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28.6 514118
----------------------------INFORMATION----------------------------Couverture : Classique
[Roman (134x204)] NB Pages : 380 pages
- Tranche : 2 mm + (nb pages x 0,07 mm) = 28.6----------------------------------------------------------------------------
Fausses notes dans la chorale
J.Pierre FONMARTY
J.P.
FO
NM
ARTY
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D’où provient le nom des notes de musique ?
Cette notation a été créée au XIème
siècle par un
moine toscan Guido d’Arezzo (995-1050). Elle est
inspirée d’un chant religieux latin, l’hymne à Saint
Jean-Baptiste.
UT queant laxis
REsonare fibris
MIra gestorum
FAmuli tuorum
SOLve polluti
LAbii reatum
Sancte Ionnaes (SI)
Qui signifie :
Afin que tes serviteurs puissent chanter à gorge
déployée tes accomplissements merveilleux, ôte le
pêché de leurs lèvre souillées, saint Jean.
Le UT difficile à chanter a été remplacé par le DO
au XVIIème
siècle par l’italien Bononcini.
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La Cantate :
Terme issu du latin « cantare » = chanter désigne
une pièce musicale pour une ou plusieurs voix avec
accompagnemant musical. Ce nom apparaît pour la
première fois en 1620 dans le titre d’un recueil du
compositeur vénitien Alessandro Grandi « cantade e
arie a voce sala »
Le choral :
Désigne un cantique simple destiné à être chanté
en chœur par les fidèles. Les chorals ont intéressé
beaucoup de compositeurs baroques. Provenant de la
liturgie luthérienne on en retrouve essentiellement
dans l’œuvre des compositeurs allemands comme
Jean Sébastien Bach qui a porté l’art du choral à son
apogée.
Et pour les fous de solfège :
Le comma est la distance musicale élémentaire
correspondant à la plus petite hauteur de son que
l’oreille peut distinguer.
La syncope est formée par une note attaquée sur
un temps faible ou sur une partie faible d’un temps et
prolongée sur le temps suivant.
L’appoggiature est un ornement mélodique
servant à retarder la note suivante sur laquelle on veut
insister. C’est une petite figure de note dont la durée
doit être soustraite de la note principale. Il existe
l’appoggiature longue et l’appoggiature brève.
Et d’autres encore dont l’anacrouse que l’on
retrouvera dans l’histoire.
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Remerciements à :
M. Claude, Yvette et Didier pour leur relecture
particulièrement attentive et leurs conseils précieux.
A J. Claude mon « conseiller » en occitan
Ainsi qu’à Roger pour m’avoir autorisé à
reproduire l’un de ses superbes poèmes.
et à tous mes amis choristes avec lesquels je
partage le plaisir du chant choral qui m’ont inspiré ce
roman.
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Je dédie ce livre à ma famille : Jackie, Laurent,
Matthieu, et à mes petits-enfants, Jeanne, Rosemarie
et Grégoire, auxquels je souhaite à l’image de Charles
Trénet « de prendre le temps de chanter car tout le
monde sait bien que la vie est souvent jolie quand on
la prend du bon côté »
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Autrefois les hommes chantaient en cœur
autour d’une table. Maintenant c’est un
seul homme qui chante pour la raison
absurde qu’il chante mieux. Si la
civilisation l’emporte, bientôt un seul
homme rira parce qu’il rira mieux que les
autres.
(Gilbert Keith Chesterton)
poète et écrivain anglais (1874-1936)
Pourquoi philosopher alors qu’on peut
chanter.
(Georges Brassens)
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Avertissement
Ceci est un roman. Toute ressemblance avec des
personnes existantes ou ayant existées ne serait que
pure coïncidence.
Toutefois rien n’empêche chacun de laisser libre
cours à son imagination pour se dire « celui-ci me fait
penser à… » ou « celle-là ressemble beaucoup à… »
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Chapitre 1
Lundi soir – Prélude
Premier mouvement
allegro ma non tropo= vif mais pas trop
Contrairement à mes habitudes, je suis en retard.
Moi qui, de tout temps ai fait en sorte d’être au moins
à l’heure si ce n’est en avance à un rendez-vous qu’il
soit d’ordre professionnel ou privé, voilà que ce soir
je suis « à la bourre » comme dirait mon petit-fils
Grégoire.
Voyons il faut que je me raisonne ; rien de
dramatique, tu ne joues pas ta vie avec quelques
minutes de retard, pas la peine de s’énerver, Clarisse
attendra sagement dans sa voiture.
Bon sang ce n’est que la répétition de la chorale ce
soir, même si tu t’attends à ce que la chef, comme à
son habitude, fasse une remarque bien appuyée sur
« ceux qui se dispensent de l’échauffement en
arrivant après les autres » tu n’en mourras pas . Cette
sentence entendue à quasiment chaque début de
répétition fait sourire tout le monde (un peu moins
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évidemment celui ou celle qui en est destinataire).
Bref, mes partitions dans le cartable, OK.
Ma trousse avec crayon à papier, gomme,
surligneur, OK.
Clarisse manœuvre devant le portail ; coup de
klaxon ; elle attend.
J’enfile ma veste, me bagarre avec le chausse-pied
et des lacets récalcitrants.
– Où sont les clés ? Ah oui, accrochées au porte-
clés, normal.
Je ferme la lourde porte d’entrée, ou plutôt de
sortie, vu le contexte, deux tours de clé et c’est parti.
Finalement j’estime que mon retard est minime.
Imbécile, encore ton excitation bien inutile ; tu n’es
pas du signe des gémeaux pour rien.
– Salut Paulin ! me lance Clarisse. Désolée je suis
un peu en avance.
– C’est la meilleure, moi qui croyais…
– Qu’est-ce que tu dis ?
– Rien de spécial, j’étais prêt ! salut Clarisse !
Pendant que je me glisse, ou plutôt m’insère sur le
siège minuscule de sa petite voiture après l’avoir
délivré de quelques sacs en plastique au contenu
indéterminé, sacs que je projette le plus délicatement
possible sur la banquette arrière déjà fort encombrée,
Clarisse me demande des nouvelles de Jocelyne.
– Ça va, elle est partie à sa réunion du groupe
Amnesty de Bergerac comme chaque lundi soir.
– Dommage qu’elle ne puisse venir chanter avec
nous !
– Oui, mais tu sais Clarisse, de toute façon elle
trouverait un autre prétexte car la chorale ne la tente
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pas. Elle aime bien venir à nos concerts et à nos
repas, mais chanter en groupe très peu pour elle.
– Dommage quand même, car je sais qu’elle a une
belle voix de soprano et comme nous en manquons
dans ce pupitre… Bref tant pis ! un jour peut-être !
La petite FIAT donne tout ce qu’elle peut pour
gravir la pente assez raide bien que courte que nous
empruntons pour rejoindre la départementale. Il est
vrai que Clarisse semble croire que parmi les quatre
vitesses manuelles qui lui sont proposées par le
constructeur, la première et la seconde sont
suffisantes… D’où le rugissement du moteur qui
exprime ainsi sa souffrance, mais peine perdue…
Toujours cette odeur, ou plutôt ce mélange
d’odeurs indéfinissables dans l’habitacle : outre le
parfum légèrement épicé de Clarisse, il y règne aussi
une touche de vanille (sans doute le bonhomme en
carton parfumé suspendu au rétroviseur, sensé
supprimer les mauvaises odeurs), une autre de fraise
des bois (je parie qu’il reste une petite barquette de
Mara des bois achetées hier matin au marché et
oubliées dans le coffre pourtant minuscule mais
tellement encombré !) et aussi surtout, celle de fumée
d’échappement, heureusement légère mais qui
témoigne d’un trou en formation dans le plancher du
véhicule. D’un âge avancé, celui-ci commence à subir
les attaques de la rouille.
Si certains sont des passionnés, voire des
maniaques de l’automobile, ce n’est pas le cas de
Clarisse, c’est sûr. Pour elle, il s’agit simplement d’un
engin destiné à la transporter d’un point A à un point
B – à savoir la plupart du temps de son domicile à
l’hôpital tout proche où elle est infirmière – et ne lui
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coûtant pas trop cher. Car Clarisse a la passion des
voyages et toutes ses économies y sont consacrées ; le
reste, habillement, confort mobilier et notamment la
voiture étant secondaire. Je partage d’ailleurs pour
une grande part cette façon de voir la vie, même si
pour diverses raisons la mienne est orientée
différemment.
J’aime bien Clarisse. C’est une chic fille, toujours
de bonne humeur, parcourant la vie en dilettante ce
qui ne l’empêche pas d’être passionnée par son
travail. Célibataire convaincue, elle m’a avoué un
jour être trop attachée à sa liberté pour se laisser
enchaîner par les liens du mariage. Il suffit d’ailleurs
de l’asticoter à ce sujet, comme certains au sein même
de la chorale s’y sont aventurés, pour qu’elle réplique
en assénant cette définition empruntée à Simone de
Beauvoir dont elle est une fervente admiratrice : « le
mariage multiplie par deux les obligations familiales
et toutes les corvées sociales ».
Ce qui pour autant n’en fait pas une allergique à
l’amour et à la fréquentation des hommes. Jusqu’alors
ce ne furent qu’aventures brèves mais qui sait si un
jour…
Nous bavardons de choses et d’autres durant les
vingt minutes que dure le trajet (que je parcours en
douze minutes lorsque nous prenons ma voiture
puisque nous avons établi un tour de rôle, à la fois par
mesure d’économie et pour plus d’agrément, ayant
jugé beaucoup plus sympathique de nous rendre
ensemble aux répétitions).
Alors que nous abordons le troisième rond-point
de la rocade bergeracoise la conversation dérive sur la
chorale et les potins inévitables, mais heureusement
toujours amicaux.
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– Dis Paulin tu crois que Louise va continuer à
nous diriger l’an prochain ?
Paul qui est très ami avec elle prétend qu’elle
envisagerait sérieusement de se désengager ; c’est
bien de trois chorales dont elle s’occupe ?
– Trois et même quatre avec le chœur de femmes.
Effectivement ça fait beaucoup ; elle prend de l’âge, plus
de 68 ans, je crois et son caractère aussi, en vieillissant ne
s’améliore pas. Je ne suis pas au courant, mais j’ai le
sentiment qu’elle se plaît parmi nous et qu’elle quittera
plutôt les autres chœurs que Polygammes.
– J’espère, car tu exagères ; c’est une excellente
chef, elle a une oreille extraordinaire, détectant le
moindre quart de ton manquant et elle est capable de
suivre tous les pupitres à la fois. On peut passer sur
son caractère un peu vif parfois, beaucoup d’artistes
sont comme ça.
– Sans doute, je reconnais ses qualités et de plus,
c’est vrai que l’ambiance est très sympa dans la
chorale. Parfois même, nous dépassons quelque peu
les bornes en parlant entre nous, alors qu’elle fait
répéter un pupitre, ce qui est gênant pour elle et les
copains. Enfin, il faut le dire, celles qui bavardent ce
sont principalement les soprani.
– Arrête ! vous aussi les basses, vous ne vous
privez pas de commentaires à voix un peu trop haute,
quand nous, les soprani, nous chantons. Et c’est bien
vous qui vous amusez à surnommer Louise « Louise
d’Arc » car sa manie c’est de répéter à tout bout de
champ « taisez-vous », alors que la plupart du temps
personne ne parle, un toc, hérité vraisemblablement
de ses nombreuses années d’enseignement. Enfin,
tout se passe bien en général.
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– Exact ! Je crois qu’on est tous contents de
chanter et de se retrouver chaque semaine.
– Attention au poids lourd qui s’est arrêté à la
sortie du rond-point !!!!
Bruit déchirant des mâchoires des tambours de
freins qui agonisent. Clarisse aura-t-elle entendu leur
cri de douleur et les fera-t-elle remplacer ? Pas sûr.
– Que penses-tu du programme que nous propose
Louise pour cette nouvelle année ?
– Je n’en pense rien de particulier. Tu sais, puisque je
l’ai déjà exprimé à plusieurs reprises lorsque le sujet est
abordé en assemblée générale, que je n’approuve pas
certains choix, notamment celui des chants en langue
étrangère. Je pense qu’il serait plus agréable pour le
public et pour nous, de se fixer sur un répertoire
d’œuvres françaises qui abondent depuis la Renaissance
et sont pour certaines fort agréables à chanter.
– Arrête Paulin ! tu es le président de
Polygammes, tu assistes donc aux réunions du bureau
où sont notamment choisis les chants nouveaux. Tu
peux influencer le choix d’autant plus que d’autres
choristes partagent ton avis !
– Tu plaisantes ! on a beau dire et redire tout cela,
proposer à Louise des partitions qu’un petit groupe a
sélectionnées, au bout du compte la chef décide et
nous met à l’apprentissage ce qu’elle préfère, elle, en
particulier des chants sacrés que nous mettons
énormément de temps à apprendre au détriment de
notre répertoire qui ne se renouvelle pas vite. Enfin, si
ces choix sont appréciés par la majorité des choristes,
tant mieux ! je m’y conforme et après tout, je prends
plaisir à chanter, même ces œuvres là.
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– Et puis, tu peux ajouter que nous sommes
quasiment tous devenus amis et que nos concerts
attirent de plus en plus de monde, ce qui est
encourageant, non ?
– Certainement, alors vive Polygammes et au
travail.
Nous arrivons à St Justin la Vallée alors que la petite
FIAT semble rendre le dernier soupir, avec quelques
hoquets du moteur, qui préfère déclarer forfait plutôt
que de continuer à subir les mauvais traitements que lui
inflige la conductrice. Celle-ci se gare, comme à son
habitude, sur le trottoir, face à la salle de répétition,
alors que plusieurs places sont libres sur le parking ce
qui confirme, sans qu’il soit besoin de consulter la
montre, que nous sommes en avance ce soir.
Je m’extrais, non sans peine, de mon siège défoncé
pendant que Clarisse récupère sur la banquette arrière
le cartable à partitions, curieusement en excellent état
au milieu du bric à brac qui encombre l’arrière de
l’auto. Inutile évidemment de verrouiller les portières,
personne ne serait assez inconscient pour dérober
cette quasi épave.
Nous allons retrouver le petit groupe qui bavarde à
la porte de la salle mise à notre disposition par la
municipalité de Saint Justin la Vallée, profitant à la
fois des quelques minutes disponibles avant que
débute la répétition et de la douceur exceptionnelle de
cette soirée de fin septembre. Pas la moindre goutte
de pluie depuis plusieurs semaines et les jeunes
platanes plantés l’an dernier par la municipalité lors
de l’aménagement du centre bourg, carrément
assoiffés baissent piteusement la tête et ont perdu
précocement une bonne partie de leur feuillage.
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Poignées de mains et embrassades.
– Comment va, Paulin ?
– Impeccable, Yves ! Jocelyne et moi sommes de
retour depuis trois jours de notre séjour en Bretagne ;
un vrai régal, temps superbe à l’image de la côte de
granit rose.
– Veinard ! et tu comptes repartir bientôt en
randonnée ?
– Dès que possible, sans doute dans deux
semaines, direction la Corse.
Dans le brouhaha, difficile de poursuivre une
conversation.
– Oh ! Clarisse tu as mis un moteur de Porsche
dans ta FIAT pour arriver à l’heure ce soir ?
Plaisante Arnaud que sa profession d’huissier ne
porte guère à la mélancolie. Grand amateur de
calembours et contrepèteries il ne manque pas une
occasion de nous en faire profiter pour notre plus
grand plaisir. Et ce soir, ça ne loupe pas.
– Au fait, comme infirmière, tu pourrais avoir
comme devise la pensée bien connue de Descartes…
– ???????????????
– Et bien oui : « je panse donc j’essuie ! »
– Clarisse le gratifie d’une superbe grimace et ne
daigne pas répondre.
Ce soir, elle arbore une chevelure d’un roux vif
agrémenté de quelques mèches d’un vert mousse du
plus bel effet du moins pour qui veut se faire
remarquer. Cela entraîne les commentaires admiratifs
de Léa, Cécile et Brigitte avec lesquelles elle entame
une discussion sur les qualités et défauts comparés de
leurs coiffeurs respectifs.