Le plus grand véhicule électrique du monde

Un consortium d’entreprises suisses réalise le plus grand véhicule électrique du monde en un temps record. Le prototype n’est pas conçu pour être exposé précautionneusement dans des foires, il s’agit d’une machine de chantier qui sera utilisée dans une carrière. Des spécialistes de l’Empa s’occupent de la sécurité d’exploitation.

Ce sera le plus grand véhicule électrique du monde: 45 tonnes de poids à vide, une charge utile de 65 tonnes et des batteries d’une capacité de 700 kilowattheures. C’est autant que huit exemplaires de la Tesla modèle S. Il faut escalader neuf marches pour atteindre la cabine. Les pneus mesurent presque deux mètres de diamètre. Pourtant, tout n’est pas neuf dans cet engin: le monstre électrique est basé sur un basculeur usagé de la marque Komatsu, démonté et remis en état de fonc-tionner à Lommis (TG) par Kuhn Suisse SA. Le moteur diesel a déjà disparu. L’espace est aménagé autour du châssis pour le bloc

d’accumulateurs qui le fera rouler pendant la deuxième partie de sa vie.

Perspective de travail: dix ans de carrière Dix années de dur labeur attendent le Komatsu HD 605-7 à motorisation électrique. Il devra acheminer vingt fois par jour des matériaux depuis une carrière sur les flancs du Chasseral jusqu’à la fabrique de ciment de l’entreprise Vigier SA, près de Bienne. La motorisation électrique offre des avan-tages décisifs précisément pour ces trajets: à la descente, ce ne sont pas des freins qui retiendront le véhicule, mais son puissant

Une image du passé: jusqu’à l’année dernière, le basculeur Komatsu roulait au diesel entre la carrière et la fabrique de ciment. Dans quelques mois, il devrait faire exactement le même travail, mais électriquement.

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À la descente, ce ne sont pas des freins qui retiendront

le véhicule, mais son puissant moteur électrique,

qui fonctionnera comme un générateur et rechargera

le bloc d’accumulateurs.

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moteur électrique, qui fonctionnera comme un générateur et rechargera le bloc d’accumu-lateurs. Cette énergie permettra au basculeur de remonter une fois vide. Si tout se passe bien, il produira même davantage d’électricité à la descente qu’il lui en faudra pour la montée. Au lieu de brûler des combustibles fossiles, il injecterait alors du courant excédentaire dans le réseau.

Pour cette idée apparemment folle, Ciments Vigier SA va débourser un montant à sept chiffres. Deux entreprises doivent mettre le mastodonte sur roues: l’entreprise Lithium Storage S. à r. l. d’Illnau (ZH), dotée d’une riche expérience en matière de véhicules électriques, et le groupe Kuhn, qui représente les basculeurs Komatsu dans toute l’Europe. L’Office fédéral de l’énergie (OFEN) soutient le projet.

L’Empa est également de la partie, puisque Marcel Held, spécialiste des batteries, est man-daté pour examiner la sécurité. Il évalue le bloc de batteries du fabricant chinois Shenzhen Westart et vérifie le mode de construction de l’immense bloc d’accumulateurs ainsi que la

programmation du système de gestion des bat-teries, fourni par le fabricant suisse Esoro. Les caractéristiques principales sont connues: le bloc de batteries du basculeur électrique pèse-ra 4,5 tonnes et se composera de 1440 cellules NMC (nickel-manganèse-cobalt).

Aucun véhicule tout-terrain n’a été équipé, à ce jour, d’un si gros bloc d’accumulateurs. «Les cellules nickel-manganèse-cobalt sont aussi celles que choisit l’industrie automobile allemande pour les voitures électriques de la prochaine génération», relève l’expert de l ’Empa. Ce qui l’intéresse avant tout, c’est de voir comment ces cellules réagissent en cas d’accident. Que se passe-t-il si l’une d’elles subit un dommage mécanique? Ou si un inter-rupteur défectueux ne coupe pas la batterie du réseau après le chargement? «Certaines batteries commencent par fumer, elles peuvent aussi prendre feu», explique M. Held. «Il est alors décisif que la cellule voisine ne soit pas elle aussi endommagée par le feu et la chaleur, sinon, cela pourrait provoquer une réaction en chaîne.» L’expert réalisera des tests de surcharge à l’Empa et maltraitera une cellule ou l’autre avec un clou en acier.

Jamais encore on n’avait construit un véhicule de cette catégorie de puissance, capable de gravir des pentes allant jusqu’à 13%, à pleine charge et par tous les temps. Il dépendra pour cela de batteries électriques d’une intensité pouvant atteindre 3000 ampères, qu’il devrait recharger de 40 kilowattheures (kWh) en descendant dans la vallée. Avec un solde de 10 kWh par trajet, soit 200 kWh par jour, il s’agira d’un véhicule à énergie positive. Si ce basculeur entièrement électrique fait ses preuves, Ciments Vigier SA pourrait en acquérir par la suite jusqu’à huit exemplaires.

Kuhn Suisse SA envisage d’autres domaines d’utilisation pour des machines de chantier électriques, par exemple la construction de tunnels ou les travaux dans des zones résidentielles sensibles aux gaz d’échappe-ment et au bruit.

Rainer Klose

Empa

Ce texte est paru pour la première fois en juillet 2017 dans le magazine Empa Quarterly.

Le moteur diesel et le réservoir de 700 litres ont été démontés. Deux blocs d’accumulateurs (en bleu) prennent leur place.

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Aucun véhicule tout-terrain

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