géochimies isotopiques

52
Géochimie isotopique Chapitre 2: Géochimie des isotopes radiogéniques... Attention à la lecture des exposant et indices (isotopes, valeurs numériques et équations), ainsi que des lettres issues de l'alphabet grec (α, β+...) qui ne sont pas tous bien retranscrists dans la version html de ce document Retour au Chapitre 1: Structure de la matière 2.1. Introduction 2.2. Géochronologie 2.2.1. Introduction: un peu d'histoire 2.2.1.1. Le temps infini des Anciens et du Moyen Age 2.2.1.2. Les âges bibliques 2.2.1.3. Les premiers âges géologiques 2.2.1.4. La découverte de la radioactivité 2.2.2. Généralité sur le calcul d’un âge radiochronologique 2.2.3. Le système Rb-Sr 2.2.3.1. Isotopes du Rb et du Sr, parentés 2.2.3.2. Géochimie du Rb et du Sr 2.2.3.3. Exemple de datations de roches magmatiques 2.2.3.4. Métamorphisme et ouverture du système Rb-Sr Suite du Chapitre 2: Géochimie des isotopes radiogéniques... (partie 2) Orientation bibliographique : Une partie des chapitres qui suivent a été fortement structurée par la traduction et à la compilation de deux cours de géochimie disponibles "on line" de W.M. White: Geochemistry de W.M. White Lien online aux chapitres de ce cours de géochimie très complet... Isotope Geochemistry du même W.M. White Lien online aux chapitres de ce cours de géochimie isotopique le plus complet du web... 2. Géochimie des isotopes radiogéniques... 2.1. Introduction Nous pouvons considérer deux applications essentielles à la géochimie des isotopes radiogéniques La première application concerne naturellement la géochronologie qui se base sur la propriété de constance du taux de désintégration des nucléides instables au cours du temps (déjà évoquée précédemment). L’indépendance de

Upload: yassir-stati

Post on 28-Nov-2015

60 views

Category:

Documents


1 download

TRANSCRIPT

Page 1: Géochimies isotopiques

Géochimie isotopiqueChapitre 2: Géochimie des isotopes radiogéniques...

Attention à la lecture des exposant et indices (isotopes, valeurs numériques et équations), ainsi que des lettres issues de l'alphabet grec (α, β+...) qui ne sont pas tous bien retranscrists dans la version html de ce document

Retour au Chapitre 1: Structure de la matière

2.1. Introduction2.2. Géochronologie2.2.1. Introduction: un peu d'histoire2.2.1.1. Le temps infini des Anciens et du Moyen Age2.2.1.2. Les âges bibliques   2.2.1.3. Les premiers âges géologiques2.2.1.4. La découverte de la radioactivité2.2.2. Généralité sur le calcul d’un âge radiochronologique2.2.3. Le système Rb-Sr2.2.3.1. Isotopes du Rb et du Sr, parentés2.2.3.2. Géochimie du Rb et du Sr2.2.3.3. Exemple de datations de roches magmatiques2.2.3.4. Métamorphisme et ouverture du système Rb-Sr

Suite du Chapitre 2:   Géochimie des isotopes radiogéniques...  (partie 2)

Orientation bibliographique : Une partie des chapitres qui suivent a été fortement structurée par la traduction et à la compilation de deux cours de géochimie disponibles "on line" de W.M. White:

Geochemistry de W.M. White Lien online aux chapitres de ce cours de géochimie très complet...   Isotope Geochemistry du même W.M. White Lien online aux chapitres de ce cours de géochimie isotopique le plus complet du web...

 2. Géochimie des isotopes radiogéniques...

2.1. Introduction 

Nous pouvons considérer deux applications essentielles à la géochimie des isotopes radiogéniques 

La première application concerne naturellement la géochronologie qui se base sur la propriété de constance du taux de désintégration des nucléides instables au cours du temps (déjà évoquée précédemment). L’indépendance de ce phénomène aux conditions physico-chimiques environnantes permet par simple mesure de la quantité de nucléides fils et de nucléides pères de calculer un temps durant lequel le système géologique est resté clos.  

La seconde application concerne leur utilisation en tant que traceurs géologiques. Cette utilisation se base sur le fait que tous les isotopes d’un même élément possède les mêmes propriétés chimiques au cours des phénomènes géologiques (fusion, cristallisation…). Corrigés de l’âge de la roche, les rapports isotopiques des roches dépendent donc de la nature de la source de l’élément considéré.

Page 2: Géochimies isotopiques

Principales paires (ou triplet dans le cas de l’uranium, du thorium et du plomb ou du K-Ar-Ca) d’éléments à vie longue dont les isotopes radiogéniques (pères et fils) seront utilisés en géochronologie ou comme traceurs pour les phénomènes géologiques anciens. Leur demi-vie et la valeur de la constante de désintégration l associée sont reportées pour chacun d’eux.

Page 3: Géochimies isotopiques

Principaux isotopes cosmogéniques à vie courte, ces isotopes radiogéniques seront utilisés en géochronologie ou comme traceurs pour les phénomènes géologiques récents. D’après leur demi-vie très « courtes », ces isotopes auraient disparu du milieu naturel depuis plusieurs milliards d’années si ils n’étaient pas constamment régénérés par les réactions entre les gaz de l’atmosphère et les rayons cosmiques. Le tritium (3H) est lié en grande partie pour son origine aux explosions de bombes nucléaires en surface de la Terre (courantes dans les années 1950 à 1970). Leur demi-vie et la valeur de la constante de désintégration l associée sont reportées pour chacun d’eux.

Ces deux utilisations directes de la géochimie des isotopes radiogéniques (datation et traceur) seront liées à des paires d’éléments à vie longue pour les phénomènes géologiques anciens (> million d’années) et à des paires d’éléments à vie courte (isotopes cosmogéniques) pour les phénomènes géologiques les plus récents.

2.2. Géochronologie 

2.2.1. Introduction : un peu d’histoire 

Cette partie 2.2.1. provient pour sa plus grande part du site de Vincent Deparis (ens-lyon/âge de la Terre) traitant de l'âge de la Terre. Elle n'a pas été paraphrasée mais seulement intégrée dans le plan du cours. Je conseille également de lire l'ouvrage passionant de V. Deparis et H. Legros, Voyage à l’intérieur de la Terre. De la géographie antique à la géophysique actuelle. Une histoire des idées, Paris, CNRS Editions, 2000.

2.2.1.1. Le temps infini des Anciens et du Moyen Age

Pour Aristote (384-322 av. J.-C.), la Terre est éternelle et garde perpétuellement son identité car les modifications de la surface se compensent en moyenne. Pour les Stoïciens, au contraire, la Terre est engagée dans une succession de créations et de destructions où à chaque fois le même monde est créé avec les mêmes êtres et les mêmes événements. Équilibre perpétuel chez Aristote, répétitions cycliques chez les Stoïciens, dans les deux cas il y a conservation du Monde. Les premières compilations des âges et des générations des personnages de l'Ancien Testament sont tentées au Ier siècle apr. J.-C. par Flavius Josèphe (37-100), puis par Théophile d'Antioche (115-181) et Eusèbe de Césarée (265-339) pour retrouver la date de la création : 5500 ans avant la naissance du Christ.

Page 4: Géochimies isotopiques

Aristote (384-322 av. J.-C.)

Les Stoïciens... ZÉNON de Kition (~335 - ~262)

Flavius Josèphe (37-100)

Eusèbe de Césarée (265-339)

2.2.1.2. Les âges bibliques  top...

Au cours du XVIe et du XVIIIe siècles, Alphonse de Vignole (1649-1744) compte plus de deux cents calculs différents : le plus court donne 3483 ans depuis la Création jusqu'au Christ, le plus long 6984. En 2003, Jean Dercourt constate "que les valeurs obtenues correspondent à l'âge du cuivre; or les archéologues établissent que durant cette période, le peuple juif quitta le bassin mésopotamien pour aller vers l'Ouest. On mesure là les pérégrinations d'un peuple et non l'âge de la Terre"

Le plus célèbre de ces âges est dû à James Ussher (1581-1656), qui affirme que la Création eut lieu au début de la nuit précédant le 23 octobre de l'an 4004 av. J.-C.. Christophe Colomb (1450-1506),Mercator (1512-1594),  Johannes Kepler (1571-1630), Isaac Newton (1642-1727) font chacun leur proposition.

James Ussher (1581-1656)

Christophe Colomb(1450-1506)

Mercator (1512-1594)Johannes Kepler (1571-1630)

Toute l'histoire de la Terre (la formation des montagnes, l'empilement des couches géologiques, le creusement des vallées) se trouve concentrée dans ces courtes durées sans que cela pose problème. La Terre se forme et se structure au cours d'événements brefs et violents, dont le Déluge est le principal.

2.2.1.3. Les premiers âges géologiques top...

Vers 1660, Niels Stenon (1638-1680) reconnut au Danemark la continuité et l'homogénéité des niveaux de craie sur de grandes régions, et admis qu'elles représentaient l'accumulation de sédiments pendant une

Page 5: Géochimies isotopiques

certaine durée de temps, chaque niveau pouvant définir une unité de temps. Buffon (1707-1788) reprend cette piste et détermina la quantité de sédiments s'accumulant dans une mare de sa propriété de Montbard et établit un taux de sédimentation. Il mesura l'épaisseur d'une formation sédimentaires le long des côtes normandes et en déduisit qu'elle s'était déposée en plusieurs dizaines de milliers d'années (dans ses carnets, Buffon propose des temps beaucoup plus longs de l'ordre de dizaines de Ma).

En 1721, Henri Gautier (1660-1737) a l'idée lui de dater l'âge du globe en estimant le temps d'érosion des reliefs grâce à la mesure de la turbidité des fleuves. Il affirme qu'en 35 000 ans un continent serait entièrement nivelé. Mais lorsque l'on reprend ses mesures et la loi qu'il invoque, on trouve des durées bien plus considérables (tout comme Buffon on observe une certaine retenue ou "Peur" des dates longues.).

En estimant le taux de sédimentation ou le taux d'érosion des montagnes et en les supposant constants dans le temps, des géologues, telsJohn Tuberville-Needham (1713-1781), Pierre-Bernard Palassou (1745-1830) ou Jean-Louis Giraud Soulavie (1752-1813) puis Phillips (1800-1874), arrivent à des âges deplusieurs millions d'années pour la formation des couches sédimentaires ou l'abrasion des reliefs. Au début du 20è siècle, Grove Karl Gilbert (1843-1918) assimila chaque couche épaisse de quelques décimètres dans la craie des grandes plaines d'Amérique du Nordres à un cycle de la Terre autour du Soleil (cycle de précession). Alors la durée put s'exprimer en années et le Gilbert fut défini (22 000 ans). Mais les non-dépôts entre les couches et les érosions étaient trop fréquentes pour que cette unité ait valeur générale.

Buffon (1707-1788), de son côté, a l'idée en 1778 de se servir du refroidissement du globe. Il affirme que  la Terre était au début de son histoire entièrement en fusion, qu'elle s'est ensuite consolidée et lentement refroidie.  En extrapolant une série d'expériences sur des globes de métaux, de verre et de pierre, il trouve qu' il a fallu 2 905 ans pour que la consolidation atteigne le centre de la planète, 33 911 ans pour qu'il soit  possible de la toucher et 74 047 ans pour qu'elle acquiert sa température actuelle. Ces âges lui semblent encore insuffisants lorsqu'il cherche à les concilier avec les phénomènes géologiques....

Une valeur de l'âge du globe est donnée par Charles Darwin (1809-1882) en 1859 : il estime à 300 millions d'années  le temps mis par la mer pour creuser la vallée de Weald dans le sud de l'Angleterre (il extrapole le taux d'érosion actuel). Cette durée lui semble compatible avec l'évolution biologique et les lents processus de la sélection naturelle.

 

Lord Kelvin défend pour la Terre un âge fini de 100 millions d’années, ou tout du moins compris entre 20 et 400Ma (qu’il révisera plusieurs fois à 96 Ma en 1862, 100 Ma en 1868, 50 en 1876, 20 à 50 en 1881 et enfin 24 Ma en 1893). En supposant que la température initiale du globe était homogène et égale à la température de fusion des roches et en utilisant les lois de la diffusion de la chaleur de Fourier (refroidissement par conduction), il calcule un temps de 20 à 400 Ma pour que la variation de température près de la surface (le gradient géothermique) atteigne la valeur actuelle de 37°/km.Lord Kelvin et d'autres physiciens se rallient à l'estimation basse de 24 Ma. Ils

Page 6: Géochimies isotopiques

déterminent en effet que si le Soleil tire son énergie de sa contraction gravitationnelle, il ne peut pas avoir un âge supérieur à 20-25 Ma, limitant du même coup l'âge de la Terre.

John Joly (1857-1933) définit en 1899 un âge de 100 millions années (datation basée sur l’hypothèse que la salinité de l’eau de mer a été acquise de manière régulière au cours du temps par l’apport fluviatile (cette hypothèse date en fait de 1715, elle a été émise par Edmond Halley  (1656-1743) pense trouver l’âge de la terre dans la salure de l'océan qui doit augmenter régulièrement au cours des temps en fonction de l'apport continuel en sels par les fleuves. Il affirme qu'on trouvera  peut-être de cette manière que le monde est bien plus vieux qu'on ne le pense mais il ne donne pas de chiffres.)

2.2.1.4. La découverte de la radioactivité top...

La découverte de la radioactivité par Henri Becquerel (1852-1908) en 1896 va débloquer la situation.

La production de chaleur par les désintégrations radioactives invalide le modèle thermique de lord Kelvin et rend caduque son estimation de l'âge du globe (l'erreur de lord Kelvin est en fait surtout d'avoir oublié la convection qui modifie complètement le mode de refroidissement de la planète en apportant continuellement en surface de la chaleur provenant des profondeurs).

Pierre Curie (1859-1906) observe qu'une émanation gazeuse produite par le radium perd exponentiellement son activité qui diminue de moitié tous les 3 jours, 24 heures et 42 minutes et en déduit, en 1902... "Qu'ainsi, une mesure absolue du temps, indépendante des observations astronomiques était possible, car la variation d'abondance d'un élément radioactif mesure un temps écoulé".

La radioactivité fournit un nouveau moyen pour déterminer l'âge des roches. Le rapport éléments radioactifs/éléments radiogéniques (produits de la désintégration) ne dépend en effet que du temps et constitue une horloge (si on connaît la proportion initiale d'éléments radiogéniques).

La première tentative est basée sur la mesure de l'hélium produit par la désintégration du radium. En 1904,Ernest Rutherford (1871-1937) attribue à un échantillon un âge de 40 Ma, qu'il révise en 1905 à 140 Ma, puis en 1906 à 500 Ma

Lord Rayleigh (1875-1947), par la même méthode, est le premier en 1905, à dépasser le milliard d'années. Les mesures de l'hélium sont cependant biaisées car d'une part l'hélium ne reste pas confiné dans la roche mais peut s'échapper et d'autre part il peut provenir de la désintégration d'autres éléments.

Bertram Boltwood (1870-1927) 1907 élabore en 1905 une méthode de datation plus fiable en se basant sur la mesure du rapport uranium/plomb dans des pechblendes, il obtient 410 à 535 millions d’années

Page 7: Géochimies isotopiques

Henri Becquerel (1852-1908)

Ernest Rutherford (1871-1937)

Lord Rayleigh (1875-1947)

Bertram Boltwood(1870-1927)

Pendant ces premières années de géochronologie "absolue" les résultats parraitront disparates quant à l'âge absolu de la Terre en raison des échantillons utilisés. Pierre Termier (1859-1930), écrira même en 1910 "La méthode repose toute entière sur un « postulatum » invérifiable qui est la constance absolue de la vitesse de désintégration de l'atome instable. Tout cela est vraisemblable mais incertain".

Néanmoins les datations se succèdent dans cette première moitié du XX siècle. Arthur Holmes 1913 (qui soutient Wegener) constate d'abord que les résultats confirment tous l'échelle stratigraphique basée sur des données paléontologiques, et il en sera ainsi pour toutes les mesures ultérieures, et les premières valeurs qu'il proposa, sont pour nombre d'entre elles aujourd'hui confirmées :

- pour le Carbonifère, il proposa 340 Ma et les mesures sophistiquées actuelles indiquent que la période a commencé il y a 354 Ma et s'est achevée il y a 298 Ma

- pour le Dévonien, il proposa 370 Ma et aujourd'hui il dure de 350 à 410 Ma

- pour le Silurien, ce sera 430 Ma et aujourd'hui 435 à 410 Ma

Grâce à cette méthode géochimique, il estime également que les plus vielles roches doivent avoisiner les1600 millions d’années.

Partant à la recherche de l'âge de la plus vieille roche terrestre, Russel (1877-1957) en 1921 constate que la plus ancienne roche connue avait 1 Ga et que si l'on admettait que tout le plomb des minéraux terrestres était issu de la désintégration de l'uranium, il avait fallu 8 Ga pour le faire.

Alfred Nier puis Harold Urey (première datation sur les rapports isotopique plutôt que sur les concentrations d’éléments). Alfred Nier fait progresser  les méthodes radiochronologiques en se servant de la notion d'isotope. Trois chaînes radioactives (uranium 238/plomb 206, uranium 235/plomb 207 et thorium 232/plomb 208) permettent de réaliser des datations ainsi que le rapport plomb 206/plomb 207 qui est lui aussi fonction du temps (méthode Plomb-Plomb). Nier trouve pour les plus vieux échantillons de roche des âges de 2 570 Ma.

En 1946, Arthur Holmes (1890-1965) et Friedrich Houtermans (1903-1966) montrent que moyennant des hypothèses sur les compositions initiales, la méthode de Nier donne directement accès à l'âge de la Terre, qu'ils fixent entre 3 et 3,4 milliards d'années.

En 1953, un nouveau progrès dans l'estimation de l'âge du globe provient de l'analyse de la composition isotopique des météorites. Clair Patterson (1995) montre, à partir de la méthode uranium/plomb, que la Terre et les météorites se sont formées au même moment à partir d'un réservoir identique, il y a 4,55milliards d'années. Cet âge est confirmé par d'autres méthodes radiochronologiques (potassium/argon et rubidium/strontium) et définitivement accepté dans les années 1970 par la datation des roches lunaires.

Page 8: Géochimies isotopiques

Arthur Holmes (1890-1965)

Alfred Nier (1911-1994)

Harold Urey (1893-1981)Clair Patterson (1922-1995)

Orientation bibliographique :

V. Deparis et H. Legros, Voyage à l’intérieur de la Terre. De la géographie antique à la géophysique actuelle. Une histoire des idées, Paris, CNRS Editions, 2000. 

"Age et histoire de la Terre" Discours de Jean Dercourt, Secrétaire perpétuel à l'Académie des sciences, Séance solennelle de réception des Membres élus en 2002, 17 juin 2003. 

Richet, P., L'âge du monde : à la découverte de l'immensité du temps. Seuil, Paris, 1999

2.2.2. Généralité sur le calcul d’un âge radiochronologique

Nous avons vu précédemment que la désintégration des noyaux instables ou excités suivait une loi f(t) caractérisé par un constant lambda propre à chaque élément père. Soit à un temps t, le nombre de nucléides fils Fmesuré peut s’écrire :

 Soit:

Dans un système géologique naturel, cette équation possède deux inconnues : Fo la quantité initial du nucléide Fils à t=0 et t (ou e(lambda*t-1) l’âge de la roche. Ce système peut être résolu et l’âge de la roche connue que si F0 = 0 (il ne reste alors plus qu’une inconnue)

Page 9: Géochimies isotopiques

Dans une représentation graphique du nombre de nucléides Fils (nb F) versus nombre de nucléides Père (nb P) chaque roche est caractérisée par une diminution de nb P et une augmentation de nb F au cours du temps. Si F0 différent de 0, le nombre de nucléides Fils à t=0 (F0) n’est pas commun aux trois systèmes lithologiques et ne permet donc de trouver l’âge.

Si l’on divise chaque terme par le nombre de nucléides stables G (F et G sont des isotopes du même élément, différent de l’élément P). Pour ces mêmes roches, l’abondance relative de nucléides Fils à t=0 (Abr F0 = nb F/nb G)) est commune aux trois systèmes lithologiques, en effet les processus de cristallisation et de fusion ne fractionnent pas les isotopes d’un même élément. Par contre, les rapport nb P/nb G restent différents (éléments différents) et caractérisent chaque roche. Graphiquement, à un temps t donné, les 3 roches s’alignent sur une même droite appelé isochrone (droite reliant des roches de même (iso-) âge (-chrone)). L’équation de cette droite est de la forme nb F/nb G = a* nb P/nb G + c et permet donc une résolution simultanée d’un système de 3 équations :

Page 10: Géochimies isotopiques

Pour lesquelles:

La droite solution du graphique précédent  :

Est solution de chacune de 3 équations de la forme :

ce qui nous permet de définir les constante a (intercepte) et c (pente de la droite) :

Plus le nombre d’équations relatives à un même système géologique (même âge et même F0) est important plus t et F0 peuvent être déterminés avec précision. Pour une datation sur roche totale, une dizaine d’échantillons est ainsi souhaitable. Lorsque ce nombre de 10 échantillons (même âge et même F0) n’e peut être atteint (ex : datation sur minéraux séparés n=2 à 4 ), on utilise de préférences plusieurs systèmes équivalents (F0 varie mais pas t) pour confirmer l’âge puis pour reculer F0 dans un second temps.

La qualité de la droite isochrone (et donc de l’âge) dépendra significativement de l’écart de valeurs nb P/ nb G.

2.2.3. Le système Rb-Sr 

2.2.3.1. Isotopes du Rb et du Sr, parentés 

Le strontium (symbole : Sr) possède de nombreux isotopes (Z = 38 et 73 < A < 105 ; M= 87,62). Seuls 4  sont stables dans la nature (84Sr, 86Sr, 87Sr et 88Sr), les autres isotopes ont des demie-vies très courtes et ont donc des abondances dans la nature négligeables. Le 87Sr provient pour partie de la désintégration β- du 87Rb.

Page 11: Géochimies isotopiques

Le rubidium (Rb) possède de nombreux isotopes (Z = 37 et 71 < A < 101 ; M= 85,4678). Seuls 1 est stable dans la nature (85Rb), et 1 possède une demie-vie très longue (87Rb). Les autres isotopes ont des demie-vie très courtes et ont des abondances dans la nature négligeables. Le 87Rb  est radiogénique et se désintègre en 87Sr par radioactivité β-.

Dans le cas du couple 87Rb-87Sr, l’équation (5) devient:

Pour permettre la résolution de cette équation dans un système naturel, Chaque terme est normalisé au nucléide stable 86Sr.

 

2.2.3.2. Géochimie du Rb et du Sr 

Page 12: Géochimies isotopiques

Le strontium appartient au groupe des alcalino-terreux (deuxième colonne) tout comme le calcium et le barium. Sr et Ca ont le même comportement et le Sr intégrera donc les minéraux calciques tels que les plagioclases, l’apatite, le sphène, les pyroxènes calciques et les amphiboles calciques en milieu endogène et la calcite, le gypse, la baritine etc. en milieu exogène.

Le rubidium appartient à la première colonne de la classification périodique des éléments, c’est un alcalin tout comme le potassium et le sodium. En milieu magmatique, le Rb sera donc incompatible tout comme le potassium et le substituera lors de la formation de minéraux potassiques tels que les feldspaths alcalins et les micas.

D’une manière générale, le rubidium et le strontium sont enrichis dans les matériaux crustaux plutôt que dans les matériaux mantelliques. Les roches granitiques présentent des rapports Rb/Sr importants alors que les roches mafiques présentent des rapports Rb/Sr faibles limitant alors l’utilisation de la méthode.

Au cours d'un processus de cristallisation fractionnée (donnant un corps granitique par exemple), il existera des variations importantes de concentration en strontium et en rubidium au sein des différents termes de la séquence lithologique. Les différences de comportement entre ces deux éléments se traduiront à leur tour par des variations importantes du rapport Rb/Sr et ainsi du rapport 87Rb/86Sr. Les premières lithologies issues de la cristallisation fractionnée sont plus calciques et donc plus riches en Sr, alors que dans les derniers liquides et les minéraux qui se formeront à partir de ces liquides, la concentration en Sr diminue et la concentration en Rb augmente tout comme celle du potassium. Dans l’exemple suivant, la roche 1 de composition granodioritique est plus riche en calcium et plus pauvre en potassium que la roche 2 monzogranitique et que la roche 3 granitique. Les rapports Rb/Sr (et bien entendu 87Rb/86Sr) seront plus élevés dans les roches granitiques que granodioritiques.

Exemple schématique de la répartition du strontium et du rubidium au sein d’une intrusion granitique en fonction des différentes lithologies. Trois roches co-génétiques présentent des rapports 87Sr/86Sr initiaux identiques pour des

Page 13: Géochimies isotopiques

rapports 87Rb/86Sr différents. Dans l’exemple, le vieillissement (désintégration progressive du 87Rb en 87Sr) des roches permet d’obtenir une isochrone. La pente de cette droite donne un âge de formation du massif de 240 Ma.

 

Exemple schématique de la répartition du strontium et du rubidium au sein d’une roche de composition granodioritique en fonction des phases minérales présentes. Trois espèces minérales co-génétiques présentent des rapports 87Sr/86Sr initiaux identiques pour des rapports 87Rb/86Sr différents. Dans l’exemple, le vieillissement (désintégration progressive du 87Rb en 87Sr) des minéraux permet également d’obtenir une isochrone. La pente de cette droite donne le même âge de formation de 240 Ma que l’isochrone sur roche totale.

 

 

 

Ce même raisonnement peut être tenu à l’échelle de l’échantillon et non plus à l’échelle du massif. Si l’on s’intéresse à l’échantillon de monzogranite de l’exemple précédent, au cours d'un processus de cristallisation il existera des variations importantes de concentration en strontium et en rubidium au sein des différents minéraux constitutifs de cette roche. Les différences de comportement entre le rubidium et le strontium se traduiront donc par des variations importantes du rapport Rb/Sr et ainsi du rapport 87Rb/86Sr entre les différentes phases. Les plagioclases sont plus calciques et donc plus riches en Sr, alors que dans les feldspaths alcalins et surtout les micas sont plus pauvres en Sr et plus riches en Rb.

Comme pour tout système géochronologique basé sur l’utilisation d’isotopes radiogéniques, l’utilisation d’un diagramme de type isochrone ne peut se faire que si le caractère co-génétique des entités (roche totale et/ou minéraux séparés) a été établi clairement. A contrario, l’obtention d’une isochrone valable (âge contrôlé par une méthode différente) sur une série d’échantillons mal contraints peut permettre d’établir leur co-généité (même rapport 87Sr/86Sr initial).

2.2.3.3. Exemple de datations de roches magmatiques: 

En préambule, retenons que la méthode Rb-Sr peut être utilisée en géochronologie si le complexe à dater respecte les points suivants :

1) Le rapport Père – Fils doit être suffisamment large pour permettre d’obtenir une large variation du rapport 87Sr/86Sr. Lorsque c’est le cas, les variations dans les compositions isotopiques de l’élément fils doivent également être suffisamment larges au regard des gammes d’erreurs analytiques. Dans les meilleures circonstances, les rapports isotopiques peuvent être mesurés avec une précision de 10 ppm ou moins. Si la quantité totale de 87Sr radiogénique produite est petite par rapport à la quantité de 87Sr présente initialement, par exemple si la proportion de 87Sr radiogénique produite est seulement d’un dixième de ppm ou moins sur la quantité totale de 87Sr, il y a un faible espoir en utilisant cette méthode d’obtenir un age raisonnable. L’erreur sur la pente de régression est fonction de la gamme de variation des valeurs utilisées. Pour des précisions analytiques similaires, la précision sur

Page 14: Géochimies isotopiques

l’âge est meilleure si la variation du rapport Père-Fils est plus large.

2) Les déviations face à un comportement en système fermé doivent être minimales par rapport à l’événement que l’on cherche à dater. Ces déviations doivent être prises en considération dans le choix même du système radiogénique utilisé pour obtenir une datation. En effet les éléments n’ont pas la même mobilité, les minéraux ne sont pas non plus tous aussi réactifs aux changements de conditions environnantes. Dans le cas du couple Rb-Sr, il faudra être vigilant face à d’éventuelles épisodes métomorphiques (instabilité des micas, des feldspaths alcalins…), métasomatiques et/ou d’altération (mobilité importante du potassium et du Rubidium dans les milieux aqueux) postérieurs à la mise en place des lithologies étudiées. Dans le cas d’un système perturbé, il faudra envisager la taille critique pour laquelle le système peut être considéré ouvert ou fermé. Un plus petit volume est plus facilement perturbé qu’un gros volume.

3) La composition isotopique en strontium doit être homogène au moment de la formation de l’objet à dater (même rapport 87Sr/86Sr initial pour toutes les lithologies du massif). Comme dans le cas précédent, un plus petit volume est plus facilement homogénéisé qu’un grand volume. De même à plus haute température, la diffusion permet également une meilleure homogénéisation qu’à plus basse température. Pour les grands volumes l’homogénéisation requiert la présence d’un liquide (plus à même de s’homogénéiser par convection et/ou advection) silicaté (magma) ou aqueux.

Les roches alcalines anorogéniques présentent à la fois des concentrations importantes en Rb et Sr, des rapports Père – Fils et 87Sr/86Sr très larges à l’origine de la très large utilisation de cette méthode dans ces roches. Nous verrons l’exemple du massif agpaitique de Lovozero de la province alcaline de la péninsule de Kola (Russie) ainsi que l’exemple d’une approche du couple Rb-Sr sur minéraux séparés (muscovite, feldspath, roche totale) ayant permis la datation d’une pegmatite associée à un granitoïde de Cuba (Grafe et al., 2001).

 

Données Rb-Sr en roche totale de différentes syénites du massi

f de Lovozero (Russie). Les 2σ 87Rb/86Sr recalculés ont été maximisé dans le présent exemple à 10% de la valeur 87Rb/86Sr. Nous verrons dans le cas de l’île de Los qu’une erreur de 2.5% (plus réaliste) permet également d’obtenir une bonne régression sur les données.

Page 15: Géochimies isotopiques

Diagramme isochrone 87Sr/86Sr versus 87Rb/86Sr pour les échantillons en roche totale du massif de Lovozero (Russie). Ces données s’alignent sur une droite isochrone dont la pente donne un âge de 351 +/- 14 Ma pour un rapport 87Sr/86Sr initial de 0,703605 +/- 0,000063 (toute les roches) et un âge de 349 +/- 17 Ma pour un rapport 87Sr/86Sr initial de 0,703611 +/- 0,000072. Les néphélines présentent un faible rapport Rb/Sr alors que les feldspaths alcalins présentent un rapport Rb/Sr plus important

Diagramme isochrone 87Sr/86Sr versus 87Rb/86Sr pour un échantillon de pegmatite d’un granitoide de Cuba en minéraux séparés (d’après Grafe et al., 2001). Ces données, à l’exception de la biotite, s’alignent sur une droite isochrone dont la pente donne un âge de 86,6 +/- 2,3 Ma pour un rapport 87Sr/86Sr initial de 0,703300 +/- 0,000036.

2.2.3.4. Métamorphisme et ouverture du système Rb-Sr 

Pour aborder la question de l’utilisation du couple Rb-Sr dans des roches ayant subi un métamorphisme conséquent, il faudra comprendre dans quelle mesure le métamorphisme aura « réouvert le système » (qu’il ai

Page 16: Géochimies isotopiques

lieu en système chimiquement fermé ou non (métasomatose)) et quelle est l’échelle affectée par cette « réouverture » (un système isotopique peut être considéré comme ouvert à l’échelle d’un cristal, d’un échantillon, et clos à l’échelle d’un massif). Cette notion de « réouverture » sera très rapidement associée à une seconde notion portant cette fois sur la nouvelle « fermeture » du système qui se mettra alors de nouveau à « vieillir » : désintégration du 87Rb en 87Sr et donc création de 87Sr radiogénique (87Sr qui provient de la désintégration du 87Rb).

En effet, lors d’un épisode métamorphique la roche va se modifier d’un point de vue minéralogique, certains éléments vont de nouveau être libérés (diffusion…), et la nouvelle paragenèse s’équilibrera du point de vue isotopique. Le degré de métamorphisme nécessaire pour affecter ces roches dépendra alors de la minéralogie qui les constitue, ce degré de métamorphisme se caractérisera espèce minérale par espèce minérale par une température de « fermeture » propre à chaque espèce (muscovite : 250°C, Biotite : 300°C, Amphibole : 400-500°C, feldspath : 500°C…). D’un point de vue géochronologique, un épisode métamorphique conséquent se caractérisera par une réhomogénéisation isotopique des lithologies, redistribuant les différents isotopes du strontium : les roches (ou les minéraux) présentent de nouveaux des rapports 87Sr/86Sr identiques mais plus hauts que le rapport 87Sr/86Sr initial prévalent lors de la mise en place du massif (il y a eu ajout de 87Sr radiogénique durant le vieillissement naturel des roches avant l’épisode métamorphique).

Diagramme schématique isochrone 87Sr/86Sr versus 87Rb/86Sr pour les échantillons analysés en roche totale d’un massif magmatique mis en place à 240 Ma et subissant un métamorphisme (à t=actuel). Les roches se rééquilibrent sur une isochrone de pente nulle. Le nouveau rapport 87Sr/86Sr initial est plus haut que le rapport initial magmatique en raison de la proportion plus élevée de 87Sr radiogénitique dans le système.

 

 

Diagramme schématique isochrone 87Sr/86Sr versus 87Rb/86Sr pour les minéraux constitutifs d’une roche d’un massif magmatique mis en place à 240 Ma et subissant un métamorphisme (à t=actuel). Les minéraux se rééquilibrent sur une isochrone de pente nulle. Le nouveau rapport 87Sr/86Sr initial est plus haut que le rapport initial magmatique de la roche en raison de la proportion plus élevée de 87Sr radiogénitique dans le système

 

 

 

Ces nouveaux systèmes isotopiquement réhomogénéisés vieillirons naturellement,

au bout d’un temps t, on observera de nouveau une pente à l’alignement des échantillons dans un diagramme 87Sr/86Sr versus 87Rb/86Sr dont l’âge recalculé correspondra à l’âge du métamorphisme. Le système peut également n’être que partiellement ouvert lors d’un épisode métamorphique. Si la diffusion d’éléments n’excède pas quelques millimètres en distance (absence de fluide faisant office de « catalyseur » du déplacement) le système isotopique peut être considéré comme étant resté fermé à l’échelle d’un échantillon

Page 17: Géochimies isotopiques

(dont la taille est supérieure à 10 cm) alors qu’à l’échelle millimétrique, les différences espèces minérales se seront rééquilibrées localement.

Diagramme schématique isochrone 87Sr/86Sr versus 87Rb/86Sr pour les minéraux constitutifs d’une série de 3 roches d’un massif magmatique mis en place à 240 Ma et subissant un métamorphisme (à t=actuel). Les minéraux se rééquilibrent sur une isochrone de pente nulle pivotant autour de la position de l’analyse en roche totale. Les roches totales conservent leur alignement sur l’isochrone 240Ma.

 

 

Ces nouveaux systèmes isotopiquement réhomogénéisés à l’échelle minérale uniquement vieillirons naturellement, au bout d’un temps t, on observera de nouveau une pente à l’alignement des minéraux constitutifs de chaque échantillon dans un diagramme 87Sr/86Sr versus 87Rb/86Sr dont l’âge recalculé correspondra à l’âge du métamorphisme. Néanmoins, les roches totales n’ayant pas subi de perturbation à leur échelle lors de l’épisode métamorphique demeureront alignées sur une isochrone dont l’âge correspondra toujours à l’âge magmatique.

Diagramme schématique isochrone 87Sr/86Sr versus 87Rb/86Sr pour les minéraux constitutifs d’une série de 3 roches d’un massif magmatique datant de 400 Ma et subissant un métamorphisme il y a 160Ma.

 

 

 

 

 

Ces propriétés d’homogénéisation isotopique à l’échelle minérale au cours d’un épisode métamorphique pourrons être utilisées également pour dater des roches métamorphiques qui n’ont plus de protolithe (magmatique) identifiable. Des gneiss, des migmatites, des micaschistes ou en des granulites ou des éclogites pourront être dater par isochrone sur minéraux séparés.

Page 18: Géochimies isotopiques

Diagramme schématique isochrone 87Sr/86Sr versus 87Rb/86Sr pour les minéraux constitutifs d’une paragenèse unique d’une roche métamorphique (micaschiste feldspathique à grenat) dont la genèse est associé à un épisode datant de 520 Ma.

Néanmoins, si l’épisode métamorphisme n’est pas suffisamment conséquent ou durable, l’homogénéisation isotopique à l’échelle minérale ou du massif peut n’être que partielle. Les minéraux constitutifs d’une roche, ou l’ensemble des roches à l’échelle du massif peuvent présenter des alignement dans un diagramme isochrone qui ne correspond à aucun âge géologique vrai. Il ne s’agit ni de l’âge magmatique, ni de l’âge métamorphique mais d’un pseudo-âge intermédiaire entre ces deux. Cette « âge » même s’il représente un bon alignement des échantillon correspond donc à un « âge de mélange » et par conséquent n'a aucune validité.

Page 19: Géochimies isotopiques

Diagramme schématique isochrone 87Sr/86Sr versus 87Rb/86Sr illustrant la mise en place d’un massif magmatique, son vieillissement pendant 240 Ma (520Ma par rapport à l’actuel) puis sa réhomogénéisation isotopique (complète ou partielle) au cours un épisode métamorphique il y a 280 Ma (520=240+280). Dans le cas d’une réhomogénéisation partielle, les roches du massifs s’alignent sur une pseudo-isochrone dont l’âge associé correspond à un « mélange » entre les âges magmatiques et métamorphiques.

Pour connaître la validité d’un âge, il est nécessaire de discuter de deux critères :

1) sa qualité «mathématique» illustrée par la valeur de l’indice statistique MSWD (MSWD = Mean Square of Weighted Deviates : Déviation pondérée de la régression par moindres carrés). Il s’agit globalement d’une mesure du rapport de l'éparpillement observé des points (par rapport à la meilleur ligne de régression) à l'éparpillement prévu (des erreurs analytiques et de la corrélation assignée entre ces erreurs). Le paramètre de MSWD ne peut pas être comparé au paramètre R2 classique, et ne correspond donc pas à une mesure de la façon dont sont corrélés les paramètres X et Y. Si les erreurs assignées sont la seule cause de l'éparpillement, le MSWD tendra à être proche de l’unité. Les valeurs élevées du MSWD (supérieurs à l’unité) indique généralement soit que les erreurs analytiques ont été sous-estimées, soit la présence d’un éparpillement non-analytique (géologique !). Les valeurs du MSWD beaucoup plus petites que l'unité indiquent généralement des erreurs analytiques surestimées ou des erreurs corrélées non reconnues.

2) Son intégration dans le contexte géologique régional  : correspond-il aux données de géochronologie relative locale ?

Un alignement dans un diagramme isochrone qui n’est pas interprété comme un âge géologique devient une « fausse isochrone » ou une erreurchrone.

Page 20: Géochimies isotopiques

2.2.4. Le système Sm-Nd2.2.4.1. Isotopes du Sm et du Nd, parentés2.2.4.2. Géochimie du Sm et du Nd   2.2.4.3. Exemple de datation2.2.4.4. εNd et âges modèles2.2.5. Le système Lu-Hf

2.2.5.1. Isotopes du Lu et du Hf, parentés2.2.5.2. Géochimie du Lu et du Hf   2.2.5.3. Exemple de datation

Suite du Chapitre 2:   Géochimie des isotopes radiogéniques...  (partie 3)

Orientation bibliographique : Une partie des chapitres qui suivent a été fortement structurée par la traduction et à la compilation de deux cours de géochimie disponibles "on line" de W.M. White:

Geochemistry de W.M. White Lien online aux chapitres de ce cours de géochimie très complet...  

Isotope Geochemistry du même W.M. White Lien online aux chapitres de ce cours de géochimie isotopique le plus complet du web...

2.2.4. Système Sm-Nd

2.2.4.1. Isotopes du Sm et du Nd, parenté

Le Néodyme (symbole : Nd) possède de nombreux isotopes (Z = 60 et 126 < A < 161 ; M= 144,24). Seuls 5 sont stables dans la nature (142Nd, 143Nd, 145Nd, 146Nd et 148Nd) et 2 possèdent une demie-vie très longue (144Nd et 150Nd), les autres isotopes ont des demie-vies très courtes et ont donc des abondances dans la nature négligeables. Le 143Nd provient pour partie de la désintégration a du 147Sm.

Le Samarium (symbole : Sm) possède de nombreux isotopes (Z = 62 et 130 < A < 165 ; M= 150,36). Seuls 6 sont stables dans la nature (144Sm, 148Sm, 149Sm, 150Sm, 152Sm et 154Sm), et 1 possède une demie-vie très longue (147Sm). Les autres isotopes ont des demie-vie très courtes et ont des abondances dans la nature négligeables. Le 147Sm  est radiogénique et se désintègre en 143Nd par radioactivité α.

Page 21: Géochimies isotopiques

Dans le cas du couple 147Sm-143Nd, l’équation (5) devient :  

Pour permettre la résolution de cette équation dans un système naturel, chaque terme est normalisé au nucléide stable 144Nd.

   

2.2.4.2. Géochimie du Sm et du Ndtop...

Le samarium et le néodyme sont deux terres rares (ou lanthanides) intermédiaires, le néodyme s’apparente plus aux terres rares légères alors que le samarium est une terre rare intermédiaire.

Ces deux éléments ont des comportements très proches. Ils sont généralement incompatibles avec la plupart des espèces minérales. Leur fractionnement mutuel peut avoir lieu entre des espèce présentant classiquement des enrichissement en terres rares légères (Sm/Nd <1 ; ex : plagioclase, clinopyroxène) et des espèces présentant tout aussi classiquement un enrichissement significatif en terres rares lourdes (Sm/Nd > 1 ; ex : orthopyroxène, grenat). Néanmoins, la demi-vie très longue du 147Sm est à l’origine d’une faible production de 143Nd, facteur limitant pour son utilisation en géochronologie car nécessitant des précisions analytiques accrues.

D’une manière générale, les roches granitiques présentent un enrichissement significatif en terres rares légères et donc des gammes de rapports Sm/Nd faibles alors que les roches mantelliques ainsi que les roches mafiques et ultramafiques présentent respectivement un appauvrissement en terres rares légères ou des spectres plats d’où des gammes de rapports Sm/Nd importantes justifiant alors l’utilisation de cette méthode.

Au cours d'un processus de cristallisation fractionnée (donnant un complexe stratiforme des cumulats mafiques-ultramafiques par exemple), il existera des variations significatives de concentration en

Page 22: Géochimies isotopiques

samarium et néodyme au sein des différents termes de la séquence lithologique litée. Les différences de comportement entre ces deux éléments se traduiront à leur tour par des variations importantes du rapport Sm/Nd et ainsi du rapport 147Sm/144Nd.

Les premières lithologies issues de la cristallisation fractionnée sont plus riches en orthopyroxène (+/- grenat dans les domaines granulitiques) et donc plus riches en Sm, alors que dans les derniers liquides résiduels et les minéraux qui se formeront à partir de ces liquides, la concentration en Sm diminue et la concentration en Nd augmente tout comme les proportions de plagioclase et de clinopyroxène. L’importance du grenat comme piège à terres rares (préférentiellement les terres rares lourdes) justifie également son utilisation fréquente dans les roches métamorphiques sur minéraux séparés (ex : isochrone biotite-roche totale-grenat).

Dans l’exemple suivant, la roche 1 de composition harzburgitique est plus riche en Sm et plus pauvre en Nd que la roche 2 pyroxénitique et que la roche 3 anorthositique. Les rapports Sm/Nd (et bien entendu 147Sm/144Nd) seront plus élevés dans les roches harzburgitiques que gabbroïques.

Exemple schématique de la répartition du samarium et du néodyme au sein d’une intrusion stratiforme mafique-ultramafique en fonction des différentes lithologies. Trois roches co-génétiques présentent des rapports 143Nd/144Nd initiaux identiques pour des rapports 147Sm/144Nd différents. Dans l’exemple, le vieillissement (désintégration progressive du 147Sm en 143Nd) des roches permet d’obtenir une isochrone. La pente de cette droite donne un âge de formation du massif de 850 Ma.

Tout comme pour le couple Rb-Sr, ce même raisonnement peut être tenu à l’échelle de l’échantillon et non plus à l’échelle du massif. Si l’on s’intéresse à l’échantillon de pyroxénite à plagioclase de l’exemple précédent, au cours d'un processus de cristallisation il existera des variations significatives de concentration en samarium et en néodyme au sein des différents minéraux constitutifs de cette roche. Les différences de comportement entre le samarium et le néodyme traduiront donc par des variations significatives du rapport Sm/Nd et ainsi du rapport 147Sm/144Nd entre les différentes phases. Les plagioclases sont plus riches en terres rares légères et donc plus riches en Nd, alors que dans les clinopyroxènes et surtout l’orthopyroxène sont plus pauvres en Nd et plus riches en Sm.

Page 23: Géochimies isotopiques

Exemple schématique de la répartition du samarium et du néodyme au sein d’une roche de composition pyroxénite à plagioclase en fonction des phases minérales présentes. Trois espèces minérales co-génétiques présentent des rapports 143Nd/144Nd initiaux identiques pour des rapports 147Sm/144Nd différents. Dans l’exemple, le vieillissement (désintégration progressive du 147Sm en 143Nd) des minéraux permet également d’obtenir une isochrone. La pente de cette droite donne le

même âge de formation de 850 Ma que l’isochrone sur roche totale.  

Rappel : Tout comme pour le strontium, et comme pour tout système géochronologique basé sur l’utilisation d’isotopes radiogéniques, l’utilisation d’un diagramme de type isochrone ne peut se faire que si le caractère co-génétique des entités (roche totale et/ou minéraux séparés) a été établi clairement. A contrario, l’obtention d’une isochrone valable (âge contrôlé par une méthode différente) sur une série d’échantillons mal contraints peut permettre d’établir leur co-généité (même rapport 87Sr/86Sr initial).

2.2.4.3. Exemple de datationstop...

La méthode Sm-Nd a été utilisée pour dater les gabbros du Chenaillet (Costa et Caby, 2001) à 198 millions d'année (jurassique basal). En effet, contrairement au rubidium et au strontium (méthode Rb-Sr) qui peuvent aisément être mobiles au fond de l'océan, Sm et Nd sont immobiles dans la plupart des processus. Ils donnent ainsi la signature isotopique originelle du magma et de la source qui l'a engendré.

Page 24: Géochimies isotopiques

Données Sm-Nd en roche totale de différents gabbros du massif ophiolitique du Chenaillet (France). Les 2σ 147Sm/144Nd recalculés ont été maximisé dans le présent exemple à 5% de la valeur du rapport 147Sm/144Nd calculé. Diagramme isochrone 143Nd/144Nd versus 147Sm/144Nd pour les échantillons en roche totale du massif ophiolitique du Chenaillet (France).

Ces données s’alignent sur une droite isochrone dont la pente donne un âge de 198 +/- 43 Ma (2σ) pour un rapport 143Nd/144Nd initial de 0,512839 +/- 0,000063.

La méthode Sm-Nd est également est très couramment utilisée pour dater des assemblages minéralogiques à grenat, qu’il s’agisse d’un métamorphisme régional ou de contact comme dans le cas des micaschistes à grenat de la région canadienne des « Central Coast Mountains » (Stowell et Tinkham, 2003). Dans cet exemple, deux échantillons ont fait l’objet d’une séparation minéralogique, la roche totale, la matrice (roche totale-grenat) et le grenat ont été mesurés séparément. Les deux roches donnent des isochrones pour un âge de 89 Ma.

Données Sm-Nd en roche totale et minéraux séparés de deux échantillons de micaschistes à grenat issus d’un épisode de métamorphisme de contact associé à la mise en place de la chaîne orogénique de la côte centrale (Canada). Les 2σ 147Sm/144Nd recalculés ont été maximisé dans le présent exemple à 2.5% de la valeur du rapport 147Sm/144Nd calculé.

Page 25: Géochimies isotopiques

Diagramme isochrone 143Nd/144Nd versus 147Sm/144Nd pour chaque échantillon en roche totale et minéraux séparés de micaschistes à grenat issus d’un épisode de métamorphisme de contact associé à la mise en place de la chaîne orogénique de la côte centrale (Canada). Ces données s’alignent sur deux droites isochrones dont la pente donne un âge commun métamorphique de 89,5 +/- 3 Ma (2σ).

2.2.4.4. εNd et âges modèles top...

Certains types de météorites,( Météorites Chondritiques), sont considérés comme des exemples de matériel primordial du système solaire qui ne sont pas devenus parie intégrante d’une planète tellurique. Leurs systèmes isotopiques [ e.g. 147Sm/143Nd ] sont restés isolés depuis la formation du système solaire (il y a à peu près 4,6.109 années).

En terme de raisonnement isotopique du système chondritique, nous pouvons installer un modèle quantitatif simple (équation 5) pour illustrer l’ évolution des rapports isotopiques de ces roches. Dans le cas du couple 147Sm/143Nd on se référera à l’équation du chapitre 2.2.4.1., connaissant le rapport 143Nd/144Nd actuel, il est alors possible de recalculer ce rapport pour n’importe quelle valeur de t (0<t<4,6.109 ans). La valeur de λ étant très inférieure à 1 (λ = 6,54.10-12 an-1) et l’âge de la Terre de 4,6.109 ans, la valeur de lt demeure également très inférieure à 1 : l’évolution du rapport 143Nd/144Nd se ferra de manière presque linéaire.

En effet, nous pouvons décomposer l’expression globale (c.f. § 2.2.4.1.) en polynômes, l’expression elt devient  :

ce qui nous permet alors de donner une approximation de l’évolution de notre système Sm/ Nd par l’expression suivante :

Ce modèle est appelé le modèle CHUR (Chondritic Uniform Reservoir d’après DePaolo et Wasserburg, 1976 : Réservoir Chondritique Uniforme), il représente l’évolution isotopique d’un système qui a conservé son caractère isolé depuis la création du système solaire.

Page 26: Géochimies isotopiques

Diagramme 143Nd/144Nd en fonction du temps (en milliards d’années) pour le modèle CHUR, noter l’évolution linéaire du rapport 143Nd/144Nd.

Si l’on examine les rapports actuels 143Nd/144Nd et que ceux-ci sont différents du rapport 143Nd/144Nd de la valeur du CHUR actuel, c’est que le corps source des roches considérées s’est séparé du modèle CHUR à un temps TCHUR dans le passé pour ensuite évoluer séparément. Ceci peut être modélisé comme suit :

Echantillon de roche :

et pour le CHUR :

Dans l’hypothèse d’une séparation entre le modèle CHUR et la source de l’échantillon considéré (ex : séparation croûte-manteau) à un temps TCHUR dans le passé, alors jusqu’à ce temps TCHURnous avons égalité des rapports isotopiques, soit :

Page 27: Géochimies isotopiques

En réunissant les deux équations précédentes, nous obtenons :

L’âge du découplage (TCHUR) est alors donné par l’expression suivante :

Avec ce modèle, nous voyons maintenant qu’un échantillon présentant un rapport 143Nd/144Nd plus important ou plus petit que le CHUR indique qu’à un âge « modèle » TCHUR dans le passé, la source de l’échantillon a été séparé du CHUR et s’est mise à évoluer indépendamment.

Diagramme 143Nd/144Nd en fonction du temps (en milliards d’années) pour le modèle CHUR, noter l’évolution linéaire du rapport 143Nd/144Nd.Pour un échantillon présentant un rapport 143Nd/144Nd actuel différent de 0,512638 (CHUR), il est possible de recalculer l’âge pour lequel les rapports 143Nd/144Nd de l’échantillon et du CHUR sont identiques. Cet âge (TCHUR) ne correspond que très rarement à une quelconque réalité géologique, il s’agit d’un âge modèle.

Typiquement, les échantillons mantelliques présentent des rapports 143Nd/144Nd plus importants que le CHUR (enrichis en 143Nd radiogénique), alors que les échantillons crustaux présentent des rapports 143Nd/144Nd plus petits que le CHUR (appauvris en 143Nd radiogénique). Dans un modèle d’évolution planétaire simplifié, le réservoir chondritique uniforme se scinde donc dès les premiers incréments de croissance crustale en deux réservoirs : un manteau restitique ou DM Depleted

Page 28: Géochimies isotopiques

Mantle (enrichi en 143Nd radiogénique) et un domaine crustal (appauvri en 143Nd radiogénique). Classiquement, depuis l’archéen, les magmas issus d’une source mantellique ne sont donc plus issus d’un réservoir CHUR mais d’un réservoir de type DM (i.e. MORB Midle Oceanic Ridge Basalt). Dans ce second modèle, il est également possible de calculer un âge théorique d’extraction de la source DM tout comme nous venons de le voir pour une source de type CHUR. Ce nouvel âge « modèle » est appelé TDM, il dépend alors très fortement des différents modèles de croissance crustale, qui ne sont plus pour la plupart linéaires (extraction progressive de magma depuis un manteau de plus en plus appauvri).

              Les variations du rapport 143Nd/144Nd étant relativement modestes (147Sm est un nucléide possédant une demi-vie très longue), on utilise couramment une notation ε (epsilon), « mesurant » l’écart entre la valeur du rapport 143Nd/144Nd de la roche mesurée et la valeur du rapport 143Nd/144Nd du CHUR au même âge. La mesure de cet écart présente l’avantage de comparer plus facilement les rapports 143Nd/144Nd.  

               

avec (143Nd/144Nd)CHUR(actuel) = 0,512638. Il est bien entendu possible (et souvent nécessaire) de recalculer la valeur de cet ε à l’âge de formation de la roche. Il est alors nécessaire de recalculer également le rapport (143Nd/144Nd)CHUR(t) à ce temps t. L’erreur analytique sur l’ε est typiquement de +/- 0,5.  

Diagramme εNd en fonction du temps (en milliards d’années) pour le modèle CHUR et le modèle DM (Depleted Mantle), noter l’évolution horizontal du CHUR (normalisé à lui-même=0), et l’évolution en

Page 29: Géochimies isotopiques

polynôme du second degré du DM (0,25t2 - 3t + 8,5 avec t en Ga d’après DePaolo, 1988).   Il est également possible d’utiliser cette notation pour mesurer l’écart de la composition isotopique du strontium par rapport à celle du manteau, supposé homogène, par un εSr définit par l’expression suivante :

 

où UR signifie Uniform Reservoir (Réservoir mantellique supposé uniforme). La valeur du rapport (87Sr/86Sr)UR (actuel) est déterminée grâce à « l’alignement mantellique » dans le diagramme (143Nd/144Nd) versus (87Sr/86Sr), elle est de 0,7045.

2.2.5. Système Lu-Hftop...

2.2.5.1. Isotopes du Lu et du Hf, parentéstop...

Le Lutétium (symbole : Lu) possède de nombreux isotopes (Z = 71 et 150 < A < 184 ; M= 174,967). Seuls 1 est stable dans la nature (175Lu) et 1 possèdent une demie-vie très longue (176Lu), les autres isotopes ont des demie-vies très courtes et ont donc des abondances dans la nature négligeables. Le 176Lu  est radiogénique et se désintègre en 176Hf par radioactivité β-.

Le Hafnium (symbole : Hf) possède également de très nombreux isotopes (Z = 72 et 154 < A < 188 ; M= 178,49). Seuls 5 sont stables dans la nature (176Hf, 177Hf, 178Hf, 179Hf et 180Hf), et 1 possède une demie-vie très longue (174Hf). Les autres isotopes ont des demie-vie très courtes et ont des abondances dans la nature négligeables. Le 176Hf provient pour partie de la désintégration β- du 176Lu.

Page 30: Géochimies isotopiques

Dans le cas du couple 176Lu-176Hf, l’équation (5) devient :

Pour permettre la résolution de cette équation dans un système naturel, chaque terme est normalisé au nucléide stable 177Hf.

2.2.5.2. Géochimie du Lu et du Hftop...

Jusqu'à aujourd’hui, ce système reste relativement peu utilisé pour la géochronologie, principalement en raison des difficultés analytiques, mais également pour d’autres raisons. Dans le cas du Hf, les températures exigées pour l'ionisation sont très hautes; en conséquence l'efficacité d'ionisation par ionisation thermique est basse, rendant ces analyses difficiles par cette méthode.

Le lutétium est la plus lourde des terres rares, avec une valence de +3 et un rayon ionique de 0,93Å, alors que le hafnium est un membre des éléments du groupe IVB tout comme le zirconium et le titane. Les trois éléments montrent quelques similitudes chimiques, ces similitudes sont très marquées dans le cas du Zr et du Hf. En effet, l’hafnium a un rayon ionique de 0,71Å (en coordinence 6) et de 0,83Å (en coordinence 8) et une valence de +4 (la similitude est alors particulièrement marquante entre le Hf et le Zr qui présente un rayon ionique pour Zr4+ de 0,72Å (en coordinence 6) et de 0,84 Å (en coordinence 8); le rayon de Ti4+ est beaucoup plus petit (0.61Å)). Le rapport Lu/Hf est assez faible dans les roches terrestres car l’abondance du lutétium y est généralement inférieur à 1 ppm, celle du hafnium pouvant atteindre la dizaine de ppm. Le système Lu-Hf est assez comparable au système Sm-Nd, car Lu et Hf sont deux incompatibles avec la plupart des espèces minérales, mais Hf l’est plus que Lu (son incompatibilité est très semblable à celle du Sm).

Le système Lu- Hf partage plusieurs des avantages du système Sm-Nd: ce sont des éléments relativement insolubles et immobiles, ils sont de plus réfractaires et par conséquent le rapport de Lu/Hf de la terre doit être très comparable à celui des chondrites. Il est donc tout à fait logique de définir une valeur εHf de la même manière que nous avions défini une valeur de εNd:

Page 31: Géochimies isotopiques

Le rapport 176Hf/177Hf chondritique actuel est 0,282772 (Blishert-Toft et Albarède, 1997) quand le rapport 179Hf/177Hf est normalisé à 0,7325. Cependant, la similitude du rapport Lu/Hf entre la Terre et les chondrites n'est pas fiable que pour le couple Sm/Nd simplement parce le Sm et le Nd en tant que terres rares se comportent très pareillement, alors que l'hafnium qui n'est pas une terre rare et diffère dans son comportement du Lu. De la même manière que pour le néodyme, il est possible de définir des âges modèles TCHUR et TDM pour l’hafnium.

Néanmoins, le système Lu-Hf présente plusieurs avantages par rapport au système Sm-Nd. Tout d'abord parce que la demi-vie de 176Lu est plus courte que celle de 147Sm (37 Ga contre 108 Ga) et parce que la gamme des rapports de Lu/Hf dans les roches et les minéraux est plus grand que celle du rapport Sm/Nd, les variations de 176Hf/177Hf et εHf sont plus grand que celles du rapport 143Nd/144Nd et de l’εNd. En second lieu, en raison de la similitude de comportement chimique entre l’Hf du le Zr, l’Hf est concentré dans le zircon qui est minéral très résistant aux changements d’environnement.

2.2.5.3. Exemple de datationtop...

Tout comme la méthode Sm-Nd, la méthode Lu-Hf est utilisé pour dater des assemblages minéralogiques à grenat. Dans l’exemple suivant (Lapen et al., 2004), plusieurs échantillons éclogitiques d’ultra haute pression ont fait l’objet d’une séparation minéralogique, la roche totale, le grenat, l’amphibole bleu et clinopyroxène ont été mesurés séparément. Les différents minéraux et roches totales donnent une isochrone unique pour un âge de 46,4 Ma.

Page 32: Géochimies isotopiques

Données Lu-Hf en roche totale et minéraux séparés de plusieurs échantillons d’éclogites à grenat issus d’un épisode de métamorphisme régional associé à la mise en place de la chaîne orogénique alpine (Italie). Les 1σ 176Lu/177Hf recalculés ont été minimisé dans le présent exemple à 0.5% de la valeur du rapport 176Lu/177Hf calculé.  

Page 33: Géochimies isotopiques

Diagramme isochrone 176Hf/177Hf versus 176Lu/177Hf pour chaque échantillon en roche totale et minéraux séparés d’éclogites à grenat issus d’un épisode de métamorphisme régional associé à la mise en place de la chaîne orogénique alpine (Italie). Ces données s’alignent sur une droite isochrone dont la pente donne un âge commun métamorphique de 46,4 +/- 1,3 Ma (2s).

Page 34: Géochimies isotopiques

2.2.6. Le système U-Th-Pb   2.2.6.1. Isotopes du Th, U et Pb, parentés2.2.6.2. Systèmes enrichis: la courbe concordia   2.2.7. Le système K-Ar  

2.2.7.1. Isotopes du K, Ar et Ca, parentés2.2.7.2. La désintégration du 40K   2.2.7.3. Une variante: la méthode 39Ar-40Ar

Suite du Chapitre 2: Géochimie des isotopes radiogéniques... (partie 4)

Orientation bibliographique : Une partie des chapitres qui suivent a été fortement structurée par la traduction et à la compilation de deux cours de géochimie disponibles "on line" de W.M. White:

Geochemistry de W.M. White Lien online aux chapitres de ce cours de géochimie très complet...  

Isotope Geochemistry du même W.M. White Lien online aux chapitres de ce cours de géochimie isotopique le plus complet du web...

2.2.6. Système U-Th-Pb top...

2.2.6.1. Isotopes du Th, U et Pb, parenté

L’uranium a la propriété unique de posséder deux isotopes radioactifs à vie longue, l’238U et l’235U. Tout comme le 232Th, ces deux isotopes de l’uranium sont à l’origine de familles radioactives dont le dernier isotope (stable) est un isotope du plomb différent pour chaque famille.

L’uranium (symbole : U) possède de nombreux isotopes (Z = 92 et 218 < A < 242 ; M= 238,02891). Aucun n’est stable dans la nature et 3 possèdent une demi-vie très longue (234U, 235U et 238U), les autres isotopes ont des demi-vies très courtes et ont donc des abondances dans la nature négligeables. L’235U par une suite complexe de désintégration a et β- se transforme en 207Pb, l’238U par une suite complexe de désintégration α et β- se transforme en 206Pb. Etant donné, les demi-vies relativement courtes (<< Ma) des différents membres de ces séries radioactives, il devient possible de considérer un équilibre radioactif (le premier membre de la famille se désintègre pour donner le dernier) entre ces différents isotopes de l’uranium et du plomb. Pour des périodes géologiques (>> Ma), l’234U fait parti de la famille radioactive de l’238U.

Page 35: Géochimies isotopiques

Le diagramme montre le cheminement sur la carte des noyaux de la cascade de désintégrations partant de l'uranium-238 et se terminant au Plomb-206 stable, avec ses 82 protons et 124 neutrons. Les désintégrations α diminuent de 2 unités les nombres de protons et de neutrons, alors que les désintégrations bêta-moins diminuent de 1 les neutrons et augmentent de 1 les protons. Les cheminements α sont corrigés à intervalles réguliers par des désintégrations β qui permettent d'atteindre le meilleur équilibre entre protons et neutrons.

Le thorium (symbole : Th) possède de nombreux isotopes (Z = 90 et 209 < A < 238 ; M= 232,0381). Aucun n’est stable dans la nature et un seul possède une demi-vie très longue (232Th), les autres isotopes ont des demi-vies très courtes et ont donc des abondances dans la nature négligeables. Le 232Th par une suite complexe de désintégration α et β- comparable à celles de l’235U et de l’238U, se transforme en 208Pb. Tout comme pour l’uranium, étant donné, les demi-vies relativement courtes (<< Ma) des différents membres de cette série radioactive, il devient possible de considérer un équilibre radioactif (le premier membre de la famille se désintègre pour donner le dernier) entre le 232Th et le 208Pb.

Le Plomb (symbole : Pb) possède de nombreux isotopes (Z = 82 et 180 < A < 214 ; M= 207,2). Seuls 3 sont stables dans la nature (206Pb, 207Pb et 208Pb) et 1 possède une demi-vie très longue (204Pb), les autres isotopes ont des demi-vies très courtes et ont donc des abondances dans la nature négligeables. Le 205Pb, bien que présentant une demi-vie non négligeable possède également une abondance nulle dans la nature. Le 206Pb provient pour partie de la désintégration complexe du

Page 36: Géochimies isotopiques

238U, Le 207Pb provient pour partie de la désintégration complexe du 235U et le 208Pb provient pour partie de la désintégration complexe du 232Th.

Les trois familles radioactives peuvent sous la forme de l’équation (5) :

Si nous divisons chacun des termes de ces équations par la concentration en atomes de 204Pb, seul isotope du plomb à ne pas être radiogénique (comparable donc à 86Sr), nous retrouvons les équations classiques des isochrones :

Page 37: Géochimies isotopiques

Le rapport 238U/204Pb (rapport atomique actuel d’238U à 204Pb) est désigné par convention par le symbole m, le rapport actuel 235U/238U est de 1/137,88. Le rapport 235U/204Pb est donc de μ/137,88. Si l’on couple les deux équations U => Pb en les divisant membre à membre, on obtient une nouvelle équation (linéaire donc de type isochrone) pour laquelle les teneurs en uranium et en plomb n’interviennent plus (méthode dite plomb-plomb) : l’âge peut être déterminé uniquement à partir des rapports isotopiques du plomb. C'est par cette méthode Pb - Pb que fut déterminé la première fois en 1955 l'âge de la Terre par Patterson, Tilton et Inghram (« géochrone »).

soit:

Page 38: Géochimies isotopiques

Evolution des rapports d'isotope du Pb (figure de M.W. White, cf. ref). Les lignes courbes représentent les chemins d’évolution pour des systèmes ayant des valeurs de μ de 8, de 9, et de 10. Les hachures sur ces courbes d’évolution caractérisent les compositions en isotope de Pb pour des âges de 1, 2 et 3 Ga.

Les rapports initiaux ne peuvent pas être obtenus graphiquement, contrairement aux méthodes Rb-Sr et Sm-Nd. Le rapport m correspond au rapport 238U/204Pb, le rapport κ est égal au rapport 232Th/238U. En connaissant t, on peut trouver κ :

2.2.6.2. Systèmes enrichis: la courbe concordia top...

Pour les systèmes riches en uranium et pauvres en plomb primaire (Pb0), les données U-Pb sont traitées à l’aide du diagramme concordia (diagramme 206Pb*/238U en fonction 207Pb*/235U ; Wetherill, 1956). 206Pb* et 207Pb* correspondent respectivement à 206Pb radiogénique (= 206Pbtotal – 206Pb0) et à 207Pb radiogénique (= 206Pbtotal – 206Pb0).La courbe concordia est le lieu de tous les points pour lesquels un temps t est solution des deux systèmes isotopiques (lieu des points dont les âges indiqués par les deux méthodes sont concordants) :

Page 39: Géochimies isotopiques

soit, en reprenant les deux équations du chapitre précédent :

L’équation de la courbe concordia est donc :

Dans un diagramme concordia, la courbe concordia est une représentation de l’ensemble des âges solutions aux deux systèmes isotopiques (206Pb-238U et 207Pb-235U). Cette courbe est ici paramétrée pour un système géologique (0 < t < 4,5 Ga).

Cette méthode de datation devient très simple d’utilisation si le système géologique ne possédait que de l’uranium et peu ou pas de plomb initial (206Pb0, 207Pb0 et 208Pb0=0) ; 207Pb* et 206Pb* sont alors directement égaux à 207Pb et 206Pb de l’échantillon considéré. Ce double chronomètre est appliqué en routine au plomb radiogénique et l’uranium contenus dans les oxydes et surtout silicates de zirconium (respectivement baddeleiyite ZrO2 et zircon ZrSiO4). En effet, l’U4+ se substitue en quantité importante au Zr4+ mais le Pb2+, de rayon ionique et de charge très différents de ceux du Zr4+, est quasiment entièrement rejeté du réseau cristallin et ne peut occuper les sites du zirconium.

Page 40: Géochimies isotopiques

Les zircons ont en outre la propriété d’être une phase accessoire relativement commune dans de nombreuses roches magmatiques et métamorphiques. Ils présentent également une stabilité très importante lors d’évènements géologiques postérieurs à leur cristallisation permettant à ces minéraux de « conserver » la mémoire de leur âge.

Exemple 1 : A t = 0 (lors de sa formation), chaque zircon d’une population ne possède donc pas de plomb, ses rapports 206Pb/238U et 207Pb/235U sont égaux à 0. A t = 500 Ma, le minéral s’est considérablement enrichi en 206Pb et 207Pb, ses rapports 206Pb/238U et 207Pb/235U sont alors respectivement proches de 0,64 et de 0,08. Il vieillira ainsi de manière continue, dans cette exemple jusqu’à 1 Ga, ses rapports 206Pb/238U et 207Pb/235U sont alors respectivement proches de 1,69 et de 0,17.

A t = 1Ga, la roche et la population de zircon qui la compose subit un épisode métamorphique qui se marquera par la réouverture partielle du système et par une perte de plomb par diffusion. Cette perte est inversement proportionnelle à la taille des cristaux de zircons. Les différentes populations de zircons (caractérisées par leur plus ou moins importante perte de plomb radiogénique) vieilliront de nouveau et s’enrichiront une seconde fois en plomb radiogénique jusqu’à t = 1, 5 Ga (date d’échantillonnage par le géologue par rapport à leur formation initiale à t=0). On observera donc un alignement de ces zircons sur une corde (discordia) dans le diagramme concordia : l’intercepte supérieur correspondant à l’âge de cristallisation des zircons (âge magmatique), l’intercepte inférieur caractérisant ici l’âge de la réouverture partielle du système (âge métamorphique).

Page 41: Géochimies isotopiques

Exemple 2 : Un autre cas de figure concerne cette fois un mélange d’âge entre un protolite ancien (orthodérivé) et une nouvelle roche magmatique qui en issue (par anatexie crustale : granite d’anatexie, leucosomes des migmatites) ou qui a été fortement contaminée par ce protolite (assimilation en masse de protolite crustale : certaines rhyolite) dont les zircons infusibles peuvent se retrouver dans la nouvelle roche magmatique. Ce cas de figure peut être résumé comme suit : A t = 0 (lors de sa formation), comme dans le cas précédent, chaque zircon d’une population ne possède donc pas de plomb, ses rapports 206Pb/238U et 207Pb/235U sont égaux à 0. A t = 500 Ma, le minéral s’est considérablement enrichi en 206Pb et 207Pb, ses rapports 206Pb/238U et 207Pb/235U sont alors respectivement proches de 0,64 et de 0,08.

Il vieillira ainsi de manière continue, dans cette exemple jusqu’à 1 Ga, ses rapports 206Pb/238U et 207Pb/235U sont alors respectivement proches de 1,69 et de 0,17. A t = 1Ga, la roche et la population de zircon qui la compose est assimilée dans un nouveau magma qui se caractérise par des néoformations de zircons et par des surcroissances sur les zircons hérités. Cette nouvelle population de zircons (d’origine mixte) est caractérisée par une plus ou moins grande participation des populations 1 (héritée) ou 2 (néoformée), décrivant une droite de mélange entre les deux pôles. Ces populations vieilliront de nouveau et s’enrichiront une seconde fois en plomb radiogénique jusqu’à t = 1, 5 Ga (date d’échantillonnage par le géologue par rapport à leur formation initiale à t=0). On observera alors, comme dans le cas précédent un alignement de ces zircons sur une corde de type discordia dans le diagramme concordia : l’intercepte supérieur correspondant toujours à l’âge de cristallisation des zircons du protolite, l’intercepte inférieur caractérisant ici l’âge de la nouvelle formation magmatique.

2.2.7. Système K-Ar top...

2.2.7.1. Isotopes du K, Ar et Ca, parentéstop...

Page 42: Géochimies isotopiques

Le potassium (symbole : K) possède de nombreux isotopes (Z = 19 et 32 < A < 54 ; M= 39,0938). Deux sont stables dans la nature (39K et 41K) et un seul possède une demie-vie très longue (40K), les autres isotopes ont des demie-vies très courtes et ont donc des abondances dans la nature négligeables. Le 40K, par radioactivité β- (89,28%), se transforme en 40Ar ; et par capture électronique (10,72%) (comparable à l’équilibre de la radioactivité β+) en 40Ca.

L’argon (symbole : Ar) possède également de nombreux isotopes (Z = 18 et 30 < A < 56 ; M= 39,948). Trois sont stables dans la nature (36Ar, 38Ar et 40Ar) aucun ne possède de une demie-vie très longue, tous les autres isotopes ont des demie-vies très courtes et ont donc des abondances dans la nature négligeables.

Le calcium (symbole : Ca) possède également de nombreux isotopes (Z = 20 et 34 < A < 56 ; M= 40,078). Quatre sont stables dans la nature (40Ca, 42Ca, 43Ca et 44Ca) et deux possèdent de une demie-vie très longue (46Ca et 48Ca), tous les autres isotopes ont des demie-vies très courtes et ont donc des abondances dans la nature négligeables.

2.2.7.2. Les désintégrations du 40K 

Page 43: Géochimies isotopiques

Environ 89,28% des atomes de 40K suivent la transformation 1, et donc seulement 10,72% la transformation 2.

Transformation 1 :

avec une constante de désintégration de λCa = 4,96.10-10 an-1 (demie-vie = 1,4 109 ans). Mais une partie des électrons ainsi produits peuvent réagir avec le 40K, pour aboutir à une seconde transformation :

Transformation 2 :

avec une constante de désintégration de λAr = 0,58.10-10 an-1 = 5,8.10-11 an-1 (demie-vie =11,9 109 ans)

par hypothèse :

Posons λ= λCa + λAr, on obtient ainsi :

Page 44: Géochimies isotopiques
Page 45: Géochimies isotopiques

Si l’on suit la définition stricte de la période radioactive, temps au bout duquel la moitié de l’élément père 40K, a disparu, cette période vaut:

On constate donc que la constante l est la somme de ces deux constantes λCa et λAr, et l'équation à utiliser pour le calcul est un peu moins simple que pour le couple Rb-Sr.

2.2.7.3. Une variante: La méthode 39Ar-40Ar 

Cette méthode consiste à irradier l’échantillon par des neutrons rapides. On ne mesure plus le potassium 40 mais l’isotope 39 de l’argon produit par réaction des neutrons avec l’isotope 39 du potassium. On parle alors de méthode 39Ar-40Ar, qui remplace la mesure précise de deux isotopes de deux éléments différents, 40K et 40Ar, par une mesure précise du rapport 40Ar/39Ar de deux isotopes d’un seul élément : l’argon. Un témoin d’âge connu irradié simultanément mesure le rendement de la réaction. Cette méthode, combinée à l’extraction progressive de l’argon de l’échantillon irradié (par plateau de température ou steep heating), a plusieurs avantages dont l’identification de perte éventuelle d’argon après la formation des minéraux.