hubert henri - les celtes et l'expansion celtique jusqu'à l'Époque de la tène

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Les Celtes et l'expansion celtique jusqu'à l'époque de la Tène G 11125 (21) Hubert, Henri Paris 1932

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celtes

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  • Les Celtes et l'expansion celtique jusqu'l'poque de la Tne

    8G 11125(21)

    Hubert, Henri

    Paris1932

  • BIBLIOTHQUEDE SYNTHSEHISTORIQUE

    L'VOLUTION DE L'HUMANIT1

    L'VOLUTION DE L'HUMANITDirigeputHENRIBERR

    DIRECTBVR DU CBNTRB INTERNATIONAL DE SYNTHSE1

    LES CELTES

    ET

    L'EXPANSION CELTIQUE= JUSQU' L'POQUE DE LA TNE =

    Avet12Cartes,43figuresdansle texteet4 plancheshorstexte.

    PAR

    Henri HUBERTDIRECTEUR D'TUDES A l'COLB DES HAUTES TUDES,

    CONSERVATEURADJOINT AUMUSE DES ANtIQUITBS NATIONALBS

    LA RENAISSANCEDU LIVRE78, BOULEVARD SAINT-MICHEL. PARIS

  • I/VOLUTION j^fr

    ' SRIE CMPLMENTAtR

    Tomer. La Scleace orientte avant l (irecs. j mille.Tome2. La Sdenco heHnlquc. : 'C.tTome3. U Science helloJiUqHe.

    *Vohuao|nu .:

  • f1,L'VOLUTIONDE L'HUMANIT

    SYNTHSECOLLECTIVE

    XXII

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    OPOT LEGAl.f B.N. vc>uf-i; s s

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    PREMIRESECTION

    IV. LE MONDEANTIQUE.

    ROMEETLA CIVILISATIONROMAINE

  • L'VOLUTION DE L'HUMANIT.SYNTHSE COLLECTIVE-

    Dirige par HENRI BERR

    LES CELTES

    ET

    L'EXPANSION CELTIQUE= JUSQU' L'POQUE DE LA TNE =

    Avec12Cartes,43 figuresdansle texteet 4plancheshorstexte.

    PAR

    Henri HUBERTDIRECTEURD'TUDES A /COtE DES HACTE3TUDES

    CONSERVATEURADJOINT AU MUSE DES ANTIQUITS NATIONALES

    8

    LA RENAISSANCEDU LIVRE78. BOULEVARDSAINT-MICHEL.78. PARIS

    1932

    -11 'IfCopyrightby LaRenavaanceduLivre 199

  • PUBLIET MISA JOUR

    PARR

    MarcelMAUSSPrefiiuvrauCotligtdefronce.Directeuri I'EmUduHoulesBluiti,

    P. LANTRConservateuradjointauMutedeSalnl.Germain.

    Jean MARXDitecttwl'coledetHauteEtudes

  • AVANT-PROPOS

    L'EXPANSION CELTIQUE

    Avec les Celtes voici qu'intervient dans l'Evolution de l'Hu-manit un lment trs important et que parat une uvretrs attendue. Attendue cause du sujet attendue causede rauteur.Sur cegroupe ethnique, sur son rle, capital dans l'his-

    toire europenne o, on savait que Vhommequi tait le plusdocument, qui avait les connaissances la lois le plus com-pltes et le plus profondment penses, si l'on peul dire,c*lail Henri Hubert, Or Nubert est mort depuis quatre ans,et certains dsespraient de voir paratre l'uvre annonce.Elle parat avec une longue et douloureuse histoire.

    L'essentiel du travail selon les termes mmes de Hubert,tait fait en 1914 (lettre du 15 juin t919). Aprs Finler-ruption force de la guerre, au cours de laquelle il avaitrendu, surtout au Ministre de l'Armement, des servicesapprcis, il s'tait ht de renouer le fil; et le 5 jan-vier i923 il m'crivait J'ai mis aujourd'hui la dernireligne mon dernier chapitre . H ajoutait Reste reprendre le tout, couper, recoudre, vrifier . Des cir-constances diverses un deuil cruel, des proccupations defamille, un mauvais tat de sant, et qui peu peu s'aggra-vait ont fait traner celle revision, qu'il menait defront avec la prparation des Germains. En juillet, aot,octobre 1925, il me donnait des nouvelles la fois rassu-

  • VI AVANT-PROPOS

    rantes, el si attristantes Je suis au travail. J'avance len-tement, mais srement. J'ai t tenu au lit tout le mois demai. Je remonte doucement la pente. Mon travail aoancergulirement, mais dans de bien mauvaises conditions. Jeme suis dbarrass de tous mes cours. Vous pouvez donccompter sur moi dans toute la mesure de ma volont. Mais ilsemble qu'un mauvais sort s'acharne sur moi et je ne sais cequ'il me prpare encore. a Le 9 octobre 1926, il me rassu-rait nouveau Je souffre de tout travail intensif quelqu'il soit. Mais fat tout de mme travaill un peu et je vaispouvoir travailler davantage. Je ne peux pas vous dire quandj'aurai fini. Ce serait absurde. Mais cela ne peul pas larder.

    Lemercredi iSmai 927, il me mettait, une fois encore, aucourant de l'avancement de sa tche; et il concluait Cen'est videmment pas commode que d'crire l* histoire desCelte aujourd'hui. Mats cela est fait. C'est surtout du travailmatriel qui me reste. o Le jeudi 26, un mol de notre amicommun Marcel Maussm'apprenait qu'il venait de succomber une crise cardiaque. Et Mauss me donnait ce dtail, mou-vant pour moi Le manuscrit des Celtes tait sur sa tableil y avait travaill mardi .Trois amis dvous ont assum le soin de mettre au point

    pour la publication le manuscrit abandonn. Depuis quatreans, ce travail pieux ils ont consacr, leur lour, tout letemps dont ils pouvaient disposer. L'un d'eux, dans des pagesqu'on lira plus loin, prcise le rle de chacun. Qu'une uvrepuisse paratre, qui constitue le testament scientifique deHubert, qui donnera un public large que n'atteignaientpoint ses doctes mmoires, une ide de son savoir et de sontalent, c'est unegrande satisfaction pour tous ses amis. Maisqu'elle paraisse aprs sa mort et qu'il n'ait pas moissonn,lui, le succs, Padmiration qu'il avait, sinon cherchs, damoins prpars lentement, c'est une grande tristesse pourceux qui s'taient attachs, en mme lemps qu'au savant et

  • AVANT-PROPOS VII

    nupenseur, l'homme, Thommede cur, l'hommedegot, Vtrerare, doudes qualits lesplus sduisantes*Hubert, ds sa jeunesse, avait mrit de nombreuseset

    fortes affections. L'un de ceux qui se sont lis troitementavec lui dans les annes d'cole normale Vamontr sup-rieur, en ce temps,aux ludes qu'il faisait, plus mrquesescamarades, dj certainde savocationet desesmthodes.Unautre, frre d'lection , a retrac sa trop courtevie,mais Ripleine par le travail et la rflexion (1). Ce sontles origines, les crations des peuplesanciensouprimitifscrations intellectuelleset matrielles langues, catgoriesde la pense, religions, arts, instruments quipeu peu sesont imposes sacuriosit, la fois trs large et trspn-trante. Des voyagesnombreux, et mmeun tour du monde,qui luiont fait voirdes types varis d'humanit, connaitrelesprincipaux Instituts et Musesd'ethnographie, de prhistoireet d'archologie, l'ont mis et tenu en contactavecla ralithumaine du prsentet dupasse. Son esprit en a t enrichietexcit. Des travaux sur les religions smitiques, un ensei-gnement d'histoire des religionsprimitivesde l'Europe, l'cole des Hautestudes, unenseignementd'archologienationale, l'coleduLouvre, des recherchesceltiqueslies ses fonctionsde conservateur au Muse de Saint.Germain, une active collaboration l'Anne Sociologiqueont traduit celle ardeur de savoir et de comprendre.Huberta t un historien au sens le plus fort du mol. Toutesa car.rire est anime de l'esprit de synthse. Celait un collabo-rateur-n de l'volutionde l'Humanit, et il a t un despremiers mepromettre libralementsonconcours.

    J'avais, en publiant la Civilisationchinoisede MarcelGra-nel et en annonantun tome XXIV bis, la Pense chinoise,

    (l) Marcel Drouin,Annuairede l'AssociationamicaledesAncienslvesdel'colenormatesuprieure,2020,pp.46-61,

  • VII! AVANT-PROPOS

    justifi ce ddouhlement et dclar qu'on entendait bien nepoint crer par l un prcdent. Somme toute, il vaut mieux,dans P amnagement d'une uvre de trs longue haleine,viter le^affirmations tranchantes et tes principes tropabsolus.Le manuscrit que m'ont livr les amis de Hubert comportait

    avec l'illustration et les appendices habituels sept huit cents pages d'impression, II aurait t fcheux de pr-senter un volume aussi compact et d'aspect, pour ainsi dire,difforme. D'autre part, il tait inadmissible, aprs toutes lesrductions que Hubert avait, ou faites lui-mme,ou prvues( I ),de tailler encore dans une uvre tous gards si prcii use.Ce que Hubert a conu, et ce qu'il a, le premier, ralis,

    c'est l'histoire de tous les Celles, le tableau de toutes les Cet*tiques. Des origines les plus lointaines o l'on puiss actuel-lement remonter aux destines ou aux survivances ultimes,il embrasse la cellicil entire avec une science incompa-rable el une sympathie qui ne Paveugle pas, mais bien pluttl'claire. Celle riche matire, par bonheur, se laissait par-tager, sans peine, en deux tomes d'importance sensiblementgale (2).Le prsent volumetudie le monde celtique Jusqu ' t poque

    de la Tne, c'est--dire jusqu' la deuxime priode dufer.Le second traitera les trois phases de celle priode et, aprsun tableau du crpuscule ceiique, il caractrisera, dans sesaspects essentiels, la civilisation des Celles. L, de plus enplus, ceux-ci apparatront comme un lment de l'histoiregnrale, et en particulier comme un lment de f histoireromaine, jusqu'au jour o ils finissent par s'intgrer dansl'Empire (3).(1) Voirl'AvertissementdeMarcelMaust.(2)La secondepartiede Hubert,les mouvementsdes populationscel-

    tiques quieomprenaitdoutegrandschapitres a donnassezlogiquementtroisdivisionsl'expansiondesCeltesjusqu'l'poquedela Tne(*partiedupremiervolume),l'expansiondesCelles l'poquedela Tint,la findumondeceltique(I" et 2Partiesdusecondvolume).(3) VoirV.CHAPOT,L'Empireromain,pp. 336-387.

  • AVANT-PROPOS s

    Conformment au principe adopt, d insrer les groupeshumains dans notre plan au moment oh leur action se mlevisiblementau grand courant de Vvolutionhistorique, nousavons situ les Celtes dans la srie romaine, avant la forma-tionde l'Empire (1) maisil convenait, cetteplace, de Jeterun regard en arrire, de montrer ce qu'taient les Celtes,d'o ils venaient, ce qu'Unavaient fait aux temps obscursdeleur vie barbare. C'est quoi, prcisment, rpond ce pre-mier tome, dans la mesureo il est possiblede rpondre cesqueslions. Il se rattache aux volumes de J. de Morgansur l'Humanitprhistorique,d'Eugne Pillard sur lesRaces,et, d'une faon gnrale, il vient complter tous ceux qui,dans celle premire section, ont voqu les grands mouve-ments des masses humaineset le peuplement de la Terre.

    Avec ce tome nous avons donc affaire des Barbares,non pas au sens antique du mot f&tipoc,barbarus tranger la Grce ou Rome, car les gyptiens ou les Perses nesont pas pour nous des Barbares, mais au sens de peupleincompltement stabilis et civilis, de masses en mouve-ment et en mue (2). Nous avons affaire des Barbares queles Grecs, les Romains ont connus, sans doute, mais trs malau dbut, et sur lesquels les Anciens, dans leurs textes, nenous donnent d'abord que des renseignements trs vagues oucontestables (3). Il y a des groupes humains qui ne sontentrs que lard, nous le savons, dans la conscience des civi-liss . Comment donc connatre, aujourd'hui, cette Europeprotohislorique que bordait une Europe mditerranenne

    (1) Onlesa entrevusau tomeXVIII, L'italio primitiveet lesdbutsdel'imprialismeromain.not.pp.199-207.(2) VoirF. Lot, La findumondeantique,Avant-propos,p. x, note3.(3) Unebonnepartiedel'ethnographieanciennenousestarrivesousformedelabiset demythologie traverslespotespiquesou lyriquescl lespoly-

    graphes*(p. US).

  • AVANT-PROPOSx

    dj riche d'histoire ?Commentconnatre, enparticulier, cesCelles et ces Germains dontle rle dans F Empireromaindevait, unjour, tre si grand, puisque, en y entrant, les unsPont affermi et les autres branl? Comment tes connatre, sinon par eux-mmes,en recueillant les seuls tmoignagesvqui subsistent de leur personnalit elhnique et de leur aclivile des faits linguistiqueset des faits archologiques?Hubert, dans la premire partie de ce volume,a insist sur

    les mthodes qui lui permettent de dterminer, de circon-scrire l'lment celtique, de savoir ce que sont les Celtes.Sans carter Vanthropotogie(1), il en limitesoigneusement

    le rle Il ne faut plus recourir celle sourceinpuisabled'erreurs et de contradictions qu'avec beaucoupde critiqueet de modration et ne pas oublierquepeuples et races, tantchoses diffrentes, ne concordentpas ncessairementet, enfait, ne concordentjamais exactement(2). Les Celtes

  • AVANT-PROPOS Xi

    lespeuples . Et pour les civilisationsdont les restes sontincorporsau sol, c'est, engrande partie, l'archologie qui*trouvant l les indices lgitimes des peuples disparus ,

  • XII AVANT-PROPOS

    qui viventencore aujourd-hui.L'unit des languesceltiquesest vidente.Elles avaient entre elles des ressemblmes desplus troites, comme elles n'en prsentaient respectivementavec aucune autre langue (p. 5t). D'une faongnrale,l'lude des Celtes insulaires, qui est abandonnepresquetoujours aux philologues, semble Hubert indispensablepour la connaissancede la celticit car il y a des couchesprolondes dupass qu'onpeut atteindre dans leurlittrature.L'effort de Hubert pour utiliser les deux genres de docu-

    mentation, pour en rendre la confrontation fructueuse, estvraiment admirable. Il est men avec une prudence exem-plaire, avecla mthode rla plus svre et la plus austre (p. 23). Certes, dclare-i-il, les faits de phontique, pasplus que les fails archologiques, n'ont une significationethnographique absolue, a II y a lieu souvent un travaild'interprtation dlicat (pp. 161, 175). Je suis port croire, sans entre tout fait sur (p. 1 7) des formulesdecegenre abondent sous sa plume la fois ingnieuseet sage.Il existe, cependant, des objets, des formes de lombes,des

    modalits de langage qui permettent de classer les Cellesparmi les Indo-Europens, de lessituer parmi lesEuropens,de les distinguer des Grco-Latins,des Germains, desBallo-Slaves, de les opposer aux Ibres et aux Ligures, de dter-miner et de dlimiter le monde cellique. Hubertfait nelle.ment apparatre l'unit ethniquedes Celles: si ellen'est pasanthropologique, la vie commune a produit une espced'unification des types physiques, dans une sorte d'habituscommun tous (p. 38). Hdiscerne la diversit dans l'unit,mais ramne celle diversit unedivisionen quatre groupes:Goideis, Piets, Bretons (y compris les Gaulois) et Belges.Hff

  • AVANT-PROPOS Xlll J

    par lesquelles il anticipe sur le volumequ'il a consacr ces derniers.Ni archologues ni historiens ne font ou ne font assez

    nettement la distinction de ces deux groupes de CellesBretons continentaux et de Grande-Bretagne et Goidetsd'Irlande et d'Ecosse, les plus avancsdes Celles versl'Ouest (p. 67). Hubert tablit, par une dmonstrationextrmement ingnieuse, ce fait important l'anciennet dela sparation du groupe goidlique(pp. 1 68-169, 206). Parune dmonstration non moinsforte il met en videncel'troitcontact des Germains avec lesCelles,l'influenceexerceparle cellisme sur le germanisme et qui s'est tendue mmebien au del, travers les Germains,sur les Batto-Slaves etsur les Finnois (p. 83) celle influenceclate dans les em-prunts linguistiques et matriels. rLes Celles paraissentavoir t pendant de longssiclesles instituteurs des peuplesgermaniques. Les faits que relveHubert et les conclusionsqu'il en lire sont en contradiction singulire avec les thsesqui ont inspir tant de livres allemandssur le rle dugerma-nisme. Si, comme il semble bien,il y a eu relations intimes,phnomnes de rception et mme de mlange, et si lesCelles faisaient figure de peupleprpondrant , il faut sans plus voir l un de ces cas de contamination etde brassage ethnique dont l'humanita tir bnfice(1).

    Les mmes"faits archologiqueset linguistiquesqui, ramas-ss d'abord, permettent Hubert de caractriser en gros lecellisme, lui permettent ensuite,localisssur lesol et dploysdans le temps, de chercher d'o les Celles sont partis, oils sont alls, comment ils se sont tendus, quel point ils

    (l) Pp.81-82,300;cf.pp. 78dsuiv.,190,222,etdansletomeXXIbis,livra1,chap.ir,d 3,chap.t.

  • XIV AVANT-PROPOS

    se sont arrts, de retracer en un seul mot leur histoire (p. 159) (1).Prenant donc commepoint de dpart l'unit indo-euro-

    penne,qu'il entrevoiten Orient(pp. 92, 93), il suit legroupedtachdans ce qui va dire longtempsson habitat, le centrede l'Europe, la future Allemagne car le Rhin est celtique,etle Danubeaussi (pp. 180-183). Avant le premier millnairequiprcde l're chrtienne, il voit s'accomplir la sparationgoidlique, la sparation iialiole, celle des Piets ensuite.Commence l'poque du bronze, celle expansion continueau premier ge du fer, l'poquedite de Hallslall unecivi-lisation homognes'tend jusqu'au V*sicle sur l'Alle-magneoccidentale,la Haute-Autriche,la Suisse, la Lorraine,la Franche-Comt, la Bourgogne,Et lapousseceltique,pardel ce domaine, s'exercera dans les Iles Britanniques, enItalie, en Espagne, pour se poursuivre, commeon le verradans le tome XXIbis, l'poquede la Tne: elle contribueraainsi, par l'intgration dans la civilisation de Hallslalld'lments emprunts, former la civilisation de l'poquenouvelle.Celle histoire de l'expansion celtique, migrations, ta-

    blissements,pointes aventureusesdans toutes les directions,contactsouconflitsavec despopulationsdiverses, il auraitt oiseuxd'en reprendre ici le dtail complexe ce que nousvoulonsfaire, bienplutt, c'est soulignerla faon,merveilleu-sementvivanteet pittoresque, dont Hubert t'a retrace.Autant l'imagination est dangereuse quand elle se donne

    trop librement carrire sur une documentation insuffisante,autant nous l'avons dit biensouvent ellejoue un rlelgitime quand son intervention couronne un long travaild'analyse, quand elle s'inspire d'une riche rudition, quandelle complteel vivifie la synthse par une gnration, en

    (I) Voirp. 189quelqueshypothsesquiprsidentcetravail.

  • AVANT-PROPOS XV

    quelque sorte spontane, d'images qui se sont imposesVil intrieur. L, prcisment, est le don recraleur dugrand historien il est, commeon l'a dit, le voyant dupass .Or, l'hommequi, pendanttant d'annes,amani lesarmes,

    les casques, lesboucliers, lesfibules,tes torquesde sesCeltes,qui a contempldans des tumulus,nonseulementles objets.mais tes squeletteset les crnes, gtandiaqueeffossismira-bitur ossa sepulcris Hubert lui-mmecite quelque part cevers de Virgile, bien que la disciplinehistorique, le senscritique refrnent et rglent son imagination,il ne peut pasne point se reprsenter tout cepassdans lequel il a vcuenesprit. Onpeut essayer de se reprsenter. Onpeutse figurer.

    Je me reprsente. voil des formules qui sans cesseexprimeront cet effort ou, plus exactement, cet aboutisse-ment imaginatif. A force d'avoir suivi,sur le sol ou sur lacarle (I), les migration des formesarchologiqueset linguis-tiques, observtoutes ces empreinteshumaines, il en vient voirlesmigrationsdesgroupes eux-mmes,leurs installations,leurs pousses,leurs flux et reflux.On trouvera ici et dansle tomeXXI bis, quand, par exemple,il suit les Gaulois, lesGalates dans leurs expditionspiques des pages puissam-ment vocalrices.Hubert voit; el il fait voir.Entre la mer du Nord et la Suisse, la Meuseet l'Oder, il

    y a eu une population, pas trs dense, et trs mobile, enpartie pastorale, en partie agricole, celle-ciqu'attirait etretenait plus oumoins long-tempsla bonneterre, mledetribus guerrires, de chasseurs, de pcheurs, de brigands,qu'attiraient, au contraire, les forts et leshauteurs ou lesrivires (p. 220). Pas plus qu'il nefaut rse reprsenter lespeuplesprhistoriques strictement cantonnsdans des fron-(1)II resteprudent: Apoirierdu rotilessurlescartes,onesttropviteentran Imaginerdesparcoursetdesdirections(p.174).

  • XVI AVANT-PROPOS

    Itres arrondies (p. 227), il nefaut se les figurer toujourssimples de composition, dans des compartiments elhnogr'phiques lanches c'est parmi la diffusion el l'enchevtre-ment, c'est dans le pot-pourri ethnographique de VAlle-magne occidentale, que sont nes les socits celliquesautour desquelles s'est cristallise toute la population etque s'est btie une civilisation une et autonome (pp. t92,222, 295), Mais ce n'est pas avant Idge de bronze que lesCeltes ont t assez nombreux, assez homognes pour s'enaller fonder au loin de vastes tablissements. Car il faut dis-linguer les exodes en masse, les dplacements de cesgrandescohues qui priodiquement se sont prcipites sur les bonnesterres de l'Europe tantt timides, tantt furieuses, encom-bres de bagages et de butin, tantt conduites par des chefsd'une surprenante lucidit, tantt paraissant abandonnesau hasard et l'instinct a (1), il faut les distinguer nettementdes randonnes de bandes hardies, des raids de chercheursd'aventures et d'aubaines (p. 2b'(i) la mer est orune granderoute i> (p. 245) qui favorise ce dernier genre d'incursions.Le vagabondage des Celles a donc revtu des formesmultiples; et les petits essaims ont prcd ou suivi souventles fortes masses, units sociales, groupes plus ou moinscomposites d*units sociales.Une fois les grandes migrations celtiques commences,elles

    ont constitu des vagues successives. Il semble que chaquevague, suivant exactement les prcdentes, tendant lesrecouvrir, soit alle aussi loin quepossible jusqu' ce qu'ellesoit force de s'arrter (p. 281) et chaque vague laissantun dpt, chaque flot nouveau modifie el la structure ethniqueet le domaine de la Celtique. Hubert voit rayonner tour tourles Goidets, les Piets, les Bretons, les Belges; il repre lesroules d'invasion il se reprsente, l'poque de Halslatt,

    (1) T. XXIbis, l Partie,chapiv.Cf.Homo,t.XVI,p. 222,

  • AVANT-PR0P08 XVII

    jt m .

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  • XVHI AVANT-PHOPOS

    tes formesque nous venons de citer suffiraient indiquerqueHubert ne donnepas seulementVimagetransposable.L'intensit mmede la vision lui rend plus naturelle et plussre l'intelligence du phnomne. Aussi fait-il comprendre,en mente lemps qu'il fait voir onpeut recueillir dans sonoeuvredes remarques sobres, maissuggestives,sur les causesgnrales des migrations. Toulcommelesmodalits, elles ensontdes plus variables.Il y en a de physiques. Leschangementsdeclimatcrent

    des vides et des appels le froid, les pluies abondanteschassentles populations vers desrgionsplus favorises.Lesbrusques cataclysmes produisent le mme effet il apparutvileaux Celles qu'il est vain de s'avancer en armes contreles raz de mare ou les inondations (1).Il y en a de sociales, conomiquesoupolitiques. L'ac-

    croissementde la populationentrane la recherche d'un terri'toiremeilleur ou un largissementde l'aire de vie. Et le pro-grs des institutions politiquespeulavoiruneffetanalogue(2),Il y en a de morales. Le got de l'aventure, l' a apptit

    d'espace joue ici un r6le vident, et l'attrait de l'inconnun'est dpass que par l'attirance des pays de civilisation.Il y en a de techniques. Il va de soiquedesinventionsen

    matire de navigation, que l'outillagedu bronze,puis du fer,que lesprogrs du charroi et de l'armement ont contribu,de diversesfaons, rendre les massesplus mobiles et plusentreprenantes (3). M.Boule a remarququ' partir duno-lithique, grdce au dveloppementdesonindustrie, l'Hommes'affranchit beaucoup plus facilement des conditions phy-siques sesdplacementsenmasse,ajoute-l-it, ne relventplusgure que de sa volontoude celledesesdirigeants (4), disons de causes sociales et logiques.

    (1)Voirpp.m, 230,318,319,321,a t. XXIbis,l Partie,chan.ik(2)T.XXIbis,ibid. (3)Voirpp.230,321.(4)LesHommesfossiles,p. 321;

  • AVANT*PROPO8 XIX

    | Toutefoisil ne faut pas ngliger, parmi les causes conlin-

    I gnieset persistantes de dplacements, le contre-coupd'un

    I4 mouvementinitial sur des peuples voisins, ou rencontrs en| coursde roule, quelquefois par attaques, par rbousculadesa,engnral par desserrement et tentation de suivre (1).

    r'Voil qui contribue aux terribles remue-mnages despoquesdegrandes migrations.

    l Ainsi,avec l'uvre de Hubert, en mme tempsque sepour-l suit l'tudede la mouvante humanit primitive, se confirme

    ou secompltece que suggraient d'autres volumesde celleSectionsur l'essence du phnomnemigratoire (2).

    j Aqueldegr d'organisation sociale les Celtessontarrivs;quellecivilisation,aveceux, a recouvert celledesmgalithes

    [ et despalafilles, te secondvolume le montrera expressment.L nousinsisteronssur leur caractre et sur le rle qu'ilsont Joudans la formation de notre pays, Nous ne ferons

    l plus ici qu'une rflexion, ou plutt nous renouvelleronsiciuneremarque dj faite ailleurs (3). On a parl d'empire cel-tique, commed'empire ligure, d'empire indo-europen(4)dans ces trois cas, avec Hubert, nous croyons le termeimpropre(5). n'ya pas empire sans unit politique, pou-voircentral, domination voulueet ralise l'unit de carac-

    (l)P. Ul sI.XXIbis,Jf"Partie,ehap.iv.P (2) Cf. Fb. Hertz, DieWanderungen, ihre Typen und ihre geschichtlicheBdeutung,donKlnerVierteljahrshefte furSoziologle, 1929, Cp.U Nousavonsdistingu prcdemmentla migration et /'invasion: il y a migrationquand la massese dplaceen terrain libre ou parmi despopulationsnon sden-taires: il y a Invasion quand la masse aborde des populations fixes (t VAuant-propos,p. xi.i). Sur la conqute, la colonisation, l'migration, lenomadisme,voir les Avant-proposdes tomes Il, IV, V, VI, XXVII XXXI.(3) Voirf. X VI, Avant-propos, p. xi.(4) VoirA. Grenier, par exemple,dan* un petu livre,d'ailleurs excellentLesGaulois,pp. 87, 29, 36, 36, 38, 49, 83.

    nmnmwm,.(5) .Rien dansl'archologieprhistorique du mondecelleet du mondeliguren voquel'image d'un empire, mmedu genre de Pemplreadque (p. 179).

  • XX AVANT-PROPOS

    tire ethnique, l'unit de civilisationn'impliquent pas forc-mentl'existence d'un empire. Et c'est parce qu'ils n'ont passu en crer un, par eux-mmes,que lesCellesse sontrallis,sans grande peine, l'ide imprialequianimait Romedansses conqutes(1).

    Henri Bekr.

    (1) Voir t. XXI bis, 3Partie, chap. n.

  • AVERTISSEMENT

    DEM.MARCELMAUSS.

    Cet ouvrage est le dernier qu'Henri Hubert ait expres-smentprpar pour l'impression. Il l'avait promis M.Berrbienavant la guerre (1).

    y avait longuementtravaill. II l'avait profess deuxfoisdans son cours d*Archologieceltique l'cole du Louvre.Il le refit une troisime fois en deux annes en 1923-24,192U25. Nous avons la rdaction compltede cecours.Il ne restait plus qu' lui donner la formed'un livre. Celle

    tchetait accomplieaux deux tiers quandHubert est morl.Le manuscrit presque en parfait tat, notes comprises, nes'arrte qu'lafinde la deuximepartie (au chapitreintitulCeltique Danubienne) (2). Plus loin, les excuteurs de lavolontd'Hubert n'ont plus eu devant eux que son cours,dansun tat admirable il est vrai. L'illustration tait pres-queentirement range.C'tait un devoir, pour nous,d'honorer la promessefaite

    par notre ami M. Berr. Avecle cours, nous avons achevle livre. Pour cela, nousfmestrois l'ouvrage.Il a fallu que M. P. Lantier, successeur de Henri Hubert

    Saint-Germain et Pun de ceux qu'il a forms l'archo-

    (1)En mmetempsqu'unautresurLesGerrnains,qui,nousl'esDironspourravoirbienttle jouravecl'aidedeM. Janse,(2) Secondvolume,chap. n de la Partie.

  • XXII AVERTISSEMENT

    logie, rdige le texte de ce qui manquaitde la H*partie dulivre (1). Le cours tait sur ce point en excellent tal J'aimoi-mmetabli celui d'un chapitre (Vol.Il, II, t).La fil' partiede l'uvre,cellequiconcernela Viesocialeet

    la CivilisationdesCeltes(2),a eu uneautrehistoire.Elle avaitt l'objet d'un trs longcours d'un an. Seulementl'ouvrageactuel, bien que publi en deux volumes,serait devenutroplong pourla Collectionde /'volutionde l'Humanitsi HenriHubert avait publi telles quelles les admirablesleonsqu'ilavai prpares en celte vue. Pour se conformeraux instruc*tionsdu directeur et des diteurs de /'volution de l'Huma-nit, il avait promis de les rsumer endeux chapitres. A saplace, nous avons da et os tenir cetengagement.Pour cela,nousavons entrepris l'uvre barbare de condenser,en quel'quespages, la matire d'un grand livre.Mais, nousservantexclusivementde phrases dcoupesd'Henri Hubert, auto-riss abrger que quefois par ses propres notes, noussommescertains de n'avoir jamais t infidles sa pense, sa faon de s'exprimer et de prouver. Dans ce travail,M. Jean Marx, autre lve, historienet cet lisant,successeurd'Henri Hubert l'cole pratique des Hautestudes, s'estcharg de la plupart des chapitres. M. Lantier a crit lersum des leonscondensesdans lesparagraphes concer.nant les Techniqueset les Beaux-arts des Celtes.Le chapitre de Conclusionsest seul un peu bigarr d'un

    choixde diverses rdactions.Nousespronspublier ailleurs, en unautre volumesous le

    nomd'Henri Hubert, et sans rien rsumer,ceCoursde Socio*logie descriptive des Celles dont nous ne donnons ici quel'ide fondamentale.

    M. Vendrys,qui fut l'ami d'Henri Hubert et dont Henri

    (1)Secondvolume,I">et S*Parties.(2) Secondvolume, Je Parit.

  • AVERTISSEMENT XXIII

    Hubert reut des leons de celtique, a revu le texte et lespreuves des chapitres de linguistique. Sa haute autoritnousassure la vateur actuelle de celle partie de l'ouvrage.

    HenriHubert s'tait assur dans une collaborationfrater-nellede plus de trente annes queJ'tais le dpositairefidledesa pense,queje savais assez les secretsde sonstyle pourtre le scrupuleux diteur des parties de sonuvre inditeque l'on peut publier. J'ai doncpris la responsabilitde celivre.Maisil est juste de dire que monrle y a surtoutconsist

    m'associer au travail des deux collaborateurs posthumesd'Hubert. L'un et l'autre ont fait, en plus de l'effort de lamiseau jour, celui de la mise au point de toutel'informationjusqu'en 1930. Deplus, M. Lanlier a vrifitoutes lescita-lionsd'Henri Hubert, ajout les siennespropres,et enfinlesa adaptes aux procds bibliographiquesde /'volution del'Humanit. Il a aussi parfait et complt l'illustrationqu'HenriHubert avait prvue.Les bonnes choses qu'on trouvera ici sont donc celles

    d'Hubert et les leurs par contre, les fautes que /'aurailaissessont les miennes. Elles ne sonl pas le fait d'HenriHubert. Je crois sincrementqu'elles serontpeu nombreusesrelativement lagrandeur et l'rudition d'unpareilouvrage.Si nous avonseu J'audacede nous exposer lescommettre,ce rut pour sauver le reste du nant.Pie facturaest.

    Acet avertissementque nous lui devionsen conscience,lelecteur nous permettra d'ajouter quelques considrationsscientifiqueslouchantles faits et la mthode.

  • XXIV AVERTI8SEMBNT

    en ce qui concerne la mthode Henri Hubert et tantdoute expliqu quelque part la mthode archologiqueetd'histoire ethnographiquequ'il suivaitet perfectionnaitd'an'ne en anne dans son immenselabeur de conservaleur duMuse d'antiquits nationales de Saint-Germain. N'aimantpas les qualificatifsil n'en aurait pas prn l'excellence,-mais il en aurait srementexpliqulesprincipes. Nousprionssimplementle lecteur d'y faire attention. Nous le prvenonsque, comme le livre qui suivra sur les Germains,commel'ensemble des cours de prhistoire d'Hubert, il faisaitpartie d'une histoire ethnographique de l'Europe et del'humanit qu'Hubert songeait dresser. Et nous nousper-mettons,tunt nous-mmesociologueet ethnographe commel'tait Hubert, de soulignerl'accordde l'histoire, ainsienten-due dans ce livre, avec les autres disciplines oh Hubertmarqua sonpassage la sociologieet l'archologieprhisto-rique. Ni dansl'espril d'Hubert, ni dans les faits, ni dans lalogique, ni pour nous, nipour personne, ces disciplinesne s'opposentquand il s'agit d'une description compltedesvnementshumainscommecelle qui est ici tente.

    Uneaulre considrationdfaits, cellefois s'impose.Ondoit sentir combiensont Justifiescertaines des ides fonda-mentalesd'Hubert, ides historiquesconcernantles originesdes Celles. Notre ami n'tait pas homme triompher de lavrification par les faits d'hypothses qu'il avait mises.D'unepart, on le verra, il enprsente trs peu. Ce n'est pasqu'il et t dpourvudu pouvoird'en inventer de trs nom*breuses et de trs justes. Maisil s'imposait svrementden'en formuleraucune quift prmature.H avait sur ce pointune lganteet scrupuleusepudeur.Dansl'expression de sesarrire-penseshistoriques, il est toujoursrest bienen dede la convictionqu'il avait de leur vracit. Ceux qui sontexperts en cesmatires verront clairemenl qu'il n'a accept

  • AVERTISSEMENT XXV

    que trs peu des suppositions classiques qui, souvent sansfondementforment te tissu de presque toute notre sciencecourantedumondeceltique. Il n'en a reconnuaucune commevalable et raisonnable qu'aprs l'avoir personnellementprouve; il a vis--visde lui-mmeexerc sa critique et n'ajamais nonccommesrs que des faits.Cependant, celle stricte mthode le conduisait vers la

    vrit la plus lointaine. Nous avons le droit de vanter lesmrites de cellepense, de souligner l'clatante confirmationque les nouvellesdcouvert esteraient de donner quelques-unes de ses ides directrices sur les emplacementsprimitifsdes Celles, et sur leurs contacts avec d'autres civilisations.Il s'agit de la grande quantit des travaux qui, aprs lestrouvaillesde Winckler,les dchiffrementsde MM. lirozny,Forrer et d'une pltade de savants concernant les langues,vulgairementgroupes sous le nomdehittites, d'AsieMineureet Antrieure, aprs l'tablissement de l'archologie descivilisations trs compositesd'origines, mais suffisammentuni formesdans toute celle aire o ces languesfurent en usagependant prs de mille ans, ont renouvelleproblme. Ellesont amen M. Meillet (1) el d'autres concevoir de faonnouvelle,et celle fois, nonplus simplementlinguistique,maishistorique,claire, probable, prouve (par lapreuvepar excel-lence,celledu monument,crit ou non crit, trouv in sUa),ce quijusqu'ici n'avait pu tre conu avec celle prcisionl'archatsme, la parent et mme lescontactscerlains des deuxgroupes de languesitalo-celtiques d'unepart, indo-iraniennesde l'autre, et enfinleurs relations aveccegroupe hittite. Parsuite, la parent et les contacts des peuples sont celle foishistoriquementdats et reprsents. Ainsi, aujourd'hui, oncesse de supposer on commence connatre les temps, leslieux, sinon lefond des vnements.

    siliL?Jali1e chronologiedes langues indo-europennes, in Bulletin de laSocitde Linguistique, 1931, t. 32, p. 1 et suiv.

  • XXVI AVERTISSEMENT

    Henri Huberttait la fin de sa vie tout fait au courantde ces progrs de l'histoire, de l'archologie, de la linguis-tique historiqueguicommenaient s'accumuleret se tasser,s'ils ne se sont clarifis qu'aprs sa mort. En tout cas ilsavait qu'ils taient d'accord avecce qu'il avait crit ici delatrs anciennesparation du premier rameaugoidelique et descontactsdirectset indirectsquecesCeltesavaienteus et gardsavec l'Orient proche et mme assez lointain (1). Et il savaitqu*ilcontribuait cesrecherches enremarquant lui-mmelecaractre presqueceltique des torques et bracelels de Bybloset des tombes de Kutas (2). n'a indiqu ces directionsque dans des termes trs attnus. Disonsnettement qu'ellestaient cellesde sa pense de toujours, le fond de son ensei-gnement oral.Les dcouvertesrcentes l'eussent amen d'autres dcou-

    vertes encore. Il et eu sur ce point des lumires uniques, ilavait la doublecomptencedu celtisanl et de l'assyriologue.Et quel archologueil tait II tait post un confluentdel'histoire et de l'archologieet il dominaitla question.Il valait la peine de noter ici la valeur historique de ses

    thses gnrales. Et on pardonnera la triste joie que nousprenons dire ici quel inventeur nousavonsperdu.

    M. M.

    (1)La numration sexagsimaleen Europe J'gedu Bronze, In L'Anthro-pologie,XOT,1920, p. 878-680;L'origine dos Aryens ( propos de fouillesamrieainedu Turkestanj, in L'Anthropologie, XXI, 1910, p. 810-528.(2) Do quelques objets de bronze trouvs Byblos, in Syria, 192S,

    p. 16-29.

  • LES CELTESET

    L'EXPANSION CELTIQUE JUSQU'AL'POQUEDE LA TtNE

  • ET L'EXPANSION CELTIQUEJUSQU'AL'POQUEDELATNE

    INTRODUCTION

    Sur les confinseuropensdumondegrco-romainvivaientdes Barbares, dont quelques-unsdoivent avoirleur placedansunehistoiregnrale.C'taient l'Est, les Scythes l'Ouest,les Ibres et les Ligures; au Centre, les Thraces,les Illyriens,lesGermainset lesCeltes.Lescrivainsclassiquesse sont plu transcrire leurs nomset quelques-unsse sont enquis aveccuriosit de leur vie et de leursmoeurs.Lesmarchandsmdi-terranens les ont frquentset ont atteint peut-tre les pluslointains, cherchant l'ambre, l'tain, les pelleteries et lesesclaves. Des Barbaressontvenusdans les villesgrecques etitaliquescommeesclavesou commevoyageurs. II y en eutcertainementqui furent des prophtesde civilisationet quel.ques-uns ont t cits commedesmodlesde sagesse.Les plus prochesde ces Barbaresont t absorbsdans la

    Grceet l'Italie agrandies.D'autres,apparusplustard sur l'ho-rizon avec des menacesd'ouragan, livrrent la Grce et

    LESCELTES

    1LES Barbares.

  • 4 INTRODUCTION

    Romedes luttes furieusee.Maiscependantils entrrent, avecla civilisationclassiqueet avec l'empireromainqui devint sabase, en diversessortesd'arrangementsqui,dansune certainemesure,les agrgrent cettecivilisationet contriburent faire de celle-ci la civilisation.On se bornera tracer pour ceuxde cespeuplesqui sont les

    mieuxconnus,lesCelteset lesGermains,un schmad'histoire.Quelques-unsdes autres y parattront par allusion.Ceux quin'auront t mentionnsni dans cette histoire des Celtes, nidans celledes Germains,ni dans les prcdentsvolumescon-sacrs l'histoire de la Grce et de Rome, appartiennent l'archologieprhistorique.

    IlLes Celtes AUcontact desGrecs.

    Voicicomment,d'aprslescrivainsgrecs,onpeutse figurerleurs progrs. Deux dates nous sontfournies pour nous fairejuges du point de vue desGrecs l'une par les pomeshso-diques, l'autre par l'historien phore, qui vivait dans ladeuximemoitidu ivsicle.LesunsplacentauNord-Ouestdu Monde une Grande Ligurie l'autre y met une GrandeCeltique.Au temps o se rdigeaient les pomes hsiodiques, les

    Ligures taient l'un des trois grands peuplesqui tenaient lesextrmitsdu mondeconnudesGrecs.

    AlOfoitijteAfyute !5ExQxc{mttjjfcoXvo.Ce versdes Catalogues(fr. 132)(1) doit dater despremiresannes du vi*sicle.Unsicleplus tard, dans sonEurope, lepremierdes historiensgrecs, HcatedeMilet,adcoupdanscette Ligurie une Celtique; en effet,le lexicographeEtienne

    (t) Hsiode,Calai,*p. 132,duStrabon,VII,8,7. Cf.d'ArjioiboiJubaInville,GGXLVWL,XII.ptuaim.

  • LESCELTESAUCONTACTbus ORCS 5_..-If C_L^ Jlf t B.# .1 %&** kftttde Byzancecite l'Europe d'Hcate proposdeMarseillequ'il

    dsigne d'aprs lui comme une ville de la Ligystique, prsde la Celtique. Hcatementionnait en outre une ville cel-tique, Nyrax, que nous ne saurions identifier(1). Marseilleavait t fondeun sicleauparavant, vers 600,par descolonsphocens.Jusqu'o allaitcetteLigystique?Unvicuxpriple,peut-tre

    marseillaiset vraisemblablementde la fin du vie sicle, plu-sieurs fois remaniet qui nousestarriv traduit en verslatins,par un personnageconsulairequi vivait au vsiclede notrere et se piquaitde littrature, RufusFestus Avienus(2),nousapprend qu'elle s'tait tenduejusqu' la mer du Nord, maisque lesCeltesavaient refoulles Liguresjusqu'aux Alpes(3).Mais les peuplesvoisinsdu lacLman,mentionnspar l'Or aMari lima d'Avienus, portent des nomsqui ont disparu de lalittrature gographique(4) et, plus tard, Aristote, dans sesMtorologiques(5),parlantde laperteduRhne fiellegarde,la situe encore en Ligurie,nepldjAiyuctix^v.Peut-tre retar-dait-il?Il fut un temps o les limitesde la Celtique,du ctde la

    Mditerrane,s'arrtaient l. Apolloniusde Rhodes,qui avaitexploitsoigneusementles gographesanciens,reprsente, aulivre IV, les Argonautesremontantle Rhne,olesavaitcon-duits l'Eridan, et secous par la tempte sur les lacs de laSuisse, dominspar les montsHercyniens,qui s'tendent aumilieu du pays des Celtes(6).Autempsd'Hrodote,dont lesrenseignements avaient beaucoupplus d'actualit, lesCeltes

    (1)EtienneDEByzancu,a. . pourNarbonne,v. Dotin,CCCXX1I,p.298.E. Philipon,DXVI,p.121,rejettelesautrespassagesd'Hcate,con-formmenta sathoriesurlesemplacementsrelatif*desLiguresetdesIbresqui.selonloi,auraientoccupalorslargiondeMarseille.( ) Avibn, 180-145. (3)Av.. 637.6W.

  • 6 INTRODUCTIONMmm Am* j Vtaient spars de la Mditerrane non seulement par lesLigures, mais les Sigynnes. Ceux-cioccupaient du ct del'Adriatiquel'arrire-paysdes Vntes(I). Mais leur nom seretrouvait dans les environs de Marseille. Les Ligyes, ditHrodote, habitant les hauteurs au-dessus de Marseille,appellent Sigynnes les petits marchands. Ce n'est pas unseul peuple, c'est toute une srie de peuples qui s'interpo-saient entre les Celtes et les riverains de la mer et qui,en effet, pratiquaient un commerce dont la prosprit estatteste par les fouilles. Vers 350, un document gogra-phiqued'une grande valeur, le Priple, attribu Scylax deCaryanda, ne mentionne pas encore lesCeltes sur les bordsde la Mditerraneoccidentale,et pourtant ils en taient djbien prs.Ils avaient rencontr beaucoup plus tt sur les bords de

    l'Atlantiqueles navigateursdeTartessequifinalementavaientfait part de leur rencontre aux Marseillais.Le vieux pripleque traduisit Avienus lesmentionnaitsur les bords de la merdu Nordd'o ils avaientchassles Ligures(2). Il dsignait laBretagneet mme l'Espagnepar le nomd'Oealrymnis (3), ose dguise peut-tre le nom des Osismiou des Oslimii, quioccupaientencore, au tempsde Csar, le Finistre. Audbutdu vesicle,Hrodoteles signale au suddesPyrnes et vraisemblablementsur l'Ocan. L'Ister, dit-il, part du pays desCelteset de la ville de Pyrn; il coule travers l'Europe,qu'il coupe par le milieu; or les Celtessont en dehors desColonnesd'Herculelimitrophesdes Kynesioiqui sont l'Occi-dent le dernier des peuplesde l'Europe (4). En.effet, le capSaint-Vincentse trouvait sur leur territoire. Le premier Grecqui fut en mesure de donner des renseignementsplus prciset plus circonstancissur lesCeltesde l'Ocan fut un voya-

    (1)Hrodote,V,9. (2)Av.,180-145.

  • LBSCELTESAUCONTACTDESOREC8 7

    C. 3

    geur marseillais, Pythas (1), dont malheureusement larelation de voyage, lepl 'i3xg*v.3,fut massacre par d'rudita

    personnages, tels que Polybe et Strabon, dont elle mit endfaut l'esprit critique. Curieux personnage sans doute, maissavant aussi bien pourvu qu'homme de son temps de connais-sances mathmatiques ou astronomiques et dou d'un tempra-ment d'explorateur, il s'embarqua par deux fois avecquelquescompagnons, sur des bateaux phniciens, passa d'Espagne en

    Grande-Bretagne, alla jusqu' la lointaine Thule et du ctde l'Est jusqu'en Danemark, peut-tre mme au del. Il vit lamer gele et les jours de vingt-quatre heures. Pylhas a ren-contr les Osismi au bout du Finistre il a connu le nom

    celtique de l'lie d'Ouessant, (Jxisama (2). celui du pays deKent, le Canlion (3), le nom dfinitif de la Grande-Bretagne,llpetrctvixaivfyrtt,qui remplacera dornavant son nom, ligureou ibre, d'Albion (4). Pythas vivait au ivesicle. Quelquesdizaines d'annes aprs lui, l'historien sicilien Time a crit

    que les fleuves tributaires de l'Atlantique traversaient la Cel-

    tique (5).Ainsi les Grecs ont su que les Celtes sont arrivs sur les

    bords des mers occidentales avant 600, sur la cte atlantiquede l'Espagne avant 500, que ceux d'entre eux que nous appel-lerons les Brittons sont arrivs en Grande-Bretagne et en

    Armorique et qu'ils ont bord toute la cte gauloise de l'Ocanavant 300. A cette date ils taient enfin arrivs laMditerra-ne depuis quelques dizaines d'annes seulement. Mais c'esten somme du ct de l'Atlantique que les Celtes sont entrsd'abord en relations directes avec les navigateurs mditerra-

    (I)D'Arbois, CCXLVni, XII, p. 63 et suiv.; MOllenhofp, CCCLXTIIl p. 327 et suiv.; Jui.lian, CCCXLVII, I, p. 416 et suiv.; A. Blazquezin XXXVI, janv.-mars 1913.(2)J. Loth, in CXI,, X, p. 352.(8)Str., 1.4,8 Riiys, CCXXX, p. 22; irl. cle,march.(4)E. Phiupon, CCCLXI, p. 29)et suiv.(6)Timb, fragm.86,dans Plutarque, Deplac. phii., III, 17,2.

  • INTRODUCTION8

    nens. Pythastait l'hritier d'un long passde navigationsgennes, mycniennosou tartesses, au cours desquelles leNord de l'Europeavait reu beaucoupdela civilisationmdi-terranenne. Les navigateurs de l'Ouest ontconnu lesCeltes,les noms de leurs pays et de leurs peuples; leschosesde lacteceltiqueont t pour eux familires et pource qui estdes Grecshellnisables par la lgende(1),alorsque,cachederrire des montagnes brumeuses, la Celtiquecontinentalerestait mystrieuse et lointaine. Sans doute les navigateursde ce temps-lpouvaientgarder lesecretdeleursdcouvertes.Il y eut aussi dans les places mditerranennesdes cata-strophes qui interrompirent les traditions. N'importe.crirevers 150avant Jsus-Christ que la dcouvertedes contresqui bordent le grand Ocan tait toute rcente(2)tait fairepreuve d'une regrettable ignorance. Maisla massedesGrecsla partageait. Aussibien tout l'intrieur de la Celtiqueet lesmouvements des Celtesont t compltementinconnusde lagnralit desGrecset des Romainsjusqu' ce que Csaretconquis la Gaule(3).Cependant, du ct de la Mditerrane, les progrs des

    Celtes s'taient prcipits partir du ivsicle. Unbeaujour,les Grecs ou plutt lesMacdoniensse sont trouvsnez a nezavec leur organisation militaire au nord des Balkans.C'taitau tempsd'Alexandre, en 335.Alexandre, en expditionchezles Gtes, y recevait les dputs des peuplesdanubiens. IIen vint aussi, dit Arrien (4), de chez les Celtestablissur legolfed'Ionie. Alexandre leur fit bonaccueil.C'estalorsqu'illeur demanda dans un banquet ce qu'ils craignaientle plusau monde. Quele ciel nous tombesur la tte, lui auraient.

    (1) Par exemple, la lt'gende de Grvon. Cf. S. Reinach, CCCULXH.p.l2M77;CCCLXXIV,l,p.2M.

    *virpoty(iov5(raixi Aiyvwv?6n*i Kctav, #n 8 toitou'Ip^puv.

  • MOUVEMENTSDS8CBLTB8Et LEURSENS M

    mMouvementsdeCertes bt LEURSENS.

    Maisil en rsulte encore ceci on est oblig de se reprsen-ter les Celtes que les marchands d'ambre ont pu rencontrer enremontant la valle du Danube ou celle du Rhne et que lescaboteurs ont trouvs encore sur les ctes basses de la mer duNord, comme un peuple originaire de l'Europe centrale,gagnant l'ouest aux dpens des Ligures et des Ibres, et dontle centre de gravit s'est trouv d'abord vers l'est du domainequ'il a occup lors de sa plus grande extension. La carte deleurs emplacements actuels nous donne une tout autreimage (1). C'est tout fait l'ouest de l'Europe, dans des les,dans des pninsules, dans les Finistres en un mot (carte 1),que les langues celtiquessont encore parles en Irlande, dansl'le de Man, dans le Pays de Galles, dans le Nord de l'Ecosseet dans les tics correspondantes; chez nous, l'extrmit de laBretagne, l'ouest d'une ligne qui irait du Morbihan Saint-Brieuc. Le cornique a cess au xvm sicle seulement d'treparl en Cornouailles.Laquelle de ces deux images est la plus juste? Le celtisme

    a-t-il subsist l'ouest de son domaine parce qu'il y tait plusfortement tabli ou parce qu'il y a t confin? N'est-ce pasde ce ct qu'il faut chercher la masse principale des Celtes,leur origine et leur image la plus pure? N'est-ce pas un abuset une interprtation vi ieused'un groupe de textes h istoriquesqui nous amnera j'ichercher ailleurs? Voil, au dbut d'unehistoire fertile en contradictions, une premire antinomie. Or,l'impression que donne la carie pourrait tre confirme par destraditions et desfaits. Tie-Live faisait de la Gaule le centre desCeltes et le point de dpart de leurs migrations. Csar attesteque l'institution des Druides avait son origine en Grande-Bre-

    (1)Riplby,CCCLXXVXn,p.28.

  • INTRODUCTION12tagne. Lorsque l'Empireromain dclina, des bandes d'Irian.aie vinrent courir la fortune en Gaule et coloniser enBretagne; le royaumed'Ecosseft la plussolidede leurs fonda-tions. Ceux de Bretagnen'taient pasen reste; ilsontcolonisl'Armorquedont ils ont fait notre Bretagne.Maisce sonttraditionsfaussetoufaitstropparticuliers.D'une

    faongiirale, lesCeltes,aprs avoir avanc vers l'Ouest del'Europe, ont reculdansla mmedirection.A bienregarderla carte, les pays oilssontcantonnsapparaissentcommedesrefuges. Les Celtesse sont arrts la sur le bordde la mer,s'accrochantaux rochers.Au del, c'est leur autre monde. Ilssont rests sur son rivage, attendant la barque du passeur,comme les morts de Procope. Un des plus jolis rcits quise trouvent dans la collectionde rcits piqueset mythiquesqui complte lesMabinogiongallois(1),raconte lesaventuresd'un empereur romain,MaxenWledig,qui, s'tant endormilachasseet ayant rvd'unemerveilleuseprincesse,semitenqute et la trouva enBretagne.On l'appelait Elen Lluyddawc,la conductrice d'armes. 11l'pousaet il leva laBretagneavecelle sonplus haut degrde gloireet de puissance.MaisHomel'avait oubli et il lui fallut la reconqurir. La Bre-tagne fournit des lgionsqui ne revinrent jamais. L'armed'Elen LluyddawcpeupleleLlydatv, hLilaoia, c'est--direlepaysdesmorts. A part lesquelquesfaits de peu d'ampleurquej'ai rsums, iln'y aeuquedesarmesfantmesoudes armesde roman commecelled'Arthur, qui, lui aussi, a conquislaGauleet l'Italieet Rome pour partir des lies Britanniquesetoccuperles pays o s'estattach le nom des Celtes.Ce quireste de ceux-ci l'ouest de leurs anciensdomainesy a tpouss,confinpard'autrespeuples venus ou formsderrireeux. Ce mouvement gnrald'expansion et de resserrement

  • MOUVEMENTSDES CKLTB8ET LEURSENS 13

    Carte1. Cartedu mouvraientdesCeltMetde leuremplacement*actuels.(W. Z.Ripley,TheRacesof Europe,}.819.)

  • 14 INTRODUCTION

    qui l'amne l'ouest et l'y borne est pour ainsi dire la loi duCeltisme. Il faut l'tudier comme un fait capital de l'histoireeuropenne.

    IVCF QUIiiistk DESCeltes et leur rle historique.

    La grandeur des Celtes s'est effondre, mais qu'a-t-ellelaiss derrire elle? Un reste de parlers celtiques, dont unseul, l'irlandais, essaie de redevenir aujourd'hui la langued'une nation une marge, plus ou moins large, o le celtiquen'est mort qu'il y a peu de temps et o sa longue survivanceest atteste par les noms de lieux et par le folk-lore enfin, lo les Celtes ont t soumis, assimils ou dtruits ds l'anti-quit, une descendance reconnaissable, des vestiges de- leurstructure, l'esprit mme de leur civilisation et, au minimum,es souvenirs morts de l'histoire et de l'archologie. LesCeltes, qui ont presque disparu de l'Europe occidentale. sontun des lments importants de sa composition. Il se rvle icipar des caractres individuel*, l par des caractres collectifs.C'est prcisment le cas chez nous o l'hritage celtique paraittre le plus considrable et le plus cohrent.Les Celtes ont t prcds en Gaule par des Ibres et des

    Ligures qui ont laiss la trace indlbile de leur occupationdans des noms de rivires et demontagnes (1), peut-tre aussidans quelques noms de villes (2) ils nous ont laiss beaucoupde leur sang, mais rien apparemment de leur structure sociale.Ce n'taient videmment pas des hordes inorganiques, maisdes socits. Des monuments de ce pass prceliique, nosmonuments mgalithiques par exemple, tmoignent d'effortscommuns et d'une vie sociale. Seulement ce qui en a subsist

    (1)Ligures d'rbois, CCCI,II, p. 87et suiv.:Dottin,CCCXXI,p. 180etuiv.; Ibres PmunoN,CCCLXIX,p.ifiletsuiv.(2)LiguresPwupon,CCCLXIX,p. 129etsuiv.;DXVI,Ibid,,p. 180.

  • CE QUI RESTE DES CELTES ET LEUR RLE HISTORIQUE 15

    ne s'est conserv que dans les cadres de la socit gauloiseet sous des rubriques gauloises. Si notre gographie physiqueest entaille de noms ibro-ligures, les traits les plus anciensde notre gographie politique sont gaulois, et ce sont des traitsfondamentaux.Nos grandes villes, sauf exceptions faciles expliquer, sont

    les chefs-lieux des peuples gaulois ou des sous.groupes quiconstituaient ces peuples. Nos circonscriptions territorialessont peu prs calques sur le-)limiteg de ceux-ci. Arras taitla ville des Atrbates, Amiens celle des Ambiani, Reims celledes Homes, Soissons celle des Suessioncs, Senlis celle desSilvanectes, Paris celle des Parisii. Les Silvanectes et lesParisii taient des sous-groupes des Suessiones. Troyes taitla ville des Tricasses, Langres celle des Lingons, Chartrescelle des Carnutes. Au moment de la conqute romaine lespeuplos taient en train de devenir des cits. Leurs lieux derunion ou leurs rduits de dfenses voluaient en villes. C'estpourquoi ce sont les noms des peuples qui ont donn la plu.part de nos noms de villes. Les noms de Reims, Durocortorum,de Paris. Lutetia, de Soissons, Noviodunum (auj. Pommiers)ont disparu. Les territoires des peuples gaulois sont devenusceux descivilales et des pagi, des pays de la Gaule romaine;ceux-ci sont devenus nos vchs, nos bailliages, dont le nomest peut-tre celtique (1). Parmi ces peuples gaulois, il y enavait peut-tre qui furent auparavant ibres ou ligures. Maismme dans le Midi de la Gaule, en Aquitaine, l o, pour destrangers, comme Csar et ses compagnons, le caractre allo-gne des communauts tait manifeste, l'empreinte politiquedes Gaulois tait profondment marque (2). Mais que l'on segarde de croire que la Gaule ait t pour la plus grande partieun corps social ibre ou ligure assimil politiquement et pourvupar les conqurants de noms dsinences celtiques. Non pas.

    (1)Irl.baile,circonscriptionterritoriale,biendegranderamille.(2)Voirplusloin,t. li,p. Il et suiv.

  • 16 INTRODUCTION

    Dans la plus grande partie de la Gaule les Celte* ont choisieux-mmes les lieuxo ila ont tabli leur rsidence. L oleurs tablissements se sont superposs des tablissementsd'ges antrieurs, ceux-ciavaient gnralement, semble-t-il,disparu quand les Celtesen ont occupla place. Il y a eu surnotre sol des villes ou des bourgs fortifisnolithiques ou del'ge du bronze.LesCeltes ne s'y sont pas tablis tout desuite.ou ils les ont abandonnespour n'y revenir que trs tard. Enun mot, ils n'ont pas pris la suite des premien occupants dusol; ils se sontbti eux-mmes leurs maisonset leurs villesils ont appropri la terre leur usage et l'ont approprie pournous, car, l o se sont dfinitivementtablis les Celtes, saufexception, nous sommesrests. Ils ont t les fondateurs denos villes et de nos villages.Les Celtesn'avaient sans douteni les mmesbesoins, ni In

    mme faon de comprendre l'exploitationdu sol que teursprdcesseurs. C'est pourquoiils se sont tablis en d'autreslieux. Ils nous ont lgu nous des habitudes qui survivent leurs raisons. Ils nous ont lgupar exemple leur cadastre.La GaulequeCsar a conquisetait si bien cadastre que lesarpenteurs du fisc romainn'ont eu qu' embrigader les arpen-teurs gaulois auxquels ils ont pris quelques termes de leurvocabulaire,en tout cas leurs mesures: l'arpent, la lieue sontceltiques (1). Notre sola conserv en bonne partie la physio-nomieque les Celtes lui avaient donne.Bref, depuis l'arrive des Celtes dans notre pays et depuis

    lors seulement, les groupes d'hommestablissur notre sol ontpris une structure qui se reconnat encore dans notre socit.Les origines de Janation franaiseremontent ses originesceltiques. Au del, c'est le passamorphe, sans histoire etmmesans nom.Nossocits,dans l'espceil s'agit de nations, sont des tres

    (1)Arpentarepennta,irl.airchenn. Lieueteaca.

  • CEQUIRESTEDBSCELTESET LEURRLEHISTORIQUE17

    complexes,constitusd'lments de natures diverses,les unsphysiques,les autres moraux. Elles ne se sont pasformesparsimples additions. On peut comparerleur formation celled'un cristal. Dans la ntre, le premierlmentqui ait fait cris-talliser le mlangeest l'lment celtique.La cristallisation atsi nette que le cristal a gard ses artes francheset sesfaceslimpides.11est plus exact de dire que la Gaule a commenc prsen-

    ter une premire image de la France quand les peuples cel-tiquesont eu leur masse principale cantonnede notrectduRhin.A cette poque, il y avait encore desCeltesenEspagne,en Italie, en AsieMineure, mais ensuite, tour tour assujettispar d'autres peuples, ils ont disparu ou perdu leur identit.Ceux-l n'ont pas t refouls vers la Gaule.Ceuxde la rivedroitedu Rhin y ont t repousssaprs de longuesluttes.EnGaule,ils ont fait masse et ont pu assimilertout le reste. Uneorganisationpolitiqueassez !aches'est forme; uneconsciencenationale assez trouble, mais capabled'clairs,s'est allume.La nation tait en voie de formationquand les Romains l'ontconquise. Elle n'a pas disparu dans l'Empire romain (1).Commela Pologne, elle a survcu la conqute.Ainsi,je suis port croire, sans en tre tout fait sr, que

    lesluttes la suite desquelles lespeuplesceltiquessetrouvrentrefoulsde la rive droite la rive gauchedu Rhin ont contri-bu la formationnationale. J'mets cedoute, car, traversles renseignementsqui nous sontvenus descrivainsanciens,il ne parait pas que les Belges, qui furent les derniers soute-nir ces luttes aient eu le sentiment d'une opposition,tantethniquequenatonate,ent re euxetlesGermains.En revanche,l'invasiondes Cimbreseut, monavis,des effetscertains.Nousapercevons dans Csar que celle d'Arioviste en promettaitd'autres.

    (t) C. Juixian, CCCXLVI, p. 164et sulv.

  • 18 INTRODUCTION

    Mais s'il y avait dj nation, c'est qu'il y avait ce qui faitl'unit profonde d'une nation idal commun, mmes faonsde penser et de sentir, en un mot tout ce que les nationsexpriment par des symboles et ce qu'elles ont de plus intimedans leur civilisation. Les Celtes en effet ont t, comme lesGrecs, plus unis, plus consciemment unis, par leurs faonscommunes de penser et de sentir que par leur sens national.On peut, leur propos, employer sans paradoxe le mot decivilisation dans son sens le plus comprhensif. Les Grecs etles Romains les considraient comme des Barbares, maiscomme des Barbares lus. Ils se figuraient les druides commedes dpositaires de la tradition pythagoricienne. Cicron a faitdu druide Diviciacus un ducn qui fut un personnage his-torique, la fois homme d'glise et homme d'pe l'un deses interlocuteurs (1).Les anciens ont prt aux druides une mtaphysique dont

    toute trace est abolie. Je crois plutt que ces juges, ces mde-cins, ces directeurs de conscience, ces potes qu'taient Jesdruides ont t des observateurs moraux et des psychologues.Ils ont cultiv certainement la mtaphysique de la mort. Maiscelle-ci touche la psychologie. Les Celtes ont beaucoup rvsur la mort. C'tait une compagne familire dont ils se sontplu dguiser le caractre inquitant. Tout ce qui nous estparvenu des druides eux-mmes. c'est une sentence troismembres, une de ces triades dont nous savons que les Celtestaient friand

  • 1CE QUI RESTE DES CEMES Et LEUR RLE HMTOMQUE i9

    l'irlandaise, d'impor!antes parties sentencieuses, gnomiques.L'esprit gnomiquc y circule mme dans tes parits narratives.Mais celtes'ei ont, sur ont pour une littrature qui ne nous ala!ssaucune trace de drame, une trange facilit &cr~r despersonnages. Dans l'pope d'Ulster, le hros Cuchu!a!nn, leroi Conchobar. le druide Cathbad, la reine Medb sont destypes dont l'individualit est d'autant ptus remarquable quelesuvres qui nous les ont transmis ne sont pas tout &fait desuvres d'art. Les Celtes de Gaule ont dlibrment sacrifitoute leur tradition pique, sduits par la civilisatiun plusrafnnee que leur apportaient les Romains. Ils en ont d garderl'esprit; c'est lu! que j'attribue le caractre dramatique quel'histoire de France a pris spontanment sous la plume de noschroniqueurs. Quelle autre histoire en effet a incorpor avecun pareil bonheur des attitudes sociales dans des figurestypiquesde hros?L'archologie de la Gaule romaine nous trompe sur nos

    affinits. Les Gallo-Romains sont restt pour la plupart desCelles dguiss. Si bien que, aprs les in valionsgermaniques,on vit reparatre en Gaule des modes et des gots qui avaientt ceux des Cel'es. Ils survivaient l'empreinte romaine.L'art roman rappelle souvent l'art gaulois ou celui des tailleursde pierre gaulois travaillant la romaine, tel point que l'ons'y trompe quelquefois (1). Mais ceci n'est encore qu'un signe.La langue en est un autre. Les Romains ont lentement imposla leur la Gaule. Mais le franais est du latin prononc pardes Celtes et mis au service d'esprits celtiques. Le caractreanalytique de son verbe, l'emploi des dmonstratifs et desparticules dmonstratives, l'allure de la phrase parle lui sontcommunsavec les langues celtiques (2).Bref, lacivilisation des Celtesest au fond de la ntre, comme

    ) Monumentde Virecourt,considrtanttcommeroman,tanttcommegaulois.(2)6. DoTtN.CXCVf.p. 77.79.

  • 30 tNTNODUCTMN

    la nation que commenaient&former les CeltesdeGauleest .,Cau fond denotre nation.C'est un lieu communque de nousjeter la tte nos afnn!tsgauoses.!1 reste donc beaucoupdesCeltes!&ou le nomce!t!que s'est perdu. Mais,pour ce quiestdeleursorganisationssoc!a!es,toutesles partiessupr!euresen ont croul.L'tat, chez nous, n'est pas celtique; il est ger-maniqueou romain. 11n'est pasrest d'Htat ce!t!quc Fcosseen est une ombre l'Irlande est une formation nouvelle. LeCeltisme ne nousa laissque des possibilitsde nations. Ilne survit quedans les fondationsde notre Europeoccidentale.n n'a gurecontribu ses superstructures. Ha succombdes vicesd'organisationque nousaurons dmter.Le rle historiquedesCeltesn'a pas t un rle politique,

    puisqueleursformations politiquesont t caduques.Maiscefut un rlecivilisateur. Un faitcaractr!st!que entre tous s'estproduit quand ilsont absorbla civilisation romaine.C'est lavigoureuse Ooratsond'co!es romaincs, hritires des colesceltiques des druides (i). Ce sont des professeurs gaulois,forms l'coledesdruides, qui ont donn laGaulesa cul-ture classique,et il y en eut de reste pour ensegnera Rome.Ce furent certainementpour lesGauloisde me!t!eurs inter-prtes de la civilisationmd!terrancnne, scicnce,art.,philo-sophie et culture morale,que ne l'eussent t des trangers.Mais c'est un trait tntrcssant qu'ils aient t ces interprtes.Plus tard, au moyen ge, des moines irlandais rappelrentl'Europe au cultedes tettres et de la philosophie grecque etlatine.Auparavant,les Celtesavaientt, pour l'Europecen*trale, les intermdiaircsde la civilisationgrecque et n'avaientpasmanqud'y propager la leur.Les Celtes ont t dans le mondeantique des porteurs de

    flambeauet nous leur avons succd. Amoureuxde beautetd'idesgnrales, nousavonst en Europe les intermdiaires

    (

  • CELTESCONTNBMTAMM CBLTMtNSULAtRNS 21

    descivilisationsanciennes,mres et hautes,dont nous avonscontribu faire ta civilisationa.Les Celtesy ontajout cer-taines formesde sensibilit et d'humanitqui appartiennentencoreen EuropeauxOccidentauxet nous.

    VCE)LTEPCONTINENTAUXET CELTES !N8ULA!ME~.

    Les historiens de i'Ant!qu!t, quand ils s'occupent desCeltes,ont l'habitude de se limiter aux Celtes du continent,c'cst.&'direen sommeaux Celtesde Gaule, aux Gaulois, donttes historiens anciens permettent de suivre la progressionet dontje viens d'indiquer quel avait t i'hrttage. L'tudedesCeltesdes lies Britanniquesest abandonnepar eux auxceltisants travail de philologueset de Bpc!aHstes.Ons'occu.pera dans ce livre la fois des Celtes continentaux et desCeltes insulaires, et l'on y laissera voir sans aucun doutequ'il est impossiblede comprendre l'histoiredes premers enfaisantabstractiondesseconds.LesCeltesinsulairesont une littrature qui, si l'on excepte

    un petit nombre d'inscriptions gauloiees,constitue toute latradition crite des Celtes. Cette ttttrature, vrai dire, esttout entire postrieure notre re et n'est conserve que pardesmanuscritsdont tesplus anciensne remontentpas au deldu xn

  • 22 NMOOUCMON

    Celtes, d'une sorte de clivage prhatorque de la masse cet'tique. para!!!e un clivage analogue des peuples italiques,sur lequel je veux appeler l'attention ds ces premires pagesparce que tes archologues qui s'occupent des Celtes (t) n'entiennent pas compte, ou n'en tiennent compte qu'insuffi-samment.Quant leur littrature c'est d{a un lieu commun de

    reconnatre qu'elle reprsente une tradition beaucoup plusancienne que la date lu plus haute o les oeuvres qu'elle noustransmet ont t mises par crit. Dans tes descriptions d'objetsdont fourmille ia ttttrature ancienne de l'Irlande, on a voulureconnaitre des armes et des bijoux de l'poque de MaUstatt(2).En cela on s'est mon avis tromp. En tout cas on y trouve latrace de faits qui datent de trois ou quatre cents ans avant J.-C.et qui devront compter a notre inventaire. Je crosses org!nesencore plus anciennes et qu'elle contient d'importants

  • f~AN 2~

    c.

    oublier que les Gaulois vaincus par Csar avaient dj d-passbeaucoup !e type de civilisationrepraentpar le droitet par pope de l'Irlande.EnfinlesCeltesdesMesnouaintressent par la suite qu'its

    ont donne&la civilisationceltiquedtournesur le continentde son essorinitial par la conquteromaine.Il y a au surptus plusieurs faons de recourir fade des

    donneslittraires ou linguistiquespour reconstituerl'histoiredesCeltes.On en a pratiqudefort scabreuses, vrai dire nonsans profit rel car ce sont les fantaisies de t'Acadnue cel-tique qui ont ouvert la voie la prhistoire. Je tcherai deprendre la mthodela plus svreet la plusaustre.

    V!PLAN.

    Il va falloir d'abord essayer de dnnirce qu'on doit entendrepar Celtes non pas que la chose soit tout fait obscure, maisparce qu'elle a t obscurcie par le manque d'entente entreles di versgroupes de savants qui, chacun de de leur ct, sesont occups des Celtes. Les !

  • 24 tNTBOBMTON

    langues celtiques correspond avec celle des soc!

  • Qu'taent-ce donc que les Cettes? H faut prendre unepremire ide de ce qu'ils sont pour se donner le moyen desavoir o ils sont. Tout groupe d'hommes vivant ensembleforme une unit physique, sociologiqueet morale. Ceux quien fontpartie se reconnaissent et se font reconnatre leurtype physique, et plutt, leur faon d'tre, leur langueet &certainesparties de leur civilisation, leur nom, s'ils ontun nom commun, qui comporte leur adhsion au groupe,ou tout autre symbole. Voyons quel parti nous allonspouvoirtirer pournotretude desCeltesdecesdivers indices.

    1

    Lesanciens crivains grecs qui nous ont laiss des rensei.gnements sur tes Celtes ont employce nom, Ke~, en latinCellae, comme une dsigna'ion ethnique gnra!e s'appli-quant des peuples considrableset fort loigns.Au dbutdu troisime sicle un nouveau nom, celui de Galates,r~MM.apparait pour !apremirefoisdans~'historienJrmede Cardie (1) qui a racont leur invasion en Macdoineet

  • 26 CE QUE SONT MB CELTES

    )

    en Grce et leur tablissementen Asie Mineure. II figurait 1,dans l'pitaphedu jeuneCydiaamastacr D~tphesen279(1).H eat probable que te nom de Galli a d&entrer en concur-rence avec le vieux nom de Celtes, chez les Italiens, verala mme poque, ou peu auparavant. Les mots Galates etGalli se prsentent galementcommedes da!gnat!onsgo'rales et ce ne sont pas les nomsgnralissde petits groupesde Celtcs.Ces diverses dsignations ont t emptoyes concurrem-

    ment. Les anciens ont essay de les spcialiser (2), des his-tor!ens modernesdelesattrJbuerrespectivementdes groupesdfffrentsde tribus celtiques(3). CcHes-eiforment en effetdes groupementsde diverses natures. Maisil faut renoncer les distinguer en Celteset en Gala!es(4).Cesnomsvenaient desCelteseux-mmes.Le nom propre Cc~os. le nom du peuple celtique des

    CeWct, lesnomspropresd'hommes,usits en Espagne, CcAi-~M~t,Ce~M~Ce/cM (5), donnent penser que le radicaltait bien celtique.Quant au motde Galli,on en trouve l'quivalent dans !es

    textes irlandais. Il y eut en Irlande des tribus de Galiain ou i:Co~n. Dans la ydMbdCuailnge, t'Entvement des bufsde Cootey o leur contingent fait partie de i'arme duConnaught, ils se d!sUngue't des autres Irlandais par leurshabitudes militaires et l'exacte d!?c)pi!nequ'ils tiennentils ont l'air d'trangers, presquedemercenaires:rangers (6). eC'taient des Gaulois abHs en Irlande. Au commencementd'un pome qui raconfe le mariage de Cuchulainu, le(t)P*U8A!

  • M NOMM LA RACE 27

    ybc~Mrc HMM~, la cour faite Em~r, le hr

  • 28 CBQMSOMMSCBLTM

    noms soient difficiles expliquer et que leur sens tymolo.gique se soit vanoui. La seule chose qui importe ce pointde vue est qu'ils n'aient pas ne phy!onotn!etrop trangreaux languescehques. JI est vraisemblableque noua avonsaCmre&troisformesd'un mmenomentendu des datesd

  • LENOMM LARACE 29

    Il est tout fait douteux que les habitants de l'Irlande sesoientjamais donnun pareil nom(1).Au surplus, tes rlan-dais paraissent avoir puis leur sens ethnographique sednnir par rapport&eux-mmeset distinguer leurs propreslments. Les Celtes de Grande-Bretagnese comportaientautrement il est d'ailleursau moinspossibleque les Galiaind'Irlandesesoientrecrutsparmi eux (2).Lesnomsde Celteset de Gauloissont proprement les noms

    des peuplesceltiquescon'nentaux.C'est aussi leur limite orientale que les tmoignages

    recueillissur l'emploide ces termes ethnographiques et surles distinctionsqui en rsultent sont prcieux et peuventcomplterheureusement les indices linguistiques et autres.y avait l des peuplesisols,en avant-garde,que l'on disait

    celtiques,les Colini, les Oui, en Silsie, les Scordisques, les~t0~. Par contre, un certain nombrede peuples betges sedisaientgermaniques.Pourtant tesBelgesont port les nomsde Gauloiset de (

  • CB QUK80NT MB CtMM

    Maisl'usagedes dsignations ethnographiquesqui dpassentles groupes o la solidarit socialeest pour ainsi dire !)fnta

  • M NOMMM RACB 3i

    En le rapprochant de celui des Cimbres,on a trouv natureld'en affubler les Belges. Mas Kymr!s n'a rien &faire avecCfMoft.Au tempsde !nvason des Cimbres. le mot Kymrydevait avoir laforme CoM&n~M(t) (tesgensdu mmepays,brog). Le moiavatt encore cette formequand ilatempruntpar l'irlandais (dat.combreic, adj. cymrique) (2).Qu'taient tesC!mb!es ? Probablementdes Germains, sans

    doute trs ce!(1) OMC~nt&r LoTtt, CXL. XXX. p K8t.(2) 0'AMBOts,CC I,t.p.2j7-2M:MOLLE'

  • 32 CE
  • t,ENOMBTJ~RACN 33

    IlLESUONMESANTHROPOLOGIQUES.

    L'esprh de confusion a soufCechez les anthropologuesquand ils se sont occupsdes Cettes, et ils s'en sont beaucouptrop occups.On s'est proccupe longtempsparmi euxd'atta-cher des noms propres ethn!ques des racespures.Il en at des Celtes commedes Aryens. On a voulu donner leurnom t'un ou&l'autredes typesphysiquesrgnant enEurope.Tous ne sont pas, heureusement, tombs dans ce traverset l'on trouvera dans les ouvrages de M. Boule, de Deniker,Itipleyet Fleure(t) les expressionslesplusraisonnables.Maisles erreurs simplificatrices,qui sont les plus naturelles detoutes, troublent le langage des sciences longtemps aprsavoir t ligotes. Un anthropologue qui parte de Celtesdevra toujours se faire violence pour ne pasat acher ce nomcomme tiquette une srie de crnes semblables.Mieuxvaudrait nejamais l'employer.Pour les crivains grecs et !a'!ns qui nous ont parldes

    Celtes,c'tait un peuple de haute taille,au corpslymphatique, la peau blanche, lachevelure blonde (2). Ils ont effraylesItaliens par leur aspect de btes gigantesques,maisde btesmagnifiques.

    AureaC

  • 34 CEQOXSONTLB8CBMB8

    lure blonde et leur peau couleur de lait, les modernes ontpens que tesbandesqui se sontabattues sur Htatie et sur laGrce s'taient recrutes parmi les grands dolichocphalesblondsde l'Europedu Nord.D'autres crivains savaient qu'it y avait des Ce'tesmoins

    blonds que les autres, lesBretonsen particulier (1); que tesCeltes sont moins blonds que les Germains; que pour faireparader des Gau'oisde haute'aille et de chevelure blonde. ilfaut les trier sur le volet et leur teindre lescheveux.Sutone,par exemple, nous raconte queCaligula, la suite d'une pr-tendue campagne contre la Germanie, pour augmenter lenombre des prisonniers devins &marcher devant soncharde triomphe, avait choisidesGauloisde la plus hau'e statureet les avait ob!< laisser crotre leur chevelure et &lateindre en rouge (2). Les crivains grecs et romainsquiconnaissaient pourtant bien les Celtes, ne ft ce que par lesesclaves,gauloisou bretons, qui devaient tre fort nombreux,habttus &voir autour d'euxune populationbrune et noirede cheveux, remarquaientsurtoutchez les trangers les typesblondset roux.Maisil y avaitsans doutebeaucoupdeGauloisbruns.Depuis Broca, on a attach le nomde Ce!tesau type des

    brachycpha!esbruns de l'Europeoccidentaleet des rgionsalpines (3). Ce'te attribution procdega!ementd'une auto-rit antique. Elle reposesur tes premiers motsdes Commen-taires de C~ar Gallia o~M

  • Lx NOMM LA RACB ?

    dansla France centrale, le type brun a tattribuauxCeltes.Brocaattribuait aux Belgesle type blond.Retenant le caractre brachycphaHquodu type prcdent,

    d'autresanthropologuesont identifitesCeltesaveclesgrandsbrachycphateaou msaticphalesdu nord et du nord-ouestde l'Europe, dsigns assez souvent sous le nomde type de~or~coy (1), qui se distinguent des autres brachycphaleseuropens par l'lvation de leur face, l'accentuation desarcades sourcilires, la forme pentagonale de la projectionhorizontale du crne et la hauteur de la taille. L'expressionsi s!nguHrede Celto-Slavesqui a t applique l'ensembledes brachycphatea procdede la diffusionde ce type spcialdans tout le nord de l'Europede Pest l'ouest (2). La des-cendancede ce type dol'Angleterre la Russiedonne pen-ser qu'il s'agtt de brachycphalesblonds,peut-treissusd'uncroisemententre tes dolichocphalesnordiqueset tes brachy-cphatesalpins. Un anthropologuedont les travaux doiventtresuivis de trs prs, parcequ'il fait un curieux effort pourtablir la concordancedes formesde c!v!t!~tion et des typesphysiquesau centre et au nord-ouest de l'Europe, au coursde la prhstore, M. Schliz, de H~itbronn, a prcismentchoisice type physique pour l'attribuer auxCeltes (3). C'esten effet celui qui se trouve, selon lui, dans tes tombeaux del'poquede La Tne en Bavire,et it est hors de doute qu'cettedate le pays tait occuppar des Gaulois.Si M.Schtiz atort,ce n'est qu'en partie, car il y eut certainementdesCeltesdece type. C'est celui que reprsen ent les grandesngures deGalates, dont on supposequ'ellesont orn quelque trophepergamnien,tel leGauloisduCapitoleou leGauloisLudovisi.

    (t) EBKRT,CCCXXV,!t, p. t2i RtpLf:Y,CCCLXXVm,p. 212;F.G.PARSON9,L tXVI,

  • 36 CEQUESONTLESCELTES

    Cesses rondes, aux faceshautes, aux fronts droits avec desarcades sourcilires furtementmarques, le nez dprim la Sba'!c,ta chev

  • LE NOM ET LA MCB 37

    to!re change suivant la rponse, et ce ne sont pas des pagesanthropologiques qui peuvent en dcider.M. Schliz, qui est trs dogmatique, expose comme suit la

    succession des types humains dans l'Allemagne du Sud, quiest son champ d'tudes, pendant les poques dites de HhMstattet de La Tne (

  • 38 CBQCE SONTM9 CELTES

    anthropologiques diHereots. Les caractres physiques de ccsgroupes varient et peuvent varier sans que ces variations aientle moindre rapport avec teur histoire. Ils se modinent pourainsi dire automatiquement sans introduction d'lment nou-veau par la variation proportionnelle de teurs lments, oupar l'introduction d'lments nouveaux, comme des esclaves 11ou des mtques, qui ne dplacent pas t'axe p'ttidque de leur ycomposition. Races et peuples ont teurs varations. Elles nesont pas ncessairement de mme sens; il n'est pas excluqu'elles soient de sens contraires. -pe-p, ~fl

  • LESORIGINESDESCELTES 183

    14

    "Apoc(Ptolme), le Humber,Abona (Tacite), PAvon,AuoopaTofoojt,Toulpo^,C'est une prsomption, sinon une certitude, de leur celticit (1). Trs rpandus en Flandre, eiBrabant, en Hollandeet dans les provinces allemandesde hrive gauchedu Rhin, ilsatteignent au nord-est une ligne qurejoint la valle de la Weser,traverse le Hanovreet s'arrte ila crte du Ilarz, embrassant la plus grande partie de IlWestphalie. Ils deviennent trs rares et disparaissentau sutdu Harz. En somme,ils tendraient vers le nord-est et dlimiteraient dans cette direction avec plus de dtails les frontires de la toponymieceltique(2).Mais,d'une faongnralelesmots celtiques, trs scrrsdans les vallesdu Rhin et dtDanube, s'espacent avant d'arriver l'Elbe et manquenpresque totalementen Frise et dans la partie septentrional4du Hanovre. Si lesCeltesy ont t, ils y ont t remplacsdEtrs bonne heure.Que signifie cette toponymieceltique ? que les Celtes sonl

    partis d'Allemagne ou qu'ils l'ont conquise P II y a de forte*raisons de croire qu'elleest indigne, en tout cas des plusanciennes,en raisondu grand nombredes nomsde rivires elde montagnes. On sait qu'ilssont au contraire presque raresen Gaule (3). Beaucoup de nos noms de rivires et demontagnes nous viennentdesLigures, sinonde plus loin (4).Or les nomsdonns la terre et aux accidentsgographiquessont les plusstablesdesnomsde lieux.Les premiersoccupantsd'un sol les lguent toujours leurs successeurs. Ceux-ciquelquefoisleur donnentdesdoublets.LesGauloisl'ontfait enGaule. Ils ontappelVArar, affluentduRhne,Souconna, laSane.Maisle doubletn'a pastoujoursprvalu. En Allemagne,on reconnaitgalementquelquesnoms ligures,ouibres, peut-

    (1)MttttENHOFP,CCCLXII,n, p.231,comparelesnomsOtcf,Olpe,01veavec*OX(vCtl'Orne,Olario,Olron.(2)f/nti., il, p. 232. (3)Dottin, CXCVI, p. 7i.cjJllua.n, CCCXLVII, t. p. in.

  • 184 MOUVEMENTSDKSPOPULATIONSCELTIQUES

    tre mme sur la rive droite du Rhin (1). Mais parmi les nomsqui ne sont pas germaniques, un trs grand nombre et de 1resanciens sont celtiques.Il en est un qui porte en lui-mme le tmoignage de sa haute

    antiquit, c'est le nom de la fort Hercynienne. Ce nom estune relique d'un tat trs ancien du celtisme. Il est probablequ'il est rest attach aux lieux qu'il dsigne depuis la date deses plus anciens accidents. Les Celtes y voisinaient alors avecles Italiotes. Le nom de !a fort Hercynienne se reprsentesous diffrentes formes Hercynia, 'A?x

  • LES ORIGINES DES CELTES 185

    -c0y.a":JOSeamm

    r5G>8.u

  • 186 MOUVEMENTSDESPOPULATIONSCELTIUKS

    du p la vlaire dans les mots de deux syllabes de la formep.q" Or c'est un fossile, car les languesceltiques ont empruntle nom vulgaire du chne d'autres racines et ce fossile esten place.D'Arbois de Jubainville a tir desnoms de rivires de Germa-

    nie d'autres indications sur le sens du mouvement des peuplesceltiques (1). Il a remarqu que beaucoup d'entre eux taientdnomms d'aprs des noms de lieux, et spcialement desnoms de rivires, apparemment de leur voisinage (2). Il y a euen Italie des Ambisonles, gaulois, placs cheval sur l'Isonzoen Illyrie des Ambidravi, placs sur les deux rives de laDrave; en Gaule des Ambarri, sur les deux rives de VArasjs, v~la Sane (3). Les Taurisci sont les Gaulois du Tauros, c'est--dire du Tauern les Scordisci, ceux du Scher-Dagh lesSequani, ceux de la Sequana. Ce genre de dsignation con-venait des groupes non encore nommsdtachs de groupesplus importants, ou des groupements de circonstance dontl'unit, quand ils s'tablissaient, tait surtout gographique.Or ils nous apparaissent toujours en voie de groupement oud'essaimage.Parmi ces noms d'origine gographique, il y en a qui

    prouvent que ceux qui les portaient ont chang de rsidence.Tel est celui des Sequani. Les Sequani qui habitaient laFranche-Comt ne touchent plus leur rivire ponyme, laSequana, laSeine. Nousverrons comment ils enont t carts.Or nous connaissons des peuples gaulois dont le nom rap-

    pelle celui de rivires qui, en Allemagne, ont gard leur nomceltique (4).Aux environs de Ble rsidaient les liaurici. La /{aura est

    la Ruhr et il n'y en a pas d'autre.

    (1)D'Arboi,CCXCIX,p. 129..

  • LESORIGINESDESCKLTRS 187

    Avranches est la ville des Abrincatui; l'Abrinca tait laRheineck, affluent de rive gauche du Rhin au sud'est deCologne.D'Arboisde Jubainville (1) y joint les Salasui ou Salluvii

    des Alpesqui sont peut-tre venus des bords d'une Sala deSaxe ou de Lorraine. Mais il n'est pas certain qu'ils soientCeltes.Ce sont tout au plus des CeltO'Ligures.Un raisonnement analogue fera supposer que les Volcae,

    Cenomani (2), Turones, Santones (3), Lemov\ ou Lemo-vices (4), qui se sont trouvs partags entre l'Allemagneet la GauledeCsar, sont originaires d'Allemagneet non pasde Gaule (5), comme les Helvtes,qui ont laiss derrireeux, sur la rive droite du Rhin, le dsert des Helvtes, dontune fraction, les Figurini, a donn la toponymiebavaroisedes motsqui commmorentsonancienneprsence,et dont uneautre fraction, lesRaurici, a peut-tre t sur la Ruhr et dontla dernire migration a provoqu l'intervention de Csar enGaule, comme les Boens,qui ont pris au mme moment lemme chemin qu'eux. Les Helvteset lesBoens furent lesderniers des peuples celtiques semettre en mouvement etleur dplacement,racont avecquelquedtail par un contem-porain minent, peut treconsidr commela dernire vaguedumouvementgnral o les peuplesceltiques ont t entrai-ns. Pour les Volques,l'un des plus anciens, l'un des pre-miers essaimer, dont les fractionssont allesaux extrmitsdu monde celtique et, en Gaule,ont eu une position d'avant-garde, une conjecture rcente corrobore notre hypothse surleur emplacementprimitif. Un linguiste des plus ingnieux,

    (1)/Wrf.,p.1M.(2) Cenomani, subdivision des Volcic;cf. Cenomanni, lbid., p. 153.(3) Sanlonea sur le Mein, dans l'Odenwald. Zanoemeister, I, XIII, 2, I,

    p. 283, n6607;Norden, CCCCIV, p. 257.(4)TAc., Germ., 43; CLXVHI,1920, p. 163.()Cf. Juluan, CCCXLVII, 1,p. 251,n. 8.LesVolquesauraient ttablis

    dans les valles du Doubs, de la Sane et de la Marne et entralns sur leDanube.

  • 188 MOUVEMENTSDESPOPULATIONSCELIQUR8

    M.Cuny, a compar le nom des Volques celui des Volsquesdu Latium (1), supposant que ces deux peuples portent lemme nom, affect alternativement de la dsinence -co et dela dsinence -gco. Les deux dsinences ont t employesconcurremment dans le nom des Osques, c'est--dire problable-ment des Opisci, qui sont appels en grec 'Othxo*.Nousserionsen prsence d'un nom de peuple commun au vocabulaire desdeux groupes italique et celtique. Comme les noms ethniquesne paraissent pas se rpter fortuitement dans des milieuxethniques voisins, il pourrait s'agir d'un peuple qui se seraitdivis entre les deux groupes, qui, appartenant l'un, auraitessaim dans l'autre. Sa prsence en Bavire, son obstination y rester sont des faits pleins de signification. Les Volques nesont pas venus l; ils y taient, et tout prs du point de jonc-tion problable des Italiotes et des Celtes, la charnire italo-celtique.En rsum, les noms gographiques et ethniques qui vien-

    nent d'trenumrscouvrent l'angle sud-ouestde l'Allemagne.La rgion qu'ils jalonnent forme un vaste triangle irrgulier,dont une pointe se trouve au Rhin, vers Cologne, une autredpasse la Bohme (2).Entre la Bohme et le Rhin, nous avons effectivement la

    trace d'une frontire. C'est en Thuringe. La crte des montsde Thuringe est suivie par un sentier herbu trs rgulier, quicourt travers bois. Il s'appelle le Rennsliegct marque actuel-lement la frontire occidentale du duch de Gotha. De touttemps ce fut une frontire et, pour en expliquer le nom. onprtend qu'il le tient des gardes cheval qui le surveillaientrennen, stet'gen, les deux lments du mot s'expliquent peu(1)CUNY,cxxxrv, mu p. i?8,(2)Occect,lesBoengardrentjusqu'aui

  • LES OBIOINEB DES CELTES 189

    Carte 4. Le Paysrhnan.

  • MOUVEMENT DES POPULATIONS CEI.TlQt'KK

    prsainsi, pas trs bien. Or c'est un nom de route (l). Ptus l'ouest,s'levant peu prs du nordau sud, le Rhn, unepetite chane de montagnes, qui formait frontire entre laFranconieet la Thuringe, porte un nom pour lequel le ger-maniquene fournit aucune explicationplausible (2). Aucontraire, le celtique nous fournit deux mots qui n'en fontpeut-trequ'un. C'est d'une part le bretonrun, moyenbretonrain,colline.Run supposeengaulois "roino.Enirlandaismonsignifiechemin, c'est--dire chemin lev, en galique raonsignifietendue de terrain (cf.cle,collineet chemin).D'autrepart le galiqueroinn ou rann, correspondantaugallois rhan,corniqueran, breton rannoen, signifiedivision.Or, il s'agit la foisde hauteurs et de limites,de frontires successives(3).Prcisment,ces chanesparalllesquibarrent successivementl'horizonde l'Elbe au Rhin sont couronnesde forts prhisto.riques, car l se sont heurts longtemps les Celtes et lesGermains.Nouspouvonsnous reprsenter ainsil'extensionvers leNord

    et vers l'Est du domaine celtique une date qui n'est pas tropanciennepour que le souvenir en soit compltementeffacetpendant une priodequi futassezlonguepour que les tracesde cetteoccupationfussent durables (4).Ledomainedes Celtesne s'tait-il pastendu au del?Plus loin que les Boiens,au tempsdeTacite,parait-il, entoutcasc'est Tacite qui nous signale lefait, un peuple cel-

    tique,lesCotini(5),maintenait i'intgritdesa langueentre lesQuades,qui taient des Germains,et lesSarmatesqui taient(1)B~b~~c~p.,tfittel- und~YordDeuf:~ch'and,n, rt1$(Leipzig,1886).(2)KRAVSE,CCCXCVU,p.8et8uiv.(8) MLLBNIIOFF,CCOLXU,Il, p. 207 et 8uiv.; LXXXV,Erganzgsb., U,191o.19H,p. 91.(4)Rbineckb, CCCCVI,p. 9, trace la limite,au dbutde l'poquede la Tne,le longdu Thftringer Wald, du Frauken Wald, de l'Ersgeb&eVet englobe laSUsie Bbbmeb,dans HermannPaui., CCCLXVin, III, p. 774.J2L i j ?* *3 Colinos *aUte*-> Ungua coargait non ease Ger-manm et quod tribula patiuntur. Parlent tribuloram Sarmat, partem

    Quadiuf alienigenia imponunt.

    190

  • l.KSOMGINSBDESCBLTKS 191

    des Slaves ou des Indo-Iraniens. C'est du ct de la Galiciequ'il convient de les situer. Ils payaient tribut et, chose noter, c'tait eux qui exploitaient lesminesde fer.Quece furent les tmoins du domaine abandonn par les

    Celtes ou les avant-postes oublis d'une expditionceltiquevers le nord-est de l'Europe, nous n'aurions aucun moyend'en dcider, supposer qu'il fallut croire aveuglment lesdiresdesdrogmansantiques sur lesquelsestfondlerenseigne-ment de Tacite,si l'archologie ethnographiquene devait pasapporter dansce cas son tmoignagedcisif.Unautre renseignement linguistiqued'unevaleurapparem.

    ment moindre,galement fourni par Tacite, a t dans cesdernires annes le point de dpart d'une srie de travauxassezaventureux. Il s'agit dessli'i, des Estes,qui habitentl'angle sud-cst de la [cte Baltique (1). Ils taient en rela-tions par le commerce de l'ambre avec les Teutons de lapninsule cimbrique, c'est--diredu Jutland, et lescaboteursde l'Ouest. Tacite nous dit qu'ils se rapprochaientpar leurlangue des Celtes, lingua Brilanniae propior . C'est pos-sible, mais ils n'en taient pas.Lestymologiesceltiquesdesnomsderivireset autres noms

    de lieuxpolonais,lithuaniens, lettonset esthonienssont fan-taisistesquand il ne s'agit pas de racinespaneuropennes(2).La ressemblancedu nom de l'Oder, Oiaooa(Ptolme) et dela rivire irlandaise Ofoua(3) est fallacieuse. Les concor-dances entre le celtique, le balto-slaveet mme le finnoisn'obligent pas supposer les Celtes tablispendant de longssicles sur la Vistule.L'argument le plussrieuxest laressemblancedes nomsdes

    Wendes, des Ventes vannetais et des Ventesde la Vn-tie (4). Mais,dans cecasencore,commedansceluidesVolques

    (t)Tac,Germ.,45.- (2)Xidbklb,CCCLXIV,I, p.24.(3) Brbmer, dans Paul, CCCLXVm, !t, p. 774.(4)LXXXV,I922,p.59.

  • 192 MOUVEMENTSHESPOPULATIONSCELTIQUES

    et des Volsques, il s'agit peut-tre d'un vieux nom de peuplequi s'est maintenu dans des branches diffrencies des Indo-Europens ou mme du nom d'un vieux peuple qui s'est divisentre des groupes linguistiques diffrencis. Ni l'histoire, nil'archologie ancienne de l'Europe ne nous permettent de nousla reprsenter comme divise en compartiments ethnogra-phiques tanches, nettement limits. Il s'est toujours produitdes mouvements de plus ou moins grande extension, des raidsplus ou moins amples et plus ou moins tendus qui ontcrev les frontires, effac les distances, jet des coloniesinattendues aux points les plus loigns. Ces faits trou-blent l'image composite que l'on essaie pniblement dereconstruire des peuples europens en rassemblant les reliquesde leurs civilisations et de leurs langues. Il faut accepter cetrouble et concevoir le pass, comme le prsent, dans toutesa complexit.D'une tout autre faon se pose lu question de la celticit des

    Cimbres et des Teutons, dont les chefs portent des noms cel-tiques et chez qui a t trouv le monument le plus importantde la plastique celtique, le vase de Gundestrup. Ils tenaient lemarch de l'ambre, point d'lection pour les mixtures ethno-graphiques. Les gographes anciens se tiraient d'affaire enqualifiant de Celto-Scythes les Teutons et les peuples qui fai-saient le commerce de l'ambre entre l'Esthonie et l'embouchurede l'Elbe (1). Nous ne sommes pas beaucoup plus avancsqu'eux. S'agit-il de Celtes germaniss, de Germains celtiss?Et de quand date cette promiscuit? La question reviendraplus loin quand il faudra tudier les variations de la frontirecelto-germanique (2). Quant savoir si les Celtes ont occup tine date quelconque les provinces maritimes qui s'tendentde la base du Jutland l'embouchure du Rhin, la questiondoit rester ouverte jusqu' l'examen de nouveaux arguments.(t)STR.,Xi,6,2; cf. 2,27 Pi.it,, Mar.,11.(2)VoirtomeIl, p, 123et suiv.

  • LE8ORIGINESDESCELTES 193

    Les limites occidentaleset mridionales du domaine initialdesCeltes ou du groupede Celtes dont nous pouvons figurerpour le moment le domainesont marques par l'extensiondesnomsde type ligure ou rto-ligurc.Ce sont des nomsappartenant la toponymieanciennede

    la Ligurie proprementdite, et des noms caractriss par lesmmesdsinences, desnomsen particulier de rivires,dontTaire d'extension, du ctde l'Italie, par exemple,dpasselesles limites que les Celtesont jamais atteintes, des noms,galement d'accidentsphysiques, inintelligibles en celtique(cette dtermination estmalsre), enfindes nomsde paysceltiques prsentant desparticularits phontiquestrangresau celtique.Les noms dsinence-usco, -asco, -osco, sont les plus

    typiques. Ils figurent en nombre dans les plus anciens docu-ments relatifs la gographiedu pays ligure (Neviasca,Tule-lasca,Veraglasca, Vinelasc