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La Lettre des Études Économiques G RANDES C LIENTÈLES ,F INANCEMENTS ET M ARCHÉS Panorama 2005 : Une bonne année malgré tout. 5 janvier 2006

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Page 1: La Lettre des Études Économiques · 2020. 4. 16. · LA LETTREDES ETUDES ÉCONOMIQUES Panorama 2005 4 locomotives habituelles (Chine et Etats-Unis),du Japon,de la plupart des pays

La Lettre des Études Économiques

GR A N D E S CL I E N T È L E S, FI N A N C E M E N T S E T MA R C H É S

Panorama 2005 :

Une bonne année malgré tout.

5 janvier 2006

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PANORAMA

Parution : annuelle

Editeur : Natexis Banques Populaires

Grandes Clientèles, Financements et Marchés – Recherche Economique et Financière

115, rue Montmartre – 75002 Paris

Directeur de publication : Marc Touati

Mise en page

Laurence Martinez [email protected] 0158323018

Céline Bezançon [email protected] 0158322738

La Lettre des Etudes Economiques de Natexis Banques Populaires est « téléchargeable » sur le serveur Internet de Natexis

Banques Populaires. Si vous souhaitez des précisions sur les articles présentés dans nos différentes publications, vous pou-

vez également nous contacter par e-mail à l’adresse suivante : [email protected]

Service de la Recherche Economique et Financière

Directeur de la Recherche Economique et Financière Marc Touati 0158324879 [email protected]

Responsable de l’Analyse Economique Alexandre Bourgeois 0158325527 [email protected]

Responsable de l’Analyse de Marché Nathalie Dezeure 0158325528 [email protected]

Analyse économique

Scénario global,Etats-Unis,Euroland,France Marc Touati 0158324879 [email protected]

Euroland,Allemagne,France Alexandre Bourgeois 0158325527 [email protected]

Europe du Sud,Euroland Carol Hainaut 0158322910 [email protected]

Europe occidentale hors zone euro,Royaume-Uni Jean-Christophe Caffet 0158324186 [email protected]

Amérique latine,Etats-Unis,Canada Nathalie Dezeure 0158325528 [email protected]

Asie, Japon,Chine Hervé Liévore 0158324609 [email protected]

Modélisation économétrique Camille Creuzé 0158325514 [email protected]

Analyse de marché

Analyse technique Micaella Feldstein 0158321152 [email protected]

Ouri Mimran 0158322835 [email protected]

Analyse quantitative Sophie Chardon 0158321142 [email protected]

Cyril Regnat 0158321133 [email protected]

Statistiques et organisation

Laura Bassi 0158324133 [email protected]

Céline Klein 0158320757 [email protected]

http://www.nxbp.frrubrique "Entreprise et Institutionnel" ou "Banque et Intermédiaire Financier"

Contact : [email protected]

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Panorama 2005 :Une bonne année malgré tout.

Page 3 Le Billet :Panorama 2005 : Une bonne année malgré tout.par MARC TOUATI

Page 7 Panorama économique 2005 : l’économie mondiale reste insensible au choc pétrolier.par ALEXANDRE BOURGEOIS

Page 13 Taux d’intérêt : un soupçon d’aplatissement, saupoudrer de hausse des taux et laisser mijoter.par SOPHIE CHARDON et CYRIL REGNAT

Page 17 Taux de change : 2005, l’année de la remontée du dollar.par CAROL HAINAUT

Page 23 Marchés actions : un très bon cru 2005.par JEAN-CHRISTOPHE CAFFET et HERVÉ LIÉVORE

Page 29 2005, une année de consolidation pour les pays émergents.par NATHALIE DEZEURE, ELISABETH LOISON et HERVÉ LIÉVORE

Page 35 Bilan des nos prévisions 2005 : une année faste !par MARC TOUATI et son équipe

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CROISSANCE MONDIALE :LA CHINE ET LES ETATS-UNISRESTENT LES LOCOMOTIVES…

Un choc pétrolier,deux ouragans ravageurs,huit resserre-ments monétaires consécutifs de la Fed, la quasi-faillite deGeneral Motors,des attentats sanglants à Londres,des risquesaugmentés (du moins d’un point de vue médiatique) d’épidé-mie de grippe aviaire… Voici quelques uns des évènementsmarquants de 2005 qui auraient pu être fatals pour l’écono-mie mondiale.Pourtant,malgré toutes ces tempêtes,au proprecomme au figuré,cette dernière a réussi à s’en sortir,avec leshonneurs. Et pour cause : la croissance du PIB de la planète aété d’environ 4,3 %.C’est donc certes bien moins que les 5,1 %

de 2004, qui étaient cependant un record depuis 1976, maisc’est surtout bien plus que les 2,4 % de 2001 ou les 1,6 % de1991. Mieux, la performance de 2005 dépasse de quasimentun point la croissance annuelle moyenne observée depuis1980,en l’occurrence 3,4 %.Aussi surprenant que cela puisseparaître,2005 a donc été une année favorable sur le front dela croissance, confirmant par là même que les craintes peu-vent se transformer en espoirs.C’est l’enseignement majeurde 2005, à savoir qu’il est possible de s’affranchir des inquié-tudes et autres soubresauts extra-économiques,pour peu quela volonté de s’en sortir, la souplesse et,ce faisant, la résistancede l’investissement et de la consommation prennent le des-sus.C’est du moins ce qui a pu s’observer dans l’essentiel deszones de la planète, qu’il s’agisse évidemment des deux

Un euro à 1,35 dollar, récession en Allemagne et en Italie, croissance nulle en France, Cac

40 à 3800, ralentissement de l’économie américaine et de celle de la planète sous l’effet

d’une nouvelle tendance haussière du cours du pétrole… Tel était le contexte économique

et financier de la fin 2004 et du début 2005. Inutile de dire que l’optimisme n’était pas à

l’ordre du jour et ce d’autant plus que la première partie de l’année allait confirmer ces craintes.

Fort heureusement, la résistance de l’économie américaine, la santé stupéfiante de la Chine et des pays

émergents dans leur globalité, sans oublier la baisse de l’euro et la remontée des marchés boursiers ont

progressivement permis d’inverser la vapeur. Pourtant, alors que l’espoir commençait à renaître, la spirale

de la peur a très vite été relancée, d’abord par les attentats de Londres, puis par les ouragans Katrina et

Rita, qui ont notamment suscité une nouvelle flambée pétrolière, hissant le baril à près de 70 dollars, un

record absolu. Enfin, comme si cela ne suffisait pas, la BCE a stoppé le mouvement de baisse de l’euro

en remontant ses taux directeurs, freinant par là même la petite reprise qui était en train de se mettre en

place dans l’Euroland.

En d’autres termes, 2005 ne restera pas dans les annales de la bienveillance économique, mais plutôt

comme une année difficile qui a rimé avec craintes et fragilités. Pour autant, elle n’est pas non plus une

année à oublier, comme l’ont par exemple été 2001, 2002 ou 1991 et 1993. Retour donc sur une

année au cours de laquelle les craintes se sont transformées en espoirs.

Le Billet:Panorama 2005 :Une bonne année malgré tout.

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Panorama 2005

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locomotives habituelles (Chine et Etats-Unis), du Japon, dela plupart des pays émergents ou encore des pays anglo-saxons(hors USA) et scandinaves.

Une croissance mondiale plus qu’honorable.

Source : FMI

… ET LA ZONE EURO, LA VOITURE BALAIS.

Bref, à la fête, certes troublée, de la croissance en 2005,tout le monde a participé, sauf,une fois encore, la zone euro.Ainsi, pour la troisième année consécutive, l’Euroland a étéla lanterne rouge de la croissance mondiale, avec une per-formance de 1,4 %, soit 2,3 points de moins qu’outre-Atlantique, 1,1 point de moins qu’au Japon et 3 points sousle niveau de la croissance mondiale.Au cours des trois der-nières années, la zone euro a même accumulé 9,5 points decroissance de retard par rapport à l’ensemble de la pla-nète. Si les craintes ont donc été transformées en espoirsdans de nombreux pays et zones, tel n’a pas été le cas dansl’Euroland.

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Croissance mondiale

a/a, %

3,4 % en moyenne depuis 1980

L’Euroland, encore lanterne rouge de la croissance mondiale

2005

Progression du PIB Contribution à la

en 2005 croissance mondiale

Chine 9,8 1,3

Inde 7,7 0,5

Russie 6,0 0,2

Dragons et Tigres 4,6 0,3

Monde 4,4 -

Amérique Latine 4,2 0,3

Europe de l'Est 3,9 0,1

Etats-Unis 3,7 0,8

Canada 2,9 0,1

Japon 2,5 0,2

Europe occidentale hors Euroland 2,0 0,1

Euroland 1,4 0,2

Source : Datastream

Pour nous réconforter, il est cependant possible de souli-gner que cela aurait pu être encore pire.En effet,après un pre-mier semestre des plus difficiles, l’économie eurolandaise a pubénéficier de la baisse de l’euro, qui est tout de même passéde plus de 1,35 dollar en janvier à 1,18 en fin d’année. De lasorte, les exportations et l’investissement ont retrouvé descouleurs, tandis que les importations ont légèrement ralenti.La confiance des industriels et le climat des affaires se sontalors améliorés, ouvrant la voie au progressif redressementde l’activité globale,notamment au second semestre.De 1,2 %au premier et au deuxième trimestre, le glissement annuel duPIB a ainsi atteint 1,6 % au troisième et vraisemblablement1,7 % au quatrième.Le rebond est donc resté modeste et nousindique que sans le repli de l’euro, la croissance de la zonen’aurait pas été de 1,4 %,mais d’au mieux 1 %!

Malheureusement,cette « flambée » de l’activité est appa-rue insupportable à la BCE.Dès lors,arguant d’un risque infla-tionniste imaginaire,cette dernière a augmenté son taux refide 25 centimes le 1er décembre, stoppant net le recul del’euro et augmentant par là même les risques sur la crois-sance 2006.Autrement dit, à moins de vivre une révolutiontechnologique majeure qui susciterait un cercle vertueux dedynamisme économique, la zone euro n’a plus la possibilitéde connaître une croissance durablement forte, c’est-à-dire supérieure à 2,5 %.L’inefficacité de l’action publique, lesrigidités de son fonctionnement et le monétarisme de la BCEle lui interdisent. Quel dommage !

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Panorama 2005

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LA REVANCHE DES MARCHÉS ACTIONS

Conscientes depuis déjà plusieurs années de cette carencede vigueur économique eurolandaise, les entreprises de lazone ont poursuivi le développement de leurs activités àl’étranger. Non pas donc par manque de patriotisme éco-nomique, mais tout simplement pour continuer de croître,voire tout simplement de vivre. C’est d’ailleurs ce mouve-ment qui explique principalement la déconnexion entre lamollesse durable de la croissance eurolandaise et la bonneperformance des places boursières de la zone.Car,à côté dela baisse de l’euro, l’autre grande et bonne surprise (du moinsvis-à-vis des prévisions consensuelles) de l’année 2005 a étéla progression des grands indices boursiers européens.Acommencer par le Cac 40.Ainsi, après avoir déjà augmentéde 7,4 % en 2004, l’indice phare de la place de Paris a gagné23,4 % en 2005, finissant l’année à 4715 points, après avoiratteint 4772 la veille, un sommet depuis août 2001. Depuisle point bas du 12 mars 2003 (à 2403 points), le Cac réaliseune progression de 96 % ! Autrement dit, après le dégonfle-ment douloureux de la bulle Internet et malgré le sempiter-nel pessimisme de nombreux investisseurs, la bourse pari-sienne a durablement retrouvé le chemin de la hausse.Et ce,non seulement via un effet de rattrapage de la dégringoladedes années 2001-2003,mais aussi grâce à des soutiens beau-coup plus concrets.En l’occurrence,une forte croissance desprofits des entreprises du Cac, dans la mesure où 80 % deces derniers sont réalisés à l’étranger. En outre, après avoir“brûlé” les placements actions au profit presque exclusif desobligations et de l’immobilier, les investisseurs se sont enfinrendu compte de l’attrait des marchés actions, qui présen-taient en 2004-2005, et encore aujourd’hui d’ailleurs, le

meilleur couple rendement-risque. Enfin, les marchés bour-siers européens et notamment celui de la France, commen-cent à retrouver leur rôle dans le financement de l’écono-mie au travers du retour en grâce des introductions enbourses et des fusions-acquisitions.

Une question demeure cependant :s’il est possible de com-prendre l’écart entre croissance eurolandaise molle et bonsrésultats boursiers,comment expliquer la déconnexion entreune croissance américaine forte et une bourse new-yorkaisemoribonde (le Dow Jones et le Standard and Poor’s 500 ontrespectivement reculé de 0,6 % et progressé de 3 %) ? Laréponse est triple.Primo,à la différence du Cac 40 ou du Dax30 qui s’étaient effondrés lors du krach Internet, le Dow Jonesn’a que faiblement baissé pendant cette cure. L’effet de rat-trapage qu’ont connu les indices eurolandais n’a donc pasjoué sur l’indice phare du Nyse. Secundo, le flight to qualityinversé des marchés obligataires et immobiliers vers lesactions qui a pu s’observer en Europe a été freiné outre-Atlantique par les difficultés de General Motors qui ont sus-cité un mouvement de relative défiance sur les entreprisesaméricaines.Tertio,que ce soit en termes de niveau de valo-risation ou de profits des entreprises, le Dow Jones resteencore relativement cher comparativement aux places euro-péennes,qui au surplus ont pu bénéficier d’un effet favorablesupplémentaire lié à la baisse de l’euro.

Euro/dollar : une baisse justifiée et salvatrice.

Sources : Datastream, Calculs : Natexis Banques Populaires Sources : Eurostat, Datastream, Natexis Banques Populaires

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Croissance eurolandaise - G -Variation annuelle de l'euro dollar (échelle inversée) - D -

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NATREX : Taux de change naturel de l'euro / dollar - G -Taux de change euro / dollar - D -

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Panorama 2005

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L’Europe devant les Etats-Unis en matière boursière

Source : Datastream

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Dow Jones - G - CAC 40 - D - Dax 30 - D -

En d’autres termes, ce que l’économie eurolandaise estincapable de faire (c’est-à-dire concurrencer et a fortioridépasser la croissance des Etats-Unis), ce sont ses entre-prises qui le font, au travers de leurs investissements et deleur rationalité.Au sortir de ce bilan 2005 navrant pour l’éco-nomie eurolandaise,mais euphorique pour la plupart de sesgrandes entreprises, il ne nous reste donc plus qu’à espérerque les gouvernements et les puissances publiques de la zoneeuro sauront mettre à profit le rebond conjoncturel qui apris corps au second semestre 2005 pour faire les réformesqui s’imposent afin de fluidifier et d’améliorer le fonction-nement des économies eurolandaises.Dès lors ces dernièrespourront reprendre le chemin de la croissance forte,de l’in-vestissement,de l’emploi,de la rationalité,de la constructionpolitique, de la crédibilisation de l’action de la BCE… Il estun peu tard pour faire sa liste au Père Noël, mais puisquec’est l’heure des vœux, on peut bien rêver un peu…Excellente année à toutes et à tous !

Marc Touati

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CROISSANCE AMÉRICAINE :ET ÇA CONTINUE ENCORE ET ENCORE…

Depuis le temps que l’on entend dire que l’économie amé-ricaine va « payer » le prix de ses déséquilibres,que ces der-niers ne peuvent se maintenir éternellement et,qu’en consé-quence, la croissance va prochainement décélérer, voires’écrouler, l’économie américaine a eu le temps d’enregis-trer quatorze années de croissance ininterrompue1.Et,mêmesi cette dernière a ralenti en 2005,elle s’établit tout de même

à 3,7 % (contre 4,2 % en 2004), soit un niveau supérieur aupotentiel estimé de l’économie américaine (environ 3,5 %).En outre, loin de se résorber, les deux déséquilibres lesplus caractéristiques de la première économie mondiale sesont renforcés, en l’occurrence, le fort endettement desménages et l’impressionnant déficit commercial.

S’il est un événement (ou plutôt un non événement) à souligner à l’issue de l’année 2005, c’est

bien le très faible impact de la forte hausse du prix des matières premières sur les principales

économies de la planète. En particulier, alors que le prix du pétrole a atteint des sommets à

la fin de l’été dernier (dépassant même provisoirement, dans le cas du WTI, les 70 dollars le

baril), la croissance mondiale est restée solide et l’inflation, malgré un redressement logique, relativement

contenue. Cette réaction extrêmement modérée s’explique par deux éléments. D’une part, depuis deux

ans et demi, la hausse des prix pétroliers a été régulière, ce qui a permis aux entreprises et aux ménages

de s’adapter progressivement. Ainsi, en moyenne sur l’année, le prix du pétrole n’a progressé « que » de

42 %, contre + 57 % en 2000, + 133 % en 1979 et + 251 % en 1974. D’autre part, les économies

occidentales sont beaucoup moins dépendantes du facteur « pétrole » qu’au début des années 80. Ainsi,

la quantité de pétrole nécessaire à la production d’une unité de PIB a été divisée par presque deux en vingt-

cinq ans, tant aux Etats-Unis que dans la zone euro. En conséquence, même si la croissance mondiale a

été en partie pénalisée par la hausse du prix des matières premières, elle se maintient toutefois à un niveau

élevé. Après les 5,1 % de 2004 (un sommet depuis presque trente ans), le PIB de la planète a en effet pro-

gressé de 4,3 %.

Panorama économique 2005 :L’économie mondiale reste insensible au choc pétrolier.

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1 Selon les deux critères définissant traditionnellement une récession, à savoir,d’une part, deux replis consécutifs du PIB trimestriel et, d’autre part, le repli duPIB d’une année sur l’autre.

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Panorama 2005

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Rien de nouveau aux Etats-Unis : la croissance reste forte,les déséquilibres se renforcent…

Sources : BEA, Dpt of Commerce, Datastream, Natexis Banques Populaires

Ainsi, le déficit extérieur américain a atteint un niveau tita-nesque en 2005, battant largement le record de 2004. Il adépassé 700 milliards de dollars, représentant environ 5,7 %du PIB américain,un sommet parmi les pays du G7.D’ailleurs,il faut noter que, depuis le troisième trimestre 1996 (soittrente sept trimestres…), le déficit commercial contribue demanière continûment négative à la croissance (même si celaa ralenti depuis le début de 2005). Et ce,malgré la déprécia-tion du dollar depuis plusieurs années. En effet, en donnéeseffectives 2, la monnaie américaine a reculé en moyenne de2,5 % entre 2004 et 2005 et de 12,5 % depuis 2002. En fait,le déséquilibre extérieur est devenu tout simplement struc-turel. D’un côté, la nouvelle organisation économiquemondiale pousse les entreprises américaines à produire lesbiens à l’étranger puis à les réexporter sur le sol américain.En conséquence, l’activité progresse beaucoup plus vite dansle secteur des services que dans celui des biens (+ 22,7 %depuis le début de 2002 pour le premier, contre « seule-ment » + 16,5 % pour le second).De l’autre côté, les ménagesaméricains continuent de consommer « à tout va ». Leursdépenses ont ainsi progressé de plus de 3,5 % en 2005, favo-risant ainsi la croissance toujours soutenue des importations(supérieure à 5 % en 2005).

Cette frénésie de dépenses soutient alors le deuxièmedéséquilibre le plus caractéristique de l’économie américaine,en l’occurrence l’endettement des ménages.Ainsi, leur ratiod’endettement est passé d’environ 100 % du revenu dispo-nible brut (RDB) début 2002 à plus de 120 % désormais. En

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Déficit commercial (cumulé sur douze mois) - D - Croissance économique - G -

outre, leur taux d’épargne est devenu pour la première foisdurablement négatif en 2005 (- 0,4 % du RDB en moyennesur l’année).Toutefois, si des fragilités peuvent apparaîtreici ou là (via l’immobilier, par exemple), la situation desménages reste satisfaisante grâce à la vigueur des créationsd’emplois et à la bonne tenue de leurs revenus.Ainsi, depuisla mi-2003, l’économie américaine a créé plus de 4,5 millionsd’emplois et le revenu disponible des ménages a progresséde presque 12 % (3,5 % en Allemagne et à peine plus de 7 %en France…).

La très bonne performance de la demande intérieure amé-ricaine, alimentée en outre par le dynamisme de l’investis-sement tant dans le logement (+ 7 % en 2005 et + 33 %depuis le début de 2002!) qu’au niveau productif (+ 9 % envi-ron en 2005),a bien entendu contribué à renforcer les pres-sions sur les prix.Dans un contexte de nette hausse des prixpétroliers, l’inflation américaine a même atteint 4,7 % en sep-tembre, un sommet depuis le printemps 1991. Même si ellea quelque peu ralenti depuis,son niveau toujours élevé (3,4 %en moyenne), ainsi que le redressement de l’inflation sous-jacente (2,2 % en moyenne l’année dernière,contre 1,8 % et1,5 % les deux années précédentes), ont conduit la Fed àremonter systématiquement ses taux.Ainsi,depuis que l’ins-titution fédérale a interrompu le statu quo observé entrejuin 2003 et juin 2004, elle n’a pas laissé se dérouler uneréunion du FOMC sans remonter sa garde. De 1 % àl’époque, les taux directeurs sont désormais passés à 4,25 %,se rapprochant progressivement de ce qu’on considèrecomme leur « niveau de neutralité ».Mais une page se tournedésormais dans l’histoire économique contemporaine avecle départ prochain d’Alan Greenspan et son remplacementpar Ben Bernanke. La réputation de ce dernier permet tou-tefois de rester optimiste pour l’avenir.Aux Etats-Unis, leshommes changent, la performance économique reste…

JAPON :LE PHÉNIX RENAÎT DE SES CENDRES…

On a peut-être enterré le Japon un peu vite… Au débutde la décennie, nombreux étaient les commentateurs quipronostiquaient que l’émergence de la Chine s’accompa-gnerait de « l’extinction économique » du Japon. Ceux-ciignoraient par là même que le second bénéficierait en par-tie des performances de la première. En effet, l’Asie est trèscertainement la région du monde la plus en pointe en termesde division internationale du travail.Depuis plusieurs années,les entreprises nippones n’ont ainsi pas hésité à réorganiser

2 Pondérations fondées sur les parts de chaque zone dans le commerce extérieuraméricain.

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Panorama 2005

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leurs processus de production, délocalisant une part signifi-cative de l’assemblage et du travail nécessitant une main-d’œuvre abondante en Chine. Elles ont alors bénéficié decoûts de production plus faibles. Par contre, elles ont gardédans l’Archipel les activités en amont (recherche, concep-tion,développement…) et en aval (marketing,commerce…)du processus de production.Pour développer ces dernières,elles ont massivement investi 3 au cours des dernières années.D’ailleurs, avec une progression d’environ 8 % l’année der-nière, l’investissement productif a certainement été le prin-cipal contributeur à la croissance japonaise. Même si sonredressement, initié en 2003, traduit principalement un effetde correction après des années de baisse et même si la haussedes derniers trimestres a surtout servi à remplacer des maté-riels obsolètes (le stock de capital tendant à rester stable),pour autant la bonne tenue de l’investissement illustre lameilleure santé des entreprises nippones.Ainsi,conséquencedes grands efforts réalisés sur la période 1998 – 2002, la ren-tabilité des entreprises n’a cessé de croître et leur endet-tement s’est nettement réduit.

Mais les entreprises n’ont pas été les seules à apporter leurpierre à l’édifice de la croissance. Les ménages, après quasi-ment une décennie d’atonie, ont retrouvé le chemin de laconsommation.Cette dernière a ainsi crû d’environ 2 % l’anpassé. La nette baisse du taux de chômage (qui est passé deplus de 5,5 % début 2003 à environ 4,5 % désormais), per-mise par le recul de la population active,s’est en effet accom-pagnée d’un redressement des salaires. Même si, dans lesdeux cas, ces évolutions sont un peu moins favorables qu’iln’y paraît à première vue (l’emploi augmente très peu et c’estsurtout la part variable dans la rémunération des salariés quis’est redressée), pour autant, elles ont permis aux Japonaisde garder le moral. Et ce d’autant plus que la rentabilité deleurs placements financiers a été très favorable cette année(le Nikkei a progressé de 40 % sur l’année!).En conséquence,la hausse de la valeur de leur patrimoine a permis un arbi-trage plus favorable en faveur de la consommation et au détri-ment de l’épargne, soutenant ainsi la croissance. Cette der-nière a atteint environ 2,5 % sur l’ensemble de 2005, unrecord depuis 2000.

Japon: la croissance reste forte, la déflation prend fin. Quedemander de plus?

Sources : Office statistique du Japon, Datastream, Natexis Banques Populaires

A l’inverse, comme on l’observe déjà depuis quelquesannées, la sphère publique n’a pas contribué à la crois-sance.En effet,même si la consommation publique continuede croître (un peu moins de 2 % en 2005), le nouveau replide l’investissement public (- 5 % et - 43 % depuis dix ans !) acompensé cet effet. Il faut dire que la situation des financespubliques nippones reste détestable.Même si le déficit publics’est quelque peu réduit ces dernières années, il dépasse toutde même les 6 % du PIB.Néanmoins, si le ratio de dette surPIB dépasse les 150 %, le « faible » poids des charges d’inté-rêt dans le budget de l’Etat (environ 3 % du PIB, comme enFrance…) permet à la dette de ne pas être trop pénali-sante pour l’économie nippone.Du moins tant que les tauxd’intérêt restent aussi bas qu’ils le sont à présent…

Or la sortie progressive de déflation pourrait bien inci-ter la BoJ à revoir progressivement sa politique de taux zéro,ce qui pourrait faire remonter les taux de marché. En effet,en s’établissant à + 0,1 % au mois de novembre, le glissementannuel de l’indice des prix à la consommation (hors produitsalimentaires) a enregistré son niveau le plus élevé depuisavril 1998 et le processus de hausse des prix qui avait accom-pagné la remontée du taux de la TVA à l’époque.Une crois-sance à un plus haut depuis cinq ans, des entreprises qui rede-viennent profitables, des ménages qui consomment ànouveau, une déflation qui prend progressivement fin : qui adit que l’économie japonaise courrait vers la faillite ?

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T1 99 T1 00 T1 01 T1 02 T1 03 T1 04 T1 05

a/a, %

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1,6a/a, %

Croissance japonaise - G - Inflation japonaise (hors produits alimentaires) - D -

3 Pour preuve, la part des dépenses de recherche et développement dans le PIBest la plus élevée des « grands pays », avec 3,2 %, contre 2,6 % pour les Etats-Unis, 2,5 % pour l’Allemagne et 2,2 % pour la France…

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L A L E T T R E D E S E T U D E S É C O N O M I Q U E S

Panorama 2005

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EUROLAND :LA CROISSANCE RALENTIT DE NOUVEAU…

Après avoir reculé fortement entre la mi-2000 et la mi-2003,puis avoir initié un redressement en 2004, la croissanceeurolandaise a de nouveau ralenti en 2005. Elle a en effetatteint environ 1,4 %, contre 1,8 % un an plus tôt.

Ce ralentissement n’est pas à mettre au compte desménages.Ces derniers n’ont certes pas retrouvé un optimismeet un pouvoir d’achat suffisants pour relancer significativementleur consommation (la progression de leurs dépenses n’a pasdépassé 1,5 %), mais la performance de 2005 n’est pas pourautant plus mauvaise que celle de l’année précédente. Demême,l’investissement ne peut être tenu pour responsable dufléchissement de la croissance.En progressant de presque 2,5 %,il enregistre sa meilleure performance depuis 2000. Cettebonne tenue a été permise par les efforts spectaculaires réa-lisés ces dernières années par les entreprises européennes(allemandes en particulier) pour améliorer leur compétitivité.Si ces efforts ont eu un coût significatif pour l’économie conti-nentale (en terme d’emplois et de salaires principalement), ilscommencent néanmoins à porter leurs fruits.

En fait, outre les stocks, le principal responsable de lamoindre performance de l’économie eurolandaise aura étéle poste « exportations ».En effet, le ralentissement du com-merce mondial 4, conjugué à l’effet retardé de la nette haussede l’euro en 2004 5, a pénalisé les ventes eurolandaises àl’étranger.En fait,parmi les « grands pays eurolandais »,seulel’Allemagne a réussi à tirer son épingle du jeu.

Malgré une performance modeste (à peine plus de 1 %…),la croissance germanique constitue d’ailleurs la bonne sur-prise de l’année 2005. Par rapport à ses homologues de lazone euro, elle s’est plutôt mieux comportée qu’au coursdes dernières années.Ainsi, le différentiel de croissance zoneeuro / Allemagne n’a atteint l’an dernier que 0,3 point, sonplus faible niveau depuis 1994 (0,8 point en moyenne chaqueannée sur la période).A l’inverse, l’Italie a depuis deux ansrécupéré la place de « dernier de la classe » occupée parl’Allemagne depuis une décennie 6.Avec une progression de

son PIB à peine positive (+ 0,2 % environ), la Péninsule setrouve en effet dans une situation délicate.Même si la réces-sion enregistrée l’hiver dernier est désormais résorbée, lamauvaise santé des entreprises italiennes pèse sur le dyna-misme économique.D’ailleurs,après les scandales et les pro-blèmes des dernières années (Parmalat,Cirio,Fiat…), le moraldes chefs d’entreprise est au plus bas. L’indice synthétiquede l’enquête ISAE dans l’industrie s’est ainsi établi en 2005 àun plancher depuis dix ans. En outre, la confiance des chefsd’entreprise dans l’action du gouvernement de SilvioBerlusconi semble extrêmement réduite, comme le mon-trent les discours réguliers de Luca di Montezemolo, le pré-sident de la Cofindustria. Il faut dire que les entreprises trans-alpines ont souffert plus que d’autres de la hausse de l’euroenregistrée sur la période 2002-2004 (+ 60 % face au dol-lar). La compétitivité des produits italiens, déjà bien réduitepar la faiblesse récurrente de l’investissement,a alors fondu.Pour preuve, le solde commercial italien a enregistré en 2005un solde négatif (un peu moins de 10 milliards d’euros) pourla première fois depuis douze ans.

Si, de son côté, l’Espagne a elle aussi enregistré un déficitcommercial important (60 milliards d’euros environ), c’estbien là l’un de ses rares points communs avec l’Italie.En effet,à la différence de celle-ci, l’Espagne est sans conteste et depuisplusieurs années le bon élève de la classe eurolandaise.Avecune croissance qui a,une nouvelle fois, largement dépassé les3 % (3,4 % environ), le pays est, pour la neuvième annéeconsécutive, en tête des « grands pays » de la zone.

L’Espagne et l’Italie aux deux extrémités du palmarès des grands pays de la zone euro.

Sources : Offices statistiques nationaux, Datastream, Natexis Banques Populaires

Comme,malheureusement, les autres pays de la zone euron’ont pas le dynamisme de l’Espagne, l’Euroland aura ainsi été

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Euroland Allemagne France Italie Espagne Pays-Bas

a/a, %

2003 2004 2005Croissance économique

4 Bien qu’en hausse toujours significative (+ 7,1 %, selon la Commission euro-péenne), le commerce mondial a ralenti par rapport à 2004 (11,2 %).5 Il faut en général entre six et neuf mois pour traduire dans les chiffres du com-merce extérieur les variations du taux de change.6 Parmi les cinq « grands pays » de la zone euro (Allemagne, France, Italie,Espagne, Pays-Bas), l’Allemagne enregistre chaque année depuis dix ans soit laplus mauvaise performance, soit une performance très proche du « dernier de laclasse ».

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Panorama 2005

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une fois de plus le parent pauvre de la croissance mondiale.Encontribuant à hauteur de seulement 0,2 point (alors qu’ellereprésente entre 15 % et 20 % de la richesse créée chaqueannée dans le monde), la zone euro ne remplit toujours pas lesobjectifs qui lui avaient été assignés lors de sa formation,à savoirassurer une « croissance économique équilibrée, via uneéconomie sociale de marché hautement compétitive qui tendau plein emploi et au progrès social ».On attend encore…

FRANCE : UNE CROISSANCE« À L’EUROPÉENNE », AVEC DESDÉSÉQUILIBRES « À L’AMÉRICAINE »…

On dit généralement que l’on ne peut avoir « le beurre,l’argent du beurre et le sourire de la crémière ».Mais de là àn’avoir aucun des trois… C’est pourtant ce qui semble avoirété le cas pour l’économie française en 2005. En effet,notre pays paraît avoir pris les pires défauts des modèles tra-ditionnels européen (croissance faible, chômage élevé) etaméricain (forts déficits, à la fois extérieur, public et privé),sans pour autant bénéficier de leurs avantages.

Ainsi, à l’image de la zone euro dans son ensemble, la crois-sance française a reculé en 2005.Après la bonne surprise de2004 (2,1 %, après + 1,3 % et + 0,9 % les deux années pré-cédentes),elle n’a ainsi atteint qu’environ 1,6 %.De la mêmemanière,même si les chiffres ont été un peu meilleurs en find’année, le taux de chômage ne s’est pas replié en moyennel’an dernier. Il atteint ainsi 10 %,comme en 2004,soit un som-met depuis 1999. En outre, si l’amélioration observée en find’année (9,6 % au mois de novembre) est plutôt favorable,elle reste assez surprenante au vu de la faiblesse des créa-tions d’emplois (à peine 30000 sur un an).

S’agissant des déséquilibres, la France n’en manque pas nonplus. D’une part, le déficit commercial a atteint des niveauxrecord l’an passé (environ 23 milliards d’euros). En outre, ilserait faux de penser que l’évolution du prix du pétrole estentièrement responsable de cette contre-performance. Eneffet, hors produits énergétiques, le solde commercial fran-çais est à son plus bas niveau depuis février 1993… Cettemauvaise performance s’explique en bonne partie par lavigueur des importations, qui ont profité de la bonne tenuede la demande intérieure française, mais également par leralentissement des exportations tout au long de l’année. Etla tendance n’est pas récente. La part de marché à l’inter-national de la France est ainsi passée depuis le début desannées 90 d’un peu plus de 6 % à un peu moins de 5 %.

France : peu de croissance, mais beaucoup de déficits…

Sources : INSEE, Datastream, Natexis Banques Populaires

De même, la France ne manque pas de déséquilibresinternes.Au niveau de la sphère publique, comme cela s’ob-serve de manière continue depuis près de vingt-cinq ans, lesolde budgétaire a été négatif. En outre, même si le gouver-nement n’a cessé et continue d’affirmer que ce dernier serainférieur à 3 %, il semble difficile de lui donner quitus à l’heureoù nous écrivons ces lignes.Pour la quatrième année consé-cutive, il devrait ainsi dépasser la limite fixée par le Pactede stabilité et de croissance. Du côté de la sphère privée, sil’endettement des entreprises s’est nettement réduit depuisquelques années,celui de ménages ne cesse de croître. Il fautdire que la hausse des prix immobiliers, conjuguée à la faibleprogression des salaires et à la stagnation de l’emploi, apoussé les ménages à puiser dans leurs réserves à la fois pourinvestir,mais aussi pour consommer.Ainsi, leur taux d’épargnea fortement reculé ces dernières années. Il s’élève à environ15,2 % (contre 16,8 % en 2002), soit un plus bas depuis 1999.De même, les ménages ont eu recours au crédit (croissancede plus de 10 % l’année dernière) pour soutenir leur niveaude consommation (qui a progressé d’environ 2 % en 2005).En conséquence, le taux d’endettement des ménages n’ajamais été aussi élevé, approchant les 65 % du revenu dis-ponible en fin d’année,contre 50 % en moyenne il y a dix ans.On n’en est certes pas encore au niveau des ménages amé-ricains (120 % du RDB) mais, à ce rythme là, on pourrait lesrattraper rapidement. Espérons qu’il en sera de mêmepour la croissance et l’emploi…

Alexandre Bourgeois

-2,25

-1,13

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1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005

a/a, %

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50,0mds d'euros

Solde commercial - D - Croissance annuelle moyenne - G -

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Panorama 2005

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La croissance mondiale par zone en 2003, 2004 et 2005.2003 2004 2005 (e)

Progression Contribution Progression Contribution Progression Contribution

du PIB à la croissance du PIB à la croissance du PIB à la croissance

mondiale mondiale mondiale

Euroland 0,7 0,1 1,8 0,3 1,4 0,2

Europe occidentale hors Euroland 1,9 0,1 3,1 0,1 2,0 0,1

Etats-Unis 2,7 0,6 4,2 0,9 3,7 0,8

Canada 2,0 0,0 2,9 0,1 2,9 0,1

Amérique Latine 2,1 0,2 5,8 0,4 4,2 0,3

Japon 1,8 0,1 2,3 0,2 2,5 0,2

Dragons et Tigres 4,3 0,3 5,7 0,4 4,6 0,3

Chine 9,5 1,3 9,5 1,3 9,8 1,3

Inde 7,0 0,4 6,9 0,4 7,7 0,5

Russie 7,3 0,2 7,1 0,2 6,0 0,2

Europe de l'Est 2,8 0,1 3,7 0,1 3,0 0,1

Reste du Monde 7,1 0,7 6,9 0,7 4,5 0,5

Monde 4,1 4,1 5,1 5,1 4,5 4,5

Sources : FMI, Offices statistiques nationaux, Datastream, Natexis Banques Populaires

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TAUX MONÉTAIRES : HAWKISH ATTITUDEPOUR LES BANQUES CENTRALES

Tandis que la Réserve Fédérale américaine augmentait pourla huitième fois de l’année le taux objectif des Fed funds, lemois de décembre a été marqué par le premier mouvementdu taux refi de la BCE depuis juin 2003. Jean-Claude Tricheta en effet profité des prémices d’une amélioration conjonc-turelle pour réagir à l’évolution des prix. De septembre ànovembre, l’indice des prix à la consommation harmonisé(IPCH) total a crû à un rythme annuel de 2,5 % en moyenne,dépassant l’objectif de stabilité des prix de l’Institution deFrancfort, quantifiée par le Conseil des gouverneurs à 2 %.

Après deux ans et demi de statu quo, la BCE a donc décidéde « sévir » lors de la réunion du 1er décembre, appliquantun peu abusivement le fameux proverbe « mieux vaut pré-venir que guérir » au cas de l’inflation eurolandaise. Cettedécision a conclu une année caractérisée par un compor-tement plutôt versatile du marché monétaire européen. Ilfaut en effet rappeler le contexte économique particulierdans lequel la politique monétaire européenne a évolué.

L’année s’annonçait plutôt morose,au vu des premiers indi-cateurs conjoncturels sortis au plus bas, tous pays confon-dus. En particulier, l’IFO est passé de 96,3 à 93 au cours descinq premiers mois de l’année, témoin d’une croissancedes plus atones en Europe.A tel point qu’un biais baissier sur

la politique de la BCE s’est progressivement imposé.En outre,la baisse des taux directeurs opérée fin juin par la Banque deSuède,d’une ampleur significative de 50 pb,ainsi que celle de25 pb de la Banque d’Angleterre en août n’ont fait que nour-rir l’argumentaire des partisans d’une baisse des taux.

Pourtant, envers et contre tous, les autorités monétaireseuropéennes ont tenu,plaçant leur objectif de stabilité des prixau-dessus du soutien de l’activité. En effet, à la flambée duprix du pétrole (variations annuelles de + 30 % pour 2004 et+ 37 % en 2005) se sont ajoutées cette année deux nouvellessources potentielles de pressions inflationnistes.D’une part,le glissement annuel de l’agrégat M3 a atteint 8,4 % en sep-tembre,faisant craindre à la BCE qu’un excès de liquidité génèreune accélération des prix.D’autre part, la monnaie unique s’estfortement dépréciée face au dollar, chutant de 1,35 USD audébut de l’année 2005 à 1,20 USD douze mois plus tard,aprèsavoir touché un plus bas à 1,17 USD mi-novembre.Par consé-quent, en septembre, au plus fort de la flambée du pétrole, leglissement annuel de l’IPCH de la zone euro a atteint 2,6 %.Néanmoins, celui de l’indice hors éléments volatils est restéen repli par rapport à l’année 2004, passant même sous les1,5 % au second semestre et symbolisant l’absence des effetsde second tour tant redoutés par la BCE.

Ainsi, le marché monétaire européen a suivi un parcoursparticulièrement erratique. Ce dernier a du revoir sa posi-tion au rythme des déclarations, anticipant une baisse des

L’évolution des taux d’intérêt au cours de l’année 2005 a mis en exergue la déconnexion qui existe

sur le plan structurel entre les économies américaine et eurolandaise. Faisant pourtant face au

même risque inflationniste, dans une période caractérisée par la flambée du cours du pétrole,

les deux banques centrales n’ont pas eu à agir de la même manière, cette hausse des prix pétro-

liers ne s’étant pas transmise dans les mêmes proportions aux indices sous-jacents. Cependant, malgré un

écartement très marqué des taux monétaires, un aplatissement généralisé des courbes a été observé, du

fait semble-t-il de l’appétit des investisseurs étrangers pour les obligations américaines et des resserrements

monétaires de part et d’autre de l’Atlantique.

Taux d’intérêt:un soupçon d’aplatissement, saupoudrer de hausse des taux et laisser mijoter.

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Panorama 2005

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taux à la fin du printemps, puis une hausse à la fin de l’au-tomne. Le retour d’une conjoncture économique plusfavorable dans la plupart des pays eurolandais (l’IFO a ter-miné l’année au plus haut depuis août 2000) a en effet sonnéle temps du resserrement monétaire pour les faucons duConseil des Gouverneurs. Ce dernier a ainsi mis fin à cettelongue période de statu quo, portant le taux refi à 2,25 %.

De l’autre côté de l’Atlantique, l’action de la RéserveFédérale aura été sans appel.Chaque réunion du FOMC s’esten effet soldée par une hausse de 25 pb,portant le taux objec-tif des Fed funds à 4,25 % le 13 décembre. Le spread des tauxmonétaires n’a donc cessé de s’accroître au profit des tauxaméricains,atteignant 200 pb à la fin de l’année.Contrairementà son homologue eurolandaise, la Fed a brillé par la clarté etla régularité de son discours,exprimé d’une seule voix par lesmembres du FOMC.Seul le passage des deux ouragans Katrinaet Rita aura été l’occasion d’un vote dissident au sein duConseil du 20 septembre,M.Olson désirant disposer de plusd’informations concernant l’impact économique de ceux-ci.

L’écart s’est fortement creusé sur les marchés monétaires.

Sources : Fed, BCE, Bloomberg.

L’évolution des taux n’a pas affecté la croissance desEtats-Unis.Les estimations pour le troisième trimestre 2005ont d’ailleurs été revues à la hausse, la croissance du PIB attei-gnant 3,7 %.Sur l’ensemble de l’année,celle-ci demeure doncencore supérieure au niveau de croissance potentielle estiméà 3,2 % (filtre Hodrick-Prescott).Les ouragans du mois de sep-tembre n’auront pas réussi à faire fléchir ce rythme,stimulantmême la construction et, dans une moindre mesure, lesdépenses publiques.

Ainsi, après une hausse de 325 pb depuis le début de cecycle de resserrement monétaire, il apparaît qu’une grandepartie de la normalisation initiée mi-2004 a désormais étéréalisée.A l’approche du « taux neutre 1 »,un changement de

0,5

1,5

2,5

3,5

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jan-05 avr-05 juil-05 oct-05

(%)

Taux refi de la BCE Taux objectif des Fed Funds

discours a été opéré lors du dernier FOMC du 13 décembre:la politique de la Fed n’est plus qualifiée d’« accommodante »,laissant imaginer qu’un resserrement monétaire à chaqueFOMC n’est plus d’actualité.

Il n’est pourtant pas certain qu’après dix-neuf ans de prési-dence de la Fed,Alan Greenspan laisse l’économie américainetelle qu’il l’aurait souhaité. En effet, des pressions haussièrescontinuent de peser sur les prix,même hors énergie, et prin-cipalement dans le secteur immobilier.Après être repassé endeçà de la barre des 10 % au printemps 2005, le glissementannuel moyen des prix des logements existants a repris sa pro-gression, fluctuant toute la seconde moitié de l’année autourdes 11 %.Ceci semble être lié au comportement des taux longsqui n’ont pas réagi aux mouvements des taux monétaires dansdes amplitudes habituelles.En outre, l’évolution des salaires encette fin d’année (+ 3,2 % en glissement annuel en novembre)laisse planer le spectre des fameux effets de second tour.Autotal, si l’inflation a opéré un net repli de 4,7 % en septembreà 3,5 % en novembre,du fait de l’évolution du prix du baril, l’in-dice sous-jacent est resté compris entre 2 % et 2,1 % depuis lemois de mai. En termes réels, le taux objectif des Fed fundsest resté négatif durant une grande partie de l’année,pour fina-lement atteindre + 0,55 % dès novembre.

Ainsi,Ben Bernanke,le successeur d’Alan Greenspan à la pré-sidence de la Fed,devrait avoir à agir dès le début de son man-dat,i.e.février 2006,afin de contenir ces pressions.Les marchés,trop imprégnés peut-être par son image « colombe »,n’envi-sagent pas que ce dernier ait à procéder à plus d’une hausse destaux objectifs des Fed funds. Il apparaît cependant que d’autresrelèvements des taux pourraient s’avérer nécessaires.

UNE ANNÉE 2005 SOUS LE SIGNE DEL’APLATISSEMENT DES COURBES DE TAUX.

Les taux longs européens et américains ont été plus cha-hutés au cours de l’année 2005 qu’en 2004. Cette évolu-tion n’a cependant pas été totalement coordonnée : si lestaux dix ans américains finissent l’année en hausse, sur lesniveaux de juin 2004 (4,50 %), les taux européens s’affichenten repli à 3,40 %, contre 3,65 % en début d’année.

Les taux ont poursuivi sur la tendance baissière amorcéefin 2004 jusque mi-février. C’est à cette période qu’AlanGreenspan,lors de sa première intervention de l’année devantle Congrès américain, a indiqué clairement son intention denormaliser les taux objectifs des Fed funds mais a surtout fait

1 Selon différentes estimations, ce denier serait situé entre 4,25 % et 4,75 %.

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Panorama 2005

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part de son incompréhension face au niveau « anormalement »bas des taux longs en période de resserrement monétaire.Cefameux « conundrum » (qui signifie énigme en anglais) aura étéun des thèmes de prédilection de la plupart des économisteset décideurs cette année, surprenant par son ampleur et sadurée.Le président de la Fed a essayé d’apporter des explica-tions à ce phénomène,citant notamment le développement desHedge Funds.La thèse la plus populaire a été formulée par BenBernanke qui soulignait le surplus d’épargne mondiale,souventdemandeuse de Treasuries. Cet argument a d’ailleurs étéconforté par la hausse enregistrée par les chiffres du Trésoraméricain retraçant le volume des achats étrangers de titresnets,passant de 40 Mds en mars à 107 Mds en octobre.Cettedynamique acheteuse a été notamment alimentée par une acti-vité impressionnante des acteurs asiatiques et tout particuliè-rement les banques centrales,principalement chinoise et japo-naise,détentrices de réserves importantes de dollars à investir.

Un rebond des taux longs des deux côtés de l’Atlantique,quoique plus sensible aux Etats-Unis qu’en Europe, a suivi cediscours.Le 10 ans américain s’est ainsi tendu de près de 70 pben un peu plus d’un mois et demi (début février jusqu’à fin mars),contre seulement 35 pb en Europe.La différence s’explique biensûr par la déconnexion qu’on a pu observer alors entre les deuxéconomies.Cependant, après le 28 mars, une seconde baissedu chiffre de la confiance des consommateurs du ConferenceBoard (103 pour le mois de mars après 104,4 et 105,1 lesmois précédents) et par la suite un rally obligataire ont stoppénet cette tendance haussière. Le marché anticipait donc tropde hausses de taux et de ce fait, les rendements dix ans améri-cains ont corrigé de 19 pb en trois jours (de 4,64 % à 4,45 %le 1er avril).La chute s’est poursuivie les mois suivants et le pointbas de l’année a ainsi été atteint le 30 juin aux Etats-Unis,le tauxobligataire 10 ans tombant à 3,91 %.La barre des 4 % n’avait pasété franchie depuis mars 2004.

Année hésitante pour les taux longs.

Sources : Fed, BCE, Bloomberg.

2,8

3,2

3,6

4,0

4,4

4,8

jan-05 avr-05 juil-05 oct-05

(%)

Zone euro : taux 10 ans Etats-Unis : taux 10 ans

Comme souvent, les rendements européens ont été entraî-nés par leurs homologues américains dans cette forte baisse.Les anticipations d’une baisse des taux directeurs de la BCEprésentes à la fin du printemps ont amplifié le mouvement,repoussant le taux 10 ans vers un plus bas historique à 3,13 %.Parmi les facteurs aggravants, le vote négatif à la constitutioneuropéenne de la France et des Pays-bas, deux pays fonda-teurs,s’est ajouté aux perspectives économiques pessimistes.

La correction estivale à laquelle nous avons assisté ensuitea été initiée par l’accélération de l’activité et le rebond deschiffres d’inflation observés aux Etats-Unis. Les taux améri-cains ont atteint 4,40 % mais ont buté sur ce seuil,pour reve-nir sur les niveaux du début de l’été suite au passage deKatrina.Cependant, l’accélération de l’inflation, liée aux plushauts historiques atteints par le baril de pétrole (70 $/bl le30 août à New York),a permis un rebond plus important destaux longs américain et européen tout au long de l’automne.En outre, le mois d’octobre a été marqué par une activitéimportante des établissements porteurs de contrats mort-gage. Les niveaux atteints par les taux longs ont en effetaffecté la duration de ces derniers, provoquant une venteimportante de futures T-notes. Côté européen, le durcisse-ment du discours des membres de la BCE vis-à-vis des pres-sions inflationnistes a été le principal guide du marché à l’au-tomne.Ainsi, le taux 10 ans a clôturé l’année en léger replià 4,39 % aux Etats-Unis, et à 3,34 % en Europe.

Sur l’année, les courbes se sont donc aplaties de façonimportante.La pente swap 2 ans/10 ans européenne est pas-sée de 109 à 44 pb et le spread US a connu une évolutionencore plus marquée, passant de 118 à 10 pb. La rapidité duphénomène est expliquée par l’effet conjoint des resserre-ments de la Fed et des pressions acheteuses de Treasuries surle secteur 10 ans.Sur la partie plus longue des deux courbes,la dynamique est différente et ce sont les réformes des fondsde pension qui ont marqué l’actualité.

LES RÉFORMES DES FONDS DE PENSION.

En effet, si une actualité a été particulièrement étudiée parles opérateurs en 2005, il s’agit probablement du feuilleton« réformes des fonds de pension », avec les Pays-Bas commeacteur principal.Depuis un an, ces réformes, que ce soit auxPays-Bas,en Suède,au Royaume-Uni ou encore aux Etats-Unis,sont à l’origine d’un engouement important pour les papierslongs EUR et US et de la mise en place de positions d’aplatis-sement sur le 10 ans/30 ans (du fait de pressions acheteusestrès importantes).

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L A L E T T R E D E S E T U D E S É C O N O M I Q U E S

Panorama 2005

16

Dans le cadre de la reforme effectuée aux Pays-Bas, la dateinitiale de mise en place,qui était fixée au 1er janvier 2006,a étérepoussée à janvier 2007.Les différents points de cette réforme(cover-ratio de 105 % minimum,actifs évalués sur une base Mark-to-Market,augmentation de la duration des actifs à 15 ans etc.),qui sont similaires pour les autres pays,semblaient à la fois dif-ficiles à appliquer et impopulaires dans l’intervalle de tempspréalablement défini. Cette impopularité est expliquée parla combinaison de deux facteurs :manque de temps et taux 30ans inférieurs à 4 % en Europe. Les gestionnaires de cesfonds n’avaient aucune envie d’investir sur un marché où lesrendements sont historiquement bas (3,80 % pour le 30 ansswap et 3,64 % pour le 30 ans Bund).Mais,même si la date butoira été repoussée, la donne n’en sera pas modifiée pour autantpuisque les besoins de papiers longs sont colossaux.

A titre d’exemple, les seuls fonds hollandais ont des actifsen portefeuilles (obligations et actions) estimés au total à 530Mds d’euros.En valeur réelle et en partant de l’hypothèse que30 % à 50 % de ce montant devrait être couvert par desobligations (afin d’atteindre l’objectif d’un cover-ratio de 105 %),les flux attendus par le marché sont évalués entre 115 et 205Mds d’euros (25 Mds déjà effectués). En 2005 et afin de pou-voir estimer le chemin restant à faire,près de 50 Mds d’eurosde papier souverain maturité 30 ans ont été émis en zoneeuro.L’appétit pour les papiers de longue maturité ne risquepas de se tarir mais le niveau anormalement bas des taux estun facteur à prendre en compte. En effet, afin de compenserle manque à gagner généré par la faiblesse des taux, lesfonds de pension pourraient être amenés à utiliser des pro-duits structurés optionnels pour augmenter la duration deleurs portefeuilles et ainsi combler l’écart de durationactuel (10 ans environ). Concernant les Etats-Unis, le gou-vernement américain a estimé que le déséquilibre actif – pas-sif s’élevait à 450 Mds de dollars ce qui a notamment expliquéla décision du Trésor US concernant le reprise de l’émissionde T-bonds 30 ans a priori dès le premier trimestre 2006.

La pression sur les parties longues des courbes EUR et US nedevrait donc pas diminuer et les risques d’inversion (observésen fin d’année sur la partie très longue de la courbe européennepour les maturités supérieures à 30 ans et la partie courte de lacourbe des Treasuries) vont donc être croissants.

LE SPREAD INTER-ZONES S’ÉLARGIT.

Le spread Etats-Unis/Europe, qui était redevenu favorableaux Etats-Unis en fin d’année dernière, s’est élargi tout aulong de l’année. Ce phénomène apparaît tout à fait en ligne

avec les évolutions conjoncturelles enregistrées par chacunede ces zones.

Les taux courts ont intégré les anticipations de mouvementsdes taux directeurs, le spread a donc suivi une tendance haus-sière régulière jusqu’en octobre, soulignant la régularité etle souci de transparence de l’action de la Fed tout au longde l’année.Le seul décrochage notable de cette tendance,situéautour du 2 septembre, souligne les doutes découlant de lacatastrophe de Katrina. Cependant, les anticipations d’unepause dans la politique de la Fed se sont rapidement dissipéesétant donné le discours des membres de l’Institution.

Le spread de taux 3 mois a ainsi atteint un plus haut à 203 pble 4 novembre,date à partir de laquelle les anticipations d’unehausse des taux de la BCE extraites des contrats futures sesont concrétisées par une augmentation significative des tauxcourts spot.Au cours des derniers mois de l’année,nous avonsdonc assisté à une période de fluctuation du spread à l’inté-rieur d’un range de 10 pb variant au gré des anticipations d’uneseconde hausse des taux européens en 2006.

Le spread est de plus en plus favorable aux taux américains.

Sources : Fed, BCE, Bloomberg.

Comme à l’accoutumée, l’évolution du spread de taux longsa été plus erratique.Cependant, la même tendance haussières’est observée, témoin de la robustesse de l’économie amé-ricaine comparée à la fragilité eurolandaise. Le spread a ter-miné l’année à 106 pb, après avoir touché un plus haut à122 pb le 25 octobre. Ce niveau est remarquable, il faut eneffet remonter à juillet 1999 pour observer un tel écart entreles deux zones.

Sophie Chardon et Cyril Regnat

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Ecart de taux 3 mois (américain - eurolandais) - G -Ecart de taux 10 ans (américain - eurolandais) - D -

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LA FED DONNE LE DÉPART.

Après trois années de dépréciation, le dollar avait terminél’année 2004 à des planchers face aux principales monnaies duglobe. Dépassant les 1,36 contre l’euro et les 1,92 contre lalivre sterling le 28 décembre, le billet vert avait flirté un moisplus tôt avec les 102 contre yen.Dès les tout premiers joursde 2005,le dollar s’est toutefois engagé sur une tendance haus-sière vis-à-vis de ces devises,qui s’est poursuivie tout au longde l’année.Il a ainsi gagné respectivement 15 %,14 % et 11,7 %par rapport à l’euro, au yen et à la livre. En termes effectifs, ils’est apprécié de près de 3 % sur l’année.

Cette hausse a, de fait, invalidé l’une des principalesexplications alors avancée pour justifier la baisse des annéesprécédentes,à savoir la montée des « déficits jumeaux » (défi-

cits budgétaire et de la balance courante). La remontée dudollar en 2005 s’est en effet opérée alors que ceux-ci,en par-ticulier le déficit courant, ont continué de se creuser. Cetteévolution a rappelé qu’il n’existait aucun lien mécanique entrela trajectoire du solde courant et celle du taux de change,tant sur les plans empirique que théorique.En l’occurrence,au delà des éléments purement spéculatifs (liés aux seulesanticipations des investisseurs) pouvant influencer les varia-tions des devises, solde courant et taux de change se dédui-sent l’un et l’autre des fondamentaux structurels (propen-sion à épargner, productivité des facteurs, etc.) et de lasituation conjoncturelle relative des pays concernés (vigueurde la demande intérieure,politiques conjoncturelles).Or cesderniers n’impliquent nullement une relation univoque entreles deux variables.Ainsi,dès lors qu’elle est financée sans dif-

Après trois années de nette dépréciation face aux principales devises de la planète, le dol-

lar a amorcé dès le début 2005 un net mouvement de remontée, qui s’est poursuivi tout

au long de l’année. Le resserrement monétaire engagé à l’été 2004 et la constance affi-

chée par la Fed dans ce processus ont finalement eu raison des craintes qu’avaient susci-

tées le creusement des déficits jumeaux sur la période précédente. Malgré les discours parfois ambigus

des dirigeants eurolandais et les incertitudes nées de la flambée du pétrole, l’inversion du spread de

taux monétaires de part et d’autre de l’Atlantique a ainsi permis à l’euro un repli salutaire, la monnaie

unique tendant progressivement vers sa parité d’équilibre. Les autres devises européennes ont également

perdu du terrain face au billet vert, dans des proportions toutefois inférieures. La livre, en particulier, a

conservé une certaine vigueur, n’intégrant qu’avec retard le ralentissement conjoncturel britannique. Dans

le même temps, le dynamisme de la croissance des pays d’Europe centrale et orientale a limité la décrue

de leurs devises, ces dernières s’appréciant en conséquence face à l’euro. La remontée du taux des Fed

funds a également induit un arbitrage au désavantage du yen. Par ailleurs, 2005 a vu la fin de certains

régimes de fixité en Asie, au premier rang desquels figure le yuan. Seules finalement les autres devises du

continent américain (Amérique latine et Canada) ont poursuivi, à quelques exceptions près, leur appré-

ciation face au dollar.

Taux de change:2005, l’année de la remontée du dollar.

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ficulté,comme c’est le cas en ce qui concerne les Etats-Unis,la hausse du déficit courant n’est pas incompatible avec uneappréciation de la monnaie. Dans la pratique, d’ailleurs, lesphases de creusement du déficit courant américain avaientsouvent été associées à des périodes d’appréciation dudollar.En outre, les fondamentaux relatifs à la croissance plai-daient plutôt, sur les dernières années, pour une apprécia-tion du dollar.

Ce n’était donc pas tant le niveau du déficit courant en soique les anticipations (en l’occurrence non fondées) surd’éventuelles difficultés à le financer 1 qui avaient favorisé laglissade du billet vert jusqu’en 2004. Mais c’est surtout laforte baisse du taux des Fed funds entre janvier 2001 etjuillet 2003 (- 550 points de base) qui, en créant un écartnégatif avec les taux eurolandais et britannique (respective-ment - 100 points de base face au taux de la BCE et - 300points de base en moyenne face à la BoE) avait au final per-mis au dollar de reculer de 16 % en termes effectifs entrois ans.

La politique des petits pas de la Fed finit par convaincre les marchés.

Sources : Fed, Datastream.

Dans ces conditions, le mouvement de resserrementengagé en juin 2004 par la Fed était logiquement de natureà inverser la tendance. Insuffisante dans les premiers moispour véritablement convaincre les marchés et empêcher unenouvelle glissade du dollar, la constance de la Fed (via la remar-quable régularité de ses interventions) est finalement par-venue à inverser les anticipations.En outre, la nouvelle admi-nistration Bush,entrée officiellement en fonction début 2005,a semble-t-il pris conscience que la politique de benign neglect

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Taux de change effectif du dollar - G - Taux des Fed funds - D -

face au dollar avait peut-être été trop loin, les effets néga-tifs d’une dépréciation pouvant à terme l’emporter sur sesavantages.Autrement dit, il n’était pas dans l’intérêt des Etats-Unis de laisser le dollar se déprécier trop fortement et troplongtemps, sous peine d’affaiblir l’hégémonie du billet vert(et, par là même, la capacité du pays à financer ses déficits).Le dollar cessant d’être simplement « le problème desautres » 2, l’heure était alors venue pour lui de s’apprécier.

MALGRÉ QUELQUES RÉSISTANCES,L’EURO SE REPLIE ENFIN…

L’euro est la principale devise à avoir profité du renforce-ment du dollar. Le mouvement a été initié par le cinquièmerelèvement du taux des Fed funds le 14 décembre 2004, quia permis au taux directeur américain, à 2,25 %,de passer au-dessus du taux refi eurolandais (2 %), créant ainsi un arbi-trage favorable au billet vert. Le spread s’est en outre élargitout au long de l’année, le taux des Fed funds continuant àaugmenter régulièrement (passant de 2,25 % à 4,25 %), tan-dis que la BCE maintenait son statu quo sur les onze premiersmois de l’année.

Les craintes d’une hausse prématurée du taux refi ont en diverses occasions freiné le repli de l’euro.

Sources : BCE, Datastream.

Alors que la remontée des taux américains, largementattendue, aurait pu se traduire par des mouvements relati-vement réguliers des devises, la trajectoire de l’EUR/USD aété fréquemment perturbée par les doutes récurrentsconcernant l’orientation de la politique monétaire eurolan-

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jan-05 mars-05 mai-05 juil-05 sep-05 nov-05

Taux de change de l'euro/dollar

1 EUR = x USD

1 Alimentées entre autres par diverses rumeurs concernant l’effritement supposédu dollar dans les réserves de change de certaines banques centrales.

2 En référence à la célèbre formule de John Connally, secrétaire du Trésor sous lePrésident Nixon : « C’est notre monnaie, mais votre problème ».

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daise. En plusieurs occasions, les craintes d’une remontéeprématurée du taux refi (alimentées notamment par les dis-cours de divers membres du conseil des gouverneurs de l’ins-titution de Francfort) ont ainsi fait remonter l’euro.

Ce fut notamment le cas en février et mars, après les pro-pos alarmistes de certains dirigeants de la BCE relatifs à lavigueur de l’agrégat M3. Bien qu’il soit désormais reconnuque M3 ne constitue pas,au moins à court ou moyen terme,un bon indicateur avancé de l’inflation, et malgré les statis-tiques décevantes concernant la conjoncture eurolandaise,les marchés ont alors estimé probable une double interven-tion de la BCE avant la fin de l’année3. Ces craintes ontd’ailleurs été renforcées par des statistiques américainesmoins favorables qu’attendu,en particulier la publication descomptes extérieurs américains révélant un nouveau creu-sement du déficit de la balance courante au quatrième tri-mestre 2004 (- 187 milliards de dollar).Le maintien d’un tauxrefi à 2 % alors que la Fed poursuivait sa politique de petitspas, puis la multiplication de bonnes statistiques aux Etats-Unis, ont finalement permis à l’EUR/USD de reprendre satrajectoire baissière. La faiblesse de l’activité eurolandaise amême ponctuellement fait naître,parmi les investisseurs, l’es-poir d’une baisse du taux refi (la probabilité d’un tel mouve-ment avant septembre s’est élevée à 24 % fin juin ;une situa-tion comparable s’est également observée fin septembre).L’ensemble de ces éléments a permis à la monnaie euro-péenne de franchir la barre des 1,20 tout début juillet.

La trajectoire de l’euro a une nouvelle fois été perturbéeau cours de l’été.La vigueur des prix pétroliers et les craintesexcessives sur d’éventuels effets de second tour ont de nou-veau fait craindre une remontée des taux eurolandais aucours de l’automne. Dans le même temps, les déclarationsde B.Bernanke (en position de remplacer A.Greenspan début2006), relatives à la gravité de la situation américaine aprèsl’ouragan Katrina ont suscité des doutes sur la poursuite duresserrement américain, ravivant la spéculation sur l’euro,avant que celui-ci ne rejoigne finalement sa trajectoire bais-sière jusqu’au début du mois de décembre, date du relève-ment du taux refi à 2,25 %. Si cette intervention a logique-ment entraîné une légère remontée de l’euro sur les toutesdernières semaines, la monnaie unique termine néanmoinsl’année à 1,18, soit un niveau de 22 % inférieur à celui pré-valant un an plus tôt.

… ENTRAÎNANT LES AUTRES DEVISESEUROPÉENNES DANS SON SILLAGE.

La livre sterling a,dans les grandes lignes,suivi la trajectoirede l’EUR/USD.Sa parité face à la monnaie unique a en consé-quence relativement peu évolué sur l’année (+ 3,2 %). Uneappréciation sensible a toutefois été observée au premiersemestre (+ 6 %), les investisseurs n’ayant pas encore inté-gré le ralentissement conjoncturel et l’apaisement des priximmobiliers qui s’étaient esquissés fin 2004, anticipant enconséquence une poursuite du resserrement monétaire (lavigueur de la croissance au cours des deux années précé-dentes avait, à quatre reprises en 2004, conduit la BoE àaccroître son taux directeur).Le 25 février, les marchés esti-maient ainsi à 65 % la probabilité qu’un resserrement moné-taire ait lieu en mars.

La livre, constante face à l’euro… en moyenne.

Source : Datastream.

Ce mouvement s’est brutalement interrompu début juillet.La perspective d’une baisse des taux de la BoE, notammentaprès les attentats de Londres du 7 juillet (une baisse de 25points de base est intervenue le 4 août) a permis de rame-ner la livre à un niveau proche des 0,70 contre euro puis de0,68 sur le reste de l’année.

Les devises des pays d’Europe centrale et orientale ontégalement, comme l’année précédente, suivi peu ou prou lemouvement de l’euro face au dollar.Elles se sont donc dépré-ciées par rapport au billet vert, dans une proportion diffé-rente, toutefois, de la monnaie unique. En demeurant hono-rables (bien qu’en retrait par rapport à ce qui avait étéobservé en 2004), les performances macroéconomiquesde la région ont apporté un support aux devises locales. Enconséquence, le mouvement d’appréciation vis-à-vis de l’euro

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jan-05 mars-05 mai-05 juil-05 sep-05 nov-05

Taux de change de l'euro/livre

1 EUR = x GBP

3 Le taux implicite des contrats futures euribor permet par exemple d’évaluer à107 % la probabilité d’une hausse avant septembre et 180% avant décembre (uneprobabilité supérieure à 100 % signifie que les marchés anticipent une hausse supé-rieure à 25 pb.Ainsi, une probabilité de 180 % signifie que le marché considèrecomme certaine une première hausse de 25 pb et estime à 80 % la probabilitéd’une seconde hausse de 25 pb.

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enregistré dans la région en 2004 s’est poursuivi l’an dernieren Pologne et en République tchèque.

Hors dérapage budgétaire, les devises des pays de l’ests’apprécient.

Sources : BCE, Datastream.

* une courbe croissance signifie une appréciation de la devise face à l’euro.

Après un premier semestre assez erratique, le zloty et lacouronne tchèque se sont engagés sur une tendance plusnettement haussière face à l’euro à partir de l’été.Une pausea été observée à l’automne, liée à la tenue des élections légis-latives et présidentielles en Pologne (en septembre etoctobre). En fin d’année, l’appréciation des deux devises atoutefois repris de plus belle. En Hongrie, en revanche, l’an-nonce du dérapage budgétaire (estimé à 6,1 % du PIB pour2005) et la probable décision de reporter l’adoption de l’euroau-delà de 2010 ont suscité la défiance des investisseurs. Leforint s’est en conséquence déprécié, en particulier à partirde septembre.Au final, depuis le 1er janvier, le forint a perdu2,8 % face à l’euro contre une appréciation de 6,1 % et 4,5 %respectivement du zloty et de la couronne tchèque.

LE YEN À DES PLUS BASDE PRÈS DE TROIS ANS.

A l’inverse des autres grandes devises, la monnaie japo-naise était, sur la période 2002-2004, intrinsèquement appe-lée à s’apprécier (l’excédent courant atteignait respective-ment 3,2 % et 3,8 % du PIB en 2003 et 2004, le comptefinancier présentant dans le même temps un solde excé-dentaire de 1,6 % et 0,4 %).Or, l’an dernier,ces éléments haus-siers ne se sont qu’en partie dissipés. En effet, si le comptefinancier est devenu déficitaire, le Japon a en revanche conti-nué d’accumuler des excédents courants significatifs (de

Parités des devises d'Europe de l'Est face à l'euro

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1 UM = x EUR, 01/01/2005 = 100

l’ordre de 3,5 % du PIB). Surtout, la croissance est restéeappréciable (le PIB devrait avoir progressé de 2,5 % en 2005et une croissance de 2,8 % est attendue pour cette année).Enfin, la Bourse de Tokyo a connu un succès remarquable (leNikkei a progressé d’environ 40 % sur l’année).Ces élémentsétaient donc a priori de nature à favoriser une poursuite del’appréciation du yen face au dollar en 2005.

Le yen, guidé par le spread de taux monétaires.

Source : Datastream.

Les marchés se sont toutefois davantage focalisés sur lapolitique monétaire qui est devenue l’an dernier l’élémentprépondérant en matière de détermination du change. Laremontée du taux des Fed funds a en l’occurrence permis àl’écart de rendement d’atteindre un niveau jugé suffisant pourrémunérer le risque de change (447 points de base en find’année sur le LIBOR trois mois contre 251 pb un an aupa-ravant). La dépréciation du yen a été sensible (-12,9 %). Leniveau des 110 yens pour un dollar, jusqu’ici seuil de résis-tance,a été dépassé mi-septembre.Celui des 115,qui n’avaithistoriquement été franchi qu’au cours des périodes précé-dant une récession (ce fut le cas en 1997 et en 2001), a étédépassé à la mi-octobre, le yen flirtant même début décembreavec les 122. La dépréciation semble toutefois excessive auregard des fondamentaux. Le yen est donc, à plus ou moinsbrève échéance, appelé à corriger cette faiblesse.

YUAN, RINGGIT, DOLLAR DE HONGKONG :BEAUCOUP DE BRUIT POUR RIEN.

Les tensions à l’appréciation du yuan nées lors du sommetde Dubaï en septembre 2003 (où les membres du G7 ont,plus que par le passé, regretté la sous-évaluation de la devisechinoise) se sont poursuivies tout au long de 2004 et lors du

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Parité du dollar/yen Différentiel de taux 3 mois

1 USD = x yen

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premier semestre, comme en témoigne l’évolution descontrats à terme non livrables en yuan.Comme elles l’avaientlaissé entendre l’année précédente, les autorités chinoisesont en partie cédé à ces pressions en procédant, le 21 juillet,à un léger assouplissement du régime de change. Cettemesure s’est traduite de facto par une réévaluation de la paritédu yuan face au dollar (+ 2,1 %).Au-delà de cette hausse, tou-tefois, le régime de change chinois n’a dans les faits que peuévolué.Dans la pratique,en effet, le renminbi reste largementsous contrôle. Même s’il tend à s’apprécier légèrement (de8,11 pour un dollar le 21 juillet, le cours a atteint 8,07 le30 décembre, soit une appréciation de seulement 0,5 %), ilprésente une volatilité toujours extrêmement faible par rap-port au dollar.

Compte tenu notamment de la fragilité de son secteur ban-caire, la Chine ne peut en effet se permettre une apprécia-tion trop rapide de sa devise. D’ailleurs, les entreprises chi-noises elles-mêmes,qui réalisent encore la majorité de leurstransactions en dollars,auront encore besoin de temps pourpouvoir supporter une réelle flexibilité du renminbi. Pourl’heure, tant l’expérience que les outils de gestion durisque de change demeurent embryonnaires. Enfin, un cer-tain nombre d’indicateurs conjoncturels suggère que, bienque toujours forte, la croissance chinoise est désormaissur la voie du ralentissement.Dans ces conditions, le rythmed’appréciation du yuan ne devrait pas s’accélérer.Pour autant,après une période d’accalmie à la suite du changement derégime, la spéculation sur le yuan a repris de plus belle en find’année. Les tensions se sont notamment accrues à la suitedu discours de John Snow devant le Parlement américain qui,bien que saluant l’appréciation récente du yuan, a en effetrappelé que la devise chinoise demeurait sous-évaluée.

La Malaisie a elle aussi opéré, le 21 juillet,un changement deson régime de change,passant à un régime de flottement admi-nistré. Depuis cette date, la Banque de Malaisie a toutefoisexercé une politique très active afin d’éviter une appréciationde sa devise.En pratique,donc,la réévaluation du ringgit consé-cutive à l’abandon du peg a été suivie d’une dépréciation pro-gressive, le ringgit retrouvant en fin d’année la parité quiprévalait avant le changement de régime.

Enfin, la spéculation sur le yuan en début d’année a égale-ment influencé l’évolution du dollar de HongKong (HKD) etconduit à une réforme de son régime de change le 18 mai2005. Le currency board en place depuis 1983 ne prévoyaitqu’une « limite faible » (valeur plafond de 7,85 HKD pour undollar) qui ne prémunissait le HKD que contre des pressionsbaissières.Or,HongKong demeurant la place boursière la plus

sûre pour investir sur des valeurs chinoises, les anticipationsde réévaluation du yuan depuis 2003 se sont traduites par despressions haussières sur le HKD, celles-ci ayant pour consé-quence un gonflement des réserves de change. Pour en limi-ter l’impact sur la masse monétaire, l’Autorité monétaire aintroduit, le 18 mai, une « limite forte » (valeur plancher de7,75 HKD/USD).Au final, le dollar de HongKong est désor-mais supposé évoluer dans une zone dite de convertibilité,comprise entre 7,75 et 7,85 et centrée sur le taux de changecible (7,8). Dans la pratique, néanmoins, l’accumulation desflux entrants de capitaux dans le pays contribue à maintenirle taux de change dans le bas de la fourchette (7,75).

LE PÉTROLE AFFAIBLITLES AUTRES DEVISES ASIATIQUES…

La phase de réappréciation du dollar a concerné la plu-part des autres monnaies asiatiques émergentes.Outre le res-serrement de la politique monétaire américaine, le ralentis-sement de la croissance dans la région après une année2004 exceptionnelle, combiné à une dégradation des soldescourants, a favorisé l’affaiblissement des monnaies locales.L’évolution des cours du pétrole a également constitué un élé-ment déterminant. En effet, compte tenu des subventionsaccordées au carburant, la flambée estivale a lourdement pesésur les finances publiques. Les craintes de dégradation dessoldes budgétaires ont renforcé la dépréciation de la plu-part des devises asiatiques 4.Le phénomène a été plus marquéen Indonésie où le dérapage budgétaire a conduit les autori-tés à réviser par deux fois le budget 2005. L’apaisement desprix pétroliers à partir de l’automne, l’accélération des res-serrements monétaires dans la région et la suppression dessubventions sur les carburants ont toutefois permis une rela-tive stabilisation des changes au cours du dernier trimestre.

4 Le peso philippin constitue une première exception,ayant bénéficié l’an dernierdes premières retombées positives des mesures d’assainissement budgétaire enga-gées en 2004. La Corée du Sud s’est également distinguée des autres pays, lewon ayant enregistré une nette appréciation au second semestre,malgré une poli-tique monétaire relativement plus accommodante que ses homologues et unecroissance relativement moins dynamique.

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Panorama 2005

22

Les devises asiatiques fléchissent sur une grande partie de l’année.

Source : Datastream.

* une courbe croissance signifie une appréciation de la devise face au dollar.

… MAIS SOUTIENT LES DEVISESAMÉRICAINES.

Les devises latino-américaines ont,dans l’ensemble,pour-suivi en 2005 le mouvement d’appréciation face au dollarconstaté au cours des années précédentes.L’appréciation laplus forte a été observée au Brésil, le réal affichant uneprogression de 15 %.Outre une situation macro-économiquefavorable, ce renchérissement traduit le redressement descomptes externes brésiliens (depuis trois ans, le paysengrange des excédents courants significatifs) et la moindredépendance du solde public brésilien à l’égard de l’extérieur(la dette publique externe représente désormais moins de10 % du total,contre 28 % il y a trois ans),deux améliorationsqui ont valu au pays un relèvement de ses notations en find’année par plusieurs agences.

Parités des devises

88

90

92

94

96

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100

102

104

jan-05 mars-05 mai-05 juil-05 sep-05 nov-05

Taiwan Indonésie

1 UM = x dollars, 01/01/2005 = 100

Les performances brésiliennes soutiennent le réal

Source : Datastream.

* une courbe croissance signifie une appréciation de la devise face au dollar.

Le peso mexicain a également affiché une progressionremarquable,profitant tout particulièrement du niveau élevédu cours du pétrole.Le Mexique occupe en effet la huitièmeplace au sein des pays exportateurs de cette matière pre-mière (avec 4,3 % des exportations mondiales).Au final, lepeso mexicain s’est apprécié face au dollar de 5,3 % sur l’an-née.Suivant une tendance similaire, les pesos chilien et colom-bien ont affiché des progressions de respectivement 9,1 %et 4,7 %,alors que les monnaies argentine et péruvienne recu-laient de respectivement 2 % et 4,6 % 5.

Au nord du continent, après déjà deux années de francheappréciation, le dollar canadien (CAD) est resté vigoureuxface au dollar américain,malgré un spread de taux de plus enplus favorable à l’USD.Le CAD a lui aussi largement bénéfi-cié du soutien des cours des matières premières, en parti-culier des produits énergétiques dont il est exportateur net.Entre janvier et septembre 2005, l’excédent cumulé de labalance des marchandises a dépassé les 28 milliards de CAD.Toutefois, dans la mesure où le prix du baril est appelé à sestabiliser, le spread de taux monétaires Etats-Unis-Canadadevrait redevenir le principal déterminant du CAD, plai-dant alors pour un repli de la devise canadienne.

Carol Hainaut

Parités des devises latino-américaines face au dollar

95

100

105

110

115

120

125

jan-05 mars-05 mai-05 juil-05 sep-05 nov-05

Brésil Mexique Argentine

1 UM = x dollars, 01/01/2005 = 100

5 En Argentine, le remboursement anticipé de la dette envers le FMI, suggérantune éventuelle émancipation du pays à l’égard de l’institution mondiale, a sus-cité la défiance des investisseurs. La perspective des élections présidentielles auPérou, et notamment la montée dans les sondages d’un candidat de gauche, ontégalement affaibli la devise péruvienne.

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2005 : L’ANNÉE DES PLACESEUROPÉENNES ET JAPONAISES.

Après la (relative) pause observée en 2004 sur la quasi-totalité des marchés d’actions, les cours ont repris un capnettement ascendant en 2005. Soutenus par des taux longstoujours au plancher 1, les grands indices européens et japo-nais ont ainsi affiché des rythmes de progression à deuxchiffres sur l’ensemble de l’exercice, la palme revenant aux

indices Topix et Nikkei qui se sont respectivement appréciésde 43,5 % et 40,2 % en un an.Avec un gain de « seulement »3 %, l’indice américain S&P 500 fait en revanche figure deparent pauvre dans la famille des grands indices boursiersnationaux.

Si 2004 s’était révélée plutôt décevante sur le plan des performances des grands indices (la plu-

part d’entre eux progressant de moins de 10 %, et encore grâce à un rebond au cours des deux

derniers mois de l’année), résultat d’autant plus surprenant que la croissance et les bénéfices

étaient au rendez-vous, 2005 restera comme l’année de la normalisation. A l’exception notable

des places américaines (pays en avance dans le cycle de profitabilité), les marchés actions ont en effet

connu des hausses à deux chiffres, des rythmes bien plus en phase avec l’évolution des résultats des socié-

tés cotées. Nouveauté de l’année écoulée : la Bourse de Tokyo s’est révélée la plus dynamique, signe

que les restructurations financières dans l’Archipel commencent à porter leurs fruits. Mais il n’y a pas

que dans les pays industrialisés que les actions se sont bien comportées. Les marchés émergents ont conti-

nué sur leur lancée des deux années précédentes, même si les performances de l’Asie font plutôt pâle figure

comparées à celles de l’Europe centrale et de l’Amérique latine.

Marchés actions: un très bon cru 2005

23

Des performances très hétérogènes en 2005.a/a, % 2004 2005

En monnaie En dollar En monnaie En dollar

locale locale

Dow Jones 3,1 3,1 -0,6 -0,6

S&P 500 9,0 9,0 3,0 3,0

NASDAQ 8,6 8,6 1,4 1,4

Nikkei 7,6 12,5 40,2 21,7

CAC 40 7,4 15,7 23,4 7,1

DAX 30 7,3 15,7 27,1 10,3

FTSE 100 7,5 15,3 16,7 4,4

Source : Datastream

Le S&P 500 en queue de peloton cette année.

Source : Datastream

Indice base 100 au 1er janvier 2005

90

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jan-05 mars-05 mai-05 juil-05 sep-05 déc-05

S&P 500 DJ Eurostoxx 50 Nikkei

1 Sans oublier les considérables rachats d’action (share buy-back), d’autant plusvolumineux,d’ailleurs, que les opérations de fusion-acquisition se sont multipliéesau cours de l’année.

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L A L E T T R E D E S E T U D E S É C O N O M I Q U E S

Panorama 2005

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Même si la volatilité des cours se situe toujours à un niveauexceptionnellement bas, il faut noter que cette progressionremarquable des bourses des pays développés n’a pas étéstrictement continue.Après un premier trimestre plutôt hési-tant,dans la foulée d’une année 2004 en demi-teinte, les coursont sensiblement marqué le pas au début du printemps,sousl’effet notamment des mauvais résultats trimestriels desentreprises du secteur technologique (IBM en particulier) etdes chiffres « décevants » de l’économie américaine publiésau mois d’avril (créations d’emploi moins fortes qu’attendu,déficit commercial record, ralentissement des ventes dedétail… le tout sur fond d’accélération de l’inflation). Unefois rassurés sur la vigueur de l’activité aux Etats-Unis, lesinvestisseurs ont ensuite réinvesti les marchés d’actions.Ceux-ci n’ont alors plus cessé de croître jusqu’au point deretournement des prix pétroliers (fin septembre si l’onexcepte les mouvements spéculatifs liés au passage descyclones sur le territoire américain). Les incertitudes surl’évolution des cours du brut et sur l’impact macroécono-mique des catastrophes naturelles outre-Atlantique ont alorstiré les cours vers le bas au mois d’octobre. Une fois cesdoutes dissipés, les marchés d’actions ont fini l’année dansune euphorie largement partagée.

Une volatilité toujours au plancher

Source : Datastream

Il convient de s’attarder sur le cas du Japon qui, en 2005,a confirmé son caractère atypique. Le succès de la Boursede Tokyo s’est vérifié non seulement en termes de prix (leTopix affiche un gain de 43,5 % et le Nikkei de 40,24 %) mais

volatilité historique(écart-type sur 3 mois des variations quotidiennes)

0,0

0,5

1,0

1,5

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4,0

jan-01 juin-01 déc-01 mai-02 nov-02 avr-03 oct-03 mars-04 sep-04 fév-05 aoû-05

S&P 500 DJ Eurostoxx 50 Nikkei 225

également en termes de volumes d’échanges. Le nombrede transactions sur le premier segment du marché tokyoïtea probablement dépassé la barre des 500 milliards sur l’an-née (soit une moyenne d’environ 2 milliards de titres échan-gés quotidiennement), contre à peine plus de 200 milliardsen 2002 et un précédent record historique de 357 mil-liards datant de 2004.

L’année boursière nippone peut être clairement scindéeen deux.Au cours des sept premiers mois, les indices japo-nais ont enregistré des hausses d’une ampleur similaire àcelles des grands indices européens. La rupture est interve-nue en août avec la dissolution de la Chambre basse duParlement par le Premier ministre Junichiro Koizumi suite aurejet de la réforme postale. Le triomphe électoral du gou-vernement sortant lors des législatives du 11 septembre adonné un avantage décisif aux réformateurs,dont la volontéaffichée de rupture avec l’interventionnisme public et d’as-sainissement des finances publiques a été très favorablementperçue par les investisseurs.

Dans ce contexte politique favorable, la dépréciation duyen face au dollar et à l’euro, notamment entre la mi-sep-tembre et la mi-décembre (8 % dans un cas, 5,5 % dansl’autre), a sensiblement accru les perspectives de résultatsdes valeurs exportatrices.Toutefois, l’aspect purement finan-cier des variations de change ne doit pas faire oublier que, infine, c’est la situation économique des différents secteurs quiest déterminante.En témoigne la relative contre-performancedes valeurs technologiques pour la deuxième année consé-cutive (l’indice Topix de ce secteur a affiché + 0,4 % en2004 et + 27,9 % en 2005,contre 43,5 % pour l’ensemble dela cote).

Deux secteurs ont connu des évolutions particulièrementsignificatives en 2005. D’une part, le secteur bancaire, qui asurperformé l’indice global pour la troisième année consé-cutive. D’autre part, les valeurs spécialisées dans l’immobi-lier,dont le cours a doublé en 2005 et presque quadruplé aucours des trois dernières années. Ces deux secteurs sonttout à fait symptomatiques de la crise qu’a traversée le Japonau cours des années 90, et leur retour en grâce (ainsi quecelui de la distribution, de gros comme de détail) constitueun indice supplémentaire que l’Archipel commence à retirerles fruits d’une décennie de restructurations.

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Panorama 2005

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La dissolution du 8 août 2005, l’électrochoc qu’attendait la Bourse de Tokyo.

Sources :Tokyo Stock Exchange, Datastream

LES MATIÈRES PREMIÈRESONT STIMULÉ LES GRANDS INDICES.

Aux Etats-Unis, les grands gagnants ont été sans contesteles groupes pétroliers,dont les profits opérationnels se sontenvolés avec les prix du brut (+ 44,5 % d’après Standard &Poor’s). Signe que les investisseurs ont correctement réper-cuté cette hausse des bénéfices sur les cours, les PER desentreprises pétrolières sont restés globalement stables surla période (entre 11 et 12 tout au long de l’année), contrai-rement aux deux autres grands secteurs en forte croissance(industrie et TMT, dont les profits opérationnels ont pro-gressé de 22,9 % et 18 % respectivement) affichant des PERen net repli (de 22,1 à 18 pour les entreprises industrielles,de 26,1 à 22,5 pour le secteur IT 2, de 18,9 à 15,1 pour lesTélécoms). Il faut sans doute voir dans cette contractiondu PER global de l’indice phare américain (qui est passé de17,9 à 16,4) les craintes des investisseurs quant aux capaci-tés des entreprises à maintenir, à long terme, des taux demarge aussi élevés.Même si, dans l’ensemble, les profits desentreprises non-pétrolières ne semblent pas avoir souffertde l’envolée des prix du brut, les gains de productivité réa-lisés récemment ne pourront en effet pas éternellement com-penser l’augmentation latente des coûts des matières pre-mières.Si d’aventure l’inflation devait s’accélérer, l’évolutionconjointe des prix des actions et des prix du pétrole obser-vée l’an dernier (cf.graphique) pourrait ne pas perdurer :c’est

50

100

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350

jan-98 jan-99 jan-00 jan-01 jan-02 jan-03 jan-04 jan-05Topix Topix - Banques Topix - Immobilier

Indice base 100 en 2003

bien parce que les tensions inflationnistes sont restées conte-nues que le pétrole cher n’a pas dégradé les valorisationsboursières.

Les actions (presque) comme le pétrole

Source : Datastream

En zone euro, tous les secteurs (à l’exception notabledes Télécoms) ont affiché des performances bien supérieuresaux anticipations du début d’année. Les plus fortes pro-gressions sont bien sûr à mettre au compte des entre-prises pétrolières,même si les services collectifs (utilities) etl’industrie ont enregistré des performances particulièrementhonorables.

LES CYCLES DE PROFITABILITÉ JUSTIFIENTLES ÉCARTS DE RENDEMENTSTRANSATLANTIQUES.

Longtemps invoqué pour expliquer les écarts de rende-ment entre les marchés américains et européens, l’argumentdu différentiel de croissance entre les deux rives del’Atlantique paraît bien fragile aujourd’hui. Force est deconstater en effet qu’avec une économie moitié moins dyna-mique, les pays de la Vieille Europe offrent des rendementspour un investissement en actions plus de trois fois supé-rieurs à ceux observés outre-Atlantique.A l’origine de cetteperformance se trouve bien évidemment l’internationalisa-tion des débouchés des entreprises du Vieux Continent,qui profitent de la vigueur de l’économie globale pourcompenser leur déficit de demande domestique 3.C’est l’une

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jan-05 mars-05 mai-05 juil-05 sep-05 déc-0540

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65

70USD

cours S&P 500 - G - cours WTI - D -

2 Secteur souffrant il est vrai d’un effet de base particulièrement défavorable,après une année 2004 où les bénéfices s’étaient inscrits en hausse de 56,7 %.

3 Les sociétés du CAC 40 – qui réalisent à l’export 70 % de leur chiffre d’affaire(comptant pour 80 % de leurs bénéfices) – sont un bon exemple en la matière.

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Panorama 2005

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des conséquences de la mondialisation : les cycles de crois-sance (nationale) et de profitabilité (macroéconomique etboursière) sont de moins en moins corrélés ; malgré unecroissance toujours atone mais dans un contexte de baisse(pérenne d’après nous) de l’euro, il n’y a donc rien d’éton-nant à ce que les places européennes valorisent vigoureuse-ment des profits en forte hausse.

La surperformance des indices européens vis-à-vis de leurshomologues américains s’explique aussi, dans une largemesure,par un effet de convergence. Il ne faut pas oublier eneffet que les marchés européens se sont redressés plus tar-divement que le marché américain (octobre 2002 à New-York, mars 2003 à Paris, Francfort et Londres) et que leS&P 500 s’était également moins déprécié que les grandsindices nationaux européens (quand les cours du S&P 500étaient divisés par deux entre leur plus haut de mars 2000et leur plus bas d’octobre 2002, les cours du CAC 40 et duDAX 30 étaient respectivement divisés par 2,9 et 3,7 entreseptembre 2000 et mars 2003).

La progression des indices européens s’explique avant tout par un effet de rattrapage

Source : Datastream

A court terme, la profitabilité des entreprises américainessemble aussi avoir franchi un pic. Le cycle de reconstitutiondes marges s’est achevé mais les entreprises ont tardé à(ré)investir,malgré les imposantes liquidités dont elles dispo-saient – elles ont pour la plupart préféré se désendetter.Selonce schéma, les investisseurs anticiperaient une progressionmoins soutenue des profits pour les années à venir.L’étude del’évolution du partage de la valeur ajoutée, clef des valorisa-tions boursières ces cinq dernières années aux Etats-Unis,conforte d’ailleurs cette intuition.Après trois années parti-culièrement défavorables aux salariés, les coûts salariaux uni-

Indice base 100 en 2000

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jan-00 sep-00 mai-01 jan-02 oct-02 juin-03 fév-04 nov-04 juil-05

S&P 500 DJ Eurostoxx 50

taires se sont significativement redressés sous les effets simul-tanés de la progression des salaires et du ralentissement(somme toute très relatif) des gains de productivité.

Le cycle de déformation du partage des revenus n’est pas à maturité en Europe

Sources : BEA, BLS, Datastream, Natexis Banques Populaires.

Les places financières européennes seraient ainsi jugéesplus attrayantes, le cycle de déformation du partage des reve-nus n’étant pas à maturité (progression des salaires réels bienplus limitée). En première analyse, et bien que les écarts sesoient resserrés, les niveaux de PER sur les marchés euro-péens laissent effectivement de l’espace pour une hausse descours 4.Le retour progressif des investisseurs institutionnels 5

sur ces marchés (depuis T1 2004 aux Etats-Unis,T3 2004 enzone euro) devrait d’ailleurs se traduire,dans un futur proche,par une sensible dilatation de ces multiples de valorisation.Tous les espoirs sont donc permis pour 2006.

-0,5

0,5

1,5

2,5

2000 2001 2002 2003 2004 2005-1

0

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3

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5

Profits réels - D - Productivité - G - Salaire réel - G -

Union Européenne

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2000 2001 2002 2003 2004 2005

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20

25

30Etats-Unis

4 En gardant bien à l’esprit que le marché américain est traditionnellement pluscher (prime de liquidité inférieure...).5 Douchés par l’éclatement de la bulle, fonds de pension, fonds communs deplacement et compagnies d’assurance avaient déserté les marchés d’actions.

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Panorama 2005

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Les valorisations européennes sont toujours attrayantes.

Source : Datastream

LES PAYS ÉMERGENTS CONTINUENTLEUR COURSE EN TÊTE.

A l’image de ce qui s’était produit en 2004, les évolutionsboursières des principaux marchés émergents ont étécontrastées d’une région à l’autre et les positions relativesdes trois grandes régions (Amérique latine,Europe centraleet Asie) sont restées les mêmes.Toutefois, les écarts de per-formance ont eu tendance à se réduire.

En termes de capitalisation, l’Amérique Latine caracole entête des régions ayant le plus progressé en 2005,avec un gainde plus de 40 % pour les sept principales places de la régionsur les onze premiers mois.L’effet change n’a joué qu’un rôlemineur,les monnaies latino-américaines n’ayant enregistré quede faibles variations face au dollar (à l’exception du real bré-silien et,dans une moindre mesure,du peso chilien).Les prin-cipaux indices ont été dynamisés par les secteurs liés auxmatières premières (notamment les métaux non ferreux) et,de manière générale,tout ce qui tourne autour de la construc-tion de logement (y compris les valeurs financières).En outre,contrairement à ce qu’on observe dans les pays industrialisés,la téléphonie mobile se porte bien, surperformant même lesindices de référence ces trois dernières années.Ceci contrastenettement avec l’atonie boursière des sociétés de téléphoniefixe au cours des deux dernières années, et la poursuite dumarasme des valeurs du crédit à la consommation, dont lestrois dernières années ont été à la baisse.

PER

5

10

15

20

25

30

35

jan-95 avr-97 aoû-99 nov-01 mars-04

S&P 500 CAC 40 DAX 30

Les marchés d’Europe Centrale ont également enregistrédes performances très honorables, bien qu’en repli parrapport à 2003 et 2004.Les trois principales places (Varsovie,Prague et Budapest, toutes trois ayant intégré l’Unioneuropéenne en 2004) ont vu leur capitalisation (expriméeen dollars) augmenter de 20 % au cours des onze premiersmois de 2005, contre un gain de 63,5 % un an auparavant et34 % en 2003.Le potentiel de rattrapage économique de cespays se traduit par des progressions impressionnantes desprincipaux indices. Sur les trois dernières années, le WIGpolonais s’est adjugé 148 %, le BUX hongrois 166,5 % et lePX50 tchèque 220 %.Parmi les secteurs plébiscités,on trouveévidemment tout ce qui se rapporte au pétrole et à l’éner-gie en général, mais également les valeurs pharmaceu-tiques.

Enfin, l’Asie s’est une nouvelle fois illustrée par des évo-lutions boursières en demi-teinte.Certes, le Kospi coréen aenregistré une hausse de 54 %, mais à la suite d’une trèsmodeste année 2004 (+ 10,5 %).Pour le reste,à l’autre extré-mité, les indices phares de HongKong, de Taiwan et de laThaïlande ont progressé de moins de 10 %,et celui de Malaisiea même fini l’année dans le rouge (- 0,8 %).Toutefois, entermes de capitalisation en dollars, l’année 2005 s’est ache-vée sur un gain de 20 % si l’on exclut la Chine.Mais la quasi-totalité de cette hausse s’explique par les performances deHongKong et,surtout,de la Corée.Contrairement à une idéelargement répandue, la langueur des marchés actions asia-tiques en 2005 ne s’explique pas par le faible dynamisme del’électronique.Ainsi, les principaux contributeurs à la haussede l’indice KOSPI en Corée sont Samsung Electronics etHynix Semiconductor. Le constat est le même pour l’autrepays présentant une sensibilité particulière au cycle de l’élec-tronique, à savoir Taiwan : sur les neuf valeurs ayant le pluscontribué à la hausse de l’indice composite de Taipei, six sontclassées dans la catégorie technologique. S’il fallait trouverdes points communs jouant à la baisse, la morosité des valeursfinancières viendrait sans doute au premier plan.A l’évidence,la tendance à l’aplatissement des courbes de taux d’intérêten 2005 a fait craindre que les revenus d’intermédiation (unecomposante essentielle des résultats bancaires dans la région)soient revus à la baisse,alors même que les rentabilités dansce secteur sont souvent précaires (notamment à Taiwan).

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Panorama 2005

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Enfin, la Russie et la Chine ont continué de se distinguer,mais dans des directions différentes. En Russie, l’indice RTS(dont la valeur est directement établie en dollars) a bondi de83 %, dans le sillage de la flambée des cours du pétrole (lesvaleurs liées à l’or noir représentent la moitié de l’indice) etdes métaux ferreux et non ferreux (dont le poids se situe à16 %).En outre, la Bourse de Moscou n’a pas eu à souffrir en2005 d’une affaire susceptible de détourner les investisseurscomme celle de Yukos en 2004. Inversement, la Bourse deShanghai a continué de se contracter, terminant l’année à - 8,3 %.Comme l’an dernier, la gouvernance des entrepriseschinoises défavorable aux actionnaires privés et la persis-tance du risque de voir l’Etat mettre sur le marché unepart importante des actions qu’il détient (avec la perspectivede dilution qui en résulterait) ont pesé sur les cours.Toutefois,la seconde moitié de 2005 s’est révélée plus favorable quele premier semestre, une embellie probablement due à unesérie de mesures visant à soutenir les marchés actions (baissede la fiscalité sur les dividendes, hausse du plafond d’inves-tissement des étrangers, interdiction des émissions d’actionsnouvelles tant que les actions existantes non échangeablesne sont pas devenues échangeables etc.).Pour l’heure,cettepolitique semble couronnée de succès, l’indice composite deShanghai ayant progressé de 14,8 % depuis le point bas du11 juillet. Ce faisant, la performance de l’indice phare de laRépublique populaire tend à redevenir attractive, du moinssi on la compare à son équivalent coté à HongKong (indicedes actions H), dont le gain depuis le 11 juillet est de 9,9 %.

Les bourses émergentes toujours en hausse en 2005.a/a, % 2004 2005

En monnaies En dollars En monnaies En dollars

locales locales

Corée du Sud 10,5 27,9 54,0 56,3

HongKong 13,2 13,0 4,5 4,8

Singapour 17,1 21,8 13,6 11,5

Taiwan 4,2 11,7 6,7 2,9

Thaïlande -13,5 -11,7 6,8 1,2

Indonésie 44,6 31,7 16,2 9,3

Philippines 26,4 25,0 15,0 21,7

Malaisie 14,3 14,3 -0,8 -0,3

Chine -15,4 -15,4 -8,3 -6,0

Mexique 46,9 48,1 37,8 44,4

Brésil 17,8 28,0 27,7 45,2

Argentine 28,3 26,6 12,2 10,2

Chili 22,2 30,3 2,7 11,5

Pérou 52,4 61,0 29,4 23,7

Venezuela 33,9 48,1 -32,3 -32,5

Colombie 86,2 120,2 118,9 124,9

Pologne 27,9 55,6 33,7 22,9

Hongrie 57,2 80,4 41,0 19,1

République Tchèque 56,6 80,1 42,7 29,4

Russie - 8,3 - 83,3

Source : Datastream

Jean-Christophe Caffet et Hervé Liévore

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LA CROISSANCE ASIATIQUE N’A PASSOUFFERT DES POLITIQUES ÉCONOMIQUESPLUS RESTRICTIVES.

L’activité économique de la région aura été moins dyna-mique en 2005 qu’en 2004.Hors Chine, la croissance des huitprincipaux pays de la zone (Corée du Sud, HongKong,Singapour,Taiwan, Indonésie,Malaisie,Philippines et Thaïlande)a vraisemblablement fluctué entre 3,6 % à Taiwan et 7 % àHongKong, soit une moyenne de 4,6 %, alors que ce chiffreavait culminé à 5,7 % en 2004. Le premier trimestre 2005aura marqué le point bas du cycle économique en Asie.Avecune croissance agrégée de 4,1 % en glissement annuelselon nos estimations, la région a connu sa plus faible crois-sance depuis le premier trimestre 2002 (si l’on exclut l’épi-sode du SRAS au printemps 2003). Mais depuis, la reprises’est confirmée,à tel point que la croissance de la zone s’estinscrite à 5 % au troisième trimestre, un rythme supérieurà la moyenne de long terme (4,6 % entre 1994 et aujour-d’hui).Tout porte à croire que cette tendance a été prolon-gée au quatrième trimestre 2005.

En décomposant les ressorts de la croissance,on constateque la demande domestique peine tout de même à remon-ter la pente et semble plutôt se stabiliser autour d’une contri-bution à la croissance du PIB de l’ordre de 4 points de pour-centage. En revanche, le commerce extérieur net(exportations nettes des importations) recommence pro-gressivement à alimenter la croissance. Les pays ayant lemoins profité de cette timide reprise du commerce sontl’Indonésie, la Malaisie et les Philippines, chacun de ces troispays ayant enregistré au troisième trimestre une contribu-tion négative de leurs échanges commerciaux à la hausse duPIB (respectivement - 1,5 point, - 1,4 point et - 0,5 point).En revanche, dans les autres pays de la région, cet agrégat ajoué un rôle considérable : environ le tiers de la croissanceen Corée du Sud et à Taiwan, 55 % à HongKong, 82 % enThaïlande et même 90 % à Singapour.

Après des performances particulièrement dynamiques en 2004, 8,1 % en Asie (5,7 % hors

Chine), 5,3 % en Europe de l’Est et 5,8 % en Amérique latine, les principales zones émer-

gentes ont vu leur taux de croissance fléchir en 2005. En dépit de ce ralentissement, auquel

ont échappé quelques pays tels que la Chine, l’Argentine ou encore les Etats baltes, l’ac-

tivité est restée installée sur un rythme de progression relativement soutenu. Ainsi, en 2005, le PIB devrait

encore augmenter de 7,9 % en Asie (4,6 % hors Chine), de 4,3 % dans les Nouveaux Membres de l’Union

européenne et de 4,2 % en Amérique latine. Par ailleurs, d’une manière générale, il apparaît que le main-

tien d’une croissance somme toute satisfaisante, ne s’est pas effectué au prix de déséquilibres majeurs. En

particulier, dans la majorité des pays considérés, l’inflation est restée sous contrôle, en dépit de la flam-

bée des prix pétroliers.

2005, une année de consolidation pour les pays émergents.

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La croissance asiatique agrégée demeure robuste et saine.

Sources : Offices statistiques nationaux, Datastream, calculs Natexis Banques Populaires

Dans l’ensemble, la consommation des ménages a plutôteu tendance à s’accélérer,notamment en Indonésie,en Coréeet à Taiwan, ou tout du moins à stabiliser son taux de crois-sance (parfois à des niveaux très élevés, comme en Malaisieavec un gain d’environ 9 %).Seul Singapour enregistre un netfléchissement de cet agrégat, avec une hausse annuelle deseulement 2,2 %.La flambée des prix à la consommation n’estdonc pas parvenue, pour le moment, à déstabiliser les com-portements des consommateurs locaux. Dans certains caspourtant, l’évolution des prix s’est révélée explosive.Ainsien Indonésie, l’inflation est passée de 6,4 % fin 2004 à 9,1 %en septembre, et même 17,9 % et 18,4 % en octobre etnovembre 2005, suite à la suppression des subventions auxcarburants au 1er octobre.Toutefois, le cas de l’Indonésie estassez particulier. Si on observe effectivement des accéléra-tions sensibles des prix dans quelques pays (notamment enThaïlande et en Malaisie, deux nations ayant égalementrevu leur politique de subvention aux carburants), la situa-tion apparaît beaucoup moins tendue dans les pays les plusdéveloppés de la région (Corée,Taiwan, HongKong etSingapour).En outre,même dans un pays aussi dépendant dupétrole que les Philippines, la dérive de l’inflation observéeen 2004 semble avoir été endiguée.

La vigueur de la consommation privée ne se vérifie pas auniveau de l’investissement.Seule la Malaisie devrait avoir connuune accélération des dépenses en capital fixe, à 9,6 % autroisième trimestre contre 2 % en début d’année et 6,7 % audeuxième trimestre.A l’autre extrémité se trouvent lesPhilippines et Singapour, dont les dépenses d’investissementn’ont cessé de se contracter depuis le début de l’année(encore - 3,8 % au troisième trimestre dans le premier cas,- 3,4 % dans le second).Pour le reste, l’heure est à la décélé-

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Demande domestique Commerce extérieur net

Points de pourcentage

Contribution à la croissance du PIB de la zone Asie

ration. Cette décrue de l’investissement répond bien à unelogique cyclique,dans la mesure où l’année 2004 avait connuune forte poussée reposant à la fois sur la correction de ladéprime économique observée en 2001-2002 et les politiquesde soutien de la demande adoptées par les différents gou-vernements à partir de l’été 2003 dans le sillage de l’épidémiede SRAS. En outre, la perspective de voir la quasi-totalitédes monnaies asiatiques entraînées à la hausse à la suite durenminbi chinois l’an dernier avait amené une accélération desinvestissements destinés à accroître la productivité. Or l’an-née 2005 aura été placée sous le signe de l’appréciation dudollar (et donc du renminbi) par rapport à l’ensemble desmonnaies asiatiques. De ce fait, les craintes quant à d’éven-tuelles pertes de compétitivité-prix se sont estompées.Enfin,dans des pays comme la Thaïlande, l’Indonésie ou lesPhilippines, le durcissement sensible de la politique monétaire,pour faire face à la résurgence des tensions inflationnistes,estsans doute venu peser sur les décisions d’investissement.

Le policy mix mis en œuvre en Asie est placé sous le doublesigne de la réduction des déséquilibres budgétaires et de lavolonté de contenir les tensions inflationnistes (dans uncontexte général de durcissement monétaire orchestré parla Réserve Fédérale américaine depuis juin 2004).Le contextea donc été plutôt restrictif, bien qu’on puisse rétorquerque les taux d’intérêt réels sont dans l’ensemble très prochesde zéro,voire négatifs,et que le poids des dépenses publiquesdans le PIB ne diminue pas (en fait, l’objectif est de faire croîtreles recettes plus rapidement que les dépenses).

En l’état actuel, les resserrements monétaires opérés nese sont pas traduits par une inflexion particulière des créditsdomestiques,ces derniers continuant de progresser plus rapi-dement que leur rythme de moyen terme.Dans l’ensembledonc, le financement de l’investissement demeure aisé et lahausse des taux ne devrait pas entraîner une dérive descharges financières des entreprises. En outre, il convient desouligner que la progression des crédits bancaires demeureinférieure à celle des PIB nominaux, ce qui n’était pas le casà la veille de la crise asiatique de 1997. Il n’y a donc pas dedéséquilibres financiers significatifs ni de bulles faisant peserun risque sur la croissance des années à venir.

LA CROISSANCE CHINOISE TOUJOURSFORTE EN 2005, MAIS PAS POUR LESMÊMES RAISONS QU’EN 2004.

Le ralentissement attendu de l’économie chinoise en 2005ne s’est pas produit, du moins si l’on en croit les comptes

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nationaux de la République populaire. Ces derniers font eneffet état d’une croissance dont la stabilité ne peut qu’inci-ter à la prudence : + 9,4 % en glissement annuel au premiertrimestre, + 9,5 % au deuxième et + 9,4 % au troisième. Surl’année, les premiers éléments disponibles laissent entendreque la croissance aurait atteint les 9,8 % (calcul fondé sur lanouvelle estimation du PIB diffusée fin décembre 2005). Unchiffre à prendre avec précautions étant donné le manque detransparence des statistiques chinoises.

2005 ne semble pas déroger à la règle des dernières années:l’investissement est toujours le principal moteur de la pro-duction.On note toutefois un retour à la normale dans les sec-teurs qui avaient été jugés en surchauffe en 2004. Ceux-ciont sensiblement ralenti leurs dépenses en capital fixe.Parallèlement, la croissance de la consommation privéedemeure à peu près stable.Mais, dans l’ensemble, la consom-mation ne semble pas encore en mesure de prendre le relaisde l’investissement comme moteur de la croissance si ce der-nier venait à ralentir, hypothèse qui nous semble la plus pro-bable pour les prochaines années.Les pressions inflationnistes,qui avaient connu un regain au cours de l’été 2004 avec deshausses annuelles de l’indice des prix à la consommation (IPC)dépassant les 5 %,sont aujourd’hui en passe d’être résorbées.L’inflation devrait avoir atteint 1,8 % sur l’ensemble de l’année.

Le thème de la « surchauffe » n’est plus vraiment d’actualité.

Sources : PBOC, Bureau National de Statistiques, Datastream

In fine, la demande domestique apparaît actuellement moinsforte qu’en 2004 (année il est vrai exceptionnelle).Mais cetteévolution a été masquée par la résistance des exportations.Ces dernières ont en effet progressé de 30 % en glissementannuel tout au long du premier semestre,alors que la haussedes importations repassait sous la barre des 20 %.Depuis l’été,

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Prix à la consommation - G - Encours de prêts bancaires - D -

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cependant, les importations s’accélèrent de nouveau,tout enrestant un ton en dessous des exportations.

Le gouvernement a eu pour priorité la limitation de sondéficit budgétaire. L’orientation des dépenses est en phasede changement, des infrastructures vers une logique plusredistributive. Mais en aucun cas l’heure n’est à l’austéritébudgétaire : le poids des dépenses publiques dans le PIB auraitmême tendance à croître à nouveau, après la légère baissede 2004.En matière de politique monétaire, les autorités chi-noises n’ont pas eu à adopter un comportement plus res-trictif compte tenu du ralentissement des crédits bancaireset de celui de l’inflation observés depuis à peu près un an.Toutefois, la déréglementation des différents taux d’intérêta franchi une nouvelle étape avec la libéralisation des tauxdes crédits hypothécaires.

Finalement, l’axe sur lequel les autorités chinoises se sontmontrées les plus actives est incontestablement l’évolutiondu régime de change et, plus généralement, la mise à niveaudu marché des changes. Point d’orgue des mesures adop-tées depuis l’été, la réévaluation du RMB de 2,1 % face à l’USDintervenue le 21 juillet. Le nouveau régime remplace le lienfixe inchangé depuis 1998 entre le renminbi et le dollar par unsystème de change flottant administré. La définition du RMBse fait désormais en référence à un panier de devises com-prenant essentiellement le dollar, l’euro, le yen et le woncoréen. Dans les faits, le renminbi reste particulièrement liéau dollar US, la volatilité de ce taux de change demeurant trèsproche de zéro. En réaction, après plusieurs semaines d’ob-servation, les autorités américaines ont renouvelé leurs appelsà une appréciation supplémentaire de la monnaie chinoise.

EUROPE DE L’EST : UNE CROISSANCE2005 SOUTENUE ET GLOBALEMENTÉQUILIBRÉE.

Dans l’ensemble des Nouveaux Membres de l’Union euro-péenne, l’environnement économique a été globalement favo-rable en 2005 et la croissance du PIB devrait avoisiner les4,3 % en moyenne, après 5,3 % l’année précédente. Plus endétail, la vigueur de la croissance dans les Etats Baltes s’estune fois de plus confirmée (elle devrait être proche de 8 %,après une moyenne de 7,1 % au cours des cinq dernièresannées). C’est également le cas des trois principaux pays(Pologne, Hongrie et République Tchèque) où elle devraits’élever à environ 4 %.

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La croissance s’installe au-dessus de 4 %.

Sources : Offices statistiques nationaux, Datastream, Calculs Natexis Banques Populaires

Tandis que la République Tchèque continuait d’afficher unefranche vigueur, le premier trimestre 2005 a été marqué parun ralentissement de l’activité en Hongrie et en Pologne.Toutefois,dès le printemps, le passage à vide semblait révoluet l’activité a rapidement retrouvé de l’allant, en particulieren Hongrie.Au cours de l’année écoulée, tous les moteursde l’économie ont été allumés dans l’ensemble des pays consi-dérés. Les ménages ont une fois encore fait preuve d’uneappétence soutenue, en témoigne la vigueur des ventes audétail. L’amélioration des conditions du marché du travail(à l’exception de la Hongrie), les hausses de salaires et la fortedemande de crédits (à la consommation et hypothécaires)ont ainsi incité les ménages à consommer. Par ailleurs, l’in-vestissement a aussi été au rendez-vous en 2005. Les indus-triels ont fait preuve d’optimisme et ont profité de condi-tions de financement globalement favorables. Outre ledynamisme de la demande intérieure, la demande étrangèrea été relativement soutenue, comme en ont attesté le rem-plissage des carnets de commandes et la progression desexportations (particulièrement vigoureuses en Hongrie eten République Tchèque),ce qui a également contribué à sou-tenir l’investissement. Etant donné la hausse marquée desexportations, les soldes extérieurs (bien que toujours dansle rouge) se sont améliorés dans l’ensemble de la région.Dansle même temps, l’intérêt des investisseurs étrangers pourla région n’a pas été démenti. Les investissements directsétrangers sont demeurés significatifs (à titre d’exemple, laRépublique Tchèque a reçu 7,5 milliards d’euros au cours destrois premiers trimestres 2005,contre 3,6 milliards en 2004).Dans l’ensemble des pays sous revue, le climat des affairesa été satisfaisant, ce qui a permis à l’activité économique derester soutenue dans un contexte de tensions inflationnistesglobalement modérées.

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2000 2001 2002 2003 2004 2005 p 2006 p

République Tchèque Hongrie Pologne Baltes NEM

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PIB

En effet, si la hausse des cours du pétrole n’a pas épargnécette année l’évolution des prix à la consommation desprincipaux pays d’Europe centrale, mis à part quelques sou-bresauts temporaires,celle-ci est restée largement contenue.Ainsi, selon Eurostat, après avoir enregistré une inflationmoyenne de 2,6 % en 2004, la République Tchèque devrait affi-cher une progression moyenne des prix à la consommationde seulement 1,6 % en 2005. En Pologne et en Hongrie, leconstat est également encourageant, puisque après respec-tivement 3,6 % et 6,8 % en 2004, l’inflation devrait s’établir à2,5 % et 3,5 % en moyenne cette année.De plus,dans les troisprincipaux pays, l’inflation sous-jacente a été sous contrôle(moins de 2 % en moyenne en Pologne et République Tchèqueet de l’ordre de 3,3 % en Hongrie, après 5,7 % en 2004). Enrevanche, la convergence des prix vers le niveau eurolandaisa été mise entre parenthèses dans les Etats Baltes. C’est enparticulier en Lettonie que l’évolution de l’inflation a été laplus problématique (notamment dans la perspective d’uneadoption de l’euro d’ici deux ans).Ainsi,sur l’ensemble de l’an-née, l’inflation lettone devrait s’être établie à 6,7 %, contre6,2 % en 2004.Du côté des finances publiques,malgré un légermieux, la situation reste des plus délicates dans les pays dugroupe de Visegrad 1, où le déficit budgétaire dépasse les 3 %du PIB (plus spécialement en Hongrie où il devrait être del’ordre de 6 % du PIB). En revanche, les Etats Baltes ont res-pecté une nouvelle fois la règle fixée par le Traité de Maastricht.La Slovaquie s’est par ailleurs distinguée récemment (rejoi-gnant ainsi les Etats Baltes, Malte, Chypre et la Slovénie) enintégrant le Mécanisme de Change Européen (MCE II), anti-chambre de l’euro.

RUSSIE : LA VIGUEUR DE LA CROISSANCENE DOIT PAS MASQUER LES FRAGILITÉS.

Après un début d’année plutôt morose, l’activité écono-mique russe s’est progressivement redressée, de telle sorteque sur l’ensemble de l’année 2005, la croissance devrait avoiratteint 6 %, après 7,2 % en 2004.Une nouvelle fois, l’environ-nement conjoncturel russe a été marqué par une forteconsommation des ménages, stimulée par une augmentationsignificative des salaires. De même, l’évolution haussière duprix du baril de pétrole (en moyenne 50,4 dollars le barild’Oural contre 34,6 dollars en 2004) a encore permis cetteannée à la Russie d’engranger des flux massifs de devises. Enconséquence, les réserves de change ont atteint de nouveauxrecords (à 169,1 milliards de dollars en décembre), la balance

1 Hongrie, Pologne, République Tchèque et Slovaquie.

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Panorama 2005

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courante est restée largement excédentaire et le solde bud-gétaire a été pour la cinquième année consécutive en surplus.De plus, la Russie a été en mesure de procéder à un impor-tant remboursement auprès du Club de Paris. Si l’assainisse-ment financier s’est poursuivi cette année, l’investissement acontinué de souffrir de la détérioration du climat des affairesdepuis mi-2004. En conséquence, les industriels étrangers etdomestiques se sont montrés frileux. Par ailleurs, le proces-sus de désinflation a été interrompu,et après 10,9 % en 2004,l’inflation s’est élevée en moyenne à 12,5 % en 2005.

APRÈS UN RECORD EN 2004, LA CROISSANCE DÉPASSERAIT 4 % EN AMÉRIQUE LATINE.

En 2004, l’Amérique latine a enregistré une croissance par-ticulièrement élevée.A 5,8 % (moyenne pondérée des tauxde croissance observés au Brésil, au Mexique, en Argentine,au Chili, en Colombie, au Pérou et au Venezuela), elle s’estétablie à un niveau qui n’avait pas été observé depuis vingt-cinq ans. L’année 2005 s’est traduite par un fléchissementsomme toute assez logique de la croissance. Mais si la per-formance est moins brillante, elle n’en est pas moins satis-faisante, avec un résultat qui se situerait légèrement au-dessus de 4 % (4,2 % selon nos prévisions). Par ailleurs, soncaractère plus équilibré constitue un progrès essentiel, quidevrait permettre aux principaux pays de la zone de se main-tenir sur un sentier de croissance plus solide qu’auparavant.

A l’issue des trois premiers trimestres de 2005, le pano-rama d’ensemble des principaux pays latino-américains estplutôt positif. La croissance est en effet restée solide tout aulong des mois écoulés, même si son profil a été un peu pluschahuté que l’an dernier.Après une franche accélération audeuxième trimestre (le glissement annuel du PIB de la zones’est élevé à près de 5 % après 3,9 % au premier), un flé-chissement a été enregistré.Selon les dernières données dis-ponibles, le glissement annuel du PIB aurait en effet atteint3,6 % au troisième trimestre. En dépit de ce ralentisse-ment, la zone apparaît bien partie pour approcher une crois-

sance annuelle d’un peu plus de 4 % (en moyenne sur les troispremiers trimestres, elle se situe à 4,2 %).

Malgré un fléchissement, la croissance est restée solide.

Sources : Instituts nationaux de statistiques, Datastream ; Calculs : Natexis Banques Populaires

Ce résultat d’ensemble repose toutefois sur des perfor-mances comprises dans une fourchette qui est restée rela-tivement large. L’Argentine et le Venezuela, qui ont profitéd’un contexte exceptionnel, sont bien partis pour enregis-trer une hausse de leur PIB proche de 9 %. Dans le cas del’Argentine, la poursuite du rattrapage économique (ce n’estqu’au deuxième trimestre 2005 que le PIB a retrouvé etdépassé les niveaux atteints fin 98), l’accélération desdépenses publiques tout au long de l’année, la faiblesse destaux d’intérêt et la politique de change compétitive (avec lemaintien autour de niveaux favorisant les exportations) sontautant d’éléments qui ont contribué au dynamisme de l’ac-tivité. Dans le cas du Venezuela, la vigueur des dépensespubliques (consommation et investissement) alimentée parles revenus issus du pétrole a sensiblement joué sur la tra-jectoire du PIB.Toutefois, ce dynamisme ne s’est pas main-tenu sans déséquilibres. Des tensions inflationnistes signifi-catives sont apparues en Argentine, où le glissement annueldes prix à la consommation est passé de 7,2 % en janvier à12 % en novembre 2005, tandis qu’au Venezuela l’inflation estrestée élevée tout au long de l’année (cf. tableau ci-dessous).

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Glissement annuel Moyenne sur quatre trimestresPIB Amérique latine

Hausse contenue des prix, excepté dans deux pays de la zone.a/a, % Brésil Mexique Chili Pérou Colombie Venezuela Argentine

2004 6,6 4,7 1,1 3,7 5,9 21,7 4,4

2005 7,0 4,2 2,5 2,0 5,0 15,0 8,2

1er semestre 7,6 4,5 2,5 2,0 5,1 16,7 8,5

2nd semestre* 6,2 3,6 3,5 1,2 5,0 15,5 10,4

* calculs effectués sur juillet-novembre Sources : Instituts nationaux de statistiques, Datastream

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Par contre, la situation est clairement satisfaisante dans lesautres « petits pays » de la zone.Les bons résultats en termed’activité,avec des taux de croissance d’un peu moins de 6 %au Chili et au Pérou et d’environ 4,5 % en Colombie, s’ac-compagnent d’un meilleur contrôle de l’évolution des prix.Entre janvier et novembre, l’inflation a atteint en moyennerespectivement 3 %, 1,6 % et 5,1 %.

Enfin,dans un contexte désinflationniste (l’inflation est pas-sée de 4,5 % à 2,9 % entre janvier et novembre 2005 auMexique et de 7,4 % à 6,2 % au Brésil), les deux principauxpays de la zone devraient enregistrer une croissance plusmodeste. Elle serait de l’ordre de 3 % au Mexique et d’envi-ron 2,7 % au Brésil.Cette déception s’explique par la contre-performance du troisième trimestre, caractérisée par unimportant déstockage qui s’est traduit par un recul de 1,2 %du PIB (après + 0,2 % et + 1,1 % aux premier et deuxième tri-mestres).Vraisemblablement, le relèvement des taux moné-taires opéré par la Banque du Brésil (BCB) entre sep-tembre 2004 et mai 2005 (+ 375 pb à 19,75 %) a pesé sur lesperspectives des industriels brésiliens, les conduisant à puiserdans leurs stocks. La baisse des taux amorcée en septembredernier (le 14 septembre, le taux Selic a alors été diminuéde 25 pb à 19,5 %),qui a été plutôt bien accueillie par le milieudes affaires, pourrait bien les rassurer. Et ce d’autant qu’elles’est poursuivie depuis, tout en prenant de l’ampleur. Unebaisse de 50 pb a ainsi été annoncée lors des réunions duComité de politique monétaire d’octobre, novembre etdécembre derniers, ramenant le taux directeur à 18 %.

Si les résultats en terme de progression de l’activité sontplutôt dispersés, la plupart des pays considérés ont néan-moins bénéficié d’une demande interne relativement solidecombinée à une demande externe toujours dynamique. Lescomptes nationaux ont notamment mis en évidence la pour-suite de la croissance de l’investissement (d’après les chiffresdisponibles il aurait augmenté d’un peu plus de 15 % enmoyenne) et une progression significative de la consomma-tion des ménages (6 % en moyenne). De leur côté, les expor-tations devraient avoir progressé de près de 9 % en moyenne,avec en tête du classement le Brésil et l’Argentine, dont lestaux de croissance ont été de l’ordre de 13,5 %.

Si les exportations ont été un moteur de la croissance,elles ont également permis aux pays latino-américains d’af-ficher une nouvelle fois des soldes extérieurs plutôt favo-rables.Ainsi, pour l’ensemble des sept pays considérés, l’ex-cédent commercial s’élevait à plus de 35 milliards de dollarsen août dernier (données cumulées sur les huit premiersmois de 2005), après 40 milliards en 2004. En conséquence,et tout comme l’an dernier, la plupart d’entre eux devrait affi-cher un excédent courant, à l’exception du Mexique et de laColombie, où la situation est cependant loin d’être inquié-tante.De même, l’année 2005 aura vu les réserves de changecroître de façon sensible.Au troisième trimestre, elles ontatteint un record à plus de 210 milliards de dollars, en pro-gression de 17,6 % sur un an.

Nathalie Dezeure, Elisabeth Loison et Hervé Liévore

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SEULS CONTRE TOUS !

Ce qui est certainement le plus déterminant réside dansle fait qu’en 2005, nous avons été très souvent à l’encontredu consensus,ce qui nous a particulièrement réussi.En voiciquelques exemples :• Anticipation d’un euro entre 1,15 et 1,20 dollar pour le

second semestre 2005,alors qu’il valait 1,35 en début d’an-née et que la plupart des prévisionnistes imaginaient uneuro supérieur (et parfois largement) à 1,40 dollar.

• Prévision d’un Cac 40 à 4500 pour la fin 2005, que nousavons ensuite révisée à 4700, alors que beaucoup osaientà peine imaginer l’atteinte des 4000, sans parler de ceuxqui envisageaient une baisse.

• Prévision d’une croissance américaine de 3,7 %, alorsque de nombreux prévisionnistes annonçaient une crois-sance molle,voire l’écroulement de l’économie américaine

• A ce sujet,nous étions parmi les rares à relativiser l’impactnégatif du choc pétrolier et des ouragans Katrina et Ritasur l’économie américaine.

• Parallèlement,de la même manière que nous étions les trèsrares (pour ne pas dire les seuls) à anticiper une hausse dutaux objectif des federal funds en juin 2004,nous avons per-sisté dans l’anticipation d’une politique de resserrementmonétaire graduel outre-Atlantique.

• Pendant que le gouvernement français annonçait une crois-sance de 2,5 % pour 2005 et que le consensus imaginait aumoins 2 %, nous prévoyions un résultat d’environ 1,5 %.

• De même pour la zone euro, nous annoncions une crois-sance d’environ 1,5 %.

• Toujours dans l’UEM,nous avons été parmi les rares à pré-voir un statu quo durable puis une remontée du taux refide la BCE,tandis que la grande majorité des prévisionnistesimaginaient plutôt une baisse. En octobre dernier, nousétions ainsi les seuls dans la plupart des consensus à anti-ciper un taux refi de 2,25 % d’ici les trois mois à venir.

• En outre, nous avons également continué de souligner,contre la BCE notamment, l’absence de dérapage infla-tionniste dans la zone euro.

• Mais les Etats-Unis et l’Euroland n’ont pas été les seuleszones de réussite de nos prévisions.Ainsi, comme en 2004d’ailleurs,nous étions parmi les rares à anticiper une crois-sance soutenue du PIB japonais.

• Plus globalement,à l’heure où de nombreux prévisionnistesdressaient des perspectives sombres sur la croissance mon-diale,nous annoncions une croissance mondiale d’au moins4,3 % en 2005.

Comme tous les ans et pour la septième année consécutive, voici l’heure du bilan de nos pré-

visions. Si depuis 1998, nous avons toujours eu la satisfaction de présenter un bilan glo-

balement positif, cette année, nous sommes un peu embarrassés puisque les « bonnes pré-

visions » dépassent très largement les « mauvaises », comme ce fut notamment le cas en

1998, 1999 et 2000. Pourtant, comme au cours de ces trois années et aussi bizarre que cela puisse

paraître, ce bilan nous paraît plus difficile à faire que lors des années plus “normales” où les quelques

erreurs nous faisaient oublier nos réussites. Que voulez-vous, nous avons grandi dans un pays où la réus-

site n’est pas valorisée et même si nous avons pris nos distances avec cette culture du défaitisme, nous en

gardons quelques traces… Allez, compte tenu de nos réussites de 2005 et avec un peu de « chance »,

nous ne serons peut-être pas aussi bons en 2006…

Bilan des nos prévisions 2005 :une année faste!

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L A L E T T R E D E S E T U D E S É C O N O M I Q U E S

Panorama 2005

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RAISON OU TORT AVEC LES AUTRES.

Si faire des prévisions non consensuelles nous a souventété favorable,nous n’avons jamais été cependant des « achar-nés » des prévisions hors consensus et ce, tout simplementparce que, parfois, ce dernier a aussi raison.• Ainsi,comme tout le monde,nous avons anticipé une crois-

sance soutenue des pays émergents en 2005, que ce soiten Amérique latine,en Europe de l’Est ou en Asie,avec unemention spéciale pour la Chine et sa croissance qui est detoute façon « encadrée » par le gouvernement chinois.

• Sur le pétrole, nous avons eu cette fois-ci plutôt tortavec tout le monde, dans la mesure où rares étaient ceuxqui anticipaient un baril à 70 dollars. En revanche, aumoment où de nombreux prévisionnistes ont paniqué enannonçant un baril dépassant durablement cette barre,voire pour atteindre les 100 dollars,nous avons été parmiles rares à annoncer un repli du baril pour la fin 2005.

• Sur les taux longs, un mouvement similaire s’est observé :nous n’avions pas anticipé la baisse des taux longs de 2005,mais nous étions parmi les rares à prévoir une remontéepour la fin d’année, notamment aux Etats-Unis.

• Enfin, si nous étions relativement optimistes sur le Nikkei,nous ne l’avons pas été assez, puisque, comme les autres,nous n’avions pas prévu que cet indice augmenterait de40 % en à peine six mois.

Au contraire de ce que nous énoncions avec ironie en fin d’in-troduction,nous espérons évidemment que notre bilan 2006 seraau moins aussi bon que celui que nous venons de présenter.Merciencore à vous, chers fidèles lecteurs et, encore une fois, excellenteannée !

Marc Touati et son équipe

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