imagerie des formes viscerales graves de...

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M.Sheibanifar 1 , A.L.Guerin 1 , L.Clément 2 , J.Champigneulle 3 , D. Mandry 1 , P.Bordigoni 2 , M.Claudon 1 1. Service de Radiologie, Hôpital d’Enfants, CHU de Nancy Brabois, Allée du Morvan, 54511 Vandoeuvre-les-Nancy (France) 2. Service de Médecine Infantile II (Secteur de Transplantation Médullaire) Hôpital d’Enfants, CHU de Nancy Brabois, Allée du Morvan, 54511 Vandoeuvre-les-Nancy (France) 3. Laboratoire d’anatomopathologie, Hôpital d’Adultes, CHU de Nancy Brabois, 54511 Vandoeuvre-les-Nancy (France) IMAGERIE DES FORMES VISCERALES GRAVES DE LA MUCORMYCOSE CHEZ 5 PATIENTS IMMUNODEPRIMES

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M.Sheibanifar 1 , A.L.Guerin 1 , L.Clément 2 ,

J.Champigneulle 3 , D. Mandry 1 ,

P.Bordigoni 2 , M.Claudon 1

1. Service de Radiologie, Hôpital d’Enfants, CHU de Nancy Brabois, Allée du Morvan, 54511

Vandoeuvre-les-Nancy (France)

2. Service de Médecine Infantile II (Secteur de Transplantation Médullaire) Hôpital d’Enfants,

CHU de Nancy Brabois, Allée du Morvan, 54511 Vandoeuvre-les-Nancy (France)

3. Laboratoire d’anatomopathologie, Hôpital d’Adultes, CHU de Nancy Brabois, 54511

Vandoeuvre-les-Nancy (France)

IMAGERIE DES FORMES

VISCERALES GRAVES DE LA

MUCORMYCOSE CHEZ 5

PATIENTS IMMUNODEPRIMES

• Objectifs : Apport de l’imagerie au diagnostic et au suivi de mucormycose grave chez des patients immunodéprimés.

• Matériels et méthodes : Analyse rétrospective des données radiologiques de cinq cas de formes graves de mucormycose, survenus chez des patients allogreffés en GVH chronique réfractaire dans un secteur de transplantation médullaire pendant la période de 2002 à 2005. Le diagnostic positif a été bactériologique et anatomo-pathologique dans tous les cas.

RESUME

• Résultats : Il s’agissait de 3 cas d’atteinte pulmonaire isolée et de 2 cas de mucormycose disséminée. Des foyers de condensations pulmonaires étaient retrouvés dans tous les cas, dont un avec une zone de basse atténuation et des nodules parenchymateux. Les lésions rénales, hépatiques et spléniques étaient bien limitées, hypoéchogènes, hypodenses et homogènes sans prise de contraste périphérique. Il existait une atteinte thyroïdienne sous forme de nodules hypoéchogènes. Une croissance rapide des lésions a étéconstatée par des scanners de contrôle (n=3) et malgré un traitement chirurgical (n=2) et une prise en charge médicale intensive, l’évolution était fatale dans tous les cas.

• Conclusion : La mucormycose fait partie intégrante du diagnostic différentiel des syndromes infectieux chez les patients immunodéprimés en période post transplantation médullaire. L’imagerie peut aider à son diagnostic mais une confirmation anatomopathologique reste indispensable.

RESUME

• La mucormycose est une infection fongique, opportuniste et

agressive rare qui survient dans un contexte sévère

d’immunosuppression (1). Elle est due à un champignon

zygomycète anaérobies et thermorésistants de l'ordre des

mucorales dont font partie Mucor, Rhizopus, Absidia (2, 3).

• Les portes d’entrée sont multiples : inhalation de spores au

niveau des voies aéro-digestives supérieures, inoculation au

niveau d’un point d’entrée vasculaire, d’une plaie importante

ou du tube digestif.

INTRODUCTION

Ces germes ont un caractère

angioinvasif: ils pénètrent les

vaisseaux grâce à une enzyme de

type élastase, puis l'invasion

mycélienne entraîne une

thrombose des vaisseaux (flèche),

un infarcissement et une nécrose

des tissus ; les mycèles continuent

à se développer dans ce milieu

anaérobie propice (2, 4, 5).Horger M, Hebart H, Schimmel H, Vogel M, Brodoefel H,

Oechsle K, Hahn U, Mittelbronn M, Bethge W, Claussen CD:

Disseminated mucormycosis in haematological patients: CT

and MRI findings with pathological correlation. Br J Radiol

2006;79:e88-95.

INTRODUCTION

• L’immunodépression (constitutionnelle ou acquise),

notamment un état neutropénique sévère et prolongé est le

principal facteur de risque de la mucormycose. Le SIDA, le

diabète décompensé et les brûlures sévères sont d’autres

facteurs favorisants (2, 6).

• L’objectif de cette revue est de présenter les aspects

radiologiques de 5 cas de mucormycose d’évolution fatale

chez des patients immunodéprimés, suivis au cours des

dernières années.

INTRODUCTION

• Pendant la période de 2002 à 2005, 6 patients ont présenté une mucormycose, diagnostiqués dans le secteur de transplantation médullaire du CHU de NANCY, dont une patiente traitée avec succès d’une atteinte sinusienne, les 5 autres patients décédés, faisant l’objet de cet article

• Il s’agit de 3 enfants âgés de 12, 14, 15 et de 2 adultes âgées de 40 et 44 ans, suivis pour une leucémie aiguë myéloblastique (2 cas), une leucémie myéloïde chronique, un lymphome malin non hodgkinien et une maladie de Fanconi.

• Tous avaient été allogreffés et avaient développé une GVH chronique dans les suites. Les principales données concernant ces 5 patients sont résumées dans le tableau 1.

MATERIELS ET METHODES

Décès

quelques

temps plus

tard

MucorLBAPulmonaire5 moisDyspnée et

syndrome

infectieux

OuiLMNH40F5

Décès en

post

opératoire

Aspergillose

Mucor

LBA

Pièce

opératoire

Pulmonaire7 moisDyspnée et

syndrome

infectieux

OuiMaladie de

Fanconi

15M4

Décès en

post

lobectomie

MucorLBAPulmonaire10 moisDyspnée

Hémoptysie

OuiLAM14M3

Décès 2

mois plus

tard

MucorBiopsie

cutanée et

thyroïdienne

Thyroïdienne

Pulmonaire

Hépatosplénorénale

cutanée

9 moisCervicalgies

droites dans

un contexte

infectieux

OuiLMC44M2

Décès 10

jours plus

tard

AbsidiaBiopsie

hépatique

Hépatique

Rénale

Sinusale

9 mois Fièvre

Diarrhée

OuiLAM12F1

EvolutionAgentConfirmationLocalisationDélai

post

allo

greffe

SymptômesGVH

post

allo

greffe

PathologieAgeSexeObservation

MATERIELS ET METHODES

Tableau 1. Présentation générale des 5 cas étudiés

• Nous rapportons ici, les explorations radiologiques (échographie et scanner) réalisées devant l’apparition d’un syndrome infectieux chez ces patients. L’exploration scanographique a été effectuée en acquisition spiralée avec un scanner multibarrettes VOLUME Zoom de SIEMENS après injection d'emblée du produit de contraste. Le diagnostic positif était anatomo-pathologique dans tous les cas. Les échographies ont été effectuées avec l’échographe Aplio de TOSHIBA.

• Au total, il existait 2 cas de mucormycose disséminée d’emblée et 3 cas d’atteinte pulmonaire initialement isolée. Malgré un traitement adapté médical (par AMBISOME, la forme liposoméede l’AMPHOTERICINE B) avec ou sans traitement chirurgical associé, l’évolution était fatale.

MATERIELS ET METHODES

RESULTATS

• Histoire clinique : Une patiente âgée de 12 ans, était suivie

pour une LAM allogreffée et compliquée d’une GVH

chronique nécessitant un traitement immunosuppresseur au

long cours. Neuf mois après l’allogreffe, survenait une fièvre

avec diarrhée. Des prélèvements de selles et des fosses

nasales ont permis d’identifier entre autre des germes de type

zygomycètes Absidia. Les hémocultures restaient négatives.

OBSERVATION N°1

• Imagerie : Un scanner cervico-thoraco-abdomino-pelvien a été réalisé à la

recherche de foyers infectieux profonds. Celui-ci, réalisé après injection

d'emblée de produit de contraste, retrouvait une sinusite maxillaire droite et

des lésions hépatiques et rénales bilatérales. La lésion hépatique était

arrondie, bien limitée, hypodense après injection et les lésions rénales,

également hypodenses, de siège cortico-médullaire, triangulaires

déformaient discrètement les contours de reins, sans rehaussement du cortex

corticis. Les lésions faisaient suspecter une origine infectieuse dont l'aspect

restait atypique en l’absence de prise de contraste périphérique.

OBSERVATION N°1

• Imagerie : En échographie, les lésions étaient difficilement visibles. Au

niveau du rein gauche, on retrouvait une discrète hypoéchogénicité de son

pôle supérieur sans franche modification de l'architecture cortico-médullaire

et c'était surtout le doppler-couleur qui a mis en évidence des anomalies à

type de defect de rehaussement de toute la zone pathologique. Au niveau du

foie, la lésion apparaissait tissulaire, discrètement hypoéchogène entourée

d'une fine couronne hyperéchogène avec une architecture vasculaire

intralésionnelle conservée sans flux Doppler. Ainsi, ces lésions pouvaient

faire discuter une atteinte lymphomateuse ou des lésions d'infarcissement

rénal par emboles septiques ou autre.

OBSERVATION N°1

Echographie

rénale gauche

Echographie

hépatique

• Confirmation : Une biopsie hépatique écho-guidée a été réalisée ramenant du matériel solide, sans pus. L'analyse anatomo-pathologique et microbiologique a mis en évidence à l’examen direct des filaments mycéliens de type Absidia confirmant le diagnostic d’atteinte disséminée de mucormycose.

OBSERVATION N°1

• Evolution : Un traitement antifongique adapté par voie intraveineuse a été mis en route par AMBISOME (la forme liposomée de l'amphotéricine B) et CANCIDAS. Un scanner de contrôle a été réalisé une semaine plus tard et celui-ci montrait une nette majoration des lésions avec atteinte pulmonaire à type d’infiltrat péribronchovasculaire du lobe moyen et de nodules pulmonaires des lobes inférieurs. La patiente décédera 10 jours plus tard par septicémie.

OBSERVATION N°1

• Histoire clinique : Un patient âgé de 44 ans, était suivi pour une LAM secondaire à une LMC, allogreffée et compliquée d’une GVH chronique sous traitement immunosuppresseur. Neuf mois après l’allogreffe, il a présenté des douleurs latéro-cervicales droites dans un contexte infectieux.

OBSERVATION N°2

• Imagerie : L’échographie a retrouvé plusieurs nodules thyroïdiens dont un lobaire inférieur droit hétérogène à centre hypoéchogènequi augmentaient en taille les jours suivants. Alors qu’une exérèse thyroïdienne partielle était envisagée, des lésions cutanées nécrotico-hémorragiques apparurent.

OBSERVATION N°2

• Imagerie : Un scanner cervico-thoraco-abdomino-pelvien a alors étéréalisé montrant un aspect hypodense de la quasi-totalité de la glande thyroïde, une pleuro-pneumopathie bilatérale (avec zone de basse atténuation et « air crescent sign » de la base droite) , des lésions hypodenses arrondies hépatiques, spléniques et rénales avec un aspect infiltré des fascias pararénaux.

OBSERVATION N°2

• Confirmation : L’analyse anatomo-pathologique de la pièce de thyroïdectomie partielle et des lésions cutanées ont posé le diagnostic de mucormycose à Mucor.

• Evolution : Le patient a été mis sous AMBISOME et CANCIDAS, mais un scanner de contrôle trois semaines plus tard a montré une majoration des lésions hépato-spléno-rénales et une pleuropneumopathie basale droite abcédée. Dans les suites de l’évolution, le patient a présenté une vive douleur du flanc droit avec au scanner un aspect de colite droite (flèche) segmentaire modérée associée aux autres localisations précédemment décrites. La coloscopie n’a pas retrouvé de lésion de type Mucor. Les contrôles scanographiques suivants retrouvaient une stabilité des lésions viscérales mais malgré un traitement adapté, le patient décédera deux mois plus tard par défaillance multi viscérale.

OBSERVATION N°2

• Histoire clinique : Un patient âgé de 14 ans, était suivi pour une LAM allogreffée compliquée d’une GVH chronique. Dix mois après l’allogreffe, il a présenté une dyspnée avec hémoptysie.

• Imagerie : Une radiographie et un scanner thoracique ont étéréalisés, retrouvant un foyer de condensation systématisé avec bronchogramme aérien du segment latéral du lobe moyen, avec infiltration du hile. Il a été mis sous AMBISOME de façon empirique.

OBSERVATION N°3

• Confirmation : Un lavage broncho-alvéolaire (LBA) a été réalisé le

lendemain, visualisant les filaments mycéliens.

OBSERVATION N°3

• Evolution : Devant un risque important d'hémoptysie par érosion d'un

vaisseau pulmonaire, une lobectomie a été réalisée, dont l’examen

anatomopathologique retrouvait des lésions nécrotico-hémorragiques avec

des filaments de type Mucor. Cette prise en charge médico chirurgicale n'a

pas empêché une évolution péjorative et mortelle dans les suites

opératoires précoces par défaillance multi-viscérale.

OBSERVATION N°3

thrombus mycotique oblitérant la

lumière d’une artère pulmonaire

interlobulaire et présence de filaments

de mucormycose de diamètre irrégulier

septés au sein du thrombus et dans la

paroi artérielle

• Histoire clinique : Un patient, âgé de 15 ans était suivi pour une maladie de Fanconi allogreffée avec GVH pulmonaire. Sept mois après l’allogreffe, Il a présenté un syndrome infectieux avec une majoration de la dyspnée.

• Imagerie : Le bilan scanographique retrouvait des images en verre dépoli avec des foyers de condensation pulmonaire bilatéraux dont le plus volumineux était lobaire supérieur droit.

OBSERVATION N°4

• Confirmation : Un LBA a été réalisé, retrouvant de l’Aspergillus fumigatus. Malgré le traitement médical, le foyer lobaire supérieur droit se majorait au scanner de contrôle 8 jours plus tard et une intervention chirurgicale a été décidée. L’examen anatomo-pathologique de la pièce opératoire mettra en évidence des filaments de Mucor.

• Evolution : Malgré le traitement antifongique adapté, le patient décédera dans les suites de l’intervention par détresse respiratoire.

OBSERVATION N°4

• Histoire clinique : Une patiente âgée de 40 ans, avait été allogreffée pour un lymphome du manteau. Dans les suites, elle a développéune GVH chronique et une adénovirose généralisée. A cinq mois de l’allogreffe, elle a présenté une pneumopathie bilatérale sévère s’aggravant.

• Imagerie : Le scanner montrait des opacités alvéolo-interstitiellesconfluentes.

OBSERVATION N°5

• Confirmation : C’est au LBA que les filaments de Mucor ont été identifiés.

• Evolution : Malgré le traitement antifongique adapté, la patiente décédera quelques jours plus tard par détresse respiratoire.

OBSERVATION N°5

• La mucormycose est une infection fongique, opportuniste et agressive dont le principal facteur de risque est un état neutropénique sévère et prolongé.

• Dans notre série, tous les patients étaient dans un état d’immunodépression prolongée avec une GVH chronique réfractaire et présentaient un syndrome infectieux persistant malgré les traitements antibiotiques probabilistes, dans un délai de 5 à 9 mois post-greffe.

DISCUSSION

• Les atteintes de la mucormycose peuvent être classiquement séparées en 2 groupes (2, 5, 8, 9):

– Les atteintes isolées d’un organe : pulmonaire, la localisation la plus fréquente (environ 30-60%), ORL et rhinocérébrale, et plus rarement rénale, rhinocérébrale, gastro-intestinale et cutanée.

– Les atteinte disséminées d’emblée ou au cours de l’évolution : Formes multiviscérales, les plus graves, atteignant de multiples organes sus- et sous-diaphragmatiques.

DISCUSSION

• Le taux de détection d’une mucormycose pendant la période post-transplantation médullaire, a été chiffré à 0,9% (13/1500 patients) dont 15% (2/13) avec une atteinte disséminée (10).

• Dans une autre étude récente, sur 59 cas de mucormycose chez des patients suivis pour hémopathies malignes, 8% des patients étaient atteints d’une mucormycose disséminée (6).

• Malgré le traitement médical intensif, le pronostic global est sombre avec un taux de mortalité oscillant de 52% pour la forme rénale isolée (11), à 100% pour l’atteinte disséminée (9).

• Dans notre série, tous les patients ayant un taux de croissance élevé (supérieur à 50% au contrôle scanographique à 8 jours pour les cas N°1 et N°4 et à 3 semaines pour le cas N°2) sont décédés.

DISCUSSION

• Dans l’atteinte pulmonaire, les signes cliniques les plus souvent retrouvés sont fièvre, toux, dyspnée, douleur thoracique, hémoptysie, cette dernière étant un signe de gravité.

• En imagerie, les descriptions rapportées sont communes aux atteintes fongiques pulmonaires (6, 7, 12, 13, 14): – foyers de condensation systématisés sans prédilection lobaire particulière

uniques ou multiples que nous avons retrouvés dans tous nos cas

– nodules ou masses parenchymateuses notés dans 2 cas

– signes d’infection mycotique angio-invasive avec des zones de basse atténuation au sein des foyers de condensation en rapport avec des infarcissements et des hémorragies pulmonaires parfois associé au « CT halo sign » et évolution vers la cavitation dans presque la moitié des cas décrits à la littérature, avec « air crescent sign » comme dans un de nos cas (flèche).

DISCUSSION

Atteinte pulmonaire

• Dans les atteintes sévères et évoluées , et le plus souvent mis

en évidence sur les pièces de lobectomie ou lors de l’autopsie ,

ont été rapportés des pseudo-anévrysmes des branches de

l'artère pulmonaire parfois rompus et se révélant par de sévères

hémoptysies, des obstructions bronchiques mycotiques ,voire

des broncho-fistules.

• Sont décrits également de façon plus rare des adénopathies

hilaires, des épanchements pleuraux.

DISCUSSION

Atteinte pulmonaire

• Le diagnostic positif est difficile car l’étude par examen direct ou mise en culture des secrétions obtenues par LBA, expectorations, hémocculturesreviennent le plupart du temps négatives (6, 12). Les biopsies transbronchiques ont de meilleurs résultats, car permettant un prélèvement au cœur des zones pathologiques (6, 14).

• L’examen anatomo-pathologique des pièces de lobectomie ou lors de autopsies confirme le diagnostic par la visualisation directe des filaments mycéliens au sein des thromboses vasculaires et des tissus nécrotiques.

• Dans notre expérience, le LBA a été contributif au diagnostic dans deux des trois atteintes pulmonaires isolées sans doute en raison du stade évolué de l’atteinte ; le patient ayant une co-infection aspergillaire présentait un foyer de condensation périphérique d’accès difficile par LBA et le diagnostic a étéréalisé sur la pièce de lobectomie.

DISCUSSION

Atteinte pulmonaire

• Dès que le diagnostic est suspecté, le traitement médical par amphotéricine B ou sa forme liposomée doit être mis en place. On note un cas de guérison par injection directe bronchoscopiqued’amphotéricine B chez un patient diabétique (15).

• L’exérèse chirurgicale des tissus nécrotiques améliore le pronostic des formes pulmonaires isolées (6, 12) ce qui a justifiél’intervention chez 2 patients, sans résultat : malgré un traitement médical approprié avec exérèse chirurgicale, les patients sont décédés par septicémie et défaillance multiviscérale peu de temps après.

• La mortalité globale chez les patients atteints de mucormycose pulmonaire reste très élevée, oscillant selon les séries entre 26 et 80% (6, 12, 14).

DISCUSSION

Atteinte pulmonaire

• L’atteinte rénale décrite dans environ 20% des formes disséminées a été retrouvée d’emblée dans nos deux cas de forme multiviscérale (16).

• L’atteinte isolée, encore plus rare, a été décrite chez une trentaine de cas des patients HIV + par toxicomanies intraveineuse au stade maladie et sporadiquement chez des patients immunocompétents sans facteur de risque (11, 16-21).

• Les signes cliniques les plus fréquents sont des douleurs lombaires fébriles, avec hématurie jusqu’à l’anurie. Les hémocultures et l’examen cytobactériologiques des urines (ECBU) restent stériles.

DISCUSSION

Atteinte rénale

• Les aspects décrits en imagerie sont quasiment semblables et l’atteinte peut être bilatérale.

• En échographie, on retrouve un gros rein hypoéchogène avec dédifférenciation cortico-médullaire sans signal doppler, comme dans notre cas N°1.

• La TDM retrouve un gros rein hypodense prenant le contraste soit de façon hétérogène (pouvant donner le change avec une pyélonéphrite xanthogranulomateuse sans calcul (18)) ou juste capsulaire périphérique, témoin de lésion d’infarcissement avec abcès, jusqu’à la thrombose du pédicule vasculaire. Contrairement à la description de la littérature, nous n’avons pas observé une prise de contraste périphérique des lésions rénales et la différenciation cortico-médullaire était conservée.

DISCUSSION

Atteinte rénale

• L’infiltration péri-rénale est retrouvée inconstamment. Koeghdécrit en IRM des zones en hyposignal T1et T2 en rapport avec les débris filamenteux et nécrotiques au sein du parenchyme (18).

• L’évolution montre une progression du volume des lésions malgré le traitement médical adapté. La mortalité globale est élevée (52%).

• La néphrectomie, dès que possible, peut permettre une bonne évolution associée au traitement médical (11, 17). Un patient diabétique a pu être traité médicalement uniquement (19).

DISCUSSION

Atteinte rénale

• L’atteinte hépatique n'est pas habituellement associée à une

élévation importante des enzymes hépatiques.

• L’échographie montre des nodules hypoéchogènes et au scanner,

on retrouve des lésions focales arrondies hypodenses entourant les

vaisseaux, cernées d'une fine prise de contraste (ce qui serait

expliqué par la très faible présence de cellules granulocytaires) (5).

DISCUSSION

Atteinte hépatique

• Devant cet aspect, on pourrait discuter une atteinte infectieuse par aspergillus, candida, mycobactéries (en particulier en cas d’infection à HIV)..., mais aussi une atteinte lymphomateuse ou des îlots de stéatose. La biopsie d’un nodule a permis dans un de nos cas de porter le diagnostic. Dans la littérature, le même aspect est décrit pour l’atteinte splénique, pouvant s’associer à une splénomégalie (9).

• Contrairement à ces descriptions, et comme pour les atteintes rénales, nous n’avons pas observé de prise de contraste périphérique des lésions hépatiques ou spléniques chez nos deux patients présentant une forme disséminée. Cela pourrait être dû au caractère très invasif des lésions, notamment au niveau vasculaire.

DISCUSSION

Atteinte hépatosplénique

• L’atteinte thyroïdienne est extrêmement rare. Un cas a été rapportéauparavant dans la littérature chez un patient suivi pour un SIDA et décédé d’une mucormycose disséminée avec atteinte thyroïdienne (22).

• Notre observation N°2 est un cas exceptionnel d’une mucormycose disséminée chez un patient transplanté médullaire, se manifestant initialement par une atteinte thyroïdienne, dont la confirmation s’est fait sur l’analyse anatomo-pathologique de la pièce de thyroïdectomie partielle. L’imagerie retrouve des nodules thyroïdiens sans aucun aspect spécifique.

• Les autres localisations (sinusienne, intestinale et cutanée) sont globalement de meilleur pronostic.

DISCUSSION

Atteinte thyroïdienne

• La mucormycose est une infection fongique, opportuniste et agressive rare qui survient dans un contexte sévère d’immunosuppression.

• Quelques aspects d’imagerie peuvent permettre d’orienter cette hypothèse diagnostique, notamment dans les tableaux infectieux chez des patients allogreffés avec GVH chronique réfractaire, et de faire débuter un traitement adapté le plus précocement possible.

• Le contrôle radiologique des lésions notamment au scanner est indispensable dans le suivi systématique de la mucormycose.

• Ce contrôle doit être plus rapproché chez les patients transplantés médullaires en état de neutropénie sévère.

CONCLUSION

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