Julien Gingembre
Master 2 Géographie
Aménagement des territoires Reconversion et Risques
Sous la direction de :
V. Bertrand B. Brillaud
Janvier à Juillet 2010
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LL’’IINNCCUUBBAATTEEUURR TTEERRRRIITTOORRIIAALL
Nancy Grand Cœur, projet d’écoquartier reçu au palmarès du concours national dans la catégorie
mobilité.
(Source : site Internet de la Communauté Urbaine du Grand Nancy).
RAPPORT DE STAGE
LA VILLE DURABLE AU CŒUR DE LA RECONCILIATION
NATURE/SOCIETE : VEILLE PROSPECTIVE AU SEIN DE
L’INCUBATEUR TERRITORIAL
Julien Gingembre
Master 2 Géographie
Aménagement des territoires, Reconversion et Risques
Stage effectué à l’Agence de Développement et d’Urbanisme de l’Aire Urbaine Nancéienne
du 18 janvier au 16 juillet 2010.
Sous la direction de :
Vincent Bertrand, maître de conférences à l’Université Nancy 2
Benjamin Brillaud, chargé de mission, responsable de l’Incubateur
Remerciements 2010
5
RREEMMEERRCCIIEEMMEENNTTSS
Je tiens à remercier Monsieur Brillaud, responsable de l’Incubateur, pour son accueil
au sein de l’ADUAN, son suivi et ses conseils. Je remercie par là même les employés de
l’Agence qui m’ont aidé, de prêt ou de loin, lors de mon stage, notamment Anne Locatelli,
directrice du département Développement économique, Nadine Césaroni et Marie-Paule
Chalon du secrétariat, Nathalie Anesa de la documentation, Annie Huchon du secrétariat de
la direction, ainsi que toute l’équipe du bureau de dessin.
Je remercie Monsieur Bertrand, maître de conférences, et également Monsieur
Husson, professeur, qui m’ont encadré durant le stage et durant ces cinq années d’études,
aux côtés des autres enseignants de Géographie. Ils m’ont apporté leur savoir, leur
expérience, mais aussi un nouveau regard, le goût d’apprendre et l’envie de construire mon
projet professionnel Dans le monde de la Géographie.
Enfin, je n’oublie pas les collègues stagiaires de l’ADUAN, avec qui j’ai travaillé durant
ces six mois : Zahra (sociologie), Elise (intelligence économique), Fidéline (écologie), Aurélien
(droit public), Jérémy (marketing), Juliette (uranisme), Alexandre et Mathilde (commerce). Je
leur souhaite une bonne continuation et de la réussite dans leurs études et leurs recherches
d’emploi.
À la mémoire de Laurent WAHL, maître de conférences à l’Université de Nancy,
disparu en décembre 2008.
La ville durable au cœur de la réconciliation Nature/Société 2010
6
SSOOMMMMAAIIRREE Remerciements .......................................................................................................................... 5
Introduction générale ................................................................................................................ 7
1.1 L’Agence de Développement et d’Urbanisme de l’Aire urbaine Nancéienne ................. 7
1.2 Contexte de l’étude : une prise en compte mondiale pour des actions locales ........... 11
1.3 Du constat au concept ................................................................................................... 13
1.4 La difficile définition de la « ville durable » ................................................................... 14
1.5 Le couple Nature/Société en milieu urbain : du divorce à la réconciliation .................. 17
1.6 Une mission de stage prospective et éclectique ........................................................... 19
La planification : socle de base de la ville durable ................................................................... 22
2.1 La Trame verte et bleue : l’aménagement du territoire au service de la biodiversité .. 23
2.2 Chronoaménagement, boulevard urbain et autoroute apaisée : des concepts innovants
pour une mobilité durable ................................................................................................... 34
2.3 Traiter autrement l’espace public : les sociotopes ........................................................ 40
Les projet urbains durables : de nouveaux objets pour une nouvelle ville ............................. 43
3.1 Les écoquartiers : un tournant urbanistique indispensable .......................................... 43
3.2 Les parcs habités, une alternative nouvelle : l’exemple de Kronsberg à Hanovre ........ 66
Conclusion ................................................................................................................................ 76
4.1 Penser la ville durable de demain .................................................................................. 76
4.2 Un stage de fin d’études formateur et enrichissant ...................................................... 77
Bibliographie ............................................................................................................................ 80
Références Internet ............................................................................................................. 83
Table des illustrations .............................................................................................................. 86
Table des matières ................................................................................................................... 86
Introduction Générale 2010
7
IINNTTRROODDUUCCTTIIOONN GGEENNEERRAALLEE
1.1 L’Agence de Développement et d’Urbanisme de l’Aire urbaine
Nancéienne
Créée en 1975 afin d’offrir aux élus un organisme de réflexion et d’études, l’Agence
d’Urbanisme de l’Agglomération Nancéienne a au cours de son existence toujours accompagné les
mutations de Nancy et de son agglomération. En 1992, elle obtient la compétence développement
économique pour porter des projets et guider les entreprises souhaitant s’installer sur le territoire.
Celui-ci, d’abord restreint à l’agglomération de Nancy, s’ouvre en 2001 à l’aire urbaine,
comprenant 225 communes de Meurthe-et-Moselle et de Moselle, soit plus de 415 000 habitants.
Adhérente à la Fédération Nationale des Agences d’Urbanisme (FNAU), présidée par André
Rossinot, maire de Nancy et également président de l’ADUAN, cette dernière obtient ses
financements de la commune de Nancy et de sa Communauté Urbaine (CUGN), du département
de Meurthe-et-Moselle, de l’État et de certaines communes et EPCI.
Les évolutions territoriales de l’agence ont accompagné l’émergence des réflexions
prospectives et des études liées au SCoT Sud 54 (Figure 1, p.9 et Figure 2, p.9) et aux enjeux du
réseau de villes du Sillon Lorrain (Figure 3, p.10). Les dossiers d’aménagement du Grand Est
intéressent naturellement l’ADUAN, notamment les projets qui touchent à la desserte du
territoire : A32, liaison ferroviaire Nord-Sud entre Bruxelles et Lyon, liaison fluviale Saône-Moselle.
L’agence est également un acteur central dans l’émergence et la conduite des projets urbains du
Grand Nancy : Rives de Meurthe (extension du centre-ville sur l’ancienne zone industrielle), Nancy
Grand Cœur (écoquartier et centre des congrès dans le secteur de la gare), campus Artem (Art,
technologie et management), plateaux de Haye (requalification du quartier du Haut-du-Lièvre) et
de Brabois (pôle bio-santé et recherche).
Les co-financeurs forment, avec les Chambres Consulaires, le Conseil Régional et certains
organismes publics (Universités, Centre Hospitalier) le conseil d’administration de l’agence. Dirigée
par Jacques Charlot, l’agence emploie 44 personnes réparties entre la direction générale et ses
deux départements : Territoires, aménagement et urbanisme, et Développement économique,
La ville durable au cœur de la réconciliation Nature/Société 2010
8
marketing territorial et prospective. Ce dernier département est doté d’une cellule permanente de
veille prospective, dont l’Incubateur territorial, qui accueille les étudiants de troisième cycle,
anime plusieurs dispositifs stratégiques en collaboration avec le milieu universitaire : veilles
thématiques (santé, commerce, marketing territorial, écoconstruction) et une veille « Ville du
futur ».
Face aux nouveaux enjeux de durabilité des villes, et attachés au précepte du SCoT Sud 54,
« pour une qualité de vie durable », l’ADUAN et l’Incubateur territorial produisent une réflexion
sur la ville durable de demain. Ces travaux ont vocation d’informer les élus et les chargés de
mission de l’Agence. Ces derniers ont ensuite la possibilité, s’ils le souhaitent, de pousser la
réflexion plus loin en s’aidant des recherches déjà effectuées. Depuis plus d’un an, de nombreux
sujets ont fait l’objet d’une publication et d’une diffusion auprès des élus et des chargés de
mission : les « écotours », les technopôles, la reconversion des casernes militaires, les « écoparcs »,
l’artisanat en milieu urbain, etc. Cette année, plusieurs sujets ont vocation à devenir des dossiers,
notamment l’écoconstruction, les bâtiments intergénérationnels et multifonctionnels, ainsi que
les écoquartiers de centre-ville. Les sujets plus « avant-gardistes » n’offrant pas un recul
nécessaire pour une analyse approfondie donnent lieu à la rédaction de « 4pages ». Ce sont des
documents synthétiques proposant un questionnement du sujet et ouvrant à la réflexion.
Introduction Générale 2010
9
Figure 1 : L’intercommunalité dans le SCoT Sud Meurthe-et-Moselle
Figure 2 : Les territoires de projet
La ville durable au cœur de la réconciliation Nature/Société 2010
10
Figure 3 : Localisation du territoire d'étude de l'ADUAN
Introduction Générale 2010
11
1.2 Contexte de l’étude : une prise en compte mondiale pour des actions
locales
Dans cet optique et en accord avec les thèmes de recherche auxquels je suis attaché, il m’a
été confié de participer à cette réflexion sur la ville durable dans le cadre de l’Incubateur, dans une
équipe pluridisciplinaire (sociologie, droit public, intelligence économique, ingénierie écologique),
afin de concevoir différents documents, rapports ou dossiers. Le couple Nature/Société est au
cœur de cette analyse. La problématique posée est de réfléchir à la place du couple Homme-
Nature dans la conception de la ville durable, en s’orientant vers les outils décisionnels et de
programmation, tels que les documents d’urbanisme et de planification, mais aussi sur les projets
urbains comme les écoquartiers ou les actions de traitement de l’espace public. S’appuyant sur un
travail de veille, cette démarche n’est pas uniquement centrée sur Nancy ou son aire urbaine,
puisqu’il faudra chercher des exemples en France et à l’étranger, mais il va de soi que la finalité
s’oriente vers une application à ce territoire, l’ambition de ces travaux étant de fournir à la CUGN
et au syndicat mixte du SCoT des recommandations et des pistes de réflexion.
Le sujet abordé s’inscrit dans un mouvement exceptionnel et inédit, débuté il y a moins
d’un demi siècle, de prise en compte, de réflexion et de proposition en matière de développement
urbain durable. Ces démarches sont nées de deux phénomènes majeurs : d’une part un mode de
croissance économique planétaire débuté lors des révolutions industrielles et aujourd’hui devenu
si considérable (incontrôlable ?) qu’il menace la pérennité des sociétés humaines, avancées ou
non ; et d’autre part une croissance démographique induite par le premier phénomène qui a
explosée au sortir de la Seconde Guerre Mondiale, dans les Pays du Nord, puis dans ceux du Sud,
associée à un exode urbain grandissant, à tel point qu’aujourd’hui, plus de la moitié de la
population mondiale travaille, réside, consomme, en un mot vit en ville.
Du premier événement sont tardivement nées des prises en comptes politiques majeures
dont le Sommet de la Terre de 1992, émanent du rapport Brundtland Your Common Future (1987),
est à la fois le point culminant et le déclencheur au niveau mondial, bien que de nombreux signaux
d’alarme aient été tirés depuis les années 1960 (Club de Rome, Sommet de Stockholm). Il s’agit à
ce jour d’une des plus grandes réussites en matière d’initiative internationale sur l’avenir de
l’humanité. Les facteurs alarmants (changements climatiques, épuisement des ressources, risques
sanitaires accrus, biodiversité menacée, pauvreté, exclusion sociale, consommation de l’espace,
La ville durable au cœur de la réconciliation Nature/Société 2010
12
population vieillissante) ont conduit à la mise en place de moyens de lutte à l’échelle
internationale, déclinés aux échelles nationales et inférieures grâce à la coopération supra-
étatique (ONU, Union Européenne): conventions et traités (Kyoto), stratégies internationales,
déclarations et chartes (Aalborg), financements et engagements financiers, programmes (Agendas
21), négociations, conférences (Copenhague)… Le concept de développement durable (encadré
p.12), au succès politico-médiatique tel qu’il a perdu sa signification originelle, résumant la
richesse mais aussi le désordre des réflexions en la matière, est donc apparu au cœur de ce grand
bouleversement. D’abord concept, le développement durable est devenu une démarche
indispensable, quasiment normative dans certains cas (Le Grenelle Environnement de 2007 a pour
ambition de légiférer sur les lois en matière de développement durable et d’environnement), de
recherche d’un cercle vertueux entre ses trois piliers.
Le second phénomène, l’explosion de la population des villes, a quant à lui initié le fait
urbain à se croiser avec le développement durable. Petit à petit, on est donc passé du concept de
développement durable à celui de développement urbain durable. Ce seuil symbolique mondial
de 50% de population urbaine cache des réalités bien différentes dans certains pays, notamment
dans les pays du Nord. En 2010 en France, cette part de la population a atteint les 80%, soit plus
de 52 millions de personnes. Le fait urbain n’a donc jamais eu autant d’importance qu’aujourd’hui
dans l’histoire de l’Humanité. Cette urbanisation s’est faite de manière verticale dans les centres-
villes, de plus en plus denses en termes de démographie mais aussi de constructions, et de
manière horizontale en périphérie, marquées par d’interminables banlieues et autres zones
économiques. Ce dernier phénomène, l’étalement urbain, est celui qui a fait des villes un des
responsables principaux des atteintes à l’environnement. Pourtant, la dédensification urbaine a
pour origine la volonté de certains urbanistes (les hygiénistes) d’ « aérer » la ville, alors rendue
insalubre par l’industrie, dans un souci de santé publique. Mais le développement de l’automobile
a repoussé toujours plus loin les banlieues pavillonnaires, au point que la limite entre la ville et la
campagne est devenue floue. L’attrait d’un foncier moins onéreux et d’un cadre de vie plus
agréable forment le leitmotiv des périurbains et des « rurbains ». Artificialisation des sols (zones
Définition du « Développement Durable » d’après le rapport Brundtland : « un développement qui répond aux besoins des générations du présent sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs. Deux concepts sont inhérents à cette notion : le concept de « besoins », et plus particulièrement des besoins essentiels des plus démunis à qui il convient d’accorder la plus grande priorité, et l’idée des limitations que l’état de nos techniques et de notre organisation sociale impose sur la capacité de l’environnement à répondre aux besoins actuels et à venir. » (Your Common Future, 1987)
Introduction Générale 2010
13
pavillonnaires, routes, mitage) et augmentation des déplacements en voiture (migrations
pendulaires) ont un impact écologique fort (émission de gaz à effet de serre, perte de biodiversité,
destruction des milieux naturels, consommation d’espaces agricoles). À cela s’ajoutent des
impacts paysagers, sociaux (ségrégation socio-spatiale, individualisme) et financiers (construction
et entretien des réseaux) que doit supporter la ruralité, sans pour autant bénéficier d’un
développement économique, les communes périurbaines se limitant souvent à être des « villes
dortoirs ».
1.3 Du constat au concept
Ce constat n’a été établit que tardivement par les instances politiques, et encore
aujourd’hui, il est difficile de convaincre certaines communes de renoncer à l’arrivée de nouveaux
habitants ou activités économiques, et donc de ressources fiscales. Ce retard est lié à la
complexité du problème urbain, milieu dans lequel on ne peut appliquer de solutions simples, et
au caractère thématique, et non territorial, des premiers travaux sur le développement durable.
Le rapport Brundtland évoque le problème des villes, surtout celles du Sud, notamment en
matière de consommation énergétique, mais reste trop général face aux enjeux.
La ville, milieu artificialisé par excellence, pôle décisionnel et champ social, est donc au
cœur de la recherche actuelle sur les avenirs de substitution. Cela a donné naissance à plusieurs
concepts, notamment celui de « ville écologique », progressivement substitué par celui de « ville
durable ». Il a fallut attendre 1988 pour voir apparaitre ce terme, dans la cadre du programme
MAB (Man and Biosphere, débuté en 1971) de l’UNESCO consacré à l’écologie urbaine1.
Après la Conférence de Rio, la question entre timidement dans les débats, jusqu’en 1996
où le Sommet d’Istanbul Habitat II lui est consacré (encadré p.14). Mais c’est en 1994 que la
Campagne européenne des villes durables est lancée dans la ville danoise d’Aalborg. Les 80 villes
représentées ratifièrent la charte, avec pour objectif de mettre en œuvre les Agendas 21 à
l’échelle locale. Par rapport à la ville écologique, une triple rupture est effectuée. Il s’agit
désormais de ne plus dissocier projet d’urbanisme et préoccupations environnementales, de
manier plus efficacement les échelles spatio-temporelles, et enfin de redonner de l’humanité à la
1 Charlot-Valdieu et Outrequin, 2009, p. 22
La ville durable au cœur de la réconciliation Nature/Société 2010
14
ville, objet longtemps soumis aux « préjugés anti-urbains »2. Après Aalborg, Lisbonne (1996),
Hanovre (2000), à nouveau Aalborg (2004) et Séville (2007), c’est à Dunkerque, du 19 au 21 mai
2010, que se déroule la sixième Conférence européenne des villes durables. Experts
internationaux, élus locaux, membre de gouvernement et dirigeants d’entreprise sont ainsi réunis
pour débattre sur le développement durable local.
Seize ans après Aalborg, les actions menées n’ont pas réussi jusqu’ici à inverser la tendance
d’une dégradation globale, les actions sectorielles souvent limitées au traitement d’aspects
environnementaux n’étant que trop isolées et non inscrites dans une véritable démarche intégrée
de développement durable. Il ne s’agit pas d’un échec, mais simplement d’une mauvaise
interprétation du concept, trop souvent confondu avec l’ « écologie urbaine », ou bien d’une
démarche centrée sur une seule entrée du développement durable (économique, social ou
environnementale), et non sur l’interface entre ces trois piliers.
1.4 La difficile définition de la « ville durable »
La ville, objet devenu rétif, car aux limites indéfinissables, se voit maintenant associée à la
durabilité, concept confus aux enjeux hétérogènes. Qu’en est-il alors de la définition de la ville
durable ?
Il s’agit d’abord d’un concept hybride fondé sur le paradigme du développement replacé
dans un contexte global que sont ses trois piliers, avec une approche temporelle novatrice, celle
du legs, de l’avenir de nos descendants3. C’est également un concept descendant, parti des
instances internationales et relayé par les États pour finir par être traité par les collectivités
locales. La ville, jadis définie par opposition à la campagne, devient durable parce qu’elle
s’accapare certains atouts traditionnels de la ruralité (qualité de vie, aménités paysagères,
proximité, etc.) tout en conservant son aura culturelle et économique, son activité, son
patrimoine, sa jeunesse. La ville durable est le symbole de l’inversion de points de vue entre les
chartes d’Athènes et d’Aalborg, elle sort de l’hygiénisme, de l’écologie urbaine trop ségrégative.
2 Theys et Emélianoff, 2001, p. 122
3 Couret et al. in Mathieu et Guermond, 2005, p. 47
Sommet d’Istanbul Habitat II de 1996 : il réunit dans un sommet international les acteurs de la ville afin de traiter des établissements humains (habitats). Le thème prioritaire était le logement, voulu « pour tous » et « durable ». Ce sommet a eu pour conséquence, hormis le fait qu’il fait entrer le concept de « ville durable » dans le langage courant, de revendiquer le rôle des villes dans la résolution des problèmes globaux.
Introduction Générale 2010
15
Elle marque le retour du quartier comme échelle efficace pour les projets, centrée autour de
l’individu.
Le concept est néanmoins flou. Une des grandes tendances de la ville durable est sa
compacité. Lors de sa conférence au Forum IRTS de Lorraine à Nancy le 8 février 2010, François
Mancébo, professeur de géographie à Grenoble, rappelait que cette notion de densification du
bâti, permettant de préserver les terres agricoles et naturelles, est contradictoire avec la demande
sociale de nature en ville, nécessitant d’ « aérer » le milieu urbain, de créer des espaces verts, des
coulées vertes. La ville compacte est un îlot de chaleur où se concentre la pollution, marquée par
l’exiguïté qui chasse les résidents et un manque chronique de place ne permettant pas de
développer les énergies renouvelables.
Alexander Stahle, architecte-paysagiste et docteur en urbanisme à Stockholm, affirme
pourtant que les deux sont conciliables, et même complémentaires, la présence de parcs
favorisant l’acceptation d’une densité plus forte par les riverains.
Face à certaines contradictions, c’est aux décideurs d’arbitrer. La solution passe par le
compromis, la ville durable se voulant avant tout d’être une ville hybride, durable dans le temps et
intégrée dans une globalité spatiale :
• Ville hybride autosuffisante, qui ne mise pas sur une « durabilité importée », c’est-à-dire
en exportant son coût de développement vers d’autres territoires ou d’autres générations, mais
qui fonctionne dans un circuit court pour répondre à ses besoins fondamentaux, et dans un circuit
plus vaste, notamment en termes d’échanges marchands internationaux, de culture, etc., vecteur
de dynamisme économique. Ce dernier intègre également le développement durable, grâce à une
efficacité sur le long terme, une distribution équitable, et une protection de l’environnement.
• Ville hybride cohérente socialement, fonctionnellement et spatialement, équitable en
tous lieux, tournée vers les nouvelles proximités : proximité des services, proximité de la nature,
proximité des cultures et proximité des générations. Elle rejette l’approche fonctionnaliste,
responsable de l’étalement de la ville, pour une mixité fonctionnelle rationnelle et multiscalaire.
La ville durable au cœur de la réconciliation Nature/Société 2010
16
• Ville hybride dense et polycentrique, qui se reconstruit sur elle-même (rénovation,
réhabilitation, reconversion), qui traite ses sols pollués sur place, et végétalisée, permettant la
résilience des éco-sociosystèmes, d’écrêter les crues, de filtrer l’air, avec une nouvelle pratique de
la nature en ville (concept de sociotope4, gestion différenciée des espaces verts).
• Ville hybride tournée vers les transports doux et les transports collectifs, rejetant
l’hypermobilité, mais toutefois ouverte à l’automobile, laissant ainsi une grande place à la
multimodalité et à la piétonisation de la rue.
• Ville hybride porteuse de projet, mais aussi portée par un projet à l’échelle supérieure,
favorisant les mouvements d’ascendance, de gouvernance participative, mais ne rejetant pas les
processus descendants, car plus aptes à traiter des changements climatiques globaux.
Néanmoins, face aux interrogations inévitables de la ville durable (F. Mancébo, J.M. Legay),
il est possible de se demander si accoler le terme de « durable », ou soutenable, qui implique un
certain maintien, teinté d’immobilisme, à un phénomène complexe et en mouvements continuels,
la ville, est raisonnable5. Cette question reflète le vide sémantique associé à ces nouveaux
concepts, qui parfois fait basculer l’urbanisme durable dans l’écologisme urbain (encadré p.16).
L’enjeu du XXIe siècle ne sera pas le déploiement et l’épanouissement de la ville durable – il
apparaît inévitable que des acquis tels que la Conférence de Rio ou la charte d’Aalborg ne vont pas
rester sans lendemain, et que la nécessité de freiner les changements climatiques globaux va
4 Concept utilisé à l’origine en sociologie (M. Castells, L. Dencik) et en anthropologie (E. Katching-Fasch), réinvesti depuis les années
2000 par A. Stahle, qui le définit comme l’unité géographique élémentaire d’un environnement social vécu et pratiqué par une partie de la population (une terrasse, une rue piétonne, un parc, etc.). Le terme est d’ailleurs tiré de la notion de biotope en écologie. Ses travaux à Stockholm ont permis d’établir une cartographie des sociotopes, servant d’outil de planification (cf. 2.3). 5 Couret et al. in Mathieu et Guermond, 2005, p. 47
L’écologie urbaine est un courant scientifique précurseur et ayant existé parallèlement aux travaux sur le développement durable, initié dans le but d’appliquer à la ville la problématique de la qualité de l’environnement, sans liaison avec les enjeux écologiques globaux. L’Ecole de Chicago est traditionnellement désignée comme la fondatrice de ce courant, pendant l’Entre-deux-guerres, intégré plus tardivement en France par des chercheurs comme P. Mirenowicz et C. Garnier. Interdisciplinaire (écologie, sciences de l’environnement et de l’homme), l’écologie urbaine centre son analyse sur les « populations humaines et le fonctionnement éco-sociosystèmique de la ville dans leurs imbrications réciproques » (Torrès in Mathieu et Guermond, 2005, p. 58). Malgré le relatif échec de ce courant, trop « technocentré » et négligeant le caractère global du fait urbain (Ibid.), des réflexions ont pu en émaner, notamment en matière de développement urbain durable : notion d’écosystème, forme urbaine polynucléaire, vision multiscalaire. Aujourd’hui, des auteurs, comme P. Clergeau (Une écologie du paysage urbain, Apogée, 2007), tentent de remettre au goût du jour le concept en y intégrant une dimension socio-économique durable.
Introduction Générale 2010
17
devenir prioritaire, ne serait-ce que pour le potentiel économique et financier en jeu (Figure 4,
p.17) – mais plutôt sa capacité à favoriser l’équité, à ne pas être une démarche ségrégative. Car si,
au départ, les trois pôles du développement durable sont d’une importance égale, un certain
effacement de la sphère de l’équité sociale est progressivement apparu, face aux nombreux
conflits que dégagent l’épaisseur et le caractère interdisciplinaire de ce concept6.
1.5 Le couple Nature/Société en milieu urbain : du divorce à la
réconciliation
Le couple nature/société, les « relations Homme-Nature » forment le paradigme originel de
la Géographie. Celle-ci « avait déjà un double champ particulier dans les sciences, qui était de
vérifier si les différences dans l’espace des hommes avaient un rapport avec les différences
spatiales dans l’ordre des phénomènes naturels »7.
Cette vision réductrice, qui a pris tout son sens au XIXe siècle, où la géographie faisait
contre, voire sans la nature8, est aujourd’hui révolue. Nature et société sont des manifestations
que la géographie étudie désormais dans leurs articulations réciproques.
L’abolition des systèmes (système rural, système urbain), la forte demande sociale de
nature en ville et l’intérêt relativement récent des biologistes pour le milieu urbain font que ces
6 Torrès, in Mathieu et Guermond, 2005, p. 59
7 Brunet et al,. 1992, p. 346
8 Ibid.
Figure 4 : Dongtan, l’utopie d’une écocité chinoise. Shanghai.
Construite ex nihilo sur l’île de Chongming, zone marécageuse protégée, la future ville de Dongtan, qui doit être en partie livrée pour l’exposition universelle de 2010, semble avoir une ambition démesurée : 80 000 habitants d’ici 2020, autonomie énergétique, recyclage intégral des déchets, espaces piétons surdimensionnés (six fois plus qu’à Copenhague, ville la plus aérée d’Europe), agriculture biologique généralisée, etc. Les retards de livraison de cette nouvelle vitrine de la Chine sont déjà un sérieux coup d’arrêt au projet.
www.linternaute.com, 2008
La ville durable au cœur de la réconciliation Nature/Société 2010
18
articulations s’effectuent désormais majoritairement en ville, et ce phénomène a conduit à la
production d’une multitude de travaux scientifiques qu’il est difficile de réunir exhaustivement.
En ville, le concept de « nature » s’oppose à celui de l’ « artificiel », la tache verte contre la
tache grise. Pourtant, un parc public est ce qu’il y a de plus artificiel : espace engazonné
régulièrement entretenu, alignement d’arbres non endémiques, ruisseaux voûtés ou tubés, etc.
Mais les espaces verts ont une quadruple utilité9 : sociale (lieu de rencontre, de partage),
culturelle (patrimoine paysager, symbole), écologique (lieu de respiration, d’aération, biodiversité)
et psychosensorielle (imaginaire individuel, sensibilité).
La nature en ville est une « expression évocatrice » mais floue, « hybride », résistante « aux
transformations des régimes de l’urbain, à ses temporalités et à ses modes de régulation »10.
La montée des préoccupations environnementales place l’urbanisme végétal au devant de
la scène urbaine, où se jouent la multitude de combinaisons entre le minéral, le végétal et le
développement durable. L’urbain, ce qui sans cesse advient par l’action des hommes, se place
ainsi entre artifice et nature, et l’urbanisme végétal devient partie prenante de la réflexion sur le
développement urbain durable.
Les premières révolutions agricoles du Néolithique et la domestication des plantes et des
animaux vont amener les Hommes à s’implanter de façon permanente dans les territoires. Les
premières villes, apparues quatre millénaires avant notre ère en Mésopotamie, sont donc nées
grâce à la maîtrise grandissante de la nature. Et jusqu’au Moyen-âge, la ville est encore largement
pénétrée par la campagne, et inversement, les faubourgs forment des appendices urbains
s’enfonçant dans le territoire rural.
Cette relation symbiotique va être largement bouleversée par l’arrivée de l’industrie,
élément conduisant à une métamorphose urbaine sans précédant : les voies de communications
se multiplient pendant que la ville se densifie en même temps qu’elle s’étend inexorablement. La
nature est absente de cette mutation. Il faut attendre que cette phase d’industrialisation fasse
naître ses premières préoccupations liées aux nuisances qu’elle engendre pour que la nature
s’immisce à nouveau dans la politique de la ville : les hygiénistes et l’urbanisme haussmannien
inaugurent les espaces publics aérés, verdoyants, accessibles à tous. En parallèle, Howard invente
son concept de « cité-jardin » pour faire face à l’urbanisation chaotique des débuts de l’ère
industrielle, où la nature devient la structure de la ville, en favorisant la proximité avec l’habitant,
9 Boutefeu, 2001, p. 36
10 Da Cunha, 2009, p.3
Introduction Générale 2010
19
grâce aux grands espaces verts, aux voies plantées d’arbres. Trop utopique, ce concept s’arrêtera à
quelques réalisations au Royaume-Uni, bien que le terme soit lui-même repris dans des projets
urbains ailleurs en Europe.
Le concept sera rejeté par l’architecture moderniste du début du XXème siècle, laquelle
sera notamment représentée par l’œuvre de Le Corbusier. Bien que désirant réconcilier
l’urbanisme avec le soleil, l’air et la verdure, ce modèle fonctionnaliste ne laissera à la nature que
tout ce qui n’est pas occupé par les immeubles et les réseaux. Cela marque à nouveau l’opposition
de la surface bâtie à la surface vide, limitant la convivialité et laissant une impression d’une
« scène urbaine construite et minéralisée, coupée de la nature, soumise à une esthétique
industrielle sans éclat, asservie aux exigences de la fluidité, de la vitesse automobile et de
l’élargissement d’un maillage urbain dessaisissant le citadin de l’échelle de proximité »11. Il ne faut
pourtant pas négliger le fait que cet urbanisme, aussi décrié soit-il, a réussi en son temps à
répondre à la pénurie de logements lors de la Reconstruction d’après-guerre. Contesté dès les
années 1970, l’urbanisme fonctionnaliste a lui aussi conduit à exacerber l’envie de vivre à la
campagne, et fait de la maison individuelle un rêve de citadin.
Le besoin de nature, terme qui regroupe ici les notions de qualité de vie, de connivence
avec l’espace vécu, d’éloignement des troubles urbains, de proximité avec la nature, est donc un
des facteurs principaux de cette dilatation de la ville. Sans revenir sur les effets directs et indirects
d’un tel phénomène (cf. 1.3), il est indéniable qu’ils ont conduit à l’apparition de nouvelles
réflexions sur le fait de concevoir la ville sous un autre angle. Construire la ville sur la ville,
revitaliser les centres, faire émerger une ville polynucléaire, qualifier l’espace public, intégrer la
nature dans les nouveaux projets urbains, construire la trame verte et bleue, offrir une véritable
mixité urbaine (intergénérationnelle, fonctionnelle, architecturale). En parallèle se mettent en
place dans les années 1990 la notion de « ville durable », plébiscitée par les conférences de Rio et
Aalborg, avec pour mot d’ordre une réduction de l’impact environnemental des villes.
1.6 Une mission de stage prospective et éclectique
Le Grand Nancy, associé à l’année internationale de la biodiversité de l’ONU, s’inscrit dans
cette optique de développement durable, et l’ADUAN offre, via l’Incubateur Territorial, un outil de
recherche prospective sur ses sujets, au croisement entre différents concepts. Le sujet de
11
Da Cunha, 2009, p.6
La ville durable au cœur de la réconciliation Nature/Société 2010
20
recherche qui m’a été confié, « la réconciliation nature/société dans la ville durable de demain »,
reflète l’importante émulation autour du développement urbain durable. Dans ce mémoire, nous
nous pencherons sur les différentes études réalisées autour de cet axe de recherche. Certains
sujets ont conduit à la production de documents pour l’agence (4 pages, dossiers), sur lesquels
nous reviendrons. La plupart des recherches effectuées ont ensuite servi à la rédaction de ce
mémoire dans le but de répondre à une problématique plus précise que le vaste sujet confié :
quels seront les outils de la ville opérant pour un retour de la nature et sa protection ? Cette
interrogation est en effet un thème de plus en plus récurent pour les agence d’urbanisme,
confrontées aujourd’hui aux nouvelles façons de construire la ville. Étant donné le large éventail
d’outils désormais disponibles, sans compter sur ceux qui naissent régulièrement, seuls certains
d’entre eux ont été sélectionné par Monsieur Brillaud et les stagiaires de l’Incubateur, car
intéressants l’ADUAN et plus largement le Grand Nancy.
Ces outils, divers et variés, ont été regroupés en deux catégories : d’une part, les outils dits
de « planification » (première partie), et d’autre part, les outils formant ce que nous pourrions
appeler les « nouveaux objets urbains » (seconde partie). Dans chacun des cas seront compilés les
grands axes de recherche étudiés durant le stage afin de répondre à la problématique. Une grande
majorité des thèmes classiques de l’urbanisme ont été abordés durant le stage : les transports,
l’écologie urbaine, les espaces publics, le logement, le commerce, la mixité urbaine.
Certains sujets, apparaissant éloignés du thème de la « nature en ville », tel que le
chronoaménagement12, ont été volontairement intégrés au rapport. Leur caractère innovant et
leur spatialité intéressent le Géographe, et certaines de leurs actions peuvent permettre une
intégration de la nature. Ce sont également des concepts qui entrent dans le domaine du
développement durable.
En parallèle à la mission concernant la ville durable, une participation à l’observatoire du
commerce mis en place par l’ADUAN m’a été confiée. À l’échelle du SCoT Sud Meurthe-et-Moselle,
une carte des isochrones des pôles commerciaux nancéiens a été réalisée (annexe 1, p.IV), tandis
qu’à l’échelle de la CUGN, il s’agissait de mettre à jour la base de données des commerces du
Grand Nancy pour la cartographie SIG. L’objectif pour l’agence est de posséder une connaissance
très actualisée du commerce nancéien, afin de réaliser des études commerciales exactes, mais
12
2.2 Chronoaménagement, boulevard urbain et autoroute apaisée, p.31
Introduction Générale 2010
21
également d’être réactif afin de proposer des solutions efficaces aux futurs commerçants de
l’agglomération.
Mon action fut d’effectuer cette mise à jour pour toutes les communes de la communauté
urbaine, hors Nancy (cette partie étant dévolue à la municipalité). En tout, plus de 2 000
commerces ont du être inspectés afin de savoir s’ils étaient encore en activité, ou bien si celle-ci
avait changée. Ce travail long et fastidieux, mais intéressant et enrichissant, montrant toute la
partie amont d’une ambitieuse mission de cartographie, a occupé onze journées de travail. Avec
une tâche complémentaire consistant à mettre à jour les tableaux de données existants.
L’observatoire du commerce étant encore en cour, il ne m’a pas été possible de joindre un rendu
intéressant de ce travail.
La ville durable au cœur de la réconciliation Nature/Société 2010
22
LLAA PPLLAANNIIFFIICCAATTIIOONN :: SSOOCCLLEE DDEE BBAASSEE DDEE LLAA VVIILLLLEE DDUURRAABBLLEE
Les premières démarches de planification urbaine environnementale sont apparues
avec l’essor des villes à l’époque romaine. Les habitats humains denses nécessitaient ainsi de
rationnaliser l’organisation de l’espace et la gestion des ressources naturelles : routes, eau,
denrées alimentaires, matériaux de construction… L’art du jardin à la française marquera
ensuite l’emprise de l’homme sur la nature. Cette pensée rationaliste prévalu jusqu’au siècle
des Lumières. La Révolution industrielle marquera l’arrivée massive des premières
préoccupations environnementales en milieu urbain, bien que la ville médiévale soit déjà le
théâtre de conflits d’usage liés à l’utilisation de l’eau. Le mouvement hygiéniste va chercher
à répondre à des problèmes de santé publique en prenant une envergure réglementaire à
Paris. La ville devient alors un métabolisme, et cela fait naître les premières idées
écologiques.
Après la Seconde Guerre Mondiale, la Reconstruction fait la part belle à l’aspect
économique. Cela engendrera des interrogations en matière d’environnement puis des
réponses telles que les premiers parcs nationaux. Cette planification environnementale trop
segmentée, tendant à muséifier l’espace, sera suivie, dans les années 1980-1990, de
l’émergence de démarches intégratives disposant d’une vision socio-environnementale. Les
efforts de décentralisation seront le ferment de ces démarches, plus participatives et moins
purement écologistes.
Cette première partie sur la planification urbaine regroupe divers concepts plus ou
moins récents et novateurs mais qui vont être appréhendés dans un proche avenir par
l’ADUAN. La trame verte et bleue13, le chronoaménagement14 et les sociotopes ont donné
lieu à la rédaction de « 4 pages » destinés aux élus et aux professionnels de l’ADUAN.
13
Annexe 2 pp. IV à VII 14
Annexe 3 pp. VIII à XI
La planification : socle de base de la ville durable 2010
23
2.1 La Trame verte et bleue : l’aménagement du territoire au service
de la biodiversité
2.1.1 Le réseau écologique : un concept ancien remis au goût du jour par le
développement durable
2.1.1.1 Genèse du concept
Le paysagiste Jean-Claude-Nicolas Forestier (1861-1930) a développé une vision
proche de celle des trames vertes et bleues (TVB) en promouvant un développement urbain
à partir d’un « système de parcs », continuité « verte » nécessaire à la respiration de la ville
(Grandes villes et systèmes de parcs, 1908). Cela fait écho au courant de pensée des
hygiénistes de la deuxième moitié du XIXe siècle qui prônait une ville saine et esthétique.
La Seconde Guerre Mondiale et les reconstructions qui s’en suivirent eurent pour
conséquence l’apparition du zonage, cloisonnant de manière réductrice les besoins de la
nouvelle société de masse, sans pour autant faire disparaître la nature de la ville, mais en la
confinant dans des « espace verts ».
Les Trente Glorieuses et le développement de la mobilité conduiront à l’étalement
urbain, phénomène lié à la recherche à la campagne d’une nature plus « sauvage » par les
citadins. Les parcs et jardins deviennent alors les reliques d’une nature « ordinaire »,
« oubliée ». Ce phénomène de périurbanisation sera éclairé par une discipline montante
dans les années 1980 : l’écologie des paysages, dont les pionniers français sont Françoise
Burel et Jacques Baudry15. La notion de « corridor écologique » est alors développée (Figure
5, p.24).
Le Sommet de Rio sera suivi d’une prise de conscience concernant la fragmentation
des habitats. Dans les pays francophones, la trame verte fait son apparition dans les
documents d’urbanisme (SDAU de Rennes en 1983, SDAU d’Angers en 1996), aux côtés de la
notion de ceinture verte. Il s’agit d’une première prise en compte concrète de
développement durable en ville.
15
Françoise Burel et Jacques Baudry, 1999, Écologie du paysage. Concepts, méthodes et applications Paris, TEC & DOC, 362p.
La ville durable au cœur de la réconciliation Nature/Société 2010
24
Figure 5 : Le corridor écologique D’après Thorme, 1993
2.1.1.2 De l’écologique à l’outil de planification urbaine
Les trames vertes et bleues sont ainsi devenues des outils d’aménagement qui
relèvent donc du réseau écologique, concept théorique de l’écologie du paysage. Très en
vogue depuis le Sommet de Rio en 1992, bien qu’existant depuis la première moitié du XXe
siècle, le réseau écologique est devenu une réalité juridique en France depuis le Grenelle de
l’Environnement en 2007 (chantier 11 piloté par le sénateur Paul Raoult), traduit deux ans
plus tard en projet de loi. Le concept de TVB est donc passé de l’état de « discours à celui de
matérialité »16.
Le réseau écologique se décline sous deux regards : celui des écologistes, qui le
définissent comme un tissu vivant favorisant le repos, le nourrissage et le déplacement de
populations animales et végétales, et celui des architectes-paysagistes, plaçant en lui des
fonctions paysagères et spatiales.
Le croisement de ces regards constitue le fondement des trames écologiques, nouvel
enjeu du développement durable. Car si le concept tend à être fortement appliqué en milieu
rural, il ne doit pas s’y restreindre. Au contraire, l’application des TVB en milieu urbain et
périurbain apparaît, à l’instar des quartiers durables, comme une nouvelle source de
naturalisation des villes.
16
Cormier et Carcaud, 2009
La planification : socle de base de la ville durable 2010
25
2.1.1.3 Un nouvel instrument pour la respiration urbaine
La nature en ville est marquée par une certaine insularité17 des espaces verts,
organisés en nuages de points isolés. Ces points (squares, jardins, parcs) ont une biodiversité
plus ou moins grande en fonction de leur taille, mais surtout en fonction de leurs
interactions. La faune inféodée à un parc isolé sera tributaire de l’arrivée de nouveaux
immigrants pour compenser les pertes naturelles. Ainsi, la présence de corridors permet des
échanges entre ces lieux, mais aussi avec la campagne environnante, si le maillage est
suffisamment développé. La connexité des espaces verts intra-muros avec les ceintures
vertes périurbaines est donc l’enjeu des TVB. Et pour s’insérer définitivement dans le
développement durable cher aux politiques, ce travail sur les TVB est souvent associé à la
mise en place de voies vertes, ou coulées vertes, et de parcs à gestion différenciée,
redevenant des lieux de rencontre d’échanges. La densification urbaine passe par ces actions
de « pratique de la nature urbaine ».
2.1.2 Un objet multiscalaire : de la haie au réseau Natura 2000
Une des particularités du concept est sa grande propension à se traduire à toutes les
échelles. Cette spatialité intéresse donc le géographe, et se traduit en SIG.
À l’échelle de l’écoquartier, la TVB se matérialise par des actions de végétalisation,
dans le but de relier les écosystèmes urbains isolés, et de créer des itinéraires verts « mi-
promenades urbaines, mi-jardins publics »18. Ces itinéraires intègrent des projets d’ampleur
plus large formés par les coulées vertes et les ceintures vertes, irriguant la ville et créant des
aménités paysagères. Le degré de connectivité des corridors ainsi crées dépend de leur
largeur, mais aussi de leur biodiversité, et en terme de mobilité, ils seront utiles s’ils
encouragent les modes doux de déplacement.
En tissant des liens avec les territoires ruraux, ces projets entretiennent la
biodiversité urbaine qui, rappelons-le, n’a rien à envier à certaines forêts. Les DTA, SCoT et
PLU sont les outils juridiques permettant la mise en place de ces pratiques, et ils seront
renforcés par le projet de loi Grenelle 2.
Plus l’échelle s’élargit, plus les projets se globalisent. L’intercommunalité permet par
exemple de promouvoir la réaffectation d’anciennes voies ferrées, la gestion des espaces
verts et leur mise en réseau, etc. Au niveau régional, la création de Schémas Régionaux de
Cohérence Écologique est prévue pour 2012, afin de cartographier les trames écologiques et
17
Modèle tiré des travaux ornithologiques de MacArthur et Wilson 18
Boutefeu, 2007, p.3
La ville durable au cœur de la réconciliation Nature/Société 2010
26
d’adopter des politiques contractuelles pour la restauration ou la préservation de la
biodiversité.
Enfin, l’échelle nationale est le terrain de la Trame verte et bleue du Grenelle,
s’inscrivant dans un cadre plus large, celui du réseau écologique paneuropéen (encadré
p.26) et de Natura 2000.
2.1.3 La prise en compte paysagère pour redynamiser le concept en politique
2.1.3.1 Des actions concrètes encore trop rares
Au-delà de l’aspect purement écologique, la TVB se décline également en politiques
paysagères pour l’amélioration du cadre de vie, afin de lui donner un intérêt plus concret,
notamment en matière de communication. Le PADD du SCoT de Lyon insiste sur ce double
intérêt des trames écologiques, censées répondre également à une attente sociale (cadre de
vie, qualité de l’air, esthétisme, récréation) voire économique, avec l’attrait de certains
touristes.
Car si de nombreuses structures françaises ont pris en compte les TVB, notamment
en les cartographiant en SIG, très peu ont réellement dépassé ce stade prospectif. Cette
carence semble être liée à plusieurs symptômes mis en lumière par Laure Cormier et
Nathalie Carcaud (2009) :
Le SCoT est le document d’urbanisme de prédilection pour la mise en place de TVB.
Or, Cormier et Carcaud considèrent qu’à cette échelle la faisabilité d’une politique
commune est limitée par la taille du territoire et son hétérogénéité. Dans le SDAU
d’Angers, une grande partie du territoire a été classé en TVB, mais l’analyse des POS
et des PLU des communes concernées montre qu’aucunes dispositions particulières
n’existaient par rapport à ce zonage. Le changement d’échelle semble bloquer la
démarche.
Si la gestion du foncier public ne pose de problème pour les acteurs de
l’aménagement, qui peuvent établir des cahiers des charges pour mettre en place les
zonages, il leur est plus difficile d’intervenir sur le domaine privé.
La Stratégie paneuropéenne pour la diversité écologique et paysagère
(SPDBP) a été élaborée à Rio en 1992 et adoptée 3 ans plus tard à Sofia par
l’Europe. Son objectif est de « trouver une riposte cohérente au déclin de la
biodiversité et de garantir la durabilité de l’environnement naturel ». Cela
passe par la mise en place du réseau écologique paneuropéen.
La planification : socle de base de la ville durable 2010
27
Les aménageurs ne sont pas suffisamment qualifiés en matière d’écologie pour
traiter foncièrement la notion à échelle fine. Il est difficile de différencier des terrains
qui peuvent former une trame et ceux qui ne le sont pas.
Il peut exister un manque d’intérêt en matière de communication politique à ces
actions qui ont parfois un aspect purement environnemental et donc abstrait.
La mise en place des trames écologiques nécessite souvent, lorsque l’échelle s’élargit,
des investissements lourds.
Face à la pression foncière urbaine, le « gel » de parcelles potentiellement
constructibles par le zonage peut paraître rédhibitoire.
2.1.3.2 Les moyens d’action
Ainsi, des leviers publics comme le droit de préemption urbain permettraient aux
collectivités d’acquérir du foncier en vue d’aménager des espaces verts ouverts. En milieu
périurbain, cela permettrait de résorber la pression foncière et de réserver des terrains pour
l’agriculture, activité qui devrait jouer un rôle majeur dans les ceintures vertes urbaines.
Néanmoins, la procédure étant lourde et coûteuse, la motivation du projet doit être grande.
Un autre moyen d’action est d’opérer via les documents de planification comme le SCoT.
Mais l’exemple angevin ne plaide pas en faveur de ce moyen ; il faudrait « dépasser les
cartographies d’orientation des SCoT et inscrire à l’échelle locale la trame verte au sein des
PLU »19. Le département de l’Isère travaille à l’assignement d’une qualification « co » au
zonage des PLU qui correspondent à des corridors (Nco, Aco), afin d’établir un cahier des
charges particulier.
Enfin, le moyen le plus novateur, et dans l’air du temps, est celui des politiques
contractuelles (semblables aux mesures agro-environnementales) associant les acteurs
publics et privés. La réussite de cette démarche en Suisse (cantons de Fribourg et Genève)
est essentiellement due à la gouvernance territoriale. La protection coercitive n’étant pas
envisageable, le gouvernement helvète a donc engagé des mesures de compensation
écologique (7% des exploitations consacrées à la compensation écologique sont synonymes
de subventions pour les agriculteurs) afin de mettre en place une trame avec une forte
implication des exploitants agricoles. Le seul bémol de la gouvernance est sa difficile
application à une échelle plus vaste (coût financier, mobilisation d’un trop grand nombre
d’acteurs…).
19
Cormier et Carcaud, 2009, p.13
La ville durable au cœur de la réconciliation Nature/Société 2010
28
Il semblerait donc que la réussite des TVB passe par la participation de tous les
acteurs et des citoyens. Ainsi, « le concept de paysage veut faire ce lien entre les formes
concrètes d'un territoire, les logiques de développement territorial et les perceptions des
acteurs qui les construisent. *…+ Il est alors indispensable de mettre en cohérence les projets
aux différentes échelles de territoire tout en pensant les connexions entre eux »20.
2.1.4 La Trame verte et bleue du Grenelle
Les travaux du comité opérationnel piloté par le sénateur Paul Raoult portent sur divers
objectifs environnementaux très généralistes :
diminuer la fragmentation et la vulnérabilité des habitats naturels et habitats
d’espèces
identifier et relier les espaces importants pour la préservation de la biodiversité par
des corridors écologiques
atteindre ou conserver le bon état écologique ou le bon potentiel des eaux de
surface
prendre en compte la biologie des espèces migratrices faciliter les échanges
génétiques nécessaires à la survie des espèces de la faune et de la flore sauvage
améliorer la qualité et la diversité des paysages
permettre le déplacement des aires de répartition des espèces sauvages et des
habitats naturels dans le contexte du changement climatique
Les TVB ont également une dimension socio-économique qui touche à la gestion de
l’eau, grâce aux processus d’épuration naturelle et de prévention des inondations, aux
aménités paysagères et au cadre de vie. On estime qu’elles pourront avoir une valeur
économique, notamment en agriculture, pollinisation (« la contribution des insectes
pollinisateurs aux principales cultures mondiales a récemment été évaluée par une étude
20
Ibid.
Définition du Grenelle : la trame verte est un outil d’aménagement du territoire, constituée de grands
ensembles naturels et de corridors les reliant ou servant d’espaces tampons, reposant sur une cartographie à
l’échelle 1:5000. Elle est complétée par une trame bleue formée des cours d’eau et masses d’eau et des bandes
végétalisées généralisées le long de ces cours et masses d’eau. Elles permettent de créer une continuité
territoriale, ce qui constitue une priorité absolue.
La trame verte et bleue est pilotée localement en association avec les collectivités locales et en concertation
avec les acteurs de terrain, sur une base contractuelle, dans un cadre cohérent garanti par l’Etat.
www.legrenelle-environnement.fr, 2008
La planification : socle de base de la ville durable 2010
29
franco-allemande à 153 milliards d’euros par an. Cet apport correspond à près de 10 % de la
valeur de la production alimentaire mondiale »21), et production de bois (haies, espaces
forestiers), et en terme d’emplois (création d’emplois pour la gestion des espaces naturels,
maintien d’emplois en milieu rural, formation d’ingénieurs en écologie pour la planification
urbaine).
Le caractère multiscalaire est quant à lui bien pris en compte par le projet de loi,
allant de l’échelle nationale aux documents de planification urbaine, en passant par les
schémas régionaux de cohérence écologique.
2.1.5 L’exemple de Bruxelles : le « maillage » vert et bleu
2.1.5.1 Contexte du programme
La région de Bruxelles-Capitale dispose d’une couverture verte importante, plus de la
moitié de sa surface (16138 ha, pour 8500 ha de zones vertes22), composée de bois, jardins
privés, cimetières, terrains de sport. Néanmoins ces espaces souffrent d’un déséquilibre de
répartition entre la périphérie et le centre, et d’un manque de connexité entre eux. Le
Ministère de l’Environnement de la région de Bruxelles-Capitale a donc entreprit la mise en
place du plan-cadre régional afin de « tisser la toile de Bruxelles en vert et bleu »5.
Ce plan est dirigé différemment en fonction de l’espace urbain : au centre, assez
dépourvu en espaces verts, tout nouveau projet urbanistique doit maintenant prévoir son
verdissement (plantation d’arbres, bandes engazonnées, végétalisation des surfaces
verticales et horizontales).
21
Site du Grenelle de l’environnement, année de référence : 2005. 22
IBGE, 2000
Les composantes de la Trame verte et bleue du Grenelle :
les espaces naturels importants pour la préservation de la biodiversité, et notamment tout ou partie des espaces visés aux livres III et IV du code de l’Environnement.
Les corridors écologiques constitués des espaces naturels ou semi-naturels ainsi que des formations végétales linéaires ou ponctuelles, permettant de relier les espaces mentionnés à l’alinéa précédent
Les surfaces en couvert environnemental permanent mentionnées au I de l’article L. 211-14 du code de l’Environnement.
les cours d’eau, parties de cours d’eau ou canaux figurant sur les listes établies en application des dispositions de l’article L. 214-17 du code de l’Environnement.
tout ou partie des zones humides dont la préservation ou la restauration contribue à la réalisation des objectifs visés au IV de l’article L. 212-1 du code de l’Environnement.
Les cours d’eau, parties de cours d’eau, canaux et zones humides importants pour la préservation de la biodiversité et non visés ci-dessus.
www.legrenelle-environnement.fr, 2008
La ville durable au cœur de la réconciliation Nature/Société 2010
30
En périphérie, l’objectif est de conserver les caractéristiques paysagères, mais aussi
de permettre la connexion avec le centre.
Il s’agit d’un projet régional, pour son financement et son pilotage, mais les actions
sont communales.
2.1.5.2 La diversité des actions engagées : entre réglementation et participation citoyenne
Les actions engagées s’inscrivent dans une optique de planification à long terme, et
donc se servent des documents d’urbanisme comme outils de mise en place du maillage vert
et bleu.
Requalifier l’espace public
Une des actions d’envergure sur l’espace public a été d’impulser la concrétisation de
la Promenade verte, projet débuté en 1986, permettant de parcourir le tour de
l’agglomération sans discontinuité à vélo ou à pied, sur des sentiers balisés. En parallèle, la
coulée verte de la Héronnière permet de pénétrer le tissu urbain le long de la vallée de la
Watermaelbeek, agrémentée de terrains de jeux et de vélocross, de potagers, etc. La
création de passerelles au dessus des infrastructures routières a été fortement réclamée par
la population et rapidement opérée par les aménageurs.
Les terrains de sports sont réaménagés afin de mieux intégrer le paysage et d’offrir
plus de convivialité aux promeneurs. Les petites friches et les dents creuses sont gérées de
manière à en faire des refuges écologiques provisoires (pas de traitement phytosanitaire).
L’abattage des vieux arbres est désormais systématique, souvent préalable à la
réimplantation de jeunes pousses dans les rues.
La démarche la plus ambitieuse est de faire des nombreuses voies ferrées des
corridors écologiques, reliant les zones noyaux qu’elles longent ou traversent. La gestion est
effectuée en partenariat avec la SNCB, et varie en fonction des impératifs de sécurité
(abattage des arbres trop grands, préférence pour le taillis).
Les nombreux bois ceinturant l’agglomération sont des zones naturelles par
excellence. Certains ont des statuts de réserve naturelle, d’autres sont plus accessibles, tout
en évitant que les promeneurs ne s’aventurent dans des zones protégées (sentiers de
découverte entretenus, clôtures).
Enfin, il ne faut pas oublier les cimetières, véritables parcs urbains (cimetière
municipal de Bruxelles). Les anciens cimetières ont été reconvertis en espaces verts (Parc
Georges Henri, parc forestier d’Anderlecht, square du Petit Sablon), et celui de Dieweg,
La planification : socle de base de la ville durable 2010
31
abandonné depuis 1958, s’est métamorphosé, acquérant une riche biodiversité, et ce sans
l’intervention humaine, faisant de lui un endroit particulièrement insolite.
Gérer durablement les eaux
La gestion des eaux bruxelloises a prit une direction différente avec l’application du
maillage bleu. La réouverture de certains cours d’eau, voutés lors de la seconde moitié du
XIXe (Figure 6, p.31), est en cours. L’objectif est aussi de relier entre eux les cours d’eau qui
se jetaient jadis dans des collecteurs, souvent surchargés, engendrant alors des inondations,
et de séparer les eaux claires des eaux d’égout. Cette dernière action permet de renvoyer
l’eau ruisselée vers les cours d’eau, les étangs et les marais et de diriger les eaux usées vers
les stations d’épuration, réduisant ainsi les quantités à traiter.
Figure 6 : Les sections voûtées des cours d’eau bruxellois IBGE, 2000
Agir également sur l’espace privé
Concernant l’espace privé, la région incite au verdissement des fronts de rue par les
citoyens, et les documents d’urbanisme interdisent désormais la transformation des
jardinets en parking. Des clauses de végétalisation imposent le verdissement lors de la
La ville durable au cœur de la réconciliation Nature/Société 2010
32
construction de bâtiments industriels, administratifs et collectifs, ainsi que pour les
parkings.
La région invite aussi, par l’intermédiaire de conseils gratuits, à la végétalisation des
terrasses et des toits (filtre de l’eau pluviale, rétention des poussières, isolation thermique,
esthétique).
Les travaux entrepris par l’Institut bruxellois pour la gestion de l’environnement
semblent porter leurs fruits. Alliant l’obligation légale pour les acteurs publics, régionaux et
communaux, et démarches participatives, le maillage vert et bleu apporte une amélioration
du cadre de vie et une action de protection environnementale. Les modes de déplacement
doux deviennent ainsi de plus en plus populaires. Au-delà, c’est l’image de la ville et de sa
région qui s’en retrouve améliorée.
2.1.6 La ceinture verte rennaise : deux décennies de travail en amont pour les
TVB
Le SDAU « vert » de Rennes de 1983 fut rédigé en parallèle du second schéma
directeur de l’agglomération. Né à la suite d’une prise en compte par les communes
périphériques rurales du district urbain (crée en 1970) de l’importance de l’agriculture dans
la qualité du cadre de vie, le SDAU « vert » sera le socle de base de la politique
environnementale engagée par l’agglomération. Le consensus autour de l’agriculture
entraînera la prise en compte par le SDAU de l’existence et du besoin de renforcement de la
ceinture verte rennaise.
En 2007, Rennes approuve son SCoT, avec une politique en matière de TVB
forte de plus de vingt années d’expérience et de travaux sur sa ceinture verte. Le
renforcement du maillage bocager, et la protection systématique des milieux naturels sont
nécessaires pour le renforcement des corridors écologiques. À une échelle plus vaste,
l’objectif est d’inscrire le pays de rennes dans le maillage de Loire-Bretagne-Normandie. La
politique des espaces verts urbains vise à mettre en réseau ces espaces et à procéder
désormais avec une gestion différenciée. Indirectement, le SCoT incite aux modes de
déplacement doux, et a pour projet le renforcement et le rééquilibrage de l’offre de loisirs,
afin d’éviter que les zones existantes soient sur-fréquentées. La maîtrise de l’étalement
urbain en contenant l’urbanisation (espaces de respiration entre les communes) et la mise
en scène des paysages le long des infrastructures routières sont des actions qui doivent
La planification : socle de base de la ville durable 2010
33
favoriser la prise en compte paysagère. Enfin, l’agriculture, à l’origine ferment de cette prise
en compte dans les années 1980, n’est pas en reste : acteur structurant pour les paysages,
l’agriculture périurbaine est en voie d’être largement valorisée et protégée, comme vecteur
identitaire du territoire.
Figure 7 : Carte de synthèse du programme de protection environnementale du SCoT rennais Pays de Rennes/AUDIAR, PADD et Documents Graphiques, 2007
La ville durable au cœur de la réconciliation Nature/Société 2010
34
2.2 Chronoaménagement, boulevard urbain et autoroute apaisée :
des concepts innovants pour une mobilité durable
2.2.1 Contexte : l’impuissance des collectivités face à des enjeux inhérents aux
grandes agglomérations
Tous les documents d’urbanisme aboutissent au même constat : l’étalement urbain
et la périurbanisation doivent être combattus. Mais depuis plusieurs décennies, et malgré les
actions engagées, la réalité perdure, voire continue de s’intensifier. Pour l’Agence
d’urbanisme et le syndicat mixte de la région grenobloise, acteurs centraux du schéma
directeur et de l’élaboration du SCoT, l’objectif a alors été de chercher les éléments les plus
structurants de l’aménagement du territoire en vue d’élaborer un schéma véritablement en
phase avec les enjeux de la région (721000 habitants, site en forme de « cuvette »). La
région, occupant un territoire bien plus vaste que l’aire urbaine, est très contrainte par sa
géographie physique. L’allongement des distances y prend donc toute son ampleur.
Figure 8 : Evolution récente de l'étalement urbain à Grenoble et perspectives d'ici 2030 SCoT région Grenoble, 2009
2.2.2 La recherche de nouveaux leviers innovants
Les leviers classiques de la planification (urbanisme, équipements, habitat,
coopération territoriale, politique foncière) ne suffisant plus à enrayer les problèmes
d’étalement et de périurbanisation (Figure 8, p.34), l’idée de jouer sur le temps, et donc la
vitesse, s’est imposée dans les études de l’agence d’urbanisme. Cette question difficile et
La planification : socle de base de la ville durable 2010
35
délicate à aborder a été partagée collectivement dès le départ entre experts et chercheurs,
puis au cours de débats publics.
Ces concertations ont aboutit à deux objectifs :
Intégrer des dimensions temporelles dès la planification et, pour les
déplacements, réintégrer les processus de décision sur les infrastructures
routières dans le cadre plus large de l’aménagement du territoire.
Subordonner le mode de gestion de ces infrastructures au fonctionnement
souhaité pour la région urbaine plutôt qu’aux normes techniques, notamment
aux limites de vitesse autorisée, non liées à des objectifs d’aménagement.
2.2.3 Plus vite, plus loin, mais pas plus de temps gagné
Les chercheurs ont mis en évidence que les progrès techniques en matière
d’automobile, mais aussi en matière d’infrastructures de transport, n’ont pas engendré une
réduction des temps de transport, mais plutôt un allongement des distances parcourues
dans un même laps de temps. Ainsi, cela a servi d’abord à aller plus loin plutôt qu’à gagner
du temps (Figure 9, p.35). Aller plus loin signifie surtout gagner sur l’espace rural, et donc
contribuer à l’étalement urbain et à toutes ses conséquences néfastes en matière
d’environnement.
Figure 9 : Relation entre vitesse et débit DIR Centre-Est, 2009
La problématique posée par les acteurs de l’aménagement grenoblois est
essentielle : peut-on utiliser le niveau de performance du système routier comme un levier
efficace pour renverser l’étalement urbain et l’éclatement de la ville ?
AU
RG
20
06
La ville durable au cœur de la réconciliation Nature/Société 2010
36
2.2.4 Le chronoaménagement, nouvel aspect transversal du schéma directeur
Dans cette optique, l’agence d’urbanisme a mis en pratique le concept de
chronoaménagement avec la notion d’ « autoroute apaisée ». Le projet a été d’agir sur les
infrastructures autoroutières urbaines (celles situées dans le « Y » grenoblois) en limitant la
vitesse de circulation à 70 Km/h. Objectif : échanger la rapidité en heure creuse contre une
fiabilité (taux d’accident en forte baisse, limitation de la congestion) à toutes heures. Pour
un habitant de la grande banlieue de Grenoble, la durée d’accès à la ville est de 15 minutes
en heure creuses, mais de 50 minutes aux heures de pointe23. L’ « autoroute apaisée »
permettra que cette durée soit de 30 minutes tout au long de la journée. Les conséquences
sont les suivantes : à court terme, cela mettra en concurrence le transport automobile avec
le collectif, puisque ce dernier est à l’heure actuelle capable de desservir le centre de
Grenoble en 25 minutes, voire même avec les transports doux lorsque les distances sont
réduites ; à moyen terme, cela contribuera à réorienter les usagers des centres commerciaux
grenoblois vers des pôles de proximité, ces derniers faisant offices aujourd’hui de
« dortoirs » ; à long terme, l’objectif ambitieux est d’influer sur les futurs choix de la
localisation des logements, afin de parvenir à un rapprochement des pôles urbains.
2.2.5 Une prise en compte du temps dans l’aménagement du territoire
Évidemment, ce projet s’intègre pleinement dans une approche systémique de
l’aménagement, notamment en prévoyant le maintien de services à moyen et long termes,
ainsi que par une politique foncière permettant de densifier les pôles urbains. Dans une
optique de développement durable, ce projet à également pour mission de répondre à des
enjeux environnementaux, tels que la diminution du bruit lié au transport, la diminution des
émissions de polluants (par la diminution de la vitesse, des phénomènes d’accordéon et par
une meilleure fluidité), l’économie d’énergie par kilomètre parcouru et la baisse significative
des accidents, et également à des problèmes sociaux, l’accès à l’hyper-mobilité n’étant pas
universelle (notamment avec le vieillissement de la population), le renforcement des
transports collectifs et des services de proximité est un impératif.
En termes de foncier, l’objectif clairement affiché est de remettre sur le marché des
espaces stratégiques bien desservis, en réduisant les emprises de voirie et d’échangeurs, et
en les libérant de la contrainte des nuisances sonores. Il est question d’augmenter le
23
Agence d’urbanisme de la région grenobloise, 2006, Pour un chrono aménagement du territoire. Vers des autoroutes
apaisées. Présentation générale du projet, Grenoble, 17 p.
DIR
Cen
tre
Est
La planification : socle de base de la ville durable 2010
37
nombre d’entrées et de sorties le long de ses autoroutes afin de mieux irriguer le territoire.
En parallèle, un travail de valorisation paysagère est envisagé, la visibilité étant améliorée
avec des vitesses moins élevées.
2.2.6 Un atout économique ?
Face à un tel projet, il est clair que les opposants ont été nombreux. Outre les
arguments « classiques » relevant de la limitation de la vitesse, il a surtout été question des
éventuelles nuisances à l’économie de la région. « Le temps, c’est de l’argent », ce célèbre
adage, mot d’ordre du monde économique, ne sera pas remis en cause par le projet de
chronoaménagement. En effet, la rapidité de circulation des marchandises et des hommes,
facteur majeur de productivité, sera améliorée à l’échelle régionale.
L’économie présentielle24 sera ainsi grandement améliorée, notamment grâce au
confortement des pôles locaux et à l’attraction de commerces, services et artisans.
L’économie générale ne subira peu ou pas d’effets néfastes, les variations de durée de trajet
sur une longue distance (par exemple pour un transporteur routier étranger) étant minimes.
Le cadre de vie de la région devrait s’en trouver grandement amélioré, ainsi que les
conditions de circulation, véritable handicap aujourd’hui. Cela pourrait alors avoir des effets
positifs sur l’image de la région et sur le secteur touristique.
2.2.7 Vers un label « Autoroute Apaisée »
Face à une notion si récente, les aménageurs ont du se pencher sur les moyens et les
objets à utiliser, à inventer pour l’appliquer. La diversité des contextes, des milieux, des
usages routiers ne se prête pas à la mise en place de normes rigides, mal vues par les
usagers craignant le « tout répressif ». Un travail de concertation a permis de faire germer
l’idée de créer un label au crible duquel tout nouveau projet sera regardé.
Ce label fait entrer l’autoroute dans la sphère du développement durable, chose qui
paraissait il y a peu assez inenvisageable : gain foncier, réduction des impacts
environnementaux, meilleure compétitivité des transports collectifs, diminution des
accidents, meilleure intégration dans le paysage.
24
Néologisme utilisé comme concept par Davezies et Terrier pour désigner une économie basée sur la population présente sur le territoire, et non sur les lieux de production traditionnels (usines, commerces, etc.)
La ville durable au cœur de la réconciliation Nature/Société 2010
38
Cette adaptation de la vitesse des véhicules qui empruntent une autoroute aux
caractéristiques des secteurs traversés est en phase de devenir un des principaux enjeux du
transport « durable » à l’échelle nationale. La réussite du projet passe par des politiques
volontaristes. La répression par des contrôles radar semble être exclue par certains
experts25, ceux-ci préférant compter sur la volonté des usagers, rappelant que les
restrictions de vitesse faites lors des périodes de pollution de l’air dans l’agglomération de
Grenoble sont globalement bien respectées.
Il s’agit d’un complément aux autres outils de l’aménagement, et ne doit donc pas
être appliqué de manière isolée, mais intégré au sein des processus de réflexion et de
décision de l’aménagement du territoire et de l’urbanisme. Les critères d’espace doivent
être associés aux critères de temps.
2.2.8 Requalification de l’A35 à Strasbourg : mutation du foncier et fluidité du
trafic
Construite à la fin des années 1960, l’A35, autoroute Nord-Sud, constitue la rocade
Ouest de l’agglomération strasbourgeoise, flirtant parfois avec le centre-ville. Forte d’un
succès grandissant (170 000 véhicules/jour, progression de 40% en 10 ans), la partie urbaine
de l’A35 souffre de dysfonctionnements (pointes à 200 000 véhicules/jour) entrainant
bouchons, accidents, pollution et dégradation de l’image de l’agglomération.
Sa requalification s’inscrit dans un projet global associant la réalisation d’une voie de
liaison intercommunale et d’un contournement Ouest, afin de capter une partie des trafics
de transit et d’échange de l’A35. Un linéaire de 3,5 km est particulièrement stratégique,
longeant l’hypercentre et le pôle multimodal (gare TGV), et traversant un foncier sous-
utilisé. Parallèlement, ce tronçon croise l’A350 et l’A351 ainsi que la RN4. Le caractère du
site, pourtant central, mais dénué d’urbanité, renforce l’enjeu de la requalification. Le SCoT
en cours de réalisation prévoit différents thèmes qui impacteront cette requalification :
25
J.-P. Lhuillier, CERTU
Le label « Autoroute Apaisée » est constitué de six conditions, l’infrastructure devant :
Rester suffisamment attractive afin de ne pas déséquilibrer l’offre de déplacement
Ne pas réduire le niveau de sécurité routière déjà existant
Parfaitement s’intégrer dans le territoire, les ouvrages ne devant plus être perçus comme des espaces « étrangers » aux secteurs traversés
Induire naturellement, de par ses caractéristiques techniques, une modération des vitesses
Garantir une ouverture aux autres modes de transport
Etre conçue avec un souci de qualité paysagère et architecturale (plantations, limitation de l’emprise routière, qualité architecturale des ouvrages et du mobilier)
La planification : socle de base de la ville durable 2010
39
traitement des entrées de ville et des paysages dégradés, mise en valeur des cours d’eau,
des coulées vertes et du patrimoine, économie du sol, diminution des nuisances,
urbanisation autour des stations de TC, intermodalité, amélioration des TC, renouvellement
urbain.
Le premier scénario propose de remplacer l’autoroute par un maillage de boulevards
desservant un parc urbain central. Une avenue abaissée au niveau de la ville permet d’y
établir un front bâti, et les entrés de faubourg seront valorisées par un traitement de
l’espace public.
Le second projet entreprend de conserver l’autoroute sur son talus et de compacter
les échangeurs. Un parc urbain et un front bâti sont envisagés le long de l’A35.
La troisième hypothèse vise à muter l’A35 en périphérique urbain, avec une
limitation à 3 échangeurs. Le profil actuel est conservé (altitude et voie rapide) mais une file
dans chaque sens sera dédiée au TCSP, afin de reporter le trafic. L’emprise des échangeurs
supprimés servira à des programmes à dominante tertiaire. Un boulevard extérieur est
aménagé parallèlement à l’A35, afin d’absorber les déplacements inter quartiers, tandis que
des traverses Est-Ouest passeront en dessous.
2.2.9 Les Voies sur Berges à Paris : vers la reconquête des bords de Seine
En partie classée au Patrimoine mondial de l’UNESCO depuis 1991, les rives de Seine
constituent un élément important du rayonnement culturel de Paris. Axe de communication
essentiel du centre métropolitain, où les voies sur berges drainent des dizaines de milliers de
véhicules, le secteur est aujourd’hui concerné par un ambitieux programme de reconquête
piétonnière et de réduction de la pollution. Bertrand Delanoë a dévoilé en avril 2010 ce
projet qui devrait voir le jour en 2012.
La gestion différenciée des deux rives, déjà fermées les dimanches et jours fériés à la
circulation automobile, et en été lors de l’opération Paris-Plage, a pour ambition de
transformer l’ « autoroute urbaine » de la rive droite, avec ses deux files de circulation,
40000 v/j et 4000 par heure en pointe, en boulevard parisien moderne. Pour cela le projet
prévoit la mise en place de cinq nouveaux feux et de repenser les carrefours au niveau des
ponts. La rive gauche deviendra piétonne du Musée d’Orsay au Pont de l’Alma, afin de
pouvoir se promener au bord du fleuve, et d’accéder aux barges flottantes mises en place
sur la Seine. Ceci afin d’en faire un pôle culturel et de loisirs exclusivement réservé aux
circulations douces (4,5 ha sur les 15 ha du projet).
La ville durable au cœur de la réconciliation Nature/Société 2010
40
Le trafic automobile de la rive gauche devrait être en partie transféré vers d’autres
axes, dont le périphérique (25%). D’après la municipalité, ceci ne devrait pas beaucoup
impacter les conditions de circulation : la traversée Est-Ouest de Paris serait rallongée de
6min. Le chronoaménagement de la rive droite ralentira la circulation en heures de pointe
(de 24 à 20 km/h en moyenne), afin d’amener les automobilistes à utiliser d’autres moyens
de transport (TC, vélo). En heures creuses, la réduction de la vitesse de 50 à 40 km/h aura
pour conséquence de pacifier la circulation, de faciliter l’accès aux berges et de diminuer la
pollution sonore.
Afin de faire accepter le projet, qui soulève déjà le mécontentement de certains
automobilistes et des opposants mettant en avant les 40 millions d’euros à investir, la
municipalité a choisi de mettre en ligne un forum de discussion, afin que les usagers
proposent et échanges des idées. Les maires des arrondissements et les collectivités
riveraines seront intégrés activement au projet.
Si le chronoaménagement est utilisé par les villes de Grenoble, Strasbourg et Paris,
force et de constater qu’en matière de communication, ces villes mettent plus ou moins en
avant ce concept, qui n’est pas forcément lisible par le grand public.
Si la réduction de la vitesse sur les grandes infrastructures routières est commune à
l’ensemble des exemples étudiés, les enjeux principaux divergent toutefois. À Grenoble,
l’objectif principal affiché est de limiter l’étalement urbain, dans un contexte conditionné par
la géographie qui réduit la hiérarchisation du réseau routier. À Paris l’enjeu est de limiter la
circulation de transit, source de nuisances (bruit, pollution), pour redonner accès à des
espaces patrimoniaux remarquables. À Strasbourg, le chronoaménagement est utilisé plutôt
dans l’optique d’une requalification des abords afin de réaliser une meilleure intégration
urbaine.
2.3 Traiter autrement l’espace public : les sociotopes
Concept récent venu de Suède, le sociotope est un outil de planification urbaine
novateur qui allie les préoccupations environnementales des grandes agglomérations aux
envies citoyennes de rencontre et de détente. Inspiré de la notion de biotope, ce concept
La planification : socle de base de la ville durable 2010
41
intéresse les urbanistes : dans la continuité des travaux du Grenelle Environnement, le
sociotope peut être amené à renouveler les pratiques de planification urbaine. L’association
de l’aspect écologique et de l’aspect social sur des documents cartographiques traités en SIG
offre aux élus et aux aménageurs un nouvel outil d’aide à la décision.
Il a donc été confié à l’Incubateur Territorial d’effectuer une approche du concept de
sociotope pour une application éventuelle au territoire nancéien.
Après un travail de définition et d’adaptation du sujet au cadre nancéien effectué par
une stagiaire sociologue, il fut nécessaire de mettre à jour la carte des espaces identifiés
comme de potentiels sociotopes du Grand Nancy (espaces verts, places, rues piétonnes,
terrains de sport). L’objectif était d’y ajouter les éléments manquants, mais également de
référencer les activités auxquelles les citoyens s’adonnaient (jeux pour enfants, sports,
loisirs, culture, etc.). Les relevés de terrain ont été effectués par une stagiaire étudiante en
écologie et moi-même en ce qui concerne les espaces verts, et par une stagiaire urbaniste
pour les espaces « durs ». Chaque entité a fait l’objet da la rédaction d’une fiche descriptive
avec photographie. Il s’agit de la première étape de la mise en œuvre des sociotopes
effectuée à Stockholm. Elle a été menée par l’Incubateur dans le but de montrer que ce
concept est pertinent à l’échelle de Nancy et de son agglomération et afin de faire
poursuivre ce travail par l’ADUAN.
Les informations recueillies ont été classées dans différentes catégories : « oasis de
verdure », espace familial, espace sportif, espace ayant un panorama paysager et/ou culturel
remarquable, biodiversité, et un classement en fonction de la fréquentation par tranche
d’âge. Une hiérarchisation a également été effectuée : les parcs d’agglomération, les parcs
de secteur, les parcs de quartier et les parcs de proximité. Ceci permet de produire des
cartes de « rayonnement » de l’attractivité des parcs : un cercle est tracé autour du parc en
fonction de sa catégorie (respectivement 2,5 km, 1000 m, 500 m et 250 m). Les zones
« vides » du Grand Nancy sont alors identifiables sur la carte. Elles concernent surtout les
communes périphériques de la communauté urbaine : il faut alors relativiser cette
« carence » en espaces verts, la plupart de ces communes étant situées à proximité de zones
rurales et forestières.
La trentaine de cartes réalisées a permis une première analyse des pratiques sociales,
notamment spatiale. La prochaine étape consistera à évaluer les différents espaces
sélectionnés au travers de missions de participation des usagers et d’un comité
interdisciplinaire d’experts.
La ville durable au cœur de la réconciliation Nature/Société 2010
42
Quatre autres étapes viennent compléter la première :
L’évaluation par un comité d’experts : composé de professionnels variés
(sociologues, historiens, urbanistes, écologues, géographes, etc.), ce comité va
évaluer et pondérer la carte théorique afin de l’affiner.
L’évaluation par les usagers : des enquêtes in situ et des groupes de travail vont
permettre de compléter la carte par les usages courants des sociotopes. Le recueil
des informations se fera auprès de cinq « publics-cible » (enfants, adolescents,
étudiants, adultes et séniors).
La cartographie et la synthèse : deux cartes seront produites. Une carte représentant
les sociotopes avec une gradation des pratiques sociales, l’autre révélant les ruptures
fonctionnelles et spatiales, c’est-à-dire les espaces où il existe une véritable
« carence » en matière de sociotopes.
L’analyse et les recommandations : cette cinquième étape s’appuie sur les cartes. Elle
met en évidence les points forts et les points faibles de l’agglomération en matière
de lieux inféodés aux pratiques sociales. Se dégagent alors des préconisations à
intégrer aux documents d’urbanisme, aux projets urbains et aux plans de gestion des
espaces verts.
À l’heure actuelle, l’Incubateur a réalisé la première étape et quelques éléments de
l’étape de cartographie consistant à créer une base de données exploitable en SIG. La
méthode proposée par A. Stahle et le bureau d’urbanisme de Stockholm s’inscrit
intégralement dans le cadre du développement durable : elle offre une vision globale des
activités sociales en milieu ouvert des citoyens, elle conduit à s’interroger sur la manière de
protéger la biodiversité tout en permettant à l’Homme de la côtoyer – c’est-à-dire en évitant
de « sanctuariser » la nature – et la méthode associe activement les citoyens par
l’intermédiaire des groupes de travail, en s’efforçant de favoriser un brassage
intergénérationnel.
Ces trois concepts, trame verte et bleue, chronoaménagement et sociotope, œuvrent
pour rendre la ville plus durable et plus agréable à vivre. La planification, élément essentiel
de l’urbanisme, est le préalable à l’aménagement du territoire, qui passe par la réalisation de
projets novateurs et respectueux de l’environnement. Le chapitre suivant revient sur ces
nouveaux objets urbains ciblés par l’Incubateur.
Les projets urbains durables 2010
43
LLEESS PPRROOJJEETT UURRBBAAIINNSS DDUURRAABBLLEESS :: DDEE NNOOUUVVEEAAUUXX OOBBJJEETTSS
PPOOUURR UUNNEE NNOOUUVVEELLLLEE VVIILLLLEE
La récente multiplication des projets urbains – écoquartier, écotour, écoparc –
témoigne d’un changement des pratiques de gestion et d’aménagement urbains, qui
tranchent avec la fragmentation des compétences et le foisonnement des acteurs. Le projet
urbain, fédérateur et prospectif, se caractérise par sa déclinaison à différentes échelles et
ses temporalités. Centré sur un problème précis (réhabilitation urbaine, transports,
commerce), il permet aujourd’hui d’explorer des pratiques de développement durable, tout
en adaptant les solutions au contexte local. La souplesse des acteurs, privés et publics, et la
participation citoyenne forcent l’adhésion à une démarche collective et le décloisonnement
institutionnel.
L’évolution de la ville pose la question des enjeux du traitement de l’espace public en
tant qu’espace symbolique, esthétique et fonctionnel. Dans la ville durable de demain,
l’espace public redevient un élément central, notamment à l’échelle des quartiers, qui
s’articulent autour de lui. Ce sont les supports des rythmes urbains quotidiens, lieux de
passage et de rencontre. Aujourd’hui, il est question de restituer ces espaces aux piétons et
d’y faire pénétrer la nature et parfois l’art.
Face à ces interrogations, l’Incubateur Territorial a souhaité engager un travail de
veille prospective consistant à observer et compiler des exemples de réalisations concrètes.
En réponse à l’aménagement futur du quartier Nancy Grand Cœur et de la ZAC Biancamaria,
la mission s’est axée sur l’observation d’écoquartiers et de parcs habités, en France et à
l’étranger.
3.1 Les écoquartiers : un tournant urbanistique indispensable
La réalisation du dossier sur les écoquartiers constitue le fil conducteur du stage.
Commencé dès les premiers jours, il fallut en premier lieu effectuer tout un travail de
recherche afin de définir le concept d’écoquartier. Ensuite, de nombreux exemples de
quartiers et de projets ont été sélectionnés afin d’être étudiés précisément. Puis il fut
convenu avec Monsieur Brillaud d’axer le dossier vers les écoquartiers de centre-ville, sujet
La ville durable au cœur de la réconciliation Nature/Société 2010
44
correspondant au cas de Nancy Grand Cœur. Dans ce cadre, plusieurs éléments
caractéristiques des écoquartiers ont été définis par Monsieur Brillaud et moi-même après
un exercice de recherche et de réflexion. Ils ont été établis afin d’orienter le dossier dans la
bonne direction.
Différents exemples français et étrangers ont donc été choisis pour étayer le dossier,
puis seuls les plus pertinents et les plus similaires au futur écoquartier nancéien ont été
sélectionnés. Certains d’entre eux disposent d’une importante documentation et d’un site
Internet officiel, facilitant ainsi les recherches. Une carte de synthèse a été établie pour
chacun d’entre eux, hormis les quartiers à l’état de projet où les plans définitifs n’ont pas été
arrêtés.
3.1.1 Éco-quartier ou quartier durable ? La difficile définition du concept
3.1.1.1 Naissance des concepts
L’écoquartier26 est un concept jeune, peu théorisé, émanation urbaine du
développement durable et de la Charte d’Aalborg.
Il est parfois confondu avec quartier durable, comme depuis la récente labellisation
de l’expression « ÉcoQuartier » par le MEEDDM27 qui incite à adopter le second terme afin
que toute confusion avec le label soit évitée. Néanmoins, les deux termes sont différenciés
par certains, car ils renvoient à des techniques, des périodes ou des échelles sensiblement
différentes. Pour B. Boutaud28, l’écoquartier, ou écovillage s’il est situé en zone périurbaine
ou rurale, serait en fait un « projet urbain utilisant des technologies de pointe et des
matériaux innovants afin de réduire son impact environnemental (encadré p.42)»29.
Le quartier durable est quant à lui un projet plus globalisant et spatialement plus
grand qui prend en compte les trois sphères du développement durable autant dans sa
26
Le choix est fait de ne pas insérer de tiret comme dans la notice explicative du dossier de candidature au concours ÉcoQuartier lancé par le Gouvernement en 2008. 27
Ministère de l’Environnement, de l’Énergie, du Développement Durable et de la Mer 28
Benoît Boutaud, ingénieur de recherche à l’European Institute For Energy Research (EIFER), Karlsruhe 29
Cybergéo, 2009
Empreinte écologique (concept élaboré par Rees et Wackernagel, deux chercheurs de l’université British Columbia de Vancouver, 1994) : désigne la surface de terres productives et d’écosystèmes aquatiques nécessaires à la production des ressources et à l’assimilation des déchets d’une population définie, à un niveau de vie spécifié, à un moment et dans un lieu donnés. La moyenne mondiale est de 2,2 hectares par personnes, alors que la planète ne peut fournir que 1,8 hectares de surfaces de terres
et de mers biologiquement productives par être humain (selon Living Planet Report 2004).
Les projets urbains durables 2010
45
conception que dans son cycle de vie. Mais il est également possible d’avancer l’idée que
l’écoquartier est un concept ayant des limites temporelles et même spatiales : il correspond
aux prémices de l’aménagement urbain durable dans la fin des années 1990 et le début des
années 2000, apparus en Europe Occidentale et Septentrionale (Allemagne, Angleterre,
Suède, Pays-Bas).
3.1.1.2 Un manque de recul évident
Pour Catherine Charlot-Valdieu et Philippe Outrequin de l’association SUDEN
(Sustainable Urban Development European Network), l’écoquartier est « conçu avec une
démarche environnementale, laquelle porte notamment sur le paysage ou la végétalisation
des quartiers et la qualité environnementale des bâtiments ». Autrement dit, l’écoquartier se
limite à un projet esthétique pour une meilleure qualité de vie par l’approche
environnementale. Tandis que leur vision du quartier durable repose nécessairement par la
prise en compte du développement durable. Pourtant, bien que fustigeant le manque de
clarté de l’État dans la définition des concepts30, l’association opte tout de même pour le
terme d’écoquartier dans ses communications.
Difficile de faire la part des choses aujourd’hui avec le manque évident de recul dont
nous disposons. Néanmoins une question intéressante peut être posée : si nous disposons
de si peu de recul quant à l’étude de ce phénomène, ou même épiphénomène, comment
pouvons-nous alors parler de durabilité, notion qui implique une durée de vie à long terme ?
Les plus « anciens » écoquartiers sont sortis de terre il y a moins de dix ans (Vauban,
BedZED, Bo01), il est alors quasiment inconcevable de parler de durabilité effective.
3.1.1.3 Une relation différente à l’espace et au temps
Si la nuance entre les deux termes ne se situe pas entre la performance
environnementale et les trois piliers du développement durable, elle est en réalité
constituée dans l’approche bidimensionnelle (l’espace et le temps) : l’écoquartier est un
ensemble bâti ayant une réalité spatiale et synchronique (par exemple : le quartier Vauban
de Fribourg construit en 2006) – formant ainsi le palimpseste de la ville – tandis que le
quartier durable, ou plutôt soutenable d’après Bousquet et Faucheux (2007), a une réalité
bidimensionnelle plus large et diachronique (autrement dit, il n’existe à l’heure actuelle que
des embryons de quartiers durables, n’ayant pas encore prouvé leur durabilité sur plusieurs
décennies). Un écoquartier aujourd’hui sera – ou ne sera pas – un quartier durable demain,
30
http://www.suden.org/fr/developpement-urbain-durable/ecoquartier-quartier-durable/
La ville durable au cœur de la réconciliation Nature/Société 2010
46
car si les innovations techniques ont une fiabilité qui laisse entrevoir leur efficacité dans le
temps, personne ne peut prouver que les critères de mixité sociale et intergénérationnelle et
de gouvernance seront, eux aussi, durables.
3.1.1.4 La nécessaire application du Développement Durable
L’utilisation du terme écoquartier dans les politiques urbaines actuelles n’est donc
pas une gageure, mais seulement si le projet respecte les préconisations du développement
durable, soutenable. Car il est important de noter que ce terme est souvent galvaudé, utilisé
à mauvais escient afin d’attirer l’attention des médias et la faveur du public, et surtout les
subventions issues du Grenelle. Un écoquartier n’est pas un simple lotissement à basse
consommation transformé en « ghetto de riches »31, c’est un projet qui relève de
l’innovation sociale et urbaine, une nouvelle manière de penser la ville, son organisation et
les liens entre les habitants32. Le principal enjeu du XXIe siècle en termes de lutte contre les
changements climatiques ne se réduit pas simplement à l’application de normes techniques,
mais au changement profond des mentalités.
3.1.1.5 Écoquartier, terme en vogue auprès des politiques et du public
Leur création a une ambition de durabilité qui définira leur succès ou leur échec.
Terme ambigu et pourtant fédérateur – il en a été de même pour les mots région ou
quartier – et porteur d’ambitions nouvelles, l’écoquartier a donc changé de sens au cours de
sa courte histoire, en se confondant avec le terme de quartier durable, né quant à lui en
même temps que ceux de ville durable et d’agriculture durable. Le choix du terme n’est donc
pas une difficulté en soi pour les acteurs de l’urbanisme, même si celui d’écoquartier
apparait plus éloquent pour le grand public, et donc tend logiquement à s’imposer. En face,
celui de quartier durable est trop ambigu, car étant formé de deux termes polysémiques à la
sémantique discutée et même rejetée, certains préférant l’utilisation du terme soutenable,
traduction plus fidèle de l’anglais sustainable development.
3.1.2 Un nouvel objet géographique
La Géographie s’intéresse volontiers à ce concept, car l’écoquartier est la réponse
urbanistique, donc spatiale, actuelle à la question du rapport nature/société, paradigme
originel de la discipline. Avec une approche à échelle fine, celle du quartier, le concept place
31
Charlot-Valdieu, 2009. 32
Chouvet, 2007, p.3
Les projets urbains durables 2010
47
l’individu au cœur de ce couple et en fait un acteur majeur grâce à la gouvernance
participative.
3.1.2.1 Le quartier, une notion polysémique
L’approche géographique permet d’apporter un élément important dans la définition
de l’écoquartier : la notion de quartier en elle-même. Le quartier se différencie du simple îlot
urbain par sa taille et surtout par son « assimilation par une certaine communauté
d’appartenance à un espace vécu, avec des lieux repères et des lieux centraux »33 , ainsi que
par sa multifonctionnalité, ne le limitant pas à une simple zone résidentielle. « Cet ensemble
doit être suffisamment grand pour que les besoins de base de la vie quotidienne soient
remplis : se nourrir, se loger, se divertir. »34. Il s’agit d’un lieu de vie animé, convivial voire
mis en scène, formant un espace de « maîtrise cognitive »35 marqué par une centralité mais
aussi par des limites floues.
Avec la croissance de l’urbain, le quartier a néanmoins subi un déclin progressif lié à
l’explosion de la mobilité des citadins et à l’exurbanisation des activités. Leur quotidien
s’inscrit désormais à l’échelle de l’agglomération. Pourtant, les quartiers existent toujours,
même si les spécificités qui les caractérisaient jadis (homogénéité sociale, appartenance
communautaire, sens fonctionnel) sont aujourd’hui plus effacées. Ce déclin a eu des
conséquences néfastes pour l’environnement urbain : les citadins sont contraints de
parcourir plusieurs kilomètres pour aller travailler, faire des achats ou pratiquer des loisirs, la
plupart du temps au moyen de l’automobile. En parallèle, les quartiers centraux se
fonctionnalisent, du fait de l’augmentation du coût du foncier, phénomène qui chasse les
populations aux revenus moyens et les petits commerces au profit des grandes enseignes et
des revenus élevés. Les quartiers suburbains subissent quant à eux une uniformisation
fonctionnelle et architecturale, et sont souvent exempts de transports en commun.
L’application de la durabilité aux villes pourrait faire renaître ces entités urbaines.
Ainsi, l’écoquartier n’a de sens que lorsqu’il s’inscrit dans une stratégie à une échelle
supérieure, celle de la ville, pour que le volet social et surtout le volet économique puissent
être mis en œuvre. Cette particularité fait qu’un quartier ne peut vivre en autarcie, replié sur
lui-même. Les ambitions d’autosuffisance de certains écoquartiers ont très vite été
abandonnées car les quartiers ne peuvent vivre qu’en interdépendance. Le projet ne se
33
Brunet et al. 1992, p.411 34
Bousquet et Faucheux, 2007, p.6 35
Dind et al., in Da Cunha (dir.), 2007, p. 54
La ville durable au cœur de la réconciliation Nature/Société 2010
48
matérialise pas seulement par la construction d’un nouvel ensemble urbanistique, mais aussi
par la réhabilitation ou la rénovation d’un quartier déjà existant. La reconstruction de la ville
sur la ville est le véritable enjeu du quartier durable, car cela permet d’éviter la conquête de
nouveaux espaces en réutilisant les friches urbaines.
3.1.2.2 Entre la ville durable et l’écoconstruction : l’écoquartier
Spatialement, l’écoquartier se traduit de diverses manières, et il nous faut aller
chercher des exemples à l’étranger pour l’illustrer. La taille des différents projets varie de
moins d’un hectare (0,6 ha pour Eco-Viikki en Finlande, 1,7 ha à BedZED dans la banlieue de
Londres) à plusieurs dizaines d’hectares (28 ha pour Vauban à Fribourg, 70 ha à Kronsberg au
sud de Hanovre).
Au-delà, l’idée de quartier s’éloigne, car la proximité des résidents diminue lorsqu’ils
sont plus nombreux, et laisse place au concept de ville durable (Dongtan en Chine, Leidsche
Rijn aux Pays-Bas). Certains auteurs36 utilisent ainsi le terme d’écoquartier pour les projets
plus modeste, et celui de quartier durable pour les projets d’ampleur plus importante,
lorsque l’on dépasse le millier de résidents et d’emplois. L’écovillage est quant à lui un terme
utilisé sans discernement pour désigner un quartier comme BedZED, avec 244 habitants, ou
comme le Kronsberg et ses 6300 habitants et 2750 emplois…
Pour Cyria Emélianoff, « l’échelle d’un quartier s’avère pertinente dans une approche
de développement durable : à l’heure où on ne maitrise pas encore toutes ses dimensions à
l'échelle d'une ville, le quartier, plus homogène, permet d'expérimenter des mesures
appropriées au territoire et à ses spécificités »37. Après la démarche ÉcoQuartier, le MEEDDM
passe à l’échelle supérieure et lance en 2009 le programme Écocités visant à identifier les
des agglomérations qui se porteraient volontaire pour initier une démarche novatrice en
matière de conception urbaine. Elles bénéficieront de l’appui opérationnel et financier de
l’État.
3.1.3 Essai de définition
En prenant en compte les éléments précités, il est possible d’établir une définition,
en s’inspirant des définitions officielles (MEEDDM) et à caractère scientifique.
Un écoquartier est un quartier urbain bâti ou reconverti prenant en compte les trois
piliers du développement durable dans son élaboration (recyclage des matériaux,
36
Cyria Emélianoff (2006), Camille Bierens de Haan (2006). 37
Diagonal, novembre 2008, p.33
Les projets urbains durables 2010
49
autopromotion, construction basse consommation), dans sa forme (mixité fonctionnelle et
sociale, densification, mitoyenneté végétalisation des surfaces) puis dans sa phase
d’exploitation (production locale d’énergie renouvelable, gouvernance participative, modes
de transport doux).
« Un quartier durable est une zone de mixité fonctionnelle développant un esprit de
quartier ; c’est un endroit où les personnes veulent vivre et travailler, maintenant et dans le
futur. Les quartiers durables répondent aux divers besoins de ses habitants actuels et futurs,
ils sont sensibles à l’environnement et contribuent à une haute qualité de vie. Ils sont sûrs et
globaux, bien planifiés, construits et gérés, et offrent des opportunités égales et des services
de qualité à tous. » (Accords de Bristol, 6-7 décembre 2005, www.energie-cites.eu)
3.1.4 Idéal type
3.1.4.1 De l’écovillage au quartier durable type
Dans le rapport de Taoufik Souami, Construction durable et renouvellement urbain en
Europe : démarches et projet pilotes, quelles recherches, partenariats et expérimentations
pour demain ?, une typologie historique est avancée. Elle classe les écoquartiers en trois
catégories : le proto-quartier durable, le prototype de quartier durable et le quartier durable
type. La première catégorie, le proto-quartier durable, aussi appelée écovillage, est
fortement teintée de militantisme écologiste, le concept glissant parfois vers l’utopie socio-
environnementale. Elle est parfois considérée comme un phénomène marginal et ancien,
correspondant aux prémices de l’expérimentation dans les années 1960 à 1980.
Le prototype de quartier durable correspond aux grands projets urbains
développés dans la fin des années 1990 et le début des années 2000 en Scandinavie (Figure
10et Figure 102, p.50), en Allemagne et aux Pays-Bas essentiellement. Les exemples les plus
parlants sont ceux de Malmö et de son écoquartier Bo01 (Bo pour habitat, 01 pour 2001),
ainsi que Kronsberg, écoquartier construit au sud d’Hanovre. Il s’agit d’une vitrine pour ces
agglomérations qui souhaitent afficher leur volonté de rupture avec l’urbanisme classique.
Les technologies sont les plus modernes en matière d’énergie, de protection de
l’environnement, et les montages financiers des opérations sont elles aussi exceptionnelles.
La ville durable au cœur de la réconciliation Nature/Société 2010
50
Enfin, le quartier durable type est celui qui est le moins visible, notamment en
comparaison avec des grands projets tels que Bo01. Leur genèse étant proche des modes de
production et de réhabilitation habituels, ces quartiers seront amenés à se développer. Ils
tirent parti des expériences des prototypes précédemment cités, avec en supplément une
certaine reproductibilité. BedZED au sud de Londres (Figure 12, p.50), GWL-Terrein à
Amsterdam ou Vauban à Fribourg (Figure 13, p.50) en sont des exemples célèbres.
Figure 12 : Beddington Zero Energy fossil Development. Sutton Situé au sud- est de Londres, est le premier projet de quartier neutre en carbone du Royaume-Uni. Bâti sur un ancien site houiller de 1,7 hectare, le projet a été terminé en 2002 et compte 244 habitants.
Yourdevelopment.org, 2008
Figure 13 : Quartier Vauban. Fribourg Le quartier Vauban s’est développé au sud du centre de Fribourg, sur une friche militaire de 38 hectares, à partir de 1994, et s’est achevé en 2006. Il compte près de 3600 habitants.
écoquartier.midiblogs.com, 2009
Figure 10 : Bo01. Malmo Figure 11 : Turning Torso. Malmö Le quartier Bo01 est né à l’occasion de l’exposition européenne de l’habitat en 2001, qui a eu lieu sur le polder de Västra Hamnen à Malmö, friche industrialo-portuaire de 140 hectares. Le projet est en
cours de réalisation et couvre pour l’instant 12 hectares. La Turning Torso, deuxième plus haute tour d’habitation d’Europe, est le nouveau symbole de la commune.
voxtv.info, 2009
Les projets urbains durables 2010
51
3.1.4.2 Typologie actuelle
Cyria Emélianoff propose une typologie très générale des écoquartiers, les groupant
en quatre catégories. La première est la même que celle des prototypes de quartiers
durables de Taoufik Souami, représentée par Bo01 et Kronsberg et constituant des projets
de démonstration lors d’expositions internationales. Le second type réunit les projets issus
de politiques de développement durable d’agglomération, tels les Agendas 21, comme Viiki
à Helsinki ou Hammarby Sjöstad à Stockholm. La troisième catégorie est proche de l’esprit
des écovillages car ces quartiers sont nés à l’initiative d’associations d’habitants : Vauban à
Fribourg (association Forum Vauban), Lanxmeer à Culemborg (fondation Eva), etc. Enfin, la
troisième catégorie, moins courante car d’esprit très anglo-saxon, regroupe les écoquartiers
mis en place par un promoteur écologiste. Le quartier BedZED à Sutton en est l’archétype.
3.1.4.3 Des caractéristiques difficiles à définir
Les différentes études sur le sujet amènent à la conclusion qu’il existe une véritable
hétérogénéité des démarches et des paramètres techniques (maison passive, HQE, etc.).
Cela complique ainsi l’élaboration de l’idéal type. Toutefois, différents critères sont
inhérents à ces quartiers.
Urbanisme et
aménagement
Environnement Socio-économique Gouvernance et
pilotage
mixité urbaine et
fonctionnelle
accessibilité
modes de transport
doux
compacité
mise en valeur
architecturale et
paysagère
réhabilitation
imbrication espace
public/espace privé
énergies renouvelables
efficacité énergétique
gestion de l’eau et des
déchets
végétalisation
matériaux locaux et/ou
à faible impact
environnemental
mixité sociale et
intergénérationnelle
cohésion sociale et
culturelle
présence d’activités
multifonctionnalité
gestion de proximité
création d’une
structure de pilotage
du projet
outils de gouvernance
participative
autopromotion
Tableau 1 : Synthèse des caractéristiques des écoquartiers Inspirés des travaux des écomaires et des Sustainable Communities
La ville durable au cœur de la réconciliation Nature/Société 2010
52
Le projet doit conserver une taille adaptée à ces principes sans quoi la notion de
quartier disparait. Aussi, la forme du quartier obéit à des fondements urbanistiques et
architecturaux : bâti dense, compacité, mitoyenneté des maisons, orientation des façades au
Sud, jardin attenant à l’arrière, hauteur limitée.
Face à cette multiplicité des techniques, des normes et des critères, Marc Lemonier,
de la revue Diagonal, insiste sur le fait qu’une grille de référence commune doit être mise en
place par le MEEDDM et les urbanistes. Le manque d’information sur les nouvelles
techniques est souvent clamé par les maîtres d’œuvre qui demandent que l’on confie le soin
à des « ensembliers du développement durable » de coordonner les différents corps de
métier.
La plupart des écoquartiers étudiés, toujours très bons élèves en matière d’efficacité
énergétique des bâtiments, ont parfois une approche sociale quasi inexistante. C. Emélianoff
en dresse les raisons : « les aides européennes, orientées depuis le début des années 1990
vers la question énergétique et climatique ont appuyé les projets d’urbanisme durable mais
en créant un “forçage” vers les éco-technologies. Les innovations sociales, elles, n’ouvrent
droit à aucune subvention »38. Cet aspect complique encore la tâche d’évaluation de ces
quartiers. Daniela Belziti rappelle qu’ « ils doivent être regardés avec circonspection, car la
lecture peut être biaisée par la communication des villes qui exploitent particulièrement ces
projets »39.
Néanmoins, à défaut d’être des modèles du genre, ces expériences n’en sont pas
moins des références indispensables, et parfois même des laboratoires socio-
environnementaux.
3.1.5 Les écoquartiers de centre-ville : études de cas en faveur de Nancy
Grand Cœur
Les quartiers durables disposent d’enjeux spécifiques largement explicités à travers
l’importante bibliographie sur le sujet, et définis comme critères de développement durable
dans les grilles d’analyse, telles qu’INDI.RU ou RST0240. Mais paradoxalement, alors que sont
prônées la densification urbaine et la reconstruction de la ville sur elle-même, il existe peu
38
Diagonal, Novembre 2008, p.42 39
Ibid. 40
Voir le 4pages sur les grilles d’analyse de durabilité en annexe
Sou
rce
: Alt
er-É
c(h
)o
Les projets urbains durables 2010
53
de publications précises sur les quartiers durables de centre-ville et sur leurs enjeux
spécifiques. Or il s’agit bien là d’un sujet très porteur en matière d’urbanisme durable.
Face à ce flou sémantique et conceptuel, il fut nécessaire de mieux cerner les enjeux
des quartiers durables centraux. Cette mission de recherche a en quelque sorte constituée le
fil conducteur du stage, et a débouchée sur la rédaction d’un dossier pour le compte de
l’ADUAN.
Ce chapitre revient en premier lieu sur les éléments essentiels qui impactent les
quartiers de centre-ville, afin de les définir. La seconde partie propose une synthèse des
éléments caractéristiques observés dans les différents exemples. Ces derniers sont compilés
en annexe du présent rapport, afin de ne pas le surcharger.
Figure 14 : Localisation des écoquartiers étudiés dans le dossier Google Earth, 2010
3.1.5.1 Le retour en grâce de l’échelle du quartier ?
La croissance de la ville au cours du XXe siècle s’est accompagnée d’un déclin de
l’échelon du quartier dans la structure urbaine. Le quartier a perdu de son sens originel au
La ville durable au cœur de la réconciliation Nature/Société 2010
54
centre-ville, l’hypermobilité des citadins et la concurrence spatiale l’ayant même parfois
réduit à une simple division administrative. Les activités quotidiennes (travail, achats, loisirs)
s’inscrivent désormais à l’échelle de l’agglomération et de la région métropolitaine. Son rôle
identitaire semble s’être progressivement évaporé, même s’il reste un espace vécu et
maîtrisé par ses usagers, un lieu de pratiques et d’interactions sociales. Ses marges floues
rendent confuse sa délimitation, mais ses centralités propres lui offrent une cohérence
interne organisée par des espaces publics souvent mis en scène. C’est un espace de maîtrise
cognitive à la physionomie propre, comprenant commerces et services, et produisant de
l’animation, de la convivialité. Une certaine densité permet à ces activités urbaines d’être
viables. En somme, le quartier possède dans une certaine mesure les caractéristiques de
l’urbain à échelle réduite.
Cela nous amène à nous interroger sur la pertinence du développement de quartiers
durables dans les hypercentres, là où les commerces de proximité et les logements
abordables sont chassés par les grandes enseignes, les activités de divertissement et de
finance. La planification à cette échelle intermédiaire, entre le bâtiment et la ville, a-t-elle
un sens du point de vue du développement durable, particulièrement au regard des critères
sociaux ? Le quartier de centre-ville n’a pas vocation à devenir un nouveau pôle urbain, à
l’instar du noyau d’urbanité41, autre sous-ensemble de la ville, mais plutôt à renforcer
l’attractivité du centre.
3.1.5.2 Friches et renouvellement urbain : deux opportunités pour faire la ville durable
La construction d’un quartier durable en position centrale des villes est souvent le
fruit d’une opportunité foncière saisie par l’aménageur. « La régénération des friches
urbaines en quartiers durables est une opération qui implique l’intégration d’une recherche
de qualité globale à la dynamique du projet, susceptible de garantir tant la cohérence
urbanistique du lieu que l’intégration simultanée des trois piliers du développement
durable. »42
Le renouvellement urbain (rénovation/réhabilitation) apparait comme un élément
essentiel de la ville durable : outre le fait qu’il permet de requalifier un quartier et donc de
refaire la ville sur elle-même, cette opération peut, dans certains cas, permettre la
41
Prudente D., in Da Cunha, 2007, p.103 42
Rey, in Da Cunha, 2007, p.123
Les projets urbains durables 2010
55
sauvegarde et la valorisation du patrimoine bâti, vecteur d’identité culturelle et de plus-
value touristique. Les exemples de Vesterbro à Copenhague et de la ZAC De Bonne à
Grenoble sont particulièrement représentatifs de ce genre d’opération (voir annexes). La
grille INDI.RU 2005 prend en compte le patrimoine, mais de manière trop subjective. Il serait
utile d’améliorer ce benchmark en différenciant les quartiers centraux des quartiers
périphériques et en introduisant un seuil chiffré représentant le taux de réhabilitation de
l’écoquartier.
La multiplication de ces espaces est liée à différents phénomènes qui on touché les
villes, et notamment les centres-villes, depuis quelques décennies. Les crises économiques
successives, associées à la difficulté grandissante pour un établissement industriel de se
développer dans des secteurs densément urbanisés (manque de place, contraintes de
transport, nuisances, coût des taxes), ont poussé ces entreprises à se relocaliser dans la
périphérie, où zones industrielles et autres parcs d’activités les attendaient. Ils ont libéré
ainsi de vastes emprises foncières, véritables mannes pour les communes désireuses
d’entreprendre des opérations de renouvellement urbain, mais parfois cadeaux
empoisonnés liés au coût de leur traitement (pollution des sols, structures difficiles à
détruire), contraintes qu’a dû surmonter la ville de Strasbourg pour l’aménagement du
quartier Danube (voir annexes). Si la réaffectation de ces terrains peut paraître difficile, elle
demeure néanmoins une stratégie majeure pour la création de nouveaux quartiers urbains
durables.
Ce déclin de l’industrie au cœur des villes, associée à l’affaiblissement du transport
ferroviaire a entrainé l’abandon d’emprises urbaines (gare de triage, rotonde, bâtiments
annexes), qui, une fois acquises par la commune, offrent des espaces bien situés à proximité
des gares centrales et facilement réhabilitables. Les projets de Neuchâtel et de la Gare de
Rungis sont des exemples intéressants. Les gares construites au XIXème siècle en périphérie
de l’époque sont maintenant en position centrale des agglomérations. Outre ce potentiel de
densification, leur position à l’interface des transports publics permet de promouvoir une
mobilité alternative à l’auto-mobilité.
Les friches militaires offrent également des opportunités intéressantes pour les communes,
comme la caserne De Bonne à Grenoble (Figure 15, p.56). Le patrimoine militaire est
diversifié et souvent situé en cœur de ville ou à proximité. Les bâtiments sont parfois
conservés pour leur style architectural dans le cadre d’une reconversion vers le tertiaire et
les équipements publics.
La ville durable au cœur de la réconciliation Nature/Société 2010
56
Figure 15 : La caserne De Bonne à Grenoble www.debonne-grenoble.fr, 2009
Enfin, il existe de nombreuses friches liées aux activités tertiaires, voire à l’habitat,
mais sont souvent d’une superficie trop restreinte (les « dents creuses »), ne permettant que
rarement d’engager une stratégie de projet urbain global. La solution peut alors
s’apparenter à une réhabilitation d’un quartier dans son ensemble selon des critères
soutenables. Elle s’effectue là où la qualité architecturale ou l’aspect identitaire des
bâtiments interdit leur destruction. Cette stratégie ambitieuse et complexe doit s’intégrer
dans une politique plus globale si elle veut être menée de façon optimale.
3.1.5.3 Mobilité : quels sont les enjeux des cœurs d’agglomération ?
Les villes sont aujourd’hui confrontées au phénomène de l’étalement et de la
fragmentation urbaine. Le développement des centres commerciaux périphériques, la
multiplication des centres de loisirs, l’extension des zones d’activités, la recherche d’un
habitat individuel à la campagne nous conduisent vers une ville dispersée, consommatrice
de sol et génératrice de déplacements, réalisés surtout au moyen de l’automobile. Les coûts
et nuisances liés à la mobilité et à l’étalement ne sont pas une fatalité, mais sont le fruit des
interrelations entre offre de transport, localisation de l’habitat et répartition spatiale des
activités.
En centre ville, la mobilité et le transport jouent un rôle majeur dans les flux et dans
la morphologie urbaine. Les nœuds de transport public permettent d’y ceinturer le bâti de
manière compacte. Le retour en force des transports collectifs en site propre (notamment le
tramway) oblige les aménageurs à se poser la question de la place de l’automobile dans ces
écoquartiers. En effet en centre-ville, il est possible d’opter pour un quartier carfree, en
s’orientant vers la mobilité douce (INDI.RU 2005 : 60% des déplacements effectués à pied ou
à vélo, indicateur 19C) et les TC (INDI.RU 2005 : 30% des déplacements effectués en TC,
Les projets urbains durables 2010
57
indicateur 19B). La longueur de voirie en site propre doit être plus importante en centre-ville
qu’en proche périphérie (INDI.RU 2005 recommande 2 mètres par habitant, indicateur 19A,
un écoquartier central doit éventuellement en comprendre plus).
Agir sur le stationnement permet également de réduire le nombre de voitures dans
le quartier, en limitant le nombre d’emplacements, et en développement en parallèle de
nouvelles solutions, comme l’ « autopartage ». Il s’agit aussi de faire prendre conscience aux
gens qu’il est possible de se passer partiellement de la voiture. Il faut alors s’interroger sur le
lien étroit entre formes urbaines, mobilité, densité et mixité dans les quartiers durables de
centre-ville. L’étude du CERTU de 200843 permet d’amener une première piste de réflexion :
En centre-ville, la majeure partie des déplacements de moins de 1 Km sont réalisés à
pied (plus des ¾), le reste étant effectué à hauteur de 20% en voiture, tandis que la part du
vélo est minime44 (Tableau 2,Tableau 2 : Répartitions des modes de déplacement de moins
de 1 km (centre et périphérie) p.57). Le premier enjeu de la mobilité en cœur
d’agglomération passe par la culture de l’usage du vélo et par l’incitation, mais surtout par
la généralisation des pistes cyclables continues et sécurisées, ainsi que par des espaces
publics de qualité rendant agréable le déplacement. La France peut prendre pour modèles les
pays d’Europe du Nord, tels le Danemark et les Pays-Bas. Sur ce type de déplacements, les TC
sont très peu attractifs car non performants en terme de vitesse.
Tableau 2 : Répartitions des modes de déplacement de moins de 1 km (centre et périphérie)
CERTU, 2008
L’autre enjeu est qu’il existe une véritable culture de la marche à pied en centre-ville,
sur laquelle il est possible poser le socle de la mobilité des les quartiers durables centraux
pour les petits déplacements. L’usage du vélo devra quant à lui être amélioré, notamment
43 Mobilités : faits et chiffres. Où sont les enjeux en milieu urbain ? (CERTU, Nov. 2008) 44
Territoires d’étude : Strasbourg (Bassin d’emploi de Strasbourg-Molsheim) 1997, Lille (Métropole) et Lyon (SCoT) 2006
0 20 40 60 80 100
Strasbourg 1997
Lyon 2006
Lille 2006
26
31
29
4
8
68
59
67Voiture
TC
2 roues motorisées
Vélo
Marche
Autres
La ville durable au cœur de la réconciliation Nature/Société 2010
58
pour les déplacements légèrement plus longs. En effet 40% des déplacements compris entre 1
et 3 Km sont toujours réalisés en voiture, en centre-ville. Or, si la marche à pied semble moins
convenir à ce type de déplacements (malgré près de 30%), le vélo devrait pouvoir
concurrencer l’automobile. Il reste pourtant bloqué à moins de 10% (Tableau 3, p.58). Cette
fourchette de déplacements constitue un enjeu important de report modal vers le vélo et les
TC. L’apparition des vélos en libre-service est un des possibles envisageables pour effectuer
cette transition, en parallèle au renforcement des circuits cyclables des agglomérations.
Tableau 3 : Répartitions des modes de déplacement de 1 à 3 km dans les zones « centre » CERTU, 2008
Enfin, cette réflexion sur la mobilité démontre que le tiers des kilomètres parcourus en
une année par habitant est réalisé sur des déplacements de moins de 3 Km. Ainsi, si cela ne
permet pas d’agir significativement sur l’émission de GES, l’enjeu en termes de pédagogie et
de réduction des flux est fort.
La ville compacte favorise les déplacements courts, réalisables à pied ou à vélo, et
que pour les déplacements plus longs, l’amélioration des TC (notamment des TCSP, et des
TC à HNS) devrait pouvoir enrayer l’utilisation encore trop massive de l’automobile. L’accès à
la mobilité est également un facteur d’équité sociale et territoriale.
3.1.5.4 Mixité différenciée et densité urbaine : quelles articulations en centre-ville ?
Critère essentiel dans les projets de création de quartiers durables, la mixité peut
prendre trois formes : la mixité fonctionnelle, qui encourage la proximité des services et des
emplois, favorisant l’animation du quartier et la réduction des déplacements, indispensable
en centre-ville (INDI.RU 2005 : 30 commerces de détail pour 1000 habitants, indicateur
14B) ; la mixité sociale, largement plébiscitée, mais qui est du fait de son caractère flou mal
représentée dans les grilles d’analyse, n’a pas la prétention de gommer les différentiations
0 20 40 60 80 100
Strasbourg 1997
Lyon 2006
Lille 2006
37
36
45
14
36
22
15
4
3
33
22
29Voiture
TC
2 roues motorisées
Vélo
Marche
Autres
Les projets urbains durables 2010
59
sociales de l’espace, mais ambitionne de les rendre moins criantes et moins ségrégatives ; la
mixité formelle, en relation avec la diversité des typologies bâties et des espaces publics,
afin d’offrir une diversité de formes, de mobilier, mais aussi de logements. Cette dernière
forme de mixité est visée par quatre indicateurs (6A, 6B, 7A, 7B).
Peu d’écoquartiers abordent le thème de la mixité intergénérationnelle, si ce n’est
dans les discours, et les grilles d’analyse offrent peu de place à cette problématique pourtant
si nécessaire à aborder. Cette notion complète pourtant les trois autres formes de mixité
dans le but d’obtenir un quartier socialement durable.
En centre-ville, les projets d’écoquartiers sont généralement plus restreints, et la
population appartient à des catégories socioprofessionnelles bien particulières. Comment
envisager les critères de mixité en cœur de ville ? Le relatif échec en matière de mixité
sociale de certains écoquartiers (Vauban, Vesterbro) et le recours aux fonds publics pour la
maintenir dans d’autres (BedZed, Kronsberg) rappelle la difficulté d’atteindre cet objectif45.
La densité, « souvent considérée par les urbanistes comme la qualité de ce qui est
compact, est un outil de conception urbaine et architecturale relevant plutôt les aspects
qualitatifs que quantitatifs de la forme urbaine46 ». Cette notion a donc fortement évolué :
aujourd’hui, la densité permet de cultiver la mixité sous toutes ses formes, la densification
des lieux d’échanges, l’amélioration des TC et la valorisation des espaces publics : c’est à
partir de cela que naît l’urbanité. On peut aussi se demander sous quelle forme intégrer la
nature en ville (INDI.RU 2005 : 40m² d’espaces verts par habitant, indicateur 3B) : traitement
de l’espace public, espaces semi-naturels, trame verte, végétalisation des toits et des murs.
L’un des enjeux de la ville contemporaine semble résider dans sa capacité à articuler espaces
bâtis et non bâtis.
3.1.5.5 Gouvernance urbaine et durabilité : l’enjeu de la démocratie participative
Contrairement aux écoquartiers réalisés dans des espaces relativement peu denses
démographiquement (ancienne ZI, espace rural), les écoquartiers de centre ville sont des
projets ayant pour ambition de s’intégrer dans des espaces d’appartenance parfois
fortement identitaires. La place de la participation (bottom up) des citoyens riverains est
donc essentielle dans la conduite du projet. Mais le caractère flou, la multiplicité de ses
45
UNIL, « Eco-quartiers, l’habitat du futur », in Vues sur la ville, 2007, Lausanne, 8p. 46
Prudente D., in Da Cunha, 2007 (p. 107) : « Durant le 20ème
siècle, la densité a essentiellement été abordée en termes quantitatifs (rapport surface de terrain et surface à bâtir) ce qui a favorisé la « verticalisation » et la « massification » de la ville. Les termes qualitatifs sont uniquement rapportés à l’architectonique des bâtiments au détriment de la qualité d’agencement des espaces publics. »
La ville durable au cœur de la réconciliation Nature/Société 2010
60
usages et de ses interprétations font à la fois le succès et la faiblesse de la gouvernance
participative, concept relativement jeune, et surtout très « en vogue ».
Il en existe, selon les auteurs, trois grandes visions47 :
Une conception instrumentale, où la démocratie participative est une des modalités
de la démocratie locale et représentative.
Une conception radicale, faisant de la démocratie participative une alternative à la
démocratie représentative.
Une conception de la gouvernance, où la démocratie participative est un
complément de la démocratie représentative.
Cela pose ainsi une question à l’origine de débats houleux : est-ce que la gouvernance
participative conduit à un renforcement de la démocratie dans la vie politique, avec une
ouverture à de nouveaux acteurs ? Ou bien est-ce seulement un « gadget » des pouvoirs
publics, essentiellement rhétorique et instrumental ?
Ce débat mérite d’être mis en lumière au miroir de quelques études de cas françaises et
étrangères de quartiers durables centraux, afin de comprendre quelles sont les modalités de
la gouvernance dans la conception et la vie de ces quartiers.
3.1.5.6 L’indispensable démarche de durabilité
La durabilité n’est pas un objectif en soi, mais doit plutôt être une démarche. La
plupart des projets de renouvellement ont, au départ, des objectifs purement
urbanistiques : améliorer les conditions de vie des résidents (Vesterbro à Copenhague),
densifier le bâti et étendre le centre-ville (quartier De Bonne à Grenoble), profiter d’une
politique plus globale pour lancer un projet urbain (Bo01 à Malmö). Le vieillissement de la
population en Europe tend à augmenter la demande en quartiers durables situés en centre-
ville ou à proximité immédiate, permettant ainsi d’offrir à ces projets un nouveau public-
cible et une justification d’aspiration socioculturelle. Le désir de mobilité et de confort des
personnes âgées s’associe à celui des personnes handicapées pour une meilleure
participation dans la vie citoyenne et une disparition de leur isolement. Au-delà du critère de
mixité sociale, les quartiers durables doivent avoir pour ambition d’améliorer la qualité de
vie de ces personnes, dont les enjeux cités précédemment deviennent des besoins
exacerbés : accessibilité, mobilité, (ré)intégration sociale, confort, commerce de proximité,
quartiers intergénérationnels.
47
Leresche et Audetat, Urbia, Participation et développement urbain durable, n°3, 2006.
Les projets urbains durables 2010
61
Le pari des quartiers durables de centre-ville sera d’anticiper leur mutation,
notamment en termes d’adaptabilité au vieillissement, sans quoi leur durabilité sera remise
en cause. Il faut dès l’élaboration du quartier penser cette adaptabilité, en prévoyant la
modification des appartements et la mutabilité des équipements : une école aujourd’hui
deviendra peut-être une résidence pour personnes âgées demain. Cette approche n’est pas
suffisamment prise en compte dans les grilles d’analyse : INDI.RU n’aborde la question
intergénérationnelle qu’avec deux indicateurs (7D et 13C), le premier traitant de la part de
logements adaptables aux personnes à mobilité réduite et âgées, sans toutefois fixer de seuil
chiffré, le second mesurant la distribution de la population par tranche d’âge. Deux
indicateurs, c’est bien peu pour des enjeux aussi déterminants que la question de la mixité
intergénérationnelle et du vieillissement.
3.1.6 Des enjeux similaires pour des traitements multiples
Le panel de quartiers observé dans le dossier (voir annexes) permet de mettre en
lumière les enjeux inhérents à la construction d'écoquartiers en centre-ville. Malgré un
évident manque de recul, leur courte existence oblige à anticiper leur évolution en termes
de durabilité. Cette problématique est une démarche qui ne peut être évaluée qu'après un
temps de fonctionnement plus ou moins long (voir 3.1.1.2 Un manque de recul évident,
p.45).
Les enjeux listés précédemment ont tous été plus ou moins abordés par les
aménageurs. Leur objectif principal est d'offrir une bonne qualité de vie en milieu assez
dense pour freiner l'étalement urbain. Ils ont pour ambition de constituer de nouveaux
morceaux de ville, de réhabiliter l'habitat urbain en le rendant attractif et désirable.48 Ces
projets urbains sont aussi d'excellentes opportunités pour faire entrer la nature en ville.
3.1.6.1 Le quartier durable : nouvel outil de polarité urbaine
Le quartier constitue un des niveaux d’intervention à privilégier pour agir sur la ville.
Il correspond à une échelle d’intervention maîtrisable, à la fois ancré dans un contexte
spécifiquement local mais aussi en lien avec un environnement plus vaste. Les différents
quartiers étudiés ont des surfaces qui s’échelonnent entre 3,8 hectares à Paris et 35 hectares
à Copenhague. Si cet ordre de grandeur permet de comparer les quartiers entre eux, il ne
48
Emélianoff, in Da Cunha, 2007, p.13
La ville durable au cœur de la réconciliation Nature/Société 2010
62
faut pas réduire la notion d’échelle spatiale à cette simple question de la surface. Il faut
prendre en compte la cohérence interne du quartier, parfois définie par ses espaces publics,
ses centralités et sa densité.
La réussite d’un quartier durable dans un tissu urbain dense, et à proximité d’un
centre-ville passera d’abord par deux éléments caractéristiques : « le quartier doit se
différencier du tissu urbain environnant, différenciation qui n’en implique pas moins une
continuité et des complémentarités avec le reste de la ville »49. Les projets de faible taille
n’ont pas vocation à devenir des quartiers au sens premier du terme – hormis Vesterbro qui
ambitionne de s’établir comme un nouveau pôle urbain au contact du centre-ville – mais
plutôt à renforcer des quartiers existants (quartier de la Mison Blanche à Paris, centre-ville à
Grenoble, Crêt-Taconnet à Neuchâtel, Neudorf à Strasbourg) notamment en offrant une
centralité nouvelle, basée sur une cohérence sociale, économique, architecturale, en
donnant une importance particulière aux espaces publics de qualité.
3.1.6.2 La densité urbaine : une des clés de la réussite d’un quartier durable
Néanmoins, le fonctionnement d’une mobilité non motorisée et l’existence de
commerces de proximité sont soumis à une taille critique suffisante pour sa viabilité. En
fonction de cette taille, les concepteurs doivent intervenir sur la densité du quartier (hauteur
des constructions, optimisation de l’espace). La différence entre mitoyenneté et
promiscuité réside ainsi dans la recherche d’une convivialité et la préservation de l’intimité,
par des espaces semi-privatifs de qualité, des jardins partagés, une maison communautaire,
dont naît la vie de quartier.
La densité résidentielle (nombre de logements à l’hectare) des quartiers étudiés se
situe dans une fourchette allant de 25 logements par hectares, à Neuchâtel, à 114 logements
par hectare à Copenhague. Cette forte variabilité est d’abord liée à la présence dans le
quartier d’une plus ou moins grande proportion d’activités et d’espaces publics. Mais cela
correspond aussi à la volonté des aménageurs de densifier ou non le quartier. Selon la
configuration spatiale, des densités identiques peuvent créer soit un sentiment de
stimulation, soit d’oppression. La densité améliore l’efficacité des transports publics et rend
viable les installations communes de chauffage et de traitement des déchets, tout en
réalisant des économies d’échelles. Elle replace ainsi le piéton au cœur du quartier,
49
Dind, Thomann et Bonard, in Da Cunha, 2007, p.54
Les projets urbains durables 2010
63
permettant notamment aux personnes âgées de se déplacer facilement et, aux enfants
d’aller à l’école sans leurs parents.
Pour rendre acceptable la densité et rehausser la qualité de vie, la réinvention d'un
rapport de proximité à la nature devient un élément central50: la densité perçue reflète le
ressenti des habitants mais est difficilement mesurable. Cela passe par une gestion pluviale à
ciel ouvert (ZAC de Rungis) et un traitement des espaces publics et des surfaces minérales
favorisant une végétalisation maximale (terrasses, toitures, murs), comme à Grenoble ou à
Paris. Beaucoup de quartiers durables ont fait le choix de créer des jardins partagés, même
s'ils sont situés en centre-ville, grâce à une gestion efficace des surfaces : potagers en
terrasse, partagés, en hauteur pour les personnes en chaise roulante. Mais certains sols jadis
pollués par l'activité industrielle ne se prêtent pas à la mise en place de jardins ou d'arbres
fruitiers (Strasbourg).
3.1.6.3 Une nouvelle façon de penser la mobilité en centre-ville
La mobilité a souvent été l’élément central dans la conception des écoquartiers de
centre-ville. Il s’agit d’un enjeu majeur, intimement lié à la notion de densité urbaine et aux
préoccupations environnementales actuelles. Il s’agit également d’agir sur le cadre de vie
urbain, martyrisé par les pollutions engendrées par les moyens de transport individuel.
Favoriser des pôles urbains denses conditionne les déplacements en réduisant les
distances parcourues. La mesure phare se situe dans la restriction de la présence de
l'automobile, limitée à quelques rues (zones 30, voire 15 km/h) seulement accessibles aux
habitants. Cela passe par une forte présence de transports collectifs, de pistes cyclables,
d'une limitation du stationnement (0,5 emplacement par logement, seuil moyen souvent
observé), mais aussi par des espaces publics de qualité, accessibles aux personnes à mobilité
réduite, ainsi que par une compacité urbaine et une présence de commerces et de services
de proximité.
Les concepteurs ont opté pour une séparation nette entre la circulation motorisée et
les modes doux de déplacements. Se côtoieront désormais cyclistes et piétons dans des
espaces spécialement aménagés, offrant des aménités paysagères (végétation, eau,
patrimoine, art). L’accès aux transports collectifs a été également plébiscité, trois quartiers
profitant de l’aménagement de nouvelles lignes de tramway (Paris, Grenoble et Strasbourg).
Cet élément est indispensable pour relier le quartier à une échelle plus large et pour inciter
50
Ibid.
La ville durable au cœur de la réconciliation Nature/Société 2010
64
les populations à moins utiliser leur automobile. C’est également un vecteur d’équité sociale
pour les personnes ne disposant pas ou ne pouvant utiliser de voiture. L’accessibilité des
quartiers, et parfois leur désenclavement, ont parfois conduit à la création d’une nouvelle
trame viaire.
L’accent mis sur la mobilité durable dans le future quartier Danube à Strasbourg a
permis à la capitale alsacienne de remporter le concours ÉcoQuartiers du Ministère de
l’Environnement dans cette catégorie. En plus de faire la part belle aux mobilités douces, au
transport collectif et en optant pour une limitation de la présence automobile dans le
quartier, les concepteurs ont également transformé la RN4 en boulevard urbain (la Route du
Rhin) végétalisé, apaisé, et interdit aux poids lourds. Cela a permis de rendre ses abords
urbanisables.
3.1.6.4 La mixité urbaine comme hétérogenèse
Pour sortir de la fabrication d’espaces monofonctionnels, l’urbanisme durable
s’appuie en particulier sur la mixité urbaine. Mixité des fonctions, mais aussi des groupes
socioculturels, diversité des formes, des ambiances, sont les outils pour réduire les risques
de ségrégation résidentielle.
La mixité fonctionnelle, indispensable en centre-ville, est largement mise en avant
dans les quartiers étudiés. Elle doit être pensée de façon à ne pas segmenter le quartier et
éviter le zonage. Pour être effective à une échelle fine, elle ne doit pas laisser trop de
distance entre les différentes fonctions. La présence de commerces de proximité, en plus de
favoriser les déplacements courts, fait naître la vie de quartier. Ainsi, une majorité des
quartiers a choisi de concevoir des espaces commerciaux et de bureaux, afin de créer de
l’emploi et d’attirer des commerces. À Grenoble, l’axe commercial sera en contact direct
avec le centre-ville, mais la ZAC semble encore vouée à être touchée par un zonage
fonctionnel. Ce n’est pas le cas à Copenhague, qui disposait toutefois d’une mixité avant la
réhabilitation, et à Strasbourg, ces deux exemples ayant opté pour des commerces de
proximité en pied d’immeuble.
Afin d’appréhender le concept de développement durable dans son ensemble,
notamment le pilier social, la plupart des quartiers ont une proportion de logements sociaux
supérieure à la moyenne (environ 25%). Ceci afin d'éviter de faire du quartier une enclave de
haute qualité environnementale destinée à des populations aisées. Néanmoins, leur
localisation en centre ville rend complexe le maintien de prix bas, et il faut souvent recourir
à des fonds publics pour que des familles modestes puissent acquérir un logement.
Les projets urbains durables 2010
65
Également, la présence de logements sociaux ne garantit en rien la mixité culturelle. Un
traitement pertinent de la mixité sociale s’établit à une échelle supérieure.
En parallèle, une adaptabilité des logements et des espaces d'activités au
vieillissement (logements accessibles aux personnes à mobilité réduite) est la clé pour
atteindre une certaine mixité générationnelle durable : la plupart des quartiers optent pour
l’établissement d’un EHPAD associé à un groupe scolaire, une crèche ou une halte-garderie.
L’exemple de la ZAC de la Gare de Rungis est particulièrement intéressant (Figure 23).
L’avenir des villes se situe désormais dans la capacité à travailler sur l’existant, à faire
des « coutures urbaines », le tout pour favoriser la compacité de la ville. À des fins
financières, patrimoniales et identitaires, la réhabilitation est indispensable en centre-ville. Il
s’agit surtout de s’approprier l’histoire du lieu et de réinvestir la ville. Une participation
active des citoyens, dans le cas où des habitants sont déjà présents sur le site : réunions,
établissement d'un cahier de doléances où seront reprises des propositions pour le cahier
des charges des futurs bâtiments. Mais la participation citoyenne est surtout le préalable
indispensable à l'éducation et la sensibilisation à l'environnement. Il ne faut pas négliger la
prévalence des variables culturelles et sociales sur les variables techniques51.
51
Emélianoff, in Da Cunha, 2007, p.13
La ville durable au cœur de la réconciliation Nature/Société 2010
66
3.2 Les parcs habités, une alternative nouvelle : l’exemple de
Kronsberg à Hanovre
La réflexion sur la place de la nature en ville pose la question de l’articulation entre
deux exigences apparemment paradoxales de la durabilité urbaine : la densification de
l’habitat et la naturalisation de l’urbain. Le projet urbain moderne présuppose la
combinaison du minéral et du végétal, sans les confondre, faisant du second une des lignes
de force de la production urbaine pour agir sur la densité, la qualité de vie et le lien social.
Si le concept d’écoquartier permet de repenser la densification urbaine, la variété et
le caractère modulable de ces quartiers permet également de jouer sur le degré d’aération
du projet urbain. En centre ville, l’écoquartier nécessite une réflexion complexe, car il faut à
la fois allier densité, compacité et nature dans un espace restreint aux enjeux fonciers et
socio-économiques forts. En périphérie, les enjeux évoluent : le foncier, moins rare, permet
d’opter pour un urbanisme moins dense, plus aéré, afin de créer un glissement progressif
entre la ville compacte et la périphérie plus ténue.
Le parc habité, concept urbanistique en vogue, consiste à densifier un quartier tout
en y préservant une atmosphère « nature ». Celle-ci va guider l’urbanisation, et non l’inverse
comme dans l’écoquartier. Il s’agit de l’élément qui semble le plus opportun à développer la
où le foncier est moins rare, mais où la densification est nécessaire : proche périphérie des
villes, emprises urbaines libérées par l’armée ou l’industrie. Inspirés des cités-jardins de
Howard et des écoquartiers développés en Europe à la fin des années 1990, le parc habité
permet de densifier un quartier tout en intégrant les espaces verts publics et privés au sein
même de la trame architecturale.
Il autorise ainsi la pénétration des éléments naturels, favorisant la biodiversité,
l’ensoleillement, l’esthétique, l’infiltration des eaux de ruissellement et la réduction de
l’amplitude thermique grâce à une aération fonctionnelle et à la place importante donnée à
l’arbre. Les trames vertes doublent les façades d’une masse végétale identique afin d’assurer
la continuité de la volumétrie urbaine. Les éléments végétaux structures le parc urbain, car
ils permettent de rompre les discontinuités, ordonner le bâti, relier les volumes disparates.
Le rapport entre la nature et le bâti structure l’identité de l’espace urbain et la lisibilité des
piétons, cyclistes et automobilistes.
Ainsi, le parc habité, à la différence de l’écoquartier, est ouvert et bénéficie
également aux habitants extérieurs, qui viennent profiter de ce nouveau pôle naturel. Dans
Les projets urbains durables 2010
67
sa réalisation, il prend largement en compte la problématique des déplacements en
favorisant directement les mobilités douces, grâce aux pistes cyclables et trottoirs en site
propre, et indirectement en limitant la circulation et le stationnement automobile. La trame
viaire a une forme souple, inspirée par le règne végétal. Les continuités arborées bordent les
espaces publics et marquent les entrées de quartier.
L’habitat n’est pas sectorisé et le bâti est hétérogène (collectif, habitat groupé,
maisons individuelles). La géométrie des bâtiments est orchestrée autour d’un cœur d’îlot,
petit square collectif intégré à l’ensemble du parc.
Enfin, le parc habité est l’opportunité de faire coïncider art et urbanisme, notamment
l’art végétal et l’art paysager (Land Art).
3.2.1 Kronsberg : un quartier durable entre ville et campagne
Kronsberg est un écoquartier situé au Sud-Est de Hanovre. Confrontée à partir de
1994 à un afflux de population issue de l’ex RDA, la ville d’Hanovre fut confrontée à une
pénurie de logement. Construit ex nihilo sur 70 hectares de des terres agricoles, qui
constituaient une des dernières grandes réserves foncières de la ville, le quartier a profité de
l’Exposition Universelle de 2000 pour prendre le virage du développement durable. Dans
l’esprit de l’Agenda 21, Kronsberg a bénéficié des techniques les plus modernes en matière
de construction et d’habitat écologiques. Deux concours furent lancés en 1994 pour
l’aménagement du secteur, et la municipalité pris également la décision d’établir un plan
local d’aménagement afin de fixer les paramètres architecturaux : nombre d’étages (quatre
ou cinq), alignement le long de la voirie, trame de base orthogonale, îlots fermés.
En 2006, près de 3300 logements avaient été construites, sur un total de 6000. S’il ne
se revendique pas comme étant un « parc habité », Kronsberg en dispose néanmoins des
caractéristiques propres : proximité de la campagne, place importante de la qualité
paysagère et de l’arbre, densification urbaine maîtrisée. À terme, 15000 habitants y sont
attendus.
La ville durable au cœur de la réconciliation Nature/Société 2010
68
Figure 16 : Localisation de Kronsberg Goolge Earth, 2010
Figure 17 : Vue satellite de Kronsberg Google Earth
3.2.2 Une prise en compte complète du pilier social
Avant le lancement du projet, un dialogue interdisciplinaire (services de la
construction, services sociaux) a permis d’aboutir sur un cahier de doléances pour la mise en
œuvre d’une démarche de durabilité dans le quartier. La flexibilité et la diversité des
Les projets urbains durables 2010
69
logements des logements a été un élément central dans les recommandations des experts.
L’objectif est de mixer les types de financement et de modes de propriété dans un même
secteur, tout en limitant les immeubles de logements sociaux, sources de ségrégation
spatiale. La location d’appartements est marquée par une limite maximale quant aux
revenus des premiers locataires, limite qui diminue lorsque de nouveaux locataires
emménagent : ainsi, le seuil de 20% de logements sociaux n’est effectif que pour la
deuxième location. Les loyers moyens tournent autour de 5 à 6 euros le mètre carré. En
contrepartie, 10% du total des logements offerts, soit 300 unités, seront composés de
maisons individuelles avec terrasses, érigées dès le départ de l’opération pour impulser une
dynamique et une image positive au quartier. Le développement de petites unités de
logements autour d’une cour intérieure a pour but de développer un quartier
communautaire.
Des jardins d’enfant et des écoles sont associées à des infrastructures favorisant la
rencontre, notamment autour de la culture, d’événements sociaux, etc. Le centre KroKus est
un espace de rencontre et un forum de quartier regroupant le réseau de services
communautaires (bibliothèque, centre d’information pour la jeunesse, lieux de réunion,
centre d’art, studio et un atelier).
Dans le même objectif de mixité sociale, la municipalité a pris la décision de
développer un projet de logement novateur. Celui-ci vise à promouvoir la cohabitation de
familles immigrées avec les familles allemandes. Un tiers des appartements de ce complexe
sont adaptés aux besoins des différentes cultures : des logements de un à sept pièces
permettent aux familles nombreuses de pouvoir se loger facilement, l’offre de ce type
d’appartements en Allemagne étant relativement rare ou trop coûteuse.
La mixité sociale sur le long terme est le leitmotiv des aménageurs. Elle devrait être
atteinte rapidement à l’échelle des îlots, en attendant la finalisation des derniers immeubles
de logement.
La ville durable au cœur de la réconciliation Nature/Société 2010
70
3.2.3 La part belle aux espaces ouverts et paysagers
Un des thèmes de l’Exposition Universelle tournait autour de « la ville est un jardin ».
Un plan paysage a été élaboré avant le plan d’urbanisme afin de prendre en compte
prioritairement le thème du paysage. Le quartier de Kronsberg inclut de nombreux espaces
non bâtis laissés à la nature, mais valorisés et modelés pour offrir des aménités paysagères.
Pour amortir économiquement et durablement une partie de ces espaces non urbanisés, un
parc sportif et ludique et un parc agricole ont été aménagés sur ces terres (Figure 19, p.71).
Une ferme à quant à elle la gestion des terres agricoles. Elle produit, transforme et vend sur
place selon les principes de l’agriculture biologique : les aménageurs ont voulu développer la
notion d’agriurbanisme (Encadré p.72).
La création du quartier a nécessité l’excavation de près de 700000 mètres cube de
matériaux : afin d’éviter au maximum l’exportation de ces gravats, qui engendre bruit,
pollution et poussière, les aménageurs ont opté pour une réutilisation totale de ces
matériaux. Ils ont essentiellement servi à l’amélioration du paysage : mise ne place de
biotopes locaux, création de deux collines, élaboration d’une bute de protection contre le
bruit le long d’une autoroute proche du quartier, comblement d’une ancienne décharge.
Figure 18 : Appartement du projet Fokus Le projet de logements Fokus est destiné aux personnes invalides souhaitant vivre de manière
indépendante tout en profitant d’une assistance dans les activités quotidiennes. Leurs logements
sont répartis parmi les logements ordinaires, mais restent à proximité d’un point d’aide.
Rumming, 2003
Les projets urbains durables 2010
71
Figure 19 : Les espaces agricoles Rumming, 2003
3.2.4 Un quartier durablement écologique
De très hauts standards environnementaux ont été établis par le comité municipal en
charge de l’écologie pour l’exposition. Gestion du sol, de l’eau et des déchets ainsi qu’une
politique énergétique sont les enjeux qui ont été les plus pris en compte.
3.2.4.1 Efficacité énergétique
L’objectif était de réduire les émissions de CO² d’au moins 60% par rapport aux
normes courantes allemandes datant de 1995. Plusieurs éléments pour y parvenir : des
méthodes de construction maisons basse consommation (55 kWh/m²/an), deux centrales de
cogénération décentralisées reliées à tous les bâtiments du quartier, deux éoliennes, énergie
solaire (panneaux photovoltaïques sur le toit de l’école primaire, du centre Krokus et du
centre commercial, mâts solaires), mesures spéciales d’économies chez les résidents.
L’agriculture intra-urbaine, ou agriurbanisme, se différencie de la notion de nature en ville car elle
est la conséquence d’une activité, et non le support d’une activité. Elle produit des biens, a des
objectifs de rentabilité que n’a pas la nature en ville, qui, elle, développe des prestations plus sociales
et esthétiques.
Mais elle pourrait devenir un nouvel outil végétalisation urbaine complémentaire, à condition qu’elle
soit viable dans le contexte urbain, non limitée à un simple « gadget urbanistique ». Le principe de
base sera de favoriser un dialogue constructif avec les agriculteurs, qui ne sont pas des jardiniers-
paysagistes, mais qui, de fait, contribuent à la production des paysages. Son potentiel est quant à lui
véritablement représenté par la possibilité de développer les circuits courts, les jardins partagés, le
bio. Elle n’a pas non plus vocation à supplanter l’agriculture « classique », intensive ou extensive, et
n’en aurai de toute façon pas les moyens.
La ville durable au cœur de la réconciliation Nature/Société 2010
72
Une étude mandatée par la ville de Hanovre en 2000 a permis d’établir les premiers
résultats en matière de consommation énergétique. Le suivi détaillé des années 1999 à
2001 a montré une diminution de 28% des émissions de CO². L’objectif est de parvenir à une
réduction de 60 à 80%, mais sur un délai plus long. Le réseau de chauffage économise 19%
d’émissions de CO² par rapport aux énergies primaires. Synthétiquement, un habitant de
Kronsberg rejette 75% de moins de CO² que la moyenne nationale, chiffre approchant
l’objectif de 80% de réduction.
3.2.4.2 Gestion de l’eau et des déchets
La forme de l’architecture a été grandement influencée par les techniques de gestion
de l’eau. L’eau est visible, dans des bassins et des rigoles aménagés (Figure 20, p.72), pour
que ce thème environnemental crucial éveille la conscience des habitants, en plus d’offrir
des éléments paysagers de qualités.
Un plan de gestion des eaux de pluie a été établi avant les premières réalisations. La
grande surface de sol destinée à la construction ne devait pas nuire à l’équilibre naturel et à
l’infiltration des eaux de pluie dans les nappes phréatiques. Ainsi, les précipitations sur les
surfaces imperméables sont recueillies puis libérées progressivement ou stockées dans les
bassins. Une partie sert à l’alimentation des toilettes de l’école maternelle et de la maison
de quartier Dans les zones où l’écoulement est difficile, les surfaces imperméabilisées ont
été réduites au maximum, et celles qui subsistent ont été végétalisées. 45 % des eaux
pluviales s’infiltrent dans le sol, 53 % s’évaporent et seuls 2 % s’écoulent dans les réseaux.
Figure 20 : Bassin de rétention dans une cour intérieure Rumming, 2003
Les projets urbains durables 2010
73
3.2.4.3 Transports
Afin de rendre accessible le quartier par des transports collectifs, une ligne de
tramway a été construite. Elle relie Kronsberg au centre-ville de Hanovre en 17 minutes, et
trois arrêts ont été disposés dans le quartier façon à ce que personne n’aie plus de 600
mètre de marche à effectuer pour s’y rendre. Seuls les résidents peuvent entrer en
automobile dans le quartier. Des pistes cyclables assurent l’accès à tous les commerces et
équipements, favorisant ainsi la mobilité douce.
Le quartier de Kronsberg est un projet d’urbanisme exemplaire en termes de
développement durable. Les principaux objectifs de l’Agenda 21 y ont été appliqués et sont
susceptibles d’être atteints rapidement. La planification a également été un élément central
dans la conception du projet : plan paysage, plan d’aménagement local et plan de gestion de
l’eau, ont grandement contribué à la réussite du quartier. Face à ce constat, la ville de
Hanovre a pris la résolution de transférer les normes appliquées ici à l’ensemble de la ville.
Les parcs habités représentent une nouvelle façon de « faire la ville » et constituent
une alternative aux écoquartiers. Plus aérés, ils ne sont néanmoins pas destinés aux mêmes
lieux d’implantation : les vastes emprises foncières périphériques se prêtent mieux à
l’accueil de parcs habités et ne sont pas forcément soumises à la nécessité de compacter
fortement l’habitat. Par contre, les parcs peuvent répondre à une éventuelle extension
urbaine, grâce à leur modularité facilitant la densification.
Rennes, Marseille et Lyon ont déjà optés pour ce type de projet urbain (Figure 21,
Figure 22 et Figure 23 pp.74-75).
La ville durable au cœur de la réconciliation Nature/Société 2010
74
Figure 22 : Maquette 3D du projet d'Arenc Marseille / Arenc : Ce futur quartier aménagé dans le cadre du projet Euroméditerranée à pour
principal objectif d’amener la nature dans un secteur portuaire déficient en espaces verts. Le parc
ne sera donc pas uniquement destiné à ses résidents mais aussi aux habitants des faubourgs
alentours. Des jardins, des loggias et une forte densité végétale offriront une réponse au climat
particulier de Marseille (fort ensoleillement, vent).
www.euromediterrannée.fr, 2009
Figure 21 : Maquette 3D du futur "bois habité" Rennes / La Courrouze : Les arbres font partie intégrante du projet, tout comme la biodiversité
végétale déjà présente sur l’ancien site militaire. La cohabitation entre les espaces publics et privés
est perçue comme une imbrication et non comme une séparation. La végétation et les fossés
drainants serviront à délimiter les différentes emprises.
www.lacourrouze.fr, 2009
Les projets urbains durables 2010
75
Figure 23 : Vue aérienne 3D du Carré de Soie Le Carré de Soie : Situé au bord du Canal de Jonage, cette vaste emprise foncière (500 hectares) va
être aménagée pour y développé un nouveau quartier inspiré des « cités jardins » : promenade
arborée, îlots d’habitation ouverts, parcs.
www.grandlyon.fr, 2009
La ville durable au cœur de la réconciliation Nature/Société 2010
76
CCOONNCCLLUUSSIIOONN
4.1 Penser la ville durable de demain
Les outils d’urbanisme et de planification durables étudiés et regroupés dans ce
mémoire ne sont qu’une partie de tout l’arsenal existant en la matière. Certains sont des
concepts déjà anciens (écoquartiers, trame verte et bleue), d’autres sont innovants et très
récents, rendant leur analyse assez délicate et théorique. La sélection de ces différents outils
s’est opérée à la suite de discussions avec Monsieur Brillaud : l’intérêt est qu’ils répondent
aux problématiques actuelles et futures des territoires d’étude de l’ADUAN.
Ainsi, la première partie regroupe deux concepts permettant une planification
durable du territoire, à l’échelle du SCoT : les trames vertes et bleues, le
chronoaménagement et les sociotopes. Si le premier est un concept ancien déjà appliqué
dans de nombreuses villes, le second est quant à lui très récent. Son application au territoire
SCoT Sud 54 est donc suspendue aux résultats qu’il obtiendra après l’expérience du Syndicat
mixte de Grenoble. Néanmoins, l’application des notions d’ « autoroute apaisée » et de
« boulevard urbain » apparaît pertinente à l’échelle de l’agglomération nancéienne.
La trame verte et bleue, concept « relancé » par le Grenelle de l’Environnement, est
déjà une des préoccupations du Syndicat mixte du SCoT Sud 54. L’intérêt était d’analyser
l’application d’une telle méthode aux grandes villes, comme à Bruxelles. Il s’agit bien là
d’une action d’envergure pour le retour de la nature en ville. L’élaboration du SCoT pourrait
alors prendre en compte les trames vertes et bleues dans l’agglomération nancéienne. La
réouverture des cours d’eau voûtés est par exemple une application transposable à Nancy.
Enfin, le « chantier » prospectif des sociotopes est le plus à même d’être appliqué à
Nancy. Sa présentation lors des différentes réunions d’agence a soulevé un intérêt notable
de la direction et des chargés de mission. Intégrés dans une politique de planification,
comme le PLH, les sociotopes pourraient permettre une gestion avant-gardiste des espaces
verts grand-nancéiens, ainsi que des secteurs touristiques du centre-ville. Une présentation
des premières cartes d’analyse éditées au mois d’août devrait avoir lieu à la fin du mois de
septembre. Il sera alors question d’enclencher la suite de la méthode, l’étape la plus longue,
qui consiste à interroger usagers et experts. Une telle mission pourrait faire de Nancy un
précurseur en la matière.
Les projets urbains durables 2010
77
En parallèle à ces outils de planification, j’ai eu l’occasion de me pencher sur les
nouveaux objets urbains amenés à produire la ville durable de demain. Le dossier sur les
écoquartiers de centre-ville, en partie présenté dans le rapport, constitue un recueil de
pratiques transférables au futur quartier de Nancy Grand Cœur. Le dossier insiste
particulièrement sur les thématiques de mobilité, de densité et de multimodalité. L’état
d’avancée du projet permet encore une prise en compte des différents éléments mis en
lumière dans le dossier. Sa réussite donc par une bonne intégration de tous ces thèmes
fondamentaux. La position centrale du quartier démontre l’ambitieuse politique de
reconstruction de la ville sur elle-même, alors que de nombreuses villes ont plutôt opté pour
la construction d’écoquartiers ex nihilo. En périphérie, avec le projet Biancamaria, il est
question de préférer une alternative à l’écoquartier, celle du parc habité.
Sur le sujet de la ville durable, les autres stagiaires se sont penchés sur
l’écoconstruction, les bâtiments intergénérationnels et multifonctionnels, les parcs
d’activités économiques durables, concepts pris en compte dans le cadre du Grand Nancy ou
bien du SCoT. Cela symbolise parfaitement la nécessaire interdisciplinarité pour répondre à
ces problématiques, mais aussi le caractère multiscalaire de l’urbanisme durable.
4.2 Un stage de fin d’études formateur et enrichissant
Ce stage a constitué ma seconde expérience professionnelle dans le monde de la
Géographie. En première année de Master, j’ai effectué un stage de trois mois en milieu
rural, sur des sujets différents de ceux abordés cette année (pollution des transports,
hydrogéologie, patrimoine rural). Ces deux expériences complémentaires constituent ainsi
mes premiers pas dans le monde professionnel.
La mission confiée a essentiellement tourné autour de la recherche et de l’étude de
concepts récents encore mal définis et souvent peu mis en pratique. Ceci rend le travail à la
fois passionnant et délicat. La diversité des sujets abordés (urbanisme, écologie,
écoconstruction, sociologie, commerce) a été à la fois l’occasion de mettre en pratique mes
Conclusion
La ville durable au cœur de la réconciliation Nature/Société 2010
78
acquis universitaires mais aussi d’enrichir mes connaissances. Ce genre d’exercice peut
s’avérer toutefois assez frustrant dans le sens où il s’agit de recherches très conceptuelles,
éliminant de fait toute la partie concrète et opérationnelle de l’urbanisme.
Pour répondre aux exigences d’une agence d’urbanisme, il a été important de savoir
sélectionner les différents thèmes en fonction des orientations de mon tuteur de stage,
Monsieur Brillaud, et de produire des documents synthétiques. Une des difficultés fut
d’adapter mon style rédactionnel universitaire à l’usage courant pour les publications
d’urbanisme. Les documents n’étaient plus destinés à mes professeurs mais à des élus et à
des chargés de mission. Cette adaptation, facilitée par les conseils et les relectures de
Monsieur Brillaud, est un acquis qui peut s’avérer fondamental pour la suite. Travailler en
agence d’urbanisme, c’est également apprendre à gérer son temps : des délais assez courts
obligent à être réactifs, tandis que des « commandes » avec un délai long ne doivent pas
être traitées à la dernière minute.
La collaboration en mode « projet » a conduit chacun d’entres nous à travailler sur un
sujet principal (pour ma part les écoquartiers) tout en participant en partie aux travaux des
autres stagiaires. Cela élargit alors le panel des recherches effectuées. Au contact de
stagiaires issus de formations différentes, ma formation de géographe a donc été un atout
dans le cadre de ces travaux interdisciplinaires. La participation au « chantier » des
sociotopes m’a permis de mettre en pratique mon savoir-faire cartographique. À l’inverse du
stage effectué l’année dernière, où j’ai opéré de manière autonome, il m’a fallut cette année
m’inscrire dans ce travail en équipe, méthode que j’ai acquise lors de mes années d’études
pour la réalisation de différents dossiers.
La réunion avec les directeurs fut la première occasion de prendre contact avec la
hiérarchie. Elle s’est déroulée le 3 mars en présence de Monsieur Jacques Charlot, directeur
générale de l’agence, Madame Anne Locatelli, directrice générale adjointe en charge du
département « développement économique », de Monsieur Benjamin Brillaud et des
stagiaires de l’Incubateur. Une présentation sous forme d’arborescence a permis de
présenter le travail accompli par chacun et les futurs thèmes abordés.
La seconde réunion fut l’occasion d’exposer l’avancée des recherches à toute
l’agence, le 3 mai. Les chargés de mission ont pu prendre connaissance des thèmes abordés
Les projets urbains durables 2010
79
par l’Incubateur, jusque là relativement ignorés, et également emporter les publications
effectuées l’année dernière.
Ces deux réunions ont été formatrices. D’une durée assez courte, il faut savoir
présenter de manière synthétique tout le travail réalisé par les différents stagiaires, sans
« empiéter » sur le temps de parole des collègues. Devant un auditoire composé d’une
trentaine de professionnels, il est indispensable de bien maîtriser son sujet. De plus, certains
thèmes flous et récents, comme les sociotopes ou le chronoaménagement, doivent être
parfaitement définis.
Ces dix mois de stage professionnalisant, à l’ADUAN et à Nompatelize, sont les
premières pierres de l’édifice symbolisant mon parcours professionnel. Les connaissances
nouvellement acquises complètent celles obtenues en faculté de géographie. En retour, j’ai
mis à la disposition de l’ADUAN mes compétences afin de réaliser les différents documents,
ainsi que ma curiosité et mon goût du terrain pour participer à l’observatoire du commerce.
Je suis également fier d’avoir pu apporter à la Communauté Urbaine ma contribution dans
ses projets urbains, le développement durable étant une problématique qui me tient à cœur.
Je quitte le monde universitaire avec un bagage de connaissances et des expériences
nombreuses, avec pour objectif le concours d’attaché territorial.
Conclusion
La ville durable au cœur de la réconciliation Nature/Société 2010
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La ville durable au cœur de la réconciliation Nature/Société 2010
86
TTAABBLLEE DDEESS IILLLLUUSSTTRRAATTIIOONNSS
Figure 1 : L’intercommunalité dans le SCoT Sud Meurthe-et-Moselle ...................................... 9
Figure 2 : Les territoires de projet ............................................................................................. 9
Figure 3 : Localisation du territoire d'étude de l'ADUAN ........................................................ 10
Figure 4 : Dongtan, l’utopie d’une écocité chinoise. Shanghai. ............................................... 17
Figure 5 : Le corridor écologique ............................................................................................. 24
Figure 6 : Les sections voûtées des cours d’eau bruxellois...................................................... 31
Figure 7 : Carte de synthèse du programme de protection environnementale du SCoT rennais .................................................................................................................................................. 33
Figure 8 : Evolution récente de l'étalement urbain à Grenoble et perspectives d'ici 2030 .... 34
Figure 9 : Relation entre vitesse et débit ................................................................................. 35
Figure 10 : Bo01. Malmo Figure 11 : Turning Torso. Malmö ................................. 50
Figure 12 : Beddington Zero Energy fossil Development. Sutton ............................................ 50
Figure 13 : Quartier Vauban. Fribourg ..................................................................................... 50
Figure 14 : Localisation des écoquartiers étudiés dans le dossier ........................................... 53
Figure 15 : La caserne De Bonne à Grenoble ........................................................................... 56
Figure 16 : Localisation de Kronsberg ...................................................................................... 68
Figure 17 : Vue satellite de Kronsberg ..................................................................................... 68
Figure 18 : Appartement du projet Fokus ................................................................................ 70
Figure 19 : Les espaces agricoles ............................................................................................. 71
Figure 20 : Bassin de rétention dans une cour intérieure ....................................................... 72
Figure 21 : Maquette 3D du futur "bois habité" ...................................................................... 74
Figure 22 : Maquette 3D du projet d'Arenc ............................................................................. 74
Figure 23 : Vue aérienne 3D du Carré de Soie ......................................................................... 75
Tableau 1 : Synthèse des caractéristiques des écoquartiers ................................................... 51
Tableau 2 : Répartitions des modes de déplacement de moins de 1 km (centre et périphérie) .................................................................................................................................................. 57
Tableau 3 : Répartitions des modes de déplacement de 1 à 3 km dans les zones « centre » 58
TTAABBLLEE DDEESS MMAATTIIÈÈRREESS
Remerciements .......................................................................................................................... 5
Introduction générale ................................................................................................................ 7
1.1 L’Agence de Développement et d’Urbanisme de l’Aire urbaine Nancéienne ................. 7
1.2 Contexte de l’étude : une prise en compte mondiale pour des actions locales ........... 11
1.3 Du constat au concept ................................................................................................... 13
1.4 La difficile définition de la « ville durable » ................................................................... 14
1.5 Le couple Nature/Société en milieu urbain : du divorce à la réconciliation .................. 17
1.6 Une mission de stage prospective et éclectique ........................................................... 19
Tables 2010
87
La planification : socle de base de la ville durable ................................................................... 22
2.1 La Trame verte et bleue : l’aménagement du territoire au service de la biodiversité .. 23
2.1.1 Le réseau écologique : un concept ancien remis au goût du jour par le développement durable ................................................................................................... 23
2.1.1.1 Genèse du concept ........................................................................................... 23
2.1.1.2 De l’écologique à l’outil de planification urbaine............................................. 24
2.1.1.3 Un nouvel instrument pour la respiration urbaine .......................................... 25
2.1.2 Un objet multiscalaire : de la haie au réseau Natura 2000 ..................................... 25
2.1.3 La prise en compte paysagère pour redynamiser le concept en politique ............. 26
2.1.3.1 Des actions concrètes encore trop rares .......................................................... 26
2.1.3.2 Les moyens d’action ......................................................................................... 27
2.1.4 La Trame verte et bleue du Grenelle ....................................................................... 28
2.1.5 L’exemple de Bruxelles : le « maillage » vert et bleu .............................................. 29
2.1.5.1 Contexte du programme .................................................................................. 29
2.1.5.2 La diversité des actions engagées : entre réglementation et participation citoyenne ...................................................................................................................... 30
2.1.6 La ceinture verte rennaise : deux décennies de travail en amont pour les TVB ..... 32
2.2 Chronoaménagement, boulevard urbain et autoroute apaisée : des concepts innovants pour une mobilité durable .................................................................................................... 34
2.2.1 Contexte : l’impuissance des collectivités face à des enjeux inhérents aux grandes agglomérations ................................................................................................................. 34
2.2.2 La recherche de nouveaux leviers innovants .......................................................... 34
2.2.3 Plus vite, plus loin, mais pas plus de temps gagné .................................................. 35
2.2.4 Le chronoaménagement, nouvel aspect transversal du schéma directeur ............ 36
2.2.5 Une prise en compte du temps dans l’aménagement du territoire ....................... 36
2.2.6 Un atout économique ? ........................................................................................... 37
2.2.7 Vers un label « Autoroute Apaisée » ....................................................................... 37
2.2.8 Requalification de l’A35 à Strasbourg : mutation du foncier et fluidité du trafic ... 38
2.2.9 Les Voies sur Berges à Paris : vers la reconquête des bords de Seine .................... 39
2.3 Traiter autrement l’espace public : les sociotopes ........................................................ 40
Les projet urbains durables : de nouveaux objets pour une nouvelle ville ............................. 43
3.1 Les écoquartiers : un tournant urbanistique indispensable........................................... 43
3.1.1 Éco-quartier ou quartier durable ? La difficile définition du concept ..................... 44
3.1.1.1 Naissance des concepts .................................................................................... 44
3.1.1.2 Un manque de recul évident ............................................................................ 45
3.1.1.3 Une relation différente à l’espace et au temps................................................ 45
3.1.1.4 La nécessaire application du Développement Durable .................................... 46
3.1.1.5 Écoquartier, terme en vogue auprès des politiques et du public .................... 46
3.1.2 Un nouvel objet géographique ................................................................................ 46
3.1.2.1 Le quartier, une notion polysémique ............................................................... 47
3.1.2.2 Entre la ville durable et l’écoconstruction : l’écoquartier ................................ 48
3.1.3 Essai de définition .................................................................................................... 48
3.1.4 Idéal type ................................................................................................................. 49
La ville durable au cœur de la réconciliation Nature/Société 2010
88
3.1.4.1 De l’écovillage au quartier durable type .......................................................... 49
3.1.4.2 Typologie actuelle ............................................................................................ 51
3.1.4.3 Des caractéristiques difficiles à définir ............................................................ 51
3.1.5 Les écoquartiers de centre-ville : études de cas en faveur de Nancy Grand Cœur 52
3.1.5.1 Le retour en grâce de l’échelle du quartier ? ................................................... 53
3.1.5.2 Friches et renouvellement urbain : deux opportunités pour faire la ville durable ......................................................................................................................... 54
3.1.5.3 Mobilité : quels sont les enjeux des cœurs d’agglomération ? ....................... 56
3.1.5.4 Mixité différenciée et densité urbaine : quelles articulations en centre-ville ? ...................................................................................................................................... 58
3.1.5.5 Gouvernance urbaine et durabilité : l’enjeu de la démocratie participative .. 59
3.1.5.6 L’indispensable démarche de durabilité .......................................................... 60
3.1.6 Des enjeux similaires pour des traitements multiples ........................................... 61
3.1.6.1 Le quartier durable : nouvel outil de polarité urbaine .................................... 61
3.1.6.2 La densité urbaine : une des clés de la réussite d’un quartier durable ........... 62
3.1.6.3 Une nouvelle façon de penser la mobilité en centre-ville ............................... 63
3.1.6.4 La mixité urbaine comme hétérogenèse ......................................................... 64
3.2 Les parcs habités, une alternative nouvelle : l’exemple de Kronsberg à Hanovre ........ 66
3.2.1 Kronsberg : un quartier durable entre ville et campagne .................................. 67
3.2.2 Une prise en compte complète du pilier social .................................................. 68
3.2.3 La part belle aux espaces ouverts et paysagers .................................................. 70
3.2.4 Un quartier durablement écologique ................................................................. 71
Conclusion ................................................................................................................................ 76
4.1 Penser la ville durable de demain .................................................................................. 76
4.2 Un stage de fin d’études formateur et enrichissant ...................................................... 77
Bibliographie ............................................................................................................................ 80
Références Internet ............................................................................................................. 83
Table des illustrations .............................................................................................................. 86
Table des matières ................................................................................................................... 86