e.learning temps-scenarisation-1
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Jean-Paul Moiraud – Décembre 2012 - Janvier 2013
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Le e.learning, le temps et l’espace, éléments de réflexion pour une
scénarisation opérationnelle1
Table des matières
INTRODUCTION .................................................................................................................................... 3
I. LES ACTEURS DU DISPOSITIF .............................................................................................. 3
A. Identifier les acteurs : la cartographie d’un réseau de formation. ................................................. 3
B. Les enseignants ........................................................................................................................................ 4
C. Le chef d’établissement ........................................................................................................................... 6
D. Les corps d’inspection ............................................................................................................................. 7
II. LE TEMPS ET L’ESPACE .......................................................................................................... 8
A. Définir et expliquer le temps en e-learning ........................................................................................... 8
B. Comment est construite la formation en présentiel ? Un temps et un espace contraint ............ 9
C. Qu’est- ce que le e-learning ? ................................................................................................................. 9
D. Le e-learning, une autre façon de penser la formation- Du temps contraint (statutaire) au
temps choisi (digitalisé ) ................................................................................................................................ 10
1) Le temps normé (statutaire) ....................................................................................................................... 10
2) Le temps choisi (numérique) ...................................................................................................................... 10
E. Proposer une nouvelle grammaire du temps de formation ............................................................. 11
1) Normer un temps nouveau ......................................................................................................................... 11
2) Le temps vu par les inspections ................................................................................................................ 12
3) Le temps vu par le chef d’établissement .................................................................................................. 12
4) Le temps vu par les scénaristes ................................................................................................................ 12
F. Articuler la réflexion sur le temps et l’espace.................................................................................... 12
G. Propositions de grilles ........................................................................................................................... 13
1 La genèse de ce billet trouve sa source dans une suite d’échanges mails avec Benoît Ducange de la DGESCO,
projet Pairformance, de Yohann Derrien tuteur projet à l’esen et des lectures de travaux des apprenants de ifdesen V2.
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CONCLUSION ...................................................................................................................................... 15
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Introduction
La construction d’une structure de formation en ligne est un acte complexe. On pourrait
la comparer à l’élaboration d’un lanceur spatial, il est nécessaire de concevoir un
dispositif en étages, doté de moteurs puissants, destinés à impulser une dynamique2 de
formation.
Un dispositif de e-learning met en réseau un grand nombre d’acteurs situés à des
niveaux divers au sein d’une pyramide organisationnelle. Il est indispensable,
préalablement à tout début de construction, de cartographier les interlocuteurs des
dispositifs. À défaut, le risque est grand qu’un acteur n´ait la perception que de son
environnement immédiat.
Je parlerai dans ce billet du e-learning à l’éducation nationale. J’y vois là, un terrain
d’analyse très intéressant parce que l’on voit émerger un autre mode d’apprentissage /
enseignement. Il est évident que mon propos est large et que la question ne peut être
résolue dans un simple billet de blog. En conséquence je souhaite poser les jalons
d’une réflexion sur les contours du temps et de l’espace en FOAD, dans une optique de
scénarisation opérationnelle.
Mon propos tentera d’analyser la possibilité de concilier la mise en place d’une structure
de formation en ligne construite sur un modèle réticulaire souple au sein d’une
pyramide contrainte par des repères temps et espace normés. Pour articuler mon
propos je tenterais de cerner la nature des fonctions de chacun des acteurs du dispositif
(I) afin de donner un début de réponse sur le temps et l’espace (II)
I. Les acteurs du dispositif
A. Identifier les acteurs : la cartographie d’un réseau de formation.
L’enseignement traditionnel cantonne les modèles organisationnels dans un espace de
formation relativement restreint (établissement, enseignant, équipe disciplinaire, chef
d’établissement). Le e-learning redéfinit la sphère des impliqués et oblige
mécaniquement à cartographier les nouveaux territoires de la formation. L’entité
2 Le mot virtuel dans son étymologie grecque dunamis est synonyme de dynamique et de mouvement. Lire à ce
propos « s’orienter dans le virtuel » de Marcello Vitali Rosatti éditions l’Harmattan. « dunamis signifie « un principe de mouvement qui se trouve dans autre chose ou dans le même en tant que autre » (métaphysique, 1019a15). En d’autres termes, il s’agit d’une capacité d’action ou de passion c’est-à-dire, une capacité de faire ou de subir quelque chose »page 22.
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administrative prend corps avec la construction des dispositifs de formation en ligne,
puisqu’il faut la personnaliser, l’identifier, la représenter sous sa dimension
opérationnelle. Les formations s’entendent alors plus dans l’horizontalité que dans la
verticalité.
Résumons cette problématique par une question de gestion de projet : qui fait quoi ?
Je vais prendre le risque d’introduire des notions de gestion d’entreprise mais il me
semble nécessaire pour ne pas dire indispensable de déterminer les contenus des
fiches de postes3 des interlocuteurs des dispositifs. Peut-être sont-elles encore à créer
pour le e-learning ? Il faut dépasser les enjeux strictement pédagogiques (ils ne
suffisent plus) pour intégrer les compétences liées à l’enseignement en ligne. Le métier
s’inscrit dans une chaîne de conception dont il faut maîtriser les subtilités. La vision
panoptique a encore du sens, plus dans son acception de surveillance mais dans la
compréhension d’un système fonctionnant sur le principe du maillage dynamique.
Par maillage dynamique j’entends la capacité des acteurs à concevoir la formation au
sein d’un dispositif en réseau intégrant des fonctions multiples (voire nouvelles) dans un
cadre spatio-temporel revisité.
L’acculturation aux enjeux du e-learning passera obligatoirement par notre capacité à
renvoyer une image claire et nette de la chaîne de conception, à formaliser précisément
les interactions humaines générées en présentiel et en distanciel.
Il faut définir et afficher précisément les rôles de chacun au sein de cette construction
complexe.
Je vais tenter de proposer quelques orientations pour que chacun des acteurs ne
perçoivent le processus de formation de façon morcelée.
Les principaux acteurs sont les enseignants, les chefs d’établissements, les corps
d’inspection.
B. Les enseignants
Ils sont au cœur du dispositif de formation en ligne. Ils peuvent intervenir à plusieurs
titres :
3 La fiche de poste est un descriptif de la fonction exercée par un agent dans une structure donnée, en prenant en
compte son environnement de travail notamment le service et l’encadrement éventuel. Une fiche de poste n’est ni une fiche d’emploi ni un profil de poste. Le poste est décrit Tél qu’il est tenu en fonction de la mission confiée. La rédaction doit donner une photographie du poste actuel et non une vision prospective ou idéale. Source. - www.ac-caen.fr/.../guide_pratique_elaboration_fiche_poste.pdf
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o Concepteurs de cours. Dans ce cadre ils doivent instrumenter leurs
compétences acquises dans leurs métiers de base. J’entends par là les savoirs
disciplinaires acquis lors de la formation initiale à l’université. Ce savoir est
indispensable et incontournable.
o Concevoir des cours ... mis en ligne. C’est ici que le métier d’enseignant évolue
dans sa mission originelle puisque la « distance » induit une autre posture à
l’égard des savoirs transmis. Là, où la transmission peut être l’objet d’une
remédiation instantanée en présentiel synchrone, le distanciel modifie les
constructions. Il est donc nécessaire que les enseignants maîtrisent les bases de
l’ingénierie pédagogique pour que les messages (ressources) transmises
puissent être compris à distance. Il devient très difficile de « bricoler 4» dans une
relation distante à forte dominante asynchrone. En visitant à nouveau sa façon
de concevoir un cours, on revisite obligatoirement ses compétences.
o Tuteur auprès des apprenants – Le travail de conception de cours en ligne oblige
à penser le rapport enseignant /apprenant. Jacques Rodet explique parfaitement
l’ensemble des enjeux du tutorat dans le blog de t@d et notamment dans la
revue Tutorales No 105 sur le temps de travail des tuteurs. La lecture attentive de
ce numéro dresse parfaitement les enjeux temporels de la formation en ligne.
Le métier, dans ce cadre précis, passe d’une posture professionnelle ou la dimension
orale est dominante, à une posture où le rédactionnel multimodal devient prégnant. Au
regard de ce que je viens d’énoncer, ma question est la suivante, comment évolue le
métier d’enseignant dans une configuration qui envisage le e-learning ? Dit autrement,
quelle pourrait être la fiche de poste type pour le e-learning chez les enseignants ?
Quelles compétences en e-learning sont exigées ?
o Compétences de conception des cours (scénarisation) ;
o Compétences en ingénierie de formation ;
o Compétences tutorales ;
o Compétences technologiques ;
o Compétences rédactionnelles ;
o Compétences relationnelles.
Puisqu’il est question d’envisager la nature des compétences, je voudrais aborder une
problématique qui me tient à cœur. Le développement du e-learning passe
obligatoirement par la case réflexive. On ne peut se contenter d’une démarche
uniquement centrée sur l’usage, il faut lui donner un corps conceptuel.
4 Le bricolage http://moiraudjp.wordpress.com/2011/06/06/bricolage-quelques-reflexions/
5 Tutorale 10 http://moiraudjp.wordpress.com/2011/06/06/bricolage-quelques-reflexions/
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Je pense profondément que les différents acteurs doivent se contraindre à produire
une analyse sur leurs propres usages, une façon d’alimenter la doxa. Cet ensemble
d’analyses ne peut que servir le e-learning et il s’agit, là encore une question de temps.
Quelle place donner à la démarche réflexive sur le e-learning dans le secondaire ?
Peut-on la reconnaître comme partie intégrante du métier ? Comment, en l’absence de
reconnaissance et de définition officielle, peut-on valoriser ce temps de travail masqué ?
Il s’agit ici, me semble t-il, d’une réflexion transversale qui concerne les enseignants, les
corps d’inspection et les chefs d’établissement.
C. Le chef d’établissement
La mise en place d’une formation en ligne ne s’improvise pas, elle se scénarise. Si le
propos est valable pour le bout de la chaîne (les enseignants), il l’est tout autant pour
les corps intermédiaires et notamment pour les personnels de direction.
La FOAD constitue une nouvelle strate dans la structure de formation d’un
établissement. Il faut évidemment la problématiser, l’intégrer dans la masse des
formations à dispenser. La formation en ligne doit, de mon point de vue, s’envisager
très en amont des dispositifs opérationnels. La politique FOAD pose un grand nombre
de questions au sein d’un établissement :
o La FOAD pour la formation des personnels ou la FOAD pour la formation des
élèves ? ;
o Quel est l’état des compétences de l’équipe enseignante ? ;
o Quelle est la vision de la FOAD (réelle ou fantasmée) du chef d’établissement ?
o Quelle est la vision de la FOAD (réelle ou fantasmée) des enseignants ?
o Quelle est la vision de la FOAD (réelle ou fantasmée) des parents d’élèves ?
o Peut-on inscrire la FOAD dans un VS pour les services enseignants ?
o La FOAD peut –elle être un vecteur de formation pour la mission de formation
continue dispensée dans certains établissements (UFA, GRETA,
accompagnement VAE...)
o Quel plan de formation pour les équipes volontaires ? ;
o Quelle place donner aux enseignants « foadistes » dans un cadre spatialisé ? ;
o Quelle qualification doit-on donner au temps de FOAD ?
o Quelle partition opérer entre la conception et l’opérationnalisation ? ;
o Quelle politique d’aménagement des locaux ? Y a t-il une place pour un Learning
center ?
Cet ensemble de questions renvoie à l’émergence de nouvelles compétences
managériales chez les cadres. Là encore il faut (faudra) imaginer la fiche de poste pour
le e-learning chez les chefs d’établissements ?
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o Compétences de management du e-learning chez les chefs d’établissements ;
o Compétences en management du changement ;
o Compétences d’analyse architecturos-pédagogiques.
Là encore, la mise en place du e-learning renvoie à la définition de nouvelles attitudes,
de nouvelles compétences. La fiche de poste pourrait être un début de réponse à cette
question épineuse parce qu’elle permettrait de formaliser une fonction émergeante chez
les cadres.
D. Les corps d’inspection
Je l’ai écrit, dans de très nombreux billets, travailler sur un mode non hiérarchique ne
signifie pas supprimer la hiérarchie. Un système a besoin d’un système de régulation, la
mission des corps d’inspection y contribue. La FOAD bouleverse, probablement,
certaines attributions. Prenons la définition de la mission d’IPR donnée par le
ministère6 :
o « veillent à la mise en œuvre de la politique éducative dans les classes et les
établissements scolaires,
o évaluent le travail des personnels enseignants, d’éducation et d’orientation des
établissements du second degré et concourent à l’évaluation de l'enseignement
des disciplines, des unités d’enseignement, des procédures et des résultats de la
politique éducative,
o inspectent et conseillent les personnels enseignants, d'éducation et d'orientation
des établissements du second degré et s'assurent du respect des objectifs et des
programmes nationaux de formation, dans le cadre des cycles d'enseignement,
o participent à l'animation pédagogique dans les formations initiales, continues et
par alternance des personnels de l'éducation nationale, en lien avec l’université,
o peuvent conseiller les chefs d’établissement à la demande du recteur,
o assurent des missions d'expertise dans ces différents domaines ainsi que pour
l'orientation des élèves, les examens, la gestion des personnels éducatifs et
dans le choix des équipements pédagogiques, notamment en participant aux
travaux de groupes d’experts menés par l’inspection générale ou l’administration
centrale du ministère.
o Ils exercent leurs fonctions dans le cadre du programme de travail académique,
en responsabilité seuls ou à plusieurs selon les disciplines ou spécialités. Ils
exercent leurs fonctions sous l'autorité du recteur d'académie et en liaison avec
les inspections générales de l'éducation nationale. »
6 http://www.education.gouv.fr/cid1139/inspecteur-d-academie-inspecteur-pedagogique-regional.html
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Dans la perspective du développement du e-learning la mission d’évaluation du travail
des enseignants se transforme mécaniquement, le travail des enseignants étant lui-
même transformé. Les enjeux de type pédagogique et didactique ne sont plus les
mêmes modifiant d’autant la grille de lecture.
La mission d’inspection est donc transformée puisque l’espace de formation n’est plus
la salle de classe située dans un établissement (collège, lycée). La FOAD fait voler en
éclat un mode d’évaluation, reste à penser et à organiser les futurs modes d’inspection,
d’évaluation et d’animations pédagogiques.
Les compétences à évaluer chez les enseignants sont autres :
o Capacité à scénariser ;
o Capacité à tutorer ;
o Capacité à médiatiser une ressource ;
o Capacité à maîtriser la construction de ressources multimodales ;
o Capacité à rendre claire une ressource mise en ligne ;
o Capacité à accompagnera les élèves via les réseaux ;
o Capacité à développer un esprit de synthèse ...
Il va de soi que se mettre en situation de conseiller, de guider impose que les corps
d’inspection maîtrisent parfaitement ce nouveau paradigme de la formation. On l’aura
compris c’est toute la chaîne de formation qui doit analyser sa capacité à intégrer le
changement.
De façon plus large il y aura à impulser dans le cadre des missions de formation initiale,
continue et par alternance les stratégies de formation en ligne. Il me semble que de ce
point de vue le rôle des corps d’inspection est fondamental pour expliquer les enjeux du
déploiement de la FOAD. Là encore, mon propos se développe dans un principe de
répétition : comment définir la fiche de poste du métier d’inspecteur dans une
configuration de développement du e-learning
II. Le temps et l’espace
A. Définir et expliquer le temps en e-learning
Le e-learning, dans l’hypothèse où celui est amené à se développer, va induire une
modification des métiers (certains éléments en tout cas). Dans cette écriture nouvelle,
la notion de temps est inscrite en toile de fond. Il est loisible de lire une littérature
abondante à ce sujet sur les aspects conceptuels. Le e-learning dans sa version
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opérationnelle soulève des questions très concrètes auxquelles il faut (faudra) donner
des réponses (notamment chiffrées):
Quelle est la table des équivalences entre le temps de travail en présentiel et le
temps de travail en ligne ?
o Temps de cours en présentiel VS temps de cours en distanciel ;
o Temps de préparation d’un cours présentiel VS temps de préparation
d’un module de formation en ligne ;
Les réponses données à ces questions détermineront les modes de rémunération des
divers acteurs. Il est donc indispensable de produire une réflexion en ce sens pour
dépasser la formule incantatoire du « Le e-learning c’est mieux, c’est moderne » ou de
penser que le e-learning est un modèle économique permettant de réaliser des
économies de structures.
B. Comment est construite la formation en présentiel ? Un temps et un espace
contraint
Je vais ici reprendre une thématique que j’ai déjà largement évoquée dans de
nombreux billets et articles. Les dynamiques de formation sont construites sur un
principe d’unité de temps et de lieu. On rassemble la communauté apprenante dans
une classe, pendant un temps déterminé. C’est le principe de l’itération qui prévaut,
puisque le cadre fixé se répète selon une modalité déterminée à l’avance (emploi du
temps et déroulé d’un programme). Il y a donc un lien très fort entre la construction
temporelle et le mode de transmission des savoirs.
C. Qu’est- ce que le e-learning7 ?
Au risque d’apparaître byzantin il me semble nécessaire de partir de la définition du
concept même pour analyser correctement les enjeux temporels et les cadrages qu’il
induit. Dans tous les cas c’est une modification du paradigme de formation qui s’opère.
Au sens de l’union européenne le e-learning c’est :
« l’utilisation des nouvelles technologies multimédias et de l’Internet pour améliorer la
qualité de l’apprentissage en facilitant l’accès à des ressources et des services, ainsi
que les échanges et la collaboration à distance »
7 http://www.awt.be/web/edu/index.aspx?page=edu,fr,gui,080,010
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Pour le propos de cet article je veux retenir la notion de réseau numérique qui pose la
question de la distance entre les acteurs des dispositifs. Je parle ici de distance
physique et non pas de distance sociale. Je renvoie, pour cette question de distance,
aux écrits de Jacques Rodet sur le blog de t@d8
D. Le e-learning, une autre façon de penser la formation- Du temps contraint
(statutaire) au temps choisi (digitalisé )
Le titre de ce paragraphe peut paraître naïf, si on ne précise pas ce qu’est le temps
contraint et le temps choisi. Non ! La formation en ligne ne permet pas de travailler
comme on l’entend.
1) Le temps normé (statutaire)
La notion de contrainte ici n’est pas envisagée sous son aspect social mais sous
son aspect juridique. Le temps d’enseignement et le temps d’apprentissage ont
été fixés selon les corps dans une période pré digitale, il est logique que ce
temps ait été construit pour des formations inscrites dans un cadre formel où
apprenants et enseignants sont dans un face à face spatial et temporel.
2) Le temps choisi (numérique)
Le temps de travail à l’heure des réseaux numériques est malmené dans sa définition
traditionnelle. Plusieurs visions peuvent être défendues :
Seul le temps traditionnel, normé et contraint est acceptable. Dans cette vision le
e-learning n’a pas sa place, on défend un enseignement traditionnel non
numérisé, ou très peu. Je classe cette posture hors de mon propos actuel.
Le e-learning existe mais il se conçoit en plus des activités habituelles. C’est le
champ d’activité des pionniers, des acteurs convaincus des bénéfices d’un
enseignement instrumenté. L’effet local est dominant, on ne peut le déborder ou
que très difficilement.
Le e-learning existe et il est intégré comme variable du métier, il est défini, normé,
inscrit comme instrument d’un métier. Dans ce cadre, le temps numérique est
définit officiellement par des grilles de repères temporels et spatiaux. On est au
stade de la concorde digitale.
La scénarisation en e-learning oblige à envisager trésor sérieusement la question de
l’existence d’un temps numérique considéré comme un temps spécifique - Différent
8 Le blog de t@d http://blogdetad.blogspot.fr/?m=1
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mais complémentaire du temps présentiel synchrone. Il est nécessaire que les acteurs
des dispositifs aient une vision identique de ce temps.
E. Proposer une nouvelle grammaire du temps de formation
Lorsque l’on inscrit une réflexion articulée autour du e-learning on s’aperçoit que deux
systèmes sont convoqués et d’une certaine manière entrent en tension. Il ne s’agit pas
ici de camper sur une posture proche de la guerre des modernes contre les anciens, ce
serait inutile et contreproductif.
1) Normer un temps nouveau
Le temps de formation est un temps signifiant parce qu’il est bordé par des
réglementations. Le droit qui cadre nos relations de travail ne se comprend que par
rapport à un état de la société. Je prends le risque du raccourci pour dire que notre
temps de travail est cadré pour une relation de formation en présentiel synchrone.
Qu’en est-il donc concrètement dans une phase opérationnelle de formation en ligne ?
Comment est structuré le temps de formation construit dans ce nouveau paradigme ?
Je vais poser ici des questions auxquelles j’apporterai (je tenterai d’apporter) des
réponses dans l’année.
o Comment est défini le temps par la réglementation de la formation continue des
enseignants ?
o Comment le temps de travail est perçu par les enseignants. Cette question
impose de donner des éléments de réponse sous divers angles. Le travail vu par
les enseignants eux-mêmes en intégrant la notion de liberté pédagogique9, la
notion de temps de travail vue sous l’angle syndical, le temps de travail est-il
déjà pensé actuellement en tenant compte des spécificités de la FOAD ou est-il
une adaptation des structures anciennes pour gérer des problématiques
actuelles ?
9 La liberte pédagogique – L 912-1-1 du code de l’éducation “La liberté pédagogique de l'enseignant s'exerce dans
le respect des programmes et des instructions du ministre chargé de l'éducation nationale et dans le cadre du projet d'école ou d'établissement avec le conseil et sous le contrôle des membres des corps d'inspection. Le conseil pédagogique prévu à l'article L. 421-5 ne peut porter atteinte à cette liberté.”
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2) Le temps vu par les inspections
J’avais rédigé un article, pour une intervention à l’esen, qui s’intitulait le temps aveugle
des enseignants10. Il en ressort que la mission d’inspection est modifiée dans une
configuration de e.learning. il n’est plus possible de se rendre sur site dans le cadre
d’une classe, pendant une heure déterminée. Il faudra repenser cette mission tant pour
l’inspection que pour les enseignants.
3) Le temps vu par le chef d’établissement
Le chef d’établissement gère une structure relativement homogène faite de volumes de
cours, de volumes d’enseignements organisés dans un espace physique représenté par
des classes. Le e-learning ne supprime pas les volumes classes et les volumes
enseignements mais il les redéfinit fortement.
4) Le temps vu par les scénaristes
Le scénariste (potentiellement l’enseignant ou l’équipe de conception) est celui qui
devra penser le module de formation dans sa globalité. Il doit avoir une excellente
perception de la structure administrative et des liens d’interaction qui s’y construisent.
Le scénariste, outre sa capacité à construire les dispositifs aura l’obligation de
comprendre les dynamiques de la formation en ligne. Lorsque je parle de
compréhension du système j’entends une vision qui déborde le cadre strict de son
corps de rattachement. Un scénariste est potentiellement une personne qui peut
construire pour un public large dans la mesure où son travail peut s’inscrire au sein
d’une équipe pluridisciplinaire.
F. Articuler la réflexion sur le temps et l’espace
Modifier la réflexion sur temps c’est obligatoirement se poser la question sur l’espace.
Je reviens à mon argumentation première, le travail des enseignants et des apprenants
est cadré par un emploi du temps, ciment de l’unité de lieu et de temps. La vie
quotidienne d’un établissement est une succession de conflits territoriaux. Prenons
quelques exemples. Qui n’a jamais été témoin d’une friction entre professeurs à cause
d’une salle (banalisée) occupée indument (sic) ? Qui n’a jamais pu profiter de la salle
10
http://moiraudjp.wordpress.com/2011/07/08/temps-aveugle-des-enseignants/
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informatique parce qu’elle est réservée à l’année sur le même créneau horaire par le
même enseignant ? Qui a osé demander à son chef d’établissement, sans peur du
ridicule et du refus annoncé, la possibilité de faire cours de son domicile ?
Le temps cadré a des répercussions chroniques sur l’espace. Celui ou celle qui pense
le e-learning dans sa dimension temporelle ne peut s’affranchir d’une réflexion sur
l’espace.
J’aimerai affirmer que le e-learning en faisant tomber les murs fait tomber les problèmes
mais il n’en est rien. En revisitant les interactions entre individus, cette réflexion obligera
les décideurs à se positionner de façon claire sur les enjeux spatiaux.
À défaut de réponses à ce stade, j’ai un ensemble de questions :
o Accepte t´on que des enseignants travaillent hors les murs de l’établissement ?
o Hors le temps normé ?
o Pendant le temps normé ?
o Si la réponse est oui, quel est le statut du domicile pendant l’interstice
professionnel ?
o Si la réponse est oui, les textes prévoient-ils la référence explicite au travail à
domicile ?
o Les équipes pédagogico-administratives dans les établissements sont-elles en
capacité de penser et d’agencer un lieu spécifique dédié au e-learning ?
o Les établissements sont-ils en capacité de formaliser un cahier des charges
auprès des collectivités locales de rattachement, pour justifier une demande
d’investissement d’un lieu de e-learning ?
G. Propositions de grilles
Mon propos de fin d’article consistera à commencer à donner des pistes, des
orientations sous forme de grilles. Ce n’est qu’un début d’exploration mais il me semble
que ce travail fastidieux est indispensable. Ces propositions ne sont que le fruit de mon
travail réflexif, elles ne demandent qu’à être confrontées aux analyses et regards de la
communauté d’enseignants et de chercheurs qui pensent le e-learning.
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Formation en e-learning
Espace physique
Sur site Domicile Lieux intersticiels
Existence d’un learning center
Penser l’aménagement
de l’espace dédié
Métier avec des temps de
déplacement
d’établissement de bassin Mobile learning Espaces signifiants
Ce lieux est dédié parce qu’il
est pensé comme tel
Ce lieux est dédié parce
qu’il est pensé
comme tel
Concevoir une réflexion sur
l’espace privé comme lieu d’expression
professionnelle.
L’espace physique s’efface au profit
de l’espace numérique.
« Everywhere »
Prise de décision
Qui conçoit ces centres ?
Qui conçoit ces centres ?
Cet espace est-il reconnu comme
lieu pertinent formation ?
Le cadre organise son temps en
fonction de la lettre de mission qui lui
est fixée.
Collaboration Collectivité locale
/ chef d’établisement /
conseil pedagogique
Décision académique
Les textes prévoient que le domicile est
un lieu de formation reconnu.
Temps Temps normé hebdo11 Temps annexes
Propositions
Primaire Professeur des écoles exerçant son service hebdomadaire de 24 heures
- 18 h d’animations pédagogiques annuelles -60 h aide personnalisée - 24 h travaux en équipes -6 heures conseil école
Qualifier des heures d’animation
pédagogiques comme temps distant tout en tenant des comptes des
textes.
Secondaire
15 H ou 18 H
missions liées au e-learning
Intégrer le e-learning comme composante du service des
enseignants
Certifié 15 h
Agrégé 18 h
Nature des décharges et
/ ou des missions.
Formation initiale
F. continue
Élèves Profs
Dans les ESPE intégrer une formation au e-learning (en option)
11
BO numéro 32 du 28 août 2008 –décret n 2008-775 du 30/07/2008- JO du 03/08/2008
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Grille de temps
Préparation du cours
Présentiel Distanciel Pondération
1 heure 1 heure ? Un coefficient ? Pas de coefficient ?
statut Quel outil de comptage ?
Cours dispensé
Référence statutaire
En synchrone distant
En tutorat asynchrone
15- 18 heures Référence construite avant internet.
1 heure = 1 heure À la copie, au nombre d’élèves, forfaitaire
Quel outil de comptage ?
Conclusion
L’enseignement à distance est une réflexion qui est désormais dans les esprits et dans
les usages.
Il est possible que nous soyons encore au stade de la transposition de méthodes
artisanales, l’objectif étant de passer à des principes plus industriels. L’adjectif industriel
sera probablement lu de façon négative et péjorative, or ce n’est pas le sens de mon
propos. Je souhaite lancer une réflexion pour la scénarisation des processus de
formation en ligne avec comme trame centrale le temps et l’espace. Cette réflexion
devra engager l’ensemble de la chaîne de formation, du concepteur au champ du
politique. Le champ est vaste, j’espère pouvoir à l’aune de mes modestes contributions
aider à cette réflexion.
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