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Hold your breath and count to ten Elinor Carra-Roq

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Hold your breath and count to ten

Elinor Carra-Roq

16.41 628825

----------------------------INFORMATION----------------------------Couverture : Classique

[Roman (134x204)] NB Pages : 262 pages

- Tranche : 2 mm + (nb pages x 0,055 mm) = 16.41 ----------------------------------------------------------------------------

Hold your breath and count to ten

Elinor Carra-Roq

Elin

or C

arra

-Roq

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And fall apart. And start again.

(Placebo – English Summer Rain)

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Je suis persuadée que tout a commencé comme ça. Que sans cet événement, je n’aurais pas la vie que

j’ai, je ne serais pas passée par ce par quoi je suis passée. Peut-être mieux, peut-être moins bien… Peut-on réellement savoir ? Si c’est le cas, je ne le veux pas… C’est connu… Avec des « si » on peut mettre Paris en bouteille.

Moi, ma réalité, elle est là. Ça s’est passé comme ça.

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Devant la télé, une fin d’après-midi avec ma mère.

Une émission sur les petits amis.

« T’as pas de copain toi, hein ? C’est mal d’avoir un copain, c’est pas bien, t’es trop jeune pour avoir un copain. Tu resteras avec maman pour toujours. C’est pas de ton âge, les garçons »

J’ai 15 ans.

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Samedi matin, 10 h, je me lève, me rappelle

vaguement de la soirée d’hier, de mes larmes en plein bar, de mes tremblements lorsqu’il m’a demandé pourquoi je pleurais et surtout de mon incapacité à lui répondre honnêtement.

Je cherche le chat. Ah oui, c’est vrai… Il n’est pas là.

La télé diffuse un truc dont je n’arrive plus à me souvenir. Emissions du matin, sans grand intérêt sans doute.

Je sais que ma mère est à mes côtés, et qu’elle ne me laisse pas vivre. Pas moyen d’aller pisser sans subir un interrogatoire des plus poussés… Où est-ce que je vais, pourquoi ? Elle m’a toujours surprotégée, mais là, y’a un soupçon d’abus quand même.

Puis mon père fait son entrée, il a été « faire son chenit » comme il dit. Déplacer des machines obsolètes et inutilisables, poussiéreuses, franchement crades. Pourquoi ? Ouais, c’est vrai, ça, pourquoi ?

Il est mal à l’aise, tourne en rond au salon, me regarde, regarde ma mère, tripote ses mains. Je sais

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qu’il a quelque chose à me dire, je ne veux pas que ça sorte, je veux qu’il ferme sa gueule.

Ce qu’il ne fera pas. Pas drôle sinon. Il me parle du chat justement, que le vétérinaire a appelé, qu’il a passé la nuit… Voilà pourquoi mes larmes d’hier… Oui, je pleure pour un chat.

Je pleure pour mon chat qui a passé 10 ans de sa vie à mes côtés. Qui a passé 10 ans à me consoler, 10 ans à supporter mes conneries. 10 ans que je l’habille, que je le gratte, que je l’emmerde quand il dort, quand il mange, quand il a besoin de chier.

10 ans que je le câline, qu’il me mord, me griffe. 10 ans que je la traite de connasse.

10 ans d’amour vache.

Donc oui, le chat a passé la nuit ! Bonne nouvelle, dis-je.

Oui, mais non. On m’annonce qu’il ne reviendra pas à la maison, jamais. Ah. Ok.

Je me lève, vais sur le balcon, regarde ce putain de lapin qui est toujours en vie lui, le prends dans mes bras, et hésite à le balancer dans le vide. « Pourquoi lui et pas toi ? Hein ? Vas-y, remue ton nez et explique-moi. » Pas de réponse. Je m’attendais à quoi hein ? Va savoir.

Il ne nous a pas reconnu quand le véto a ouvert la cage. Crache-nous à la gueule, on te dira rien. Une piqûre. Une seule. Il se calme au fur à mesure que le poison atteint le cœur. Il me regarde, langue

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pendante, souffle court, puis il ferme ses yeux, continue de respirer doucement. Je le caresse en attendant… En attendant quoi ? Je sais pas, je suis dans le flou. J’attends c’est tout.

« C’est fini » lâche le véto. Un cri. Long, rauque. Des larmes. Par milliers. Je

crie, je hurle, je pleure, je bave. Je perds toute dignité et j’en ai rien à foutre. Mes parents pleurent, je pleure. Ce moment est une rivière de larmes en crue. Ça déborde, je ne peux rien contenir. Je refuse de me séparer de ce corps inerte. Je refuse de lâcher la table d’examen. Je dis à ma mère que je veux le prendre à la maison, chez nous. Je veux le garder. « Mais, il est mort » me dit-elle. J’m’en tape. Je veux mon chat. Elle doit me sortir de chez le véto. Me mettre de force dans la voiture. Je crie encore. Et à force de pleurer, je dors.

J’ai 17 ans.

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Un après-midi, en semaine, aux environs de 16 h.

Mon père et moi rentrons dans cet appart’que je connais par cœur. On se marre, je sais plus pour quelle connerie. Le téléphone sonne, je réponds. Une voix de femme qui me demande : « Ton papa est là ? »

Je passe le combiné, mon père, sourire aux lèvres le prend. 10 secondes chrono et son sourire s’efface. J’ai bien vu ce changement sur son visage, je m’en rappelle encore.

Et moi dans mon coin qui tourne en rond, qui tiens pas en place, qui ne comprends pas. Je suis sûre que c’est pour moi, que j’ai fait une connerie, qu’il va m’engueuler. Mais au fait, j’ai fait quoi ? J’en sais rien. J’ai pas la conscience tranquille. J’ai fait quoi bordel ?

Il repose le combiné, va s’asseoir à la cuisine, ses mains croisées. J’arrive, me plante devant lui. « Y’a quoi ? »

« Tu savais que maman voyait quelqu’un d’autre ? » Première baffe. Je cours au téléphone, appelle ma

mère dans sa chambre d’hôpital. Lui hurle dessus, lui

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demande, « mais bordel c’est quoi ces histoires ? » Mon père prend le téléphone, lui parle. Et moi je bous. Littéralement. Au bord de l’implosion. Mes neurones s’agitent et finalement, je capte plus rien. Je reprends le combiné et je l’entends encore me dire : « Mais ma fille, tu crois qui ? Ta mère ou une parfaite inconnue ? »

Ce soir-là, je ne remonterai pas la voir à l’hôpital. Dans 3 jours, j’ai 18 ans.

Le lendemain, elle rentre de l’hosto. Pas un mot, direct dans sa chambre. Où elle vivra couchée le plus clair de son temps. Nos relations se dégradent, et tout ce qu’elle trouve à me dire le 20 août 2003 c’est : « Joyeux anniversaire quand même. »

Je dis merci, je suis polie. Je prends mes affaires et me casse.

Ça se dégradera encore plus quand quelques jours plus tard, je la suis dans cette ville où elle n’a rien à faire un après-midi à 13h, sans voiture. Je la piste dans toutes les rues, perds sa trace, la retrouve, assise sur un muret avec un mec. Ah ok. Baffe dans ma gueule. Encore une.

Puis, peu après, un vendredi soir, minuit, j’appelle mon père pour qu’il vienne me chercher. Pas le permis. Et une heure de rentrée imposée. Ça répond pas. Ni sur le fixe, ni sur le portable. Plus assez de thunes pour payer le taxi, je décide de dormir chez mon copain.

Mes parents ne savent pas que j’ai un copain. Mes

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parents n’ont jamais vraiment su ce que je faisais dès que je sortais de chez moi. J’envoie en SMS pour expliquer ce qu’il se passe et que je vais dormir chez mon copain, « comme ça au moins vous savez que j’en ai un. » Et je termine avec : « De toute façon, tout ce qu’il se passe en ce moment, c’est pas ma faute. »

Mon téléphone a sonné toute la nuit. J’ai pas répondu. J’ai pas dormi non plus, j’avais bien trop peur. Le lendemain 7 h, devant la télé, je réponds enfin. Ma mère. J’l’envoie chier. « Attends je te passe ton père. » Ah. Changement de ton. Il me hurle dessus et je fonds en larmes. « Arrête de pleurer, on arrive. »

J’attends bien sagement sur le trottoir, coupable. Quand ils arrivent, je monte dans la voiture, et les réjouissances commencent. Surtout ma mère. Mon père est bien trop content de me savoir saine et sauve.

« T’es vraiment qu’une salope, à 18 ans tu découches. T’es qu’une marie-couche-toi-là. »

Je pourrais lui dire que lorsqu’on voit son amant, on ferme sa gueule. Par respect pour mon père, je n’en ferais rien. Tout prendre dans la gueule, avaler, et se taire.

Je ne lui parle plus. Et un beau jour de septembre, le 11, exactement. Elle me dit qu’elle y va. Ce qu’elle me dit tous les jours une fois mon père parti au travail.

« Ok. » Je ne la reverrai plus.

Trahison, abandon, incompréhension, doute, survie, haine.

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Joli mois de mai. 10 h30. Je me réveille et vois sur ce fabuleux outil qu’est un téléphone portable, certainement créé pour tous ces sales lâches qui n’osent pas dire les choses en face, que mon copain, me largue. Joie, bonheur ! Il est le premier, et je n’entends pas ça de cette manière. Je vais le voir. Deux mois qu’il fait semblant. Ça fait toujours plaisir ! C’est pas comme si j’m’étais totalement reposée sur lui depuis que ma salope de mère s’est barrée. Ça m’apprendra.

Et oui, ça m’apprends. A avoir mal, à encaisser les coups. A ouvrir la bouche pour la refermer aussitôt.

Et comme je suis une ratée et que j’ai pas de job, bah, je rumine. Plus je rumine et plus je suis triste, plus je suis triste, moins j’ai le goût de bouger, et donc je me fais chier avec ma mélancolie sur le dos ! Eh ouais. Je suis sur internet jours et nuits, je me nourris de DOVE Caramel Wave en paquets de 200 grammes que mon père a la gentillesse de me ramener, je fous rien, mais je suis trop flemmarde pour aller acheter ces chocolats dans le magasin qui se trouve à 500 mètres. Je suis une loque, je ne me supporte plus, mais je ne fais rien du tout pour arranger les choses.

Le mal-être qui m’habite est tellement fort, que je tente par n’importe quels moyens de l’oublier. Ne serait-ce que quelques secondes.

Une lame de cutter va me sauver, du moins pour un temps. M’entailler consciencieusement les avant-bras. Une entaille après l’autre. Toujours plus

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profonde, toujours plus souvent. La douleur me sauve de mes pensées pour des micros-moments.

C’est là, qu’une addiction aux gueules de bois commence. Du vendredi au dimanche soir je suis bourrée. Souvent, je ne me rappelle pas de la soirée dans sa totalité. Peu m’importe…

C’est ça que je raconte, à moi, aux autres, à qui veut bien me lire, sur ce blog, ce journal intime qui n’a plus rien d’intime que le nom. Affiché sur la toile, aux yeux d’inconnus, ce blog qui est naît un jour de mai, il y a déjà 10 ans.

C’est moi qui me livre, qui me délivre, mot après mot, au fil des jours, de ce sablier qui égrène le temps, implacable. C’est moi qui suis dans chacune de ses phrases, c’est mes larmes qui planent au-dessus de chaque point-virgule.

C’est l’histoire totalement banale et barbante d’une post-ado mal dans sa peau, qui veut le monde et qui n’a que les déchets de ce monde. D’une fille qui a mal à en crever, qui apprend, qui monte sa carapace, qui prend ses armes. C’est une histoire de plus dans le monde.

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ENVOLE MOI

[25.05.2004]

Une envie de parler. De tout de rien. Juste parler. Un sentiment de manque. Manque de partager. Et personne à qui dire ce que je ressens.

Frustration.

J’garde le silence par obligation. A qui parler ? Aux étoiles ? Essayons. Besoin qu’on m’écoute. Qu’on me réponde. Mais sur cette terre personne ne veut rien entendre. On se bouche les oreilles pour ne pas souffrir. Demain est un jour meilleur. Non j’en doute. J’veille sur vous… Non. Tu renforces ma haine déjà si présente.

Dégradation de mon système nerveux. La phase 2 est engagée.

GIVE ME SOME AFFECTION

[26.05.2004]

Prisonnière d’un esprit trop atrophié par toute

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cette polémique de l’amour. L’amour c’est beau, l’amour c’est bien, l’amour rend heureux.

Oui c’est vrai l’amour rend heureux mais pour combien de temps ? 1 semaine ? 1 mois ? 6 mois ? 4 ans. Puis tout s’écroule et que vous reste-il ? Les amis ? Pas tous. Mais les seuls qui restent auprès de vous, eux, tiennent à vous. Je me sens comme l’oiseau pris dans le pétrole, étouffée, seule, agonisante.

Quelle ironie quand je vois tout le monde qui m’entoure, tous ces vrais-faux amis qui se tiennent à mes côtés. Mais au fond pourquoi ? Pourquoi restent-ils avec moi ? Oh non j’n’suis pas la fille populaire, tellement trop « fun », je ne suis pas non plus THE piège à hommes. Alors pourquoi ?

S’agit-il d’une conspiration destinée à m’faire mal plus vite ? Mais faites gaffe chers « amis », vous qui me parlez à condition que service vous soit rendu, je ne suis pas sage, je trahis… Choqués ? Alors tirez-vous. Vous ne me méritez pas. Si j’dois vous supportez parce que vous m’avez rendu service… Débiles.

Les vrais amis ne se doivent rien. Les vrais amis se complètent et s’aident. J’suis perdue et dépourvue d’âme.

Finalement je ne veux qu’une chose. I need a hug1…

1J’ai besoin d’un câlin.