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Il Mangiatore di fagioli (ou Il mangiafagioli), Annibale Carracci, c.1583, image iconique du paysan italien, sauf qu’il soit peu probable qu’un paysan de l’époque mange si bien, et avec une nappe sur la table.

Guy Lanoue, Université de Montréal, 2011-2014

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Les paysans ont eu une image ambigüe dans l’anthropologie, avec son bagage culturel hérité du continent de ses origines, l’Europe occidentale, où les paysans étaient considérés une sous-classe douée d’une culture minimale. La pendule s’est un peu renversée grâce aux recherches de Fernand Braudel (Civilisation matérielle, économie et capitalisme, XVe-XVIIIe siècle , 3 tomes, Paris 1979) et de ses collègues de l’école Annales, qui écrit l’histoire de l’Europe occidentale vue « du bas » (c.-à-d., les conditions de la vie quotidienne des masses), et, en anthropologie, de l’œuvre d’Eric Wolf (Europe and the People Without History, Berkeley, 1982, et Peasant Wars of the Twentieth Century, New York, 1969), où il place les « petits peuples » souvent oubliés par l’historiographie officielle au centre des grands mouvements qui ont formé le monde contemporain: l’accumulation et la concentration du capital grâce au trait à l’esclavage et de la fourrure, l’infiltration bourgeoise de la campagne, etc.) .

http://worldhistoryforusall.sdsu.edu/images/medieval-european-peasants.jpg

L’image à gauche perdure depuis des siècles, mais elle n’illustre qu’une vérité partielle, car les paysans avaient une culture qui les sensibilisait à l’Autre, et ils n’étaient pas politiquement inertes. Les seigneurs ne conservaient pas de documents qui traitent des paysans, mais on trouve néanmoins quelques traces de leurs efforts à s’éduquer et à gérer leurs communautés.

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Les paysans italiens ont depuis longtemps été la cible de diverses politiques de « folklorisation » étatique ou d’orientalisation esthétique. À gauche, une mise-en-scène évocatrice du film néoréaliste « Riso amaro », 1949, avec Silvana Mangano.

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Une représentation de la vie paysanne selon les canons du classicisme allemand. Cette esthétique a dominé les images de l’Italie, surtout au 19e siècle: de personnes « simples » encadrées par les ruines de l’empire. Les chercheurs allemands admiraient les réalisations de la civilisation romaine, mais ils étaient moins admiratifs de l’Italie contemporaine (ceci se voit dans le journal de Goethe, Voyage en Italie , publié en 1816-7, où il admire l’art, les ruines, les plantes et la géologie, mais adopte un ton parfois critique parfois ironique envers les Italiens « simples »). Les Allemands sont sensibles aux revendications françaises qu’ils incarnent l’esprit de l’empire et que les Allemands sont les descendants des sauvages que les Romains avaient combattus pendant 4 siècles. L’héritage allemand serait tellement contaminé par son passé sauvage qu’ils étaient pour toujours l’antithèse de la civilisation.

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Le paysan bucolique version 1800; ils sont rarement représentés au travail, et quasiment toujours en costume « folklorique » que les personnes postaient seulement en occasion festive. Le costume normal pour le travail était une tunique simple.

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Les Abruzzes, 1890; on voit que le travail du paysan s’effectuait avec peu d’outils et beaucoup de sueur.

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Les Abruzzes, 1890; ces poses étaient souvent interprétées comme « preuve » que les paysans avaient de familles énormes (et donc, ne contrôlaient pas leurs pulsions charnelles); il s’agit plutôt d’un groupe de travail dont les membres ne sont pas nécessairement apparentés.

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Les Abruzzes, 1930

Difficile à discerner, mais les jeunes, surtout les femmes, ne portaient pas de souliers, qui étaient réservés pour le dimanche et les fêtes (si on en possédait une paire). Pour les champs, il y avait de sabots de bois ou de cuir non traité. Les femmes n’avaient pas de sous-vêtements, et donc étaient susceptibles aux infestations de vers quand elles s’assoyaient par terre.

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Lazio, 1905

Le cheval était réservé pour les riches, comme à l’époque médiévale. Les paysans se déplaçaient sur l’âne, s’ils étaient chanceux.

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Manifestation, Rome, 1946; la 2e pancarte à gauche dit: « Les terres communes doivent retourner aux paysans »; en italien, contadino, de contado, mot ancien pour conté (lié à contrade, quartier urbain), dans le sens d’une zone rurale attachée à et contrôlée par une ville.

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Abruzzes, 1995; un ami, l’anthropologue, et le père de l’ami.

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Il y a deux textes classiques qui prennent comme sujet les paysans italiens. Sydel Silverman en Three Bells of Civilisation (New York, 1975) propose que la vie paysanne d’un village d’Ombrie (Monte Castello di Vibio) est dominée par la civilità, un ensemble de valeurs qui agit comme une idéologie manipulée par l’élite locale pour reproduire le statuquo et donc pour conserver sa position privilégiée. Silverman n’accordait pas de poids aux affirmations qu’ils faisaient partie d’un projet civilisateur. En fait, elle ignore le fait que les personnes défavorisées par cette idéologie l’acceptent. Dans cette vision du monde paysan, les individus sont victimes de la tradition, qui se reproduit et se transmet sans modification, d’une génération à l’autre. Cette approche se voit également en The Moral Basis of a Backward Society de E. Banfield (New York, 1958). Ces paysans ont une « mauvaise» culture qui les empêche d’avancer sur les plans social et économique, car ils sont incapables d’agir en faveur de la communauté. Ils sont guidés par le «familisme amoral», et investissent uniquement dans la famille.

« Montegrano », le pseudonyme du village étudié par Banfield en Basilicata.

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En contraste avec leur image bucolique, les paysans italiens s’identifient avec le projet civilisateur et avec la vie urbaine. Ils ne se voient pas comme des campagnards mais comme

Mariage paysan, 1960

comme représentants de la ville. Par exemple, les paysans qui sont généralement présentés dans des costumes « traditionnels» (que personne ne portait même dans le passé sauf les jours de fête), adoptent les modes urbaines lors des rituels (la messe du dimanche, les mariages et baptêmes) où le protagoniste est l’individu et non la communauté. Chaque village s’identifie avec un grand centre métropolitain et reproduit en miniature la structure du centre urbain: ateliers, magasins, services, orchestre local, etc. Cependant, il y a un paradoxe: pourquoi s’identifient-ils avec l’urbain, qui est après tout l’incarnation du système qui les exploite? La réponse est

subtile: la civilisation est féminine et donc fragile (elle est symbolisée par Italia, déesse mineure sans aucun trait particulier). Sa fragilité souligne l’importance de l’intervention forte et donc symboliquement « masculine » pour l’appuyer; traditionnellement, ceci signifie dominer la périphérie militairement et symboliquement. La civilisation hégémonique justifie indirectement l’agir. Dans un système contemporain où la gouvernance bourgeoise bloque l’avancement individuel et définit les paysans comme une classe subalterne, ce symbolisme est alléchant pour les personnes sans pouvoir.

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Les paysans s’insèrent dans un cadre étatique de pouvoir. Ils n’ont pas de contrôle sur les dynamiques de la reproduction sociale et économique de l’entreprise familiale, à différence des fermiers. Ils sont perpétuellement endettés envers le propriétaire de leurs terres ou au baron local.

Ils ont plusieurs réponses à cette situation: 1) élargir le nombre de travailleurs dans la famille (famille élargie); 2) créer des réseaux d’entre-aide; 3) acheter ou louer d’autres terres, s’ils ont de moyens; 4) migrer (à l’étranger ou à de grands centres; 5) augmenter leur revenu en travaillant à temps partiel en d’autres métiers, surtout l’artisanat. L’une ou l’autre de ces stratégies sontadoptés selon le degré de pauvreté; cependant, la pauvreté a deux causes, qui vont les orienter vers un choix particulier: soit la terre est peu productrice, soit le régime politico-économique les écrase.

Des terres fertiles situées dans une zone gouvernée par un régime oppressif ont le même effet sur la structure de la maisonnée qu’une terre pauvre dans un régime politique plus ouvert

Costumes « typiques » des paysans du Lazio

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Les paysans italiens adhérent à un régime culturel patriarcal, pour deux raisons : 1) ce code culturel souligne justifie le contrôle de la sexualité féminine, qui empêche la création de liens sociaux et de réseaux parallèles. Ces derniers pourraient déséquilibrer les réseaux d’entre-aide déjà établis; 2) le patriarcat justifie un système de parenté patrilinéaire; l’épouse est donc une « étrangère » au sein de la maisonnée (en général, les paysans sont patrilocaux); comme tels, ses pouvoirs sont limités, ce qui la motive à s’investir dans le bienêtre de ses enfants, qui « appartiennent » au lignage du mari; ainsi, elle se transforme d’épouse « étrangère » en mère « locale ». Par contre, le pouvoir d’agir du mari est limité par sa participation dans les réseaux d’entre-aide dont dépend la survie de sa maisonnée. La femme « étrangère », elle, n’est pas tenue à gérer ces réseaux tant qu’elle ne les compromet pas en tachant l’honneur de la famille. Elle peut agir avec plus d’indépendance. Par exemple, si une famille veut acheter un terrain des voisins pour aider leurs enfants à s’établir, le mari ne peut refuser le prix exigé sans compromettre son lien au vendeur. La femme, quant à elle, peut mieux négocier, car elle pense uniquement à ses enfants et au futur. Son mari peut également jouer sur le statut étranger de sa femme pour contourner les contraintes sociales qui l’entourent:. « Tu sais, je payerais volontiers ton prix, mais ma femme me tuerait. Tu sais comment sont les femmes ». Un régime patriarcal a donc quelques bénéfices indirects pour les femmes paysannes, car il crée un espace d’agir réservé aux femmes, qui en conséquence ont tendance d’être plutôt conservatrices et d’appuyer le statuquo.

Un régime patriarcal est souvent jugé négativement par les femmes urbaines et surtout par les féministes, qui ne reconnaissent pas ses

avantages pour la survie de la maisonnée dans un contexte paysan.

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Le tarentisme aux Pouilles, selon Ernesto De Martino (La terra del rimorso, 1961; La terre du remords, 1999), est une métaphore puissante pour la misère économique et surtout psychique des pauvres du sud de l’Italie et, notamment, des femmes dans cette société plutôt patriarcale. Censée être mordues par une araignée tarentule, les femmes se donnent à de gestes forts et déchainés qui semblent inconsciemment incarner la sexualité qu’elles ne peuvent assumer ouvertement. Taranto est une ville portuaire fondée par les Grecs, qui l’avaient baptisé Taras, nom d’un fils de Poséidon, maitre de la mer. Le nom de la ville est à l’origine du nom de la maladie, car la condition est émergée dans la zone limitrophe au 16e siècle, mais il y a de suggestions que des manifestations semblables existaient ailleurs en Europe dès le 11e siècle. Le phénomène est certainement lié au contrôle de la sexualité des femmes (la grande majorité des victimes sont de jeunes femmes nubiles, et il se manifeste surtout en été, avant la récolte), pour conserver intacts les réseaux d’entre-aide.

http://www.big-italy-map.co.uk/maps/map-of-puglia-map.gif

Ce n’est pas surprenant que les gestes frénétiques des femmes soient «domptés» par les rythmes réguliers et ritualisés de la musique. Il existe des musiciens spécialistes du genre (des hommes, naturellement).http://www.youtube.com/watch?v=f3RaIpFxw8I&feature=related

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Après la reprise économique des années 1950 et surtout 1960, les paysans commencent à abandonner la terre, se transformant en prolétaire urbain à Turin, Milan, Gênes, ou plus loin (Allemagne, France, Belgique, Argentine). Mais ce n’est pas un phénomène nouveau. Ils ont toujours migré pour augmenter le revenu familial ou pour réaliser un projet de vie (se marier, acheter une maison). Par exemple, pour un village abruzzais où j’ai effectué de la recherche, de 1958 à 1991 507 femmes et 470 hommes ont quitté le village (avec une population de base de c.1500), mais 248 hommes sont revenus, comparés à 283 femmes, pour un bilan négatif de 222 hommes et 324 femmes. Pourtant, ils ont de parcours différents: 72,7% des hommes ont migré en Italie, contre 92,4% des femmes qui ont choisi d’autres localités italiennes. Statistiquement, les hommes ne favorisent pas une localité particulière, mais 50% de ces femmes se sont établies dans un de deux villages avoisinants.

De 1870 a 1980, 5 millions d’Italiens ont émigré en Suisse (Swissinfo.ch, 14-10-2003; 14-10-2011); à droite, des Italiens à New York c,1906, dans des conditions de pauvreté extrême.

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Pourquoi? Dans cette région et à différence des autres régions du Sud, les femmes peuvent hériter des terres.* Par contre, un nombre d’hommes n’hérite pas de terres, car ils sont bergers. Ceci les pousse à trouver des épouses héritières là où ils peuvent, car même les femmes pauvres ont des terres. Bien que les femmes retiennent le titre à leurs propriétés, après le mariage elles cèdent le contrôle au mari. Pour éviter la perte de leur seule source d’autonomie (largement symbolique, car les lots sont petits, et une femme nubile ne peut pas travailler ses terres seules), elles restent célibataires le plus longtemps possible. En moyenne, elles sont plus vieilles de leurs époux au mariage (approx. 13 mois). Elles peuvent également opter pour une 2e stratégie: trouver des maris plus riches et donc désintéressés sur le plan économique. Or, le village d’origine est pauvre, mais les 2 autres avoisinants ne le sont pas. Là, elles trouvent plus facilement un mari riche (à noter que les différences entre riches et pauvres sont minimes dans ce contexte).

Femmes d’Abrouzzes, L. Alma-Taddena, c.1900

* Étant une zone montagneuse, les Abruzzes est une région dont la pauvreté n’a pas encouragé la création de latifundiums; les paysans n’étaient pas exploités pas de grands propriétaires; ceci a possiblement encouragé l’émergence d’un système d’héritage plus égalitaire.

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Les paysannes ont joué un rôle important dans les transformations économiques et sociales de la campagne italienne, commençant avec leur appui du fascisme dans les années 1920-30 (voir P. Wilson, Peasant Women and Politics in Fascist Italy: The Massaie Rurali , Londres, 2002; une massaia est une ménagère, c.-à-d., une paysanne relativement aisée qui ne travaille pas la terre mais gère la maison; cette fiction sémantique était un appât fasciste pour leurrer les paysannes et pour créer une impression bucolique de la vie rurale). La plupart de ces femmes ne semblent pas avoir été motivées par l’idéologie, mais par les bénéfices que le Parti fasciste leur promettait: écoles et rôles-clés (uniquement au niveau local) dans les organisations qu’ils fondèrent. Après la guerre, elles sont restées culturellement conservatrices, mais ont adopté les nouveautés sociales parrainées par le gouvernement qui augmentaient leur pouvoir d’agir et de s’exprimer dans le contexte patriarcal local: les écoles et les cliniques. Ayant la charge des enfants, et étant “étrangères” dans la maisonnée patrilinéaire, elles n’hésitent pas à s’investir dans ses véhicules qui donnent aux enfants des atouts importants. Le développement économique et politique de la

campagne des années 1960-70 est surtout accueilli par les femmes (l’autre vecteur du développement était les politiques gouvernementales qui favorisaient l’emplacement des usines dans la campagne; ceci touchait les hommes, bien que plusieurs jeunes paysannes se sont aussi transformées en prolétaires).

Une massaia, années 1930, en costume traditionnel. Les Fascistes adoraient les uniformes, car ils standardisaient l’individu en cachant son individualité et le transformaient en composant simple du nouveau corps politique qu’ils avaient créé.