droit des obligations - notes de marco-chan - cours terminé

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Droit des obligations : le fait juridique

Mme en absence dun lien contractuel peut se trouver un lien dobligation, cr par le fait juridique.

Introduction au droit des obligations et au fait juridique.Les obligations qui se forment sans (lexigence) dune convention. Lopposition entre les obligations conventionnelles et les obligations non conventionnelles. Cette distinction se trouve dans le Code civil entre les titres 3 et 4 du livre troisime du Code civil. Cest, en droit des obligations, au regard de la source dune obligation, le summa divisio (division principale) entre les obligations. Lorsque lobligation trouve sa source dans un acte juridique, il sagit dune obligation conventionnelle (articles 1101 et suivants), et lorsque lobligation trouve sa source dans un fait juridique, le lgislateur parle dobligation non conventionnelle (lobjet de ce cours, articles 1370 et suivants). Il y a une difficult relativement cette opposition : les obligations qui se forment sans convention constituent une catgorie de dimension universelle (Le grand manteau de la responsabilit civile). Sauf que, cette dimension universelle de la responsabilit civile, se concilie mal avec certains rgimes spciaux de responsabilit, en particulier, avec le rgime de la responsabilit du fait des produits dfectueux (articles 1386 et suivants) : cest un rgime de responsabilit mis en place suite une directive europenne. Il y a larticle 1386-1 disposant que le producteur dun produit dfectueux est responsable, quil soit ou non li par un contrat avec la victime, autrement dit, on consacre des rgles qui ont vocation sappliquer toutes les victimes, mais qui sont communes galement pour ceux qui ont un lien juridique avec la victime ; ce rgime spcial sapplique alors autant aux obligations conventionnelles quaux obligations non conventionnelles.

Les seules obligations non conventionnelles. Il faut ici avoir sous les yeux, larticle 1370 du Code civil dont le deuxime alina distingue, au titre des obligations non conventionnelles, celles qui rsultent de lautorit seule de la loi des obligations qui naissent dun fait personnel celui qui se trouve oblig . Il conviendrait dtudier lensemble de ces obligations.

Premire catgorie dobligations non conventionnelles : les obligations qui rsultent de lautorit seule de la loi. Il y a, par exemple, lobligation entre propritaires voisins de tailler les haies qui peuvent gner le voisinage ; lobligation pour les parents (qui exercent lautorit parentale) de grer en bon pre de famille les biens de leurs enfants ; lobligation pour les jeunes franais ayant atteint lge de 18 ans de participer une journe citoyenne Toutes ces obligations sont extrmement htrognes et varies, elles ne sont pas enseignes dans leur unit, mais dans leur diversit. Deuxime catgorie : les engagements qui naissent dun fait personnel celui qui se trouve oblig. Pour cette catgorie, lintgralit de lenseignement y sera consacre, on y trouve ce qui est communment nomm les dlits civils (article 1382), les quasi-dlits civils (1383), mais aussi les quasi-contrats (1370 et suivants). Lorsque lobligation rsulte dun dommage caus autrui, on met en uvre les mcanismes de la responsabilit civile (de nature extra contractuelle). Lorsque ce dommage est le rsultat dune faute intentionnelle on parle de dlit civil, Droit civil des obligations second semestre notes de Marco-chan1

lorsquil est le rsultat dune faute non intentionnelle on parle de quasi-dlit civil. Lorsque lobligation rsulte non plus de dommage caus autrui, mais de lavantage reu dautrui, on met alors en uvre les rgles relatives aux quasis contrats.

Livre premier : la responsabilit civile extracontractuelle.Le dommage caus autrui comme source dobligation.

Chapitre introductif : premire approche de la responsabilit.1. Une approche notionnelle. Dun point de vue tymologique, le mot responsabilit trouve ses origines dans le Latin respondeo (ere), qui signifie se porter garant. Ces mots vont connaitre une volution tymologique, et dans le droit de lAncien Rgime, les premiers lutiliser sont les Anglo-saxons, sous la forme de responsability, mot que lon trouve ds le XVII sicle. En droit franais, le mot responsabilit apparait dans les textes du vieux franais au XVIII sicle. Aujourdhui, la responsabilit consiste tre tenue de rpondre de ses actes. Le rgime de la responsabilit civile extracontractuelle trouve ses fondements techniques dans le code Napolon de 1804 aux articles 1382 et suivants de ce code. 2. Une approche philosophique. La libert et la responsabilit sont deux faces dune mme pice, on est libre parce quon est responsable et rciproquement. Ce raisonnement peut tre tant individuel que collectif. Si on se place au niveau individuel, Philippe Malaurie a crit propos de la libert des hommes que lHomme libre est celui qui a conscience de ses actes et qui en rpond (principe de la responsabilit pnale). Lhomme responsable est quelquun qui agit pour prserver sa libert. Les auteurs disent que lhomme irresponsable est un tre qui finalement est humainement diminu (exemple la situation des incapables). On peut encore citer Nitch propos du privilge extraordinaire de la responsabilit et Sartre propos de la libert : lhomme est responsable du monde et de lui-mme en tant que manire dtre. Nous prenons le mot de responsabilit en son sens banal de conscience dtre lauteur incontestable dun vnement ou dun objet . Cette responsabilit absolue nest pas acceptation dailleurs : elle est simple revendication logique des consquences de notre libert. Au niveau de la socit, un pouvoir responsable est un pouvoir qui a conscience de ses actes et en rpond. Aujourdhui, les dmocraties ont mis en place le systme des consultations lectorales. Un pouvoir irresponsable, qualifi de tyrannique, peut devenir dcadent, Zola dit alors sur Napolon : les peuples, oubliant le tyran, sprirent du hros. La responsabilit peut avoir plusieurs visages : ce peut tre dabord une responsabilit de conscience, une responsabilit philosophique, religieuse, morale. La sanction de la responsabilit morale est bien entendu la conscience (bonne ou mauvaise). Il y a galement la responsabilit politique, sa sanction dans les dmocraties est la consultation lectorale. Autre visage de la responsabilit : la responsabilit pnale o la sanction est le prononc dune peine. Enfin, la responsabilit civile, dont la sanction est lindemnisation de la victime.

Section 1 : Approche compare avec les autres ordres de responsabilit.La responsabilit civile, ce nest pas une responsabilit en vases clos. Il y a des interactions qui naissent avec dautres formes de responsabilit juridique, la question des liens entre la responsabilit contractuelle et extracontracDroit civil des obligations second semestre notes de Marco-chan2

tuelle est une problmatique intrinsque la responsabilit civile. En revanche il y a galement des interactions qui se nouent avec des responsabilits qui ne seraient pas civiles (pnale et administrative), on est alors dans la dtermination extrinsque de la responsabilit civile. Ces deux volets vont tre abords.

Paragraphe 1 : A.

Les frontires extrinsques de la responsabilit civile.

Responsabilit civile et responsabilit administrative. Pourquoi deux ordres de responsabilit ? Est-ce que ce dualisme emporte des consquences satisfaisantes ?

1.

La justification du dualisme. Originaire de la dcision Blanco du 8 fvrier 1873 dans laquelle le tribunal des conflits va se rfrer des lois rvolutionnaires (26 et 24 aot 1790 et 16 fructidor an 2) et rappelle que ces lois interdisent aux tribunaux judiciaires de troubler des actes de ladministration (mise en uvre de la sparation des pouvoirs). Le Tribunal des Conflits rend une dcision particulirement instructive sur la justification du clivage entre lordre administratif et lordre judiciaire. Il indique que la responsabilit qui peut incomber ltat pour les dommages causs aux particuliers par le fait des personnes quil emploie dans le service public ne peut tre rgie par les principes qui sont tablis dans le Code civil pour les rapports de particulier particulier. Il poursuit en indiquant que cette responsabilit nest ni gnrale ni absolue ; elle a ses rgles spciales qui varient suivant les besoins du service et la ncessit de concilier les droits de ltat avec les droits privs. Cette responsabilit particulire qui tait son nom va tre drogatoire au droit commun. Le tribunal des conflits conclu par ds lors, au terme des lois vises ci-dessus, lautorit administrative est seule comptente pour en connaitre. Les comptences respectives du juge administratif et du juge judiciaire. La comptence du juge administratif est plus complexe que ce que pouvait laisser entendre larrt Blanco de 1873. Il faut distinguer, depuis une dcision du 30 juillet 1873 Pelletier (il sagissait de renvoyer devant une juridiction civile, un gnral qui dans le ressort de sa juridiction, avait choisi de faire saisir un journal ; la clef a t de dterminer sil agissait dans le cadre de sa mission ou sil avait commis une faute personnelle dtachable de ses fonctions), la faute de service (lhypothse de larrt Blanco), de la faute personnelle de lagent dtachable de ses fonctions. Les comptences de lordre civil. L encore, il y a eu une volution, pour les SPIC il a t dcid que les pour les dommages causs loccasion de la mise en uvre dun SPIC, relevait la comptence judiciaire et lapplication des rgles du droit civil (droit priv dune manire plus gnrale) : dcision du tribunal des conflits, le 22 janvier 1921 Bac dloka (une barge qui servait relier une lagune qui a coul en Cte dIvoire : qui est responsable est quelles rgles doit-on mettre en uvre ?). Lintervention lgislative : ltat lui-mme dcide parfois que les activits de ses agents relveront du domaine judiciaire (loi du 5 avril 1937 qui donne comptence aux tribunaux judiciaires lorsquun enseignant dducation nationale est victime ou bien cause un dommage un de ses lves). Autre loi importante du 31 dcembre 1957 donnant comptence au juge judiciaire qui statue conformment aux rgles de droit civil pour les dommages causs par des vhicules appartenant une administration ; ou encore lorsqu loccasion de procdures dexpropriation un litige n avec un propritaire priv, la comptence reviendra aux juridictions judiciaires qui mettront en uvre un principe de droit priv. Les inconvnients suscits par la dualit des responsabilits administratives et civiles. Il est choquant que les victimes dactes similaires soient traites diffremment selon que lacte lorigine du prjudice soit analys comme administratif ou de droit priv. Le terrain dlection de cette dichotomie est principalement celui de la responsabilit mdicale. Il y a eu par exemple en matire dinfections nosocomiales des divergences de jurisprudence non satisfaisante. propos de cela, les juDroit civil des obligations second semestre notes de Marco-chan3

2.

3.

ridictions administratives ont t plus favorables que les juridictions civiles lindemnisation parce que le Conseil dtat a, avant la Cour de Cassation, considr que les hpitaux publics taient tenus une obligation de scurit et de rsultat. propos de lobligation dinformation concernant des risques exceptionnels concernant une intervention chirurgicale particulire, est-ce que ltablissement doit informer le patient des risques exceptionnels ? La Cour de Cassation la premire a considr que les tablissements de sant privs, se devaient dinformer, les patients de tous les risques, mme les risques exceptionnels. Le Conseil dtat a fini par accepter cela pour les tablissements publics. La loi du 4 mars 2002, relative au droit des malades, est venue mettre en place un rgime juridique unique, quil soit dispens dans les tablissements privs ou publics.

B.

Responsabilit civile et pnale. La philosophie de la responsabilit du droit pnal nest pas celle du droit civil. Le droit pnal est un droit rpressif qui vise condamner des comportements asociaux, alors que le droit civil est un droit qui est plus tourn vers les victimes et dont la fonction essentielle est de garantir lindemnisation des victimes. Malgr cette opposition, il y a des interactions extrmement fortes entre le droit civil et le droit pnal. Ces deux droits ont connu lun et lautre des volutions comparables. En droit civil, la responsabilit civile a connu et connait encore un dveloppement de la responsabilit dite objective (responsabilit sans faute). Or, en droit pnal, la notion de culpabilit (ncessairement objective au regard de llment intentionnel) connait aussi quelques reculs, mme dans la matire pnale. On sait quil y a en droit pnal un certain nombre dinfractions matrielles pour lesquelles llment intentionnel nest pas requis. En outre, au-del de lapprciation de la faute, le droit pnal et le droit civil, participent aussi des mmes objectifs : lun et lautre ont une mission prventive. Le droit de la responsabilit civile parce quil vise indemniser les victimes, chercher prvenir les comportements susceptibles dentrainer des prjudices. De plus en plus en matire de responsabilit civile, on accorde ce droit une fonction de peine prive (cest lexemple des dommages et intrts punitifs). Le droit pnal est lui aussi poreux aux mcanismes du droit civil. Il y a certains auteurs qui estiment que la philosophie du droit pnal est aussi de rparer le dommage caus la socit. Le droit civil et le droit pnal sont aussi totalement imbriqus quand une faute pnale est lorigine dun dommage civil. chaque fois que le fait gnrateur de responsabilit (au sens civil du terme) est aussi et en mme temps une faute pnale.

1.

Les situations de la victime devant les juridictions pnales. La victime dun prjudice peut avoir intrt porter son action quelques fois devant une juridiction pnale. Faire le choix dune demande dindemnisation devant une juridiction pnale est de bnficier des moyens du parquet dans la recherche de la preuve dune faute et dune culpabilit. En outre, on peut esprer des indemnisations beaucoup plus rapides (reconnaissance pralable de culpabilit) qui peuvent conduire quelques fois en quelques jours une dcision de culpabilit et une dcision dindemnisation. Finalement, sest aussi un procs moins coteux. La personne mise en cause peut cependant tout mettre en uvre pour chapper une dclaration de culpabilit ; par consquent, la culpabilit, son prononc, sera la condition de lindemnisation. dfaut de culpabilit, nulle indemnisation. Dun point de vue thorique, il est vident que la culpabilit pnale est une notion plus difficile mettre en uvre que la notion de faute et responsabilit des articles 1402 et suivants du Code Civil. Ces rgles de fond connaissent cependant quelques exceptions : une cour dassises (comptente pour juger les crimes) peut, mme lorsque laccus est acquitt, accorder une rparation la victime. Elle le fera en fondant sa dcision de rparation sur des faits distincts de linfraction qui tait reproche laccus (cette rgle figure dans larticle 372 du Code de procdure pnale). Autre rgle qui simpose devant le tribunal correctionnel : il peut lui aussi accorder une victime lindemnisation de ses prjudices lorsque le prvenu est relax dune infraction non intentionnelle (cette rgle figure dans larticle 470-1 du code de procdure pnale). Droit civil des obligations second semestre notes de Marco-chan

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De manire plus gnrale, la Cour de Cassation a jug, en visant les articles 2 et 3 du Code de procdure pnale, que les rgles de fond de la responsabilit civile simposent au juge pnal qui en est saisi par la victime.

2.

Lautorit de la chose juge au criminel sur le civil. Cest un principe qui sest impos aux juridictions civiles sans que les textes laient prvu. Il a t affirm pour la premire fois par la chambre civile de la Cour de Cassation le 7 mars 1855. Cest lexpression dune rgle gnrale selon laquelle on affirme la primaut du criminel sur le civil et on tire de ce principe quelques consquences concrtes, notamment lobligation pour le juge civil de sursoir statuer dans lattente de la dcision du juge pnal (article 4 alina 2 du code de procdure pnale). Une autre consquence : laction civile qui est mene devant les juridictions criminelles dpend par exemple du rgime de la prescription pnale. De ce point de vue la rforme de la prescription de 2008 na rien modifi, au contraire, les dlais daction de la force publique ont t maintenus dans le Code civil. Autre consquence encore : lautorit de la chose juge au pnal sur le civil lie le juge civil en ce quil ne peut contredire ce qui a t jug au pnal. En matire criminelle, on sait que la dcision dune cour dassises ne fait pas obstacle une rparation civile par la cour elle-mme. Autre limite : labsence de culpabilit pnale au sens du dlabrement mental de larticle 122-1 du Code pnal, nempche pas une condamnation au civil, quand bien mme cette personne serait atteinte dun trouble mental cette fois-ci au sens de larticle 489-2 du Code Civil. Lacquittement de la relaxe ne fait pas obstacle une rparation civile lorsque laction civile est mene au titre dune responsabilit dite objective (sans faute). Dernire limite : depuis la loi du 10 juillet 2000 (relative aux dlits non intentionnels en matire pnale), labsence de faute pnale dimprudence ninterdit pas lindemnisation des victimes fonde sur larticle 4-1 du code de procdure pnale.

Paragraphe 2 :

Les frontires intrinsques de la responsabilit civile.

Il faut distinguer la responsabilit contractuelle de la responsabilit non contractuelle ou extra contractuelle. Il y a toujours un dbat savoir sil faut toujours parler de responsabilit au niveau du contrat, cela pose une relle interrogation dans la doctrine. Entre ces deux ordres de responsabilit, il y a des diffrences et des divergences. Dans la doctrine contemporaine (Philipe Letourneau entre autres), certains auteurs dnient toute ide de responsabilit en matire contractuelle. Pour ces auteurs, la responsabilit contractuelle ne devrait pas sappeler responsabilit parce quelle a une fonction exclusivement satisfactoire1 et non compensatoire : linexcution dune obligation contractuelle est sanctionne par quivalent et non en nature, et lallocation de dommages et intrts lis linexcution dune obligation contractuelle, ne permet finalement que lexcution du contrat par quivalent.

A.

Les divergences relatives entre les responsabilits contractuelles et extracontractuelles.

1.

Quant aux conditions de la responsabilit.

a.

Dabord en matire de preuve. Larticle 1315 alina 2 du Code Civil dispose de la preuve du fait gnrateur de la responsabilit dlictuelle, est toujours la charge du demandeur. Par opposition, en matire contractuelle, la responsabilit du dbiteur contractuel dfaillant est prsume. En matire contractuelle il existe des obligations dites de moyen : le crancier (contractuel) doit supporter la charge de la preuve dun manquement chaque fois que le dbiteur contractuel est tenu dune obligation de moyen.

1

Qui est de nature pouvoir expier une faute commise.

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b.

linverse, dans le domaine de la responsabilit civile extracontractuelle, le crancier est quelques fois dcharg du fardeau de la charge de la preuve, ce sera le cas chaque fois ou presque que lon mettra en uvre un rgime de responsabilit objective1 (sans faute). En matire de capacit juridique. Diffrence fondamentale, lincapacit juridique interdit de rechercher la responsabilit contractuelle dun incapable (larticle 489-2 prvoie que le trouble mental nest pas une cause dexonration de la responsabilit civile).

2.

Quant aux effets de la responsabilit. Les clauses relatives la responsabilit sont en principe valables en matire contractuelle, alors quelles sont sans effets dans le domaine extracontractuel. b. Il y a galement une diffrence quant au quantum de la rparation. En matire de responsabilit extracontractuelle, le principe est celui de la rparation intgrale (de tous les prjudices). Alors quen matire contractuelle, les seuls dommages qui peuvent conduire lallocation de dommages et intrts sont les prjudices qualifis de prvisibles, ceux qui ont t prvus lors de la conclusion du contrat. c. Les divergences relatives quant la mise en uvre de la responsabilit. i. Concernant la mise en demeure. Il sagit du commandement de lordre qui est donn dbiteur dexcuter son obligation. En pratique, il prend la forme dune LRAR (Lettre Recommande avec Accus Rception) ou par lintermdiaire dun exploit dhuissier. Cette mise en demeure du dbiteur nest obligatoire que pour la matire contractuelle (article 1146 : les dommages et intrts ne sont dus qu compter de la mise en demeure en matire contractuelle). ii. En matire de conflits internationaux. Depuis peu, les rgles relatives aux conflits de loi et de juridictions (rgles qui visent dterminer quelles sont les juridictions comptentes lors quil y a conflits entre des ordres tatiques) sont pour les pays de lUnion Europenne contenus dans des rglements communautaires rcents pour limiter ces conflits : ROME I (paru en 2007 et entr en vigueur le 17 dcembre 2009) et ROME II (parut en 2008 sur les obligations non contractuelles en vigueur depuis mars 2009). Il y a, dans la mise en uvre de ces deux ordres de responsabilit des diffrences qui peuvent tres significatifs.

a.

3.

Linterdiction de loption entre les deux ordres de responsabilit. Il sagit de ce que lon appelle le principe du non-cumul des responsabilits. Ce principe a t pos la fin du 19me sicle dans un arrt de la chambre des requtes de la Cour de Cassation qui a t rendu le 21 janvier 1890 (S.1890.1.408 ou DP.1891.1 p.380). Pourquoi interdire au crancier dune obligation contractuelle dagir sur le terrain non contractuel ? Cest parce que le rgime de la responsabilit contractuelle diffre de celui de la responsabilit dlictuelle. Les rgles de la responsabilit dlictuelle sont parfois plus favorables au crancier que les rgles de la responsabilit contractuelle : en matire contractuelle seul le dommage prvisible peut tre indemnis, alors quen matire non contractuelle tous les dommages peuvent tre indemniss. Il y a galement largument de la prescription : dlai de 5ans en matire contractuelle, souvent en matire dlictuelle, le dlai de prescription est plus long (10 annes pour les dommages corporels par exemple). Les domaines respectifs des deux ordres de responsabilit. La responsabilit contractuelle na vocation qu sappliquer dans lhypothse o un partenaire contractuel viole ses engagements. Or, il nest pas rare que les mcanismes de la responsabilit contractuelle sappliquent des personnes qui nont pas la qualit de cocontractant.

4.

1

Exemple de la responsabilit des parents de leur enfant mineur.

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6

a.

La mise en uvre de la responsabilit contractuelle entre les contractants. Laccord de volonts na pas forcment tre formalis (principe du consensualisme). La question de la mise en uvre des deux ordres de responsabilit se pose lorsque celui-ci na pas t formalis (exemple du contrat mdical reconnu partir de 1936 avec larrt Mercier, ou encore lassistance bnvole, les relations tablies avec des officiers ministriels). chaque fois quil y a contrat, la responsabilit contractuelle pourra tre engage, sauf lhypothse o la nullit du contrat serait dclare ( raison de leffet rtroactif de laction). Concernant lobligation de scurit, cest une obligation dcouverte au dbut du XX sicle, dabord dans le contrat de transport, puis tendu aux remonts mcaniques, contrat mdical. Cette extension du champ dapplication de lobligation de scurit va paralllement saccompagner de son affaiblissement, lobligation de rsultat va se transformer en une simple obligation de moyen. Cest une volution regrettable parce que paralllement laffaiblissement de lobligation de scurit en matire contractuelle, le droit de la responsabilit civile a facilit les actions des victimes sur le terrain de la responsabilit du fait des choses (articles 1384 du Code Civil, terrain non contractuel). Cest une volution qui nest pas ncessairement satisfaisante pour lesprit parce que les victimes finalement se trouveraient moins bien protges dans le cadre contractuel que dans le cadre extracontractuel. La jurisprudence a consenti dabord de limiter le champ de la responsabilit contractuelle la phase dexcution du contrat proprement dite, mais les rgles de la responsabilit extracontractuelle retrouvent application en dehors de la priode dexcution proprement dite du contrat. Le doyen Carbonnier a indiqu, en parlant du fait de faire rentrer certaines catgories dans la responsabilit contractuelle, que cest artifice que de faire entrer l-dedans de bras casss et des morts dhommes ; les tragdies sont de la comptence des articles 1382 et suivant du Code Civil. Dans sa pense, lobligation contractuelle de scurit ne serait finalement rien dautre quune mauvaise traduction du devoir gnral de ne pas nuire autrui ; il souhaitait limiter le champ dapplication de lobligation de scurit dorigine contractuelle aux seuls contrats vritablement dangereux pour lHomme. En ce sens, il est un petit peu aujourdhui suivi, avec les projets dobligations de scurit de rsultat en matire contractuelle pour certains contrats spcifiquement dangereux. La mise en uvre de la responsabilit contractuelle au-del de la sphre des contractants. Larticle 1165 du Code Civil est relatif leffet relatif des conventions, or lune des consquences rattaches la mise en uvre de ce texte est que des tiers au contrat qui seraient victimes dune mauvaise excution du contrat ne devraient pas pouvoir placer leur action sur le terrain de la responsabilit contractuelle (parce quils nont pas la qualit de partie au contrat et sont juridiquement tiers au contrat). L encore, la jurisprudence a admis lapplication de la responsabilit contractuelle ce genre de situations en inventant des notions de groupes de contrat ou encore densemble contractuel. Dans un premier temps, cest en 1820 que commence lextension de la responsabilit contractuelle. Trs tt la jurisprudence a admis quen matire de vente (opration ralisant un transfert de proprit), le sous-acqureur peut actionner son choix, lorsquil est victime des vices cachs de la chose quil a acquise, auprs du vendeur ou mme du fabricant. En deuxime lieu, la jurisprudence a choisi de suivre le mme raisonnement dans des contrats non translatifs de proprit (nayant pas pour objet un bien successivement vendu). Elle a fait application de ce raisonnement (ensemble contractuel, groupes de contrats), aux contrats dentreprise. Cest lhypothse du contrat de louage douvrage (expression disparue depuis la loi de juillet 2009, contrat visant la ralisation dun ouvrage) par lequel le maitre douvrage (le client) recherche la responsabilit du fabricant des matriaux que lentrepreneur (le constructeur) a utiliss. La jurisprudence a tendu ces chaines de contrats les mcanismes de la responsabilit contractuelle. Il a fallu un arrt du 17 fvrier 19861 pour que lassemble plnire de la Cour de Cassation

b.

1

Comment au JCP 1986 II, N 20616, avec une note du professeur Malinvaud.

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accepte lextension du champ de lapplication de la responsabilit contractuelle ces chaines de contrats qui ne sont pas exclusivement constitus de contrats translatifs de proprit (entre autres relatif des contrats de prestations de services). Troisime temps de cette volution : la jurisprudence a fini par consacrer la thorie de la chaine de contrats en labsence de transmission de toute chose. Cette dernire extension est intervenue dans un arrt rendu le 21 juin 1988 par la premire chambre civile de la Cour de Cassation. Elle indique que dans un groupe de contrats, la responsabilit contractuelle rgie ncessairement la demande en rparation de tous ceux qui ont souffert du dommage parce quils avaient un lien avec le contrat initial (grands arrts de la jurisprudence civile n 172). Le 12 juillet 1991, la Cour de Cassation dans un arrt Besse (rendu en assemble plnire, grands arrts de la jurisprudence civile, n 174) va viser expressment larticle 1165 du Code Civil et au visa de ce texte, elle va retenir une conception plus restrictive du lien contractuel, de la thorie des groupes de contrats en considrant dans un litige qui opposait le maitre de louvrage un sous traitant, que le sous traitant nest pas contractuellement li au maitre de louvrage (parce quil y a un double contrat dentreprise).

Section 2 :

Approche des fondements de la responsabilit civile.

Toute lvolution de la responsabilit civile (extracontractuelle) depuis maintenant deux sicles, est tourne vers une meilleure indemnisation de la victime. Les formules pour exprimer cette volution sont multiples. Les auteurs ont parl didologie de la rparation, ils ont pu voquer lthique de la responsabilit pour exprimer le trop plein de sollicitudes envers la victime. Cela nimporte pas vraiment parce que cette volution, ce choix, ne permet pas de rpondre la question essentielle qui dans la socit franaise doit prendre en charge et assurer le cot des dommages subis. Un dommage a toujours un cot et la seule question qui importe la socit est de dterminer qui doit lassumer. Spontanment, naturellement, cest toujours la victime qui assume ce cot ; mais la socit, travers les rgles quelle met en place peut faire partager ce cot entre plusieurs personnes. Aujourdhui on a choisi de dplacer le cot du dommage de la victime vers des tiers. Cest cela toute lvolution de la responsabilit civile. Quelle justification faut-il avancer pour justifier ce dplacement du cot du dommage de la victime vers des tiers ? Il y en a de nombreuses, qui forment les fondements de la responsabilit civile. On peut opposer les fondements classiques aux modernes : la faute et le risque, avec des thories beaucoup plus modernes.

Paragraphe 1 :

Les fondements classiques de la responsabilit civile.

Notre droit, et surtout le droit de la responsabilit civile, est un droit fortement imprgn dune morale religieuse judo-chrtienne. Pour cela, on a beaucoup de mal encore aujourdhui distinguer la rparation de la rpression. Suite cela, on a construit au moment du Code Napolon le rgime de la responsabilit civile sur lide que la responsabilit ne peut trouver son explication, son fondement, que dans la faut commise par autrui. On ne peut tre responsable que parce que lon a faut, hors lhypothse dune faute il ne peut alors de responsabilit civile. Cette thse est devenue insuffisante pour permettre dans le mouvement, lindemnisation des victimes qui mritaient dtre indemnises. Cest lindustrialisation, le dveloppement des machines-outils, la multiplication des accidents du travail au cours du 19me sicle, qui a conduit la socit franaise considrer que, quand bien mme une personne naurait pas commis de faute, cette personne devrait assumer une partie du cot li au dommage subi par une victime, dans le cas o elle aurait fait prendre des risques la victime par exemple (cest la thorie du risque, qui est venue sajouter la thorie de la faute).

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A.

La faute, premier fondement de la responsabilit civile. Elle est dfinie par larticle 1382 du Code Civil et dont larticle 1383 cr la faute non intentionnelle. Les articles 1384 et suivants constituent des rgimes spciaux qui appliquent des domaines particuliers le principe gnral de la responsabilit pour faute. Cette philosophie est la conception subjective de la responsabilit, plus communment aujourdhui, la responsabilit subjective ou responsabilit pour faute. Ce fondement de la responsabilit civile est toujours dfendu par une partie de la doctrine Plagnol assimilait la responsabilit sans faute une vritable injustice sociale. Pour lui, il ntait pas concevable, justifiable, de dclarer la responsabilit civile dune personne nayant pas commis de faute. Il fait un parallle avec le droit pnal et considre que dclarer la responsabilit civile de quelquun qui na pas commis de faute est comme envoyer un innocent en prison (dans son article du fondement de la responsabilit civile). sa suite, lun de ses lves, Ripert. Lui dnie avec force la victime, le droit de demander rparation lorsque son dommage est caus par le sort1 : quand un dommage sest produit, il ny a plus, a-t-on dit, quune question dattribution. Ne pas admettre le droit rparation est frapper la victime. Pourquoi la victime plutt que lauteur ? En ralit le choix a t fait par la force obscure du destin. Une victime doit assumer seule le cot de ses dommages si personne na commis de faute. Le risque, deuxime fondement de la responsabilit civile. Les causes de son apparition sont aujourdhui connues : cest lindustrialisation du 19me sicle, le dveloppement des machines-outils, et les martyrs de cette industrialisation (les salaris, les ouvriers, les mineurs) qui victimes daccidents du travail, une poque o le droit du travail et la scurit sociale nexistaient pas, une poque o la misre affectait de manire trs prsente le monde ouvrier, ces personnes se trouvaient dpourvues de toute indemnisation et souvent quelques fois de tout moyen de subsistance pour eux mme voir leur famille. La socit a choisi de tendre la main ces victimes, qui avaient souvent limpossibilit de prouver lexistence dune faute lorigine de leurs dommages. Dans de telles circonstances, la charge du dommage ne devait pas ncessairement incomber exclusivement aux victimes. Saleilles et plus tard son lve Josserant, ont dfendu lide que lobjet de la responsabilit civile ne devait pas se limiter la seule rparation des dommages imputables une dfaillance humaine, mais que la responsabilit civile devait galement sentendre, se comprendre comme lobligation dassumer la charge des risques dune activit humaine (susceptible de procurer des profits). Saleilles sexprimait ainsi dans Le risque professionnel dans le Code civil, la rforme sociale en 1848 : toute activit qui fonctionne pour autrui fonctionne aux risques dautrui (...) Cest celui qui en a la direction qui doit en payer les risques. Cette thorie du risque a marqu une tape capitale dans lhistoire de la responsabilit civile. Elle a t consacre par le droit franais en premier lieu par la jurisprudence. partir des dbuts du XX sicle, ct de la responsabilit pour faute (la responsabilit subjective), va naitre en droit franais une responsabilit sans faute (responsabilit objective) fonde sur le risque li certaines activits humaines. Aujourdhui les auteurs contemporains ne cherchent plus remettre en question ce fondement. La doctrine et la jurisprudence considrent que la thorie du risque, marque par une philosophie de solidarit, sajoute et cohabite avec la thorie de la faute qui elle, marque de manire plus vidente la philosophie de la responsabilit individuelle. Plus rcemment dautres thories sont apparues pour expliquer des mcanismes qui ne trouvent pas fondement dans ces thories.

B.

1

1949, la rgle morale dans les obligations civiles.

Droit civil des obligations second semestre notes de Marco-chan

9

Paragraphe 2 : A.

Les fondements modernes de la responsabilit civile.

La thorie de la garantie. Elle a t dveloppe par Starck (Boris) dans sa thse soutenue en 1947 (Essai dune thorie gnrale de la responsabilit civile considre dans sa double fonction de garantie et de peine prive). Il opre une approche originale par rapport aux thories classiques parce quil ne raisonne pas par rapport au dbiteur de lindemnisation (celui qui a commis une faute ou assume les risques), mais par rapport au crancier de lindemnisation. Il considre que lindemnisation du crancier ne doit pas dpendre de lapprciation du comportement de lauteur du dommage. Pour lui, chacun a droit au respect de sa vie, de son intgrit corporelle, chacun a droit au respect de son intgrit matrielle, une scurit matrielle et morale La consquence de son approche et la conclusion de sa thse est de dire que ds lors quune atteinte est porte lun de ces droits, cette atteinte emporte ncessairement une rparation. Il est conscient des imperfections et risques attachs son raisonnement et reconnait que ce droit gnral la scurit est un droit qui peut conduire finalement la socit, les hommes, ne plus agir. Il va chercher dans sa thse tablir une chelle entre le droit dagir et le droit la scurit, il va distinguer entre les droits. Dans une premire catgorie : le droit la vie, scurit matrielle, intgrit personnelle (droits de la personnalit et la proprit prive) o il considre que ces droits (fondamentaux) doivent lemporter sur le droit dagir. En revanche, pour les droits qui ne relvent pas de cette premire catgorie, les dommages de nature conomique ou morale ne seraient rparables (donneraient droit indemnisation) que lorsquils trouvent leur origine dans une faute. Sa thse est celle de lidologie de la rparation (dite rparation tout prix), et est inacceptable pour les tenants de la thorie de la faute.

B.

Les autres thories.

1.

La thse de Mme. Schamps. Soutenue en 1998, elle propose la conscration du concept de mise en danger. La seule mise en danger suffirait pour fonder le principe gnral dune responsabilit sans faute. Le ressort de la responsabilit civile dans sa thse, serai que celui qui exploite, dveloppe une activit particulirement dangereuse, doit tre tenu de rparer les dommages engendrs par lactivit risque mise en uvre.

2.

La thse de Mme. Thibierge. Elle se projette dans lavenir, laube de lexprience contemporaine. Elle propose de repenser la thorie de la responsabilit civile : elle fait un constat qui se veut volontairement effrayant en considrant que la socit du XXI sicle est une socit extrmement dangereuse pour les Hommes. Elle constate lapparition de risques nouveaux pour la communaut humaine, des risques qui pourraient aller jusqu mettre en pril la plante. Elle parle notamment des risques alimentaires et voque la vache folle , la grippe aviaire, les pratiques industrielles de salaison ct de ces risques alimentaires, elle voque des risques proprement mdicaux (affaire de lhormone de croissance, expriences dans la gntique) ou encore les risques industriels (nuclaire, le dveloppement des rseaux de tlphonie, rseaux informatiques) et les risques environnementaux (usage trop important des CFC). Partant de ce constat, elle propose de promouvoir une responsabilit dite de prcaution : si ces risques se ralisent lindemnisation, la rparation fortiori est illusoire pour la victime. Elle propose alors de crer de la responsabilit en amont, sur la philosophie de la prcaution, de la prudence. Il existe aujourdhui en droit franais un principe de prcaution qui nest pas un principe dabstention, mais quil faut tout mettre en uvre pour que laction que lon va intenter soit le moins risque pour les autres. cf. article dune dette de responsabilit une crance dindemnisation. Droit civil des obligations second semestre notes de Marco-chan10

Titre premier : les conditions de la responsabilit civile.Il faut un fait gnrateur de responsabilit, un dommage et un lien de causalit.

Sous-titre premier : Le dommage. Sauf si lon admet avec Mme Thibierge que la responsabilit peut exister sans dommage (dite de prcaution), il ny a pas en droit franais, de responsabilit civile dans dommage. Mme lorsquune personne commet une faute, si cette faute ne cre par de dommage, laction en responsabilit civile est interdite. La condition du dommage dtermine quelques fois laction de tiers (comme des assureurs). On dit en matire procdurale : pas dintrt, pas daction.

Section 1 :

Le dommage rparable.

Dans lavant-projet de loi Catala, il y a une distinction propose qui est lopposition entre le dommage patrimonial et le dommage extrapatrimonial. Cette distinction figurera dans le futur article 1443 du Code Civil. Aujourdhui, la distinction traditionnelle en matire de dommage est lopposition entre le dommage matriel (se rapprochant du dommage patrimonial), et le dommage moral (de rapprochant du dommage extrapatrimonial).

Paragraphe 1 :

Le dommage matriel, patrimonial.

On peut le dfinir comme le dommage qui est directement susceptible dvaluation pcuniaire. Cest dabord la perte subie loccasion de ce dommage, mais galement le gain que lon manquera cause de ce dommage. Premier chef de prjudice rparable : latteinte porte lintgrit physique dautrui (le dommage corporel, o il y a par exemple les frais mdicaux, chirurgicaux, pharmaceutiques, lis la ncessit dadapter un logement, acqurir un vhicule adapt son nouvel handicap). Il y a en outre, dans ce dommage corporel, les revenus qui seront perdus par cette victime dun dommage corporel, parce quil va tre plac sous un rgime dincapacit de travail. Tous ces lments constituent des chefs de prjudices qui sont indemniss au titre dun dommage corporel. Deuxime forme de dommage matriel : latteinte aux biens (destruction des biens intervenue loccasion de laccident). Pour pouvoir tre indemnis, il faut que le dommage prsente certains caractres : il doit tre licite (la victime ne peut demander que lindemnisation dun intrt lgitimement protg par le droit et la socit), les prjudices illicites ne sont pas indemnisables1. Il faut galement que le prjudice ait un caractre certain et probable. La jurisprudence a introduit une certaine souplesse et se contente dun caractre probable du dommage (pas ncessairement certain). Pour quun dommage soit certain, il faut que ce soit un dommage actuel, prsent (la certitude va tre pose par la nomination dun expert qui va constater ltendue du prjudice). Il y a cependant des situations dans lesquelles le caractre certain du dommage est relatif, cest une certitude relative : elle sapplique surtout aux dommages futurs (exemple de lincapacit de travail, la certitude de ce dommage nest pas absolue). La jurisprudence a pris le parti dindemniser le dommage futur, au titre dune certitude relative. Il y a galement la situation du dommage ventuel. Celui-ci est un dommage qui ne prsente aucune certitude, par dfinition. En droit franais, une hypothse ne peut jamais constituer un dommage certain (mme si elle pourrait trouver se raliser, exemple de lhypothse de travail sur lobligation alimentaire dun enfant). La perte dune chance est-elle cependant une situation justifiant la certitude dun dommage (et donc lindemnisation) ?Arrt de la 2 chambre civile du 22 fvrier 2007, pourvoi n 06-10131, Dalloz 2007 jurisprudence p.798, note de PalhawanSenthiles, voir document annexe.1

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Il sagit de la disparition actuelle et certaine dune ventualit favorable. La jurisprudence admet quun prjudice peut tre invoqu ds lors quune chance existait et quelle a t perdue, il appartiendra aux parties et aux juges dapporter toutes les pices ncessaires la preuve dune chance qui simpose a aujourdhui disparu. Les juges ont admis par exemple au titre de la perte dune chance : lindemnisation de la perte dune chance de gagner un procs (un avocat avait oubli dexercer des voies de recours disponibles), la perte dune chance de remporter des gains loccasion dune course de chevaux (disqualification dun jockey qui avait gagn), la perte dune chance de russir un concours/examen (la probabilit de russite au concours est tablie et que limpossibilit de poursuivre le concours est lie un vnement extrieur), cette perte de chance peut intervenir galement dans le cadre dune erreur mdicale. La perte dune chance est un prjudice en soi, on indemnise la perte de la chance (qui est plus ou moins probable), mais a ne conduit pas les tribunaux allouer la victime, les gains manqus pour lavenir (lorsquils trouvent leur origine dans la perte de cette chance). Le caractre direct. Lexistence de lindemnisation dun caractre direct va de soi, le prjudice indirect nest pas indemnisable ce titre (il existe cependant des situations spciales o cest possible).

Paragraphe 2 :

Le dommage moral ou extrapatrimonial.

Le dommage moral est un dommage qui ne porte pas atteinte au patrimoine (dom son appellation de dommage extrapatrimonial). Cest la souffrance vcue par la victime. Il y a deux causes cette souffrance : soit une atteinte porte son intgrit corporelle, soit celle son intgrit intellectuelle. Lorsquil y a une atteinte porte lintgrit corporelle. Elle peut causer diffrents chefs de prjudice indemnisables : - Il y a dabord la souffrance physique, ce que les professionnels appellent plus communment le pretium doloris (prix de la douleur, que lon ressent dans sa chair). On value le prix de la douleur sur une chelle qui va de 1 7 (pour tre au plafond, il faut tre dans une situation physique trs dure, souvent les trs grands bruls en soins intensifs). - Les souffrances morales. Ce sont les souffrances suite un prjudice esthtique (trs lourd, comme la dfiguration, mutilation, brulure). On peut galement indemniser les prjudices dits dagrment (notamment pour les sportifs qui du jour au lendemain se trouvent dans lincapacit de pratiquer leur sport). La jurisprudence indemnise aussi le prjudice sexuel. Il y a galement les atteintes portes lintgrit intellectuelle. Ce sont des chefs de prjudice indemnisable aux enjeux moindres : gnralement la violation de la vie prive, diffamation, injures publiques, usurpation didentit (nom de famille), divorce pour faute (quand faute exclusive), atteinte aux sentiments (perte dun tre cher) et parfois les atteintes portes aux convictions et sentiment religieux (les croyances). Il y a aujourdhui un dbat sur la raison de lexistence dindemnisation du dommage moral (le dommage moral est-il rparable ?). Cest un dbat qui a t vif dans la premire moiti du XX sicle. Des auteurs ont contest le caractre rparable du dommage moral1 (cest ce propos quon a distingu entre la rparation et lindemnisation). On trouve quelques fois la traduction de ce dbat quand il arrive que des personnes se constituant partie civile ne sollicitent que 1 euro de dommage et intrts (reconnaissance symbolique du dommage par la socit). Cela tant, cette thse na pas t reue par la jurisprudence franaise, et lindemnisation du prjudice moral a toujours t admise par les juges2. Depuis, le dommage moral a toujours t indemnis par les juridictions franaises.

1 2

Doit-on chiffrer la perte dun tre cher ? De nombreux courants considrent quil y a une certaine indcence cela. Exemple de larrt du 27 juin 1833, S.1833 part 1 p.458 avec les conclusions de Dupin.

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12

Premier argument : il faut reconnaitre que la souffrance psychologique, morale, nest jamais rparable, mais la socit doit admettre et reconnaitre cette souffrance travers une indemnisation (lindemnisation est la reconnaissance de la souffrance de lautre par la socit). Cette indemnisation peut-elle crer un sentiment de satisfaction ou de remplacement ? Le deuxime argument, moins fondamental, mais plus franc, est que le fait dallouer une indemnisation, cest aussi pour la victime une faon de sassocier la sanction qui va tre inflige lauteur du fait gnrateur du dommage (cest la notion de peine prive).

Section 2 :

Le dommage par ricochet.

Un certain nombre de dommages indirects peuvent aussi tre rpars, on les nomme, les dommages par ricochet.Cest lexemple de lemployeur qui se voit priv des services dun associ pendant de longues semaines ou mois. La victime directe est lassoci, la victime indirecte est lemployeur qui souffre de labsence de son associ.

En pratique, la plupart des procs intressant la mise en uvre dune indemnisation dun dommage par ricochet touchent le cercle familial, notamment lorsque cette personne (la victime directe), permettait la famille de vivre. Du jour au lendemain, parce quil ne peut plus travailler, la famille se trouve dmunie de toute ressource (type mme de prjudice par ricochet indemnisable). Ce prjudice est pour une part un dommage matriel, et dune autre part, un dommage moral.

Paragraphe 1 :

Le dommage matriel par ricochet.

Il correspond en pratique lhypothse o la victime directe est une victime dun accident mortel (il y a plus facilement un substitut cette perte de revenus). Si la victime ne meurt pas, elle ne percevra plus de traitements et salaires en revanche, elle va percevoir dun certain nombre dorganismes des compensations financires (indemnits journalires, indemnits dassurance). En prsence dun accident mortel, certaines personnes (que la fiscalit qualifie de personnes charge) vont devenir indirectement les victimes de ce fait dommageable (le dcs du proche). Elles vont pouvoir en leur nom propre demander la rparation de certains chefs de prjudice.

A.

Les personnes susceptibles de demander rparation. Sur cette question la jurisprudence a volu : elle est passe dune conception rduite une vision plus large. Le revirement premier est intervenu en 1937, il a ouvert la porte lindemnisation la condition que la personne rclamant lindemnisation ait un intrt lgitime juridiquement protg. Cette formule a t reprise dans 5 dcisions prises par la cour de cassation : 3 rendue par la chambre criminelle le 13 fvrier 1937 et 2 par les chambres civiles le 27 juillet 1937. Cest une formule restrictive : quelles sont ces personnes ? Cette jurisprudence va exclure la situation de la ou du fianc ainsi que les enfants naturels lorsque ceux-ci taient adultrins. partir de 1952, ces deux chambres vont avoir des analyses diffrentes du problme. La chambre criminelle va la premire avoir une jurisprudence plus librale, elle va largir le cercle des personnes autorises la perception dune indemnisation un dommage matriel par ricochet. Elle va accueillir en 1952, laction des frres et surs ; en 1954 laction de la fiance et en 1955 lindemnisation de lenfant naturel adultrin. Il faudra attendre 1959 pour quelle admette laction du concubin. En revanche, la chambre civile (plus prcisment la deuxime) va maintenir une jurisprudence plus conservatrice. Elle va refuser en 1961 lindemnisation du concubin survivant. Droit civil des obligations second semestre notes de Marco-chan

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partir de 1961, on se retrouve face une divergence de jurisprudence entre la chambre criminelle et la deuxime chambre civile de la Cour de Cassation. Cette divergence tait difficile accepter, dautant plus quelle sest maintenue pendant plus de 10 ans (par ce quon faisait au concubin survivant, un sort diffrent selon qu lorigine de la mort de son concubin on dtectait ou non une infraction pnale). Il a fallu attendre un arrt rendu par la chambre mixte de la Cour de Cassation du 27 fvrier 1970 dans lequel la Cour va statuer en faveur de la concubine survivante. Le motif utilis est que larticle 1382 du Code Civil nexige pas, en cas de dcs, lexistence dun lien de droit entre le dfunt et le demandeur en indemnisation. Jusquen 1975 il y a eu encore des refus dindemnisation lgard des concubins adultrins (jusquen 1975 ladultre tait une infraction pnale). Aujourdhui, laction en rparation du prjudice par ricochet est une action quasi exclusivement familiale (veuf/veuve, concubin/concubine, pacs(), fianc(e) et les plus proches parents : grands parents, enfants, oncles/tantes, neveux/nices). Il y a eu des cas o un associ ou un employeur a demand une indemnisation, mais cest plus titre anecdotique.

Paragraphe 2 :

Le dommage moral par ricochet.

La problmatique ici est diffrente de celle du dommage matriel : le dommage moral est une souffrance vcue par les proches de la victime. Cette souffrance est prsente dans dautres cas que le dcs.

A.

Le dommage moral par ricochet lorsque la victime initiale ou directe dcde rapidement. linverse du dommage matriel, le dommage moral concerne un cercle beaucoup plus large de victimes. Ce nombre de personnes, qui souffrent du dcs dune autre personne peut-tre trs important (lensemble des parents, les allis, amis, collgue, confrre, associ, employeur, quipier). lorigine la Cour de Cassation a exig pour la rparation dun dommage moral par ricochet un lien de parent ou un lien dalliance entre la victime directe et la victime indirecte. Vis--vis de ces personnes, la jurisprudence avait fix la prsomption dun prjudice daffection. Il sagissait dune prsomption simple qui pouvait tout moment tre renverse si un parent trop loign venait se prsenter. Paralllement lacceptation dune prsomption de prjudice daffection pour les parents et pour les allis, la jurisprudence a maintenu une exclusion pour ceux qui navaient pas cette qualit (essentiellement les fiancs et concubins survivants). Les juridictions du fond en rsistance la Cour de Cassation acceptaient cependant souvent des indemnisations pour les fiancs ou concubins survivants. Dans larrt de la premire chambre civile du 16 janvier 1962, la Cour de Cassation a admis un prjudice dordre subjectif et affectif pour la perte dun cheval (catgorie de choses) et prolonge ce revirement de jurisprudence par larrt du 27 fvrier 1970 de la chambre mixte o elle ne fait plus de distinction selon la nature du dommage pour octroyer un droit indemnisation dun prjudice par ricochet matriel ou moral lorsquun proche vient dcder. En pratique, le nombre des demandeurs et leur qualit est en fait assez limit. Il est rare que des amis sollicitent lindemnisation dun prjudice moral li la perte dun ami proche.

B.

Le dommage moral par ricochet indpendamment du dcs de la victime initiale. Cest ici lhypothse dun dommage corporel important subi par la victime directe. Il est vident que les proches de cette victime directe, qui a survcu, peuvent tres, et sont, en grande souffrance psychologique de voir ltre aim souffrir lui aussi. Aujourdhui, dans le droit positif, cette souffrance est prise en compte par la socit et donne des droits indemnisation. En 1942, la Cour de Cassation a refus lindemnisation de ce genre de prjudice pour une raison fondamentale : ce genre de prjudices ne pouvait tre indemnis quen cas de dcs de la victime directe (position de principe). En 1946, la Cour de Cassation procde un revirement de jurisprudence et admet pour la premire fois lindemnisation du prjudice moral par ricochet en cas de survie de la victime directe (avec limite). Droit civil des obligations second semestre notes de Marco-chan14

En outre, autre restriction pose par la jurisprudence : ce prjudice moral par ricochet devait tre particulirement important. En droit toutes ces restrictions ont disparu, mais de fait, elles simposent par ellesmmes (en labsence denjeux importants, les victimes du prjudice moral ne ralisent que rarement des actions). Lorsque laction civile (en rparation) est mene devant les juridictions rpressives, une difficult a t souleve et rsulte de larticle 2 du Code de Procdure Pnale : laction civile en rparation du dommage caus par un crime, un dlit ou une contravention appartient tous ceux qui ont personnellement souffert du dommage directement caus par linfraction. Dans un premier temps, la jurisprudence a interprt trs restrictivement ce texte et interdisait aux victimes civiles par ricochet dagir devant la juridiction rpressive sans leur interdire dagir devant les juridictions civiles (dans lattente de la fin du procs pnal). Dans un arrt du 9 fvrier 1989 la chambre criminelle de la Cour de Cassation1 a jug il rsulte des articles 2 et 3 de Code de Procdure Pnale que les proches de la victime dune infraction () sont recevables rapporter la preuve dun dommage dont ils ont personnellement souffert et dcoulant directement des faits objets de la poursuite.

Section 3 :

Le dommage soumis au recours des tiers.

Ce sont des situations qui sont la plupart du temps envisages par des rglementations spciales (non rfrences dans le Code Civil). Ce qui fait lunit de ces diffrents textes est que la victime du dommage dispose parfois, outre son recours contre lauteur du fait dommageable, de droits particuliers quelle pourra opposer, mettre en uvre, des tiers au fait dommageable.Exemple du droit particulier lobtention de scurit sociale pour une personne qui se trouve dans lincapacit de travailler, cest la scurit sociale qui sera amene verser les droits de la victime. Ou encore la situation dun fonctionnaire dtat qui peut, parce que dans lincapacit dexercer sn activit professionnelle, solliciter de la part de ltat, le versement de certaines pensions. Enfin la situation de ceux qui se tournent vers des socits dassurance pour lobtention de diffrentes indemnisations.

La prsence de ces tiers soulve deux questions : Est-ce que la victime peut cumuler les indemnits verses par lauteur du fait dommageable et celles verses par un tiers ? Si on admet cette possibilit de cumul, ne faut-il pas admettre alors que le tiers puisse exercer un recours contre la personne responsable ? Si on admet le cumul, aucun recours nest admissible (entre lauteur du fait dommageable et le tiers par exemple). En revanche, si on refuse le cumul des indemnits, le tiers qui a dj vers de largent la victime doit pouvoir se retourner contre lauteur du fait dommageable. Pour lessentiel la rponse ces questions a t pose par la loi du 5 juillet 1985 relative aux accidents de la circulation (sous larticle 1383 du Code Civil), cest une rglementation dordre public. Il faut distinguer dans cette loi, deux catgories de dommages, les dommages aux biens et les dommages aux personnes. En ce qui concerne les dommages aux biens, les sommes qui sont verses par lassureur ont un caractre indemnitaire (il sagit de rparer un prjudice). En ce qui concerne les dommages aux biens, rien ninterdit la victime dactionner en justice le tiers responsable si lindemnisation verse par lassureur ne couvre pas la ralit du prjudice matriel. Lassureur qui a pay, il bnficie pour ce dommage, dun recours subrogatoire (L 121-12 code des assurances), quil exercera contre le tiers responsable. Pour les dommages rsultat des atteintes la personne. Le recours nest permis que dans les conditions poses par larticle 29 de la loi du 5 juillet 1985. Larticle 28 de cette loi, lui donne une porte gnrale (alors quelle est sur les accidents de la circulation), elle concerne alors galement les accidents domestiques, les accidents sportifs et les violences volontaires. Dans cette hypothse, le tiers payeur (souvent lassureur) va disposer de deux formes de recours : soit un recours subrogatoire, soit un recours direct.1

Dalloz 1989 partie jurisprudence p.614 avec note de Bruneau.

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Lhypothse du recours subrogatoire contre le tiers responsable. Larticle 29 de la loi du 5 juillet 1985 nonce prcisment les postes qui autorisent ce recours subrogatoire : les prestations verses par les organismes de scurit sociale ; les prestations verses par des personnes publiques leurs agents ; les caisses primaires dassurance maladie pour les frais mdicaux et de rducation ; les employeurs qui pendant un temps (alors que le salari avait cess son activit) ont continu verser un salaire ; les indemnits journalires de maladie et dinvalidit. Ces prestations qui permettent un recours subrogatoire ont donn lieu une intervention lgislative rcente avec une loi du 21 dcembre 2006 qui est venue pour simplifier les conditions de la loi de 1985. Malheureusement cette loi a cr la confusion qui, par une rafale darrts (11) allant de mai juin 2009, la Cour de Cassation est venue prciser linterprtation quil fallait donner certains clairages apports par la loi de 2006 (dont surtout larrt du 19 mai 2009, pourvoi n 0884.896, voir document annexe). Lhypothse du recours direct contre le tiers responsable. Cest un recours organis par larticle 32 de la loi du 5 juillet 1985. Il sagit dun recours qui est ouvert certains tiers pour le versement de sommes qui nont pas de caractres indemnitaires. Il sagit des recours qui peuvent tre exercs par les employeurs et notamment ltat pour les charges que ces derniers ont continu payer alors que la victime ntait plus en activit. Ces rgles sont des rgles dordre public (parce que dans la loi du 5 juillet 1985).

Sous titre deuxime : le fait gnrateur de responsabilit.

Le dommage autrui, est toujours une source de responsabilit, que ce dommage trouve sa source dans le fait personnel dune autre personne ou qui la trouv directement dans le fait dune chose ou dun corps, le fait dautrui. La responsabilit dautrui dite du fait personnel est le point de dpart des mcanismes de la responsabilit civile. La thorie gnrale de la responsabilit civile repose dabord sur les mcanismes de la responsabilit du fait personnel. Quiconque cause autrui un dommage par son propre fait, doit le rparer (article 1382 du Code Civil) ; peu importe que ce fait soit intentionnel, volontaire (responsabilit civile dlictuelle) ou non intentionnel, involontaire (responsabilit civile quasi dlictuelle). Les fondements dans le Code civil de la responsabilit civile du fait personnel sont les articles 1382 et 1383 du Code Civil. ct du fait personnel, il y dautres faits gnrateurs de responsabilit, lorsquune personne est engage par le fait dautres personnes dont elle doit rpondre. Lorsquil sagit de responsabilit lie au fait de personne dont on doit rpondre, on parle de responsabilit du fait dautrui. Si on recherche le ou les fondements de la responsabilit du fait dautrui, il sagit, pour le droit commun, de larticle 1384 alina 1 du Code Civil. Le Code Civil prvoit cependant dans cet article 1384 des rgimes spciaux de responsabilit du fait dautrui.Ce sont les exemples de la responsabilit des parents du fait de leurs enfants, ce rgime est pos par le quatrime alina de larticle 1384 ; la responsabilit des maitres et commettants du fait de leurs domestiques et prposs pos par lalina 5 ; la responsabilit des instituteurs et des artisanats du fait de leurs lves et apprentis prvue par le sixime alina de larticle 1384.

Troisime source de responsabilit : la responsabilit dune personne du fait des choses quelle a sous sa garde. Le principe gnral figure dans larticle 1384 alina 1 du Code Civil. ct de ce principe gnral, il y a des rgimes spciaux (notamment la responsabilit du fait des animaux fixs par larticle 1385 du Code Civil ou la responsabilit du fait des immeubles menaant ruine pose par larticle 1386 du Code Civil). Depuis 1804, dautres rgimes spciaux se sont ajouts, malgr lapparition dun rgime gnral (notamment le fait des vhicules terrestres moteurs de la loi du 5 juillet 1985 sur les accidents de la circulation ou encore la responsabilit des fabricants et producteurs du fait de leurs produits apparus en 1998, aujourdhui ce rgime se retrouve dans les articles 1386-1 et suivants du Code Civil).

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Chapitre 1 : La responsabilit du fait personnel. Les mcanismes de la responsabilit civile (du fait personnel en particulier) ont un fondement constitutionnel. On le trouve dans larticle 4 de la Dclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 aot 1789 dans la mesure o cet article dispose que la libert consiste pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas autrui. Dans les relations de droit priv, lexpression de ce principe se trouve dans larticle 1382 du Code Civil qui est en quelque sorte la mise en uvre dans les rgles de droit priv de ce principe constitutionnel. Il a fallu attendre 1999 pour que le Conseil Constitutionnel confre la responsabilit civile expressment une valeur constitutionnelle. Cette reconnaissance est intervenue dans une dcision rendue le 9 novembre 1999 (DC 99-419) propos des dbats politiques dvelopps au sujet du PACS. La consquence est quaujourdhui, tout dommage caus autrui appelle une rparation civile. Il existe une exception, en matire de droit de la concurrence, le dommage concurrentiel est, par exception, licite, et nengage pas la responsabilit de celui qui est lorigine de ce dommage (la clientle est qui sait la prendre). La responsabilit du fait personnel est une responsabilit exclusivement fonde sur la faute.

Section 1 :

La notion de faute.

Il y a des auteurs qui se sont essays dfinir la faute et proposer des expressions permettant dclairer sur la notion de faute. Marcel Planiol par exemple, a dfini la faute comme tant la violation dune obligation prexistante ; le doyen Carbonnier sest essay la dfinir comme un fait illicite. Le reproche peut tre que ces deux propositions ne feraient que dplacer lorigine du problme. La dfinition de la faute semble alors bien impossible. Aujourdhui la doctrine contemporaine ne cherche pas dfinir la faute, ils analysent la jurisprudence et considrent que la notion de faute est un standard qui est laiss la libre apprciation des magistrats. Le magistrat a alors une mission prcise : il doit comparer deux attitudes et raliser un jugement de valeur. Il doit dabord analyser lattitude de lauteur du dommage (ce quil a fait ou pas fait) et la comparer lattitude quil aurait d avoir. Si lattitude de lauteur du fait dommageable correspond lattitude quil devait adopter, son attitude ne sera pas fautive ; si en revanche elle ne correspond pas lattitude quil devait avoir, elle sera qualifie de fautive au sens de larticle 1382 du Code Civil. Si on se tourne vers le droit prospectif on a dans lavant projet de loi de rforme des obligations, une prposition lgale de dfinition de la faute et, de lege ferenda1, larticle 1352 alina 2 propose la dfinition suivante : constitue une faute la violation dune rgle de conduite impose par une loi, par un rglement, o le manquement au devoir gnral de prudence ou de diligence. dfaut de dfinition lgale de la faute, il existe des classifications relatives la faute. Il existe aussi en droit franais une exigence de droit processuel, la ncessit pour le juge de dire en quoi consiste la faute (constater judiciairement la faute).

Paragraphe 1 :

La conception objective de la faute civile.

En matire pnale, la conception de la faute qui a t consacre par le droit est une conception subjective (selon laquelle, la faute doit tre imputable lauteur de linfraction, si elle ne lui est pas imputable, il ne pourra pas tre dclar pnalement responsable). En droit civil, la conception de la faute est plus objective parce que le droit civile a, petit petit, abandonn cette exigence dimputabilit (les civilistes emploient plutt le terme de discernement). En 1804, une personne ne pouvait tre dclare responsable civilement, que si elle tait doue de discernement (tre parfaitement consciente de ses actes). Cette exigence de principe avait des consquences importantes en matire de responsabilit civile parce que tous ceux dont on pouvait douter du discernement, devaient tres dclars civilement irresponsables (les alins, lenfant en bas ge et les personnes morales principalement). Ds le 19me sicle, la thorie de la personnalit morale va tre approfondie par les auteurs, et la responsabilit civile de la personne morale va tre admise par la Cour de Cassation ; en revanche lirresponsabilit de lInfans et de lalin va tre maintenue jusquau 20me sicle. Il y a la loi du 3 janvier 1968 relative la protection des incapables qui va abandonner le principe de lirresponsabilit civile des incapables majeurs, les alins. Aujourdhui ce principe est nonc par larticle 489-2 du Code Civil qui dispose que celui qui a caus un dommage autrui alors quil1

Du latin, quant la loi que lon doit appliquer.

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tait sous lempire dun trouble mental, nen est pas moins oblig rparation. Ce texte tait en thorie applicable aux seuls incapables majeurs va permettre petit petit labandon de lirresponsabilit des incapables mineurs et mme, en dernier lieu, labandon de lirresponsabilit de lInfans. Deuxime temps, lapplication de larticle 489-2 aux alins mineurs. Cette extension du champ dapplication du texte est intervenue pour la premire fois dans un arrt rendu par la premire chambre civile de la Cour de Cassation le 20 juillet 1976 : Lobligation rparation prvue larticle 489-2 du Code Civil, concerne tous ceux qui, sous lempire dun trouble mental, ont caus un dommage autrui. Dernier stade de lvolution, larticle 489-2 a t enfin appliqu lInfans (les mineurs en bas ge). Cette volution est intervenue dans un arrt de lassemble plnire de la Cour de Cassation du 9 mai 1984 (arrt Fullenwarth conte Felten ; pourvoi n79-16.612, commentaire au GAJC n208 et 209) o lassemble plnire considre et affirme quon ne peut reprocher aux juridictions du fond de ne pas chercher vrifier la capacit de discernement dun enfant. En conclusion, labsence de discernement, lalination ne sont plus aujourdhui une cause dirresponsabilit civile. Il y a quand mme de lintrt apprcier ltat de discernement ou dalination de la personne, parce que cela va permettre de qualifier civilement la faute qui a t commise : cest ncessairement une faute non intentionnelle, une faute qui relve du quasi-dlit civil de larticle 1383 du Code Civil (ce qui a une incidence sur le quantum de la rparation).

Paragraphe 2 : A.

Les classifications des fautes.

La distinction entre la faute civile et la faute pnale.

1.

Une diffrence quant aux personnes responsables. Le dlit civil, est indiffrent lalination ou au manque de discernement de la personne. En revanche, linfraction pnale suppose son imputabilit lauteur de linfraction, ce qui exclue la responsabilit pnale dans certaines circonstances : la situation dune personne atteinte dun trouble mental au sens pnal du terme (article 122-1 alina 1 du Code Pnal). Deuxime limite : la responsabilit pnale au sens strict, suppose que lauteur de linfraction ait atteint lge de 10 ans. Cest une responsabilit attnue en gnral pour les mineurs entre 13 et 18 ans, et ce ne sont que des mesures dites dassistance ducative entre 10 et 13 ans (cf. article 122-8 du Code Pnal pour les mineurs entre 13 et 18 ans et article 15-1 de lordonnance du 2 fvrier 1945 pour les mesures dassistance ducatives). Une diffrence quant aux sources. Le dlit civil est une faute dans un sens trs gnral ce qui a pour consquence que les quasi-dlits civils sont innoms (on ne peut tablir de liste limitative) ; a contrario, linfraction pnale est toujours dfinie par les textes (il ny a pas dinfraction sans texte). Une diffrence quant aux rsultats. Le dlit civil suppose lexistence dun dommage, en revanche, en matire pnale, linfraction peut exister sans dommage (exemple dun excs de vitesse). Une diffrence de sanction. La sanction du dlit civil est la rparation des prjudices soufferts par la victime (dfense dun intrt priv) alors que la sanction de linfraction pnale est le prononc dune peine au nom de la socit.

2.

3.

4.

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B.

Les catgories de fautes civiles.

1.

La faute de commission et la faute par omission. Lopposition est aise comprendre : la faute de commission est le fait davoir ralis quelque chose que lon naurait pas d faire ; alors que la faute par omission est une faute qui consiste ne pas avoir fait ce que lon aurait d faire (cest une abstention). lorigine la faute dabstention, a t contest par certains auteurs parce que dans notre systme libral, les individus sont libres de ne rien faire. Cette conception philosophique a connu ses succs au dbut du 19me sicle, mais aujourdhui elle est abandonne, mais dun point de vue historique, le droit tel quon le connait aujourdhui (qui sanctionne labstention) nest pas une nouveaut : sous lancien rgime, lancien droit sanctionnait la faute dabstention (cf. jurisconsulte Loisel : qui peut et nempche, pche). Aujourdhui en droit positif, les juges qualifient toujours de faute une abstention guide par une intention de nuire. Cest aussi le cas lorsquun individu commet un manquement une indication lgale ou rglementaire (comme lobligation de porter secours une personne en pril). La difficult surgit lorsquil nexiste aucun texte qui impose une obligation lgale ou rglementaire de faire quelque chose. On sest interrog sur la possibilit de sanctionner labstention alors mme quil ny a pas dintention de nuire ou dobligation lgale. Il a fallu attendre le milieu du 20me sicle pour que la Cour de Cassation dans un arrt du 27 fvrier 1951 (arrt Branly : il fallait rechercher si lauteur stait comport comme un historien prudent, avis, conscient des devoirs dobjectivit qui lui incombaient, chronique du doyen Carbonnier le silence et la gloire, Dalloz 1951 partie chronique p.119), elle sanctionne labsentions, lomission, en labsence de toute intention de nuire et de toute obligation lgale ou rglementaire. La faute intentionnelle et la faute non intentionnelle. Cette opposition correspond la distinction lgale pose par les articles 1382 et 1383 du Code Civil. Le fait quelconque de lhomme est une formule de lancien droit qui renvoie lide de la faute intentionnelle, larticle 1382 renvoie alors la faute intentionnelle commise par lhomme (dlit civil). En revanche, pour la faute dimprudence ou de ngligence (article 1383), ces termes renvoient lide dune faute non intentionnelle, cest le quasi-dlit civil de larticle 1383 du Code Civil. Le dlit civil, la faute intentionnelle, est une faute qui a t ralise avec la volont de commettre un acte dommageable avec la volont de causer autrui un dommage. Le dlit civil suppose la conscience de causer un dommage, ce qui, normalement, devrait carter lapplication de larticle 1383 du Code Civil lorsque le dommage a t caus par un incapable (alin ou Infans). Le droit civil nattache quasiment aucune consquence au caractre intentionnel de la faute : ltendue du prjudice est en fonction du dommage, et non de la faute. Il y a deux objections : lorsquune faute est intentionnelle, cette faute ne peut, en principe tre assure ; les juges peuvent tre enclins allouer pour un dommage similaire plus facilement des dommages et intrts lorsque la faute a un caractre intentionnel (alors quils ne devraient pas le faire sur le plan juridique). Le quasi-dlit civil, la faute non intentionnelle, est soit une ngligence soit une imprudence. Cette imprudence ou ngligence est le fait dune personne qui na pas voulu causer un dommage. On distingue limprudence de la ngligence parce que limprudence serait un manque de rflexion alors que la ngligence serait plus un manque dattention. En principe, la cause du dommage est indiffrente. Cela tant, il existe en matire civile, une gradation entre les fautes non intentionnelles : la faute lourde, la faute lgre, la faute trs lgre

2.

Paragraphe 3 :

Lapprciation et la constatation judiciaire de la faute.

Lapprciation judiciaire de la faute doit se raliser abstraitement, in abstracto : le juge va devoir comparer lattitude de lauteur des faits dommageables avec celle quil aurait d avoir sil avait t un homme prudent, diliDroit civil des obligations second semestre notes de Marco-chan19

gent, sil avait agi comme un bon pre de famille. Cette apprciation disparait lorsque lauteur de la faute a commis une faute intentionnelle. Dans cette hypothse, le juge va devoir se livrer une investigation psychologique de lauteur de la faute. Cest un lment important lorsque le fait litigieux est susceptible de constituer galement une infraction pnale. En matire pnale, llment intentionnel est un lment qui est souvent requis en matire dinfractions criminelles et correctionnelles. Si cet lment intentionnel est tabli, lassureur refusera dindemniser. Les cas dans lesquels le caractre intentionnel sera insuffisant : cest le cas en matire de responsabilit mdicale, lie une activit sportive o le caractre intentionnel dun fait litigieux ne dtermine pas ncessairement une responsabilit civile. Lobissance lordre donn par une autorit lgitime exclut toute responsabilit pour lauteur du fait dommageable sil na fait quobir, la condition que cet ordre ne soit ni un ordre arbitraire, ni un ordre illgal (sinon, cela dtermine de la responsabilit civile, article 122-4 du Code Pnal), cest la mme situation en cas de lgitime dfense (article 122-5 du Code Pnal) ou encor dans la situation de ltat de ncessit (article 122-7 du Code Pnal). La question de la constatation judiciaire de la faute : la charge de la preuve de la faute incombe la victime du fait dommageable, en vertu de larticle 1315 alina 1 du Code Civil, cest lapplication de ladage actori incumbit probatio. Cela tant, ce qui est lorigine de la faute est un fait juridique ; or, le fait juridique peut tre prouv par nimporte quel mode de preuve (le plus souvent le tmoignage et le jeu des prsomptions). Si le fait dommageable est galement constitutif dune infraction pnale, le ministre public devra lui aussi uvrer pour rapporter la preuve de linfraction.

Section 2 :

La faute dans lexercice dun droit, labus dun droit.

Est-ce que quelquun qui exerce une prrogative juridique qui lui est octroye par la socit, exerant un droit subjectif, peut en exerant ce droit, commettre une faute civile au sens de larticle 1382 et 1384 ? Peut-on tre responsable davoir exerc un droit ? Quelles sont alors les conditions poses par la jurisprudence pour que lexercice dun droit dtermine une responsabilit civile? Cest une problmatique qui a donn lieu, surtout dans la premire moiti du 20me sicle, des dbats doctrinaux plutt vifs ; laffaire Clment-Bayard a donn lieu un arrt de la Cour de Cassation en 1915 o il sagissait du propritaire dun terrain qui sur son terrain avait dcid ddifier diffrentes constructions en bois au sommet desquelles il avait positionn des piques en fer pour carter les ballons dirigeables de ses voisins : il a alors le droit de se clore, mais que sil nabuse pas de son doit. Ici il en abus parce que le seul but poursuivit tait lintention de nuire son voisin (3 aot 1915, commentaire dpoque Dalloz 1917, partie 1, p.79 ; commentaire contemporain GAGC n62 dernire dition).

Paragraphe 1 :

La thorie de labus dun droit.

La rception de cette thorie a t combattue par certains auteurs, notamment Plagnol qui considrait que la rception de la thorie de labus de droit tait vritablement une folie intellectuelle : un mme acte ne peut tre la fois conforme au droit et en mme temps contraire au droit. Le droit cesse l o labus commence cependant, alors tait-il vritablement un opposant de cette thorie ? Il y avait galement un courant de pense favorable cette thorie, dont le raisonnement tait que plus on a de droit, plus on a de responsabilits, les deux vont de paire (Emmanuel Levy entre autres, qui est prsent comme le thoricien du socialisme juridique). Aujourdhui, la difficult est de dterminer le critre de labus de droit. Premier lment dinformation, prsent dans laffaire Clment-Bayard, cest lintention de nuire (lorsque lexercice dun droit nest port que par lintention de nuire, il est abusif, et dtermine alors la responsabilit civile) : exemple de la situation dun propritaire qui a lev sur son terrain dune fausse chemine et dune palissade noire uniquement pour priver son voisin de la belle vue quil avait ; ou encore un propritaire qui ralise des fouilles sur son terrain et dcouvre une petite source qui alimente le terrain de son voisin en contrebas, il dtourne alors la source pour quelle nalimente plus le terrain de son voisin Droit civil des obligations second semestre notes de Marco-chan20

Sappuyant sur cette jurisprudence, Josserand a publi en 1929 un ouvrage consacr la Relativit des droits, o il soutient que les droits qui sont confrs aux individus leurs sont confrs par ltat, ds lors que cest ltat, travers la loi, qui est lorigine de ces droits, ces prrogatives sont ncessairement relatives (elles ne sont pas absolues) ; ltat ne peut pas confrer aux individus des droits susceptibles de confrer des torts lintrt gnral. La conclusion est que lindividu qui use dune prrogative qui lui a t confre par ltat des fins contraires aux finalits de linstitution (la proprit par exemple), cet individu commet un acte abusif. Cette thse dfendue la fin des annes 1920 va tre le point de dpart dune volution de la thorie de labus de droit dans la jurisprudence ; cest la thorie dite des droits-fonctions (la finalit et le but des droits). Selon Josserand, le titulaire dun droit en dispose non pas dans son seul intrt, mais dans lintrt collectif dune institution. Pour ces droits-fonctions, chaque fois que le titulaire de ce droit en use des fins autres que celles qui sont poursuivies par cette prrogative, chaque fois, il y aura abus de droit.En droit de la famille, les parents sont titulaires de lautorit parentale, cest un droit-fonction, on leur octroie des prrogatives juridiques sur leurs enfants mineurs habitants avec eux, mais dans le but dassurer lducation de leurs enfants et les protger. Si les parents usent de leur droit lautorit parentale dans un but autre que lintrt de leur enfant, on peut leur retirer lexercice de cette autorit parentale. En droit du travail, lemployeur peut licencier ses salaris condition davoir une cause dite relle et srieuse. Ce droit de licencier, octroy par ltat un individu, a une finalit sociale et institutionnelle (la protection du march de lemploi), si lemployeur ne se soumet pas cette finalit sociale, il pourra tre sanctionn par les rgles du droit du travail.

La rception de la thse de Josserand conduit aujourdhui les tribunaux tendre la thorie de labus de droit des situations dans lesquelles le titulaire dun droit ne lexerce pas de manire prudence et avise. Il y a une catgorie de droits subjectifs qui chappent a thorie de labus de droit, ce sont les droits discrtionnaires (rares en droit franais), ctait le cas par exemple des jeunes filles entre 15 et 18ans qui avaient besoin de lautorisation de leurs parents pour se marier ; le refus dautorisation mariage tait discrtionnaire, cest aussi le droit pour les compagnies dassurance de refuser lagrment dun successeur un portefeuille dassurance.

Paragraphe 2 :

La mise en uvre de la thorie de labus dun droit.

Aujourdhui la doctrine et la jurisprudence saccordent pour reconnaitre quil nexiste pas quun seul critre la thorie de labus de droit. Les critres sont les suivants : lintention de nuire, la rfrence au dtournement du droit de sa finalit sociale, et il y a enfin la rfrence dans certains arrts, la notion de faute dans lexercice dun droit (sans plus de prcision). Cette thorie est mise en uvre dans de trs nombreux domaines, extracontractuels, mais galement contractuels.Par exemple propos de la libert de contracter, propos de la rsiliation du contrat, propos des conflits de travail, propos du droit dagir en justice (il y a eu des arrts qui ont sanctionn le demandeur en justice pour avoir agi alors que le demandeur savait quil navait aucune chance de succs ou des arrts qui ont sanctionn les dfendeurs en justice pour abus de droit parce quils ont cherch opposer indfiniment des arguments don ils sauraient que ces derniers ne seraient jamais reus), mais surtout celui de labus du droit de proprit, cest dans ce domaine que la jurisprudence est la plus abondante : la fausse chemine, les piques, le tintamarre ralis par le propritaire dun terrain pour faire fuir le gibier que chassait son voisin, planter un rideau de fougres pour priver son voisin de fougres, raliser des palissades pour occulter la vue Pour labus de droit en labsence dintention de nuire : il a t jug notamment que le fait de construire un immeuble dhabitation de 21 tages (avec toutes les autorisations ncessaires), construction ralise dans intention de nuire au voisin, pouvait dtermin pour le constructeur de cet immeuble, une responsabilit civile sur le motif que cette construction en privant les autres proches avait diminu la valeur de ces derniers ; une cour dappel a galement admis que le propritaire dimmeuble ayant fait lobjet de deux arrt de prils et qui refusait sans raison valable de procder la dmolition commet un abus de droit parce quen refusant la dmolition, il prive ses voisins de la possibilit de raliser des constructions sur leurs propres immeubles.

La mise en uvre par la jurisprudence de la thorie des troubles dpassant les inconvnients normaux du voisinage. Cette thorie permet dtendre la thorie de labus de droit lencontre dtablissements industriels ou commerciaux, crant pour le voisinage des nuisances (sonores, lies lmanation de fumes, odeurs). Ces dsagrments Droit civil des obligations second semestre notes de Marco-chan

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engagent la responsabilit des tablissements au titre de labus de droit, et ceux alors mme que toutes les autorisations administratives ont t octroyes, alors mme que le propritaire de ltablissement a pris toutes les mesures ncessaires pour ne pas causer ces dsagrments.

Chapitre deuxime : la responsabilit du fait des choses.Le rgime gnral, de droit commun

Les mcanismes de la responsabilit du fait des choses reposent sur le premier alina de larticle 1384 du Code Civil : on est responsable non seulement du dommage que lon cause par son propre fait, mais encore de celui qui est caus par le fait des personnes dont on doit rpondre ou des choses que lon a sous sa garde (texte original de 1804). En 1804 ce premier alina tait un alina de transition entre les articles qui prcdaient (1382 et 1383) et les alinas qui suivaient (ainsi que les articles 1385 et 1396) ; le lgislateur de 1804 navait donn aucun sens particulier cet alina, aucune perspective juridique. Ce texte, cet alina premier naura cependant aucun sens tout au long du 19me sicle ni aucune porte juridique. Cest au crpuscule du 19me sicle que la jurisprudence va donner cet alina une vritable porte juridique. La premire qui va lui tre donne est den faire un principe gnral de responsabilit du fait des choses (qui sappliquera toutes les choses sauf les animaux, article 1385 et les immeubles, article 1386). Cet alina qui navait aucun intrt en 1804 va devenir partir de la fin du 19me sicle un texte essentiel en matire de responsabilit des choses. Postrieurement, vont tre crs dautres rgimes spciaux de responsabilit du fait des choses ; notamment en droit interne avec la loi du 5 juillet 1985 relative aux accidents de la circulation (pour les vhicules terrestres motoriss). Postrieurement cette loi, le lgislateur franais a galement transpos une directive communautaire, et depuis la loi du 19 mai 1998 il existe un rgime spcial de responsabilit du fait des choses, la responsabilit du fait des produits dfectueux (articles 1386-1 et suivants du Code Civil).

Section 1 :

Lorigine du principe gnral de la responsabilit du fait des choses.

Pour quelles raisons la fin du 19me sicle est apparu ce principe gnral de la responsabilit du fait des choses ? Pourquoi les tribunaux ont donn une porte juridique cet alina ? La responsabilit du fait des choses tel quelle avait t pense au dbut du 19me sicle est apparue la fin de ce sicle, largement insuffisante pour faire face aux volutions de la socit et aux problmatiques poses par lvolution de la socit franaise. Cest une socit qui a connu sa rvolution industrielle, avec le dveloppement du machinisme (lutilisation sans cesse croissante des machines-outils). Ce dveloppement a multipli les accidents du travail. Or, lorsquun salari tait victime la fin du 19me sicle, dun accident du travail, il ne pouvait esprer du fait de cet accident, une indemnisation, que dans un cas sil rapportait la preuve de la faute commise par son employeur. Or dans le cas de laccident dune machine-outil, lemployeur ny est subjectivement pour rien, par consquent, les chances pour le salari dtre indemnises en cas daccident du travail, taient trs limites. Il faut prendre en compte que les accidents du travail augmentent alors que les chances dindemnisations ne bougent pas sachant quil ny a pas ce moment-l de systme dassurance sociale et non plus de systme dassurance prive. Ce principe gnral de la responsabilit du fait des choses est n dun arrt de principe de la Cour de Cassation, dans un arrt rendu le 16 juin 1896 (Dalloz 1897, partie 1, p.433 avec les observations de Saleilles) connu sous le nom de larrt du remorqueur. La Cour de Cassation reconnait la responsabilit de lemployeur au profit de lemploy. Saleilles et Josserand ont justifi cette position par la prise en compte de la thorie du risque : une machine industrielle est un outil qui permet daccroitre les profits, par consquent, ds lors quelle multiplie aussi les risques pour les utiliDroit civil des obligations second semestre notes de Marco-chan22

sateurs, celui qui a introduit ce danger nouveau doit en assumer la contrepartie, c'est--dire, les risques (l o est lmolument, l est la charge). Cette volution jurisprudentielle va tre trs rapidement consacre par le lgislateur, le 9 avril 1898 il vote pour la premire fois en droit franais, une loi relative aux accidents du travail. Par consquent, cette loi de raction par rapport larrt remorqueur, rend quasiment inutile cet arrt. Les arrts qui ont suivi vont sloigner en quelque sorte de la thorie du risque de Saleilles et Josserand, en considrant que la responsabilit du gardien est une responsabilit fonde sur une prsomption de faute. La seule faon pour le gradient de la chose de sexonrer de cette faute prsume est de rapporter la preuve quun vnement de force majeur est lorigine du dommage. lissue de la Premire Guerre mondiale, dans les annes 1920, une nouvelle problmatique apparait : les