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  • Histoire des Arts

    Education Musicale Collge 3mes

    Chanson de Craonne

    Priode : XXe et notre poque

    Thmatique : Arts-espace-Temps

    Problmatique : Luvre dart et la mmoire : regards dcrivains, potes et artistes sur

    la premire guerre mondiale et ses consquences

    _________________________________

    Autre thmatique possible : Arts, Etats et Pouvoirs

    Problmatiques : Les uvres engages

    Chants des deux guerres

    Chants rvolutionnaires

    Mmoire collective de lentre-deux guerres

    _________________________________

    La chanson de Craonne est un chant anonyme populaire, associ au pass douloureux de

    la France pendant les guerres 1914-18 mais aussi 1939-45.

    Ce chant appelant se mutiner, tait entonn par les soldats lors des combats particulirement

    meurtriers sur le Chemin des Dames en 1917. Il fut interdit de diffusion jusquen 1974.

    Il reste de nos jours un lment fondamental pour ltude historique des vnements de

    lpoque, tant sur un plan militaire que social ou psychologique.

    Complment du cours

  • I. CONTEXTE HISTORIQUE

    De 1913 1920, la France est sous la 3me Rpublique.

    Raymond POINCARE est Prsident.

    Dbut XX : les lments ncessaires un conflit arm sont runis.

    EUROPE : deux blocs antagonistes

    Chaque puissance dveloppe sans limite son potentiel militaire.

    Cest la consquence dun pass tourment. Chacun souhaite prendre une revanche ou

    reprendre des rgions, des colonies.

    La France voudrait reprendre lAlsace et la Lorraine, perdues la guerre de 1870.

    Le Royaume-Uni voudrait bien acqurir de nouvelles colonies en Afrique.

    LAllemagne souhaite aussi obtenir des colonies pour assurer ses approvisionnements

    en matires premires. De plus, son ouverture sur les mers et ocans reste trop rduite.

    LEmpire Ottoman doit prserver ses richesses des apptits europens sil ne veut pas

    devenir une colonie.

    LAutriche est confronte des divisions nationalistes et la Russie redoute une

    rvolution.

    La situation en Europe centrale est une poudrire puisque les Croates, Slovnes et

    Bosniaques sont sous linfluence de lEmpire Austro-Hongrois, mais la Serbie est sous

    protection russe.

    Belgique, Pays-Bas et Luxembourg construisent des fortifications pour viter dtre

    envahis.

    En rsum, tous les lments sont runis pour crer un conflit arm de grande ampleur.

    Il ne manque plus quun acte cibl pour dclencher les hostilits : lassassinat de lArchiduc

    Franois-Ferdinand de Habsbourg, hritier du trne de lEmpire Austro-Hongrois.

    La Triple-Entente :

    France, Empire Russe et le Royaume-Uni

    Triple-Alliance :

    Empire dAutriche-Hongrie, Allemagne,

    Empire Ottoman

  • GUERRE 1914 / 1918 guerre totale guerre de masse

    28 juin 1914 : attentat Sarajevo commis sur lhritier du trne dAutriche-Hongrie, Franois-

    Ferdinand de HABSBOURG, par un tudiant serbe.

    Cela entraine un mois plus tard la dclaration de guerre de lAutriche-Hongrie contre la Serbie.

    Avec les alliances, cela engendrera une guerre mondiale.

    1914

    31 juillet 1914 : assassinat de Jean JAURES Paris

    1er aot 1914 : mobilisation gnrale en France

    3 aot 1914 : lAllemagne dclare la guerre la France et la Serbie.

    4 aot 1914 : lAllemagne envahie la Belgique et le Luxembourg

    2 septembre 1914 : les allemands sont aux portes de Paris

    5 au 12 septembre 1914 : bataille de la Marne, Joffre repousse lennemi

    Premiers combats ariens.

    1915

    9 mai 1915 : offensive du Marchal JOFFRE en Artois. Guerre de position.

    25 septembre 1915 : offensive en Champagne.

    A compter de cette anne, lennemi utilise des gaz et lance-flammes, ce qui est contraire aux

    conventions de La Haye (1899).

    Premire guerre sous-marine.

    1916

    Fvrier 1916 : guerre dusure, VERDUN.

    Les allemands tirent 1 million dobus le premier jour (21 fvrier).

    Juillet novembre 1916 : les batailles de la Somme. 900 000 morts des deux cts.

    Au soir du 1er juillet : 60 000 morts ou disparus.

    15 septembre 1916 : utilisation de chars de combats pour la premire fois (britanniques).

  • 1917

    7 avril 1917 : le Chemin Des Dames 140 000 morts en un mois pour des rsultats

    contests. Georges CLEMENCEAU devient Prsident du Conseil.

    Dans ce contexte, des mutineries clatent dans les rgiments. Pour maintenir lordre, des

    mesures rpressives sont mises en place et 55 soldats sont fusills pour lexemple .

    Le moral des troupes est au plus bas.

    1918

    Echec des allemands sur le front russe et nimes combats dans lest de la France.

    174 divisions ennemies combattent les troupes allies formes de 99 divisions franaises, 58

    britanniques, 12 belges et 3 amricaines, 2 portugaises.

    21 mars 1918 : offensive allemande.

    27 mai 1918 : lennemi reprend le chemin des dames

    Paris bombard la grosse bertha .

    Aprs de rudes combats, lennemi est vaincu par les Franais au soir du 18 juillet 1918 lors de

    la deuxime bataille de la Marne.

    11 novembre 1918 : armistice.

    A savoir

    En pertes militaires, la France dplorera 1 500 000 morts, 530 000 disparus et prisonniers,

    4 200 000 blesss.

    Pertes totales : (17 pays, Allemagne inclue) : 8 600 000 morts, 7 700 000 disparus ou

    prisonniers, 21 000 000 blesss.

    Sur cette priode, Hitler tait caporal

    Verdun

  • II La chanson de Craonne : analyse / texte

    Les paroles ont t modifies en fonction des lieux et des combats.

    Si les modifications successives des paroles sont dues aux soldats dont les noms restent

    inconnus, la mlodie en revanche est rpertorie :

    Bonsoir mamour (1911) chanson damour cre par Karl DITAN

    Paroles de Raoul LE PELTIER, Musique de Charles Ademar SABLON

    Les paroles originales taient les suivantes :

    Un joli teint frais de rose en bouton Des cheveux du plus beau blond, Ouvrire humble et jolie, Ell' suivait tout droit sa vie, Lorsqu'un jeune homm' vint, comm' dans un roman, Qui l'avait vue en passant, Et qui, s'efforant de la rencontrer, S'tait mis l'adorer. Et, timide, un soir que la nuit tombait Avec un sourire il lui murmurait : Refrain a fit un mariage et ce fut charmant ; Du blond, du rose et du blanc ! Le mariag' c'est bon tout d'mme Quand c'est pour la vie qu'on s'aime ! Ils n'eurent pas besoin quand ils furent unis D'faire un voyag' dans l' midi : Le midi, l'ciel bleu, l'soleil et les fleurs, Ils en avaient plein leur cur. Lhomme, en travaillant, assurait l'av'nir Et chantait le soir avant de s'endormir : Refrain Au jardin d'amour les heureux poux Virent clore sous les choux, Sous les roses ou sous autr'chose De jolis p'tits bambins roses Le temps a pass, les enfants sont grands, Les vieux ont les ch'veux tout blancs Et quand l'un murmure : "y a quarante ans d'a !" L'autre mu rpond : "Dj !" Et le vieux redoute le fatal instant O sa voix devrait dire en sanglotant : Refrain "Adieu, m'amour! Adieu, ma fleur ! Adieu toute mon me ! O toi qui fis tout mon bonheur Par ta bont de femme ! Du souvenir de ses amours L'me est toute fleurie, Quand on a su toute la vie S'adorer toujours !"

    Version enregistre (1913), interprte par Emma LIEBEL, couter.

    Refrain "Bonsoir m'amour, bonsoir ma fleur, Bonsoir toute mon me ! O toi qui tiens tout mon bonheur Dans ton regard de femme ! De ta beaut, de ton amour, Si ma route est fleurie, Je veux te jurer, ma jolie, De t'aimer toujours !"

  • Lambiance bucolique du dbut XXe ressort dans ces paroles dun chant damour sans autre

    arrire-pense.

    Les vnements politiques majeurs et la guerre 1914/18 modifieront le cours de lhistoire.

    Reportez-vous au chapitre 1- Contexte historique pour mieux comprendre ces changements.

    Par ces causes, le texte a t modifi plusieurs reprises pour exprimer des sentiments

    loppos des paroles initiales. A lamour succde les cauchemars, les violences de la guerre de

    position, des images de combats acharns et les massacres sans limite.

    Ces nouvelles paroles sont venues au cur mme des tranches par des soldats conscients

    daller une mort certaine et dont on ne connait plus les auteurs.

    Ces textes ont t retrouvs dans des lettres envoyes du front, mais les paroles sont

    incompltes, modifies par la censure militaire, pour viter de dmoraliser les troupes et

    ddramatiser les informations envoyes aux familles restes au pays.

    On dit que les autorits proposaient la dmobilisation et un million de francs or qui

    dnoncerait les auteurs de ces textes. Cest donc clandestinement quils ont t diffuss.

    En voici les paroles :

    Quand au bout d'huit jours le repos termin

    On va reprendre les tranches

    Notre place est si utile

    Que sans nous on prend la pile

    Mais c'est bien fini on en a assez

    Personne ne veut plus marcher

    Et le cur bien gros comm' dans un sanglot

    On dit adieu aux civelots

    Mme sans tambour mme sans trompette

    On s'en va l-haut en baissant la tte

    REFRAIN

    Huit jours de tranches huit jours de souffrance

    Pourtant on a l'esprance

    Que ce soir viendra la relve

    Que nous attendons sans trve

    Soudain dans la nuit et dans le silence

    On voit quelqu'un qui s'avance

    C'est un officier de chasseurs pied

    Qui vient pour nous remplacer

    Doucement dans l'ombre sous la pluie qui tombe

    Les petits chasseurs vont chercher leurs tombes

    REFRAIN

    C'est malheureux d'voir sur les grands boulevards

    Tous ces gros qui font leur foire

    REFRAIN

    Adieu la vie adieu l'amour

    Adieu toutes les femmes

    C'est bien fini c'est pour toujours

    De cette guerre infme

    C'est Craonne sur le plateau

    Qu'on doit laisser sa peau

    Car nous sommes tous condamns

    Nous sommes les sacrifis

    Si pour eux la vie est rose

    Pour nous c'est pas la mm' chose

    Au lieu de s'cacher tous ces embusqus

    F'raient mieux d'monter aux tranches

    Pour dfendr' leurs biens car nous n'avons rien

    Nous autres les pauvres purotins

    Tous les camarades sont enterrs l

    Pour dfendre les biens de ces messieurs-l

    DERNIER REFRAIN

    Ceux qu'ont l'pognon ceux-l r'viendront

    Car c'est pour eux qu'on crve

    Mais c'est fini car les trouffions

    Vont tous se mettre en grve

    Ce s'ra votre tour messieurs les gros

    D'monter sur le plateau

    Car si vous voulez faire la guerre

    Payez-la de votre peau

  • Ces paroles sont sensiblement restes sous cette forme, publies aprs-guerre par Paul

    Vaillant-Couturier, crivain politique (communiste), sous le titre : Chanson de Laurette .

    Au printemps 1915, la rgion dArtois connue de violents combats et particulirement autour

    de Notre-Dame de Lorette do ce titre choisi : Chanson de Laurette

    En 1916, des variantes font allusion aux combats de Verdun.

    Voici un exemple de strophe et refrain ajouts lpoque :

    Quand on est au crneau

    Ce nest pas un fricot

    Dtre quatre mtre des pruscos.

    En ce moment la pluie fait rage,

    Si lon se montre, cest un carnage.

    Tous nos officiers sont dans leurs abris

    En train de faire des chichis,

    Et ils sen foutent pas mal si en avant deux

    Il y a de pauvres malheureux.

    Tous ces messieurs-l encaissent le pognon

    Et nous, pauvres troufions

    Nous navons que cinq ronds.

    En 1917, un vent contestataire et de rbellion se propageait sur les zones de combat.

    Le titre change nouveau : La vie aux tranches , Les sacrifis de Craonne .

    Voici une autre strophe ajoute cette priode :

    Nous voici partis avec sac au dos

    On dit adieu au repos

    Car pour nous, la vie est dure

    Cest terrible, je vous lassure

    A Craonne, l-haut

    On va se faire descendre

    Sans mme pouvoir se dfendre

    Car si nous avons de trs bons canons

    Les boches rpondent leur son

    Forcs de tenir, et dans la tranche

    Attendant lobus qui viendra nous tuer .

    REFRAIN

    Adieu la vie, adieu lamour

    Adieu toutes les femmes

    Cest pas fini, cest pour toujours

    De cette guerre infme

    Cest Verdun, au fort de Vaux

    Quon a risqu sa peau

    Nous tions tous condamns

    Nous tions sacrifis

  • A partir de 1920, le titre a t nouveau transform pour devenir : La Chanson de Craonne .

    Cest la version que lon connait aujourdhui, qui fait rfrence aux combats sanglants du

    Chemin des Dames dans lAisne (1917).

    Texte : problmatiques et interprtation du contenu

    Plusieurs tudes sont privilgier :

    1. Lopposition entre les franais qui font la guerre et ceux qui ne la font pas.

    Cette sparation entraine le clivage entre les riches et les pauvres.

    2. Lopposition entre les troupes et leurs commandements.

    3. La vie au quotidien des soldats / guerre 1914-18 et leurs souffrances

    4. Les appels la mutinerie

    Ces lments simbriquent les uns dans les autres :

    Ainsi, sur cette priode, un soldat franais fait la guerre mais il est souvent pauvre ou dmuni.

    A linverse, lEtat-Major fait la guerre sans la faire, du point de vue des soldats, et ces dirigeants

    sont souvent issus des classes sociales aises.

    Dautre part, et suite de multiples guerres de positions prises et reprises, les pertes en

    hommes sont considrables. Lhorreur et les souffrances dpassent lentendement, tant et si

    bien que des soldats hros au pass militaire reconnu finissent par sinsurger (environ 40000

    soldats) et se mutiner contre leurs suprieurs.

    Soldat

    enterr

    sous

    lclat

    dun

    obus

    Tranche

    Craonne

  • Clivages riches / pauvres Clivages : troupes /

    commandement Vie du soldat / souffrances Appels la mutinerie

    on dit adieu aux civelots : civelle

    ou civelot est une jeune anguille qui

    remonte les cours deau. Cest une

    allusion aux planqus qui

    chappent aux tranches grce leurs

    relations haut-places. Il ny a rien

    attendre deux.

    cest malheureux dvoir sur les

    grands boulevards, tous ces gros

    qui font leur foire , ces

    embusqus , ces messieurs-l ,

    ceux quont lpognon ,

    messieurs les gros : rancur

    envers les bourgeois, parvenus (plus

    que la noblesse qui tait souvent trs

    implique sur le plan militaire). Ils font

    leur foire, car en plus davoir une vie

    faste dans les grandes villes, ils

    senrichissent grce la guerre sans

    combattre. Ils sont opportunistes. Ainsi,

    ils ont des biens , mobiliers,

    immobiliers, usines, bijoux etcalors

    que le soldat na rien. Sa vie ne lui

    appartient mme plus sur le champ de

    bataille ( petits chasseurs qui vont

    chercher leurs tombes ).

    notre place est si utile que sans

    nous on prend la pile : ironique. Les

    soldats vont se faire tuer au combat un

    jour pour prendre une position

    lennemi, qui sera reprise le lendemain.

    Sous-entendu que les ordres sont

    inefficaces avec une mauvaise

    stratgie de guerre.

    nous sommes tous condamns,

    nous sommes les

    sacrifis , pauvres

    purotins , les troufions : sous-

    entend que le gouvernement et lEtat-

    Major (pas les officiers) assimilent le

    soldat de la chair canon. Tous

    morts si ncessaire pour tenir la

    stratgie militaire.

    on a lesprance que ce soir

    viendra la relveun officier

    pied : mauvaise analyse de la

    situation face lennemi, le soldat

    estime que lapprovisionnement et la

    relve ne sont pas assurs

    correctement.

    huit jours de repos : ironique, le

    cauchemar est omniprsent dans les

    penses.

    on va reprendre les tranches :

    guerre de position, conditions

    inhumaines (boue, ensevelissements,

    cadavres, horreurs visuelles et

    auditives)

    le cur bien gros comme dans un

    sanglot , on sen va l-haut ,

    les petits chasseurs vont chercher

    leurs tombes : le soldat sait quen

    allant lassaut, il sera tu car les

    prcdents ne sont pas revenus ou

    sont ensevelis sous ses pieds dans la

    tranche.

    on a lesprance que ce soir

    viendra la relveun officier

    pied : ironique. Les soldats savent

    quils ne seront pas remplacs ou en

    nombre insuffisant.

    Difficults du terrain : Craonne, sur

    le plateau : sur les hauteurs du

    plateau de Californie qui surplombe le

    village de Craonne (Aisne).

    crneau : ouverture dans la

    tranche pour apercevoir lennemi et

    ajuster le tir (si possible)

    Cest bien fini, on en a assez ,

    personne ne veut plus marcher :

    le soldat est us physiquement et

    psychologiquement par la guerre de

    position et souhaite larrt de

    massacres jugs inutiles, avec ou sans

    laval de ses suprieurs.

    mais cest fini, car les troufions

    vont tous se mettre en grve :

    cest fini signifie que les abus nont

    que trop dur, quil est temps dagir

    pour se mutiner. Le terme grve est

    trs fort car il est associ au refus

    dobissance, incompatible avec les

    ordres militaires.

    Ambigut souligner : ces soldats

    mutins ne sont pas assimils des

    pacifistes. La plupart dentre eux ont un

    pass hroque aux combats. Ils

    veulent avant tout tre mieux compris

    et encadrs.

  • III La chanson de Craonne : analyse / musique

    Structure :

    Dorigine populaire, ce chant reste dune structure simple.

    Si le texte a chang au fil des combats, la mlodie en revanche est reste la mme.

    Couplets et refrains sont alterns rgulirement.

    Chaque couplet possde ses propres paroles, le refrain revient entre chaque strophe.

    Chaque refrain est construit en anaphores : rptitions de mots ou groupes de mots au dbut

    de phrases successives. Cela accentue le ct dramatique et la souffrance des soldats.

    Les paroles du dernier refrain sont modifies, un projet pour lavenir, en guise de conclusion.

    Forme de luvre :

    Introduction laccordon ou orgue de barbarie (tradition populaire)

    Couplet 1

    Refrain

    Couplet 2

    Refrain

    Couplet 3

    Refrain (avec paroles modifies)

    Caractristiques principales :

    Ton principal en Si b Majeur (2 bmols larmure, fin sur la tonique SI, arrt sur la dominante

    avant le refrain). Cest la version crite sur la partition de Raymond LEFEBVRE et Paul

    VAILLANT-COUTURIER.

    Mesure ternaire 6/8, ce qui accentue le ct populaire : valse musette

    Le rythme dansant de la mlodie contraste avec le ct tragique du texte.

    Une autre version, contemporaine, de Bernard Gobinet est en Sol Majeur. La partition est

    propose aux pages suivantes. Elle perd toutefois son rythme ternaire avec une mesure binaire

    3 temps. Partition pour voix et piano.

    La fin de chaque couplet est relie au refrain par un pont ce qui permet la modulation.

    Le tempo est variable dune interprtation une autre mais reste Moderato ou Allegro .

    La nuance densemble est Forte, la voix est mise en avant, articule, dclame plus que

    chante, avec accentuation des syllabes, ports de voix et glissandos. Cela renforce le ct

    populaire et le rend accessible tous, musiciens ou non.

    Avec les anaphores du texte, cest idal pour accentuer lpret des paroles.

  • Version de 1920 :

  • Version chant accompagn

    au piano.

  • IV La chanson de Craonne : le dilemme

    Cette chanson damour, modifie en texte subversif appelant la mutinerie pendant la guerre

    1914-1918, reste toujours source dinterrogations et de rflexions aujourdhui.

    Si tout un chacun souhaite prserver le devoir de mmoire , les avis divergent quant

    lattitude et aux rponses apporter pour la postrit.

    Les questions fondamentales restent :

    La chanson de Craonne est-elle subversive ou un cri de dsespoir, un appel laide ?

    Ce chant peut-il tre entonn lors des crmonies commmoratives ?

    Les soldats mutins des tranches de 1917 doivent-ils tre reconnus comme soldats

    morts au champ dhonneur pour la France ?

    Ces soldats mritent-ils leur nom grav sur les monuments aux morts ?

    Doit-on clbrer ces soldats au mme titre que ceux morts aux combats, lors des

    crmonies commmoratives ?

    Le 05 novembre 1998, le Premier Ministre en place lpoque, Lionel JOSPIN, a prononc le

    texte officiel suivant Craonne :

    Lieu sacr, Craonne fut au printemps 1917 le cur ensanglant de la Premire guerre mondiale. () Certains de ces soldats, puiss par des attaques condamnes l'avance, glissant dans une boue trempe de sang, plongs dans un dsespoir sans fond, refusrent d'tre des sacrifis. Que ces soldats, fusills pour l'exemple , au nom d'une discipline dont la rigueur n'avait d'gale que la duret des combats, rintgrent aujourd'hui, pleinement, notre mmoire collective nationale. () Gardons constamment prsent lesprit, pour respecter le sang vers, pour saluer le labeur des survivants, le message de paix quils nous laissent.

    Ce discours a fait couler beaucoup dencre. Si le gouvernement sous la prsidence de Jacques

    CHIRAC souhaitait clarifier la situation, nombreux restent opposs ces choix.

    Les lments de la discorde sont les suivants :

    La mutinerie de 1917 est venue des tranches au cur de laction, par des soldats qui

    taient dj hroques lors des combats prcdents. Cet appel cesser les combats

    nest pas venu de groupes pacifistes contestataires politiques ou antimilitaristes.

    La situation dans les tranches dpassait tout ce que lon pouvait avoir connu en

    atrocits lors des guerres prcdentes. Etait-il possible de perdurer ainsi ?

    Les stratgies militaires en place se sont avres discutables et perfectibles dans leurs droulements. Ce qui a conduit de svres checs.

    Les paroles de la Chanson de Craonne ne font que dpeindre la ralit de lpoque sans autre artifice. Il ny a pas de critique directe envers le pouvoir en place et sa

    politique. Aucun personnage nest cit dans le texte.

  • Pour autant, nombreux sont ceux qui affirment les lments suivants :

    Une guerre nest jamais belle, la libert na pas de prix.

    Sur un plan militaire, un ordre est indiscutable ds lors quil est donn par voie

    hirarchique.

    Il ny a aucune ambigut face une rbellion : il est officiellement annonc quun soldat

    qui refuse un ordre au combat est passible de conseil de guerre pouvant entraner son

    excution, ce qui a t fait.

    Le texte de la Chanson de Craonne est un appel des soldats larrt des combats, ce

    qui nest pas admis sur un plan militaire. De ce fait, cest une volont de mutinerie, qui

    entrane invitablement des dsordres au front, ce qui ne peut tre tolr. Un soldat qui

    doute nest plus oprationnel et met en jeu sa vie et celles de ses camarades de combat.

    Cette situation chaotique favorise lavance de lennemi.

    De ce fait, la Chanson de Craonne doit-tre interdite, ce qui a t ordonn jusquen

    1974, date laquelle Valry Giscard dEstaing autorisera sa diffusion sur les mdias.

    Dautres arguments propres rflexions pourraient tre noncs comme les clivages

    riches/pauvres, soldats au front/civiles, troufions/opportunistes etc

    Un soldat au front pouvait lire le tract suivant en 1917 (archives de lArme de Terre) :

    Camarades,

    souvenez-vous de

    Craonne

    Camarades Savez-vous ce qui

    se passe eh bien voici : le 3e

    corps a refus de monter.

    Cest--dire quil a manifest en silence sans aucun homme sou.

    Faites-en tous autant au moment

    de monter et nous aurons vivement

    la paix. 3e

    corps

  • V Craonne / lieu dhistoire

    Craonne est un village situ dans lest de la France, dpartement de lAisne.

    Ce lieu mythique est charg dhistoire.

    Dj en 1814 sous Napolon, victoire contre les

    prussiens.

    Septembre 1914 : Chemin des dames, violents

    combats.

    1915-1917 : Guerre de tranches sur un front au

    nord de lAisne et bataille de Verdun (1916).

    Craonne : offensive du gnral NIVELLE en avril

    1917 (35 000 morts en une semaine).

    29 avril 1917 : Premires mutineries :

    dsobissance collective au Chemin des Dames

    Juillet 1917 : Fin progressive des mutineries, (>50 excutions pour lexemple par Ptain)

    Oct. 1917 : Succs dune offensive franaise au fort de la Malmaison

    1918 : Les Amricains au Chemin des Dames

    Mai 1918 : offensive allemande qui dpasse le Chemin des Dames et arrive la Marne

    Juillet 1918 : Contre-attaque franaise, qui va entraner la dfaite des armes allemandes

    11 nov. 1918 Armistice : fin des combats. Au total, 300.000 morts au Chemin des Dames

    1919 Premire publication de la Chanson de Craonne dans un recueil musical

  • VI- Chanson de Craonne et contexte artistique

    Cette uvre est situer par rapport aux autres ralisations et mouvements artistiques,

    dpoque ou plus rcents, qui font rfrence au sujet.

    Particulirement :

    Musique :

    La butte rouge (1919) de Georges Krier, paroles de Monthus

    Ballade des tranches Anonyme

    Non, non, plus de combats (1917) anonyme

    Marche des hommes bleus (1919) de L.Boyer, V.Scotto

    Verdun, on ne passe pas (1917) E.Joullot/J.Cazol, musique de R.Mercier

    La guerre de 14-18 G.Brassens (1961)

    Peinture :

    Le cubisme

    Albin Egger-Linz, Den Namenlosen, 1914 (Ceux qui ont perdu leur nom, 1914), 1916,

    huile sur toile, Heeresgeschichtliches Museum, Vienne

    Otto Dix, Sturmtruppe geht unter Gas vor (Assaut sous les gaz), 1924, aquatinte,

    Deutsches Historiches Museum, Berlin

    Eric Heckel Deux soldats blesss , 1915, Muse Folkwang Essen, xylographie

    sur papier

    C. R. W. Nevinson, The Harvest of Battle, 1919, huile sur toile, Imperial War Museum,

    Londres et retour aux tranches National Gallery Ottawa

    Gino Severini canon en action , et train blind en action Muse dArt Moderne,

    New-York

    Fernand Lger la partie de cartes Krller-Mller Museum, Otterlo

    Littrature et bibliographie :

    Blaise CENDRARS La main coupe

    Roland DORGELES Le rveil des morts

    Eric VIOT Les blessures de lme / Le champ de bataille , socit des crivains

    Nicolas Offenstadt, Le Chemin des Dames, de lvnement la mmoire , 2004

    Louis Barthas, Les Carnets de guerre de Louis Barthas , 1996

    Pierre Miquel, Le Chemin des Dames , 1997

    Marc Ferro, La Grande guerre, Folio , 1987

    Films :

    Stanley KUBRICK Les sentiers de la gloire (1957)

    J.P JEUNET Un long dimanche de fianailles

    Bande dessine :

    Jacques TARDI Les aventures dAdle Blanc-Sec Tomes 2 & 8