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JACQUES VEYRENC ^ DOCTEUR ES-LETTRES

AGRÉGÉ DE GRAMMAIRE, AGRÉGÉ DE RUSSE PROFESSEUR A L'ÉCOLE NATIONALE DES LANGUES ORIENTALES VIVANTES

LES FORMES CONCURRENTES DU GERONDIF PASSE

EN RUSSE

PUBLICATION DES ANNALES DE LA FACULTÉ DES LETTRES AIX-EN-PROVENCE

Nouvelle Série N° 33 — 1962 ÉDITIONS OPHRYS

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A LA MEMOIRE DE DIMITRY STREMOOUKHOFF

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"Quand deux formations vivantes fonctionnent 8n concurrence, elles ne sauraient avoir la même valeur; et, corrélativement, des fonctions différentes dévolues à une même forme doivent avoir une base commune".

E. Benveniste

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AVANT-PROPOS

Nous avons ici le devoir d'avouer une part tout au moins de la dette que nous avons contractée envers les maîtres sans qui le présent ouvrage n'aurait pas vu le jour ou n'aurait pu être conduit jusqu'au point où nous le présentons.

A M. Charles Corbet, Professeur à la Faculté des Lettres de Dijon, qui a dirigé nos premiers pas dans l'étude du russe, et qui a su guider ensuite et encourager nos progrès, nous exprimons nos sentiments d'affectueuse reconnaissance.

M. Dimitry Stremooukhoff, Professeur à la Sorbonne, nous a livré le sujet sous la forme précise qui est indiquée par le titre. Nous ne me- surions pas alors le prix du don qui nous était fait. Plus tard, partant de ce problème limité de syntaxe, nous avons vu, au fur et à mesure de nos recherches, se découvrir, dans le système du gérondif et dans son histoire, des relations que nous étions bien loin de soupçonner. Ainsi, la vertu même du sujet nous conduisait, orientait notre méthode , déterminait des élargissements et des enrichissements nécessaires, com- mandait enfin la solution, le tout se conditionnant en fonction de l'élan initial. C'est dire assez tout ce que nous tenons de notre directeur. Ce n'est pas dire encore tout ce que notre ouvrage lui doit sous sa for- me définitive. Car M. Stremooukhoff a su exiger et obtenir de nous plus que nous n'aurions peut-être de nous-même donné. C'est pour répondre à son désir que nous avons en dernier lieu refondu nos conclusions, in- troduit des dépouillements qui tiennent compte des divers registres du langage écrit et parlé, donné enfin plus de rigueur et plus de netteté aux lignes fondamentales de notre travail.

M. André Vaillant, Professeur au Collège de France, dont le dé- vouement nous a très profondément touché, a bien voulu lire quelques-uns des essais qui ont précédé la présente rédaction. Grâce à lui nous avons abandonné des chemins où notre inexpérience nous avait d'abord fourvoyé . La fermeté de ses critiques, qui ont porté à la fois sur la méthode , sur la rédaction et sur le contenu de notre travai] , nous a ensuite gardé de bien des faux pas. Enfin la richesse des informations qu'il nous a si généreusement dispensées apparaîtra dans plusieurs endroits. Sur son invitation, nous avons notamment cru devoir donner plus d'importance au chapitre qui concerne l'emploi du gérondif passé en fonction d'attribut dans la langue moderne des dialectes.

M. André Mazon, Membre de l'Institut, nous a assuré le contact avec les derniers travaux qui par leur objet confinaient au nôtre. Il a eu

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la grande bonté de nous introduire auprès de l'un des plus récents spé- cialistes russes du gérondif, A.G. Roudnev, Professeur à l'Institut Herzen de Leningrad, avec qui nous avons pu échanger une utile correspondance . C'est encore M. André Mazon qui nous a permis de bénéficier en 1959 d'un fructueux séjour à Moscou, où sa haute recommandation nous a valu d'être accueilli et conseillé par l'Académicien V. V. Vinogradov, Direc- teur de l'Institut de langue russe, à qui nous sommes redevable de quel- ques précieuses indications.

Il nous faut à ce propos rendre hommage à E. M. Galkina-Fedorouk, Professeur à la Faculté de Philologie de Moscou, qui a patiemment guidé nos recherches bibliographiques à la Bibliothèque Lenine, et qui nous a révélé les thèses dactylographiées soutenues en U. R. S. S. ces dernières années sur des problèmes dont la solution a fait progresser nos recher- ches et éclairé nos conclusions.

Aux différents stades de notre travail, nous avons eu l'avantage de bénéficier des observations de lecture que nous ont faites succes- sivement M. Paul Garde, Chargé d'Enseignement à la Faculté des Lettres d'Aix, M. Robert Triomphe, Professeur à la Faculté des Lettres de Strasbourg, M. Antoine Culioli, Professeur à la Sorbonne, Mme E. Referovskai'a, Docteur ès Sciences Philologiques, Professeur à l'Univer- sité de Leningrad, M. Charles Corbet, Professeur à la Faculté des Lettres de Dijon. Nous avons correspondu par ailleurs avec MM. les Professeurs James Ferrell, Gleb Struve et Boris Unbegaun, qui ont bien voulu nous donner sur notre travail de précieux avis. Qu'ils soient tous ici remerciés.

M. Henri Granjard, Professeur à la Sorbonne, nous a honoré de sa bienveillance, et il nous a fait la faveur de nous indiquer en toute der- nière heure quelques défauts auxquels il était encore temps de parer.

Pour les encouragements dont il a soutenu et récompensé notre ef- fort, nous tenons enfin à exprimer le témoignage de notre particulière gratitude à M. Pierre Pascal, Professeur à la Sorbonne.

Aux publications de la Faculté d'Aix-en-Provence, qui nous font le privilège d'admettre notre ouvrage dans leur collection, et tout spécia- lement à leur Directeur, M. Hildebert Isnard, Professeur à la Faculté des Lettres, nous présentons nos plus vifs remerciements.

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AVERTISSEMENT

1/ Les noms propres d'origine russe (noms d'auteurs et noms de villes) sont cités dans leur orthographe traditionnelle : Pouchkine, Kachine. A la finale -v est préféré à -ff ; en toute position, -chtch - est allégé en -s te h - : Saltykov-Stchedrine; enfin e est écrit sans accent : Tchekhov, sauf à la finale : Bravé.

Les citations russes sont données, à la ligne, en lettres cyrilliques; mais les mots russes qui figurent dans le corps du paragraphe sont translittérés en alphabet latin (caractères italiques).

2/ On trouvera en annexe (p. 259-260) la liste des œuvres citées en abrégé, ainsi que celle (p. 261-262) des éditions dont sont tirées les références qui accompagnent nos citations.

3/ Le caractère particulier de notre recherche ne nous permettait guère de donner la traduction de nos exemples : ou alors nous aurions risqué de commettre une pétition de principe, supposant résolue l'in- connue (valeur de la forme en -( v)si) que précisément nous cherchions.

Nous avons pu cependant faire une exception pour la Vie . d'Awakum, - texte de la fin du XVIIème siècle, qui se situe à un moment capital de l'histoire du gérondif long, - car nous disposions ici de la traduction de P. Pascal : l'analyse de cette traduction, intervenant à un moment où se trouveront déjà dessinées les valeurs principales de la forme longue, nous fournira une contre-épreuve des plus intéressantes.

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INTRODUCTION I

ORIGINE ET PREMIÈRE HISTOIRE DU GÉRONDIF

La théorie de la proposition abrégée. - Le gérondif issu du participe. - L'exposé de Potebnia. - Chronologie de l'apparition du gérondif. - La théorie de Roudnev. - Le gérondif de type balto-slave et le gérondif moderne.

L'origine du gérondif est connue. Depuis longtemps les grammai- riens ont renoncé à la définition empirique de N. Gretch, qui tenait le gérondif, comme le participe, pour une "proposition abrégée". Voici l'un des passages de la Grammaire pratique du russe , où Gretch se réfère à cette théorie : "Les gérondifs sont, au point de vue syntaxique, l'abrè- gement du système que forme le verbe avec une conjonction de subor- dination; ils expriment ainsi la valeur subordonnante d'une proposition adjointe; par exemple :

Mon ôpaT 0ôpa40Ba/icH, YBHAEB CBoero Apyra

au lieu de

MOà OpaT oôpa oBa icfl, Koryia yBHAeA CBoero ^pyra"

La même opinion est reprise par A. Vostokov(2), I. Davydov(3), F. Bouslaev(4). Elle a cours jusque vers la fin du XIXème siècle dans les grammaires scolaires, par exemple dans celle de A. Kirpitchnikov(5) ou dans celle de M. Rybakova(6).

Pourtant, vers l'époque où paraissait la Grammaire prattque du russe de Gretch, Martynov fournissait du gérondif une définition satisfaisante

(1) H.H. rpe'l, ITpaKTH'leCKM pyeeKaa rpaMMaTHKa, CITÓ., 1827, §400 , Voir encore les §§410, 412, 414, 418, 419, 462, 493, et passim.

(2) A. BOCTOKOB, PyccKaa rpaMMaTHKa, no HaiepTaHHiD ero we COKPaU[eHHOà rpaMMaraKH ncwHee H37I0)i(eHHaH, 2-oe ZSa., CIIO. , 1831, §112.

(3) H. J(aBbl,l\OB, On HT oÓmecpaBHHTe.llbHO;-j rpaMMaTHKH pyccKoro 513b!Ka, H3Â. 3 - e, CHo.. 1854, § 483.

(4) $.H. BYCJJaeB, HcTopHiecKaH rpaMMaTHKa pyccKoro H3UKa, CHHTaKCHC, H3,l\, 4-e, M. , 1875, §§ 135, 274, 275.

(5) A. K;ipriiiqHliKOB, CHHTaKCHC pyccKoro H3HKa , M., 1881, p. 26, 32. (6) M. Piic)aKOBa, PyccKan rpaMMaTHKa, M., 1883, p. 82.

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en se gardant de recour i r à la théorie de la proposition abrégée : "Le gérondif provient du verbe, et, sans modifier sa terminaison selon les cas, il sert à indiquer la forme ou le moyen de l'action exprimée par le verbe auquel il se rapporte, comme s ' i l participait à l 'action décrite par ce verbe"(l). Martynov est déjà sur la voie d'une explication cor- recte de l 'origine du gérondif, dont la forme est historiquement le résul- tat d'une évolution qui a intéressé à date ancienne la forme courte du participe. En 1845, un dictionnaire se fait l 'écho d'une étymologie qui exprime clairement cette relation de descendance :

TaK KaK OHH npOHCXO/lHT OT IipHlâCTHH, noTOMy H Hâ3UBaîOTCH AeeHpHqaCTZRMM, 46TLMH npHlâCTHH, HO CTapHHHOMy npHîaCT04eT5ïlffl(2)

Pour naïve qu'elle soit, cette fantaisie étymologique contient mieux qu'un germe de vérité. Vingt ans plus tard, N. Nekrasov se refuse à disso- cier le gérondif du participe : dans l'un et l 'autre cas, écrit- i l , il s ' a - git de "formes adjectives du verbe", qui prennent la forme courte quand elles ont une signification circonstancielle, "comme c 'est le cas en gé- néral pour les formes courtes de l 'adjectif, par exemple choroso, durno, chudo, etc. "(3).

Mais c 'es t A. Potebnia qui, en 1888, dénonçant l ' e r r eu r dont est entachée l'explication du participe et du gérondif par la théorie de la proposition abrégée(4), décrit le premier , en s'appuyant sur des textes historiques abondants, le processus suivant lequel l'ancienne forme courte du participe passé actif s 'est progressivement transformée en gé- rondif. L'exposé de Potebnia que la plupart des grammairiens posté- r ieurs n'ont fait que confirmer (5) , tient dans les grandes lignes suivantes :

1/ Dans l'ancienne langue, à côté de la forme courte du participe passé actif, s 'es t progressivement développée une forme longue (type sdelavstj), comme ce fut en général le cas dans les adjectifs.

2/ L'existence de la forme courte s 'est alors vite réduite aux seuls cas du nominatif : sdelav pour le masc. sing. et pour le neutre sing. , sdelavst pour le fém. sing., sdelav^e pour le pluriel des trois genres : on reconnaît déjà dans ces nominatifs de participes courts les formes différentes du gérondif passé.

(1) MapTlffiOB, Ilpe noJoaeHHe 0 r^aro^ax q3LIKa pOCCHHCKOrO, CIIô. , 1829, p. 71. (2) rpaMMaTHKa pyCGKOrO HS 1!!Œ , I-a Il., 3THM0.fl0rHfl, 2- oe HS,l\, , TeTpa,n:b II, M., 1845, p. 88.

Vasmer n'explique pas l'étymologie de deeprlcastle . Ce pourrait être un c qu avec transformation en composé, du grec SVEPYT]Tl){T] llETOXrl "participe actif . Quant au terme gerundtj, qui s'est compromis, dans l'argot des séminaires, en erunda (voir sur ce sujet 51, TpOT, SlMCWIomeCKHe pa3LicyaRM31 , II-2, p. 329 ; MHHapCKHe cvioBa B py-.CKOM HS1!!<e", m , 1905> BaprnaBa, T. 54, Ban. 1-e, p. 115), il est réservé au gérondif latin et à quelques autres, par exemple au gérondif anglais.

(3) H. HeKpacoB, 0 3HaieHHH epM pyccKoro rviarcvia, 0116,1865, p.251. (4) A.A. IToTeÓHH, Z3 3a7HCOK no pyccKOH rpaMMaTHKe, TT. l-l I, XaptKOB . 1888, p. 117-118. (5) Voir notamment les travaux de D. Koudriavski, E. Karski, E. Istrina, A. Chakhmatov ,

S. Obnorski, L. Boulakhovski.

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3/ Quant au mécanisme de la transformation du participe passé actif court en gérondif passé, il s'agit schématiquement d'un déplacement du centre d'attraction auquel était soumise la forme participiale (1 ). Soit par exemple une phrase comme telovek, skazav eto, vosel v komnatu, "l'homme qui avait dit cela entra dans la chambre" : si la forme skazav gravite autour du sujet substantif celovek (et c'est cette valeur qu'essaie de rendre la traduction française), c'est une forme de participe, et, comme telle, elle s'accorde en genre, en nombre et en cas avec Xelovek. Mais la forme skazav a pu tendre vers une certaine autonomie; ainsi li- bérée de l'attraction que lui imposait le sujet Celovek, et affranchie du même coup des règles de l'accord en cas, en genre et en nombre, skazav prenait une valeur de gérondif. Dans ces conditions nouvelles, la propo- sition : Celovek, skazav eto, vosel v komnatu prend un sens assez différent: "l'homme, quand il eut dit cela, entra dans la chambre". Ainsi skazav ne s'applique plus à la qualification du sujet; il perd la valeur adjective propre au participe : "l'homme qui avait dit cela ... "; le sens nouveau, qui révèle la vertu caractéristique du gérondif, exprime une modalité verbale secondaire ("après avoir dit ... "), qui se rattache à l'action verbale principale ("il entra quand il eut dit

Quand la forme de gérondif-participe (ici skazat» ) est antéposée, la virgule qui s'intercale entre cet élément et le sujet du verbe principal signale par un symbole matériel la conversion du participe court en gé- rondif : skazav eto éelovek vosel se distingue de skazav eto, éelovek vosel v komnatu. C'est ainsi que D. Ovsianiko-Koulikovski peut opposer le tour podumav on skazal, podumav est encore un participe court, au tour podumav, skazal, où la ponctuation indique la nouvelle nature de podumav, devenu gérondif(2) .

La transformation des participes courts en gérondifs a été dans l'histoire de la langue un phénomène important par les conséquences qu'il a entraînées. Les dialectes russes ont perdu à peu près complète- ment l'usage du participe actif, devenu souvent adjectifl3) : ainsi stoJaétj, stdjatflj, vtsJaC'tj, ktpjaétj, êorjaci j, etc. pour les formes du participe présent; ses emplois ont été remplacés, qu'il s'agisse du présent ou du passé, par des propositions subordonnées ou par des tours au gérondif. En revanche la langue littéraire a conservé les formes du participe actif sous l'influence du slavon d'église, ainsi qu'en témoigne le phonétisme caractéristique des participes stojasétj, sidjatéij, etc. en face des for- mes adjectives de type russe. D'où les emplois nouveaux du participe en fonction d'apposition (Celovek, skazavstj eto, vosel v komnatu "l'homme qui avait dit cela entra dans la chambre"), qui restent, en principe du moins, bien distincts du tour correspondant au gérondif ( celovek, skazav eto, vosel v komnatu "l'homme, ayant dit ces mots, entra dans la chambre").

(1) Ce déplacement d'attraction résulte de la nature même du participe : "... dès l'é- poque indo-européenne, la relation sémantique entre l'action de la phrase et celle du participe, n'étant fixée que par l'ensemble, pouvait être très variée, . . . " écrit K. Brugmann, (Abrégé de grammaire comparée des langues indo-européennes, Paris, 1905, p. 641 ).

(2) ,H. H. OBCRHHKO-KYJIHKOBCKHH, CRHTaKCHC pyOCKOPO a3MKa, CÏÏO.,1912, p. 74. (3) A. A. Potebnia, op. cit., p. 186.

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Quant aux conditions chronologiques dans lesquelles s'est opérée la conversion du participe actif court en gérondif, il est naturel qu'un phénomène de cette importance ait demandé beaucoup de temps, vrai- semblablement plusieurs siècles. Dans son étude de la Russkaja Prauda, dont la langue, de l'avis de V. Klioutchevski, échappe à peu près com- plètement aux influences savantes(l), S. Obnorski constate l'absence to- tale de participe "en tant que catégorie déclinable du verbe", alors que "l'emploi des formations participiales dans la fonction du gérondif mo- derne" est fréquent(2). Potebnia relève de son côté, dans les monuments de la fin du XIIIème siècle, quelques emplois du participe court où l'ac- cord n'est plus observé(3). Il en conclut que la confusion des formes a dû commencer un peu plus tôt, vers la fin du XIIème ou le début du XIIIème siècle.

Cet état de confusion va se prolonger, comme le démontre une communication de R. Stola sur le développement du gérondif en vieux russe(4). L. Zevakova trouve même jusque dans des textes du début du XVIIIème siècle des matériaux suffisants pour affirmer que la forme en -v&e, quand elle est utilisée, accompagne presque toujours un sujet pluriel(5). Mais il s'agit là de monuments fortement marqués d'influence savante. En fait on peut considérer que le gérondif se constitue en caté- gorie grammaticale autonome vers le XVème siècle. A cette époque , "au lieu des participes, écrit A. Chakhmatov, on trouve des gérondifs, c. à. d. une forme verbale invariable qui s'emploie ou bien dans les cas où la vieille langue utilisait le participe, ou bien avec une fonction ad- verbiale autonome propre"(6).

A. M. Pechkovski, qui, dans l'étude des groupes logiques de la phrase, met l'accent sur les faits de rythme et de mélodie, n'apporte rien de plus à l'histoire du gérondif(7). En revanche les travaux de A. Roudnev tentent de donner à cette question un éclairage nouveau. Le déplacement du centre d'attraction du participe court, principe qui sert de base à la théorie de Potebnia, est, d'après Roudnev, contraire à la vraisemblance. "On n'a jamais vu que des mots entrant dans le groupe sujet subissent le processus de l'adverbialisation" Et, prenant pour méthode l'étude des fonctions plutôt que l'analyse des formes, Roudnev montre que, dans les textes en vieux russe qu'il examine, le participe court joue très souvent précisément le même rôle que le gérondif moderne. "Les formes courtes du participe actif, écrit-il, ont souvent non pas un rôle de détermination, mais la valeur ■ du gérondif moderne; elles expri-

(1) B.O. KfflJieBCKHH, Kypc pyCCKOH HCTOpHH , T. 1, M., 1937, p.223 sqq. (2) C,IT. OÓHOpCKHH. ""PyccKaH IIpaB/ia" KaK naMHTHHK pyccKoro .MTepaTypHoro H3HKa", 23B. OTA.

QOieCTBeHHHX HayK AH CCCP , n010, 1934, p. 765-766. (3) A. A. Potebnia, op. cit., p. 186-187. Autres exemples dans Bouslaev, loc. cit. (4) R. Stola, Zur Frage der Entwicklung des /teenpHiaCTHe im Altrussischen, M., 1958. (5) JI.H. 3eBaKOBa. HMeHHoe npHiacTHe ,!\eHCTBHTe.IIbHOrO saac)ra no najwiHHKaM pyccKOH iiHCbMeHHOCTH

17-HaHajia 18-HX BEKOB, JI., 1954, p. 45. (6) A. A. DlaxMaTOB, "HCC.lIe,!\oBaRHe o /IBHHCKHX rpaMOTax 15-oro BeKa", HccvieflOBaHHfl no pyocx. R3.,

T.2, BHn. 3-H. li34. AH, CIIO., 1903,1. 1, p.134. (7) A.M. IIemKOBCKHii, PyCCKHH CHHTaKCHC B HayqHOM OCBeieHHH, H3/U 6- oe, M., 1938,rvi. 22. (8) A.r. PyÂHeB, 0liHTaKCHC OC.lIOiKHeHHoro npe/lJ0S6HH3, M., 1959, p. 61.

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ment une circonstance avec telle ou telle fonction sémantique (circons- tance de temps, de manière, etc. )(1).

Intéressante en ce qu'elle fait passer au premier plan les raisons de syntaxe, l'explication de Roudnev n'enlève rien à la validité des ana- lyses de Koudriavski(2), précisées récemment par Stola(3), qui, s'ap- puyant sur des données statistiques, prouve que les faits de rupture d'accord apparaissent par priorité, dans la Chronique Laurentine, à pro- ximité d'un sujet duel, dans les cas où le sujet se compose de plusieurs termes ("anacoluthe logique"), avec un sujet collectif, ou enfin quand la forme du gérondif est �ed (ou un composé). La fixation morphologique du gérondif en forme invariable devait naturellement accompagner ou sui- vre de près le sentiment de la fonction.

Le glissement de certaines formes participiales vers la valeur gé- rondive et les faits de rupture d'accord qui s'ensuivent remontent d'ail- leurs au vieux slave, qui a déjà des gérondifs, et d'emploi fréquent . Les grammaires du vieux slave(4) n'indiquent pas la fréquence d'emploi des gérondifs. Mais le dépouillement des formes du Suprasl tensis, ef- fectué par A. Vaillant, apporte sur ce point des précisions. Une cons- truction comme povele . . . tli £uriïàe Izbytt ti, tli ne Mrïi&e zïle umr&ti 208_9î] -&úGav-ra oe . . . r i P-T) -&úGav-ra ae "il a ordonné . . . ou bien que, sacrifiant, tu sauves ta vie, ou bien que, ne sacrifiant pas, tu meures de male mort" n'est pas rare : elle apparaît dans 25 exemples après po- velë. Il faut y ajouter une quinzaine d'autres cas dans divers types de phrases, plus difficiles à distinguer des nombreux exemples où le co- piste a substitué une forme non fléchie à une forme fléchie de participe , ces altérations de la flexion étant également significatives.

Ces gérondifs sont anciens, et d'un type balto-slave. Ensuite, les langues slaves ont élaboré un gérondif d'un type différent, par fixation de la forme de nominatif du participe actif court, soit au masculin sin- gulier, soit au pluriel, soit au féminin singulier : d'où, pour le passé, les gérondifs en -(v), en -(v)ge et en -(t»Mt.

(1) A.r, Py/meB, OÓOCOÓJIeHHhIe MeHH npe yioseHHH B HCTOPHH PY'-CKOPO q3UKa, JI., 1959, p. 80.

(2) .ll. H. Ky/jpHBCKHH, K HCTopHH pyccKHX iipHtiacTrHH, BHÏÏ. 1, .AeenpHiacTHH npome,l\mero BpeMeHH, [OpbeB, 1916.

(3) R. Stola, art. cit.

(4) Voir par exemple Franz Miklosich, Veréletchende Grammattk der sÍautschen Sprachen , IV, Wien, 1868-1874, p. 828, et W. Vondrak, Al tktrchenslautsche Grammatlk, zweite Auflage, Berlin, 1912, p. 608. On trouvera par ailleurs une liste d'exemples dans R. Scholvin, "Beitrâge zur Declination in den pannonisch-slovenischen Denkmâlern des Altkirchenslavischen", Archtu fur slautsche Phtloloéte, II, 1877, p. 553.

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INTRODUCTION II

LE PROBLÈME DES FORMES CONCURRENTES DU GÉRONDIF PASSÉ

Le gérondif en -v£i, forme de féminin singulier ou forme de pluriel. - Le type en -u et le type en -vHl : opinions des grammairiens. - Un problème qui reste entier.

En 1947, V. V. Vinogradov pouvait écrire que "dans son ensemble la question des locutions au gérondif et des fonctions propres aux cons- tructions gérondives dans leur emploi syntactique était encore à étu- dier"(!). Les nombreux travaux publiés depuis lors ont principalement trait à différents aspects historiques, stylistiques et comparatifs de la question(2). Mais le problème des formes concurrentes du gérondif passé reste entier(3).

Sur l'origine exacte du gérondif en -v£i les opinions divergent. La plupart des grammairiens russes s'en tiennent à l'apparence des faits, et voient ici la survivance de l'ancien nominatif féminin singulier du par- ticipe court. Telle est l'explication fournie notamment par Potebnia(4), Jakoubinski(5), Obnorski b). Mais la proportion relativement faible des emplois de cette forme dans les anciens textes justifie mal une pareille fortune : dans la Chronique Laurentine par exemple Koudriavski ne relève que 65 cas de -(v)st contre 536 de -(v)se et 896 de -(v) (7).

Ces données inclinent à poser l'hypothèse d'une contamination des deux formes - vsi et -use. Chakhmatov écrit que le gérondif en -vst Il remonte à la forme de nominatif pluriel du participe passé"(8). C'est aussi ce que pense A. Vaillant, pour qui la terminaison -(v)st n'est qu'une graphie, ou une variante, ou une réfection de la terminaison de nom. pl. -(v)se. Le vieux serbo-croate a d'ailleurs opposé d'abord les deux for- mes en - v et en -use : la finale en - i n'est apparue qu'à partir du

(1) B.B. BJ.morpa,i\OB, PYCCKHH q3UK, M., 1947, p. 387. (2) Voir tnf. la bibliographie, p. 267-269. (3) Confirmé par V. V. Vinogradov (entretien du 14 décembre 1959). (4) A. A. Potebnia, op. cit., p. 187. (5) J!.n. Hkvôhhckhh, Hctophh ;¡peBHepYGCKOrO H3MKa, M., 1 953, p. 253. (6) C.U. OÓHOpGKHH. OiepKH no MopimornH Py--CKC)rO rJIarOJIa, M., 1 953, p. 217. (7) D.N. Koudriavski, art. cit., p. 13. (8) A.A. lUaXMaTC)B, OqepK coBpeMeHHoro py'.CKOrO JiHTepaTypHoro H31Æa, L. , 1925, p. 184.

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XIVème siècle^ h Dans son plus récent ouvrage, Roudnev explique la substitution de -vgi à -v§e par des raisons d'ordre phonétique et analo- gique. "Les formes en -vse, sous l'influence de la langue parlée, où -e final pouvait se prononcer comme - t, ont été évincées par les for- mes en Roudnev voit ici l'influence des dialectes, "où les gé- rondifs présentent les suffixes -vgt, -vëy, ou -m&y, D'autre part, il faudrait admettre le jeu de la tendance générale à uniformiser les désinences de nominatif pluriel, notamment dans les bases en chu- intante, sur le modèle des finales de substantifs (types nozi, eZi ). "Ces finales ont pu s'étendre, par assimilation morphologique, aux suffixes de gérondifs"(4).

L'explication de Roudnev n'est pas certaine; elle n'est fondée que sur des suppositions. Mais le fait que la finale en -v£i a progressive- ment assimilé la forme en -vse est hors de doute, Koudriavski observe(5) que déjà dans la Chronique Laurentine les cas de rupture d'accord qui in- terviennent dans la finale en -( v) i du participe court concernent le plus souvent des emplois où l'on attendrait -( v) se. . Dansles povest' du XVème et du XVIème siècles, il arrive qu'on hésite au nominatif pluriel, pour le même verbe, entre une forme en -v£t et une forme en -vte : uzasëesja (P. vz. Tsgr. T., p. 59), mais u$as$isja (tbid., p. 71); et, à deux lignes d'intervalle : znamenav e 1e sja et znamenav&isja (P. os. Psk. St.Bat.,p.125). Il n'est pas rare d'autre part qu'un même système, apposé à un pluriel, mêle les terminaisons en -(u)Mt et en ~(v)£e :

OBIIM se xosy cojpaBine co cpaMa ee , H, pO)!(eH )!(eJleSeH pa3«erM , BOH- saxy B cpaM en (P.H. volev. Dr., p. 94).

• • • npHBe3MH H3 rpa^a H oimotom orpa HBie (P. Petr. ts. Ord., p. 101) ; Maio HeKazo pa^ocru ô iaroBecTHfl npHeMnm H ocTaBHBnm HeMonn îkghckhô H B MyXGKyK) KpenOCTb OÛO.flKIIieCH ... (P. os. Psk. St. Bat., p. 151).

Et dans une povest' du XVIIème siècle :

H TaRO HanHoaBineca B co^aTH H HaiesniH KYllHO xo/ihth Ha yieHHfl (P. Sav. Gr., p. 94).

D'ailleurs la forme en -vse s'est conservée assez longtemps dans les textes marqués d'influence slavonne. La Vie d'Awakum (1672) parait ne connaître que la finale en - uge (17 emplois); les gérondifs passés construits sur une base consonantique sont aussi dans leur grande majo- rité en -Se (14 exemples), plutôt qu'en -Si (4 exemples). Au début du XVIIIème siècle, un texte de 15 pages ( G. r. m.) donne 5 emplois en -use contre 7 en -ugt. On relève enfin jusque dans Lomonosov un gérondif, évidemment artificiel, en -se :

(1) A. Vaillant, Grammaire comparée des langues slaves, II, 2, 1958 , p. 559, § 284. (2) A.G. Roudnev, op. cit., JI.1959, p. 110. (3) Ibid., p. 111. (4) Ibid., p. 111. (5) D.N. Koudriavski, art. cit., 1916, p. 62-63.

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H60 Ero CMOK) H 4yxom noiiBHrmecfl repOHHR Hama.

L'extension de la finale de gérondif en -ugi au détriment de la t e r - minaison en -vee s 'est donc faite progressivement. On peut admettre que ce processus est en voie d'achèvement en russe au XVIIème siècle.

Pour ce qui concerne l'évolution ultérieure du gérondif passé, et singulièrement les emplois parallèles de la forme en -v et de la forme en - ugi, la plupart des grammairiens restent muets. Ils se bornent gé- néralement, dans leurs études descriptives, à noter sous la forme d'une parenthèse la terminaison en -ugi comme une variante de Gvozdev, plus explicite encore, écrit qu'il n'existe aucune différence entre le gé- rondif en -v et le gérondif en -v£l, "formations de même valeur"(2) .

Quelques-uns pensent avec Gorki que la forme en -u, forme lé- gère, a évincé de l 'usage la forme en -t)gi, forme lourde, pour une raison d'euphonie(3). Mais on peut douter que podnjavSi par exemple soit plus désagréable à l 'oreille que podnjaunis', consacré aujourd'hui par l'usage. Or Gorki lui-même emploie dans Po Rusl (389 pages) 86 formes en - v£is', sur un total de 752 gérondifs passés. S'il évite -vSt (6 for- mes), il ne semble donc pas reculer devant l'emploi de -v£is' , et la raison d'euphonie, pour justifier la préférence de -v à paraît de ce fait peu valide.

Ce qui est bien assuré, c 'est d'une part la tendance à éliminer -vlt de la langue écrite. En 1916, Koudriavski pouvait s 'abuser encore et croire que la forme en -vêfi. "forme vivante", allait devenir "la forme unique de gérondif passé"( J. Mais en 192 5 Chakhmatov doit constater que la finale en -t)gt sort de l'usage(5). Gvozdev confirme à date plus récente que les emplois en -v constituent l 'écrasante majorité des cas(6). Il est d'autre part hors de doute que la forme en -ugt, dans la mesure où elle se conserve, tend à carac tér iser la langue populaire, la forme en -v se confinant de plus en plus dans les emplois l i t téraires et l ivres- ques. Tchernychev assurait déjà en 1914 que les gérondifs en -vSi "étaient un trait distinctif de la langue populaire et parlée" (7).

Mais le gérondif passé en - vsi pose un problème justement dans ceux de ses emplois qui ne sont pas marqués d'un caractère populaire . V.I. Tchernychev écrit qu'au XVIIIème et au XIXème siècles on peut ren- contrer quelquefois la forme longue "chez de bons écrivains, . . . .

(1) Par exemple V. V. Vinogradov, op. cit., 1947, p. 388 et E. M. rEUKHHa - $e opyK , C0Bp6M6HHHH pyoCHH H3HK , M., 1957, p. 366, § 258.

(2) A. H. rB03/(eB, OiepKH no CTHJIHCTHKe PyccKOro H3HKa,M. , 1957, p. 257. (3) Ibid., loc. ctt.

, (4) Koudriavski, art. cit., p. 14. j (5) Chakhmatov, op. cit., p. 184.

(6) Gvozdev, op. cit., p. 257.

{ (7) B.H. qepHLMeB, IIpaBiabHOCTb H iHCTOTa pyccKofi peq;i, CITÓ., 1914, 2, p.334. Cette opinion i est commune. Voir, parmi les ouvrages les plus récents, H.B. YCTHHOB, OiepKH no , pyeeKOMy H3UKy. M., 1959, p. 252, et la dernière édition de la Grammaire de l'Aca-

dénie, t.I, M. ,1960, p. 527. | (8) V.I. Tchernychev, op. cit., 2, p. 339.

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On se propose ici d 'apprécier la proportion et la qualité de ces emplois. Par ailleurs il est bien connu que la forme lourde du gérondif passé s 'est étendue et même généralisée dans certaines catégories verbales : le type voëedët aurait supplanté le type court voSed, n'eût été la fortune tardive de vojdja; dans les formations pronominales, podnjav&ls' l 'a dé- finitivement emporté sur podnjavsja.Enfin la construction du gérondif pas- sé en fonction d'attribut n 'est attestée qu'avec la forme longue (on vypivsi).

Etablir entre ces faits, apparemment étrangers les uns aux autres , un rapport qui se fonderait sur une valeur commune de la terminaison en -véi permettrai t de mieux saisir l'évolution de la forme longue du gérondif passé, dont l'emploi populaire pourrait alors apparaître comme une caractéristique secondaire. Une observation de L. Tolstof, qui tou- che précisément à la comparaison des deux formes du gérondif passé , fournira la matière d'une discussion liminaire, et peut-être une première idée de la valeur propre à la forme longue. Puis il faudra comparer , siècle par siècle, et quelquefois écrivain par écrivain, les indices de vitalité de la forme en -v&i. Des statistiques, qui portent sur une di- zaine de milliers de pages, donneront une idée du nombre relatif des emplois selon les époques. Dans l'étude des valeurs du gérondif passé long, il a paru plus expédient de par t i r des données immédiates de la langue moderne, pour remonter de proche en proche jusqu'à des emplois plus anciens, où apparaîtra peut-être l'explication profonde des valeurs propres à la forme en -vgt. Le gérondif passé en fonction d'attribut, qui pose des problèmes variés, fera l'objet d'un chapitre à part. De même aussi l'étude du gérondif passé à désinence de présent (types postauja , vojdja), dont l'emploi se conforme, contrairement à celui de la forme en -v&i, à un schéma historique uniforme, que les dépouillements ef- fectués devraient permettre de préciser .

Les faits relatifs au gérondif passé d'aspect imperfectif ont dû être t rai tés dans une seconde partie. C'est d'abord que les emplois de la forme pleine sont ici relativement plus nombreux. Surtout plusieurs points restent à écla i rc i r dans l'évolution et dans la syntaxe du gérondif passé imperfectif. L'histoire de cette forme, qu'il fallait pour cette raison esquisser, indiquera du même coup le principe de répartition des ter - minaisons courtes et des terminaisons pleines.

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INTRODUCTION III

QUESTIONS DE MÉTHODE

Ordre des recherches. - Dissymétrie de la composition. - Elargissement de la construction. - Dépouillements et statistiques.

ORDRE DES RECHERCHES.

Comme il arrive souvent, le cadre de nos recherches, en se mo- difiant, a déterminé une ligne de composition sensiblement différente de celle que nous avions primitivement prévue.

Dans une période ancienne, nous avions exploré séparément, dans la syntaxe du gérondif, deux domaines particuliers où il nous paraissait possible d'apporter des éléments neufs : (a) les emplois du gérondif en fonction d'attribut, et (b) les valeurs du gérondif passé d'aspect im- perfectif.

Les matériaux dont nous disposions nous auraient facilement permis d'écrire deux ouvrages différents, qui auraient constitué deux contribu- tions distinctes à l'étude du gérondif. Mais la synthèse, que nous dési- rions, résistait à nos efforts.

Le progrès décisif de notre étude date du jour où nous fut soumise la question suivante : "Toutes choses égales d'ailleurs, n'y aurait-il pas une différence de valeur entre la forme de gérondif en -u et celle en -( vHt ?" Cette question, apparemment étrangère à nos problèmes anté- rieurs, devait avoir pour dernier effet de les aligner dans une même perspective, comme éléments d'une synthèse plus large.

DISSYMETRIE DE LA COMPOSITION.

De là les deux versants de notre composition. Dans un premier temps, nous devrons établir la valeur de 1' tnconnue

(c. à d. de la forme en -(v)Si). Il nous a paru que le plus sûr était pour cela de partir de la langue moderne. D'une part les faits y sont bien établis et les flottements dans la syntaxe doivent y être plus rares . D'autre part les applications du gérondif en ~(v)£t, peu courantes, y sont sans doute d'autant plus caractéristiques. Ainsi quelques lignes maîtresses pourraient-elles assez tôt se dessiner.

Non pas que nous espérions pour l'immédiat faire complètement la lumière. Nous prévoyons, avant d'aboutir à une solution claire, de mul-

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tiples tâtonnements. C'est peu à peu, par approches successives, que nous espérons découvrir l'unité d'un principe fondamental. Alors nous serons au niveau de l'état historique : les faits analysés et le principe qui les résumera devraient trouver là leur explication.

Cette remontée dans le temps, étape par étape, semblera peut-être lente à nos lecteurs. Mais qu'ils veuillent bien songer aux difficultés de notre tâche! Les linguistes qui ont, ces dix dernières années notamment, abordé le problème du gérondif, ont tous, à notre connaissance, laissé de côté le problème des formes concurrentes en -v et en -(i»et. Les définitions que fournissent les grammaires normatives sont toujours par- tielles, quelquefois contradictoires. Enfin nous avons eu constamment présente à l'esprit la plus redoutable des objections, - celle qui verrait dans le problème des formes concurrentes un problème illusoire, et ré- duirait ainsi notre ouvrage à un assemblage de chimères.

Par là s'explique le soin que nous mettons à assurer nos premiers pas, et cette prudente exploration qui remonte le cours du temps, jus- qu'à ce que, l'induction initiale arrivant à son terme, se découvrent les lignes du principe fondamental.

Alors, dans un deuxième temps, ce principe une fois posé et as- suré, nous entreprendrons de le démontrer en l'appliquant aux différentes structures qui ont - soit fixé, - soit tendu à fixer la forme en - (v) Si. A cette phase de déduction correspondra tout naturellement une métho- de chronologiquement progressive, puisqu'il ne s'agira plus alors que de contrôler une valeur déjà reconnue.

Ainsi la dissymétrie de la composition exprime le double caractère de la méthode, qui est elle-même commandée par la nature du problème.

ELARGISSEMENT DE LA CONSTRUCTION.

D'autre part notre construction fait apparaître un élargissement progressif. C'est que l'application du principe fondamental nous engage à prendre parti dans la controverse du gérondif attribut, dont nous som- mes amené à embrasser le problème dans son ensemble. Par le biais du tour pronominal umyvïsis ' , nous touchons à ostanovtv£is, parallèle à ostanoujas', dont le sort doit être étudié lui-même en fonction de celui du nom pronominal ostanovja. L'extension du type long - ëedSi doit se mesurer par rapport à l'extinction progressive du type court -sed: par là se trouve posé le problème du gérondif passé des bases consonanti- ques; et la régression de -SedSi, survenue plus tard, est en relation nécessaire avec le progrès de -jdja.

Des raisons plus impérieuses encore nous commandent de traiter dans sa généralité le problème du gérondif passé imperfectif. Car ce domaine particulier n'a fait jusqu'ici l'objet que de descriptions incom- plètes, qui parfois ne s'ajustent pas entre elles. En tout cas la doctrine des plus récentes grammaires est impraticable, puisque le dernier des exemples rencontrés, à la date de 1957, contredit cette doctrine sur ses deux points essentiels. En jugeant de la répartition des formes d'après une description des emplois que nous savions en grande partie inexacte, nous aurions ajouté sciemment l'arbitraire à la confusion, et nous serions condamné par avance. Reprendre à leur base l'histoire et la description des emplois était donc le seul moyen d'apprécier scienti- fiquement la distribution des types en fonction des valeurs.

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Ainsi, par un jeu d'élargissements progressifs que notre enquête nous impose, sommes-nous conduit à traiter dans son ensemble le pro- blème du gérondif passé, tant perfectif qu'imperfectif.

Ce cadre même, nous devons le déborder souvent, pour les be- soins de la démonstration. C'est ainsi que nous sommes amené à toucher aux valeurs de l'ancien tour duratif et de l'ancien parfait, de l'aoriste et du prétérit, à comparer en plusieurs points le présent en -�t et le passé en -(v)kl, à mettre en regard le participe en -vgtj et le géron- dif en -(v)gi . Si bien que notre horizon s'étend dans la mesure même où les formes et les valeurs se conditionnent mutuellement.

Mais notre préoccupation première est de résoudre une inconnue , par une méthode appropriée à la nature du problème, et en vue d'une conclusion qui devrait se présenter elle-même, idéalement, sous la forme d'une solution exacte. C'est en dernier ressort la qualité de cette solu- tion qui jugera - et la pertinence de la méthode - et le bien-fondé du problème.

DEPOUILLEMENTS ET STATISTIQUES.

Il nous a fallu aussi apporter la plus grande rigueur dans la mise en œuvre de nos matériaux. Nous aurions pu prouver n'importe quoi, - ce qui eût été ne rien prouver, - en invoquant des listes d'exemples recueillis au hasard. En fait, l'emploi d'une forme en -vit dans un texte donné est signifiant dans la mesure du coefficient de fréquence dont cette forme peut être affectée à l'intérieur du même texte : tel écrivain emploiera, dans un récit de 100 pages, une vingtaine de formes en -vsi ; tel autre n'en présentera que de rares exemples; plus d'une fois, cette forme ne sera nulle part attestée dans son usage. D'où un premier in- dice de pourcentage, qui traduira par convention le rapport des formes longues au nombre des pages.

D'autre part il faut tenir compte que la densité d'emploi du gé- rondif passé toutes formes confondues est très variable aussi selon les textes : on peut rencontrer 3 ou 4 gérondifs passés par page; on peut au contraire n'en trouver qu'un pour 2 ou 3 pages. Pour marquer ce second élément de variation, il faut un indice de pourcentage différent du pre- mier, qui exprime le nombre des gérondifs en -v Si soit en fonction du nombre des gérondifs en -v, soit en fonction du nombre total des géron- difs passés.

Ainsi, nous posons comme condition absolue qu'une forme en -vst ne doit jamais être considérée comme isolée, mais toujours comme doublement située, - et par rapport au nombre des pages, - et par rap- port au nombre des autres formes de gérondifs passés. La valeur dé- monstrative de chaque forme dépend étroitement des deux indices de pourcentage de fréquence qui la définissent en situation : les indices les plus bas marquent les emplois les plus signifiants; les indices les plus hauts marquent les emplois les moins signifiants.

Nos dépouillements et nos dénombrements, qui portent en gros sur quatre siècles (XVIIème-XXème), nous ont ainsi fourni des matériaux statistiques suffisants pour nous permettre d'effectuer, avant toute ten- tative d'explication, une série de coupes, destinées à caractériser, pour chaque siècle ou chaque demi-siècle, en quantité et en qualité, les emplois de la forme en -vSi.

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La comparaison de ces divers états suggérera, sur le plan de la diachronie :

- une double courbe, maximum et minimum, qui figurerait la densité des emplois du gérondif passé toutes formes con- fondues;

--une double courbe, maximum et minimum, qui figurerait la densité des emplois du gérondif en -ugt comparés en nombre avec les emplois en -v.

Les dépouillements qui se rapportent à la période antérieure au XVIIème siècle, - ceux que nous avons établis nous-même et ceux que nous avons empruntés à d'autres, - nous ont été utiles dans la phase déductive de notre démonstration. Nous en avons tiré le plus grand parti notamment dans l'histoire du gérondif passé d'aspect imperfectif.

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PREMIÈRE PARTIE

LES FORMES CONCURRENTES DU GÉRONDIF PASSÉ D'ASPECT PERFECTIF

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CHAPITRE I

A PROPOS D'UNE OBSERVATION DE L. TOLSTOI LE GÉRONDIF PASSÉ LONG

COMBINÉ AVEC LE GÉRONDIF PASSÉ COURT DANS UN MÊME SYSTÈME APPOSÉ

L'observation de L. Tolstoï. - Les faits à écarter du débat. - Exemples types. - L'argument de la dissimilation des formes; discussion. - Les systèmes de deux gérondifs longs. Leur valeur. - Les systèmes de deux gérondifs courts. Leur valeur. - Précision qu'il faut apporter à l'observation de Tolstoï. - Exem- ples tirés d'écrivains qui pratiquent peu la forme en -vëi. - Exemples tirés d'é- crivains qui pratiquent souvent la forme en -u§i. - Conclusion : la forme en -u£î. sentie comme une valeur d'état, ce qui rend compte des exemples contradictoires.

Les grammairiens sont d'accord pour n'établir entre l'emploi de la forme courte et celui de la forme pleine du gérondif passé qu'une distinction d'ordre stylistique. "Dans le russe contemporain, écrit par exemple A.G. Roudnevll), le gérondif avec suffixe -v a un emploi livres- que, tandis que le gérondif avec suffixe -uyt s'emploie plutôt dans la langue parlée".

Cette distinction rend compte de l'apparence des faits. Mais elle laisse entier le problème de l'emploi simultané des deux formes dans un même texte, quelquefois dans la même page, voire dans la même phrase, sans qu'intervienne une différence de style.

La présence côte à côte, à l'intérieur d'un même système apposé , d'un gérondif passé long et d'un gérondif passé court, dans un même style, qui peut être aussi bien de caractère livresque que populaire , pose le problème sous sa forme la plus nette.

Léon Tolstof, que l'expérience pédagogique de Jasnaja Poljana amena plus d'une fois à se pencher sur des points délicats de la grammaire russe, fait à propos des séquences de ce type l'observation suivante, dans ses Zaptst na otdel'nych listach de l'an 1879(2) :

Et l'écrivain commente lui-même d'un mot ces emplois :

(1) A. G. Roudnev, Correspondance du 31 mars 1959. (2) }j.B, TCMCTOH, IIoJHoe coopaHHe JOiHHeHHH, TOOHile',IHOe H34aHHe, t. 48, p. 352.

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L. Tolstof ajoute un exemple où le premier gérondif est à la forme pronominale :

Enfin dans un autre emploi(l) le premier gérondif de forme pleine est constitué sur un composé de - j t i :

Il apparaît ainsi que, pour L. Tolstoï", quand un gérondif court suit un gérondif long dans un même système apposé à un verbe principal, le gérondif long se rapporte à un passé éloigné (davnoproëedêee)(2), tandis que le gérondif court concerne un simple passé (pro£ed£ee) : "il acheta le fusil, puis l 'examina, et le jeta"; "il s 'assi t , puis se mit à som- meil ler , et s 'endormit". Ces deux phrases, comme toutes celles que cite L. Tolstof, expriment bien l 'antériorité de la première action évoquée par rapport à la deuxième.

Dans quelle mesure L. Tolstoï", sinon comme grammairien, du moins comme écrivain averti sur les nuances de sa langue, mér i te - t - i l notre crédit ?

Il convient d'abord d 'écar ter du débat le cas des écrivains qui n'u- tilisent jamais, - ou qui utilisent rarement , - la forme longue du gé- rondif passé : deux degrés successifs de l 'antériorité peuvent évidem- ment être notés chez eux par deux formes juxtaposées ou coordonnées de gérondifs courts. Voici deux exemples empruntés à un texte des pre- mières années du XVIIIème siècle :

• • • Bie^ B iiepKOBB H YBHAEB BaCHJlHH, - TOTiac npn3B&/i K ceoe KaMoprepa. ( G. r.m., p. 18)

A.l\MHpaJI «e, IIPHCTYIIHB K KOPOEBHE H 1104HHB, aja B ymH. (G.r.m., p. 21)

L'antériori té de l'action exprimée par le premier gérondif sur celle que décrit le second est nette dans les deux cas; pourtant v$ed&i et pristupiv&t, qu'on attendrait d 'après l 'observation de L. Tolstoï, n'apparaissent pas, car il s 'agit d'un texte qui fait de la forme pleine du gérondif passé un usage t rès discret : sur un total de 62 gérondifs passés perfectifs, 7 seu- lement sont en -vSi.

Voici, deux siècles plus tard, un emploi de Gorki où deux formes courtes de gérondifs passés décrivent la succession de deux actions :

(1 ) Ibid.,p, 355. (2) On évite à dessein la traduction de daunopro£ed£ee par "plus-que-parfait", à cause

de l'acception de résultat qui est comprise, du moins théoriquement, dans l'ex- pression française.

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Mais l'emploi de la forme longue est t rès rare , exceptionnel même, chez Gorki : dans les quelque 400 pages de Po Rust, pour 569 gérondifs passés dénombrés, on n'en a compté que 5 ou 6 de forme longue.

La même syntaxe apparaft pour la même raison chez la plupart des écrivains du XXème siècle. C'est ainsi que Zostchenko écrit :

nospaB BBOJHO H IIo6ece,l\OBaB o ateHOË Ha xo3SHCTBEHHH6 TÔMH H 3aKaSaB en OÔe4 Ha saBTpa, OH OGTABACH B NEIA MOM OAHHO'ÏECTBE. ( SoneHKO, p. 115)

Mais les r a res emplois de la forme pleine du gérondif passé qui apparais- sent dans ce recueil de Zostchenko (21 pour un total de 397 gérondifs passés) sont affectés pour une bonne part à des constructions particu- l ières : 5 entrent par exemple dans des emplois du gérondif passé long en fonction d'attribut.

Il ne saurait donc être question de prêter à l 'observation de L . Tolstoï un caractère absolu : deux formes courtes du gérondif passé employées dans un même système apposé peuvent s'appliquer normale- ment à la description de deux actions successives.

Pourtant la Vte d'Awakum, bien que le nombre des gérondifs longs qu'elle comprend soit faible en comparaison de la quantité des gérondifs courts (16 pour un total de quelque 2 30 gérondifs passés), fournit une phrase où l'observation de L. Tolstoï se vérifie :

Bsaame OT npecTOJia KpecT, H Ha KPLWOC BSOme,l\, SaKpliqM : "3anpenaio TH HMeHeM rocno^HHM". (ABBaKYM, p. 50)

Dans un style populaire, Gorki lui-même fait dire à l'un de ses personnages :

H xorna OHM æH,l¡OBKa, C,l\eJlaBrnH HenpaBMbHo BMH/tam, C TOrO HS,l\OXJ!a, noTepaB BCK) KpoB&, HO - npe«Hee He B3arpaJio : 5IrnKa OKOHHaTe LHO npona i - CIIHllCH. (no PyCH, p. 67)

Deux siècles d'intervalle, - et toute la différence qui va du regis- tre de la langue vulgaire au style le plus soutenu, - séparent ces deux exemples, où se vérifie également, - en dépit de la faible proportion des gérondifs en - vst dans les textes cités, le schéma décrit par L. Tolstof dans ses Zaptst na otdel' nych listach de l'an 1879.

Mais, pour situer le débat sur son véritable terrain, ce sont les auteurs accoutumés à pratiquer aussi bien la forme pleine que la forme courte du gérondif passé qu'il faut surtout consulter. Ici, on pourrait objecter à L. Tolstoï qu'un souci d'euphonie guide peut-être seul le choix d'un écrivain comme Gogol, quand il emploie une forme courte en -u après une forme pleine en -v£i : alors les phrases citées par L. Tolstof s'expliqueraient par un simple phénomène de dissimilation, sans qu'il soit utile d'introduire d'autre principe de distinction entre les deux for- mes du gérondif passé.

Or il apparaît que Gogol par exemple n'est nullement gêné par la répétition de plusieurs formes en - di :

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IIPBeCHBIÏÏH rOJlOBY H OIIYCTHBmH pyKH, CH,l\eJI.OH B cboeà- KOMHaTe, KaK 6e,lijŒK, HameINNË ôeciieHHyio «eMiy«HHy H TYT se BHPOHHBMHH ee B Mope.

(HeBCKHH IIpOCIIeKT, p.24)

La répétition de deux formes longues de gérondifs passés (povesivst et opust tust) inquiète si peu l'écrivain qu'après une proposition principale assez courte il prolonge sa phrase au moyen d'une structure en appo- sition où apparaissent deux formes de participes en -vgtj (na$ed$lj et vyrontvëtj), aussi choquantes pour l'oreille que peuvent l'être les géron- difs longs.

Bien plus, pour des raisons qui restent à éclaircir, il arrive que Gogol accumule volontairement les formes pleines de gérondifs passés dans des passages qui présentent une certaine unité stylistique : c'est ainsi qu'on peut en trois lignes relever dans Les Ames fortes , p. 263, les gérondifs passés longs suivants :

He YSHaBmH, BUCMOTpeBmH, YSHaBrnH, OTTOJlKHYBrnH, OTaBHÎH,

soit cinq formes de suite, à l'exclusion de tout gérondif passé court; voir encore par exemple dans le même roman I, 7, p. 112.

On pourrait multiplier les exemples où Gogol emploie dans un même système apposé deux formes pleines du gérondif passé :

Bce oTKHHYBmH, Bee nosaONBmH, CHAe.5 OH C coKpyrneHHUM, C Ô63Ha4e#HHM BH,l\OM (HeBCKHR rrpOCIIeKT, p. 32) HAKOHEII TOJlCTUR, noc ymBiH Bory H Tocy apu, SaCJlYÆHBrnH Boeoômee yBa- ÆeHHe,OCTaBJlHeT ofiyatôy. (MepTBue Aynra , p. 12)

Ainsi donc Gogol n'hésite pas à employer deux formes successives de gérondifs longs pour décrire deux actions qui sont situées au même niveau du passé, sans qu'il y ait antériorité de l'une de ces actions par rapport à l'autre.

Plus troublants, à la lumière de l'observation fajLte par L. Tolstof, sont justement les cas où se succèdent deux gérondifs longs dont le pre- mier décrit un fait antérieur au second. Gogol écrit dans Stragnaja mest' :

JlesHT naH ero, npoTHHyBIIHCB Ha seMJle H 3aKpuBmn HCHue ora. (p. 237)

Dans Les Ames mortes (I, 6) deux gérondifs longs coordonnés s'appliquent aussi à la description de deux actions qui se sont succédé dans le temps :

n.MKHH, ceBMH B Kpecyia H B3HBHIH B PYKY nepo, ,l\OJlro eme BOPOqaJI Ha Bce CTOpOHU qeTOOpTKY. (p. 103)

Mais ces deux phrases ne sont pas exactement comparables à cel- les qui fondent l'observation de L. Tolstof. Ici en effet ce n'est pas la réalisation successive des actions exprimées par protjanuv£ls' et zakryvëi dans le premier exemple, par sevl&i et vzjav&tdans le second, que l'es- prit envisage. Il s'agit bien plutôt de décrire l'attitude globale qui ré- sulte de l'exécution de ces actions : ". . . allongé les yeux fermés . . .

.. assis dans le fauteuil la plume à la main . . . Autrement dit , les couples de gérondifs passés longs ont dans ces deux emplois une va-

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PUBLICATIONS DE LA FACULTÉ DES LETTRES D'AIX -EN-PROVENCE

1 — G. ROSTAING. CONSTANT DU HAMEL (Fabliau). Edition critique avec commen- taire et glossaire. Le volume (170 p.) . 6 NF

2 — Pierre COLOTTE. PIERRE DE DEIMIER, Poète et théoricien de la poésie. Le volume (96 p.) 5 NF

3 — G. DUBY. RECUEIL DES PANCARTES DE L'ABBAYE DE LA FERTE-SUR-GROSNE (1113-1178). Le volume (264 p.) 7,50 NF

4 — Bernard GÙYON. LA VOCATION POETIQUE DE VICTOR HUGO. Le volume (138 p.) 4 NF

5 — Jean VIDALENC. LETTRES DE J.A.M. THOMAS, Préfet des Bouches-du-Rhône, A ADOLPHE THIERS. Le volume (140 p.) 4,50 NF

6 — A. BRUN. DEUX PROSES DE THEATRE, Drame romantique, comédies et pro- verbes. Le volume (144 p.) 4 NF

7 — F. BENOIT. L'HEROISME EQUESTRE, 148 pages, 28 planches, 94 illustrations. Le volume 12 NF 8 — A. BRUN. EN PROVENCE, DE L'ENCYCLOPEDIE AU ROMANTISME. Le volume

(164 p.) 5 NF 9 — F. BENOIT. L'ART PRIMITIF MEDITERRANEEN DE LA VALLEE DU RHONE.

74 pages, 12 figures, 64 planches (200 illustrations). Le volume 20 NF 10 — B. DURAND et Ch. ROSTAING. LA CORRESPONDANCE DE FREDERIC MISTRAL

ET LEON DE BERLUC-PERUSSIS (1860-1902). Le volume (220 p.) 12 NF 11 — B. A. TALADOIRE. LE SENTIMENT RELIGIEUX CHEZ FREDERIC MISTRAL. Le

volume 5 NF 12 — V. L. BOU]RILLY. LES PROTESTANTS DE PROVENCE AUX XVIIe ET XVIII'

SIECLES. Le volume 12 NF 13 — P. COLOTTE. MALHERBE ET LA PROVENCE (1555-1955) Le volume .... 3 NF 14 — CONFERENCES ET COMMUNICATIONS. IVe CENTENAIRE DE LA NAISSANCE

DE MALHERBE. Le volume 5 NF 15 — P. GUIRAL. MARSEILLE ET L'ALGERIE Le volume 12 NF 16 — Ch. MAURON. L'INCONSCIENT DANS LA VIE DE RACINE. Un volume in-8°

Raisin (352 p.) 13 NF 17 — A. BRUN. POEMES PROVENÇAUX DU XVIe 'SIECLE. Un volume in-8° Raisin

(204 p.) 10 NF 18 — Ch. ROSTAING et B. DURAND. CORRESPONDANCE DE BERLUC-PERUSSIS AVEC

PAUL MARIETON. Un volume in-8° Raisin (258 p.) 13 NF 19 — Pierre JONIN. PROLEGOMENES A UNE EDITION D'YVAIN. Un volume in-8°

Raisin (128 p.) ..— • 8 NF 20 — CI. PICHOIS et J. DAUTRY. LE CONVENTIONNEL CHASLES ET SES IDEES DEMO-

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DE TRISTAN AU XIIe SIECLE. Un volume in-8° Raisin (528 p.) 23 NF 23 — L. MOULINIER. QUELQUES HYPOTHESES RELATIVES A LA GEOGRAPHIE D'HOMENE DANS L'ODYSSEE. Un volume in-8° Raisin (138 p.) 10 NF 24 — Ch. ROSTAING et Frédéric MISTRAL. CORRESPONDANCE DE FREDERIC MISTRAL

ET ADOLPHE DUMAS (1856-1861). Un volume in-8° Raisin (116 p.) .... 10 NF 25 — J. HEERS. LE LIVRE DE COMPTES DE GIOVANNI PICCAMIGLIO, HOMME D'AF-

FAIRES GENOIS (1456-1459). Un volume in-8° Raisin (380 p.) 16 NF 26 — F. BENOIT. MARS ET MERCURE. Un volume in-8° Raisin avec 22 planches hors

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