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Le capital-risque aux Etats-UnisBernard Paulr
To cite this version:Bernard Paulr. Le capital-risque aux Etats-Unis : Structure et volution du systme. Rapporteffectu dans le cadre dune convention avec lInstitut CDC. 2003.
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Le capital-risque aux Etats-Unis
Structure et volution du systme
1959-2001
Bernard PAULRE
MATISSE ISYS UMR Paris 1 C.N.R.S. n 8595
Universit Paris 1 Panthon Sorbonne
Paris, dcembre 2003
Recherche effectue dans le cade dune convention avec CDC Institut
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Table des matires
Remerciements ......................................................................................................................................5
Rsum..................................................................................................................................................7
Avertissement........................................................................................................................................9
Introduction : Position des problmes ................................................................ 11
Le capital-risque comme objet dtude .................................................................................................11
Le capital-investissement (Private equity) aux Etats-Unis
dans les annes quatre-vingt dix et la place du capital-risque...............................................................18
Annexe 1 : Caractristiques de la base Venture Expert ........................................................................25
Annexe 2 : Rapprochement des valuations de quelques agrgats relatifs au
capital-investissement ...........................................................................................................................26
Annexe 3 : Le cycle du capital-investissement .....................................................................................30
Chapitre 1 : Le systme de capital risque et sa structure
Problmes mthodologiques et caractristiques. ........................................ ....... 31
Section 1 - La notion de capital-risque et ses incidences
sur les valuations statistiques. Questions de dfinition et de mesure ....................................... ..........32
Section 2- Les acteurs et les oprations du systme..............................................................................49
Chapitre 2 - Le systme de capital-risque comme
systme de gestion de lincertitude. Mise en perspective.
Fonctionnement et comportements internes au systme..................................... 91
Section 1 Le systme de capital-risque comme systme de gestion de lincertitude.
Orientations de recherche........................................................................................................... ..........92
Section 2 Incertitude stratgique et rgulation des comportements ........................................ ..........95
Section 3 Les sorties...........................................................................................................................102
Section 4 L'investissement en capital-risque d'origine industrielle dbouche-t-il
sur des comportements spcifiques ? ....................................................................................................120
Annexes au chapitre 2 ...........................................................................................................................133
Chapitre 3 - Lvolution du capital-risque aux Etats-Unis ......................... ....... 153
Section 1 - Approche quantitative et priodisation ...............................................................................154
Section 2 - Approche vnementielle....................................................................................................159
Section 3 Les facteurs de dveloppement du capital-risque...............................................................166
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Section 4 - Approche sectorielle ...........................................................................................................172
Annexe au rapport : La Haute Technologie. Dfinition et approche
statistique............................................................................................................. 179
Elments bibliographiques .................................................................................. 185
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Remerciements
La recherche lorigine de ce rapport sinscrit dans le cadre dun contrat liant, pour
I.SY.S. M.A.T.I.S.S.E. (U.M.R. de lUniversit Paris I - C.N.R.S. n 8595), le C.N.R.S.
et lInstitut C.D.C. de la Caisse des Dpts et Consignations.
Nous remercions plus particulirement Isabelle Laudier, responsable de lInstitut CDC
pour la Recherche, de nous avoir permis de raliser cette tude. Nous avons apprci
notamment sa patience et lattention quelle a porte notre travail.
Nous remercions galement Albert Ollivier, Directeur des PME et de lInnovation (CDC),
Prsident de CDC PME, et Patrick Artus, Directeur Economique de la Caisse des Dpts
IXIS, de nous avoir apport leur soutien.
Nous avons bnfici des observations et des suggestions de M. Pascal Lagarde et de
Melle Isabelle Bebear, de la Direction des PME et de l'Innovation (CDC). Nous les en
remercions.
Cette recherche naurait pas pu tre entreprise et mene bien sans laccs aux bases de
donnes de la socit Thomson Financial Data. Nous sommes reconnaissants pour leur
aide et leurs conseils David Sanchez, Alexis Biancospino et Alexandre Diallo du bureau
parisien de cette socit.
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Rsum
Sur une priode longue de trente annes, lvolution du capital-risque aux Etats-Unis est
caractrise par une monte en puissance progressive marque par quelques cycles
mineurs et dbouchant sur un cycle dune amplitude relative considrable entre 1995 et
2001. A partir des donnes primaires tires de la base de donnes Venture Expert et de
traitements originaux, nous apportons des lments dinformation quantifis sur
lvolution du systme de capital-risque aux Etats-Unis et, notamment, sur certains
aspects de sa structure : place de lintervention des groupes, types de fonds, places
relatives du capital-risque et du capital-transmission, structure sectorielle des
investissements, dlais sparant les diffrents tours de table, nature et caractristiques des
sorties etc.
Un certain nombre de rgles et de normes ont jou un rle important dans le
franchissement dtapes significatives du dveloppement du systme de capital-risque.
Des vnements exognes galement (taxation des gains en capitaux, rgles prudentielles
des Fonds de pension notamment). Ces lments ont eu vraisemblablement un rle plus
important que lvolution conjoncturelle. Cest parce que le systme tait en place et
bien structur ds le dbut des annes quatre-vingt quil a pu occuper la place qui a t
la sienne durant les annes quatre-vingt dix. Dans une perspective dynamique et
historique nous fournissons les lments permettant de justifier la thse selon laquelle le
systme capital-risque est un systme dont lmergence traduit un phnomne
dauto-organisation.
Dans cette tude nous mettons mal limage banale du capital-risque prsent comme
rserv au financement de socits trs jeunes ou en cours de cration dans des secteurs
de pointe. Nous approfondissons galement sa dimension industrielle. Nous mettons en
vidence les trajectoires de certains secteurs et soulignons les enchanements de cycles
technologiques qui caractrisent la dynamique de longue priode du systme. La
rpartition des investissements en capital-risque entre secteurs de haute technologie les
autres secteurs est galement approfondie.
Ltude comprend trois chapitres. Dans le premier nous rendons compte de la structure du
systme partir de certains ratios et de lvolution de quelques grandeurs agrges. Nous
analysons plus particulirement les caractristiques de lactivit des acteurs du systme :
les investisseurs, les Fonds, les socits de capital-risque et les compagnies bnficiaires.
Nous insistons sur les difficults mthodologiques dapprciation de ces caractristiques.
Dans le second chapitre nous mettons en perspective le fonctionnement du systme de
capital-risque en soulignant son rle comme systme de gestion de lincertitude. Nous
approfondissons certains aspects de son fonctionnement qui illustrent cette dimension
ainsi que les interfaces entre ce systme et la sphre industrielle. Nous soulignons la
monte en puissance des sorties par acquisition alors que lon voque le plus souvent les
sorties par introduction en bourse. Nous fournissons quelques arguments statistiques
tendant montrer que le comportement des groupes industriels, lorsquils investissent en
capital-risque, est analogue celui des Fonds privs indpendants. Dans le troisime et
dernier chapitre, nous abordons le systme de capital-risque sous langle de la dynamique
longue et des fluctuations.
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Avertissement
Ltude du capital risque aux Etats Unis est intressante et instructive pour un ensemble
de raisons assez varies que nous voquons dans lintroduction ce document.
Lune de ces raisons, rarement sinon jamais voque notre connaissance, au moins
dans les milieux acadmiques, tient au dveloppement de ce quon appelle le
capital-investissement, cest--dire le financement en capitaux propres de socits non
cotes. Cest le capital-risque qui fut la premire manifestation dune activit de
capital-investissement organise. Et pendant une dizaine dannes le
capital-investissement se confond, pour sa partie organise ou professionnelle, avec le
capital-risque. Puis arriva le capital-transmission (buyout) qui, certaines annes, en vint
reprsenter plus de 50 % du capital-investissement.
Aujourdhui celui-ci occupe une place trs importante aux Etats Unis. En 2000 il
reprsentait 140 milliards dinvestissement. Grandeur que lon peut, pour situer lordre
de grandeur, rapprocher du total des crdits la consommation (134,7 milliards en 2000 1) et qui reprsente un peu moins du tiers de lensemble des prts aux petites entreprises
qui slevait 437 milliards de dollars en 2000 2.
Lun des objectifs de la recherche lorigine de ce document est de produire une vision
statistique assez prcise du dveloppement et des caractristiques du
capital-investissement et du capital-risque amricain. Cet objectif est justifi par le fait
que nous avons accs lune des bases de donnes parmi les plus performantes sur ces
questions, savoir celle distribue par la socit Thomson Financial Data Securities (base
Venture Expert).
Nous pouvons ainsi prsenter dans ce rapport une vision densemble du systme du
capital-risque nord amricain et faire tat dinformations chiffres qui exploitent au
mieux la base de donne utilise. Celle-ci renfermerait la quasi-totalit des oprations de
ce type ralises aux Etats-Unis. Ce qui nest pas le cas pour les oprations effectues
hors Etats-Unis 3.
Bien entendu, malgr la prsentation de chiffres apparemment prcis, il convient
dinterprter une partie des informations fournies comme des ordres de grandeur. Mais
on peut considrer que les ratios et les rapprochements, brefs tous les ratios de structure
ou dvolution doivent tre assez fidles dune ralit pour laquelle nous ne disposons
videmment daucun lment de recoupement ou de comparaison mis part, videmment,
quelques autres bases de donnes concurrentes.
1 Cf. Flow of Funds Accounts of the United States, 1995-2000
2 On considre par convention que le prt aux petites entreprises (micro-business loans) est approxim par
lensemble des prts dun montant infrieur 1 million de dollars. 3 Voici ce quannonce la socit Thomson Financial dans lune des brochures de prsentation de la base
Venture Expert : Nous avons suffisamment dinformations sur les investissements en capital-risque pour
que lon puisse faire tat de linvestissement total aux Etats-Unis. Lactivit du reste du monde est
seulement disponible au mieux .
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La base de donnes Venture Expert fournit par ailleurs des informations sur deux
lments importants du systme de capital risque : dune part les sorties des socits de
capital risque et, notamment, les sorties par introduction en bourse, cest--dire, dans le
jargon des spcialistes les I.P.O. (Initial Public Offering), et les sorties par acquisition ;
dautre part les performances, en terme de rentabilit, des investissements effectus.
La plupart des chiffres et tableaux prsents dans ce rapport rsultent de la compilation
des donnes primaires fournies par la base de donnes. Ces compilations ont toutes t
effectues par lauteur de ltude. Nous nous dispenserons dsormais de rappeler
lorigine des chiffres dont il va tre fait tat.
Signalons une caractristique importante de la base de donnes : elle est actualise en
temps rel cest--dire en permanence. Cette actualisation intervient videmment le plus
pour les oprations rcentes. Mais il nest pas rare de constater que des chiffres
relativement anciens peuvent changer. Sauf arrter lhorloge , cest--dire
travailler sur ltat de la base un instant donn, on est conduit travailler sur des
chiffres fluctuants. Or, moins de stocker toute la base de donnes il est difficile de
garantir lhomognit parfaite de tous les chiffres utiliss. Le lecteur ne devra donc pas
stonner de constater certains dcalages entre des chiffres qui devraient normalement
avoir la mme valeur. Nous avons fait le maximum pour viter cet inconvnient qui nest
dailleurs pas totalement liminable 4.
Lun des objectifs poursuivis en entreprenant cette recherche tait de mettre en relation
les caractristiques et les performances des socits adosses du capital-risque avec les
innovations ventuelles quelles avaient ralises. Le temps consacr la matrise et la
comprhension de la base de donnes, joint au fait que cela nous a conduit soulever un
certain nombre de problmes statistiques non prvus (et difficilement prvisibles tant que
nous navions pas accs la base de donnes) nous a empch daller au bout de ce
projet. Par ailleurs, le couplage, que nous avions projet, de la base de donnes Venture
Expert avec une base de donnes sur les brevets, supposait des tests de faisabilit que
nous navons pu entreprendre suffisamment tt. Cet objectif nest toutefois pas
abandonn.
Le prsent rapport sinscrit donc dans le cadre dun programme de recherche plus vaste
qui porte sur lconomie de linnovation et qui se dveloppe au sein du laboratoire
I.SY.S.-MATISSE (Innovation SYstmes Stratgies) de lUniversit Paris 1 (UMR
C.N.R.S. n 919). Il prolonge au plan empirique la rflexion thorique dinspiration
volutionniste de son auteur et, notamment, lanalyse en termes dauto-organisation 5. Il
accompagne dautres tudes, passes ou en cours, sur le thme gnral de linnovation et
de ses manifestations sur le plan industriel 6.
4 Nous avons en effet le sentiment que toutes les parties de la base ne sont pas mises jour au mme
moment. Si bien que les dcalages semblent invitables. Plus particulirement laccs la base sur le mode
interactif (Venture Expert Web) et laccs sur le mode direct partir de requtes dinterrogation
personnelles donnent souvent des valeurs diffrentes. Nous avons privilgi laccs partir de requtes qui
permet de contrler prcisment la nature de linformation obtenue. 5 cf. B. Paulr, Lauto-organisation comme objet et comme stratgie de recherche. Lexemple de
lconomie industrielle, Mlanges en lhonneur de Jacques LESOURNE, Dunod, 2000 et Evolutionnisme
contemporain et auto-organisation, in numro spcial sur lEvolutionnisme contemporain en conomie,
Economie Applique, n 3, 1997. 6 Notamment : B. Paulr et alii, Le rachat de start up dans la haute technologie : Electronique, Pharmacie,
Biotechnologies, Ministre de lEconomie, des Finances et de lIndustrie, septembre 2002.
http://www.industrie.gouv.fr/biblioth/docu/dossiers/sect/f4b_startup.htm
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INTRODUCTION
Position des problmes
Le capital-risque comme objet dtude
Les raisons de sintresser au capital-risque et, notamment, au capital-risque
nord-amricain sont nombreuses. Certaines dentre elles sont de nature empirique. Elles
se rfrent soit au rle quaurait jou le capital-risque dans la croissance amricaine des
annes quatre-vingt dix, soit son importance quantitative. Dautres ont un caractre plus
thorique et consistent sinterroger sur la nature des comportements ou des stratgies
spcifiques qui ont cours dans ce qui peut tre prsent comme un compartiment
relativement nouveau du systme financier nord-amricain.
Dun point de vue empirique, la raison majeure tient sans doute au fait que depuis le dbut
de annes quatre-vingt dix on est convaincu, encore plus quauparavant, du rle des
nouvelles entreprises dans la croissance et, notamment, dans la cration nette demploi.
Mme si lhypothse du rle essentiel des petites entreprises dans la cration demplois
est contestable (Davis, Haltiwanger et Schuh, 1996 p.e.), elle demeure toujours la plus
commune. Les rfrences en sa faveur sont extrmement nombreuses. Elles concernent
aussi bien les Etats Unis (Davis et alii, 1996), que la Grande-Bretagne (Konings, 1995 ;
Robson et Gallagher, 1994) ou, globalement, les pays de lO.C.D.E.
Le rle des nouvelles entreprises dans la croissance peut tre justifi, entre autres raisons,
par le fait que linnovation, qui est un facteur important de la croissance, est troitement
dpendante de lexistence dun secteur entrepreneurial dynamique. Le discours rcent sur
la Nouvelle Economie (New Economy) intgre gnralement lide que les jeunes
entreprises innovantes (les start ups 7), ont jou un rle dterminant dans lvolution
industrielle et la croissance des Etats-Unis dans les annes quatre-vingt dix. Les succs de
socits comme Genentech, Federal Express, Microsoft permettent dillustrer le propos,
mais on peut avoir une ide un peu plus prcise des relations entre innovation,
dveloppement des jeunes entreprises innovantes et performances macro-conomiques
partir de quelques analyses trs rcentes.
Une tude conduite par le W.E.F.A. (Wharton Econometric Forecasting Associates) pour
le compte de la National Venture Capital Association des Etats Unis, dont les premiers
rsultats ont t publis en mai 2001, montre que les entreprises nord amricaines
soutenues dans le pass par le capital-risque sont lorigine de 4,3 millions de nouveaux
emplois et reprsentent aujourdhui elles seules 3,3 % de lemploi total du pays
(N.V.C.A., 2001). Elles ont gnr 736 milliards de dollars de chiffre daffaires et sont
lorigine de 7,4 % du PNB en 2000. Certes, il est difficile de savoir ce qui se serait pass
si le capital-risque navait pas t aussi dvelopp et quel anti-monde aurait vu le jour.
Mais il est vraisemblable quune part non ngligeable des performances mesures est
imputable au capital-risque et aux concours apports de jeunes entreprises innovatrices.
Une recherche conomtrique sur linfluence du capital-risque dans le dpt de brevets
propose une estimation quantitative de son rle (S. Kortum et J. Lerner). Selon cette tude, 7 Nous utilisons ici (dans cette page) lexpression start up dans son sens vulgaire (jeune entreprise
innovante) et non dans le sens technique et restreint quil a dans le contexte du capital-risque o il dsigne la
seconde phase du dmarrage, cest--dire une phase caractrise par la mise en dveloppement du produit et
le dmarrage du marketing (cf. plus loin).
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portant sur vingt secteurs suivis sur trente ans, le capital-risque serait lorigine de 8 %
des innovations apparues dans la dcennie 1982-1992. Compte tenu de la croissance du
capital-risque depuis 1992 et si lon fait lhypothse que la propension relative innover
des petites entreprises soutenues est reste identique, on peut supposer que le
capital-risque est aujourdhui lorigine de 14 % des innovations
La remise au premier plan de la figure de lentrepreneur via laccent mis sur les
entreprises nouvelles voque videmment les thses du premier Schumpeter, celui de
lEvolution conomique. La pense de celui-ci avait en effet connu un inflchissement
dans les annes trente qui lavait conduit privilgier linnovation via les laboratoires des
grandes entreprises et relativiser linnovation ralise loccasion de la cration dune
entreprise nouvelle 8
. Cest dans son dernier ouvrage, Capitalisme, Socialisme et
Dmocratie, que Schumpeter avait t amen sinquiter des risques de
bureaucratisation de la recherche dans les grandes entreprises et y voir lun facteurs du
dprissement futur du capitalisme.
Or le dveloppement de linnovation dans les annes quatre-vingt dix aux Etats-Unis
nous conduit formuler une autre conception des places relatives de la petite et de la
grande entreprise dans le dveloppement technologique de lindustrie amricaine. Cette
conception est celle dune complmentarit et dune sorte dhybridation des deux
modles polaires initiaux. Si lon peut observer lexistence dun secteur
entrepreneurial dynamique et prospre dbouchant sur la constitution dacteurs
industriels de premier plan venant parfois supplanter les entreprises anciennes, on
nassiste pas pour autant la disparition systmatique des leaders en place. Certains
dentre eux parviennent en effet inscrire leur dveloppement dans les courses
technologiques nouvelles et grer les mutations ncessaires pour renouveler leur
potentiel de faon maintenir peu prs leur rang.
Le renouveau technologique des groupes leaders en place ne se fait pas toujours grce
leur potentiel de recherche et dinnovation propre mais repose fortement sur lacquisition
de technologies nouvelles partir de fusions ou acquisitions, dalliances ou dachats de
licences. Non seulement le rebond des groupes leaders menacs est possible mais, surtout,
il se ralise entre autres manuvres, partir du rachat de jeunes entreprises dtenant ou
contrlant des technologies cls ou des produits davenir. Ce phnomne est relativement
nouveau. Il permet dobserver, au passage, que la critique du "non invent chez nous"
(not invented here) nest plus dactualit, en principe du moins.
Si ce type de manuvre contribue lintgration de technologies nouvelles par les
groupes en place, il permet, surtout, de pratiquer un renouvellement rapide. On peut
formuler lhypothse dune certaine substituabilit entre les dpenses ddies la R&D et
les oprations dacquisitions de jeunes entreprises innovantes ou de moyennes entreprises
rcentes.
On notera au passage que ces manuvres dacquisition nont pas seulement un effet priv.
Elles ont aussi, selon nous, un effet public ou collectif dans la mesure o la mise en
uvre des innovations par des grands groupes permet des innovations de se dvelopper
de faon plus saine, plus rapide et sans doute plus efficace que si elles devaient compter
uniquement sur les forces des jeunes entreprises qui les ont produites. Ce gain collectif
doit cependant tre relativis partir des situations concurrentielles qui prvalent (i)
8 On utilise lexpression Schumpeter II pour dsigner cette deuxime phase de la pense de
Schumpeter.
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lorsque linnovation est ralis par un grand groupe et, (ii) si linnovation est assure par
lentreprise mme qui est lorigine de celle-ci.
Cette vision semble aller lencontre de la notion de destruction cratrice. Elle se heurte
surtout une certaine interprtation, que nous jugeons radicale et excessive, de cette
notion. Considrer que des entreprises et des secteurs nouveaux remplacent et vincent
les entreprises et les secteurs anciens, que des activits nouvelles viennent simplement se
substituer des activits anciennes est une interprtation manichenne. La ralit nous
parat plus complexe, mlant adjonction dactivits et dentreprises nouvelles,
renouvellement dactivits anciennes, mutations plus ou moins profondes dentreprises
ou de secteurs anciens etc. Pour cette raison au moins, un point de vue volutionniste
nous parat prfrable une vision privilgiant les ruptures et les substitutions sches .
Cette mise en perspective nous conduit porter une attention particulire lintervention
des groupes industriels dans le capital-risque (Corporate venturing). Car non seulement
les grands groupes rachtent de jeunes entreprises dont la technologie semble
prometteuse mais, de plus, ils interviennent frquemment par des investissements en
capital-risque. Oprations quils ralisent en direct ou via des Fonds.
Un autre aspect de lapproche Schumptrienne que lon retrouve dans les
proccupations contemporaines centres sur les entreprises innovatrices nouvelles est
celui de leur financement. Ltude des facteurs de linnovation conduit en effet tout
naturellement sinterroger sur les facteurs dordre financier dont dpendent la cration
et le dveloppement initial des entreprises nouvelles.
On sait que les petites entreprises se heurtent des obstacles ou des contraintes
spcifiques (cf. p.e. Petersen et Rajan, 1994). Leur endettement est plus souvent de court
terme que de long terme. Sur un plan plus thorique, les cots dagence ou les
imperfections du march financier peuvent ainsi expliquer un moindre recours au
financement externe. Lon observe dailleurs une relation ngative entre lge des
entreprise (ou leur profitabilit) et le levier financier. Cest une autre raison de
sintresser au capital-risque. Non pas dans son aspect rel cest--dire dans sa
capacit engendrer une offre industrielle nouvelle, mais dans son aspect proprement
financier. Le capital-risque est en effet, en partie, une industrie financire. On peut
considrer que cest lun des secteurs du systme financier national 9.
Or ds que lon se concentre sur les aspects financiers et sur les caractristiques
financires de fonctionnement de la Nouvelle Economie aux Etats-Unis dans les annes
quatre-vingt dix, un phnomne original attire lattention : le formidable dveloppement
de ce quon appelle aujourdhui couramment le capital-investissement, partie du systme
financier centre sur le non cot, et dont relve le capital-risque. La monte en puissance
du capital-investissement est lune des caractristiques importantes de la Nouvelle
Economie, en dsignant simplement par l la priode de croissance particulire de
lconomie U.S. entre 1995 et 2000. Elle mrite dautant plus dtre souligne que lon
associe souvent Nouvelle Economie et dveloppement des marchs financiers. Or mme
si cela peut paratre paradoxal, on doit constater, avec la monte du
capital-investissement, le fort dveloppement dune finance que l'on peut considrer
comme hors march . En 2000 les financements raliss par des Firmes U.S. de
capital-investissement se sont levs presque 141 milliards de dollars.
9 Nous prfrons toutefois le prsenter comme se situant lintersection du systme dinnovation et du
systme financier (cf. chapitre 1, section 1).
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Dun point de vue plus thorique ou acadmique, ltude du financement des jeunes
entreprises innovantes par le capital-risque ou par le capital-investissement en gnral est
intressant pour une toute autre raison. Le monde des PME et du capital-investissement
est en effet, par opposition lunivers des Firmes cotes et du financement de march, un
monde opaque cest--dire un monde o linformation est trs imparfaite, les asymtries
importantes, et o lincertitude est leve. Ds lors, les comportements des acteurs
doivent tenir compte de cette opacit informationnelle et sy adapter. On doit donc
sattendre observer des comportements originaux, dune autre nature que ceux
observables sur les marchs publics . Les petites entreprises voluent dans des
marchs financiers trs imparfaits. Les aspects stratgiques des interactions entre les
acteurs constituent une dimension dterminante de leurs comportements.
Un autre enseignement que nous tirons de lmergence dun systme de capital-risque
organis et performant consiste souligner lexistence dun nouveau march de la
technologie qui largit le champ des stratgies technologiques accessibles aux Firmes et
aux groupes. Ce nouveau march associe dune faon originale : dune part ceux que lon
peut dsigner, de faon gnrique comme tant des concepteurs de technologies et/ou de
produits nouveaux et, dautre part, ceux que lon appellera des dveloppeurs ou des
exploitants 10
. Lacquisition de technologie prend, sur ce march, la forme de
lacquisition, par un groupe existant (le dveloppeur), dune compagnie (jeune entreprise
innovante, le concepteur) soutenue par des investisseurs en capital-risque. Ce march, o
schange des titres et le contrle de nouvelles entreprises, est celui des sorties par
fusions et acquisitions.
Jusqu prsent, la notion de march de la technologie tait utilise peu prs
exclusivement pour dsigner les transactions portant sur les licences dexploitation de
brevets. Ce march particulier de la technologie nest dailleurs pas dorigine rcente.
Daprs N. Lamoreaux et K. Sokoloff 11
, il aurait en effet merg au cours du XIXime
sicle. Cest, selon eux, la rforme du systme des brevets (le Patent Act de 1836) qui
serait lorigine dune plus grande facilit dchange dinformations brevetes, cette
facilit rsultant de lmergence, cette occasion, dun certain nombre dintermdiaires
(Conseils en brevets, juristes) grce auxquels le march de la technologie a pu
fonctionner de faon efficace. Mais il semble que ce march dchange des droits
dexploitation des brevets a quasiment disparu aprs les annes vingt, avant de renatre au
cours des deux dernires dcennies 12
.
Le nouveau compartiment du march de la technologie que constitue le march du
contrle des jeunes entreprises innovantes est plus rcent. La premire transaction de ce
type a lieu en 1978 et lanne 1988 est la premire anne au cours de laquelle un nombre
significatif de rachats de jeunes entreprises innovantes par des groupes est signal (10
acquisitions). On peut considrer que lmergence et la structuration de ce march est un
phnomne analogue celui de lmergence du march des licences au XIXime sicle. Il
sagit en quelque sorte, plus dun sicle aprs, dune seconde tape dans la structuration
dun march gnralis (mais compartiment) de la technologie.
10
Nous faisons allusion ici aux termes introduits par F. Pammolli et M. Riccaboni (2000): Originators et
Developers, mais dans un sens plus gnral puisque ces auteurs ne prennent en compte que les accords de
licence. 11
N. R Lamoreaux et K. L. Sokoloff, Inventive activity and the market for technology in the United States,
1840-1920, N.B.E.R., WP n 7107. 12
A. Arora, A. Fosfuri et A. Gambardella, Markets for technology and their implications for Corporate
Strategy, Industrial and Corporate Change, vol. 10, n 2, 2001.
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On observera au passage quun autre type de march de la technologie sest dvelopp
plus rcemment : il sagit du march de la recherche sur contrats. Selon le rapport de 1998
de la National Science Foundation, ce type de transaction saccrot de 43 % entre 1994 et
1995 aux Etats-Unis. Ce march est certes relativement ancien, mais ce nest qu partir
du milieu des annes quatre-vingt dix quil joue un rle significatif, son taux de
croissance devenant suprieur celui des dpenses de R&D internes. Si bien qu la fin
des annes quatre-vingt dix les diverses formes possibles dacquisition externe de
technologie semblent soumises une rgulation marchande, un march extensif de la
technologie tant mis en place.
Pour souligner limportance du capital-risque on peut aussi, quoique la comparaison soit
limite en principe 13
, rapprocher le financement quil reprsente annuellement du
montant des dpenses en R&D que finance lindustrie. En se fondant sur les donnes
fournies par la NSF (National Science Foundation) on peut calculer le ratio entre les
engagements annuels nouveaux en capital-risque et les dpenses de lindustrie consacres
chaque anne la R&D, ces deux grandeurs tant prises ici en dollars courants. On
constate que ce ratio, qui croit continment partir de 1991, dpasse les 10% en 1997 et
atteint en 2000 la valeur de 52,6%. Autrement dit, et en simplifiant le propos, la situation
observe en 2000 suggre que pour 2 dollars dpenss en R&D (donc pour innover), il y a
1 dollar dpens en capital-risque.
Unit en ordonne : millions de dollars
13
Les activits finances par le capital-risque ne peuvent pas toutes tres considres comme des
innovations technologiques donc comme tant comparables, voire substituables des dpenses de R&D.
0
50 000
100 000
150 000
200 000
250 000
300 000
1980
1981
1982
1983
1984
1985
1986
1987
1988
1989
1990
1991
1992
1993
1994
1995
1996
1997
1998
1999
2000
Dpenses totales de R&D
Dpenses totales de l'industrie finances par l'industrie
Engagements nouveaux en capital-risque
-
16
Lassimilation des phnomnes de sortie par fusion et acquisitions un compartiment du
march gnral de la technologie nest pas la seule manifestation dun processus de
marchandisation de la technologie ayant son origine dans le dveloppement du
capital-risque. Le processus amont de linnovation se trouve en effet organis, en
fonction des principes de fonctionnement du systme de capital-risque, sur des bases
contractuelles et quasiment marchande. Une fois institutionnalis et structur, le systme
de capital risque peut tre abord comme le lieu o se rencontrent une offre et une
demande de capitaux. Lchange est plus complexe toutefois car : (i) en fait dchange de
capitaux il sagit surtout dchange de droits de proprit et de parts dans une activit
entrepreneuriale et, (ii) il y a simultanment change de capitaux, apport de prestations et
de conseil, et une implication patrimoniale. Il nen demeure pas moins que limage du
march est de plus en plus applique au systme de capital-risque pour en caractriser la
logique de fonctionnement.
Nous ne discuterons pas ici du fait de savoir si la figure du march est la plus efficace
pour rendre compte, au plan thorique et conceptuel, du fonctionnement du systme de
capital-risque. Nous nous limiterons deux observations : (i) pour rendre compte, dans
une perspective dynamique, de lmergence et de lvolution du systme, la figure du
march se rvle limite ; lmergence de certains paramtres institutionnels jouant un
rle dterminant dans la structuration des comportements et des changes ne sexplique
pas sur la base de comportements marchands , do le recours une autre figure, ou
un autre principe dinterprtation, celui de lauto-organisation ; (ii) si march il y a, il
sagit ncessairement dun march particulier compte tenu du caractre qualitatif et
complexe (multidimensionnel) des changes. Il nen demeure pas moins que
lassimilation du systme de capital-risque un march est devenue relativement
courante et qu certains gards elle peut fonctionner .
Non constatons donc bien que, de plusieurs points de vue, empiriques aussi bien
thoriques, rels que financiers, le capital-risque nord amricain mrite dtre
prcisment tudi. Mais le sujet nest gure nouveau si lon en juge par le nombre dj
lev dtudes qui lui ont dj t consacres. Cest dire que nous nentendons pas ici
proposer une synthse supplmentaire venant sajouter aux tudes existantes. Dans le
prolongement de lnonc de quelques unes des raisons qui justifient ltude du
capital-risque, nous allons privilgier quelques aspects qui nous paraissent originaux :
Part des engagements en capital-risque
/ dpenses en R&D de l'industrie finances par l'industrie
0,00%
10,00%
20,00%
30,00%
40,00%
50,00%
60,00%
1980
1981
1982
1983
1984
1985
1986
1987
1988
1989
1990
1991
1992
1993
1994
1995
1996
1997
1998
1999
2000
-
17
1- limportance et le rle du capital-investissement,
2- la mise en perspective du capital-risque dun double point de vue : dun point de vue
statistique dabord ; du point de vue de lmergence de ses caractristiques principales
ensuite,
3- lanalyse des sorties (exits),
4- lanalyse de la place des investissements en capital-risque effectus par des groupes
industriels et de leur comportement dans ce domaine.
Notre tude du capital-risque amricain repose sur une problmatique qui est la suivante :
le capital-investissement, dont le capital-risque est llment le plus important, peut tre
conu comme un systme cest--dire comme un ensemble dacteurs lis par certaines
relations et interagissants partir de leurs comportements et en fonction de certaines
contraintes. Ce systme napparat pas spontanment et immdiatement dot de la
structure et de lorganisation la plus efficace ou, du moins, de celle que nous lui
connaissons aujourdhui. En dautres termes, ce systme merge progressivement et
sauto-organise . Par quels mcanismes, sous linfluence de quels facteurs et des
dcisions de quels agents son organisation actuelle sest-elle mise en place et stabilise ?
Telle est lune des questions que nous poserons. Cet aspect sera davantage voqu dans le
second et le troisime chapitre de ce document.
Le systme de capital-risque comme systme auto-organis
Selon la premire dfinition connue de cette notion, on dit dun systme quil est
auto-organisateur sil modifie sa structure de base en fonction de son exprience et de
lenvironnement (M. C. Yovits, 1962). Plus explicitement, on caractrise les systmes
auto-organiss en fonction de leur capacit faire merger des processus locaux une structure
globale qui savre ainsi ni impose autoritairement par une instance suprieure, ni labore
dlibrment par les lments de base (B. Walliser, 1989). Ces dfinitions sont discutables mais
suffisent ici (B. Paulr, 2000).
Le principe de lapplication dune approche auto-organisationnelle la dynamique
institutionnelle des marchs a t pos initialement par J. Lesourne qui observe : Au cours de
son histoire et en fonction de celle-ci, un march peut susciter la cration dintermdiaires,
llaboration dopinions et de thories, la constitution de syndicats, la concentration de lappareil
productif, la naissance de nouveaux produits, la formation de travailleurs plus qualifis,
lmergence de nouveaux marchs. En dautres termes, linteraction entre les agents dans le
cadre du march est susceptible dengendrer de manire endogne toute une gamme
dinstitutions (ital. de J. L., J. Lesourne, 1991).
Nous nous loignons de lanalyse dveloppe par J. Lesourne pour la raison que dans son
approche il suppose quun march, fut-il simple, existe dj, et quil centre son attention sur ses
volutions cest--dire ses transformations, lesquelles peuvent se manifester par la cration de
nouveaux rles ou acteurs. Nous sommes plus attentifs lvolution qui fait que le systme, dun
tat peu ou mal organis (au point quil peut paratre non pertinent dutiliser la figure du march
pour en caractriser le fonctionnement), volue vers une structuration qui va permettre ses
acteurs davoir des comportements plus rationnels et sengager dans des interactions dont la
logique relve plus nettement de celle du march. En sengageant dans cette perspective nous
sommes plus proche du type de problmatique dveloppe par D. North par exemple (1990). Mais
nous nous en cartons sur un autre point, qui concerne le rle jou par les cots de transaction et
de production dans lmergence des institutions.
Notre approche est la suivante : la structure dun systme peut tre considre comme quasiment
acheve lorsque, au terme dun certain nombre dinnovations institutionnelles (en un sens large),
les acteurs peuvent inscrire leurs actions dans un cadre contractuel quils considrent comme
-
18
juste, suffisant et pertinent et dont ils acceptent les obligations quelles que soient les circonstances
dans lesquelles ils se trouvent 14
. Cela nimplique pas une notion dquilibre telle que lentendent
les conomistes. Ainsi, comme lobserve O. Hart, les arrangements institutionnels sont conus
pour allouer du pouvoir entre les agents (1995).
Dans le cas du systme de capital-risque, linnovation institutionnelle que constitue le partenariat
limit (Limited Partnership) est lun de ces lments institutionnels qui contribue en
achever la structuration. Cest bien dun problme de pouvoir dont il sagit puisque cest
partir de laffaire Fairchild, dans laquelle les inventeurs avaient t privs de leur capacit de
garder un contrle partiel de lentreprise, quun nouveau type darrangement contractuel a t mis
au point afin que les pouvoirs et les droits patrimoniaux des inventeurs et des investisseurs soient
mieux rpartis.
Lautre originalit que nous revendiquons est dordre statistique. Nous allons en effet
proposer une analyse de lvolution du capital-risque nord-amricain qui sappuie, au
plan quantitatif, sur la base de donnes la plus complte dont on puisse disposer sur le
domaine : la base Venture Expert, commercialise par la socit Thomson Financial
Securities Data. Nous suggrons au lecteur de cette note de prendre connaissance de
lAnnexe 1 de la prsente introduction consacre la prsentation des caractristiques de
cette base. Cela devrait lui permettre de mieux interprter les diverses informations
chiffres dont allons faire tat, et dtre averti de certaines nuances.
Le capital-investissement (Private equity) aux Etats Unis dans les annes quatre-vingt
dix et la place du capital-risque
Le capital-investissement rassemble les activits par lesquelles des investisseurs
apportent des capitaux propres des entreprises non cotes en bourse. Il soppose donc au
capital cot (public equity). Lappel au capital-investissement peut rpondre des besoins
varis : dvelopper de nouveaux produits ou de nouvelles technologies, crer une
entreprise, financer des acquisitions ou renforcer le bilan dune socit. Ce type de
financement peut tre galement mobilis pour rsoudre des problmes de caractre
patrimonial : permettre la ralisation dune succession dans le cas dentreprises familiales
ou permettre une quipe de dirigeants, internes ou externes lentreprise, den prendre
le contrle ou dacqurir une division (Buy in ou buy out).
Lvaluation globale du financement fourni par le capital-investissement est dlicate pour
la simple raison quune part significative en est ralise par des agents non institutionnels
et/ou par des agents non soumis des obligations de publicit strictes sur ce type
dactivit. Deux tentatives dvaluation globale du capital-investissement nord amricain
sont disponibles.
Dans une tude publie en 1995, des statisticiens de la Federal Reserve ont estim le
niveau cumul des financements effectifs en capital-investissement jusquen 1994 100
milliards de dollars (G. W. Fenn et alii, p. 2). Ils soulignent la progression spectaculaire
de ce march : Sur les quinze dernires annes, ce march du financement des
entreprises a t celui dont la croissance a t la plus rapide devant les autres marchs
comme le march public des titres, le march obligataire et le march de la dette prive.
Aujourdhui le march du non cot reprsente grossirement un sixime du march des
crdits des banques commerciales et du papier commercial en terme cumul. Dans les
annes rcentes le capital lev par les partenaires a rejoint, et parfois dpass les fonds
14
Il faudrait ici se rfrer la notion de structure oprationnelle telle quelle est prsente par J. Piaget.
-
19
levs loccasion des I.P.O. et les missions brutes des obligations publiques haut
rendement (p. 1).
Lvaluation prsente concerne uniquement ce quils appellent le march organis
du capital-investissement cest--dire les investissements en fonds propres effectus par
des gestionnaires professionnels. Ceux-ci sont les reprsentants des intermdiaires
spcialiss ou des investisseurs institutionnels : Les gestionnaires de placements en
fonds propres privs acquirent une part importante de la proprit et jouent un rle actif
dans le contrle et lassistance des compagnies en portefeuille. Dans bon nombre de cas
ils exercent un contrle quivalent celui exerc par les responsables appartenant aux
compagnies, et mme suprieur (p. 2). Le montant cumul des investissements du
capital-investissement organis est constitu, en 1994, selon les estimations des auteurs,
30 % par des investissements de type capital-risque, et 70 % par des investissements
autres que de capital-risque.
Selon Fenn et alii, , dans son acception largie, le capital-investissement rassemble, en
plus de sa partie organise : (i) les investissements des anges des affaires (business
angels), (ii) un march informel (informal capital-investissement market) et (iii) le
march du capital-investissement de la rgle 144A suscit par un rglement de la S.E.C.
autorisant certaines catgories dinvestisseurs institutionnels a dtenir et changer
librement des titres privs (pp. 2-3).
Dans une tude suscite par une interrogation dune autre nature, T. J. Moskowitz et A.
Vissing-Jorgensen adoptent un point de vue que nous pouvons qualifier
dintentionnellement exhaustif, du capital-investissement. Ils y incluent en effet la part du
capital priv dtenu par les mnages. Le montant du capital-investissement investi dans
des socits est estim par eux 6,9 trillions de dollars en 1998. Compte tenu dune
valuation du capital dtenu par les mnages dans des actifs industriels autres que des
socits (non corporate business) 5,3 trillions, le capital-investissement total serait, en
1998, de 12,2 trillions de dollars. Ces valuations sont des estimations aux prix du march
et non des financements cumuls.
Cette approche nous carte lgrement de notre propos mais est instructive car elle
permet dapprcier les volutions relatives du capital-investissement et du capital cot
(private et public equity). On observe en effet que sil continue tre suprieur au capital
cot ( partir de lacception trs englobante retenue), le capital-investissement, pris ici
dans son sens le plus large possible, progresse toutefois moins rapidement que celui-ci.
Revenons la conception troite ou stricte du capital-investissement, la seule que nous
retiendrons dornavant. Selon cette acception, le capital-investissement rassemble les
quatre activits de financement suivantes :
1- le capital-risque qui rassemble les activits de financement destines crer, assurer le
dveloppement initial ou soutenir la croissance dune entreprise nouvelle,
2- le capital-transmission qui dsigne les investissements en fonds propres dans des
entreprises ou des divisions confrontes de mauvaises performances, pour en permettre
le rachat par un groupe de dirigeants,
3- Le financement en Mezzanine qui peut accompagner lun des financements prcdents
et intervient plus tard, en particulier lorsque lentreprise sapprte tre introduite en
bourse,
4- Dautres financements reprsentant un montant global assez mineur : Fonds de Fonds
etc.
-
20
Source : T. J. Moskowitz et A. Vissing-Jorgensen Les pourcentages reprsentent les taux annuels de variation relative
La question prliminaire que nous devons maintenant aborder porte sur les places
respectives du capital-risque et du capital-transmission notamment dans le
capital-investissement global. Pour cela nous pouvons nous reporter la base de donnes
Thomson Financial Data. Nous avons dans un premier temps retenu comme critre les
engagements effectus par les Fonds dinvestisseurs US, cest--dire les sommes que les
investisseurs se sont engags investir. Ce qui donne une ide du niveau dactivit
notionnel du capital-investissement et de ses diverses composantes. Chaque Fonds a en
effet une spcialisation, ce qui signifie que ses investissements sont orients vers un type
particulier de compagnie ou de situation. On distingue les Fonds qui investissent de faon
privilgie en capital-risque, ceux qui investissent en capital-transmission puis les autres
(Fonds mezzanine, Fonds de Fonds). Ces engagements sont associs lanne de
cration du Fonds (cf. graphiques 1 et 2 plus bas)15
.
On constate que :
1- le capital-investissement, calcul de cette faon, reprsente, en montant cumul des
engagements annuels, depuis 1962 16
, une somme de 1035,4 milliards de dollars.
2- sa croissance a t extraordinairement rapide jusquen 2000. Le flux annuel
dengagements tait encore de 8,7 milliards en 1986. Le cap des 20 milliards est franchi
en 1992. Celui des 30 milliards en 1994 (36,7 milliards) ; celui des 40 milliards en 1995 et
des 80 en 1997 (88,7 milliards). On en tait 214 milliards en 2000. Le taux de croissance
moyen annuel du flux dinvestissement sur 20 ans (1980-2000) est de 24,3 %. Sur les dix
dernires annes, il est de 14,5 %. Certes, on a constat une baisse sensible en 2001 (de
43 %) ramenant le montant total des engagements 122,4 milliards. Le rythme actuel
pour lanne 2002 laisse entrevoir, dans ltat actuel des informations, un dbit de 22
milliards environ, soit une baisse considrable, de prs de 82 % par rapport 2001. Ce qui
nous ramne aux niveaux des annes 1992 ou 1993 (20 et 25,4 milliards respectivement).
Il est clair que 2000 aura t lacm du dernier cycle du capital-investissement et, plus
particulirement, du capital-risque (cf. troisime chapitre du rapport).
3- la croissance des engagements des Fonds orients vers le capital-risque sacclre
partir de 1994, aprs un point bas atteint en 1991 (3,1 milliards). Les 10 milliards sont
dpasss en 1995. Les 20 milliards en 1997 (22,6 milliards). En 2000 les engagements
des Fonds de capital-risque slvent 103,8 milliards avant de retomber 39,5 milliards
15
Nous soulignons : il ne faut pas confondre engagements et investissements. Les deux sont diffrents
conceptuellement. Empiriquement, les investissements suivent les engagements dans le temps (entre 1 et 4
ans), et les investissements sont structurellement infrieurs aux engagements. 16
Jusqu octobre 2002.
trillions $ 1989 1992 1995 1998
5,773 6,424 8,448 12,251
11,3% 31,5% 45,0%
2,075 2,829 4,436 8,523
36,3% 56,8% 92,1%
private
equity (sens
large)
public equity
Estim ation de la va leur de m arch
-
21
en 2001 puis atteindre, vraisemblablement, un montant de lordre de 6,6 milliards en
2002. Le montant cumul des engagements de ces Fonds depuis 1962 slve 372,3
milliards de dollars.
4- la part du capital-risque dans le capital-investissement a fortement diminu entre 1972
et 1987. Le capital-risque passe dune situation dexclusivit une priode dmergence
puis de forte concurrence du capital-transmission. Aprs avoir atteint un minimum absolu
en 1987 (19,1 % du total des engagements en capital-investissement), cette part slve,
en 1990, 25,7 % et atteint 48,5 % en 2000. Si lon ne considre que lensemble
[capital-risque + capital-transmission], le premier repasse devant le second en 1999, mais
ds 2001 les engagements des Fonds de capital-transmission sont suprieurs ceux des
Fonds de capital-risque. En 2002 la proportion est de 38,5 % c. 61,5 %.
Lvolution de la rpartition du capital-investissement entre capital-risque et
capital-transmission apprcie partir des engagements des Fonds US fait assez
clairement ressortir quatre priodes (cf. graphique ci-aprs p. 13) : (i) la priode qui va de
1962 1972 caractrise par la prsence exclusive du capital-risque, (ii) la priode
1972-1987 marque par une dcroissance de la part du capital-risque, (iii) la priode
1987-1994 caractrise par des fluctuations faisant voluer la part du capital-risque dans
une bande borne par les valeurs 32 % (31,95 % en 1989) et 20 % (20,8 % en 1994), (iv)
la priode 1995-2002, constituant un cycle dont lacm se situe en 2000 (part du
capital-risque : 48,5 %).
Si lon retient comme critre dvaluation le montant des dbours effectus au profit de
compagnies US, et non plus les engagements, nous obtenons pour le
capital-investissement dans son ensemble un montant cumul de 510 milliards de dollars
pour la priode 1962-oct. 2002, dont 91 milliards rien que pour la priode 1980-1994. On
peut rapprocher ce dernier chiffre de lestimation avance par Fenn dans son rapport de
1995 (100 milliards). Le montant des dbours en capital-risque slve, en cumul
jusqu ce jour, 335,6 milliards et, pour la priode 1980-1994, 46,1 milliards. Cette
valuation est sensiblement diffrente de celle des statisticiens de la Fed puisque ceux-ci
valuaient le cumul des dbours en capital-risque 30 milliards. En octobre 2002, sur les
montants annuels cumuls depuis 1962, la part du capital-risque est de 34,2 % du total des
dbours 17
. Le rapport Fenn faisait tat en 1994, dun ratio de 30 %.
On constate que le montant cumul des dbours depuis 1962 est sensiblement infrieur au
montant cumul des engagements (510 milliards de dollars c. 1035 milliards). En ce qui
concerne le capital-risque on observe des valeurs plus proches (335,6 milliards c. 372,3
milliards). Au del des carts rsultant des diffrences dinformations disponibles entre
les deux sries, les valuations que nous venons de prsenter permettent de mettre en
vidence la diffrence dvaluation assez sensible entre deux faons daborder
quantitativement le niveau dactivit du capital-risque : dune part on peut retenir comme
critre dvaluation le montant des engagements des Fonds US si bien que, dans ce cas, la
rpartition entre capital-risque et capital-transmission porte sur la vocation affiche des
Fonds ; dautre part on peut prendre comme critre le montant des dbours cest--dire les
investissements effectifs dont ont bnfici des compagnies US, auquel cas le partage
entre capital-risque et les autres types dinvestissement se fait en principe sur la base du
stade de dveloppement de la compagnie soutenue ou de la situation et du problme dont
linvestissement doit permettre la rsolution18
.
17
Nous avons cumul ici lensemble des dbours effectus au profit de compagnies US se trouvant, au
moment du tour de table (round), dans lun des stades de dveloppement relevant du capital-risque. 18
Nous reviendrons sur les critres de mesure du capital-risque au dbut du chapitre 1 ci-dessous.
-
22
Lcart vient en partie de ce que la fonction des financements supports par les Fonds
peut tre en dcalage avec leur vocation reconnue 19
. Si lon se rfre aux statistiques
annuelles concernant les dbours, le creux de la part du capital-risque se situe en 1989
avec une part de 31,8 % des investissements totaux de capital-investissement. La mme
anne, la part des engagements des Fonds en capital-risque est quasiment identique
(31,9 %). Or, selon ce dernier critre, le creux est atteint en 1994 avec une part de
capital-risque value 20,8 % (et se maintient dans une zone 25-32 %), alors que la part
des dbours en capital-risque volue au mme moment dans une fourchette 42-60 % 20
.
Ce qui signifie, au niveau agrg, quune part importante du financement en
capital-risque est assure par des Fonds dont la vocation affiche est de faire du
capital-transmission. Un autre facteur explicatif tient au fait que, structurellement et de
faon agrge, les investissements effectifs sont infrieurs aux engagements (cf. plus
loin).
Les acteurs du capital-investissement sont prsents sur les diffrents compartiments qui le
composent. Ainsi, des Firmes de capital-risque interviennent aussi dans lautre grand
compartiment du capital-investissement, le capital-transmission. Et inversement, des
Firmes plutt spcialises dans le capital-transmission, interviennent galement dans le
capital-risque. Bref, les compartiments du capital-investissement ne sont pas
parfaitement tanches.
Cette absence dtanchit nest pas la consquence dune pure contingence et dun
comportement irrationnel des acteurs. En fait elle semble traduire, dans certaines
circonstances, linclination des grants de Firmes pour les placements les moins risqus,
ncessaires pour afficher une rentabilit susceptible dattirer de nouveaux apporteurs de
capitaux 21
. Or les placements les moins risqus, dans le domaine, sort ceux qui se situent
le plus en aval. Le capital-transmission en fait partie. Dans dautres circonstances, plus
favorables au capital-risque parce que le risque parat relativement moins important et/ou
que la rentabilit espre est sensiblement plus leve, des glissements soprent en
faveur de ce type dinvestissement. Dans le cadre de larbitrage rentabilit-risque
classique, on doit sattendre, globalement, ce quen priode moins risque, et aux
comportements stratgiques prs lis au statut des Firmes ou la rputation des grants,
le capital-risque prenne le pas, et quen priode plus incertaine ou plus instable, linverse
se produise.
Dun point de vue pratique, cela prouve que lanalyse du capital-risque ne peut pas tre
totalement spare de celle du capital-investissement. Dabord parce que, globalement, il
en est la composante majeure et mme historiquement constitutive. Ensuite parce que les
acteurs interviennent sur les divers compartiments du capital-investissement, en fonction
des circonstances et dobjectifs stratgiques apprcier. Cest une particularit qui joue
un rle dans la conception mme des mtiers lis au capital-investissement et leur
segmentation. Cest le premier point que nous aborderons dans le premier chapitre du
rapport. Enfin, on peut considrer que lensemble des activits relevant du
capital-investissement obit des contraintes et des logiques communes issues du fait
19
Lcart sexplique aussi par le fait que dans un cas nous privilgions la nationalit des compagnies
bnficiaires et, dans lautre cas, la nationalit du fonds dinvestissement. 20
Sur les montants cumuls nous observons galement une diffrence mais celle-ci est faible (34,1 % c.
36 %). Toutefois, il semble que ce faible cart global traduise une compensation entre une priode ou les
carts taient importants dans un sens (1960-1980) et une priode o ils taient significatifs dans lautre
(1987-1998). 21
Soulignons que le secteur du capital-investissement, est, sur le plan professionnel, cest--dire du point
de vue des grants des firmes de capital-risque, un secteur dans lequel la comparaison ou l'talonnage
(benchmarking) sont trs prgnants.
-
23
quil sagit dactivits mal informes, pour lesquelles les acteurs doivent supporter des
asymtries dinformation. Il sagit dactivits dailleurs peu rglementes, ce qui
explique la fois le risque qui leur est attach, les opportunits de gain quelles suscitent
et la varit des comportements concevables.
Nous pouvons faire une seconde observation propos du partage entre capital-risque et
capital-transmission. Le financement du capital-transmission (buyout ou buyin) est li
aux restructurations et aux rorganisations dentreprises ou de groupes. Ce financement
permet en effet des dirigeants dacqurir tout ou partie dune entreprise existante. Il
favorise donc les satellisations (spin off), les cessions dactivits considres comme en
dehors du cur de mtier (non core), la sortie de la cote et le passage au
capital-investissement dentreprises ou de divisions publiques . Trs gnralement, il
faut sattendre ce que le dveloppement des cessions suscites par le souci de rduction
de la taille (downsizing) et les restructurations industrielles entrane un besoin de
financement. Cet argument conduit penser que lvolution du capital-transmission (en
tant quinvestissement effectif, et non les engagements) doit tre normalement corrle
avec limportance des rorganisations et des restructurations dans les stratgies
industrielles. Cest bien ce que lon observe en ce qui concerne les engagements pour la
priode rcente. La part du capital-transmission dans les engagements totaux slve,
entre 1999 et 2002 de 31 % 47,4 % 22
. Cette orientation nest pas visible dans
lvolution des dbours puisque, aprs avoir diminu trs lgrement entre 2000 et 2001
(de 76,5 % 74,5 %), la part du capital-risque remonte 81 % en 2002 (sur les 9 premiers
mois), quoique sur des montants gaux 1/3 de ceux de 2001.
Finalement, le partage entre capital-risque et capital-transmission rsulte, au niveau
global, de trois variables dterminantes : (i) du niveau de risque peru, li la conjoncture
ainsi qu limportance des bouleversements technologiques en cours, sans doute
diffrents selon les secteurs ; (ii) de limportance des manuvres de rorganisation,
galement variable selon les secteurs et, (iii) des comportements stratgiques des
apporteurs de capitaux (Fonds) et des grants des Firmes.
22
Mais elle slevait dj presque 51 % en 1998 et aux alentours de 60 % entre 1992 et 1995.
0
20000
40000
60000
80000
100000
120000
1960
1962
1964
1966
1968
1970
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1976
1978
1980
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1984
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1996
1998
2000
2002
0,00%
10,00%
20,00%
30,00%
40,00%
50,00%
60,00%
70,00%
80,00%
90,00%
100,00%
Engagements des fonds orients vers le capital-risque Part dans les engagements totaux annuels
-
24
Unit en ordonne : millions de dollars
La dernire observation que nous voulons faire en introduction notre rapport concerne
la varit des sources dinformation disponibles et, plus prcisment, la diversit des
valuations chiffres fournies par ces sources. Pour ne pas alourdir le texte nous avons
plac en annexe cette introduction (p. 22) un tableau comparatif et rcapitulatif des
valuations fournies par quatre sources diffrentes sur quelques grands agrgats
concernant, pour les annes 1999 et 2000, les leves de fonds et les investissements en
capital-risque des deux grandes zones, USA et Europe, et de quelques pays :
Royaume-Uni, France et Allemagne. Les diffrences peuvent tre considrables. Cest
lun des facteurs qui est lorigine de notre recherche. Il nous a sembl indispensable
dessayer de lever lopacit des valuations fournies par divers organismes sur
limportance du capital-risque. Non pas tant pour fournir des valuations que nous
aurions la prtention de prsenter comme tant ncessairement meilleures que celles
fournies par les organismes dont nous avons repris les chiffres. Mais afin de comprendre
pourquoi lon pouvait tre conduit, mme lorsque lon dispose des informations
ncessaires, proposer des valuations ventuellement divergentes.
Ce souci dapprofondissement et de clarification statistique pourra paratre fastidieux au
lecteur. Mais il nous a sembl indispensable dy rpondre afin de fournir une image aussi
fidle que possible dune ralit que nous considrons finalement comme assez mal
connue, compte tenu des nombreuses difficults ou conventions qui conditionnent son
valuation. Cela va nous amener proposer une reprsentation que daucuns jugeront
floue compte tenu de la pluralit des indicateurs utilisables. Mais sagissant dun
phnomne multidimensionnel dont le fonctionnement se reprsente comme un cycle
(Annexe 3), il est naturel que lvaluation quon en propose soit diffrente selon lendroit
du cycle o lon se positionne.
0
20000
40000
60000
80000
100000
120000
1962
1964
1966
1968
1970
1972
1974
1976
1978
1980
1982
1984
1986
1988
1990
1992
1994
1996
1998
2000
2002
0,00%
10,00%
20,00%
30,00%
40,00%
50,00%
60,00%
70,00%
80,00%
90,00%
100,00%
Dbours au profit de Compagnies US se trouvant dans l'un des stades "VC"
Part des dbours au profit de Compagnies en phase "VC" dans les dbours totaux
-
25
Annexe 1
Venture Expert
Contenu de la base de donnes Tous pays et toutes annes confondues, dbut 2002
1- plus de 43500 entreprises en portefeuille (Portofolio Companies)
2- plus de 18600 Fonds
dont :
un peu plus de 15000 Fonds de capital-risque
presque 2100 Fonds de capital-transmission
presque 300 Fonds Mezzanine
3- presque 9230 Firmes de capital-risque
4- les sorties :
3600 introductions en bourse (I. P. O.) 2100 sorties par fusions et acquisitions (M&A)
-
26
Annexe 2
Rapprochement des valuations de quelques agrgats relatifs au capital-investissement
Nous avons retenu cinq sources dinformations sur lvolution du
capital-investissement23
:
1- les enqutes et les valuations faites par le cabinet PriceWaterhouseCoopers, seul ou en collaboration :
1a en collaboration avec la socit 3i, le cabinet PriceWaterhouseCoopers publie depuis
1999, une note annuelle consacre au capital-investissement mondial, baptise Global
Private Equity. Cette note fournit les principales donnes sur les montants de fonds levs et
sur les investissements effectus. Ces donnes concernent trois niveaux : le niveau
mondial ; puis le niveau rgional (Amrique du Nord, Europe de louest) et enfin le niveau
national.
1b en collaboration, depuis dcembre 2001, avec la socit Venture Economics (filiale du
groupe Thomson) et la National Venture Capital Association (NVCA) le cabinet publie un
rapport sur les Etats-Unis appel MoneyTree US Report 24
.
2- les rsultats publis rgulirement par lEVCA (European Venture Capital and Private Equity Association). Ceux-ci concernent les pays Europens, pris globalement ou
individuellement. LEurope est ici dfinie comme un ensemble de 21 pays auxquels sont
adjoints, au titre dtudes pilotes, quelques pays de lancienne Europe de lEst. LEVCA
travaille en rseau avec les organismes nationaux reprsentants de lactivit de
capital-investissement : lAFIC pour la France, la BVCA pour le Royaume-Uni etc.
3- la British Venture Capital Association (BVCA), socit anglaise regroupant les professionnels du capital-investissement, publiant rgulirement des notes de conjoncture
sur lvolution du capital-investissement anglais.
4- Les donnes statistiques rassembles et diffuses par la socit canadienne Thomson Financial. Ces donnes sont accessibles via internet, constituant un ensemble baptis
Venture Expert Web (cf. le site de Venture Economics). Elles sont accessibles en interactif
via des cadres pr-formats ou bien via des requtes relevant du language SQL et un
logiciel dinterrogation spcifique install sur lordinateur de lutilisateur.
Nous avons compar les valuations fournies pour les annes 1999 et 2000 pour un certain
nombre de grandeurs afin dapprcier lexistence et limportance ventuelle des carts. Ce
rapprochement a t synthtis dans un tableau reproduit ci-dessous.
On peut observer facilement limportance des diffrences pour certaines grandeurs. Il est
difficile de synthtiser le sens et la grandeur de ces carts tant ils sont varis. Pour en
suggrer la nature, nous pouvons formuler lapprciation suivante :
23
Il existe dautres sources : Venture One et Initiative Europe par exemple. 24
Ce rapport tait publi rgulirement par le cabinet PriceWaterhouseCoopers, seul, depuis quelques
annes.
-
27
- pour ce qui concerne les montants de capitaux levs on observe : (i) une valuation de Thomson sensiblement suprieure celle du Global Private Equity, en 1999, pour les
leves de fonds mondiales et celles des USA : de 60% environ, (ii) des ordres de grandeur
comparables pour les montants levs au niveaux europen et des pays composant cet
ensemble en 1999, (iii) des valuations du Global Private Equity des leves de fonds en
2000 infrieures celles de la socit Thomson.
- une valuation des investissements globaux ou par type souvent diffrents en 1999 mais plus proches en 2000.
- lorsque la comparaison est possible les valuations du Global Private Equity Report et de lEVCA sont proches, ce qui est normal puisque la partie europenne des valuations du
Global repose sur celles de lEVCA.
On observe par exemple un cart important pour une grandeur fondamentale, le montant
agrg des leves de fonds au niveau mondial, entre le Global Private Equity Report et les
rsultats de la base Venture Expert : 134,9 milliards de dollars (Global report) contre
212,5 milliards (Venture Expert) en 1999 ; ou encore 225 milliards de dollars (Global
report) contre 299,4 milliards (Venture Expert) pour lanne 2000. Pour linvestissement
total Europen, le Global Report fournit une valuation de 26,8 milliards de dollars en
1999 et de 32 milliards en 2000, alors que Venture Expert value le mme poste
respectivement 17,3 milliards et 30,7 milliards : la diffrence est de 35 % en 1999 et de
seulement 4% en 2000.
Nous ne sommes gure en mesure de justifier et de fournir une explication de ces carts.
Concernant lEurope prcisment, les valuations de Thomson semblent
systmatiquement infrieures celles de lEVCA reprises par le Global Private Equity
Report. La diffrence de primtre ne nous semble pas constituer une explication
convaincante de cet cart. On pense plutt que la couverture de la socit Thomson, en
matire de recueil de donnes primaires auprs des Fonds et des socits de capital-risque
Europens, est infrieure celle de lEVCA qui sappuie sur les associations
professionnelles de tous les pays europens. Il est vraisemblable que la couverture de
lactivit europenne par la socit Thomson samliore au fil des annes, ce qui peut
expliquer que le rapprochement des investissements pour lanne 2000 soit meilleur que
celui de lanne 1999. Mais cela a pour consquence le fait que lvolution des
performances des pays Europens selon les donnes de Thomson traduit sans doute, pour
une part que nous ne pouvons apprcier, lamlioration de cette couverture.
Quant aux donnes sur les Etats-Unis, nous avons le choix, en quelque sorte, entre celles
recueillies par le cabinet PriceWaterhouseCoopers (dans leurs deux versions), et celles
fournies par le Cabinet Thomson. Nous navons aucune information particulire nous
permettant de juger lesquelles sont a priori les plus pertinentes. Mais il existe une grande
diffrence entre les deux sources : par la base Venture Expert nous avons accs aux
donnes primaires alors que les valuations du cabinet PriceWaterhouseCoopers,
notamment dans le Global Private Equity Report, sont des donnes traites et agrges.
Autrement dit, les grandeurs fournies par la socit Thomson rsultent de lagrgation de
donnes micro-conomiques directement accessibles. Nous pouvons avoir une
information dtaille sur chaque opration au niveau lmentaire : engagements dont
bnficient les Fonds, appels de fonds effectus par les socits de capital-risque,
montant et composition des tours de table dont bnficient les compagnies, capitaux
disposition de socits de capital-risque etc. Nous pouvons ainsi contrler le sens prcis
et la porte des regroupements ou des recoupements effectus. Nous pouvons dailleurs
-
28
effectuer tous les traitements et regroupements que nous souhaitons raliser sur ces
donnes primaires qui peuvent tre retraites sous Excel.
Ces raisons nous ont conduit exploiter systmatiquement les donnes fournies par la
socit Thomson et renoncer utiliser les donnes fournies par les autres socits avec
lesquelles nous ne pouvons effectuer aucun recoupement. Et compte tenu de la diffrence
importante entre les donnes relatives lEurope fournies par Thomson et celles fournies
par lEVCA, nous avons renonc, sauf exception, utiliser les donnes sur lEurope
fournies par Venture Expert. Nous en rendrons compte sur certains points, notamment
pour ce qui concerne certaines structures ou rpartitions. Mais nous navons aucune
raison particulire de considrer que les donnes europennes de Thomson fournissent
une bonne ide, en niveau, de lactivit du capital-risque en Europe.
Sources
organismePricewaterhouseCoopers
& 3i Group plc Venture Expert EVCA en dollars
nature / titre du document Global Private Equity 2000 base de donnes accessible via Internet
objet principal du document mondial mondial
mthode
Exploitation d'un grand nombre de sources
varies, de niveau rgional ou national.
Utilisation d'estimations globales pour "les
rgions dont le capital-transmision et
l'investissement en capital-risque ne sont pas
mesurs". Parmi les rfrences utilises :
PricewaterhouseCoopers US Money Tree
Survey, EVCA. Absence de Venture
Economics ou de la NVCA.
adresse URLsur abonnement :
http://www.venturexpert.com/NASApp/vxWeb
WAR/vxWeb.jsp
Rsultats milliards de dollars milliards de dollars milliards de dollars1999
1999 Leve de fonds en capital-investissement - Mondial 134,9 212,5
1999 USA Leve de fonds totale en capital-investissement 97,1 (amrique du nord) 142,7 (VC : 59,6) ( BO : 60,8 )
1999 Europe Leve de fonds totale en capital-investissement 27,1 24,4 (VC : 11,6) 27,05
1999 Europe Leve de fonds totale en capital-transmission 12,74 10,2 12,561999 U.K. Leve de fonds totale en capital-investissement 14,1 (VC : 8,0 ) 10,54
1999 France Leve de fonds totale en capital-investissement 3,4 (VC : 2,1) 4,58
1999 Allemagne Leve de fonds totale en capital-
investissement total 2,5 (VC : 1,3) 4,04
1999 Fonds levs aux USA pour invest. en Europe 6,6 6,6
1999 Investissement capital-investissement Mondial 135,8 111,4 (VC : 76,7)
1999 Investissement Mondial transmission 77 34,6 (total moins VC) 1999 USA Investissement total 98 (amrique du nord) 84,41999 USA Investissement capital risque 61,71999 USA Investissement capital transmission 62 22,7 (total moins VC)
1999 Europe Investissement total 26,8 17,3 (Compagnies Eur.)
10,1 (Firmes Eur.)26,73
1999 Europe investissement en capital-transmission 13,4 3,4 (Firmes europennes) 14,06
1999 U.K. Investissement total en Grande Bretagne 12,1 10,3 (VC : 3,3 ) 12,25
1999 U.K. Investissement total par les socits de capital-
risque anglaises6,6
1999 U.K. investissement total en capital-transmission 9,17 7,0 (UK compagnies hors VC)
1999 France Investissement total 3 1,6 (VC : 0,8) 31999 Allemagne Investissement total 3,5 1,4 (VC : 1,3) 3,36
2000
2000 Leve de fonds en capital-investissement - Mondial 225 299,4
2000 USA Leve de fonds totale en capital-investissement 153,9 (amrique du nord)212,5 (tous fonds US)
105,8 (fonds VC) 84,1 (BO)
2000 Europe Leve de fonds totale en capital-investissement 43,7 60,4 (VC : 32,5 ; BO : 23,7 )
2000 U.K. Leve de fonds totale en capital-investissement 16,3 31,0 (VC : 10,2) 18,85
2000 France Leve de fonds totale en capital-investissement 6,9 13 7,98
2000 Allemagne Leve de fonds totale en capital-
investissement5,7 5,7 (VC : 4,2) 6,49
-
29
Sources
BVCA en dollarsBVCA
(British Venture Capital Association)Pricewaterhousecoopers organisme
note MoneyTree US Report nature / titre du document
Grande-Bretagne U.S.A. objet principal du document
Donnes fournies par 95 % des membres de la
BVCA, "reprsentant une large majorit du capital-risque en grande Bretagne", donnes collectes et analyses par la socit Bannock
Consulting.
L'enqute de l'association PricewaterhouseCoopers/Venture
Economics/National Venture Capital Association MoneyTree mesure les investissements dont le financement est
compens par la participation au capital effectus par la communaut des professionnels du capital-risque. Il s'agit
d'investissements effectus dans des compagnies U.S. nouvelles.
mthode
adresse URL
milliards de dollars milliards de milliards de dollars Rsultats1999
1999 Fund raising capital-investissement Mondial
1999 USA Fund raising capital-investissement
total1999 Europe Fund raising capital-investissement total
1999 Europe Fund raising capital-transmission
1999 U.K. Fund raising capital-investissement
1999 France Fund raising capital-investissement
1999 Allemagne Fund raising capital-
investissement total
1999 Fonds levs aux USA pour invest. En
Europe
1999 Investissement capital-investissement Mondial
1999 Investissement Mondial transmission
1999 USA Investissement total
54,4 1998 USA Investissement capital risque
1999 USA Investissement capital transmission
1999 Europe Investissement total
1999 Europe investissement en capital-transmission
10 6,2 dans 1109 compagnies1999 U.K. Investissement total en Grande
Bretagne
12,7 7,85 investis dans 1358 compagnies1999 U.K. Investissement total par les socits de
capital-risque anglaises
7,6 4,71999 U.K. investissement total en capital-transmission
1999 France Investissement total
1999 Allemagne Investissement total
2000
2000 Fund raising capital-investissement Mondial
2000 USA Fund raising capital-investissement total
2000 Europe Fund raising capital-investissement
total2000 U.K. Fund raising capital-investissement total
2000 France Fund raising capital-investissement total
2000 Allemagne Fund raising capital-investissement total
-
30
LE CYCLE DU CAPITAL-INVESTISSEMENT (PRIVATE EQUITY)
Fonds dinvestissementde divers types :
- captifs ou non captifs
(indpendants)
- spcialiss (capital-
risque, transmission etc.)
Apporteurs decapitaux
ou Limited Partners :
Fonds de Pension,
Groupes industriels,
Particuliers, Banques
etc.
Compagniesbnficiaires dapports en
capitaux propres ou
Portofolio Companies
(PC)
Firmes (ou socits) de
capital risqueou General Partners de
divers types
- captifs ou non captifs
(indpendants)
- spcialiss (capital-risque,
transmission etc.)
Rcupration des revenuset/ou des produits de
cession de parts
Dbours(ou investissements)
Rponses auxappels de fonds des
grants
Distribution des
revenus et/oudes gains encapital
Engagements oupromesses dapports
(commitments)
Rcupration des
fonds disponiblesaprs les oprations
Cession (M&A), introduction enbourse (IPO), rachat secondaire(cession de parts) etc.
-
31
CHAPITRE 1
Le systme de capital risque et sa structure
Problmes mthodologiques et caractristiques
Contrairement limpression que peut donner la lecture de certaines analyses, la
reprsentation du fonctionnement dun systme de capital-risque et lvaluation de son
activit soulvent quelques difficults.
Le premire concerne la dfinition mme du capital-risque, dont dpend videmment le
primtre des oprations dont on sefforcera de rechercher et donner une valuation.
Nous allons y revenir ci-dessous. Mais ce nest pas le seul problme que nous rencontrons
ds lors que lon veut faire preuve dun minimum de circonspection lgard de la
mesure de lactivit dun systme de capital-risque.
Nous avons en effet rapproch un certain nombre dvaluations proposes par des
organismes faisant autorit pour certains agrgats nationaux ou internationaux
importants : leves de fonds en capital-investissement ou en capital-risque au niveau
mondial, aux U.S.A., en Europe etc. Limportance des carts ne peut laisser indiffrent.
Cest lune des raisons qui nous a conduit consacrer une partie de notre rflexion
lexamen de questions de caractre mthodologique et dordre statistique. Cette analyse a
renforc notre conviction de la ncessit daccder aux sources dinformation sur
lesquelles se fondent les organismes voqus pour proposer leurs valuations des
principaux agrgats et, le cas chant dautres indicateurs pertinents.
Or la seconde grande difficult que nous rencontrons dans lanalyse de lactivit dun
systme de capital-risque est justement celle de laccs aux sources et ce que nous
appelons les donnes primaires, cest--dire les donnes de base, micro-conomiques,
dont rsultent par agrgation les valuations globales. La majeure partie des donnes
fournies par les organismes spcialiss ne sont pas vrifiables , en ce sens qu'il est
impossible de remonter aux informations micro-conomiques de base. Ce qui a deux
consquences, lies mais distinctes : (i) on ne peut corroborer ou discuter les options
mthodologiques et les conventions statistiques qui permettent de produire les agrgats et,
(ii) il est difficile dapprcier le sens et la porte exacte des agrgats fournis, dont on
ignore le mode de production, mme si les commentaires dont ils sont accompagns
prtendent en spcifier la nature.
La possibilit daccder la base de donne de Thomson Financial (Venture Expert) dans
des conditions privilgies qui ont permis des traitements systmatiques sur les donnes
primaires disponibles dans cette base, nous ont conduit naturellement mettre en lumire
un certain nombre de difficults et, partant, la varit des mesures possibles du
capital-risque. La consultation et le traitement de ces donnes, dont nous ne souponnions
pas initialement la difficult, ont eu pour nous une valeur pdagogique dont nous
esprons faire bnficier le lecteur.
Nous allons commencer par aborder, dans ce chapitre, certaines des difficults ou des
latitudes dvaluation que nous devons mettre au jour afin de savoir prcisment ce que
lon mesure (section I). Puis nous passerons en revue les acteurs qui interviennent dans le
fonctionnement du systme afin den prciser le rle, certains traits de leurs
comportements et fournir des valuations quantitatives de leurs oprations (section II).
Cest moins la valeur ou le nombre de celles-ci qui retiendront ici notre attention, que leur
-
32
structure. Dabord parce que nous traiterons dans le chapitre 2 du montant et de
lvolution des oprations. Ensuite parce que la connaissance dune valeur est moins
intressante ou parlante par elle-mme que certains ratios ou rapports de structure qui font
sens quant lorganisation et au mode de fonctionnement du systme.
Alors que ce document est centr sur le capital-risque nord-amricain, nous voquerons
plusieurs reprises dans ce chapitre, titre de comparaison, le capital-risque europen. La
base de donnes que nous utilisons comprend en effet des donnes primaires sur les
oprations europennes. Faute den appr