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Ambassade de France à Washington
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URL : http://www.ambafrance-us.org Domaine Réseau de distribution d’électricité intelligent
Document Rapport d’Ambassade / Consulat Général de France à San Francisco, California
Titre La Smart Grid en Californie : acteurs et enjeux
Auteur(s) Arnaud SOUILLE
Date Novembre 2010
ContactSST science@consulfrance-‐sanfrancisco.org
Numéro
Mots-‐clefs Energie. Energie renouvelable. Réseau. Réseau intelligent. Smart grid. Véhicule électrique. Électricité.
Consommation. Transmission. Distribution. Communication. Infrastructure. Stockage énergétique. Régulation. Batterie. Effacement énergétique. Microgrid. Cyber sécurité.
Résumé La Californie est engagée dans la lutte contre le changement climatique, et cela passe par la modernisation de son infrastructure électrique. L’intégration de sources d’énergies renouvelables et le déploiement de véhicules électriques vont amener leur lot de perturbations sur un réseau vieillissant et en mauvais état. Mais c’est aussi pour cet état qui reste un champion de l’efficacité énergétique une formidable opportunité de remettre les compteurs à zéro en installant une infrastructure capable de flexibilité dans la gestion de toutes ces ressources variables. Pour beaucoup d’entreprises et de startups c’est aussi une occasion unique de se positionner sur un marché gigantesque. On s’est donc dans ce rapport attaché à comprendre les particularismes régionaux du déploiement du réseau dit intelligent mais que tout le monde désigne ici par « Smart Grid ».
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L’accès est libre et gratuit : http://www.bulletins-‐electroniques.com
2 LA SMART GRID EN CALIFORNIE
ABSTRACT
La Californie est engagée dans la lutte contre le changement climatique, et cela passe par la modernisation de son infrastructure électrique. L’intégration de sources d’énergies renouvelables et le déploiement de véhicules électriques vont amener leur lot de perturbations sur un réseau vieillissant et en mauvais état. Mais c’est aussi pour cet état qui reste un champion de l’efficacité énergétique une formidable opportunité de remettre les compteurs à zéro en installant une infrastructure capable de flexibilité dans la gestion de toutes ces ressources variables. Pour beaucoup d’entreprises et de startups c’est aussi une occasion unique de se positionner sur un marché gigantesque. On s’est donc dans ce rapport attaché à comprendre les particularismes régionaux du déploiement du réseau dit intelligent mais que tout le monde désigne ici par « Smart Grid ».
La Smart Grid en Californie Acteurs et Enjeux Arnaud Souillé
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Table des Matières
LE PAYSAGE ELECTRIQUE CALIFORNIEN. 8
ETAT ACTUEL DU RESEAU 8 UN RESEAU VIEILLISSANT 8 UNE CONSOMMATION D’ELECTRICITE EN AUGMENTATION 8 UNE PRODUCTION ET UNE DISTRIBUTION MULTIPLE 8 REPARTITION DE LA CONSOMMATION 10 LES ORGANISMES DE REGULATION 10 LA CALIFORNIA ENERGY COMMISSION (CEC) 11 LA CALIFORNIAN PUBLIC UTILITY COMMISSION (CPUC) 11 LE CALIFORNIA INDEPENDANT SECURITY OPERATOR (CISO). 11 LA REGULATION ET LA TARIFICATION EN PLACE 11 LE DECOUPLING 11 UNE TARIFICATION REPARTIE EN TRANCHES DE CONSOMMATION 12
AMBITIONS POLITIQUES ET CHALLENGES A VENIR EN CALIFORNIE. 13
UNE POLITIQUE AGRESSIVE EN MATIERE D’ENVIRONNEMENT. 13 LE NET-‐ENERGY METERING (NEM) COMME INCITATION SUPPLEMENTAIRE 14 INTEGRATION DES ENERGIES RENOUVELABLES 15 D’UNE PRODUCTION CENTRALISEE VERS UNE PRODUCTION REPARTIE SUR L’ENSEMBLE DU TERRITOIRE. 15 LES ENERGIES RENOUVELABLES : UNE SOURCE ENERGETIQUE INSTABLE. 15 INTEGRER LES VEHICULES ELECTRIQUES. 16 REDUIRE OU MAINTENIR LA CONSOMMATION ELECTRIQUE 16 GERER LES PICS DE CONSOMMATION 17 UN PIC DE CONSOMMATION ENTRE 14H ET 18H 17 UN PIC DE CONSOMMATION QUI COUTE CHER 18
LA SMART GRID, UNE REPONSE TECHNOLOGIQUE A CES DEFIS. 19
AMELIORER ET OPTIMISER LE RESEAU ELECTRIQUE 19 STRUCTURE DU RESEAU ELECTRIQUE 19 AMELIORER LE RESEAU DE TRANSMISSION. 20 AMELIORER LE RESEAU DE DISTRIBUTION 23 UN RESEAU DE COMMUNICATION APPOSE AU RESEAU ENERGETIQUE 25 UNE SEGMENTATION DU RESEAU DE COMMUNICATION CALQUE SUR L’INFRASTRUCTURE ELECTRIQUE. 25 L’INFRASTRUCTURE AMI /FAN 27 LE WAN 34 LE HAN 36 AJOUTER UNE INFRASTRUCTURE DE STOCKAGE. 41 DES SOLUTIONS TECHNOLOGIQUES ENCORE A L’ETAT DE RECHERCHE. 41 LES BENEFICES DU STOCKAGE POUR LES RESEAUX INTELLIGENTS. 44 LES INSTANCES DE REGULATION EN FAVEUR DU STOCKAGE ENERGETIQUE EN CALIFORNIE 45
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DEVELOPPER LES INFRASTRUCTURES VE 46 UNE MISE A JOUR DU RESEAU NECESSAIRE POUR SUPPORTER UNE SURCONSOMMATION. 46 DEUX MODELES EN COMPETITION POUR LA RECHARGE DES BATTERIES 47
VERS DE NOUVEAUX MODELES ECONOMIQUES 49
UNE TARIFICATION EN TEMPS REEL OU DU MOINS VARIABLE EN FONCTION DU TEMPS. 49 EFFACEMENT ENERGETIQUE (D.R) 51 LE MODELE 51 LES AGREGATEURS DOMINANT LE MARCHE EN CALIFORNIE 53 FEED IN TARIFF 53 MICROGRID 54 VEHICLE TO GRID 57
REGULATIONS ET STANDARDS 58
IMPORTANCE DE LA REGULATION ET INCIDENCE SUR LE MARCHE. 58 RESEAUX OUVERT OU FERME ? 59 UN ARBITRAGE, AU NIVEAU FEDERAL. 60 VERS UNE INTEROPERABILITE ET UNE MISE EN PLACE DE STANDARDS 61 UNE CYBER-‐SECURITE POUR LE RESEAU ELECTRIQUE. 62
UN MARCHE POTENTIEL ENORME POUR LA CALIFORNIE A SAISIR. 64
UN INVESTISSEMENT MASSIF DES OPERATEURS ELECTRIQUES. 64 UN NOUVEAU MARCHE POUR L'INDUSTRIE INFORMATIQUE. 64 EDUQUER LE CONSOMMATEUR 67 SMART GRID, UN CONCEPT INCONNU DU GRAND PUBLIC 67 LE DEPLOIEMENT DU RESEAU VERSUS LE COMPORTEMENT DES CONSOMMATEURS. 67 DE NOMBREUX PROGRAMMES DE RECHERCHE SUR LE SUJET. 69 LE RESEAU INTELLIGENT, ATTRACTIF POUR LES INVESTISSEMENTS AUX ETATS-‐UNIS. 70 LA SILICON VALLEY : UN ECOSYSTEME FAVORABLE POUR INVESTIR DANS LA SMART GRID 72
CONCLUSION 74
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Liste de Figures
Figure 1: Evolution de la consommation d'électricité en Californie (Source : California Energy Commission -‐ 2007) ............................................................................................................................... 8 Figure 2 : Provenance de l'énergie consommée en Californie (source : California Energy Commission)............................................................................................................................................................... 9 Figure 3 : Production des énergies renouvelables en Californie (source : California Energy Commission) .......................................................................................................................................... 9 Figure 4 : Répartition de la consommation électrique par secteur (source :CEC) ............................... 10 Figure 5: Modèle de tarification en tranche utilisé en Californie (Source : Southern California Edison)............................................................................................................................................................. 12 Figure 6: Production du solaire versus le pic de consommation (source : Green Manufacturer-‐ ) ..... 15 Figure 7 : Stabilisation de la consommation électrique par tête en Californie (source CEC) .............. 16 Figure 8: Répartition de la consommation électrique au cours de la journée par secteur économique (source : LBNL)..................................................................................................................................... 17 Figure 9: Mix énergétique quotidien ................................................................................................... 18 Figure 10 Schéma du réseau électrique (Source : J. J Messerly, from Wikipedia -‐ Electrical Grid) ..... 19 Figure 11: Carte des lignes de transmission existantes en Californie (Source CEC) ............................ 20 Figure 12 Schéma d'un SCADA (Source Wikipedia : SCADA) ............................................................... 24 Figure 13: Exemple de réseau de communication entre les sous stations (Source : Cisco) ................ 25 Figure 14: les réseaux de communication et leurs applications (GTM Research) ............................... 26 Figure 15: Architecture du réseau de communication apposé sur le réseau électrique (GTM Research) ............................................................................................................................................. 27 Figure 16 : Compteurs intelligents utilisés par PG&E (PG&E).............................................................. 29 Figure 17: Technologies de communication disponibles pour le WAN/FAN (GTM Research) ............ 30 Figure 18: comparaison entre le BPL et le 4G/WiMAX (Source : Spectrum IEEE)................................ 36 Figure 19 : HAN composé de la technologie Zigbee et CPL (Source : Renesas) ................................... 38 Figure 20 : Liste des projets de stockage électrique en Californie ...................................................... 43 Figure 21: Domaines potentiel définis par le NIST, pour la création de standards(Source : NIST)...... 61 Figure 22: La consommation énergétique par appareil dans une maison (Source : kilowatt-‐house.com) .......................................................................................................................................... 66 Figure 23: Comparaison des transactions liées au secteur Smart Grid entre Q1 et Q2 2010 (Source Mercom Capital Group) ....................................................................................................................... 70 Figure 24: Détail du capital risque au second trimestre 2010 pour le secteur Smart Grid (Source Mercom Capital Group) ....................................................................................................................... 72 Figure 25: les principaux acteurs du secteur Smart Grid par segment de marché (Source GTM Research) ............................................................................................................................................. 73
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Remerciements
Pour commencer ce rapport, je souhaiterais remercier tout particulièrement Thomas Deschamps, attaché scientifique au consulat de San Francisco. Son aide précieuse pour la prise de contacts, la recherche d’information et le travail complémentaire effectué sur ce document ont rendu possible l’écriture de ce rapport. Je tiens également à lui témoigner toute ma reconnaissance pour l’expérience enrichissante qu’il m'a permis de vivre depuis son arrivée dans l'équipe et pour mon initiation aux problématiques actuelles du réseau intelligent.
Je souhaiterais également remercier l’ensemble du personnel du consulat pour leur générosité et leur gentillesse, et plus particulièrement mes collègues de la mission scientifique: Raegen Salais, Véronique Mini, Myriam Laïc et Marion Franc, pour leur soutien quotidien durant ma mission.
Un grand merci enfin a Yvan Castilloux, Antoines Aslanides, Christian Keller et Grégory Vincent, pour leur aide et leurs conseils durant nos différentes entrevues.
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Introduction
Smart Grid est un terme peu connu du grand public. Selon une étude réalisée par Harris Interactive1, 68% de la population américaine n’en a jamais entendu parler et 63% ne saurait décrire un compteur intelligent. Littéralement Smart Grid signifie réseau intelligent, c’est à dire un réseau capable de communiquer, d’observer et de prendre des décisions en conséquence. La réalité est que le terme Smart Grid a dépassé l’aspect technologique pour devenir un concept à part entière incluant, en plus de la composante technologique, une composante économique et sociale. L’an dernier, le président Américain avait annoncé un financement de $3.4 milliards dédié au réseau intelligent. Il avait alors comparé cette initiative aux grands travaux lancés par Eisenhower pour construire des autoroutes entre les états : de même qu’Eisenhower avait voulu moderniser le transport routier pour relancer l’économie et l’emploi, Obama veut aujourd’hui moderniser le transport de l’énergie avec pour ambition de porter les Etats-‐Unis au rang de leader mondial de cette industrie et relancer ainsi une partie de l’économie.
Et la Californie dans tout cela? La Californie reconnue à elle seule comme la 8ème puissance mondiale, terre d’innovations, ayant connu tour à tour plusieurs révolutions industrielles (or, argent, pétrole, internet), est aujourd’hui fragilisée. Surendettée, elle fait face actuellement à un taux de chômage de 12.4% un des plus élevés de son histoire2. Elle a connu ces dernières années de nombreux problèmes énergétiques : En 2001, une énorme coupure de courant avait paralysé pendant plusieurs jours l’économie provoquant dans le même temps la faillite de son plus grand opérateur électrique, PG&E. Plus qu’une remise à jour de son réseau, la Californie voit dans le réseau intelligent une opportunité pour entrer dans une nouvelle révolution industrielle. « Go Green for Green »tel pourrait être son leitmotiv à l’heure actuelle.
1 Engaging your Consumers for Smart Grid Success -‐ Electric Energy Online Magazine, September 2010 2 Evolution du taux de chômage Californien sur Google Public data explorer http://bit.ly/aOQ1Vg
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Le paysage électrique californien.
Etat actuel du réseau
Un réseau vieillissant
A l’image du réseau électrique américain, le réseau californien est vieillissant, intégrant des technologies et des appareils âgés, parfois de plus de 50 ans. Les disfonctionnements ont coûté et coûtent encore énormément d’argent(entre $11 milliards et 18 milliards3) à un état qui est aujourd’hui surendetté4. En 2001 la crise énergétique, surnommée également la Western U.S Energy crisis, représenta une perte de plus de 40 milliards de dollars pour la Californie.
Une consommation d’électricité en augmentation
Alors que la population augmente en Californie la consommation en électricité suit cette tendance (Figure 1). Et selon la California Energy Commission (CEC), ce phénomène ne devrait pas s’estomper dans les prochaines années. La Californie doit donc construire chaque année de nouvelles centrales pour assurer la production d’électricité ou importer plus d’énergie.
Figure 1: Evolution de la consommation d'électricité en Californie (Source : California Energy Commission -‐ 2007)
Une production et une distribution multiple
En 2008, la Californie produisait 73,2% de son électricité alors qu’elle en importait 27,8% (Figure 2). La Californie est donc dépendante de ses voisins pour assurer son ravitaillement énergétique. Parmi les sources utilisées pour produire l’électricité en 2008, le gaz naturel était le plus utilisé et représentait à lui seul 46.5%. Venaient ensuite le charbon (15.5%) et le nucléaire (14.9%). Les
3 The cost of power disturbances to industrial and digital economy companies – EPRI http://bit.ly/crz8G7 4 Has the golden state gone bust ? San Francisco Gate, February 22 2010
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énergies renouvelables représentaient 13.5% et se positionnaient juste devant l’hydraulique avec 9.6%.
Figure 2 : Provenance de l'énergie consommée en Californie (source : California Energy Commission)
Parmi les énergies renouvelables, l’éolien et la géothermie sont les deux sources les plus utilisées. A elles deux elles représentent plus de la moitié de la production des renouvelables. Alors que l’hydraulique, la biomasse, les biogaz et la géothermie assurent une production stable au cours de la journée, le solaire et l’éolien sont plus efficaces respectivement en milieu de journée ou pendant la nuit. La production totale devient donc dépendante de l’heure de la journée (Figure 3).
Figure 3 : Production des énergies renouvelables en Californie (source : California Energy Commission)
Une vingtaine d’opérateurs électriques coexistent sur le territoire. Certains comme Sacramento Municipal Utility District (SMUD) sont publics, les autres dont les 3 plus grands Pacific Gas & Electric (PG&E), San Diego Gas & Electric (SD&E) et Southern California Edison (SCE) sont privés. Cependant
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ces derniers sont responsables de plus des ¾de la distribution. Le nombre d’opérateurs n’est pas fixe, et s’ils se partagent géographiquement le territoire, il peut arriver qu’un comté ou une municipalité décide de prendre son indépendance et de créer son propre service d’électricité. Ce fut le cas en début d’année lorsque le comté de Marin créa le Marin Energy Authority5, prenant alors son indépendance vis-‐à-‐vis de PG&E, le plus grand opérateur de Californie.
Parmi les autres opérateurs il est bon de citer : Alameda Municipal Power, Azusa Light & Water, City of Palo Alto Utilities, Glendale Public Service Department, Gridley Municipal Utilities, Healdsburg Municipal Electric Department, Los Angeles Department of Water and Power, Pacific Power, Riverside Public Utilities , Santa Clara Electric Department (a.k.a. Silicon Valley Energy), Sierra-‐Pacific Power, Southern California Public Power Authority, Pasadena Water & Power, Burbank Water & Power, Anaheim Public utilities.6
Répartition de la consommation
L’électricité en Californie est consommée pour la plus grande partie par les habitations et les bâtiments commerciaux. Comme on peut le voir sur la courbe ci-‐dessous (Figure 4) l’agriculture et l’industrie ne représentent qu’un faible pourcentage de l’énergie utilisée et ont peu d’impact sur la hausse de consommation observée depuis plusieurs décennies.
Figure 4 : Répartition de la consommation électrique par secteur (source :CEC)
Les organismes de régulation
Pour réguler le marché de l’électricité et assurer une bonne entente entre les opérateurs, les consommateurs et les tiers acteurs des organismes de régulation ont été mis en place au niveau
5 Marin County Goes Renewable By Establishing Its Own Energy Authority, Planet Green Blog 6 La liste complète sur Wikipedia : http://en.wikipedia.org/wiki/List_of_United_States_electric_companies
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californien. A noter également l’existence de la Federal Energy Regulation Commission (FERC) qui dicte la politique et la régulation énergétique à l’échelle fédérale.
La California Energy Commission (CEC)
La CEC a pour responsabilité de prévoir les besoins futurs en énergie, de promouvoir l’efficacité énergétique à travers la mise en place de standards pour les appareils électriques ainsi que pour le bâtiment, et de supporter les technologies impliquées dans les énergies renouvelables. Sa mission se traduit notamment par l’entretien de l’historique des données énergétiques, le financement de projets de recherche et la certification des sources d’énergies dites renouvelables.
La Californian Public Utility Commission (CPUC)
Le CPUC joue le rôle d’arbitre entre les opérateurs privés et les consommateurs (les opérateurs publics dépendent des municipalités). Le CPUC s’assure auprès des consommateurs que le degré de service offert par les opérateurs satisfait suffisamment les requis imposés par la régulation de l’état. Il est, entre autres, responsable de fixer en accord avec les opérateurs et les consommateurs le prix de l’électricité en fonction des zones géographiques et économiques. Il est également responsable de la mise en application du modèle de « decoupling» utilisé en Californie. Du point de vue des opérateurs, le CPUC veille au bon accomplissement des objectifs imposés par le gouvernement comme par exemple l’obligation de produire 20% de son électricité en provenance des énergies renouvelables.
Le California Independant Security Operator (CISO).
Le California ISO est l’organisme en charge d’assurer la fiabilité et l’efficacité du réseau. Il régule l’accès au réseau de transmission et promeut le développement de l’infrastructure de transmission. Par ailleurs il fournit régulièrement de l’information sur l’état du réseau, sur la consommation et la production d’électricité.
La régulation et la tarification en place
Le decoupling
Suite à la crise énergétique de 2001, le gouvernement en place a opté pour une régulation renforcée de la filiale énergétique. Le modèle alors choisi par l’état Californien a été le « decoupling », encore aujourd’hui en place. Ce terme désigne le modèle selon lequel les profits réalisés par les opérateurs sont dissociés de leur vente de l’électricité. En conséquence une plus grande quantité d’électricité vendue ne rapporte pas plus d’argent. Le but est d’inciter les opérateurs à réaliser une meilleure efficacité énergétique étant donné qu’une baisse de la quantité d’électricité vendue n’implique aucune réduction des bénéfices. Il permet également de limiter les spéculations, en partie responsables de la crise de 2001. Ce schéma s’oppose à celui choisi par le Texas qui a opté pour une plus grande dérégulation du marché énergétique. En cas de réussite des objectifs imposés par le CPUC en termes de sauvegarde d’énergie, les opérateurs reçoivent des récompenses sous forme de nouveaux fonds. Cependant, en cas de non respect des objectifs et de résultats très éloignés des
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attentes, les opérateurs peuvent recevoir des pénalités jusqu’à un montant de $25 millions. Dans les faits ceci ne s’est jamais produit.
Une tarification répartie en tranches de consommation
Du point de vue du consommateur, la tarification appliquée dépend de sa consommation totale. En effet, de façon à pénaliser les gros consommateurs, un système de tranches de tarif a été mis en place7. Comme le montre le schéma ci-‐dessous (Figure 5), la première tranche (Tier) est censée représenter la consommation basique comme l’éclairage, le chauffage, et les usages quotidiens (réfrigérateurs, cuisine, …). Lorsque la consommation dépasse celle attribuée à la première tranche, la quantité supplémentaire sera facturée au taux donné par la seconde, et ainsi de suite pour les tranches restantes. Ce modèle incite lui aussi à une meilleure efficacité énergétique et à une réduction de la consommation8.
Figure 5: Modèle de tarification en tranche utilisé en Californie (Source : Southern California Edison)
7 Tranches de prix pour PG&E, SCE et SDG&E en juillet 2010 : http://bit.ly/bO5unV 8 Getting consumers to rethink cost of solar: it’s the electricity, The Solar Home & Business Journal, November 9 2010
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Ambitions politiques et challenges à venir en Californie.
Une politique agressive en matière d’environnement.
L’Etat de Californie mène une politique agressive en matière d’environnement en comparaison de la majorité des autres états américains et est devenu, de fait, l’un des meneurs dans ce domaine aux USA. En 2006 le gouvernement californien a voté l’ Assembly Bill 329 (AB32), ordonnant la mise en place d’un programme de plusieurs années pour réduire les émissions de gaz à effets de serre. L’objectif fixé est le retour du niveau des émissions en 2020 à celui de 1990.
Comme pour prouver son ambition, le gouvernement californien accéléra en 2006 la mise en place de la Senate Bill 1078, établie en 2002 et donnant naissance au Renewables Portfolio Standard (RPS). Le RPS est l’un des plus ambitieux standards du pays et prévoit qu’une part de 20% de son électricité soit produite à partir d’énergie renouvelable en 2010. Ce taux devrait passer à 33% en 2020, bien que cette initiative soit confrontée à une forte opposition10,11. Dans les énergies renouvelables, il faut entendre ici le solaire, l’éolien, la géothermie, la biomasse et les barrages hydrauliques de petite taille principalement. Le nucléaire et les barrages hydrauliques de grande capacité ne sont pas comptabilisés comme sources d’ENR en raison de leur impact sur l’environnement.
En 2009, les 3 plus gros opérateurs californiens ont affiché un taux moyen de 15% de leur mix énergétique en provenance d’ENR. Le détail pour chacun d’entre eux est donné ci-‐dessous :
• Pacific Gas and Electric (PG&E) -‐ 14.4% • Southern California Edison (SCE) -‐ 17.4% • San Diego Gas & Electric (SDG&E) -‐ 10.5%
Une liste des projets en Californie programmés par les opérateurs privés pour parvenir au 33% RPS est également disponible sur le site du CPUC12.
La California Solar Initiative (CSI)
Bien que bénéficiant d'une dizaine d'années d'aides gouvernementales en matière de solaire, la Californie a connu une accélération du développement de son parc grâce au démarrage en 2004 du projet "Million Solar Roof", visant à installer des panneaux solaires sur un million de toits californiens, et posant ainsi les fondations de la California Solar Initiative13. Disposant d'un budget de $3,3 Milliards sur dix ans (de 2006 à 2016), ce projet modifie radicalement le système d'incitations et d'aides de l'état. Comportant plusieurs volets, notamment un programme d'aide à l'accès au solaire pour les foyers les
9 Assembly Bill 32 website 10 Meg Whitman, Prop 23, and AB 32, Legal Planet Blog, September 24 2010 11 Meg Whitman Tries to Have it Both Ways With California Climate Change Law, Green Tech Media, Sept 23 2010 12 Liste au format Excel des projets du CPUC http://bit.ly/akwCAt 13 The California Solar Initiative Website
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plus modestes, la CSI a permis la mise en place d'une réelle politique incitative adaptée en fonction de la consommation de l'utilisateur.
La première mesure : Expected Performance-‐Based Buy-‐Down (EPBB), concerne les installations générant moins de 30 kW avec la possibilité de toucher directement en une fois une aide calculée à partir des performances estimées du système et indexée sur une grille tarifaire particulière en fonction de la catégorie de l'utilisateur.
La deuxième mesure : Performance Based Incentive (PBI), s'applique aux installations de plus de 50 kW. Une aide mensuelle étalée sur une durée de cinq ans est versée en fonction des capacités de production de l'installation.
Ces deux aides qui constituent à elles seules une réelle avancée sont en plus complétées par un allègement fiscal de 30% du coût total de l'installation réservé aux particuliers et entreprises de négoce (offert par le gouvernement fédéral)14.
Le Net-‐Energy Metering15 (NEM) comme incitation supplémentaire
Jusqu'en octobre dernier, le système en place ne permettait pas aux utilisateurs de systèmes photovoltaïques de capacité inférieure à 1 MW d'être rémunérés pour leur surproduction redistribuée au réseau. Depuis la directive AB920 approuvée par le Gouverneur Schwarzenegger, il existe désormais une option avantageuse pour ces "clients-‐producteurs", à la condition d'installer un compteur intelligent permettant d'accéder à l'électricité consommée tout autant que celle produite. Les utilisateurs qui produisent plus qu'ils ne consomment ont la possibilité de se voir racheter leur production excédentaire au tarif de leur catégorie. Cette initiative permet donc aux usagers d'être véritablement acteurs de leur consommation puisqu'ils ont la possibilité d'adapter leur utilisation d'électricité en fonction de l'heure de la journée et de la période de l'année afin d'engranger des bénéfices. En effet, un consommateur qui bénéficie du NEM peut produire de l'électricité pendant les heures "de pointe", électricité qui lui sera rachetée plus cher que le prix qu'il paie en consommant en dehors de ces périodes (Figure 6). Le procédé permet conjointement de diminuer la demande énergétique à ces moments de la journée et donc de faire réaliser des économies aux opérateurs énergétiques.
14 Quelle politique incitative pour le solaire en Californie ?, Bulletin Electronique, June 7 2010 15 California incentives/policies, Database of State Incentives for Renewables and Efficiency website
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Figure 6: Production du solaire versus le pic de consommation (source : Green Manufacturer-‐ )
Intégration des énergies renouvelables
D’une production centralisée vers une production répartie sur l’ensemble du territoire.
En 2006, Arnold Schwarzenegger avait lancé l’initiative «Million Solar Roof Plan16” qui consiste à atteindre un niveau d’un million de toits solaires d’ici 2018 en Californie. Si les objectifs sont atteints, les opérateurs électriques verront apparaître sur leur réseau une multitude de sources d’énergies potentiellement connectables. Ces derniers ont également lancé de nombreux projets de fermes solaires, éoliennes ou géothermiques, multipliant les sources d’énergie propre afin de satisfaire les objectifs du RPS. On assiste donc aujourd’hui à une décentralisation des moyens de production qu’il devient de plus en plus difficile à gérer sur le réseau. En effet, connaître la quantité en temps réel d’électricité disponible sur le réseau devient complexe et pose des problèmes pour l’ajustement des moyens de production pour suivre la demande.
Les énergies renouvelables : une source énergétique instable.
Les énergies renouvelables, comme le solaire ou l’éolien, posent par ailleurs des problèmes d’intermittence et de disponibilité des ressources. Le solaire photovoltaïque sans stockage ne fournit pas d’électricité la nuit. De même, un nuage affectera directement la production solaire. Le vent varie en fonction des jours, de l’exposition, et n’est pas de force constante. Intégrer et relier les énergies renouvelables au réseau demande donc des moyens techniques supplémentaires comme les onduleurs. Les courants sur le réseau sont contrôlés étroitement et leurs caractéristiques comme la phase, la tension et le courant, doivent être parfaitement maîtrisées. Il devient donc nécessaire d’ajouter une interface entre l’électricité produite et l’électricité envoyée sur le réseau. Par ailleurs, pour compenser les surproductions ou les sous productions une infrastructure de stockage devient un outil indispensable. Le Texas par exemple est victime de surproduction en temps de grands vents avec pour résultat un surcroît de stress sur le réseau et une perte énergétique importante17.
16 Million Solar Roofs website 17 Strong growth but are rocky times coming for wind ?, Green Tech Media, August 10 2010
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Intégrer les véhicules électriques.
Du véhicule électrique (VE) ou de l'infrastructure, lequel devrait être construit et déployé en premier ? Cette question revient fréquemment lors des discussions sur la pénétration du VE. Cependant la fin du débat pourrait être proche : L'arrivée des V.E est programmée sur le marché d'ici la fin 2010 avec notamment la Nissan Leaf et la Chevrolet Volt18. Les infrastructures devront donc être prêtes pour accompagner l'arrivée de ces premiers VE.
Les véhicules électriques ont reçu de nombreuses aides l'an dernier aux Etats-‐Unis, avec notamment un investissement fédéral de $2.4 milliards19. Cependant un déploiement des véhicules électriques à grande échelle nécessite la mise en place d'une infrastructure, en particulier pour recharger les batteries. Plusieurs questions viennent alors à l'esprit : quelle est la taille optimale de l'infrastructure ? On peut imaginer que les particuliers auront une station de recharge dans leur garage, mais ils auront aussi besoin d'une station sur le lieu de travail. Qui devra payer pour l'installation? Les entreprises seront-‐elles prêtes à financer de tels systèmes? La distance moyenne parcourue par jour aux Etats-‐Unis est d'environ 65 kilomètres (40 miles) par conducteur. Comment recharger sa voiture lorsqu'on part en vacances? Des stations de recharge seront nécessaires sur la route mais il reste à connaître le nombre à installer, leur propriétaire, le modèle économique et financier à appliquer, notamment pour payer l'électricité.
Réduire ou maintenir la consommation électrique
La consommation d’électricité par habitant en Californie est restée stable depuis la moitié des années 70 alors que la moyenne nationale a augmenté d’environ 50% (voir Figure 7).
Figure 7 : Stabilisation de la consommation électrique par tête en Californie (source CEC)
18 L.A. gets wired with new electric-‐car charging stations, LA Times, June 29 2010 19 President Obama Announces $2.4 Billion in Grants to Accelerate the Manufacturing and Deployment of the Next Generation of U.S. Batteries and Electric Vehicles, White House statements & releases, August 5 2010
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En 1976, faisant suite à l’impossibilité de construire de nouvelles centrales nucléaires, le gouvernement tenta de réduire la consommation. Les dirigeants se sont rendus compte que la consommation des réfrigérateurs à elle seule représentait la construction de 5 centrales. Améliorer l’efficacité des réfrigérateurs a permis de répondre aux besoins de nouvelles constructions de centrales. Depuis la Californie n’a cessé d’adopter de nouvelles mesures pour améliorer l’efficacité des appareils électriques et tenter de freiner l’augmentation de la consommation.
Gérer les pics de consommation
Un pic de consommation entre 14h et 18h
Comme présentée sous la courbe ci-‐dessous (Figure 8), la consommation électrique n’est pas uniforme au cours de la journée. La nuit, la consommation électrique est très basse, alors qu’elle progresse rapidement au cours de la journée formant un pic généralement entre 14h et 18h. L’intensité du pic dépend généralement des conditions climatiques et de facteurs extérieurs mais en Californie les plus hauts niveaux atteints se situent pendant l’été, lors des journées très chaudes et lorsque les appareils de climatisation fonctionnent à plein régime. De nombreuses études ont été réalisées pour comprendre ce comportement de consommation et il est intéressant de remarquer sur la courbe suivante que le pic de consommation a lieu en fin de journée lorsque la consommation sur le lieu de travail est haute et la consommation à la maison augmente. Le pic est donc lié à la fois à la consommation résidentielle mais également à celle des bâtiments commerciaux.
Figure 8: Répartition de la consommation électrique au cours de la journée par secteur économique (source : LBNL)
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Un pic de consommation qui coûte cher
Parce qu’il faut construire des centrales d’appoint onéreuses pour compenser la surconsommation, les pics électriques coûtent très chers aux opérateurs électriques qui répercutent le prix sur les utilisateurs. Ceci est accentué par l’augmentation de l’intensité des pics dans le secteur résidentiel comme dans le secteur commercial.
Par ailleurs, comme il est présenté sur la Figure 9, le gaz naturel -‐ énergie non renouvelable -‐ est utilisé pour l’ajustement. En effet les centrales au gaz naturel ont l’avantage de pouvoir varier leur production avec un temps de latence réduit permettant une meilleure flexibilité. Les barrages hydrauliques de grande taille, grâce à leur grande capacité de stockage, sont également utilisés en grande quantité pour combler le déficit de production. Cependant ces barrages ne sont pas considérés en Californie comme une énergie propre, en raison des problèmes environnementaux causés, comme la destruction de la faune et de la flore et la dégradation des paysages.
Figure 9: Mix énergétique quotidien
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La Smart Grid, une réponse technologique à ces défis.
Améliorer et optimiser le réseau électrique
Structure du réseau électrique
Le réseau électrique peut être décomposé en 2parties, montrées sur le schéma ci-‐dessous (Figure 10). Chacune de ces parties correspond à une gamme de voltage différente et induit en conséquence des infrastructures, des fonctions et des technologies différentes. La première partie inclut les tensions élevées voire très élevées, qui sont typiquement supérieures à 110 kV. Elle inclut la production dans le cas des grandes centrales et moyennes centrales, et la transmission. La seconde partie comprend les tensions inférieures à 110kV, qui correspondent à la distribution et aux petites centrales de production.
Figure 10 Schéma du réseau électrique (Source : J. J Messerly, from Wikipedia -‐ Electrical Grid)
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Améliorer le réseau de transmission.
Situation actuelle
Lors du Berkeley Energy Symposium en mars dernier, Philip Moeller, un des cinq représentants à la tête de la Federal Regulatory Energy Commission (FERC), avait rappelé le besoin pour les USA de mettre à jour le réseau des lignes de transmission : "Il est de notoriété publique que nous avons besoin de plus de lignes transmissions... Il n'y a aucun moyen de capter plus d'énergie renouvelable sans transmission ».
Figure 11: Carte des lignes de transmission existantes en Californie (Source CEC)
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Un rapport publié en août de l’année dernière, écrit par les régulateurs californiens et les opérateurs électriques, prévoit un coût de $15.7 milliards dans le déploiement de lignes de transmission pour parvenir aux objectifs ambitieux de la Californie. Ceci prend notamment en compte le transport, jusqu'aux grands centres de populations, de grandes quantités d'énergie provenant de lieux de production éloignés comme des éoliennes dans le Midwest ou des centrales géothermiques dans le Southwest. Une carte proposant de nouvelles infrastructures de transmissions20 ainsi qu'une carte recensant la situation actuelle (Figure 11) sont disponibles. "Dans le futur nous pourrions voir le développement de larges centrales comme des fermes d'éoliennes capables de produire 5 à 10 GW, mais situées loin des centres urbains. Il deviendra alors nécessaire de transporter de larges quantités d'énergie sur des longues distances" affirmait Arshad Mansoor, vice président du Power Delivery and Utilization de l'Electricity Power Research Institute (EPRI).
Comment y parvenir
Pour faire face aux problèmes relatifs à la transmission, la Renewable Energy Transmission Initiative (RETI)21 a été créée. C'est une initiative californienne mise en place pour aider l'identification des projets de transmissions nécessaires pour atteindre les objectifs dictés par la politique énergétique de la Californie. La mission du RETI est de définir toutes les zones favorables aux énergies renouvelables, dites "competitive renewable energy zones (CREZ)", en Californie et dans les états voisins qui pourraient fournir des quantités significatives d'énergie à la population d'ici 2020. Une fois cette étape validée, il s'agit ensuite d'identifier quelles sont les zones avec le meilleur potentiel de développement, à savoir le meilleur rapport qualité/prix, tout en prenant aussi en compte les critères écologiques. L'étude se termine par des plans détaillés des transmissions nécessaires pour le développement.
Pour pouvoir initier et planifier le déploiement du réseau de transmission, les dirigeants auront besoin de se fier à des simulations aussi détaillées que possible. Afin de fournir les meilleures prévisions possibles, le Renewable and Appropriate Energy Laboratory (RAEL)22, affilié à l'Université de Berkeley, a développé son propre logiciel de simulations. Solar, Hydro and Conventional generators and Transmission (Switch)23 peut explorer différents scénarios pour le futur réseau électrique des Etats-‐Unis. Le modèle suggère les décisions d'investissement à prendre en fonction du coût, pour répondre à la future demande en électricité, tout en tenant compte du réseau actuel mais aussi des projections quant au prix des carburants, des développements technologiques, des potentiels d'énergie renouvelable et des politiques proposées.
Promotion de nouvelles lignes grâce à des technologies plus efficaces comme les supraconducteurs
Transporter de grandes quantités d'énergie sur de longues distances pourrait être plus aisé dans les prochaines années si les producteurs d'électricité adoptaient un nouveau système de transmission utilisant du courant continu (DC) plutôt qu'alternatif (AC) et des câbles supraconducteurs selon l'EPRI. 20 Carte des lignes de transmissions potentielles : http://bit.ly/d4wnTP 21 Présentation de l'initiative RETI : http://www.energy.ca.gov/reti/index.html 22 Présentation du laboratoire RAEL: http://rael.berkeley.edu/ 23 Présentation du projet Switch : http://rael.berkeley.edu/switch
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Ce dernier décrit dans un récent rapport un système à base de tels câbles permettant de transporter plusieurs gigawatts d'électricité. Deux autres rapports associés au premier expliquent les problèmes principaux pour l'intégration sur de longues distances, la connexion des câbles supraconducteurs de type DC avec le réseau existant, les transmissions de type AC à de plus faibles tensions et les systèmes de distribution. Comme défini dans le rapport principal, le nouveau système pourrait fournir une capacité de 10 GW avec un courant et une tension nominale de 100 kiloampères et de 100 kilovolts. Le rapport met également en avant le potentiel d'amélioration de la sécurité, la fiabilité et l'efficacité sur le réseau AC existant.
De plus, il indique que les constructeurs de telles transmissions pourraient se reposer sur des technologies déjà disponibles sur le marché et des méthodes de construction similaires à celles utilisées dans la construction des pipelines de gaz naturel. En se fondant sur les tendances notamment dans le domaine des améliorations dans le secteur des câbles supraconducteurs, l'EPRI a affirmé que les transmissions de type DC pourraient être à l'avenir plus efficaces que des lignes haute tension de type AC pour le transport de grandes quantités d'énergie sur de longues distances.
Synchrophaseurs
Une des solutions pour rendre le réseau plus fiable est l'ajout de synchrophaseurs appelés également Phase Measurement Units (PMU)24. Placés à l'intersection des lignes de transmissions et sur une partie du réseau de distribution, les PMU permettent de mesurer la phase du courant 30 fois par seconde, soit une fréquence 120 fois supérieure aux systèmes actuels. A l'aide d'un système GPS, les informations récoltées sont alors comparées entre elles, permettant de tracer une carte en temps réel des phases du réseau électrique. Grâce à ces données, il est possible d'estimer le stress sur le réseau et de synchroniser les lignes de transmissions entre elles. Ce système devrait également permettre d'estimer les risques de panne et d'éviter les coupures de courant à grande échelle, de parvenir à une meilleure optimisation des lignes de transmission, de faciliter l'intégration des sources d'énergie intermittentes et enfin, d'améliorer la sécurité sur le réseau.
Afin d'accélérer et de cadrer le déploiement des synchrophaseurs, la North American Synchrophasor Initiative (NASPI)25 a été mise en place. La NASPI est une collaboration entre l’U.S Department of Energy (DoE), la North American Electric Reliability Corporation (NERC) ainsi que plusieurs distributeurs, centres de recherche et industriels. Grâce à la NASPI plusieurs projets ont pu voir le jour. Le DoE a ainsi attribué une bourse de $53.9 millions pour lancer le Western Interconnection Synchrophasor Program. Neuf autres partenaires ont également investi dans le projet, rassemblant un total de $107,8 millions. Le programme, mené par le Western Electricity Coordinating Council (WECC) qui gère la sécurité et la robustesse du réseau électrique pour 11 états de l'Ouest, devrait permettre d'économiser près de $2
24 Phasor Measurement Unit Wikipedia 25 Site officiel de la NASPI : http://www.naspi.org/
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milliards dans les 40 prochaines années, selon les prévisions. Depuis son lancement 137 PMU ont été installés26.
A l'heure actuelle, grâce aux PMU installés, les distributeurs sont parvenus à améliorer la compréhension et le contrôle en temps réel de l'état du réseau. Cependant, seul le distributeur Southern California Edison a mis en place un véritable système opératoire automatisé.
Les projets de construction de ligne de transmission en Californie.
Plusieurs projets ont déjà démarré. La liste ci-‐dessous, fournie par la Californian Energy Commission (CEC)27, fait état des projets en cours :
-‐ SB 1059 State Corridor Planning
-‐ Imperial Valley Study Group (terminé) -‐ Renewable Energy Transmission Initiative (RETI) -‐ Solar Programmatic Environmental Impact Statement (PEIS) -‐ West-‐Wide Federal Energy Corridor Programmatic Environmental Impact Statement (PEIS) -‐ California ISO Regional Transmission Planning -‐ California Public Utilities Commission -‐ Transmission Information and Projects -‐ U.S. Department of Energy National Interest Electric Transmission Corridors (NIETC) -‐ U.S. Department of Energy Wind Energy Development Programmatic Environmental Impact Statement
Information Center
Améliorer le réseau de distribution
La règle des « trois neufs».
Selon la Galvin Electricity Initiative, le système actuel est construit sur une norme de fiabilité des “trois neufs”, ce qui signifie que dans 99.9% des cas, le réseau fonctionne normalement. Ce qui veut aussi dire que 0.1 % du temps le réseau n’est plus fiable, entraînant des risques d’accidents, une perte de productivité, un effet négatif pour le commerce et une entrave à la sécurité du pays. En particulier dans les sous stations ou la quantité d’énergie est énorme, la sécurité est un facteur prioritaire. Qui plus est certains appareils nécessitent plus d’un an de construction et représentent un coût significatif pour un opérateur.
Pour protéger le réseau et améliorer sa sécurité, les opérateurs électriques l’ont équipé de composants électroniques intelligents, nommés en anglais Intelligent Electronics Devices (IEDs). Ces appareils servent de protections posées sur les relais, de régulateurs de tension, et d'enregistreurs de perturbations. Ils peuvent intervenir de façon automatisée sur le réseau dans le cas d’anomalies de tension, de courant ou de fréquence.
26 Carte des PMU installés dans la Western Interconnection : http://redirectix.bulletins-‐electroniques.com/XCmxH 27 Les différents projets de lignes de transmission : http://www.energy.ca.gov/transmission/index.html
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Surveiller et contrôler le réseau : Supervisory Control And Data Acquisition (SCADA)
Le terme SCADA réfère habituellement à un système centralisé capable de surveiller et de contrôler un ensemble de systèmes complexes étendus sur une large zone. La grande majorité des actions est réalisée automatiquement par des terminaux de contrôle à distance (RTU) ou par des contrôleurs logiques programmables (PLC). Dans le cas du réseau électrique le système sera capable de mesurer les caractéristiques du réseau comme la tension, la fréquence ou encore le courant, et d’agir automatiquement en cas de faille sur le réseau (voir Figure 12).
Figure 12 Schéma d'un SCADA (Source Wikipedia : SCADA)
Automatiser le réseau de distribution
Afin d’augmenter l’efficacité sur le réseau de distribution et de minimiser les pertes, les opérateurs électriques se tournent vers une plus grande automatisation du réseau. Ceci inclut par exemple des composants intelligents permettant une augmentation de la fiabilité du réseau et l’amélioration des capacités de restauration du réseau en cas de panne. Ceci comprend également des logiciels capables d’automatiser les facteurs de correction d’énergie et la réduction de la conservation de tension. Pour parvenir à une optimisation maximale, les composants sont connectés entre eux (Figure 13), les opérateurs ayant alors une vue d’ensemble instantanée du réseau.
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Le sujet n’est pas nouveau, l’EPRI travaille déjà depuis quelques années sur le projet Intelligrid28. Mais ce n’est que depuis peu que de nombreux opérateurs se sont lancés dans de tels programmes. On peut citer le cas du SMUD29, de PG&E30 ou encore de SCE31
Figure 13: Exemple de réseau de communication entre les sous stations (Source : Cisco)
Un réseau de communication apposé au réseau énergétique
Une segmentation du réseau de communication calqué sur l’infrastructure électrique.
Les fondations des réseaux intelligents reposent sur l’apposition d’une infrastructure de communication sur l’ensemble du réseau énergétique. Le format du réseau de communication est encore à définir, et de nombreuses solutions technologiques parfois divergentes sont présentées. Cependant une architecture générale semble se dessiner. Cette architecture reprend les fonctionnalités principales du réseau que sont la production, la transmission, la distribution et la consommation.
Comme présenté sur les schémas ci-‐dessous, le réseau peut être divisé en 4 sous-‐réseaux (Figure 14), correspondant chacun à une infrastructure du réseau électrique (Figure 15) :
28 Architecture for the Intelligent Electricity, Energy and Utility Services Grid of the Future, EPRI 29 Distribution Automation and Efficiency Document, Sacramento Municipal Utility District 30 PG&E Smart Meter Program, PG&E Website 31 Lower Costs and Customer Focus Regenerates Distribution Automation, Electric Light & Power
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1. Local Area Nework (LAN) : Restreint à des zones confinées, le LAN est utilisé typiquement pour transmettre des données aux points sensibles du réseau comme le cœur des opérateurs électriques ou des centrales.
2. Wide Area Network (WAN): De par sa grande couverture, le WAN est utilisé pour transférer les données du réseau électrique sur de longues distances pour être ensuite stockées sur des serveurs centraux (cloud computing) ou encore pour communiquer le long des lignes de transmission
3. Field Area Network (FAN/AMI) : Disposant d’une portée généralement plus faible que le WAN est utilisé en majorité pour les communications sur le réseau de distribution. C’est pourquoi il est souvent assimilé au réseau AMI.
4. Home Area Network (HAN) : Il supporte les communications au niveau des bâtiments commerciaux et des lieux de résidence.
Figure 14: les réseaux de communication et leurs applications (GTM Research)
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Figure 15: Architecture du réseau de communication apposé sur le réseau électrique (GTM Research)
L’infrastructure AMI /FAN
L’advanced metering Infrastructure (AMI) réfère à un système capable de collecter, de mesurer et d’analyser les usages d’énergie en permettant l’envoi de données sur un réseau de communication bidirectionnel connectant les compteurs intelligents et les systèmes de contrôle des opérateurs. L’AMI fournit aux opérateurs des capacités de gestion sans précédent, ouvrant la voie à un échange d’information avec l’utilisateur final et des choix en temps réel relatifs à leur consommation.
Les deux composants principaux sur l’AMI sont le compteur intelligent lui-‐même, qui remplace les anciens compteurs mécaniques incapables de communiquer, et le réseau de communication nécessaire pour transporter les données que le compteur génère. L’AMI peut donc être représenté par l’association de deux structures, la première incluant la couche d’application, et la seconde représentant la couche de transport.
La couche d’application est responsable de la collecte des données, de leur analyse et des fonctions de contrôle dans le but d’améliorer l’efficacité du réseau. La couche application a également pour but de
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traiter les données pour que l’information, provenant de millions de points finaux, soit transformée en données utilisables par les opérateurs pour gérer le réseau, interagir automatiquement et assurer une meilleure efficacité, optimisation, fiabilité et sécurité.
La couche transport est quant à elle vouée aux échanges d’informations entre les opérateurs et les consommateurs finaux. Ceci est réalisé grâce l’ajout d’une infrastructure de réseaux interconnectés. Ce réseau de communication a attiré l’attention des opérateurs parce que, d’une part, les technologies impliquées dans la construction des compteurs intelligents sont assez simples, et parce que d’autre part, il rend possible de nouvelles applications en connectant les opérateurs aux consommateurs finaux.
Une infrastructure AMI permet de nombreuses nouvelles applications comme la lecture des compteurs à distance, la capacité de connecter et de déconnecter à distance, de détecter et de gérer des coupures de courant, la détection de vol, la lecture de la consommation sur de petits intervalles, le suivi et la gestion d’une production dispersée.
Selon les phases planifiées par PG&E, le déploiement du réseau AMI, devrait suivre les étapes suivantes :
1. Test initial du système 2. Processus de déploiement et de prévision des compteurs intelligents 3. Support des compteurs intelligents pour le paiement de la consommation 4. Application de nouveaux tarifs. 5. Ajout de nouvelles fonctionnalités (ex : information sur les coupures de courant) 6. Proposer des applications mobiles ou sur Internet dédiées au consommateur. 7. Applications avancées.
Aujourd’hui, les opérateurs les plus avancés en Californie, comme PG&E32, en sont à la seconde phase. Leur déploiement des compteurs intelligents est presque terminé et la technologie de communication est déjà en grande partie déterminée. Cependant beaucoup d’autres opérateurs ne sont pas aussi avancés et leur choix des technologies n’est pas encore défini.
Les compteurs intelligents, piliers du déploiement du réseau intelligent
Les compteurs intelligents sont des appareils capables de mesurer la consommation d’électricité presque en temps réel. La question de la fréquence de mesure a été longuement discutée et il semble que la majeure partie des opérateurs prévoit dans le meilleur des cas une mesure toutes les 15 minutes33. Mais ce qui rend ces compteurs «intelligents» est la possibilité d’établir des communications avec les opérateurs à travers le FAN et le WAN, la nouvelle génération de compteur, étant capable de communiquer de façon bidirectionnelle. L’introduction des compteurs intelligents et leur déploiement sont régulés, pour les opérateurs privés, par le CPUC.
32 PG& Smart Meter Report http://www.pge.com/SmartMeterCPUCreports 33 Smart Meters Raise Privacy Concerns, Smart Money November 9 2010
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Un compteur intelligent agit donc comme un portail pour permettre aux opérateurs de communiquer directement avec le client et leur HAN. Lorsque le réseau intelligent aura atteint un développement avancé, les clients auront accès à un système élaboré de gestion de leur énergie dans le but d’intégrer de nouvelles infrastructures de stockage, une production locale, des voitures électriques… Pour les opérateurs électriques, implémenter convenablement les compteurs intelligents est crucial car ces derniers sont la clé pour une participation active des consommateurs et un changement des habitudes de consommation.
Aux États-‐Unis, et en particulier en Californie, de nombreuses compagnies se sont lancées dans la production des compteurs intelligents. Les 5 plus grands fabricants présents sur le marché nord américain sont Itron, Landis+Gyr, Elster, Sensus et General Electric (voir Figure 16).
Le déploiement des compteurs intelligents chez les 3 plus grands opérateurs est déjà bien avancé en Californie, et PG&E apparait comme le meneur. En novembre 2009, PG&E a remporté le titre de « la meilleure initiative de déploiement AMI en Amérique du Nord ». PG&E, SCE et SDG&E prévoient, conformément aux objectifs fixés par le CPUC de terminer le déroulement de leurs compteurs intelligents au cours de l’année 201234 et de couvrir ainsi la totalité de leurs clients. En juillet dernier SCE avait annoncé la mise en place du millionième compteur soit un cinquième de son déploiement total.
Figure 16 : Compteurs intelligents utilisés par PG&E (PG&E)
Points d’entrées, autres que les compteurs intelligents :
Les compteurs intelligents sont encore peu déployés à l'échelle des USA (seulement environ 10% de la population en sont équipés aujourd'hui, la moitié le sera d'ici 5 ans). Pour ceux qui n'y auraient pas encore accès une compagnie dénommée Energy Inc, basée en Caroline du Sud a développé un appareil capable de remplacer les compteurs. Vendu $200, The Energy Detective (TED)35, se branche directement sur le réseau électrique de la maison. L'appareil est devenu populaire depuis que Google a annoncé qu'il serait le premier à pouvoir être acheté aux USA et être fonctionnel avec le PowerMeter. Cependant ce
34 California Expects to Have 17 Million Smart Meters In Place By 2012, Tech Pulse 360, February 2010 35 Présentation du TED: http://www.theenergydetective.com/
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type d’appareil ne permet pas d’être relié aux opérateurs électriques et par conséquent ne fournissent pas de suivi de la tarification.
L’infrastructure de communication sur l’AMI/FAN
Comme décrit ci-‐dessus, le réseau AMI, également appelé FAN, établit la connexion entre le compteur intelligent et le WAN qui est connecté lui-‐même aux opérateurs. Il permet en particulier l’échange de donnés bidirectionnel entre les opérateurs et les consommateurs. Plusieurs solutions technologiques existent plus ou moins efficaces et fiables dépendant de la localisation et du milieu environnant (urbain, rural, en montagne). Parmi elles (voir Figure 17), on peut citer en particulier la transmission par câbles, sans fil, par Mesh RF ou encore par ondes radios. Aucune des solutions n’est optimale pour chaque application et les opérateurs se positionneront probablement sur un mix de plusieurs technologies. C’est pourquoi les opérateurs semblent se diriger vers un mix de leurs solutions, et la création d’une technologie standard tarde à émerger.
Figure 17: Technologies de communication disponibles pour le WAN/FAN (GTM Research)
En effet, un standard permettrait de simplifier et d’accélérer le déploiement du réseau intelligent, mais pour qu’une technologie prenne le dessus sur les autres, il faudrait qu’elle remplisse les critères de chacun. Or, si la sécurité, la fiabilité et la flexibilité sont des critères cruciaux pour les opérateurs, la bande passante devient un des enjeux principaux. En effet, les opérateurs doivent d’ores et déjà prévoir la capacité de leur réseau pour les 20 prochaines années. Et la taille de ce réseau dépend de la taille de l’opérateur, du nombre de clients et des services qu’il souhaite proposer.
LA SMART GRID EN CALIFORNIE 31
Technologies et infrastructure de communication sur le réseau AMI/FAN
Rf Mesh Network
Le RF Mesh Network est le mode de communication le plus utilisé á l’heure actuelle en Californie. Dans ce modèle, chaque nœud du réseau formé par les compteurs intelligents, ainsi que des collecteurs, sont un chemin potentiel pour transporter l’information. Cependant l’information est encryptée et aucun des nœuds parcourus n’est capable de lire l’information contenue. La multiplicité des chemins potentiels offre d’une part la possibilité de partager l’information et d’augmenter ainsi la sécurité, et d’autre part, de trouver rapidement une alternative lorsqu’un lien casse. Un autre avantage est la possibilité de contourner les obstacles en fonction de la topologie du terrain en passant par différents nœuds, ce qui évite les problèmes liés à la ligne de vue.
Cependant cette configuration est caractérisée par une latence élevée en comparaison aux autres solutions comme le Wi-‐max ou la fibre optique, et pourrait être mal adaptée en cas de quantité de données trop importantes relatives aux futures applications estampillées Smart Grid. Le choix de la technologie prend d’autant plus d’importance lorsqu’on sait que PG&E et SCE ont prévu de dépenser respectivement $2.2 et $1.6 milliards pour la mise en place de leur réseau AMI, et qu’une reconstruction du réseau ne pourra être facilement acceptée par le CPUC et les consommateurs dans les 5 ou 10 prochaines années.
Parmi les compagnies proposant de tels réseaux en Californie, Trilliant et SilverSpring Network font figure de meneurs. Trilliant utilise le 2.4 GHz et est basé sur le protocole 802.15.4 propre également au Zigbee, mais basée sur une architecture réseau IP modifiée. Trillant est capable de fournir une large bande passante avec un débit supérieur à 256 kilobits pour le résidentiel et plus de 54 mégabits sur le WAN. SilverSpring compte parmi ses clients PG&E. Le réseau repose sur des communications utilisant la fréquence 900 MHz.
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WIFI
Si le WIFI apparait comme trop coûteux et trop gourmand en alimentation pour un réseau rural ou pour relier des compteurs isolés, il gagne cependant en efficacité et en rentabilité en milieu urbain plus dense. Cependant il est également reproché au WIFI, les risques d’interférence dans un milieu urbain où de nombreuses habitations sont elles mêmes équipées de WIFI.
Tropos, une start-‐up basée en Californie, propose une solution reposant sur la technologie WIFI. Elle a signé des partenariats avec les principaux constructeurs de compteurs intelligents comme Itron, Elster et Echelon. L’opérateur californien Burbank Water and Power36et Glendale Water and Power font partie de ses clients.
36 Reading electric meters wirelessly – GreenTechMedia, October 24 2007
Cisco un nouvel entrant de poids dans le RF Mesh Network
Le 2 septembre dernier, Cisco a annoncé l’achat d’Arch Rock, une compagnie spécialisée dans la technologie RF Mesh Network, pour le contrôle et la surveillance des centres de données et la gestion des réseaux. La veille Cisco avait créé une alliance avec Itron, pour l’intégration de ses logiciels dans les compteurs intelligents de ce dernier.
Avec ces derniers pas, Cisco est parvenu à la fondation d’une plateforme de communication compétitive pour le réseau AMI et avance doucement mais surement vers l’effacement énergétique et le HAN. C’est cette même stratégie qui été suivie depuis quelques années par SilverSpring.
Cisco a de l’argent, du temps et de l’expérience. SilverSpring a quant à lui signé des contrats et se préparerait à entrer en bourse. Quel sera le vainqueur ? Il est encore difficile de le prédire, mais les clients sont peu nombreux, 3100 opérateurs électriques aux États Unis, et laissent peu de place pour de nombreux compétiteurs.
Si SilverSpring est capable de fournir des résultats concrets de par ses contrats déjà remplis, l’acquisition d’Arch Rock relance Cisco dans la course. Pour citer Rick Thompson président et co-‐fondateur de Greentech Media : « Bien qu’arrivé plus tard sur le marché que SilverSpring, Trilliant et les autres, Arch Rock est à mes yeux la start-‐up la plus intéressante dans le secteur du réseau AMI. Cette acquisition met à la disposition de Cisco la technologie dont il avait besoin pour, en partenariat avec Itron passer du message marketing à la réalité du marché ».
A noter que Trilliant, aussi positionner sur ce marché en Californie avait récolté $106 millions en juillet dernier et a déjà scellé des accords avec SDG&E.
Source: Cisco takes aim at Silver Spring with Arch Rock purchase Seeking Alpha – 2/10/2010
LA SMART GRID EN CALIFORNIE 33
Le Courant Porteur Ligne
Cette technologie permet de placer un signal de faible intensité sur le flux d'électricité transmis dans les câbles. Cependant ces signaux ne peuvent passer l'information à travers les nœuds du réseau, impliquant l'ajout de connexions supplémentaires autour des nœuds. En France, le problème est peu gênant : le taux de concentration en France (nombre moyen de compteurs derrière un poste de transformation MT/BT) est de 49. Aux Etats-‐Unis, ce ratio diminue fortement, avoisinant en Californie un taux de concentration de 7. Dans cette optique, le CPL semble peu adapté pour le réseau de distribution.
L’architecture Tropos Gridcom choisie par Glendale Water and Power(GWP)
En avril dernier, GWP l’opérateur de la ville Glendale située au nord de Los Angeles, a annoncé qu’il avait retenu la solution Tropos Gridcom pour communiquer entre les compteurs. Le projet total est estimé à $51 millions et $20 millions supplémentaires seront financés par le U.S. Department of Energy. Ces fonds proviennent des $3.4 milliards alloués dans le cadre de l’American Recovery and Reinvestment Act. Selon Craig Kuennen, GWP Project Sponsor, avait alors expliqué que cette solution avait été choisie car il fournissait une très faible latence ainsi que très bonnes caractéristiques de sécurité.
Source : Gridcom tropos Press release – 14/04/2010
Exemple de PG&E
PG&E utilise aujourd’hui 3 différentes technologies dans le déploiement de son réseau AMI dans le cadre du programme SmartMeter™ :
• Un réseau RF Mesh fourni par SilverSpring Networks pour le réseau électrique
• Un réseau basé sur des Radio Fréquences fourni par Aclara RF pour le réseau électrique et gaz
• Un réseau basé sur la technologie CPL, également fourni par Aclara sur son réseau électrique.
PG&E continuera d’opérer l’ensemble de ces réseaux jusqu’au remplacement de tous les points finaux utilisant le CPL. L’opérateur prévoit de lire les compteurs et d’envoyer l’information sur le réseau une fois par heure.
Source : PG&E Smart Meter Program
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Le WAN
Comme mentionné plus haut, le WAN peut être utilisé pour transmettre des informations le long des lignes de transmission ou vers des centres de données et de traitement. La limite entre le WAN et le FAN peut être parfois confuse et certaines des technologies ci-‐dessous comme le Wi-‐max peuvent être utilisée également sur le réseau de distribution. Mais ce qui importe pour ce type de communication est que les distances à couvrir de façon générale sont plus grandes et la quantité de données qui transite est plus élevée, typiquement supérieure à plusieurs 50 Mégabits. Les opérateurs ont également besoin de temps de latence très courts. En cas de pannes sur le réseau, pour des problèmes de sécurité et économiques, une réaction rapide est exigée. Il est à noter que le WAN est considéré comme un réseau public, en opposition aux réseaux AMI, qui devront appartenir dans la grande majorité des cas, aux opérateurs électriques.
Le choix de la technologie dépendra donc des contraintes physiques mais également des ententes réalisées entre les acteurs. En effet, on peut assister depuis quelques temps à une montée des tensions entre les opérateurs comme AT&T, Verizon et les producteurs d'électricité. D'un côté les producteurs veulent créer leur propre réseau sans-‐fil entre les compteurs intelligents et les différents nœuds sur le réseau de distribution et de transmission. L'intérêt est qu'ils sont propriétaires du réseau et donc indépendants même si le coût est élevé à l'installation (modèle CAPEX). D'un autre côté, les opérateurs téléphoniques disposent déjà de réseaux de communication 3G et 4G avec des fréquences disponibles sur lesquelles les producteurs pourraient faire passer leurs données en échange de paiements. Même si dans ce cas ils n'ont plus le problème d'un coût élevé au départ pour l'achat des infrastructures, ils devront payer chaque mois (modèle OPEX) pour chaque compteur (environs 15cents/ mois). Dans les prochains mois nous devrions assister à une prise de position de la part de chacun des acteurs. Ceci devrait influencer fortement le choix de la technologie choisie. A noter par ailleurs, que d’ici quelques années, la FCC pourrait allouer des fréquences pour la communication relative au réseau électrique, les fréquences 2.5 GHz et 5 GHz étant les plus probables.
Technologies et infrastructures de communication disponibles pour le WAN
Wi-‐max
Le Wi-‐MAX, grâce à sa capacité de couverture, devient donc un acteur potentiel pour la communication sur les réseaux. Il a aussi l'avantage d'être plus fiable et plus sécurisé que les technologies non licenciées, comme le WIFI. Il bénéficie d'une largeur de bande et d'un temps de latence appropriés qui permet aux producteurs d'électricité d'utiliser leur réseau pour un grand nombre d'applications menant à l'intégration des sources alternatives d'énergie et les technologies de stockage. Il est supporté par des compagnies comme GE, Intel Sprint Nextel, Clearwire, Motorola, Samsung et Google, parmi tant d'autres. Mais pour le moment il commence tout juste à décoller aux Etats-‐Unis. Le WiMAX souffre encore aujourd'hui de son prix élevé [5], même s'il peut potentiellement devenir très bon marché dans les années à venir grâce notamment à une technologie reposant sur des standards ouverts. Ses détracteurs reprochent également au WiMAX de ne pas encore avoir ses preuves en milieu urbain. La
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difficulté d’y transmettre par radiofréquences faute aux grands édifices pourrait en effet remettre en question la possibilité d’un déploiement simple et à bas coût.
D'autre part, le WiMAX peut être étendu sur le réseau AMI. Les compteurs intelligents basés sur le WiMAX sont déjà disponibles aux USA. GE en association avec Intel et GridNet a construit les premiers compteurs de cette sorte.
Le 4G/LTE.
Le Long Term Evolution (LTE) pourrait devenir une option de valeur. Bénéficiant d'un déploiement important, il est devenu une solution bon marché. Le LTE est une technologie sans-‐fil soutenue par un grand nombre d'opérateurs de télécommunication, prévue pour supporter le développement du réseau de quatrième génération (4G). Sa plus grande capacité de couverture et sa capacité à supporter un plus grand nombre de nœuds devraient jouer un rôle clé. Pour citer Patrick Plas, directeur du département sans fil d'Alcatel Lucent : la compagnie "ne mettra plus énormément d'efforts dans cette technologie (en parlant du Wi-‐MAX)", ajoutant que le lancement du LTE par les compagnies comme Verizon a montré "une claire direction prise par l'industrie dans le LTE"37. De même, en octobre dernier, Cisco avait annoncé l'acquisition de Starent Networks pour 2,9 milliards de dollars38, un achat permettant de renforcer leurs offres basées sur le LTE.
Le Broadband over Powerline (BPL)
Le BPL est une technologie, comme le CPL, capable de transmettre de l’information à travers des réseaux existants. Le prix de son installation est élevé comparée au Wi-‐Max ou au Cellulaire. Cependant il pourrait être une solution adaptée, dans un environnement rural, là où le réseau télécom n’est pas
37 WIMAX lost against LTE says Alcatel Lucent – February 2010 38 Cisco Announces Agreement to Acquire Starent Networks – CISCO Press releases October 2009
Sprint et GridNet, les deux grosses pointures du WiMAX s’associent.
GridNet, le leader du Wi-‐max pour le déploiement du réseau intelligent, a signé en septembre dernier une entente avec l’opérateur télécom Sprint . GridNet fournit une plateforme pour communiquer entre les réseaux et les routeurs basée sur le standard WiMAX. Avec cet accord, la compagnie entend désormais utiliser les réseaux 4G de Sprint pour faire transiter les données.
Sprint est de son côté, le premier et le seul opérateur télécom aux USA à avoir choisi le Wi-‐max pour son réseau 4G. AT&T et Verizon ont en effet tous les deux choisi la technologie Long Term Evolution. Sprint est sous contrat avec plus d’une centaine d’opérateurs énergétiques et voient dans cette collaboration un marché de niche dans le déploiement des réseaux intelligents.
Source: Grid Net and Sprint Enable First 4G Smart Grid and Smart Home Solutions for Utilities, GridNet 13/09/10
Ref: http://www.greentechmedia.com/articles/read/grid-net-partners-with-sprint-for-utility-market/
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encore développé et la mise en place d’un réseau sans fil offre une efficacité réduite. La Figure 18 propose une comparaison entre BPL et 4G.
Figure 18: comparaison entre le BPL et le 4G/WiMAX (Source : Spectrum IEEE)
La fibre optique
La fibre optique est utilisée majoritairement par les opérateurs pour transmettre des informations entre les sous-‐stations. La fibre optique permet d’atteindre des hauts débits, mais l’investissement est important pour la mise en place du réseau. A l’heure actuelle, seul l’opérateur EPB dans le Tennessee a choisi cette solution en collaboration avec la compagnie Tantalus, suite à un financement du DoE pour le projet39.
Le HAN
L’objectif du HAN est d’avoir accès aux informations liées à la consommation, de les échanger sur le réseau, d’effectuer des contrôles automatisés et de permettre une gestion de la consommation énergétique au sein d’un bâtiment ou plus particulièrement au sein d’une maison. Le Han devrait être un réseau intranet séparé du réseau internet actuel. Pour parvenir à une telle infrastructure, plusieurs composants sont nécessaires :
Le portail du réseau, connectant les informations extérieures au réseau au HAN. Les différents points d’accès ou les nœuds du réseau L’opérateur système du réseau et les logiciels de gestion
39 Does Fiber Have a Role in the Smart Grid? A Tennessee Utility Thinks So , GigaOM, September 2009
LA SMART GRID EN CALIFORNIE 37
Les points finaux comme les thermostats, les appareils électroménagers, la climatisation…
Le portail du réseau
Le réseau interne doit être connecté à l’environnement extérieur c'est-‐à-‐dire au réseau AMI/FAN. Ceci est réalisé par le compteur intelligent qui envoie les données de consommation aux opérateurs.
Les points d’accès ou nœuds du réseau.
A terme, le particulier devrait être capable de connaître la consommation individuelle de chaque appareil électrique de sa maison, de sa climatisation, de ses lumières (voir Figure 19).Pour réaliser un tel challenge, plusieurs solutions apparaissent, comme l’utilisation de prises électriques intelligentes capables de communiquer avec les appareils électriques et de recueillir l’information. D’autres compagnies comme Cisco envisagent l’implémentation de puces dans les appareils qui transmettent ensuite l’information directement à une centrale de gestion. Le géant avait notamment signé l’an dernier un partenariat avec Whirlpool pour connecter les appareils intelligents au réseau de la maison40.
L’opérateur système.
La majorité des opérateurs aux états Unis semblent avoir opté pour un système sans fil pour connecter les compteurs intelligents aux HAN. Les technologies avec courant porteur sont plus populaires en Europe, particulièrement à cause des maisons dotées de murs en pierre, qui peuvent limiter la propagation des ondes dans la maison. Parfois même, l’installation des deux technologies est choisie. Le débat n’est donc pas tant de savoir si l‘on doit choisir une communication avec ou sans fil, mais semble se porter sur la bande passante adéquate. Faut-‐il une large bande passante ou une bande passante plus étroite mais moins consommatrice d’énergie ?
40 Whirlpool Set to Launch Smart Grid Compatible Appliances by 2015 – GreenBiz May 2009
38 LA SMART GRID EN CALIFORNIE
Figure 19 : HAN composé de la technologie Zigbee et CPL (Source : Renesas)
WIFI
Le sans fil le plus utilisé à l’heure actuel au niveau des habitations est le WIFI. Il utilise la fréquence 2.4 GHz. Gainspan, une compagnie californienne basée à San José, est le leader du marché HAN soutenant la norme WIFI. Atheros le géant des puces WIFI tente également d’être de la partie. Cependant, si l’on considère les récentes annonces, il semble que la norme perde du terrain sur ses concurrents.
Zigbee
Cette norme semble dominer actuellement le marché. Basée sur le standard IEEE 802.15.4, ce sans fil de courte portée est doté de logiciels adaptés aux réseaux de type Mesh et dispose d’une large gamme
Un combo CPL/wifi chez soi : telle est la vision d’Athéros.
Athéros travaille actuellement sur des projets pour intégrer le WiFi avec des systèmes CPL pour faire son entrée sur le marché du réseau intelligent. Lorsque la compagnie avait acheté Intellon en septembre 2009, le président Craig Barratt avait indiqué que la combinaison Wifi/CPL associé à l’Ethernet pouvait servir comme la « colonne vertébrale » du HAN. Cependant, le challenge est difficile à relever étant donné la multitude de standards et de technologies tentant de pénétrer le marché du réseau intelligent. Atheros en est encore à ses débuts et teste actuellement la dernière puce de Intellon qui utilise le standard HomePlug et les standards IEEE 1901.
Source: Atheros pushing WiFi/powerline combo for smart grid, Fierce Broadband wireless-‐05/06/10
LA SMART GRID EN CALIFORNIE 39
d’applications. Le contrôle et la gestion résidentielle sont parmi les plus populaires. L’alliance Zigbee maintient et prône le standard Zigbee. Il certifie également l’interopérabilité des produits avec les autres standards. Il existe une trentaine de produits certifiés impliqués dans la création d’appareils résidentiels intelligents, du chauffage, de l’éclairage, de l’utilisation de l’énergie et de la sécurité. Zigbee est aujourd’hui le lien principal entre les compteurs et les thermostats. Zigbee sponsorise également le programme Smart Energy qui offre aux opérateurs électriques et fournisseurs d’énergie, un réseau sans fil, sécurisé, et facile d’utilisation pour la gestion des HANs.
Les avantages avancés en faveur de cette norme sont qu’elle utilise une technologie relativement simple et peu coûteuse comparée à d’autres technologies comme le WPAN ou le Bluetooth. Elle est adaptée pour des communications RF qui requièrent typiquement des taux de transmission de données faibles, consommant peu, et nécessitant un fort degré de sécurité. Les fréquences utilisées aux USA sont le 915 MHz et e 2.4 GHz. Parce que le Zigbee peut être caractérisé par une faible latence, il peut être activé en moins de 15 ms, la norme est réputée comme très réactive en comparaison avec le Bluetooth doté d’un temps de latence d’environ 3 s. Cependant Zigbee a une portée très courte(< 10 m) et peut souffrir d’interférences avec le WIFI. Pour le HAN, l’infrastructure peut se révéler plus couteuse que ce que la technologie prévoit en théorie car toutes les pièces doivent avoir alors au moins une radio. Le canal de communication doit être également bien choisit afin d'éviter au maximum les interférences. Il peut donc être difficile à déployer à grande échelle. Enfin l'interopérabilité n'a pas encore démontrée car Zigbee n'as pas encore été déployée au même niveau que WIFI.
Z-‐wave
Z-‐wave est un concurrent direct de la norme Zigbee. Il utilise la fréquence 908.42 Mhz aux USA, ce qui le protège des interférences avec les nombreux produits utilisant la bande 2.4 GHz (WIFI, Bluetooth, Zigbee). Pour des courtes fréquences, la portée est généralement meilleure que celle obtenue grâce à la bande 2.4 GHz. La technologie est encore plus simple que la norme Zigbee, cependant la bande passante est également plus faible. La compagnie vend ses produits à travers des points de ventes comme Radio Shack, Lowe’s et Fry’s. Le standard est soutenu par la Z-‐Wave Alliance, qui est un consortium de compagnies travaillant sur des produits basés sur la norme Z-‐wave.
40 LA SMART GRID EN CALIFORNIE
Insteon
Insteon est un produit capable de communiquer à la fois par radiofréquences ou par CPL. Si la technologie est considérée par certains comme peu coûteuse, son manque d’interopérabilité, notamment avec le triphasé, et son manque de fiabilité la rendent peu compétitive avec les autres normes.
Courant Porteur Ligne
L’un des avantages du CPL, dans une maison ou un immeuble, est que le signal s’affranchit très facilement des obstacles tels un mur en pierres ou une plaque de métal. Le CPL offre donc une meilleure pénétration mais également une meilleure autonomie. Comme pour le Zigbee ou le Z-‐Wave, la norme CPL HomePlug a été créée, ainsi que l’ HomePlug® Powerline Alliance qui lui est associée. Le produit HomePlug Green PHY (HomePlug GP) 41a été spécialement conçu pour les applications Smart Grid et la connectivité entre le HAN et la gestion d’appareils comme la climatisation, le thermostat… La technologie repose sur le standard ITU G.hn L’alliance a signé plusieurs partenariats avec, entre autres, PG&E, SDG&E et SCE.
41 HomePlug Goes Live With New Spec, New Smart Grid Projects – GigaOM, June 15 2010
La course aux produits entre Zigbee et Z-‐Wave.
L’alliance Zigbee a certifié son 100ème produit en septembre dernier, agrandissant encore un peu plus son portfolio de produits. Selon un récent rapport publié par ON World, ZigBee a été adopté par plus de 350 fabricants et peut revendiquer un revenu total supérieur à un trillion de dollars. Aujourd’hui zigBee regroupe plus de 400 membres à travers un large spectre d’industries.
Alors que Zigbee, annonçait son 100ème produit certifié, Z-‐Wave annonçait le même mois la certification de son 400ème produit : le Mi Casa Verde Vera Gateway conçu par MiOS. Parmi les principaux membres supportant la norme Z-‐Wave sont présents Cooper WiringDevices, Danfoss, Fakro, Ingersoll-‐Rand, Intermatic, Leviton, UniversalElectronics, Wayne-‐Dalton et Zensys.
LA SMART GRID EN CALIFORNIE 41
Ajouter une infrastructure de stockage.
Des solutions technologiques encore à l’état de recherche.
Plus qu'une ambition politique ou économique, le déploiement des systèmes de stockage d'énergie et plus généralement du réseau électrique intelligent est un enjeu capital pour la Californie, l'un des plus grands consommateurs en électricité des Etats-‐Unis. Pour reprendre les mots de l'Attorney General, Jerry Brown, "Le stockage d'énergie est le futur. C'est une industrie parmi le secteur des technologies
Watteco une start-‐up françaises a l’assaut du marché américain
Watteco est une jeune compagnie française qui s’est lancée sur le marché des réseaux intelligents et plus particulièrement sur le marché de la gestion énergétique. La compagnie a développé une puce, Watt Pulse Communication, basée sur la technologie Courant Porteur Ligne (CPL). Grâce à plusieurs brevets déposés, Watteco est aujourd’hui le seul sur le marché à proposer une puce basse consommation basée sur le CPL (environ 100 fois plus faible que la consommation CPL traditionnelle). Une faible consommation est déterminante pour limiter la taille de l’alimentation de la puce. Ainsi Watteco est parvenu à produire un modem complet dont la taille est de l’ordre d’un morceau de sucre, bien inférieure à la taille standard de l’ordre d’une grosse boîte d’allumette.
Selon Paul Bertrand, fondateur de la compagnie, Watteco se positionne sur le marché résidentiel et les petits commerces. Grâce à cette puce intégrable dans une prise de courant ou directement dans les appareils électriques, il est possible de relier ces derniers à une centrale dédiée à la gestion de la consommation énergétique. La consommation de chaque appareil pourrait alors être suivie et si besoin est il serait possible d’éteindre ou d’allumer ces appareils à distance. Par ailleurs, la puce repose sur le protocole IPV6 (chaque puce possédant une adresse IP) et est compatible avec des standards basés sur ce protocole comme la norme 6LowPan.
Récemment la compagnie a lancé un nouvel outil de visualisation de la consommation le baroWatt, qui semblable à un thermomètre numérique permet de suivre la consommation électrique de la maison. Cet outil est compatible avec le logiciel de gestion PowerMeter proposé par Google. Watteco propose également son propre logiciel de gestion EnPowerMe qui apporte cette fois du détail sur les principales sources de consommation électriques.
Actuellement Watteco est implanté dans le sud de la France et dans la Silicon Valley, à Santa Clara. Sa présence en Californie est justifiée par sa volonté de se faire connaître auprès des géants comme Google, Cisco, SilverSpring Network etc…, et de s’ouvrir au marché américain. La société est membre de plusieurs alliances dont l’HomePlug PowerLine Alliance et l’IPSO Alliance. Elle participe également au projet Premio, un projet de démonstration des réseaux intelligents lancés par EDF et inscrit dans les travaux de l’EPRI. Enfin, Watteco est membre de l’initiative Smart Grid Ecosystem lancée par Cisco pour promouvoir les communications utilisant des standards ouverts.
Source : Entretien avec Paul Bertrand, fondateur de Watteco.
42 LA SMART GRID EN CALIFORNIE
propres en croissance rapide qui réduira les dépenses de l'état ainsi que la pollution. Ce qui est encore mieux, c'est que cette technologie pourrait créer 8500 nouveaux emplois en Californie durant la prochaine décennie". Les projets récents annoncés représentent approximativement 1 Gigawatt de nouvelle capacité, ce qui doublerait les capacités de stockage énergétique actuelles.
En novembre dernier, Obama avait annoncé un financement à hauteur de $620 millions de dollars42 par le stimulus package, dont $435 millions seront attribués à des projets de démonstration du réseau intelligent. Le reste des financements est alloué à 16 projets de capacités de stockage expérimentales pour parvenir à terme à une meilleure efficacité et une meilleure fiabilité du réseau. Parmi ces projets, sont présents des systèmes basés sur des batteries de type Li-‐ion, des volants d'inertie (fly-‐wheel), des systèmes à air comprimé. Ces aménagements permettront l'intégration des ressources renouvelables énergétiques sur le réseau ainsi qu'une meilleure gestion des pics d'énergie. A noter que parmi ces projets, 5 seront localisés en Californie(Figure 20).
42 Smart grid demo projects win $ 620 million seed money – Ecoseed, November 25 2009
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Figure 20 : Liste des projets de stockage électrique en Californie
44 LA SMART GRID EN CALIFORNIE
La demande pour le stockage de l'énergie est conduite par plusieurs tendances, incluant la prolifération des sources d'énergies intermittentes comme le vent ou le solaire, la migration vers un réseau intelligent et l'arrivée des véhicules électriques, pour n'en nommer que trois. Alors qu'auparavant stocker de l'énergie était pratiquement impossible économiquement, un grand nombre de technologies émergeant sur le marché tendent à changer cette situation.
Pour contrebalancer l'intermittence du vent et compenser les fluctuations d'énergie, les producteurs d'électricité misent sur des systèmes de stockage. Dans cette optique, Pacific Gas & Electricity (PG&E) a remporté l'un des 16 projets et obtenu $25 millions de dollars pour initier les travaux sur d'éventuels moyens de stocker l'énergie provenant du vent durant la nuit. PG&E a prévu de développer le stockage d'énergie à base d'une technologie à air comprimé. L'idée est de stocker de l'air et de le comprimer dans des caves souterraines lorsque le vent permet de produire beaucoup d'énergie, et d'utiliser cet air comprimé pour faire tourner des turbines et produire de l'électricité lorsque le vent est tombé. Si le test de cette technologie s'avère concluant, 300 MW pourraient être produits pour un investissement initial de $365 millions. Le projet doit cependant être approuvé par le CPUC, ce qui permettra de lever les fonds restants nécessaires.
.Dans un même sens, Beacon Power Corporation a installé un système de stockage utilisant des volants à inertie connectés à une ferme éolienne à Tehachapi en Californie. Le système fait partie du projet de démonstration des volants à inertie porté par la Californian Energy Commission. Tehachapi est une zone à fort potentiel. Selon un rapport du California ISO, jusqu'à 4200 MW de vent pourraient être ajoutés dans les années à venir. La fonction principale de ces volants d'inertie est de maintenir le courant sur le réseau. Cependant, pendant les périodes de grandes fluctuations de la consommation ou de la production sur les lignes de transmission, ils pourront être utilisés pour palier au manque ou à l'excès d'électricité sur le réseau.
Un récapitulatif des technologies de stockage a été mis en ligne par Le CPUC43. 7 technologies ont été répertoriées. L’étendue des applications du stockage étant vaste, il n’existe pas encore à l’heure actuelle une technologie permettant de répondre efficacement à l’ensemble des requis technologiques. Ainsi parfois, un cycle de charge et de décharge court sera préféré alors que, dans d’autres cas, l’élément déterminant sera l’espérance de vie de la capacité de stockage.
Les bénéfices du stockage pour les réseaux intelligents.
Si le coût de l’implémentation de capacités de stockage sur le réseau est encore très élevé, les applications résultantes sont nombreuses et variées. Dans l’optique de rendre le réseau plus efficace et plus « intelligent », le stockage ouvre des perspectives très intéressantes voire indispensables :
Améliorer la qualité des flux électriques. Les consommateurs, au niveau industriel ou commercial, ont besoin de caractéristiques de tension et de fréquence très précises et stables. Grâce aux stockages, il est possible d’améliorer la qualité de ces caractéristiques en supprimant, par exemple, les sauts de tensions.
43 CPUC Storage White Paper – California Public Utility Commission
LA SMART GRID EN CALIFORNIE 45
Réduire les besoins de production pendant le pic de consommation. En permettant aux consommateurs ou aux opérateurs de conserver de l’énergie pendant les heures creuses, les capacités de stockages fournissent une bonne alternative à la construction de nouvelles centrales indispensables pendant les heures de pic de consommation. La suppression du pic de consommation deviendra de plus en plus rentable en Californie, alors que la demande augmentera et que les émissions de carbone deviendront plus chères.
Une meilleure efficacité des énergies renouvelables. Alors que le Californie mène une politique agressive en faveur des énergies renouvelables, l’intégration de ces sources d’énergies sur le réseau n’est pas simple. L’éolien, par exemple, qui tend à être plus efficace pendant la nuit, ne permet pas de faire correspondre le pic de consommation avec le pic de demande. Des capacités de stockage permettent d’éviter la surproduction et le stress sur le réseau pendant les heures creuses, tout en fournissant une ressource supplémentaire durant les heures de pic de demande.
Réduire le besoin de mise à jour du réseau de distribution et du réseau de transmission. Le stockage peut être utilisé pour maximiser les ressources de transmission et de distribution déjà existantes. En décalant la demande d’électricité hors des périodes de pic, il permet d’éviter l’augmentation de capacité indispensable pour l’augmentation des flux sur le réseau. Il permet également de répondre aux problèmes de congestion.
Augmenter et améliorer la disponibilité des services auxiliaires. Les services auxiliaires sont des services nécessaires pour supporter la transmission de l’énergie du lieu de production aux consommateurs, tout en maintenant la fiabilité du système de transmission. Il y a deux services auxiliaires primaires en Californie : la régulation de la fréquence, qui assure que le réseau opère dans une gamme de fréquence convenable et les réserves opérationnelles, qui garantit que plus d’énergie peut être ajoutée dans un faible intervalle de temps pour contrebalancer des augmentations ou des réductions de demande inattendues.
Réduire les gaz à effet de serre. En réduisant l’intensité des pics de demande, le stockage se substitue à l’ajout de centrales supplémentaires qui sont en Californie essentiellement des centrales au gaz pour l’ajustement du pic. Il a été montré qu’une capacité de stockage équivaut pour la même capacité à seulement la moitié des émissions de carbone produites par une turbine au gaz.
Les instances de régulation en faveur du stockage énergétique en Californie Supportée par la Californian Energy Storage Alliance une proposition de loi44, dont l'objectif est de promouvoir la Californie au statut de leader dans le stockage d'énergie, a été introduite à l'assemblée. En favorisant l'utilisation des énergies renouvelables et en réduisant le coût des nouvelles centrales et des lignes de transmission, la nouvelle législation devrait aider les consommateurs à économiser significativement sur leurs factures en énergie. Elle devrait également permettre la création de milliers d'emplois permanents et ainsi dynamiser un état où le taux de chômage a atteint un niveau très élevé.
44 Vital New Legislation Creates Green Jobs and Puts California in Forefront of Future Smart Electric Grid – Storage Alliance -‐ February 2010
46 LA SMART GRID EN CALIFORNIE
Enfin sur le plan international, l'objectif est de réduire le fossé entre les Etats-‐Unis et les autres nations dans le déploiement et l'investissement des systèmes de stockage d'énergie.
Concrètement, cette loi prévoit l'obligation d'incorporation d'une capacité de stockage d'énergie au moins équivalente à 2,25% du pic de consommation pendant la journée d'ici 2014 et 5% du pic en 2020, pour tous les producteurs d'électricité présents dans l'état. En reprenant les chiffres donnés par le Californian Iso, le pic de consommation moyen est d'environ 29 GW, ce qui représenterait donc une capacité de stockage de 652 MW en 2014 et de 1.5 GW en 2020.
Développer les infrastructures VE
Une mise à jour du réseau nécessaire pour supporter une surconsommation.
Pour assurer un déploiement significatif des voitures électriques, l’infrastructure du réseau devra répondre aux besoins supplémentaires en énergie. Fournissant l'électricité, les opérateurs auront un rôle important à jouer dans le déploiement des véhicules électriques. Cependant ce rôle aux Etats-‐Unis devrait dépendre en grande partie de chaque état et de chaque opérateur. En Californie, les "investor-‐owned utilities (IOU)", c'est à dire les opérateurs privés, représentent environ 75% de la production totale d'électricité de l'état. La réglementation leur impose de suivre un modèle découplé ("decoupling"). Ceci signifie qu'elles ne gagneront pas plus d'argent en vendant davantage d'électricité destinée aux VE. Cependant, construire plus d'infrastructures et les posséder leur permettraient d'augmenter leur contrôle sur le réseau et d'obtenir de plus amples financements de la part des institutions californiennes. Ainsi les distributeurs pourraient vouloir par la suite les louer à d'autres compagnies ou aux particuliers.
De plus, la consommation d'un VE représente deux fois celle d'une maison ordinaire. Pour les opérateurs, cette demande supplémentaire d'électricité peut affecter le réseau pendant les périodes de
53 MW de capacité de stockage sous forme de glace.
Ice-‐energy une start-‐up basée dans le Colorado mais très présente en Californie a signé un gros contrat en mai dernier pour la mise en place d’un projet de 53 MW de capacité de stockage. La technologie utilisée permettrait de réduire le la consommation de carburant des opérateurs énergétiques de 30% et la consommation des bâtiments individuels jusqu’à 90%.
11 municipalités participent au projet et 6000 unités seront installées parmi 1500 bâtiments. Chaque unité convertie 450 gallons (1700 litres) d’eau en glace pendant la nuit lorsque la demande est la plus basse. En milieu de journée, l’appareil coupe la climatisation et dégèle la glace pour refroidir le bâtiment pendant environ 6 heures, suffisamment pour couvrir la période de pic de consommation. La coordination du projet est effectuée par le Southern California Public Power Authority.
Source: 53 Megawatt Ice Energy Storage Project Begins In Glendale, California, Cleantechnica
LA SMART GRID EN CALIFORNIE 47
pics de consommation. Garder un contrôle sur la distribution devient alors essentiel car, pour optimiser le réseau, les opérateurs doivent réduire au maximum les pics, par conséquent réduire la concentration des points de recharges par quartier. Le taux de concentration en Californie des compteurs derrière un poste de transformation MT/BT est de 7. Ceci laisse peut de marge pour supporter une consommation électrique supplémentaire. En effet si la consommation d’une voiture électrique est équivalente à celle d’une maison, l’ajout de 3 voitures électriques sur le même transformateur reviendrait à un taux de concentration de 10. Or la majorité des transformateurs actuels en Californie ne peut supporter un tel taux. De plus, avec une recharge importante des VE, pendant la nuit, les transformateurs restent sollicités et ne peuvent plus accomplir leur cycle naturel de refroidissement habituel. Cette élévation de la température peut également endommager les installations. Les instances de régulation ne prévoient pas pour le moment de limiter la possession de voitures électriques par famille ou par quartier. Cependant les opérateurs envisagent désaccords avec les vendeurs pour connaître le plus rapidement possible l’achat de nouvelles voitures électriques et les informations relatives au client pour adapter le réseau.
Les consommateurs verront également de leur côté des effets sensibles sur leur facture d'électricité. Ils devront changer leur attitude de consommation, notamment grâce à l'accès à de nouveaux programmes de gestion de leur consommation pendant les heures creuses, soit en dehors des pics. Certains opérateurs comme Pacific Gas and Electric (PG&E) ont déjà planifié d'appliquer le modèle "Time of Use" pour les propriétaires de voitures électriques. Pour appliquer une telle tarification, les opérateurs auront besoin d’avoir installé les compteurs intelligents pour mesurer la consommation par tranche horaire. Certains opérateurs, et le CPUC parlent même de l’implémentation d’un second compteur intelligent dans les maisons entièrement dédié aux véhicules électriques. Ceci permettrait notamment de mettre en place une tarification séparée du reste de la maison.
Deux modèles en compétition pour la recharge des batteries
Comme dans les stations essence actuelles, le temps passé devra être le plus court possible. Un véhicule nécessitant entre 6 à 12 heures de recharge pour seulement une à deux heures de conduite ne pourra jamais toucher un large public. Les voitures représentent en effet le moyen de transport associé à la liberté de déplacement, elles doivent permettre une grande mobilité. Pour séduire les conducteurs, les véhicules électriques devront donc pouvoir se recharger dans des conditions similaires à celles des stations essence actuelles.
Deux solutions existent pour réduire ce temps de recharge. La première est le "chargement rapide". Plusieurs constructeurs automobiles misent sur cette technologie. Combiné à une infrastructure de points de recharge, ce type de solution technologique répondrait aux problèmes d'autonomie. Cependant ceci pourrait conduire à des pics élevés de demande en électricité. Typiquement, une voiture électrique équipée d'une batterie d'une capacité de 25kWh, a besoin d'un accès à une puissance de 3,125W pendant 8 heures. Si cette même batterie doit être rechargée en seulement 10 minutes, ceci nécessite une puissance de sortie de 155 kW. Il est clair que pour de telles recharges rapides, même si
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elles ne sont utilisées que par une faible quantité de véhicules, l'ajout de capacités et la gestion de l'énergie deviendront obligatoires.
La seconde est de troquer une batterie vide contre une autre fraîchement rechargée. BetterPlace, société en tête de ce marché, a fait la démonstration d'une station capable d'effectuer l'échange en 60 secondes. Cependant, ce système de batteries échangeables n'apparaît pas aux yeux de tous les constructeurs automobiles comme une solution économique et efficace. En effet, ces derniers ne veulent pas être contraints à adopter un standard unique pour leur batterie. Ceci réduirait leur marge de manœuvre dans la conception des moteurs. La conséquence directe pour une compagnie comme BetterPlace est alors la gestion des stocks importants de batteries de multiples modèles.
Le choix du modèle économique est important pour les opérateurs et pour les régulateurs, car il influera directement sur le mode de recharge et sur les infrastructures à mettre en place sur le réseau.
Better Place et General Electric, ensembles sur le marché du véhicule électrique.
Better Place et General Electric seront partenaires sur le marché des véhicules électriques. Telle a été la décision officialisée en septembre dernier. Cette déclaration fait suite au lancement de la station de recharge WattStation cet été. Il avait alors mentionné la volonté de s’associer avec un fournisseur de batteries.
En début d’année Better Place avait reçu un nouveau financement de $350 millions par HSBC group, soit l'un de ses plus gros investissements dans les "clean tech ». En avril dernier la compagnie avait fait la démonstration d'une station capable d'effectuer l'échange en 60 secondes. Avec ces nouveaux succès, Better Place avait confirmé la bonne tenue de route de son programme de lancement en Israël et au Danemark, prévu pour la fin de 2011, lorsque les premières Renault à batterie échangeable sortiront sur le marché. La compagnie a également des projets de déploiement en Australie et sur les marchés d'Amérique du Nord, lorsque les lancements au Danemark et en Israël seront finalisés.
Les objectifs de Better Place et de Renault sont ambitieux. Amener 100.000 voitures électriques associées au réseau de recharge des batteries dans les rues d'Israël et du Danemark d'ici 2016. Renault a prévu d'installer le logiciel AutOS dans la voiture Fluence ZE. Le logiciel permettra de savoir quand et où il sera possible de recharger sa voiture, la recharge de la batterie étant un point clé du déploiement du véhicule électrique. Ce partenariat s'inscrit dans la volonté de Renault de se tourner entièrement vers les véhicules électriques. Le constructeur avait décidé un peu plus tôt de stopper son développement dans la voiture hybride.
Source: GE and Better Place to Partner on EV charging -‐ NY Times – 09/24/10
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Vers de nouveaux modèles économiques
Une tarification en temps réel ou du moins variable en fonction du temps.
Avec le déploiement d'un réseau intelligent, les opérateurs s'intéressent désormais à de nouveaux modèles de tarification devenus possibles grâce aux nouvelles infrastructures, parmi eux : le “Time of Use" et le "Net Metering"(Le Net-‐Energy Metering (NEM) comme incitation supplémentaire). Le "Time of use" est un modèle définissant les prix à l'avance en fonction des périodes de l'année et basé sur des estimations antérieures de demande en électricité. Typiquement le consommateur peut récupérer les tarifs sur Internet, permettant alors d'adapter sa consommation. La grille tarifaire est remise à jour une à deux fois par an.
Afin d'appliquer de telles politiques de paiement, les opérateurs requièrent l'installation de compteurs intelligents leur permettant de relever les flux d'électricité entrant et sortant sur le réseau pour chaque consommateur. En Californie la totalité du déploiement des compteurs intelligents devrait être terminée d'ici la fin 2012. D'autre part les opérateurs et les régulateurs travaillent actuellement à la mise en place d'une variante du "Time of Use", à savoir le "Critical Peak Pricing (CPP)". Dans ce modèle, le "Time of Use" est utilisé comme référence, excepté pour certaines périodes de pics de demande où le prix peut alors être fixé en fonction de la production et de la consommation réelle.
Durant l'été 2008, PG&E avait déployé sur le territoire américain le premier programme à grande échelle basé sur le CPP. Le projet pilote avait été conduit sur une période de plus de 6 mois définissant la période de pic entre 14h et 19h pendant les jours de la semaine avec des réductions de coûts significatives appliquées pendant les heures "creuses". Les résidents avaient reçu par e-‐mail ou sous d'autres formes de communication les évolutions du programme. Les résultats obtenus ont montré que le consommateur moyen réduisait sa consommation au moment du pic de 16.6%. Un second programme a été mis en place depuis mai dernier par PG&E, le "Peak Day Pricing"45, proposant un service comparable au CPP à plus de 2000 compagnies ou commerces d'une puissance de plus de 200 kW. Pour les opérateurs, c'est une opportunité de réduire la demande sur le réseau et de s'orienter vers de l’effacement énergétique, un modèle économique incitant les clients à réduire leur consommation pendant les pics de demande en électricité. C'est également une opportunité d'ouvrir un nouveau segment du marché du réseau intelligent, grâce à l'accès aux données de la consommation au cours de la journée. C’est le cas d’Ecofactor proposent des logiciels de gestion automatique permettant selon eux de réduire très sensiblement les factures électriques.
Christian Keller, du département “Policy and Integrated Planning" de PG&E, nous explique que, malgré une volonté réelle d'appliquer le "Time of Use" et le "CPP", les opérateurs privés hésitent encore à se lancer dans une nouvelle tarification complexe qui risquerait de mécontenter les clients. L'an dernier, suite à l'installation de compteurs intelligent à Bakersfield, de nombreux usagers s'étaient plaints d'une hausse de leur facture d'électricité. Ce mécontentement avait grandi à un tel point que désormais les
45 Peak Day PRicing PG&E Website
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médias parlent du "Bakersfield Effect"46 pour décrire l'incompréhension des consommateurs envers les compteurs intelligents.
D'autre part, la mise en place d'une tarification en temps réel, même seulement pour de courtes périodes, requiert une infrastructure supplémentaire. Si le coût de l'infrastructure devrait être rapidement compensé par une réduction significative du pic de demande, la mise en place des logiciels de gestion énergétique est encore mal définie. En effet, des géants comme Google et Microsoft proposent déjà des solutions logicielles comme le Power Meter ou Ohms, cependant elles reposent sur des technologies avec licence. Toujours selon Keller, "PG&E ne veut adopter que des technologies à standards ouverts pour rester flexible et laisser plus de choix à ses clients à l'avenir dans les domaines du "Home Area Networking". Le standard considéré est "OpenADE" qui fait partie de l'initiative "Open Smart Grid" (OpenSG)"47.
46 PG&E to Bakersfield: Weather, Not Smart Meters, Cause of Higher Power Bills – GreenTechMedia October 2009 47 Open Smart Grid Subcommittee Website
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Effacement énergétique (D.R)
Le modèle
L’effacement énergétique (ou demand response aux USA),est un modèle selon lequel il est possible d'alléger la demande en électricité lors des pics de consommation en planifiant différemment les tâches réalisées par les appareils électriques au cours de la journée. Du point de vue des producteurs d'électricité, l'intérêt est d'éviter une surproduction très coûteuse lors des pics de consommation liée à l'utilisation de centrales d'appoint d'un rendement généralement plus faible, et de limiter les risques de
Emeter et le programme PowerCents DC offrent des résultats positifs en faveur d’une tarification dynamique
Emeter a levé 12.5 millions de dollars en juillet dernier grâce aux fonds d’investissements Sequoia Capital et Foundation Capital, joint par le nouvel investisseur Northgate capital. Ceci afin d’étendre ses ventes et ses efforts sur le marché clé du service client et pour le développement de nouveaux produits. Comme preuve de ses ambitions internationales, la compagnie a signés plusieurs contrats avec Electralink basée au Royaume-‐Uni, l’ Independent Electricity System Operator au Canada, EnBW Ostwurttemberg Donau Ries en Allemagne ainsi que Umetriq et Vattenfall.
La compagnie fournit des logiciels capables de traiter les données collectées par les opérateurs électriques pour ensuite les utiliser dans la gestion de l’énergie, l’effacement énergétique ou encore le service client. La compagnie fournit également ce que Kyle Arteaga, responsable de la communication chez Emeter, appelle « Construire des ponts entre les silos ». En Californie, les opérateurs souffrent d’un manque de communication entre les différents services financier, service clients, département technique ce qui peut porter confusion chez les consommateurs finaux.
Emeter a reçu récemment beaucoup d’attention grâce à sa participation dans le programme PowerCents DC. Lors du projet, en collaboration avec Pepco, un petit échantillon de personnes ont été équipées de compteurs intelligents, de thermostats intelligents. Différentes tarifications leur ont été ensuite proposées, le but étant de mesurer l’impacte de ces technologies sur le consommateur. Le système était ainsi capable de rendre compte de la consommation toutes les heures et de gérer automatiquement la climatisation en fonction des pics de consommation. Le logiciel Energy Engage d’Emeter a aussi été déployé, donnant accès aux consommateurs à une information régulièrement mise à jour sur leur consommation, le coût associé et l’empreinte équivalente carbone.
Les résultats ont été présentés à la Maison Blanche. Les participants ont réduit leur facture électrique de 8% pendant la période d’essai. Les personnes utilisant une tarification dynamique ont toutes réduit leur consommation et celles utilisant le Critical Peak Pricing ont atteint une réduction totale entre 22 et 34%.
52 LA SMART GRID EN CALIFORNIE
coupure de courant représentant un coût de plus de $150 milliards chaque année aux Etats-‐Unis48, et d'autre part pour les consommateurs, de réduire leur facture d'électricité, soit en la réduisant en consommant plus pendant les heures creuses, soit en recevant des paiements incitatifs pour réduire leur demande à un moment précis.
Pour comprendre l'enjeu de l’effacement énergétique, il suffit de regarder les chiffres avancés par le rapport. Si les contrats actuels entre les acteurs de l’effacement énergétique sont préservés pendant la prochaine décennie, la FERC estime qu’il permettrait de réduire de 38 GW le pic de la consommation en 2019 soit entre 2 et 3% du pic de consommation. Si les programmes existants étaient étendus géographiquement dans des régions où actuellement les initiatives dans ce domaine sont peu nombreuses, et si la participation à ces programmes égalait celle des meilleures pratiques actuelles, l'impact pourrait atteindre 82 GW, soit 9% du pic de consommation aux Etats-‐Unis.
Création de la coalition Demand Response and Smart Grid (DRSG)
Une des conclusions du rapport est donc qu'il existe un large fossé entre l'usage actuel de l’effacement énergétique et son potentiel. Pour parvenir à réduire ce fossé, le National Action Plan recommande la formation de coalitions pour favoriser l'intégration de ce modèle dans la politique énergétique des états. Une coalition, la Demand Response and Smart Grid [3] coalition (DRSG), associant de nombreux acteurs du domaine a été créée. Elle regroupe déjà 53 acteurs très influents comme Oracle, Trilliant Networks, EnerNOc, Comverge, Johnson Controls, Lockheed Martin, Boeing, EnergyConnect, preuve de sa véritable montée en puissance. Cette association a pour but de fournir des produits et des services dans les domaines de la gestion d'énergie et dans les technologies du réseau intelligent. L'alliance a aussi pour objectif de conseiller et d'expliquer les clés de développement de ces technologies à l'ensemble des acteurs allant des entrepreneurs, aux producteurs d'électricité, en passant par les médias et les décideurs politiques au niveau fédéral comme au niveau de l'état.
Parmi les membres de la coalition, les "agrégateurs" comme EnerNOC [5] ou Comverge [6] se livrent une concurrence féroce. Les "agrégateurs" sont des compagnies qui proposent des solutions d’effacement énergétique et qui se situent entre les producteurs d'électricité et les consommateurs. D'un côté ils garantissent aux premiers une capacité virtuelle d'allégement lors des pics de consommation ou en période d'urgence comme une coupure de courant. De l'autre, ils proposent des services de gestion de l'énergie à un ensemble de compagnies, leur permettant ainsi une réduction des factures électriques. Ils peuvent également les inciter à réduire leur consommation sur une courte période en échange de paiements pour diminuer la demande sur le réseau.
48 President Obama Announces $3.4 Billion Investment to Spur Transition to Smart Energy Grid, DOE Press Release October 27 2009
LA SMART GRID EN CALIFORNIE 53
Les agrégateurs dominant le marché en Californie
Parmi le top 5 des compagnies présentes dans l’effacement énergétique publiée en Juillet cette année par le magazine Greentechgrid49, étaient présentes, EnerNOC, Comverge, Cpower, Honeywell et Schneider Electric :
EnerNOC a signé un accord avec le producteur californien, PG&E50. Selon cet accord, PG&E proposera à ses clients commerciaux et industriels la solution SiteSmart d'EnerNOC. Le logiciel, en plus de suivre la consommation en tant réel, fournit des recommandations pour économiser l'énergie en fonction du mois ou de l'année, ou encore de l'activité du client. EnerNOC dispose à l'heure actuelle de plus de 3.5 Gigawatts de "capacité virtuelle".
Comverge, un autre agrégateur qui a déjà 3 GW sous contrôle, travaille sur une nouvelle plateforme, nommée Apollo. Contrairement à EnerNOC, la compagnie s'intéresse de près au marché de l’effacement énergétique chez les particuliers. Cette plateforme devrait être capable de gérer environ 150.000 maisons, soit environ une capacité de 150 MW. L'idée est de contrôler les climatisations, les chauffe-‐eaux ainsi que les pompes à eaux dans les piscines pour réduire la consommation en urgence. Comverge a signé des accords avec l’opérateur Southern California Edison51.
Cpower se positionne en 3ème place, et représente un solide concurrent avec à son actif 2.8 GW en période de pic en avril dernier. Tout comme les 2 précédents, CPower regarde également d’autres services, comme le crédit d’énergies renouvelables et d’efficacité énergétique. Cpower possède également des accords avec Southern California Edison52.
Honeywell, en début d’année, avait acheté Akuacom, une compagnie utilisant le standard OpenADR dans sa solution d’efficacité énergétique. Honeywell a également signé un contrat avec l’opérateur Southern California Edison pour automatiser le programme de Critical Peak Pricing. Ce type de tarification est largement soutenu en Californie, autant dans le commercial que dans le résidentiel, ce qui devrait être un avantage décisif pour la compagnie.
A noter également la présence de la compagnie Energyconnect qui a lancé cette année sa plateforme GridConnect, dont la maison est mère est située dans la Silicon Valley.
Feed in Tariff
Un des facteurs clés qui pourrait inciter au développement du solaire réside en la mise en place d'une législation avantageuse dont l'exemple nous a été montré par l'Allemagne, première à mettre en place de telles directives. Ces tarifs préférentiels doivent remplir les trois conditions suivantes :
49 The Top Five Players in Demand Response – Green Tech Media, July 19 2010 50 EnerNOC Awarded 40 MW PG&E Contract, EnerNOC Press Release, March 2007 51 Comverge Southern California Edison Contract Approved – GreenStock Central, August 2009 52 CPower Wins Contract with Major Maryland Utilities, CPower Press Release, April 2009
54 LA SMART GRID EN CALIFORNIE
• Un accès garanti au réseau de distribution • Une garantie de contrat à long terme • Un prix d'achat permettant à tout projet compétitif de générer des liquidités.
Cette tarification intéressante permettrait à tout un chacun de posséder sa propre source d'énergie renouvelable et de la revendre au réseau. A l'heure actuelle, quatre politiques d'incitation tarifaire ont été mises en place en Amérique du Nord, ces quatre régions voient les projets d'énergies renouvelables fleurir, confirmant toute la plus-‐value du procédé...
La Californie développe actuellement deux programmes de Feed in tariff53. Le premier proposé est un Feed in Tariff basé sur un marché de 1GW qui requiert que les opérateurs privés entreprennent des sollicitations de projets d’énergies renouvelables entre 1 et 10 MW. C’est différent du Feed in Tariff traditionnel, car au lieu de garantir un prix, on garantit un marché et on laisse les développeurs du projet établir leur propre prix. Le second repose sur la Senate Bill 32 (SB 32), passée l’an dernier.
Le Feed in tariff devrait, dans la phase initiale, être essentiellement utilisé pour du résidentiel. Chris Villarreal, en charge de la régulation sur le réseau intelligent au CPUC, prévoit une mise en application d’ici début 2011, le principal frein étant au départ des problèmes juridiques vis-‐à-‐vis de la régulation fédérale54. Dans les mois prochains, les opérateurs devront lancer l’installation des infrastructures permettant de mettre en place une tarification dynamique sur le réseau.
Microgrid
Les microgrids, un modèle d'optimisation pour le réseau électrique
John Kelly, président de la Galvin Electricity Initiative [2] avait introduit lors de la Conférence Gridweek 2009 les microgrids comme une solution pour maximiser les bénéfices des consommateurs et des compagnies. Les Microgrids représentent un nouveau modèle de pensée vis-‐à-‐vis du service de l'électricité. Ils offrent l'opportunité pour les opérateurs électriques de travailler avec les communautés lors de la conception et la planification de leur système de production, pour un bénéfice commun maximisé. De par leur nature localisée, ils supportent l'innovation et créent des opportunités, engendrant de nouveaux partenariats ainsi qu'une participation plus active de la part des consommateurs. Les microgrids bénéficient en effet d'atouts significatifs sur le réseau traditionnel. La proximité de la production permet d'optimiser la distribution du courant et de réduire les pertes d'énergies liées au transport de l'électricité. Proches du consommateur, il leur est possible d'obtenir une meilleure efficacité grâce à une production directement ajustée au besoin de l'unité. L'efficacité peut être également améliorée grâce à la possibilité de mixer électricité et chaleur évitant la perte d'une grande quantité d'énergie sous forme de chaleur dans les réseaux traditionnels.
Les microgrids, une alternative aux opérateurs électriques ?
53 http://www.grist.org/article/2010-‐outlook-‐for-‐solar-‐in-‐california/ 54 http://www.greentechmedia.com/articles/read/ferc-‐defines-‐states-‐feed-‐in-‐tariff-‐authority
LA SMART GRID EN CALIFORNIE 55
La plupart des microgrids en projet ne seront pas capables de produire et de stocker suffisamment d'énergie pour pouvoir se passer d'un raccordement au réseau électrique. En fait les microgrids devront maintenir un lien constant et complexe avec les opérateurs, alternant achat et vente de l'électricité, connexion et déconnexion avec le réseau, permettant d'ajuster la quantité d'électricité et de réduire le stress sur le réseau. Les opérateurs pourraient également les utiliser dans des programmes d'effacement énergétique comme capacité virtuelle qu'il serait possible de mobiliser pendant les heures de pic de consommation.
Ils fournissent également aux opérateurs des zones de démonstrations reproduisant à petite échelle un grand nombre des problèmes liés au déploiement du "Smart Grid" et à l'intégration sur le réseau des énergies renouvelables. Les opérateurs ont, grâce à ces minis réseaux, l'opportunité de se rapprocher des universités ou des grandes compagnies afin d'étudier la façon la plus efficace pour eux de gérer une distribution dispersée. De plus, la relative simplicité pour les microgrids d'intégrer les énergies renouvelables et les capacités de stockage les rend très attractifs aux yeux des opérateurs. Les infrastructures nécessaires aux réseaux intelligents sont très lourdes à mettre en place et peuvent prendre plusieurs années. Les microgrids deviennent une alternative plus simple à mettre en œuvre et pourraient donc jouer un rôle moteur dans le déploiement des réseaux intelligents.
La question toutefois est de savoir quelles seront exactement les relations entre les opérateurs et les microgrids. Qui possédera les infrastructures de stockage, les moyens de production, le raccordement au réseau et qui devra payer? D'autant plus que dans certains cas les microgrids seront utilisés pour obtenir une plus grande indépendance vis-‐à-‐vis des opérateurs. C'est le cas du comté de Marin (au nord de la baie de San Francisco), qui a créé le Marin Clean Energy [4] sous l'étiquette d'opérateur public, pour acheter et vendre de l'électricité ainsi que fournir de l'énergie aux résidents à la place de l'opérateur local, PG&E.
De nombreux projets planifiés
Le projet le plus avancé en termes de microgrid est programmé par l’opérateur SDG&E à Borrego Spring au sud de la Californie. Eloigné du réseau central et bénéficiant de ressources solaires importantes, Borrego Springs est un emplacement idéal pour un projet de démonstration. Le Department of Energy a financé le programme à hauteur de $7.5 millions de dollars et la California Energy Commission à hauteur de $3 millions. Le projet pilote consiste en l’implémentation de détecteurs, d’équipement de communication et de contrôle pour fournir un système propre, efficace énergétiquement et économique. Le début de la construction est prévu pour la fin de cette année, et le projet devrait être effectif d’ici 3 ans.
Plusieurs universités ont déjà annoncé des projets de microgrids. Parmi elles, il est bon de citer l'Université de Howard (Washington, DC). Elle a signé cette année un contrat avec la compagnie Pareto Energy55 pour construire un système de production d'énergie électrique et thermique pour le chauffage
55 http://www.washingtonpost.com/wp-‐dyn/content/article/2010/07/02/AR2010070204905.html
56 LA SMART GRID EN CALIFORNIE
et le refroidissement du campus. Pareto prévoit d'investir entre 15 et 20 millions de dollars pour l'amélioration de la centrale de l'université, un projet qui devrait s'étendre sur 2 ans.
Dans le cadre du projet RESCO pour "Renewable Energy Secure Communities", l'Université de San Diego s'est consacrée au déploiement d'un microgrid [6]. Reconnu comme l'un des plus avancés au monde, ce microgrid s'étend sur 1200 acres, fournit en électricité 450 bâtiments et couvre une population de 45000 personnes. Le projet a été fondé par la California Energy Commission (CEC) dans le but de tester l'intégration de la production locale d'énergie, une partie provenant d'énergie renouvelable sur le campus. Ainsi le campus est équipé de deux turbines à gaz d'une puissance de 13.5 MW chacune, d'une turbine à vapeur d'une puissance de 3 MW et d'une capacité photovoltaïque de 1.2 MW, représentant 82% de la puissance annuelle consommée sur le campus. Le projet a reçu 2 millions de dollars dont une bourse de $1 million du CEC et un accord a été signé avec deux startups proposant des solutions destinées au microgrid: EDSA et Viridity Energy.
Un dernier projet qu'il est important de mentionner est celui lancé par l'U.S Army prévoyant de construire une installation solaire "microgrid" à l'US Army Garrison Fort Hunter Liggett en Californie, près de Monterey [9]. La capacité prévue est de 1 MW et le coût est estimé entre $5 et $10 millions. Un mégawatt de capacité solaire représente typiquement les besoins annuels en électricité de 200 maisons même si la production peut être réduite près des côtes en raison du brouillard. Le microgrid garantira une sécurité énergétique au Fort, fournissant de l'électricité pendant les périodes de coupures de courant et réduira ses coûts en redistribuant de l'électricité sur le réseau principal pendant les heures de forte consommation. Avec ses propres moyens de stockage et ses propres infrastructures de distribution le réseau devient plus fiable, plus sûr et limite la dépendance énergétique du site, un atout essentiel dans le cadre d'une installation militaire56.
Certaines barrières restent à surmonter pour un déploiement vaste et rapide
Cependant plusieurs défis doivent être relevés pour une adoption à grande échelle des microgrids, les plus importants étant d'ordre technique et technologique. La resynchronisation avec le réseau conventionnel est difficile à faire. Pour que l'électricité produite puisse être distribuée sur le réseau, les caractéristiques de tension, de fréquence et de puissance doivent être contrôlées. De même l'infrastructure du microgrid doit être compatible avec les standards existants pour que l'équilibre sur le réseau soit maintenu. Dépendant de la production d'énergie locale, le stockage est une composante essentielle des microgrids. Cependant les solutions existantes restent encore très chères et l'ajout de tels systèmes augmente les coûts de maintenance.
Par ailleurs, la réglementation en place dans de nombreux états reste peu favorable aux microgrids. On peut faire référence au "net metering" utilisé en Californie ne permettant pas aux producteurs de revendre leur électricité. Des changements législatifs sont nécessaires pour inciter les investissements dans des systèmes locaux de distribution. Des changements pourraient voir le jour sous l'impulsion
56 Une liste plus complète des microgrids en construction est disponible sur le site de la Galvin Initiative. http://www.galvinpower.org/microgrid-‐projects
LA SMART GRID EN CALIFORNIE 57
d'initiatives comme la Galvin Electricity Initiative. Fondée en 2005 par Robert W.Galvin, l'ancien Président et Chairman de Motorola, elle a été créée dans le but de promouvoir un large déploiement des microgrids.
Vehicle to Grid
Appelé "vehicle-‐to-‐grid" (V2G), ce concept permet de tirer avantage des capacités électriques des batteries des VE pendant les après midis chaudes lorsque la demande est la plus élevée et la consommation la plus chère pour éviter des coupures de courant à grande échelle. PG&E est devenu il y a trois ans le premier opérateur à démontrer publiquement57 la possibilité d'utiliser cette solution pour alimenter la maison et les commerces en électricité.
Cependant ce modèle est complexe et plusieurs problèmes doivent être résolus avant une utilisation à grande échelle. En effet, la quantité d'électricité disponible est susceptible de fluctuer énormément au cours de la journée. A cela s'ajoute le morcellement de la capacité de stockage, la gestion devenant alors très difficile. De plus les stations devront être capables de supporter des flux d'électricité bidirectionnels, à savoir un premier sens pour recharger la batterie et un second pour redistribuer l'électricité sur le réseau. Aujourd'hui les technologies traditionnelles utilisées sont conçues pour supporter seulement un seul sens, celui destiné à la recharge des batteries. Durant la conférence TechConnect à Anaheim en juin dernier, des experts sur le sujet ont affirmé ne pas s'attendre à une large utilisation de ce modèle avant 2020.
57 Pacific Gas and Electric Company Energizes Silicon Valley With Vehicle-‐to-‐Grid Technology, PG&E Website
58 LA SMART GRID EN CALIFORNIE
Régulations et standards
Importance de la régulation et incidence sur le marché.
Avec le déploiement à grande échelle des réseaux électriques intelligents et la multitude des applications associées qui voient le jour, la Smart Grid du futur engendrera des flux énormes de données entre les distributeurs d'électricité et les consommateurs. Ces flux devront être gérés et transportés, ce qui nécessitera un réseau de communication capable de les supporter, tout en garantissant une sûreté et une fiabilité suffisante. Une série de questions se pose alors: sur quel modèle reposera le réseau de communication ? Sera-‐t-‐il ouvert comme pour les communications Internet ou suivra-‐t-‐il le schéma traditionnel des réseaux de communication utilisés par les distributeurs d'électricité? Le consommateur recevra-‐t-‐il sa facture électrique de la main de ces derniers ou bien de compagnies proposant des services de gestion de l'énergie en ligne? Comment seront protégées les données et qui pourra y accéder ?
Si le sujet est aujourd'hui au cœur de l'actualité Smart Grid, une réponse précise n'est pour le moment pas envisageable, divers acteurs ayant des ambitions incompatibles.
Un secteur à la croisée de deux grandes industries :
Une des spécificités du réseau de distribution d’électricité intelligent est l'ajout d'un réseau de communication sur le réseau énergétique déjà existant. Les représentants politiques s'accordent à dire dans leur majorité qu'il existe pour la première fois dans l'histoire des Etats-‐Unis une synergie importante commune entre l'industrie de l'énergie et l'industrie des télécommunications. Pour marquer ce rapprochement, Steven Chu, Ministre de l'énergie et Jon Wellinghoff, chairman de la Federal Energy Regulatory Commission avaient rejoint Julius Genachowski, Chairman de la Federal Communication Commission lors d'une rencontre ouverte entre plusieurs acteurs du réseau intelligent, une première.
En mars dernier, la FCC avait déjà annoncé clairement ses intentions d'intervenir sur le réseau intelligent lors de la publication du FFC's Broadband Plan. A travers ce long rapport58, elle prône une vision selon laquelle le réseau de distribution d’électricité intelligent deviendrait un prolongement d'Internet reliant l'ensemble des américains pour permettre des services à l'échelle nationale. Ceci inclut par exemple des cours ou des diagnostics médicaux en ligne, un réseau sécurisé sans fil public à l'échelle nationale et en particulier des outils de gestion d'énergie pour réduire la consommation des particuliers. Dans cette vision, la FCC propose d'utiliser le spectre national pour augmenter le déploiement du réseau intelligent.
Suite à cette publication de nombreux acteurs présents dans l'industrie Internet se sont lancés dans la brèche ouverte par la FCC. Dan Reicher, directeur des initiatives sur le changement climatique et sur les énergies à Google, nous fait partager la vision du géant: "La Smart Grid est fonction de deux industries: les télécoms et les fournisseurs d'électricité. L'accès à Internet est un composant important du réseau intelligent parce qu'il peut supporter la transmission et l'échange d'information concernant les usages 58 Le rapport est téléchargeable à cette adresse: http://www.broadband.gov/download-‐plan/
LA SMART GRID EN CALIFORNIE 59
de consommation, et permettant l'engagement des consommateurs". Google a notamment lancé en début d'année, un logiciel de gestion d'énergie appelé PowerMeter.
Réseaux ouvert ou fermé ?
Cependant de nombreuses différences fondamentales existent entre ces deux industries et une coopération parfaite ne pourra se faire rapidement et simplement. Pour reprendre les propos de Reicher: "il existe deux mondes. L'un est l'Internet ouvert avec une supervision fédérale. L'autre est l'industrie de l'énergie où la régulation au niveau des (50) états est une tradition". De ce fait les deux industries n'envisagent pas de la même façon le réseau de communication à déployer.
Les fournisseurs téléphoniques prévoient d'utiliser leurs réseaux pour transporter l'information. Ainsi Verizon Wireless tente aujourd'hui, en partenariat avec d'autres compagnies comme Itron, Ambient Corp et Qualcomm, de vendre ses applications Smart Grid aux fournisseurs d'électricité. Notamment grâce au déploiement de son réseau sans fil 4G basé sur la technologie Long term Evolution (LTE). De même, SilverSpring avait annoncé en décembre dernier un partenariat avec AT&T59 pour utiliser le réseau de communication cellulaire de ce dernier pour supporter ses applications Smart Grid.
Cependant l'Internet public n'est pas la solution choisie par un grand nombre de distributeurs d'électricité. En effet, ils préféreraient utiliser leur propre réseau qui leur donnerait une entière indépendance. Par exemple, Vermont Electric Power Co et Vermont Electric Cooperative ont annoncé leur volonté de ne pas faire appel à des fournisseurs commerciaux de communication : "Un réseau privé de communication servira mieux les besoins en énergie et les applications des réseaux intelligents".
De plus, l'un des principaux reproches avancés par les distributeurs d'électricité à la FCC est que les canaux de communication utilisés par l'Internet commercial sont trop vulnérables et pas suffisamment sécurisés pour servir d'ossature aux communications cruciales requises pour la gestion et le contrôle des flux sur le réseau électrique. Pour appuyer leur argument, ils reprennent l'exemple des dégâts infligés par la tornade Katrina en 2005, qui avait engendré une longue coupure des communications alors que les systèmes de distribution d'énergie, équipés de batteries de sauvegarde avaient beaucoup mieux résistés. Suite à cela la FCC avait demandé aux fournisseurs commerciaux d'ajouter eux aussi des batteries sur leur réseau. Cependant un système de stockage sur de grandes distances représente un coût encore trop élevé pour les fournisseurs de télécommunication.
Certains distributeurs pensent cependant coopérer avec les fournisseurs de télécommunication : Cela peut prendre 30 ans pour avoir un déploiement à grande échelle du réseau intelligent selon Ron Melton, directeur du projet Smart Grid au Pacific Northwest National Laboratory. Car l'industrie de l'énergie inclut plus de 3000 fournisseurs servant des grandes métropoles et aussi des petits hameaux, et il n'y a pas un consensus parmi eux. En effet, une infrastructure de télécommunication coûte très cher à mettre en place et certains fournisseurs d'électricités, trop petits, n'auront pas les moyens de le payer.
59 AT&T and Silver Spring Hook Up Over the Smart Grid, GigaOM – December 8 2009
60 LA SMART GRID EN CALIFORNIE
D'autre part pour installer leur réseau, les distributeurs ont besoin de quelque chose que la FCC possède: de la bande passante. Ils ont désespérément besoin d'un accès au spectre de communications dédié aux communications sans-‐fil. La FCC a répondu à ce besoin en proposant comme option dans le FCC's Broad band plan de laisser les distributeurs utiliser une partie du réseau public sécurisé sans-‐fil pour des transmissions sécurisées liées à la gestion de l'énergie ou encore les bandes blanches60. Cependant pour qu’une partie du spectre devienne disponible, il faudra sûrement attendre plusieurs années, le processus de régulation étant très long et les intérêts pour chacun des acteurs élevés.
Un arbitrage, au niveau fédéral.
Une des questions essentielles reste de savoir comment l'accès aux données sur la consommation électrique et leur conservation sera géré. Restera-‐t-‐il du domaine des fournisseurs d'électricité ou sera-‐t-‐il ouvert à Internet, permettant ainsi aux compagnies privées de rentrer dans la compétition? La FCC qui régule essentiellement l'accès à l'information aura donc un rôle important à jouer.
D'autre part, pour le moment les distributeurs d'électricité ont reçu énormément de subventions de la part du gouvernement fédéral afin de les aider dans leurs initiatives de développement des réseaux intelligents. Cependant le gouvernement fédéral veut veiller à ce que leur déploiement soit le plus rapide possible et le "Electricity Consumers Right to Know Act"61 a donc été introduit. Ce projet de loi déclare que tout consommateur doit avoir le droit d'accéder à l'information sur son usage de l'électricité et sur les prix de l'électricité en provenance des fournisseurs, "d'une manière gratuite, convenable et dans les délais", selon les termes du projet.
Si ce projet de loi est mis en application, dans les 6 mois qui suivront, la FERC devra identifier les normes minimales que les fournisseurs d'électricité et les états devront adopter. Si l'un des fournisseurs ne parvenait pas au niveau des minima nationaux une année après que les standards aient étés publiés, les états pourraient le poursuivre en justice. Cette loi aurait donc pour conséquence de forcer les fournisseurs à s'équiper d'une infrastructure de télécommunication rapidement ou dans certains cas, à faire alors appel aux réseaux déjà existants, à savoir les réseaux utilisés par les fournisseurs téléphoniques ou Internet. Selon Chris Villarreal, responsable du département Smart Grid au CPUC, le choix d’un réseau public ou privé ne sera pas défini par les instances de régulation californienne. Le CPUC suit la législation fédérale, en particulier les recommandations faites par le FERC et le FFC. Le réseau télécom étant un réseau national, il serait en effet difficile de le réguler à l’échelle d’un état. Le débat qui oppose certains opérateurs et les fournisseurs de télécommunication devra donc se référer à un arbitrage fédéral.
Néanmoins dans le cas où un réseau existant possédait déjà toutes les caractéristiques requises pour les réseaux intelligents, le CPUC ordonnerait aux opérateurs privés l’utilisation de ce réseau. En effet la
60 Très haut débit sans fil pour tous, le « SuperWifi » annoncé aux Etats Unis, Blog du journaliste A. Baritault – September 2009 61 Electricity Consumers Right to Know Act, OpenCongress website
LA SMART GRID EN CALIFORNIE 61
construction d’un nouveau réseau coûterait très cher et ce prix serait transféré sur le prix de l’électricité et donc sur le consommateur ce qui ne peut être accepté par le CPUC.
Vers une interopérabilité et une mise en place de standards
Pour parvenir à une réelle efficacité sur le réseau, les acteurs du réseau intelligent auront besoin de standards d’interopérabilité pour les communications et les flux de données entre les appareils. Drew Clark appartenant à IBM Venture Capital Group avait déjà déclaré en 2008, que le « lien manquant » était les standards. La question d’interopérabilité est d’autant plus d’actualité, qu’avec le déploiement des compteurs intelligents, les opérateurs auront besoin de se reposer sur des standards pour la communication entre les compteurs. Conscient de cette faiblesse, le gouvernement fédéral a désigné le National Institute of Standards and Technology (NIST) comme responsable d’une mise à jour des standards existants pour une meilleure interopérabilité (voir Figure 21).
Cependant la difficulté actuelle est qu’il n’existe pas encore de standards suffisamment matures et reconnus. Dans un tel contexte, chaque acteur, conscient de l’importance de se positionner le plus rapidement sur le marché, développe sa propre solution. La complexité et le nombre des technologies impliquées dans le réseau intelligent accentuent encore cette difficulté.
Figure 21: Domaines potentiel définis par le NIST, pour la création de standards(Source : NIST)
62 LA SMART GRID EN CALIFORNIE
Si rien n’est encore défini, on constate que de nombreux acteurs penchent vers un modèle basé sur la technologie IP. Bien que peu sécurisé, le protocole IP est déjà omniprésent dans l’industrie des communications. Plusieurs standards émergent : on peut citer les standards: Zigbee, WIFI, Homeplug, C12 22, au niveau du réseau résidentiel, les standards Wimax, GPRS et SONET au niveau de distribution A noter également le standard ouvert OSHAN développé et promeut par PeoplePower, une des startups montantes de la Silicon Valley
Une cyber-‐sécurité pour le réseau électrique.
Contrairement à un ordinateur personnel, les compteurs ne seront pas connectés directement à l’Internet public. Accéder aux compteurs ne devrait donc pas être un challenge à la portée de tout le monde, et en contrôler un ensemble devient d’autant plus difficile qu’il faudrait accéder à chaque compteur individuellement. Cependant plusieurs études ont montré qu’il existe un réel risque de pénétration sur le réseau. En début d’année, InGuardians, une compagnie spécialisée dans le conseil sur la sécurité, avait pointé plusieurs vulnérabilités et la possibilité de prendre le contrôle d’un compteur en pour changer la facture62.
En réponse, plusieurs standards en développement relatifs à la sécurité sont en développement sous la pression du North American Electric Reliability Council (NERC) du Critical Infrastructure Protection (CIP) ou encore du NIST. De tels standards sont essentiels pour la communication étant donné que le réseau sera composé d’une multitude de couches impliquant de multiples technologies. Quelques standards, déjà matures comme le FIPS 140-‐2 utilisé par le gouvernement fédéral, existent et pourraient être renforcés.
62 New 'smart' meters for electrical utilities have security holes, Oregon Live – March 27 2010
People Power : des produits Open Source pour une plus grande interopérabilité.
People Power, une jeune compagnie californienne spécialisée dans les systèmes de veille et de contrôle de l’énergie, a reçu en août dernier une seconde bourse du DoE d’un montant d’un million de dollars. Ces fonds devraient permettre de commercialiser leurs produits sur le marché du résidentiel. New Cycle Capital, Greener Capital ont également investi dans la société.
People Power offre la possibilité de contrôler et de surveiller sa consommation énergétique au niveau de l’appareil, avec pour but de réduire les couts tout en réduisant les émissions de carbone. La particularité de People Power est la création d’un logiciel libre nommé Open Source IPv6 Area Network (OSIAN), capable de supporter à la fois le Wifi et le ZigBee et fournissant ainsi un premier pas vers l’interopérabilité dans le réseau intelligent. En octobre dernier, la compagnie avait également annoncé le lancement du module SuRF Bloc, une petite puce qui une fois implémentée dans un appareil permet de se connecter directement au réseau Internet.
Source – site de People Power
LA SMART GRID EN CALIFORNIE 63
L’administration Obama défend l’idée que le réseau intelligent est une des voies privilégiées pour renforcer la sécurité du pays, notamment en réduisant la dépendance énergétique du pays. Cependant une prise de contrôle du réseau électrique par un pays tiers est un élément qui ne devrait pas être négligé.
En Septembre, le NIST a publié sa dernière version du rapport « Guidelines for Smart Grid Cyber Security »63, présentant un ensemble de recommandations pour assurer la cybersécurité.
63 NIST Finalizes Initial Set of Smart Grid Cyber Security Guidelines, NIST website, September 14 2010
64 LA SMART GRID EN CALIFORNIE
Un marché potentiel énorme pour la Californie à saisir.
Un investissement massif des opérateurs électriques.
Presque un an après l'annonce d'Obama, d'attribuer une bourse de $4.5 milliards de dollars à ce secteur, un rapport de l'organisme Pike Research 64 prévoit un investissement total de $200 milliards entre 2008 et 2015. La Californie s'est fixé comme objectif de devenir le numéro un des technologies vertes aux Etats-‐Unis dans les prochaines années et compte bien obtenir une place de choix dans ce domaine. Avec trois des plus grands fournisseurs de gaz et d'électricité du pays, San Diego Gas & Electric (SDG&E), Pacific Gas & Electric (PG&E) et Edison International (SCE), la Californie part avec un avantage certain sur les autres états65. D'ici al fin 2012, PG&E devrait installer près de 10 millions de compteurs pour l'ensemble de ses clients dont 5.1 millions pour l’électrique et 4.2 millions pour le gaz, pour un coût total de $2.2 milliards. De même, SCE devrait mettre en place 5.3 millions de compteurs électriques pour un coût de $1.7 milliards, et SDG&E 1.4 millions de compteurs électriques et 0.9 millions de compteurs à gaz pour un coût de $571 millions.
Cependant le déploiement des compteurs intelligents n'est qu'une étape dans le processus du renouvellement du réseau électrique. Comme l'explique Clint Wheelock, Directeur Exécutif à Pike Research : "A l'heure actuelle les compteurs apparaissent comme l'élément principal du réseau intelligent, mais ils ne sont en réalité que le sommet de l'iceberg. Notre analyse montre que les fournisseurs trouveront le meilleur retour sur investissement et par conséquent y attribueront la majorité de leur capital, dans les infrastructures réseaux incluant une mise à jour des transmissions, une automatisation de sous-‐stations, et une automatisation des processus de distribution". Le rapport prévoit, entre autres, que ces initiatives d'automatisation accapareront 84% de l'investissement total dédié au réseau intelligent.
Un nouveau marché pour l'industrie informatique.
Le Président Obama en personne était intervenu lorsqu'il avait recommandé que l'argent de l'ARRA ("stimulus") fléché sur le réseau intelligent, soit $3.4 milliards en soutien de projets, puisse contribuer à l'extension du réseau de communication haut débit sur l'ensemble du territoire américain, notamment dans les zones rurales. Ainsi la solution d'un réseau de communication basé sur des protocoles IP (comme Internet), semblait privilégiée66. Il est évident que les industriels de l'informatique et notamment des fournisseurs de réseaux de communication de données, se positionnent sur ce terrain. Outre Oracle et IBM, dans l'industrie du logiciel et du service informatique, le grand du réseau, Cisco, vient de lancer cette année sa nouvelle gamme de produits, incluant des solutions pour la distribution automatisée ainsi qu’une plateforme de gestion de son énergie. La raison de cet intérêt est simple, les
64 Rapport: "Smart Grid Technologies" – Pike Research 65 Top 25 Utility Rankings 2010 – IDC Energy Insights 66 Smart-‐grid money could assist Broadband – ComputerWorld, October 2007
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analystes de Cisco pensent que le marché de la communication pour le réseau intelligent va atteindre les 20 milliards de dollars par an d'ici 5 ans67.
Google compte également prendre part à ce marché avec la mise en ligne en accès gratuit d’une nouvelle application appelée PowerMeter. Cette plateforme permet aux particuliers de suivre l'usage de leur énergie en temps quasi réel : "A l'heure actuelle les américains achètent leur électricité comme s'ils allaient au magasin tous les jours et ne payaient la facture qu'en fin de mois" fait remarquer Edward Lu, manager du projet PowerMeter de Google. "Quand les consommateurs peuvent voir en temps réel combien coûte l'électricité qu'ils utilisent, ils économisent entre 5 et 15% d'électricité en changeant simplement de comportement". SDG&E teste par ailleurs le logiciel sur ses consommateurs avec pour critères la sécurité, la fonctionnalité et l'interface. De son côté Microsoft a lancé sa plateforme Hohm en concurrence directe avec PowerMeter.
Selon Don Kintner, chercheur à l’EPRI, une ville dotée d’un million de compteurs intelligents, qui communiquent seulement une heure par jour, devrait transmettre au total plus de 300 giga-‐octets de données par an68. Les opérateurs électriques seront donc confrontés au traitement d’énormes quantités de données, ce qui à l’heure actuelle ne fait pas partie de leur savoir-‐faire. Ils devront donc faire appel å des compagnies intermédiaires comme les services proposés par la compagnie californienne Emeter, leader actuellement sur ce marché. Une étude récente réalisée par le cabinet GTM, prévoit une augmentation du marché de 300%69, passant de $54 millions en 2009 à $221 millions en 2014.
Le marché associé à la sécurité est également important. Pike research a récemment publié un rapport selon lequel, la cyber-‐sécurité devrait représenter un marché de $21 milliards70 entre 2010 et 2015 avec un revenu annuel de $3.7 milliards en 2015. Les investissements relatifs à la sécurité devraient correspondre à 15% de l’investissement total dans le réseau intelligent. L’Amérique du Nord devra être la part la plus importante du marché, avec un revenu de $1.5 milliards de dollars.
La gestion et le contrôle de son énergie
Pour les commerces et l'industrie où la consommation énergétique représente une grand part des dépenses, un modèle basé sur des prix fluctuants au cours de la journée, peut potentiellement engendrer une réduction (ou une augmentation) significative des coûts. Si la gestion de la consommation suit les heures creuses, on se retrouve alors dans un scénario gagnant-‐gagnant à la fois pour les distributeurs et pour les consommateurs, et l'adoption d'un tel modèle devrait alors être assez aisée. Cependant pour le consommateur résidentiel cet atout devient moins évident. Des études ont montré qu'en moyenne un américain pense à sa facture électrique seulement 6 minutes par an, d'autant plus que la différence de prix, réalisée sur la facture électrique à la fin du mois, restera très
67 Cisco Smart Grid Solutions -‐ Cisco website 68 WiMax for Smart Grids – IEEE Spectrum, July 2010 69 Meter Data Management Market to Grow 300% by 2014 – GreenTech Media, August 2010 70 Smart Grid Cyber Security Market to Reach $3.7 Billion by 2015 – BusinessWire June 23 2010
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faible voire parfois défavorable. Conscients de cette faiblesse, les opérateurs devront donc trouver le moyen d'impliquer les particuliers afin d'obtenir la meilleure efficacité et le meilleur prix.
Figure 22: La consommation énergétique par appareil dans une maison (Source : kilowatt-‐house.com)
Les problèmes liés à l’énergie poussent à repenser la gestion électrique de la maison : connaître en quasi temps réel ce qu’elle consomme, piloter et programmer les équipements électriques grâce à un tableau de bord unique, optimiser l’éclairage, le chauffage et la climatisation, etc. Dans une maison traditionnelle, la lumière est responsable de la plus grande partie de la consommation de la maison, suivie des appareils électriques comme la télévision, les ordinateurs. Le réfrigérateur et la climatisation se positionnent en 3ème et 4ème place (voir Figure 22).
Pike Research estime à 14,4 millions le nombre de dispositifs d’affichage installés en 2015. Sur ce marché se trouvent le plus souvent des acteurs offrant déjà des solutions de gestion énergétique au-‐delà des écrans. La gestion de l'énergie sera alors pilotée sur des plateformes web : en 2015, Pike Research estime le nombre d’utilisateurs à 11,1 millions sur ordinateur et à 2,6 millions sur téléphone mobile.
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Eduquer le consommateur
Smart Grid, un concept inconnu du grand public Au début de l’année, Control4 et GE, ont lancé la Smart Grid Consumer Coalition (SGCC) dont le but est de fournir recherche et enseignement pour intégrer les consommateurs dans le déploiement de la Smart Grid. Richard Walker, Président de Control4 Energy Systems, un des membres fondateurs de la coalition, explique que "c'est très choquant de voir à quel point l'éducation des consommateurs sur les technologies liées aux compteurs intelligents a été tant négligée. La plupart des consommateurs ne comprennent même pas pourquoi ils devraient prêter attention à tout ceci". L'organisation prévoit de lancer d'ici peu des travaux de recherche sur le comportement des gens. Elle dispose également de quelques données prouvant le bien fondé de leur initiative. GE a conduit récemment une étude71 en Australie et aux USA dont la conclusion a été que 79% des consommateurs ne sont pas familiers avec le terme Smart Grid. Cependant, parmi les 11% qui connaissaient bien le sujet, presque la totalité était favorable à cette technologie. Parmi les autres membres de la coalition, il est bon de citer Future of Privacy Forum, IBM, Control4, SilverSpring Networks, GE, NREL ainsi que plusieurs opérateurs.
Le déploiement du réseau versus le comportement des consommateurs. Si l'implication des consommateurs dans le réseau intelligent est essentielle pour le déploiement à grande échelle du réseau intelligent, elle a également un rôle important dans le choix, puis la mise en place des technologies et des infrastructures qui seront utilisées sur le futur réseau électrique. Si l'on considère par exemple le déploiement des compteurs intelligents, les deux grandes applications, du
71 National Survey: Americans Feel a Smart Grid Will Help Reduce Power Outages, Personal Energy Usage, Business Wire – March 23 2010
Le thermostat intelligent, un marché ciblé par Ecofactor
EcoFactor est cette année une des startups les plus en vue dans le monde du réseau intelligent en Californie. Elle s’est faite notamment remarquer cette année à la conférence VentureBeat, où un jury sélectionne chaque année des entreprises innovantes et prometteuses. Le produit présenté est un logiciel capable de traiter un ensemble de paramètres qui influent directement sur la consommation énergétique d’une maison comme la température extérieure, le prix de l’électricité ou encore la taille de la maison. Ceci afin d’ajuster au cours de la journée, en temps réel, le thermostat et de maintenir une température constante dans la maison tout en minimisant la facture électrique. Selon la compagnie, au cours d’une année 14000 ajustements sont effectués en moyenne conduisant à une réduction du coût comprise entre 20 et 30%. Pour justifier le positionnement de la compagnie, son président explique qu’à la différence de l’effacement énergétique traditionnel concentré sur 5 jours par an Ecofactor optimise la consommation 365 jours par an. Fondée il y a 4 ans, son premier contrat officiel a été annoncé en juillet dernier avec l’opérateur texan Oncor après trois années de test. Ecofactor a déjà levé $5.9 millions, provenant de Claremont Creek Ventures et RockPort Capital Partners.
Sources: EcoFactor impresses judges with smarter thermostat, Venturebeat -‐ 04/11/10
EcoFactor Launches Its First Service in Texas, Gigaom – 7/07/10
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point de vue des utilisateurs finaux, sont d'une part la gestion de leur consommation en fonction des appareils et d'autre part, en fonction d'une grille tarifaire fluctuante au cours de la journée. Cependant, cette dernière est très coûteuse à mettre en application et les producteurs d'électricité peinent à dégager les fonds nécessaires. Sans un appui significatif et une volonté forte des consommateurs pour développer ces fonctionnalités, le déploiement de ces technologies devrait être lent. C’est pourquoi actuellement certains opérateurs comme PG&E pensent modifier le déroulement du déploiement de leur réseau AMI. Lors de la Conférence Smart Energy International en septembre dernier, Kevin Cornish, consultant pour Enspiria Solution, présentait une nouvelle version des étapes de déploiement de PG&E. La phase « Proposer des applications mobiles ou sur Internet dédiées au consommateur » est placé en 3ème position alors que la phase «Application de nouveaux tarifs » est reléguée à la 5ème place. Le but est de donner plus de moyens au consommateur d’être impliqué dans le réseau intelligent avant la mise en place d’une nouvelle tarification. Cette démarche est justifiée selon Kevin Cornish par le fait que de nombreux programmes de tarifications ont été créés ces dix dernières années, mais peu de consommateurs connaissent leur existence et encore moins y participent.
-‐ 0 : Test initial du système
-‐ 1 : Processus de déploiement et de prévision des compteurs intelligents
-‐ 2 : Support des compteurs intelligents pour le paiement de la consommation
-‐ 3 : Proposer des applications mobiles ou sur Internet dédiées au consommateur.
-‐ 4 : Ajout de nouvelles fonctionnalités (ex : information sur les coupures de courant)
-‐5 : Application de nouveaux tarifs.
-‐6 : Applications avancées.
Par ailleurs, l'intérêt des consommateurs sur la variation des prix n'est peut être pas le plus significatif. Selon GroundedPower72, si le prix est une motivation importante, ce n'est qu'un des nombreux facteurs qui encouragent les consommateurs à économiser de l'énergie. On peut citer comme autres motivations, l'amélioration de l'environnement, la compétition, la coopération, la comparaison avec leurs pairs (Opower), la reconnaissance et les récompenses. Par exemple, la compagnie avance les résultats obtenus par le projet pilote Cape Cod Mass, qui montraient une réduction de 10% de l'énergie consommée, sans que les utilisateurs n'aient eu accès à un moniteur de contrôle ou à une grille tarifaire, ou encore à un contrôle des recharges des appareils. Dr Paul Cole, Président et fondateur de GroundedPower va même plus loin : "En fait se concentrer uniquement sur les dollars peut mener à une résistance du consommateur plutôt qu'un intérêt et une coopération". PG&E, suite à l’installation des compteurs intelligents à Bakersfield, en avait fait les frais. La compagnie avait reçu plusieurs milliers de
72 GroundedPower Submits Behavior-‐Focused Recommendations for California Smart Grid Initiative, Electricity Energy Online -‐ April 8 2010
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lettres de mécontentement de la part des consommateurs. D’autre part, dans un communiqué, Jon Wellinghoff, Président de la FERC a estimé qu'une réduction nationale de 20% des pics de demande permettrait de réduire d'environ 1.2 milliards de tonnes les émissions de carbone par an, fait intéressant pour les mouvements écologiques. Pour parvenir à de telles économies d'énergie, beaucoup d'acteurs du secteur Smart Grid privilégient le modèle de l’effacement énergétique permettant de créer de la capacité virtuelle lors des périodes de grande demande en électricité. On peut citer le projet Proxy DR73 en Californie, qui a été lancé au courant du mois d'avril pour inciter les particuliers ainsi que les industriels à utiliser l’effacement énergétique. Un tel modèle dépend d'une implication active à grande échelle des utilisateurs finaux.
De nombreux programmes de recherche sur le sujet.
Conscientes de l'importance d'impliquer les consommateurs dans le réseau intelligent, de nombreuses universités ont créé des programmes de recherche en lien avec le comportement des consommateurs face aux problématiques d'énergie. Au sein de ces universités, on peut citer en Californie les études réalisées au Precourt Energy Efficiency Center (PEEC) à Stanford ou encore au California Institute for Energy and Environment (CIEE) de l’UC Berkeley. Des équipes ont porté leurs recherches sur la manière d'éduquer les adolescents vis-‐à-‐vis de leurs consommations d'énergie ainsi que sur la création de plateformes de jeux comme moyen ludique d'apprentissage. L'UC Davis n'est pas en reste et organise chaque année en coopération avec ces laboratoires une conférence intitulée "Behavior, Energy and Climate Change Conference (BECC)" abordant ces problématiques.
73 Virtual Power – Market Rewards for Smart Energy Practices, Smart Grid Library, April 26 2010
Opower ou comment impliquer le consommateur dans le réseau intelligent.
Opower s’est porté sur l’engagement du consommateur et la modification de son comportement vis-‐à-‐vis de l’énergie. La start-‐up revendique que sa solution permet de réduire de 3.5 % l’utilisation d’électricité pour 85% de la population. Leur interface permet aux gens de connaître leur consommation en comparaison avec leurs voisins tout en leur donnant des conseils.
Le président Dan Yates, avait fait l’annonce récemment lors d’une conférence à Stanford que la compagnie prévoyait un revenu de plus de $30 million cette année. Pour justifier le modèle économique d’OPower, il avait alors dit : « Nous fournissons des services d’information aux clients à travers des partenariats avec les opérateurs. L’efficacité énergétique est très ennuyante. Personne ne s’y intéresse. Il faut donc donner l’information car personne ne va venir la chercher. Il faut fournir des résultats et non seulement des rangées de données ».
Le concept a fait son chemin et aujourd’hui Opower peut se vanter d’avoir signé des partenariats avec plus d’une trentaine d’opérateurs. La compagnie permet aujourd’hui de fournir l’équivalent d’1/3 de la production solaire aux Etats-‐Unis sous forme d’économie d’énergie.
Source: OPower Making Millions in Home Energy Efficiency -‐ Greentechmedia
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Le réseau intelligent, attractif pour les investissements aux Etats-Unis.
Le second trimestre de l’année 2010 a montré un rebond des activités dans le réseau intelligent. Le capital risque investi a plus que triplé, alors que les fusions et acquisitions ont atteint une valeur de 1.3 milliards de dollars. Ce bilan du second trimestre montre l’intérêt porté au secteur Smart Grid et particulièrement aux Etats-‐Unis, qui totalise 10 des 12 investissements (voir Figure 23).
Figure 23: Comparaison des transactions liées au secteur Smart Grid entre Q1 et Q2 2010 (Source Mercom Capital Group)
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Figure 24: Détail du capital risque au second trimestre 2010 pour le secteur Smart Grid (Source Mercom Capital Group)
Parmi les 12 compagnies américaines ayant reçu des investissements, 4 sont basées en Californie : Ecofactor, 4Home inc, GreenWave Reality et Recurve (voir Figure 24).
La Silicon Valley : un écosystème favorable pour investir dans la Smart Grid
Le consensus est que le "Smart Grid" représente un marché potentiel énorme mais encore à ses débuts. Selon les experts, le marché devrait être mature d'ici 5 ans. Au cours des 5 prochaines années, le marché du secteur aux Etats-‐Unis devrait croître de plus de 70%, de 5.6 milliards en 2010 à $9.6 milliards en 2015.
Nombreux y voient donc l’opportunité de fonder une nouvelle compagnie, qui serait synonyme d'embauches, de R&D et d'extension de son réseau. La Silicon Valley, bassin californien de l'innovation, bénéficie d'une concentration impressionnante de talents grâce à des universités de grande renommée, comme Stanford University et UC Berkeley, et du fait de la présence de compagnies de rang mondial comme Yahoo, Google, Cisco. La région compte une foule d'ingénieurs, d'entrepreneurs et de professionnels compétents parmi lesquels il est possible de puiser pour créer son équipe.
De nombreuses organisations californiennes ou internationales existent pour aider les nouveaux arrivants à construire leur réseau. D’autre part venir dans la Silicon Valley permet aux startups et petites compagnies de gagner une meilleure visibilité. La plupart d'entre elles recherchent des collaborations et des accords, en particulier avec des compagnies internationales de haut rang, permettant d’obtenir rapidement une reconnaissance de fiabilité et d’avoir accès par la même occasion à un plus grand marché. D'autre part, la quantité de fonds d'investissements présents dans la région représente une
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source potentielle de financements importante et il existe de nombreuses opportunités pour vendre sa compagnie ou entrer en bourse (voir Figure 25).
Figure 25: les principaux acteurs du secteur Smart Grid par segment de marché (Source GTM Research)
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Conclusion
Le réseau intelligent de part ses multiples facettes devient un enjeu technologique, économique et social pour la Californie, mais il n’en est encore qu’à ses débuts et beaucoup d’étapes restent à franchir.
Les défis technologiques restent encore importants, que ce soit au niveau de l’implémentation du réseau de communication, de la mise à jour des composants ou des nouvelles infrastructures sur le réseau. Nombreux sont les produits encore au stade du développement ou de test dans les centres de recherche comme l’EPRI, dans les universités ou encore à travers des projets de démonstrations présents sur le territoire. Ce manque de maturité influe directement sur la mise en place de standards et ralentit le déploiement et l’adoption de la Smart Grid. Les grands opérateurs électriques californiens comme PG&E, SDG&E ou encore SCE optent encore pour plusieurs solutions technologiques (sans-‐fil, Rf mesh networks, courant porteur ligne, fibre optique, …). Si les déploiements de compteurs intelligents ont commencé, le principe de précaution est de mise et le choix final d’une unique technologie n’a pas encore été accepté. Cette hésitation se traduit par une grande difficulté pour les organismes de régulation comme le CPUC de mettre en place des programmes précis et cadrés juridiquement. Ainsi le Critical Peak Pricing, le Time of Use ou encore l’effacement énergétique peinent à être instaurés en Californie.
Dans une période de ralentissement économique, cela représente cependant une source d’innovation importante et un moteur pour l’industrie. Sans les réseaux intelligents, les véhicules électriques, l’éolien, et le solaire auront des difficultés à émerger. De nombreuses startups, aidées en Californie par un système financier dynamique et efficace ont vu le jour et tentent de se créer une bonne place au niveau national mais également international. Parfois soutenu par les géants de l’informatique et des télécoms (Cisco, Google, Oracle, …), parfois en concurrence directe, elles contribuent néanmoins à dynamiser l’économie locale. C’est un atout de grande importance pour un état surendetté, ayant atteint un taux de chômage record ces deux dernières années.
Enfin, de part sa volonté de limiter la consommation et les moyens de production, la Smart Grid fournit une nouvelle solution aux problématiques environnementales, un des piliers politiques de la gouvernance d’Arnold Schwarzenegger : Remplacer une production à base d’énergie fossile et provoquer une baisse de la demande. Si la communication est efficace, la Smart Grid influencera directement les habitudes relatives à l’utilisation de l’énergie, un argument choc alors que la Californie tente de réduire sa dépendance énergétique vis-‐à-‐vis des autres états.
La Smart Grid offre donc l’opportunité à la Californie de révolutionner son réseau électrique et énergétique. Avec elle, efficacité énergétique, optimisation, fiabilité, sécurité deviendront les maîtres mots pour décrire le réseau. Elle ouvre également la voie à un grand nombre d’applications influençant significativement l’industrie de l’énergie mais aussi l’industrie des télécoms et l’industrie de l’informatique. Sur le long terme elle influera directement sur la relation entre le consommateur et son énergie et pourrait déboucher sur de nouveaux modèles sociaux.