la connaissance intuitive

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  • 8/18/2019 La Connaissance Intuitive

    1/20

    A. de Ivánka

    La connaissance intuitive chez Kant et chez AristoteIn: Revue néo-scolastique de philosophie. 33° année, Deuxième série, N°31, 1931. pp. 381-399.

    Citer ce document / Cite this document :

    de Ivánka A. La connaissance intuitive chez Kant et chez Aristote. In: Revue néo-scolastique de philosophie. 33° année,

    Deuxième série, N°31, 1931. pp. 381-399.

    doi : 10.3406/phlou.1931.2626

    http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/phlou_0776-555X_1931_num_33_31_2626

    http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/author/auteur_phlou_653http://dx.doi.org/10.3406/phlou.1931.2626http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/phlou_0776-555X_1931_num_33_31_2626http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/phlou_0776-555X_1931_num_33_31_2626http://dx.doi.org/10.3406/phlou.1931.2626http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/author/auteur_phlou_653

  • 8/18/2019 La Connaissance Intuitive

    2/20

    L intuition chez Kant et chez

    Aristote

    381

    XVI

    LA CONNAISSANCE INTUITIVE

    CHEZ KANT ET CHEZ ARISTOTE

    L étude

    que

    nous

    présentons ici s inspire d une pensée

    fo

    rmulée par plusieurs philosophes,

    et

    dont

    il

    n'est guère besoin de

    souligner l'intérêt.

    L analyse

    méthodiquement

    poursuivie

    de

    notre

    connaissance

    discursive aboutirait nécessairement

    à

    une forme de

    connaissance

    plus parfaite, à la

    connaissance

    intuitive. Celle-ci

    serait le

    fondement de l'autre, c est-à-dire que seule la

    supposition

    d une

    connaissance intuitive,

    une

    et intégrale,

    rendrait intelligible

    l existence

    et

    justifierait l exercice de notre

    connaissance

    discur

    sive,

    laquelle se

    compose d éléments

    divers (données sensibles,

    raisonnement intellectuel)

    et

    procède par actes successifs.

    Il

    nous

    faut bien plutôt expliquer pourquoi

    nous nous

    sommes

    bornés,

    dans

    ce

    travail, aux systèmes

    d'Aristote

    et de Kant, étant

    donné

    les

    divergences profondes

    qui

    les séparent, quant

    au

    mode

    et

    à la valeur de notre connaissance. Plutôt que de se limiter à

    deux

    auteurs

    seulement et qui sont à tel point différents, n'eût-il

    pas été préférable — se demandera-t-on — d examiner cette

    pensée

    sous toutes ses

    formes, c est-à-dire dans toutes les théories de la

    connaissance? On en aurait dégagé les éléments communs et ob

    tenu de

    la sorte

    une

    idée qui tînt

    compte de tous les aspects de

    la

    question. Au contraire beaucoup de traits caractéristiques du pro-

    mier

    stade d'un ordre

    nouveau

    qu'

    Aristote

    aurait

    commencé à

    introduire

    dans

    son

    dernier

    cours

    de

    morale,

    mais

    ne

    serait

    pas

    arrivé

    à

    réaliser

    de

    façon

    comp

    lète?

    Tout

    ce

    que nous savons, en effet,

    sur l'origine

    de ses

    traités

    doit

    nous

    les

    faire considérer

    comme des

    exposés

    toujours en voie de

    formation et

    de

    renouvellement.

    Il

    en

    résulte que souvent ses derniers ouvrages, non seulement

    sont

    inachevés,

    mais

    se présentent

    sous l'aspect

    de

    développements mal

    ajustés

    les uns

    aux

    autres. L'Ethique

    à

    Nicomaque est

    bien

    du nombre.

    Quant

    à

    la

    composition

    générale du traité, M. M. croit

    que

    les livres litigieux

    V,

    VI et VII appartiennent

    originairement à

    l'Ethique eudémienne;

    mais,

    comme

    il n'a

    jusqu'ici

    exposé

    ses

    vues à ce

    sujet que de

    façon fragmentaire

    et occasionn

    elle, ans des comptes rendus ou dans des

    études

    consacrées

    à

    d'autres

    quest

    ions, il n'y

    a

    guère

    moyen

    de s'y

    arrêter ici.

  • 8/18/2019 La Connaissance Intuitive

    3/20

    382

    , André de

    blèmc

    devront

    nécessairement échapper, semble-t-il,

    en restre

    ignant la recherche d une

    manière aussi arbitraire.

    Mais un examen

    plus

    approfondi de la question

    nous

    fera voir

    que

    ces

    deux

    systèmes

    philosophiques,

    quelles que

    soient

    d ailleurs

    leurs divergences, envisagent

    ce

    pioblème de la

    même manière.

    Car tous deux, dans leur

    théorie

    de la connaissance, maintiennent

    une distinction foncière entre les

    données

    sensibles d une part

    et

    l acte

    du

    raisonnement

    intellectuel

    d autre part.

    Les autres systèmes

    philosophiques, au contraire, tendent à réduire la

    connaissance

    en

    tière à l un de ces deux

    principes.

    C est

    ainsi que l atomisme ancien

    et

    l'empirisme moderne ne

    voient

    dans

    la connaissance que l association des impressions sen

    sibles, physiques. Pour

    eux,

    la valeur de la connaissance ne dépasse

    pas

    celle de

    la

    sensation.

    De

    même

    le

    rationalisme, tel

    que

    le

    pro

    fessent

    Descartes et

    Leibniz, envisage la sensation

    comme

    une

    perception

    confuse,

    différant de la perception

    rationnelle

    par le

    degré

    de

    clarté

    seulement.

    La

    perception

    comporterait

    une forme

    imparfaite

    (sensation) et une forme parfaite (raison), mais ne comp

    orterait

    pas

    de degrés essentiellement distincts. Tous ces

    systèmes

    ne doivent donc

    pas

    recourir à

    un autre

    mode de connaissance pour

    unifier deux éléments qu ils ont, à si bon compte, essentiellement

    identifiés. Seule la théorie affirmant que dans notre activité cognit

    ive

    a

    pensée

    ou

    la

    raison

    est

    essentiellement

    distincte

    de

    la

    sen

    sation devra

    chercher

    le

    point

    de

    coïncidence

    de

    ces

    deux formes

    de notre perception. Elle le trouvera

    dans

    la connaissance intui

    tive. Or, parmi

    les grands systèmes

    philosophiques, seuls

    ceux

    d'Aristote

    et

    de Kant, comme

    nous

    l avons

    déjà

    dit, interprètent

    notre connaissance de la sorte. Nous pouvons donc légitimement

    aborder le problème en nous

    attachant

    à leur manière de voir.

    Il

    va de soi que la

    manière dont

    ces deux systèmes envisagent les

    éléments

    de ce problème

    et la

    solution

    qu ils

    y apportent

    diffèrent.

    Il faudra, pour

    apprécier

    avec justesse les différences dans leur

    façon

    de concevoir

    la connaissance

    intuitive,

    analyser

    d abord

    la

    manière dont

    ils

    se représentent

    notre connaissance

    discursive

    et

    retracer les

    raisons

    qui, logiquement, les ont

    conduits

    à admettre

    et

    à définir la

    connaissance

    intuitive.

    * * «

    Comme on

    le

    sait, d après

    Kant ce sont les

    impressions

    sen

    sibles

    (die Empfindungen)

    *) qui constituent

    le

    donné immédiat,

    *) Die Fâhigkeit

    (Receptivitàt)

    Vorstellungen durch die Art,

    wie

    wir von

  • 8/18/2019 La Connaissance Intuitive

    4/20

    L intuition

    chez Kant

    et

    chez

    Aristote 383

    l pbjet

    direct de

    notre

    connaissance.

    L ordre

    dans

    lequel ces

    pressions

    s imposent

    à

    nous est

    déjà

    subjectif, car cet

    ordre

    ne

    peut

    pas

    être lui-même une impression

    *). C est

    là une

    des

    thèses pr

    imordiales

    du

    système

    kantien. Les

    deux intuitions,

    celle du temps

    et celle de l espace,

    dans

    lesquelles

    toutes nos

    impressions

    nous

    sont

    données, sont donc subjectives.

    Il

    nous

    est

    impossible de nous

    figurer même des impressions sensibles qui ne soient accompagnées

    de ces, intuitions. Or

    cette

    impossibilité prouve que ces intuitions

    sont la

    condition

    subjective de la perception et non la

    perception

    elle-même,

    ce

    qui est

    perçu.

    Les

    mathématiques

    sont indépendantes de l expérience, leurs

    axiomes

    étant fondés

    sur

    les

    formes

    pures

    de

    la perception. Cette

    valeur

    « à priori » confirme la doctrine de la

    subjectivité

    des intui

    tions d espace

    et

    de durée. Car

    ces

    formes de la perception

    sont

    naturellement indépendantes des perceptions elles-mêmes, elles

    les

    précèdent dans notre connaissance, elles sont la condition même

    de leur ordre. La possibilité d appliquer les

    mathématiques

    aux

    objets sensibles prouve, une

    fois

    de

    plus, le

    caractère

    subjectif

    de

    ces

    deux

    formes

    de la perception.

    Etre

    dans l espace, être dans le

    temps, sont par conséquent les

    formes

    que

    doit

    prendre le donné

    sensible, pour

    s adapter aux

    conditions

    du sujet connaissant.

    Mais

    les

    impressions

    sensibles, bien

    que

    organisées

    de

    cette

    manière par les formes

    à priori

    de la réceptivité perceptive

    (Recep-

    tivitàt

    der Eindriicke : Sinnlichkeit) n'ont

    cependant pas

    de valeur

    cognitive,

    tant

    qu elles ne sont

    pas

    élevées, par un

    acte

    de sponta

    néiténtellectuelle

    Spontaneitat der Erkenntnisse

    »

    : Verstand)

    à

    la sphère de la pensée, c est-à-dire de l aperception consciente.

    En effet, tant que notre sensibilité seule est

    affectée, sans

    que

    nous en ayons conscience,

    cet

    état n est qu un fait physique

    et

    ne

    GegenstàndSn afficiert werden, zu

    bekommen,

    heisst Sinnlichkeit

    (33).

    Die Wir-

    kung eines Gegenstandes auf die

    Vorstellungsfâhigkeit,

    sofern wir von

    dem-

    selben

    afficiert

    werden,

    ist

    Empnndung

    (34)

    [les nombres ajoutés

    aux

    citations

    se

    rapportent

    aux

    pages

    de la

    seconde

    édition (de 1787) de la «Critique de la

    Raison Pure

    »

    de

    Kant]

    ') In

    der

    Erscheinung nenne ich

    das,

    was

    der

    Empnndung korrespondiert,

    die Materie derselben, dasjenige aber, welches macht, dass

    das

    Mannigfaltige

    der Erscheinung in gewissen Verhâltnissen geordnet werden kann, nenne ich

    die

    Form

    der Erscheinung.

    Da

    das,

    worinnen sich

    die Empnndungen allein

    ordnen, und

    in

    gewisse

    Formen gestellt

    werden

    kônnen, nicht selbst

    wiederum

    Empnndung sein kann, so ist

    uns

    zwar die

    Materie aller

    Erscheinungen a poster

    iori gegeben, die Form derselben aber muss zu ihnen insgesamt im Gemùte

    a

    priori bereit

    liegen (34).

  • 8/18/2019 La Connaissance Intuitive

    5/20

    384  André

    de foanka

    rentre pas

    encore dans la

    connaissance

    comme un de ses éléments.

    Il

    faut donc que chaque perception, pour devenir vraiment cognit

    ive, soit accompagnée d un

    acte

    de l autoconscience intellec

    tuelle

    ).

    Même

    cela

    ne

    suffit

    pas

    encore

    ;

    car

    les actes successifs

    d

    autoconscience accompagnant les impressions ne constitueraient

    qu une

    autoconscience

    intermittente

    et

    fragmentaire ; ils ne per

    mettraient pas de

    constater

    l'identité du moi

    connaissant

    dans ses

    actes successifs

    2). Il faut

    que

    le

    même acte intellectuel

    qui rend

    les

    impressions conscientes,

    les

    perçoive comme nécessairement,

    comme

    essentiellement

    liées 3). Seul

    ce lien,

    réunissant

    une impres

    sion l'autre, permet de constater l'identité du moi conscient dans

    les perceptions successives, qu il réunit dans l'identité d un seul

    acte

    d

    autoconscience. En

    effet

    dès que ce lien

    existe,

    la repro

    duction

    d une

    perception

    antérieure

    ne constitue

    plus

    un

    acte

    dis

    parate

    avec

    la perception actuelle

    qui

    lui disputerait

    la place

    dans

    la conscience

    ;

    car

    alors toutes

    les perceptions sont unies dans

    l'identité

    du

    moi conscient,

    aussi bien dans l acte présent

    que

    dans

    l acte

    antérieur 4). La

    connexion universelle de toutes nos impres

    sions st

    donc une condition

    indispensable

    de leur perception

    intel

    lectuelle

    5).

    Cependant, cette connexion

    est

    l œuvre de l'intellect

    seulement : la

    perception

    sensible ne

    peut

    jamais

    nous

    la donner,

    elle ne peut nous en fournir que des éléments 6). Les rapports de

    *)

    Das

    « Ich denke »

    muss aile meine

    Vorstellungen begleiten

    kônnen ; denn

    sonst wiirde etwas in mir vorgestellt werden, was gar

    nicht

    gedacht werden

    kônnte,

    welches ebensoviel heisst,

    als

    : die

    Vorstellung wûrde entweder unmôg-

    lich, oder fur mich

    nichts

    sein...

    (131-32).

    2)

    Dièse Beziehung

    (à savoir de

    la

    sensation au

    «

    moi

    » conscient) geschieht

    also

    dadurch

    noch nicht,

    dass

    ich

    jede Vorstellung mit Bewusstsein begleile,

    8ondern dass

    ich

    eine zu der anderen hinzusetze und

    mir

    der

    Synthesis

    dcrsclben

    bewusst

    bin

    '( 33)

    ') Nur dadurch, dass ich

    das

    Mannigfaitige der Vorstellungen in einem

    Bewusstsein begreifen

    kann,

    nenne

    ich dieselben

    insgesamt meine Vorstellungen

    denn sonst

    wiirde ich

    ein

    so vielfarbiges, verschiedenes Selbst haben, als

    ich

    Vorstellungen habe,

    deren ich

    mir bewusst

    bin

    (134).

    *) Nur

    dadurch, dass

    ich ein

    Mannigfaltiges gegebener Vorstellungen

    in

    einem Bewusstsein verbinden

    kann,

    ist es môglich, dass

    ich

    mir die Identitdt

    des

    Bewusstsein8

    in

    diesen Vorstellungen

    selbst vorstelle (133).

    ')

    Das erste

    reine Verstandeserkenntnis also,

    worauf sein ganzer

    iibriger

    Gebrauch sich

    griindet...

    ist der

    Grundsatz

    der urspriinglichen synthetischen

    Einheit der

    Apperception

    (137).

    8) Allein die Verbindung

    (conjunctio)

    eines Mannigfaltigen ùberhaupt kann

    niemals

    durch

    Sinne

    in uns kommen (129).

  • 8/18/2019 La Connaissance Intuitive

    6/20

    L intuition chez Kant et chez Aristote 385

    succession, de coexistence, etc., qui résultent de la sériation tem

    porelle et spatiale de

    nos

    perceptions, ne constituent

    pas

    des con

    nexions nécessaires

    ; au contraire,1

    il faut

    supposer d abord

    une

    connexion intellectuelle

    pour pouvoir

    prendre

    conscience

    de

    la

    suc

    cession. Cependant

    s il

    existe

    une connexion

    nécessaire et univers

    elle ntre nos impressions, elle

    ne

    peut se trouver que dans

    ces

    rapports, car seuls ils relient

    toutes

    nos impressions.

    Donc, si notre

    intelligence doit percevoir nos

    impressions

    comme

    liées

    entre elles

    par des

    connexions nécessaires,

    afin de pouvoir en prendre con

    science, elle ne peut d autre part

    établir des

    connexions toutes

    nouvelles, purement

    intellectuelles,

    et

    n ayant rien de corrélatif

    dans

    les

    données des

    sens.

    Elle

    pourra

    seulement

    percevoir

    ces

    rapports de manière

    à

    ce

    qu ils

    deviennent

    des

    connexions

    nécess

    aires, par la façon même dont elle

    les

    perçoit. Or,

    le seul

    moyen

    d y arriver,

    est

    de concevoir ces

    rapports

    comme l expression d un

    rapport existant

    entre nos impressions,

    en

    dehors même de

    leur

    succession

    ou

    de leur coexistence dans

    notre

    perception,

    et qui

    soit

    la raison en vertu de laquelle nous percevons un tel rapport.

    Il faut supposer par

    conséquent

    que les impressions sont la repré

    sentation

    d un

    objet

    qui par sa nature même rend compte de la

    perception

    de ces impressions et du rapport qui

    les

    unit. L unité

    de l objet auquel

    nous rapportons

    les impressions sensibles, ex

    plique

    l union intellectuelle de

    ces

    impressions

    ;

    union sans

    la

    quelle

    elles

    ne

    pourraient être connues. Dès

    que

    nous concevons

    ces impressions comme représentant

    un

    ordre existant réellement

    dans l objet

    qui

    se

    trouve à

    l'origine de nos impressions, le rap

    port perçu devient une connexion nécessaire *).

    Pour percevoir nos

    impressions dans

    une connexion

    nécess

    aire, il faut par conséquent les

    objectiver ; en

    d autres termes,

    la forme de la perception

    intellectuelle

    est

    l objectivation.

    C est

    pourquoi

    l'intelligence, la

    faculté

    de la

    connaissance («

    Vermôgen

    der Erkenntnisse

    »,

    137),

    est

    aussi

    appelée

    par Kant : faculté de

    l objectivation

    des

    impressions

    Vermôgen den

    Gegenstand

    sinn-

    *) Wir

    finden,

    dass unser Gedanke von der Beziehung aller Erkenntnis auf

    ihren Gegenstand

    etwas von Notwendigkeit bei

    sich fùhre,

    da namlich dieser

    als dasjenige

    angesehen wird, was dawider ist,

    dass

    unsere Erkenntnisse nicht

    aufs

    Geratewohl

    oder

    beliebig,

    sondern

    a

    prion auf

    gewisse

    Weise

    bestimmt sind,

    weil,

    indem sie

    sich auf einen Gegenstand

    beziehen sollen, sie

    auch notwen-

    diger Weise in Beziehung auf

    diesen

    untereinander ùbereinstimmen,

    d.

    i.

    die-

    jenige

    Einheit

    haben miissen,

    welche

    den Begriff

    von

    einem Gegenstande

    aus-

    macht

    (pages

    104-05 de l'édition première — de 1781).

  • 8/18/2019 La Connaissance Intuitive

    7/20

    386

     André de

    Ivanka

    licher Anschauung

    zu

    denken », 75). Connaissance du. donné et

    objectivation du donné, ne sont qu un seul et même

    acte

    de

    l i

    ntelligence vu sous

    deux aspects

    différents. Les

    connexions

    intel

    lectue l les

    de

    nos

    impressions

    sont

    l objectivation

    des

    rapports

    exis

    tant

    entre

    nos

    impressions dans la sériation temporelle. Les con

    cepts

    intellectuels

    exprimant les formes de ces connexions, les

    catégories,

    sont l objectivation conceptuelle des différents types de

    rapports pouvant exister dans la sériation temporelle

    tant

    des

    pressions

    elles-mêmes

    que

    dans

    leur ordre d ensemble.

    La

    percept

    ionmaginative

    de l aspect formel de ces types de rapports, le

    «

    Schema

    » comme

    Kant

    l appelle, est

    donc le

    « tertium

    compa-

    rationis

    » qui permet de subsumer un rapport donné entre des

    impressions

    concrètes,

    sous

    un

    rapport intellectuel

    *),

    et

    en

    con

    séquence de les objectiver.

    Ces

    « Schemata » ne sont donc que

    les différentes

    formes

    des rapports

    temporels.

    C est

    ainsi qu aux différentes catégories de la Quantité : Unité,

    Pluralité et Totalité, correspond le «

    nombre

    » comme moyen de

    mesurer et

    de

    saisir

    une grandeur quelconque.

    C est

    la

    répétition

    imaginative

    de l unité perçue

    qui,

    à la perception actuelle de cette

    unité,

    joint

    la perception de la

    série

    temporelle constituée par les

    réitérations

    déjà

    passées, de

    cette

    même perception.

    De

    même :

    Aux

    catégories de la Qualité :

    Réalité,

    Négation,

    Limitation, correspond

    la

    perception

    du temps comme

    rempli

    ou

    vide d impressions. A la catégorie de Substance, correspond la per

    ception d un

    réel

    qui persiste inaltéré dans les changements perçus

    en

    lui. A

    la catégorie de Causalité, répond la succession d un réel

    à

    un

    autre, dès que le premier est posé.

    A la catégorie de Dépen

    dance mutuelle, répond la

    simultanéité

    de l existence

    ou

    de la non-

    existence d un

    réel avec celle

    d un autre. A la catégorie de la Poss

    ibilité, répond la

    concordance des

    rapports entre

    des

    réels avec les

    conditions

    du temps (à

    savoir

    : que deux contraires ne

    peuvent

    exister en même temps). A la catégorie de l Existence, répond le

    réel donné

    à

    un

    moment déterminé.

    A

    la

    catégorie

    de

    la

    Nécessité,

    le

    réel

    donné

    est

    perçu

    en tout temps 2).

    *) Es ist klar, dass es ein Drittes geben musse, was

    einerseits

    mit der

    Kate-

    gorie, andrerseits mit

    der Erscheinung

    in Gleichartigkeit stehen muss,

    und

    die

    Anwendung der ersteren auf die letzte

    môglich macht

    (177).

    Dieses

    Dritte sind

    die

    sogenannten

    Schemata, formale Bedingungen der Sinnlichkeit...

    welche

    die

    allgemeine

    Bedingung

    enthalten, unter

    der

    die Kategorie allein auf irgend einen

    Gegenstand angewendet werden kann (179).

    3)

    Pour bien

    faire

    ressortir la

    différence fondamentale

    qui

    sépare Kant

    d'Aris-

  • 8/18/2019 La Connaissance Intuitive

    8/20

    L*

    intuition chez Kant et chez Aristote 387

    Le

    principe fondamental de la

    perception intellectuelle

    — à

    savoir que les

    impressions

    doivent être

    conçues comme étant

    néces

    sairement

    toutes

    liées

    entre

    elles — s exprime d après la diversité

    des

    connexions

    possibles,

    dans

    une

    quantité

    de

    propositions.

    Telles

    les suivantes : Toute impression

    doit

    être une grandeur étendue.

    Toute impression

    doit avoir

    une intensité.

    Tout

    ce

    qui subit

    un

    changement

    reste

    aussi

    inaltéré

    ;

    car dans tout

    changement, il y

    a un élément

    qui

    demeure inchangé.

    Tout

    changement

    descend

    comme

    effet

    d une cause antérieure, etc. Pour être perçues inte

    llectuellement

    les impressions^

    doivent

    donc être

    conçues comme

    soumises à ces lois.

    Par

    là,

    on comprend comment ces lois s appliquent nécessai

    rement, universellement

    à

    tout

    ce qui

    est

    objet de

    notre

    connais

    sance

    encore

    qu elles ne

    soient

    pas contenues logiquement dans

    le concept même de ce

    qui

    nous

    est

    donné, comme le concept de

    cause par exemple dans celui d un changement quelconque (Cr. d. 1.

    R. P.2 13). Ainsi

    se

    résout pour

    Kant, le problème

    des jugements

    synthétiques

    à

    priori.

    Mais par la même raison,

    ces

    lois ne valent

    que pour les objets de notre connaissance subjective. En effet,

    puisqu elles sont

    l objectivation

    des rapports

    fondés

    sur

    la forme

    tote,

    dans la manière

    dont

    le

    premier

    établit les catégories,

    il fallait insister sur

    la

    valeur

    qu'ils

    accordent aux

    «

    schemata

    ».

    En

    effet

    Kant

    dans

    son

    exposé de

    la «

    Transcendentale Deduction

    der reinen

    Verstandesbegriffe

    » (aussi bien dan»

    la

    première

    édition

    que

    dans la seconde) pourrait faire

    croire

    (quelques comment

    ateurs

    'ont compris de la sorte) qu'il déduisait les catégories des diverses

    formes

    logiques du

    jugement.

    Il

    est vrai

    que

    c'est là, chez Kant,

    la « voie

    de l inven

    tion

    ,

    la

    méthode suivie

    pour établir les catégories.

    Les

    connexions

    que

    notre

    intelligence établit entre nos impressions

    par

    ces catégories quand elle se

    forme

    un

    concept

    objectif de ces

    impressions,

    sont

    nécessairement analogues aux

    con

    nexions que notre intelligence constate entre nos concepts, quand il en forme

    un

    jugement. («

    Derselbe

    Verstand, und

    zwar durch eben dieselben Handlungen,

    wodurch er in Begriffen vermittelst der analytischen Einheit die logische Form

    eines

    Urteils

    zu

    Stande

    brachte,

    bringt

    auch,

    vermittelst

    der synthetischen

    Ein

    heit

    des Mannigfaltigen in der Anschauung ûberhaupt, in seine Vorstellungen

    einen transzendentalen Inhalt », 105). Mais ce

    serait

    mal

    comprendre

    cette

    ana

    logie

    que

    de

    croire que les catégories

    résultent

    des

    formes différentes

    des

    juge

    ments. Au contraire, si de telles formes de rapports logiques

    existent

    entre nos

    concepts,

    c'est

    parce que la synthèse des impressions

    dans l'élaboration du

    concept s'est

    faite suivant ces mêmes formes. Conclure des formes

    du

    jugement

    aux catégories,

    c'est

    conclure de l effet

    à la

    cause.

    Ce

    n'est donc

    pas

    au sens

    strict une déduction. Aussi

    Kant

    appelle-t-il

    cette

    partie de son

    système

    «

    Leit-

    faden

    der Entdeckung der reinen Verstandesbegriffe » et

    celle qui

    suit : « Deduct

    ioner reinen

    Verstandesbegriffe

    »

  • 8/18/2019 La Connaissance Intuitive

    9/20

    388 André

    de Ivanka

    de notre perception sensible, elles sont subjectives comme cette

    forme

    elle-même, et n ont de

    valeur

    que

    pour une intelligence

    qui

    comme la

    nôtre,

    reçoit le matériel de

    ses

    connaissances par le

    moyen

    de

    la

    perception

    sensible

    seulement

    x).

    On

    n a

    pas

    le droit

    cependant, de regarder la forme de

    notre

    perception sensible

    comme la seule possible 2). Ainsi pour une intelligence qui per

    cevrait

    les

    objets de sa connaissance dans l acte même de

    l auto-

    conscience

    (c'est-à-dire pour

    une

    intelligence intuitive) les catégor

    ies auraient aucune

    valeur

    3).

    C est

    ici que

    nous

    rencontrons pour la

    première

    fois

    chez

    Kant

    le

    concept

    de l intelligence intuitive. Ce n'est encore qu un

    con

    cept problématique, destiné à

    nous

    faire comprendre, la

    subject

    ivitéde notre

    manière de connaître,

    en

    lui

    opposant

    une

    autre

    manière de connaître dont l existence

    est au

    moins possible.

    Quel motif

    avons-nous d'attribuer

    à

    cette

    connaissance intui

    tive,

    sinon une existence réelle,

    au

    moins une valeur

    égale

    à

    celle

    des formes

    de

    notre connaissance?

    Car nous

    pouvons

    voir

    dès

    maintenant que la valeur de ce postulat, même s il était indi

    spensable pour sauvegarder la légitimité de notre

    connaissance

    tout

    entière, ne peut être que subjective ; puisque la valeur de -notre

    connaissance aussi n'est que subjective.

    Le

    but de notre activité cognitive ne

    peut

    être

    atteint

    qu au

    moment

    où l ensemble

    de nos

    impressions

    est

    transformé intégrale-

    ment, en

    une

    unité conceptuelle adaptée à la connaissance intel

    lectuelle.

    Il

    s agit donc

    non

    seulement de

    relier

    les

    impressions

    par les catégories,

    mais de

    les

    concevoir quant à leur

    essence

    par

    ticulière dans une

    unité

    intellectuelle

    qui

    nous

    fasse saisir

    intelle

    ctuellement, même le côté matériel du donné de notre connaissance.

    A première vue l on pourrait croire que la raison

    doit

    comp

    léter, dans ce sens, l unité

    intellectuelle

    établie par les catégo-

    ')

    Allein

    von einem Stûcke

    konnte

    ich

    im

    obigen

    Beweise

    doch

    nicht

    abstra-

    hieren,

    namlich davon, dass das Mannigfaltige fiir die Anschauung noch vor der

    Synthesis des Verstandes

    und

    unabhângig von

    ihr

    gegeben sein musse (145).

    2)

    .. .

    denn man kann von der Sinnlichkeit doch

    nicht

    behaupten, dass sie

    die einzige

    môgliche

    Art der Anschauung sei (310). '

    ') Denn

    durch das

    Ich, als einfache

    Vorstellung,

    ist nichts Mannigfaltiges

    gegeben... Ein

    Verstand,

    in welchem durch das Selbstbewusstsein zugleich ailes

    Mannigfaltige gegeben wiirde, wûrde anschauen; der

    unsere

    kann nur

    denken

    und

    muss

    in den Sinnen die Anschauung

    suchen

    (135). ...

    Wollte ich

    mir einen

    Verstand denken, der

    selbst anschaute... so

    wûrden

    die

    Kategorien

    in Ansehung

    eines

    solchen

    Erkenntnisses gar keine Bedeutung

    haben (145).

  • 8/18/2019 La Connaissance Intuitive

    10/20

    L intuition

    chez Kant

    et

    chez

    Aristote 389

    ries.

    Mais

    la raison

    ne

    s occupe pas directement des

    impressions

    particulières

    ;

    son objet lui

    est fourni par l intelligence,

    tout

    comme

    l objet

    de celle-ci

    est fourni

    par les

    impressions 1).

    A

    supposer

    même

    que

    la

    raison

    réussisse

    à

    établir,

    d une

    manière

    suffisante

    et logiquement irréprochable,

    cette

    unité

    rationnelle,

    elle ne réa

    liserait qu une

    des

    deux conditions

    requises

    pour l unité complète

    de notre

    connaissance.

    En

    effet

    elle donnerait

    alors

    un système

    cohérent

    des

    règles

    qui

    président à l intelligence, mais sans nous

    indiquer encore

    le

    moyen de subsumer

    intégralement

    les

    données

    sensibles

    sous

    les

    règles

    de

    l intelligence 2).

    Mais,

    il

    est

    import

    ant e

    le

    remarquer en vue de la comparaison à établir sur ce

    point

    avec la

    doctrine d Aristote

    cette

    unité que la raison

    tend

    à

    établir

    dans

    les règles

    de l intelligence, n est

    pas

    une

    unité

    intel

    lectuelle

    ; c est

    une

    unité d un autre ordre et que

    l intelligence

    en

    vertu de

    ses

    principes à elle, ne saurait jamais ni réaliser 3) ni

    même entrevoir 4).

    L intellect

    demande

    seulement que, de tout ce

    qui est

    condi

    tionné, on puisse remonter à

    une

    condition.

    Sans

    doute, la série

    des

    conditions

    conditionnées

    nous

    amène finalement à l incondi

    tionné,

    absolu, renfermant

    la totalité

    des

    conditions qui déter

    minent

    et constituent la série des

    conditionnés

    telle que

    nous

    la

    percevons ; mais ceci

    est

    un postulat de la raison seulement.

    C est

    précisément

    en rapportant

    les règles

    de

    l intelligence

    au

    concept

    de

    l inconditionné

    que la raison

    établit son

    unité

    systématique

    5).

    Car la nature particulière de la raison lui

    fait

    concevoir ses objets

    comme

    nécessaires

    ; sans

    quoi,

    elle ne

    peut

    en aucune

    façon les

    ') Der

    Verstand macht fur die

    Vernunft eben so

    einen

    Gegenstand

    aus, als

    die Sinnlichkeit

    fiïr

    den Verstand (692).

    2) Sie (die Vernunft) sucht die grosse Mannigfaltigkeit der Erkenntnisse des

    Verstandes auf

    die

    kleinste

    Zahl der Principien (allgemeiner

    Bedingungen)

    zu

    bringen und

    dadurch

    die hôchste Einheit

    derselben

    zu bewirken (361).

    *)

    Die

    Vernunft...

    geht...

    auf

    den Verstand,

    um

    den

    mannigfaltigen

    Erkennt-

    nissen desselben Einheit a priori durch Begrifîe zu

    geben,

    welche

    Vernunfteinheit

    heissen mag und von ganz anderer Art ist, als sie von dem Verstande geleistet

    werden

    kann (359).

    4) So bezieht sich demnach die Vernunft auf den Verstandesgebrauch... um

    ihm

    die

    Richtung

    auf

    eine

    gewisse Einheit

    vorzuschreiben,

    von

    der der

    Verstand

    \einen Begriff

    hat

    und die

    darauf

    hinausgeht, aile Verstandeshandlungen in An-

    sehung eines

    jeden Gegenstandes

    in

    ein

    absolutes Ganzes zusammenzufassen (383).

    5) (Die Vernunft)

    sucht die synthetische

    Einheit,

    welche in

    der

    Kategorie

    gedacht wird, bis zum Schlechthinunbedingten

    hinauszufuhren.

  • 8/18/2019 La Connaissance Intuitive

    11/20

    390

    André de ïvanka

    connaître

    1).

    Or l intelligence n a

    pas

    ce besoin, cette exigence,lle

    ignore

    ce postulat.

    La

    raison forme les

    idées du

    « Moi

    », du

    « Monde

    », et

    de

    «

    Dieu

    »

    (Dieu

    étant

    :

    ens realissimum,) pour

    avoir

    un

    corrélatif

    inconditionné, absolu,

    sous

    les

    trois rapports

    que tout objet donné

    a

    nécessairement,

    à

    savoir : 1° d être contenu dans la

    conscience

    d un moi connaissant, 2° d être rattaché par les catégories à tous

    les autres objets

    réels, 3°

    d être déterminé positivement ou néga

    tivement, par

    tous les

    prédicats

    entitatifs

    possibles. De plus, la

    raison

    nous oblige

    à

    penser

    des

    séries de conditions ultérieur

    ementonditionnées, comme si elles tendaient vers l inconditionné.

    Elle répond

    ainsi

    à un

    besoin

    qui

    existe indépendamment

    de notre

    connaissance

    intellectuelle,

    dans notre nature rationnelle, celui de

    penser

    l absolu

    et d y rapporter les objets

    de

    notre

    connaissance.

    En

    effet,

    la

    connaissance

    intellectuelle, l'intelligence peut se

    réaliser complètement sans

    ces

    trois idées ; ou plutôt, ces idées

    conçues comme

    objet

    d une

    connaissance

    intellectuelle,

    contre

    disent immédiatement aux règles de l'intelligence,

    laquelle de

    mande que tout

    objet

    soit ultérieurement conditionné (les «

    Anti

    nomies »).

    En fait,

    notre nature

    morale

    réclame ces

    trois idées

    comme

    des

    conditions nécessaires, rendant possible son existence

    et

    son développement par

    l action 2).

    L unité

    systématique

    que

    la

    raison

    imprime

    aux

    objets de

    notre connaissance en les rapportant à

    l absolu,

    n'est donc pas,

    même

    pour

    Kant, une condition subjective de

    leur connaissance

    intellectuelle, comme l étaient les

    règles

    de l intelligence. Cette

    unité n'est

    pas non

    plus

    un

    perfectionnement de l unité

    intellec

    tuelle ue les règles de l intelligence y ont introduit. En réalité

    cette unité n'est que le moyen de mettre

    nos

    connaissances en

    rapport avec

    les

    principes de la moralité.

    Même si, comme il

    a

    été dit précédemment, la raison n était

    ')

    Die

    Vernunft

    kann

    ailes

    nur

    a

    priori

    und

    als

    notwendig

    oder

    gar nicht

    erkennen (803).

    Sie

    geht

    von dem Grundsatze aus, dass

    sich die Reihe

    der Bedin-

    gungen (in der Synthesis der

    Erscheinungen,

    oder

    auch

    des Denkens der Dinge

    iiberhaupt) bis

    zum

    Unbedingten erstrecke (356) sie sucht... zu dem

    bedingten

    Erkenntnisse

    des Verstandes

    das

    Unbedingte zu finden, womit

    die Einheit

    des-

    selben vollendet

    wird

    (364).

    2)

    Die

    letzte Absicht der weislich uns versorgenden

    Natur

    bei der

    Einrich-

    tung unserer Vernunft ist eigentlich nur aufs Moralische gestellt (829).

    Les

    citations

    qui suivent

    sont

    prises de la «

    Kritik

    der

    Urteilskraft

    » Les

    nombres se

    rapportent

    aux pages de l'édition de 1790.

  • 8/18/2019 La Connaissance Intuitive

    12/20

    V

    intuition chez

    Kant et

    chez

    Aristote 391

    que

    l achèvement

    des règles

    de

    l'intelligence, et

    l'intégration comp

    lète

    de l unité établie par les connexions

    des

    catégories, elle ne

    réaliserait

    de

    ce

    fait

    que

    la

    moitié seulement de l'unification

    que

    requiert

    la perfection de notre connaissance. Car

    les axiomes

    de

    l'intelligence que la

    raison

    ramènerait

    à

    l unité d une manière par

    faite

    ne contiennent que la règle générale, suivant laquelle tous

    les

    objets de notre connaissance

    doivent

    nécessairement

    être reliés,

    par les diverses formes

    des

    catégories,

    suivant

    les

    rapports

    perçus

    entre nos impressions.

    Les termes

    de la connexion

    des

    catégories, c est-à-dire les

    ob

    jets reliés

    par

    cette

    connexion,

    ne sont pas

    par

    déterminés

    dans

    leur être spécial et individuel.

    Le

    principe de causalité par exemple,

    constate seulement

    que,

    à chaque

    changement

    dans

    l'état

    d un

    ob

    jet quelconque,

    un

    autre

    changement

    doit

    précéder comme

    sa

    cause. Mais ce principe ne détermine

    ni

    la

    qualité ni

    les condi

    tions

    particulières

    du changement antérieur

    ; il nous

    faut

    les

    cher

    cher pour

    chaque

    cas

    particulier

    dans

    l expérience. La

    connexion

    seule

    est

    donc nécessaire, tandis que les déterminations

    particul

    ières es objets liés

    entre

    eux — par

    exemple :

    à

    tel

    changement

    correspond précisément tel autre,

    comme sa

    cause

    sont

    des faits

    empiriques,

    et

    par conséquent

    contingents au

    point de vue de la

    règle

    de l intelligence. Nous

    ne pouvons

    déduire

    ces faits que

    par

    l observation réitérée de

    la

    succession

    d un

    effet

    donné

    à

    une

    cause déterminée. Or le lien établi entre

    tel effet et telle cause,

    bien

    que

    nous

    l ayons

    vu

    vérifié dans

    tous les cas observés, ne

    pourra jamais

    atteindre

    au

    caractère de nécessité

    du

    principe

    de

    causalité lui-même. Jamais

    il

    ne sera, en

    son

    essence particulière,

    concevable pour l'intelligence, toujours

    il

    restera

    empirique.

    Mais

    l unité de

    notre connaissance demande

    que

    ces

    con

    nexions empiriques entre les objets et les

    divers

    états des mêmes

    objets

    — contingents et

    accidentels du point de vue de l intell

    igence

    puissent

    être comprises en vertu de

    quelque

    autre prin

    cipe universel,

    comme

    réalisant une

    unité

    nécessaire

    et

    systémat

    ique).

    La seule

    forme

    qui permette de ramener à

    une

    unité nécess

    aireune

    diversité

    quelconque, dont les éléments ne sont

    pas

    reliés

    ')

    Es

    miissen (fiir

    das

    Empirisch-Einzelne)

    doch

    auch Gesetze sein, die

    zwar,

    als empirische, nach

    unserer

    Verstandeseinsicht zufallig

    sein

    mogen,

    die aber

    doch...

    aus

    einem, wenngleich uns unbekannten Princip der Einheit des Mannig-

    faltigen

    als notwendig

    angesehen

    werden

    mûssen. XXVI.

  • 8/18/2019 La Connaissance Intuitive

    13/20

    392

     André de

    par la causalité, c est la finalité. En effet,

    dès

    que les parties d un

    tout

    ne sont pas causées

    dans

    leur

    être

    concret, par des

    causes

    externes et que le tout

    n'est

    pas un effet

    de

    la coopération

    de

    ces

    causes,

    il

    ne

    nous est

    possible

    de

    nous

    figurer

    entre

    ces

    parties

    qu un ordre

    inverse

    à

    celui de

    la causalité ; en

    d autres

    termes,

    l existence du tout ne sera

    possible

    que si les parties

    vérifient pré

    cisément

    telles dispositions

    et

    telles qualités, c est-à-dire

    à la con

    dition que le tout soit la fin

    des

    parties )• De la sorte, les parties

    ne déterminent

    pas

    le

    tout,

    mais le tout

    détermine

    les parties, elles

    s y ramènent.

    Nous devons

    par conséquent supposer — afin de

    pouvoir

    les

    intégrer dans l unité systématique de notre connais

    sance— que

    tous les

    faits

    empiriques

    qui

    dans

    leur

    existence

    par

    ticulière ne

    sont pas

    déterminés par le principe de causalité, le

    sont

    au

    moins

    par

    la

    finalité.

    C est

    l ensemble,

    le tout

    du

    monde,

    qui

    comme fin ultime de

    toutes

    les réalités, exigera précisément

    et

    tel

    objet

    particulier

    et

    tel état

    et telle

    condition

    de

    cet

    objet, parce

    que cet objet

    est

    une de

    ses

    parties.

    Outre cette raison

    générale

    de supposer la

    finalité

    comme prin

    cipe déterminant de

    ce

    qui est contingent au point de vue de la

    causalité,

    il

    y a dans le domaine de notre

    connaissance

    un cas

    qui

    nous

    contraint

    d admettre

    le

    même

    principe. C est

    celui

    des

    êtres

    vivants.

    Il ne

    s agit plus seulement ici de faits contingents

    ne pouvant être

    compris

    dans un ordre systématique si l on ne

    suppose

    la

    finalité

    ; mais -chez eux nous voyons une activité- con

    crète qui suit ce principe : tel

    est

    bien le cas des êtres vivants.

    En eux

    le

    tout

    détermine

    manifestement

    les parties. Chaque organe

    est constitué

    et

    conformé en vue de la

    fonction

    qu il exerce, en vue

    de l ensemble du vivant. Le but

    — la

    forme complète

    — est

    devenu

    en

    eux une

    force motrice qui

    dans

    le développement organique

    dirige

    la

    matière

    d une

    manière

    différente de celles que

    suivraient

    les

    forces

    organiques agissant

    seules.

    Cette même

    force

    dirige les

    fonctions

    assurant la conservation du vivant, dont l organisme

    est

    constitué

    ;

    elle

    imprime

    aux éléments

    corporels

    des

    réactions

    qui

    s opposent,

    parfois d une manière évidente,

    aux

    lois de la

    causa-

    *)

    Wollen

    wir uns... die Môglichkeit der Teile (ihrer Beschaffenheit

    und

    Ver-

    bindung nach) als vom Ganzen

    abhângend

    vorstellen,

    so

    kann dieses... nur

    so

    geschehen,

    dass

    die

    Vorstellung

    eines

    Ganzen

    den Grund der Môglichkeit der

    Form desselben und der dazu

    gehôrigen

    Verknûpfung der

    Teile

    enthalte

    (349-350).

    Der Begriff von einem

    Objekt,

    sofern

    er

    zugleich den

    Grund

    der Wirklichkeit

    dieses

    Objekts enthâlt, heisst Zweck XXVIII.

  • 8/18/2019 La Connaissance Intuitive

    14/20

    L intuition chez Kani et chez Aristote 393

    lité

    que ces éléments suivent par

    eux-mêmes

    *). Plus encore que

    les

    faits

    empiriques

    en général,

    les

    êtres vivants nous

    obligent

    donc

    à

    admettre qu il

    est impossible

    de

    concevoir l ensemble des

    objets

    de notre

    expérience

    comme une

    unité

    parfaite

    et

    cohérente, sans

    recourir

    à la finalité, comme au principe de

    détermination

    pour le*

    détail

    des objets.

    Cependant l'efficacité réelle d un

    but,

    n est concevable pour

    nous, que par l opération d une intelligence agissant en vue de ce

    but.

    Il

    nous

    est

    en

    effet

    impossible de nous figurer qu un tout non

    encore existant puisse agir sur ses

    parties

    et

    prédisposer

    la

    matière

    dont

    il sera formé

    à prendre la

    forme complète,

    à

    moins de con

    cevoir

    la

    forme

    parfaite existant

    dans

    une intelligence,

    laquelle se

    la propose comme fin de

    son

    opération. Admettre la finalité comme

    principe de

    détermination

    des

    objets, c est

    supposer en même

    temps, qu ils sont

    produits

    par l opération d une intelligence 2).

    L idée

    d une intelligence créatrice, opérant

    selo^ le

    principe de

    finalité,

    est

    par conséquent une condition

    nécessaire

    pour l unité

    complète

    de notre

    connaissance

    3).

    Il est

    évident que cette idée

    est

    subjective, car le concept

    même de

    l'efficacité

    d une

    fin,

    par

    l opération

    d une intelligence,

    est

    déduit de

    notre

    manière d'agir,

    et

    rien

    ne

    nous permet d affi

    rmer

    u une

    telle

    manière

    d agir

    existe

    réellement

    hors

    de

    nous.

    Le

    seul motif

    nous le

    faisant supposer, c est qu il n'y a pas pour

    nous d autre

    manière possible de ramener à un principe universel

    ce

    qui est

    contingent

    dans

    l ordre

    causal. Sous

    ce rapport cette

    idée

    ne

    diffère

    en

    rien

    des trois idées

    de la raison qui, par leur

    réduction

    à

    l absolu,

    réunissaient dans

    une

    unité systématique les

    séries

    de

    données fournies

    par l intelligence. Or le besoin de rame

    nera

    détermination

    du détail des objets à un principe

    universel

    et

    ') Ein

    organisiertes

    Wesen

    ist

    also

    nicht

    bloss Maschine,

    denn

    die

    hat

    ledig-

    lich

    bewegende Kraft,

    sondern^es

    besitzt

    in sich bildende

    Kraft, und zwar eine

    solche,

    die

    es

    den Materien

    mitteilt,

    welche sie nicht haben (sie organisiert)

    (292-93).

    Es

    ist

    namlich ganz gewiss, dass

    wir die organisierten

    Wesen und deren

    innere Moglichkeit nach bloss mechanischen Principien der

    Natur nicht

    einmal

    zureichend kennen

    lernen, viel weniger

    uns erklâren konnen (337).

    2)

    lch kann...

    ùber

    die Moglichkeit jener Dinge

    und

    ihre Erzeugung nicht

    anders

    urteilen,

    als

    wenn

    ich

    mir zu

    dieser eine

    Ursache, die

    nach

    Absichten

    wirkt, mithin

    ein Wesen denke, welches nach der

    Analogie mit

    der

    Kausalitat

    eines Verstandes produktiv ist (333).

    s) Wir miissen den obersten Grund zu alien

    solchen

    Dingen in einem ur-

    sprûnglichen Verstande

    als

    Weltursache suchen (354).

  • 8/18/2019 La Connaissance Intuitive

    15/20

    394

    André

    de lvan\a

    systématique, n est pas

    une condition pour la

    connaissance intel

    lectuelle

    des

    objets, celle-ci ne

    demande

    que la valeur

    universelle

    des catégories ; mais

    elle

    est un

    besoin

    de la raison, au même titre

    que le

    besoin

    d'unifier

    les

    règles

    de l intelligence dans une unité

    systématique en les ramenant à l absolu.

    Le

    concept satisfaisant

    à ce

    besoin

    est

    donc également

    subjectif dans

    les deux

    cas.

    Il

    y a toutefois une différence fondamentale entre

    les trois

    idées de

    l Ame, du

    Monde

    et

    de

    Dieu comme

    être

    premier

    d une

    part,

    et

    l idée d un intellect créateur, opérant suivant le principe

    de la finalité

    d autre

    part.

    Le

    motif

    nous

    faisant supposer

    l exi

    stence

    des

    premières idées, c est la tendance de notre raison à

    comprendre les règles de l intelligence dans

    une unité

    systémat

    ique.

    eur

    fonction

    est

    précisément

    de

    ramener

    les

    règles de

    l i

    ntelligence à une unité,

    qui

    ne nous

    est

    donnée nulle part sinon

    dans le besoin.de notre raison même.

    Or dans le cas de l intelligence

    créatrice,

    ce

    motif

    se trouve

    dans notre

    connaissance

    empirique, bien que

    l idée

    que

    nous

    croyons

    avoir le droit d en

    déduire

    soit

    subjective : notamment le

    fait que

    dans

    notre connaissance,

    il

    y a des objets donnés qui ne

    peuvent être

    suffisamment expliqués par la causalité seule *).

    L idée

    même de l explication de certains objets par l action d une intell

    igence opérant en vue dune

    fin,

    a beau

    être

    subjective,

    ces

    objets

    étant

    inexplicables

    par

    le

    principe

    de

    causalité,

    ils fournissent

    par

    le fait même l occasion de concevoir cette idée subjective.

    Or

    ce

    qui rend possible

    cette idée, c est

    la nature même de

    notre connaissance

    intellectuelle. Car

    notre

    intelligence qui,

    en

    s

    ubordonnant

    les

    données spéciales sous

    les

    règles

    générales de

    l

    xpérience, recompose

    dans la

    connaissance

    l unité de l objet exté

    rieur en reliant par les catégories les données isolées

    2),

    ne peut

    com

    prendre

    un tout donné sinon comme

    causé

    par la

    combinaison

    de

    *)

    Es

    verhâlt

    sich

    mit

    dem

    Begriffe

    eines

    Naturzwecks

    zwar ebenso,

    was die

    Ursache

    der

    Môglichkeit eines

    solchen Prâdikates

    betrifît,

    die

    nur in

    der

    Idee

    iiegen

    kann ; aber die

    ihr

    gemâsse

    Folge (das Produkt selbst) ist

    doch

    in der

    Natur

    gegeben, und der Begriff einer Kausalitât der

    letzteren,

    als

    eines nach

    Zwecken handelnden Wesens, scheint die Idee eines

    Naturzwecks

    zu einem

    konstitutiven

    Princip desselben zu machen, und darin hat sie etwas von alien

    anderen

    Ideen

    Unterscheidendes (345).

    2) Unser Verstand

    hat

    die Eigenschaft, dass er in seinem Erkenntnisse z. B.

    der Ursache eines Produkts, vom

    Analytisch-Allgemeinen

    (von Begriffen) zum

    Besonderen

    (der gegebenen

    empirischen

    Anschauung

    gehen

    muss

    wobei

    er

    also

    in Ansehung

    der

    letzteren

    nichts

    bestimmt, sondera

    dièse Bestimmung fur

    die

  • 8/18/2019 La Connaissance Intuitive

    16/20

    L intuition

    chez

    Kant

    et chez Aristote 395

    1 efficacité causale de

    ses parties

    *). Ainsi un

    objet

    dans lequel le

    tout

    détermine

    les

    parties, doit nécessairement

    échapper

    à

    la

    com

    préhension

    de

    notre intelligence. La

    dernière

    raison

    de ce fait

    est

    la séparation dans

    notre connaissance

    de la faculté primaire de

    perception, la sensibilité, d avec la faculté de connaissance object

    ive, l'intelligence

    ;

    en

    d autres

    termes, la passivité de notre

    con

    naissance.

    Notre activité

    intellectuelle se borne

    à introduire

    un

    ordre à

    priori dans un matériel donné par ailleurs ; voilà pourquoi

    il

    y a,

    dans notre connaissance, cette différence profonde entre ce qui est

    nécessaire (c'est-à-dire ce qui dans le donné s adapte à

    cet

    ordre

    de

    manière

    à

    pouvoir

    en

    être

    déduit)

    et

    ce qui

    est

    contingent

    (c'est-

    à-dire ce

    qui

    dans

    le

    donné

    ne

    s y

    adapte pas entièrement). L objet

    d une intelligence

    qui

    joindrait

    à l acte

    de

    la pensée

    celui de

    la

    perception,

    trouverait

    dans son

    autoconscience

    même le lien unis

    sant

    ces perceptions, sans

    devoir recourir

    pour

    cela

    aux connexions

    des

    catégories.

    L objet perçu

    par une

    telle

    intelligence

    ne serait

    ni

    nécessaire (c'est-à-dire

    suffisamment

    déterminé par ces connexions)

    ni contingent

    (c'est-à-dire exigeant une détermination

    ultérieure),

    mais

    il

    serait

    simplement

    réel 2).

    Par conséquent

    seule l intell

    igence

    qui dans l acte de

    l' autoconscience même percevrait la total

    ité

    de

    ses

    objets, c est-à-dire une intelligence

    intuitive, est

    capable

    de

    concevoir

    en

    une

    unité

    complète

    et intégrale, ce qui

    pour nous

    inévitablement

    se partage en deux éléments hétérogènes

    : le

    néces

    saire et le

    contingent.

    L unité

    de 1*

    autoconscience

    intuitive suffit

    à

    unir les éléments de la connaissance, pour elle

    il

    n'est

    pas

    nécess

    aire de les relier par les connexions

    des

    catégories ; ni par con-

    Urteilskraft von

    der Subsumption der empirischen

    Anschauung... unter

    den

    Begriff erwarten muss (348).

    ')

    Nach

    der BeschaflFenheit unseres Verstandes ist... ein reaies Ganze der

    Natur

    nur

    als

    Wirkung

    der konkurrierenden

    bewegenden

    Krâfte der

    Teile

    anzu-

    sehen (349).

    2) Wâren zu

    dieser

    ihrer (se. der Erkenntnisvermôgen) Ausiibung

    nicht

    zwei

    ganz hétérogène Stiicke, Verstand fur Begriffe, und sinnliche Anschauung fur

    Objecte,

    die ihnen korrespondieren, erforderlich, so wûrde es keine solche Unter-

    scheidung (zwischen dem Môglichen und

    Wirklichen) geben (340). Fiir einen

    Ver-

    stand,

    bei dem

    dieser

    Unterschied

    nicht eintrâte,

    wùrde es heissen

    : aile Objekte,

    die

    ich

    erkenne, sind (existieren) und die Môglichkeit einiger, die

    doch

    nicht

    existieren,

    d.

    i. die

    Zufâlligkeit

    derselben, wenn sie existieren, also

    auch

    die

    davon zu

    unterscheidende

    Notwendigkeit, wurde

    in

    die Vorstellung

    eines

    solchen

    Wesens

    gar nicht kommen

    konnen

    (341-42).

  • 8/18/2019 La Connaissance Intuitive

    17/20

    396

     André de îvanka

    sequent de recomposer l unité de l objet perçu en unissant

    ses

    éléments suivant les catégories. L intelligence intuitive perçoit la

    partie

    dans

    le

    tout, et non pas comme notre intelligence le

    tout

    par ses

    parties

    *).

    Avec

    l usage

    des

    catégories

    cesse

    nécessaire

    mentacte

    de

    l intelligence qui en est

    le

    fondement : l objectiva-

    tion

    des données perçues.

    Inversement, les catégories ne sont rien

    d autre que l application

    de cet

    acte aux

    rapports établis

    dans

    nos

    impressions. Dès que la connexion

    des

    éléments de la

    connaissance

    ne demande

    pas

    un

    acte

    spécial

    de l intelligence, mais qu elle est

    donnée par l unité de

    l'

    autoconscience

    intuitive elle-même

    com

    prenant

    ces

    éléments dans l unité

    immédiate

    de

    son

    propre acte,

    il n'y

    a

    plus

    lieu de

    rapporter cette connexion

    à un

    objet

    extérieur

    pour

    fournir

    une

    raison

    de

    sa nécessité

    et

    de son

    universalité

    2).

    Pour

    une

    intelligence de

    ce

    genre, la

    perception

    de l objet est

    identique

    à

    l objet perçu ; elle ne connaît

    pas

    comme la nôtre les

    objets

    par

    l impression reçue passivement

    dans ses

    facultés

    de per

    ception sensible.

    Notre

    intelligence rapporte les impressions don

    nées dans sa passivité sensible à un objet comme à une cause extra

    subjective de

    ce

    qui est

    présent

    dans la conscience ;

    alors

    qu une

    intelligence intuitive est, par

    son

    autoconscience

    même, la cause

    de ces

    objets

    3). En elle, la

    dualité

    d objet

    représenté

    et de repré

    sentation subjective cesse et

    se

    fond

    dans l unité d une activité

    intellectuelle

    qui

    est

    à

    la

    fois

    pénétration spirituelle

    et

    production

    réelle 4).

    ') Nun

    kônnen

    wir

    uns aber

    auch

    einen Verstand denken, der weil

    er

    nicht

    wie der

    unsrige

    diskursiv, sondern intuitiv

    ist, vom

    Synthetisch-Allgemeinen

    (der Anschauung

    eines

    Ganzen als

    eines Solchen)

    zum Besonderen geht

    d.

    i.

    vom Ganzen zu den

    Teilen,

    der

    also

    und

    dessen

    Vorstellung

    des

    Ganzen

    die

    Zufâlligkeit der

    Verbindung

    der

    Teile

    nicht

    in sich enthâlt (348-49).

    a) Derjenige

    Verstand,

    durch dessen Selbstbewusstsein zugleich

    das

    Mannig-

    faltige der

    Anschauung gegeben wiïrde...

    wùrde

    einen

    besonderen

    Aktus

    der

    Synthesis

    des Mannigfaltigen

    zu

    der

    Einheit des Bewusstseins

    nicht

    bedûrfen,

    deren

    der menschliche Verstand, der bloss

    denkt, nicht

    anschaut, bedarf

    (p.

    139

    de la a

    Cr. d. 1. R.

    P.2 »).

    *)

    Derjenige Verstand,

    durch dessen

    Selbstbewusstsein zugleich

    das

    Mannig-

    faltige der Anschauung gegeben wûrde, ein

    Verstand,

    durch dessen

    Vorstellung

    zugleich die

    Objekte

    dieser Vorstellung existierten... (Cr.

    d.

    1.

    R. P.2, 138-39).

    *) Unsere

    Anschauungsart,

    die

    darum sinnlich

    heisst, weil sie nicht

    ursprung-

    lich,

    d. i.

    eine solche ist,

    durch

    die

    selbst das

    Dasein

    des Objekts der

    Anschauung

    gegeben wird

    (und die, soviel

    wir

    einsehen, nur dem

    Urwesen

    zukommen kann...

    (Cr. d. 1. R. P.2, 72). Wollte ich mir einen Verstand denken, der selbst anschaute

    (wie etwa einen gôttlichen, der nicht gegebene Gegenstânde

    sich vorstellte,

    son-

  • 8/18/2019 La Connaissance Intuitive

    18/20

    L intuition

    chez Kant et

    chez Âristote

    397

    La

    question se

    po'se

    pour nous

    de

    savoir

    si la nature de notre

    connaissance,

    et

    cette opposition

    entre

    causalité

    et

    finalité

    dans

    notre intelligence, sont des arguments suffisants pour supposer

    l existence objective d une intelligence intuitive? Intelligence dans

    laquelle, comme

    nous le

    décrivions

    précédemment,

    ces oppositions

    se

    concilient.

    La solution de ce

    problème

    dépend de

    cet

    autre :

    Le

    fait de

    notre connaissance, telle que toute notre expérience

    nous

    la

    montre, est-il un argument

    suffisant

    pour supposer une existence

    objective

    en

    dehors de

    notre

    connaissance, un

    « en

    soi

    » des

    objets

    de notre expérience? L objet modifié par les formes subjectives de

    la

    perception

    et

    de

    la

    pensée

    existe-t-il hors

    de

    notre

    connaissance?

    Evidemment,

    la connaissance

    intuitive,

    intégrale et

    pénétrant

    l

    ssence des

    objets,

    parce

    qu elle les cause dans l acte même de

    sa

    connaissance

    — à supposer qu il

    y

    ait

    une

    existence

    objective

    des

    objets — est

    nécessairement

    la forme de perception qui répond à

    cette réalité, comme

    notre connaissance

    humaine, partielle,

    et

    mod

    ifiant

    par

    ses

    conceptions

    subjectives

    l objet de

    sa

    perception,

    répond aux objets empiriques *) (p. 391).

    Il

    est vrai que les données

    des sens ne

    contiennent

    en elles-mêmes nul rapport à un

    objet

    ultérieur,

    dont

    elles seraient

    la

    représentation

    2). Un tel rapport est

    produit

    par

    notre

    intelligence,

    et

    sa

    conception se

    fait

    suivant

    les

    règles

    subjectives des catégories. Notre intelligence

    opère

    un

    pas

    sage de l'effet à la cause lorsqu elle conclut des impressions qui

    existent en

    nous

    comme de données à l existence d un

    objet

    qui

    par

    son

    action sur notre faculté perceptive

    nous

    les «

    imprime

    ».

    Il

    se peut

    que le

    concept même

    d un

    objet

    existant

    hors de

    notre

    dern durch dessen

    Vorstellung

    die Gegenstânde selbst zugleich gegeben

    oder

    hervorgebracht wûrden)...

    (Cr.

    d.

    1. R. P.2,

    145).

    Ainsi aboutissons-nous, en

    effet,

    à

    l'idée d'une intelligence créatrice et

    cependant

    ce n'est

    pas

    une inte

    l l igence

    créatrice

    opérant

    par

    le

    moyen

    de

    sa connaissance

    (c'est-à-dire

    par

    la

    conception

    préconçue de

    la

    fin), comme il

    semblait

    tout

    d'abord;

    mais un

    intel

    lect dont l'activité cognitive est

    identique à

    son opération

    créatrice.

    ')

    Da

    es

    aber

    doch

    wenigstens

    môglich

    ist, die matérielle Welt

    als

    blosse

    Erscheinung

    zu

    betrachten, und etwas als

    Ding an sich selbst (welches

    nicht

    Erscheinung ist) als Substrat zu denken, diesem

    aber

    eine korrespondierende

    intellektuelle Anschauung (wenn aie gleich nicht die unsrige ist) unterzulegen...

    (Kritik der Urteilskraft, 352).

    2) Durch blosse Anschauung wird gar

    nichts gedacht, und dass

    dièse Affek-

    tion der

    Sinnlichkeit

    in mir ist, macht gar keine Beziehung von dergleichen

    Vorstellung auf irgend ein Objekt

    aus

    (Cr.

    d.

    1. R. P.2, 309).

  • 8/18/2019 La Connaissance Intuitive

    19/20

    398

    André de Ivanka

    connaissance et

    indépendamment

    d elle,

    soit un concept purement

    subjectif, et que la manière dont

    nous

    envisageons les données

    sensibles dans notre connaissance,

    quelle

    que soit d ailleurs leur

    portée,

    n'est

    pas

    fondée

    sur

    la

    nature

    et

    les

    conditions de

    ces

    données,

    mais sur

    un

    besoin particulier (peut-être moral)

    de

    notre

    nature subjective. Mais

    aussitôt

    que

    nous

    avons adopté une telle

    manière de

    voir,

    il nous

    faut supposer

    une réalité objective, un

    « en soi » des objets perçus pour la justifier *). Quoique cette sup

    position puisse n'être

    que

    subjective,

    cependant

    elle

    est

    nécessaire,

    comme* le fondement de

    toute

    notre connaissance,

    et

    comme la

    justification du

    rôle

    qu elle remplit.

    La

    forme que prend notre

    connaissance

    vis-à-vis de

    ces

    objets

    est

    1

    intellection, la perception

    intellectuelle

    par la pensée.

    Il

    nous

    faut

    donc

    pour

    légitimer

    cette

    forme,

    supposer

    qu elle

    est le

    moyen

    adéquat de saisir spirituellement ces objets. Aussi les règles de

    notre intelligence s imposent-elles à

    nous,

    avec

    une valeur nécess

    aire et universelle. Or ce qui donne valeur à ces règles concer

    nantes objets de

    notre

    expérience, c est précisément le fait qu au

    cunechose ne

    peut être

    pour

    nous

    donnée ou

    représentation

    intel

    lectuelle,

    sans

    être

    soumise

    à ces règles et

    reliée par les catégories

    au reste

    de nos connaissances.

    Par

    conséquent, pour pouvoir re

    garder

    cette

    forme de

    la connaissance comme légitime,

    nous devons

    postuler

    que

    la

    perception

    intellectuelle

    s étend

    à

    tout

    objet

    pos

    sible

    de la connaissance.

    Néanmoins,

    si dans notre

    connaissance

    se trouvent

    des

    objets

    échappant

    à la compréhension

    intellectuelle

    suivant les règles des catégories,

    il nous

    faut supposer encore que

    cela

    provient non du fait qu ils

    soient

    inintelligibles en

    eux-mêmes,

    mais de ce que la forme de connaissance

    intellectuelle

    qui est

    nôtre,

    n'est

    pas la

    plus

    parfaite

    possible.

    L opération

    consistant à rendre intelligible le matériel donné,

    à rendre intellectuellement compréhensible ce qui ne

    s impose

    d abord

    à nous que comme un

    état

    affectant notre sensibilité,

    pré

    cisément

    parce

    qu elle

    ne peut

    jamais

    se

    réaliser intégralement

    dans

    notre connaissance,

    suppose

    qu il existe une intelligence, dans

    la

    quelle

    cette opération se trouve intégralement réalisée. En d autres

    termes,

    l opération

    qui

    tend

    à saisir

    intellectuellement les choses,

    *) Gleichwohl und dabei

    immer

    vorbehalten, dass

    wir

    eben

    dieselben

    Gegen-

    stânde

    auch

    als

    Dinge an sich selbst,

    wenngleich

    nicht erkennen,

    doch

    wenigstens

    mùssen

    denken

    kônnen. Denn sonst wiïrde der

    ungereimte

    Satz

    daraus folgen,

    dass Erscheinung ohne etwas

    ware, was

    da erscheint (Cr.

    d. 1. R. P.2,

    XXVI-XXVIl).

  • 8/18/2019 La Connaissance Intuitive

    20/20

    Programme

    des

    cours

    de l Institut 399

    suppose

    leur intelligibilité intégrale. Par conséquent,

    l idée

    d une

    intelligence intuitive devient

    une

    idée nécessaire pour notre intel

    ligence,

    non seulement pour

    unifier

    systématiquement

    ses

    règles,

    comme les

    idées

    de la raison, mais déjà pour

    légitimer

    leur appli

    cation aux

    données

    sensibles ; et cela, non seulement comme un

    complément final,

    mais comme

    une condition élémentaire

    de

    son

    activité.

    Cette activité dont la fonction est d élever

    le donné

    à la

    région

    de la

    pensée,

    suppose par

    chacun

    de

    ses actes,

    l existence

    d une activité

    connaissante

    d une

    autre

    espèce, dans laquelle la

    pensée

    est la raison même qui fait

    exister

    les objets, dans laquelle

    l acte de penser les objets

    est identique à

    l existence de

    ces

    objets,

    eux-mêmes.

    Ce sera donc

    une

    idée subjective, mais

    une

    idée dont la sub

    jectivité ne sera pas

    plus grande

    que celle

    de

    notre activité de

    connaissance

    tout entière ; une idée

    qui

    se retrouve

    au

    fond du

    moindre acte de

    connaissance comme sa

    condition nécessaire.

    André

    DE

    IVANKA.

    Karpe-Gécz

    (Hongrie).

    (A

    suivre).

    XVII

    PROGRAMME DES COURS

    de l Institut Supérieur de Philosophie

    Année

    académique

    1931-1932

    Première année

    *)

    Eléments de métaphysique, par L.

    MARCHAL, 2 h. toute l an

    née.

    Idem en langue flamande par J. BlTTREMIEUX.

    Introduc

    tionla psychologie et éléments de

    psychologie

    rationnelle, par

    A. Fauville, 2 h. toute l année. —

    Idem

    en langue

    flamande par

    x)

    Les

    étudiants

    qui

    ont

    reçu

    une formation équivalente

    peuvent être

    dis

    pensés

    en

    tout ou

    en

    partie des

    Cours

    de

    première

    année.