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Philippe Barrière pour le site académique du Centenaire de la Grande Guerre de l’Académie de Grenoble Page 1 Illustrations et documents. La conscription. *** [in Annie Crépin, Histoire de la conscription, Paris, Gallimard, collection « Folio histoire », 2009] *** Les objets de la conscription, 1869-1900. [Documents aimablement fournis par Nicolas Beaupré] ***

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Page 1: Illustrations et documents.€¦ · l’on noue des solidarités nouvelles hors de sa classe sociale. Interprétation Au XIXe siècle, le Français a « peu de goûts pour le métier

Philippe Barrière pour le site académique du Centenaire de la Grande Guerre de l’Académie de Grenoble Page 1

Illustrations et documents.

La conscription.

***

[in Annie Crépin, Histoire de la conscription, Paris, Gallimard, collection « Folio histoire », 2009]

***

Les objets de la conscription, 1869-1900. [Documents aimablement fournis par Nicolas Beaupré]

***

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Le conscrit Camille.

[http://www.histoire-

image.org/site/rech/resultat.php?auteur_id=20]

© Photo RMN-Grand Palais - J.-G. Berizzi

Titre : Le conscrit Camille.

Auteur : CAMILLE

Date de création : 1871

Dimensions : Hauteur 41.1 cm - Largeur 21.8 cm

Technique et autres indications : peinture à l’huile sur

bois

Lieu de Conservation : MuCEM (Marseille) ; site web

Contact copyright : Agence photographique de la

Réunion des musées nationaux. 254/256 rue de Bercy

75577 Paris CEDEX 12. Courriel : [email protected] ; site

web

Référence de l’image : 99CE18295/55. 139. 3

Contexte historique

Pendant la majeure partie du XIXe siècle, la conscription, ou obligation pour tous les garçons de

servir sous les drapeaux, n’a jamais été appliquée stricto sensu. C’est la loi Jourdan qui l’institue en

1798 (an VII) : tous les hommes peuvent être mobilisés en temps de guerre, tandis qu’en temps de

paix l’armée fait principalement appel à des engagés volontaires. Pour mettre en œuvre cette

décision, tous les hommes âgés de 20 ans (sauf les hommes mariés, les infirmes, etc.) seront inscrits

ensemble — d’où le terme de « conscription » — sur une liste de recrutement.

Ce système de l’obligation militaire, sur lequel s’appuie l’effort de guerre napoléonien, est

supprimé à la Restauration. Mais comme les engagements volontaires ne sont pas suffisants pour

assurer les effectifs d’une armée de métier, le ministre de la Guerre, Gouvion Saint-Cyr, fait voter

en 1818 une loi qui institue un service long de six ans auquel doivent se plier les jeunes gens qui

ont tiré au sort un mauvais numéro, ou les remplaçants qu’ils auront trouvés. Pour cette raison,

entre 1815 et 1870, la masse des soldats français est constituée d’appelés ayant tiré un mauvais

numéro, de remplaçants et d’engagés volontaires.

La loi de 1872 introduit un changement important : bien que le tirage au sort soit maintenu, le

remplacement est supprimé. La moitié du contingent doit effectuer cinq ans de service actif, l’autre

un an.

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Analyse des images

Le recrutement, qui a lieu dans le chef-lieu de canton, obéit à un rituel précis. Le jeune homme tire

au sort son numéro de conscrit, ici numéro 40, représenté sur papier aquarellé. Après avoir tiré le

mauvais numéro et s’il ne peut se faire remplacer, le conscrit passe devant le conseil de révision.

S’il n’est ni phtisique, ni infirme, ni trop petit, il est déclaré « bon pour le service », comme ici le

Conscrit Camille.

Celui-ci porte son habit de fête, composé d’un pantalon de drap, d’un chapeau à ruban et d’un

foulard. Il souffle dans une trompette, tout faraud : il semble se réjouir de quitter son village, qu’on

aperçoit au fond. C’est qu’il va participer au charivari. Pendant cette fête, les « classards » achètent

képis, clairons, cocardes, insignes et autres brassards. Au bourg puis au village, les futurs soldats

mangent, boivent, chantent et font mille farces aux filles, aux commerçants et aux bourgeois qu’ils

croisent. Un bal est donné le dimanche suivant. Le charivari des conscrits revêt plusieurs

significations : c’est à la fois une fête civico-militaire, un rite de passage et une fête de jeunesse où

l’on noue des solidarités nouvelles hors de sa classe sociale.

Interprétation

Au XIXe siècle, le Français a « peu de goûts pour le métier militaire », si bien que le rêve de la

Charte de 1814, celui d’une armée de métier composée de volontaires, se révèle impossible. De ce

fait, la conscription est nécessaire, mais, pendant plus de cinquante ans, son égalitarisme apparent

est vicié par l’argent qui permet d’acheter un remplaçant.

Avec la défaite de 1870 et l’avènement de la IIIe République, on assiste à un regain de la

conscription, c’est-à-dire de l’armée citoyenne. Le vote des lois de 1872, de 1889 et surtout de 1905

instituent un service personnel, égal et obligatoire. En ce sens, on peut considérer que l’image du

Conscrit Camille, pimpant et gaillard, courant sous les drapeaux, vise à inciter les garçons des

classes populaires à accomplir leur devoir. La simplicité, la verve populiste et nationale de cette

peinture font de Camille la figure d’une sorte de « vaudeville militaro-agrarien ».

L’année même de la défaite, la joie du conscrit « bon pour le service » est l’expression d’une

propagande nationaliste qui appelle à la fois à la conscience civique et à la revanche contre le

Prussien. On peut noter que le Numéro de conscrit tout fleuri vient d’Alsace, la province perdue. Le

mythe des combattants partis fleur au fusil est tenace ; mais, en 1914, c’est sans enthousiasme que

les jeunes Français s’en iront au front se faire massacrer.

Auteur : Ivan JABLONKA

Bibliographie

André CORVISIER, Histoire militaire de la France, t. 3, De 1871 à 1940, Paris, PUF, 1992-

1994.

Gérard DE PUYMEGE, Chauvin, le soldat-laboureur. Contribution à l’étude des

nationalismes, Paris, Gallimard, coll. « Bibliothèque des Histoires », 1993.

Bernard SCHNAPPER, Le Remplacement militaire en France. Quelques aspects politiques,

économiques et sociaux du recrutement au XIXe siècle, Paris, Sevpen, 1968.

Maurice VAISSE ( dir.), Aux armes, citoyens ! Conscription et armée de métier des Grecs à

nos jours, Paris, Armand Colin, coll. « Référence histoire », 1998.

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Les décisions du conseil de révision pour l’Hérault et la Lozère (1889-1919).

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La tournée du conseil de révision au cours de l’année 1906, en Lozère

(d’après Recueil des actes administratifs, 1906).

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Effectifs des « troupes indigènes » régulières (1870-1914).

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Statistiques officielles des pertes françaises telles qu’établies pendant le conflit (bilan général) [in Histoire militaire de la France (André Corvisier), volume 3 sld Guy Pedroncini (De 1871 à 1940), Paris, PUF, 1992-1994]

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Philippe Barrière pour le site académique du Centenaire de la Grande Guerre de l’Académie de Grenoble Page 8

Statistiques officielles des pertes françaises telles qu’établies pendant le conflit (bilan mensuel) [in Histoire militaire de la France (André Corvisier), volume 3 sld Guy Pedroncini (De 1871 à 1940), Paris, PUF, 1992-1994]