le progressiste n° 2132

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1 euro Le Progressiste Hebdomadaire du PPM - Fondateur : Aimé Césaire Le Progressiste “La chance de la Martinique c’est le travail des Martiniquais” - Aimé CESAIRE mercredi 26 mai 2010 - N° 2132 AU SOMMAIRE - 30 MAI : PROFESSION DE FOI DE MM. JABOL ET ROBIN (PP. 5 À 7) - CARTON ROUGE : LA RÉCUPÉRATION DU 22 MAI (PP.8/9) - A LA REGION : GOUVERNANCE ET COOPÉRATION (P.10) « LES MEILLEURS SPÉCIALISTES DES AFFAIRES MARTINIQUAISES SONT LES MARTINIQUAIS EUX-MÊMES » (DR ALIKER) « CHAQUE GÉNÉRATION DOIT TROUVER LES CHAÎNES QU’IL LUI FAUT BRISER. C’EST CELA LE SENS PROFOND DE NOTRE 22 MAI D’AUJOURD’HUI »

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Page 1: Le progressiste n° 2132

1 euro

Le ProgressisteHebdomadaire du PPM - Fondateur : Aimé Césaire

Le Progressiste“La chance de la Martiniquec’est le travail des Martiniquais”

- Aimé CESAIRE

mercredi 26 mai 2010 - N° 2132

AU SOMMAIRE- 30 MAI : PROFESSION DE FOI DE MM. JABOL ET ROBIN (PP. 5 À 7)- CARTON ROUGE : LA RÉCUPÉRATION DU 22 MAI (PP.8/9)- A LA REGION : GOUVERNANCE ET COOPÉRATION (P.10)

« LES MEILLEURS SPÉCIALISTES DES AFFAIRES MARTINIQUAISES SONT LESMARTINIQUAIS EUX-MÊMES » (DR ALIKER)

« CHAQUE GÉNÉRATION DOIT TROUVER LES CHAÎNESQU’IL LUI FAUT BRISER. C’EST CELA LE SENS PROFOND

DE NOTRE 22 MAI D’AUJOURD’HUI »

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DISCOURS

Le Progressiste - Page 2 - mercredi 26 mai 2010

Mes chers compatriotes,Mes chers amis,Madame la maire de Pétion villeMes amis artistes de Martiniquede Guinée et dʼHaïti

Nous voilà donc une nouvellefois réunis autour de la commé-moration du 22 mai 1848 ! Je tenais pour ma première cé-lébration du 22 mai en tant queprésident du conseil régional, apartager mon recueillement avecceux qui il y a une trentaine dʼan-née ont su symboliser dans lʼes-pace et dans le temps une desplus belles pages de notre his-toire. Je veux parler de Césaire,dʼAliker, de Darsières qui ontlutté pour que la date du 22 maisoit reconnue et quʼune place etun monument symbolisent faceà nous, face au monde à traversune œuvre de Khokho, lʼexpres-sion à la fois dʼune souffrance etdʼune résistance.

Depuis hier soir, autour du tam-bour et du souvenir de cette jour-née pas comme les autres, desdizaines de cérémonies vont setenir dans toute la Martinique.Cʼest bien le signe que quelquechose dans notre mémoire sʼesttransformé.

Nous ne sommes plus dans lʼou-

bli douloureux.Nous ne sommes plus dans lesilence de lʼembarras et de lahonte. Nous ne sommes plus dans larevanche et dans la haine. Nous ne sommes pas non plusdans la sacralisation idéologiqueou dans une incessante victimi-sation.

Nous sommes très simplement,très sereinement, dans la recon-quête apaisée de nous-mêmes. Alors une question se pose.Elle est de savoir comment etpourquoi un événement vieux de162 ans peut encore alimenterles énergies individuelles et col-lectives alors que nous devonstout mettre en œuvre pour faireface aux défis du  mondecontemporain ?

Notre regretté Aimé Césaire, etavec lui le docteur Aliker, toutcomme Camile Darsières et tousles dirigeants du PPM, ont tou-jours été présents quand il a falluse battre contre lʼoubli colonial.Ils ont toujours été en premièreligne quand il a fallu transformerle travail mémoriel que nousavions à effectuer sur notre his-toire et sur nous-mêmes, en unvéritable « devoir de mémoire ».Rappelez vous : ce nʼest quʼen1983 par décret que la Répu-blique reconnaît les dates lo-cales de lʼabolition delʼesclavage dans les « DOM ».Et ce nʼest quʼen 2001 que lʼes-clavage sera reconnu commecrime contre lʼhumanité grâce àChristiane Taubira.

Nos ainés avaient compris quele passé, le présent et le futurétaient indissociables ! Que dé-serter son passé revenait à dé-serter et le présent et le futur ! Etdonc : que la mémoire ne servaitpas à sʼenfermer dans le passé,mais quʼelle permettait de mieuxhabiter le présent et par là-même dʼinventer le futur !

Cʼest en ce sens quʼil existeun « devoir de mémoire », etcʼest pourquoi le PPM a toutfait pour que la Martinique as-sume ce devoir !

Mais associer la notion de « de-voir  » à celle de «  mémoire  »était bien le signe que leschoses nʼallaient pas de soi.Cʼétait bien le signe quʼil fallait àla fois se battre contre la chapede plomb coloniale, mais aussicontre cette souffrance inté-rieure qui nous amenait tous,collectivement, à oublier — oupire  : à nier ou à renier — lesréalités insupportables de notrepassé !

Mais nous devons bien êtreconscients que lʼidée de « devoirde mémoire  » ne peut êtrequʼune étape vers lʼinstaurationen nous-mêmes et dans notresociété dʼune dimension mémo-rielle naturelle qui nʼa pas besoinde se nommer, ni dʼêtre impo-sée, et qui sʼinscrira naturelle-ment dans la perceptionconfiante, responsable et volon-taire que nous aurons de nous-mêmes !

Le devoir de mémoire sʼeffacequand la mémoire est assainie.Il sʼestompe quand lʼautorité in-térieure apparaît et que lʼon de-vient pleinement responsable dece que lʼon est, et de ce lʼon fait !La relation absolument néces-saire entre passé, présent etfutur se fait naturellementquand un peuple se met endevenir dans une perceptionestimable, responsable etsouveraine de lui-même !

La traite, lʼesclavage et les luttesde libération ont été des tragé-dies humaines terrifiantes. Maisces tragédies ont été dans lemême temps porteuses dʼhé-roïsmes, de courages, dʼabné-gations, de créativités, devolonté et de projection vers lefutur !

Discours de Serge LETCHIMY

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DISCOURS

Le Progressiste - Page 3 - mercredi 26 mai 2010

Cette expérience est la nôtre. Elle est en nous, et elle doit nousporter vers tous ces combats quinous attendent et qui vont ins-crire notre pays dans le mondequi vient !

Quand lʼesclave Romain a em-poigné son tambour, quʼil lʼa faitrésonner, il exprimait son refusdes humiliations et des chaînes. Et il invoquait ce quʼil y avait deplus précieux à lʼépoque : la Li-berté.

Les tambours que nous avonsentendus hier soir nous invitentà nous souvenir de ce refus etde cette invocation. Mais nousne devons pas oublier quʼunejournée comme celle du 22 maine prend tout son sens que sielle engendre de nouveaux 22mai : cʼest à dire si elle nous ins-pire, pour lʼépoque qui est lanôtre, les voies et les moyensdʼêtre plus libres, plus dignes,plus responsables !

Chaque génération doit trouverles chaînes quʼil lui faut briser. Cʼest cela le sens profond denotre 22 mai dʼaujourdʼhui !

Mais ce matin, je voulais évo-quer avec vous cette notion delʼoubli.

Contre lʼoubli, le travail de noshistoriens a été précieux, et jetiens à rendre hommage ici àceux qui nous ont permis de dis-poser dʼune meilleure connais-sance de cette périodefondatrice, certes avec des di-vergences et des contradictions

quʼil faut assumer.Assumer, avec lʼexigence mo-rale, politique et intellectuellepour lutter contre tous les oublis,tous les silences.Lʻabolition de lʼesclavage estlʼaboutissement de luttes, de ré-voltes et de rebellions jalonnéesdans le temps et dans le monde,dʼhommes et de femmes qui ontsu repousser les limites dʼunedes pires barbaries quʼa connulʼhumanité.Les résistants furent nombreux.Alain Anselin nous rappelle dansson ouvrage publié en 2009quʼen Afrique, dès le départ, desAfricains ont lutté contre la traite,contre ceux qui se faisaient lescomplices des négriers. La

controverse de Valladolid ex-prime au 16ème sièclea complicitéde lʼéglise dans la colonisation etla traite, mais aussi les opposi-tions de religieux célèbres.

Nos historiens ont su arracherlʼesclave Romain et son tambourdʼune épaisseur dʼoubli phéno-ménale. Mais ce que nous sa-vons de lʼHistoire de notre pays,cʼest quʼelle est faite de dénis,dʼoublis et de silences. Cʼestpourquoi jʼaimerais avoir avecvous tous une pensée particu-lière pour tous les oubliés.

Quand Romain veut exprimerson refus et sa colère, il se jette

sur son tambour. Le tambourétait disponible parce que desgénérations dʼesclaves ano-nymes, oubliés, se sont battuesde manière ouverte ou détour-née pour lʼintégrer dans leschants de travail. Elles ont rusépour que le tambour soit présentde manière innocente danstoutes les fêtes dʼHabitation, etils lui ont gardé sa dimension se-crète, sa dimension sacrée,dans les cérémonies interdites,dans les moments de vieux-nè-gres, et dans les bois profondsauprès des « nègres marrons».

Quand on sait que pratiquementtoutes les Habitations du paysdisposaient dʼun cachot. Quandon sait que presque tous les sa-medis, sur la place Bertin, àSaint-Pierre, des esclaves re-belles ou indociles étaient châ-tiés, voire exécutés de manièrespectaculaire. Quand les histo-riens nous décrivent la série dechâtiments et dʼinstruments detorture qui existaient dans toutesles périodes esclavagistes oncomprend quʼil y a eu durantchaque heure de chaque jour, etchaque jour de ces trois siècles,un esclave anonyme, une es-clave oubliée, qui a dit « Non ! ».Durant chaque jour de ces troissiècles, il y a eu un esclave quisʼest rebellé, une esclave quisʼest fait tuer ! Mieux,On découvre encore de nosjours à Sainte-Marie, des ves-tiges dʼun cimetière dʼesclaves ;les événements du Carbet en1822 et la répression qui a suivimontre le niveau de barbarie deschâtiments.Nous avons beaucoup focalisésur les grands résistants et surles « nègres marrons», et cʼestvrai quʼils étaient admirables.Delgrès. Ignace. Boukman.Toussaint. Fabulé. Makandal.Gabriel en Guyane. Quao etCujoe de la Jamaïque… Maisnʼoublions pas quʼau cœurmême de chaque Habitation,des dizaines et des dizainesdʼhommes et de femmes résis-taient en silence. Avortements !

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Sabotages dʼoutils ! Incendies des champs ou desréserves ! Ralentissement de toutes lestâches ! Empoisonnement des eaux desources ! Empoisonnements des ani-maux ! Empoisonnement des maîtres !Mille et mille formes de résis-tances et dʼhéroïsmes que nousnʼavons même pas commencé àinventorier !

Ainsi, quand lʼesclave Romainse met à chevaucher son tam-bour, ce sont des milliers denos ancêtres qui lʼont précédéet qui sont avec lui ! Ce sont des milliers et des mil-liers de tambours qui ce jourlà ont résonné dans sonunique tambour !

Ce qui nous permet de com-prendre que toutes les grandesactions ne sont jamais des actesisolés qui émergent du mystère.Derrière les grandes résistanceset les grandes avancées, il y atoujours des milliers dʼano-nymes, des milliers dʼhommes etde femmes qui se battent pourdes valeurs et des principes !Personne ne peut réussir seul,nous avons besoin de la parti-cipation, du courage et de lacréativité de tous! Lʼhumilité, lerespect de lʼautre, lʼécoute de ladifférence, lʼimplication de cha-

cun dans tous les projets struc-turants, sont des valeurs qui per-mettent à lʼénergie collective decirculer et de sʼélever. La Marti-nique de nos ancêtres nous lʼaenseigné  ; la nouvelle Marti-nique saura conserver laleçon !

Nos héros nʼont pas été réperto-riés par la chronique coloniale.Les registres de justice ne vontévoquer que des prénoms, dessurnoms dérisoires, et unevague origine ethnique. Noussommes donc entourés de hérosinvisibles. Notre mémoire estpleine de socles sans statues etde statues sans nom, sans corpset sans visages. Je pense à cesmillions dʼafricains qui nʼont passurvécu à la traversée des ba-teaux négriers, et qui tapissentaujourdʼhui le fond de lʼAtlan-tique. Je pense à ces esclavesenterrés à la va-vite sur les Ha-bitations et qui ont disparu corpset âme. Je pense à ceux qui sesont desséchés dans les ca-chots ou sous les instruments detortures… Ils sont là, anonymes, invisi-bles derrière la figure de Ro-main ou le visage de cethomme admirable quʼétait Vic-tor Schœlcher.

Alors, jʼaimerais que vous pre-niez conscience dʼun phéno-mène qui me hante depuislongtemps. La mémoire de ces

hommes et de ces femmes nenous est pas parvenue parceque nos ancêtres ne disposaientpas de lʼécriture. Lʼécriture était celle des maîtres. Lʼécriture accompagnait le sys-tème colonial. Pourtant, si nous y réfléchissonsbien, on peut dire que nos ancê-tres disposaient dʼune écritureparticulière, et je crois profondé-ment quʼils ont tenu des archivessecrètes dans cette écriture par-ticulière. Mon sentiment cʼest que tousnos héros oubliés sont là ! Ils sont là avec nous tous lesjours ! Et que cʼest à nous quʼil ap-

partient de connaitre et de re-

connaitre notre patrimoine

mémoriel : le patrimoine des

oubliés.

Nous le ressentons, et nous ex-primons une inconsciente inti-mité par des émotions diverses.Mais sommes-nous en mesuredʼen faire des lieux et desmoyens de la construction dʼunelucide conscience dʼêtre ?

Alors, que les tambours chan-tent en toute sérénité !Que les tambours chantent enpleine autorité ! Et que cette autorité nourrisselʼautorité sereine de toute la Mar-tinique !

Vive le 22 mai !Vive la Martinique nouvelle !

Serge LETCHIMY

22 mai 2010

TETE

Le Progressiste - Page 4 - mercredi 26 mai 2010

DISCOURS

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ELECTIONS CANTONALES

Le Progressiste - Page 5 - mercredi 26 mai 2010

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Une fois de plus, vous êtes conviés à vous rendre dans les bureaux de vote. Cette fois, par la seule volonté du Conseiller général sortant, maire de la commune, tête de liste aux dernières régionales.

Une fois élu à la Région, il a été obligé de démissionner du Conseil Général, en raison de la règle de non cumul des mandats.

Il est clair que pour Rivière-Salée cette élection revêt un caractère inédit. En effet pour la première fois depuis 20 ans, le Maire ne sera pas présent dans un scrutin local.

Cela nous projette inévitablement dans un scénario où, le candidat qui sera élu, se positionnera comme investi de votre confiance pour les années à venir.

Il s’agit donc d’un enjeu local fort qui a conduit le RDS à se positionner en proposant

ma candidature et celle de Bettina Bonheur, ma remplaçante, à vos suffrages.

Pour la Martinique il s’agira, à l’occasion de ce renouvellement partiel, de poursuivre l’œuvre engagée lors des élections régionales.

L’enjeu politique des années à venir est la mise en place de la collectivité unique que les électeurs martiniquais ont voulu dans le cadre de l’article 73 de la constitution.

C’est à cette mission que je m’attellerai si vous me faites confiance.

En tant que membre de l’équipe du nouveau Président de Région, il me semble que je suis le mieux placé des candidats pour mettre en œuvre de façon cohérente ce projet de fusion de nos collectivités.

J’ai l’expérience d’une mandature en collectivité, j’ai participé aux travaux du Congrès en défendant la position retenue au final par les martiniquais.

RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE SALÉEN

ELECTIONS CANTONALES

Le Progressiste - Page 6 - mercredi 26 mai 2010

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ELECTIONS CANTONALES

Page 8: Le progressiste n° 2132

CARTON ROUGE

Le Progressiste - Page 8 - mercredi 26 mai 2010

Ce « convoi » mené par leMODEMAS de GarcinMALSA risque, à force

de démagogie, de sombrerdans le plus opaque des obs-curantismes et de sʼenliserdans le plus abject des popu-lismes.

Pour ce qui est du crime contrelʼhumanité (je veux parler de latraite et de lʼesclavage desNoirs), le mot « réparation » neme semble pas le mieux àmême de faire saisir lʼampleurde lʼhorreur de la transforma-tion de lʼhomme noir en bête desomme. Si on se réfère au dic-tionnaire, « Réparer, cʼest re-

mettre en bon état ce qui a étéendommagé ; cʼest rabibocher,replâtrer, rafistoler… » On peutdonc réparer une voiture, unvieux mur, un vieux meuble,voire une personne malade ouaccidentée ; mais comment ré-parer un cadavre, si crimeconnote meurtre, assassinat ?

Il faut donc avoir le couragedʼexprimer clairement sa re-vendication, appeler un chat unchat, ne pas se perdre dansdes circonlocutions subtilespeut-être, mais ridicules, parceque démagogiques et tout sim-plement exiger un dédomma-gement.

Car «  dédommagement  » et«  réparation  » nʼont pas lamême signification. Loin dʼêtresynonymes, ils peuvent êtreopposables. Et ce nʼest passimplement une question desémantique, cʼest aussi et sur-tout un problème dʼéthique, demorale. Ceux du convoi lʼontbien compris ; réclamer un dé-dommagement du crime, delʼexploitation inhumaine de nos

arrière-grands-parents pourraitêtre perçu comme une tenta-tive ignoble de tirer profit deleurs souffrances, de leurs mal-heurs, dans ce que magrandʼmère appelait « lʼesclavi-tude ». Aussi, pour ne pas pas-ser pour des malotrus,malpropres, «  sans senti-ment », ont-ils préféré parler deréparation plutôt que de dé-dommagement.

La société réprime le crime etpunit le criminel  ; il estcondamné à purger une peinede prison ; il paie sa dette. Or,le seul fait de payer lʼexonèrede tout problème deconscience  ; il recouvre la li-berté ; cʼest le rachat par lʼex-piation.

La réparation réclamée par nosconvoyeurs a-t-elle pour but depermettre à nos békés de seracheter, de sʼexonérer deleurs problèmes de conscienceou tout simplement de rafisto-ler leur conscience ? Cʼeût étéun geste digne, honorable, unemanière dʼouverture vers la ré-

QUAND LE « CONVOI POUR LA REPARATION »TENTE DE RECUPERER CESAIRE !

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CARTON ROUGE

conciliation de la caste békéavec notre réalité composite,multiraciale, multiculturelle.Mais ce nʼest pas, me semble-t-il, le but recherché ni la  ;préoccupation première et, ma-jeure de nos convoyeurs !

Et où cette démagogie devientplus quʼinsupportable, plusquʼinacceptable et vraiment in-tolérable, cʼest quand elle tentede récupérer Aimé CESAIRE etde lʼembarquer de force dansson convoi, dont la significationdemeure obscure, pour ne pasdire viciée et cela, surtout,quand tout le monde sait quʼILa dès le départ condamné cettedémarche et a fermement dé-claré « ce crime irréparable »,au grand dam de nosconvoyeurs, qui ne lʼont pasencore digéré !

Maintenant que voilà, le peuplemartiniquais LUI a offert un mé-

morable belya et quʼIL « habite[sa] blessure sacrée » , les plusvirulents, vibrionnants de sesadversaires se réclament deLUI, se veulent fils aînés deCESAIRE ! Il est donc de bonton de se donner pour césai-ristes convaincus de la pre-mière heure  ! Ce nʼestcertainement pas une choseodieuse, à décourager, sʼil estvrai quʼAimé CESAIRE, pèrede la nation martiniquaise, nesaurait être confisqué par lePPM dont la mission est préci-sément de diffuser sa penséeet ses options politiques. Maisvouloir utiliser CESAIRE, lʼins-trumentaliser dans la plusodieuse des «  modemasca-rades  » relève de lʼinconve-nance, de lʼindécence, de lamalhonnêteté intellectuelle, duplus misérable populisme !!!

Pour notre part, nous avonschoisi le DEVOIR DE ME-

MOIRE qui, tout en rappelantles moments douloureux denotre histoire, permet dʼhonorerles luttes de nos arrière-grands-parents, «  leur résis-tance à la chicote  » et àlʼasservissement et dʼévacuertoute arrière-pensée de tirer unprofit malsain, ignoble, du mal-heur de nos grands aînés…ré-duits à lʼétat de bêtes. Ce qui,aujourdʼhui, nous met en capa-cité de «  regarder le présentavec fermeté et toiser lʼaveniravec insolence » (in « Notre 22mai).

Vonvon Nwè

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A LA REGION

Le Progressiste - Page 10 - mercredi 26 mai 2010

Deux mois après lʼéclatantevictoire du mouvement « En-

semble pour une Marti-

nique nouvelle » à lʼélection de lacollectivité régionale que le peuplesouverain a décidée, lʼorganisationde lʼinstitution dans sa déclinaisonpratique, rationnelle et –pourquoine pas le dire- « nouvelle », se meten place. A partir dʼune méthodolo-gie éprouvée dans de nombreusessphères de responsabilités, lʼéquipe«  managée  » par Serge LET-

CHIMY, sans Désormais, sansprécipitation, sans affolement, maisavec sérieux et rigueur, sʼest miseau travail. Un Directeur des Res-sources Humaines ainsi quʼun Di-recteur financier, si nécessairesdans toute administration qui pré-tend posséder des « curseurs » etune «  lisibilité » dans sa gestion,seront recrutés prochainement.Dans la gouvernance précédente,pour dʼobscures raisons, cespostes nʼétaient pas pourvus, cesfonctions nʼétaient pas assurées.Une Directrice Générale des Ser-vices est nommée  : Laure MOU-

TAMALLE (voir N° précédent). Lescommissions sont en place et fonc-tionnent déjà  ; lʼélection du prési-dent du Parc Régional a eu lieumercredi dernier  : cʼest Daniel

CHOMET. La Région Martinique esten ordre de marche. Alors, hautsles cœurs et avançons !

LʼETAT DES LIEUX

Lʼancien président de la Région glo-sait à qui mieux mieux et se répan-dait sur tous les tons sur lʼétat desanté insolent de « sa  Région »,sur lʼexcédent que dégageait sa« gestion » et sur le « matelas » fi-nancier dont il disposait. Las !!! Au-jourdʼhui, la réalité est moinsfolichonne ! Le fameux matelas, enlʼespace de quelques mois, est de-venu par la seule volonté dʼun diri-geant politique haineux et

revanchard, une vulgaire descentede lit effilochée ! La situation de laRégion Martinique est celle nor-male dʼune collectivité qui avait dé-cidé dʼériger la frilosité et la gestionà vue en modus operandi. En at-tendant les audits qui seront rendusvraisemblablement en septembre,voilà ce que lʼon peut dire. Pas dequoi sauter au plafond  ; pendantlongtemps, la fameuse «  disso-nance cognitive » a fait ses dégâts.Il était temps de revenir à une réa-lité qui concilie vérité économiqueet objectifs.

LA PAROLE LIBEREE

Le président LETCHIMY a reçu lepersonnel mercredi dernier dans lecadre de la Ferme Perrine ; lʼocca-sion pour lui de présenter la Direc-trice générale et dʼéchanger avecles agents : « Vous devez vous sen-tir libres et non point assujettis à unparti ou à un élu. Prenez des initia-tives et considérez-moi avant toutcomme un homme, certes avec desresponsabilités, mais un hommequi sera toujours à votre écoute etprompt au dialogue et à lʼéchange.Je compte sur vous, sur votre ca-pacité à impulser la Région, votrecapacité de travail et dʼinnovation.Je compte sur votre énergie qui mesera nécessaire ». Dans la foulée,le président annonçait que le plan

de relance économique sera pré-

senté dans trois semaines.

LʼINITIATIVE PARTAGEE

La Collectivité Unique que les Mar-tiniquais par leur vote du 24 janvier2010 appellent de leurs vœux, a faitlʼobjet dʼune première rencontre àFort-de-France entre les présidentsS. LETCHIMY et Victorin LUREL

(Guadeloupe), puis dʼune journéede travaux à Cayenne avec le pré-sident guyanais Rodolphe

ALEXANDRE. Ils ont longuementévoqué la mise en place des fu-tures collectivités, le mode de scru-tin, la gouvernance, le nombredʼélus ainsi que le calendrier. Lesprésidents guyanais et martini-quais, concernés, ont souligné « lescontraintes juridiques susceptiblesde faire obstacle à la réduction dela durée des mandats des élus ré-gionaux en cours dʼexercice ». Ilssemblent donc retenir lʼéchéance

de 2014 comme la plus plausible,présentant lʼavantage de « détermi-ner dans le respect du principe delibre administration des collectivitésterritoriales, les modalités organisa-tionnelles, financières et adminis-tratives devant permettre dʼaboutirà une optimisation de cette fusion ».

Mes trois présidents ont évoqué laproblématique de lʼoctroi de mer

et du marché unique. Sʼagissantdu problème des carburants, ils re-tiennent la nécessité de « réduire lastructure des prix, ses modalités,son administration  ». Quant à lacontinuité territoriale, ils ont dé-cidé de faire une réponse com-mune aux projets de décretssoumis aux collectivités sur la ges-tion de ces fonds. Là encore, ceséchanges préfigurent les actions fu-tures des trois Régions et les po-sent dans une dynamique collectivequi ne pourra quʼêtre bénéfiquepour tous.

SDE

GOUVERNANCE ET COOPERATION : C’EST PARTI !

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HISTOIRE

Le Progressiste - Page 11 - mercredi 26 mai 2010

AUTOUR DE L’ABOLITION DE L’ESCLAVAGELES TROIS DIABLES DU POPULISME (I)

EDOUARD DE LÉPINE

Le 150e anniversaire de lʼAboli-tion avait donné lieu à degrandioses manifestations,

aussi bien du côté des anciennescolonies françaises quʼà lʼinitiativedu Parlement et du gouvernementsocialiste de Lionel Jospin. Jʼaicommis à cette occasion un petitouvrage de vulgarisation desconnaissances disponibles àlʼépoque, Dix semaines quiébranlèrent la Martinique.1

«  Il reste à espérer, écrivais-jealors, que le cent cinquantième an-niversaire aura suffisamment titilléla curiosité intellectuelle de noschercheurs et de nos étudiantspour donner un nouvel élan à la re-cherche même limitée à la Marti-nique. »

1/ Le bon sens nʼest pas lachose la mieux partagée dansnotre société

Sʼil est vrai que quelques ouvragesont paru depuis qui ont parfois re-nouvelé notre approche de lʼescla-vage et de son abolition, il nʼestpas sûr que nous ayons réussi àclarifier autant quʼil est souhaitablela question des rapports avec lʼan-cienne puissance coloniale qui ont

été largement déterminéspar les circonstances delʼabolition dans notre pays,ni celle des relations entredescendants des maîtreset descendants des es-claves.

Douze ans après le 150e

anniversaire, nousnʼavons guère progressédans ce domaine. Cʼestdʼailleurs peut-être à ce ni-veau que se manifeste laprincipale séquelle de lʼes-clavage  : notre attache-ment à notreirresponsabilité collectiveau nom de notre droit à laresponsabilité. Cʼest tou-jours les autres qui sontresponsables de notre si-tuation, spécialement de

ce qui va mal.

Les manifestations du 162e anni-versaire de lʼAbolition (mais sʼagit-il encore de célébrer lʼAbolition ?)donnent lieu à un déferlement decommentaires qui ont de moins enmoins de rapports avec lʼHistoire.

Ce ne serait pas grave sʼil nesʼagissait que des inévitables sous-produits de ce genre de manifesta-tions. Des événements autrementimportants de lʼhistoire mondiale,pour ne parler que de ce qui sʼen-seigne dans nos écoles et dansnos lycées, les grandes invasionsbarbares, en Europe, la Réformeet les guerres de religion, lʼindé-pendance des Etats-Unis ou la ré-volution Haïtienne, la révolutionrusse ou la révolution chinoise, laRévolution française ou la Com-mune de Paris, lʼexpansion colo-niale ou la révolution coloniale, ontdonné lieu et donnent encore lieudans des milliers dʼouvrages, dansles salles de cinéma, sur lesécrans de télévision des grandeschaînes françaises, à des extrava-gances parfois surprenantes, maisavec un minimum de tenue.

La commémoration du 22 mai à la

Martinique produit chaque annéeun flot de sottises et dʼélucubra-tions farfelues et, dans le meilleurdes cas, dʼapproximations qui dé-fient le bon sens.

Le bon sens ne protége pas detout, pas même de la connerie. Àla veille de la crise de février 2009à la Martinique et à la Guadeloupe,un béké martiniquais qui se flatte,non sans quelque raison, dʼêtre unmajor de lʼEBS, qui nʼest pas lʼEu-ropean Business School commeon pourrait le croire, mais lʼEcoledu Bon Sens, sʼest laissé piégerdans le mauvais film de Bolzinger,« les derniers maîtres de la Marti-nique ».  Il risque de payer cherune sottise quʼil a regrettée avantmême quʼelle ne fût connue dugrand public. Combien de nègrespas tous diplômés de lʼEBS, maisplusieurs émoulus de lʼUniversitéfrançaise, risqueraient dʼêtre pour-suivis devant les tribunaux pourdes propos malheureux qui loin decontribuer à lʼunité nationale marti-niquaise dont ils se veulent leschampions entretiennent la divi-sion, la rancune et la rancœur ?

Cʼest peut-être quʼil est plus difficileque nous ne lʼavons cru dʼexorciserles trois diables à tout faire de notrehistoire, vue par les populistes,toutes nuances confondues, entrain de récupérer le 22 mai, dansle silence des historiens et la pru-dence des responsables poli-tiques : les colonialistes français,les mulâtres et les békés.

Edouard de Lépine

1 Edouard de Lépine, Dix semaines qui ébran-

lèrent la Martinique – 25 mars - 4 juin 1848,

Maisonneuve Larose-Servédit, Paris 1999

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Le Progressiste - Page 12 - mercredi 26 mai 2010

NOTRE 22 MAI COMMEMORÉ PAR LE PARTI PROGRESSISTE

COMITÉ DE RÉDACTION :

Daniel COMPERE

Jeannie DARSIERES

Didier LAGUERRE

Laurence LEBEAU

Daniel RENAY

Serge SOUFFLEUR

Victor TISSERAND

Appel du « Progressiste » aux Militants, aux sympathisants, à tous les Démocrates qui lui ont tou-

jours fait confiance.

« Le Progressiste », organe du Parti Progressiste Martiniquais, a besoin de l’aide matérielle, in-

tellectuelle de tous les militants, démocrates et sympathisants. Nous les remercions d’envoyer

leurs dons (à l’ordre du PPM), leurs articles et leurs suggestions au siège du PPM :

- Ancien Réservoir de Trénelle - Fort-de-France.

Directeur de la Publication : Daniel COMPERE

18, Allée des Perruches - Rte de l’Union - 97200 Fort-de-France

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Vous souhaitez adhérer au Parti Progressiste Martiniquais ?1. Téléchargez le bulletin d’adhésion :http://www.ppm-martinique.fr/wp-content/uploads/2009/09/Bulletin-dadhésion-2006.pdf2. Complétez-le3. Renvoyez-le à : PPM – Ancien réservoir de Trénelle – 97200 Fort-de-Franceou par Mail à [email protected] le site du PPM :http://www.ppm-martinique.fr

Cette année encore, le PPM, avec gravité, a commémoré ence samedi la date historique de lʼabolition de lʼesclavage.

Ce fut dʼabord une messe en lʼéglise des Terres Sainville ; undéfilé dans lequel prenaient place le président du parti SergeLETCHIMY, le maire de la capitale Raymond ST LOUIS-AU-GUSTIN, des membres du PPM, des élus, des militants, desMartiniquais, emmenés par la « cora » de « Djimbé » et le« Sang bang » du groupe de tambours africains de la Guinée,invité par le SERMAC. Le cortège se rendait à la place du 22mai à Trénelle ; là, Serge LETCHIMY prononçait son discours :« Nous sommes ici aujourdʼhui pour rester dans la ligne fixéepar Aimé CESAIRE, appuyée par Camille DARSIERES et le DrALIKER. Nous ne sommes pas dans lʼoubli douloureux maisdans le rappel constructif ; déserter son passé revient à  dé-serter son présent ». Et plus de quinze minutes durant, le pré-sident exhumait Boukman, Mackandal, Romain, toutes lesgrandes figures du panthéon esclavagiste pour un nécessairerappel mémoriel. Et alors lʼartiste haïtien James GERMAIN,griot albinos à la voix divine venu en Martinique pour une pres-tation humanitaire avec le groupe « Arpège », lançait son in-cantation : « Vivilo, fais an vèvè pou nous, ago, ago » aux dieuxdu temple vaudou.

Dépôt de gerbe au pied de la statue de René-Corail, en pré-sence du maire de Pétion ville, Mme Liliane PARENT.« Vaillant 22 mé » que souhaitait le maire de Fort-de-France,sous le regard blessé mais déterminé de cette mère projetéevers un destin incertain. Le 22 mai, pour nous Martiniquais, estla seule date qui vaille, estampillée sur lʼacte de naissance denotre peuple. Gardons-nous de lʼoublier si nous ne voulonsnous oublier nous-mêmes !

SDE

La gerbe du PPM Mme Liliane PARENT, mairede Petionville

Le griot haïtienJames GERMAIN

La gerbe des maires de FFce etPetionville Le defile PPM

Le griot et les mairesLe recueillement de Serge

R. St LOuis-Augustin Le spectacle du SERMAC