Chapitre 1 : Les fondements du commerce international - La diversit des relations internationales

Chapitre 1 : Les fondements du commerce international - La diversit des relations internationales

I - Les thories du commerce international et leurs limites

Partons dun exemple:

Le Nord dispose de 8000h de travail et le sud de 10000h de travail. Le Nord et le Sud peuvent fabriquer des machines et des lots de vtements:

Cots relatifs

Pour fabriquerNORDSUDNORDSUD

1 machine80H120H80/90 = 0,88120/100 = 1,2

1 lot de vtements90H100H90/80 =1,125100/120 = 0.83

Le Nord dispose de 8000h de travail et le sud de 10000h de travail. Le Nord et le Sud peuvent fabriquer des machines et des lots de vtements:

On constate dans cet exemple que le Nord semble avantag la fois pour la production de machines et pour la production de vtements. En effet, l'tat d'avancement des techniques au Nord permet de fabriquer une machine en 80 h et un lot de vtements en 90 h tandis qu'il faudra 120 h pour une machine et 100 h pour un lot de vtements au sud. On aurait donc tendance penser, au premier degr, que le Nord peut se spcialiser dans la production de machines et de vtements et que le sud aurait tout intrt concentrer ses efforts dans d'autres domaines de production. On peut d'ores et dj dire que le Nord dispose d'un avantage sur le sud pour produire des machines et des vtements.

En regardant seulement la premire partie du tableau on voit mal pourquoi le Nord importerait des machines ou des vtements en provenance du Sud. Nous verrons, un peu plus loin, qu'en fait, il n'en est rien.

A -- Les thories de Smith et Ricardo.

Rappel : Adam Smith est le pre fondateur de l'cole librale classique. Dans recherche sur la nature et les causes des richesses des nations , publi en 1776, Adam Smith dresse un vritablehymne aux lois du march. Le laisser-faire et laissez-passer selon la formule chre Vincent de Gournay implique une libert totale de circulation des biens, des capitaux et des personnes entre les nations. Toutefois, Adam Smith n'excluait pas le recours au protectionnisme dans certains cas notamment pour protger les industries dans l'enfance.

Le nom de David Ricardo est systmatiquement cit ds lors que l'on voque les thories classiques du commerce international.

Les thories classiques du commerce international ont t labores par Smith et Ricardo. Adam Smith est l'auteur de la thorie des avantages absolus. Trente ans plus tard, David Ricardo mettra en vidence l'importance des cots relatifs. La thorie des avantages relatifs ou avantages comparatifs a remis en cause les prceptes formuls par Adam Smith.

1 -- La thorie des avantages absolus. (A. Smith)Adam Smith peut tre considr comme le pre du libre-change. Dans sa thorie des avantages absolus, Adam Smith pensait qu'un produit ne pouvait tre export que si les producteurs disposaient de cots plus faibles et donc d'une productivit plus leve que leurs concurrents. Adam Smith raisonnait en termes de cots absolus. Dans l'exemple du tableau, on peut dire que le Nord dispose d'un avantage absolu sur le sud aussi bien pour la production de machines que pour la production de vtements (80h au Nord contre 120 h au sud pour les machines -- 90 h au Nord contre 100h au sud pour les vtements).

Avec la thorie des avantages absolus, le pays qui dispose, pour la fabrication de tel ou tel produit, d'une productivit plus leve que celle de ses concurrents doit se spcialiser dans la production de ce produit. Dans l'exemple que nous avons cit, le Nord devrait donc se spcialiser pour les deux types de production (machines, vtements). Aucun change rciproque n'est donc justifi avec le Sud.

On peut donc en conclure que la thorie des avantages absolus exclut l'change rciproque entre pays ayant des niveaux trs diffrents de dveloppement En effet, le plus dvelopp des pays est susceptible de bnficier de la productivit la plus leve dans tous les secteurs.

David Ricardo remettra en cause cette thorie en montrant que le raisonnement doit s'effectuer non pas en termes de cots absolus met en termes de cots relatifs.

De quoi s'agit-il exactement ?

2 -- La thorie des avantages relatifs ou comparatifs.

L'ide de dpart de Ricardo est sensiblement la mme que celle de Smith : un pays l'intrt produire et exporter ce qui lui cote le moins cher en cots de production et importer les produits pour lesquels il n'est pas spcialis. Par exemple, la France a intrt importer des bananes ou du caf plutt qu'essayer d'en produire dans des serres!! . Il se cre donc naturellement un flux d'changes entre les pays dans la mesure o chaque pays y trouve un avantage relatif.

Le grand mrite de Ricardo a t de montrer que le flux d'change rciproque ne dpend pas de l'existence d'un avantage absolu pour chaque pays mais de la seule diffrence des rapports de cots entre les pays. En prenant l'exemple clbre de l'Angleterre et du Portugal pour deux produits ( le vin et le drap) Ricardo a montr l'intrt que chacun des deux partenaires peut trouver dans l'change.

En se reportant nouveau l'exemple du tableau est en s'attardant cette fois examiner les cots relatifs, on constate que les rapports de cots concernant la fabrication d'une machine au Nord et au Sud jouent nettement en faveur du Nord -- le rapport est de 0,88 pour le Nord et de 1,2 pour le sud. Le Nord dispose donc d'un avantage relatif sur le sud pour la production de machines. Concernant au contraire les vtements le rapport est de 1, 125 pour le Nord et de 0,83 pour le sud -- le Sud dispose donc d'un avantage relatif sur le Nord pour la production de vtements. D'aprs la thorie des avantages relatifs, le Nord a donc intrt se spcialiser dans la production de machines et les exporter vers le Sud tandis que le sud a intrt se spcialiser dans la production de vtements et les exporter vers le Nord. En conclusion sur ce point, dans une logique ricardienne, la loi de l'avantage comparatif et des prix relatifs doit entraner un flux d'changes qui doit profiter aux deux partenaires.

En thorie, chacun des partenaires doit donc y gagner en bien-tre et doit quilibrer sa balance extrieure mais en pratique, bien entendu, il n'en est pas toujours ainsi et la thorie de Ricardo semble parfois bien loigne de la ralit. Disons que les thories de Smith et Ricardo reprsente un bon point de dpart pour comprendre la ralit des changes internationaux contemporains. Il est donc ncessaire de souligner les limites que peuvent comporter ces thories mais avant cela tudions en tout d'abord les prolongements.

B. -- Les thories sudoises.

HECKSHER et OHLIN sont les thoriciens de l'ingalit des dotations en facteurs.

L'ide de dpart de ces thories consiste dire que chaque pays est dot de facteurs de production en proportion diffrente. Cette diffrence de proportion conditionne la nature des changes entre les pays.

-- En 1919, HECKSHER tentent de fournir une explication la diffrence des cots relatifs pouvant exister entre les pays.. Il admet que les techniques de production peuvent tre facilement transfres d'un pays l'autre (alors que Ricardo ne l'admettait pas). Partant de l, si les cots de production sont diffrents entre les pays c'est parce que les prix des facteurs de production y sont diffrents. Chaque pays est donc amen combiner ses facteurs de production (travail, capital, ressources naturelles) de manire diffrente. Par exemple, dans les pays o la main-duvre est abondante le prix du travail sera faible et la production se spcialisera dans des biens incorporant une forte proportion de facteur Travail et une faible proportion de facteur Capital. Le commerce extrieur de ces pays se caractrisera donc par une spcialisation dans l'exportation de ces biens.

-- En 1934, Ohlin noncera la loi de la proportion des facteurs : un pays tend se spcialiser dans la production pour laquelle la combinaison de facteurs dont il dispose lui donne le maximum d'avantages ou le minimum de dsavantages. .

En d'autres termes, et pour rsumer :

1. La production de biens diffrents ncessite des facteurs de production en proportion diffrente.

2. Les pays ont des dotations relatives diffrentes en facteurs de production.

3. Chaque pays un avantage comparatif pour les biens qui contiennent une proportion leve du facteur dont il est abondamment dot -- il exportera ces biens et importera des biens qui, au contraire, contiennent une forte proportion de facteurs dont il est faiblement dot.

Par exemple, le Canada connat une abondance de ressources naturelles tandis que la main-duvre y est le facteur rare -- l'Inde est pourvue d'une main-duvre non qualifie trs abondante alors que le capital et le facteur rare -- etc....

Thorme d'Hecksher-Ohlin : le commerce international tend produire une galisation des rmunrations de facteurs, galisation qui ne saurait tre absolue. .

Cela signifie que le commerce international conduira chaque pays se spcialiser dans la production de biens incorporant les facteurs de production abondants sur son territoire et qu' plus ou moins long terme les salaires et les profits auront tendance s'galiser dans le monde entier !!!!!!!

Certaines observations contredisent toutefois les thories classiques et leurs prolongements :

C -- Les limites aux thories classiques du commerce international.

Certaines observations sont en effet assez paradoxales dans la mesure o elles contredisent, o tout au moins semblent contredire les thories de Smith, Ricardo, et les thories sudoises. Une des plus clbres concerne l'analyse du commerce extrieur amricain -- plus connue sous le nom de paradoxe de Lontief .

1 -- le paradoxe de Lontief :En 1954, un conomiste amricain, Lontief entreprit de vrifier empiriquement la nature du commerce extrieur amricain.

L'opinion admise tait la suivante : -- aux USA, le capital est le facteur abondant et la main-duvre et le facteur rare par rapport au reste du monde. En toute logique, les USA devaient donc exporter des biens forte intensit de capital et importer des biens forte intensit de main-duvre.

Or l'tude de Lontief montrait le contraire : -- les USA importaient des biens forte intensit de capital . Ce rsultat tait paradoxal et semblait anantir les thories sudoises.

Explication du paradoxe :

L'explication des conomistes sudois tait insuffisante car ceux-ci ne prenaient en compte que trois facteurs de production (Travail, Capital, ressources naturelles) sans les nuancer. Pour redonner une porte explicative aux thories sudoises, il faut admettre qu'en fait il n'existe pas 3 mais 5 facteurs de production :

1. Le travail non qualifi.

2. Le travail qualifi.

3. Le capital (usines et quipements).

4. La terre cultivable.

5. Les gisements miniers et ptrolifres.

Le paradoxe de Lontief devient alors explicable : -- c'est le travail qualifi qui est abondant aux USA par rapport au reste du monde. En fait, le capital n'a jamais t relativement abondant aux USA bien quen valeur absolue il ait t suprieur au reste du monde. Ceci explique donc le fait que les USA importent des biens forte intensit de capital (bois, chaussures, confection, cuir, automobiles, mobilier, jouets.) mais incorporant beaucoup de main-duvre peu qualifie. Ceci rconcilie un peu Lontief et les thoriciens sudois en redonnant une certaine porte leurs thories.

Le paradoxe de Lontief a pour mrite de mettre en vidence le rle essentiel de la qualification professionnelle dans l'explication de la configuration des changes. En fait, les changes de produits primaires sont largement dtermins par la localisation des ressources naturelles et l'importance de la main-d'oeuvre non qualifie dans certains pays. Au contraire, les pays industriels avancs sont riches en main-duvre qualifie par rapport au reste du monde -- leurs exportations incorporent donc une forte proportion de travail qualifi tandis que leurs importations incorporent une forte proportion de travail non qualifi.

2 -- Les changes croiss :

Les thories traditionnelles du commerce international ne parviennent pas expliquer l'accroissement des changes croiss de produits semblables depuis une cinquantaine d'annes. Nous changeons par exemple des automobiles contre d'autres automobiles, des produits lectroniques contre d'autres produits lectroniques, etc... L'explication de ces changes croiss peut se formuler brivement de la manire suivante : .

Tout d'abord, un pays peut se constituer un avantage comparatif grce l'existence d'une demande intrieure importante permettant de raliser une production sur une grande chelle donc de rduire les cots. Par ailleurs, le got des consommateurs peut se porter vers des produits trangers notamment lorsque ceux-ci sont de meilleure qualit ou lorsqu'il s'agit de biens fortement substituables. Ensuite, une branche peut-tre globalement dficitaire dans un pays tout en possdant des firmes comptitives dont certaines seront exportatrices.

3 - Les avantages comparatifs peuvent tre remis en cause :

N'oublions pas que le modle de Ricardo raisonne de manire ultra-simplifie (deux pays, deux biens).

Les pays peuvent prendre des mesures protectionnistes qui remettent en cause les dbouchs des produits trangers sur le sol national.

Les thories classiques raisonnent en termes rels, on parle d'heures de travail mais pas de monnaie -- or l'introduction de la monnaie peut modifier la nature des changes (taux de change variables, etc..).

Les thories classiques raisonnent de manire intemporelle en ignorant les problmes que posent les transformations des structures productives.

Par ailleurs, les modles classiques raisonnent comme si les cots de transport t nulle et ne modifient pas les donnes relatives l'change, et comme si les firmes ne dlocalises par leur production.

Soulignons enfin que de nombreux pays (pays en voie de dveloppement surtout) ne parviennent pas ou mal s'intgrer dans le commerce international.

80 % des changes mondiaux sont un change Nord -- Nord entre les pays de la triade ( union europenne, associations de libre-change nord-amricaine, et pays asiatiques conomie de march).

Le commerce international se caractrise par des relations de domination financires & commerciales, ne l'oublions pas.

II - la diversit des relations conomiques internationales

A -- la diversit des relations internationales quant leur nature.

La nature des relations internationales est en effet trs diversifie:

Relations politiques et diplomatiques.

Mouvement de personnes.

changes commerciaux de biens et de services.

Mouvements de capitaux.

changes intellectuels et techniques.

changes culturels.

Bien entendu, de nombreuses interactions existent entre ces diffrentes formes de relations internationales. Par exemple, la visite d'un chef d'tat tranger peut provoquer la signature de contrats commerciaux importants. Par ailleurs, les changes commerciaux banalisent les modes de consommation dominants ce qui a pour effet, sur le long terme, d'uniformiser les cultures.

B. -- la diversit des relations internationales quant leurs acteurs.

Tous les acteurs conomiques peuvent potentiellement tre des acteurs du commerce international :

Les mnages sont les premiers acteurs du commerce international. Les migrations sont en effet trs d'importantes, qu'elles soient professionnelles ou touristiques.

Extrait un ouvrage de Jean-Bernard : la France et le march mondial.

En quoi sommes-nous concerns par le problme des changes internationaux ? Pour rpondre cette question, il n'est que de faire le voyage le plus court qui soit, un voyage imaginaire autour de ma chambre... De tout ce que j'y trouve d'origine trangre, voici l'inventaire. La table sur laquelle j'cris est en acajou. La plupart de mes outils sont trangers : la machine crire est une Olivetti, le stylo est un Parker qui, mme s'il est fabriqu en France, le march payait une redevance ses crateurs amricains. La gomme est en caoutchouc import de Malaisie ou de Borneo. Le papier franais mais il y a fort parier que sa production a mis en oeuvre des bois scandinaves ou canadiens. Sur la table, la lampe est en cuivre, ncessairement import.

La chane haute fidlit et plus complexe. Instruments de l're lectronique, il tmoigne d'une division du travail entre une multitude de fabricants situs dans 3 ou quatre pays. La platine est anglaise, la tte de lecture allemande, les semi-conducteurs certainement japonais et les firmes amricaines peroivent des brevets sur maintes pices. Si l'lectricit qui m'clairait incontestablement franaise, la chaudire du chauffage central est alimente en fuel-oil produit grce des techniques principalement amricaines, partir de ptrole brut import du Moyen-Orient ou d'Algrie. .

Une observation s'impose : le consommateur est, au final, le principal artisan du commerce international.

Bien entendu, ce sont les entreprises qui jouent un rle essentiel au niveau des relations internationales. Elles exportent, elles importent, elle se multinationalisent, implantent des filiales de production, de distribution, etc...

Le systme bancaire est galement trs internationalis.

Les organisations internationales se multiplient (voir chapitres suivants).

C -- Diversit des relations internationales quant leur intensit

Intensit nulle : autarcie.

Intensit faible : protectionnisme -- nationalisme.

Intensit forte : union douanire, union conomique (voir notions de zone de libre-change, union douanire, march commun dans le chapitre sur la construction europenne).

Quelques dfinitions :

Autarcie : -- rgime conomique d'un pays se suffisant lui-mme et n'effectuant avec les autres aucuns changes. Exemple : systmes collectivistes leurs dbuts. Il est trs rare qu'il s'agisse d'une situation totale et permanente.

Nationalisme : -- forme voisine du protectionnisme qui consiste considrer tous les problmes d'un point de vue strictement propres la nation laquelle on appartient. Les intrts immdiats sont ici privilgis au dtriment des progrs long terme.

Union douanire : -- ensemble de pays qui adopte un tarif douanier commun vis--vis des importations des autres pays.

Union conomique : -- ensemble de pays qui adopte une monnaie unique (ex. euro).