la somme et la grande guerre -...
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La Somme et la Grande Guerre
dans les collections photographiques et
cinématographiques de l’ECPAD (1915-1919)
Les archives de la SPCA et dons faits à
l’ECPAD sur la Somme :
Nombre de reportages : 274
Nombre de photographies : 6 847
Nombre de films : 149
Les photographies
L’ECPAD détient au total près de six mille neuf cents photographies prises dans la Somme
par des opérateurs militaires ou par des particuliers dont les descendants ont fait don des
clichés de leurs ancêtres à l’établissement. La Section photographique de l’armée ayant été
créée en avril 1915, il n’existe pas d’images des débuts de la guerre dans la Somme : bataille
d’Albert en septembre 1914, puis déplacement des combats vers le Nord (Arras, Lille,
Flandres), course à la mer et installation de la guerre de tranchées.
En 1915 (cent cinquante-neuf photographies), des reportages sont consacrés à la protection de
la cathédrale d’Amiens, à l’école des gaz de Barleux, à la destruction des villages (Dancourt
et Grivillers notamment). Des positions d’artillerie et des systèmes défensifs – tranchées et
barricades – sont installés en plein cœur des villages (L’Échelle-Saint-Aurin, Beuvraignes,
Fescamps, Dancourt, Tilloloy). Les photographes visitent les cantonnements (Tilloloy, messe
à L’Échelle-Saint-Aurin). Une mission suédoise se rend dans la Somme.
L’année 1916 (environ trois mille photographies), comporte l’essentiel des clichés pris dans le
département au cours de la guerre, en vue d’illustrer un épisode majeur du conflit : la bataille
de la Somme (1er
juillet - 18 novembre). Au cours du premier semestre, les reporters militaires
observent la vie quotidienne des troupes cantonnées dans divers villages, par exemple à
Erches, Arvillers, Boves où a lieu un concert de musique militaire, Méharicourt, Rosières-en-
Santerre etc. (SPA 16 S). Des troupes étrangères sont présentes : britanniques (SPA 19 S),
ainsi que des troupes coloniales (spahis SPA 41 R, Sénégalais SPA 18 A et 43 R). Des civils
sont évacués (SPA 19 S et SPA 19 E).
La première bataille de la Somme
Plusieurs reportages sont consacrés à l’aménagement de l’arrière du front avant l’offensive
(installation d’un hôpital, d’un poste de secours souterrain, de lignes téléphoniques, d’abris et
de quais de débarquement, reportage SPA 19 E), ainsi qu’à la très importante préparation
d’artillerie précédant immédiatement les opérations (SPA 47 R, 22 S et 23 S) et se
poursuivant ensuite (SPA 21 R, parc d’artillerie de La Neuville-Sire-Bernard SPA 22 R et 33
S).
Références : SPA 23 S 1498
Bray-sur-Somme (Somme). Anglais et Français, 25 juin 1916.
Photographe : Emmanuel Mas/© ECPAD
Au début de l’offensive, des reportages montrent les engagements qui ont lieu dans le secteur
de la tranchée du bois de la Vache et du boyau du Bois-en-Hache (SPA 43 B), dans la région
de Péronne (SPA 45 B), d’Amiens (SPA 49 B) et de Dompierre (SPA 24 S). Un reportage est
consacré à Biaches (SPA 48 B), dans la zone centrale des combats, village le plus à l’est du
secteur conquis pendant la bataille de la Somme. De nombreux prisonniers allemands sont
capturés et conduits dans un camp à Coivrel (SPA 21 R et 38 R). Les troupes anglaises sont
visibles dans de nombreux reportages : SPA 38 S (British West Indies Regiment), SPA 29 C,
19 E, 11 G, 90 et 91 H, 50 R, 2 W, 47 S (Écossais). La bataille se poursuit en septembre et
octobre : des reportages illustrent notamment les combats de la ravine de la saucisse (SPA 91
H) et la prise de Combles (SPA 88 H et 46 S). L’offensive se termine en novembre, avec un
dernier reportage montrant les destructions et les mouvements de troupes (SPA 3 W). Pendant
les opérations à l’avant, les reporters continuent à visiter les troupes cantonnées à l’arrière et
décrivent la vie quotidienne (SPA 44 S), le ravitaillement (boucherie militaire de Mézières-
en-Santerre dans SPA 1 G) et les loisirs (séance de théâtre au camp « des canards » dans SPA
33 R). Clemenceau et le général Foch visitent le front et se rendent notamment au terrain
d’aviation de Cachy (SPA 43 S).
Pendant l’hiver 1916-1917, les troupes alliées tiennent les villages le long de la Somme et
reconstituent leurs forces. Les hommes s’entraînent, réparent les routes et les infrastructures
téléphoniques (SPA 42 D et 43 D), s’occupent d’agriculture et de reconstruction. Les
reporters photographient les villes détruites (SPA 44 D, SPA 87 R).
En 1917 (environ mille cent photographies), fin mars, les Allemands se replient sur la ligne
Hindenburg, laissant derrière eux une région saccagée (SPA 56 D, 87 R et 58 D). Les Alliés
reprennent Roye, Albert et Péronne (SPA 181 M). En avril et mai, les Britanniques lancent
une contre-attaque à la suite de laquelle la Somme subit de nouvelles destructions (SPA 2 LO,
SPA 6 LM). Pendant le reste de l’année, les reporters militaires continuent leurs reportages
sur l’état des lieux dans le département, la préservation et l’évacuation des œuvres d’art, et
l’inventaire photographique des ruines.
Références : SPA 58 D 4210
Roye, Somme. L’Hôtel de ville, 9 mai 1916.
Photographe : Édouard Brissy/© ECPAD
Dès 1917, la hiérarchie militaire et le ministère de l’Instruction publique et des Beaux-Arts se
préoccupent de garder trace, pour les générations futures, des combats meurtriers1
qui se sont
déroulés dans la Somme. Une commission est chargée de reconnaître des vestiges ou portions
du front qui pourraient être préservés en l’état et envoie des représentants sur le front en zone
britannique, accompagnés d’un opérateur de l’armée dont on ne connaît pas, en l’état actuel
des recherches, le nom. Il pourrait toutefois s’agir de Paul Queste. En effet, André Ventre,
architecte en chef des monuments historiques et membre de la commission, a produit une
série de dessins de sites picards endommagés pendant le conflit. Or ces dessins correspondent
exactement à des clichés de Paul Queste datés de la période à laquelle la commission a débuté
ses travaux. L’architecte a visiblement exécuté ses dessins d’après les photographies de
Queste. L’ECPAD conserve certaines reproductions photographiques des œuvres d’André
Ventre (SPA 175 Z), dont l’une représente un ancien fortin allemand à Rosières-en-Santerre.
À gauche, référence : SPA 175 Z 5986. Fortin allemand à Rozières. Dessin d’André Ventre,
reproduction photographique par Lemare, janvier 1918/ © ECPAD
À droite, référence : SPA 114 B 6064. Ancien fortin allemand à Rosières-en-Santerre,
Septembre 1917. Photographe Paul Queste/© ECPAD
En 1918 (mille sept cents photographies), la guerre de mouvement reprend à l’initiative des
Allemands qui lancent fin mars l’offensive Michel et s’avancent rapidement vers l’Ouest. À
Grivesnes, les troupes franco-britanniques, avec les hommes du 350e régiment d’infanterie,
contiennent héroïquement l’ennemi, lui coupant ainsi la route vers Amiens. Un reportage leur
rend hommage (SPA 118 R), tandis que d’autres montrent les mouvements des unités à
l’arrière (SPA 60 Y et 121 R), la vie quotidienne sur le front (SPA 119 R et 85 V) et les
soldats anglais (SPA 124 R, SPA 2 LO). Plusieurs reportages témoignent de la montée en
puissance des troupes américaines, avec notamment la prise de Cantigny par la 1re
division
d’infanterie des États-Unis (SPA 127 R), le 28 mai 1918. Les troupes canadiennes (SPA 23
LO) et australiennes (SPA 93 V, 72 L à 74 L, 23 LO et 26 LO) sont également bien
représentées. C’est aussi la montée en puissance des chars, photographiés à maintes reprises
(SPA 127 R, 130 R, 24 LO, 89 V, 94 V, 95 V).
Référence : SPA 127 R 4543
Attaque et prise de Cantigny par les troupes américaines soutenues par les tanks français.
Les officiers du 5e groupe qui participèrent à l'attaque. 28 mai 1918.
Photographe: Edmond Famechon/© ECPAD
À l’été 1918, au plus fort de la contre-offensive française, interviennent la libération de
Lamotte-en-Santerre (SPA 22 LO), la réduction de la poche de Montdidier (SPA 15 DS), la
reconquête de Roye, le 27 août (SPA 145 R) et celle d’Ham, le 6 septembre (SPA 150 R).
Jusqu’à l’armistice, les reporters militaires poursuivent leur travail d’inventaire des
destructions de villages, de monuments et de l’outil économique (sucreries dévastées), du
matériel allemand abandonné, des profanations de tombes etc.
Quelques reportages réalisés en 1919 (environ deux cents photographies) montrent la visite de
Lloyd George dans le département, celle d’une mission américaine, celle de journalistes
étrangers, ainsi que des reproductions de monuments et œuvres d’art.
Plusieurs reporters militaires sont particulièrement actifs dans la Somme pendant la Grande
Guerre: Ribard et Famechon (série R) y réalisent à eux deux plus de mille cent photographies,
de mai 1916 à septembre 1918. Emmanuel Mas (série S) prend plus de mille clichés en un an
entre décembre 1915 et novembre 1916. Son travail est très centré sur la Somme, à la
différence d’autres opérateurs ayant davantage rayonné sur les autres départements. Il réalise
aussi, après l’armistice, de nombreuses photographies d’œuvres d’art préservées de l’ennemi.
Référence : SPA 150 R 5116
Ham (Somme). Devant le porche de l'église Saint-Charles, le lieutenant-colonel Maurel,
commandant le 125e d'infanterie, entré le premier dans Ham. Au premier plan, le coq de
l'église. 6 septembre 1918. Vue stéréoscopique.
Photographe : Edmond Famechon/© ECPAD
De nombreux reportages sont photographiés en vues stéréoscopiques sur plaques de verre de
format 6cm x 13cm. Il existe par ailleurs cinq photographies en couleur (autochromes) prises
dans la Somme (série AUL) en 1917, portant sur les châteaux de Verpillières et Tilloloy.
Référence : AUL 367
Verpillières (Somme). Château en ruine, 1917.
Photographe : attribué à Jean-Baptiste Tournassoud/© ECPAD
Les photographies issues des fonds privés légués à l’ECPAD complètent les reportages
effectués par les photographes militaires. Les principaux fonds ou sujets traités sont les
suivants :
- Le 5e bataillon du 8
e régiment d’artillerie à Y, en 1916 (D73-36, dix-neuf clichés).
- Un régiment de spahis à Marcelcave (D73-37).
- Des trains blindés d’artillerie lourde sur voie ferrée (D73-35 et 73-42).
- Des travaux de terrassement à Froissy, Méharicourt, Lihons etc. (D106-1).
- Cent deux clichés réalisés dans diverses localités de la Somme par Ludovic Cassard,
médecin aide-major au 35e régiment d’artillerie (D105).
- Les activités du 215e régiment d’artillerie de campagne à Framerville, Foucaucourt et
Moreuil (D232).
- Quatre-vingt-huit clichés de Jacques Tournadour d’Albay, médecin auxiliaire du 11e
régiment du Génie en 1915-1916 : portraits, artillerie, églises, vie quotidienne des
soldats, animaux, concours de cuistots… (D171-1)
- Plus d’une centaine de photos issues du don Garros (D193-1 et D193-2), attribuées à
Jean-Baptiste Tournassoud, autochromiste ayant dirigé la Section photographique et
cinématographique de l’armée à la fin de la Grande Guerre (églises, escadrille
américaine à Ham, troupes australiennes, vie dans les cantonnements, portraits etc.).
Référence : D171-1-500
Fay. Septembre 1916. Bivouac du 2e peloton. Valencon.
Photographe : Jacques Tournadour d'Albay/© ECPAD
Les films
Les films et rushes tournés par les caméramans de la SPCA dans la Somme reflètent en
grande partie les événements photographiés évoqués précédemment car les reporters
travaillaient en équipe : l’ECPAD conserve cent quarante-neuf films où des images de la
Somme ont été repérées (il y en a peut-être davantage, certains films du fonds 14-18 n’étant
pas encore légendés). Parmi les images animées recoupant les reportages photographiques on
peut citer en exemple :
- La visite du président de la République du Portugal sur le front (films 14.18 A 31 et A
965 – images tournées par Alfred Machin, en correspondance avec les reportages SPA
226 M et SPA 74 D, respectivement d’Albert Moreau et d’Édouard Brissy).
- Des vues de Villers-Bretonneux en mai 1918 (film 14.18 B 549 et reportage
SPA 73 L, les deux documents étant d’Albert Samama-Chikli, photographe et
caméraman).
- Le coq de l’église de Ham tombé sur les marches (film 14.18 B 77 et reportage SPA
15 R, voir photo ci-dessus).
La collection des films sur la Somme commence en 1916 avec la première bataille de la
Somme. Plusieurs documents illustrent cet événement ; certains portent sur l’ensemble de
l’offensive (14.18 A 1199, A 1200, A 271, B114, B309, A 283) dont ils relatent le
déroulement de façon plus ou moins complète, avec des cartons explicatifs. D’autres abordent
le sujet de façon plus partielle (la bataille de l’Ancre : 14.18 A 174), de façon thématique ou
encore géographique, par exemple :
- L’artillerie lourde dans la Somme (14.18 A 274).
- La prise de Curlu (A 280, dans ce cas il s’agit d’un rush).
- Sur la Somme de Deniécourt à Ablaincourt (A 296).
- Les troupes anglaises (A 1211).
Plusieurs documents portent sur le Service de santé pendant la bataille de la Somme (14.18 A
883, A 884, A 885 et A 879 intitulé En péniche sur la Somme avec nos blessés).
En 1917 (trente-deux films), les opérateurs filment l’état de dévastation du département
(ruines, outil agricole et industriel saccagé, arbres sciés etc.) à la suite du retrait des
Allemands sur la ligne Hindenburg, des unités coloniales ou des troupes étrangères à l’arrière
du front ainsi que des prisonniers allemands. Un film porte sur les chars anglais (14.18 A
1175).
En 1918 (cinquante-cinq films), de nombreux numéros des Annales de la guerre – actualités
cinématographiques diffusées dans les cinémas et sur le front – comportent des séquences
concernant la Somme. Avec la reprise de la guerre de mouvement, le département est l’enjeu
de nombreux combats dont il faut tenir informée la population. Les phases successives des
combats font aussi l’objet de films spécialisés, par exemple les débuts de l’offensive Michel
(14.18 A 1484, A 178, A 267, A 375) ou la bataille de la Scarpe (14.18 B 228). Les troupes
anglaises, américaines et néo-zélandaises apparaissent dans plusieurs documents (14.18 B
206, B 228, B 298, B 5483). L’aviation est présente dans plusieurs documents (…..) ainsi que
les chars (char anglais dans 14.18 A 1201, A 267, A 323, chars français dans 14.18 A 567, B
717, char allemand Elfriede capturé à Villers-Bretonneux).
Par ailleurs, du matériel agricole en provenance des États-Unis commence à être acheminé
vers les régions dévastées à remettre en culture (14.18 B 436).
En péniche sur la Somme avec nos blessés
À Cerisy-Gailly (Somme), des blessés sont embarqués en grand nombre à bord d'une péniche
de la Croix-Rouge. Les amarres sont larguées. Au cours de ce voyage vers Amiens, la caméra
promène son regard le long des berges. Des soldats en cantonnement lavent leur linge. À
l'arrêt de l'écluse de Corbie, une colonne de camions franchit le fleuve et des habitants offrent
quelques présents. Un peu plus loin, des hommes se baignent. Enfin, la cathédrale d'Amiens
se profile. À l'arrivée, de jeunes volontaires aident au débarquement des blessés que l'on
aperçoit furtivement à l'intérieur de la cale.
TC 00:07:06 – Cerisy-Gailly TC 00 :08 :41 TC 00 :13 :43 – L’écluse de Corbie
Photogrammes extraits du film
En péniche sur la Somme avec nos blessés
Noir et blanc, muet, caméraman inconnu, durée 16 mn 54 sec/© ECPAD
Escadrille des Cigognes ; le char Elfriede de Villers-Bretonneux Mai 1918
Descriptif détaillé des rushes :
À Hétomesnil (Oise, 19 mai 1918), sur le terrain d'aviation occupé par le groupe de
combat 12 (GC 12) également appelé escadrille des Cigognes, le lieutenant aviateur
Hugues, de l'escadrille n°26, et le capitaine aviateur Deullin, de l'escadrille n°3,
posent devant leur avion de chasse. Les SPAD XIII décollent pour effectuer une
mission. Les mécaniciens préparent les appareils avant le décollage. Un pilote
endosse sa combinaison de vol fourrée.
À Saleux (Somme, 18 mai 1918), le char allemand Stürmpanzerwagen A7V Elfriede
capturé devant Villers-Bretonneux lors de la contre-attaque du 25 avril 1918 par les
Australiens et le 3e RT (régiment de tirailleurs), a été remis en marche par des
équipages de l'AS n°2 (artillerie spéciale n°2). Sous les regards amusés de leurs
camarades, l'équipage français fait rouler le char allemand recouvert de graffitis
réalisés par les soldats alliés.
TC 00:08:05 TC 00:10:14 TC 00:11:36
Photogrammes extraits du film
Escadrille des Cigognes ; le char Elfriede de Villers-Bretonneux, mai 1918.
Noir et blanc, muet, caméraman Renard, durée 9 mn 42 sec/© ECPAD