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BARBEGAL
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DU MÊME AUTEUR
l!
ARBAN, roman.
LAURÉNA, roman.
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ROGER VRIGNY
BARBEGAL
récit
rirf
GALLIMARD
5, rue Sébastien-Bottin, Parie VIIe
2' édition
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Il a été tiré de l'édition originale de cetouvrage vingt-cinq exemplaires sur vélin
pur f il Navarre dont quinze numérotés de
1 à 15et dix, hors commerce,marqués de
A à J.
Tous droits de traduction, de reproduction et d'adaptationréservés pour tous pays, y compris la Russie.
@ 1958, Librairie Gallimard.
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Le découpage que j'ai dû adopter dansla présentation de ce livre nécessite quelquesexplications. L'histoire de Barbegal m'estparvenue sous la forme d'un dossier quiappartenait à Julien Charmeret et que saf amille m'a transmis peu après la disparitionde mon ami, mort accidentellement l'an
dernier. Je n'ai pas à rappeler ici ce quef ut sa tro p brève carrière. D'une naturesecrète, peu soucieuse de ses talents, JulienCharmeret s'était fait un nom dans la lit-térature enfantine, grâce surtout à la sériede contes qu'il publiait régulièrement chezH. et qui lui avait acquis l'audience d'unpublic nombreux. Il méritait mieux, à monavis, que cette réputation d'écrivain pourla jeunesse et ce n'est pas une des moindres
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raisons qui m'ont poussé à la publicationde Barbegal.
Le dossier que j'ai eu entre les mainscomportait plusieurs documents précédésd'une notice à mon intention « Je ne peuxme résoudre à reprendre le récit de cetteaventure, avait écrit julien, qui s'est dérou-lée du 2 au 14 avril 1950. Je te la confieet tu jugeras toi-même s'il est bon qued'autres la connaissent. J'ai réuni les élé-ments qui permettent de la reconstituer.Il faudra modifier les initiales et les noms
de lieux. Celui de Barbegal a été empruntéà un village de Provence, pris au hasardsur la carte. »
Les documents étaient de trois sortes
un Carnet de notes, un conte de quarante-sept pages intitulé L'Exploration ou leVoyage d'Antoine, enfin une enveloppecontenant plusieurs f euillets dactylographiésavec. cette indication épinglée en têteLettres à la Parisienne, correspondanceéchangée avec Mlle E.F. durant mon séjour.Extraits reproduits avec son autorisation. »
J'ai voulu respecter la volonté de monami et tenir compte de ses scrupules. jen'ai rien ajouté aux matériaux qui m'étaient
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fournis. Pour rétablir la chronologie desévénements, il m'a fallu fragmenter cha-cune des pièces, intercaler dans la suite dela narration, les pages de carnet, les lettreset les chapitres du conte. Il en résulte évi-demment une diversité de ton qui, je l'es-père, ne déroutera pas trop le lecteur.
Pour ma part, à mesure que j'agençais
les différents morceaux du puzzle, il m'abien semblé que l'histoire, selon les vœuxde l'auteur, se reconstituait à mes yeux. Dumoins s'agissait-il d'une histoire, celle deBarbegal. Est-ce la véritable ? Nous ne lesaurons jamais.
R.V.
Décembre 1957.
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(1)
(Mardi, 2 avril, 2 heures du matin.)Je suis logé pour la nuit dans une grande
pièce que je pense être un salon mais dontje n'ai pu apprécier la destination exacteni mesurer la superficie parce que l'élec-tricité fait défaut. Les ampoules existent.Les commutateurs par contre n'ont aucune
action sur elles. Restent les fils qui sontpeut-être coupés. L'atmosphère est humideet une odeur de salpêtre se combine avec
celle poussiéreuse des housses et des vieillestentures. Le chef de la colonie, qui est venume chercher à la gare, s'est excusé de ce
campement de fortune. « A cette heure,me dit-il, je n'ose pas réveiller Mlle Made-
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leine et j'ignore quelle chambre elle vousa réservée. » Il aurait pu s'en informer plustôt, et cette négligence me donne à croireque mon séjour ici, malgré toutes les solli-citations dont j'ai été l'objet, n'était pasconsidéré comme certain, ni ma présence,au fond, sincèrement désirée. Mais je me
méfie de mes réflexes. Chaque fois que j'ar-rive quelque part, je me demande ce quej'y fais, et mon premier mouvement estde prendre la fuite. J'ai bien manqué d'ycéder tout à l'heure. La perspective desdouze kilomètres à pied m'a rendu moinsnerveux. Cet homme, après tout, avec sestrente gosses sur le dos, les soucis du ravi-taillement, des jeux, des accidents, a d'autressujets de préoccupations que l'hébergementd'un « pékin ». Maintenant que mon ins-tallation est presque convenable, je suisdisposé à l'indulgence.
Le chef a déplié un lit de camp, il m'aapporté un oreiller pneumatique et unecouverture, m'a laissé sa lampe électriqueque j'ai réussi à accrocher à une embrassede rideau, ce qui donne une allure intimeà la portion de pièce où je suis réfugié.« Vous avez faim ? m'a-t-il demandé. Je
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n'ai à vous offrir que du lait froid, dupain et du beurre. Ou une boîte de con-serves, si vous préférez ? » Comme j'hési-tais, il a ajouté « Cela ne vous empêcherapas de communier, la messe sera dite plustard ce matin et le jeûne n'est pas obliga-toire. Il suffit de n'avoir pas absorbé d'ali-ments dans les trois heures qui précèdent.Une heure pour les liquides, précise-t-il.Vous voyez, c'est bien commode. Vousn'avez rien à craindre. » Je n'avais pas
peur mais pas plus envie de communierque d'avaler des sardines à l'huile à deuxheures du matin. J'ai accepté le lait paresprit de sacrifice et pour ne pas décevoirmon hôte. Cet homme est curieux, à mi-
chemin de l'ecclésiastique et du sportif, unefantaisie de boy-scout et une austérité defonctionnaire; un esprit vif, cultivé, entre-prenant. Durant le trajet de la gare auchâteau, il ne cessait de m'interrompre pourme donner des indications sur la nature du
terrain, les récoltes, l'archéologie, les spé-cialités culinaires. Je conversais avec leGuide Bleu. La route que nous suivionsétait mouvementée, tantôt droite au milieu
des marécages. « Non, ce sont des rizières,
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me dit-il, la principale ressource du pays,vous savez bien, le riz de Camargue estcélèbre, vous en mangerez. La propriétaire
du château, Mlle Madeleine, possède plu-sieurs centaines d'hectares. » Tantôt si-
nueuse, resserrée entre des rocailles quela lumière de la lune faisait ressembler àdes éboulis de cailloux blancs. « Ce n'est
rien à côté des Baux Un paysage dan-tesque, apocalyptique, et l'on y boit unrosé dont vous me direz des nouvelles. »
A chaque virage, je saisissais des yeuxune touffe d'arbustes, un cyprès, la courbed'un muret de pierre en surplomb dutorrent.
Si nous pouvions nous arrêter, répé-tait le conducteur, vous verriez ce coupd'oeil, d'une sauvagerie
Mais il n'avait pas le temps. Pourquoi ?Personne ne le savait. Au milieu de la nuit,
je ne comprenais pas quelle tâche urgentele pressait, sauf le souci de dormir, qu'iln'avait pas du reste, puisque par la suiteil s'attarda une heure avec moi, au moment
précis où nous aurions pu aller nous cou-cher. Je crois plutôt qu'il fait partie decette catégorie de gens instables, constam-
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ment préoccupés par les choses qu'ils ou-blient de faire. L'inquiétude leur devientnaturelle et le repos les trouble commeun désaveu ou une erreur de conduite.
Cela ne l'empêchait pas de me renseigner,au contraire
A droite, un moulin romain.
Le temps de tourner la tête et le moulinavait disparu.
Vous ne perdez rien. Il est détruit
aux trois quarts. A côté il y a une aubergeoù l'on sert une excellente bouillabaisse.
A gauche un aqueduc. Authentique, il datede Trajan. Deux arches et demie recouvertesde lierre. C'est ravissant. Toute la poésiedes ruines vient du lierre qui pousse dessus,vous avez remarqué ?
Les vitres baissées laissaient entrer l'air
de la nuit où l'odeur du thym, de lamenthe et de la bruyère se mêlait, pourmoi, à une autre plus ancienne, presque
idéale et de mélancolie que j'associais jene sais pourquoi au plaisir. Déjà quandj'ai débarqué du train, à la gare d'A.,retrouvant les palmiers, les bouquets demimosas dans les corbeilles, le gravier rouge
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du quai, j'ai éprouvé une sensation curieusede rajeunissement dont je ne cherchais pasà creuser la raison. Puis il y eut cettesilhouette inconnue à côté de celle du chef,qui me parut soudain trop familière. Dèscet instant je me suis demandé si la vien'allait pas recommencer ses erreurs, enrenouvelant ses comparses, si les pièges, tou-jours les mêmes, ne me seraient pas, encoreune fois, tendus, avec cette différence pour-tant que les ayant éprouvés, je les regar-derais sans surprise, avec un mélange deregret et d'attendrissement.
Au fond le personnage de ce chef decolonie me pose un problème. Il doit avoirle même âge que moi, à peu près. Il estdifficile de le fixer avec certitude entre
trente et trente-cinq à cause d'unecalvitie précoce, d'un ventre qui pousse laceinture, d'un affaissement des épaules,signes qui ne sont pas chez lui des preuvesde vieillissement, il les a toujours eus, dumoins depuis cinq ans que je le fréquente.Par contre, son agilité, il court comme unlapin, la mobilité de ses traits, son rire encascade, dans le regard une lueur curieuse,moitié naïve, moitié roublarde, tous ces
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détails contredisent l'apparente maturité deson corps. Il a mal grandi, la chair flasqueet l'esprit imberbe. Ce qui explique l'exis-tence qu'il mène. Je ne lui connais pasd'activités précises, en dehors de cette péda-gogie des vacances qu'il exerce comme unsacerdoce. Enfant parmi les hommes, il al'air d'un homme dans le monde des enfants
mais, où qu'il soit, ses dimensions faussentla perspective. (Si je parle si longuementd'un homme qui ne m'intéresse pas, c'estque peut-être j'ai peur de lui ressembler ?)
J'ai encore une impression à noter que
je crains de ne pas garder intacte. Nousétions au terme du parcours. La voitures'engageait dans une allée rectiligne entredeux rangées d'arbres noirs.
Ce sont des micocouliers. Les grainesen ont été apportées en Provence par lesChevaliers des Croisades. Vous verrez en
plein jour, ce sont de beaux arbres, de15à20 mètres de haut, un feuillage trèsdélicat.
Je passe les détails techniques que mefournit le conducteur. Nous avions franchi
le portail. J'entendis le gravier sous les2
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roues, j'aperçus une pelouse, des massifs defleurs, un bassin et, derrière un grillage, desvolatiles domestiques parmi lesquels je crusreconnaître un paon, enfin une terrasse.Le château commençait là. Il fallait des-cendre de voiture pour le mesurer duregard. Il me parut d'abord invraisemblableà cause de sa blancheur. Il flottait comme
un drap immense, tendu entre les arbres,troué d'alvéoles sans volets ni croisées
qui communiquaient avec le vide. Ensuiteil prit ses dimensions, devint une masse rec-tangulaire, un énorme gâteau de sucre,
surgi de l'ombre, il semblait avoir absorbéla clarté diffuse de la nuit qu'il renvoyaiten distillant autour de lui une sorte d'au-
réole. En longeant la terrasse, je m'aperçusque l'éclat du bâtiment central rejetaitdans l'obscurité les deux ailes du château,
à gauche une tour crênelée du genre mé-diéval, à droite un portique, posé là commepar mégarde, perpendiculaire à la terrasse.Il n'ouvrait sur rien car la chaussée s'ar-
rêtait aux colonnes, bordée par des tailliset un réseau touffu de branches. Je m'ap-prochai, j'essayai de voir au-delà des arbres.Je distinguai assez loin des lumières zigza-
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AVERTISSEMENT Pages de Carnet (1) Première Soirée - ANTOINE ET LE GÉNIEDeuxième Soirée - L'HOMME ET LA PRINCESSE