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RETOUR D’EXPERIENCES SUR LA CONCESSION
POUR IMPLANTER ET EXPLOITER LE GUICHET UNIQUE PORTUAIRE
AUTOMATISE DU PORT AUTONOME DE COTONOU AU BENIN
Auteurs :
Dr. Yann ALIX Dr. Jean GROSDIDIER DE MATONS
Délégué Général Fondation SEFACIL Consultant portuaire International
Le Havre – France Washington D.C. – USA
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RETOUR D’EXPERIENCES SUR LA CONCESSION
POUR IMPLANTER ET EXPLOITER LE GUICHET UNIQUE PORTUAIRE
AUTOMATISE DU PORT AUTONOME DE COTONOU AU BENIN
Résumé :
Le présent article analyse la convention de concession signée entre le groupement Bureau Veritas
BIVAC B.V./SOGET SA et le gouvernement de la République du Bénin pour l’installation, la gestion et
l’exploitation du guichet unique portuaire automatisé du Port de Cotonou. L’originalité de la
démarche tient dans l’adoption de solutions managériales et stratégiques en phase avec les réalités
technologiques et opérationnelles d’un GUP via une concession associant investisseurs
internationaux et parties prenantes béninoises. La création de la Société d’Exploitation et de Gestion
du Guichet Unique est resituée dans le contexte du développement économique et logistique
béninois et met en perspective les opportunités de facilitation du commerce international
subsaharien.
Mots clés : Port de Cotonou – Concession – Guichet Unique Portuaire- Logistique
Abstract :
This paper analyses the concession agreement signed between the Bureau Veritas BIVAC B.V./SOGET
SA association and the Government of the Republic of Benin for the installation, management and
operation of the automated single window system of the port of Cotonou. The originality of this
undertaking resides in the adoption of managerial and strategic solutions in line with the operational
and technological realities of port single window systems through a concession regrouping
international investors as well as stakeholders of Benin. The implementation of the Société
d’exploitation et de gestion du Guichet unique is discussed in the logistical and economic
development context of Benin. It also puts into perspective the opportunities of international trade
facilitation in Sub-Saharan Africa.
Keywords : Port of Cotonou – Concession – Single Window – Logistics
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Tables des Figures
Figure 1 - Trafic total conteneurisé de l’Afrique – 1980 / 2008 En EVP
Figure 2 - Représentation cartographique en anamorphose des manutentions portuaires
conteneurisées mondiales – Année 2008
Figure 3 - Trafics portuaires conteneurisés et principaux corridors logistiques sous-régionaux
en Afrique de l’Ouest (2006 – En EVP)
Figure 4 - Terminal de véhicules usagés au port de Cotonou (2002)
Figure 5 - Distribution par origine première et destination finale sous-régionales des
marchandises portuaires du port de Cotonou (2000-2009 – En tonnes métriques).
Figure 6 - Revenu national brut par habitant (Bénin-Niger-Nigéria-Burkina Faso-Mali 2009 –
US$)
Figure 7 - Analyse des facteurs de temps pour les marchandises en transit vers les pays
enclavés (Ports de Cotonou, Lomé et Téma – Année 2001)
Figure 8 - Cartographie des parties prenantes connectées au guichet unique portuaire
automatisé
Figure 9 - Contrôle public et contrôle privé des terminaux conteneurisés : situation de l’Afrique
(2003 – 2007 et estimation fin 2010 - en % du total)
Figure 10 - Investissements portuaires annoncés depuis 2008 sur la rangée ouest africaine
Dakar-Cotonou (Situation connue fin février 2011)
Figure 11 - Cartographie des principales catégories d’acteurs publics et privés intégrées dans
l’opération et l’exploitation du Guichet Unique Portuaire au Port de Cotonou
Figure 12 - Synthèse des principales fonctionnalités du Guichet Unique Portuaire Automatisé du
Port de Cotonou
Figure 13 - Organisation générale du projet de Guichet Unique
4
Introduction
La gestion et l’exploitation des terminaux conteneurisés dans le monde suivent dorénavant un
modèle quasi universel de type Port Foncier. Dans ce modèle, la responsabilité des autorités
régaliennes en matière d’exploitation s’efface au profit d’intérêts privés dans le cadre de processus
de concessions octroyés pour de longues périodes (de 20 à 35 ans en moyenne). Seuls 17,4% des
terminaux portuaires conteneurisés demeuraient entièrement sous contrôle public en 2008 contre
plus de 56% sous le contrôle des opérateurs globaux de terminaux (Aldrick, 2009). Toutefois, de
fortes disparités régionales persistent puisque le continent africain conserve en 2008 plus de 50% de
terminaux sous contrôle public contre moins de 6% pour les terminaux de l’Europe de l’Ouest et 19%
en Amérique du Nord. Le continent africain conserve davantage de terminaux sous contrôle public
parce que les ports des pays anglophones ont toujours été, dans le passé, gérés en régie (en
particulier par les chemins de fer) alors que les ports des pays francophones ont toujours été gérés
en ports fonciers (Grosdidier de Matons, 2004). Ceci dit, l’uniformisation des modèles de gestion et
d’exploitation ne signifie pas pour autant une homogénéisation des conditions législatives,
réglementaires et juridiques dans le cadre du transfert de compétences entre sphère publique et
entités privées. Dans l’Union Européenne, l’exploitation privée des terminaux à conteneurs est
soumise à des législations et réglementions communautaires et nationales permettant de garantir un
minimum de concurrence. Ces encadrements légaux autorisent souvent de limiter, voire de contrôler
et de sanctionner les abus de positions dominantes sur une place portuaire. Finalement, les
prérogatives administratives peuvent même entretenir une compétitivité inter-terminaux au sein
même d’un établissement portuaire et stimuler une concurrence entre opérateurs privés nationaux
et internationaux (Verhoeven, 2009).
La situation en Afrique subsaharienne demeure toute autre avec le morcellement géopolitique et
administratif historique de l’Afrique post-coloniale (Debrie, 2010). Cette situation héritée a entraîné
l’avènement de portes d’entrées portuaires nationales souvent uniques et monopolistiques. De
Dakar à Conakry en passant par Abidjan, Lomé, Cotonou ou Douala, chaque Etat-Nation dispose de sa
porte d’entrée et de sortie, concentrant ainsi les trafics dans des logiques nationales, voire
nationalistes. Les volumes et valeurs de trafics ne soutiennent pas de véritables concurrences
portuaires intra-nationales hormis quelques exemples notables avec la progression de San Pedro en
Côte d’Ivoire ou la compétition croissante entre Téma et Takoradi au Ghana. De même, il est somme
toute très rare de constater des concurrences inter-terminaux au sein même d’un établissement
portuaire national. Ceci étant dit, les choses évoluent depuis quelques années avec l’élévation
économique du continent en corrélation avec la demande de matières premières et la
consommation locale de produits manufacturés internationaux. La croissance globale de 5,9% du PIB
continental africain sur 2001/2008 aiguise les appétits d’investisseurs internationaux. Les interfaces
portuaires deviennent les cibles privilégiées des IDE et ce d’autant plus que l’obsolescence des
infrastructures résonne trop souvent en écho aux carences importantes en matière de
superstructures portuaires. Après plusieurs décennies de sous investissements portuaires, le XXIème
siècle marque un véritable tournant. De grands projets portuaires fleurissent, de Tanger Med aux
nouveaux terminaux congolais et angolais en passant par les projets insulaires d’éclatement (Guinée
Equatoriale, Sao Tomé, Cap Vert, etc.). Les opérateurs globaux de terminaux comme APM Terminals
ou DP World concurrencent les acteurs historiques de la manutention portuaire (notamment les
groupes français Bolloré ou NCT-Nécotrans – Getma). Les phases de renégociation de contrats de
5
concessions et/ou de positionnement dans les projets d’expansion et/ou de création de nouveaux
terminaux intensifient une concurrence devenue globale.
Au-delà de ces compétitions sur les concessions d’exploitation portuaires, une étape intéressante a
été franchie avec l’engagement du groupement Bureau Veritas BIVAC B.V./SOGET SA dans une
concession pour l’implantation et l’exploitation du guichet unique portuaire au Port Autonome de
Cotonou (PAC). Cette initiative traduit les ambitions sous-régionales de voir accompagner la
croissance des trafics portuaires par de nouvelles pratiques de gestion intégrée. L’installation d’outils
technologiques de pointe marque un tournant essentiel dans la modernisation des échanges
d’informations au sein de toutes les communautés professionnelles (maritime, portuaire, logistique,
administrative, douanière, etc.). Les solutions « software » accompagnent dorénavant les ambitions
« hardware » de mises en chantier de nouveaux terminaux physiques. Surtout, ces engagements
partenariaux innovants déplacent le curseur de la compétitivité des services de transport
subsahariens (Ollivier, 2008). La mise en place d’un guichet unique portuaire automatisé par
l’entremise d’une concession permet d’améliorer les performances économiques et logistiques de
l’ensemble des pratiques de transport sur un corridor donné. Dans l’attente de voir aboutir les
investissements de 250 milliards de dollars pour construire un réseau de transport continental
(Kiggundu, 2010), la fluidification et l’assainissement des pratiques via l’échange sécurisé
d’informations soutient une véritable révolution communautaire. Les guichets uniques portuaires
automatisés apparaissent comme une solution technologique souple pour faciliter et accroître les
échanges commerciaux (Ollivier et Alix, 2010). Il s’avère alors d’autant plus intéressant d’en analyser
les formes juridiques d’implantation et d’exploitation. Le présent article se propose de commenter
les conditions générales de l’accord historique de concession signé entre les parties prenantes à la fin
de l’année 2010 à Cotonou en République du Bénin. La constitution de la Société d’Exploitation et de
Gestion du Guichet Unique est resituée dans le contexte du développement économique et logistique
subsaharien.
Après avoir recadré l’environnement concurrentiel dans lequel s’inscrit le port autonome de
Cotonou, une deuxième partie définit le guichet unique portuaire automatisé et ses principaux
enjeux économiques, managériaux et financiers dans le cadre de l’implantation en République du
Bénin. Une troisième partie expose les originalités du modèle de concession retenu par les parties
prenantes, ce qui permet d’ouvrir le propos au-delà des termes purement juridiques. L’auteur
analyse les modalités de gouvernance ainsi les modalités opérationnelles et stratégiques retenues
par les parties prenantes au sein de la convention de concession. La présente contribution se conclut
sur les perspectives concurrentielles du développement sous-régional de guichets uniques portuaires
réunis dans le cadre d’une nouvelle association subsaharienne à vocation collaborative, garante de la
continuité d’un service public portuaire.
6
1- Trafics portuaires sous-régionaux et positionnement concurrentiel du port de Cotonou
Afin de cerner l’environnement économique sous-régional dans lequel s’inscrit le port de
Cotonou, il n’est pas inutile de rappeler quelques données macro-économiques. Le PIB africain pèse
1 500 milliards de dollars en 2008, soit l’équivalent du Canada ou du Brésil. Le PIB de l’Afrique
subsaharienne représente à lui seul 1 000 milliards de dollars avec un taux de croissance annuel
supérieur à 5% entre 2000 et 2008. Sur le plan portuaire, une croissance quasi exponentielle des
trafics conteneurisés est constatée depuis le milieu des années 1990 dans les ports du continent
(Figure 1). Le trafic portuaire conteneurisé africain représente un peu plus de 20 millions de boîtes fin
2009 soit l’équivalent des manutentions réalisées sur les terminaux du port de Hong Kong. Et même
si le continent africain pèse toujours moins de 3% du grand total mondial conteneurisé (Figure 2) ; les
tendances constatées ces dernières années traduisent une meilleure intégration des économies
africaines dans les circuits logistiques internationaux (Alix et Pelletier, 2009).
Figure 1 : Trafic total conteneurisé de l’Afrique – 1980 / 2008 En EVP
Source : Drewry Consultant 2009
Figure 2 : Représentation cartographique en anamorphose des manutentions portuaires
conteneurisées mondiales – Année 2008
0
2 000 000
4 000 000
6 000 000
8 000 000
10 000 000
12 000 000
14 000 000
16 000 000
18 000 000
1980
1982
1984
1986
1988
1990
1992
1994
1996
1998
2000
2002
2004
2006
Gatew ay Transhipment
Source : WorldMapper 2011Source : WorldMapper 2011
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Le développement des trafics conteneurisés transbordés sur les extrémités méditerranéennes et sud-
africaines du continent manifeste une intensification des connectivités maritimes. Des unités
cellulaires de plus de 2,000 EVP couvrent en direct plus de touchés portuaires dans un
environnement concurrentiel stimulé par une croissance importante des échanges sino-africains. Sur
la rangée portuaire ouest-africaine depuis Dakar au Sénégal à l’ensemble Lagos/Apapa au Nigéria, un
total d’environ 2,5 millions de boîtes a été manutentionné en 2006, soit une augmentation de 50%
en moins de dix ans (Figure 3). Les ports dominants sous-régionaux demeurent Lagos/Apapa avec
plus de 850 000 EVP malgré d’importantes contraintes opérationnelles, sécuritaires et logistiques. Ils
desservent en priorité la région de la capitale économique du pays avec plus de 12 millions de
consommateurs potentiels dans un rayon de moins de 100 kilomètres. La remontée logistique
jusqu’aux grands ensembles urbains d’Abuja et de Koné entre en concurrence avec les pénétrantes
frontalières empruntant le corridor de Cotonou.
Figure 3 – Trafics portuaires conteneurisés et principaux corridors logistiques sous-régionaux
en Afrique de l’Ouest (2006 – En EVP)
Source : Autorités portuaires – Compilation Yann Alix 2011
Les deux autres grands ports constituent également des portes d’entrées portuaires pour deux
importantes économies sous-régionales : Abidjan pour la Côte d’Ivoire et Dakar pour le Sénégal. Ces
deux complexes profitent de services portuaires de qualité avec des cadences de manutention
supérieures à la moyenne sous-régionale. Ils demeurent les principaux terminaux où s’articulent des
prestations de transbordement et de massification que complète l’apport des trafics enclavés. Le
0 250 500
kilomètres
Freetown
Conakry
Dakar
Banjul
Monrovia
Abidjan Téma
Lomé
Cotonou
San Pedro
Lagos/
Apapa
CAMEROUN
NIGÉRIA
BÉNIN
GHANA
LIBÉRIA
SIERRALÉONE
GUINÉE
GUINÉEBISSAU
GAMBIE
SÉNÉGAL
MAURITANIE
MALI BURKINA FASO
NIGER
Océan Atlantique
Golfe de Guinée
Bamako
Ouagadougou
Niamey
Takoradi
CÔTE-D’IVOIRE TOGO
Vers N’Djamena
600 000
400 000
200 000
40 000
Trafic conteneurisé en EVP
Bamako : capitale politique des états enclavés
Principaux corridors de transport
Corridors intérieurs enclavés Yann Alix 2011
0 250 500
kilomètres
Freetown
Conakry
Dakar
Banjul
Monrovia
Abidjan Téma
Lomé
Cotonou
San Pedro
Lagos/
Apapa
CAMEROUN
NIGÉRIA
BÉNIN
GHANA
LIBÉRIA
SIERRALÉONE
GUINÉE
GUINÉEBISSAU
GAMBIE
SÉNÉGAL
MAURITANIE
MALI BURKINA FASO
NIGER
Océan Atlantique
Golfe de Guinée
Bamako
Ouagadougou
Niamey
Takoradi
CÔTE-D’IVOIRE TOGO
Vers N’Djamena
600 000
400 000
200 000
40 000
Trafic conteneurisé en EVP
Bamako : capitale politique des états enclavés
Principaux corridors de transport
Corridors intérieurs enclavés Yann Alix 2011
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port de Dakar se nourrit essentiellement de l’arrière-pays malien avec un corridor dynamique qui
relie Bamako alors qu’Abidjan profite des connexions routière et ferroviaire pour demeurer le plus
important port de l’économie burkinabèse. Cette hégémonie sous-régionale est contestée depuis la
fin des années 1990 par la croissance soutenue de Téma, plus important port du Ghana. Au-delà de
la desserte directe d’Accra, Téma a profité de la crise ivoirienne et du blocage logistique au nord de
Bouaké pour consolider des trafics conteneurisés depuis les pays enclavés subsahariens. Dorénavant
avec 400,000 EVP, il s’impose comme une alternative portuaire et logistique sous régionale en
concurrence directe avec Abidjan à l’ouest et l’ensemble Lomé/Cotonou à l’est. Cette exacerbation
de la concurrence entre corridors et la multiplicité des options logistiques intégrées pourraient
réduire, à terme, les surcoûts imputables au transport (Pelletier et Alix, 2008). En Afrique
subsaharienne, les coûts de transport représentent entre 15 et 18% de la valeur totale des denrées
importées contre 8% environ pour les autres territoires en développement et moins de 4% pour les
pays industrialisés. Dans le cas des économies enclavées subsahariennes, parmi les moins intégrées
dans les chaînes de valeur internationales, ces coûts de transport peuvent atteindre 40%,
anéantissant compétitivité des produits exportés et réduisant d’autant la capacité d’achat local
(Raballand et alli, 2008 ; Teravaninthorn et Raballand, 2009). Les préconisations du programme
Almaty établies dès 2003 cadrent les enjeux de coopération en matière de transport pour réduire la
pression des coûts inhérents aux déplacements des marchandises vers les pays enclavés (APA, 2003).
C’est dans ce contexte économique et logistique rapidement brossé que le port autonome de
Cotonou demeure une entité essentielle, tant pour l’économie béninoise que pour les populations
enclavées subsahariennes. Cotonou concentre 90% des importations nationales et 60% des revenus
de l’état avec un trafic total d’environ de 6,7 millions de tonnes métriques en 2009. Le déséquilibre
chronique des flux non énergétiques qui handicape tous les ports de la sous-région demeure une
réalité pour Cotonou. Seules 720 000 tonnes de trafic furent exportées contre quasiment 6 millions
importées en 2009. Les noix de cajou devancent les produits forestiers et le coton dans le sens des
exportations alors que le port de Cotonou demeure avec 310 000 unités une importante plaque
tournante de l’importation de véhicules usagés en provenance de l’Europe de l’Ouest (Figure 4).
Figure 4 : Terminal de véhicules usagés au port de Cotonou (2002)
Source : Port Autonome de Cotonou
9
Au cours de la décennie 2000, les produits céréaliers et alimentaires n’ont cessé de croitre pour
atteindre plus de 2 millions de tonnes métriques en 2008 et 2009. Cette tendance illustre le rôle
croissant des économies enclavées subsahariennes dans l’activité portuaire béninoise. Alors que les
trafics en transit représentaient 27,5% du total manutentionné à Cotonou en 2000, ce sont
dorénavant une tonne sur deux qui concerne des origines premières ou des destinations finales non
béninoises. Sur la dernière décennie, l’on constate l’interdépendance croissante du port de Cotonou
à l’égard de ses voisins, aux premiers rangs desquels figure le Niger, un des pays les pauvres du
monde et le Nigéria, le pays le plus peuplé du continent (Figure 5).
Figure 5 : Distribution par origine première et destination finale sous-régionales des marchandises
portuaires du port de Cotonou (2000-2009 – En tonnes métriques).
0
500 000
1 000 000
1 500 000
2 000 000
2 500 000
3 000 000
3 500 000
4 000 000
2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009
BENIN NIGER NIGERIA MALI BURKINA FASO TOGO AUTRES
Source : Port autonome de Cotonou 2011
La quote-part du Niger ne cesse de croitre sur le dernier quinquennat avec des volumes supérieurs à
2 millions de tonnes depuis 2008. Le profil de croissance des trafics béninois et nigériens se calque
fidèlement l’un sur l’autre depuis le milieu de la décennie. Le port de Cotonou profite de la relative
fiabilité logistique du corridor national de transport qui permet de connecter Niamey après
1 056 kilomètres de route (contre 1 136 pour Lomé, 1 500 pour Téma et 1 650 pour Abidjan). Second
partenaire, le géant Nigérian avec les régions de l’Ouest qui profite d’une porosité fortement teintée
de corruption tout le long de la frontière terrestre entre les deux pays. Une véritable économie
parallèle au Bénin et au Nigéria s’est instituée en réseaux organisés pour acheminer notamment les
automobiles d’occasion, les pièces détachées… et le carburant. Le port de Cotonou « profite » de
cette manne avec des trafics qui ont atteint officiellement 836 000 tonnes en 2008 et 650 000 en
2009.
Enfin, les marchés maliens et burkinabés, malgré leur éloignement géographique et logistique, n’en
demeurent pas moins des potentialités de plus en plus significatives pour les autorités portuaires de
Cotonou. Les deux grandes villes de Bobo Dioulasso et Ouagadougou au Burkina constituent la
quintessence des 310 000 tonnes qui ont transité par Cotonou en 2009. Ce tonnage a triplé depuis
2005 et illustre en quelque sorte l’intensité des relations de concurrence qui anime depuis longtemps
10
les portes maritimes sous-régionales (Charlier, 1995). Le recouvrement des aires de recrutement de
clientèles enclavées implique une grande versatilité des routes et choix logistiques. Les autorités
portuaires de Cotonou, comme tous leurs homologues, cherchent à fidéliser ces marchés intérieurs
non-captifs. Même tendance et même analyse pour les marchés orientaux du Mali qui ont dépassé
les 140 000 tonnes en 2009 contre 42 000 en 2005 et seulement 15 000 en 2000.
Au regard de la représentation graphique illustrant le revenu national brut par habitant des
principaux pays partenaires du port (Figure 6), force est de constater que les potentialités du Nigéria
et du Burkina écrasent quelque peu celles du Niger.
Figure 6 : Revenu national brut par habitant (Bénin-Niger-Nigéria-Burkina Faso-Mali 2009 – US$)
Source : Yann Alix, 2011 d’après les données de la Banque Mondiale
Ces potentialités de consommation s’avèrent fondamentales dans le cadre des grands programmes
d’investissements structurels actuellement en cours de déploiement au Bénin. La compétitivité
portuaire de Cotonou repose sur l’attractivité du port mais aussi et surtout sur la différenciation
qualitative des solutions logistiques intégrées pour desservir des espaces économiques aux frontières
du Bénin. A l’instar des déclarations réalisées par Vincent Bolloré suite au gain de la concession
d’exploitation du futur terminal à conteneurs en 2009, le développement du port de Cotonou se
décline selon une vision en triptyque :
- consolider la position concurrentielle du port à l’égard de ses voisins togolais et surtout
nigérians pour absorber la croissance projetée des trafics du Golfe de Guinée ;
- renforcer sa vocation de port de transit pour la desserte des marchés enclavés du Niger et
étendre son aire d’influence sur les marchés burkinabé, malien et tchadien ; et,
- entretenir une meilleure performance logistique sur les chaînes de transport sous-régionales
avec l’instauration de plates-formes relais intérieures à Parakou, Sèmè, voire Dosso.
Avec ses investissements, le groupe français table sur un trafic d’un million de boîtes à l’horizon
2030. Pour ce faire, reste à résoudre quelques-uns des maux du port de Cotonou qui furent
notablement relevés par une étude réalisée en 2001 suite à l’administration de questionnaires sur
11
tous les corps de métiers de la communauté portuaire sous-régionale (Vissiennon, 2002). L’analyse
prenait pour révélateur la variable temps dans la gestion des navires et des marchandises pour le
corridor de Cotonou et les solutions logistiques concurrentes de Lomé et de Téma. La synthèse
graphique ci-après met en perspective l’importance des durées, du temps d’attente à l’ancre des
navires aux traitements des marchandises sur l’interface portuaire ainsi que les retards dans les
temps de transit terrestres jusqu’aux postes frontaliers des pays enclavés (Figure 7).
Figure 7 : Analyse des facteurs de temps pour les marchandises en transit vers les pays enclavés
(Ports de Cotonou, Lomé et Téma – Année 2001)
Dans tous les cas de figure, le port de Cotonou demeurait à cette époque en deçà des résultats
globaux enregistrés par ses deux concurrents portuaires les plus directs. Malgré une politique
tarifaire agressive et une approche marketing innovante à destination des pays enclavés, le port de
Cotonou pointait déjà à l’époque le manque d’efficacité dans les services offerts au navire et à la
marchandise. Les lacunes administratives et douanières béninoises se cumulaient alors avec le
manque chronique de coordination entre tous les acteurs de la communauté portuaire. L’un des
griefs relevant des retours d’expériences des clients était la lourdeur et la multiplicité des procédures
pour sortir les marchandises de l’enceinte portuaire. La simplification par une intégration accrue des
procédures était déjà prônée en 2001 pour réduire les temps d’entreposage et les surtaxes qui
handicapaient la compétitivité du port de Cotonou (Vissiennon et Alix, 2003). Il faut rappeler que dès
1985, un Centre Commun de Facturation (CCF) avait été mis en place par les autorités portuaires afin
de regrouper physiquement l’ensemble des acteurs impliqués dans la gestion des documents
nécessaires à l’enlèvement des marchandises. Toutefois, cette action ne réglait pas le manque
Analyse des facteurs de temps pour le transfert des marchandises en transit vers les pays enclavés à partir des ports de Cotonou, Lomé et Téma (année 2001)
Source : Appolinaire Vissiennon d’après les données des autorités portuaires - Conception et réalisation : Yann Alix – Innovation maritime
Équivalent 10 heures
Temps d’attente du navire en rade
Temps de séjour à quai incluant la manutention
Temps de l’entreposage au port incluant les formalités administratives
Temps de l’entreposage au port incluant les formalités douanières
Temps de transit du post acheminement routier sur les corridors terrestres
Légende
Porte-conteneurs Cotonou
Lomé
Téma
Cargo conventionnel
Cotonou
Lomé
Téma
Navires rouliers Cotonou
Lomé
Téma
Vracs solides
Cotonou
Lomé
Téma
Vracs Liquides Cotonou
Lomé
Téma*
*Les données pour Téma ne sont pas toutes disponibles
Analyse des facteurs de temps pour le transfert des marchandises en transit vers les pays enclavés à partir des ports de Cotonou, Lomé et Téma (année 2001)
Source : Appolinaire Vissiennon d’après les données des autorités portuaires - Conception et réalisation : Yann Alix – Innovation maritime Source : Appolinaire Vissiennon d’après les données des autorités portuaires - Conception et réalisation : Yann Alix – Innovation maritime
Équivalent 10 heures
Temps d’attente du navire en rade
Temps de séjour à quai incluant la manutention
Temps de l’entreposage au port incluant les formalités administratives
Temps de l’entreposage au port incluant les formalités douanières
Temps de transit du post acheminement routier sur les corridors terrestres
Légende
Porte-conteneurs Cotonou
Lomé
Téma
Cargo conventionnel
Cotonou
Lomé
Téma
Navires rouliers Cotonou
Lomé
Téma
Vracs solides
Cotonou
Lomé
Téma
Vracs Liquides Cotonou
Lomé
Téma*
*Les données pour Téma ne sont pas toutes disponibles
Équivalent 10 heures
Temps d’attente du navire en rade
Temps de séjour à quai incluant la manutention
Temps de l’entreposage au port incluant les formalités administratives
Temps de l’entreposage au port incluant les formalités douanières
Temps de transit du post acheminement routier sur les corridors terrestres
Légende Équivalent 10 heures
Temps d’attente du navire en rade
Temps de séjour à quai incluant la manutention
Temps de l’entreposage au port incluant les formalités administratives
Temps de l’entreposage au port incluant les formalités douanières
Temps de transit du post acheminement routier sur les corridors terrestres
Légende
Porte-conteneurs Cotonou
Lomé
Téma
Cargo conventionnel
Cotonou
Lomé
Téma
Navires rouliers Cotonou
Lomé
Téma
Vracs solides
Cotonou
Lomé
Téma
Vracs Liquides Cotonou
Lomé
Téma*
*Les données pour Téma ne sont pas toutes disponibles
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d’intégration informatisée qui aurait permis de réduire la démultiplication des procédures manuelles.
Les transactions ont vite débordé le centre lui-même, ne réglant ni les malversations ni les erreurs
d’écriture dans la gestion des documents.
En 1991, le port de Cotonou demeurait un pionner avec le lancement du programme Escale qui avait
pour ambition de renforcer la compétitivité de toute la chaîne logistique portuaire béninoise via une
informatisation harmonisée. Escale devait permettre une émission automatisée d’une facturation
complète des services, depuis le navire jusqu’à l’enlèvement des marchandises de l’enceinte. Cette
tentative de modernisation, et toutes les tentatives subséquentes, ont échoué notamment par le
manque d’adhésion et de coopération de communautés très puissantes au sein du port de Cotonou.
En 2010, la situation a évolué grâce aux efforts et investissements de toute la communauté portuaire
et logistique de Cotonou, notamment en matière de sécurisation des convois et d’organisation de
l’arrière-pays béninois (Alix, 2009). Toutefois, des données consolidées par l’opérateur maritime
Delmas fin 2009 mettaient une nouvelle fois en avant le fait que le corridor de transport béninois
demeurait le plus « long » pour les temps d’acheminement vers les pays enclavés (Hartmann, 2010).
Le temps de transit total atteignait 23 jours pour rejoindre Niamey contre 22 jours pour la solution
de Téma éloignée pourtant de 280 kilomètres supplémentaires. Vis-à-vis du voisin togolais, la
situation demeure préoccupante car le port de Lomé présente en 2009 des temps de transit deux
jours plus courts pour le passage portuaire et trois jours pour l’acheminement terrestre (malgré une
distance supérieure à parcourir de 140 kilomètres). Pour Ouagadougou, la solution du corridor
béninois prend 5 jours supplémentaires par rapport à Téma (même distance terrestre à parcourir) et
9 jours ( !) vis-à-vis de Lomé (qui n’est « que » 110 kilomètres plus courts que la route par le Bénin).
Ces différentiels expliquent en grande partie pourquoi Cotonou ne se positionne pas de manière plus
prégnante sur le sud-est du Burkina Faso. Même s’il convient de considérer l’obsolescence
généralisée des infrastructures routières et les usages cartellisés du transport routier subsaharien,
cela n’explique pas le fait que le port de Cotonou subit toujours des temps de passage portuaire
anormalement élevés. Or, comme le rappelle justement Olivier Hartmann :
« Pour servir efficacement de support aux échanges internationaux, le secteur des transports
doit être performant sur trois niveaux superposés et interdépendants : les infrastructures, les
services de transport et la logistique (ou l’organisation du transport). »
Cette organisation du transport englobée sous le terme très général de « logistique » inclut le
traitement souvent complexe et corrompu des informations liées aux marchandises. Les retards
totaux enregistrés découlent tout autant de l’inefficacité du transport physique des produits que de
l’inefficience du traitement informatique des informations administratives et douanières. Or, sans
une accélération fiabilisée du traitement modernisée des informations, inutile de croire que la mise à
disposition physique des marchandises sur les corridors ne s’améliore !
Les carences des systèmes informatiques intégratifs continuent d’amputer la fluidité logistique des
trafics avec des astreintes administratives et douanières très dommageables pour la compétitivité
sous-régionale de l’ensemble des acteurs économiques béninois (Traoré, 2007). Les coûts de
transactions s’accroissent en corrélation avec les affres d’une bureaucratie totalement déconnectée
de la réalité logistique et commerciale moderne. La nécessaire fluidification des procédures
administratives s’avère impérieuse pour réduire ces coûts de transaction. Dit autrement, c’est la
réduction drastique des temps inutiles passés dans les tracasseries administratives qui profiterait à
13
l’ensemble des acteurs économiques et à la facilitation générale du commerce. Il n’est plus à prouver
les interrelations dynamiques entre transport, facilitation du commerce et amélioration générale des
conditions économiques sous-régionales (CNUCED, 2009b ; Pedersen, 2001 ; Kuggundu, 2010 ; Maeti,
2008). Ceci dit, il reste complexe sur le plan méthodologique d’isoler l’importance et le rôle de
l’informatisation des services automatisés dans l’ensemble. En 2007, dans un rapport sur
l’amélioration des conditions portuaires et maritimes en Afrique de l’Ouest et du Centre, les experts
de la Banque Mondiale invoquaient en première recommandation :
« The main objectives of upcoming reforms for Governments should be aimed at:
facilitating procedures and controls in ports, such as procedures affecting turnaround time,
dwell time and handling costs, otherwise port attractiveness is seriously limited.
The introduction of a community-based system may help in this regard”.
(Pálsson, G., Harding, A., Raballand, G., 2007)
En 2009, une énième étude indépendante recensait de nouveau les « litiges » exprimés par les
usagers du port. 69% des usagers et opérateurs du port estimait le niveau de corruption trop élevés,
expliquant que toutes les étapes de la chaîne des services du port sont concernées. Il en ressort un
niveau de satisfaction très faible puisque 54% des personnes enquêtées demeurent insatisfaits. Les
experts concluent en guise de solution corrective :
« Développer et mettre en place un Système Informatisé de gestion des activités au sein du
Port qui soit intégré et étendu à l’ensemble des activités, notamment celles de gestion
physique des flux et espaces à l’intérieur de l’enceinte portuaire.
- Mettre en place un système de gestion des Réclamations client, qui soit un outil de mesure
de la satisfaction des clients (les opérateurs et usagers) et d’amélioration des prestations du
Port ». (MCA Bénin, 2009).
Ces éléments relevant de travaux d’enquêtes et d’analyses « de terrain » corroborent, s’il le fallait
encore, les positions d’un panel d’experts de la CNUCED qui établissaient clairement un corolaire
entre un objectif (Faciliter le commerce), des moyens (Les partenariats public-privé dans le domaine
des infrastructures de transport) et des outils (Des solutions technologiques adaptées comme les
systèmes informatiques communautaires intégrés). (CNUCED, 2009a).
Bien sûr, ces éléments ont largement été documentés, identifiant par exemple l’analyse des cadres
juridiques comme des pré requis indispensables à toutes réformes d’envergure (Grosdidier de
Matons, 1999 ; Arvis et alli, 2007 ; Guiziou, 2010 ). Le manque de coordination et d’harmonisation
ampute toute opportunité d’intégration sous-régionale effective. La libre circulation physique des
échanges sous-régionaux ne pourra voir le jour que par une ré-écriture en profondeur des
environnements législatifs et réglementaires. Les contraintes inhérentes à la réforme d’appareils
nationaux comme les Douanes ont aussi été documentées pour justifier les manquements dans le
changement des pratiques (Rizet, 1997 ; Djimba, 2001 ; CNUCED, 2009b ; ECA, 2010).
Toutefois, avec l’amélioration technologique des systèmes informatiques communautaires et
l’ensemble des accompagnements managériaux, force est de penser que les outils sont en passe de
permettre aux moyens d’achever l’objectif.
14
2- Guichet unique portuaire automatisé (GUP@)
Il est somme toute intéressant d’aborder la notion de guichet unique portuaire automatisé en
définissant finalement les clés de succès de son implantation. Selon la CNUCED, un guichet unique
utile pour la facilitation du commerce repose sur la somme combinée des facteurs suivants :
- la volonté et l’appui politiques ;
- le soutien de toutes les parties prenantes et la mise en place d’un mécanisme de
coordination approprié ;
- la définition de la structure organisationnelle de la personne morale et des partenaires
stratégiques ;
- la définition du modèle commercial le plus approprié ;
- la sensibilisation du public ;
- l’adaptation du cadre juridique ;
- la réalisation d’une étude technique et d’une étude de faisabilité qui examinent, entre autres
choses, la question de l’harmonisation des données et contiennent une analyse des
procédures et de l’amélioration de l’infrastructure informatique ; et,
- la planification de projets pilotes en coopération avec les organisations internationales
CNUCED, 2009b).
Et de poser la question de savoir pourquoi cette somme de conditions préalables s’avère
indispensable pour assurer la viabilité de la mission d’un guichet unique portuaire ? La réponse tient
dans l’analyse de la structure organisationnelle que sous-tend l’implantation d’un guichet unique
portuaire automatisé (GUP@) au sein d’une communauté portuaire et logistique. Cette analyse doit
aussi prendre en compte nécessairement les difficultés inhérentes aux réalités économiques,
financières, organisationnelles… et culturelles d’un pays en développement. La maturité des
pratiques et l’adhésion aux nouvelles technologies de l’information présentent des niveaux très
hétérogènes au sein même d’un corps de métiers. Pour exemple, les grandes agences de transit
internationales déploient souvent des solutions combinatoires entre leurs systèmes informatiques
internationaux performants et les solutions possibles dans le contexte d’une nation en
développement. En conséquence de quoi, un GUP@ automatise, optimise, orchestre et sécurise les
processus métier de la chaîne logistique entre tous les acteurs publics et privés de la communauté
soit souvent des centaines d’opérateurs au sein de la chaîne logistique. (Figure 8).
Dans le recensement réalisé par le MCA Bénin, la mise en place du GUP@ à Cotonou concernerait
dans le secteur privé 2 577 entités réparties en 89 opérateurs (ensemble des Consignataires,
Commissionnaires Agréés en Douanes et entreprises installées au port) et 2.488 usagers
(Importateurs et/ou Exportateurs).
15
Figure 8 : Cartographie des parties prenantes connectées au guichet unique portuaire automatisé
Source : O. Jean Degauchy – SOGET SA 2011
Le GUP@ actuel dépasse largement les délimitations fonctionnelles et opérationnelles classiques de
la communauté portuaire de Cotonou. Il intègre nécessairement tous les acteurs de la chaine
logistique internationale, depuis l’expéditeur jusqu’à la destination finale. Nous reviendrons plus en
amont sur cette notion, notamment dans l’optimisation des services de suivi des marchandises et des
performances logistiques sur les corridors intérieurs, incluant les trafics en provenance ou à
destination des pays enclavés ou en transit.
Le GUP@ permet une modernisation des pratiques et des opérations par une dématérialisation des
documents. Cela engendre une traçabilité complète sur la chaîne logistique de transport avec un
suivi en temps réel de toutes les opérations référencées dans le système intégré. Tout l’arsenal
réglementaire sur les plans administratif et douanier est assuré de manière automatique. La
centralisation et la consolidation des données permettent la génération d’historiques. Surtout,
l’intégration des donnés attendues permet une comparaison systématique avec les donnés réelles
enregistrées in fine, permettant ainsi de relever les différences, voire les incohérences. Bien sûr, le
tout est assuré dans une totale confidentialité par une sécurisation optimale des données transigées
au sein du système. Un GUP@ élimine la multiplication des échanges et la duplication inutile des
informations, réduisant ainsi les pertes de temps, les pertes de données et les erreurs de saisies. Le
GUP@ soutient :
� L’élimination des processus inefficaces et ainsi améliore la productivité des
prestataires de services logistiques en général de 50% (selon des études internes
Exportateur
Importateur
Vérificateur
Transporteur
Import
Transporteur
ExportDépôt Centre
d’empotage
Centre de
dépotage
Terminal
Groupeur
Déclarant
Transitaire
Agence
gouvernementale
Douane
Autorité portuaireLigne maritime
Agent Maritime
Guichet
Unique
Portuaire
Automatisé
GUPA
Exportateur
Importateur
Vérificateur
Transporteur
Import
Transporteur
ExportDépôt Centre
d’empotage
Centre de
dépotage
Terminal
Groupeur
Déclarant
Transitaire
Agence
gouvernementale
Douane
Autorité portuaireLigne maritime
Agent Maritime
Guichet
Unique
Portuaire
Automatisé
GUPA
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réalisées par les équipes de la SOGET SA dans le cadre d’implantation et de suivi des
procédures du GUP@ en France et à l’étranger).
� La rationalisation des procédures douanières en conformité avec le cadre de normes
SAFE de l’Organisation Mondiale des Douanes pour faciliter et sécuriser le commerce
mondial
� La réduction des temps de stationnement et de transit
� Un accès facilité aux marchés européens et nord-américains en fournissant aux
douanes destinataires des données électroniques prévisionnelles sur la marchandise
Sur le plan opérationnel et afin de caractériser l’apport d’un GUP@, le tableau ci-après reprend les
principales fonctionnalités pour les Imports/Exports.
IMPORT EXPORT
� Soumission du manifeste
� Déchargement du conteneur
� Déclaration et formalités en douane
� Bon à délivrer commercial
� Identification du transporteur
� Autorisation de sortie du conteneur du
terminal
� Sortie du conteneur pour mise à la
consommation
� Sortie du conteneur pour transfert et
dépotage sous douanes
� Traitement du Dépotage
� Liste prévisionnelle et définitive de dépotage
� Opérations de dépotage
� Dédouanement des marchandises dépotées
� Suivi du conteneur et des lots dépotés
� Arrivée du conteneur chez l’importateur ou
au CFS
� Départ du conteneur de chez l’importateur
ou du CFS
� Retour du conteneur sur le dépôt de
conteneurs vides
� Confirmation de booking
� Mise à disposition du conteneur vide
� Sortie du conteneur vide du dépôt
� Entrée du conteneur vide chez l’exportateur
� Sortie du conteneur plein de chez
l’exportateur
� Annonce du conteneur au terminal
� Déclaration en douane
� Autorisations douanières de déplacement
� Autorisation de chargement Agent
� Autorisation de chargement Transitaire
� Empotage sous douane
� Annonce et entrée des marchandises en
magasin
� Dédouanement
� Liste prévisionnelle d’empotage et transfert
vers le terminal
� Opérations d’empotage
� Entrée du conteneur/marchandise sur le
terminal
� Embarquement du conteneur/marchandise
Source : O. Jean Degauchy – SOGET SA 2010
17
A la lumières de toutes les fonctionnalités énoncées, Il apparaît toutefois important de rappeler
qu’un GUP@ se préoccupe aussi des services de transbordement et qu’il permet de conserver une
trace des historiques à des fins de compilations statistiques :
� Procédure logistique et douanière de transbordement
� Escales
� Suivi en temps réel de toutes les marchandises
� Statistiques
� Etats de suivi par profession
� Inventaires
Toute cette structuration de l’information, de surcroît dématérialisée, nécessite une démarche
extrêmement précise et rigoureuse, en particulier dans des environnements pas nécessairement
enclins à des changements de pratiques aussi drastiques. C’est pourquoi il est pertinent de relever la
démarche managériale mise en place par l’opérateur SOGET SA au moment d’installer un GUP@.
Cette démarche rappelle les prérogatives relevées par les experts de la CNUCED mais va plus loin
dans l’accompagnement partenarial avec les parties prenantes locales.
1- Trouver un porteur officiel et reconnu de la démarche en local
a. Directeur Général de l’Autorité Portuaire ou le Directeur Général des Douanes
o Président de la Communauté Portuaire
o Président de l’association des Transitaires Commissionnaires de Transport ou le Président de l’association des Importateurs / Exportateurs
2- Réunir toutes les parties prenantes (voir figure 7)
3- Optimiser les processus
a. Collaborer avec chaque acteur représentatif de la communauté
b. Identifier la valeur ajoutée créée par chaque acteur de la chaîne logistique
c. Reformuler tous les processus et procédures métier
d. Identifier les besoins spécifiques
e. Evaluer l’optimisation des processus
f. Réviser les outils tels que ‘Dwell Time’, ‘Logistics Performance Index’, ‘Doing Business’
g. Evaluer les bénéfices
4- Créer un partenariat avec les services douaniers
a. Adopter et Appliquer le cadre de normes SAFE de l’Organisation Mondiale des
Douanes
18
b. Amener progressivement (en fonction de la situation économique et logistique
locales) les acteurs de la chaîne logistique à obtenir la certification “Opérateur
Economique Agréé” afin de faciliter le commerce avec l’Europe communautaire
c. Sensibiliser la douane aux bienfondés d’un GUPA et aux opportunités pour les
services de douanes de se focaliser sur les marchandises à risque élevé
5- Analyser les cadres légaux
a. Réglementation douanière
b. Réglementation maritime
c. Loi relative à la protection des données
d. Concession relative au futur opérateur du guichet unique portuaire
6- Mettre en en place une commission Procédures
a. Animation de groupes de travail réunissant les catégories d’acteurs les plus
importantes comme la Douane, les agences gouvernementales, les agents maritimes,
les exploitants de terminaux, les transitaires, les services portuaires, les déclarants
en douane, les « stockeurs » - entrepôts, CFS et dépôts de conteneurs
7- Mettre en place une commission Formation ce qui nécessite d’impliquer un maximum
d’acteurs en inventoriant toutes les entreprises par type d’acteurs (de même que les
utilisateurs au sein des entreprises). Des partenariats avec des institutions de la formation
(Université, Chambre de Commerce, école de commerce, etc.) impliquent une évaluation des
formateurs tout en recherchant des financements publics pour assurer cette très importante
étape.
8- Gérer le changement, ce qui exige l’implication motivée de toutes et tous. Une stratégie de
gestion du changement doit être formalisée et portée par des leaders qui se font les porteurs
et défenseurs de ces nouvelles pratiques. Un plan de communication efficace sensibilise
toutes les catégories d’acteurs (en portant attention à leur niveau de responsabilité
hiérarchique dans la culture du changement). Le développement des compétences et des
savoirs s’avère essentiel dans l’intégration positive d’un GUP@, autant pour aider les
collaborateurs que pour soulager les réalités de la conversion professionnelle. La durabilité
et l’efficacité du changement reposent sur l’adhésion à de nouvelles méthodes
méritocratiques, mettant en avant par des récompenses la qualité opérée.
Tout ceci n’a de sens sur le plan de la mise en place que si les cadres d’un partenariat structuré et
structurant permette l’installation d’un GUP@. Or, force est de constater que les partenariats public-
privé dans le secteur des transports ne concernent plus seulement les investissements
infrastructurels. Le secteur de la logistique commerciale a de plus en plus recours au secteur privé
pour assurer le déploiement de services ou de technologies. Les pays en développement y voient un
intérêt combiné car au-delà la mobilisation capitalistique et financière, ce sont les aptitudes
techniques et technologiques qui manquent, sans parler de la formation adéquate et continue des
agents. Cette réalité se confirme une fois encore par le document d’orientation de la CNUCED qui
19
affiche in extenso un lien direct entre facilitation du commerce, mise en place d’un GUP@ et
réalisation sous un format PPP :
« La simplification des procédures et l’utilisation d’outils fondés sur les TIC permettent de
synchroniser le mouvement des marchandises et la transmission des documents
commerciaux. A cet égard, les experts ont souligné les résultats très probants affichés par les
guichets uniques électroniques, les systèmes commerciaux dématérialisés et les systèmes en
ligne des communautés portuaires. Toutefois leur mise en œuvre est délicate et coûteuse,
puisqu’elle requiert non seulement un financement durable mais aussi des connaissances, des
compétences et des services spécialisés. Un moyen de se procurer ce type d’équipement est
de conclure des partenariats public-privé ; le secteur privé dispose en effet des capacités
nécessaires pour transférer les compétences, les services et les technologies qui manquent au
secteur public ».
Il n’est pas dans l’ambition de la présente contribution de faire une apologie du PPP mais bien de
faire la démonstration du bienfondé d’une telle démarche structurante. C’est l’objet de la troisième
partie qui révèle les éléments clés d’une construction partenariale gagnante, tant pour les pouvoirs
publics que pour les usagers/opérateurs du corridor de transport béninois… que pour le
concessionnaire privé.
3- Concession du GUP@ pour le Port autonome de Cotonou
Avant toute chose, il convient de rappeler une donnée statistique qui ne trompe pas : le continent
africain présente plus de terminaux conteneurisés opérés par la puissance publique que par des
entreprises privées en 2007 alors que la situation dans le reste du monde indique que moins de 10%
des terminaux « échappent » au secteur privé ! (Figure 9). Fin 2010, le rattrapage est tel que le
dernier recensement des investissements portuaires réalisé par l’auteur permet d’affirmer que le
secteur privé deviendra majoritaire dans la gestion et l’exploitation des interfaces portuaires
conteneurisées en 2011.
Figure 9 : Contrôle public et contrôle privé des terminaux conteneurisés : situation de l’Afrique
(2003 – 2007 et estimation fin 2010 - en % du total)
Source : Drewry Consultant 2009 et compilation Alix – 2011
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Le positionnement des grands groupes mondiaux de la manutention comme DP World, Hutchison
Whampoa ou encore APM Terminals continue de modifier l’environnement concurrentiel portuaire
sous-régional. Ils s’ajoutent aux manutentionnaires historiques comme Bolloré Africa Logistics pour
contrôler plus d’un tiers du marché conteneurisé africain. Fin 2010, plus de 1,3 milliards de dollars
d’investissements portuaires était recensé sur la rangée portuaire Dakar / Cotonou malgré quelques
incertitudes comme la remise en cause des intérêts du groupe NCT Necotrans-Getma sur la
concession conteneurisée du port de Conakry ou les engagements différés de San Pedro compte tenu
de la situation critique en Côte d’Ivoire (Figure 10).
Figure 10 : Investissements portuaires annoncés depuis 2008 sur la rangée ouest africaine Dakar-
Cotonou (Situation connue fin février 2011)
Source : Olivier Hartmann – Banque Mondiale 2011
Cette réalité structurelle accompagne la culture du changement prônée dans le cadre de
l’implantation d’un GUP@. Les grands groupes portuaires se font le relais des intégrateurs logistiques
et des opérateurs maritimes pour soutenir le changement au sein des ports subsahariens. La mise en
place du GUP@ à Cotonou relève de ce pragmatisme exprimé par les acteurs économiques. Elle se
veut aussi un révélateur fort de cette ambition publique de voir les choses se réformer pour soutenir
la compétitivité vitale du corridor pour toute l’économie nationale. Le gouvernement du Bénin
demeure très clair sur ses intentions déclinées en trois argumentaires complémentaires :
- conforter la place portuaire de Cotonou comme une porte naturelle des échanges pour le
pays et les économies enclavées
- élever la porte d’entrée béninoise aux plus hauts standards de sécurité et de fiabilité pour les
échanges internationaux
DAKAR
CONAKRY –
en renégociation depuis le 8 mars 2011
FREETOWN
MONROVIA
SAN PEDRO LOME COTONOU
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25 years
2008420 M US$
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en renégociation depuis le 8 mars 2011
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- permettre l’augmentation significative de la collecte des revenus issus du commerce
international empruntant les solutions portuaire et logistique béninoises.
Dans ce sens, en novembre 2010, Mr. Issa Badarou, Ministre Délégué chargé de l’Economie
Maritime, des Transports Maritimes et Infrastructures Portuaires de la République du Bénin, a signé
la convention de concession pour la mise en place et l’exploitation du guichet unique portuaire pour
le commerce extérieur au Port de Cotonou.
Le concessionnaire signataire de ladite convention est constitué d’un groupement de deux
entreprises françaises : Bureau Veritas BIVAC BV, chef de file du groupement et SOGET SA implanté
au Havre et spécialiste mondial des systèmes informatiques portuaires. L’originalité de la présente
démarche qui unit l’autorité concédante et le concessionnaire repose sur l’appréhension
opérationnelle et fonctionnelle de la convention de concession prônée par les deux entreprises
privées en concertation avec les pouvoirs publics béninois.
Mais pour en saisir toute la substance, il convient de bien saisir le postulat énoncé par le groupement
concessionnaire. Au regard des expériences subsahariennes passées, force est de constater qu’un
guichet unique portuaire demeure trop souvent réduit à une somme de fonctionnalités
technologiques. Et c’est en grande partie pour cette raison que les autorités portuaires ou
douanières ainsi que par la plupart des bailleurs de fonds internationaux ou encore les ministères
nationaux de tutelle (transports, commerce, finances, etc.) ont souvent failli dans l’orchestration
collaborative d’une exploitation pérenne des différents GUP sous-régionaux. Le partenariat public
privé pour un GUP s’agence sur un achat de technologies disponibles sur le marché mondial avec une
installation/exploitation qui relève de concessionnaires publics nationaux. Or, le déploiement de ces
solutions technologiques se trouve confronté à deux grandes catégories de frein :
1- l’expertise globale requise (et pas seulement celle liée à l’utilisation et la mise en place
de l’outil technologique)
2- la capacité financière (capacité investissements massifs + investissements sur les
opérations à proprement parlé + investissement sur l’entretien et l’évolution des
produits / applications sans évoquer la problématique de l’investissement en capital
humain).
Le cadre classique de la concession fut systématisée pour l’instauration de guichets uniques
portuaires mais bien souvent sans l’accompagnement managérial, ni le développement stratégique
et encore moins la capacité technique d’installation/exploitation/gestion des systèmes complexes.
Les équipes, les moyens techniques et les rigueurs d’exploitation avec la permanente remise à jour
des capacités du système (en phase avec l’évolution des pratiques d’une communauté portuaire)
sont trop rarement explicites dans les schémas de partenariat public-privé jusque là prônés. Les
expériences douanières sous-régionales demeurent un exemple intéressant d’une implantation a
minima de technologies développées par les Nations-Unies. Ces solutions tournent comme des pis
allers avec les affres d’une exploitation réduite par le manque de compétence et de formation des
agents en charge d’utiliser et de déployer les outils. Ce constat se matérialise dans le temps par une
dégradation fonctionnelle de l’outil technologique originel qui n’est que trop rarement mis à jour. Ce
dernier enferme même les administrations douanières dans des carcans rigides, où l’innovation et le
changement peuvent être jugés comme de potentielles menaces/ruptures vis-à-vis du modèle hérité.
22
Les cadres administratifs et réglementaires contraignent toute ambition de changement des
pratiques.
Le constat s’avère le suivant : les partenariats public/privé pour les guichets uniques portuaires dans
le sens actuellement développés sur le continent africain se trompent radicalement de paradigme.
Un guichet unique portuaire ne peut se résumer à une mise à jour technologique à un instant donné.
Dans un partenariat public/privé concernant un guichet unique portuaire, il convient de considérer :
- les conditions préalables de l’implantation ;
- la constitution d’une stratégie managériale et opérationnelle ;
- l’identification de compétences pour toutes les parties prenantes ;
- la mobilisation de programmes de formation ;
- l’accompagnement au changement ;
- la maintenance des outils technologiques ;
- et surtout l’aptitude à remettre en permanence les solutions proposées en conformité avec
l’évolution des activités de toute la communauté portuaire (exemple du développement des
applications en relation avec les réglementations internationales comme pour la sécurité et la
traçabilité des produits).
La vision de SOGET/Bureau Veritas s’inscrit dans une logique de rupture avec une innovation radicale
en prônant une approche par concession avec une convention de concession qui régit :
- les modalités de gouvernance dans la relation partenariale publique / privée
- les modalités opérationnelles entre le concessionnaire et le concédant
- les modalités de validation dans les gains de productivité et de compétitivité à l’échelle non
plus de la communauté portuaire mais bien de tout le pays et le corridor de transport jusqu’aux
marges des pays enclavés desservis.
L’objectif est aussi simple qu’ambitieux : créer le modèle innovant de concession qui permette
d’assumer un GUP@ comme un ensemble complexe permettant l’amélioration durable des
conditions de l’échange et du commerce dans un environnement économique international
dépassant largement les interrelations de la communauté portuaire locale. Le GUP@ demeure un
objet concédé qui n’est pas purement infrastructurel comme pourrait l’être un quai ou un terminal.
La convention de concession s’inscrit dans l’ambition inscrite comme préambule au projet de
concession :
(…) le gouvernement a opté pour la mise en place d’un Guichet Unique en vue de :
- La facilitation et la fluidification des procédures et des formalités de passage des navires et
des marchandises au port de Cotonou ;
23
- La généralisation de l’utilisation des moyens informatiques efficaces dans les échanges de
données et les circuits de communication entre tous les intervenants dans la chaîne de
passage portuaire des navires et des marchandises ;
- La réduction des coûts et des temps de séjour portuaire des navires et des marchandises.
Le champ d’intervention couvre l’ensemble des activités portuaires relatives aux navires et aux
marchandises, à l’import, à l’export et en transit.
Selon les conditions définies dans le cahier des charges, l’opération s’adresse autant à destination de
structures publiques que privées, prenant pour acquis que le tout devra se décliner en deux phases
incluant au final l’ensemble des parties prenantes de la communauté portuaire et logistique élargie
du Bénin (Figure 11).
Figure 11 : Cartographie des principales catégories d’acteurs publics et privés intégrées dans
l’opération et l’exploitation du Guichet Unique Portuaire au Port de Cotonou
La matérialisation contractuelle s’établit dans la création d’une joint-venture entre le groupement
concessionnaire et un ensemble de partenaires publics et privés de la communauté béninoise. La
constitution de la Société d’Exploitation et de Gestion du Guichet Unique se base sur une concession
pour 10 ans durant lesquels le groupement Bureau Veritas/Soget dispose de 70% des parts contre
30% pour les parties prenantes béninoises (PAC, SOBEMAP, CNCB, CNERTP, CCIP). Cette société, dès
sa notification et de plein droit, se substituera à lui en qualité de Concessionnaire. Tout en restant
majoritaire (51% au moins), sa part est susceptible d’évoluer à la baisse avec l’implication d’autres
acteurs dans le capital social. Le tout a été entrepris dans le cadre d’un décret ministériel sous
l’autorité concédante du Ministère de l’Economie Maritime, des Transports Maritimes et
Infrastructures Portuaires de la République du Bénin. La Convention de Concession est conclue pour
une durée initiale de dix ans, renouvelable sur demande préalable du Concessionnaire au moins une
année avant l’expiration normale de la Convention de Concession. Dans ce cas, le renouvellement de
la Convention de Concession fera l’objet d’une nouvelle Convention de Concession.
Dr. Yann ALIX – Mars 2011
PH
AS
E 1
PAC CNERTPSOBEMAP CNCBCCIB
Les Agents Maritimes Les Transitaires Les Transporteurs Les Banques
PH
AS
E 2
LA DOUANE
Les manutentionnaires privés
Tous les opérateurs contribuant au passage portuaire
des navires et des marchandises
PAC : Port Autonome de Cotonou SOBEMAP : Société Béninoise des Manutentions portuaires
CNCB : Conseil National des Chargeurs du Bénin CCIB : Chambre de Commerce et d’Industrie du Bénin
CNERTP : Centre National d’Essais et de Recherche des Travaux Publics
Dr. Yann ALIX – Mars 2011
PH
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E 1
PAC CNERTPSOBEMAP CNCBCCIB
Les Agents Maritimes Les Transitaires Les Transporteurs Les Banques
PH
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E 2
LA DOUANE
Les manutentionnaires privés
Tous les opérateurs contribuant au passage portuaire
des navires et des marchandises
PAC : Port Autonome de Cotonou SOBEMAP : Société Béninoise des Manutentions portuaires
CNCB : Conseil National des Chargeurs du Bénin CCIB : Chambre de Commerce et d’Industrie du Bénin
CNERTP : Centre National d’Essais et de Recherche des Travaux Publics
24
Cette formule de concession permet en toute transparence au Gouvernement de la République du
Bénin de ne pas mobiliser d’importantes ressources financières publiques tout en s’assurant une
efficacité minimale des opérations dès la mise en service des systèmes technologiques. La limitation
du risque, la maîtrise du calendrier de mise en exploitation et la pérennité de l’opération constituent
également d’importantes garanties de succès pour toutes les parties prenantes impliquées au Bénin.
Surtout, la Société d’Exploitation et de Gestion du Guichet Unique implique directement les intérêts
béninois dans l’optimisation de l’outil technologique exploité. L’intégration ne se résume pas à une
prise de position capitalistique puisque la Convention de Concession stipule d’importantes mesures
d’accompagnement qui soutiennent un véritable partage des savoirs et savoir-faire sur la base d’une
collaboration managériale et opérationnelle.
Sur le plan des rémunérations, le concessionnaire est payé en fonction des services rendus lors de
l’exploitation du système selon un système relativement classique avec un prélèvement automatisé
sur chaque bordereau de frais unique (BFU) traité. Cette modalité de rémunération est entendue en
prenant en compte les investissements initiaux requis pour la mise en place du Guichet Unique,
l’amortissement de ces investissements, les frais d’exploitation et la marge bénéficiaire. Bien sûr,
cette rémunération est sujette à modification selon la hausse ou la baisse des volumes de BFU
calculés lors de l’estimation financière préalablement entendue par les parties prenantes. L’Autorité
Concédante se voit, en contrepartie, rémunérée par une redevance de concession calculée une fois
encore de manière classique en fonction du montant total HT de la recette annuelle assurée par le
Concessionnaire.
Le cadre d’exploitation et gestion permet de se conformer aux activités concédées qui peuvent se
résumer, pour les plus importantes, par :
- l’automatisation totale des procédures et formalités de passage des navires et des
marchandises en permettant aux Agents maritimes d’annoncer les escales des navires, de
mettre le manifeste dans le système et aux transitaires de présenter leurs bons à délivrer et
de suivre le processus de facturation en mettant dans le système une copie de la déclaration
en douane liquidée et payée ;
- la diffusion d’informations générales et spécifiques utiles à la communauté portuaire ;
- l’exploitation de l’application informatique en client – serveur et web pour les traitements
donnant aux différents structures la maîtrise de leurs procédures de facturation et de
recouvrement ;
- L’émission du bordereau de frais unique après l’accord de chacune des structures impliquées
et mise en place d’un système de veille automatique pour avertir chaque structure des
retards pris pour facturer le dossier d’un transitaire ;
- L’intégration au Guichet Unique d’une bourse de transport entre les chargeurs et les
transporteurs sur la base de l’information disponible dans le Guichet Unique en relation avec
la Société de gestion du Fret Portuaire (SOGEFRET) ;
- La mise à disposition des structures impliquées des informations de base concernant :
o Les données sur les escales ;
25
o Les informations sur les marchandises ;
o Les différents éléments de facturation ;
o Les statistiques sur le trafic maritime et le passage des marchandises ;
o Des tableaux de bord avec des indicateurs pour mesurer l’amélioration des
performances du Port de Cotonou sur les conditions d’escale des navires et des
conditions de passage des marchandises ;
- la mise en œuvre d’un système de suivi de la qualité des services rendus aux usagers par le
Guichet Unique ; et,
- Le développement du Guichet Unique suivant les futures demandes des usagers.
L’ensemble de ces activités concédées s’accompagne en amont de la mise en place de tous les outils
technologiques requis pour mener à bien l’ensemble des tâches détaillées dans le contrat de
concession. Au-delà des solutions techniques et technologiques sous-jacentes (notamment en
matière d’interfaces et d’interconnexions des systèmes), un accompagnement lourd permettra de
former les personnels et informaticiens du Guichet Unique ainsi que toutes les personnes impliquées
dans les structures interfacées au système de Guichet Unique. Et pour que l’ensemble soit
parfaitement intégré et transparent, une campagne nationale d’information sera conçue et mis en
œuvre afin de sensibiliser les opérateurs économiques du commerce extérieur. Toutes les
professions portuaires seront conscientisées au fonctionnement et aux objectifs du Guichet Unique
dans l’esprit d’une facilitation améliorée des conditions de passage des navires et des marchandises.
Au-delà des fonctionnalités essentielles que le Concessionnaire s’est engagé à produire (Figure 12),
c’est l’organisation de la gestion de projet qu’il convient de commenter avec une interpénétration
permanente entre les plus hauts intérêts publics de l’Etat Béninois, les sphères opérationnelles
locales et régionales et les experts des équipes des deux entreprises concessionnaires (Figure 13).
Figure 11 : Synthèse des principales fonctionnalités du Guichet Unique Portuaire Automatisé du
Port de Cotonou
Dr. Yann ALIX – Mars 2011
BORDEREAU
de FRAIS UNIQUE
OPERATIONS
PORTUAIRES FACTURATION
BOURSES
de TRANSPORTESCALES
• Annonce du voyage
avec ETA et ETD
modifiables
• Demande de
placement à quai
facilitée et sécurisée
• Fichier Navire
• Planning d’occupation
des postes à quai pour
éviter les congestions et
optimiser les occupations
• Attribution du poste
à quai
• Enregistrement des
mouvements du navire
• Situation du port avec
infos en temps réels
sur tous les navires
• Etablissement
des pro-forma
• Emission des factures
• Suivi des règlements
pour sécuriser et
garantir la livraison
des marchandises
• Paramétrage des
modules de facturation
par chaque structure
intégrée
• Création d’un BFU pour
chaque B/L ou chaque
confirmation de booking
• BFU comme document
central de gestion
• BFU comme référence
unique indiquant le montant
total à régler pour le
passage de la marchandise
(transparence des coûts
par l’émission directe
depuis le Guichet Unique)
• Le recouvrement
du BFU assuré par la caisse
duGuichet Unique ou par
les banques (En cours
de validation)
• Transitaires ou Agents
Maritimes pour poster
des offres de transport
détaillées
• Les transporteurs,
après abonnement
au Guichet Unique,
déclarent leur intérêt
sur les offre
• Recherches
personnalisées d’offres
avec enregistrements
et reconnaissance de
requêtes
• IMPORTS: toutes les
étapes depuis le
manifeste
provisoire à son
apurement final
• EXPORTS :
Touts les étapes
de l’offre commerciale
de transport à la
confirmation du booking
jusqu’àu constat de
réception à l’autorisation
d’embarquement
(avec le BASE) et au
constat de chargement
• Processus de transit
pour les marchandises
concernant les pays
enclavés
Dr. Yann ALIX – Mars 2011
BORDEREAU
de FRAIS UNIQUE
OPERATIONS
PORTUAIRES FACTURATION
BOURSES
de TRANSPORTESCALES
• Annonce du voyage
avec ETA et ETD
modifiables
• Demande de
placement à quai
facilitée et sécurisée
• Fichier Navire
• Planning d’occupation
des postes à quai pour
éviter les congestions et
optimiser les occupations
• Attribution du poste
à quai
• Enregistrement des
mouvements du navire
• Situation du port avec
infos en temps réels
sur tous les navires
• Etablissement
des pro-forma
• Emission des factures
• Suivi des règlements
pour sécuriser et
garantir la livraison
des marchandises
• Paramétrage des
modules de facturation
par chaque structure
intégrée
• Création d’un BFU pour
chaque B/L ou chaque
confirmation de booking
• BFU comme document
central de gestion
• BFU comme référence
unique indiquant le montant
total à régler pour le
passage de la marchandise
(transparence des coûts
par l’émission directe
depuis le Guichet Unique)
• Le recouvrement
du BFU assuré par la caisse
duGuichet Unique ou par
les banques (En cours
de validation)
• Transitaires ou Agents
Maritimes pour poster
des offres de transport
détaillées
• Les transporteurs,
après abonnement
au Guichet Unique,
déclarent leur intérêt
sur les offre
• Recherches
personnalisées d’offres
avec enregistrements
et reconnaissance de
requêtes
• IMPORTS: toutes les
étapes depuis le
manifeste
provisoire à son
apurement final
• EXPORTS :
Touts les étapes
de l’offre commerciale
de transport à la
confirmation du booking
jusqu’àu constat de
réception à l’autorisation
d’embarquement
(avec le BASE) et au
constat de chargement
• Processus de transit
pour les marchandises
concernant les pays
enclavés
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Figure 12 : Organisation générale du projet de Guichet Unique
Le Comité de supervision regroupe les plus hautes sphères politiques de la République du Bénin
(5 représentants de 5 ministères distincts) et dispose d’un rôle d’encadrement général afin de
s’assurer du déroulement conforme du projet de Guichet Unique. Ce Comité de supervision donne au
Comité de suivi les recommandations nécessaires de l’installation générale et à l’exploitation du
système. Le Comité de suivi se compose de représentants desdits Ministères précités, complété par
des hauts représentants des unités opérationnelles impliquées dans le déploiement fonctionnel du
Guichet Unique. On retrouve l’ensemble des intérêts énumérés dans la première phase du projet
d’implantation tel que décrit dans la figure 10 précédente. Un représentant du concessionnaire
complète le dispositif de ce niveau 2 de supervision afin de garantir une coordination optimale entre
l’ensemble des parties prenantes. Cette organisation relativement classique du projet d’implantation
du Guichet Unique se complète par deux autres niveaux.
Les commissions plus « techniques » englobent les dimensions essentielles du succès d’implantation,
de gestion et surtout d’exploitation pérenne du nouveau système informatique. La commission
formation, comme préalablement énoncé, atteste de l’approche préconisée par les concessionnaires
du projet. L’accompagnement dans l’apprentissage technologique se matérialise par un encadrement
très structuré de la gestion des compétences et des savoir-faire. La commission formation réunit les
représentants de chaque groupe professionnel impliqué dans le projet de Guichet Unique. Les plans
de formation sont établis selon la connaissance des pratiques et des savoirs enregistrés au sein de
chaque groupe professionnel. Le tout permet de consolider une stratégie complète de formation
professionnelle afin d’utiliser les potentialités révélées au plan local. Cette commission gère enfin les
retours sur les canaux de formation dans le but d’initialiser des produits adéquats de formation
auprès des praticiens du système. Cette structure de formation ne peut se concevoir sans un
accompagnement sur la culture du changement au sein des institutions régionales impliquées dans le
dossier. Dans une installation de technologies nouvelles, les réflexes de rejet ou de manque de
motivation se trouvent trop souvent sous-estimés. La commission de gestion du changement
consiste à informer les professionnels sur les conséquences prévisibles de l’installation d’un outil
technologique comme le Guichet Unique. Elle permet de recueillir les freins et réticences exprimés
de même que les contraintes opérationnelles pratiques constatées au moment d’implanter les
nouvelles applications technologiques. Son rôle conjugue un caractère explicatif pour mieux
communiquer sur les conséquences de l’utilisation d’un guichet unique et un rôle
d’accompagnement managérial pour optimiser les bénéfices de l’utilisation accomplie des nouveaux
Dr. Yann ALIX – Mars 2011
COMITE
DE SUIVI
COMMISSION
FORMATION
COMITE
DE SUPERVISION
COMMISSION
PROCEDURE
COMMISION
GESTION DU CHANGEMENT
Dr. Yann ALIX – Mars 2011
COMITE
DE SUIVI
COMMISSION
FORMATION
COMITE
DE SUPERVISION
COMMISSION
PROCEDURE
COMMISION
GESTION DU CHANGEMENT
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outils technologiques disponibles. L’approche reste très pratique et pragmatique avec un
concessionnaire qui a mis en place une commission procédure pour faciliter l’instauration et
l’acceptabilité des nouvelles procédures définies dans le cadre du guichet unique.
Pour finir, un quatrième niveau de mobilisation regroupe plusieurs groupes de travail qui réunissent
plusieurs représentants et acteurs d’un même groupe professionnel. Sous la responsabilité du chef
de projet (comme les trois commissions du niveau 3), l’objectif consiste à remonter les problèmes
rencontrés pour apporter des réponses. En cas de problèmes récurrents ou de l’impossibilité de
proposer des solutions à ce niveau d’interactions, alors les éléments se trouvent automatiquement
remontés par le Chef de projet auprès des commissions. Cette approche permet de coller aux réalités
opérationnelles vécues par les toutes les parties prenantes du projet de guichet unique portuaire.
Elle établit des passerelles indispensables entre les concessionnaires et spécialistes de la technologie
portuaire et les futurs opérateurs qui déploieront par leurs pratiques le guichet unique portuaire.
Cette vision intégrée constitue un élément central de la gestion et de l’exploitation rapide d’un
système technologique complexe. Tel qu’évoqué précédemment, l’expérience présente s’engage à
aller au-delà de l’installation technique d’outils technologiques. Les pratiques collaboratives et
l’interpénétration permanente entre le concessionnaire et les utilisateurs publics et privés régionaux
tendent à garantir une installation, une gestion et une opération plus en phase avec les spécificités
logistico-portuaires subsahariennes.
Conclusion
Le Guichet Unique préconisé dans le cadre de son installation au Bénin permet une amélioration
globale de la productivité de tous les opérateurs intégrés, qu’ils soient publics ou privés avec un gain
tangible sur la gestion des tâches documentaires. L’accélération du processus complet de transit de
la marchandise s’accompagne d’une sécurisation accrue puisque les procédures sont entièrement
automatisées. La disponibilité en temps réel des informations liées à la marchandise soutient aussi
une plus grande transparence et traçabilité de la chaîne logistique ; le tout sans jamais compromettre
la confidentialité requise par toutes les parties prenantes du système de transport. La
dématérialisation des documents sous-tend aussi un changement radical des pratiques généralement
admises entre grands corps de l’administration publique Béninoise.
Ces changements des pratiques et des mentalités s’incarnent dans la structuration juridique et
opérationnelle de la Société d’Exploitation et de Gestion du Guichet Unique qui redonne une place
prépondérante aux entités publiques et privées locales. Le schéma évolutif décennal et la souplesse
d’adaptation aux conditions réelles rencontrées localement constituent un cadre innovant qui
s’adapte à l’implantation de solutions qui ne peuvent se résumer à un simple transfert technique de
technologies. Les guichets uniques portuaires automatisés peuvent, selon l’expérience initiée au Port
de Cotonou, initier cette révolution des pratiques logistiques de transport depuis les portes d’entrées
portuaires jusqu’aux extrémités infrastructurelles des marchés enclavés subsahariens. La maîtrise de
l’information pourrait à terme servir de terreau pour soutenir le développement pérenne de services
logistiques à valeur ajoutée sur les produits d’exportation subsahariens. Cela concorde avec des
conclusions très « afroptimistes » qui mettent en avant l’émergence d’une classe moyenne, la
maturité croissante des systèmes bancaires et financiers africains ou encore les biens faits de la
dividende démographique pour justifier l’avènement de nouveaux modèles de croissance en Afrique
28
(Culliers, 2008 ; Sévérino et Ray, 2010 ; WEF, 2010). L’appropriation des nouvelles technologiques
n’est plus à prouver non plus avec la généralisation de la téléphonie mobile ou d’internet. Dans ce
sens, les ingrédients semblent tous réunis pour que de nouvelles formes de partenariats publics
privés attirent de plus en plus les investisseurs étrangers sur des modèles innovants où le poids des
acteurs africains ne cessera de croître. Des centres de gestion téléphonique émergent à Dakar. Des
développements manufacturiers s’implantent au Bénin. Des projets de croisières ouest-africaines se
concrétisent (Gnonlonfin, 2010, De Carvalho, 2009). Une industrie de services tend à structurer une
économie subsaharienne de plus en plus urbaine caractérisée par une augmentation des niveaux
d’épargne de ses habitants. Un cercle économico-sociétal vertueux s’affirme avec l’apparition d’une
capacité croissante de consommation, tirée par une classe moyenne supérieure éduquée. Dans ce
contexte, l’exemple de la Société d’Exploitation et de Gestion du Guichet Unique s’impose comme un
laboratoire en phase avec les nouvelles interactions entre investisseurs étrangers, administration
publique locale et tissu entrepreneurial régional. Les bailleurs de fonds internationaux suivent de très
près ces initiatives de PPP d’un genre nouveau tout en continuant d’observer les formats
partenariaux initiés par les nouveaux grands investisseurs chinois, indiens ou brésiliens (Opagi, 2010).
En guise de conclusion, il convient de remettre la présente démarche de PPP sur un Guichet
Unique dans une perspective encore plus ambitieuse. SOGET SA a fait le pari de l’éducation
supérieure des élites publiques africaines pour accompagner ses démarches avec ses partenaires
d’affaires comme Bureau Veritas. Depuis de nombreuses années, SOGET SA soutient l’Institut
Portuaire d’Enseignement et de Recherche (IPER) du Havre en France dans ses programmes de
formation des cadres portuaires africains et internationaux. Par le financement de bourses, des
managers portuaires de toutes les autorités portuaires africaines peuvent ainsi se sensibiliser aux
meilleures pratiques en matière de gestion portuaire internationale. Les transferts et échanges de
savoir-faire contribuent à impulser cette culture de changement indispensable pour voir émerger les
nouveaux modèles de croissance africains. Il y a 5 ans, SOGET SA, en partenariat avec l’Organisation
Mondiale des Douanes, a participé à la construction d’un Master Douane et Logistique à l’Université
du Havre. Dans la même philosophie, des cadres supérieurs des douanes des pays africains sont
soutenus financièrement pour venir échanger avec des experts logisticiens sur les nouveaux métiers
d’une douane modernisée. Les interactions avec les agents des douanes françaises et tous les
professionnels de la communauté portuaire élargie havraise permettent de préparer l’instauration
de nouvelles pratiques douanières en Afrique. L’intégration de solutions technologiques innovantes
comme un guichet unique portuaire automatisé s’avère de facto favorisée quand les plus hauts
responsables de l’administration publique ont partagé plusieurs mois de formation intensive.
Dernière initiative en date, SOGET SA est le fondateur de la Fondation SEFACIL lancée en 2010 sous
l’égide de la Fondation de France. La fondation SEFACIL a pour vocation de s’intéresser aux
changements qui influent, perturbent et stimulent la structuration des réseaux logistiques
internationaux. L’objectif consiste à mettre en place et animer un pôle mondial d’excellence de la
réflexion stratégique et de l’analyse prospective sur des thématiques porteuses d’avenir dans les
domaines maritime, portuaire et logistique. Axée sur les mondes francophones, la fondation SEFACIL
accompagne la création de produits pédagogiques innovants grâce au soutien des plus grandes
entreprises privées ainsi que des organismes et institutions publics nationaux et internationaux.
La dotation de bourses d’études, le déploiement de partenariats Nord-Sud / Sud-Sud ou encore la
production d’outils comme une base de données maritime et portuaire subsahariennes constituent
29
quelques unes des réalisations projetées par la fondation SEFACIL. Dans ce sens, les collaborations
avec les élites universitaires africaines s’avèrent une nouvelle fois essentielle et complètent l’arsenal
des initiatives prises par SOGET SA à l’égard des marchés émergents africains et internationaux.
L’expérience béninoise en cours symbolise en quelque sorte cet ensemble cohérent d’initiatives. Et la
feuille de route continue de se dérouler avec trois grandes étapes qui restent à écrire :
- le retour d’expériences de la Société d’Exploitation et de Gestion du Guichet dans le contexte
béninois et son évolution au fil des années pour faire ressortir un modèle affiné de
partenariat avec l’ensemble des communautés impliquées ;
- la duplication de la présente expérience sur d’autres ports et d’autres corridors de transport
afin de vérifier l’amélioration des performances globales des chaînes de transport sous-
régionales grâce au modèle de PPP préconisé ; et,
- la mise en place d’une future association sous-régionale des systèmes informatiques
portuaires communautaires dans le but de partager les retours d’expériences sous-régionaux
et soutenir une implantation généralisée de solutions technologiques innovantes au service
des professionnels du transport et des populations subsahariennes dans son acceptation la
plus générale.
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