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La mode populaire, le temps et le pouvoir. Le sémiopouvoir de l’habillement
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Guy Lanoue, Université de Montréal, 2013-2017
Le pouvoir et le capital culturelAujourd’hui, les anthropologues reconnaissent que la dimension économique n’est pas l’unique domaine où réagissent les personnes à des inégalités créées par la structure du pouvoir. On parle plutôt de «capital culturel» (Pierre Bourdieu, La distinction), les éléments (qui incluent la mode) qui permettent aux personnes de manœuvrer positivement dans un système de statut sans nécessairement accéder au vrai pourvoir détenu et gérer par l’État. Autrement dit, les modèles qui se basent sur la centralisation du pouvoir ne sont plus nécessairement utiles pour comprendre des cultures nationales décentralisées par le système mondial.
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P.-S. La belle jeune femme n’est pas censée représenter l’idée que le pouvoir donne accès aux jeunes femmes. Elle incarne plutôt l’idée de la mode et de beauté comme des manifestations du capital culturel, comme le diplôme universitaire et la voiture semi-luxueuse. En Occident, les personnes belles, grandes et minces ont souvent plus d’avantages dans la vie.
Le pouvoir Le concept de capital culturel nous permet de mieux comprendre comment les personnes réagissent au pouvoir en utilisant les outils à leur disposition. La mode en est un de ces instruments du peuple. Autrement dit, la mode n’est pas uniquement un aspect du Soi censé établir le statut de l’élite vis-à-vis des classes subalternes, mais également une façon individuelle de se positionner vis-à-vis le pouvoir (James Scott, Weapons of the Weak, 1985), surtout dans un espace social pyramidal, où la structure plus ouverte encourage un peu de souplesse sociale.
Manhattan Municipal Building Muhammad-Ali; http://imagecache2.allposters.com/images/pic/145/SP0053~Muhammad-Ali-Posters.jpg
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Le biopouvoir, l’espace et le temps
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Traditionnellement, il y plusieurs moyens utilisés par les États pour
exercer le pouvoir par le contrôle du temps (qui, par ses effets sur le corps,
fait partie du concept de biopouvoir de Michel Foucault – Histoire de la
sexualité; voir aussi Anthony Giddens, The Consequences of Modernity [1990]: «le contrôle de l’espace
commence avec la coordination du temps»).
L’image illustre la vie biologique et le pouvoir de Dieu (la Chapelle Sixtine de Michelangelo), mais il ne s’agit pas du biopouvoir, qui, selon Foucault, lie le pouvoir impersonnel de l’État à l’intimité et aux rythmes du corps. Le biopouvoir est la politisation de la dimension biologique de l’humain. Par exemple, obliger des élèves à respecter un plan rigide de placement dans une salle de cours, jour après jour, est un exemple du biopouvoir. Ils apprennent que leur corps, censé être au cœur de l’individualité, peut devenir un engin de soumission (et, avec de tatouages, de vêtements, d’une gestualité, le corps devient un engin pour la rébellion).
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Les changements de mode
Traditionnellement, la mode appartient aux classes supérieures; les «autres», subalternes, portaient des vêtements adaptés au travail ou des guenilles. Les changements à la mode ont donc été naturellement interprétés comme des tentatives des classes supérieures d’établir de micro-distinctions à l’intérieur de la catégorie «supérieure», et de définir un écart les séparant des classes moyennes qui, elles, cherchaient à imiter les classes huppées pour augmenter leur statut. La mode est liée à un système de pouvoir, et ce n’est pas surprenant que les élites en Occident (commençant avec le monde classique) ont mis en place des Lois somptuaires qui lient la présentation du Soi au statut de l’individu, ceci pour limiter les effets du surenrichissement sur le système de classe.
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Le paradoxe de l’habilement est que c’est un des rares domaines où l’individualité peut s’exprimer librement. Même les régimes les plus stalinistes (Corée du nord, La Chine de Mao Zedong, la Roumanie de Ceausescu, et, évidemment, la URSS de Staline, limitaient le choix vestimentaires mais ne les éliminaient pas. Cependant, aujourd’hui les choix individuels en Occident semblent rejeter les anciennes règles et donc affaiblissent davantage les communautés locales déjà fragilisées par la mondialisation.
Deux, les choix individuels semblent émerger d’avantage de la culture populaire plutôt de la haute culture et ses règles. Il faut distinguer la mode (haut) et le style (bas).
Trois, les choix vestimentaires populaires, comme la haute couture, mettent en scène la distinction haut-bas que les anciens Romains ont introduit dans le langage de la communauté imaginée.
À gauche: « mode »; à droite, « style vestimentaire ». Même avec la tentative de se brancher dans le mouvement jeunesse. On voit l’effet « design » à gauche et l’effet populaire à droite: la mode (haute couture) distingue plus le haut et le bas.
1609 - Margaret Savoy, Duchess of Mantua, by Frans Pourbus II (Hermitage)/ https://www.pinterest.com/pin/72409506484481027/
1614-1618 Diana Cecil by William Larkin (Kenwood House - Hampstead, London UK) | Grand Ladies | gogm / https://www.pinterest.com/pin/72409506484481029/
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comtesse de Vauban 1776http://www.gogmsite.net/reign-of-louis-xvi/1776-comtesse-de-vauban-wea.html/
Princess Mary , 1807/ https://www.pinterest.com/pin/181058847495934492/
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Christian Dior Ensemble, 1954/ https://www.pinterest.com/pin/181058847495538033/
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On voit qu’avec le temps, la mode évolue pour mettre diminuer la distinction haut - bas par l’utilisation de la coupe des vêtements et par les accessoires pour mettre l’accent d’avantage sur le corps comme soit. Quand l’esthétique sportive et la chirurgie plastique deviennent plus importants dans les années 1990s, l’habilement se simplifie considérablement et dans un sens devient secondaire. Le corps devient protagoniste pour mettre en relief la distinction haut – bas.
La mode populaire dans les années 1950s
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Poodle skirt
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Peter Pan collar
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Saddle shoes
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Cat’s eyes glasses
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Hawaiian shirts
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Letterman jackets
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La mode populaire dans les années 1950s
White tees
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Deep cuff blue jeans
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Circle skirts
La mode populaire dans les années 1960s
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Miniskirt
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Go-go boots http://www.naa.gov.au/Images/7456494-pillbox-hat_tcm2-12589.jpg
Pillbox hat
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Hot pants
http://assets.tobi.com/files/product_color/main/65797/_DSC0132.jpg Shift dress
La mode populaire dans les années 1960s
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Baby doll dress
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¾ length sleeves
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Tie-dye
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Nehru jacket
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Beatle haircuts
La mode populaire dans les années 1970s
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Track suit
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Mood ring
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Earth shoes
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Bell bottomshttp://www.dorlingkindersley-uk.co.uk/static/clipart/uk/dk/costume/image_costume003.jpg
Platform shoes
La mode populaire dans les années 1970s
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Leisure suits
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Glam rock
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Printed nylon shirts
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Afros
La mode populaire dans les années 1970s
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Corduroy suits
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Abba (le glam dénaturé)
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Jewfros
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Adidas
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Soft hair
La mode populaire dans les années 1980s
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Polo shirt
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Designer jeans
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Flashdance leg warmers
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Big hair
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Doc Martens
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’staches
La mode populaire dans les années 1980s
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Parachute pants
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Padded shoulders http://4.bp.blogspot.com/_0TZuyA_kvso/SLpCS5js9VI/AAAAAAAAAkU/msFEYDewzpA/s400/Madonna.jpg
Punk styles
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Michael Jackson jackets
Acid wash jeans
La mode populaire dans les années 1990s
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Grunge
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Straight hair
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Mullets
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Skullets
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Cargo pants
La mode populaire dans les années 1990s
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Power bracelets
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Tattoos
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Ghetto fabulous
Minimalist design
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Pashminas
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Tank tops
La mode populaire dans les années 2000s
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Tramp stamp
Whale tail
Emo hair
Neo-punk for preteens
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Beehives «ironiques»
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Layering, Leggings
La mode populaire dans les années 2000s
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Faux-hawks
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Uggs
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Geek chic
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Baseball Caps
Hoodies http://www.supplierlist.com/photo_images/68783/BBC_ClothingBBC_HoodiesBBC_mens_JeansBBC_Jeans.jpg
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Bling-bling
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Retro fashionsee Beehives
La brigade KanukKanuk est un manufacturier de vêtements d’hiver de haut de gamme à Montréal, surtout connu pour ses vêtements à duvet. Ses manteaux sont chauds, mais plusieurs personnes y ajoutent des accessoires comme s’ils partaient en expédition au Himalaya.
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L’homme le plus intéressant de la planète part en expédition à
Madagascar. Il est protégé par son chapeau Tilley.
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Pour ajouter à l’effet, des bottes de trekking, obligatoire.
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Le sac à dos urbain
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Ce n’est pas uniquement à Montréal où se trouvent les personnes inspirées par le style trekking/grano. Ici, elles sont particulièrement voyantes parce qu’elles sont
associées à une catégorie sociale liée (mais pas limitée) à la montée des sentiments nationaux au Québec, qui a créé une variété de positions professionnelles et semi-professionnelles impliquées dans la gouvernance «nationale», dont une grande partie semble occupée par les membres de cette catégorie. Les attributs liés au trekking les unissent symboliquement à la force primordiale de la nature. En été, sans la protection de leur plumage d’hiver, ils doivent se contenter de souliers «confortables» et se réunir à certains endroits névralgiques.
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Leur alimentation spirituelle
http://www.montrealplus.ca/montreal/venues/cafe-cherrier/cafe-cherrier_montreal-1.jpg/image_regularL’habitat naturel
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Obligatoire
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Enfin, la mode contemporaine comparée à celle des décennies précédentes
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La grossièreté d’une époque devient le chic d’un autre
Le haut et le bas
Quelle est la forme (métaphorique) de la «structure» de la société: une pyramide ou une coupe de champagne inversée? Autrement dit, quel est le rapport entre le haut et le bas? Est-il possible de préciser le degré de communication et de mobilité sociale entre le haut et le bas? Est-ce que la mode et les gouts vestimentaires parmi la grande masse de personnes sont-ils des tentatives d’imiter les attitudes et les styles propres aux cultures du «haut» (des élites)? Est-ce que le «bas» (qui inclut les classes moyennes et subalternes) imite-t-il les cultures du «haut» dans l’espoir d’augmenter la chance d'acquérir un statut «haut» et faire un saut de classe?
Les sauts vers le «haut»
Plus la société ressemble à une pyramide, plus est-il probable que le «bas» est positivement influencé par les cultures du «haut», car en imitant les cultures élites, les membres des classes subalternes ont une chance légèrement meilleure de faire un saut, tout simplement parce qu’il y a plus de place pour eux au milieu et au sommet de la pyramide sociale. Bref, le saut du bas vers le sommet est plus facile quand la distribution du pouvoir définit un espace social plus pyramidal, plus ouvert. Ceci peut déclencher une «guerre de la mode», car les élites répondent à l’imitation en créant ou en adoptant de nouvelles modes, obligeant les classes inférieures d’adopter ces nouveaux styles; c’est la Guerre Froide de l’habillement, car les vêtements sont un marqueur de classe très puissant.
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À gauche: des sauts, pas tout liés au statut
Pareto et la règle 80/20Wilfredo Pareto, sociologue-économiste du 19e siècle, a noté vers 1900 que la distribution de richesses en Italie adhérait à une règle de 80/20, que 20% de la population contrôlait 80% des ressources. À son grand étonnement, il a observé le même rapport pour un ensemble de pays riches et pauvres, développés et sous-développés. Ceci est devenu le Principe de Pareto, tellement est-il accepté par les chercheurs. Aujourd’hui, ce rapport est le sujet d’un débat aigu. Si ce rapport est constant, le mouvement du bas vers le haut ne dépend pas de l’économie.
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La distribution de la richesse
Déchiffrer les sources et les critères utilisés pour classer la richesse présente un grand défi, mais ils concordent, plus ou moins, pour appuyer l’idée de Pareto. Ce qui semble avoir changé est la distribution géographique: certains pays semblent s’enrichir davantage aux dépens des autres parties du Monde. De plus, la richesse semble se concentrer à l’intérieur du 20% élite. La Loi de Pareto ne semble plus si rigide face aux déplacements rapides typiques du régime postmoderne.
Sources consultées: U.N. statistics - Distribution of Income and Consumption; wealth and poverty Research on the World Distribution of Household Wealth (UNU-WIDER) CIA World Factbook: Field Listing - Distribution of family income - Gini index
« A study by the World Institute for Development Economics Research at United Nations University reports that the richest 1% of adults alone owned 40% of global assets in the year 2000, and that the richest 10% of adults accounted for 85% of the world total. The bottom half of the world adult population owned barely 1% of global wealth. Extensive statistics, many indicating the growing world disparity, are included in the available report, press releases, Excel tables and Powerpoint slides. Moreover, another study found that the richest 2% own more than half of global household assets. Despite this, the distribution has been changing quite rapidly in the direction of greater concentration of wealth ». (http://en.wikipedia.org/wiki/Distribution_of_wealth 21-07-09)
Europe de l’Est, 2007
La centralisation du pouvoirAu 19e siècle, les États de l’Occident se transforment en États-
nation, s’inspirant de la radicalisation de la culture mise en place par la France révolutionnaire. Même les noms
individuels, qui étaient un moyen de comptabilité pour tracer les alliances entre les maisonnées, sont politisés par les
idéologues pour produire une «nation». Pour renforcer la solidarité politique, ils veulent renforcer l’unité culturelle. Les
États tentent d’évacuer les menaces à leur politique de centralisation du pouvoir: les traces du système de classe de
l’Ancien Régime, les privilèges hérités, les prétentions de l’Église qui réclame le partage du pouvoir, l’ethnicité comme
base de l’identité sociale (aux États-Unis, ceci assume des conséquences tragiques pour les peuples autochtones; plus
tard, en Allemagne, la situation devient pire pour les Juifs et les Gitans), les syndicats (qui prétendent définir une base du
pouvoir qui s’oppose à celle de l’État), et même la parenté (qui fournit aux personnes de ressources psychiques et émotives pour résister à l’État, et donc devient un des
premiers domaines où intervient l’État, qui prend le contrôle des mariages, de la sexualité et de la reproduction). Les
personnes sont donc poussées vers une guerre de résistance psychique sur les intrusions étatiques. La mode et d’autres domaines (la musique, la littérature et le théâtre populaire,
toutes des formes qui deviennent, pour l’État et ses idéologues, de formes «basses», «vulgaires» «dérivatives» de la «haute» culture – les musées et son esthétique, la musique
«classique», etc.) deviennent des champs de bataille où les personnes cherchent à affirmer leur autonomie face à l’État.
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Signing the Marriage Register, 1896, James Charles
La mondialisation et la société ouverte
Je tente d’exposer un paradoxe: oui, la mondialisation pousse la société locale vers un modèle «coupe de champagne», mais en élargissant les frontières des communautés (largement en les fragilisant), elle crée l’illusion qu’il a plus de niches prêtes à recevoir les personnes qui maitrisent la culture de ce nouvel espace «international», les «néo-cosmopolites» qui s’internationalisent pour prendre place au banquet du régime mondial et de sa culture de détachement et de déplacement. Autrement dit, l’augmentation de la mobilité sociale et géographique est liée à l’appauvrissement en croissance.
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L’espace social était assez complexe avant la mondialisation; aujourd’hui, il l’est davantage, car le l’espace public où traditionnellement les lignes de force agissaient et se chevauchaient est brouillé. Qu’est-ce qu’un lieu public de nos jours? Il y a un autre aspect problématique à la mondialisation: on parle incessamment des frontières poreuses (États, nations, pays, individus), comme si la migration était devenue un paroxysme global. Mais c’est inexact: comparé au 19e siècle, le taux de migration comme proportion de la population totale est relativement faible. Cela suggère que la perception de la migration ait changé, d’un élément qui contribuait à la construction de la nation (au 19e siècle) à quelque chose que la menace (aujourd’hui).
http://www.migrationinformation.org/datahub/charts/historic-1.jpgImmigration aux États-Unis, 1870-2008
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Le Canada qui accueille les
immigrants, 1880
«The New Cosmopolitanism»
Ce n’est pas que le monde d’aujourd’hui soit plus compétitif (il l’est, sans aucun doute, grâce au néolibéralisme qui a tendance à gruger les racines communautaires des personnes), mais qu’il donne l’impression qu’il est possible pour un individu de sortir du tourbillon en maitrisant la nouvelle culture de cet espace «cosmopolite». Le cosmopolitisme donne l’impression que la personne s’orne d’une couche protectrice culturelle, en maitrisant certains signes iconiques d’un monde dominé par les déplacements de personnes, marchandises et surtout d’images. Le cosmopolitisme n’est plus signalé par la capacité de pénétrer l’étranger en toute sécurité (signe du régime colonial) mais par l’appropriation de l’étranger « chez-nous ».
La rationalité et l’espace
Parmi d’autres techniques de gouvernance, les États projettent leur pouvoir pour transformer l’espace public en symbole de la communauté politique. Quand un gouvernement établit des normes de l’utilisation de l’espace censées être «rationnelles», il autorise et impose une vision de causalité sur ses citoyens. Inconsciemment et involontairement, le contrôle de l’espace selon un modèle d’une utilisation rationnelle du temps établit le pouvoir culturel de l’État. Par exemple, une personne qui calcule le «meilleur» parcours pour arriver au travail tente (normalement) de minimiser le temps du trajet, non le nombre d’arbres qu’il doit voir en chemin. Quand les individus contrôlent leurs déplacements selon le modèle «rationnel» de l’État, ils se sensibilisent aux lignes de force de l’espace public et donc adaptent également les rythmes intimes de leurs corps (dormir, manger, etc.) à cette rationalité. L’espace public de l’État (et sa métaphore du «corps social») devient l’espace intime du corps. Plus importante, cette définition spatiotemporelle de la rationalité devient le standard qui définit l’ensemble de la causalité, qui permet même une comptabilité de l’intimité («je te quitte parce que tu n’es pas prêt à investir dans notre couple», ou ses variantes).
Tokyo
Comment s’établit le contrôle du temps et de l’agir individuel• 1a) établir des usages prescrits de l’espace («zoning»); ceci oblige les personnes à faire une navette
liant les zones résidentielles, de travail, et de loisir;• 1b) le zonage des magasins alimentaires établit le temps nécessaire pour les emplettes;• 2a) établir, initialement en collaboration avec les propriétaires d’usines et, aujourd’hui, règlementer la
«tradition» qui fixe les horaires de travail et des écoles;• 2b) ceci va déterminer les horaires de l’intimité – quand manger ensemble, etc.;• 3) établir le nombre de jours ou même les périodes de vacances (ce qui oblige les personnes à prendre
des décisions de «rester à la maison» ou de voyager);4) standardiser les unités utilisées pour établir le temps; les fuseaux horaires standards ont émergé uniquement au 19e siècle; ceci en partie contribue à définir les frontières du «Nous» en sabotant les temps «locaux»
• 5) au 19e siècle, définir des standards d’hygiène qui obligeaient les personnes à établir certaines habitudes règlementées selon un horaire (se laver, s’habiller, etc.);6) établir, par un système de musées, ce qui constitue «le passé» pour définir ce qui est «le présent»;7) règlementer les moyens de transport public (nombre, fréquence, parcours) et donc les horaires de déplacement;8) règlementer les horaires des magasins et donc définir les habitudes d’achat.9) définir l’année financière et donc la «rationalité fiscale»
Comme dans le cas de vêtements formels, le costume «folklorique» ou «national» exprime l’identité affichée en l’espace public et non l’identité de l’intimité. À place de transformer les citoyens en petits robots porteurs/porteuses de l’identité «nationale», ce costume est adopté uniquement en public lors de fêtes nationales, et donc il signale l’existence d’une dimension privée, dont les traits souvent servent à tenir l’intime à l’abri de la dimension publique trop «bruyante» et trop intrusive. Il favorise la qualité hermétique et quasi-sacrée de l’intimité dans un environnement autrement dominé par un social un peu trop présent, car il précise les contours de l’espace public et donc trace les limites du pouvoir de l’État.
Ici, on veut un jeune couple balkanique posé pour une carte postale dans les années 1980s.
Les vêtements standardisés et l’espace
La ritualisation du corps et de son symbolisme est une façon d’affirmer le Soi aux dépens du pouvoir projeté sur le lieu: les «vêtements de travail» sont auto-identifiants, mais l’habillement formel est valide pour tous les lieux et donc isole la personne de son environnement: le pouvoir du lieu est toujours local, mais l’habillement formel est, en contraste, polyvalent, car il se base sur un modèle universel et donc simplifié de l’espace social. Les vêtements formels permettent aux personnes de s’isoler des lignes de force qui parsèment les lieux publics. La culture populaire n’a pas compris: l’individualité se protège en la camouflant, pas en la proclamant.
Parodie des chefs du G-8, 2010ahttp://www.rcinet.ca/english/illustration/htmleditor/G8%20skit(1).jpg
La mode et ses changements contre le pouvoir temporel de l’État
• Les données ne sont pas sans équivoques, mais elles suggèrent néanmoins une augmentation des dépenses pour les vêtements: (1) montre les dépenses pour des femmes américaines urbaines de tous âges pour la période 1997-2007; (2) les dépenses de femmes américaines avec doctorat ou autre diplôme professionnel pour la même période. Source: Bureau of Labor Statistics, United States Department of Labor; http://data.bls.gov/cgi-bin/dsrv, consulté le 28-10-2009.
Year Annual
1997 693
1998 669
1999 679
2000 755
2001 708
2002 727
2003 653
2004 756
2005 774
2006 778
2007 773
Year Annual
1997 978
1998 913
1999 1010
2000 1065
2001 1030
2002 972
2003 854
2004 900
2005 1097
2006 961
2007 1146
(1) (2)
Et si la mode et ses changements ne seraient-ce une simple tentative d’épater les autres, mais plutôt une réaction individuelle contre le contrôle étatique du temps? Si, en restant «à la mode» et sensible aux changements (n’oublions pas, liés au statut individuel), les personnes voulaient lancer le message qu’elles sont les «vrais» maitres du temps? Selon les hypothèses avancées au début sur la structure de la société («pyramide» ou «coupe de champagne renversée»), plus les États réagissent à diminution récente de leur pouvoir (due aux effets de la mondialisation) en renforçant les moyens traditionnels de contrôle étatique, et plus les personnes se sentent victimes des mêmes dynamiques de la mondialisation, plus elles devraient devenir sensibles aux rythmes de la mode pour affirmer leur pouvoir individuel. En fait, elles vont même créer des demandes qui vont accélérer ces rythmes.
Economic Indicators 2004 2005 2006 2007 2008 08-07 % CAAGR
Apparent Domestic Market 10 182.0 10 065.5 10 450.0 10 517.0 10 301.6 -2.0% 0.3%
Shipments 6 241.1 5 289.6 4 981.0 4 325.4 3 288.0 -24.0% -14.8%
Gross Domestic Product 2 906.0 2 549.0 2 358.0 2 095.0 1 622.8 -22.5% -13.6%
Manufacturing Intensity Ratio 46.6% 48.2% 47.3% 48.4% 49.4% 1.9% 1.5%
Total Imports 6 084.4 6 509.0 6 976.9 7 391.6 7 910.0 7.0% 6.8%
Domestic Exports 2 143.5 1 733.1 1 508.0 1 200.0 896.5 -25.3% -19.6%
Trade Balance -3 940.9 -4 775.9 -5 469.0 -6 191.6 -7 013.6 13.3% 15.5%
Import Penetration 59.8% 64.7% 66.8% 70.3% 76.8% 9.3% 6.5%Export Orientation 34.3% 32.8% 30.3% 27.7% 27.3% -1.7% -5.6%
Domestic Market Share 40.2% 35.3% 33.2% 29.7% 23.2% -21.9% -12.8%
Labour Productivity 35.4 37.9 36.3 37.3 36.6 -2.0% 0.8%
Employment (Thousands) 82.2 67.3 65.0 56.2 44.4 -21.0% -14.3%
Clothing Manufacturing [NAICS 315] - Major Economic Indicators(millions of $ CAN. employment in thousands)
Source : Industrie Canada (http://www.ic.gc.ca/eic/site/apparel-vetements.nsf/eng/h_ap03307.html, 23-08-2011)
Les importations entre 2004 et 2008 sont passées de 60% à 77% (Import Penetration) de la valeur totale du secteur, soit de 6mld à 7,9mld (total imports). Donc, la valeur des importations durant cette période augmente plus que la quantité d’importations.
Du meme rapport: « Apparel imports have grown consistently over the 2004 to 2008 period at a time when the apparel domestic market showed a very modest average annual increase of 0.3%. This underscores the pressure being felt by Canadian apparel producers in that they are accounting for a declining percentage of a non-growing market ». Les données n’indiquent pas la proportion exacte du secteur « de luxe », mais l’augmentation de la valeur des importations suggère que le changement n’est pas limité au gradin le plus bas du secteur, où de vêtements économiques importés de la Chine remplacent les vêtements jadis produits au Canada. Bref, une grande partie des changements est sans aucun doute due à des réaménagements motivés par la mondialisation; cependant, il semble y avoir une évolution dans la demande pour des articles plus dispendieux venant de l’étranger.
La fréquence des changements
Selon cette position, non seulement les dépenses, mais la fréquence avec laquelle les personnes adoptent de nouvelles modes est signe de cette lutte entre l’individu et le pouvoir.
Par exemple, le cout de chaque item individuel peut baisser à fur et à mesure que les marchands importent des vêtements fabriqués en Chine ou en Inde (à bas prix), mais le nombre
d’items consommer peut augmenter si le rythme de la mode accélère, avec des changements tous les 5 ou 6 mois.
Autrement dit, les personnes sacrifient la qualité pour la quantité. Il serait intéressant de constater la quantité de vieux vêtements dans les garde-robes (selon ce scénario, on ne peut
mesurer la quantité donnée aux charités traditionnelles, car ces vêtements de qualité inférieure sont probablement jetés et
non recyclés). Il est également possible que les personnes achètent davantage aux friperies, augmentant toujours la
quantité aux dépens de la qualité (ou de la durée de vie de chaque item). Le gout contemporain pour le rétro est peut-être
émergé de cette tendance (alimentée par les conditions économiques désastreuses d’aujourd’hui).
Comme vous pouvez constater, il y a de multiples possibilités et plusieurs pistes de recherche.
http://masterind.com/images/store_big.jpg
http://www1.chicagoreader.com/best_of_chicago_09/fashion/used_
clothing/lennyandme.jpg
Une friperie
Un magasin à détail
Les garde-robes
«The growth of the suburbs was facilitated by the automobile and an expanded road network after the 1958 Interstate Highway Act. The space occupied by American homes began to increase as the population density pressure eased further out from city centers. A typical home built in 1900 had between 700 and 1,200 square feet of living space. Compare that with 1,000 square feet for a home built in 1950 and 2,265 square feet in the average home built in 2000. American closets have kept up with the growth in the home. Many floor plans now include not one but two walk-in closets. The increase in American wealth has led to more and more elaborate closet designs. In 2006, Business Week estimated that the market for custom closet design and do-it-yourself closet retail represents a $2 billion industry that grew 25% a year between 2000 and 2005. The American closet has come into its own as an accepted and indispensable part of our homes.»
http://historicalwebber.mossiso.com/digitalmaps/index.php?topic=13.0; 25-07-09
http://www.nhdbuzz.com/BuzzAdmin/articlefiles/462-1Place_Bed1.jpg
Garde-robe, appartement des années 1960s, 8 pi carrés indiqués par la flèche
http://farm4.static.flickr.com/3031/2656093106_cf1d9db4d7.jpg?v=0
Garde-robe dans un logement rénové, 2000
Jay Pritchett de Modern Family a fait sa fortune dans le design de garde-robes.
Le centre commercialEn tant que telle, l’importance du centre d’achat est son caractère de non-lieu (dans le sens proposé par Marc Augé, (Non-Lieux. Introduction à une anthropologie de la surmodernité, 1992; c-à-d., pas attaché à un système local de significations). Il fait partie, dans un sens, du système mondial, car il est gavé de marchandise provenant de partout dans le monde, et c’est précisément cette qualité d’amener et de présenter «l’ailleurs» (qui autrement représente la cause des instabilités économiques locales quand, par exemple, les entreprises transfèrent la partie manufacture en Chine ou en Corée) qui l’évacue de ses significations locales – le centre d’achat n’est plus dans la même dimension mercantile du bistro local, du dépanneur du coin, de «mon» boucher. De plus, ces lieux ne sont pas des endroits pour flâner, car ils sont trop surchargés de significations positives et négatives: c’est le lieu rempli d’objets qui incarnent la menace à la stabilité d’emplois causée par le système international de production; c’est aussi le lieu qui incarne avant tout le choix, et donc le lieu où les personnes peuvent créer le simulacre du pouvoir individuel.
* À différence de certains chercheurs qui prétendent que les individus «postmodernes» soient secoués et fragilisés par les dynamiques de déplacement qui dominent ce régime, je crois que les personnes «désencadrées» par la fragilisation des frontières (psychiques autant que nationales) et voulant renforcer leur présence dans les communautés poreuses, réagissent en mettant l’accent sur leur coté psychique émotif et sur le comportement agressif. Mais ceci est le sujet d’une autre enquête.
http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/thumb/8/83/Eaton_Centre_HDR_style.jpg/350px-Eaton_Centre_HDR_style.jpg
Bref, l’identité «étrangère» et sémiotiquement surchargée du centre évacue le sens purement économique ou purement utilitaire des objets, transformant la négociation avec l’objet en une projection des pulsions émotives de la psyché individuelle; dans la postmodernité, ces pulsions définissent l’individu.* Autrement dit, les personnes peuvent fréquenter ces lieux, comme le notent Falk et Campbell, sans nécessairement vouloir acheter ou se définir par la consommation. Visiter ces endroits est une aventure, c’est frôler le danger pour en sortir plus fort.
Eaton Centre, Toronto
Le consumérisme et l’identité postmoderneLe monde est-il profondément transformé par le capitalisme postmoderne? Sommes-nous devenus des esclaves du consumérisme? Est-ce que la force motrice censé définir le Soi social s’est déplacée du rapport au système de production, vers la consommation? D’innombrables arguments existent sur ce sujet, mais il est important à souligner, comme le font Falk et Campbell (The Shopping Experience, Sage, London, 1997) qu’il n’est pas nécessaire que les personnes achètent des marchandises ou des objets culturels (ou même qu’elles les consomment sans nécessairement les acheter) pour que la vie soit dominée par le consumérisme. L’identité (ou au moins une partie importante) peut se construire dans des lieux d’achat. Autrement dit, les personnes peuvent
http://cache.marriott.com/propertyimages/y/yulmr/phototour/yulmr_phototour24.jpg
Centre Eaton, Montréal
fréquenter des lieux mercantiles pour les maitriser, en rejetant le rôle de robot-consommateur, en s’engageant dans une négociation sémiotique avec les objets et les messages qu’ils incarnent. Ces lieux sont devenus les champs de bataille, où les personnes à la recherche de nouvelles communautés peuvent dialoguer en utilisant les objets comme vecteurs (comme jadis les journaux le faisaient). Les objets ne sont plus uniquement des jetons qui proclament le statut, mais agissent comme des échos muets de la condition psychique d’isolement. L’appropriation des objets devient la première ligne de défense contre le déracinement réel et symbolique du nouveau système mondial.