etudes psychologiques de c. g. jung à j. krishnamurti, par râm linssen

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  • 8/2/2019 Etudes psychologiques de C. G. Jung J. Krishnamurti, par Rm Linssen

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    E T U D E S P S Y C H O L O G I Q U E S

    C. G. JUNGJ . K R I S H N A M U R T I

    par

    Ram LINSSEN

    DITIONS TRE LIBRE 20, RUE PRE DEDEKEN

    BRUXELLES

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    INTRODUCTIONN c e s s i t d e l a p s y c h o l o g i e

    Au seuil de cette seconde moiti du XX* sicleo les progrs de la science et de la technique ralisentchaque jour une conqute nouvelle de lhomme sur letemps et l'espace, les rythmes de lexistence humainesemblent se prcipiter encore davantage.

    Le monde moderne semble danser sur un volcan.Les bouleversements continuels et la rapidit des cou-rants dopinions qui saffrontent oprent une slectionparmi les diffrents types psychologiques de l'espcehumaine.

    Les phnomnes physiques et psychiques ont sou-vent entre eux dtranges similitudes.

    La rapidit du droulement des vnements ac-tuels nous fait penser aux tourbillons des essoreuses

    slectionnant les lments constitutifs des liquides, met-tant ainsi en vidence des composantes de diffrentstypes molculaires. On peut de cette faon voir nette-ment les dlimitations des zones de composantes slec-

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    tionnes par ordre de densit, en fonction de la forcecentrifuge.

    Les faits innombrables qui agitent les hommes aumilieu des priodes critiques de transition comme nousen vivons, ont eux aussi, une action slective sur le planpsychique. Des types humains appartenant des den-sits psychiques diffrentes sont mis en relief avecune tonnante nettet.

    Nous pourrions diviser ce types psychiques entrois catgories ou phases.Premirement une phase de naissance du moi ,

    ensuite une phase de maturit du moi et finalementune phase de dpassement du moi .

    La premire phase est prindividuelle. Elle orien-te l'individu vers son individuation effective. Laseconde est celle de l'individuation. La troisime, cellede laccomplissement humain par le dpassement etl'utilisation de lindividuel nuprofit de luniversel.

    Il existe un paralllisme entre les diffrentes pha-ses de lvolution psychologique de lhomme en tantquindividu et les vnements extrieurs bouleversantles collectivits humaines.

    Dans la phase de naissance du moi la prise deconscience sbauche peine.

    Le moi ne pense pas encore par luimme. 11sidentifie au groupe dont il fait partie.

    Cest lesprit de la tribu, du troupeau. Lindividun'agit jamais par luimme, mais en fonction de motsdordre, soit politiques, soit religieux ou moraux. Sa vieest faite de soumission aveugle, dimitation. Telle taitdans un lointain pass lattitude de l'immense majoritdes hommes. Mais telle est encore aujourd'hui la men

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    talit de ceux qui subissent l'engouement des mouve-ments dits de masse .

    Au cours de la phase de maturit du moi , lej sens critique sveille. Le moi prend plus profond

    iment conscience de luimme. 11saffirme et tend versune autonomie progressive. 11 ne sincline plus aussifacilement devant les mots dordre. 11commence pen-

    ser par luimme et nest plus un simple animal de for-me humaine soumis aveuglment aux impratifs de sys-tmes standardiss.j Dimitateur quil tait, il devient crateur.' Lindividu psychologiquement mr ne se croit plus

    le centre du monde et peroit combien il est ridiculeet monstrueux de ne tout rapporter qu luiseul. Il tend sinsrer la juste place quil occupe dans la hirar-chie complexe des tres et des choses. Il repense plusprofondment les valeurs de la civilisation au sein de

    laquelle il sest dvelopp. A ce point de vue videm-ment, le langage des faits actuels est particulirementloquent.La mission fondamentale des gouvernements tait

    J dapporter la prosprit, la scurit et la paix. Cest ldu moins ce quavaient affirm les reprsentants detous les Etats en promettant aux hommes de tous les

    , peuples la prosprit, la scurit et la paix. En fait, lai prosprit est remplace par des crises conomiques,

    politiques et sociales de plus en plus aiges. Ces crisesengendrent un tat de tension et des dsquilibres dune

    y telle envergure, quil nexiste plus un endroit sur le*' monde o lhomme puisse se dire vraiment en scurit.Quant la paix promise et souhaite nen parlons paslLa guerre na jamais cess vritablement. En vertu des

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    moyens de destruction effroyables et de facteurs co-nomiques vidents, il est prouv qu'actuellement pluspersonne nest rellement victorieux dans une guerre.Les vnements le dmontrent de faon premptoire.A lissue de chaque conflit la situation est plus dsas-treuse que jamais.

    Hlas! le monde na rien appris! Avec un cynisme

    effarant les mmes fautes se commettent, les mmeszones d'influences se dessinent et prparent les plusgrands massacres de lhistoire.De toutes parts, depuis l'aprsguerre de 191418

    dabord, depuis laprsguerre de 193945 ensuite, maissurtout depuis les vnements de Core, des lgionsdhommes et de femmes de tous les milieux, se rendentcompte que les institutions destines les aider, loinde les librer, les crasent.

    La duperie est trop vidente.De toutes parts, les hommes se lvent et quit-

    tent le troupeau humain dans sa marche .folle verslabme. Ces hommes en 1920 taient peuttre 50.000.En 1951, ils sont peutctre centmillions, qui se

    refusent jouer le jeu diabolique responsable de tantde misres physiques et morales.

    Les dmentis cinglants et douloureux des bellespromesses, et la perspective de nouvelles catastrophesvidentes ont contribu lEVEIL DES INDIVIDUS.

    Lhomme qui a le courage et lintelligence de dou-ter de toutes les valeurs, de toutes ABSOLUMENT, ac-tive en luimme, linstallation de la phase de maturitpsychologique, prlude de sa libration.

    Cest ainsi que tout observateur attentif peut dis-cerner au del des ruines qui scroulent, la naissance10

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    d'une re nouvelle dont les possibilits sont remarqua-bles.

    Une vie nouvelle balaye les structures inadqua-tes la prodigieuse rvolution des faits actuels. Ellebrise les cadres trop troits et dsuets. Mais sur le plande lesprit les signes annonciateurs d'une renaissancemagnifique sont nettement perceptibles.

    Le travail fcond de l'me qui vit lucidement lesespoirs, les dceptions et les tourments du monde ext-rieur, parachve sa maturit. Elle prend conscience, dela fragilit de ses limites. Elle peroit quaprs avoirconquis richesses matrielles et spirituelles elle restemalgr tout un centre rigidement limit. Se connais-sant mieux ellemme, elle commence mieux conna-tre ce qui lentoure. Elle soriente ainsi vers la percep-tion de lUNITE FONDAMENTALE D LA VIE endpit de la MULTIPLICITE des formes.

    Vient ensuite la troisime phase: celle de la lib-ration du m'oi . Devant lvidence des catastrophesengendres par le seul dveloppement du mental,lhomme se demande si le processus habituel de lana-lyse ne devrait pas tre modifi ou dpass. Lme tend mettre en lumire les processus profonds qui prsident son existence et lEMPRlSONNENT. Au seuil de salibration, lhomme devient suprmement conscient deson conditionnement. Il parvient dmasquer la com-die quil se joue luimme et dcouvre dans un mer-

    veillement dAmour et de Lumire la ralit ternelle-ment prsente qui demeure en lui comme en toutesCest la fusion du fini humain dans l'infini di

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    vin grce au dpassement du processus mental ordi-naire.

    Nous remarquerons ici, une fois de plus, que les-sor inoui de la science et de la technique concourt llargissement du champ de conscience strictement in-dividuel, rgional ou national des sicles passs.Le dveloppement des moyens de communication,laviation, la radio, triomphent des barrires artificiellesriges par lignorance et lintrt sordide des hommes.

    Au seuil de cette seconde moiti du XX0 sicle,tout esprit qui na pas compris que le MONDE ESTUNE UNITE fait preuve de mentalit rtrograde.

    Les vnements, une fois de plus forcent les hom

    Les engins de destruction de lre atomique ontmis l'humanit devant cette tragique alternative :SUNIR OU PERIR.

    La ncessit imprieuse denvisager les vne-ments lECHELLE MONDIALE entrane un largisse-ment du champ de conscience des individus, les prdis-posant davantage la comprhension de l'universel etpar contraste, la prise de conscience de la fragilitde leurs limites gostes.

    Les hommes ont subi la magie toute puissante desconqutes extrieures rsultant de leurs dveloppementsintellectuels et techniques.Mais lacuit des crises grandissantes leur fait com-prendre que des valeurs essentielles rsidant en euxmmes ont t ngliges.12

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    Par un curieux paradoxe, plus lhomme triomphetechniquement du temps et se dplace rapidement,MOINS IL A LE TEMPS.

    11 a artout de moins en moins de temps pour seconnatre et panouir ses facults spirituelles.

    Cette carence du dveloppement spirituel engen-dre limmense abme existant entre les progrs intellec-

    tuels et techniques dune part et les progrs spirituelset moraux dautre part. Cette disparit entre lvolutionmorale et les progrs techniques est l'origine de tousnos dsquilibres.

    Les vnements forcent lhomme, qu'il le veuilleou non, perfectionner la science de son me, dontlvolution avait t mise en veilleuse devant les mira-cles prestigieux de la technique.

    La psychologie peine naissante la fin du19* sicle tient, ds prsent, une place prpondrantedans les proccupations humaines.

    Linfluence du psychique sur le physique est cha-que jour prise en considration par un nombre grandis-sant de docteurs pour le traitement des malades, pardes industriels pour le rendement de leur personnel,par des ingnieurs et des savants de tous les secteurs.

    Lvolution prodigieuse de la science et de latechnique ayant eu pour point de dpart une maturitintellectuelle naissant dans les individus, rebondit surles individus aprs mille dtours extrieurs et les for-cent mieux se connatre.

    L'histoire de l'volution intellectuelle et techniquedepuis Descartes jusqu' nos jours est lobjet dun cycleferm, de causes effets trs complexes mais particu-lirement intressant tudier.

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    Lesprit cartsien par sa technique analytique en-gendra tout le processus d'exprimentation scientifiquedont les grandes dcouvertes actuelles sont laboutisse-ment. Lorigine premire de ce mouvement se situe dansle dveloppement de lintelligence. 11 sagit donc, audpart, dun facteur d'ordre psychique, individuel etintrieur.

    Lhomme parvint rapidement capter les poten-

    tialits pratiquement illimites de la matire. Le dve-loppement prodigieux des coefficients de productionhumaine suite aux dcouvertes de la machine vapeur,du ptrole, de l'lectricit, engendra rapidement desbouleversements conomiques, politiques et sociaux.

    Les thories de Marx naquirent en grande partiede ces modifications EXTERIEURES.

    Lesprit humain tait dj aux prises avec la rvo-lution des faits extrieurs qu'il a luimme engendr,mais qui le forcent se reconsidrer luimme.

    Depuis lors, lascension des progrs techniquestait foudroyante. La capacit de travail de lhommepar les machines tait value vingt fois celle desres prhistoriques en 1920. Elle monta au cofficient400 en 1943. Le domaine industriel ntait pas encoreouvert aux possibilits extraordinaires de l're atomi-que.

    Au seuil de 1951, les progrs techniques, une foisde plus encourags par le spectre de la guerre, conti-

    nuent leur ascension vertigineuse.Nous sommes trs loin de la phase conomiquedite de raret .Tous les hommes de tous les peuplespourraient vivre dans labondance la plus large.14

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    Mais nos structures actuelles absurdes, quoiqueproduisant labondance, distribuent la misre

    La crise svit dans luniversalit des activits hu-maines, plus grave que jamais. Par ses progrs intellec-tuels et techniques, l'homme a mis en mouvement unprocessus qui lcrase. Cest lhistoire de lapprenti sor-cier. Les malheurs de notre poque proviennentils duseul dveloppement de notre facult de penser, puisque

    cest elle qui engendra lessor inoui de Ta science et dela technique? Ou bien lhomme estil victime dun d-squilibre entre ses fonctions psychiques ? Nos mtho-des dducation ne pchentelles pas de faon fonda-mentale en ne laissant aucune place au dveloppementdu sentiment et de lintuition ?

    Ces questions sont celles que des milliers dhom-mes se posent.

    Les problmes devant lesquels se trouve le mondeactuel obligent les hommes mieux se connatre. Ceci

    met en vidence le rle de la psychologie dans les con-jonctures prilleuses de la seconde moiti du XX*sicle.

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    Une tude complte des rapports existant entre lapsychologie de C.G. Jung et lenseignement de J. Krish-namurti ncessiterait en ralit plusieurs gros volumes.Parmi les richesses inpuisables dun tel sujet, nousnous bornerons pren dre quelques points pars maisessentiels mettant en relief les similitudes, la compl-mentarit et les divergences des deux enseignements.

    L e p r o b l m e m o n d i a l e s t u n p r o b l m e i n d i v i d u e l

    Le problme du monde est le problme de l'indi-vidu, nous dit le penseur indou J. Krishnamurti. 11 estde peu dutilit de modifier les cadres extrieurs, co-nomiques, politiques, sociaux, juridiques, si, pralable-ment ces rformes de surface on ne procde pas latransformation radicale du cur et de lesprit deshomm es destins utiliser ces structures nouvelles.

    La crise stend luniversalit des activitshumaines.Depuis un sicle elle ne fait que saggraver. Din-nombrables spcialistes nous prsentent les systmes,les formules relatives leurs domaines particuliers,

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    mais le malaise mondial ne fait quempirer. Les seulesmodifications du milieu extrieur ne sont quun empl-tre sur une jambe de bois.

    Ainsi que lexprime Krishnamurti (p. 14 Madras47) :

    Nous sommes dans un tat de confusion qui se manifeste dans le monde extrieur. Chacun de nous

    est responsable de cette dtresse. Du fait que nous avons provoqu cette catastrophe, chacun de nous doit laffronter. Cest cela que jappelle engendrer une nouvelle faon de penser et un nouveau point de vue. 11 nous faut par consquent comprendre LIMPORTANCE EXTRAORDINAIRE DE LINDI. VIDU A NOTRE EPOQUE.

    P. 16 : Penser juste me semble la solution duchaos actuel mais une pense juste ne peut tre engen-

    dre par aucune formule ni par aucune adhsion quoique ce soit. On ne peut penser juste quau moyen dela connaissance de soi.

    P. 221: Mais se connatre soimme est extr mement difficile; il est plus facile de suivre un sys tme, car il ne nous demande pas de penser beau coup: il suffit de se donner un parti de gauche ou de droite et ainsi de mettre fin notre processus de pense. Pour se rendre compte des activits de notre

    existence quotidienne, il faut une rflextion, une intelligence et une lucidit que trs peu de personnes sont disposes mettre en uvre: elles prfrent rformer la socit plutt que comprendre leurs pro18

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    prs activits, leurs propres sentiments, qui pourtant sont la cause de la dtresse et de la dvastation.

    Lminent psychologue suisse C. G. Jung exprimelu mme pense dans son ouvrage Psychologie undReligion, pp. 142 :

    Dans la mesure o les collectivits ne sont que des agglomrations d'individus, leurs problmes ne sont galement que des agglomrations de PRO BLEMES INDIVIDUELS.1 De tek problmes ne sauraient en aucune faon tre rsolus par une lgislation et des tours dadresse. Ils ne peuvent tre rsolus que par un changement gnral dattitude. Et ce changement ne sinstaureo pas coups de propagande par des assembles de la masse, ni mme par la force. IL COMMENCE PAR UNE MODIFICATION NAISSANT DANS LES INDIVIDUS. Il se manifestera dans une trans

    i formation de leurs prdilections et de leurs rpul sions personnelles, de leur manire de concevoir la vie, de leurs valeurs. Seule laccumulation, lagglo mration de tels changements individuels amnera une solution pour la collectivit.

    La similitude est ici vidente. Elle nous montre que^ dans la mesure ou les penseurs sont profonds, la solu

    lion quils prconisent est beaucoup plus spirituelle etpsychologique quconomique et politique.

    Krishnamurti et Jung ne sopposent toutefois pas la ralisation de rformes conomiques et sociales, maiscellesci ninterviennent qu titre second et driv de-vant la transformation spirituelle de lindividu qui estfondamentale.

    1U L

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    Suite aux bouleversements du monde au seuil decette seconde moiti du XXe sicle surtout, un nombregrandissant de penseurs s'orientent vers cette concep

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    L i n d i v i d u e l e t l e c o l l e c t i f

    C. G. Jung et Krishnamurti sefforcent de nousacheminer vers la socit parfaite par ltablissementdans l'individu dune attitud e nouvelle, o loin de'exclure, lindividuel et le collectif se compltent.

    La tche que nous propose luvre de C. G. Jung,iious dit Jolan Jacobi (La psychologie de C. G. Jung,p. 166) consiste RELIER LES DEUX CONTRAIRESINDIVIDU et COLLECTIF dans la PERSONNALITE

    INTEGRALE EN RAPPORT AVEC TOUS LESDEUX.Cette personnalit intgrale ne peut tre ralise

    que par la connaissance de soi, nous dit Krishnamurti.Et cette connaissance de soi nest pleinement rvleque dans nos rapports avec nos semblables, par ltude

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    liste dans ses conclusions. Si son point de dpart estlindividu son aboutissement est la dcouverte et laralisation d'une Ralit suprme devant laquelle sef-fondre le masque de la sparativit et saffirme lunitde lessence profonde des tres et des choses.

    Pour moi, nous dit Krishnamurti (p. 15) l'im portance de l'individu est suprme, NON PAS DE

    > LINDIVIDU EN CE QUIL S'OPPOSE A LA SO CIETE. Lorsque nous considrons lindividu et sa fonction dans la socit, il nous faut voir la totalit de son tre, et NON LE SEUL ASPECT DE SON ACTIVITE INDIVIDUELLE QUI PEUT ETRE ANTISOCIALE.

    et (p. 97, Krishnamurti parle ): Etre, cest tre en rapport avec les autres, il

    n'existe pas dtre isol. Nos rapports humains sont un tat de conflit intrieur et extrieur: lextension du conflit intrieur devient un conflit mondial. Vous et le monde ntes pas spars, votre problme est le problme du monde; vous portez le monde en vous, sans vous il nest pas. L'ISOLEMENT NEXISTE PAS, il nest pas dobjet qui ne soit reli aux autres.

    L'volution rcente de la physique et de la bio-logie nous montre quel point, tout dans lUnivers estsolidaire de tout.

    Les lois dinterdpendance et dinteraction nousforcent de plus en plus considrer les anciennes no-tions disolement comme excessives et arbitraires.

    Ceci ne peut nanmoins excuser la mentalit quiprside aux mouvements de masse , l'Unit ne pou22

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    vnnt tre dcouverte que par une prise de conscienceprofondment individuelle.

    Le lien qui nous relie luniversel se situe en ef-fet dans lintimit de notre structure psychique, au deldes couches les plus profondes de la conscience.

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    L e c o n s c i e n t e t l i n c o n s c i e n t

    Pour Krishnamurti et Jung, le conscient ne consti-tue quun infime fragment de notre moi total .

    Krishnamurti nous enseigne que la partie de nousmmes que nous connaissons avec une relative clart neconstitue quune couche superficielle et fragmentaire denotre structure psychique. Celleci est extraordinaire-ment complexe et se trouve forme de couches innom-brables portant au plus profond dellesmmes les m-moires obscures dvnements se perdant dans la nuit

    des temps.(P. 18Ojai 1944): La plupart d'entrenous mal heureusement, essayent de rsoudre leurs problmes superficiellement, cestdire avec CETTE PETITE PARTIE DE LESPRIT QUE NOUS NOMMONS LE CONSCIENT. OR NOTRE CONSCIENCE EST SEMBLABLE A UN ICEBERG DONT LA PLUS GRANDE PARTIE EST IMMERGEE EN PRO FONDEUR ET DONT UNE SEULE FRACTION SE MONTRE AU DEHORS.

    Nous avons connaissance de cette couche super ficielle, mais cest une connaissance confuse TAN DIS QUE LA PARTIE INTERIEURE, LA PLUS GRANDE, LE PROFOND INCONSCIENT. NOUS24

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    . EST A PEINE PER CE PTIBLE , ou, si elle le devien t. nous en prenons conscience travers des rves.

    Si nous dsirons vraim ent com prend re no tre problme, il nous faut dabord dissiper la confusion du conscient en la sentant aussi largement que pos sible, avec comprhension et Impartialit. Ensuite, dans cette claircie du conscient lucid, l'esp rit int rieur peut se projeter.

    Pour Jung, le conscient nest quun rejeton tardifde linconscient... La partie de nousmmes que nousconnaissons est dfinie dans la terminologie jungiennecomme le Moi ..

    Par Moi , nous dit Jung, jentends un complexede notions qui forme le centre de mon champ CONS-CIENT et me SEMBLE dune grande CONTINUITE etdune grande identit soi (Psychologische Typen,p. 629).

    Ce Moi , nest dans la conception jungiennequun aspect priphrique et trs superficiel de la tota-lit psychique, de la personnalit intg rale queJung dsigne comme le Soi .

    Le Moi nest que le conscient. Le Soi estla totalit du conscient et de linconscient.

    Pour Jung, linconscient est la base de toutpsychisme individuel. Linconscient, ditil, a prcd le conscient. Il constitue le donn primordial, do ne cesse de surgir le conscient . (PsychologischeTypen, p. 690).Les contenus de linconscient sont forms par lesmodes typiques de raction de lhumanit depuis sesorigines dans les situations psychiques les plus varies:lutte contre les forces de la nature, dfense contre des

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    puissances suprieures, relations entre sexes, comporte-ment dans la haine et lamour, attitude devant la mort,peur sous toutes ses formes.

    Nous ne pouvons nous empcher de reproduire lepassage suivant emprunt lHomme la dcouvertede son me de C. G. Jung (p. 19) dfinissant admira-blement les fonctions du conscient et de linconscient:

    Linconscient peroit, a des intentions et des pressentiments, des sentiments et des penses tout comme le conscient. 11 n'y a quune seule diffrence essentielle entre le fonctionnement conscient et le fonctionnement inconscient de la psych : le conscient en dpit de son intensit et de sa concentration, est purement phmre, accomod seulement au prsent immdiat et son propre voisinage; il ne dispose par nature que des matriaux de lexprience indivi duelle; rpartis peine sur quelques dcennies.

    Sa mmoire pour le reste est artificielle et com pose, essentiellement, de papier imprim. Combien diffrent est linconscient ! Ni concentr, ni intensif, mais crpusculaire jusqu' lobscurit, il y gagne une extension immense et il renferme, cte cte, de faon paradoxale, les lments les plus htrognes, disposant, outre une masse inajsignable de percep tions subliminales, du trsor prodigieux des stratifi cations dposes au cours des vies des anctres qui, par leur seule existence, ont contribu la diff renciation de lespce.

    Comme Jung, Krishnamurti voque frquemmentlexistence des stratifications dposes au cours dupass , dont l'accumulation en couches successivesforme l'immense complexit de lgo.26

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    La mmoire krishnamurtienne ne comprend eneffet pas seulement celle du conscient fait de papier....prim , mais aussi celle beaucoup plus profonde detoutes nos expriences, de toutes nos russites, de tousnos checs, de toutes les victoires et de toutes lesdfaites des tres vivants qui nous ont prcd dans lanuit des temps. *

    Si linconscient pouvait tre personnifi , crit

    Jung (p. 19), il prendrait les traits dun tre humain collectif, vivant en marge de la spcification des sexes, de la jeunesse et de la vieillesse, de la nais sance et de la mort, fort de lexprience humaine peu prs immortelle de un ou deux millions dan nes. Cet tre planerait sans conteste au dessus des vicissitudes des temps.

    ... ce serait un rveur de rves sculaires, et, grce son exprience dmesure, un oracle aux

    pronostics incomparables. Car il aurait vcu la vie de lindividu, de la famille, des tribus, des peuples, un nombre incalculable de fois, et il connatrait tel un sentimen t vivant le rythme du devenir, de lpanouissement et de la dcadence.

    Le conscient et linconscient forment une totalitpsychique, dont Jung a particulirement tudi le com-portement et les lois.

    Les principes jungiens de lnergtique psychiquefont nettement entrevoir lexistence dune loi de con-servation de lnergie psychique offrant quelque simili-tude avec les lois de conservation connues en physico-chimie.

    Cest en vertu de ces lois que la FONCTIONCOMPENSATRICE DE LINCONSCIENT A LE

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    GARD DES ACTIVITES DU CONSCIENT se trouveexplique.

    Lactivit du conscient nembrasse qu'un champdaction, dont l'objet est strictement limit aux exi-gences immdiates du moi superficiel.

    Elle sadapte aux conditions extrieures. Cet excsd'nergies tournes vers lextrieur et lgosme mes-

    quin est COMPENSE par lactivit de l'inconscient.L'inconscient obit des mobiles intrieurs, des loisissues de lexprience humaine collective. Nous verronsultrieurement que cette activit compensatrice oppo-se au conscient par linconscient, se manifeste dans lerve, auquel Jung et Krishnamurti accordent unegrande importance.

    Krishnamurti nous fait galement comprendrelexistence dun principe de conservation psychologi-que. Le Soi jungien cestdire la totalit duconscient superficiel et de linconscient profond estconstamment agi par un instinct de conservation. Au-trement dit, le principe de compensation conscientinconscient rsulte dune autodfense de la totalitpsychique particulirement attentive sauvegarder sacontinuit, sa scurit, en se grossissant chaqueseconde, non seulement de son pass individuel, maisaussi de l'inconscient collectif qui se continue en elle.

    Le je krishnamurtien comprend la totalit desaspects gocentriques de l'existence, depuis le corpsphysique jusquaux motions, aux penses, des profon-deurs les plus subtiles de l'inconscient.Ainsi quon le voit, le moi krishnamurtien estassez vaste. Il comprend toutes les fonctions psycho-logiques dont les indous et les thosophes ont donn28

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    une nomenclature dtaille, depuis le corps physique,le corps thrique , le corps m otionne l , le corps mental infrieur (rpa manas), jusquau corps mental suprieur (arpa manas).

    Pour ceux accoutums la psychologie aurobindienne, le moi krishnamurtien comprend videm-ment le surmental et le supramental . Krish-namurti sopposant la conception dun mental divin

    ou cosmique .En un mot, il comprend tout ce qui, dans de nom-breuses philosopnies indoues, vdiques et bouddhistesform erait lindividualit relativem ent perm anentemais qui au terme du cycle du samsara disparat.

    Krishnamurti sattaque donc la racine fonda-mentale du moi. Que celuici soit celui dune vie,ou dune succession dexistences, il est essentiellementimpermanent et illusoire.

    Le moi rsulte dun processus dassociationpsychologique continuellement luvre. Ce processusdassociation psychologique est command par uneforce apparemment irrsistible : linstinct de conserva-tion du moi , le dsir de dure, la soif de devenir.

    Le moi krishnam urtien (qui correspondraitplutt au Soi jungien), aime se sentir comme uneentit rellement durable, doue dune sorte de soliditpsychologique. Ce sentiment de solidit psychologique

    lui est fourni par lactivit mentale, les motions, lessensations. Cest la densit et la succession de cellesciqui confrent au moi limpression de continuitdans laquelle il se complat.

    Tel est, dans ses grandes lignes, linstinct de con-29

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    servation qui prside au processus du moi . La pre-mire tche laquelle nous invite Krishnamurti rsidedans la prise de conscience de ce processus opration

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    L q u i l i b r e d e s f o n d i o n s p s y c h i q u e s

    Jung classe les fondons psychiques en quatreactivits fondamentales : la pense, lintuition, le sen-timent et la sensation.

    La pense et le sentiment sont dfinis par luicomme fonctions rationnelles.

    La sensation et l'intuition sont dfinies commefonctions irrationnelles.

    La pense est la fonction qui, par un acte deconnaissance, tend faire comprendre le monde. Elle

    est aussi une fonction dadaptation au monde tendant expliquer de faon logique ce quelle rencontre. Leprocessus de la pense est un processus dvaluation enfonction du connu. Cest aussi un jugement, un choixbas sur les mmoires conscientes et inconscientes dupass.

    A loppos de la pense qui tablit des relationsabstraites et tire des conclusions logiques, le sentimentsaisit le monde en lvaluant en fonction de ce qui luisemble agrable ou dsagrable.

    En un mot, comme le fait remarquer Jung, lapense et le sentiment procdent par EVALUATION..La pense ACCUEILLE OU REJETTE en fonc-

    tion de ce qu'elle value comme VRAI OU FAUX. Le

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    sentiment ACCUEILLE OU REJETTE en fonction desimpressions de PLAISIR OU DE DEPLAISIR.

    En opposition par rapport la pense et au senti-ment qui sont dfinis comme fonctions rationnelles,Jung dsigne lintuition et la sensation comme fonc-tions irrationnelles, parce quelles nutilisent pas de

    jugements, ne procdent pas des valuations, ni des

    choix.Lintuition et la sensation n'interprtent pas. Ellessaississent les choses telles quelles sont, l'une sur leplan abstrait, lautre sur le plan concret, sans interven-tion du raisonnement.

    La sensation est une perception qui apprhendelaspect extrieur des choses, mais ne saisit delles queleurs particularits strictes dans ce quelles ont de super-ficiel et de priphrique.

    Son champ dinvestigation, quoique prcis puis-

    que Janet lappelait la fonction du rel est limit l'aspect extrieur des choses.La sensation ne peroit que le dtail, jamais l'en-semble; toujours la partie et jamais le tout.

    Lintuition est la fois plus intrieure et plusglobale.

    Comme le dit Carrel lintuition peroit sponta-nment sans les artifices du raisonnement, les liens quiunissent entreelles les parties dun tout , et en fonc-tion desquels ces parties ont une signification.

    Pour Jung, lintuition est une perception intrieuredes possibilits inhrentes aux choses.Nous passerons sous silence les diffrentes inter-

    prtations de la fonction dintuition, chaque auteur32

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    envisageant le sujet sous des aspects diffrents, telpoint quils sexcluent.

    Retenons ds prsent que Jung met en relieflexistence dun principe de compensation entre lesdeux axes pensesentim ent et sensationintui-tion .

    Le fonctionnement de ce principe de compensa-tion est considr comme indispensable lquilibre

    humain.Toute surdiffrenciation dune fonction s'ef-fectue au dtriment des autres et amne le dsqui-libre.

    Krishnamurti insiste galement sur la ncessitdun quilibre entre nos diffrentes fonctions psycholo-giques.

    Lenseignement krishnamurtien ne nous incite passeulement raliser lquilibre de nos fonctions, maisil nous engage en faire une vritable synthse.

    Lamour, nous dit Krishnamurti, est le lubrifiantde la pense . Un cur sans amour est comme une rivire qui

    na plus deau pour abreuver ses rives. LINTUITION krishnamurtienne se ralise par

    LEQUILIBRE DE LA RAISON ET DE LAMOUR,de la pense et du sentiment.

    Cependant, si nous voulons tre plus prcis, nousdirons que pour Krishnamurti LINTUITION est aussile DISCERNEMENT DE LA REALITE PROFONDEDES CHOSES ET DES ETRES.

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    B u t p r o f o n d d e l q u i i i b r e p e n s e - s e n t i m e n t

    Lquilibre de la raison et de lamour, de la pen-se et du sentiment a pour but profond de permettreleur utilisation par une fonction suprieure.

    Il va de soi, que si la pense et le sentiment nesont pas harmoniss, les tensions qui rsultent de leursdiffrences de direction et dintensit, rendent impos-sible toute rceptivit aux messages dune fonction plusleve.

    De COORDINATRICE QUELLE ETAIT, la

    PENSEE DOIT ETRE COORDONNEE, utilise parune fonction qui la dpasse.Comme Jung, Krishnamurti considre le sentimentintimement li la pense dans le processus du moi .Leurs surdiffrenciations sont k l'origine de tous lesconflits.

    La seule solution aux dsquilibres qui svissentdans luniversalit des activits humaines, rside dansla CONNAISSANCE DE SOI, dont linvitable cons-quence est le DEPASSEMENT DE SOI et la vie unitive. Mais le dpassement de soi ne peut se faire sansl'quilibre de nos fonctions psychiques.

    Dans lhomme la dcouverte de son me ,Jung voque la mme ncessit (p. 19). Il nous faut

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    acheminer notre malade vers cette rgion o nat en lui lUNITE, le LIEN AVEC LUNIVERSEL, o se produit cette naissance cratrice qui entred chire la mre et qui est, au sens le plus profond , la causede toutes les dissociations de la surface.

    Po ur Krishnamurti, il n y a de libert v ritablequ partir de cette dco uve rte et de cette expriencedu Rel.

    Encore fautil dire que les fonctions psychologi-ques pensesentiment doivent subir, dans lenseigne-ment krishnamurtien, une mtamorphose totale.

    Pour employer une image qui nous est person-nelle et ne peut par consquent engager Krishnamurti,la Ralit suprme est Une, homogne, ternelle.

    Nous pourrions la comparer la lumire blanchequi est une avant que le prisme ne la dcomposedans le spectre color.des sept couleurs fondamentales.

    Chaque homme est une sorte de prisme vivant,rig en vase clos et limit dans le temps et lespace, travers lequel tente de sexprimer la Ralit Suprmeet Unique des profondeurs.

    Cette Ralit passe travers le prisme vivantque nous sommes et se dcompose en un faisceau de proprits et de fonctions particulires.

    Parmi le faisceau de proprits et de fonc-tions particulires que nous empruntons lnergiede la Ralit fondamentale qui nous habite, nous mani-festons la fonction am our , la fonction intelli-gence , etc.

    De mme que la lumire blanche nest pas spcia-lement le bleu, le vert, le rouge, le jaune rvls etdissocis grce lintervention du prisme, de mme la

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    Ralit profonde nest pais seulement intelligence, pen-se ou amour tels quils rsultent de nos divisions fami

    De mme que la lumire blanche est en sommela synthse, l'apothose indivise des coloris particu-liers, de mme la Ralit que nous portons en nousmmes et au del de nousmmes est, FORTIORI,

    l'apothose HOMOGENE et INDIVISE des propri-ts et des fonctions qui se trouvent divises enCe serait lune des raisons pour lesquelles Krishna-

    murti ne parle plus jamais de la pense ou du sen-timent comme fonctions isoles, mais emploie inten-tionnellement lexpression espritcur ou pensersentir , ou encore pensesentiment .

    Lintuition krishnamurtienne nest autre que lelibre fonctionnement en nous et par nous malgrnos limites de surface * de cette plnitude formantlapothose de ce que nous nommons intelligence et amour .

    Jamais la seule intelligence ne pourra connatrela Ralit, nous dit Krishnamurti. Que pouvezvousconnatre, nous demandetil? Vous he pouvez connatre que ce qui est pass, que ce qui est sta tique, que ce qui est mort. Vous ne pouvez connatre la Vrit qui est continuellement cratrice, vivante. (Sarobia, 1940.)

    A ia question suivante : Ne peuton penser

    lIncr, Dieu? Krishnamurti rpondait (Krishnamurtiparle, p. 186) ; Cela qui est cr ne peut penser lIncr. Il ne peut penser qu sa propre projection qui nest36

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    pas le Rel. Estce quune pense qui est le rsultat du temps, des influences, des limitations peut penser lincom m ensurab le ? Elle ne peut penser quau connu. Ce qui est connaissable nest pas le Rel, ce qui est connu ne cesse de reculer dans le pass, et ce qui est pass nest pas lEternel. Vous pouvez spculer sur l'inconnu, mais vous ne pouvez pas y penser.

    11 sagit donc de nous dlivrer de limmense far-deau du PASSE, form des mmoires innombrables,responsables de la solidit du moi , si nous voulonsnous ouvrir la spontanit divine du Rel. Ce seraitlla signification profonde du dpouillement du vieilhomme voqu dans les critures.

    Le problme central consiste dans la ralisation

    dune ADHESION totale au Prsent Eternel et sansdure du rythme divin.Cette ralisation ncessite la pleine descente delinconscient dans le conscient, linconscient tant pr-cisment ldifice le plus considrable du TEMPS ETDE LA DUREE.

    Comme lexprime Jolan Jacobi, lminent disciplede Jung (p. 27) :

    Si les quatre fonctions pouvaient tre places dans le domaine du conscient, on pourrait parler dun individu PARFAIT ; et plus loin : quel quun en seraitil capable, il pourrait donc se d pouiller du dernier reste terrestre qui se trouverait enco re en lui .

    Telle est cependant lexigence formule par Krish37

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    namurti en insistant cependant sur le fait que lhomme libr peut et doit vivre dans le monde.

    Lessentiel rside dans la libert intrieure duntel homme, se dissociant chaque instant du fardeaudu pass pour raliser ce que Carlo Suars appelle laCONTINUELLE PRESENCE AU PRESENT.

    Jung, Bergson et Krishnamurti se retrouvent ici,comme en dautres points dailleurs.

    Pour Jung, lhomme ordinaire ne possde pas sesfonctions psychologiques en main; cest elles qui noustiennent .

    Autrement dit, ainsi que lexprimait Bergson, nous sommes beaucoup plus agis que nous agissonsnousmmes . Telle est lorigine de nos servitudes.

    Nous sommes rellement agis par nos fonc-tions psychologiques, nous fait comprendre Krishna-murti, aussi longtemps que nous ne les connaissons pas

    et que nous ne nous connaissons pas.La libert vritable rside dans le fait de ne plustre agi par des mots dordre, ni extrieurs, ni int-rieurs, par des systmes de penses, par des confectionsmentales. Nous devons tre attentifs au Chant dela Vie , qui ne sexprime que par lpanouissement denotre originalit cratrice, en nousmmes et par nousmmes. Ceci diffre un peu de Jung, ainsi que nous leverrons ultrieurement.

    La dcouverte de la vrit, nous dit Krishnamurti,ne rsulte jamais de lacte mental. La ralit, ditil,nest pas un rsultat. Elle existe par ellemme. Elleest autogne. Il ny a pas ddifice spirituel construire.Tout est l... mais un immense travail de clarification,38

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    ut que dentretenir la continuit du moi sous lecouvert de transformations continuelles, qui ne rsol-vent jamais le centre du problme.

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    L e r l e d u r v e

    Pour Jung, les activits du rve forment linstru-ment principal de la thrapeutique.Le rve est, pour lui, le moyen le plus commode

    pour accder aux contenus de l'inconscient. Sans lhypothse de linconscient, le rve n'est

    quun absurde agglomrat de bribes parses, dchets de la vie diurne. (Lhomme la dcouverte deson me, p. 282.)

    La plupart des psychanalystes accordent une gran-de importance aux activits oniriques.

    La mthode jungienne se diffrencie cependant desautres par le fait que Jung nenvisage pas les phno-mnes du rve comme rsultant seulement de conflitspersonnels, mais participant galement de linconscientcollectif.

    Les seules psychologies du conscient sont inca-pables dexpliquer le rve. 11sagit l dun fonctionne-ment particulier, indpendant de la volont ou des aspi-rations du moi . Le rve est nettement dnu din-

    tention.Ainsi que lexprime admirablement Jung : ONNE REVE PAS, ON EST REVE .Notre conscient ignore les mobiles profonds qui

    prsident lactivit onirique.40

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    Ltude du PRINCIPE DE COMPENSATION del'nergtique psychique jungienne explique admirable-ment le processus des rves.

    Lactivit consciente du moi est faite dans unetension psychique de tous les instants : tension crepar le vaetvient des penses qui naissent et quimeurent, troubles intrieurs de lmotion, de la pas

    Cette notion de tension psychique constante,inhrente lactivit mentale, est particulirementmise en relief dans la pense krishnamurtienne.

    Le mobile profond de toutes les activits psy-chiques est en effet pour Krishnamurti linstinct de con-servation du moi , le dsir de devenir , la soifde continuit, de dure.

    Pa r le sommeil, lactivit m entale consciente setrouve suspendue. Les tensions quelle implique tantdisparues, les activits compensatrices de linconscientpeu ven t se manifester.

    Cest toujours dans la DETENTE, que les couchesprofondes de notre psych peuvent tendre vers la sur-face.

    Il est impossible dans le cadre dune tude aussisommaire, de donner un aperu du mode dinterprta-tion jungien de lactivit onirique. Rappelons seulementque Jung nous enseigne que les personnages trangersqui meublent nos rves rvlent souvent des aspects denousmmes que nous ignorons.

    Krishnamurti emploie un langage semblable. La conscience consciente ditil (Krishnamurti

    Madras 1947 p. 202) est activement occupe toute la41

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    journe, soit gagner de largent, soit une routine detravail, soit une occupation technique.

    Lorsque vous vous endormez, quarrivetil ? Lesprit superficiel est relativement calme, mais la conscience ne consiste pas simplement en une cou che superficielle; ELLE A DE TRES NOMBREUSES COUCHES.

    Chacune de ces couches possde sa propre conscience. Lorsque la couche superficielle se calme, ces couches se projettent en elle; c'est alors que vous Il existe naturellement des rves superficiels

    et des rves qui ont un sens. Les rves superficiels sont engendrs par les ractions du corps, pa r exem pie une indigestion. D autres rves sont des missions des couches les plus profondes de la conscience.

    Peuton comprendre le contenu total de la

    conscience, la librer, de sorte que ce contenu nait nul besoin de se projeter sur la couche superficielle pendant le sommeil ? En d'autres termes, peuton tre si lucide, dune lucidit exclusive de tout choix que toutes les couches de la conscience transmettent leurs missions tout le temps et que la conscience interne devienne un tout indivisible?

    Par cette question fondamentale, dcoulant dail-leurs logiquement de lenseignement jungien, et par larponse quy donne Krishnamurti, le penseur indou

    nous fait entrevoir une fois de plus lintressante com-plmentarit des deux enseignements. Lorsque la conscience consciente est calme, elle peut se livrer des occupations superficielles sans que son calme en soit troubl. Vous verrez alors qu

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    plus on est conscient, plus lobservation est passive ment ngative, vive et dpourvue de choix, et PLUS LES CONTENUS DE LINCONSCIENT MONTENT A LA SURFACE; on na aucun besoin de les inter prter, parce que, ds linstant quils surgissent, ils sont compris. Si vous faites cette exprience, vous prouverez une libert extraordinaire, parce que vous raliserez ltre total. La conscience, qui est maintenant fragmentaire, sera intgrale; il ny aura plus de luttes dans la conscience et celleci sera par consquent amour, elle sera totale, non fragmente. A ce m om ent il nest plus besoin de rves. (p. 207 ).

    Le rythme de vie simple vers lequel nous orienteKrishnamurti, ralise une condition de dtente psychi-que continuelle, permettant aux contenus de lin-conscient de se rvler au conscient au cours de la viequotidienne.

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    L e d p a s s e m e n t d e s p r o b l m e s

    Les lecteurs ou auditeurs occidentaux des conffences de Krishnamurti sont souvent dsempars, voiredus et irrits. Bon nombre dentre eux critiquentKrishnamurti parce quil ne rpond jamais aux ques-tions quon lui pose, quil tourne autour du problmesans le rsoudre, ou encore quil semble chapper parla tangente en employant des explications de mta-physicien.

    Comment rpond Krishnamurti lorsquune ques-

    tion prcise relative un problme particulier lui estpose ? Supposons par exemple que lui soit pos le pro-blme de la guerre ? Nous avons tous la conviction, etKrishnamurti peuttre le premier, quil est ncessairedtablir un gouvernement mondial, et de mettre envigueur un mode d'conomie distributive.

    Le penseur indou ne donnera pourtant jamais larponse PARTICULIERE inhrente ce problme. 11sefforce de nous faire entrevoir directement la causepremire et fondamentale do jaillissent tous les pro-blmes particuliers. 11 trahirait la vrit en nous don-nant la rponse tant souhaite car elle ne parviendraitqu' rsoudre les symptmes momentans mais non la

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    En un mot, Krishnamurti nous met face faceavec le fabricant de problmes que nous portons ennous: lgosme, lignorance.

    11 y a la guerre, parce quil'y a des frontires, desnationalismes, des nations riches et des nations pauvres,des exploiteurs et des exploits, des distinctions ra-ciales, sociales, idologiques.

    Mais pourquoi toutes ces barrires existentelles?Parce que chacune dentre elles nourrit le moi , len-tretient. Si nous parvenons nous connatre nousm-mes nous dit Krishnamurti, nous librerons le moi deses avidits, car nous en aurons compris les conditionsde ridicule et dasservissement. A ce moment, le probl-me de la guerre, se trouve pour NOUS, PSYCHOLO-GIQUEMENT rsolu, non comme problme particuliermais parce que nous connaissant nousmmes, nous

    nous serons DEPASSES.Ds linstant o lavidit et la soif de devenir du moi se trouvent dpasses, tous les problmes,tels que orgueil, sensualit, jalousie, etc. se trouvent r-solus, NON DANS LEURS RAPPORTS PARTICU-LIERS AVEC LE MOI , MAIS PARCE QUE LE MOI QUI LES PRODUIT SE TROUVE PSYCHO-LOG IQUEM ENT DISSOUS.

    Jung emploie un langage semblable dans DasGeheimnis der goldenen Blte . p. 2122 (cit dansJacobi p. 147).

    a Les problmes les plus grands et les plus impor> tants sont au fond tous insolubles; et ils doivent ltre, car ils expriment la polarit ncessaire, imma> nente tout systme autorgulateur. ILS NE PEU

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    >. VENT JAMAIS ETRE RESOLUS, MAIS UNIQUE MENT DEPASSES. Toutefois, le fait de pouvoir dpasser les problmes personnels de l'individu sest rvl correspondre une hausse de niveau du cons cient. Un intrt plus lev et plus vaste est apparu lhorizon, grce quoi le problme insoluble a per du de son urgence. Il n a pas t rsolu logiquement en soimme mais il a pli en face dune orientation de vie nouvelle et plus puissante. Il na t ni refoul, ni tendu inconscient, mais sest montr simplement dans une autre lumire, et, ainsi, il est galement de

    Comme la dailleurs crit Vanderleeuw dans Laconqute de lIllusion tous nos problmes sont aufond des pseudoproblmes. Quil s'agisse du problmede la cration, du but de lunivers, de la richesse mat-rielle ou intellectuelle, tous sont conditionns par lop-

    tique mentale spciale de celui qui les pose.Le sage indou Ramana Maharishi (Voir Etudes collection des Trois Lotus) se demande avec raison Qui pose la question, Qui sert de support auproblme. Telle est lorientation quont pris de grandspenseurs et de grands sages de notre temps.

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    R a l i s o n s - n o u s , l o n o u s s o m m e s

    Les diffrentes transformations qui rsultent dela descente progressive de linconscient dans leconscient nimpliquent jamais une fuite du monde.

    Jung nous demande dtre attentif aux diffrentesimpulsions de linconscient, sans nous identifier elles.Cest prcisment ce que recommande Krishnamurti.

    Dans Psychologie und alchemie Jung crit:notamment, parlant des impulsions de linconscient quil ne faut pas sidentifier elles, ni les fuir; siden

    tifier ces impulsions serait do nner libre cou rs ses instincts, tandis que les fuir signifierait les refouler; mais ce qui est demand ici est fort diffrent; il SAGIT DE RENDRE CES IMPULSIONS CONS CIENTES, DE RECONNAITRE LEUR REALITE, ET ELLES DEVIENDRONT DU MEME COUP INOFFENSIVES.

    La fuite devant linconscient rendrait le but de la procdure illusoire. Il faut tenir bon et prouver

    dans toutes ses pripties le processus amorc par lautoobservation, pour le RELIER LE MIEUX. POSSIBLE AU CONSCIENT.

    11 ne faut donc rien modifier dans le cadre ext-rieur au sein duquel se poursuit lexistence matrielle..

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    La profession, les responsabilits familiales, le sport, lesexercices ne doivent changer.

    Un tel langage est familier dans lenseignementkrishnamurtien.

    LA PLUPART DES GENS SIMAGINENT QUE LA VERITE EST CACHEE, QUELLE EST EN DEHORS DE LEXISTENCE QUOTIDIENNE. EN DEHORS DE LESPRIT HUMAIN ORDINAIRE QUELLE EST INACCESSIBLE A LHOMME DONT LES PENSEES ET LES SENTIMENTS NE SONT PAS EXCEPTIONNELS.

    ON PENSE QUE POUR TROUVER LA VE RITE IL FAUT SE RETIRER DU MONDE, acqu rir des qualits, des connaissances, connatre certai ns douleurs et certaines joies. Au contraire, jaffirme que DES LINSTANT OU VOUS COMPRENEZ LA, VIE TELLE QUELLE SE DEROULE DEVANT

    > CHACUN DE VOUS, VOUS COMPRENEZ LA VERITE. LEFFORT DOIT ETRE FAIT LA OU LON EST, EN SOIMEME, AU MILIEU DE TOUTES LES CONFUSIONS, DES IDEES LES PLUS CON> TRADICTOIRES.

    Mais nous ne voulons pas accepter proprementet simplement les situations dans lesquelles nous noussommes installs par manque de discernement.

    Nous prfrons fuir. Fuir nest pas rsoudre. Ilnous semble plus commode de modifier les circonstan-ces extrieures au sein desquelles un conflit sest rvl,que de transformer notre cur et notre esprit.

    Cet enttement prfrer la transformation du48

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    milieu ou nous vivons celle de notre tre profond nersulte pas seulement d'une paresse ou dune inertieintrieure. Le moi veut se rserver. Ce rythme delhabitude est une manifestation de son instinct de con-servation.

    Au lieu de nous fuir par des changements de ca-dres extrieurs, par notre adhsion de nouvellescroyances ou de nouveaux systmes, ou par de nou-

    velles activits, nous devrions nous affronter, nous voirtels que nous sommes. L, rside pour Krishnamurti, lepremier pas raliser.

    Il faut, nous dit Jung SE RECONNAITRE SOI MEME, COMME CE QUE LON EST DE PAR NATURE, PAR OPPOSITION A CE QUE LON VOUDRAIT ETRE (cit par Jolan Jacobi p. 144).

    Cest l que rside la grande difficult. Ds quenous prenons conscience dun tat dtre, ou dune v-

    rit qui nous semble peu flatteuse, nous vitons de laregarder en face et nous nous promettons instantanmentdans un tat idal, vers loppos de la situation quenous condamnons.

    Ceci nous entrane dans la ronde sans fin des pai-res opposes qui loin de librer le moi lasservit deplus en. plus.

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    Les quelques points qui prcdent, relevs de ci,de l, dans les uvres de Jung et Krishnamurti font net-tement entrevoir la fois des paralllismes frappants,une certaine complmentarit, mais non des identits.Ceci devient surtout vident si nous nous en rfrons la totalit des deux enseignements.

    Comme la plupart des psychologues et psychanalistes, Jung aspire raliser lintgration de la personne;la descente de linconscient dans le conscient permet-

    tant au Soi de se raliser intgralement, d'tre uneentit cohrente, harmonieuse, quilibre.Si Krishnamurti poursuit certains moments lemme but, ce nest qu titre provisoire.

    Quoique Jung reconnaisse quil raut conduirelhomme vers cette rgion profonde de luimme orside luniversel, la personnalit totale, le Soi semble tre pour lui lultime sommet de lvolution psy-chologique et spirituelle.

    Dans son ouvrage Wirklichkeit der Seele p.

    190, Jung envisage cette ralisation totale de la person-nalit comme inaccessible. La personnalit, en tant que ralisation complte de la totalit de notre tre, est un IDEAL INACES

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    > SIBLE. Mais LE FA IT D ET RE INACCESSIBLE nem pche nullement quon le poursuive...

    La divergence est ici assez nette. Non seulementkrishnamurti nous invite raliser lintgration de lapersonne par la descente totale des contenus de lin-conscient dans le conscient, mais l'harmonisation dua Soi qui en rsulte nest pour lui quune tape.

    Pour Krishnamurti, le moi dans son intgralit

    (c.d. le Soi jungien) est le rsultat dun proces-sus dautoidentification avec le milieu physique, mo-tionnel et mental.

    Il y a, dautre part, une contradiction entre le Soi , point particulier, limit, et son essence, qui estUniverselle, (voir Comdie psychologique de C. Suares).

    Dans linconscience relative de la norme humaine

    qui n est veille qu aux couches superficielles de sastructure psychique, la conscience de cette contradictionnexiste pas.

    Ds linstant,ou se ralise la personnalit totale ,les limites du Soi se rvlent ellesmmes dans cequelles ont dillusoire, dimpermanent, dphmre. Lacontradiction de base, jadis inconsciente devient IN-TENSEMENT EVIDENTE.

    Dans la ralisation de lunification conscient

    inconscient , le Soi peroit avec une acuit profon-de le dsquilibre existant entre son processus fonda-mental dexistence, son devenir dune part, et lEtrela Ralit divine dans son universalit, dautre part.

    Lun est rgi par un instinct de conservation, une

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    soif de continuit de dure, l'autre est complet en luimme, il EST.

    Dans lenseignement krishnamurtien, la connais-sance de soi oriente l'homme vers cet tat de luciditau cours duquel le soi devient CONSCIENT DESON CONDITIONNEMENT, de son avidit de de

    La claire vision des servitudes innombrables aux quelles lentrane sa soif de devenir provoque uneimmobilisation de son processus fondamental dexis-tence. Cette immobilisation ne rsulte pas dun acte devolont du Soi ce qui serait faux mais dunecomprhension impersonnelle.

    Lorsque cesse lavidit de devenir surgit larvlation de la Ralit divine qui est Amour, Lumire,Pure intelligence et batitude.

    Cest, comme le dirait Louis Lavelle un envahis-sement du conscient et de linconscient par un lanqui les dpasse infiniment.

    Cependant, trs peu de personnes sont conscientesde ce processus dautoidentification en elles. Cette prisede conscience est cependant indispensable la libra-tion humaine. Elle nest atteinte que par la personna-lit totale du langage jungien.

    Krishnamurti, contrairement Jung envisage cette intgration , cette ralisation de la personnalit tota-le comme accessible mais elle nest pas un but, ni unefin en soi.

    Nous pourrions prciser le point de vue en insistant52

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    sur le fait que la personnalit totale nest pas pour #Krishnamurti un tat dfinitif possdant un carac-tre de permanence. 11sagit plutt DUN POINT CRI-TIQUE, dune acuit de conscience telle, que les limi-tes au sein desquelles sinscrivait le Soi svanouis-sent instantanment comme si elles se trouvaient sou-dain volatises soit par un courtcircuit intrieur, soitpar une sursaturation de conscience.

    A ce moment que se passetil ? 11 ne reste plus du Soi que son support matriel le corps , et sur lesplans psychiques, une transparence totale de lmotionet de la pense, un silence, une srnit, une dtentedans lesquels et par lesquels les rythmes de la sponta-nit divine peuvent sexprimer librement, sans rencon-trer de rsistances .

    Autrement dit la personnalit totale , de coor

    donatrice quelle tait, devient coordonne , dirige.Et ce langage nest encore que celui dune premire ap-proximation. Dans ltat rel de libration, il ny a plusde dualit. Nous comprendrons aisment quen effet,LA PERSONNALITE TOTALE NETANT QUUNPOINT CRITIQUE RESPONSABLE DE SA PROPREAUTODISSOLUTION, ELLE N'EXISTE QUUNEFRACTION DE SECONDE.

    Les penseurs vdiques et thibtains considrent

    lhomme libr comme une coquille vide. Vide dequoi ? Vide de toute raction personnelle, de tout de-venir goste mais pleine de la vie divine.

    A ceux que ce langage surprend nous rappelleronsces paroles de Jsus dans le Sermon sur la Montagne :

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    Heureux les simples en esprit, le royaume des cieuxleur appartient .

    Cette simplicit nest videmment ni incohrenceni absence dintelligence. Elle est au contraire un tatde transparence dans lequel sexpriment les plus hautesformes de lintelligence et de lamour.

    Ce qui tonne loccidental difiant la pense cestque le sommet de lintelligence, de la lucidit ne se ra-lise que dans un tat ou le MENTAL EST DEPOUILLEDIDEES.

    Une autre diffrence essentielle entre Jung etKrishnamurti rside dans le fait que Jung estime quilest trs dangereux pour lhomme de sen remettre soimme. Nous reprenons ciaprs ce passage deluvre de Jolan Jacobi (p. I 19).

    Cest pourquoi le dialogue du catholique avecson confesseur est une institution sage de lEglise; pourle croyant pratiquant, ces moyens arrivent encore uneprofondeur beaucoup plus grande.

    Krishnamurti, comme Vivekananda nous incite nous tenir debouts tout seuls. Il ny a pas l prsemption intellectuelle, mais simple respect des lois de lanature et accomplissement normal des possibilits hu-maines.

    Certes, Krishnamurti nous enseigne que nous nousconnaissons nous mmes dans nos rapports avec nossemblables. Mais cette connaissance de nousmmes r-sulte dune lucidit de tous les instants au cours de la-quelle,nous sommes suprmement vigilants, alertes, at-tentifs aux moindres mouvements de la pense, delmotion, de nos gestes, de nos paroles.54

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    Le fait que le processus de la confession offre uncertain paralllisme avec les mthodes psychanalytiqueslibratrices de linconscient, nest pas une raison suffi-sante pour encourager ladhsion aux implications mul-tiples de la confession ENVISAGEE COMME SACRENiENT.

    Lexamen de conscience a certes du bon et le faitde nous librer du fardeau de nos peines, de nos secr-

    tes difficults est favorable lpanouissement de la viepsychique.Cependant, la dtente qui rsulte du fait que nous

    livrons dautres ce que nous avons sur le cur ,peut tre ralise par lattitude intrieure que nous sug-gre Krishnamurti. Elle est trs loigne dune rmis-sion des pchs , cette dernire tant psychologique-ment et mtaphysiquement une erreur lourde de cons-quences.

    Lorsque nous vivons simplement, naturellement,sans chercher briller, sans prendre des masques, nouslibrons spontanment les contenus de linconscientsans recourir la confession.

    Une autre notion, spirituellement et psychologiquement FATALE est celle de lindispensabilit des inter-mdiaires entre lhomme et le divin.

    Nous rappellerons que la descente des contenus delinconscient dans le conscient ncessite une attention et

    une persvrance considrables et que dautre part, lescouches de l'inconscient se situant dans l'intimit la plusprofonde de la structure psychique de chaque individu,ne peuvent se rvler que par un processus profond-ment individuel.

    11 y a incompatibilit radicale entre le but lointain55

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    et inaccessible (selon Jung) de la personnalit totale etladhsion un systme quelconque de pense ou le cul-te des intermdiaires .

    Le premier devoir dune me qui dsire se conna-tre est un devoir dautonomie.

    Le premire tche qui nous incombe est celle dudoute. Nous devons repenser tous les problmes, met-tre en doute toutes les valeurs dune civilisation fausseque nous avons mcaniquement adopte.Jung reconnat luimme le fait que nous sommesplus possds par nos facults que nous les possdons.11slve avec raison contre la psychologie de masseou lindividu est cras,' mcanis, spirituellement inerte.

    Il tombe sous le sens que toutes les fois que nousdonnons notre adhsion un systme dides, noussommes agis . Lorsque nous nous plions aux exi-gences de dogmes, nous ne sommes plus des individus,ni des personnalits totales , nous dit Krishnamurti.

    Avant quun esprit puisse se connatre, il faut luipermettre de fonctionner. Et pour quun esprit fonc-tionne, il lui faut la libert.

    Mais cette libert ne sacquiert pas sans peine.Ldifice sur lequel repose notre moi sest construitdepuis des millions dannes par le travail lent et per-svrant de processus, qui, dans leurs dbuts sont encontradiction avec la condition de libert suprme in-hrente lessence profonde des tres et des choses.Dcouvrir ces processus luvre en soi, pour sen li-brer ensuite, telle est la tche gigantesque que nousdevons accomplir.

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    La ralisation de cet accomplissement ncessite,laffranchissement de tout le pass, de tous les contenusde linconccient.

    Carlo Suars nous en donne une comprhensionbien nette dans La comdie psychologique (p. 236).

    La courbe du subjectif, dornavan t, ne peu t plus se rsoudre, et parvenir son accomplissement, en crant sur la plante des espces nouvelles. Elle ne peu t se rsoudre que dans des individus humains, dis>. poss rechercher la PERM AN ENCE DY NAMIQUE. DU MONDE QU ILS A VA IENT PERD UE ds LOR IGINE DE LE UR MOI , ET DISPOSES A DETRUIRE, DANS CE BUT, LA PERMANENCE STATIQUE DE CE MOI .

    La sve de la Terre ne nous laisse aucun rpits Dans une prodigieuse lutte contre la Nature, les co ques fermes que sont les moi, ont construit pen dant des sicles un univers fantastique, dlirant, es sentiellement contradictoire. CETTE LUTTE CON TRE LA NATURE EST UN PHENOMENE NATU REL. CHAQUE MOI ABRITE EN LUI, DANS LE TREFONDS DE SA SUBSTANCE, LINSTANT ETERNEL DONT IL EST ISSU, CETTE ADHE RENCE A LINSTANT ETERNEL DONT IL EST LA CONTRE PARTIE, DONC LA NEGATION. II labrite comm e une coquille d uf abrite la vie futu re qui la cassera un jour. Phno m ne la fois collec tif et individuel : nou s somm es entrs dans une re, peuttre plus longue et plus douloureuse que celle des guerres des Dieux et des Titans : L'ERE DES

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    GUERRES ENTRE lHumain et le divin. ENTRE LA CONSCIENCE ET LE MYTHE, ENTRE LE PRESENT ET LE PASSE.

    Si lHumain est dj n, le sousconscient est loin d'tre encore terrass, et les moi en masse compactes, en congrgations terribles se lvent par tout pour lutter contre la vie.

    De tous temps, les traditions, les dogmes, les pr"jugs ont agi comme principes conservateurs du passsur lequel s'est difi le moi .Toute la difficult pour lhomme rside dans le

    fait quil est victime de ses propres crations et quausurplus, les principes conservateurs du pass lui conf-rent un sentiment de scurit.

    Imaginons un homme dbarass de tout cet chafaudage statique du moi, nous dit Carlo Suars (p. 239). 11 retrouverait un perptuel tat de naissan ce consciente, ltat plastique, souple, de ltre qui peroit la prsence de linstant, et cet tat, qui ne serait plus touff tout moment par les dpts cris talliss du Temps, serait une rsonnance dynamique de tous les instants chacun de leurs prsences. LA PERSONNALITE DE LINDIVIDU SE RECREE RAIT, elle serait la courbe unique de ses nouvelles ractions, de ses ractions qui tant dornavant en harmonie parfaite avec le prsent, ne seraient plus vrai dire des ractions, MAIS DES EXPRESSIONS PARTICULIERES ET IMPERSONNELLES de la vie cratrice en UN POINT. Cet individu serait chaque

    j> instant la consommation de tout son pass, donc du pass de toute la race, donc du pass de tous les58

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    > temps et de tous les univers. IL SERAIT ABSENT> A LUIMEME ET PRESENT AU MONDE EN> CONTACT AVEC LES CHOSES DONT IL DIS CERNERAIT AVEC CERTITUDE LA VRA IE VA LEUR LESSENCE LES NOMS QUELLES POR> TENT AU REGARD DE LETERNITE. Mais il se> rait devenu comme invisible luimme, en ce sens quil ne pourrait plus se situer dans lunivers des en

    tits qui disent je suis moi.

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    F o n c t i o n h u m a i n e d e c r a t i o n e t n o n d i m i t a t i o n

    Lhomme est destin crer, tant sur le plan de lmatire que sur celui de lesprit.

    La confusion et lirresponsabilit existent dans lemonde actuel parce que les hommes se sont borns copier aveuglment, obir, imiter servilement ce quileur a t prsent.

    Ce manque de sens critique, cette absence de ri-chesse intrieure est l'origine de tous les mouvementsde masse et des catastrophes quils engendrent.

    Affirmer que lhomme en tant quindividu, est priori incapable de ne compter que sur lui commele font de nombreux dogmes engendre lexploitationde ceux qui profitent de sa prtendue faiblesse natu-relle.

    Etant incapable de trouver en lui, les richesses in-finies qui rsident cependant en lui, lhomme a rclamles chefs , les miracles extrieurs.

    Le culte de lautorit, et les mouvements de massesrsultent dune faute d'ducation fondamentale : cellepar laquelle on inculque aux hommes la ncessit desen remettre dautres queux mmes pour rsoudreleurs problmes intrieurs.

    Nous avons vu comment le destin a sanctionn ces60

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    faillites de lhomme que nous nommons le culte dautruiet les mouvement de masse .

    L, ou cesse le jugement individuel, l o les fa-cults d'autocritique se trouvent obnubiles, les hom-mes sidentifiant aux ides quils imitent, deviennent lesfanatiques dun systme au nom duquel sexcuseront lescrimes les plus odieux. Lhistoire nous en fournit din-nombrables tmoignages.

    Lhomme ne peut spanouir dans la plnitude deses fonctions psychologiques qu la condition dtrelibre. Un esprit conditionn ne peut fonctionner libre-ment. Les croyances et les dogmes constituent les piresentraves au libre fonctionnement de lesprit.

    Krishnamurti respectant scrupuleusement les con-ditions de libert et de spontanit du Rel, nous incite nous librer des cristallisations religieuses, estimantquelles immobilisent la pense de faon ngative. Cettenotion est trs loigne de Jung.

    Nous ne citerons que ce passage de Jolan Jacobi(p. 146). Jung na rien ajouter un conscient qui se tro uv e encore labri dan s la foi, et dans la symboli que du dogme; de mm e il encourage tout point de vue celui qui cherche le chemin qui le ramne lEglise.

    Nous savons que les contenus de linconscient nedescendent dans le conscient que dans la dtente et lasouplesse mentale. Loin de donner la souplesse et la d-tente psychiques, le dogme fixe lesprit, le fige dans uneattitude, le cristalise. Les croyances et les dogmes, loinde dvelopper lme, la broyent dans un moule rigide-ment limit et lendorment par les consolations facilesauxquelles seuls les faibles donnent leur adhsion.

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    Le processus de cette faiblesse est clairement ex-pliqu par Carlo Suars dans la Comdie Psychologi-que p. 207.

    Aussitt que le je merge de sa souscons cience juste assez pour dire je suis moi , cest dire, pour se constater, cette constatation qui est un doute, lui fait peur. 11 a peur parce quil a

    dout (inconsciemment) de sa ralit, mais il ne se rend pas compte que cette peur provient dun doute. Il ne veut plus perdre pied, il met tout en uvre pour se prouver que ce moi est rel. Il se rfugie dans une congrgation, et se sent sauv . Dans les con grgations chacun a besoin de sentir autour de lui la foi des autres. Ainsi s'apaisent la peur et le doute.

    Mais si ce moi , rejetant toute peur, ne craint pas den arriver un jour aux pires extrmits, se perdre, danser sur labme, se prcipiter dans le vide, navoir plus de lieu ou reposer sa tte, bref, si, pouss par le dynamisme magnifique du doute absolu, il ne craint pas de dissocier son tre de tout, de tout absolument; dmerger chaque fois, de rejeter les nouveaux piges que lui tendent tous les objets du monde pour lassocier eux; de dtruire la nouvelle entit qui se reconstruit sur les ruines de lentit qui scroule; ce moi , transfor m en une torche incandescente brle impitoyable ment tout ce qui est lui, pour se prouver que ce ntait pas encore lui, alors un jour, devenant su

    prmement conscient, et ne trouvant plus rien quoi sassocier; CE QUI RESTE DE LUI SAUTE TOUT ENTIER DANS LA FLAMME ETERNEL LE QUI CONSUME TOUT. SAUF LETERNEL,62

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    ET, ETANT MORT EN TANT QUENTITE, IL NEST PLUS QUE VIE.

    Pour en arriver cet accomplissement final, le Moi do it rejeter tou tes les vr its quon lui offre,> il ne doit ob ir personne, il do it tre insoumis, iL doit saffranchir de toute imposition, de toute auto rit spirituelle, de toute croyance, de toute doctrine, de tout idal, de tout conformisme et de toute ide

    acquise .Ce nest jamais en fuyant nos expriences et enprenant refuge dans des consolations, des croyanceset des dogmes que nous librerons linconscient. Etny atil pas de refuge plus vident que les croyanceset les dogmes ? Il est pou rtan t facile de com prendreque toutes les fois que nous nous en remettons uneautorit extrieure, un systme dides, un prten-du intermdiaire entre le divin et nousmmes, nous

    nous vadons et prenons une orientation diamtrale-ment oppose celle qui simpose et dcoule simple-ment de la nature et de la structure des choses et destres.

    A ce sujet, nous pourrions dire que le monde ex-trieur avec sa multiplicit dapparences est construitsur un monde intrieur plus homogne. Ceci est djvrai en physique. Linfiniment grand repose sur linfiniment petit.

    Les aspects extrieurs de lunivers interviennent titre second et driv devant les aspects intrieursdune nergie qui forme la base unique et laliment es-sentiel des choses et des tres.

    Ainsi que lexprime Jung, le conscient, plus63

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    extrieur, nest quun rejeton tardif de linconscient.Ds le point de dpart actuel, lhomme vivant est

    rig en vase clos ici la surface. 11 doit sorienter deprofondeur en profondeur, travers les couches succes-sives du conscient et de linconscient afin den appr-hender tous les contenus et de ce fait, sen librer. Maisil est entendu qui si cette libration seffectue par lescontacts avec autrui, donc des lments extrieurs nous, elle ne peut se faire que par un processus profon-dment individuel au cours de ces contacts. Nous de-vons tre suprmement attentifs nous librer de tou-tes les contraintes psychologiques du milieu ambiant,sans quoi nos contacts avec autrui ne sont plus rels, nirvlateurs.

    Ainsi que lexprime Krishnamurti, un homme quien rencontre un autre travers une croyance, le voit travers le prisme dformateur de ses prjugs, de sesides prconues, de ses clichs dogmatiques. 11 y a lautant de facteurs qui fausseront son optique et lui li-vreront des lments dnus de toute objectivit.

    Rien nest plus absurde de prtendre que descontacts profonds et spirituellement vivants peuventtre tablis entre deux hommes qui sabordent en ayantchacun lesprit charg dides fixes, un mental fossilisdans le dogme. De tels tres ne pensent plus. Pour euxles problmes sont soidisant rsolus. Dans de tels con-tacts, nous dit Krishnamurti, il ny a quajustements,que coercitions, calculs et mfiance.

    Aucune spontanit, aucun ouverture dir.e, au-cune dtente, ne sont possibles entre deux esprits dog-matiques.Lalternative est claire. Ou bien l'homme se

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    dilivre de lemprise des dogmes et accde la sponta-nit, ou bien il reste dans lattitude de rserve que luicommande une prise de position bien prcise.

    La plus haute fonction de lhomme est pourKrishnamurti la connaissance de soi parce quelle ou-vre la porte la dcouverte du divin.

    En nous laissant embrigader dans un systme depense nous enlevons toute libert lesprit.

    Rien ne nous loigne plus du divin que la fixa tion de la pense. DIEU EST LIBERTE ET SPONTA-NEITE. UNE SPONTANEITE NE SE CONQUIERTPAS PAR UN ACTE DE VOLONTE ET MOINS EN-CORE PAR LIMITATION DUN MODELE.

    LA LIBERTE NEST PAS UN RESULTAT .nou s dit Krishnamurti (p. 63 Madras 47) qui sousentend par l que la Libert vritable est celle deDieu; et que Dieu existant p a r . luimme, ta nt au -

    togne , nest pas un rsultat . POUR DECOUVRIR LE VRAI DIEU IL FAUT QUIL Y AIT LIBERTE; MAIS VOUS NE POU VE Z PAS ETRE LIBRE DE DECOU VRIR LORSQUE VOTRE ESPRIT A LHABITUDE DE,, PENSER DANS DES LIMITES BIEN DETER MINEES.

    Pour recevoir la Vrit, il faut avoir la libert de penser clairement, profondment. Il faut une

    lucidit sans choix, sans condamnation, sans identi fication. La discipline empche la pense, et CEv NEST QUE DANS LA SPONTANEITE QUE LA LIBERTE PEUT ETRE REELLE, QUE LINCOM> MENSURABLE PEUT ETRE CONNU.

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    Une autre diffrence essentielle entre Jung etKrishnamurti rside dans le fait que la base de la m-thode jungienne est une analyse, un travail mental.Lhomme tudie le contenu de ses rves, il les juge, ilen tire des conclusions bases sur l'exprience du

    Le processus krisnamurtien, tout en paraissant in-tellectuel; mtaphysique et par consquent trs men-

    tal, fait appel une certaine cessation de lactemental, ainsi qu la libration intgrale de tout lepass : que ce pass soit celui hrit, celui faonn parlducation, celui des mmoires obscures inhrentes linconscient collectif, ou encore celui de nos propresexpriences.

    La plus haute fonction de la pense est de se d-montrer ellemme le bien fond de son silence afindtre utilise, coordonne par une Ralit qui la d

    Pour Krishnamurti, la pense qu'elle se situedans le conscient ou dans linconscient est un rsul-tat du pass. Tout son effort tend nous faireaccder lexprience dune Ralit divine toujoursrenouvele, ternellement prsente. 11 existe donc uneincompatibilit entre nos mmoires et nos penses quisont un rsultat du pass, dune part, et dautre part laRalit divine, existant par Ellemme au rythme dun

    jaillissement prodigieux qui La fait toujours nouvelleimprfigurable, impensable, incommensurable.

    Cest ce quexprime Krishnamurti (p. 131). Krish-namurti parle : La mmoire est de l'exprience accumule; ce

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    qui est accumul est le connu, le connu est toujours du pass. Avec le fardeau du connu peuton dcou vrir lintemporel? Ne devonsnous pas tre libres du pass si nous voulons prouver par exprience lincommensurable? Ce qui est construit, c..d. la mmoire, ne peut pas comprendre ce qui ne lest pas. LA SAGESSE NEST PAS UNE MEMOIRE ACCUMULEE MAIS UNE SUPREME VULNERA

    B1LITE AU REEL...Cette dernire phrase est essentielle dans la pen-se Krishnamurtienne, car elle rsume l'attitude sp-

    cifique de son enseignement.Si Krishnamurti nous incite nous dlivrer de

    lemprise de nos prjugs, de nos croyances, de nosdogme3, de nos disciplines extrieures et intrieures,ce nest pas pour nous transformer en maniaques dela ngation, et moins encore pour permettre notregosme de satisfaire ses fantaisies innombrables.

    Il sagit que nous nous mettions dans les condi-tions telles que la ralit que nous portons en nouspuisse sexprimer librement.

    Lorsque nous avons pleinement compris le pro-cessus fondamental de notre moi et toutes les ser-vitudes auxquelles nous entraine notre soif de de-venir , cette comprhension est ellemme libratriceet engendre une srnit profonde, vivante qui ne r-sulte pas dun acte de volont.

    Krishnamurti nous dit ce sujet (Krishnamurtiparle p. 65) : Cet aband on du moi nest p as un acte de volon t. Ce voyage vers laut re rive nest pa s un acte dlibr. La Ralit nat de la plnitude du

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    silence et de la sagesse. Vous ne pouvez pas inviter la Ralit, elle doit venir vous, vous ne pouvez pas choisir le Rel, cest lui qui doit vous choisir.

    La majeure partie des divergences entre Jung etKrishnamurti pourrait provenir de leur formation trs

    diffrente. Jung est avant tout mdecin. Sa fonction depsychiatre consistait ramener lquilibre chez desmalades mentaux. Cest donc en psychothrapeute queJung aurait constat lutilit des dogmes religieux, nonpour lpanouissement des individus normaux, maispour remdier des dficiences. Cest ultrieurementquil a gnralis ses conclusions et scarte nettementde l'attitude krishnamurtienne.

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    L e n s e i g n e m e n t d e J . K r i s h n a m u r t i

    Les paragraphes qui suivent nont pas la prten-tion de donner une vue globale de la pense krishnamurtienne, et nengagent que nousmmes. Nous con-seillons aux lecteurs dsireux dapprofondir les u-vres du grand penseur indou, la lecture des ouvragesdits par les soins du Krishnamurti Writings Incor-poration . Quoique Krishnamurti ne puisse pas treconsidr comme un penseur dO rient stantlibr des contenus de linconscient personnel et de

    linconscient collectif d Orient . nous reprodu irons, la demande du public, quelques passages offrant unesimilitude avec certains penseurs dOrient.

    LIMMOBILITE CREATRICE DU REEL.Tout leffort de Krishnamurti consiste faire

    prendre conscience de la strilit des efforts de l'goet de ses manifestations dans le domaine de lespritaussi bien que dans la matire. Il demande que nousdevenions pleinement conscients de nos vasions con-tinuelles par lesquelles se satisfait inlassablement notresoif de durer et de devenir .

    Ce que lhomme pense, il le devient, nous dit unvieux proverbe indou... En fait, nous pouvons obtenir

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    et devenir ce que nous dsirons. Il suffit dy mettre le

    Si nous voulons obtenir le pouvoir et les richessesde la matire, nous pourrons nous dpenser jour etnuit par un travail inlassable et, nous aidant de la ruse,nous finirons un jour par rcolter le fruit de nos efforts.

    Si la richesse matrielle nest plus de nature nous intresser,^ notre ambition et notre recherche deprestige peuvent sexprimer dans le domaine de l'esprit.L aussi, il suffit de payer le prix, de faire leffort n-cessaire.

    Si nous dsirons briller par l'rudition, par lha-bilet rsoudre des problmes mathmatiques com-plexes, il suffit de faire leffort ncessaire. Avec volon-t, persvrance, unit de direction, noua pourronstoujours vaincre les obstacles et arriver nos fins.

    Et alors? En sommesnous plus avancs pour au-tant) Ne nous apercevonsnous pas que nous sommestoujours un point limit dans le temps et lespace,n il y a quelques annes, mourant dans quelques an

    II faut que nous sentions que nous tournons enrond, QUE NOUS SOMMES PRISONNIERS.

    En dautres termes, Krishnamurti nous incite nous connatre pleinement, dmasquer en nous lacomdie inconsciente que nous nous jouons nous

    mmes chaque instant. Il nous dmontre avec unesimplicit et une vidence souvent dconcertantes quel point la plupart de nos activits prtendues spi-rituelles ne servent qu satisfaire la soif subtile de de-venir de notre go. Aprs avoir t du sur le plan de70

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    la matire, il se met en tte de conqurir celui delesprit.

    La lecture et surtout la mise en pratique de len-seignement de Krishnamurti nous montrent quelpoint notre pense est influence, conditionne parune foule de notions fausses, superficielles, aveugl-ment acceptes. De plus en plus nous nous rendonscompte quel point les vieilles traditions depuis long-temps dpasses par les faits exercent sur la plupartde nos spiritualismes supposs volus, une magie tou-tepuissante dont le prestige est loin dtre teint.

    LA LUCIDITE VISAVIS DE SOIMEME,ditil (Kr. parle, p. 36) PERMET DE DECOUVRIRLE MODELE, LHABITUDE, LE CONDITIONNE-MENT DE LA PENSEE, LAUTOLUCIDITE ET LACONNAISSANCE DE SOI, QUI ENGENDRENT LEPENSER, DEVOILENT LIMMOBILITE CREATRI-CE DE LA REALITE Dans ses discours rcents, Krishn amu rti insistecontinuellement sur limmobilit du Rel, sur le calmedu pensersentir .

    Dans dautres textes, plus anciens, il insistait surle Mouvement de la ralit suprme, sur le modedexistence intense et dynamique de lessence univer-selle, quil opposait lexistence statique de lgo.

    Y atil contrad iction dans ces affirmations ?

    Ces contradictions sont plus apparentes que r-elles. Parlant dun domaine chappant tous les op-poss, mais employant le langage humain inhrent auxopposs, il est invitable que des affirmations contra-dictoires dans la forme expriment une vrit identiquequant au fond.

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    En 1936, Krishnamurti dfinissait la sagesse dela faon suivante : complt vulnerability is wisdom .A ce moment, il voquait frquemment lexpression mouvement de la vie. ou extase du mouvement dela vie . La sagesse tait donc dfinie comme la par-faite vulnrabilit, ou parfaite rceptivit au mouve-ment de la vie. Autrement dit, ltat de libration est

    celui au cours duquel le rythme universel sexprimelibrement dans l'individu qui sest affranchi de toutesles rsistances statiques pour se transformer en simpleinstrument de la Prsence Divine. Cette Prsence rev-tait alors un caractre fluide et dynamique.

    Vous ne pouvez connatre la Ralit par lapense dit Krishnamurti.

    Vous ne pouvez connatre que ce qui nest plus.La ralit est continuellement vivante, cratrice.

    Dautre part, en 1944, (Ojai 1944, p. 36). il d-

    finit la plus haute sagesse apparaissant avec limmo-bilit CREATRICE du curesprit .Nous avons soulign avec intention cratrice dans lexpression immobilit cratrice . Ceci indi-que clairement que lIMMOBILITE DU REEL ESTDIFFERENTE DES IMMOBILITES CLASSIQUESRIGOUREUSEMENT EMPREINTES DE STATICITE. Aussi paradoxale que paraisse cette affirmation,il sagit dune immobilit vivante et dynamique parcontraste notre mobilit creuse et superficielle.

    Cette affirmation n'est pas unique en son genre.Il y a quelques milliers dannes, Herms employaitun langage semblable en rpondant une question deson disciple Thot :72

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    Labsolu, disaitil, se meut intensment dans sa.stabilit.

    Nous pourrions dailleurs faire de nombreusescomparaisons en empruntant les exemples fournis parla nature du monde.

    Un fragment de marbre est apparemment immo-bile. En fait, il ne lest pas du tout. Au del de sonmasque fig, les molcules qui le constituent effec-

    tuent des milliers de milliards d'oscillations chaqueeconde.Nous pourrions dire que ce fragment de marbre

    se meut intensment dans sa stabilit.Reprenant lantique adage : Ce qui est en bas,

    est comme ce qui est en haut et rciproquement, nepourrionsnous pas transposer limage du mouvementmatriel se poursuivant au sein d'une apparente stabi-lit, dans d autres dom aines ? A utrem ent dit, ce quiest en haut ne seraitil pas SEMBLABLE ce quiest en bas ?

    Nous avons de profondes raisons de le penser,d'autant plus que pour Krishnamurti, comme pour nousil nexiste ni haut, ni bas, ces deux aspects n-tant que les faces opposes mais complmentairesdune mme ralit : le TOUT.

    Lorsque Krishnamurti emploie le terme im-mobilit , nous pensons quil lemploie dessein, pourlopposer la mobilit constante de lgo qui veut durer et devenir . Dans la libration de lavi-dit de devenir, IL Y A PA R CON TRA STE, UNESERENITE QUI EST IMMOBILITE, mais immobilitintensment vivante.

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    A ceux que ce langage dplat, nous pourrionsdire que l'immobilit cratrice de Krishnamurti est aufond, une mobilit plus profonde, plus sereine quela mobilit superficielle et bruyante du moi .

    Dans ses causeries de 1945, Krishnamurti dit : Soyez silencieusement conscient du devenir :

    gotez cette lucidit silencieuse . ETRE immobile,

    et DEVENIR immobile sont deux tats diffrents .Cette phrase met en relief la confusion dange-reuse et trs subtile qui pourrait s'tablir entre deuxnuances assez abstraites.

    LETRE immobile du rel EST. 11 nest pas unrsultat. 11nest pas fabriqu. 11na pas tre engendrpar nous. Nous avons LE dcouvrir.

    Mais cette dcouverte exige labdication pure etsimple du rgne de lgo, de ses lim