fables vol 1 - jean de la fontaine

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ean de La Fontaine

ABLES

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ivre I

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réface

L'indulgence que l'on a eue pour quelques-unes de mes fables me donne lieu d'espérer la mâce pour ce recueil. Ce n'est pas qu'un des maîtres de notre éloquence n'ait désapprouvé le deles mettre en vers. Il a cru que leur principal ornement est de n'en avoir aucun; que d'ailleu

ntrainte de la poésie, jointe à la sévérité de notre langue, m'embarrasseraient en beaundroits, et banniraient de la plupart de ces récits la breveté, qu'on peut fort bien appeler l'âm

nte, puisque sans elle il faut nécessairement qu'il languisse. Cette opinion ne saurait partir quemme d'excellent goût; je demanderais seulement qu'il en relâchât quelque peu, et qu'il crût quâces lacédémoniennes ne sont pas tellement ennemies des muses françaises que l'on ne puvent les faire marcher de compagnie.

Après tout, je n'ai entrepris la chose que sur l'exemple, je ne veux pas dire des anciens, qui nint à conséquence pour moi, mais sur celui des modernes. C'est de tout temps, et chez touuples qui font profession de poésie, que le Parnasse a jugé ceci de son apanage. A peine les fon attribue à Ésope virent le jour, que Socrate trouva à propos de les habiller des livrées des m

que Platon en rapporte est si agréable, que je ne puis m'empêcher d'en faire un des ornemente préface. Il dit que, Socrate étant condamné au dernier supplice, l'on remit l'exécution de l'aruse de certaines fêtes. Cébès l'alla voir le jour de sa mort. Socrate lui dit que les dieux l'averti plusieurs fois, pendant son sommeil, qu'il devait s'appliquer à la musique avant qu'il mourvait pas entendu d'abord ce que ce songe signifiait: car, comme la musique ne rend pas l'hoilleur, à quoi bon s'y attacher? Il fallait qu'il y eût du mystère là-dessous, d'autant plus quux ne se lassaient point de lui envoyer la même inspiration. Elle lui était encore venue une des. Si bien qu'en songeant aux choses que le Ciel pouvait exiger de lui, il s'était avisé q

usique et la poésie ont tant de rapport, que possible était-ce de la dernière qu'il s'agissait. Il int de bonne poésie sans harmonie; mais il n'y en a point non plus sans fiction, et Socrate ne se dire la vérité. Enfin il avait trouvé un tempérament: c'était de choisir des fables qui continelque chose de véritable, telles que sont celles d'Ésope. Il employa donc à les mettre en verniers moments de sa vie.

Socrate n'est pas le seul qui ait considéré comme sœurs la poésie et nos fables. Phèdre a témil était de ce sentiment, et par l'excellence de son ouvrage nous pouvons juger de celui du ps philosophes. Après Phèdre, Avienus a traité le même sujet. Enfin les modernes les ont suivis:avons des exemples non seulement chez les étrangers, mais chez nous. Il est vrai que lorsqu

ns y ont travaillé, la langue était si différente de ce qu'elle est qu'on ne les doit considére

mme étrangers. Cela ne m'a point détourné de mon entreprise: au contraire, je me suis flatspérance que si je ne courais dans cette carrière avec succès, on me donnerait au moins la glovoir ouverte.

l arrivera possible que mon travail fera naître à d'autres personnes l'envie de porter la chosen. Tant s'en faut que cette matière soit épuisée, qu'il reste encore plus de fables à mettre en vern'en ai mis. J'ai choisi véritablement les meilleures, c'est-à-dire celles qui m'ont semblé telles;tre que je puis m'être trompé dans mon choix, il ne sera pas difficile de donner un autre tles-là même que j'ai choisies; et si ce tour est moins long, il sera sans doute plus approuvé. il en arrive, on m'aura toujours obligation: soit que ma témérité ait été heureuse et que je n

s point trop écarté du chemin qu'il fallait tenir, soit que j'aie seulement excité les autres à m

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re.

e pense avoir justifié suffisamment mon dessein quant à l'exécution, le public en sera juge. Ouvera pas ici l'élégance ni l'extrême brièveté qui rendent Phèdre recommandable; ce sont qudessus de ma portée. Comme il m'était impossible de l'imiter en cela, j'ai cru qu'il fallaompense égayer l'ouvrage plus qu'il n'a fait. Non que je le blâme d'en être demeuré danmes: la langue latine n'en demandait pas davantage; et si l'on y veut prendre garde, on reconnns cet auteur le vrai caractère et le vrai génie de Térence. La simplicité est magnifique cheands hommes; moi qui n'ai pas les perfections du langage comme ils les ont eues, je ne la

ver à un si haut point. Il a donc fallu se récompenser d'ailleurs: c'est ce que j'ai fait avec d'aus de hardiesse que Quintilien dit qu'on ne saurait trop égayer les narrations. Il ne s'agit pas icporter une raison: c'est assez que Quintilien l'ait dit. J'ai pourtant considéré que, ces fables es de tout le monde, je ne ferais rien si je ne les rendais nouvelles par quelques traits qevassent le goût. C'est ce qu'on demande aujourd'hui: on veut de la nouveauté et de la gaieppelle pas gaieté ce qui excite le rire, mais un certain charme, un air agréable, qu'on peut don

utes sortes de sujets, même les plus sérieux.

Mais ce n'est pas tant par la forme que j'ai donnée à cet ouvrage qu'on en doit mesurer le prix

r son utilité et par sa matière. Car qu'y a-t-il de recommandable dans les productions de l'esprise rencontre dans l'apologue? C'est quelque chose de si divin, que plusieurs personnagntiquité ont attribué la plus grande partie de ces fables à Socrate, choisissant pour leur servir deui des mortels qui avait le plus de communication avec les dieux. Je ne sais comme ils n'ont t descendre du ciel ces mêmes fables, et comme ils ne leur ont point assigné un dieu qui en ection, ainsi qu'à la poésie et à l'éloquence. Ce que je dis n'est pas tout à fait sans fondemisque, s'il m'est permis de mêler ce que nous avons de plus sacré parmi les erreurs du paganus voyons que la Vérité a parlé aux hommes par paraboles, et la parabole est-elle autre chospologue, c'est-à-dire un exemple fabuleux, et qui s'insinue avec d'autant plus de facilité et dil est plus commun et plus familier? Qui ne nous proposerait à imiter que les maîtres de la saus fournirait un sujet d'excuse; il n'y en a point quand des abeilles et des fourmis sont capabla même qu'on nous demande.

C'est pour ces raisons que Platon, ayant banni Homère de sa république, y a donné à Ésope unes honorable. Il souhaite que les enfants sucent ces fables avec le lait, il recommande aux noules leur apprendre; car on ne saurait s'accoutumer de trop bonne heure à la sagesse et à la v

utôt que d'être réduits à corriger nos habitudes, il faut travailler à les rendre bonnes pendant qunt encore indifférentes au bien ou au mal. Or quelle méthode y peut contribuer plus utilemen fables? Dites à un enfant que Crassus, allant contre les Parthes, s'engagea dans leur pays

nsidérer comment il en sortirait; que cela le fit périr, lui et son armée, quelque effort qu'il fitretirer. Dites au même enfant que le renard et le bouc descendirent au fond d'un puits pindre leur soif; que le renard en sortit s'étant servi des épaules et des cornes de son cammme d'une échelle; au contraire, le bouc y demeura pour n'avoir pas eu tant de prévoyance; enséquent il faut considérer en toute chose la fin. Je demande lequel de ces deux exemples feus d'impression sur cet enfant: ne s'arrêtera-t-il pas au dernier, comme plus conforme et mproportionné que l'autre à la petitesse de son esprit? Il ne faut pas m'alléguer que les pensé

nfance sont d'elles-mêmes assez enfantines, sans y joindre encore de nouvelles badineriesdineries ne sont telles qu'en apparence, car dans le fond elles portent un sens très solide. Et co

r la définition du point, de la ligne, de la surface, et par d'autres principes très familiers,rvenons à des connaissances qui mesurent enfin le ciel et la terre, de même aussi, pa

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sonnements et conséquences que l'on peut tirer de ces fables, on se forme le jugement et les mse rend capable des grandes choses.

Elles ne sont pas seulement morales, elles donnent encore d'autres connaissances. Les propriétémaux et leurs divers caractères y sont exprimés; par conséquent les nôtres aussi, puisque

mmes l'abrégé de ce qu'il y a de bon et de mauvais dans les créatures irraisonnables. Qométhée voulut former l'homme, il prit la qualité dominante de chaque bête: de ces piècférentes il composa notre espèce; il fit cet ouvrage qu'on appelle «le petit monde». Ainsi ces fnt un tableau où chacun de nous se trouve dépeint. Ce qu'elles nous représentent confirm

rsonnes d'âge avancé dans les connaissances que l'usage leur a données, et apprend aux enfanil faut qu'ils sachent. Comme ces derniers sont nouveaux venus dans le monde, ils n'en connas encore les habitants, ils ne se connaissent pas eux-mêmes. On ne les doit laisser dans norance que le moins qu'on peut; il leur faut apprendre ce que C'est qu'un lion, un renard, ainte; et pourquoi l'on compare quelquefois un homme à ce renard ou à ce lion. C'est à quoi les fvaillent; les premières notions de ces choses proviennent d'elles.

'ai déjà passé la longueur ordinaire des préfaces, cependant je n'ai pas encore rendu raison nduite de mon ouvrage. L'apologue est composé de deux parties, dont on peut appeler l'une le c

utre l'âme. Le corps est la fable; l'âme, la moralité. Aristote n'admet dans la fable que les animn exclut les hommes et les plantes. Cette règle est moins de nécessité que de bienséance, puisqope, ni Phèdre, ni aucun des fabulistes, ne l'a gardée: tout au contraire de la moralité, dont aucdispense. Que s'il m'est arrivé de le faire, ce n'a été que dans les endroits où elle n'a pu entrer

âce, et où il est aisé au lecteur de la suppléer. On ne considère en France que ce qui plaît; c'ande règle, et pour ainsi dire la seule. Je n'ai donc pas cru que ce fût un crime de passer par-d

anciennes coutumes lorsque je ne pouvais les mettre en usage sans leur faire tort. Du tsope, la fable était contée simplement, la moralité séparée, et toujours en suite. Phèdre est

i ne s'est pas assujetti à cet ordre: il embellit la narration, et transporte quelquefois la moralitéau commencement. Quand il serait nécessaire de lui trouver place, je ne manque à ce précept

ur en observer un qui n'est pas moins important. C'est Horace qui nous le donne. Cet auteur nes qu'un écrivain s'opiniâtre contre l'incapacité de son esprit, ni contre celle de sa matière. Jamqu'il prétend, un homme qui veut réussir n'en vient jusque-là; il abandonne les choses dont in qu'il ne saurait rien faire de bon:

 Et quoe Desperat tractata nitescere posse, relinquit.

C'est ce que j'ai fait à l'égard de quelques moralités, du succès desquelles je n'ai pas bien espéré

l ne reste plus qu'à parler de la vie d'Ésope. Je ne vois presque personne qui ne tienne

uleuse celle que Planude nous a laissée. On s'imagine que cet auteur a voulu donner à son héractère et des aventures qui répondissent à ses fables. Cela m'a paru d'abord spécieux; maiuvé à la fin peu de certitude en cette critique. Elle est en partie fondée sur ce qui se passe ntus et Ésope; on y trouve trop de niaiseries, et qui est le sage à qui de pareilles choses n'arrint? Toute la vie de Socrate n'a pas été sérieuse. Ce qui me confirme en mon sentiment, c'est qactère que Planude donne à Ésope est semblable à celui que Plutarque lui a donné dans son Ba

s sept Sages, c'est-à-dire d'un homme subtil, et qui ne laisse rien passer. On me dira que le Bas sept Sages est aussi une invention. Il est aisé de douter de tout: quant à moi, je ne vois pasurquoi Plutarque aurait voulu imposer à la postérité dans ce traité-là, lui qui fait profession

ritable partout ailleurs, et de conserver à chacun son caractère. Quand cela serait, je ne sauraintir sur la foi d'autrui: me croira-t-on moins que si je m'arrête à la mienne? Car ce que je pu

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composer un tissu de mes conjectures, lequel j'intitulerai: Vie d'Ésope. Quelque vraisemblable rende, on ne s'y assurera pas, et, fable pour fable, le lecteur préférera toujours celle de Plan

mienne.

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Monseigneur le Dauphin

chante les héros dont Ésope est le père,oupe de qui l'histoire, encor que mensongère,ntient des vérités qui servent de leçons.ut parle en mon ouvrage, et même les poissons:qu'ils disent s'adresse à tous tant que nous sommes;

me sers d'animaux pour instruire les hommes.ustre rejeton d'un prince aimé des cieux,r qui le monde entier a maintenant les yeux,qui faisant fléchir les plus superbes têtes,mptera désormais ses jours par ses conquêtes,elque autre te dira d'une plus forte voixs faits de tes aïeux et les vertus des rois.vais t'entretenir de moindres aventures,tracer en ces vers de légères peintures;

si de t'agréer je n'emporte le prix,urai du moins l'honneur de l'avoir entrepris.

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a Cigale et la Fourmi

Cigale et la Fourmicigale, ayant chantéut l'été,trouva fort dépourvueand la bise fut venue.

s un seul petit morceaumouche ou de vermisseaue alla crier famineez la fourmi sa voisine,priant de lui prêterelque grain pour subsisterqu'à la saison nouvelle

e vous paierai, lui dit-elle,ant l'oût, foi d'animal,

érêt et principal.»fourmi n'est pas prêteuse;

est là son moindre défaut.ue faisiez-vous au temps chaud?t-elle à cette emprunteuse.Nuit et jour à tout venantchantais, ne vous déplaise.Vous chantiez? j'en suis fort aise.bien: dansez maintenant.»

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e Corbeau et le Renard

aître corbeau, sur un arbre perchénait en son bec un fromage.aître renard par l'odeur alléchéi tint à peu près ce langage:é! bonjour Monsieur du Corbeau

e vous êtes joli! que vous me semblez beau!ns mentir, si votre ramagerapporte à votre plumageus êtes le phénix des hôtes de ces bois»

ces mots le corbeau ne se sent pas de joiepour montrer sa belle voix

ouvre un large bec laisse tomber sa proie.renard s'en saisit et dit: «Mon bon Monsieurprenez que tout flatteur

t aux dépens de celui qui l'écoute:tte leçon vaut bien un fromage sans doute.»corbeau honteux et confusa mais un peu tard, qu'on ne l'y prendrait plus.

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a grenouille qui veut se faire aussi grosse que le bœuf 

e grenouille vit un bœufi lui sembla de belle taille.e, qui n'était pas grosse en tout comme un œuf,vieuse, s'étend, et s'enfle et se travaille,ur égaler l'animal en grosseur,

sant: «Regardez bien, ma sœur;t-ce assez? dites-moi: n'y suis-je point encore?nni.—M'y voici donc?—Point du tout.—M'y voilà?Vous n'en approchez point.» La chétive pécorenfla si bien qu'elle creva.

monde est plein de gens qui ne sont pas plus sages.ut bourgeois veut bâtir comme les grands seigneurs,ut prince a des ambassadeurs,

ut marquis veut avoir des pages.

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es deux mulets

ux mulets cheminaient, l'un d'avoine chargé,utre portant l'argent de la gabelle.lui-ci, glorieux d'une charge si belle,eût voulu pour beaucoup en être soulagé.marchait d'un pas relevé,

faisait sonner sa sonnette:and, l'ennemi se présentant,mme il en voulait à l'argent,r le mulet du fisc une troupe se jette,saisit au frein et l'arrête.mulet, en se défendant,sent percé de coups; il gémit, il soupire.st-ce donc là, dit-il, ce qu'on m'avait promis?mulet qui me suit du danger se retire;

moi j'y tombe et je péris!Ami, lui dit son camarade,n'est pas toujours bon d'avoir un haut emploi:tu n'avais servi qu'un meunier, comme moi,ne serais pas si malade.»

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e Loup et le Chien

loup n'avait que les os et la peau,nt les chiens faisaient bonne garde.loup rencontre un dogue aussi puissant que beau,

as, poli, qui s'était fourvoyé par mégarde.ttaquer, le mettre en quartiers,

e loup l'eût fait volontiers;ais il fallait livrer bataille,le mâtin était de taillese défendre hardiment.loup donc, l'aborde humblement,tre en propos, et lui fait complimentr son embonpoint, qu'il admire.ne tiendra qu'à vous, beau sire,

être aussi gras que moi, lui répartit le chien.

ittez les bois, vous ferez bien:s pareils y sont misérables,ncres, hères, et pauvres diables,nt la condition est de mourir de faim.r quoi? rien d'assuré; point de franche lippée;ut à la pointe de l'épée.ivez moi, vous aurez un bien meilleur destin.»loup reprit: «Que me faudra-t-il faire?

Presque rien, dit le chien: donner la chasse aux gens

rtant bâtons et mendiants;atter ceux du logis, à son maître complaire:oyennant quoi votre salairera force reliefs de toutes les façons:de poulets, os de pigeons,

ns parler de mainte caresse.»loup déjà se forge une félicitéi le fait pleurer de tendresseemin faisant, il vit le cou du chien pelé.u'est-ce là? lui dit-il.—Rien.—Quoi? rien?—Peu de chose.Mais encor?—Le collier dont je suis attachéce que vous voyez est peut-être la cause.

Attaché? dit le loup: vous ne courez donc pasvous voulez?—Pas toujours; mais qu'importe?

Il importe si bien, que de tous vos repasne veux en aucune sorte,ne voudrais pas même à ce prix un trésor.»la dit, maître loup s'enfuit, et court encor.

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a Génisse, la Chèvre et la Brebis en société avec le Lion

génisse, la chèvre et leur sœur la brebis,ec un fier lion, seigneur du voisinage,ent société, dit-on, au temps jadis,mirent en commun le gain et le dommage.ns les lacs de la chèvre un cerf se trouva pris.

rs ses associés aussitôt elle envoie.x venus, le lion par ses ongles compta,dit: «Nous sommes quatre à partager la proie».is, en autant de parts le cerf il dépeça;t pour lui la première en qualité de sire:lle doit être à moi, dit-il, et la raison,

est que je m'appelle lion:cela l'on n'a rien à dire.seconde, par droit, me doit échoir encor:

droit, vous le savez, c'est le droit du plus fort.mme le plus vaillant, je prétends la troisième.quelqu'une de vous touche à la quatrième,l'étranglerai tout d'abord.»

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a Besace

piter dit un jour: «Que tout ce qui respiren vienne comparaître aux pieds de ma grandeur:dans son composé quelqu'un trouve à redire,peut le déclarer sans peur;mettrai remède à la chose.

nez, singe; parlez le premier, et pour cause.yez ces animaux, faites comparaisonleurs beautés avec les vôtres.

es-vous satisfait?—Moi? dit-il; pourquoi non?ai-je pas quatre pieds aussi bien que les autres?on portrait jusqu'ici ne m'a rien reproché;ais pour mon frère l'ours, on ne l'a qu'ébauché:mais, s'il me veut croire, il ne se fera peindre.»urs venant là-dessus, on crut qu'il s'allait plaindre.

nt s'en faut: de sa forme il se loua très fort;osa sur l'éléphant, dit qu'on pourrait encorouter à sa queue, ôter à ses oreilles;e c'était une masse informe et sans beauté.léphant étant écouté,ut sage qu'il était, dit des choses pareilles:ugea qu'à son appétitme baleine était trop grosse.me fourmi trouva le ciron trop petit,

croyant, pour elle, un colosse.pin les renvoya s'étant censurés tous,reste contents d'eux.

ais parmi les plus foustre espèce excella; car tout ce que nous sommes,nx envers nos pareils, et taupes envers nous,us nous pardonnons tout, et rien aux autres hommes:se voit d'un autre œil qu'on ne voit son prochain.fabricateur souverainus créa besaciers tous de même manière,nt ceux du temps passé que du temps d'aujourd'hui:it pour nos défauts la poche de derrière,celle de devant pour les défauts d'autrui.

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hirondelle et les petits oiseaux

e hirondelle en ses voyagesait beaucoup appris. Quiconque a beaucoup vuut avoir beaucoup retenu.lle-ci prévoyait jusqu'aux moindres orages,devant qu'ils ne fussent éclos,

s annonçait aux matelots.arriva qu'au temps que le chanvre se sème,e vit un manant en couvrir maints sillons.eci ne me plaît pas, dit-elle aux oisillons:vous plains, car pour moi, dans ce péril extrême,saurai m'éloigner, ou vivre en quelque coin.yez-vous cette main qui, par les airs chemine?jour viendra, qui n'est pas loin,e ce qu'elle répand sera votre ruine.

là naîtront engins à vous envelopper,lacets pour vous attraper,fin, mainte et mainte machinei causera dans la saisontre mort ou votre prison:re la cage ou le chaudron!

est pourquoi, leur dit l'hirondelle,angez ce grain et croyez-moi.»s oiseaux se moquèrent d'elle:

trouvaient aux champs trop de quoi.and la chènevière fut verte,hirondelle leur dit: «Arrachez brin à brin

qu'a produit ce mauvais grain,soyez sûrs de votre perte.

Prophète de malheur, babillarde, dit-on,bel emploi que tu nous donnes!

nous faudrait mille personnesur éplucher tout ce canton.»chanvre étant tout à fait crue,

hirondelle ajouta: «Ceci ne va pas bien;auvaise graine est tôt venue.ais puisque jusqu'ici l'on ne m'a crue en rien,s que vous verrez que la terrera couverte, et qu'à leurs bléss gens n'étant plus occupésront aux oisillons la guerre;and reglingettes et réseauxtraperont petits oiseaux,

volez plus de place en place,

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meurez au logis ou changez de climat:itez le canard, la grue ou la bécasse.ais vous n'êtes pas en état

passer, comme nous, les déserts et les ondes,d'aller chercher d'autres mondes;

est pourquoi vous n'avez qu'un parti qui soit sûr,est de vous enfermer aux trous de quelque mur.»s oisillons, las de l'entendre,

mirent à jaser aussi confusémente faisaient les Troyens quand la pauvre Cassandrevrait la bouche seulement.

en prit aux uns comme aux autres:aint oisillon se vit esclave retenu.

us n'écoutons d'instincts que ceux qui sont les nôtresne croyons le mal que quand il est venu.

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e Rat de ville et le Rat des champs

trefois le rat des villesvita le rat des champsune façon fort civile,des reliefs d'ortolans

r un tapis de Turquiecouvert se trouva mis.laisse à penser la viee firent ces deux amis.

régal fut fort honnête:en ne manquait au festin;ais quelqu'un troubla la fêtendant qu'ils étaient en train.

a porte de la salleentendirent du bruit:rat de ville détale,n camarade le suit.

bruit cesse, on se retire:ts en campagne aussitôt;le citadin de dire:chevons tout notre rôt.

C'est assez, dit le rustique;main vous viendrez chez moi.n'est pas que je me piquetous vos festins de roi;

ais rien ne vient m'interrompre:mange tout à loisir.ieu donc. Fi du plaisir

e la crainte peut corrompre!»

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e loup et l'agneau

raison du plus fort est toujours la meilleure:us l'allons montrer tout à l'heure.

Agneau se désaltéraitns le courant d'une onde pure.

loup survient à jeun, qui cherchait aventure,que la faim en ces lieux attirait.ui te rend si hardi de troubler mon breuvage?t cet animal plein de rage:seras châtié de ta témérité.

Sire, répond l'agneau, que Votre Majestése mette pas en colère;

ais plutôt qu'elle considèree je me vas désaltérant

ns le courant,us de vingt pas au-dessous d'Elle;que par conséquent, en aucune façonne puis troubler sa boisson.Tu la troubles, reprit cette bête cruelle;je sais que de moi tu médis l'an passé.Comment l'aurais-je fait si je n'étais pas né?prit l'agneau; je tette encor ma mèreSi ce n'est toi, c'est donc ton frère.

Je n'en ai point.—C'est donc l'un des tiens;r vous ne m'épargnez guère,us, vos bergers et vos chiens.me l'a dit: il faut que je me venge.»

-dessus, au fond des forêtsloup l'emporte et puis le mange,

ns autre forme de procès.

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homme et son image

ur M. le Duc de La Rochefoucauld

homme qui s'aimait sans avoir de rivauxssait dans son esprit pour le plus beau du monde:accusait toujours les miroirs d'être faux,

vant plus que content dans une erreur profonde.in de le guérir, le sort officieuxésentait partout à ses yeuxs conseillers muets dont se servent nos dames:roirs dans les logis, miroirs chez les marchands,roirs aux poches des galands,roirs aux ceintures des femmes.e fait notre Narcisse? Il se va confinerx lieux les plus cachés qu'il peut s'imaginer,

osant plus des miroirs éprouver l'aventure.ais un canal, formé par une source pure,trouve en ces lieux écartés:'y voit, il se fâche, et ses yeux irrités

nsent apercevoir une chimère vaine.ait tout ce qu'il peut pour éviter cette eau;

ais quoi? Le canal est si beau'il ne le quitte qu'avec peine.

voit bien où je veux venir.parle à tous; et cette erreur extrêmet un mal que chacun se plaît d'entretenir.tre âme, c'est cet homme amoureux de lui-même;nt de miroirs, ce sont les sottises d'autrui,roirs, de nos défauts les peintres légitimes;quant au canal, c'est celuie chacun sait, le livre des Maximes.

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e dragon à plusieurs têtes et le dragon à plusieurs queues

envoyé du Grand Seigneuréférait, dit l'histoire, un jour chez l'empereurs forces de son maître à celles de l'Empire.allemand se mit à dire:otre prince a des dépendants

i, de leur chef, sont si puissantse chacun d'eux pourrait soudoyer une armée.»chiaoux, homme de sens,i dit: «Je sais par renomméeque chaque Électeur peut de monde fournir;cela me fait souvenirune aventure étrange, et qui pourtant est vraie.tais en un lieu sûr, lorsque je vis passers cent têtes d'une hydre au travers d'une haie.

on sang commence à se glacer;je crois qu'à moins on s'effraie.n'en eus toutefois que la peur sans le mal:mais le corps de l'animal

put venir vers moi, ni trouver d'ouverture.rêvais à cette aventure,and un autre dragon, qui n'avait qu'un seul chefbien plus qu'une queue, à passer se présente.e voilà saisi derechef

étonnement et d'épouvante.chef passe, et le corps, et chaque queue aussi:en ne les empêcha; l'un fit chemin à l'autre.soutiens qu'il en est ainsivotre empereur et du nôtre.»

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es voleurs et l'Âne

ur un âne enlevé deux voleurs se battaient:un voulait le garder, l'autre le voulait vendre.ndis que coups de poing trottaient,que nos champions songeaient à se défendre,rive un troisième larron

i saisit maître Aliboron.

ne, c'est quelquefois une pauvre province:s voleurs sont tel ou tel prince,mme le Transylvain, le Turc et le Hongrois.lieu de deux, j'en ai rencontré trois:

est assez de cette marchandise.nul d'eux n'est souvent la province conquise:quart voleur survient, qui les accorde net

se saisissant du baudet.

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monide préservé par les Dieux

ne peut trop louer trois sortes de personnes:s dieux, sa maîtresse et son roi.alherbe le disait, j'y souscris, quant à moi:sont maximes toujours bonnes.louange chatouille et gagne les esprits.

yons comme les dieux l'ont quelquefois payée.

monide avait entreprisloge d'un athlète; et la chose essayée,rouva son sujet plein de récits tout nus.s parents de l'athlète étaient gens inconnus;n père, un bon bourgeois; lui, sans autre mérite;atière infertile et petite.poète d'abord, parla de son héros.

rès en avoir dit ce qu'il en pouvait dire,e jette à côté, se met sur le proposCastor et Pollux; ne manque pas d'écriree leur exemple était aux lutteurs glorieux;

ève leurs combats, spécifiant les lieuxces frères s'étaient signalés davantage;

fin l'éloge de ces dieuxisait les deux tiers de l'ouvrage.thlète avait promis d'en payer un talent;

ais quand il le vit, le galanden donna que le tiers; et dit fort franchemente Castor et Pollux acquittassent le reste.aites vous contenter par ce couple céleste.veux vous traiter cependant:nez souper chez moi; nous ferons bonne vie:s conviés sont gens choisis,es parents, mes meilleurs amis,yez donc de la compagnie.»monide promit. Peut-être qu'il eut peur

perdre, outre son dû, le gré de sa louange.vient: l'on festine, l'on mange.acun étant en belle humeur,domestique accourt, l'avertit qu'à la porte

ux hommes demandaient à le voir promptement.ort de table; et la cohorte

en perd pas un seul coup de dent.s deux hommes étaient les gémeaux de l'éloge.us deux lui rendent grâce, et, pour prix de ses vers,

l'avertissent qu'il déloge,

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que cette maison va tomber à l'envers.prédiction en fut vraie.pilier manque; et le plafondtrouvant plus rien qui l'étaie,

mbe sur le festin, brise plats et flacons,en fait pas moins aux échansons.ne fut pas le pis, car pour rendre complètevengeance due au poète,

e poutre cassa les jambes à l'athlète,renvoya les conviesur la plupart estropiés.renommée eut soin de publier l'affaire:acun cria miracle.doubla le salairee méritaient les vers d'un homme aimé des dieux.

n'était fils de bonne mèrei, les payant à qui mieux mieux,ur ses ancêtres n'en fit faire.

reviens à mon texte, et dis premièrement'on ne saurait manquer de louer largements dieux et leurs pareils, de plus que Melpomèneuvent, sans déroger, trafique de sa peine;fin, qu'on doit tenir notre art en quelque prix.s grands se font honneur dès lors qu'ils nous font grâce:dis l'Olympe et le Parnasseaient frères et bons amis.

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a mort et le malheureux

malheureux appelait tous les joursmort à son secoursMort, lui disait-il, que tu me sembles belle!

ens vite, viens finir ma fortune cruelle!»mort crut, en venant, l'obliger en effet.

e frappe à sa porte, elle entre, elle se montre.ue vois-je? cria-t-il: ôtez-moi cet objet;'il est hideux! que sa rencontre

e cause d'horreur et d'effroiapproche pas, ô Mort! ô Mort, retire-toi!»

écénas fut un galant homme;a dit quelque part: «Qu'on me rende impotent.l-de-jatte, goutteux, manchot, pourvu qu'en somme

vive, c'est assez, je suis plus que content.»viens jamais, ô Mort; on t'en dit tout autant.

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a mort et le bûcheron

pauvre bûcheron, tout couvert de ramée,us le faix du fagot aussi bien que des ansmissant et courbé, marchait à pas pesants,tâchait de gagner sa chaumine enfumée.fin, n'en pouvant plus d'effort et de douleur,

met bas son fagot, il songe à son malheur.el plaisir a-t-il eu depuis qu'il est au monde?est-il un plus pauvre en la machine ronde?

int de pain quelquefois et jamais de repos.femme, ses enfants, les soldats, les impôts,créancier et la corvéei font d'un malheureux la peinture achevée.

appelle la Mort. Elle vient sans tarder,i demande ce qu'il faut faire.

'est, dit-il, afin de m'aiderrecharger ce bois, tu ne tarderas guère.»

trépas vient tout guérir;ais ne bougeons d'où nous sommes:utôt souffrir que mourir,est la devise des hommes.

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homme entre deux âges et ses deux maîtresses

homme de moyen âge,tirant sur le grisongea qu'il était saisonsonger au mariage.

avait du comptant,

partantquoi choisir; toutes voulaient lui plaire:quoi notre amoureux ne se pressait pas tant;

en adresser n'est pas petite affaire.ux veuves sur son cœur eurent le plus de part:

une encor verte, et l'autre un peu bien mûre,ais qui réparait par son artqu'avait détruit la nature.

s deux veuves, en badinant,

riant, en lui faisant fête,llaient quelquefois testonnant,

est à dire ajustant sa tête.vieille, à tous moments, de sa part emportaitpeu du poil noir qui restait

in que son amant en fût plus à sa guise.jeune saccageait les poils blancs à son tour.utes deux firent tant, que notre tête grisemeura sans cheveux, et se douta du tour.

e vous rends, leur dit-il, mille grâces, les belles,i m'avez si bien tondu:i plus gagné que perdu;r d'hymen point de nouvelles.lle que je prendrais voudrait qu'à sa façonvécusse, et non à la mienne.n'est tête chauve qui tienne.vous suis obligé, belles, de la leçon.»

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e Renard et la Cigogne

mpère le renard se mit un jour en frais,retint à dîner commère la cigogne.régal fut petit et sans beaucoup d'apprêts:galand, pour toute besogne,ait un brouet clair: il vivait chichement.

brouet fut par lui servi sur une assiette:cigogne au long bec n'en put attraper miette,le drôle eut lapé le tout en un moment.ur se venger de cette tromperie,quelque temps de là, la cigogne le prie.olontiers, lui dit-il, car avec mes amis,ne fais point cérémonie.»'heure dite, il courut au logisla cigogne son hôtesse;

ua très fort sa politesse;ouva le dîner cuit à point:n appétit surtout, renards n'en manquent point.e réjouissait à l'odeur de la viandese en menus morceaux, et qu'il croyait friande.servit, pour l'embarrasser,un vase à long col et d'étroite embouchure.bec de la cigogne y pouvait bien passer;

ais le museau du sire était d'autre mesure.

ui fallut à jeun retourner au logis,nteux comme un renard qu'une poule aurait pris,rrant la queue, et portant bas l'oreille.

ompeurs, c'est pour vous que j'écris:tendez-vous à la pareille.

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enfant et le maître d'école

ns ce récit je prétends faire voirun certain sot la remontrance vaine.

jeune enfant dans l'eau se laissa choirbadinant sur les bords de la Seine.

ciel permit qu'un saule se trouva,nt le branchage, après Dieu, le sauva.tant pris, dis-je, aux branches de ce saule,r cet endroit passe un maître d'école;nfant lui crie: «Au secours, je péris.»magister, se tournant à ses cris,

un ton fort grave à contretemps s'avisele tancer: «Ah! le petit babouin!yez, dit-il, où l'a mis sa sottise!

puis, prenez de tels fripons le soin.e les parents sont malheureux qu'il failleujours veiller à semblable canaille!'ils ont de maux! et que je plains leur sort.»ant tout dit, il mit l'enfant à bord.

blâme ici plus de gens qu'on ne pense.ut babillard, tout censeur, tout pédantpeut connaître au discours que j'avance.acun des trois fait un peuple fort grand:créateur en a béni l'engeance.toute affaire ils ne font que songerx moyens d'exercer leur langue.! mon ami, tire-moi du danger,feras après ta harangue.

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e coq et la perle

jour un coq détournae perle qu'il donnabeau premier lapidaire.

e la crois fine, dit-il;ais le moindre grain de mil

rait bien mieux mon affaire.»

ignorant héritaun manuscrit qu'il portaez son voisin le libraire.

e crois, dit-il qu'il est bon;ais le moindre ducatonrait bien mieux mon affaire.»

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es frelons et les mouches à miel

'œuvre on connaît l'artisan.

elques rayons de miel sans maître se trouvèrent:s frelons les réclamèrent;s abeilles s'opposant,

vant certaine guêpe on traduisit la cause.était malaisé de décider la chose:s témoins déposaient qu'autour de ces rayonss animaux ailés, bourdonnant, un peu longs,couleur fort tannée, et tels que les abeilles,aient longtemps paru. Mais quoi! dans les frelonss enseignes étaient pareilles.guêpe, ne sachant que dire à ces raisons,enquête nouvelle, et pour plus de lumière,

tendit une fourmilière.point n'en put être éclairci.e grâce, à quoi bon tout ceci?t une abeille fort prudente.puis tantôt six mois que la cause est pendante,us voici comme aux premiers jours.ndant cela le miel se gâte.est temps désormais que le juge se hâte:a-t-il point assez léché l'ours?

ns tant de contredits, et d'interlocutoires,de fatras et de grimoires,availlons, les frelons et nous:verra qui sait faire, avec un suc si doux,

s cellules si bien bâties»refus des frelons fit voire cet art passait leur savoir;la guêpe adjugea le miel à leurs parties.

ût à Dieu qu'on réglât ainsi tous les procès:

e des turcs en cela l'on suivît la méthode!simple sens commun nous tiendrait lieu de code:

ne faudrait point tant de frais;lieu qu'on nous mange, on nous gruge,nous mine par des longueurs;fait tant, à la fin, que l'huître est pour le juge,

s écailles pour les plaideurs.

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e chêne et le roseau

chêne un jour dit au roseau:ous avez bien sujet d'accuser la nature;roitelet pour vous est un pesant fardeau;moindre vent qui d'aventure

it rider la face de l'eau,

us oblige à baisser la tête.pendant que mon front, au Caucase pareil,n content d'arrêter les rayons du soleil,ave l'effort de la tempête.ut vous est aquilon, tout me semble zéphyr.cor si vous naissiez à l'abri du feuillagent je couvre le voisinage,us n'auriez pas tant à souffrir:vous défendrai de l'orage;

ais vous naissez le plus souventr les humides bords des royaumes du vent.nature envers vous me semble bien injuste.

Votre compassion, lui répondit l'arbuste,rt d'un bon naturel; mais quittez ce souci:s vents me sont moins qu'à vous redoutables;plie, et ne romps pas. Vous avez jusqu'icintre leurs coups épouvantablessisté sans courber le dos;

ais attendons la fin.» Comme il disait ces mots,bout de l'horizon accourt avec furieplus terrible des enfantse le nord eût porté jusque là dans ses flancs.rbre tient bon; le roseau plie.vent redouble ses efforts,fait si bien qu'il déracinelui de qui la tête au ciel était voisine,dont les pieds touchaient à l'empire des morts.

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able des matières

éfaceMonseigneur le Dauphin

a Cigale et la Fourmi

Corbeau et le Renarda grenouille qui veut se faire aussi grosse que le bœuf s deux muletsLoup et le Chien

a Génisse, la Chèvre et la Brebis en société avec le Liona Besacehirondelle et les petits oiseauxRat de ville et le Rat des champsloup et l'agneau

homme et son imagedragon à plusieurs têtes et le dragon à plusieurs queuess voleurs et l'Âne

monide préservé par les Dieuxa mort et le malheureuxa mort et le bûcheronhomme entre deux âges et ses deux maî tressesRenard et la Cigogne

enfant et le maître d'école

coq et la perles frelons et les mouches à mielchêne et le roseau