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DROIT INTERNATIONAL PRIVÉ 2 Cours de Madame Porcheron Delphine de 2013 Master 1 Droit Privé Semestre 2 Fisch Kevin lundi 29 avril 2013 1

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Page 1: Droit International Privé COMPLET

DROIT INTERNATIONAL PRIVÉ 2

Cours de Madame Porcheron Delphine de 2013

Master 1 Droit PrivéSemestre 2

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PARTIE 1: DROIT DES

PERSONNES ET DROIT EXTRA-

PATRIMONIAL DE LA

FAMILLE

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Les questions relatives au droit des personnes et au droit extra-patrimonial appartiennent au statut personnel.Ce statut inclut traditionnellement les statuts individuels de la personne et les relations de la famille.

Origine du statut personnel:

Cette expression est ancienne et antérieure au DIP moderne, c’est à dire antérieure à la méthode savygnienne.C’est une survivance de ce qu’on appelait la «théorie des statuts».Aujourd'hui, on parle toujours de statut personnel même si elle est discutée.cette catégorie est actuellement éclatée et contient donc des rattachements diversifiés.La catégorie statut personnel trouve sa spécificité grâce à des caractères généraux qui sont au nombre de 3:

• La non disponibilité des droits. Lorsqu’on s’attache au DIP commun, on se rend compte que la volonté est toujours, pour l’instant, tenue à l’écart. Donc la règle de conflit française demeure objective. C’est pourquoi l’application d’office de la règle de conflit trouve son terrain d’élection en matière de statuts personnels.

• Il n’existe pratiquement pas dans cette matière de règles matérielles propres aux situations internationales (à l’exception de règles qui figurent dans des Conventions internationales). Du fait de l’absence de ces règles matérielles, le statut personnel est l’un des principaux domaines d’intervention de l’exception d’ordre public.

• Il s’agit ici de rechercher la permanence de la loi applicable à la question donnée afin d’éviter qu’une personne soit soumise à des règles différentes au gré de ses déplacements. Donc ici l’objectif principal est d’assurer la continuité de la situation afin d’éviter ce qu’on appelle les « statuts boiteux». On entend par cette expression une solution qui varierait selon que la personne se situe dans des Etats différents. Une personne pourrait être considérée comme mariée en France alors qu’elle serait considérée comme divorcée au Brésil, par exemple. Pour éviter cela, on va associer à la catégorie de rattachement un rattachement stable et, de même, on promeut la reconnaissance de plein droit des jugements étrangers d’état et de capacité.

La doctrine et la JP a essayé de rattacher à cette catégorie un élément de rattachement qui soit le plus stable possible. On a utilisé l’élément prévu à l’article 3 alinéa 3 du code civil

« les lois concernant l’état et la capacité des personnes régissent les français même résidant en pays étranger».

Donc ici l’élément de rattachement est la nationalité.L’option adoptée par cet article était une option révolutionnaire puisqu’auparavant le critère utilisé était celui du domicile.En ce qui concerne les autre pays, c’est le mouvement des idées qui a mené certains d’entre-eux à adopter l’élément de rattachement national. Ce mouvement des idées peut être rattaché à Mancini.Sa thèse en faveur du rattachement du statut personnel à la nationalité est devenue instantanément célèbre puisqu’elle s’insérait dans les idées politiques du moment (éveil des nationalités à cette époque).

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Pour Mancini, il s’agissait de substituer le principe rationnel de la nationalité à celui, empirique, du domicile.Plus particulièrement, pour Mancini, il découle du principe démocratique que les lois sont l’expression de la volonté générale si bien qu’elles doivent s’appliquer aux Italiens en tout lieu et à eux-seuls.Les idées de Mancini se sont manifestées particulièrement en Italie mais aussi en Allemagne. Dans ces deux Etats, le domaine de la catégorie de statut personnel est plus étendu qu’il ne l’est en France. Par exemple, le droit des successions mobilières relève de la loi nationale en DIP italien et allemand alors qu’en DIP français, pour le moment, on retient le dernier domicile du défunt ( mais un règlement à venir du 4 juillet 2012 va réformer le DIP des successions).

Toutefois, il existe des Etats qui suivent le rattachement à la loi du domicile. C’est le cas de la Grande- Bretagne, de l’Irlande, du Danemark, de l’Islande, de la Norvège et de la Suisse. Parmi ces Etats, le cas de la Grande-Bretagne est le plus important, là où le rattachement est le plus fort avec le domicile.

Au niveau mondial, le DIP des USA et du Canada retient le rattachement au domicile. Il en va de même en Australie et dans un certain nombre d’Etats d’Amérique du Sud.Donc le rattachement à la loi nationale est devenu assez marginal.De façon plus générale, on assiste ces dernières années à une remise en cause des solutions traditionnelles du DIP, notamment au nom des droits de l’Homme.Par exemple, le rattachement à la loi nationale sera écarté au profit de la reconnaissance de la situation valablement créée à l’étranger: Arrêt Wagner c/ Luxembourg, CEDH, 28 juin 2007.

CHAPITRE 1: LA CAPACITÉ

Elle correspond à l’aptitude reconnue à tout individu à acquérir un droit et à l’exercer.La notion de capacité englobe des institutions très hétérogènes et son étude en DIP conduit à distinguer l’état d’incapacité et la protection organique des incapables.Cette distinction emporte des conséquences au regard des règles de conflit applicables.L’état de capacité se présente de façon classique comme une question de conflit de lois. En revanche, la protection de l’incapable, du fait qu’elle fait souvent intervenir des autorités administratives et/ou judiciaires, mêle étroitement les conflits de lois aux conflits de juridictions dans la mesure où il convient de déterminer à la fois l’autorité compétente et la loi applicable à la protection de l’incapable.

Section 1: L’état d’incapacité

Paragraphe 1: détermination de la loi applicable

Question qui se pose: Quelle est la règle de conflit de loi en la matière?En principe, l’incapacité relève de la loi personnelle. Selon la conception française, il s’agit de la loi nationale.

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Cette solution a été admise rapidement par la Jp du 19ème siècle qui a bilatéralisé l’article 3 alinéa 3 du code civil.

Arrêt BUSQUETA du 13 juin 1814

Faits:

Un moine espagnol avait rompu ses voeux.Il est venu en France où il a épousé une femme de nationalité française. Or selon les droits

espagnoles de l’époque une personne ayant prononcé les voeux de chasteté ne pouvait se marier.Comme le domicile de cette personne était en France, il aurait été possible de recourir au droit

français en se basant sur le rattachement au domicile.Mais la Cour de cassation a appliqué la loi espagnole car la personne en cause était de nationalité

espagnole.

Conclusion:

L’état et la capacité est soumise à la loi nationale.

Il y a quand même un élément de complication qui résulte de la distinction opérée en DIP entre les incapacités de jouissance spéciales et les incapacités d’exercice.L’incapacité de jouissance traduit l’inaptitude d’un individu à jouir d’un certain droit. Ces incapacités de jouissance sont toujours spéciales.

Exemple: - un médecin qui soigne un mourant ne peut bénéficier de legs de son patient.- incapacité de disposer à titre gratuit du mineur âgé de moins de 16 ans.

L’incapacité d’exercice est l’inaptitude d’une personne d’exercer certains droits par elle même.Ces incapacités n’empêchent pas une personne d’exercer certains droits mais la prive de la possibilité d’agir par elle-même. Cette personne doit se faire assister ou représenter.Deux catégories de personnes sont frappées d’une incapacité d’exercice: les mineurs et certains majeurs.Cette distinction est susceptible d’influer sur les solutions du DIP. Concernant les incapacités générales d’exercice: on considère la personne en tant que telle. Donc cette incapacité générale les suit partout c’est pourquoi ces incapacités sont soumises à la loi nationale de la personne afin d’assurer un maximum de continuité.Concernant les incapacité spéciales de jouissance, elles doivent relever de la loi de la matière visée.

Exemple: dans le cas du médecin, cette incapacité relève de la loi de la succession du de cujus.

La loi nationale détermine des causes qui peuvent être à la source d’une incapacité comme par exemple, la minorité, démence. C’est ainsi la loi de la nationalité qui décidera de l’âge de la majorité.Arrêt chambre civile Cour de cassation, 6 juin 1990

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Illustration 1: Les incapacités naturelles

Elles sont également incluses dans la catégorie statut personnel. Une incapacité naturelle découle d’une situation de fait.C’est l’exemple de la personne frappée de démence ou d’insanité d’esprit.Ces incapacités naturelles ont soulevé un problème de qualification en DIP. En effet, le sort des actes juridiques de ces personnes relèvent-ils du statut personnel ou du statut de leur acte?

Arrêt Cour de cassation, 25 juin 1957, SILVIA

« L’insanité d’esprit et la démence constituent en réalité des cas d’incapacité naturelle soumis à la loi personnelle et non à la loi régissant les actes juridiques mentionnés comme les liens du

consentement»

Faits:

Problème de validité d’un contrat soumis à la loi française et signé par une italienne qui était alors sous le coup d’une grave dépression ( donc démence selon la Cour).

Il fallait qualifier la situation et on pouvait ici hésiter entre deux règles: soit qualification de statut personnel qui renvoyait en l’espèce à la loi nationale italienne soit qualification du consentement de

la personne donc on était ici sur le terrain de la loi du contrat.Selon le droit italien applicable à la capacité, le demande en nullité du contrat n’était plus possible

car elle a été tardive. En revanche, selon la loi française l’action en nullité était recevable.La qualification se fait lege fori donc selon les propres conceptions du juge.

En 1957 en France, avant la réforme des incapables, le droit civil interne français considérait la nullité des contrats conclut par des déments comme une nullité pour défaut de consentement et non

pour une incapacité.Si on transpose cette qualification en droit international, on qualifie la matière contractuelle et donc

la loi française était applicable.

Solution:

Pourtant, ce n’est pas la solution retenue par la Cour qui a considéré que la démence constitue un cas d’incapacité naturelle soumise à la loi personnelle donc la loi italienne ici.

Pour la Cour, la qualification du droit civil interne doit céder le pas à une autre qualification si cette qualification est plus conforme au besoin du droit international privé.

Donc en l’espèce, on retrouve le souhait de faire régir par la loi nationale tous les cas de démence, d’incapacité sans distinguer si le majeur a déjà été soumis ou non sous tutelle.

Il y a donc une recherche de cohésion de la catégorie.De plus, si on imaginait que l’on classe la démence dans la catégorie « actes juridiques» cela

signifierait que la question soit soumise à la « loi d’autonomie». c’est la loi applicable au contrat et qui est choisie par les parties. Cela signifierait que cette question relèverait de la loi choisie par les

parties donc. Or, l’adéquation ici ne serait pas parfaite.Donc la Cour a choisi une adéquation entre la catégorie et la rattachement retenu ici.

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Cela admet à opérer une extension de la catégorie de rattachement qui a été faite en se basant sur la nature de la question à résoudre et non en fonction de la solution substantielle que lui apportait le

droit civil interne.

Illustration 2: la capacité matrimoniale

Elle relève de la loi nationale de l’incapable. Ce rattachement coïncide avec le rattachement des conditions de fond du mariage.

Illustration 3 : la capacité de conclure un contrat de mariage

En droit interne, à l’article 1398 du code civil, on a un adage selon lequel le mineur capable de contracter mariage est capable de consentir toutes les conventions dont ce contrat est susceptible et les conventions et donations qu’il y a faite sont valables pourvu qu’il ait été assisté des personnes dont le consentement était nécessaire pour la validité du mariage.Mais faut-il considérer qu’il s’agit d’une incapacité générale parce qu’il est mineur ou d’une incapacité spéciale parce qu’elle se rattache à une règle propre au contrat de mariage?La Cour de cassation a décidé ici que cette règle est une simple modalité de la capacité générale d’un individu à contracter donc relève de la loi nationale.

Arrêt PATINO, civile 1er, 15 mai 1963, seconde espèce.

Faits:

Époux Patino qui se marient. Mais la veille de leur mariage ils ont passé un contrat de mariage qui prévoyait la séparation de biens du droit bolivien des époux.

Madame Patino était mineure à cette époque et avait obtenu de son père adoptif l’autorisation de conclure cette convention matrimoniale.

Lorsqu’elle a voulu divorcer elle s’est rendue compte que le régime retenu n’était pas à son avantage. Elle a donc choisi d’agir en nullité du contrat au motif de son incapacité au moment de la

conclusion.

Solution

La Cour a décidé que l’habilitation d’une mineur à la conclusion d’un contrat de mariage ressort de sa loi personnelle à la date du contrat.

A la date du contrat, Madame était espagnole donc il convenait d’appliquer la loi espagnole. Or cette loi obligeait l’assistance et non la simple autorisation du mineur pour contracter une

convention matrimoniale. Par conséquent, le contrat a été annulé.

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Paragraphe 2: Mise en oeuvre de la règle de conflit de lois

I- Le renvoi

Imaginons que la règle de conflit du for désigne la loi étrangère. mais selon la règle de conflit du système étranger désigné, sa propre loi n’est pas applicable. Il décline donc sa compétence. Il y a alors un conflit négatif de système.C’est ce qu’on appelle l’hypothèse du renvoi: renvoi au premier degré lorsque le système étranger redonne compétence à la loi du for et au deuxième degré lorsqu’il donne compétence à un autre système étranger.En matière de capacité, la loi applicable est la loi nationale.On s’est posé la question de l’applicabilité du renvoi ici.Le renvoi a été admis sans difficulté puisque ce qui importe ici n’est pas tant l’application de telle ou telle loi mais l’application d’une loi unique garantissant la permanence du statut d’incapable.

Arrêt, civile 1, 21 septembre 2005

Faits:

Mise sous tutelle d’une femme de nationalité canadienne qui était domiciliée en France depuis des décennies.

Le jugement d’ouverture de la tutelle a été attaqué et le pourvoi reprochait au jugement d’avoir retenu la compétence de la loi française par suite d’un renvoi au premier degré opéré par la loi

canadienne à la loi française.

Solution:

La Cour approuvé ce jugement d’avoir appliqué la renvoi.

II- L’exception d’ordre public international

Elle pourrait intervenir pour évincer la loi étrangère édictant une discrimination religieuse, sexuelle ou raciale.Ce pourrait être également le cas d’une incapacité qui atteindrait la femme mariée en général ou une loi qui maintiendrait une mineure sous tutelle après son mariage.

Arrêt Cour d’appel de Nancy, 23 octobre 1989

A l’heure actuelle, l’intervention de l’OP se retrouve surtout en matière de protection des mineurs et, plus particulièrement, en matière d’autorité parentale où l’OP aura vocation à intervenir à l’encontre d’une loi qui attribuerait automatiquement la garde d’un enfant à un parent déterminé en fonction de l’âge ou du sexe de l’enfant.

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III- Le conflit mobile

Il s’agit d’un changement de la circonstance de rattachement.Il y aura un conflit lorsque la nationalité ou le domicile change, par exemple.En matière d’incapacité, le conflit mobile est susceptible d’intervenir.

Quelle loi appliquer alors? Continuer d’appliquer la loi de son ancienne nationalité ou la loi de sa nouvelle nationalité?

On applique la solution générale en matière de conflit mobile et qui consiste à appliquer immédiatement la loi nouvelle.Évidemment, cela peut aboutir à une rupture dans la protection de l’incapable dans la mesure où la loi nouvelle peut très bien considérer la personne comme capable alors que la loi ancienne la considérait comme incapable.Un éventuel changement de nationalité ne remet pourtant pas en cause la validité des actes accomplis sous l’empire de l’ancienne loi.

IV- L’ignorance excusable de la loi étrangère

Mécanisme propre à la capacité en DIP.Son existence s’explique par la volonté de protéger les tiers puisqu’une personne amenée à contracter avec un incapable n’est pas forcément au courant des incapacités de cette personne.Or, l’incapacité peut conduite à l’annulation du contrat passé avec le tiers.La jurisprudence a eu à résoudre cette question.

Arrêt LIZARDI, chambre des requêtes, 16 janvier 1861

Faits:

Un jeune homme mexicain âgé de plus de 21 ans mais considéré comme mineur par la loi mexicaine.

Cette personne avait acheté des bijoux dans une prestigieuse bijouterie à Paris.Il a finalement demandé l’annulation du contrat pour cause d’incapacité.

Solution:

En l’espèce, il a été admis que son contractant, le bijoutier, pouvait demander l’exécution du contrat en invoquant son ignorance excusable de la loi étrangère.

Le fondement de cette solution n’est pas très claire, on hésite entre deux explications.Pendant un premier temps, on a considéré que l’ignorance excusable portait sur le contenu de la loi étrangère. Dans un second temps, certains auteurs ont estimé que l’ignorance ne portait pas sur le

contenu de la loi étrangère mais sur la règle de conflit elle-même.

Cette solution a été reprise par la Convention de Rome de 1980 et par le règlement Rome 1 concernant la loi applicable aux obligations contractuelles à l’article 13.

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Selon ce texte, une personne physique capable de contracter selon la loi du lieu de conclusion ne peut invoquer son incapacité selon une autre loi que si au moment de la conclusion du contrat, le co-contractant a connu cette incapacité ou ne l’a ignoré qu’en raison d’une imprudence de sa part.

Section 2: La protection organique des incapables

Cette protection nécessite l’intervention d’organes tels que le tuteur, le curateur, le conseil de famille ou encore des autorités judiciaires ou administratives.Les difficultés qui en résultent ont une double origine:

• Il existe une grande divergence entre les systèmes juridiques nationaux puisque certains Etats exigent que les mesures de protection soient prises par les autorités alors que d’autres Etats dans des situations comparables ne vont mettre en place qu’une protection familiale.

• Le fait d’avoir des autorités qui interviennent a pour résultat que le conflit de lois va se doubler d’un conflit d’autorités, lequel aura tendance à l’emporter sur le conflit de lois.

Paragraphe 1: La protection classique du mineur

Cette protection est réglementée par deux conventions internationales et un règlement du droit de l’UE.

I- Le droit conventionnel

On a ici deux conventions de la Haye:

• Une signée en 1961 qu’on appelle convention concernant la compétence des autorités et la loi applicable en matière de protection des mineures.

• Cette convention est peu à peu remplacée par la Convention de la Haye concernant la compétence, la loi applicable, la reconnaissance, l’exécution et la coopération en matière de responsabilité parentale et des mesures de protection des enfants de 1996 ou «convention enfant».

Ces conventions ont été créées sous l’égide de la Conférence de la Haye, institution internationale et qui oeuvre pour l’unification du DIP.La convention de 1996 est entré en vigueur en France le 1er février 2011 et est destinée à remplacer la convention de 1961.

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A- Champs d’application de la convention de 1996

Elle précise tout d’abord les enfants auxquels elle s’applique: ce sont tous les enfants de leur naissance jusqu’à 18 ans.Cela ne signifie pas que l’âge de la majorité sera nécessairement de 18 ans dans tous les Etats contractants mais que les dispositions de ce texte ne seront plus applicables aux personnes qui auront dépassé cette limite d’âge.Le domaine matériel recouvre toutes les modalités relatives aux conditions d'exercice de l’autorité parentale, la protection de l’enfant et la protection de ses biens.

Exemple: dans une affaire de négligence grave les Etats contractants prennent des mesures pour soustraire l’enfant à ses parents et la question du retrait total de la responsabilité parentale rentre dans le champs matériel d’application de la convention.

B- La règle de compétence juridictionnelle retenue par la convention

Les règles concernant la compétence juridictionnelle ont inspiré celles du règlement Bruxelles 2bis.La règle retenue est la compétence des autorités de la résidence habituelle.La convention précise également qu’en cas de changement de la résidence d’un enfant, sauf dans le cas d’un déplacement illicite, les autorités de la nouvelle résidence habituelle de l’enfant sont compétentes.

C- Loi applicable

La convention précise que les autorités saisies appliqueront leur propre loi. Donc la loi applicable est celle de la résidence habituelle de l’enfant.Toutefois à la différence de la convention de 1961, il n’y a plus de compétence concurrente entre les autorités nationales de l’enfant et les autorités de la résidence habituelle de l’enfant.Pour éviter que ce mécanisme soit trop rigide, les rédacteurs ont inclus une clause d’exception fondée sur l’intérêt supérieur de l’enfant.Cela signifie que lorsque l’autorité saisie considère que la loi de la résidence habituelle de l’enfant s‘avère inappropriée en l’espèce, dans ce cas là elle pourra appliquer ou prendre en considération la loi d’un Etat avec lequel l’enfant a un lien étroit.

Exemple: un enfant résidant en France possède un bien immobilier en Australie. Le bien doit être vendu. Si on applique les règles de protection françaises à la vente de ce bien, cela pourrait poser certaines difficultés notamment concernant la forme à donner à l’autorisation de la vente de ce bien. Dans ce cas là, le droit australien pourrait être appliqué par le JAF ou tout au moins être pris en considération afin de rendre une décision assurant la protection de l’enfant et permettant de façon optimale la mise ne vente de son bien.

En cas de changement de la résidence habituelle, la convention prévoit que la loi de la nouvelle résidence sera applicable.

II- Droit de l’UE

Le droit de l’UE a adopté le règlement Bruxelles 2bis du 27 novembre 2003.Ce règlement régit la compétence des juridictions et les effets des décisions en matière de divorce et en matière de responsabilité parentale.

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En matière de conflit de juridiction, la compétence de principe est attribuée à la juridiction de la résidence habituelle de l’enfant.

Quelle est la relation entre la convention de 1996 et le règlement Bruxelles 2Bis?

Pour les Etats membres de l’UE à l’exception du Danemark, le règlement aura la priorité dès lors qu’un enfant a sa résidence habituelle dans un Etat membre de l’UE.

Paragraphe 2: La protection du majeur

C’est la convention de la Haye du 13 janvier 2000 sur la protection internationale des adultes.Une évolution s’est produite depuis un certain nombre d’années en raison de l’internationalisation croissante des modes de vie ainsi que l’allongement de la vie humaine.Ces deux phénomènes, effectivement, font que de plus en plus souvent des personnes âgées s’installent dans des Etats autres que leur Etat national ce qui peut être la source éventuelle de graves difficultés si ces personnes viennent à souffrir d’une altération de leurs facultés mentales puisque ici l’application de la loi nationale ne sera pas toujours appropriée, surtout quand la personne n’a plus de contact avec son Etat national.Au vu de cela, la Conférence de la Haye a élaboré la Convention du 13 janvier 2000, censée répondre à ces nouvelles préoccupations.Elle est entrée en vigueur en France le 1er janvier 2009.

I- Champs d’application

Elle concerne les adultes, personnes ayant atteint l’âge de 18 ans.Les mesures de protection concernées sont énumérées de façon non limitative.On y trouve divers régimes juridiques d’incapacité qui sont prononcés dans des termes assez larges afin d’englober, si possible, chaque législation avec toutes ses nuances.Elle concerne également des mesures à effet immédiat, comme le placement dans un établissement et l’autorisation d’une intervention ponctuelle.

II- Règles de compétence

La convention prévoit la compétence générale des juridictions de l’Etat de résidence de l’adulte avec, cependant, une compétence concurrente des autorités nationales de la personne protégée et des autorités du lieu de situation des biens de la personne.

Pourquoi ces deux compétences concurrentes?

Parce que la concurrence est apparue nécessaire spécialement dans le cas où la personne st placée dans la famille dans une institution de soin ou de retraite.Il a été relevée que les autorités judiciaires et sociales de certaines villes d’eau peuvent être assez peu motivée pour faire face aux multiples demandes de protection adressées à elles.

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III- La loi applicable

Encore une fois, le conflit de loi suit le conflit d’autorité.On dit souvent dans ce cas là que le conflit de loi est absorbé par le conflit de juridiction.Cela signifie que la loi applicable est la loi de l’autorité saisie.Dans la mesure où la protection de l’adulte le requiert, la loi d’un autre Etat avec lequel la situation a un lien étroit sera appliquée.

Ces différentes conventions de 1996 et de 2000 sont novatrices en ce qu’elles instituent un mécanisme de coopération entre les Etats contractants.Cette coopération est mise en oeuvre par la création d’autorités centrales dans chaque Etat contractant.Pour la convention de 1996, cette autorité centrale est, en France, le Bureau de l’entraide civile et commerciale international du ministère de la justice et des libertés. Toute personne qui est confrontée à un problème concernant la protection d’un enfant peut faire appel à cette autorité centrale pour savoir comment peut être mise en oeuvre la procédure de protection du mineur.

CHAPITRE 2: LE COUPLE

Section 1: Le mariage

Le DIP du mariage a toujours été un domaine de choix du DIP avec la théorie des conflits de lois.La raison de cela est que, certes, le mariage représente un concept qui a une unité fondamentale dans différents droits, mais il n’en reste pas moins que l’on voit apparaitre des divergences et notamment en ce qui concerne le mariage polygamique.Et de même, en ce qui concerne les modalités de conclusion du mariage, il existe des divergences assez profondes.Ces divergences sont d’autant plus sensibles que les populations sont de plus en plus mobiles.

Sous-section1: Le mariage traditionnel

Cette institution du mariage est connue dans tous les systèmes, avec toutefois quelques particularités. En droit français, par exemple, le mariage est au coeur du droit civil alors qu’en Angleterre le mariage peut être célébré civilement ou religieusement.Le mariage est par ailleurs une question sensible puisqu’il a une incidence sur le droit de séjour et la nationalité: il a donc une importance d’un point de vue politique.En France, par exemple, il faut attendre 4 ans après la célébration du mariage pour obtenir la nationalité française.

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Paragraphe préliminaire: Les fiançailles ou promesses de mariage

Cette institution est assez désuète en France mais existe toujours.La question des promesses de mariage et notamment la question de la loi applicable à une éventuelle sanction d’une rupture des fiançailles soulève en DIP une question intéressante, celle du renvoi de qualification.La rupture de fiançailles en DIP français est qualifiée de délit et donne lieu à des dommages et intérêts. En France, la loi qui lui est applicable est celle du lieu où la rupture s’est tenue.En revanche, en Allemagne la rupture des fiançailles relève de la catégorie statut personnel et par conséquent est soumise à la loi nationalité du fiancé victime.Imaginons que deux fiancés ont la nationalité française et rompent leur fiançailles à Berlin.Selon le DIP français, la loi applicable est celle du lieu de rupture. Donc le droit allemand est désigné. Or selon le système allemand cette question rentre dans la catégorie statut personnel ce qui mène à l’application du droit français. Il s’agit donc d’un conflit négatif de système de DIP et ce conflit négatif nait d’une différence de qualification.Mais le mécanisme de renvoi de qualification permet de répondre à cette difficulté en prenant en considération la conception du droit étranger quant à la construction de ces catégories.Donc dans notre hypothèse, la technique sous-tend l’acceptation par le système juridique français la qualification retenue par le DIP allemand.

Paragraphe 1: La formation du mariage

I- Les conditions de fond

A- Principe: Application distributive de la loi nationale de chaque époux

Le mariage fait partie de l’état des personnes et donc on applique l’article 3 alinéa 3 du code civil français.De plus, si on regarde l’article 171-1 du code civil relatif aux conditions de forme du mariage, il y a une précision selon laquelle, dans le cadre d’un français qui se marie à l’étranger selon les formes locales, ce mariage est valable pourvu qu’il n’ait point contrevenu aux conditions de fond françaises.

Il n’y a pas de difficulté lorsque les deux époux ont la même nationalité.Mais quand les deux époux sont de nationalités différentes, l’application des conditions de fond est en principe distributive. On applique la loi nationale de chacun des futurs époux.Cette solution consiste à apprécier séparément, pour chaque époux, les conditions de fond de son mariage par application de sa propre loi nationale. Aujourd’hui, cette règle est le plus souvent mise en oeuvre pour faire constater la nullité des mariages de complaisance ou des mariages forcés qui sera prononcée pour faute de consentement.

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Arrêt, chambre civile 1, 1er juin 2011

Faits:

Les tribunaux français avaient été saisis sur le fondement de la loi française d’une demande en nullité du mariage célébré en France. Cette demande était dirigé par l’époux français contre sa

femme togolaise. Ces personnes avaient eu un enfant conçu avant leur mariage qui a été célébré en 2000. La déclaration de la nationalité française de la femme a été enregistré en 2004 et celle-ci a

quitté le domicile un peu plus tard dans la même année.Les juges du fond avaient rejeté la demande de nullité en faisant application de la loi française

puisqu’il manquait la preuve de l’absence totale du consentement des époux.

Solution:

La Cour casse l’arrêt au visa de l’article 3 en statuant que les conditions du fond du mariage sont régis par la loi nationale de chacun des époux. La loi togolaise était donc compétente pour apprécier

le consentement de l’épouse.Ici la loi étrangère n’avait pas été invoquée par les parties mais cette absence d’invocation ne

dispensait pas le juge de soulever d’office la règle de conflit de loi étrangère ( arrêt Mutuelle du Mans)

B- Exception: empêchements bilatéraux

Parfois, l’application distributive des différentes lois nationales n’est pas forcément satisfaisante, notamment pour certaines conditions qui concernent non plus la personne mais le lien entre les deux époux.

Exemple: - Condition qui concerne la parenté entre les époux. - Interdiction de la polygamie

Selon l’article 147 du code civil, on ne peut contracter un second mariage avant la dissolution du premier. Cela signifie qu’une personne déjà mariée ne peut contracter un second mariage même en partant à l’étranger.Mais a contrario, cela signifierait qu’une personne française célibataire pourrait se marier avec un étranger déjà marié si la loi de cet époux reconnait la polygamie.Ce principe serait conforme à l’application distributive de la loi nationale.Mais une telle solution a été considérée comme contraire à l’esprit de l’article 147. Par conséquent cet article dispose qu’il n’est pas possible de se marier avec une personne déjà mariée.Donc ici l’empêchement est devenu bilatéral.Quand on parle d’un empêchement bilatéral cela signifie qu’une loi d’un époux vient s’appliquer aux deux sans distinction car on considère que l’essence même de l’union est en cause.

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Arrêt 1er chambre civile 24 septembre 2002

Faits:

Il s’agissait d’un homme libanais, de statut personnel monogame. Il s’est marié avec une autre libanaise.

10 ans plus tard il s’est converti à l’Islam donc la loi régissant son statut personnel a changé ce qui lui a permis la polygamie.

Il a donc épousé une française célibataire, au Caire.

Solution:cr’

Selon les juges français, le mariage est nul car il faut que les lois nationales de chacun des époux autorise la bigamie.

Donc le mariage contracté par le citoyen français avec une personne déjà mariée est entaché de nullité.

Que faire si une personne française se marie avec un homme célibataire qui lui permet la polygamie?

La première solution a été de dire que l’on interdit tout mariage potentiellement polygamique.Autre solution: protection de cette femme française par le jeu de l’ordre public. Tout d’abord cela va signifier qu’une union polygamique ne peut pas être célébrée en France car elle va heurter l’exception d’OPI français.Mais maintenant, , lorsque le mariage polygamique est célébré à l’étranger: l’OP intervient ici mais de façon atténuée. Ainsi un mariage polygamique célébré à l’étranger peut produire certains effets en France.

Arrêt Chemouni du 28 janvier 1958 et 19 février 1963

Faits:

Un homme s’est marié 2 fois en Tunisie et est venu s’établir en France avec ses deux épouses. La seconde lui a réclamé des aliments.

Le mari a alors prétendu que le second mariage était nul car polygamique.

Solution:

La Cour a appliqué ici la jurisprudence Rivière: la demande de pension alimentaire introduite en France par la seconde épouse ne heurte pas l’OPI français dès lors que sa qualité d’épouse légitime

a été acquise sans fraude en Tunisie, en conformité avec sa loi nationale compétente.

Cependant, lorsque la première épouse est française, la solution va être quelque peu différente.En effet, les deux unions vont être considérées comme valables mais on va opposer l’OP à certains effets du second mariage, dès lors que cet effet porte préjudice à la première épouse française.

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Arrêt 1er chambre civile, Baaziz, 6 juillet 19888

Faits:

La seconde épouse de nationalité algérienne a demandé une rente au conjoint survivant.

Solution:

La conception française de l’OPI s’oppose à ce que le mariage polygamique contracté à l’étranger par celui qui est encore l’époux d’une française produise ses effets à l’encontre de celle-ci.

Solution discutable car le second mariage est valable mais pour autant il est paralysé.De plus, ce qui est finalement écarté ici c’est la loi française.

Des positions doctrinales ont été faites et notamment une qui propose d’appliquer un empêchement trilatéral: dès lors qu’une loi s’oppose au mariage polygamique, ce mariage n’est pas possible.Une autre proposition serait de remplacer l’effet atténué de l’OP par l’OP de proximité.

Arrêt, 2eme chambre civile 1er décembre 2011

Faits:

Il s’agissait d’un époux de nationalité algérienne qui s’est marié la première fois en France avec une personne de nationalité française.

L’union a duré 20 ans puis le couple a divorcé.L’époux s’est marié une seconde fois en Algérie avec une personne algérienne alors que le premier

mariage n’était pas encore dissolu.Cette seconde union a duré 14 ans et la durée de la situation polygamique a duré 6 mois.

La première épouse française a demandé la liquidation de la pension de réversion. La seconde épouse la demande aussi.

Il y a un refus de la Cour d’appel concernant la pension de réversion de la seconde épouse.

Solution:

La Cour approuve la CA au motif que la conception française de l’OPI s’opposait à ce que le mariage polygamique contracté en Algérie par celui qui était encore l’époux d’une française,

produise des effets en France.On remarque un durcissement par rapport à la solution Baaziz puisque ce dernier dit que le mariage crée des effets à l’encontre de la femme française alors qu’ici on parle de « produise des effets en

France».

Dans ces deux arrêts, le mariage polygamique n’est pas annulé. Ce sont simplement certains effets qui se voient opposer l’exception d’OPI. Ainsi, le partage de pension de réversion a été admis plusieurs fois dans l’hypothèse où les deux épouses sont de statut polygame.

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Arrêt 1er chambre civile, 3 janvier 1980, Bendeddouche

Faits:

Tous les époux sont de nationalité algériennes et les deux mariages ont eu lieu en Algérie.La seconde épouse prétend à une vocation successorale

Solution:

La Cour lui reconnait une vocation successorale.Ici il faut combiner le droit français interne du droit des successions avec une institution privée

inconnue en droit français.

II- Conditions de forme

Il faut une célébration qui suit des formes particulières.On va distinguer l’hypothèse du mariage célébré à l’étranger et l’hypothèse du mariage célébré en France.

A- Mariage célébré à l’étranger

Selon l’article 171-1 du code civil le mariage d’un français à l’étranger est valable dès lors que les formes locales ont été respectées. Quand on parle de forme locale on applique le principe du locus regit actum ou lex loci celebrationis ( loi du lieu de conclusion de l’acte).Ainsi, un mariage religieux célébré à l’étranger même entre deux personnes de nationalité française, ce mariage sera reconnu en France.

Il est possible de se marier à l’étranger selon les formes françaises si l’on se marie dans une Ambassade française ou dans un consulat.Pour le mariage entre deux français dans une Ambassade ou consulat, cela sera possible dans tous les pays selon l’article 171-1 alinéa 2 du code civil.En revanche, pour les mariage mixtes, ce mariage n’est possible que dans certains pays. Une liste de ces pays est dressée dans un décret.

Dans le cas d’un mariage célébré à l’étranger devant les autorités étrangères compétentes, les conditions de formes prévues par la loi française sont désormais applicables en de nombreux points. Donc ici il y a une dérogation à la pleine application de la lex loci celebrationis.La loi française va intervenir, notamment concernant l’obtention du certificat de capacité à mariage. En effet, un français qui souhaite se marier à l’étranger devant une autorité étrangère, devra obtenir un certificat de capacité à mariage ( article 171-2). Ce certificat va attester qu’il a rempli les différentes formalités requises par l’article 63 du code civil ( publication des bancs notamment). Ce certificat doit être demandé auprès de l’autorité diplomatique ou consulaire française compétente selon le lieu où doit être célébré le mariage.

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Une autre règle qui s’applique à l’étranger: article 146-1 du code civil. Selon cet article, il est interdit de se marier par procuration. Autrement dit, le français doit être présent à la cérémonie.

On peut s’interroger sur la nature de ces dispositions. On peut penser qu’il s’agit ici de lois de police.

B- Mariage des étrangers célébré en France

En revanche, rien n’est prévu pour le mariage des étrangers en France.La JP a bilatéralisé la règle pour les français se mariant à l’étranger.Ainsi, pour le mariage célébré en France, ce mariage doit être célébré selon la forme locale française. Les conditions essentielles du droit interne jouent aussi: publicité, célébration dans la commune de résidence des époux.Les formes de la loi nationale de ces époux étrangers sont exclues.

Exemple: un mariage purement religieux en France ne sera d’aucun effet en France. Il ne sera pas nul mais seulement inexistant.

Il y a une atténuation: le mariage sous la forme diplomatique on consulaire est possible en France mais à des conditions restrictives: seuls les agents diplomatiques ou consulaires sont compétents pour célébrer ce mariage.

III- Les sanctions du non respect des conditions de formation du mariage

Il existe une sanction préventive et il existe également des sanctions qui interviennent à posteriori.

A- La sanction préventive

C’est ce qu’on appelle l’opposition à mariage.Les personnes qui peuvent former une telle opposition et les motifs susceptibles d’être invoqués relèvent des conditions de fond du mariage et donc de la loi nationale dont le mariage est en cause.La loi française a ainsi crée une procédure d’opposition spécifique pour le mariage d’un français célébré à l’étranger. Effectivement, lorsque des indices sérieux laissent présumer que le mariage encourt la nullité, l’autorité diplomatique doit saisir sans délai le procureur de la République. Celui-ci a alors 2 mois pour faire opposition alors qu’en France ce délai est de 15 jours.Cette opposition n’empêchera pas le mariage d’être célébré à l’étranger mais empêchera la transcription de l’acte de mariage sur les registres d’état civil français.

B- Les sanctions a postériori

1- Le refus de transcription

Il peut y avoir tout d’abord un refus de transcription du mariage sur les registres d’état civil français.

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Précision sur le terme de transcription: les actes concernant les français sont transcris à la demande des intéressés, voire même d’office, sur les registres tenus par les agents diplomatiques ou les consuls.Cet acte étranger doit satisfaire à une obligation de légalisation. La légalisation est la certification par le consul de la véracité de la signature de l’acte étranger. Cette obligation de légalisation est une application d’une obligation coutumière internationale.Une fois que ces actes sont tenus sur les registres, ces registres vont être centralisés au service central de l’état civil de Nantes.

Cette transcription, est une condition d’opposabilité au tiers. Sans transcription, le mariage d’un français valablement célébré à l’étranger produira ses effets civils en France mais uniquement à l’égard des époux et des enfants: article 171-5 alinéa 1 du code civil.

2- La nullité

Cette nullité doit être toujours constatée judiciairement.

a- Compétence juridictionnelle pour prononcer la nullité

La compétence international des tribunaux français à l’égard des actions en nullité se détermine en principe face aux règles du règlement Bruxelles 2bis.

b- Les titulaires de l’action en nullité et les délais

Cela relève de la loi de la condition violée. La loi qui pose une exigence doit également être compétente pour dire ce qui se passe si cette loi n’est pas respectée.Ainsi, la prescription de l’action en nullité va dépendre de la loi de la condition violée.

c- Les effets de la nullité

La question qui se pose ici est le bénéfice de la putativité.Un mariage putatif est un mariage nul mais qui produit certains effets notamment à l’égard des enfants du couple.La loi compétente pour décider si un mariage nul peut avoir les effets d’un mariage putatif a été mise en évidence par la jurisprudence.

Arrêt Moreau, 1er chambre civile 6 mars 1956

Faits:

Un officier français avait épousé à Damas une syrienne en lui dissimulant son précédent mariage avec une française.

A son décès, l’épouse syrienne s’est prévalue de sa qualité de veuve et a réclamé une pension à l’autorité militaire, laquelle lui a refusé ce droit pour bigamie.

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Elle a alors demandé à pouvoir bénéficier du mariage putatif.La question se posait de savoir qu’elle était la loi applicable au bénéfice de la putativité

Solution:

La Cour a décidé que les effets que peut produire à titre de mariage putatif un mariage annulé pour violation des règles de fond françaises sont ceux de la loi française qui édicte la nullité du mariage.

Paragraphe 2- les effets du mariage

Pour connaitre des effets du mariage il faut nécessairement appliquer une loi unique puisqu’une application distributive des lois n’est pas concevable dans la mesure où les questions de l’effet du mariage concerne le lien matrimonial entre les époux.Le domaine de la catégorie des effets de mariage se réduit de plus en plus.

Exemple: - le divorce appartient aujourd’hui à une catégorie autonome- Même chose pour le régime matrimonial- Même chose pour les obligations alimentaires

I- Détermination de la loi applicable aux effets du mariage

Le mariage, par ses effets, modifie l’état de ceux qui le contractent. Il est donc logique que s’applique aux effets du mariage la loi nationale commune des époux. Il s’agit ici d’une règle bilatérale.Cependant, il y a un problème lorsque les époux sont de nationalité différente. De plus deux questions spécifiques vont se poser dû au fait que le mariage est appelé à se prolonger dans le temps, les circonstances de rattachement peuvent être amenée à évoluer. Va se poser alors la question du conflit mobile. Enfin, nous verrons le problème des mariages boiteux.

A- La détermination de la loi applicable aux effets du mariage lorsque les époux sont de nationalité différente

La JP ici a retenu la seule solution concevable dans une telle hypothèse et elle a eu recourt à un rattachement subsidiaire. Les juges utilisent dans un tel cas le critère du domicile commun des époux.Ce critère ressort de: Arrêt Rivière et Arrêt Lewandowski du 15 mars 1955Ces deux arrêts ont été rendus dans le domaine du divorce, qui à cette époque était encore rattaché à la catégorie générale des effets du mariage.Cette solution a été étendue à d’autres questions comme les obligations alimentaires ( Arrêt Chemouni 2) et en matière de donation mobilière ( Arrêt Campbell Johnston 15 février 1966).

Précision sur la notion de « domicile commun»: La Jp a précisé qu’il s’agit de l’établissement effectif des époux et non des domiciles légaux.Par ailleurs, le domicile commun existe même si les époux sont séparés mais à condition qu’ils vivent dans le même pays.

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Que se passe t-il s’il n’y a ni domicile commun ni nationalité commune?

On applique ici la lex fori, la loi du for.Cette application de la loi du for ressort de : Arrêt Tarwid 15 mai 1961.

En résumé:la loi applicable est la loi de la nationalité des époux. A défaut, on applique la loi du domicile commun des époux. A défaut, on applique la loi du for.

B- Hypothèse du conflit mobile

C’est le cas où il y a une modification de la circonstance du critère de rattachement.Dans notre hypothèse, entre le jour du mariage et le jour où un problème se pose concrètement, un changement dans la circonstance de rattachement peut se produire. Alors, il faut savoir quelle est l’influence de ce changement sur la détermination de la loi applicable: c’est ce qu’on appelle ici l’hypothèse du conflit mobile.Différentes hypothèses sont possibles.

Exemples: - Les deux époux se font naturaliser: faut-il appliquer ici la loi ancienne ou la loi nouvelle commune?- Les deux époux sont de même nationalité à l’origine mais l’un d’eux se fait naturaliser: il y a un changement de la

règle de conflit puisqu’il n’y a plus de nationalité commune.- On a un domicile commun lors de la célébration du mariage puis l’un des époux part vivre à l’étranger.

Que se passe t-il alors pour le conflit mobile?

La réponse réside dans la nature du mariage en tant qu’institution. Le mariage est un échange de consentement en vue de rentrer dans une situation légale au contenu déterminé par la loi. Ici la volonté n’a rien à voir.Par conséquent, puisque cette situation est étrangère de la volonté des parties, on ne se trouve pas en matière contractuelle et donc la solution est d’appliquer la loi nouvelle immédiatement et cette loi nouvelle va régir les effets à venir du mariage.

C- Le problème du mariage boiteux

Le rapport boiteux provient de la locution latine matrimonium claudicans.Elle concerne le cas d’un mariage de deux époux qui est célébrée contrairement aux dispositions de leur loi nationale.

Exemple: lorsque la loi nationale de l’un des deux époux est évincée par le jeu de l’exception de l’ordre public. Par exemple deux italiens hommes qui se marient en Belgique alors que la loi italienne ne reconnait pas l’union homosexuelle.

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Quelle est alors la loi applicable aux effets de ce mariage?

La question n’est pas véritablement résolue.En générale la jurisprudence française écarte la loi nationale et elle applique une autre loi comme la loi de la résidence.

II- Le domaine de cette loi applicable aux effets du mariage

Cette question est délicate puisque plusieurs lois entrent en concurrence ce qui fait que le domaine de cette loi applicable peut être difficile à déterminer.

A- Les effets sur les personnes

L’essence même du mariage est de modifier l’état des personnes. Certains effets sont communs aux deux personnes et d’autres effets sont propres à chacun des époux.

1- Les effets communs

On va appliquer ici la loi des effets du mariage.Ça été confirmé par la JP et notamment par l’arrêt Chemouni pour le devoir de secours entre époux, les obligations alimentaires.Toutefois, cette solution n’est plus vraiment d’actualité puisque aujourd’hui il y a une catégorie autonome pour les obligations alimentaires qui résulte de la convention de la Haye du 20 octobre 1973 et qui, aujourd’hui, est remplacée en France par un règlement du droit de l’UE: le règlement n°4-2009 du 18 décembre 2009 relatif à la compétence, la loi applicable, la reconnaissance et l’exécution des décisions et la coopération en matière d’obligations alimentaires.

Concernant les autres devoirs issus du mariage ( comme la fidélité entre les époux), en principe, ici, on applique la loi des effets du mariage. Mais ici la question est assez sensible et cette loi des effets du mariage risque d’être écartée par l’intervention de l’exception d’ordre public international.

2- Les effets propres

C’est la condition de la femme qui est particulièrement en cause et la question se pose de savoir si on va appliquer la loi des effets du mariage ou la loi personnelle de l’épouse.Des problèmes de qualification se posent ici en ce qui concerne le nom de la femme mariée ( on peut hésiter entre l’application de la loi des effets du mariage ou la loi nationale de l’épouse).En ce qui concerne l’autorité maritale ( autorité du mari sur la femme), il s’agit de donner à une seule personne en couple le pouvoir de prendre des décisions. On considère que la loi des effets du mariage est plus adaptée à cette question qu’une autre loi.Une réserve ici: cette loi risque fréquemment d’être écartée par l’exception d’ordre public international.Un autre exemple est celui de la capacité de la femme mariée. Classiquement, la capacité relève de la loi nationale de la personne mais ici il y a une hésitation car on peut considérer que l’objectif est d’assurer la cohérence au sein du couple ( en brigand l’un des deux éléments du couple) et donc certains auteurs défendent l’application de la loi des effets du mariage pour régir cette question.

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B- Les effets sur les biens

En DIP français, le régime matrimonial n’appartient pas à la catégorie « effets du mariage» mais à une catégorie autonome.

La loi des effets du mariage va retrouver son empire dans deux situations:

1° La première concerne le statut patrimonial de base ou régime primaire (article 212 et suivants du code civil).

Pour la cour de cassation, la loi des effets du mariage s’applique à la question du régime primaire: Arrêt civil 1, 22 octobre 1985. Deux ans plus tard, la Cour de cassation a décidé que ces mêmes règles sont d’application territoriale: Arrêt civil 1, 20 octobre 1987, Cressot. La Cour ferait de ces règles de régime primaire français des sortes de lois de police. On s’est demandé si cet arrêt Cressot était un revirement par rapport à celui de 1985. A priori non, puisque les deux solutions sont conciliables.On a estimé que le régime primaire est d’application immédiate sur le territoire français à l’égard des époux soumis à la loi étrangère. En revanche, pour les époux vivant à l’étranger, on applique la loi des effets du mariage.

2° Concernant les contrats entre époux

Certaines lois interdisent les contrats entre époux, d’autres lois peuvent prévoir des règles spéciales. Concernant la donation entre époux, une hésitation a eu lieu car on peut envisager différentes lois: la loi personnelle, la loi du régime matrimonial, la loi du contrat ou la loi des effets du mariage.Il a été décidé que ce qui est principalement en cause ici c’est le mariage et donc il convient d’appliquer à ces contrats entre époux la loi des effets du mariage: Arrêt Campbell-Johnston 15 février 1966.

Sous-section 2: Le mariage homosexuel

Le projet de loi français, actuellement en question, contient des dispositions relatives au droit international privé.

Paragraphe 1: L’état actuel du droit français sur cette question

En droit français interne, le mariage suppose que les époux soient de sexe différent.Le code civil français ne le dit pas expressément. Pour autant, on retrouve cette distinction dans différentes articles du code civil.Ce qui est certain, c’est que aujourd’hui le mariage entre deux personnes de même sexe ne peut pour l’instant être célébré en France.Pourtant, il est admis de dépasser cette conception traditionnelle française pour qualifier l’union entre deux personnes de même sexe de mariage.

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Par ailleurs, d’autres Etats autorisent ce mode d’union et, par conséquent, il est envisageable qu’un couple de même sexe marié à l’étranger viennent s’établir en France.

I- La célébration d’un mariage homosexuel en France en l’état actuel

Prenons l’exemple d’un français et d’un belge qui souhaitent célébrer leur union en France.Cette union ne peut pas voir lieu aujourd’hui car la loi applicable aux conditions de fond s’oppose au mariage homosexuel en France. On applique ici la règle de conflit de loi.Il en est de même d’un couple hispano-allemand désirant se marier en Allemagne puisque le droit allemand exige cette différence de sexe entre les époux.

Qu’en est-il si ces deux personnes dont la loi national accepte le mariage homosexuel désirent se marier en France?

C’est le cas de deux espagnols qui désirent se marier en France.Ici la loi nationale des conditions de fond est respectée car la loi espagnole autorise les mariages homosexuels.

Mais pour autant, la célébration du mariage peut-elle avoir lieu en France?

La réponse est clairement non car ici intervient l’exception d’OPI français. L’OP français en matière international va s’opposer à ce que soit crée en France une telle situation car cette situation heurte un des principes fondamentaux du droit français qui est l’exigence de la différence de sexe entre les époux.La dimension internationale ne change rien ici.

II- La reconnaissance en France d’un mariage homosexuel valablement célébré à l’étranger

Aujourd’hui, en Europe, 8 pays européens dont 6 membres de l’UE autorisent le mariage homosexuel: les Pays bas, la Belgique, l’Espagne, la Suède, la Norvège, le Portugal , l’Islande et le Danemark.La reconnaissance de telles unions dans un Etat donné va forcément avoir des répercussions en France.D’autant que certains de ces Etats entendent assurer le rayonnement de leur choix grâce à des règles de conflit de lois qui sont particulièrement souples.C’est le cas par exemple de la loi belge : article 46 du code civil belge « l’application d’une disposition du droit désigné en vertu de l’alinéa 1 est écartée si cette disposition prohibe le mariage de personnes de même sexe, lorsque l’une d’elles a la nationalité d’un Etat ou a sa résidence habituelle sur le territoire d’un Etat dont le droit permet un tel mariage».

Quel accueil est réservé en France à de telles unions qui sont valablement célébrées à l’étranger?

Pour répondre, il convient de distinguer deux étapes dans le raisonnement de DIP:- La qualification de la situation- La reconnaissance.

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A- La qualification de la situation en DIP français

Imaginons une union célébré en Espagne entre deux personnes de même sexe.

Est ce que cette union va entrer dans la catégorie « mariage» au sens du DIP français?

Il est de tradition en DIP français d’élargir les catégories de rattachement, notamment en matière de polygamie qui est classé dans la catégorie « mariage».Le problème qui se pose est qu’en droit français on associe traditionnellement le mariage à la procréation. Or en principe on ne peut pas procréer au sein d’un couple homosexuel. Pour cette raison, beaucoup d’auteurs en DIP français on refusé d’inclure le classement du mariage homosexuel dans la catégorie « mariage» en raison de la différence de nature.

Il y a eu une évolution en la matière qui a trouvé son aboutissement notamment dans un arrêt de la CEDH.

Arrêt CEDH Goodwin C/ RU du 11 juillet 2002.

Elle a permis de dissocier le mariage et la procréation.La CEDH affirme ici le droit pour un transsexuel de ce marier après changement de sexe avec une

personne qui est certes juridiquement de sexe opposée mais biologiquement de même sexe.On considère que la Cour a consacré la dissociation entre le mariage et la procréation.

Aujourd’hui la majorité de la doctrine française en DIP a pris acte de cette évolution et un grand nombre d’auteur considère que le mariage homosexuel peut être effectivement classé dans la

catégorie « mariage».

A noter que la jurisprudence de la CEDH est très prudente concernant le mariage homosexuel.On a par exemple l’arrêt du 24 juin 29010, Schalk et Kopf c/ Autriche qui refuse un droit au mariage aux personnes de même sexe mais avec une grand prudence.

B- Mariage homosexuel célébré à l’étranger et OP français en matière international

Si on accepte de faire entrer dans la catégorie « mariage» l’union entre deux personnes de même sexe à l’étranger, encore faut-il que ce mariage ait été valablement contracté dans le fond et la forme.

1- La validité du mariage homosexuel célébré à l’étranger

On est dans l’hypothèse où les conditions de forme sont soumises à la loi du lieu de célébration. Les conditions de fond sont régies par les lois nationales des époux. Ce sera la loi nationale commune des époux ou la loi nationale de chacun des époux.Étant donné que la différence de sexe intéresse le lien matrimonial lui-même, ici on est dans le cas d’un empêchement bilatéral, c’est à dire d’une application cumulative des différentes lois nationales.

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Que se passe t-il si la loi nationale d’un des époux n’admet pas le mariage homosexuel mais qu’en application des règles de DIP édictées par l’Etat du pays de célébration, le mariage peut être valablement contracté sur cet Etat? Est ce que cette

union va produire des effets en France?

Ici, va jouer l’influence éventuelle du droit de l’UE et plus précisément des libertés européennes, plus particulièrement le principe de liberté de circulation des citoyens européens.Il existe toute une JP de l’UE qui se fonde sur ce principe là, reconnu à l’article 21 TFUE, pour écarter l’application d’une loi nationale qui entraverait cette liberté de circulation.Cette JP est relative au nom de famille: CJCE 2 octobre 2003, Garcia Avello et CJCE 14 octobre 2008, Grunkin-Paul.En suivant cette JP relative à la liberté de circulation des personnes, les mariages homosexuels étrangers seraient tenus pour valables s’ils le sont au regard des lois compétentes du lieu de célébration du mariage. Dans ce cas, la règle de conflit de l’Etat d’accueil ( France par exemple) serait écartée.Il existe toutefois toujours un limite à cette jurisprudence: la réaction de l’ordre public.

2- L’ordre public

Cette réaction de l’ordre public peut être abordée de deux façons: l’effet atténué de l’ordre public et l’ordre public de proximité.

a- L’ordre public atténué

Ici on a un mariage valablement célébré à l’étranger et il s’agit de l’accueil en France de cette situation.Si l’on se fonde sur la solution de l’arrêt Rivière, cette situation pourrait être reconnue en France.

b- L’ordre public de proximité

La réaction de l’ordre public va varier en fonction de l’intensité des liens que la situation en cause présente avec l’ordre juridique français: plus ces liens seront étroits et plus la réaction de l’OP sera rigoureuse.Si on applique ce raisonnement au mariage homosexuel, cet OP de proximité conduirait à refuser de laisser produire des effets du mariage en France lorsque la situation présente des liens forts avec la France, comme par exemple si l’un des époux est français.

Quelle serait la solution si l’on a cette fois deux époux belges qui résident actuellement en France?

Si l’on raisonne selon l’OP de proximité, la réponse est que l’on pourrait refuser de faire produire des effets à ce mariage en raison des liens de proximité entre la Belgique et la France.

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Paragraphe 2: Le projet de loi

Ce projet de loi comporte des règles de conflit.Mais on a une nouvelle règle de conflit qui a trait de manière spécifique au mariage spécifique.

Article 202-1 alinéa 2 ( en construction à l’Assemblée Nationale): « la loi personnelle d’un époux est écartée, sous réserve des engagements internationaux de la France, en tant qu’elle fait obstacle au mariage de deux personnes de même sexe, lorsque la loi de l’Etat sur le territoire duquel est célébré le mariage le permet».

A l’aune de l’adoption du texte par l’AN, l’article a été légèrement modifié dans le sens le mariage pour tous est permis dès lors qu’au moins la loi personnelle de l’un des époux le permet ou encore la loi de sa résidence ou de son domicile.

I- Le mariage célébré en France

Au sein de cet article on retrouve la règle de la mise à l’écart de la loi prohibitive.Cela signifie que sous réserve des engagements internationaux de la France, la mise en oeuvre de l’exception d’ordre public permettra la célébration en France de tous les mariages pour lesquels l’officier d’état civil français se voit reconnaitre compétence.Dès lors que l’officier d’état civil français est compétent, l’article 202-1 alinéa 2 s’applique et la loi personnelle prohibitive d’un des époux sera écartée pour permettre la célébration du mariage.Il existe pourtant un tempérament: le respect des engagement internationaux de la France.

II- Le mariage célébré à l’étranger

La particularité de cette règle est que l’on a à la fois une règle de conflit et une règle de reconnaissance.Cette règle devrait permettre d’accueillir tous les mariages célébrés à l’étranger entre personnes de même sexe.

Exemple: Le mariage néerlandais de deux italiens résidant aux Pays Bas, ce mariage sera reconnu en France.

Conclusion sur cette règle de conflit:

Si cette règle est adoptée en l’état, on peut soulever de nombreux problèmes:

• Un problème de Law shopping. Les époux ici vont avoir la liberté de se marier où ils veulent et de se faire reconnaitre en France.

• Les mariages boiteux. On rencontrera des mariages valables en France mais pas en Italie par exemple.

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Section 2: Les autres formes d’union

Les réponses apportées au concubinage et au partenariat sont bien distincts en DIP. Le concubinage est une situation de fait qui ne relève d’aucune catégorie tandis que pour le partenariat partagé il existe une règle de conflit à l’article 515-7-1 du code civil.

Paragraphe 1: La loi applicable à l’union libre

I- La loi applicable à la formation de l’union libre

Le concubinage est considéré en France comme une union de fait. Ainsi le concubinage est analysé comme un fait juridique donc par conséquent la loi locale doit s’appliquer.Il en résulte que la loi de l’actuelle ou la dernière résidence des concubins devrait être compétente pour régir les conditions de formation d’un concubinage.Cette solution est critiquée par certains auteurs et ces derniers proposent de s’écarter de la conception française de droit interne et de créer une qualification autonome pour le concubinage. Ainsi, la formation du concubinage serait soumise, comme pour le mariage, à la loi personnelle de chacun des concubins.Cette proposition doctrinale prend appui sur le fait qu’un certain nombre de droits étrangers prévoient un statut pour les couples non mariés vivant en concubinage. Le reproche que l’on peut faire à cette proposition est que finalement on va imposer à des personnes qui ont fait le choix de vivre dans une union informelle des règles de conflit de lois applicables au mariage. Il est alors préférable de laisser la compétence à la loi locale.

II- La loi applicable aux effets de l’union libre

En matière de concubinage, il convient de distinguer entre les concubinages inorganisés et les concubinages contractualisés.Comme le concubinage inorganisé n’est pas une catégorie juridique en DIP, on va appliquer les règles de conflit existantes et correspondantes à la loi de la question posée.En revanche, lorsque l’on a une convention de concubinage, celle-ci en tant que contrat devrait dès lors relever de la loi applicable aux actes juridiques.Ainsi, la validité et certains effets de cette convention entre concubins devrait être régit par le règlement N°593-2008 ou règlement Rome 1.Cependant, l’application de ce règlement Rome 1 ne s’impose pas avec évidence car si on regarde dans le champs d’application de ce règlement, on peut voir que l’article 1-2b dispose que les relations de famille ou les relations réputées avoir des effets comparables doivent être exclues de ce champs d’application. On peut penser toutefois que le règlement pourrait être applicable aux rapports pécuniaires entre les concubins.Donc la loi ainsi désignée par le règlement Rome 1 pourrait s’appliquer aux donations entre concubins, à la solidarité conventionnelle, l’indivision conventionnelle, la liquidation et le partage conventionnel.Pour l’instant, toutefois, on n’a pas encore de jurisprudence en la matière.

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III- La loi applicable à la dissolution de l’union libre

La loi applicable à la dissolution est à l’image de sa formation. On va considérer que c’est un fait donc par conséquent on va appliquer la loi locale.

TGI Paris 21 novembre 1983Le juge français décide ici que les effets de la rupture d’un concubinage sur les fonds déposés sur

un compte joint dans une banque portugaise mais située en France par les concubins ayant vécus en France devait être régit par la loi française. Ici on applique tout simplement la loi locale.

Paragraphe 2: Les partenariats enregistrés

I- Remarques introductives

C’est une règle de conflit spéciale prévue à l’article 515-7-1 du code civil provenant d’une loi du 12 mai 2009 sur la simplification du droit.

«Les conditions de formation et les effets d'un partenariat enregistré ainsi que les causes et les effets de sa dissolution sont soumis aux dispositions matérielles de l'État de l'autorité qui a procédé à son enregistrement»

Il faut savoir que cette règle de conflit a été intégrée dans cette loi un peu par surprise.La critique qui a été faite à cette règle de conflit est qu’il s’agirait d’une règle trop simpliste.En tout cas, la finalité de cette règle est une volonté d’ouverture au partenariat enregistré.La terminologie est ici bien sûr totalement indifférente: en France on peut utiliser le terme de Pacs mais peut également s’appliquer à la cohabitation légale en Belgique, le contrat d’union de partenaires en Norvège, le civil partnership en Angleterre.

On a ici une catégorie de rattachement qui regroupe toutes les institutions dont la fonction est d’organiser la vie commune sans s’apparenter au mariage.Avant l’adoption de cette règle de conflit, différentes propositions avaient été faite pour essayer de qualifier le PACS. Des auteurs proposaient d’intégrer le PACS dans la catégorie «contrat», d’autres de l’assimiler au mariage. Finalement on a retenu la catégorie de « partenariat enregistré».Concernant les critères de rattachement, il s’agit de la loi de l’autorité qui a enregistré le partenariat.

Exemple: le partenariat est enregistré en France mais au consulat belge. Dans ce cas là la loi applicable est la loi belge car l’autorité qui l’a enregistré est l’autorité belge.

Question: que se passera t-il vis à vis des partenariats qui ne font pas l’objet d’un enregistrement?

La question reste ouverte. Certains auteurs considèrent qu’il aurait mieux valu de parler de la loi de l’institution qui crée ce partenariat et non pas la loi de l’autorité qui l’a enregistré.

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II- La loi applicable à la formation

Concernant le partenariat enregistré, la règle de conflit est différente du mariage puisque la loi appliqué est celle de l’autorité qui enregistre le partenariat.Donc ici, aucun lien n’est exigé entre l’autorité d’enregistrement et les partenaires.Il y a donc un risque de Law-shopping.

En France, il existe toutefois une exigence posée à l’article 515-3 alinéa 5 du code civil puisque pour que le PACS soit enregistré en France, il faut que les partenaires aient leur résidence en France ou que l’un d’eux ait la nationalité française.Donc pour conclure un partenariat en France, il faudra simplement respecter les conditions posées aux articles 515 et suivants du code civil: être majeur, absence d’empêchement, etc...Ceci vaut aussi bien pour les conditions de forme et les conditions de fond.Mais la critique que l’on peut faire est que cette règle de conflit va permettre à deux personnes de conclure un partenariat alors que la loi nationale de l’un ou de l’autre, voire des deux, ne permettrait pas une telle union= risque de création de rapports boiteux.C’est la même critique formulée pour la règle de conflit qui figure dans le projet de loi pour le mariage pour tous.

III- La loi applicable aux effets et à la dissolution du partenariat enregistré

A- Les effets

Concernant les effets, la loi applicable est celle de l’autorité qui a procédé à l’enregistrement.Par conséquent, si un PACS est enregistré en France, on appliquera la loi française pour les effets de cette union.L’avantage de cette règle est qu’elle évite de soumettre les effets à une loi qui ignore les partenariats. Toutefois, il faut faire attention car tous les effets ne sont pas soumis à cette nouvelle règle de conflit. Il s’agit d’une règle de conflit générale concernant le partenariat, cela signifie que les règles de conflit spéciales vont primer. Donc, en matière de succession, on appliquera la règle relative aux successions, en matière d’obligations alimentaires ce sera la même solution.

La difficulté ici est que le texte ne précise pas ce qui est soumis à cette règle de conflit de loi et ce qui ne l’est pas, ce qui crée une certaine incertitude.On peut se demander également si, ici, une règle de conflit peut intervenir: article 515-4 du code civil qui pose des dispositions relatives à la vie commune des partenaires, à l’aide matérielle, l’assistance, la solidarité à l’égard des tiers. Certains auteurs se sont demandé si cet article pouvait intervenir en tant que loi de police. Ils raisonnent en effet par analogie avec le mariage ( cf arrêt Cressot 1987 qui soumet le régime primaire d’époux résidant en France à la loi française).

B- Dissolution

Il s’agit ici de déterminer l’autorité compétente pour rompre le partenariat.Concernant en revanche la loi applicable, il n’y a pas de difficulté ici puisqu’il s’agit de la loi de l’autorité qui a enregistré le partenariat qui sera applicable.

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Chapitre 3: Le divorce et la séparation de corps

Le divorce a avec le mariage au moins un point commun: un divorce exige dans tous les cas l’intervention d’une autorité.Cependant, le mariage résulte le plus souvent d’un simple acte public tandis que, en principe, le divorce nécessite l’intervention d’une autorité judiciaire.Le divorce suppose donc une décision.En conséquence, il convient d’étudier dans un premier point les conflits de juridiction relatifs au divorce puis les conflits de lois.

Section 1: Les conflits de juridictions en matière de divorce

Les conflits de juridictions recouvrent deux questions:

• Quand le juge français est-il compétent face à un rapport de droit comportant un élément d’extranéité? bCette question est relative à la détermination de la juridiction compétente en matière internationale

• Une question relative à la reconnaissance et à l’exécution en France d’une décision étrangère: quelle est l’efficacité en France d’un jugement étranger du divorce?

Paragraphe 1: La compétence internationale en matière de divorce

Depuis l’entrée en vigueur d’un premier règlement européen le 1er mars 2001, remplacé depuis par le règlement 2201-2003 ou règlement Bruxelles 2bis, une distinction s’impose systématiquement: ce règlement est-il applicable? Si la réponse est négative, à défaut d’autres textes internationaux, il convient d’appliquer le droit commun français.Ainsi, le règlement issu du droit de l’union va primer.

I- Les règles issues du droit de l’Union: le règlement Bruxelles 2bis

A- Considérations générales

Ce règlement est entré en vigueur le 1er mars 2005.Ce règlement fixe des règles de compétence internationale directe, de reconnaissance et d’exécution pour les décisions de séparation de corps, de divorce ou de nullité du mariage ainsi que pour les mesures relatives à la responsabilité parentale et aux aspects civils d’enlèvement d’enfants.Ce champs d’application est prévu à l’article 1er du règlement.

L’applicabilité de ce règlement est large puisque dès lors que nous sommes dans son domaine matériel, les règles de compétence directe de ce règlement sont mises en oeuvre dès lors qu’un juge d’un Etat membre est saisi et même si le litige présente un caractère extra-européen.

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Ce règlement prévaut généralement sur l’ensemble des instruments bilatéraux couvrant le même domaine.Donc au niveau du raisonnement, il faut déjà regarder si le règlement est applicable, regarder ensuite si une convention bilatérale s’appliqe et enfin le droit commun.

B- La nature des règles

Le règlement pose à la fois des règles de compétence directe et également des règles concernant l’efficacité des décisions étrangères.

Concernant les règles de compétence directe, il s’agit de règles donnant une compétence générale aux juridictions des Etats membres. En effet, si on lit l’article 3 du règlement, il est fait état des « juridictions d’un Etat membre». Il s’agit donc d’une règle de compétence générale.Pour déterminer la compétence spéciale, il faut avoir recours au droit interne des Etats.

Exemple: En France, une fois que l’ordre juridictionnel français est déclaré compétent, il faut se référer à l’article 1070 du code de procédure civile pour déterminer la juridiction spécialement compétente.

Si L’article 1070 du CPC ne permet pas d’établir la compétence spéciale, on peut se référer à la jurisprudence:

Arrêt 13 juin 1978

Le tribunal spécialement compétent est celui qui présente un lien de rattachement ou, à défaut, qui correspond à une bonne administration de la justice

Exemple: Les juridictions parisiennes pourraient être compétentes de façon générale.

Lorsque le critère qui est posé par le règlement Bruxelles 2bis est assez précis, dans ce cas là on considère qu’il est inutile de passer par le biais des règles internes.

C- Le système des règles de compétence directe

1- Les critères de compétence énumérés à l’article 3 du règlement

Cet article 3 énumère toute une série de critères de rattachement non hiérarchisés.Ce sont des règles qui sont obligatoires. Elles sont essentiellement fondées sur la résidence habituelle mais le critère de la nationalité n’est toutefois pas exclut.

Que se passe t-il dans les cas de double nationalité?

Si on regarde l’article 3-1b il est fait référence à la nationalité des époux ainsi que dans le 3-1a.Le problème s’est posé d’époux qui ont une double nationalité.

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Arrêt CJCE 16 juillet 2009, Hadadi

Dans le cas d’un conflit de nationalité, la Cour a décidé que les principes de primauté de la nationalité du for et de la nationalité la plus effective sont écartés. Dans ce cas là, les époux

disposent d’une option: ils peuvent se fonder sur l’une ou l’autre de leur nationalité.

Avant cet arrêt Hadadi, les juridictions ne fonctionnaient pas ainsi puisque dans le cas où un époux avait la nationalité française on faisait primer la nationalité du for. Si aucune des parties n’avait la nationalité du for, on faisait primer la nationalité la plus effective, celle qui était susceptible de présenter le plus grand lien avec l’Etat du juge.Depuis Hadadi, ces principes sont écartés. Bien entendu cette décision n’est applicable qu’aux situation intra-européenne.Cette solution a été reprise par la Cour de cassation: 17 février 2010

Certains ont reproché à l’arrêt Hadadi de favoriser encore plus le Law shopping puisque l’article 3 du règlement permettait déjà une large possibilité pour les époux. Donc avec cet arrêt relatif à la double nationalité on crée une option en plus.

2- La notion de résidence habituelle

On la distingue de la notion de « domicile».La notion de résidence habituelle est une notion de fait, concrète tandis que la notion de domicile de droit qui est définie dans chaque législation.

Exemple: en France la notion de domicile est définie à l’article 102 du code civil qui dispose que « le domicile de tout français quant à l’exercice de ses droits civils est au lieu où il a son principal établissement».

Cette notion de résidence habituelle n’est pas définie par le règlement Bruxelles 2bis.Les juridictions françaises ont eu l’occasion de se prononcer sur cette notion dans deux arrêts rendus dans la même affaire.

CA Aix en Provence 18 novembre 2004 et 14 décembre 2005

Faits:

Il s’agissait d’un couple de britannique. L’époux avait acheté une villa sur la côte d’azur afin que l’épouse s’y installe avec leur fille.

Au bout de 18 mois, l’époux a saisi un TGI français afin d’obtenir le divorce en application du règlement Bruxelles 2bis.

La question posée ici était de savoir si on piuvait considérer que l’épouse avait sa résidence habituelle en France.

Solution:

La Cour de cassation a considéré que non. Pour cela, elle a comparé les liens rattachant l’épouse à la France et à l’Angleterre selon la méthode d’un faisceau d’indices.

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Mais la Cour a également fait référence à l’intention de s’installer. Et donc ici la Cour a considéré que l’épouse n’avait pas la volonté de conférer un caractère stable à cette résidence.

La Cour précise ici qu’il s’agit d’une notion autonome du droit communautaire.

Dans ces deux arrêts, les juges retiennent à la fois des éléments objectifs mais également des éléments subjectifs ( la volonté de s’établir en un certain lieu).La définition qui a été donnée par la Cour de cassation a été reprise par les juridictions étrangères, notamment les Cour luxembourgeoises et anglaises.Pour autant, on peut se demander si cette définition est toujours celle qu’il faut retenir puisque la CJUE a défini la notion de résidence habituelle dans deux arrêts en lui donnant un sens différent.Toutefois, la difficulté est que ces deux arrêts sont intervenus en matière de responsabilité parentale et non en matière de divorce.

Arrêt CJUE, A., 2 avril 2009 et arrêt CJUE, Mercredi du 22 décembre 2010

Dans l’arrêt A. la Cour dit que la notion de résidence habituelle de l’enfant doit être interprétée comme la résidence qui correspond au lieu qui traduit une certaines intégration de l’enfant dans un

environnement social et familial.Elle se caractérise notamment par la prise en considération de la durée, de la régularité, des

conditions et des raisons du séjour dans un Etat membre. Les connaissances linguistiques sont également prises en compte ainsi que les conditions de scolarisation.

La Cour précise aussi ici qu’il appartient à la juridiction nationale d’établir la résidence habituelle de l’enfant.

Dans l’arrêt Mercredi, la Cour dit ici que lorsqu’il n’est pas possible d’établir la résidence habituelle de l’enfant, la détermination de la juridiction compétente doit pouvoir se fonder sur le

critère de la présence de l’enfant.Ici, il s’agissait d’un nourrisson.

Dans ces deux arrêts, la Cour fait référence à des éléments objectifs et ne se réfère plus à la volonté comme dans la jurisprudence de la Cour de cassation.

Ce qu’il faut retenir sur la notion de résidence habituelle est qu’il s’agit d’abord d’une notion autonome. Elle s’apprécie in concreto, selon chaque cas d’espèce.

3- L’application des règles de compétence directe

Encore une fois, ces règles de compétence directe sont précisées à l’article 3 du règlement.Toutefois, lorsque l’on applique ces règles, il convient de procéder à une distinction.Effectivement le règlement distingue entre le défendeur européen ou défendeur protégé d’un autre défendeur.

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a- le défendeur européen

On détermine la notion de défendeur européen grâce à l’article 6 du règlement. Donc un défendeur européen ou protégé est un ressortissant d’un Etat membre ou un résident habituel d’un Etat membre.Lorsqu’on a un défendeur européen, pour l’attraire devant les juridictions d’un autre Etat membre, on ne peut invoquer que les règles de compétence du règlement et non les règles du droit commun.

Exemple: une personne réside en France, donc un défendeur protégé au sens du règlement. Cette personne ne peut être attraite devant une autre juridictions qu’une juridiction française qu’en vertu des règles posées à l’article 3.

b- le défendeur non protégé

Lorsqu’il s’agit d’un défendeur non protégé, à savoir un non ressortissant d’un Etat membre et non résident d’un Etat membre, on applique en premier lieu les règles du règlement puis, subsidiairement, on peut appliquer les règles de droit commun si aucune juridiction d’un Etat membre n’est compétente en vertu des règles posées aux articles 3 à 5 du règlement.

CJCE, 29 novembre 2007, Lopez

Faits

Madame Lopez est une ressortissante suédoise et est mariée à un ressortissant cubain.Les deux époux avaient leur résidence habituelle en France. Ils finissent pas se séparer et madame Lopez résidait toujours en France au moment du divorce tandis que son mari était retourné à Cuba.Madame Lopez s’est fondée sur la règlementation suédoise pour introduire une demande en divorce

à Stockholm selon les règles de conflit suédoises.Elle a été déboutée par une décisions suédoise au motif qu’en vertu de l’article 3 du règlement,

seules les juridictions françaises sont compétentes.Une question préjudicielle a été posée à la CJCE: dans le cas d’un défendeur non protégé, les juridictions d’un Etat membre peuvent-elles fonder leur compétence sur le droit national pour

statuer sur leur compétence alors que les juridictions d’un autre Etat membre sont compétentes en vertu de l’article 3 du règlement?

Solution

La CJCE répond que selon l’article 7-1 du règlement, ce n’est que lorsqu’aucune juridiction d’un Etat membre n’est compétente en vertu des articles 3 à 5 du règlement que la compétence est réglée

dans chaque Etat membre par le droit national.Ainsi, il découle de cette décision que l’on ne peut invoquer les règles de compétence nationales

seulement lorsqu’aucune autre juridiction d’un Etat membre est compétente au titre du règlement.

En l’espèce, ici on avait dans l’article 3 un critère qui donnait compétence aux juridictions françaises.

L’arrêt se fonde donc sur l’article 7-1. Cet article ne s’applique que dans le cas d’un défendeur non protégé.

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Dans le cas d’un défendeur protégé on applique l’article 6.L’article 7-2 permet également d’invoquer de façon subsidiaires les règles de compétence exorbitantes, à savoir les privilèges de juridictions ( articles 14 et 15 du code civil).Cet article 7-2 étend les privilèges de juridictions qui sont en principe réservés qu’aux nationaux.L’approche dans le règlement Bruxelles 2bis est différente de celle du règlement Bruxelles 1 ( Article 4§2) car l’extension ne concerne que les personnes qui ont une résidence dans un Etat membre et qui ont la nationalité de cet Etat membre.Attention: 14 et 15 sont d’application subsidiaire!

Arrêt Cour de cassation du 30 septembre 2009 et surtout arrêt du 12 janvier 2011

Dans un premier moyen cet arrêt se prononcer sur l’articulation de Bruxelles 2bis et droit commun en matière de divorce.

Faits:

Un couple dont l’époux est de nationalité française et l’épouse est américaine. Ils ont deux enfants nés à Strasbourg.

La famille part s’installer aux EU, puis l’époux revient s’installer en France en août 2007. Il dépose une requête en divorce en décembre 2007 soit 3/4 mois après son installation en France.

L’épouse, quant à elle, introduit une action en divorce aux EU en mars 2008.L’époux soulève une exception de litispendance.

Le JAF fait droit à cette exception de litispendance. La CA de Colmar infirme le jugement en constatant l’incompétence des juridictions françaises sur le fondement de l’article 309 du code civil.

Solution:

Un pourvoi est formé par l’époux et la décisions de la CA est censuré car la CA s’est fondée sur l’article 309 du code civil ( qui n’a rien à voir avec la compétence juridictionnelle car règle les

conflits de lois).Dans un second point, la Cour rappelle la hiérarchie des règles de compétence juridictionnelle en

matière de divorce. En l’espèce, la compétence des juridictions françaises ne pouvait être établie par les articles 3, 4 et 5 du règlement.

Dans l’article 3, effectivement, il n’y a pas de critères qui donnaient compétence aux juridictions françaises puisque l’époux de nationalité française a introduit sa demande moins de 6 mois après

son installation en France.Dès lors, il faut se référer à l’article 7 du règlement puisque l’épouse n’est pas un défendeur protégé

( nationalité américaine et réside en Amérique).En droit français, cela signifie qu’il faut se référer aux règles ordinaires de compétence qui résultent

de l’article 1070 du CPC. En l’espèce, cet article ne permettait pas de donner compétence à une juridiction française. Ainsi, il

convient d’appliquer de façon subsidiaire l’article 14 du code civil en vertu de l’arrêt du 19 novembre 1985, Orliac.

Donc dans le cas d’un défendeur non protégé il convient d’appliquer les règles issus des articles 3 à 5 du règlement. Si aucune juridiction d’un Etat membre n’est compétente en vertu de ces règles, les

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juridictions françaises seront compétentes si l’un des critères énoncés par l’article 1070 s’applique. A défaut, les privilèges de juridictions peuvent être mis en oeuvre.Dans l’hypothèse d’un défendeur protégé, cette personne ne peut être attrait devant les juridictions d’un autre Etat membre qu’en application des critères posés aux articles 3 à 5 du règlement, les autres critères ( en particulier les privilèges de juridiction) sont exclus.

4- Les règles de litispendance

Dans le règlement, on trouve également des règles sur la litispendance, lorsque deux juridictions sont saisies d’une même affaire.Un caractère automatique est donné à l’exception de litispendance par l’article 19 du règlement.Ce caractère automatique permet d’éviter des décisions qui seraient inconciliables puisqu’ici la juridiction saisie en second lieu doit surseoir à statuer.La règle retenue par cet article est celle du prior tempore.

II- Les règles issues du droit commun

A- La compétence des juridictions françaises en droit commun

Cette compétence des juridictions françaises est posé à l’article 1070 du CPC.Attention: Lorsque l’on transpose cet article à l’ordre international, il faut lire à chaque fois « le tribunal français où réside (...)».

Différents chefs de compétence sont posés par cet article. Ils sont hiérarchisés, laquelle a été également transposée dans l’ordre international.Dans le cas où aucun des critères de compétence ne permet de saisir une juridiction française, dans ce cas on applique de façon subsidiaire les articles 14 ( demandeur français) et 15 du code civil ( défendeur français).

B- Les conflits de procédures en droit commun

La litispendance hors du droit européen, ne joue pas automatiquement puisqu’elle peut être reçue par le juge français.Donc il n’est pas obligé de se dessaisir.

Paragraphe 2: L’efficacité des jugements étrangers en matière de divorce

La reconnaissance des jugements de divorce obéit à deux régimes différents:

• l’hypothèse où le droit de l’UE s’applique• l’hypothèse où le droit commun s’applique

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I- Le droit européen de la reconnaissance et de l’exécution

Le règlement Bruxelles 2bis qui s’applique à la reconnaissance des décisions rendues dans un autre Etat membre, adopte le principe de la reconnaissance de plein droit.Cela signifie qu’une partie qui désire simplement invoquer l’autorité du jugement étranger de divorce, elle n’a pas besoin de former une instance principale en exequatur.Ce principe est posé à l’article 21§1 du règlement.Toutefois, cela ne signifie qu’il n’y ait pas de motifs de non reconnaissance. L’article 22 du règlement énumère de façon limitative ces motifs de reconnaissance:

• contrariété à l’OP• absence de notification de signification au défendeur• inconciabilité avec une décision antérieure

Le règlement Bruxelles 2bis organise une procédure simplifiée si le contrôle de la décision est porté devant les tribunaux soit à titre incident soit à titre principal.Il s’agit avant tout de faciliter la circulation des jugements.Attention: Le règlement Bruxelles 2bis ne concerne que le lien matrimonial, il ne règle pas tout ce qui concerne les effets pécuniaires du divorce.

A- Un contrôle exercé à titre incident

La reconnaissance de la décision étrangère du divorce peut être invoquée dans un litige qui porte au principal sur une autre question.

Exemple: On peut imaginer que le litige principal porte sur la validité du second mariage d’un des époux. La résolution de cette question dépend de savoir si l’époux était divorcé ou non.

Dans ce cas là, le juge qui est saisi à titre principal contrôlera qu’il n’y a aucun motif de non reconnaissance de la décision invoquée à titre incident: article 21-4.

B- Un contrôle exercé à titre principal

Il peut être parfois souhaitable de voir établir la situation matrimoniale des époux puisque la reconnaissance de plein droit est toujours entachée d’une certaine précarité.

L’article 21-3 du règlement autorise à agir en reconnaissance ou en non reconnaissance de la décision de divorce. Si on regarde l’article 21-3 alinéa 1 on peut voir que la demande peut être effectuée par tout partie intéressée ( donc les époux) mais également le ministère public.Le tribunal compétent pour cette reconnaissance est le président du TGI en France.Il s’agit ici d’une procédure simplifiée donc non contradictoire dans un premier temps puisqu’elle doit être rapide.

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II- Le droit commun de la reconnaissance et de l’exécution

En droit commun français, les conditions de régularité internationale d’un jugement étranger ont été allégés par la jurisprudence récente avec l’arrêt Cornelissen du 20 février 2007.Il faut 3 conditions:

• Le jugement a été rendu par un juge de compétence indirecte, c’est à dire ayant des liens suffisants avec le litige

• Le jugement ne doit pas être contraire à l’OPI français.• Le jugement ne doit pas être entaché d’une quelconque fraude à la loi

Lorsque le jugement étranger est régulier, dans ce cas il est reconnu de plein droit en France ce qui permet aux époux de se remarier.la régularité du jugement étranger peut faire l’objet d’un contrôle en justice, il s’agira soit d’un contrôle incident soit d’un contrôle principal.La procédure d’exequatur n’est requise que pour les actes d’exécution matérielle sur les biens.L’action en exequatur est exercée devant le TGI siégeant à juge unique.

A- La compétence indirecte du juge étranger et notion de fraude

Arrêt Simitch, Cour de cassation, 6 février 1985

Faits:

Il s’agissait d’une demande d’exequatur d’un jugement anglais. Cette demande a été admise alors que l’époux défendeur avait sa résidence en France ce qui fait qu’en principe les juridictions

françaises étaient compétentes sur le fondement de l’article 1070.

Solution:

La Cour de cassation n’en a pas pour autant déduit l’incompétence anglaise car il existait des liens de rattachement avec l’Angleterre: nationalité de la femme, lieu de célébration du mariage,

localisation de biens appartenant au mari.ces éléments rattachaient les époux Simitch aux juridictions anglaises.

L’exigence du lien caractérisé est apprécié au cas par cas, en fonction de l’ensemble des éléments de localisation du litige.La limite à cette compétence est la fraude.Une dernière précision sur cette compétence indirecte: il y a eu un abandon de l’exclusivité fondé sur les articles 14 et 15 du code civil. Pendant longtemps, la cour de cassation avait estimé que la compétence fondée sur ces deux articles était exclusive ce qui signifiait que la compétence du tribunal étranger ne pouvait être reconnue lorsqu’il y avait un français à l’instance à moins que celui ci ait renoncé expressément à son privilège.Cette JP est aujourd’hui condamnée par les arrêts Prieurs du 23 mai 2006 et l’arrêt Fercométal du 22 mai 2007.Désormais les articles 14 et 15 ne confèrent pas une compétence exclusive aux tribunaux français.

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Il en résulte que même si la nationalité française de l’un des époux est invoquée, la compétence indirecte du tribunal étranger sera reconnue dès lors que l’instance en divorce présente des liens caractérisés avec l’ordre juridique étranger.En matière de divorce cette Jp aura un impact important car c’est surtout en matière de divorce qu’étaient invoqués ces articles.

Par ailleurs, la compétence indirecte du juge étranger ne peut être retenue que s’il est avéré que ce juge n’a pas été saisi de façon frauduleuse, c’est à dire pour échapper aux conséquences d’un jugement français.La notion de fraude en DIP peut être entendue de deux façons:

• La fraude au jugement• La fraude à la loi

La fraude au jugement consiste en ce que les parties portent leur litige devant un tribunal dont elles ne relèvent pas normalement. En matière de divorce, on va se trouver dans une hypothèse particulière: la saisine du juge étranger qui est destinée à faire échec à un jugement français déjà rendu ou sur le point de l’être.

Arrêt cour de cassation 20 juin 2012 N°11-30120

Faits:

Cet arrêt portait sur la reconnaissance en France d’un jugement de divorce prononcé en Algérie.En l’espèce, la Convention franco-algérienne était applicable. Cependant l’application de ce texte

ne changeait pas le raisonnement à tenir.Monsieur et madame X de nationalité algérienne mariés en Algérie en 1962 et les époux sont

ensuite venus s’installer en France où ils ont eu 6 enfants.En juin 2007, monsieur X est revenu vivre en Algérie mais en laissant sa femme en France. Par une

requête du 11 février 2008, madame Y a demandé la condamnation de son époux à lui payer une contribution aux charges du mariage. Cependant, moins de deux mois plus tard, le mari a saisi un

tribunal en Algérie afin que soit prononcé le divorce lequel a été prononcé en mai 2008.Le problème ici est que si l’autorité de la chose jugée était reconnue au jugement algérien, dans ce

cas là, l’action de l’épouse en contribution aux charges du mariage devenait irrecevable. Le jugement étranger devenait dans ce cas là une fin de non recevoir.

Solution:

La Cour d’appel de Paris a rejeté la fin de non recevoir sur deux fondements:- la fraude au jugement- pour une contrariété à l’OPI car il s’agissait d’une répudiation selon la CA.- La Cour de cassation ne s’est pas prononcée sur la contrariété à l’OPI. Cependant elle approuve la

CA concernant la fraude et, plus précisément, la Cour de cassation approuve les juges du fond d’avoir déduit que les circonstances de cette procédure précipitée en Algérie constituait une fraude

au jugement dans le but de faire échec à l’exécution de la décision française devant intervenir.

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Arrêt 23 février 2011 N°10-14760

Faits:

Des époux se sont mariés au Maroc mais se sont installés en France. L’épouse a la nationalité marocaine et l’époux a la double nationalité franco-marocaine. L’épouse a saisi les juridictions

françaises d’une demande de contribution aux charges du mariage et l’époux, juste après, saisi les juridictions marocaines d’une requête en divorce. Le divorce est prononcé au Maroc et retranscris

sur le registre d’état civil français. L’épouse demande l’annulation de la transcription et la CA refuse ici.

Elle forme alors un pourvoir en cassation en soulevant notamment l’argument de la fraude au jugement car selon elle la juridiction marocaine aurait été saisie dans le but de faire obstacle à la

demande de contribution aux charges du mariage.

Solution:

Le pourvoir est rejeté car selon la Cour, la saisine du juge étranger ici n’est pas exclusivement dictée par la volonté du demandeur d’échapper aux conséquences du jugement français.

Pour la Cour, le mari avait pu légitimement souhaiter divorcer devant les juridictions marocaines.

Dans la seconde affaire, les époux étaient séparés depuis au moins 3 ans, la Cour a pu considérer que l’époux avait véritablement envie de divorcer.

Il y a fraude à la loi lorsque les parties ont volontairement modifié un rapport de droit dans le seul but de la soustraire à la loi normalement applicable. cette fraude à la loi avait été identifiée et sanctionné dans un arrêt Princesse de Beaufremont de 1878.Cette fraude à la loi par modification d’un lien de rattachement ( changement de domicile ou de nationalité), au niveau de la reconnaissance et de l’exécution d’un jugement de divorce étranger, on va être confronté à une difficulté puisque l’arrêt Cornelissen de 2007 a supprimé le contrôle de la loi étrangère appliquée par le juge français. D’ailleurs l’arrêt Cornelissen a été rappelé par un arrêt du 30 janvier 2013.

En effet, dans la mesure où il n’y a plus de contrôle de la loi appliquée par le juge étranger, peut-on encore retenir une éventuelle fraude à la loi?

La doctrine est partagées sur ce point. Il semblerait que le contrôle de la fraude à la loi puisse toujours être effectué puisque, tout d’abord, l’arrêt Cornelissen fait référence à cette fraude à la loi et , d’autre part, on considère que lorsqu’on contrôle cette absence de fraude, il faut l’appréhender comme absence de toute déloyauté ayant entaché l’obtention du jugement étranger.

Cependant, la véritable fraude à la loi est assez rare, elle est plutôt théorique. En pratique, il s’agit plutôt d’une fraude à la compétence judiciaire. Donc le fait de contrôler la compétence judiciaire du juge étranger devrait suffire.

Quelque soit la fraude, la sanction sera toujours la même à savoir le refus de faire produire un effet quelconque en France à ce jugement étranger obtenu par fraude.

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B- La question de la régularité à l’ordre public

On distingue de façon classique l’ordre public procédural de l’ordre de fond.

1- L’ordre public procédural

Lorsque l’on étudie l’absence de contrariété du jugement étranger à l’OP procédural, il ne s’agit bien entendu pas de contrôler la façon dont s’est déroulée toute la procédure à l’étranger. Seuls seront pris en compte des aspects de la procédure étrangère qui sont révélateurs de manquements graves.Il s’agit principalement du respect des droits de la défense.

Exemple: il faut que le défendeur ait été régulièrement représenté et qu’il ait fait valoir ses moyens de défense.

Aujourd’hui, il convient de noter que le contrôle de l’OP procédural doit se faire en respectant l’article 6 de la CEDH relatif au procès équitable.

Arrêt CEDH 20 juillet 2001 Pelligrini c/ Italie

La CEDH a condamné l’Italie pour avoir accordé l’exequatur à un jugement de nullité de mariage prononcé par la rote romaine et ce au motif que les droits procéduraux de la femme n’avaient pas

été correctement respectés dans la procédure canonique.

Arrêt CEDH Jackson McDonald c/ France du 29 avril 2008

Un divorce avait été prononcé aux USA et l’ex-époux demandait l’exequatur en France. La décision d’exequatur n’avait pas été reconnue en France.

La CEDH avait considéré en l’espèce qu’il n’y avait pas atteinte à l’article 6.

Arrêt CEDH 13 octobre 2009

La CEHD a invoqué l’article 6 pour condamner une règle de droit turque qui déniait à tout personne autres que celles parties au divorce qualité pour demander la reconnaissance de ce divorce.

2- L’ordre public de fond

L’intervention de l’ordre public concerne ici la solution retenue au fond par le juge étranger.Selon la terminologie actuelle, cette solution ne doit pas heurter les principes essentiels du droit français.

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Arrêt 4 novembre 2010 N°09-15302

Faits:

Il s’agissait de deux époux de nationalité française partis s’établir aux USA. Ils se sont séparés et le mari est revenu vivre en France. L’épouse a entamé une procédure de divorce devant un tribunal

texan et, de son côté, le mari a dépose une requête en divorce devant le JAF. Le juge texan a rendu un jugement définitif de divorce et donc l’épouse s’en est prévalu à l’appuie

d’une exception de chose jugée à l’étranger.Cette exception de chose jugée a été rejetée puisque les conséquences du divorce à l’égard des

enfants étaient apparues comme contraire à l’OPI.

Solution:

la Cour de cassation a approuvé les juges du fond d’avoir refuser l’accueil en France d’une décision de divorce américaine fondé sur l’égalité des parents dans l’exercice de l’autorité parentale.

En l'occurrence, le juge américain avait accordé à la mère le droit de prendre seule des mesures importantes concernant les enfants et, en outre, il était interdit au père de recevoir sa compagne en

présence des enfants à moins qu’il ne se marie.

La contrariété à l’OP en matière de divorce se pose notamment à l’égard des réceptions des répudiations prononcées à l’étranger.On oppose généralement les pays dans lesquels l’homme et la femme sont traités d’une manière égale et les pays dans lesquels le mari dispose d’une prérogative de répudiation qui n’est pas réciproque.La répudiation unilatérale présente un caractère privé et religieux plus ou moins marqué selon les droits mais qui diffère profondément d’une conception égalitaire et laïque du divorce reconnu dans d’autres pays.Il existe différents types de répudiation:

• Le talaq qui est une répudiation purement unilatérale de la femme par le mari.• Le khôl qui suppose une compensation mais donnée par la femme• Le chiqaq qui est une sorte de divorce pour discorde

Concernant l’accueil des répudiation en France, il y a eu une évolution jurisprudentielle.

Arrêt Rohbi cassation 3 novembre 1983

Faits:

Il s’agissait d’une répudiation ayant eu lieu au Maroc entre deux époux marocains.Le seul lien avec la France était le lieu de résidence des époux.

Solution:

La Cour de cassation a admis des effets de cette répudiation en France alors qu’elle était unilatérale et révocable.

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Il résultait de cet arrêt que la répudiation pouvait être reconnue dès lors que le droit étranger était compétent et que la répudiation était tempérée par les garanties pécuniaires assurées à la femme.

Au début des années 1980 est entrée en vigueur en France la convention franco-marocaine du 10 aout 1981 relative au statut personnel et à la coopération judiciaire.Cette convention assimile le divorce à la répudiation. Comme cette convention est entrée en vigueur en 1983, on peut penser que la Cour ne voulait pas froisser les relations entre la France et le Maroc.Le problème est que dans de nombreux litiges où les deux époux étaient domiciliés en France, lorsque l’épouse saisissait une juridiction française d’une demande en divorce, l’époux faisait un aller-retour dans son pays d’origine afin de demander la répudiation et présentait ce jugement étranger afin d’empêcher la demande déposée en France d’aboutir.La Cour de cassation a ensuite adopté une position beaucoup plus rigoureuse.

Arrêt 1er juin 1998, cour de cassation

Ici, la Cour de cassation a introduit un nouveau visa. Elle considère que la répudiation viole l’article 5 du protocole 7 de la Convention européenne des droits de l’homme qui dispose que les époux

jouissent d’une égalité de droit et de responsabilité de caractère civil entre eux durant le mariage et lors de sa dissolution.

Cette évolution s’est confirmée dans des arrêts rendus le 31 janvier 1995 et 11 mars 1997.Ces deux arrêts font prévaloir la CEDH sur la convention franco-marocaine.Effectivement, on perçoit à travers ces arrêts que la répudiation est atteint d’un vice intrinsèque, c’est à dire qu’elle est contraire au principe d’égalité des époux car elle est unilatérale.Cependant, dans ces deux derniers arrêts, la Cour de cassation fait toujours référence à la double dimension de l’OP: la dimension substantielle ( égalité des époux) mais également procédurale ( respect du droit de la défense). Ainsi, lorsque la procédure de répudiation était contradictoire et qu’elle reconnaissait des garanties financières à l’épouse, la répudiation pouvait être reconnue en France.Cependant, cela n’empêchait pas à l’époux de garder un pouvoir discrétionnaire de répudier sa femme et, d’autant plus que les garanties financières étaient souvent dérisoires.

Finalement, la Cour de cassation dans 5 arrêts rendus le 17 février 2004 refuse de façon très net de reconnaitre la répudiation unilatérale.Ces 5 arrêts sont fondés sur l’article 5 du protocole 7 de la CEDH. Ces arrêts reprennent la JP initiée en 1994 tout en innovant car ils intègrent les valeurs fondamentales dans l’OPI.D’autre part, dans ces arrêts on a un recours qui est fait à la notion d’OP de proximité.

Comment analyser ici ce recours à l’OP de proximité?

On peut y voir une volonté de limiter le champs d’application des principes européens et également de limiter les statuts boiteux. On peut donc y voir la prise en compte du caractère relatif des droits fondamentaux, qui peut être exprimé ainsi: «les droits de l’homme affirmés par la Convention ne sont que l’expression d’une certaine culture régionale» Canivet.

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Un autre auteur, à propos de l’OP de proximité a dit que « le recours à l’OP de proximité devrait rassurer tous ceux qui redoutent une application intempestive des droits de l’homme dans les relations internationales», Ganaji???

Section 2: La loi applicable au divorce

Avant la loi du 11 juillet 1975, pour connaitre la loi applicable au divorce il fallait appliquer la JP Rivière, Lewandowsky et Tariv.Cette loi a introduit l’article 310 du code civil qui est devenu plus récemment l’article 309.Les solutions traditionnelles ont été bouleversées par l’introduction de cette nouvelle règle de conflit unilatérale.Plus récemment est entré en vigueur un nouveau règlement UE N°1259-2010 du Conseil du 20 décembre 2010 mettant en oeuvre une coopération renforcée dans le domaine de la loi applicable au divorce et à la séparation de corps.

Paragraphe 1: L’ancien article 309 du code civil

Avant l’entrée en vigueur du règlement, la règle de conflit relative à l’admissibilité et aux causes du divorce était posée à cet article 309 du code civil. Cette règle de conflit était applicable dès lors qu’aucune convention bilatérale n’était compétente.Selon cet article, la loi française s’applique si les époux sont de nationalité française, si les époux sont domiciliés en France et enfin si les tribunaux français sont saisis du litige et qu’aucune autre loi n’est compétente. Il s’agit donc ici d’une règle de conflit unilatérale car elle donne la compétence de la loi française.

Qu’est ce qui a justifié l’adoption de cette règle?

L’objectif était de permettre au maximum l’application de la loi française et également d’intégrer à la société française des époux de nationalité étrangère habitant en France.De nombreux problèmes sont apparus dans l’application de cette règle de conflit et, notamment, cette règle était assez difficile puisque dans la troisième hypothèse il fallait rechercher la loi étrangère qui se voulait compétente.Il fallait regarder les différentes points de rattachement que présentait la solution donnée et si la situation avait des point de rattachement avec l’Allemagne, par exemple, on regardait la règle de conflit allemande pour savoir su cette règle de conflit donnait compétence à la loi allemande.

Le règlement Rome 3 propose des solutions qui sont plus flexibles et finalement plus simples.

Paragraphe 2: Le règlement Rome 3

Ce nouveau règlement est appliqué depuis le 21 juin 2012.Ce règlement apporte des solutions innovantes pour le DIP français.L’adoption de ce règlement a été laborieuse. En effet, on a eu une première proposition élaborée par la Commission Européenne en 2006 mais elle s’est heurtée à une hostilité très forte de certains Etats puisque effectivement au sein de l’UE on a des conceptions très différentes concernant le divorce.

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Exemple: Il y a peu encore, le divorce était interdit à Malte.

Comme il était impossible de parvenir à l’unanimité, 14 Etats ont alors demandé à bénéficier de la nouvelle procédure de coopération renforcée institué par le traité d’Amsterdam.I- Champs d’application du règlement

A- Champs d’application temporel

Il s’applique aux actions introduites après le 21 juin 2012.

B- Champs d’application spatial

Son domaine d’application est limité aux Etats membres participants à cette coopération renforcée. Attention: ce règlement a une portée universelle. Cela signifie que ce règlement constitue aujourd’hui le nouveau DIP des Etats participants. Il sera applicable dès lors qu’une juridiction d’un des Etats membres est saisie.Cela signifie que la loi désignée par ce règlement peut être la loi d’un Etat participant ou il peut s’agit de celle d’un Etat non participant voire un même un Etat non membre de l’UEDans les relations entre les Etats participants, le règlement Rome 3 prévaut. Donc ce règlement remplace plusieurs conventions bilatérales qui liaient la France à d’autres Etats membres participants.En revanche, en ce qui concerne la relation entre la France et un Etat tiers, d’autres conventions bilatérales vont continuer à s’appliquer.

Exemple: La convention franco-polonaise contenant une règle de conflit relative au divorce va continuer à s’appliquer tant que la Pologne ne participe pas à Rome 3.

C- Champs d’application matériel

Ce règlement ne concerne que les conflits de loi donc que la loi applicable à la désunion.Il devra être coordonné avec le règlement Bruxelles 2bis relatif au conflit de juridictions.En outre, Rome 3 porte sur le divorce et la séparation de corps.Sont exclus:

• l’existence ou la validité du mariage• les obligations alimentaires• effets patrimoniaux du divorce• l’autorité parentale•

On assiste donc à un morcellement des règles de conflit de lois.

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II- Les principales règles de conflit

C’est là où le règlement innove car désormais les époux ont le choix de la loi applicable au divorce: article 5 du règlement Rome 3.L’avantage qui est recherché est une plus grande flexibilité et une plus grand prévisibilité des solutions.Il s’agit d’un choix encadré toutefois, car les époux ne peuvent choisir n’importe qu’elle loi.La liberté est donc encadrée deux façon c’est à dire encadrée quant aux conditions de forme ( le choix devra être formulé par écrit, daté et signé et par les deux époux) et également quant aux conditions de fond puisque les lois pouvant être désignées par les époux se limitent à 4:

• La loi de la résidence habituelle des époux au moment de la conclusion de la convention

• La loi de l’Etat de la dernière résidence habituelle des époux à condition que l’un d’eux y réside encore au moment de la conclusion de la convention

• La loi de l’Etat de la nationalité de l’un des époux au moment de la conclusion de la convention

• La loi du for

Les parties ont bien sûr la faculté de choisir la loi d’un Etat non soumis au règlement.Également, un accord procédural est possible en fonction de la loi du for. Un accord procédural est le choix de la loi applicable au cours de la procédure, à condition que la loi du for le prévoit.Pour l’instant, la loi française ne le permet pas.

Dans le silence des parties, lorsqu’elles n’ont pas choisi la loi applicable, l’article 8 du règlement prévoit plusieurs rattachements et ces rattachements sont hiérarchisés:

• La loi en principale applicable est celle de la résidence habituelle des époux• A défaut, la loi de la dernière résidence habituelle des époux si cette résidence n’a pas

pris fin plus d’un an avant la saisine d’une juridiction• A défaut, sera appliquée la loi de la nationalité commune des époux• A titre subsidiaire, pourra être appliquée la loi du for

III- La mise en oeuvre de ce règlement

Un article 10 du règlement prévoit l’application de la loi du for dans deux hypothèses:

• Lorsque la loi applicable en vertu de l’article 5 ou 8 ne prévoit pas le divorce. Il s’agit ici d’une disposition qui tend à la dissolubilité du divorce. C’est ce qu’on appelle une règle favor divortii. On a donc ici une limite au principe de l’autonomie de la volonté.

• Lorsqu’il y a un risque de discrimination.

Dans ces deux hypothèses, la loi du for est alors appliquée.L’article 11 exclut le renvoi car on est dans le domaine de la volonté.L’article 12 prévoit expressément la limite de l’OP puisqu’il énonce que «l’application d’une disposition de la loi désignée en vertu du présent règlement ne peut être écartée que si cette application est manifestement incompatible avec l’ordre public du for».

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L’article 13 dispose que « aucune disposition du présent règlement n’oblige les juridictions d’un Etat membre participant dont la loi ne prévoit pas le divorce ou ne considère pas le mariage en question comme valable aux fins de la procédure de divorce à prononcer un divorce en application du présent règlement». C’est ce qu’on appelle la clause maltaise. Cette disposition n’est plus d’actualité mais ce qui est intéressant c’est que cet article envisage également le cas où le mariage en cause ne serait pas considéré comme valable dans l’Etat membre participant du for.

Exemple: S’agissant d’un mariage entre personnes du même sexe, si un juge italien a été saisi d’un tel divorce, celui-ci ne serait pas obligé de divorcer un tel couple.

L'activité législative de l’UE en matière de droit de la famille ne s’est pas limitée à l’adoption de ce règlement car peu de temps auparavant a été adopté un autre règlement relatif aux obligations alimentaires: Règlement N04-2009.

Cas pratique

Madame D de nationalité italienne et monsieur M de nationalité française se sont mariés à Paris. Leur premier domicile conjugal s’est fait en France. Mais en raison de l'activité professionnelle de

M, ils ont vécus ensemble pendant 4 ans en Allemagne. Deux enfants sont nés de cette union.Les époux se sont finalement séparés. Madame B est venue s’installer à Strasbourg avec ses

enfants. Elle décide de saisir le tribunal de Milan d’une demande en divorce,. Monsieur M saisit quant à lui, peu de temps après, le TGI de Strasbourg.

Quelle juridiction est compétente pour connaitre de l’action en divorce? Quelle est la loi applicable?

I- La juridiction compétente

A- l’applicabilité du règlement Bruxelles 2bis

Champs d’application temporel: s’applique aux actions introduites après le 1er mars 2005. Ici ok.Champs d’application spatial: s’applique dès lorsqu’une juridiction d’un Etat membre est saisie sauf

Danemark. Ici okChamps d’application matériel: on est en matière de divorce ici donc ok.

CCl: le règlement Bruxelles 2bis est applicable.

B- Application du règlement

Particularité: Ici on est face à un cas de litispendance car deux juridictions sont saisies d’une demande en divorce formée par les mêmes parties.

pour résoudre ce problème, il faut se référer à l’article 19 du règlement qui prévoit les cas de litispendance.

L’article 19§1 prévoit que la juridiction saisie en second lieu doit surseoir à statuer jusqu’à ce que la compétence de la première juridiction saisie soit établie.

Donc ici la première juridiction saisie est la juridiction italienne.

Cette juridiction est-elle compétente en vertu des articles 3, 4 et 5 du règlement?En l’espèce, la compétence n’est pas donnée aux juridictions italiennes en vertu du règlement.

La juridiction française est-elle compétente?

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On est dans le cas d’un défendeur protégé ici donc application des articles 3, 4 et 5.En l’espèce, l’article 3 donne compétence aux juridictions françaises: résidence habituelle du

défendeur qui est ici située à Strasbourg.Il s’agit d’une compétence générale pur les juridictions françaises. La juridiction spécialement

compétente est le TGI de Strasbourg.

II- La loi applicable

L’action a t-elle été introduite avant le 21 juin 2012 ou après?Envisageons ici les deux cas exceptionnellement.

A- Demande introduite avant le 21 juin 2012

On regarde d’abord si une convention bilatérale est applicable en l’espèce entre l’Allemagne et la France. Ici non donc on applique l’article 309 du code civil qui dispose que la loi française

s’applique si les époux sont français. En l’espèce les deux époux ne sont pas tous français. Ensuite la loi française s’applique si les époux sont domiciliés en France. En l’espèce ce n’est pas le cas car

un des époux réside en Allemagne. Donc on tombe sur le dernier alinéa qui prévoit que la loi française s’»applique si aucune autre loi ne se reconnait compétente et que les tribunaux français

ont été saisis. Ici donc il faut regarder par rapport aux liens de rattachement pour déterminer quelle loi pourrait

être compétente. ici il faut regarder si la loi allemande se reconnait compétente.En matière de divorce, à l’époque, la loi allemande prévoyait que la loi applicable à la loi des effets du mariage c’est à dire ici à la loi du dernier domicile commun des époux. Donc effectivement, le

dernier domicile commun des époux était bien situé en Allemagne donc la loi allemande avait vocation à s’appliquer.

B- Demande introduite après le 21 juin 2012

Il faut d’abord s’interroger sur l’applicabilité de Rome 3.

1- Applicabilité Rome 3

Ici le règlement s’applique bien

2- Application du règlement

La règle principale est le choix de la loi par les époux.En l’espèce, les époux n’avaient pas choisi de loi applicable au divorce. Donc il faut passer à la règle de confit applicable à défaut de choix de la part des époux posée à l’article 8 du règlement.

Il y a une hiérarchie des liens de rattachements:• le premier cas ne s’applique pas• le deuxième non plus • non plus• finalement c’est la loi de la juridiction saisie

Donc au final ici la loi française était applicable au divorce.

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Section 3: Les suites du divorce

Paragraphe 1: La lutte contre le déplacement illicite d’enfants

Pour lutter contre ce déplacement illicite d’enfant, des mesures préventives ont été mises en place par les autorités françaises. En outre, des textes internationaux ont mis en place un système performant permettant de lutter contre ce déplacement.

I- Les mesures préventives mises en place par le droit français

Ces mesures ont été renforcées par la loi du 9 juillet 2010 relative aux violences faites aux femmes, aux violences au sein du couple et aux incidences de ces dernières sur les enfants.Cette loi a modifié l’article 373-2-6 du code civil. Cet article permet au juge d’ordonner l’interdiction de sortie de l’enfant du territoire français sans l’autorisation des deux parents. Cette interdiction est inscrite au fichier des personnes recherchées à la diligence du procureur de la république.Un décret qui a été publié au Jo le 11 septembre 2012 fixe les dispositions nécessaires à l’application de cet article et précise que le JAF peut ordonner l’interdiction de sortie d’un enfant du territoire français sans l’autorisation de ses deux parents.

Avant que cette mesure ne soit adoptée, la mesure préventive antérieure consistait en l’inscription sur le passeport des parents l’interdiction de sortie. Or cette mesure s’est révélée rapidement inefficace: dans l’espace Schengen, on ne demande plus les passeports. De même depuis 2005, les enfants ont leur propres passeport or l’inscription en cause figurait sur le passeport des parents. Enfin, lorsque le parent est de nationalité étrangère, les autorités françaises ne pouvait inscrire l’interdiction sur son passeport.Donc les modification de cet article ont été considérées comme bienvenues.

II- Aspects civils de l’enlèvement international de l’enfant

On a d’abord la Convention de la Haye du 25 octobre 1980 ( 80 Etats en sont parties) ainsi que le règlement Bruxelles 2bis ( sauf pour le Danemark).Le Règlement Bruxelles 2bis s’appuie sur la Convention de la Haye de 198à et perfectionne le système mis en place par la Convention de la Haye. Ce ne sont pas deux textes qui rentrent en concurrence.Leur objectif est d’assurer le retour immédiat de l’enfant déplacé.En plus de ces deux textes, on a d’autres convention bilatérales: convention entre la France et l’Algérie et la France et la Tunisie.

La Convention de la Haye couvre des hypothèses de déplacement illicite de l’enfant de l’Etat dans lequel il a sa résidence habituelle vers un Etat tiers. Dans de telles circonstances elle attribue la compétence aux tribunaux de l’Etat de la résidence habituelle de l’enfant.La Convention organise un mécanisme de retour de l’enfant en cas de violation du droit de garde lorsque ce dorit de garde est effectivement exercé.

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Le Règlement Bruxelles 2bis reprend le même chef de compétence et l’Etat de la résidence habituelle de l’enfant sert d’ordre juridique de référence.Les autorités de l’Etat vont déterminer le caractère illicite du déplacement.

A- Les conditions du déplacement illicite d’enfant

En vertu de l’article 3 de la Convention de la Haye ou de l’article 2-11 du Règlement Bruxelles 2bis, il faut la réunion d’un élément juridique qui est la violation d’un droit de garde et d’un élément d’ordre géographique c’est à dire un déplacement de l’enfant.

1- la violation d’un droit de garde

La clé de la définition du déplacement illicite d’enfant réside dans cette violation du droit de garde.La difficulté est que la notion de droit de garde est différente suivant les différents Etats.En droit français d’ailleurs, on ne parle même plus de droit de garde.Au sens des textes internationaux, lorsque l’on parle de violation droit de garde on fera référence à la circonstance selon laquelle le parent décide de façon unilatérale de déplacer l’enfant dans un pays étranger alors que l’autre parent ou un tiers exerce conjointement le droit de garde.

Souvent, l’enfant n’est pas restitué au terme de son séjour chez le parent chez qui l’enfant ne réside pas. L’autre hypothèse est que parfois la violation du droit de garde est le fait du parent chez qui l’enfant réside et, dans ce cas là, ce qui est violé c’est le droit de visite.

Arrêt CJUE MacB du 5 octobre 2010

Faits:

Il s’agissait d’un couple avec un homme irlandais et une femme britannique.Le couple a vécu ensemble pendant plus de 10 ans à travers le monde et ont eu 3 enfants.

Les relations se dégradent entre le couple et la mère s’enfuit avec ses enfants.Le couple n’est pas marié.

Suite au départ de la mère, le père introduit une demande en justice devant les juridictions irlandaises afin d’obtenir un droit de garde des enfants.

le problème est que la mère est partie en Angleterre et l’action en justice n’est pas notifiée à) la mère ce qui fait que l’action n’a pas pu être introduite conformément au droit irlandais.

Le père introduit une action devant les juridictions britanniques conformément aux deux textes vus précédemment.

Cependant les juridictions britanniques lui demandent conformément à l’article 15 de la Convention de la Haye la production d’une décision ou d’une attestation constatant que le déplacement des

enfants était illicite.Finalement, le père introduit une nouvelle action devant les juridictions irlandaises afin d’obtenir

cette attestation.Or, selon le droit irlandais, le père naturel des enfants ne bénéficie pas de plein droit d’un droit de

garde. La garde doit lui être confiée par un jugement.Par conséquent, au regard de la Convention de la Haye et du Règlement Bruxelles 2bis, le

déplacement ne semblait pas illicite.

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Le père interjette appel et la juridiction irlandaise forme une question préjudicielle auprès de la CJUE.

Solution:

La Cour décide que le Règlement Bruxelles 2bis doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à ce que le droit d’un Etat membre subordonne l’acquisition du droit de garde par le père à

l’obtention d’une décision de la juridiction nationale lui conférant un tel droit.Donc ici le Règlement Bruxelles 2bis n’intervient pas dans la détermination des titulaires du

droit de garde. Il revient aux droits nationaux de déterminer ces titulaires.Une réserve est toutefois formulée dans l’arrêt puisque cet arrêt vise la CEDH et la jurisprudence de cette Convention. La Cour EDH avait effectivement jugé qu’une législation nationale qui accorde

de plein droit l’autorité parentale à la mère n’est pas contraire si le père peut demander la modification de ce droit de garde. Elle avait également jugé en 2009 qu’une législation nationale

qui n’accorde au père naturel aucune possibilité d’obtenir un droit de garde constitue une discrimination injustifiée à l’égard du père.

2- Un déplacement ou non-retour de l’enfant

A première vue cette condition ne pose pas de difficulté particulière parce que cela signifie que pour qu’il y ait un déplacement illicite de l’enfant il faut qu’il ait été déplacé au delà d’une frontière ( d’un Etat contractant vers un autre Etats contractant).Pour autant des difficultés peuvent apparaitre, notamment concernant la notion de « non-retour d’un enfant qui est déplacé in utero».

Chambre civile, 26 octobre 2011

Faits:

Il s’agissait d’un couple avec une dame française et un homme américain.Les époux se marient aux USA et une première fille nait de ce mariage.

Deux ans après, l’épouse à nouveau enceinte retourne en France accompagnée de sa fille.Son époux saisi l’autorité centrale américaine d’une demande de retour de ses enfants.

La première juridiction de fond, le TGI de Lyon, ordonne le retour immédiat des enfants avec une exécution provisoire de cette décision. La CA de Lyon confirme le retour immédiat des enfants et

donc la mère saisi la Cour de cassation.Elle considère que s’agissant du nouveau né, celui-ci étant né en France et ne s’étant jamais rendu

aux USA, il n’a jamais pu faire l’objet d’un déplacement.

Solution:

La Cour de cassation approuve l’arrêt de la CA et relève que les membres du couple disposaient tous deux le plein exercice de l’autorité parentale et qu’ils avaient leur résidence habituelle aux

USA, que cette résidence n’avait pas changé et que le père n’avait pas autorisé son épouse à s’installer sur le territoire français avec ses enfants.

En conséquence, la Cour de cassation en a déduit que le non-retour des enfants était illicite.

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Dans ce dernier arrêt il est intéressant de constater que peu importe que l’enfant soit né et ait toujours vécu en France, les éléments qui sont importants ici sont que les parents étaient tous deux titulaires de l’autorité parentale et la mère était venue en France de part sa volonté unilatérale.C’est en ça qu’il y a eu un déplacement illicite de l’enfant.La Cour a bien insisté sur le fait que la résidence habituelle demeurait aux USA.

B- La mise en oeuvre de la procédure de retour immédiat

La Convention de la Haye de 1980 a rencontré un grand succès puisqu’elle a fait face de façon pragmatique à des situations dans lesquelles le droit international privé restait impuissant.Cette Convention a donc innové en mettant en place un mécanisme de retour immédiat.L’article 12 de la Convention prévoit en effet que lorsqu’un enfant a été déplacé ou retenu illicitement, l’autorité saisie ordonne son retour immédiat.

1- L’action en retour

Cette action en retour se concrétise par une action en remise de l’enfant.!!Attention!!: cette action en remise de l’enfant se distingue de la décision de fond tendant à l’attribution de la garde.Ici l’action en retour tend à faire cesser une voie de fait.Cette action va déclencher une coopération administrative entre les Etats.Cela signifie que l’autorité centrale du pays refuge doit procéder de toute urgence au retour de l’enfant. Chaque Etat partie de la Convention de la Haye a du mettre en place une autorité centrale. S’agissant de la France, cette autorité centrale est le Bureau de l’entraide civile et commerciale internationale de la direction des affaires civiles et du sceaux du ministère de la justice.Pour cela des délais sont fixés.Article 11 Règlement Bruxelles 2bis: la juridiction doit rendre sa décision six semaines au plus tard après sa saisine.Les diligences pris par les Etats à appliquer ces dispositions peuvent être contrôlées notamment par la CEDH.Elle interviendra de façon indirecte: elle va regarder si la violation de la Convention de la Haye entraine par ricochet la violation des dispositions de la CEDH.

CEDH 1er février 2011 Dore c/ Portugal

La Cour a condamné le Portugal pour violation de l’article 8 de la CEDH pour un défaut de diligence de la part du Portugal dans la mise en oeuvre des procédures en cas d’enlèvement

international.

Faits:

Le requérant devant la CEDH était le père de l’enfant qui réside à Londres.La mère est partie au Portugal sans en informer le père.

Celui-ci a demandé l’assistance des autorité britanniques afin d’obtenir le retour de l’enfant sur le fondement de la Convention de la Haye.

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Il a indiqué que l’enfant était très certainement scolarisé à l’école britannique de Porto.Le père a formulé sa demande le 22 septembre 2006. Or, la trace de l’enfant n’a été retrouvée qu’en

mars 2007 alors que l’enfant était bien scolarisé à l’école de Porto.Une fois l’enfant retrouvé, les juridictions du Portugal ont été saisies mais la demande de retour de l’enfant a été rejetée parce que le père n’avait pas été informé de l’audience donc il n’avait pas pu

s’y présenter.Finalement, le père a saisi la CEDH en violation des articles 6 et 8 de la Convention EDH.

Solution:

la Cour a rendu sa décision à la lumière de l’article 8.Elle a donc condamné le Portugal en insistant bien sur le fait que le passage du temps peut avoir des conséquences irrémédiables pour les relations entre l’enfant et le parent qui ne vit pas avec celui-ci.

Cependant, les juridictions de l’Etat refuge peuvent refuser d’ordonner le retour de l’enfant dans certaines circonstances.

2- Les exceptions au retour de l’enfant

Dans ce cas, le caractère illicite du déplacement va être neutralisé.

La première est posée par la Convention de la Haye à l’article 20: le risque de violation des droits fondamentaux.Cet article dispose que le retour de l’enfant peut être refusé quand il ne serait pas permis par les principes fondamentaux requis.

La deuxième exception est posée par l’article 12 de la Convention: l’intégration de l’enfant dans son nouvel environnement. L’autorité judiciaire ou administrative, même saisie après l’expiration de la période d’un an doit aussi ordonner le retour de l’enfant à moins qu’il ne soit établi que l’enfant s’est intégré dans son nouveau milieu.

La troisième exception est posée par l’article 13b de la Convention: danger physique ou psychique pour ‘enfant. Il n’y aura pas de retour s’il existe un risque grave que ce retour expose l’enfant à un danger physique ou psychique. L’enfant, en principe, doit être entendu afin d’apprécier l’existence d’un tel danger.Toutefois, le Règlement Bruxelles 2bis énonce une limite à cette exception puisque l’article 11-4 du RB2bis précise qu’une juridiction ne peut pas refuser le retour en vertu de l’article 13b de la Convention s’il est établi que des dispositions adéquates ont été prises pour assurer la protection de l’enfant après son retour.La CEDH a été amenée à se prononcer plusieurs fois sur cette exception et plusieurs décisions sont allées dans le sens d’une décision de non retour à cause d’un danger physique ou psychique de l’enfant.

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CEDH 6 juillet 2010, Neulinger et Shuruk c/ Suisse

Ici la CEDH applique la Convention de la Haye au regard de la Convention EDH. Par contre elle n’examine pas le RB2bis et sa limite posée.

Faits:

Il s’agissait d’époux qui vivent à Tel Aviv. L’épouse est de nationalité suisse et l’époux israélien.Le tribunal des affaires familiales de Tel-Aviv attribue la garde de l’enfant à l’épouse.

Un droit de visite est attribué au père mais avec de fortes limitations.La requérante est soumise à une interdiction de sortie du territoire israélien. Cependant elle arrive à

quitter clandestinement le territoire israélien et retourne s’installer en Suisse avec l’enfant.Le père saisit alors les juridictions suisses en vue de voir ordonner le retour de l’enfant en Israel. Dans un premier temps, le juge saisi rejette la demande du père estimant que le déplacement de

l’enfant était effectivement illicite mais que pour autant il existait un risque grave que le retour de l’enfant l’expose à un danger psychique et physique.

Un appel est interjeté et le tribunal fédéral admet quant à lui le recours du père et ordonne donc le retour immédiat de l’enfant.

La mère saisit finalement la CEDH en soutenant que le retour forcé de l’enfant sans elle constituerait un traitement inhumain d’une part et, d’autre part, que ce retour forcé constituerait une

violation de l’article 9 de la CEDH dans la mesure où il faudrait s’attendre à ce que le père de l’enfant soumette cet enfant aux préceptes de la communauté loubavitch.

Solution:

La Cour répond qu’il n’est pas dans l’intérêt supérieur de l’enfant de retourner en Israel.Elle prend cette décision parce que la mère de l’enfant subirait un ingérence disproportionnée dans

son droit au respect de la vie familiale si elle était contrainte de rentrer en Israel. En conséquence, selon la Cour, il y aurait une violation de l’article 8 de la CEDH.

Ici, la Cour précise que la mère faisait l’objet en Israel d’une procédure pénale (puisqu’elle avait quitté clandestinement le territoire avec son enfant) ce qui fait que si une décision de retour était

prononcé vis à vis de son enfant, elle même devait rester en Suisse ce qui fait que l’enfant rentrait seul.

Cette décision a suscité de vives réactions parce qu’il est très fréquent que le parent qui a enlevé l’enfant s’oppose au retour de celui-ci en faisant valoir des conséquences néfastes d’une séparation pour l’enfant. De façon générale, le parent indique qu’il ne retournera pas avec l’enfant dans le pays d’origine.Donc ici ce qui a été reproché à la Cour c’est que le risque n’est pas vraiment lié à la décision de retour de l’enfant mais plus à celle du parent. Donc finalement ici, on fait primer le droit de l’un des parents sur les droits de l’enfant mais surtout sur les droits de l’autre parent.Le problème que pose cette décision est que finalement tout le succès de la Convention de la Haye repose sur l’aspect automatique du retour immédiat.A partir du moment où on introduit de plus en plus de brèches dans ce principe, la dissuasion est de moins en moins forte ce qui met en péril ces textes.

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3-Le Règlement Bruxelles 2bis

Pour renforcer le système de la Convention de la Haye, le RB2bis a mis en place un système encore plus efficace puisque le texte prévoit une procédure particulière en cas de refus de retour et donc ce règlement va renforcer les obligations des Etats.En effet, le RB2bis à l’article 11-8 prévoit que lorsqu’il y a un conflit entre une décision de retour prise dans l’Etat de résidence habituelle de l’enfant et une décision de non retour prise dans l’Etat refuge la primauté est alors donnée à la décision prise par le juge de la résidence habituelle antérieure à l’enlèvement.De plus, dans le RB2bis à l’article 11-4, il existe un garde-fou puisque une juridiction ne peut pas refuser le retour de l’enfant s’il est établi que des dispositions adéquates ont été prises pour assurer la protection de l’enfant après son retour.

Arrêt 8 juillet 2010 civile 1er

Faits:

Le père est français et la mère est anglaise.Le père revient en France tandis que les enfants vivent avec la mère en Angleterre. Le père bénéficiait d’un droit de visite et d’hébergement. Après les vacances de Noel, il avait refusé

d’envoyer ses deux fils en Angleterre. Pour appuyer son refus, il se prévaut d’une ordonnance du juge des enfants français qu’il avait saisi et qui avait ordonné le placement des enfants chez lui. Les juridictions anglaises ont été saisies par la mère et ont rendu une mesure de protection des

enfants en Angleterre et elles ont exigé le retour immédiat des enfants en Angleterre.Le père se pourvoit en cassation.

Solution:

La Cour constate qu’étant donné que les dispositions adéquates avaient été prises par les juridictions anglaises, le retour devait être prononcé.

Donc dès lors que des mesures de protection sont prises, le retour doit être ordonné.

Paragraphe 2: les conséquences pécuniaires du divorce pour les époux

I- La loi applicable à la prestation compensatoire

La prestation compensatoire a un caractère propre et beaucoup plus indemnitaire qu’alimentaire en droit français.Pourtant, en DIP, la prestation compensatoire est classée dans la catégorie « obligations alimentaires».En conséquence, les instruments internationaux relatifs aux obligations alimentaires s’applique à la prestation compensatoire.

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On a tout d’abord le Règlement UE N°4/2009 en matière d’obligation alimentaire. Il présente la particularité de renvoyer au protocole de la Haye du 23 novembre 2007 en ce qui concerne la loi applicable aux obligations alimentaires.Ce protocole de la Haye donne comme règle générale que la loi applicable est celle du pays de la résidence habituelle du créancier alimentaire. Toutefois, le protocole prévoit une règle spéciale pour les époux et ex-époux: « si l’une des parties s’oppose à l’application de la loi de la résidence habituelle du créancier et que la loi d’un autre Etat, en particulier l’Etat de leur dernière résidence habituelle commune présente un lien plus étroit avec le mariage alors cette loi s’appliquera.»Si on prend l’exemple d’un couple franco-allemand. Le couple habitait ensemble pendant 10 ans en France puis finissent par se séparer. L’épouse allemande retourne s’installer en Allemagne. Les époux divorcent et l’ex-épouse demande alors une prestation compensatoire. En principe, selon la règle générale la loi applicable serait la loi allemande. Mais si elle s’oppose à l’application de la loi allemande ( et elle y a intérêt), la loi française pourra être appliquée à la prestation compensatoire car cette loi correspond à la dernière résidence commune des époux et qu’elle présente des liens plus étroits avec le mariage.

II- La loi applicable à la liquidation du régime matrimonial

En principe, c’est la loi applicable au régime matrimonial des époux qui va s’appliquer et non la loi applicable au divorce.Brièvement, en droit positif français on applique deux règles de conflit et la délimitation entre ces deux règles de conflit se fait en fonction de la date de la célébration du mariage:

1° Si le mariage a été célébré avant le 1er septembre 1992

On applique ici une règle de conflit d’origine prétorienne.Cette règle dit qu’en principe le régime matrimonial est soumis à la loi choisie par les époux. A défaut de choix, la loi du premier domicile conjugal des époux s’applique.

2° Si le mariage a été célébré après le 1er septembre 1992

On applique la Convention de la Haye du 14 mars 1978.Selon cette convention, la loi applicable est celle choisie par les époux mais ici le choix est encadré. A défaut de choix, la loi applicable est celle de la première résidence commune des époux après le mariage.

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CHAPITRE 4: LA FILIATION

Les questions relatives à la filiation sont soumises à différentes méthodes de conflit de lois.L’objectif général qui gouverne ces règles sont la protection de l’enfant.

Section 1: La loi applicable à la filiation biologique

Les règles de conflit en matière de filiation sont posées aux article 311-14 et suivant du cc sont issus d’une loi du 3 janvier 1972 et certaines de ces dispositions ont été modifiées suite à une ordonnance du 4 juillet 2005 sur la «réforme de la filiation»

I- La règle générale : article 311-14

A- Le principe

La règle générale est posée a l’article 311-14 du code civil: « la filiation est régie par la loi nationale de la mère au jour de la naissance de l’enfant et si la mère n’est pas connue par la loi nationale de l’enfant» C’est une règle de conflit de loi bilatérale classique.

Ce principe du rattachement de la loi nationale de la mère est demeurée intacte au fil du temps. Pq ce rattachement ? Cette disposition résulte de la conviction qui pouvait exister que la mère de l’enfant est forcément connue, en application de l’adage « mater samper certa est» L’élément le moins aléatoire c’‘est la mère.

Cette disposition est applicable dès lors qu’il n’y a pas de règle spéciales.

B- Domaine de l’ article

Le rattachement à la loi nationale de la mère a été mis en oeuvre par exemple en matière de recherche de paternité et de désaveux de paternité .L’article 311-14 apporte une précision : dès lors que la mère n’est pas connue, on applique pour régir la filiation la loi nationale de l’enfant.

Précision : le renvoi a été exclu par la JP

C- Mise en oeuvre de la règle :

En principe la mise en oeuvre de cette règle de conflit de loi est un domaine propice à l’intervention d’un mécanisme qu’on connait bien: l’OP international de proximité En effet, le droit d’agir en établissement de la filiation a été affirmée au nom de l’OP de proximité , cad au profit d’un enfant de nationalité française ou résidant en France. Cette solution découle d’un arrêt de la Cour de cassation

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Cass civ du 10 février 1993 « Parretti»

Faits :

Femme tunisienne qui accouche d’une fille , et la fille est française et réside en France. Cette femme assigne son ancien concubin de nationalité algérienne en recherche de paternité naturelle. Selon l’article 311-14 cc, la loi compétente est la loi de la mère donc la loi tunisienne, Or ici cette

loi ne connait que la filiation légitime.La mère de l’enfant soutient que la loi tunisienne est contraire à l’OP international français. La cour

d’appel lui donne raison mais son ex concubin se pourvoit en cassation.

Solution :

La cour rejette le pourvoi et décide que, si les lois étrangères qui prohibent l’établissement de la filiation naturelle, ne sont en principe pas contraires a la conception de l’OP international , il en est autrement lorsque ces lois ont pour effet de priver un enfant français ou résidant habituellement en

France du droit d’établir sa filiation. = application de l’OP de proximité pour écarter la loi étrangère.

Le facteur de proximité permet d’introduire un effet relatif a l’intervention de l’OP .

Quel critère de proximité est retenu ? Nationalité ou domicile ?

On considère que rattachement alternatif La doctrine considérait ici qu’il s’agissait de corriger une règle de conflit assez défectueuse « toute enfant français ou domicilié en France à le droit d’établir sa filiation» ( règle matérielle ) Cette solution a été réaffirmée ultérieurement:

Arrêt Cour de cassation du 10 mai 2006

« une lois étrangère qui ne permet pas l’établissement d’une filiation naturelle , n’est pas contraire à la conception française de l’OP international dès lors, qu’elle n’a pas pour effet de priver un

enfant de nationalité française ou résidant habituellement en France du droit d’établir sa filiation»

D- L’évolution en matière de filiation

Arrêt Cour de cassation 26 octobre 2011

Faits :

Enfant né en France au début des années 2000, reconnu par sa mère de nationalité ivoirienne. Sa mère a assigné Monsieur X en recherche de paternité.

Le TGI de Paris dit recevable la demande en recherche de paternité, et ordonne une expertise génétique.

Un appel est interjeté par monsieur X et la cour d’appel de Paris a invité les parties à s’expliquer sur la loi ivoirienne qui était applicable.

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La cour d’appel confirme le jugement de première instance, et donc monsieur X se pourvoit en cassation.

Solution:

La cour rejette le pourvoi et considère que c’est à bon droit que la cour d’appel a décidé que la loi ivoirienne , bien que désignée par la règle de conflit, est contraire a l’OP international français car

elle prive l’enfant de son droit d’établir sa filiation paternelle.

Si on compare avec l’arrêt Parretti et l’arrêt de 2006 on a une différence = on a une référence a la nationalité de l’enfant ou sa résidence en France . Si on reprend l’arrêt on a pas de référence. Ici l’arrêt ne précise pas que l’enfant est français et qu’il réside habituellement en France.

On s‘est demandé si aujourd’hui on assistait pas à un recul de la notion de l’OP de proximité.Ici pas de réponse ferme car l’enfant était bien né en France mais pour autant on peut penser que la notion est abandonnée ici.Si le revirement de JP est confirmé le principe deviendrait qu’une disposition étrangère qui prive l’enfant de son droit d’établir sa filiation paternelle est contraire à l’OP.Il faut attendre une réaffirmation de cette solution.

II- Les règles de conflits spéciales

On en a plusieurs aux articles 311-15 et suivants du code civil.

A- L’article 311-15 du code civil

La première considère la possession d’état.

« toutefois si l’enfant ou ses père et mère ou l’un d’eux ont en France leur résidence habituelle commune ou séparée, la possession d’état produit toutes les conséquences qui en découlent selon la loi française, alors même que les autres éléments de la filiation auraient pu dépendre d’une loi étrangère»

Pas de règles de conflit bilatérale. Ici, on peut penser que ce texte érige les règles matérielles françaises faisant produire effet à la possession d’état en loi d’application immédiate. En conséquence les règles matérielles relatives à la possession d’état évinceraient notamment les articles 311-14 et 311-17 du code civil. Dès lors que les conditions de l’article sont réunis , il s’applique et écarte les autres règles de conflit de loi relatives a la filiation . Pour les tribunaux cette règle s’applique aux effets positifs de la possession d’état c’est à dire aux conséquences attachées à son existence, comme par exemple l’article 317 qui permet « l’établissement de la filiation par la possession d’état» ou aussi aux conséquences liées à l’absence de possession d’état (par exemple pour écarter une présomption de paternité).

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B- L’article 311-16 du code civil

Il a été abrogé car il s’agissait d’un article relatif à la loi applicable à la légitimation.Ici, le droit français évolue en la matière mais ne signifie pas que le caractère légitime de la filiation a été supprimé dans les autres Etats

C- L’article 311-17 du code civil

 Il pose une règle spéciale portant sur la loi applicable à « la reconnaissance volontaire de paternité ou de maternité est valable si elle a été faite en conformité soit de la loi personnelle de son auteur soit de la loi personnelle de son enfant».

l’objectif de la règle est celui de la validité de la reconnaissance : elle sera valide si elle est faite soit selon la loi personnelle de son auteur ou de l’enfant Le choix entre la loi nationale de son auteur ou de l’enfant présente un caractère limitatif

La cour de cassation a interprété a contrario cet article 3 puisqu’elle a estimé qu’il était applicable a une action en nullité de la reconnaissance et à une action en contestation d’une reconnaissance. Le critère de rattachement alternatif devient un critère cumulatif

Les juges refuseront l’anéantissement de la filiation chaque fois que l’une des 2 lois désignées y fait obstacle. Cependant une hésitation est née d’un arrêt du 14 juin 2005 : il s’agissait d’une action en contestation de reconnaissance et la cour de cassation s’est fondée sur l’article 311-14, et non sur l’article 311-17. Mais cet arrêt n’est pas claire donc solution retenue de l’arrêt de 1999.

D- L’article 311-18 du code civil

Cet article a été abrogé et était relatif à l’action à fin de subsides . C’est une règle de conflit à caractère matériel. Cet article couvrait une option pour l’enfant en quête de subside. Il a été abrogé car est entré en vigueur la convention de LH du 2 octobre 1973 qui donne les solutions pour les lois applicables en matière des obligations alimentaires.

Section 2: La filiation adoptive

Les solutions en matière de filiation adoptive ont été dégagées dans un premier temps par la jurisprudence puis cette jurisprudence a été partiellement reprise par une loi du 6 février 2001.Ces règles sont insérées dans le code civil.

La filiation adoptive est très souvent international car le nombre d’adoptables en France est faible. les règles sont complexes et notamment parce que l’adoption présente des aspects très différents selon les législations.

Un dispositif de coopération administrative a été mis en place par une Convention de la Haye du 29 mai 1993 sur le protection des enfants et la coopération en matière d’adoption internationale.Elle est entrée en vigueur en France le 1er octobre 1998.

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Cette convention prépare la procédure judiciaire de l’adoption et les dispositions de cette convention vont se combiner avec les dispositions de droit commun.L’objectif de cette convention est de réduire au maximum les adoptions boiteuses.Cette convention ne règle pas les conflits de lois mais organise une coopération entre les autorités des Etats contractants.Donc chaque Etat contractant est chargé de nommer une autorité centrale chargée de coopérer avec les autres autorités des autres Etats contractants.En France, cette autorité centrale est le Service de l’Adoption Internationale et une autre autorité intervient également: l’Agence France de l’Adoption.Donc en France, il existe deux régimes distincts selon que l’Etat d’origine de l’enfant a ratifié ou non la Convention de La Haye.

On a donc comme source: Articles 370-3 et suivants du code civil, Convention de la Haye et également la Convention internationale des droits de l’enfant du 20 novembre 1989 en ce qui concerne les principes fondamentaux ( Convention de New-York).

Concernant le droit français, 3 articles ont été insérés dans le code civil:

• 370-3 qui porte sur les conditions de l’adoption• 370-4 qui porte sur les effets de l’adoption en France• 370-5 qui concerne les effets de l’adoption prononcée à l’étranger

Paragraphe 1: La loi applicable à l’établissement du lien de filiation

Il s’agit de déterminer la loi applicable aux conditions de l’adoption internationale.La jurisprudence a rendu plusieurs arrêts en ce sens.

Arrêt Torlet, Cour de cassation 7 novembre 1984

L’adoption est régie par la loi nationale du ou des adoptants. La loi de l’enfant doit seulement déterminer les conditions relatives au consentement de l’adopté et à sa représentation.

Il y a donc application distributive de la loi de l’adoptant et de la loi de l’adopté.Ce système a été en partie repris par l’article 370-3 du code civil.

«Les conditions de l'adoption sont soumises à la loi nationale de l'adoptant ou, en cas d'adoption par deux époux, par la loi qui régit les effets de leur union. L'adoption ne peut toutefois être prononcée si la loi nationale de l'un et l'autre époux la prohibe.

L'adoption d'un mineur étranger ne peut être prononcée si sa loi personnelle prohibe cette institution, sauf si ce mineur est né et réside habituellement en France.

Quelle que soit la loi applicable, l'adoption requiert le consentement du représentant légal de l'enfant. Le consentement doit être libre, obtenu sans aucune contrepartie, après la naissance de l'enfant et éclairé sur les conséquences de l'adoption, en particulier, s'il est donné en vue d'une

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adoption plénière, sur le caractère complet et irrévocable de la rupture du lien de filiation préexistant.»

Le premier alinéa pose une règle de conflit de loi.Le second alinéa pose une simple prise en considération de la loi étrangère et non une règle de conflit de loi.Enfin le troisième alinéa pose une règle matérielle, règle qui va directement donner une solution au fond.Il résulte donc de cet article que la loi nationale de l’adoptant a une vocation générale à s’appliquer et, d’autre part que la loi nationale de l’adopté doit être prise en considération.

I- Application générale de la loi nationale de l’adoptant

On considère que c’est la loi de création du lien de filiation.Il est précisé que si l’adoption est faite conjointement par des époux de nationalité différente, alors la loi des effets du mariage est compétente car on considère que c’est l’entité du couple qui adopte.Ici donc il faut se référer à l’arrêt Rivière de 1953: la loi de la nationalité commune des époux. A défaut de la loi de nationalité commune, on applique la loi du domicile commun et à défaut la loi du for.

Toutefois, l’article 370-3 alinéa 1 pose une limite: l’adoption ne peut être prononcée si la loi nationale de l’un ou de l’autre époux la prohibe. Donc même si la loi des effets du mariage autorise l’adoption, si la loi de la nationalité de l’un ou de l’autre époux la prohibe alors cette adoption n’est pas possible.Il s’agit d’éviter ici les adoptions boiteuses dans une certaines mesure.

II- La place laissée à la loi de l’adopté

La jurisprudence antérieure de la Cour de cassation admettait que le consentement éclairé du mineur, le consentement donné par ses représentants, puisse l’emporter sur le contenu prohibitif du statut personnel de l’enfant.L’article 370-3 alinéa 2 a modifié cette solution en réponse à ce qui pouvait être considéré comme un comportement impérialiste des pays occidentaux.Il résulte de cet alinéa un principe d’inadoptabilité du mineur de statut prohibitif.Ainsi, si la loi nationale du mineur interdit l’adoption alors ce mineur ne pourra pas être adopté même si la loi nationale de l’adoptant le permet: c’est ce qu’on appelle la Kafala.La Kafala est une institution reconnue par les droits musulmans. Il s’agit d’un engagement de prendre bénévolement en charge l’entretien, l’éducation et la protection de l’enfant mineur au même titre que le ferait un père pour son fils.La Kafala ne crée aucun lien de filiation. Toutefois, comme il s’agit d’une décision relative à l’état des personnes, cette institution lorsqu’elle est judiciaire a vocation à être de plein droit reconnue en France.La difficulté est que les effets produits par la Kafala sont plus ou moins étendus et dépendent à la fois de la législation du payas d’origine, du contenu de la décision du Kafala et de la situation de l’enfant recueilli.

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Exemple: dans le cas d’enfants abandonnés sans filiation connue, la Kafala peut être assimilée en France à une tutelle.Dans les cas où les attributs de l’autorité parentale ont été transférés au Kafile, sans renoncement définitif des parents à exercer cette autorité parentale, dans ce cas en France cette Kafala va produire des effets d’une délégation d’autorité parentale.

En raison de la relative complexité juridique attachée à la Kafala, cette institution est encore mal connue des administrations européennes. Il en résulte parfois des difficultés pour les familles, notamment auprès des services consulaires, fiscaux, sociaux ou éducatifs.

S’agissant de la possibilité de prononcer en France l’adoption d’un mineur accueilli dans le cadre d’une Kafala, l’article 370-3 alinéa 2 interdit le prononcé en France de l’adoption d’un tel mineur.La Cour de cassation a rappelé ce principe d’interdiction dans deux arrêts de principe:

Cour de cassation 10 octobre 2006

Cette prohibition est considérée comme conforme aux engagements internationaux de la France notamment la Convention de La Haye du 29 mai 1993 qui impose de s’assurer de l’adoptabilité de

l’enfant.En outre, la Kafala est une institution juridique qui est reconnu par la Convention des Nations Unies

du 29 novembre 1989 relative aux droits de l’enfant.

En effet, l’article 20 de la Convention reconnait comme moyen de protection le placement dans une famille par Kafala.Les solutions de la Cour de cassation ont été critiquées par une grande partie de la doctrine européenne. Mais pour les moment, ces solutions ne sont pas remises en compte.

Civ 15 décembre 2010

Le fait de n’avoir aucune filiation n’est pas contraire à l’intérêt de l’enfant.

Faits:

Deux époux français et résidant en France et ont recueilli en Algérie par un acte de Kafala un enfant abandonné donc qui n’avait pas de filiation connue.

Ces personnes sont retournées en France et afin de donner une filiation à cet enfant, ils sont saisi la justice en requête d’une adoption plénière.

La CA de Chambery a rejeté leur demande au motif que l’article 370-3 alinéa 2 interdit l’adoption si la loi nationale de l’adopté la prohibe.

D’autre part, cet article n’est que la traduction en droit interne des rgles édictées par la Convention de La Haye de 1993.

Enfin, la loi algérienne prohibe l’adoption.Le pourvoi invoquait la contrariété de la décision à l’intérêt supérieur de l’enfant ( reconnu par la

Convention de New York de 1989)

Solution:

La Cour rejette le pourvoi et l’enfant reste inadoptable.

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Décision critiquée car ici l’intérêt de l’enfant est apprécie in abstracto.Or, on pourrait penser qu’il faudrait plutôt retenir une appréciation in concreto de l’intérêt de l’enfant.

Une proposition de loi relative à la Kafala avait été déposée devant le Sénat le 10 mars 2011 afin de mettre en place justement un régime juridique respectueux de l’intérêt supérieur de l’enfant.Cette proposition de loi proposait de rompre avec le régime prohibitif de l’article 370-3 alinéa 2.Pour autant cette proposition est restée lettre morte. Un espoir était né d’une saisine de la CEDH.

Arrêt CEDH Harroudj c/ France 4 octobre 2012

Faits:

Il s’agissait d’une femme qui avait saisi le TGI de Lyon d’une requête en adoption plénière d’une enfant née en Algérie sans filiation établie.

La demande en France est rejetée à la fois en première instance qu’en appel.Elle forme un pourvoi en invoquant la Convention de NY et les articles 8 et 14 de la CEDH.

La Cour de cassation a rejeté son pourvoi.La demanderesse a alors saisi la CEDH considérant que la position du droit français constitue tant

pour elle que pour l’enfant une atteinte disproportionnée à sa vie familiale normale. Elle invoque les dispositions de l’article 14 de la CEDH car il y avait pour elle une discrimination fondée sur la

nationalité.

Solution:

La CEDh considère qu’il n’y a pas en l’espèce violation des articles 8 et 14.Elle considère que le refus de l’adoption ne constitue pas une ingérence dans la vie familiale de la requérante. Pour parvenir à cette solution, la CEDH s’appuie sur le droit international, notamment

sur la Convention de NY qui reconnait la Kafala et la Cour prend soin de préciser que la Kafala crée une situation comparable à une tutelle.

De plus, la Cour précise qu’en l’espèce l’enfant avait pu changer de nom, qu’il avait été possible de rédiger un testament.

Par ailleurs, la Cour ajoute qu’il s’agit d’un statut prohibitif provisoire puisque la nationalité française peut être acquise après 5 ans de séjour sur le territoire français.

Finalement, la Cour conclu que l’Etat ( France ici) efface progressivement la prohibition de l’adoption et que, ce faisant, cet Etat entend favoriser l’intégration des enfants étrangers sans les

couper immédiatement des règles de leur pays d’origine et donc que cet Etat respecte les pluralismes culturels.

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Paragraphe 2: Les effets de l’adoption

La loi du 6 février 2001 distingue selon que l’adoption a été prononcée en France ou à l’étranger.Dans le premier cas, l’article 370-4 du code civil est applicable

«Les effets de l'adoption prononcée en France sont ceux de la loi française.»

Dans le second cas, l’article 370-5 est applicable.

«L'adoption régulièrement prononcée à l'étranger produit en France les effets de l'adoption plénière si elle rompt de manière complète et irrévocable le lien de filiation préexistant. A défaut, elle produit les effets de l'adoption simple. Elle peut être convertie en adoption plénière si les consentements requis ont été donnés expressément en connaissance de cause.»

Les solutions retenues par ces deux articles peuvent paraitre contestables puisque tous les types d’adoption en droit comparé doivent finalement être ramenés aux deux modèles qui existent en droit français.Or les modèle d’adoption à l’étranger ne sont pas forcément assimilables aux deux modèles français.

On va s’attacher plus particulièrement à l’article 370-5.Le principe est que l’adoption va produire en France des effets sans exequatur et donc, s’il n’y a pas de contestation, cette adoption va être reconnue de plein droit.Ce principe de la reconnaissance de plein droit est conforté par des arrêts de la CEDH: Arrêt Weiner du 28 juin 2007 et Négrépontis- Gianisis c/ Grèce du 3 mai 2011.Si l’adoption a été prononcée dans un Etat partie à la Convention de La Haye de 1993 et si cette adoption a été certifiée par l’autorité désignée par la Convention, dans ce cas l’efficacité de cette adoption ne peut être refusée en France.Elle pourrait toutefois être refusée en France que si elle est manifestement contraire à notre OPI compte tenu de l’intérêt supérieur de l’enfant.

Dans les autres cas, la reconnaissance de l’adoption est soumise aux conditions ordinaires de reconnaissance d’un jugement étranger. Ces conditions peuvent être examinées à titre principal ou incident et ces conditions ont été posées par l’arrêt Cornelissen: compétence indirecte du juge, jugement non contraire à l’OPI français et qu’il ne soit pas entaché d’une quelconque fraude.

Plusieurs décisions récentes ont été rendues concernant une contrariété à l’OPI.Plus précisément, ces décisions concernent la question controversée de l’adoption au sein d’un couple homosexuel.

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Chambre civile Cour de cassation du 8 juillet 2010

La Cour a décidé qu’un jugement étranger d’adoption par deux femmes homosexuelles pouvait produire des effets en France.

Faits:

Deux femmes française et américaine vivent aux USA et concluent un partenariat civil aux USA.Un tribunal de l’Etat de Georgie prononce l’adoption de l’enfant de l’une de ces femmes qui est né

après insémination par donneur anonyme. Les deux femmes, suite à ce jugement, exercent l’autorité parentale sur l’enfant et l’acte de

naissance américain de l’enfant mentionne la mère comme étant la mère et l’adoptante comme étant parent.

La CA de Paris a refusé l’exequatur à cette décision américaine en raison de sa contrariété à l’OPI français.

Solution:

La Cour de cassation casse l’arrêt et ordonne l’exequatur de la décision américaine.Pour la Cour, le jugement américain a réglé la question de l’autorité parentale en prévoyant le

partage de cette autorité entre la mère biologique et l’adoptante. Or, pour la Cour de cassation, le partage de l’autorité parentale n’est pas contraire à l’OPI français.

Cette solution a été approuvée par de nombreux auteurs car elle permet la permanence du statut personnel ( donc évite les statuts boiteux) et s’aligne sur le respect de la vie privée familiale de l’intéressé.

Chambre civile, 7 juin 2012

La Cour semble revenir sur la solution de l’arrêt de 2010

Faits:

Dans la première affaire était en cause un jugement britannique prononçant l’adoption d’un enfant par un français et un britannique qui vivaient ensemble depuis 16 ans et domiciliés en GB.

Dans la seconde affaire, il s’agissait d’un jugement canadien qui a prononcé l’adoption conjointe d’un enfant par un couple franco-canadien qui vivaient ensemble depuis de nombreuses années à

Montréal.Dans les deux cas, le TGI de Paris a refusé l’exequatur pour méconnaissance de l’OPI.

La CA de Paris, en se fondant sur l’arrêt de 2010, a considéré qu’il convenait d’accorder l’exequatur.

Solution:

La Cour casse les arrêts de la CA de Paris et juge qu’est contraire à un principe essentiel du droit français de la filiation la reconnaissance en France d’une décision étrangère dont la transcription sur

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les registres français d’état civil valant acte de naissance emporte inscription d’un enfant comme né de deux parents du même sexe.

On s’est demandé si ces arrêts de 2012 constituaient un revirement par rapport à la solution retenue en 2010. Il ne semblerait pas d’un revirement en tant que tel puisque dans les différentes affaires les situations de fait sont différentes. En effet, dans l’affaire concernant l’arrêt de 2010 il s’agissait de la transcription d’une adoption simple alors que dans les arrêts de 2012 il s’agissait de la transcription d’un jugement d’adoption qui pouvait être assimilé à une adoption plénière.De même les motifs de cassation sont différents puisque ce qui est jugé contraire à l’OPI dans les arrêts de 2012 ce n’est pas en soi la circonstance que l’enfant aura deux parents de même sexe mais c’est surtout la circonstance que la transcription aurait pour effet d’inscrire cet enfant comme étant né de deux parents de même sexe.Il ressort finalement de ces arrêts de 2012 que ce qui importe pour la Cour de cassation ce sont les actes d’état civil puisque l’adoption ne porte atteinte à l’OPI français que si elle a pour effet d’imposer d’écrire sur un acte d’état civil que l’enfant est né de deux personnes de même sexe.

Ces deux arrêts de 2012 peuvent sembler en contre-temps à la fois du contexte juridique national et européen.Au niveau national, il n’appartient pas au juge de créer le droit mais on peut penser que les juges ici auraient pu utiliser toutes les nuances de l’OPI pour éviter la cassation et donc accorder l’exéquatur.Elle aurait pu faire jouer l’effet atténué de l’OP, d’autant plus que dans les deux espèce, les deux personnes étaient établis dans un Etat qui accorde l’adoption par les couples homosexuels.D’autres par un arrêt de la CEDH du 19 février 2013 X et a c/ Autriche, la Cour s’inscrit en faveur de l’adoption par un couple homosexuel. Elle a conclu que l’impossibilité d’accès à l’adoption par les couples homo en Autriche était discriminatoire en comparaison avec la situation des couples hétérosexuels non mariés.En effet, en Autriche, un couple hétérosexuel non marié peut adopter. Il y a donc une discrimination ici.

Section 3: Les difficultés liées à la gestation pour autrui et à la procréation assistée

Toutes les règles relatives à la PMA et à la GPA sont tributaires de la régulation territoriale par les pouvoirs publics de l’exercice de la médecine.Il existe de grandes divergences de législations ce qui a pour conséquence de voir apparaitre le tourisme procréatif.Ces divergences de législation donnent lieu à des décisions parfois surprenantes.

Décision anglaise qui avait autorisé une veuve à effectuer une insémination post-mortem en Belgique dans des conditions interdites par la loi anglaise.La Cour anglaise s’est ici fondée sur la libre prestation de service. Pour la Cour, les gamètes congelées du mari décédé ont été qualifiés d’accessoires au service médical d’insémination offert dans un Etat membre.

Plusieurs autres questions se posent, notamment quant à la détermination de la loi applicable à l’établissement de la filiation dans le cas d’une gestation pour autrui ou d’une procréation assistée.

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D’autres questions se posent quant à l’effet d’une législation étrangère reconnaissance la gestation pour autrui.

I- Hypothèse 1: Conflit entre la loi de la mère et la loi de l’Etat dans lequel a eu lieu une procréation assistée

Un enfant est né d’une PMA avec un tiers donneur. Cette opération a été réalisée en France, lieu de la résidence habituelle de l’enfant.Imaginons que la loi de la mère de cet enfant admet la levée de l’anonymat. Si on applique l’article 311-14 du code civil qui désigne la loi nationale de la mère en tant que loi applicable à la filiation, dans de cas là, la loi de la mère devrait s’appliquer ( par exemple la loi suédoise).

Mais que se passe t-il si la loi de la résidence habituelle de l’enfant ( ici la France) proscrit l’action en recherche contre le tiers donneur de gamète? Quelle loi fait-on

prévaloir? L’article 311-14 ou un autre principe?

On pourrait supposer ici que le régime du secret applicable en France devrait primer et ce régime devrait primer au nom de l’OPI ici.Il faut noter que l’on a pas de décision en la matière donc on ne fait que supputer.

II- Hypothèse 2: Le rôle du rattachement à la loi de la mère dans l’hypothèse d’une GPA

Dans le cas d’une GPA plusieurs personnes peuvent intervenir pour donner naissance à un enfant.Plusieurs situations sont à distinguer:

• Dans une première situation, la mère porteuse accouche sous X d’un enfant conçu par insémination artificiel avec son propre ovocyte et le sperme du père intentionnel

• Dans une deuxième situation, la mère porteuse est seulement gestatrice et porte en elle un embryon conçu in vitro par les parents génétiques de l’enfant.

• Dans une troisième hypothèse, l’embryon est conçu in vitro mais cette fois avec les ovocytes d’une donneuse et le sperme d’un père intentionnel.

On a donc une dissociation des différents éléments: conception, gestation, accouchement.La difficulté soulevée survient si chacune des femmes se prétend auteur de l’enfant.

Quelle loi est applicable dans un tel cas si on applique 311-14?

Cet article précise que lorsque la mère n’est pas identifié ou identifiable, alors on applique la loi de l’enfant. on peut donc supposer que dans une telle hypothèse ou appliquerait la loi de l’enfant.

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III- Hypothèse 3: Enfant né à l’étranger d’une GPA pratiquée à l’étranger dans un Etat non prohibitif

Le droit français considère que le contrat de mère porteuse est illicite au regard de l’article 16-7 du code civil. Cet article interdit toute convention portant sur la gestation, procréation pour autrui.

3 arrêts de la chambre civile, 6 avril 2011

La Cour a réaffirmé cette solution dans l’ordre internationalCes arrêts étaient attendu en raison d’un contexte médiatique très fort

Faits:

Il s’agissait à chaque fois d’un couple composé d’un homme et d’une femme qui sont de nationalité française et le couple concluait un contrat de mère porteuse aux USA dans des Etats qui autorisent

cette forme de procréation ( Minnesota et Californie ici).Dans les deux première affaires, les embryons étaient issus des gamètes du couple et dans ces affaires le couple demandait la transcription sur les registres d’état civil français des décisions

américaines les reconnaissant comme parent.dans la troisième affaire, l’enfant provenait des gamètes du père et d’une donneuse anonyme et ici

le couple sollicitait la transcription de l’acte français de notoriété constatant la qualité de l’enfant en tant qu’enfant légitime et à titre subsidiaire l’établissement de la filiation paternelle par la

possession d’état.A chaque fois les juges de première instance ont rejeté les demandes d’exequatur.

Les CA ont approuvé les juges du fond.Les pourvois ont été rejetés également.

Solution:

La Cour considère que la GPA heurte les principes essentiels de droit français, lesquels relevant de l’OPI font échec à la reconnaissance des décisions étrangères qui y contreviennent.

Il ressort donc de ces arrêts que les ressortissants français ne peuvent pas contourner la prohibition de la maternité pour autrui en ayant recours à la mère porteuse dans un Etat qui autorise cette

pratique.La décision ne sera pas reconnue en France car contraire à l’OPI français.

La réponse de la Cour ici peut apparaitre peu adaptée du point de vue du DIP français puisqu’ici aucune référence n’est faite à la proximité et, d’autre part, au vu des faits d’espèce, la fraude aurait pu être opposée et elle semblerait ici plus adaptée.Un autre élément est gênant dans ces arrêts puisqu’il est décidé que le refus de reconnaissance de la décision étrangère ne prive pas l’enfant de la filiation maternelle que le droit de l’Etat concerné lui reconnait ni ne l’empêche de vivre avec les époux en cause en France.Cette précision peut sembler opportune. Toutefois, si l’on reprend un raisonnement de DIP, l’affirmation est assez surprenante car ici, finalement, l’absence de filiation selon le droit français est en quelque sorte racheté par l’existence d’une filiation selon le droit étranger.

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Ce qui pose problème donc ici c’est que la Cour va tirer partie de l’existence d’une situation à l’étranger pour refuser de la reconnaitre en France alors que traditionnellement en DIP le raisonnement est inverse.Donc ici l’OP est utilisé à l’envers puisque ordinairement, l’existence d’un droit acquis à l’étranger a pour effet de paralyser l’exception d’OPI afin de garantir la continuité de la situation.Dans un tel cas, en effet, intervient l’OP atténué.Or justement ici, l’existence d’un droit acquis à l’étranger a pour effet de déculpabiliser le juge français et donc de renforcer l’exception d’ordre public.

A l’heure actuelle, les solutions françaises concernant la GPA sont celles données par les arrêts du 6 avril 2011.On peut citer la Circulaire Taubira qui concernait la GPA. Cette circulaire ne concerne simplement que la délivrance du certificat de nationalité française mais absolument pas la reconnaissance de la filiation née d’une GPA valablement pratiquée à l’étranger.

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PARTIE 2: LE DROIT DES

OBLIGATIONS

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Le droit des obligations concerne non seulement les personnes physiques mais également les personnes morales qui exercent des activités commerciales internationales.

Chapitre 1- Le contrat

Lorsqu’une situation présente des éléments d’extranéité, il y a deux problèmes à résoudre:

• La juridiction compétente. Concernant les règles de compétence des juridictions on a le Règlement Bruxelles 1 et notamment sont article 5. On n’y reviendra pas ici.

• La loi qui va régir le contrat. Dans ce domaine, on applique le Règlement Rome 1

Lorsque l’on s’interroge sur le droit applicable au contrat, il faut se pencher sur les méthodes de traitement de l’internationalité du contrat. Effectivement, ici deux approches distinctes existent:

• Soit le contrat international est soumis à un droit étatique par le biais d’une règle de conflit de loi. Dans ce cas le contrat est soumis à un ordre juridique déterminé via la méthode du conflit de lois.

• Soit le contrat international est soumis à des règles propres, règles qui vont être internationales ou trans-nationales. Donc ici il s’agit finalement d’un droit alternatif ( dans le sens où il s’ajoute aux règles internes) et substantiel ( ici dans le sens de matériel). Ces règles propres vont concerner seulement les contrats internationaux et ces règles vont être différentes des règles internes.

Section préliminaire: les règles matérielles du commerce international

Lorsque l’on parle de règle matérielle internationale applicable au contrat international, il s’agit ici de normes spécialement faites pour régir les relations internationales.Ces règles matérielles doivent être distinguées de la règle de conflit de lois car ces règles matérielles donnent immédiatement une solution à une question donnée et donc ne se contentent pas de désigner une loi étatique applicable comme le font les règles de conflit de lois.

Un deuxième trait caractéristique de ces règles matérielles internationales (RMI) est que celles-ci se distinguent des normes internes. Ces RMI sont vraiment tournées vers des besoins du commerce international.

Lorsque l’on traite des RMI on peut y opposer deux grandes sortes de règles:

• Les règles matérielles qui ont une origine étatique ou inter-étatiques ( RME)• Les règles d’origine privée (RMP)

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Paragraphe 1: Les RME

Ces règles vont émaner des Etats, d’organisations d’intégration régionale ( UE, OHADA, ALENA, etc...), d’organisation inter-étatiques ( ONU, OMC, OCDE).

I- Les sources étatiques

Un Etat peut parfois prendre la peine d’édicter des lois ou créer de la jurisprudence qui soient réservées aux seules relations internationales.

Exemple: la validité des clauses valeur or ( clauses indexées sur l’or). Pendant longtemps elles étaient formellement interdites puis le droit français a autorisé ces clauses dans les contrats internationaux soumis au droit français. La question s’est alors posé d’un contrat international soumis à un droit étranger qui prohibait de telles clauses. La Cour de cassation, dans un arrêt Messagerie maritime du 21 juin 1950, a décidé de valider ces clauses alors qu’elles étaient interdites pas la loi étrangère applicable au contrat. Cela signifie que ce type de clauses est valable dans les contrats internationaux même si selon la loi étrangère ces clauses sont nulles.!!!Attention!!! Il ne s’agit pas d’une loi de police ici mais elle permet de favoriser des intérêts du commerce international.

II- Les sources inter-étatiques ou inter-gouvernementales

Il s’agit notamment de l’ONU et, plus précisément, de la CNUDCI ( Commission des Nations Unies pour le Droit Commercial International). Il s’agit d’un organe juridique de l’ONU et qui est compétente dans le domaine du droit commercial international.

La CNUDCI est spécialisée dans la réforme du droit commercial et existe depuis maintenant plus de 40 ans.Elle a pour but de moderniser, harmoniser les règles applicables au commerce international. Elle élabore donc des règles harmonisées sur les opérations commerciales.Elle élabore ainsi des conventions, des guides législatifs. La plus connue de ses convention est la Convention sur le contrats de vente internationale de marchandises ( CVIM) adoptée à Vienne le 11 avril 1980.Cette Convention est entrée en vigueur en France le 1er janvier 1988.

Cette CVIM a rencontré un grand succès auprès des Etats du monde entier car le nombre d’adhésion ne cesse de progresser ( aujourd’hui environ 79 Etats parties).Pour autant, certains Etats n’en sont pas parties comme l’Angleterre et l’Irlande. Cette CVIM constitue une règlementation de la vente internationale et n’est donc applicable qu’à la vente internationale.

Il s’agit ici de règles matérielles puisque cette convention concerne les règles applicables à la formation du contrat, l’obligation du vendeur et de l’acheteur, à la résolution, etc... Donc là on n’a que des dispositions matérielles.Toutefois, les parties ont la possibilité d’exclure son application par le biais d’une clause contractuelle.

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Paragraphe 2: Les sources privées

Il s’agit ici d’un droit spontané ou d’un droit construit.Quand on parle d’un droit spontané, il s’agit ici de pratiques et d’usages qui émanent des commerçants.Quand on parle de droit construit, on fait référence à des normes matérielles élaborées dans l’enceinte d’une institution.

On a les principes UNIDROIT relatifs au contrat du commerce international. Ce sont des principes mis au point par un groupe d’experts provenant d’Etats du monde entier. Chaque expert est intervenu à titre personnel donc ils ne représentaient pas officiellement leur Etat. Ces experts se sont réunis sous l’égide d’une organisation qui s’appelle UNIDROIT. Ces principes proposent différentes règles aux contrats internationaux. Ces principes ont une grand influence sur les réformes des droits des obligations qui sont en cours dans différents Etats qui vont s’en inspirer. Ces principes peuvent également s’appliquer directement aux contrats internationaux, à savoir que les parties peuvent désigner les principes UNIDROIT comme applicable à leur contrat et un arbitre international appliquera ces principes.

On a également les INCOTERNS. Ils ont été mis au point par la Chambre de commerce international qui siège à Paris.Ils règlementent toutes les questions liées à la logistique d’une vente internationale ainsi que les transferts de risque. Ces TERNS permettent de répartir les frais et les risques liés à l’acheminement de la marchandise. Ce sont donc des termes commerciaux qui permettent d’articuler la vente et le transport.Aujourd’hui, ils constituent donc une des bases du commerce international. Ils s’expriment généralement par des sigles : « EXW», « SIF», etc... A chaque sigle, les obligations de l’acheteur et du vendeur sont révélés. Ainsi en présence du signe EXW, les obligations sont au maximum à la charge de l’acheteur.Cela signifie que l’acheteur devra se charger lui même de l’acheminement des marchandises achetées, ainsi du risque de l’acheminement et du dédouanage.Ces sigles doivent être négociés entre l’acheteur et le vendeur dans le cas des commerces internationaux.La dernière production de ces sigles date de 2010.

On a également la lex mercatoria. C’est la loi des marchands. C’est un droit spontané et informel qui est issu de la pratique des professionnels et des opérateurs du commerce international.Généralement, on inclut dans cette loi les principes généraux du commerce international.

Exemple: - On va y retrouver le principe de bonne foi qui entoure le contrat. - On va également y retrouver le principe de compensation des créances et des dettes.

Aujourd’hui, cette loi des marchands est reconnue comme étant une véritable source de droit et elle est fréquemment utilisée par les arbitres internationaux.

Le problème qui se pose est que l’existence de toutes ces règles n’est toutefois pas suffisante pour appréhender de façon simple et sûre le contrat international. En effet, ces règles ne vont pas régler tous les problèmes relatifs au contrat international. La difficulté qui se pose est que finalement

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l’opérateur international va se retrouver confronté à chaque fois à un droit national différent pour s’appliquer à son contrat international.Pour essayer de remédier à cette difficulté on a un effort de la part de l’UE pour unifier les règles de conflit de lois. Ainsi, quelque soit le juge saisi, la même loi sera applicable.

Section 1: Le champs d’application du règlement Rome I

A été signé à Rome le 19 juin 1980 une convention sur la loi applicable aux obligations contractuelles. Il s’agit de la Convention de Rome.A l’origine, cette convention était applicable en France et dans les 7 autres Etats de la CE de l’époque. Elle est entrée en vigueur le 1er avril 1991.Au fur et à mesure de l’élargissement de la CE et des convention d’adhésion à des conventions internationales, la Convention de Rome est finalement entrée en vigueur dans tous les Etats de l’UE.Cette convention a été transformée en un règlement communautaire: règlement 593/2008 du Parlement et du Conseil de l’UE du 17 juin 2008 ou Règlement Rome I.Ce règlement s’applique aux contrats conclus après le 17 décembre 2009.Les deux textes, Convention et Règlement, sont amenés à coexister pendant encore quelques temps puisque la Convention de Rome va continuer à s’appliquer aux contrat conclus avant le 17 décembre 2009 et ensuite le règlement Rome I ne s’applique pas au Danemark.

Paragraphe 1: Le caractère universel de Rome I

Article 2: « la loi désignée par le présent règlement s’applique même si cette loi n’est pas celle d’un Etat membre».cela signifie que le règlement Rome I s’applique quelque soit la loi applicable au contrat même s’il s’agit d’une loi étrangère.

C’est donc une disposition qui détermine la loi applicable mais c’est également une disposition qui concerne le domaine d’application du texte puisque cet article 2 signifie que le règlement s’applique quand bien même il aboutit à la compétence de la loi d’un Etat tiers.En conséquence, le règlement, dans son domaine d’application, se substitue totalement au droit international privé de chacun des Etats de l’UE ( sauf Danemark).Cela signifie que les règles de conflit de lois qui concernaient les contrats en droit commun français ne sont plus appliqués.

Paragraphe 2: Le champs d’application dans l’espace de Rome I

Comme il s’agit d’un règlement issu du droit de l’UE, il s’agit donc d’un texte de droit communautaire dérivé. Cela signifie qu’il est directement applicable sur le territoire des Etats membres de l’UE, à l’exception du Danemark.On en déduit que les tribunaux danois continueront d’appliquer la Convention de Rome, même pour les contrats conclus après le 17 décembre 2009.En revanche, lorsqu’un tribunal d’un autre Etat membre est saisi, ce tribunal doit appliquer Rome I peu importe que le contrat litigieux soit soumis au droit danois.

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Paragraphe 3: Le champs d’application temporel de Rome I

Ce règlement est entrée en vigueur le 20ème jour après sa publication au Journal Officiel: Article 29.Cependant, le règlement distingue entre son entrée en vigueur et son entrée en application.En effet, dès l’entrée en vigueur de ce texte, les Etats ont été soumis à certaines obligations.

Exemple: les Etats devaient dès l’entrée en vigueur du texte communiquer à la Commission les convention internationales auxquelles ils sont parties.

Le règlement Rome I n’affecte pas l’application des conventions internationales

Paragraphe 4: Le champs d’application matériel de Rome I

Trois conditions doivent être remplies pour que les textes ( Convention et Règlements) s’appliquent.

I- On doit être en présence d’une obligation contractuelle

Une première remarque à faire est que le règlement Rome I ne donne pas de définition de la matière contractuelle.La difficulté est que l’on se heurte à une différence de qualification entre les Etats de l’UE.

Exemple: en ce qui concerne les obligations du vendeur à l’égard du sous-acquéreur lorsque l’on est en présence d’une chaine de contrat. En droit français, lorsque le sous-acquéreur agit en responsabilité à l’encontre du vendeur, le sous-acquéreur bénéficie d’une action directe. Cette action directe, en droit français, est qualifiée d’action contractuelle.Au niveau des conflits de lois, cela sous entend d’appliquer Rome I. Mais si on qualifie cette action d’action délictuelle ( ce qui est le cas dans nombre d’Etat membre), alors on applique Rome II et non Rome I.

Ici, donc, il est indispensable que la Cour de Justice tranche cette question comme d’ailleurs, l’y invite le considérant 7 du règlement Rome I: « Le champ d'application matériel et les dispositions du présent règlement devraient être cohérents par rapport au règlement (CE) no 44/2001 du Conseil du 22 décembre 2000 concernant la compétence judiciaire, la reconnais- sance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale(5) (Bruxelles I) et au règlement (CE) no 864/2007 du Parlement et du Conseil du 11 juillet 2007 sur la loi applicable aux obligations non contractuel- les (Rome II)».

En ce qui concerne l’action directe, la qualification retenue par la CJCE est celui d’action délictuelle: Arrêt Jacob Handte CJCE de 1996.

Dans le domaine de conflit de lois, la Cour de cassation a rendu des arrêts sur le fondement de la Convention de Rome dans des espèces où il s’agissait d’une action directe du sous-traitant à l’encontre du maître de l’ouvrage: Arrêt Agintis, chambre mixte Cour de cassation, 3à novembre 2007.

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A l’article 1§1, le règlement précise qu’il s’applique dans des situations comportant un conflit de lois aux obligations contractuelles relevant de la matière civile et commerciale.

Enfin, il faut un contrat. La difficulté qui s’est posée ici est la qualification des négociations pré-contractuelles.En droit interne français, les fautes commises dans ce processus de pourparlers relèvent en principe de la responsabilité délictuelle. Mais ce n’est pas le cas dans tous les droits de l’UE. Ainsi, en Allemagne on applique la culpa in contraendo ( la faute dans le processus de contracter) qui engendre une responsabilité délictuelle.Le règlement Rome I a apporté ici une précision puisqu’il exclut expressément de son domaine d’application les obligations découlant de tractations menées avant la conclusion d’un contrat.C’est prévu à l’article 1§2(i).

II- Le contrat doit concerner une situation comportant un conflit de lois

Le règlement est applicable dès lors que la situation présente un conflit de lois. Cela signifie, a contrario, que Rome I va s’appliquer même lorsqu’il ne s’agit pas d’un contrat international.

En effet, Rome I est applicable à un contrat qui, objectivement, peut présenter les caractères d’un contrat interne mais pour lesquelles les parties ont fait naître un conflit de loi en soumettant tout simplement ce contrat à une loi étrangère.Rome 1 prévoit même le cas où un contrat est soumis à une lo étrangère par la volonté des parties.Cela figure à l’article 3§3: « Lorsque tous les autres éléments de la situation sont localisés, au moment de ce choix, dans un pays autre que celui dont la loi est choisie, le choix des parties ne porte pas atteinte à l'application des dispositions auxquelles la loi de cet autre pays ne permet pas de déroger par accord.»Donc même lorsque tous les éléments d’un contrat sont localisés dans un Etat, les parties peuvent tout de même choisir de soumettre leur contrat à une loi étrangère.

Également à l’article 3§4: « Lorsque tous les autres éléments de la situation sont localisés, au moment de ce choix, dans un ou plusieurs États membres, le choix par les parties d'une autre loi applicable que celle d'un État membre ne porte pas atteinte, le cas échéant, à l'application des dispositions du droit communautaire auxquelles il n'est pas permis de déroger par accord, et telles que mises en œuvre par l'État membre du for.»

Il suffit donc que la situation comporte un conflit de lois.

III- Le contrat ne doit pas relever d’une matière exclue par le règlement

La liste des matière exclues par le règlement figure à l’article 1.

« Il ne s'applique pas, notamment, aux matières fiscales, douanières et administratives.

2. Sont exclus du champ d'application du présent règlement:

a) l'état et la capacité juridique des personnes physiques, sous réserve de l'article 13;

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b) les obligations découlant des relations de famille ou des relations réputées avoir, en vertu de la loi applicable, des effets comparables, y compris les obligations alimentaires; c) les obligations découlant des régimes matrimoniaux, des régimes patrimoniaux relatifs aux relations qui, selon la loi qui leur est applicable, ont des effets comparables au mariage et aux successions; d) les obligations nées des lettres de change, chèques, billets à ordre ainsi que d'autres instruments négociables, dans la mesure où les obligations nées de ces autres instruments négociables dérivent de leur caractère négociable; e) les conventions d'arbitrage et d'élection de for; f) les questions relevant du droit des sociétés, associations et personnes morales, telles que la constitution, par enregistrement ou autrement, la capacité juridique, le fonctionnement interne et la dissolution des sociétés, associations et personnes morales, ainsi que la responsabilité personnelle légale des associés et des agents pour les dettes de la société, association ou personne morale; g) la question de savoir si un représentant peut engager, envers les tiers, la personne pour le compte de laquelle il prétend agir ou si un organe d'une société, d'une association ou d'une personne morale peut engager, envers les tiers, cette société, association ou personne morale; h) la constitution des trusts et les relations qu'ils créent entre les constituants, les trustees et les bénéficiaires; i) les obligations découlant de tractations menées avant la conclusion d'un contrat; j) les contrats d'assurance découlant des activités menées par des organismes autres que les entreprises visées à l'article 2 de la directive 2002/83/CE du Parlement européen et du Conseil du 5 novembre 2002 concernant l'assurance directe sur la vie(1), ayant pour objet de verser des prestations à des personnes salariées ou à des personnes indépendantes faisant partie d'une entreprise ou d'un groupe d'entreprises, en cas de décès, en cas de vie, en cas de cessation ou de réduction d'activités, en cas de maladie professionnelle ou d'accident du travail.

3. Le présent règlement ne s'applique pas à la preuve et à la procédure, sans préjudice de l'article 18.»

Au sujet des contrats d’assurance, les contrats de réassurance relèvent des règles générales du règlement Rome I.Concernant les contrats d’assurance, on a des règles distinctes du règlement. Le principe est que les contrats d’assurance figurent dans le champs d’application de Rome I. Sont cependant exclus certains contrats d’assurance.

IV- Les rapports entre le règlement Rome I et d’autres sources de règles de conflit de lois

A- Le rapport entre Rome I et le droit national français

Comme il s’agit d’un droit issu de l’UE, s’impose le principe de primauté du droit de l’UE.il en résulte qu’il est maintenant impossible pour un Etat soumis à Rome I d’adopter une règle de conflit de lois nationale pour une catégorie particulière de contrat tombant dans le domaine d’application du règlement.

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B- Le rapport entre Rome I et les autres conventions internationales

1- Les rapports entre ce règlement et la Convention de Rome

L’article 24 du règlement dispose qu’entre les Etats membres, le règlement remplace la Convention de Rome ( sauf pour le Danemark).Il en résulte que toute référence faite à la Convention de Rome s’entend comme référence au règlement.

2- Les rapports entre Rome 1 et les conventions internationales impliquant des Etats tiers

La solution est posée à l’article 25§1 du règlement:

« Le présent règlement n'affecte pas l'application des conventions internationales auxquelles un ou plusieurs États membres sont parties lors de l'adoption du présent règlement et qui règlent les conflits de lois en matière d'obligations contractuelles.»

En effet, le droit de l’UE n’entend pas conduire les Etats membres à ne pas respecter leurs engagements internationaux.Donc les Etats membres continuent à être soumis aux conventions qu’ils ont soumis avec des Etats tiers.ceci est très importante car il existe d’autres sources internationales concernant le conflit de lois.Deux autres convention sont appliquées régulièrement:

• La Convention de La Haye du 15 juin 1955 sur la loi applicable aux ventes à caractère international d’objets mobiliers corporels.

• La Convention de La Haye du 14 mars 1978 sur la loi applicable aux contrat d’intermédiaires et à la représentation.

Imaginons qu’un contrat soit conclu entre une société X siégeant en Allemagne et une société Y siégeant en France. La société X achète une grue pour un chantier de construction en Allemagne. La société Y livre cette grue avec un certain de retard. de fait, la société X va agir en dommages et intérêts contre la société Y.Ici on appliquera la Convention de La Haye de 1955 car il s’agit de la vente d’un bien d’un mobilier corporel.Dans la plupart des contrats de vente, c’est la Convention de La Haye de 1955 qui s’applique et non Rome I.

S’agissant à présent d’un contrat entre un agent commercial et son co-contractant. Ici Rome I ne s’appliquera pas mais la Convention de La Haye de 1978.

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3- Les rapports entre Rome I et les conventions internationales conclues exclusivement entre les Etats membres

Ici la solution est différente et posée par l’article 25§2:

« Toutefois, le présent règlement prévaut entre les États membres sur les conventions conclues exclusivement entre deux ou plusieurs d'entre eux dans la mesure où elles concernent des matières réglées par le présent règlement.»

Section 2: La détermination de la loi applicable

Paragraphe 1: Le principe de l’autonomie de la volonté

Ce principe figure au sein de l’article 3 du règlement.Cet article s’intitule « la liberté de choix» et l’alinéa 1 précise que le contrat est régit par la loi choisie par les parties.Il en découle que Rome I, tout comme précédemment la Convention de Rome, prévoit la possibilité pour les parties de choisir la loi applicable au contrat.C’est ce qu’on appelle l’exercice de l’autonomie de la volonté des parties.

I- L’expression du choix de la loi applicable

Ce choix résulte le plus souvent de ce qu’on appelle une clause d’electio juris.A défaut de choix exprès, le juge doit éventuellement prendre en considération un choix résultant de façon certaines des autres dispositions du contrat ou des circonstances de la cause.

A- La clause d’electio juris

En présence d’une telle clause, le juge doit s’en tenir au choix exprimé par les parties.Ces clauses sont importantes en pratique car elles sont le meilleur moyen d’assurer la prévisibilité du droit applicable.

B- La possibilité d’un choix tacite mais certain

L’article 3§1 dispose que le choix peut également résulter de façon certaine des dispositions du contrat ou des circonstances de la cause.

On rencontre fréquemment dans les contrats des clauses qui vont révéler i directement la volonté des parties de se soumettre à une loi donnée. Ici on est donc dans le cas de figure où l’on est pas en présence d’une clause d’electio juris.Ainsi on peut avoir le recours à un contrat type qui est en usage dans un pays déterminé.

Exemple: en droit maritime, les parties peuvent décider de se référer à un contrat type en vigueur dans le droit anglais. Donc là on en déduira que les parties ont voulu soumettre le contrat au droit anglais.

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Un autre élément individuel qui permettre de déduire de manière indirecte le choix des parties est la présence d’une clause attributive de juridictions. Cette clause pourra être prise en compte, mais cette fois comme indice de la volonté des parties. En effet, le considérant 12 de Rome 1 permet de prendre en considération pour déterminer si le choix de la loi applicable a été clairement énoncé, une clause attributive de juridictions.

En second lieu le règlement envisage l’éventualité d’un choix résultant de façon certaines des circonstances de la cause, c’est à dire les circonstances de l’espèce.Cette expression a suscité certaines interrogations car elle a introduit une certaines souplesse qui pourrait laisser entendre que la recherche d’une volonté simplement implicite des parties est suffisante.Cette hypothèse concerne notamment celle de contrats constituant l’accessoire d’autres contrats principaux qui sont eux expressément soumis à une loi déterminée.

Est ce qu’il résulte du choix de la loi applicable au contrat principal le choix de la loi applicable à un contrat accessoire?

Pour répondre à cette question, il faut se référer à la logique de l’article 3§1 de Rome 1. Rome 1 met en place un système dualiste ce qui signifie qu’à défaut de choix exprès ou à tout le moins tacite, la loi applicable est déterminée par référence à des critères objectifs posés à l’article 4 du règlement.Il en résulte que la volonté présumée ou hypothétique des parties est écartée.Cependant, certains auteurs défendent la solution consistant à déduire du choix de la loi applicable au contrat principal la loi compétente pour régir un contrat lié au contrat principal. Ainsi, une caution consentie par un particulier sera régie par la loi du contrat dont elle est l’accessoire.Cependant, ici, plusieurs hypothèses sont à distinguer:

• Il n’y a pas de difficulté particulière si la clause de choix insérée dans le contrat principal prévoit expressément son application au contrat accessoire et que les parties contractantes sont identiques dans les deux contrats. Dans ce cas là, l’accord des parties concernant l’extension de la clause de la loi applicable est certain ici.

• Si le contrat principal est muet quant à la loi applicable concernant le contrat accessoire, il faut alors déterminer la portée du choix de la loi applicable au contrat principal. Il appartiendra alors au juge en considération des différents éléments d’espèce d’apprécier si un choix certain de la loi applicable au contrat accessoire peut être mis en évidence.

Exemple: un facteur pouvant être pris en considération est le fait que les parties au contrat accessoire sont identiques qu’au contrat principal. En revanche, si les parties sont différentes, l’effet relatif des contrats va s’opposer à cette extension car on considéra qu’il n’y a pas de choix certain quant à la loi applicable au contrat accessoire.

Dès lors que le choix est exercé, la volonté des parties est dotée d’une grande liberté concernant la portée du choix de la loi applicable.

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II- La porté de ce choix

Des solutions libérales ont été retenues par la Convention de Rome puis par Rome 1.

A- Les solutions libérales

Il résulte de l’article 3 du règlement la possibilité de désignation d’un droit qui n’a pas de liens avec le contrat.Les parties peuvent valablement choisir la loi d’un pays pour laquelle il n’existe aucun lien avec le contrat.

Les raisons pour justifier ce choix ne manquent pas: ainsi les parties peuvent choisir une loi neutre. C’est pour cette raison que la loi suisse est la première loi choisie en matière de commerce internationale. Les parties peuvent également choisi une loi qui leur parait la plus appropriée au contrat. Elles peuvent également choisir une loi qui valide leur contrat.Cette liberté a été discutée en doctrine car certains ont pu y voir un risque de fraude.

Une autre solution libérale consacrée par Rome 1 est la faculté de dépeçage de la loi applicable au contrat.En effet, Rome I autorise la technique dite du dépeçage de la loi applicable.Cela signifie que les parties peuvent choisir de soumettre certaines stipulations contractuelles à une loi et les autres à une autre loi.C’est l’article 3§1 qui le prévoit: « Par ce choix, les parties peuvent désigner la loi applicable à la totalité ou à une partie seulement de leur contrat.»

Existe t-il des limites au dépeçage de la loi applicable?

Il existe des limites mais qui ne sont pas posées par le règlement.Une des limites figure dans le rapport suite à l’adoption de la Convention de Rome. Il est précisé qu’une cohérence doit être respectée. Le dépeçage ne doit pas mener à des contradiction.

Une dernière solution libérale est le changement dans le temps de la loi applicable.C’est l’article 3§2 du règlement qui prévoit cette possibilité:

« Les parties peuvent convenir, à tout moment, de faire régir le contrat par une loi autre que celle qui le régissait auparavant soit en vertu d'un choix antérieur selon le présent article, soit en vertu d'autres dispositions du présent règlement. Toute modification quant à la détermination de la loi applicable, intervenue postérieurement à la conclusion du contrat, n'affecte pas la validité formelle du contrat au sens de l'article 11 et ne porte pas atteinte aux droits des tiers.»

B- Les limites à l’autonomie de la volonté posées à l’article 3

Rome 1 octroie une grande liberté aux parties.Cependant cette liberté n’est pas absolue. En effet, le choix par les parties de la loi applicable est une choix qui reste encadré puisque selon l’article 3, le contrat est régit par la loi choisie par les parties.

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Comment se traduisent ces limites?

Elles vont se traduire tout d’abord par l’objet du choix. Ensuite, elles vont se traduire par le respect de dispositions impératives lorsque le contrat est interne ou intra-européen.

1- Les limites tenant à l’objet du choix

Avant que Rome 1 ne soit adopté, a été adopté une proposition de règlement.Dans cette proposition on avait la disposition suivante: « les parties peuvent également choisir comme loi applicable des principes et règles de droit matériel des contrats reconnus au niveau international ou communautaire».Donc il résultait de cette disposition que la proposition de règlement autorisait les parties à choisir un droit matériel d’origine non étatique ( comme le principe UNIDROIT). Cependant la proposition précisait que le choix de la lex mercatoria n’était pas possible parce qu’elle était considérée comme étant trop imprécise.Cependant, cette proposition n’a pas été retenue. En effet, il est apparu que cette proposition de choisir un droit non étatique soulevait divers problèmes:

• On pouvait se demander selon quel critère seraient déterminées les règles non étatiques suffisamment reconnues par la communauté internationale pour être valablement désignées par les parties.

• Un autre problème se posait concernant la confrontation entre ces règles non étatiques désignées par les parties et les dispositions impératives de la loi objectivement applicable. Quelles dispositions allait-on faire primer?

Finalement ces problèmes soulevés font que cette proposition n’a pas été retenue par Rome I.

!!! Les principes énoncés ici sont relatifs aux juridictions étatiques. rien n’interdit à un arbitre de faire usage de la lex mercatoria par exemple!!!!

Si les parties choisissent des règles non étatiques pour leur contrat, cela ne signifie pas pour autant que ce choix sera invalidé au regard des dispositions du règlement.En effet, deux considérants sont important dans Rome I:

• Le considérant 13: « Le présent règlement n'interdit pas aux parties d'intégrer par référence dans leur contrat un droit non étatique ou une convention internationale.» Si les parties font référence aux principes UNIDROIT, ces principes auront la valeur d’une simple stipulation contractuelle. Cela signifie que concrètement le contrat sera régit par la loi objectivement applicable ( déterminée grâce à l’article 4 du règlement) mais éventuellement, le juge pourra être amené à se référer à ces principes UNIDROIT dans la limite autorisée par la loi objectivement applicable.

• Le considérant 14: « Si la Communauté adopte dans un instrument juridique spécifique des règles matérielles de droit des contrats, y compris des conditions générales et clauses types, cet instrument peut prévoir que les parties peuvent choisir d'appliquer ces règles.» A l’heure actuelle on a tout un processus qui vise à

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harmoniser au sein de l’UE une partie du droit des contrats. Ce processus ne porte que sur le droit de la vente. Donc ici ce considérant 14 fait référence à ce processus d’harmonisation qui est en cours.

2- Les limites tenant au respect des règles impératives

L’article 3§3 de Rome I considère qu’un conflit de lois peut se produire même lorsque tous les éléments de la situation sont localisés au moment de ce choix dans un seul pays. Cela signifie que le choix par les parties peut provoquer a postériori un conflit de loi.Mais ici une limite est posée par le même article: les dispositions impératives internes doivent obligatoirement s’appliquer. Concrètement, les parties, par le choix d’une loi étrangère ne peuvent pas contrevenir aux dispositions impératives internes.

« le choix des parties ne porte pas atteinte à l'application des dispositions auxquelles la loi de cet autre pays ne permet pas de déroger par accord.»

dans le cadre de cet article, il s’agit de dispositions impératives internes. En ce qui concerne l’ordre juridique interne il s’agit de l’ordre public interne. Donc cet article ne fait pas référence aux dispositions internationalement impérative ou encore appelées lois de police.

De même, dans le cadre d’un contrat intra-UE, selon l’article 3§4 du règlement, le choix par les parties d’une autre loi applicable que celle d’un Etat membre ne porte pas atteinte à l’application des dispositions du droit communautaire auxquelles il n’est pas permis de déroger par accord.Il s’agit d’une nouvelle limite qui préviendrait la fraude aux dispositions communautaires.Plusieurs défauts ont été relevés par la doctrine concernant cet article, notamment du fait de son imprécision: que sont les dispositions communautaires? Il y a également une mise à l’écart de l’autonomie de la volonté à chaque fois que l’on est dans un cadre intra-UE et que la loi d’un Etat tiers est choisie. Cette hypothèse se rencontre assez fréquemment, notamment concernant le choix du droit Suisse.

Paragraphe 2: La loi applicable dans le silence des parties

Dans ce cas, le règlement est beaucoup plus directif.Il y a une grande différence entre la Convention de Rome et les solutions données par Rome 1.La Convention de Rome, dans son article 4, avait opté pour un système d’une grande souplesse qui était dominé pat la notion des liens les plus étroits.Cette souplesse était atténuée par quelques présomptions qui étaient elles mêmes écartées par le jeu de la clause d’exception.Rome I a modifié profondément l’article 4 et le nouveau texte énumère désormais une série de contrats et, pour chaque catégorie, décide de la loi applicable.Donc ici le règlement privilégie la prévisibilité et la sécurité juridique en édictant à l’article 4-1 des règles précises pour toute une série de contrats.

Concernant la vente de biens, la règle est précisée à l’article 4-1a) qui contient la règle générale selon laquelle la vente de biens est régie par la loi du pays de résidence habituelle du vendeur.Il faut également prendre en compte deux autres ventes particulières:

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• la vente aux enchères à l’article 4-1g)• La vente de certains instruments financiers à l’article 4-1h)

Il faut souligner ici que les articles 4-1a) et 4-1g) ne s’appliqueront pas en France chaque fois que sera appliquée la Convention de La Haye du 15 juin 1955.

Concernant le contrat de prestation de service, la règle générale figure à l’article 4-1b) qui dispose que le contrat est régi par la loi du pays dans lequel le prestataire a sa résidence habituelle.Il y a là encore référence à la résidence habituelle du débiteur de l’obligation caractéristique.Des difficultés peuvent surgir concernant la définition du contrat de prestation de service. Le contrat d’entreprise est un contrat de prestation de service, tout comme le contrat d’intermédiaire mais pour ce contrat d’intermédiaire en France c’est la Convention de La Haye de 1978 qui s’appliquera. Mais dans d’autres hypothèses, il sera plus difficile de savoir si l’on est en présence ou non d’un contrat de prestation de service.Il faut ici se reporter au considérant 17 du règlement qui énonce qu’il faut retenir une application identique à celle retenue pour l’application de Bruxelles 1. Ce considérant précise également que les contrats de franchise et de distribution sont des contrats de service même s’ils relèvent de règles particulières.En effet, selon l’article 4-1e) de Rome 1, le contrat de franchise est régi par la loi du pays où le franchisé a sa résidence habituelle. Concernant le contrat de distribution, l’article 4-1f) soumet de tels contrats à la loi du pays dans lequel le distributeur a sa résidence habituelle.Il s’agit de solutions qui vont modifier la jurisprudence de la Cour de cassation qui retenait des solutions différentes: Arrêt Optelec du 15 mai 2001.Une précision à apporter puisque à la fois l’article 4-1e) et 4-1f) ne concernent que le contrat cadre et donc ne concerne pas les contrats d’exécution.

L’article 4-2 du règlement formule une règle de conflit générale.

«Lorsque le contrat n'est pas couvert par le paragraphe 1 ou que les éléments du contrat sont couverts par plusieurs des points a) à h) du paragraphe 1, le contrat est régi par la loi du pays dans lequel la partie qui doit fournir la prestation caractéristique a sa résidence habituelle.»

Il va s’appliquer pour les contrats qui n’appartiennent pas à une catégorie prévue au paragraphe 1.La règle formulée dans le paragraphe 2 donne compétence à la loi du pays dans lequel le débiteur de la prestation caractéristique a sa résidence habituelle.

Exemples: le contrat de transfert de propriété intellectuelle. Pour calculer le droit applicable à ce contrat à défaut de choix des parties, il faut dans un premier temps déterminer la prestation caractéristique de ce contrat. Plus précisément s’il s’agit d’un contrat de cession de droits d’auteur, ici la prestation caractéristique va être la cession du droit d’auteur. Donc le débiteur de la prestation caractéristique est le cédant.

Pour les contrats qui relèveraient de plusieurs catégories, dans ce cas là également on va appliquer l’article 4-2.

Exemple: un contrat concernant la conception, la fabrication, la vente et l’expédition de documents publicitaires. Ce contrat contient plusieurs prestation: vente, services. Donc ici on applique l’article 4-2 et non les deux catégories relatives à la vente et la prestation de service de l’article 4-1.

Ces articles 4-1 et 4-2 énoncent des rattachements rigides et ils visent souvent le rattachement de la résidence habituelle.

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La notion de résidence habituelle est ici définie dans le règlement Rome 1 ce qui n’est pas le cas dans Bruxelles 2bis.

Article 19 Rome 1

«1. Aux fins du présent règlement, la résidence habituelle d'une société, association ou personne morale est le lieu où elle a établi son administration centrale.La résidence habituelle d'une personne physique agissant dans l'exercice de son activité professionnelle est le lieu où cette personne a son établissement principal.2. Lorsque le contrat est conclu dans le cadre de l'exploitation d'une succursale, d'une agence ou de tout autre établissement, ou si, selon le contrat, la prestation doit être fournie par lesdits succursale, agence ou autre établissement, le lieu où est situé cette succursale, cette agence ou tout autre établissement est traité comme résidence habituelle.3. La résidence habituelle est déterminée au moment de la conclusion du contrat.»

Donc pour une personne physique il s’agit du lieu de son établissement principal tandis que pour une personne morale il s’agit du lieu de son administration centrale. de même la notion de résidence habituelle est apprécie au jour de la conclusion du contrat.

De plus l’article 4-3 du règlement admet le jeu d’une clause d’exception.

«Lorsqu'il résulte de l'ensemble des circonstances de la cause que le contrat présente des liens manifestement plus étroits avec un pays autre que celui visé au paragraphe 1 ou 2, la loi de cet autre pays s'applique.»

Cette clause d’exception est entendue de façon restrictive puisqu’il y a l’adverbe « manifestement» qui apparait dans l’article. Dans la convention de Rome on ne retrouve pas cet adverbe.Le considérant 20 du règlement donne un exemple de circonstances qui pourront être reconnues pour l’application de cette clause d’exception: «il convient de prendre en compte, notamment, l'existence de liens étroits du contrat avec un ou plusieurs autres contrats.»On peut en déduire qu’en présence d’un groupe de contrat ou chaines de contrat ou éventuellement de contrats cadre ou contrats d’application, d’un contrat principal et d’un contrat accessoire, la clause d’exception sera éventuellement utilisée pour parvenir à l’application d’une loi unique.En application de cette clause d’exception, on en déduit la loi applicable au contrat accessoire.

!!!Attention ici: c’est en circonstance de l’espèce!!!

Enfin, on retrouve à titre de règle de conflit subsidiaire la compétence de la loi du pays avec lequel le contrat présente les liens les plus étroits pour le cas où la loi ne peut pas être déterminée en application des paragraphe 1 et 2 de l’article 4. cette règle de conflit subsidiaire est énoncée à l’article 4-4 du règlement.

«Lorsque la loi applicable ne peut être déterminée sur la base du paragraphe 1 ou 2, le contrat est régi par la loi du pays avec lequel il présente les liens les plus étroits.»

Il s’agit ici d’une sorte de disposition balai c’est à dire qu’elle ne va s’appliquer que lorsque le contrat soit n’appartient pas à aucune des catégories prévues au paragraphe 1, soit lorsque ce contrat ne relève pas non plus de plusieurs des catégories énoncées dans le paragraphe 2 et également, dans le cadre d’un contrat pour lequel une prestation caractéristique ne peut être déterminée.

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Exemple: il peut s’agir du contrat d’échange. En effet ce contrat ne relève d’aucune des catégories qui figurent à l’article 4-1 de même on ne peut déterminer une prestation caractéristique dans ce contrat donc finalement il ne nous reste plus que l’article 4-4. Dans ce cas le juge devra prendre en compte les circonstances pour déterminer la loi du pays avec lequel le contrat a les liens les plus étroits.

Conclusion sur l’article 4:

On observe de façon générale que la recherche de proximité guide les solutions adoptées par cet article. Cependant la prévisibilité et la sécurité juridique ne sont pas oubliés. puisque la clause d’exception n’est introduite que de façon limitée et l’article 4-4 ne s’applique que de façon subsidiaire.

Lorsqu’on est passé de la Convention de Rome au règlement Rome 1 il y a eu une proposition qui prévoyait de supprimer cette clause d’exception. Finalement Rome 1 l’a reprise mais a essayé de l’encadrer plus fortement que la Convention Rome.Toutefois, si on prend cet article 4, il va certainement soulever quelques difficultés et notamment une principale. Ainsi à l’article 4-1, une difficulté va être soulevée à savoir celle de qualification. En effet, on est dans un contexte international or les différents droits ne qualifient pas de la même manière les différents contrats et, de plus, dans certains droits comme en droit français, il peut paraitre difficile de distinguer le contrat de vente et le contrat de prestation de service. Pour ce dernier cas, on pourrait utiliser la jurisprudence rendue dans le cadre de l’article 5-1 du règlement Bruxelles 1.

Paragraphe 3: les rattachement spéciaux

Pour certaines catégories de contrat, la Convention de Rome puis le règlement Rome 1 ont prévu des rattachement spéciaux. dans la Convention de Rome il ne s’agissait que des contrats conclus par les consommateurs et les contrats de travail.Ces deux cas ont été repris par le règlement Rome 1 avec quelques modifications. Il s’agit bien sûr de protéger la partie faible.

Le règlement Rome 1 a rajouté une autre catégorie de contrat pour lequel il a posé des règles de conflit particulières: il s’agit du contrat de transport.La Convention de Rome traitait déjà du contrat de transport de marchandise mais elle se contentait de poser une présomption à l’article 4-4 tandis que le règlement Rome 1 lui, consacre un article 5 au sujet du transport de marchandises et du transport de passagers.

Le règlement innove également en consacrant un article 7 relatif à la détermination de la loi applicable au contrat d’assurance alors que la Convention de Rome se contentait d’exclure les contrats d’assurance couvrant des risques situés sur le territoire des Etats membres.

Dans ce cours nous ne traiterons pas du contrat de transport ni du contrat d’assurance.

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I- Le contrat de consommation

Il convient de procéder ici par étapes.Tout d’abord, il faut vérifier que l’on se trouve bien dans le domaine d’application de l’article 6 du règlement Rome 1.Puis, seulement lorsque cette question est traitée, on peut ensuite dans un second temps s’intéresser à la loi applicable à ce contrat.

A- Le domaine d’application de l’article 6

Cet article 6 ne va s’appliquer que si le contrat a été conclu entre un consommateur et un professionnel.La notion de consommateur est définie à l’article 6-1:

«Sans préjudice des articles 5 et 7, un contrat conclu par une personne physique (ci-après «le consommateur»), pour un usage pouvant être considéré comme étranger à son activité professionnelle, avec une autre personne (ci-après «le professionnel»), agissant dans l'exercice de son activité professionnelle, est régi par la loi du pays où le consommateur a sa résidence habituelle, à condition que le professionnel»

Donc le consommateur est celui qui agit pour un usage pouvant être considéré comme étranger à son activité professionnelle. de même il doit s’agir d’une personne physique.

Peu importe le lieu de résidence du consommateur puisque les règles posées par le règlement s’appliquent à ce consommateur que celui-ci ait sa résidence habituelle sur le territoire d’un Etat membre ou non.

Concernant les circonstances dans lesquelles les contrats doivent être passés, le champs d’application du règlement Rome 1 est plus large que celui de la Convention. A priori, tous les contrat de consommation bénéficient de l’article 6 du règlement. Ainsi, les restrictions qui figuraient dans l’article 5 de la Convention de Rome ont été abandonnées. Effectivement à cet article 5 figuraient une restriction au contrat de fourniture d'objets mobiliers corporels et également une restriction au contrat de service au consommateur.L’article 6 du règlement Rome 1 ne reprend pas ces deux restrictions.Simplement, il résulte de l’article 6-1 du règlement que le professionnel soit exerce sont activité professionnelle dans le pays de la résidence habituelle du consommateur ( article 6-1a ) soit par tout moyen dirige cette activité vers ce pays ou vers plusieurs pays dont celui-ci ( article 6-1b ).Donc il faut que le consommateur soit passif, c’est le professionnel qui vient vers lui.Ici cette disposition nous fait penser à l’article 15 paragraphe 1 du règlement Bruxelles 1 et cette disposition a été posée pour viser notamment les contrats électroniques. En effet l’une des difficultés du contrat électronique est de déterminer à partir de quel seuil un professionnel qui propose des produits sur internet peut être considéré comme dirigeant ses activités vers le pays du consommateur.

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Est-ce que l'accessibilité du site internet est suffisante pour déterminer que le professionnel dirige son activité vers le pays du consommateur?

Pour répondre à cette question, le considérant 24 du règlement Rome 1 établit un parallèle avec le règlement Bruxelles 1.Ce qui signifie que l’on peut utiliser la jurisprudence qui a été rendue pour interpréter l’article 15 de Bruxelles 1.Donc a priori, d’après cette jurisprudence, le critère de l’accessibilité n’est pas suffisante et l’on utilise le critère de la focalisation ( Arrêt Pammer et Hôtels Alpenhof et également l’arrêt du 6 septembre 2012 Muhlleitner)Ce qui importe dans l’application de cet article 6 est que l’activité commerciale du professionnelle doit être dirigée vers l’Etats de la résidence habituelle du consommateur.Il s’agit bien sûr d’assurer ici la protection du consommateur tout en recherchant un certain équilibre puisque cette circonstances ( direction de l’activité vers l’Etat du consommateur) doit éviter de soumettre trop facilement un professionnel à la loi du pays de la résidence habituelle du consommateur lorsque l’activité de ce professionnel n’est pas dirigé vers cet Etat.

Par ailleurs, l’article 6 exclut un certain nombre de contrats. La liste figure à l’article 6-4, notamment:

• le contrat de fourniture de services lorsque ces services doivent être fournis au consommateur exclusivement dans un pays autre que celui de sa résidence habituelle.

• le contrat de transport• le contrat ayant pour objet un droit réel immobilier ou un droit d’utilisation à temps

partiel d’un immeuble.• les contrats concernant les instruments financiers• les contrats qui sont conclus dans un type de système relevant de l’article 4-1h du

règlement.

Pour ces différents contrats exclus du champs d’application de l’article 6, on appliquera pour déterminer la loi applicable les articles 3 et 4 du règlement Rome 1.

Une fois que le champs d’application a été vérifié, on peut passer à la détermination de la loi applicable en vertu de l’article 6.

B- La détermination de la loi applicable en vertu de l’article 6

La règle de principe ici demeure que les parties peuvent choisir la loi applicable au contrat. Cependant, la portée du principe d’autonomie de la volonté est limité.En effet, si on prend l’article 6-2, le choix effectué par les parties ne peut avoir pour effet de priver le consommateur de la protection que lui assure les dispositions impératives de la loi du pays dans lequel il a sa résidence habituelle.

«Nonobstant les dispositions du paragraphe 1, les parties peuvent choisir la loi applicable à un contrat satisfaisant aux conditions du paragraphe 1, conformément à l'article 3. Ce choix ne peut cependant avoir pour résultat de priver le consommateur de la protection que lui assurent les dispositions auxquelles il ne peut être dérogé par accord en vertu de la loi qui aurait été applicable, en l'absence de choix, sur la base du paragraphe 1.»

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La protection assurée par la loi de sa résidence habituelle est ici garantie au consommateurMais on peut s’interroger sur la manière dont on peut interpréter cette disposition.On peut l’interpréter de deux façons distinctes:

• Ou bien on peut voir dans cette disposition une compétence obligatoire des dispositions impératives protectrices de la loi de la résidence habituelle du consommateur. Si on retient cette interprétation, cela irait jusqu’à exclure éventuellement des dispositions plus protectrices de la loi choisie par les parties.

• Le règlement ne verrait dans les règles du pays de la résidence habituelle qu’une protection minimum pour le consommateur. Cela ne s’opposerait pas au jeu éventuel de dispositions plus protectrices. Il semblerait que cette seconde interprétation soit plus conforme à l’esprit du texte puisqu’il s’agit de protéger les parties faibles même si elle peut conduire à certaines difficultés car il va falloir apprécier la loi la plus favorable pour le consommateur.

Dans le silence des parties ( les parties n’ont pas choisi la loi applicable), pour le contrat de consommation, alors le contrat est soumis à la loi du lieu de la résidence habituelle du consommateur. Cette loi n’est pas forcément la plus favorable mais elle présente l’avantage d’être celle que le consommateur est susceptible de connaitre le mieux et le plus facilement.

II- Le contrat de travail

Article 8 Rome 1 et sous la Convention de Rome article 6Ces articles sont gouvernés par un soucis de protection du travailleur. Ils traduisent également le principe de proximité en déterminant la loi applicable à défaut de choix sur la base de critères désignant la loi qui présente les liens les plus étroits avec le contrat.

A- Domaine d’application de l’article 8

L’article s’applique au contrat individuel du travail ce qui signifie que les conventions collectives restent hors de son champs d’application.La notion de contrat de travail n’est pas défini par le règlement ou la Convention mais la doctrine considère que deux types de contrat de travail international doivent être pris en considération:

• le contrat de travail du travailleur émigré dans l’UE• le contrat du cadre détaché à l’étranger

Le texte de l’article 8 tente de concilier au mieux les divers intérêts.

B- Détermination de la loi applicable

1- Le principe de l’autonomie de la volonté des parties

La règle de principe est là encore le choix de la loi applicable.En effet, en vertu de l’article 8-1, le principe demeure que les parties peuvent choisir la loi applicable à leur contrat.Cela signifie que ce choix obéit aux règles fixées à l’article 3 du règlement Rome 1.

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Ici, tout comme pour le contrat de consommation, le choix est encadré.Quelle que soit la loi choisie, ce choix ne peut avoir pour effet de priver le travailleur de la protection que lui assure les dispositions impératives de la loi qui serait applicable à défaut de choix.Là aussi une hésitation s’est posée: comment interpréter cette formule?On considère que cette disposition devrait être interprétée de la façon suivante: la loi qui serait applicable à défaut de choix laisse place à des dispositions éventuellement plus favorable de la loi choisie.Donc ici, cela signifie qu’il va falloir appliquer les dispositions de la loi applicable à défaut de choix et de la loi choisie par la loi.

Doit-on procéder à une comparaison globale des deux lois ou faut-il se contenter de comparer la disposition précise en cause de la loi choisie avec la disposition qui lui

correspondrait dans la loi applicable à défaut de choix?

La Cour de cassation s’est prononcée pour une comparaison ciblée sur la disposition en cause dans le litige: Arrêt chambre sociale 20 octobre 2004

S’agissant toujours de la comparaison entre les lois, un arrêt de la chambre sociale du 14 mars 2007 a fait peser sur le salarié la charge de prouver que la loi qui aurait été applicable à défaut de choix lui est plus favorable.C’est une solution tout de même sévère vis à vis du salarié car on devrait retenir qu’il appartient au juge de procéder à cette comparaison.

2- Loi applicable à défaut de choix

La loi applicable est en principe à défaut de choix, la loi du pays où le travailleur exécute habituellement son travail. L’article 8-2 ajoute qu’à défaut d’accomplissement du travail dans un pays est applicable la loi du pays à partir duquel le travailleur accompli son travail.Cette disposition permettra par exemple de régler la question de la loi applicable aux personnels naviguant ou encore les contrats de travail concernant les salariés travaillant dans un lieu qui ne relève d’aucun Etat ( ceux qui travaillent sur les plateformes pétrolières en haute-mère).

Il est également précisé que le pays dans lequel le travail est habituellement accompli n’est pas réputé changé lorsque le travailleur accompli son travail de façon temporaire dans un autre pays.

Arrêt CJUE 15 mars 201, Koelzsch

Faits:

La Cour de justice s’est prononcée sur la loi applicable au contrat de travail d’un chauffeur routier domicilié en Allemagne, employé par une filiale luxembourgeoise d’une société danoise.

Pour déterminer le sens de l’expression « lieu d’exécution habituelle du travail», la Cour a utilisé la jurisprudence existante pour la Convention de Bruxelles de 1968 et celle pour interpréter le

règlement Bruxelles 1.

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Solution:

La Cour a décidé que le lieux d’exécution du travail est le pays où compte tenu de l’ensemble des éléments qui caractérisent l’activité, le travailleur s'acquitte de l’ensemble de ses obligations à

l’égard de son employeur.C’est la méthode du faisceau d’indice qu’on utilise ici.

Par ailleurs l’article 8-3 prévoit un rattachement subsidiaire:

«Si la loi applicable ne peut être déterminée sur la base du paragraphe 2, le contrat est régi par la loi du pays dans lequel est situé l'établissement qui a embauché le travailleur.»

La Cour de justice a interprété ce rattachement.

Arrêt CJUE 15 décembre 2011, Jan Voogsgerd

Il s’agissait de l’interprétation de l’article 6 de la Convention de Rome.

Faits:

Il s’agissait d’un contrat de travail concernant un chef mécanicien travaillant à bord d’un navire.

Solution:

La Cour indique ici que au cas où il est impossible de déterminer le lieu d’exécution habituel du travail alors la notion « d’établissement qui a embauché de le travailleur» recouvre exclusivement

l'établissement qui a procédé à l’embauche et non pas celui avec le travailleur est lié par son occupation effective. La Cour prend soin de rappeler que ce critère doit être utilisé si vraiment il est

impossible de déterminer le lieu d’exécution habituel du travail, ce dernier restant le critère prioritaire.

Enfin, l’article 8-4 formule une clause d’exception. Ainsi , en vertu de cette clause, les différentes éléments de rattachement énoncés précédemment pourront être écartés s’il résulte des circonstances que le contrat de travail présente des liens plus étroits avec un autre pays, auquel cas la loi de cet autre pays est applicable. Il s’agit ici d’une manifestation très nette du principe de proximité. D’ailleurs, cette clause d’exception n’utilise pas l’adverbe «manifestement» contrairement à l’article 4-3. Il s’agirait toutefois d’un simple oubli de la part des rédacteurs.

Arrêt Chambre sociale Cour de cassation, 28 mars 2012

Cet arrêt semble marquer une évolution dans la jurisprudence de la chambre sociale car habituellement, cette chambre interprète et applique l’article 8 du règlement ( article 6 de la

Convention) de la façon la plus favorable au travailleur. Les rattachement énoncés par l’article 8

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sont fréquemment interprétés de manière à parvenir à la loi la plus favorable au travailleur, ce qui revient à aboutir à la loi française.

Or dans cet arrêt la Cour désigne comme loi applicable au contrat la loi chinoise et pour cela elle applique l’article 6 de la Convention de Rome de façon rigoureuse.

Faits:

Il s’agissait d’un journaliste français employé par une société de droit français mais qui était implantée en Chine pour des reportages en Chine.

Le contrat de travail n’avait jamais été écrit. Suite à son licenciement, le journaliste avait saisi les CPH français et a invoqué la loi française pour son licenciement.

Cependant la CA a désigné comme loi applicable au contrat la loi chinoise et non la loi française.Le salarié s’est pourvu en cassation et il a soulevé l’existence d’un choix implicite en faveur du

droit français et, à défaut, il a sollicité la loi française sur le terrain de la clause d’exception.

Solution:

Pour la Cour de cassation, le chois de la loi française par les partis n’était pas caractérisé.De même ce choix ne résultait pas non plus des circonstances de la cause.

Quant à la clause d’exception, la Cour retient une approche très rigide de cette clause car elle ne l’applique pas.

Donc finalement, la loi chinoise était bien applicable au contra de travail et approuve la CA d’avoir considéré que le liue d’exécution habituel du travail était bien situé en Chine où l’employeur

disposait d’un établissement stable.

Paragraphe 4: Les perturbations éventuelles de la loi applicable

la Convention de Rome et le règlement Rome 1 mettent en place une technique traditionnelle en DIP puisqu’il s’agit de la règle de conflit bilatérale qui permet aussi bien de désigner la loi du for qu’une loi étrangère.Par conséquent, ces textes envisagent également des mécanismes classiques tels que le renvoi ou l’ordre public.

I- Le renvoi

La Convention de Rome et le règlement Rome 1 excluent le renvoi: article 15 Convention de Rome et article 20 du règlement Rome 1.En effet, le renvoi est écarté dès lors que la règle de conflit de lois repose sur l’autonomie de la volonté. On considère que dans ce cas là, les parties en choisissant une loi choisissent ici le droit interne du pays et non le droit interne + les règles internationales internes.Si on devait retenir le renvoi ici, on irait à l’encontre de la prévisibilité juridique.

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II- L’exception d’ordre public

L’article 16 de la Convention de Rome et l’article 21 du règlement Rome 1 prévoient l’intervention éventuelle de l’ordre public.En vertu de ces dispositions, une fois la loi étrangère désignée, son application peut être écartée si elle produit un résultat contraire aux conceptions fondamentales de l’ordre juridique qui est censé l’intégrer.La mise en oeuvre de cette exception d’ordre public est toutefois rare en matière contractuelle.Pour autant, cette exception est parfois mise en oeuvre pour justifier l’application de la loi française et écarter la loi étrangère dans le cadre d’un esclavage domestique:

Chambre sociale 10 mai 2006, époux Moukarin

Faits:

Il s’agissait d’une jeune algérienne dont la famille avait signé une convention par laquelle elle était placé au service d’un employeur britannique habituellement résidant au Nigéria. Le contrat

prévoyait que la famille ne pouvait mettre fin au contrat sans rembourser l’employeur des frais engagés par lui. Cette jeune femme était tenue de suivre son employeur à l’étranger sans pouvoir

revenir dans son pays natal sans l’autorisation de celui-ci. Son salaire était de 25 euros par mois qui d’ailleurs ne seront pas versé lors de ses séjours hors Nigéria.

Solution

La loi nigérienne a été écartée au profit de la loi française en application de l’ordre

III- La loi de police

Le règlement Rome 1 donne une définition des lois de police à l’article 9-1:

«Une loi de police est une disposition impérative dont le respect est jugé crucial par un pays pour la sauvegarde de ses intérêts publics, tels que son organisation politique, sociale ou économique, au point d'en exiger l'application à toute situation entrant dans son champ d'application, quelle que soit par ailleurs la loi applicable au contrat d'après le présent règlement.»

Cette définition reprend en grande partie celle qu’avait proposé Francescakis ou celle proposée par l’arrêt Arblade du 23 novembre 1999. Toutefois ici, le texte ajoute un élément qui est celui de la sauvegarde des intérêts publics.

Le domaine privilégié de la mise en oeuvre des lois de police est justement la matière contractuelle.En effet, la spécificité de la règle de conflit de principe qui est consacrée en la matière permet d’expliquer que les lois de police a pour domaine privilégié la matière contractuelle puisque les parties ont la possibilité de choisir la loi applicable.Cette grande liberté signifie aussi une grande facilité pour les parties de mettre à l’écart des dispositions impératives pourtant fondamentales pour un Etat.

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C’est pourquoi l’autonomie de la liberté est compensée par la présence de lois de police qui sont internationalement impératives.

Le règlement Rome 1 se réfère à deux types de lois de police:

• lois de police du for à l’article 9-2• lois de police étrangères à l’article 9-3

A- Lois de police du for

Il s’agissait de l’article 7-2 sous la Convention de Rome.Elle ne présente pas de difficulté particulière. Le juge est tenu de les appliquer quelle que soit la loi applicable au contrat.Donc la loi de police s’applique impérativement en dehors de toute intervention de la règle de conflit.Ainsi chaque juge devra demander à son propre système juridique si telle ou telle disposition est ou non une loi de police ce qui n’est pas forcément évident.

Pour que la loi du police du for s’applique il faut que la situation présente un lien de rattachement avec le pays du for. En ce sens, on peut se référer à la jurisprudence française.

Arrêt de la chambre commerciale du 27 avril 2011

La cour de cassation casse l’arrêt d’appel car elle lui reproche d’avoir appliqué l’article 13-1 de la loi du 31 décembre 1975 sur la sous traitance en tant que loi de police sans avoir caractérisé l’existence d’un lien de rattachement de l’opération avec la Franc au regard de l’objectif de

protection des sous traitants poursuivis par ce texte.

Une interrogation s’est posée concernant l’articulation des règles protectrices du consommateur avec les lois de police.L’article 6 du règlement Rome 1 réserve l’application des dispositions impératives de la loi du pays de la résidence habituelle du consommateur. Dès lors, on pourrait considérer que les lois de police de l’Etat de la résidence habituelle du consommateur ne peuvent intervenir que dans les cas prévus par les articles dédiés spécifiquement aux consommateurs.Et donc, ces lois de police de la résidence habituelle ne pourraient pas être invoquées au titre général de l’article 9.Cette opinion a été défendue par Paul Lagarde et également par la jurisprudence allemande puisque, en effet, pour la Haute juridiction allemande, l’article 5 de la Convention aujourd’hui l’article 6 de Rome 1 concerne une clause spéciale d’application des lois de police et les contrats de consommation qui ne tombent pas dans le champs d’application de l’article 5??? ne peuvent bénéficier de la clause générale des lois de police de l’article 7 de la Convention.

Selon une autre interprétation, on peut estimer que l’article 6 du règlement, article 5 de la Convention, donne une compétence direct aux dispositions impératives de la loi de la résidence habituelle du consommateur mais que cet article n’empêche pas l’article 9 du règlement de jouer son rôle général en dehors de ces cas.

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C’est dans ce dernier sens que s’est prononcée la jurisprudence française

Arrêt chambre civile 1 Cour de cassation , 23 mai 2006

Faits:

Il s’agissait d’époux français domiciliés à Sarreguemines et s’étaient rendus en Allemagne afin d’ouvrir un compte et d’y souscrite un prêt.

Par la suite, la banque allemande assigna ce couple devant le TGI de leur domicile en paiement du solde de leur compte et en remboursement du prêt.

Les défendeurs ont invoqué la compétence du tribunal d’instance sur le fondement de l’article L311-17 du code de la consommation.

Solution:

La Cour de cassation casse la CA qui avait estimé que l’article 7 de la Convention de Rome ne pouvait s’appliquer lorsqu’on était pas dans une hypothèse visée à l’article 5 de la Convention.

Pour la Cour de cassation cet article du code de la consommation était d’application impérative au sens de l’article 7-2 de la Convention de Rome.

Le régime de ces lois de police du for dépend de la compétence juridictionnelle.Or, en matière contractuelle, les parties peuvent choisir le tribunal compétent dans la plupart des hypothèses. D’où la nécessité de prévoir le recours aux lois de police étrangère pour essayer d’éviter ces détournements.

B- Les lois de police étrangère

Les dispositions de l’article 7-1 de la Convention de Rome et celle de l’article 9-3 de Rome 1 sont complètement différentes.La Convention de Rome à l’article 7-1 prévoyait la faculté pour le juge saisi de mettre en oeuvre les lois de police d’un pays avec lequel la situation présentait un lien étroit.L’article 9-3 est totalement différend puisqu’il dispose:

«Il pourra également être donné effet aux lois de police du pays dans lequel les obligations découlant du contrat doivent être ou ont été exécutées, dans la mesure où lesdites lois de police rendent l'exécution du contrat illégale. Pour décider si effet doit être donné à ces lois de police, il est tenu compte de leur nature et de leur objet, ainsi que des conséquences de leur application ou de leur non-application»

Cet article 9-3 pose plusieurs problèmes:

• ???• la restriction faite au lieu d’exécution. En effet, seules les lois de police du lieu

d’exécution des obligations sont envisagées.• l’exigence du caractère illégal. Qu’entend-on exactement ici?

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Donc à cet article on a une approche réductrice des lois de police étrangères. La prise en considération d’une loi de police étrangère peut être illustrée par la jurisprudence.

Arrêt chambre commerciale Cour de cassation, 16 mars 2010, Société Viol

La Cour rend un arrêt de cassation au visa de l’article 7-1 de la Convention de Rome.

Faits:

Il s’agissait d’un vendeur de viande français qui s’était adressé à un transporteur pour qu’il achemine plusieurs lots chez un acheteur domicilié au Ghana. Le transporteur a été exposé à des difficultés puisqu’il y avait un embargo local sur la viande française. La nullité du contrat pour

cause illicite était sollicitée.

Solution:

La Cour décide que la règlementation du Ghana doit être considérée comme une loi de police étrangère.

Paragraphe 5: La règlementation applicable à la forme des contrat

De façon traditionnelle la loi applicable à la forme est celle de la loi du lieu de la conclusion du contrat.Cette règle consiste toutefois en une règle d’application facultative pour les parties car le but est de favoriser la validité du contrat.

Rome 1 retient également cette approche car l’article 11-1 du règlement prévoit qu’un contrat conclu entre des personnes qui se trouvent dans le même pays au moment de sa conclusion est valable quant à la forme s’il satisfait aux conditions de la loi qui le régit au fond en vertu du présent règlement ou de la loi du pays dans lequel il a été conclu.

Lorsque le contrat est conclu entre absents ( lorsque les parties ne se trouvent pas dans le même pas au moment de la conclusion du contrat), dans ce cas le règlement formule la solution suivante: il suffit que la forme respecte soit la loi du contrat soit l’une des lois de chacun des Etats où se trouvent chacun des cocontractants lors de la conclusion du contrat soit encore la loi du pays dans lequel l’une ou l’autre des parties avait sa résidence habituelle à ce moment.

Le règlement énonce par ailleurs des règles particulières concernant la forme pour certains contrats. Ainsi, pour les contrats de consommation, al forme est soumis à la loi du pays de la résidence habituelle du consommateur.Concernant les contrats portant sur un immeuble, seront appliqués en principe les règles de forme impératives de la loi du pays où l’immeuble est situé.Selon cette loi, ces dispositions s’appliquent indépendamment du lieu de conclusion du contrat et de la loi le régissant au fond.

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Section 3: Le domaine de la loi applicable au contrat

Les règles de base figurent à l’article 12 du règlement.On se demande ici quelle question cette loi applicable au fond du contrat va pouvoir connaitre.

Paragraphe 1: les questions figurant dans le domaine du contrat

La loi applicable au contra régit notamment la formation du contrat.Ainsi, les principales questions concernant la validité au fond sont soumises à cette loi: le consentement, l’objet, la cause.Tous ces points sont donc soumis à la loi compétente pour régir le contrat.

Les pourparlers sont également soumis à la loi du contrat mais, ici, cette solution ne provient pas du règlement Rome 1 mais est posée par le règlement Rome 2.

La loi du contrat régit également le contenu de ce contrat à savoir les obligations qui existent entre les parties.

Paragraphe 2: Les questions partagées soumises soit à la loi du contrat soit à une autre loi

Les questions relatives à la forme peuvent être régit par la loi applicable au contrat mais également par la loi du lieu de conclusion du contrat.

En matière de preuve, la question est au carrefour de plusieurs catégories de rattachement puisqu’elle concerne tant la procédure que le fond du contrat, le lieu de conclusion du contrat.Le règlement retient que la loi du contrat est applicable à la détermination de la charge de la preuve et donc cette loi du contrat va donc également s’appliquer aux présomptions.En revanche, s’agissant des modes de preuve, le règlement énonce que sont admissibles tous les modes de preuve admis soit par la loi du for soit par la lex contractus ( loi applicable au contrat) soit enfin par la loi du lieu de conclusion du contrat.Il y a donc là un rattachement alternatif.

Concernant l’exécution du contrat, la loi applicable sera appliquée de façon principale. Toutefois, s’agissant des modalités d’exécution du contrat on s’intéressera également à la loi du pays où l’exécution a lieu.Il s’agira ici plus précisément de la prise en considération de la loi du lieu de l’exécution.

Concernant les mesures à prendre par les créanciers en cas de défaut d’exécution, il faudra prendre en considération la loi du pays du lieu d’exécution.

Exemple: Imaginons qu’un mode particulier d’exécution forcé soit prescrit par la loi du contrat. Ce mode d’exécution forcé ne pourra être utilisé que si la loi du lieu d’exécution ne s’y oppose pas. C’est ce qu’on appelle ici la prise en considération de la loi du lieu d’exécution.

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Paragraphe 3: Les questions exclues du domaine de la loi du contrat

Il s’agit ici notamment de la capacité à contracter.l’incapacité contractuelle du mineur est régie effectivement par sa loi personnelle et non par la loi applicable au contrat.L’inconvénient de cette solution est qu’elle peut être génératrice de surprise pour le co-contractant. Effectivement, lorsque l’on conclu un contrat, on ne se renseigne pas forcément sur la loi étrangère régissant la capacité de son co-contractant.C’est pourquoi on trouve à l’article 13 du règlement Rome 1 une exception qui s’appelle « l’exception d’ignorance excusable de la loi étrangère». Cette exception va pouvoir être opposée lorsque la personne en cause est incapable selon sa loi personnelle mais capable selon la loi locale.Cet article va permettre de protéger la partie qui a conclu un contrat avec un incapable lorsqu’elle était dans une ignorance légitime de cette incapacité.La formule utilisée par l’article 13 rappelle la solution de l’arrêt Lizardi.

Chapitre 2: La loi applicable aux faits juridiques

L’enjeu de la loi applicable à la responsabilité contractuelle est fondamentale parce que les règles de droit interne en matière délictuelle sont très peu harmonisées.Or, les différences entre les droits substantiels sont très importantes.En outre, l’importance des conflits de lois dans le domaine extra-contractuel s’est encore accru ces dernières années en raison de la multiplication des causes d’intervention du droit international privé.

Section 1: Les principes généraux relatifs à la loi applicable en matière délictuelle

Pendant longtemps, la question était assez aisée car il n’existait qu’une règle de conflit de lois concernant la matière délictuelle. Il s’agissait de la règle lex loci delicti ou encore la loi du lieu du délit.Puis des conventions internationales ont été adoptée dans des domaines particuliers: La Convention de La Haye du 2 octobre 1973 sur la loi applicable à la responsabilité du fait des produits. Il s’agit de l’hypothèse où un produit, un bien provoque un dommage.Il y a une autre Convention de La Haye du 4 mai 1971 sur la loi applicable en matière d’accidents de la circulation.Ces deux conventions ont été ratifiées par la France et elles y sont toujours applicables à l’heure actuelle.ces deux conventions retiennent des solutions particulières concernant la loi applicable à ces deux types de questions délictuelles.

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Paragraphe 1: Les solutions du droit commun français

La lex loci delicti est très ancienne et a une origine jurisprudentielle.Elle a été clairement énoncée, notamment par la jurisprudence.

Lautour du 25 mai 1948

Faits:

Il s’agissait d’un accident de camion français qui a eu lieu en Espagne à hauteur d’un passage à niveau.

La veuve de l’un des conducteurs agit contre l’autre conducteur afin d’obtenir réparation du préjudice.

Elle invoque l’application du droit français qui lui est beaucoup plus favorable.

Solution:

La Cour décide qu’en matière de responsabilité délictuelle est applicable la loi du lieu où le délit a été commis donc en l’espèce de la loi espagnole.

Cette règle de conflit peut cependant être parfois difficile à mettre en oeuvre notamment dans le cadre des délits complexes ( éclatement des éléments constitutifs du délit dans différents pays).Si le lieu du fait générateur est situé dans un pays mais que le dommage subi est lui subi dans un autre pays, la question se pose de savoir qu’elle loi est applicable.La solution a finalement été donnée par la Cour de cassation.

Arrêt chambre civile 1, Gordon du 14 janvier 1997

Faits:

Ici il n’y avait pas de délits complexes mais la Cour a donné des indications concernant la loi applicable aux délits complexes.

Il s’agissait ici d’une action en concurrence déloyale suite à la publication d’articles dans une revue scientifique.

Solution:

La Cour applique la loi du lieu où le délit a été commis en précisant que ce lieu s’entend aussi bien du lieu du fait générateur que du lieu où le dommage a été subi.

Suite à cet arrêt, la question s’est posée de savoir à qui revient le choix de la loi.Dans l’arrêt Gordon, les deux éléments constitutifs se trouvaient en France donc la Cour n’avait pas à répondre à cette question.La précision a été donnée dans deux arrêts rendus ultérieurement.

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Arrêt chambre civile 1 du 11 mai 1999, Mobil

Faits:

Il s’agissait de l’effondrement d’une plateforme pétrolière en mer du Nord.

Solution:

La Cour de cassation reprend les solutions de l’arrêt Lautour et de l’‘arrêt Gordon et précise qu’il appartient au juge de choisir entre les différentes lois désignées par l’arrêt Gordon selon le principe de proximité. En l’espèce, la Cour de cassation approuve la Cour d’appel d’avoir constaté que les

parties étaient pour la plupart des sociétés britanniques, les contrats signés s’étaient référés au droit britannique, l’auteur présumé du dommage était intervenu en tant qu'organisme de certification habilité par le gouvernement britannique. La Cour en déduit que la loi applicable était bien en

l’espèce la loi britannique qui correspondait ici à la loi du lieu du fait générateur.

On a pu en déduire que finalement le principe de proximité pouvait servir d’élément départiteur entre la loi du lieu du fait générateur et la loi du dommage.

Arrêt 27 mars 2007, Bureaux Veritas

Cet arrêt réaffirme expressément la solution rendue en 1997. Il énonce que la loi applicable à la responsabilité délictuelle est celle de l’Etat du lieu où le fait dommageable s’est produit, en cas de délit complexe ce lieu s’entend aussi bien du lieu du fait générateur du dommage que du lieu de

réalisation de ce dernier.En l’espèce la Cour tranche en faveur de l’application de la loi française en appliquant le principe

de proximité à nouveau.

Ce dernier arrêt reste hélas assez flou sur le point de savoir si la loi française correspondait à la loi du lieu du fait générateur ou à la loi du lieu du dommage. Mais ce qu’on peut en retirer est le principe qu’elle a énoncé.

ces solutions laissent tout de même une part de subjectivité assez importante.Aujourd'hui, le droit commun français ne s’applique que de façon résiduelle c’est à dire dès lorsque la question en cause n’est pas visée par le règlement Rome II ou d’une autre convention internationale.le droit commun français continue notamment à) être appliqué pour toutes les questions relatives aux atteintes au droit de la personnalité.

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Paragraphe 2: Les solutions consacrées par Rome II

Ce règlement Rome II a été adopté le 11 juillet 2007 et il a vocation à se substituer aux règles de conflit de droit commun dans son domaine d’application.

I- le champs d’application de Rome II

A- Champs d’application ratione temporis

Un doute est né ici du fait de la dissociation entre la date de l’entrée en vigueur du règlement et celle de son application.L’entrée en vigueur du règlement est intervenu 20 jours après sa publication au Journal Officiel.Cependant, l’article 32 du règlement intitulé « date d’application» prévoit que le règlement est applicable à partir du 11 janvier 2009.Ce qui a soumis le doute est l’article 31 intitulé « application dans le temps» qui précise que le règlement s’applique aux faits générateurs du dommage survenus après son entrée en vigueur.

Ainsi, imaginons un fait dommageable intervenu le 29 août 2007. Le règlement Rome II est-il applicable ou non?La réponse sera positive si on considère que l’article 31 vise l’entrée en vigueur intervenue en juillet 2007. En revanche la réponse sera négative si on retient cette fois la date de mise en application du règlement intervenue le 11 janvier 2009.La question a été posée à la CJUE.

Arrêt CJUE 17 novembre 2011, Homawoo

Faits:

Monsieur Homawoo réside en Angleterre et a subi un accident en France. Il saisit les juridictions anglaises en invoquant l’application de la loi anglaise car celle -ci est plus avantageuse pour lui que

la loi française en matière d’allocation de dommages et intérêts.Si le règlement n’est pas applicable à l’espèce, la loi anglaise ici sera bien compétente en vertu de la

règle de conflit de loi anglaise qui retient la lex fori. En revanche, si le règlement est applicable, dans ce cas là la loi française est compétente.

Solution:

La CJUE a finalement décidé que le règlement s’applique à tous les faits générateurs de dommages survenus à partir du 11 janvier 2009.

Par conséquent, le règlement ne s’appliquait pas en l’espèce et la loi anglaise était compétente.

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B- Champs d’application ratione loci

Tous les Etats membres sont liés par ce règlement sauf le Danemark.Ici, l’article 3 du règlement précise le caractère universel donc la loi désignée par le règlement peut être soit la loi d’un Etat membre soit la loi d’un Etat tiers.

C- Champs d’application ratione materiae

Il est précisé dans l’article 1 du règlement.Cet article dispose que le règlement s’applique à toutes les situations comportant un conflit de lois, aux obligations non contractuelles relevant de la matière civile et commerciale.cela suppose par conséquent que l’on ne soit pas en présence d’une personne publique agissant dans le cadre ses prérogatives de puissance publique.En revanche le règlement ne donne pas de définition de la notion d’obligation non contractuelle mais on considère que le règlement s’applique aux questions qui ne relèvent pas de RBI.Enfin, il faut que la situation comporte un conflit de lois.

!!!Attention!!! Les exceptions sont nombreuses. Une exclusion surprenante est celle des atteintes à la vie privée et au droit de la personnalité, y compris la diffamation.

Pourquoi cette exclusion?

Dans les discussions relatives à l’adoption de ce règlement, il y a avait une pression de la part du Royaume Uni qui menaçait de refuser d’être lié par ce règlement si ces questions devaient figurer dans le domaine d’application du règlement. En effet, la liberté de la presse est très importante au Royaume Uni et les lobbyistes anglais avaient peur que la liberté de la presse soit menacée par ce règlement.Toutefois, la situation est en train de changer car une réforme est en cours en Angleterre concernant le droit de la presse, réforme engagée à la suite du scandale des écoutes téléphoniques .La situation est également en train de changer du fait d’une résolution votée par le Parlement européen le 10 mai 2012 contenant des recommandations faites à la Commission sur des modification à Rome II. Ces recommandations portaient notamment sur les atteintes ???, le pays dans lequel le ou les éléments les plus significatifs du dommage surviennent ou sont susceptibles de survenir est réputé être le pays auquel la publication ou un service de radio-diffusion est principalement destinée ce qui entrainera la compétence de la loi de ce pays.Donc le Parlement européen ici conseille à la Commission d’adopter lors de la révision de Rome II une règle de conflit de lois relative à l’atteinte au droit de la personnalité et à la vie privée ( diffamation inclue). Il est fort probable que lorsque la révision sera adoptée, il y aura dans le règlement Rome IIbis une règle relative à ces questions.

Quelle est la relation avec le règlement Rome II et les convention internationales?

Ici il n’y a pas de surprise puisque le règlement prévaut entre les Etats membres sur les conventions internationales conclues exclusivement entre les Etats membres.En revanche, les conventions internationales qui ont été conclues avec des Etats tiers prévalent sur le règlement.

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cela signifie que les deux Conventions de la Haye de 1971 et 1973 continuent de s’appliquer puisqu’elles lient notamment des Etats tiers.Également, la règle de conflit de lois contenue dans la Convention de Berne de 1886 relative à la protection des oeuvres littéraires et artistiques devrait vraisemblablement continuer de s’appliquer.

II- Les principales règles de conflit de lois

Rome II est assez complexe car il comporte une règle de conflit de lois générale et une variété de règles de conflit de lois spéciales. Il comporte également une possibilité de choix de la loi applicable par les parties.

A- La règle de conflit de lois générale

1- Le rattachement de principe

Elle est énoncée à l’article 4 du règlement.Elle repose sur un rattachement de principe lui-même assorti d’exceptions. Le rattachement de principe est énoncé l’article 4-1 qui prévoit l’application du lieu du dommage et, plus précisément, il s’agit du lieu où le dommage survient. Cette loi s’applique quelque soit le pays du fait générateur.Ç signifie que cette règle s’applique également pour les délits complexes.

2- Les exceptions au rattachement de principe

Ce rattachement de principe est assorti de deux exceptions aux articles 4-2 et 4-3:

• Si les deux parties ont leur résidence habituelle dans le même pays, la loi de ce pays s’applique. C’est une solution opportune car il s’agira de la loi la mieux connue par les parties au litige.

• Si une autre loi est manifestement plus proche que celle désignée par le paragraphe 1 ou le paragraphe 2, il faudra écarter la loi normalement applicable et faire jouer la loi la plus proche. Ici on a une mise en oeuvre du principe de proximité par une clause d’exception.

l’article 4-3 donne un exemple d’application puisqu’il dispose qu’un lien manifestement étroit avec un autre pays pourrait se fonder notamment sur une relation préexistante entre les parties tel un contrat présentant un lien étroit avec le fait dommageable en question.Ainsi, si les parties sont en relation contractuelle et qu’une obligation non-contractuelle est cause, le juge pourra alors appliquer la loi du contrat.On pourrait imaginer l’application de cet article, par exemple, dans le cas d’une action directe du maître d’ouvrage à l’encontre du sous-traitant.Donc le système de Rome II n’est pas vraiment plus simple que le système français.

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B- Les règles de conflit spéciales

Elles vont s’appliquer pour certains délits en particulier.Ces règles de conflit figurent aux articles 5 et suivants.Il existe une règle particulière pour la responsabilité du fait des produits mais le juge français appliquera ici la règle de conflit qui figure dans la Convention de 1973. On trouve aussi une règle de conflit à la loi applicable à la responsabilité en matière d’atteinte à la concurrence et cette règle de conflit figure à l’article 6 et vise aussi bien les pratiques anti-concurrentielles que la concurrence déloyale.Une règle de conflit existe aussi en matière de responsabilité environnementale à l’article 7.Également, il existe une règle particulière pour la responsabilité en matière d’atteinte au droit de propriété intellectuelle à l’article 8. La loi applicable est celle du pays pour lequel la protection est revendiquée. Ici il faudra combiner l’article 8 avec un article qui figure dans la Convention de Berne de 1886 puisque cette Convention à son article 5-2 prévoirait une règle de conflit. cet article stipule que « la jouissance et l’exercice du droit de l’auteur indépendant de la protection au pays d’origine de l’oeuvre se règle exclusivement d’après la législation du pays où la protection est réclamée».Cet article 5-2 a suscité beaucoup de controverses pour savoir s’il s’agit réellement d’une règle de conflit de lois ou non, d’où l’usage du conditionnel ici. S’il ne s’agit pas d’une règle de conflit de loi, alors en cas d’atteinte à un droit de propriété intellectuelle on appliquera l’article 8. En revanche, si l’article 5-2 est bien une règle de conflit de lois, on appliquera bien cet article et non l’article 8.

Enfin il existe également à l’article 9 une règle de conflit de lois pour responsabilité du fait de grève ou lock-out.

C- le choix de la loi applicable par les parties

Cette possibilité est prévue à l’article 14 du règlement.Toutefois, cette possibilité est encadrée. Effectivement, les parties ne peuvent choisir la loi applicable que dans deux hypothèses:Si l’accord est postérieur à la survenance du fait générateurSI l’accord est antérieur à la survenance du fait générateur mais les parties concernées exercent chacune une activité commerciale et l’accord doit être librement négocié par les parties.

La deuxième hypothèses est assez rare. on pourrait envisager le cas d’un chantier de construction sur lequel intervient le sous-traitant. dans ce cas là, il serait intéressant de prévoir une loi applicable à toutes les questions délictuelles.

Conclusion

La démarche à adopter est de regarder en premier lieu si les parties n’ont pas choisi de loi applicable en vertu de l’article 14. A défaut, il faut regarder si une règle de conflit de lois spéciale s’applique. A défaut encore, on applique l’article 4 du règlement avec en principe l’application de la loi du lieu du dommage sauf si la résidence des parties et situé dans le même Etat et sauf à écarter le jeu de ce principe au moyen d’une règle d’exception.

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III- Les perturbations éventuelles

A- Les lois de police

L’article 16 du règlement fait effectivement référence aux lois de police.Elles jouent un rôle considérable en matière contractuelle. En revanche, en matière de responsabilité extra-contractuelle peu de dispositions méritent cette qualification.

Ce qui est surprenant ici est que l’article 16 ne vise que les lois de police du for et rien ne vise dans le règlement les lois de police étrangères. On s’est demandé s’il ne s’agissait pas d’un oubli de la part des rédacteurs. Certains se prononcent pour l’application éventuelle des lois de police étrangère tandis que d’autres considèrent qu’elles ne peuvent pas s’appliquer.Il faut attendre une décision pour trancher cette hésitation.

B- La réserve d’ordre public

Elle est prévue par l’article 26 qui dispose que « l’application d’une disposition de la loi d’un pays désigné par le règlement ne peut être écarté que si cette application est manifestement incompatible avec l’ordre public du for.»

Ces situations sont très rares en matière délictuelle.Toutefois, la Commission européenne avait prévu un cas d’intervention de l’exception d’ordre public dans le cas d’une loi étrangère qui prévoirait l’allocation de dommages et intérêts non compensatoires ( tels que les dommages et intérêts punitifs).Cette proposition a suscité de nombreuses critiques et finalement elle a été abandonnée. Toutefois, un considérant rappelle cette disposition: le considérant 30.

Dans les décisions récentes, la Cour de cassation a jugé qu’en tant que tels les dommages et intérêts punitifs n’étaient pas contraires à l’OPI français à conditions qu’ils ne soient pas disproportionnés.

Enfin, le règlement prévoit !!!l’exclusion du renvoi!!!: article 24.

Section 2: Le cas particulier des délits commis sur internet

A l’apparition d’Internet, certains avaient proposé l’adoption d’une loi unique. Finalement cette proposition a été abandonnée.Il existe cependant des chartes pour l’utilisation de certains sites, mais c’est un code de régime privé qui ne l’emporte pas sur le droit étatique.

Concernant l’application de Rome II, il n’existe pas de jurisprudence significative sur ce point. On s’intéresse donc encore aux solutions du droit commun.Concernant le vocabulaire utilisé, on parle de la loi du lieu d’émission et de la loi du lieu de réception à la place du lieu du fait générateur et du lieu du dommage subi.

Lorsque l’on s’intéresse à la loi applicable au cyber délit, il convient de distinguer entre les différents délits:

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Paragraphe 1: La loi applicable à la contrefaçon à l’aide d’un support internet

Deux textes sont applicables tels que l’article 8 du règlement Rome II et l’article 5-2 de la Convention de Berne sachant que ces deux textes retiennent la compétence de la loi du pays où la protection est réclamée.Un arrêt de la Cour de cassation vient de reconnaitre à l’article 5-2 la nature de règle de conflit de lois.

Arrêt de la Cour de cassation du 12 juillet 2012.

Cet arrêt concernait la loi applicable à la protection civile du droit d’auteur.

Faits:

En l’espèce, une photo d’un chanteur acteur français, Patrick B avait été prise au Maroc et publiée dans un journal Belge. Mais le photographe avait constaté que cette photo avait été reprise sans son autorisation sur un site français aufeminin.com. Par ce biais, cette photo était également référencée

sur le site Google Image. La question de la loi applicable aux prétentions du photographe était discutée.

La société Google soutenait qu’était applicable la loi américaine parce que ses moteurs de recherche sont hébergés sur des serveurs informatiques situés aux Etats-Unis et de plus le siège de Google est

situé au Etats-Unis.Le photographe soutenait l’application de la loi française.

Solution:

Les juges du fond ont donné compétence à la loi française et la Cour de cassation a approuvé la décision de la Cour d’appel. C’est la loi française car les juridictions on fait application de l’art 5-2 de la convention de Berne. D’autre part la Ccour de cassation considère que la loi de destination et

réception des google images et la réception de ceux ci caractérisent un lien de rattachement substantiel avec la France.

La diffusion en France d’image par un hébergeur français de photographie, mise en ligne pour le public français, sur le site de google image par google France.

Donc la loi frs était bien applicable en l’espèce.

Afin de déterminer le lieu ou la protection est réclamée en vertu de l’art 5-2, la cour utilise le critère de la focalisation ou de destination.Ce critère devient ainsi le facteur de détermination la loi applicable en cas de cyber contrefaçon. L’arrêt est d’autant plus intéressant que la solution rejette clairement l’idée de s’en remettre à la loi du pays ou les pages internet sont simplement « accessibles », rejet du critère de l’accessibilité.C’est donc un revirement de JP de l’arrêt Crystal du 9 décembre 2003.

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Paragraphe 2: les injures et insultes racistes.

Il y a une ordonnance rendue en l’espèce.

Ordonnance du TGI de Paris du 24 janvier 2013.

Faits :

Diffusion sur Twitter en octobre 2012 de Tweet à caractère raciste. Diverses associations françaises de lutte contre le racisme, ont saisi le juge des référés afin qu’il leur donne certaines données.

Notamment pour l’identification des personnes envoyant ces messages, et également que le juge ordonne de mettre en place un dispositif facilement accessible et visible, permettant à toute

personne de porter à sa connaissance des contenus illicites.En l’espèce la compétence du juge frs du TGI de Paris n’était pas contestée.

Mais la question de la loi applicable était plus difficile.Notamment les associations françaises soutenait l’application de la loi LCEN du 21 juin 2004 en

tant que loi de police.La difficulté ici c’est que la loi ne dit pas que c’est une loi de police.

Solution:

Le juge s’est refusé à qualifier cette loi de loi de police, car la nature de cette loi ne s’impose pas avec évidence.

Mais si la loi de 2004 avait été qualifié de loi de police, cela veut dire que tout hébergeur qq soit son siège aurait du satisfaire les dispositions de la loi de 2004.

Mais le juge a refusé ici cette qualification. Mais le juge aurait pu faire application de la loi française par le biais de l’article 145 du CPC qui a

permis d’enjoindre à Twitter de fournir les données demandées.

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TITRE 3 : Les règles

concernant le droit patrimonial

de la famille.

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C’est le DIP des successions que l’on va étudier. Ce qui est intéressant c’est qu’il existe des systèmes très divergents en Europe concernant l’administration des successions.Il y a deux grands systèmes:

• Dans un grand nombre de systèmes juridiques (Belgique, Suisse, Italie, Allemagne, Espagne, France), les héritiers sont directement saisis des biens héréditaires. Donc en principe, les fonctions d’administration de la succession sont exercées par ces héritiers saisis, et dans ces pays, la loi successorale est compétente pour régir l’administration de la succession.

• A l’opposé dans les droits anglo-américains, il n’y a pas de transmission directe des biens successoraux aux héritiers. Le règlement de la succession est confié à un tiers. Donc une personne, l’administrateur, est chargé d’administrer la succession. Il peut s’agir d’un héritier ou une personne qui n’a pas de lien avec le défunt. Cette personne est chargée d’administrer la succession, d’appréhender les biens successoraux, rassembler l’actif et liquider le passif avant de répartir les lots entre les héritiers. Dans ces pays, l’administration de la succession est soumise à la loi du for ou à la loi de situation des biens.

Le règlement des conflits de lois est très différent d’un état à l’autre. La conséquence de ces divergences est qu’il est très difficile d’organiser la succession internationale et on se heurte a une certaine imprévisibilité.Aujourd’hui toutefois, l’adoption d’un nouveau règlement en droit de l’union va remédier aux difficultés.Il s’agit du règlement du 4 juillet 2012 « règlement succession ». Section 1: Les règles de conflit actuelles.

Ce sont les règles françaises de droit commun qui s’appliquent encore jusqu’en 2015. Paragraphe 1: Règles de conflit de lois et de juridictions

I- Les règles de conflit de loi françaises

Le système est dit dualiste.On fait donc une distinction entre la succession mobilière et la succession immobilière. Les règles de conflit de loi sont différentes.

Exemple : les parts d’une SCI sont considéré comme des biens meubles, donc règles de conflit de loi en matière de succession mobilière. Les successions mobilières sont soumises à la loi du dernier domicile du défunt.Cette solution est ancienne, car date de l’arrêt du 19 juin 1939 Labedan.

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Les successions immobilières sont soumises à la loi du lieu de situation des immeubles. Arrêt 14 mars 1837 Cette distinction s’applique aussi bien aux successions ab intestat qu’aux successions testamentaires.Cette règle dualiste est difficile à appliquer, car cela signifie que la succession doit être divisée en deux masses distinctes. Cela a entrainé de nombreuses difficultés. Le Règlement a changé ces solutions. I- Les règles de conflit de juridiction françaises

Les règles de conflit de lois ordinaires adoptent aussi un système dualiste qui reflète celui retenu pour la loi applicable.Donc les successions mobilière et immobilière sont réglées distinctement.

Les tribunaux français sont compétents pour les litiges concernant la succession mobilière si le de cujus avait son dernier domicile en France. C’est une transposition de l’art 45 du CPC dans l’ordre international.A contrario, elles sont incompétentes si le dernier domicile du de cujus était situé à l’étranger.Sauf exceptions tenant à la nationalité française d’une des parties (on applique a titre subsidiaire les art 14 et 15 du code civil). Concernant la succession immobilière, les tribunaux français sont compétents si l’immeuble est situé en France. En revanche ces tribunaux seront incompétents lorsque l’immeuble est situé à l’étranger.Toutefois, la Cour de cassation a récemment admis la compétence des juridictions françaises par l’effet du renvoi de la loi étrangère à la loi française alors que l’immeuble était situé à l’étranger arrêt Tassel 23 juin 2010.

Paragraphe 2: La mise en œuvre des règles de conflits de loi.

L’application de la technique du renvoi, a permis de moduler différentes solutions relatives aux conflits de loi notamment. Et également la réserve d’OP donne aussi des solutions intéressantes. I- Le renvoi en succession internationale.

L’hypothèse du renvoi nait de l’hypothèse d’un conflit négatif, car les règles de conflit de lois étrangères peuvent avoir des critères de rattachement différents de ceux du droit français.Si on applique ce renvoi en matière de succession, cela signifie par exemple que si un français décède en laissant un immeuble en Espagne, la règle de conflit de loi française concernant la succession immobilière désigne la loi espagnole, mais la règle de conflit espagnol elle, désigne la loi nationale du de cujus, donc la loi française.Il y a donc un renvoi de la loi espagnol à la loi française. Si ce renvoi est admis la succession sera régit par la loi française.

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Le renvoi est admis en matière de succession internationale. Il a été admis d’abord en matière de succession mobilière (arrêt Forgot de 1882) et en matière de succession immobilière (arrêt Ballestrero 21 mars 2000). Par la suite un arrêt Riley 11 février 2009, a donné une info intéressante concernant l’application du renvoi, puisqu’il affirme que le renvoi opéré par la loi de situation de l’immeuble ne peut être admis que s’il assure l’unité successorale et l’application d’une même loi aux meubles et aux immeubles.Donc ici, il s’agit de la mission d’un renvoi fonctionnel. C’est un renvoi qui va aussi permettre de corriger notre système dualiste. Autre arrêt important : Tassel 23 juin 2010. Il fait un lien entre les règles de conflit de juridictions et les règle de conflit de lois en utilisant le renvoi.Cet arrêt énonce que lorsque la loi étrangère du lieu de situation d‘un immeuble renvoi à la loi française applicable à la succession mobilière et à un immeuble situé en France, les juridictions françaises sont, par l’effet de ce renvoi, compétentes pour régler l’ensemble de la succession.A l’exception des opérations juridique et matérielle découlant de la loi réelle de situation de l’immeuble à l’étranger.Donc ce qui est avant tout recherché c’est l’unité de compétence ! (à la fois succession mobilière et immobilière, et conflit de loi et de juridiction).

II- L’ordre public international.

Toute condition discriminatoire soit d’ordre social, religieux, racial, sexuel … prévue par une loi étrangère peut se révéler contraire à l’OPI.Aujourd’hui, l’ordre public trouve essentiellement à s’appliquer à l’encontre des incapacités successorales qui sont édictes par le droit musulman et qui sont fondées sur la différence de religion.

Exemple : par un arrêt de la chambre civile du 17 novembre 1964, la Cour de cassation a jugé qu’une incapacité successorale fondée sur la non appartenance à une religion déterminée est directement contraire au principe de la loi française et notamment à celui de la liberté de conscience.

L’ordre public, en revanche, ne s’oppose plus aux droits successoraux concurrents de deux époux polygames, dès lors que l’union a été contractée régulièrement à l’étranger. Les deux veuves se partagent la part attribuée au conjoint survivant. Toutefois, l’exception d’OP va intervenir si la première femme est de nationalité française. Arrêt Baaziz du 6 juillet 1988, et renforcé par un arrêt du 1er décembre 2011.

Actuellement une question suscite des polémiques en France, s’agissant de la réserve héréditaire.

Une loi étrangère désignée par la règle de conflit française et qui ne prévoirait pas la réserve héréditaire, doit elle être écarté ou non sur le fondement de l’OPI ?

La réponse, est semble t-il négative. L’OP n’interviendrait pas. En effet, la CA de Paris, le 3 novembre 1987 a jugé que le risque d’une atteinte à la réserve ne heurte pas la conception française de l’OPI dans des conditions propres à interdire tout effet en France à une décision étrangère.

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Cette solution, est à prendre avec précaution, car c’est un arrêt de CA et non de cassation , et il s’agissait de l’effet atténué de l’OP en l’espèce. Cependant certains commentateurs ont souligné que cette décision devrait être étendue au cas où le juge français doit faire directement application d’une loi successorale étrangère. Donc si la loi étrangère désignée par la règle de conflit française ignore la réserve, cette loi ne serait pas contraire à l’OPI.

Par conséquent, la succession d’un français domicilié en Angleterre dont le patrimoine se compose de valeurs mobilières placées sur des comptes en France ne sera pas soumise aux règles française sur la réserve. (succession mobilière donc dernier domicile du défunt). En revanche, la succession d’un français domicilié en France, dont le patrimoine se compose de valeurs mobilières situées dans un compte en Angleterre sera soumis aux règles de la réserve française.

Il existait un correctif à ce principe il y a quelques temps, en cas de non réserve : il s’agissait du droit de prélèvement prévu à l’article 2 de la loi du 14 juillet 1819. Il prévoyait que « dans le cas de partage d’une même succession entre des co-héritiers étrangers et français, ceux ci (frs) prélèveront sur les biens situé en France une portion égale à la valeur des biens situés en pays étranger dont ils seraient exclus à quelque titre que se soit en vertu des lois et coutumes locales ».

Donc c’était un privilège fondé sur la nationalité française d’un héritier. Il pouvait priver une certaine somme. Mais par une décision du Conseil constitutionnel du 5 aout 2011, ce droit de prélèvement à été déclaré inconstitutionnel car discriminatoire. Il est donc abrogé. Il en résulte la possibilité d’organiser sa succession de façon à passer outre la réserve. La limite est celle de la fraude à la loi.

III- La fraude à la loi.

Les critères de la fraude à la loi on été posés par l’arrêt de la Cour de cassation du 18 mars 1878, Princesse de Beauffremont. Il faut un élément matériel, légal, et moral. Cette fraude s’applique en matière de succession et notamment dans l’affaire Caron qui illustre une tentative de fraude à la loi en matière de succession.

Arrêt cour de cassation du 20 mars 1985, Caron

Faits:

Il s’agissait d’une manipulation de la catégorie de rattachement. Monsieur Caron a transformé une succession immobilière en succession mobilière.

Il était domicilié dans les iles vierges, et voulait soustraire à ses deux enfants un immeuble qu’il possédait sur la cote d’azur. Il voulait le transmettre à son ancienne secrétaire. Il voulait contourner

la réserve. Il a donc constitué une société dans les iles vierges, puis vendu son immeuble à cette société, puis crée un trust aux USA, il a remis au trusty les actions de la société avec une stipulation

disant que ces actions seraient transférées à son décès à sa secrétaire.

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Solution:

La Cour de cassation a approuvé la CA d’avoir caractérisé l’existence d’une fraude. La sanction de la fraude a été l’inefficacité. Ainsi lorsque la fraude a été faite pour se débarrasser

des institutions de la réserve, on procède à une réduction de la libéralité.

L’arrêt a été rendu dans des circonstances particulières, mais ne doit pas être considéré comme condamnant la vente ou apporter un immeuble à une société contre une somme d’argent. C’est une pratique utile.

Le DIP français des successions est considéré comme complexe, et donc bientôt destiné à disparaître et à être remplacé par le système mis en place par le règlement succession.

Section 2: Le règlement succession

Il s’agit du Règlement du 4 juillet 2012. Ce nouveau Règlement est vivement attendu par les praticiens. Il a été adopté le 4 juillet dernier, et veut offrir un cadre global a l’ensemble des difficultés suscitées par la présence d’un élément d’extranéité au sein des successions. D’ailleurs, son titre est « la compétence, la loi applicable, la reconnaissance te l’exécution des décisions, et l’acceptation des actes authentiques en matière de succession et a la création d’un certificat européen ». Donc l’UE nous offre une sorte de code de DIP des successions. Les deux principales ambitions sont :

• La simplification de la succession internationale, en consacrant le principe de l’unité de la succession. (mobilière, immobilière, de l’ouverture au partage)

• Il privilégie la prévisibilité des solutions. Avec l’introduction de l’autonomie de la volonté.

Paragraphe 1: Champs d’application.

I- Champs d’application temporel

Les dispositions du règlement ne sont applicables qu’à partir du 17 aout 2015. Toutefois à partir du moment où le décès de la personne aurait lieu après le 17 aout 2015, les règles instituées par le Règlement pourront être sollicitées pour consacrer la validité de choix antérieur effectué par le défunt.

Exemple : le choix de la loi applicable est possible dès aujourd’hui, et ce choix sera effectif dès lors que la personne décède après le 17 aout 2015.

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II- Champs d’application spatial

Le Règlement est applicable à tous les Etats membres de l’UE sauf au Danemark, et pour l’instant il ne s’applique pas au RU et à l’Irlande. Son application est universelle, c’est à dire que son application n’est pas subordonnée au fait que la succession soit intra européenne. Donc peu importe la situation des éléments d’extranéité, et que la loi désignée soit celle d’un pays d’un Etat non membre. Le RU pourra bien sur se soumettre à ce texte. De plus, ce texte reste applicable à partir du moment où la succession est traitée par une autorité française même si des éléments sont situés au RU. Ce n’est que si la succession est saisi au RU qu’elle mettra en œuvre la règle du conflit de lois.

III- Champs d’application matériel

Le Règlement offre un champ d’application très étendu puisqu’il s’applique aux successions à cause de mort. Cette notion est largement entendue dans la définition de l’article 3 du Règlement, qui dispose qu’il s’agit de « toute forme de transfert de biens, de droits et d’obligations à cause de mort, qu’il s’agisse d’un acte volontaire de transfert, en vertu d’une disposition à cause de mort, ou d’un transfert dans le cadre d’une succession ab intestat». Donc sont concernés tous les types de successions. C’est un facteur de simplicité.

Il existe des exceptions : notamment sur des questions fiscales, qui sont exclues du Règlement du fait de l’existence de nombreux traités internationaux bilatéraux, et la France est tenue par plus de 35 conventions ! Toutefois cette exclusion ne constitue pas une renonciation de l’UE mais la voie choisie est plus souple, car une recommandation du 15 décembre 2011 a été prise pour éviter la double imposition, et les discriminations en fonction du lieu de situation. Les questions relatives aux régimes matrimoniaux et patrimoniaux sont exclus du domaine d’application du Règlement.

Paragraphe 2: Les règles de compétence juridictionnelle.

Actuellement lorsqu’il y a une succession internationale, plusieurs juridictions peuvent se reconnaître compétentes. Et donc des incohérences ou contradictions sont à craindre. Ce Règlement a donc pour finalité de remédier à cette difficulté. Les successions sont en principe réglées hors des tribunaux, mais un litige est toujours possible, c’est pourquoi il y a des règles de conflit de juridictions au sein du Règlement.

Les dispositions de ces règles sont inscrites au Chapitre 2 du Règlement, et pour la loi applicable il s’agit de solutions innovantes. Les articles 4 à 13 du Règlement sont relatifs à la compétence juridictionnelle et se substituent aux règles de droit commun françaises. Il s’agit de règles de compétences générales, dans le sens où ces règles permettent de déterminer la compétence internationale de l’ordre juridictionnel d’un Etat membre donné. Le tribunal spécialement compétent découle des règles nationales.

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Les dispositions du Règlement sont très détaillées et parfois répétées, mais ces règles sont dominées par une recherche d’une coïncidence entre l’ordre juridictionnel compétent et la loi applicable à la succession. Le règlement prend soin d’édicter des règles de compétence subsidiaire.

I- La coïncidence entre l’ordre juridictionnel compétent et la loi applicable.

Le principe est posé à l’article 4 du Règlement « sont compétentes les juridictions de l’Etat membre dans lequel le défunt avait sa dernière résidence habituelle ». Elle est assez proche de la règle de droit français actuelle en matière mobilière, mais s’en distingue par la référence faite à la résidence habituelle. Or en droit français il s’agit du domicile.Une autre nouveauté est que cette compétence concerne aussi bien la succession mobilière que immobilière.

Cette recherche de coïncidence ressort également des règles des articles 5 et 9 du Règlement.Selon ces articles, le choix par le défunt de sa loi nationale entraine à certaines conditions, la compétence des juridictions du pays de sa nationalité. Cette coïncidence, cette unité peut provenir de 4 situations :

• L’article 5 du Règlement indique que si le de cujus a choisi sa loi nationale pour régir sa succession, les parties concernés peuvent convenir que la ou les juridictions de cet Etat membre ont compétence exclusive pour statuer sur toute la succession.

Cette exclusivité confèrera au seul tribunal désigné par ces parties.L’accord concernant cette élection de for doit être conclue par écrit, daté et signé par les parties. Aucune précision n’est donnée sur la signification de «ces parties» concernées, mais il s’agirait des héritiers, des légataires et créanciers éventuels du défunt.Cette élection de for ne peut se faire que si le de cujus a choisi sa loi nationale pour sa succession et donc les tribunaux seront ceux de son pays.

• L’article 6 permet à la juridiction de la dernière résidence habituelle du défunt, de décliner sa compétence à la demande d’une des parties, si elle considère que les juridictions de l’état membre dont la loi a été choisie sont mieux placés pour statuer sur la succession.

• L’article 7 c) du Règlement qui vise l’hypothèse d’une acceptation expresse par les parties à la procédure de la compétence de la juridiction saisie.

• L’ article 9, qui ajoute la prorogation tacite de compétence, la comparution volontaire des parties qui n’auraient pas participé au vote du for entraine une prorogation de compétence de la juridiction saisie.

Dans ces 4 situations, la question successorale pourra être porté devant le tribunal de l’Etat ou le de cujus avait sa nationalité.C’est des règles principe pour une coïncidence entre les deux compétences.

Le Règlement adopte aussi des règles de compétences subsidiaires.

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II- Les règles subsidiaires.

Enoncé à l’article 10 du Règlement, et ces règles donnent compétence aux juridictions d’un Etat membre alors même que la résidence du défunt n’était pas au moment du décès situé dans un Etat de l’union.On ramène le litige vers les juridictions d’un état membre de l’UE. Un rattachement min doit tout de mm existé avec l’UE. Puisque les chefs de compétences subsidiaires ne s’applique que si des biens successoraux sont situés dans l’état membre de l’union.

Ces chefs de compétences subsidiaires sont hiérarchisés :

• Les juridictions d’un Etat membre dont le défunt possédait la nationalité au moment du décès.

• A défaut, les juridictions de l’Etat membre où le de cujus a eu sa précédente résidence habituelle, à condition que cette résidence n’ait pas pris fin plus de 5 ans, avant le changement de résidence habituelle.

L’article 10 2) précise que lorsque aucune juridiction d’un Etat membre n’est compétente en vertu des deux hypothèses précédentes, les juridictions de l’Etat membre dans lequel sont situés des biens successoraux, sont compétentes pour statuer sur ces biens. Introduction ici d’un morcellement de la succession. Par ailleurs, un for de nécessité à été prévu: lorsque aucune chef de compétence précédent ne permet de désigner un tribunal d’un Etat membre, et qu’il est impossible de saisir une juridiction d’un Etat tiers, les juridictions d’un Etat membre peuvent se prononcer sur la succession. Toutefois, l’affaire doit présenter un lien suffisant avec l’état membre.

Paragraphe 2: La loi applicable à la succession internationale.

I- La détermination de la loi applicable.

L’unité et la volonté apparaissent comme la devise de ce Règlement concernant la loi applicable. Effectivement, le Règlement a consacré le principe de l’unité successorale. Une seule loi est applicable à l’intégralité de la succession. Pour mettre en œuvre ce principe le Règlement institue comme règle de rattachement la loi de la résidence habituelle.

Cette loi n’est pas une notion nouvelle en DIP, mais son utilisation était rare en matière de succession, puisque les rattachements classiques en succession sont ceux de la nationalité, du domicile ou de la situation des biens. Le rattachement à la résidence habituelle était très peu retenue.

Ce caractère novateur de ce rattachement invite à évoquer les raisons de ce choix et sa définition, et sa mise a l’écart par la clause d’exceptions.

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A- Les raisons de ce choix.

Le critère de la résidence habituelle a les faveurs de l’UE car ce critère permet de favoriser l’intégration de l’individu au sein de l’environnement dans lequel il demeure. Ainsi, en rompant le lien entre l’individu et sa loi nationale, l’UE souhaite favoriser la mobilité des individus. Cette justification politique est aussi taillée par des éléments plus pragmatiques.La dernière résidence habituelle du défunt est souvent le lieu où se trouve la plupart de ses biens. Donc ce rattachement apparaît comme une solution simple. Egalement, la loi de la RH sera celle des autorités compétentes pour intervenir dans le traitement de la succession.

B- Définition de la résidence habituelle

Le Règlement consacre l’un de ses premiers articles à un travail de définition. Il offre donc des éclaircissements sur les notions qu’il utilise. Ici, il n’y a cependant pas la définition de la résidence habituelle. Cette absence de définition est regrettable car les praticiens avaient souligné cette lacune. La critique peut paraître injuste puisque deux considérants dans le Règlement sont venus apporter des précisions sur cette notion (23 et 24), mais cette tentative peut paraître contre-productrice, car la valeur normative des considérants de Règlement n’est pas vraiment déterminée.De même, les critères évoqués par ces considérants tendent à rapprocher cette notion à la notion de domicile. En effet, il est précisé que l’autorité chargée de la succession devra procéder à une évaluation d’ensemble prenant en compte la durée, et la régularité de la présence du défunt dans l’Etat concerné, et les conditions et raisons de cette présence.

L’absence de définition va entrainer des cas de litispendances, car plusieurs Etats vont considérer être celui de la dernière résidence habituelle du défunt. Ce principe est écarté par la clause d’exception.

C- La mise à l’écart par la clause d’exception.

Le Règlement prévoit que lorsque a titre exceptionnel il résulte de l’ensemble des circonstances de la clause que, au moment de son décès, le défunt présentait des liens manifestement plus étroits avec un autre Etat, la loi de cet Etat évince celle du pays de la résidence habituelle. Toute exception va nuire à la sécurité juridique, puisque son champs d’application va susciter des discussions, néanmoins la formulation de cette clause d’exception est émaillée de 3 termes qui tendent réduire au max son application : « exceptionnel » « manifestement » « ensemble ».

On trouve en plus dans les considérants, que cette clause ne doit être sollicitée que dans des cas exceptionnels.

Une seule piste pourrait être évoquée : l’hypothèse du défunt venu résider dans un pays, uniquement pour y recevoir les soins. Dans ce cas la clause sera appliquée.

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II- La promotion de la volonté successorale.

Article 22-1 du Règlement « choix de la loi ».Ce choix de la loi est consacré comme « une personne peut choisir comme loi régissant l’ensemble de sa succession, la loi d’un Etat dont elle possède la nationalité, au moment où elle fait ce choix ou au moment de son décès ».

A- Intérêt du choix

Il s’exprime à 3 égards :

• Il est source de sécurité, car le choix permet de sécurisé les successions internationales.

Lorsque le de cujus choisi la loi qui va s’appliquer, il fait le choix d’une solution ferme qui est vecteur de sécurité juridique. En effet, un tel choix va éviter les discussions sur la détermination parfois délicate concernant la dernière résidence habituelle du défunt. Le rattachement de la succession à la loi nationale offre un critère de rattachement bien plus stable que celui de dernier lieu de la résidence. Permet d’éviter les aléas liés à la vie du de cujus.

• Ce choix va permettre d’assurer une certaine proximité entre la loi applicable et le défunt.

En effet, en faisant choix de sa loi nationale, le disposant soumet sa succession à une loi qui lui est en principe connue et avec laquelle il présente des liens étroits.

• Ce choix va être un outil d’anticipation successorale.

Cette question peut être réglée en amont de la succession, de façon claire et définitive durant la vie du de cujus. Une telle anticipation constitue une innovation importante car aujourd’hui c’est la loi au jour du décès.

B- Les conditions de ce choix

1- Les conditions tenant à l’objet du choix

Le choix ne peut porter que sur la loi nationale du défunt, et cette nationalité est appréciée soit au moment où le choix est effectué, ou au moment du décès. Cette limitation n’est pas surprenante car la nationalité constitue un rattachement classique en matière de DIP de la famille. Cette limitation va être un garde-fou contre la possibilité de choisir une loi qui ne présenterait pas de lien avec la personne.

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Cette limitation constitue une garantie contre les choix frauduleux. Ce choix de loi nationale offre cependant une option car il peut porter soit sur la loi nationale de la personne au moment où elle exprime ce choix, soit sur sa loi nationale au moment de son décès. Par ailleurs, le Règlement a un caractère universel, donc le choix peut porter non seulement sur la loi d’un Etat membre, mais aussi sur celui d’un Etat tiers. Le choix ainsi réalisé ne peut porter que sur une seule loi. Et la loi s’applique à l’ensemble de la succession.

2- Les conditions tenant à l’expression du choix

L’article 22-2 dispose que le choix est formulé de manière expresse dans une déclaration revêtant la formation d’une disposition à cause de mort, ou ce choix résulte des termes d’une telle disposition. Ainsi, doit être formulé expressément dans une disposition testamentaire, et donc le choix de la loi applicable à la succession peut intervenir par testament à tout moment de la vie d’une personne. L’examen des conditions de ce choix, révèle que la liberté de choix obéit à un cadre stricte, et le respect de ce cadre est essentiel car ces règles conditionnent la validité du choix. Faute de choix valable, il y aura un retour à la règle de principe, à savoir la dernière résidence habituelle du défunt.

III- La mise en œuvre des règles de conflit de loi.

A- Le renvoi

Le renvoi est admis par le Règlement mais de façon restreinte. Il est exclu dans un certain nombre d’hypothèses, et notamment dans le cas où est mise en œuvre une liberté de choix de la loi.

En revanche une telle exclusion n’est pas retenue pour appliquer le rattachement à la loi de la résidence habituelle. Mais l’intervention du renvoi dans ce cas est fortement cantonnée. Il ne sera retenu, que s’il permet la désignation de la loi d’un Etat membre de l’UE ou encore s’il permet la désignation de la loi d’un Etat tiers mais qui dans ce cas la, appliquera sa propre loi. Il est possible que les praticiens regrettent la survivance du renvoi, cependant il résulte de l’écoute portée par l’UE aux commentaires des travaux préparatoire du Règlement puisque la doctrine avait appelé la mission restreinte du renvoi, car le renvoi est une technique de DIP pour parvenir à une harmonie des solutions.

B- L’exception d’ordre public

Cette exception est exprimée à l’article 35 du Règlement : l’application d’une disposition de la loi d’un Etat désigné par le présent règlement, ne peut être écarté que si cette application est manifestement incompatible avec l’OP du for. Cette exception d’OP permet d’évincer l’application de la loi étrangère, lorsque cette loi désignée est contraire à l’OPI du for.

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Le problème s’est posé de l’application de l’OP afin de protéger le jeu de la réserve héréditaire. Cette question suscite encore de vives réactions. Les craintes étaient que le choix de la loi devienne un moyen d’éviter frauduleusement l’application de la loi française et donc de la réserve héréditaire. Pour le combattre, il est alors suggéré de protéger la réserve contre la loi étrangère grâce a la technique de l’OPI.

Ce qu’il faut observer c’est que cette possibilité de choix applicable ne va permettre que dans très peu de cas d’éviter l’application de la réserve, puisque en vertu de l’article 22 du Règlement, le choix de la loi applicable ne peut porter que sur la loi nationale du disposant. Donc dès lors, pour que se pose la question de l’éviction de la loi étrangère désignée par ce choix, il faut que le disposant soit de nationalité étrangère. S’agissant des ressortissant français, ceux ci ne pourront pas échapper à la réserve héréditaire, la loi française s’appliquera en raison de leur choix.

En définitive, le jeu de l’exception d’OP concernant ces questions de la réserve, est potentiellement plus important en dehors de l’hypothèse de choix de la loi, donc lorsque la loi est celle du dernier domicile du défunt.Donc ce choix de loi applicable, contribue à la préservation de la réserve héréditaire tout au moins pour les ressortissants français.

3- Les lois de police.

La vocation de la loi successorale a régir l’ensemble de la succession se heurte éventuellement aux lois de police de l’état de situation du bien. Effectivement, le Règlement prévoit l’intervention des lois de police dans 2 hypothèses :

• Le Règlement à l’article 30, réserve l’application des dispositions spéciales de la loi de situation imposant des restrictions à la succession de certains biens immobilier, certaines entreprises, ou d’autres catégories particulières de biens, en raison de leur destination économique, familiale ou sociale, lorsque ces dispositions se veulent applicables quelque soit la loi régissant la situation.

Cet article a fait l’objet d’une application anticipée de la Cour de cassation arrêt 10 octobre 2012. Dans cet arrêt la cour a décidé que les règles relatives a l’attribution préférentielle d’un bien, sont des lois de polices. La cour n’avait pas obligation d’invoquer les lois de police car la loi française était d’office applicable. Mais elle y a fait appel.

• L’article 31 du Règlement prévoit l’adaptation des droits réels prévus par la loi successorale et inconnu de la loi de situation des biens, au droit réels équivalent le plus proche en vertu de la loi de cet état.

Donc il est possible que certains droits réels ne soient pas connus du lieu de situation des biens. Dans ce cas, le Règlement propose de mettre en place le procédé d’adaptation.

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REVISIONS :

RB1 ne rentre pas dans le programme de révision. Pas besoin de règlement, si sujet sur un règlement ils seront en annexe.

Art 6 RBII bis, deux interprétation possibles :

• on lie l’art 6 aux art 3,4 et 5 du R (pas retenu par la doctrine frs mais semble être appliqué quand mm) et ne jouerait que lorsque le R fonde la compétence d’un T d’un

état membre. • on lie l’art 6 à l’art 7, donc le def protégé ne peut jms être attrait devant un T d’un autre

état mm sauf en vertu des art 3,4 et 5. Si pas défendeur protégé on applique le droit national (art 7). Si défendeur protégé le droit national ne s’applique que si permet de

l’attraire devant la juridiction de l’état qui en font en défendeur protégé.

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