontre lemploi darmes explosives frappant sans discri-
mination dans des zones forte densit de population.
Bien que le bombardement de zone soit aujourdhui
illgal, et que de nombreux tats ne considrent plus
comme acceptable le recours aux armes sous-muni-
tions, lemploi dautres armes explosives, mme dans
des zones densment peuples, demeure un fait courant
dans les conits arms actuels, relvent les auteurs en
invoquant de nombreuses tudes de cas tires de conits
survenus en 2011 : Afghanistan, Irak, Liban et Somalie.
Pour sa part, le CICR reconnat que les combattants
prennent souvent position dans des quartiers rsiden-
tiels et dans dautres lieux o des civils peuvent tre
exposs aux effets des affrontements. Il affi rme cepen-
dant que les forces attaquantes doivent nanmoins
veiller constamment rduire au minimum limpact
de leurs oprations sur cette population, notamment
par le choix des moyens et mthodes de guerre. Il faut
envisager dautres armes et dautres tactiques.
Le tribut pay par les civilsDe nos jours, les conits en Syrie, les combats en Isral
et Gaza ou encore en Ukraine sont des exemplescriants des consquences de lemploi dengins explo-
sifs dans des zones civiles.
Gaza, les infrastructures publiques, les installations
mdicales et sanitaires et les coles ont subi de graves
dommages, quand elles nont pas t dtruites. Plus de
2100 personnes ont t tues, prs de 11 000 blesses, et
on estime 108 000 le nombre dhabitants qui ne pour-
ront pas regagner leurs habitations.
Le rseau deau ainsi que les installations lectriques
ont t gravement endommags, tandis que le secteur
mdical a t pouss dans ses derniers retranche-
ments et les hpitaux ont t touchs par des obus ou
dautres munitions.
Les destructions dans la bande de Gaza ne se limitent
pas aux biens de caractre civil et aux infrastructures,
explique Younis Al-Khatib, prsident de la Socit du
Croissant-Rouge palestinien. Elles ont aussi eu un im-
pact important sur la sant et les moyens dexistence
des citoyens de Gaza.
Les missiles tirs depuis Gaza sur des zones rsiden-
tielles et urbaines en Isral ont fait quant eux au moins
cinq victimes, dont un volontaire du Magen David Adom
(MDA), plus de 800 blesss civils et contraint entre 5000et 10 000 habitants fuir leur foyer.
Cest dans ce contexte que le CICR a ritr ses ap-
pels (relays par la FICR et par les Socits nationales)
aux deux parties au conit pour quelles pargnent les
zones civiles et respectent le DIH. Le nombre de vic-
times civiles et lampleur des destructions ont atteint
un niveau sans prcdent dans la rgion ces dernires
annes, relve Robert Mardini, le chef des oprations
du CICR pour le Proche et le Moyen-Orient.
Les humanitaires en dangerLes guerres daujourdhui en milieu urbain font aussicourir des risques importants aux agents humanitaires,
qui demeurent actifs, mobiles et visibles lorsquils va-
cuent les blesss ou fournissent des services et des
secours essentiels aux populations civiles. Parmi les
38 agents humanitaires du Croissant-Rouge arabe sy-
rien et les 7 employs du Croissant-Rouge palestinien
tus pendant le conit syrien, plusieurs ont t victimes
darmes explosives non identies, tandis que des in-
frastructures essentielles ont, l, aussi, t touches.
En juillet 2014, deux urgentistes du Croissant-Rouge
palestinien ont t tus et trois blesss dans lexer-
cice de leurs fonctions. Les ambulances touches
taient clairement marques de l emblme du Crois-
sant-Rouge. Et en aot, un volontaire du MDA en Isral
a t tu par un missile dans le kibboutz o il vivait.
Avec la dtrioration de la situation, la scurit de
notre personnel demeure pour nous une grave pr-
occupation, affi rme Noam Yifrach, le prsident du
comit excutif du MDA, en particulier parce que, du
fait de la dure prolonge de cette phase durgence,
nous avons d dployer des volontaires et du person-
nel supplmentaires dans les zones dopration.Pendant ce temps, avec la poursuite des combats
dans lest de lUkraine, les civils paient un lourd tribut
avec les bombardements intermittents des zones dha-
bitation dans des villes comme Lougansk, qui mettent
en pril la population comme les agents humanitaires.
En septembre, un obus sest abattu lextrieur
des bureaux du CICR, tuant Laurent du Pasquier, un
dlgu du CICR de 38 ans, de nationalit suisse,
qui travaillait comme administrateur et qui avait
accompli des missions en gypte, en Hati, au Pakis-
tan, en Papouasie-Nouvelle-Guine et au Ymen.
Nous sommes atterrs par cette perte tragique, a d-
clar Dominik Stillhart, directeur des oprations du CICR,
au lendemain du drame. Les bombardements aveugles
de zones rsidentielles sont inacceptables et constituent
une violation du droit international humanitaire.
LLemploi darmes explosivesde grande puissance dans leszones urbaines force souventles civils survivants fouiller lesdcombres pour en tirer les objetsindispensables leur survie.Des quartiers nagure pleins devie se retrouvent souvent sanslectricit ni systmes deau etdassainissement, tandis que lavie conomique est anantie. Lesgraves dommages inigs par cesarmes font que les habitants qui ontfui sont privs de foyer et resterontdplacs pendant des annes.Photo: Teun Anthony Voeten/CICR
IDurant les conits, leMouvement prend diversesmesures pour maintenir les servicesde base en tat de fonctionner.Ici, des spcialistes de leau et delhabitat du CICR et du Croissant-Rouge arabe syrien rencontrent
des responsables locaux du rseaulectrique Damas (Syrie) pourparler des rparations apporter des systmes dnergie critiques.Photo: Croissant-Rouge arabe syrien
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LLemploi dexplosifs puissantsdans des zones urbaines faitde nombreux morts, mais peutaussi causer des destructionsdune ampleur telle quellesbouleversent le paysage urbain.
Gaza, ce garon se tientdevant un btiment ras par unbombardement arien.Photo: Annibale Greco/CICR
J Les armes explosives employesdans les zones peuples sontsouvent de nature frapper sansdiscrimination et ne peuvent trediriges avec assez de prcisionpour viter de faire des victimesciviles. Ici, une femme passe
devant un btiment dtruit parles bombardements Popasna,une ville de lest de lUkraine, enoctobre 2014.Photo: REUTERS/David Mdzinarishvili
Avec lurbanisation croissante sous toutes les latitudes, la guerre moderne se droule elle aussi de plus
en plus souvent entre les immeubles dhabitation, dans les rues, les quartiers, les centres commerciaux
et les marchs des grandes villes. Les conits rcents Gaza, en Irak, en Libye, en Syrie et en Ukraine
montrent limpact que des armes ltales peuvent avoir dans des environnements urbains densment
peupls. Ils montrent aussi lenvi combien il est diffi cile de protger la vie humaine dans des zones de
combat o les systmes ncessaires la vie eau, gouts, lectricit, transports, fourniture de vivres
et de carburant sont complexes et tendus. Ces images, qui illustrent toutes des conits en cours,amnent sinterroger sur les effets long terme et les cots normes quentranera la remise en tat
de ces quartiers dtruits pour que leurs habitants puissent nouveau y vivre, y travailler, y commercer
et y jouer en toute scurit.
La guerredans les rues
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JDans les conits qui fontrage aujourdhui dans des zonesurbaines, de nombreux acteurs sedisputent la mainmise sur diversquartiers ou zones stratgiques.
Bien souvent, ils tirent avec desarmes explosives partir de zoneso rsident ou travaillent encoredes civils.Photo: REUTERS/Shamil Zhumatov
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IUne femme isralienne reoitdes soins lors de son vacuation
aprs la chute dune roquettetire de la bande de Gaza sur laville de Sderot, au sud dIsral,le 31 juillet 2014.AFP Photo/Gil Cohen-Magen
Focus
LDans bien des zones urbainesde conit, ce type de scne nestque trop frquent. La queue dunebombe non explose merge dece tas de dcombres de btimentsdtruits, dans une zone prochedAlep (Syrie). Outre le dangerpour les habitants, la prsence
de ces restes non explossentrave gravement les efforts dereconstruction.Photo: REUTERS/Hamid Khatib
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KLa guerre en milieu urbaincomprend une dimensionpsychologique particulire, dueaux dangers de btiments sur lepoint de seffondrer et la menacede munitions non explosesdissimules dans les dbris. Ladestruction de zones urbaines pardes armes explosives suscite aussides questions concernant lavenir,en particulier pour les jeunes, quidoivent essayer de trouver un
espace de vie, et mme une sorte denormalit, dans un environnementparfaitement anormal. Cette fillettepalestinienne joue avec un ballonprs des dcombres de sa maisonfamiliale dans lest de la ville deGaza, en octobre 2014.Photo: REUTERS/Suhaib Salem
J En 2014, le conit entre Isralet Gaza a fait plus de 2000 morts,dont deux urgentistes duCroissant-Rouge palestinien. Aunord-est de Gaza, le Croissant-Rouge palestinien a aid, aveclappui du CICR, lvacuationdes blesss et fourni desservices mdicaux durgence lapopulation. Photo: Rama Humeid/CICR
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Dans le sillage de la guerre et des catastrophesnaturelles, la violence a pris racine dansde nombreuses zones urbaines dAmriquecentrale. La Croix-Rouge offre une aide aux
jeunes qui gardent lespoir dune autre voie.
ENTRE LES RUES DE TERRE et de boue dfon-
ces et pentues, les masures de Hbitat Confen
mergent au-dessus de la dense vgtation tro-
picale. Cest un jour de semaine et ce matin, les rues
du quartier sont calmes. Nous sommes dans lune des
nombreuses communauts qui composent Ciudad
Delgado, une ville de 120 000 habitants quelques ki-
lomtres de San Salvador, la capitale dEl Salvador.
Hbitat Confen est une communaut qui sest d-
veloppe rapidement aprs le grave tremblement de
terre doctobre 1986, lpoque ou El Salvador tait
plong dans la guerre civile, explique Mario Gutirrez,dirigeant communautaire et membre du conseil dad-
ministration de lassociation de dveloppement de la
communaut.
chapper la violence
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Au lendemain de la guerre civile, qui a dur de 1980
1992, les zones urbaines se sont tendues trs rapi-
dement et sans planication. Cest lun des nombreux
facteurs qui ont contribu la violence urbaine.
violence changeante, nouveau dCiudad Delgado nest pas la seule ville confronte
ces problmes. El Salvador est lun des pays les plus vio-lents de la rgion, avec plus de 2300 homicides en 2013
un chiffre cependant bien infrieur celui de 2011,
lorsque plus de 4000 meurtres avaient t signals,
selon le ministre de la Justice et de la Scurit publique.
Cette nouvelle forme de violence urbaine est re-
connue comme lune des diffi cults les plus criantes
de la rgion. En avril 2011, la Croix-Rouge dEl Salvador
a lanc un projet intitul Chances dintgration, une
initiative nance par la Croix-Rouge italienne, le CICR,
la Croix-Rouge suisse et la Croix-Rouge de Norvge.
Les ministres de la Sant et de lducation ainsi
que les autorits municipales de Ciudad Delgado
collaborent aussi au projet, qui cherche favoriser lin-
tgration sociale des jeunes et de leur famille Hbitat
Confen. La communaut entire bncie du projet,
qui offre des possibilits concrtes plus de 400 jeunes
et adolescents gs de 10 25 ans.
Les initiatives, qui dureront jusquen dcembre 2014,
donnent aux jeunes la possibilit de faire valoir leurs
comptences artistiques, sportives, sociales ou leurs
aptitudes de direction. Le programme offre ainsi aux
jeunes une chance dchapper la violence, lalcool
et la drogue.Les mesures prises, explique Arqumedes Flores, le
coordonnateur du projet, renforcent les structures au
service des jeunes et de la communaut, amliorent la
prvention sanitaire et la salubrit du milieu, et encou-
ragent lart, la culture et les loisirs.
Faire revivre la communautLe projet a permis de crer un programme scolaire
pour 1500 lves, mais aussi de construire une aire
Le gouvernement a bti 1040 logements pour crer
Hbitat Confen, et ce sont les personnes touches par
la guerre ou par le sisme qui sont venues habiter ici,
poursuit Mario Gutirrez, qui vivait lui-mme avec sa
famille San Salvador et qui a tout perdu dans le trem-
blement de terre. Cest pourquoi on trouve ici des
familles venues des 14 dpartements du pays.
Depuis quelques annes, la vie des 5500 habitants de
Hbitat Confen sest nettement amliore : les groupes
violents sont bien moins actifs, grce en partie aux
projets lancs par la Croix-Rouge dEl Salvador et par
dautres acteurs locaux et internationaux. La violence
reste cependant une proccupation pour la commu-
naut et les possibilits offertes aux jeunes sont limites.
Les services sociaux taient trs limits au dpart,
explique Mario Gutirrez, mais avec le temps, nous
avons organis la communaut pour grer diverses
institutions locales et des projets de dveloppement,comme des espaces de loisirs pour les enfants et les
jeunes, avec le soutien de la Croix-Rouge, qui sest
jointe nous depuis cinq ans.
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KLa violence entre bandeslourdement armes est uneralit quotidienne depuis denombreuses annes CiudadDelgado. Cependant, quelquessignes despoir se font jour : ici,un membre dune bande disposedes armes qui seront remises auxautorits la faveur dune trveentre gangs en mai 2013.Photo: REUTERS/Stringer
J Hbitat Confen, dans la villede Ciudad Delgado, qui fait partiede laire urbaine de la capitaleSan Salvador, des jeunes suiventun cours de hip-hop, lune desnombreuses activits organises parla Croix-Rouge dEl Salvador dansle cadre de son projet Chancesdintgration.Photo: Vladimir Rodas/FICR
Avec le temps, nous
avons organis la
communaut pour grer
diverses institutions
locales et des projets de
dveloppement, comme
des espaces de loisirspour les enfants et les
jeunes.
Mario Gutirrez, dirigeantcommunautaire et membre duconseil dadministration duneassociation de dveloppementcommunautaire Hbitat Confen,Ciudad Delgado (El Salvador)
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de planche roulettes, un terrain de football, un bel-
vdre, un parc de loisirs pour enfants et le centre
Henry-Dunant pour les jeunes, o quelque 550 lves
suivent des cours de couture, de fabrication de bougies
et de piatas(gures remplies de jouets et de sucre-
ries utilises lors des ftes), dinformatique, de danse
(y compris de break dance) et de diverses formes dex-
pression artistique.La Croix-Rouge dEl Salvador propose aussi un plan
de prvention et dassistance contre lalcoolisme et la
toxicomanie, destin aux adolescents.
Jai commenc fumer de la marijuana quand
javais 12 ans, explique un jeune de 14 ans participant
au programme. On navait rien faire pour soccuper
ici, nous les jeunes, alors on est entrs dans la bande
de notre quartier.
Ma mre me disait : Comment, tu fumes de la ma-
rijuana, ton ge ! Mais je ne lcoutais pas... jusquau
jour o jai assist lun des ateliers du programme.
Jy ai rencontr des jeunes dautres quartiers et nous
avons fait connaissance. Jai commenc voir les
choses autrement : jai arrt la drogue et je me suis mis
frquenter lcole. prsent, je pense mon avenir.
Je veux tudier laronautique et devenir astronaute.
On peut toutefois sinterroger sur leffi cacit long
terme de ces efforts de prvention et sur le rle de
la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge en matire de
prvention de la violence. Si le Mouvement a surtout,
jusquici , ragi la violence, les Socits nationales
sont de plus en plus nombreuses voir la ncessit
dagir davantage pour inuer sur certaines de sescauses profondes.
La Croix-Rouge de Norvge concentrait jusquici
ses efforts sur des projets de sant rurale et de rduc-
tion des risques lis aux catastrophes, explique Lars
Erik Svanberg, conseiller de programme pour la rgion
Amriques au sein de la Socit nationale, mais au vu
des effets de la violence urbaine sur la situation huma-
nitaire, nous avons depuis deux ans rorient notre
action vers ce domaine.
Lars Erik Svanberg sait bien que les Socits natio-
nales, en tant quorganisations non gouvernementales,
ne sauraient sattaquer lensemble des causes de la
violence, mais il est convaincu quelles peuvent en at-
tnuer les consquences sur la situation humanitaire.
Nous pensons que le Mouvement, puisquil repose
sur les principes de neutralit et dimpartialit, est bien
plac pour sengager dans ce type dactivit dans la r-
gion, affi rme-t-il.
Comme dans bien dautres rgions du monde, la
Croix-Rouge dEl Salvador a souvent plus facilement
accs aux zones qui sont aux mains de groupes violents
que certains autres services publics. Sa mission, en effet,
est purement humanitaire et elle ne reprsente pas ungouvernement national ni une autorit publique.
La grande diffi cult laquelle se heurtent les projets
contre la violence urbaine, expliquent les organisateurs,
est la ncessit de ne pas perdre llan et de garantir leur
durabilit, en termes de nancement comme dadhsion
des communauts, an que limpact social du projet
dans le quartier puisse se renforcer, voire stendre en-
suite au reste de Ciudad Delgado.
Une autre diffi cult est lie aux bandes elles-mmes.
Si lobjectif ultime de la Croix-Rouge dEl Salvador est
lintgration et linclusion sociale des jeunes, y com-
pris ceux qui pourraient tre membres de bandes ouproches delles, celles-ci ne risquent-elles pas de voir
dans ces initiatives une menace contre leur capacit de
recruter de nouveaux membres et de conserver leur as-
cendant sur leurs rivaux ?
Former des jeunes dirigeants au GuatemalaAu Guatemala, pays voisin, la violence prend aussi
ses racines dans la guerre civile et dans la croissance
urbaine frntique et dsordonne pendant et aprs
la guerre. Ainsi, la communaut de Santa Isabel II,
une dizaine de kilomtres de Guatemala City,
a vu le jour en tant que communaut de rapatris : des
personnes qui avaient fui pendant la guerre civile et
qui ont t reloges ici une fois le conit termin.
Ces gens venaient au dpart de la rgion dIxil,
dans le dpartement de Quich, dont la population est
principalement autochtone, explique Miguel Angel
Estrada, coordonnateur dun programme dintgration
sociale administr par la Croix-Rouge du Guatemala.
Bien que la vision du monde des autochtones repose
sur un lien profond avec la terre, le conit qui a dur de
1960 1966 les a chasss de chez eux. Ils sont dabord
partis au Mexique, puis le gouvernement les a rapatriset rinstalls ici.
Dans cette communaut, la Croix-Rouge du Gua-
temala gre lun des trois projets de prvention de la
L Des garons et des llesparticipent un camp de football,une activit propose par le projetde la Croix-Rouge dEl SalvadorPossibilits pour lintgrationsociale Hbitat Confen. Pourmaintenir ses activits, le projet doittrouver un nancement durable.Photo: Vladimir Rodas/CRCR
Dans un cadre tel que
celui-ci, o certains
enfants ne vont mme
pas lcole, les enfants
touchent trs tt la
drogue et lalcool.
Duilio Monterroso, responsabledun programme de prvention dela violence pour la Croix-Rouge duGuatemala
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violence destins aux jeunes dans les districts haut
risque. Le projet de Santa Isabel II, intitul Enfants et
jeunes pour une vie meilleure, a t lanc en 2011 et il
est mis en uvre en collaboration avec la Croix-Rouge
espagnole et avec le CICR, avec lappui des autorits
municipales de Villa Nueva.
Le projet sarticule autour dun centre commu-
nautaire administr par la Socit nationale. Cettablissement offre un havre aux enfants et aux ado-
lescents; nous voulons quils se sentent ici chez eux,
dit Duilio Monterroso, coordonnateur du projet. Nous
esprons dvelopper les aptitudes de direction de ces
jeunes pour que leur voix soit entendue dans leurs