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Le seul journal francophone de l’Université McGill • Le mardi 6 février 2007 — Volume 96 Numéro 17 • Au moins un légume orangé depuis 1977. Le conte Portrait de la pop-oralité au Québec en pages centrales Munroe-Blum, Duceppe, Clark, van Sant... aussi à l’intérieur

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Portrait de la pop-oralité au Québec en pages centrales Munroe-Blum, Duceppe, Clark, van Sant... aussi à l’intérieur Le seul journal francophone de l’Université McGill • Le mardi 6 février 2007 — Volume 96 Numéro 17 • Au moins un légume orangé depuis 1977.

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Le seul journal francophone de l’Université McGill • Le mardi 6 février 2007 — Volume 96 Numéro 17 • Au moins un légume orangé depuis 1977.

Le contePortrait de la pop-oralité au Québec

en pages centrales

Munroe-Blum, Duceppe, Clark, van Sant... aussi à l’intérieur

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acceptera les nominations pour :_ Président de l’AÉUM_ Vice-président (Affaires universitaires)_ Vice-président (Communications)_ Vice-président (Finances)_ Vice-président (Externe)_ Vice-président (Interne)

_ Questions référendaires initiées par des étudiantsRamassez un dossier de nomination ou de pétition dès le lundi 5 février, 2007, au bureau d’Elections McGill (bureau 405, édifi ce Shatner), ou visitez notre site web: www.electionsmcgill.ca

Dès le lundi 5 février 2007, Elections McGill

Elections McGill acceptera dès le lundi 5 février des pétitions pour :

Toute question référendaire doit être soumise au bureau d’Elections McGill au plus tard à MIDI, le VENDREDI 16 FÉVRIER, 2007.

Les dossiers de nomination doivent être soumis au bureau d’Elections McGill au plus tard à MIDI, le MARDI 27 FÉVRIER, 2007.

Nous n’accepterons pas de soumissions en retard.

Questions ou commentaires? Écrivez nous à :[email protected]

www.delitfrancais.com

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03xle délit | 6 février 2007www.delitfrancais.com

RÉDACTION3480 rue McTavish, bureau B•24

Montréal (Québec) H3A 1X9Téléphone : +1 514 398-6784

Télécopieur : +1 514 [email protected]

Rédacteur en chef [email protected]

Alexandre de LorimierChefs de pupitre–nouvelles [email protected]

Maysa PharèsMorgane Lapeyre

Chefs de pupitre–arts&culture [email protected]

Pierre-Olivier BrodeurLaurence Martin

Rédacteur-reporterMarc-André Séguin[+ 1 poste vacant et disponible]

Coordonnateur de la production [email protected]

[Poste vacant et disponible]Coordonnateur [email protected]

Mathieu MénardCoordonnatrice de la correction

Laurence Bich-CarrièreCollaboration

Antoine Boudet, Laurence Côté-Fournier, Florence Coupry, Alexandra Havrylyshyn, Andreea Iliescu, Hugo Lavallée, Louis Melançon, Victor Raynaud, Julie Rousseau, Amélie Rousseaux, Véronique Samson

CouvertureMathieu Ménard

BUREAU PUBLICITAIRE3480 rue McTavish, bureau B•26

Montréal (Québec) H3A 1X9Téléphone : +1 514 398-6790

Télécopieur : +1 514 [email protected]

Publicité et direction générale Boris Shedov

Gérance Pierre Bouillon

Photocomposition Jack Sanford

The McGill Daily • [email protected]

Rishi Hargovan

Conseil d’administration de la Société de publication du Daily (SPD)

Alexandre de Lorimier, Kelly Ebbels, Joshua Ginsberg, Rishi Hargovan, Peter Lipsombe, Erika Meere, Joël Thibert, Jefferey Wachsmuth, Aaron Wright

[email protected]

Le seul journal francophone de l’Université McGill

Éditorial

Vous voulez rencontrer le consul de Belgique? Joe Clark et Gilles Duceppe? Heather Munroe-Blum? Une seule façon de le

faire: écrire pour Le Délit à [email protected]!

Alexandre de LorimierLe Délit

La semaine dernière a été houleuse dans l’arène politique québécoise. Un peu plus d’un an après son

élection, le chef du Parti québécois s’est vu entraîné dans une tourmente que de nombreux commentateurs politiques avaient prédite depuis longtemps. André Boisclair, qui n’avait pourtant jamais réellement profité d’une lune de miel politique, a vu le vrai visage de ses collègues du PQ qui ne font qu’une bouchée des chefs qui ne suivent pas la ligne du parti.

Tout a commencé lundi quand La Presse et Le Devoir ont tous deux dévoilé des sondages concurrents sur les intentions de vote des Québécois. Bien que les opinions ne s’accordaient pas en ce qui concernait le Parti libéral ou l’Action démocratique, les deux sondages confirmaient une chute marquée du PQ. Avec 32 p. cent des intentions de vote dans Le Devoir, le parti d’André Boisclair ne parvenait soudainement plus à ravir le pouvoir aux libéraux.

Ces portraits de l’électorat québécois, aussi discutables soient-ils, n’étaient que deux pavés de plus dans une mare déjà bien remplie. La démission de Bernard Landry avait causé une onde de choc dans le camp souverainiste. La venue de ce jeune chef dynamique et pimpant avait-elle berné les militants du Parti? Certes, il devait incarner le renouveau mais pouvait-il faire fonctionner cette machine qui tente de rallier toutes les tendances autour d’une cause, ici la souveraineté?

Toutes ces questions ont été posées et débattues au moment de l’élection du

nouveau chef. Elles reviennent pourtant au goût du jour alors qu’André Boisclair prouve qu’il ne parvient pas à rallier ses troupes. De fait, la même semaine, il a démontré sa position en faveur du néolibéralisme économique en écartant les syndicats qui sont pourtant des alliés de longue date du PQ. Les membres de SPQ libre, un club plus radical au sein du Parti, avaient alors du mal à affirmer leur allégeance au jeune chef, tandis que la base du parti ne se reconnaissait pas

non plus dans ce discours.Souffrant de prétention et exhibant un

je-m’en-foutisme notoire, André Boisclair n’a jamais été le choix de la majorité des souverainistes. Cette nouvelle génération de politiciens de carrière ne semble pas réussir à montrer quelque empathie que ce soit pour

les besoins des citoyens. Éclipsés par des géants de la politique nationale, le nouveau chef du Parti québécois et ses acolytes manquent de substance tout en cultivant des ambitions malsaines, parsemées de choix pour le moins douteux.

La tradition social-démocrate du Parti québécois doit résister au passage d’André Boisclair. Bien que les partis de gauche se soient ralliés sous la bannière de Québec solidaire, ce nouveau parti ne peut pas

remplacer le PQ. Le système électoral en place ainsi que l’accueil plutôt froid réservé aux partis de gauche en dehors de quelques comtés montréalais ne lui permet pas de gagner de terrain. Pourtant, il est étonnant que Françoise David et son équipe n’aient pas sauté sur cette occasion de défendre les convictions solidaires des Québécois. Le parti devra faire l’effort supplémentaire d’être entendu sur toutes les tribunes s’il veut diffuser son message.

Quant au Parti québécois, ses performances à court terme sont encore incertaines. La sortie de Bernard Landry contre André Boisclair démontre l’opinion véritable de la vielle garde du Parti à l’encontre de la soi-disant génération du renouveau. Toutefois, on s’attendrait à ce que l’homme qui a mis le Parti dans le pétrin fasse preuve de bien plus de réserve.

Pendant ce temps, André Boisclair n’a pas tardé à retourner sa veste. En congrès devant les députés et les militants du Parti pendant la fin de semaine, il a affirmé son adhésion retrouvée à la social-

démocratie. Grâce à cette sortie, même les têtes pensantes du SPQ libre ont renoué avec le chef. Cette bonne dose d’opportunisme suffira-t-elle à remettre le Parti sur les rails? Eh bien nous le saurons très bientôt, la rumeur voulant que les élections générales aient lieu dès la fin mars. x

Faire mieuxnational

Le Délit dans l’antre de la rectrice

L’amour au temps des colères du Brahmane

Les sièges restent vides malgré l’AG

Tout un gusse ce Gus (Van Sant).

1387 14L’usage du masculin dans les pages du Délit vise à alléger le texte et ne se veut nullement discriminatoire.

Le Délit (ISSN 1192-4609) est publié la plupart des mardis par la Société de publication du Daily (SPD). Il encourage la reproduction de ses articles originaux à condition d’en mentionner la source (sauf dans le cas d’articles et d’illustrations dont les droits avant été auparavent réservés, incluant les articles de la CUP). Les opinions exprimées dans ces pages ne reflètent pas nécessairement celles de l’Université McGill. L’équipe du Délit n’endosse pas nécessairement les produits dont la publicité paraît dans ce journal.Imprimé sur du papier recyclé format tabloïde par Imprimerie Quebecor, Saint-Jean-sur-le-Richelieu (Québec).Le Délit est membre fondateur de la Canadian University Press (CUP) et du Carrefour international de la presse universitaire francophone (CIPUF).

Volume 96 Numéro 17

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04xle délit | 6 février 2007www.delitfrancais.com Controverses

Prise d’otage pour les verts

Tandis que la Conférence de Paris sur les changements climatiques accueillait, vendredi dernier, le bilan environnemental des membres du Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évo-lution du climat ainsi que leurs éventuelles pro-positions pour contrecarrer les dérèglements iné-luctables présagés par la communauté scientifi que internationale, des militants de Greenpeace ont tenté d’attirer l’attention des parisiens sur l’impé-ratif de lutter contre le réchauffement climatique. En bâillonnant les quelques statues et monuments de leur paysage quotidien, ils espéraient dissiper un sentiment défaitiste et éveiller les consciences de leurs concitoyens sur le fait qu’il n’est pas trop tard pour agir. C’est donc dans cette intention que le zouave du pont de l’Alma a été pris d’assaut par des groupuscules écologistes. (TV5)

Virilité capillaire

Le propriétaire d’un institut de beauté lon-donien a mis au point une crème de soin pour cheveux à base de racines de plantes et de sperme de taureau, ingrédient très particulier dont les bienfaits, selon lui, outrepassent ceux des huiles de truffe et d’avocat. Le salon de Hari Salem situé dans le quartier de Chelsea offre donc à sa clien-tèle curieuse ou prête à tout pour des cheveux éclatants de santé, un soin de 45 minutes com-prenant un massage avec cet agrément inodore et soigneusement réfrigéré avant utilisation. (Yahoo/Reuters)

Pression environnementale

L’héritier du trône d’Angleterre, dont l’enga-gement pour la préservation de notre écosystème est largement reconnu, s’est vu remettre ce week-end, à l’Université Harvard, le prix de citoyen de l’année en matière de protection de l’environne-ment. Dans son discours, le prince Charles a ainsi rappelé la menace que représente le réchauffement climatique pour l’espèce humaine et l’importance d’adapter les économies nationales aux impéra-tifs environnementaux. Son passage aux États-unis pourrait-il donc expliquer le récent élan de solidarité écologique de George W. Bush? La se-maine dernière, ce dernier se serait en effet résolu à appuyer le développement de sources d’énergie alternatives dans le but de réduire la dépendance pétrolière du pays. (AFP/La Presse)

Exposition de gâteaux royaux...

Le château de Windsor accueillera, le mois d’avril prochain, une exposition de gâteaux de la couronne, couvrant la période 1840-1947, en l’honneur des noces de diamant de la reine Élisa-beth II. Des morceaux de ces péchés gourmands de la famille royale ont en effet été précieusement conservés dans des petits contenants sur lesquels est inscrite la date du mariage de la reine Victoria et du prince Albert, le 10 février 1840. Le diamè-tre des gâteaux de cette époque est estimé à envi-ron trois mètres, et leur poids minimal, 150 kilos. Compréhensible donc, qu’il y ait des restes... (AP/La Presse)

Des vertes et des Verts

En hausse

L’UNIVERSITÉ DE SHERBROOKE

Car, n’est-ce pas, comme l’a dé-claré son recteur, Bruno-Marie Béchard, à la collation des grades, «l’Université de Sherbrooke doit infl uencer le nouvel ordre mon-dial». C’est beau la modestie.

Au neutre

L’IND-EAU-NÉSIE

Face à l’étendue des dégâts et victimes causés par les inonda-tions paralysant Jakarta depuis plusieurs jours, le président indonésien a consenti à ouvrir les barrages de Manggarai qui protègent non seulement les quartiers riches mais aussi son propre Palais. Belle solidarité. (TV5/AFP)

En baisse

LA HAUTEUR DU VENTRE

Stéphane Dion a fait installer une salle d’exercice à Stornway, la rési-dence offi cielle du chef de l’opposi-tion, à laquelle il compte bien ren-voyer Stephen Harper. Sauf que ce commentaire lui a valu les foudres de certains commentaires. «C’est un coup en bas de la ceinture». Non, la bedaine, c’est en haut de la ceinture.

En trois vitesses

IL Y A DES PROPOS plaisants qu’on tient le samedi soir. Ainsi brodions-nous sans trop y croire que le Superbowl pourrait se révéler une métaphore du succès de l’audacieux plan vert des Américains: Colts contre Bears, cow-boy contre nature (29-17 Colts). Sur le sujet général du vent d’écologisme politique qui souffl e sur nos politiciens comme le blizzard chez DairyQueen, plutôt que de grincer qu’il s’agit sans doute d’un bon compromis pour rallier les jeunes sans parler d’éducation, les vieux hippies et les corporatistes qui veulent se donner bonne conscience (et après tout, même les plus radicales des plantes ne vo-tent pas, sauf si vous êtes au PQ), je faisais dans l’autobiographique, rapportant que la contribution la plus extraordinaire de l’école primaire à mon civisme écologique –et c’est vraiment générationnel–, c’est de m’avoir ap-pris l’importance du bac à recyclage pour y jeter les feuilles dont j’aurais préalablement noirci les deux côtés (d’ailleurs, utilisateurs de Macintosh mis à part, vous aurez remar-qué que la corbeille a été remplacée par un bac à recyclage il y a belle lurette). Il est tou-jours bon, ajoutai-je, d’avoir des écolos dans son entourage, ne serait-ce que pour aspirer à avoir des rues propres, rêve qui semble dia-blement lointain en cette période de l’année où je songe sérieusement à apprendre le tir à l’arbalète pour protéger mes poubelles des griffes d’écureuils écumants, contribuant ainsi au bonheur net et naïf du maire Tremblay en faisant de sa ville une petite Chuisse romaine, cf. Astérix en Helvétie, bande d’ignares. Exempli

gratia de l’utilité d’avoir un écologiste gentil et rationnel près de soi: «Kate, y’a pas de poubel-les dans les environs, soit tu prends mon vieux paquet de gomme, soit je le jette par terre».

Malheureusement, ma remarque devait sentir le beurre rance –certaines sont aigres, d’autres ductiles–, car une fl oppée de fana-tiques environnementaux (très exactement deux: une frencheuse de berger du Larzac et un tree-hugger à la Pierre Lapointe dans le bye-bye de RBO) sont immédiatement venus me faire la morale sur le réchauffement de la planète. Je doute fort que ce qui suit rende justice aux initiatives de Greening McGill. C’est un té-moignage choisi (car on m’a aussi fait le coup de nos-ancêtres-qui-vivaient-en-harmonie-avec-la-natûre, mais ceci semble se destiner à être une chronique d’actualité).

Attaque: «Je suis certain que tu n’as pas éteint tes lumières jeudi soir entre 19h55 et 20h. On te demandait seulement de donner cinq minutes de répit à la planète. C’était un geste symbolique.» Sous-entendu: «Si tu n’es pas avec nous, tu es contre nous». Pécheresse ou juste? Au-delà de la subtilité infi nie de cet argument rhétorique qu’on entendait naguère à propos de la guerre au terrorisme, ce qui m’embête, plus, c’est l’importance accordée au tout-puissant geste symbolique.

Le geste symbolique, c’est un rite. Et le rite, c’est l’apanage de la religion. Et l’envi-ronnementalisme militant me semble une religion. Elle a ses prophètes, ses illuminés et même sa célébration, le jour de la Terre. Et pour une religion d’athées urbains, elle a de

forts relents de Genèse: l’homme, qui vivait dans un paradis terrestre, a touché à l’arbre de la connaissance et depuis connaît le mal. Dis-cours primitivisme où mère Nature est adorée comme un totem vengeur dont il ne faudrait pas troubler le sommeil par la peccadille de laisser couler l’eau du robinet pendant qu’on se brosse les dents.

Je n’aime pas cette religion passive où l’homme doit subir et ne peut toucher la na-ture, je n’aime pas adorer des dieux barbares que je dois craindre et je n’aime pas qu’on m’enfonce l’idée que toute industrie humaine est obscurantiste. Et surtout, j’ai horreur de me faire dire quoi faire.

J’aime ma maison chauffée à l’hydroélec-tricité, mon réfrigérateur au CFC et je n’ai pas la patience d’élever un troupeau de carottes. Mais j’ai celle d’appuyer toute politique éco-logique bien menée qui appuie la recherche et le développement.

L’environnement, mes amis, ne se résume pas à la nature. L’environnement, c’est le mi-lieu. La nature inclut la nature humaine.

Sans commentaireLaurence Bich-Carrière

Citationde la semaine

«A French version will

follow later in the week...»

Nous accordons la palme de la citation de la semaine à l’Arts Undergraduate Society (AUS) qui, dans son courriel de masse laissait planer cet élégant espoir. Mettons cela sur le compte de leur sens poussé de l’ironie... pourquoi pas l’année prochaine? Ah non, s’cusez, y paraît qu’on se plaint beaucoup. Reconaissons donc là l’impeccable sensibilité de l’AUS.

Il n’y a pas eu de jardin d’Éden

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05xle délit | 6 février 2007www.delitfrancais.com

Controverses

De ce qui se fait dans votre dos

Nous ne voulons pas dispu-ter la véracité des deux proposi-tions dans le titre de l’Ayatollah de la langue du 30 janvier «Le Délit se plaint et ça change!» car en ef-fet «Le Délit se plaint» et il est vrai que «ça change»: un panneau af-fichant les règlements en français est maintenant placé à l’entrée du Gert’s. Ces deux déclarations prises séparément sont tout à fait vraies. Par contre, l’implication que l’une ait provoqué l’autre, c’est là où nous voyons une erreur.

Peu après l’installation des nouveaux panneaux d’information sur la réglementation à l’intérieur du Shatner, nous avons remarqué

que les panneaux affichant les rè-glements pour la salle de bal (et pour Gert’s) étaient unilingues an-glophones. En tant que commis-saires francophones, nous som-

mes allés avertir l’AÉUM. Pauline Gervais, la directrice (francophone) de l’AÉUM, nous a répondu qu’il s’agissait d’une erreur et que les panneaux en français étaient sup-posés arriver et être installés avec les autres, puisqu’elle s’occupait de

cette situation depuis bientôt un an. Après tout, ce genre d’affichage dans le Centre universitaire William Shatner doit nécessairement être dans les deux langues. Étant don-

né que tous les autres panneaux sont bilingues, il ne s’agit pas ici d’un manque de respect pour les francophones ni d’un oubli de la part de l’AÉUM.

Finalement, la situation avait été remarquée immédiatement et

ce n’est certainement pas les plain-tes du Délit qui ont fait avancer les choses. Nous trouvons d’ailleurs que Le Délit se plaint souvent de l’AÉUM par rapport au français sans trop faire enquête sur la situa-tion ni de s’informer à savoir si et comment l’AÉUM tente de résou-dre le problème perçu, alors qu’il ignore certains dossiers qui pour-raient être importants pour ses lecteurs. Par exemple, une motion a été présentée au Sénat concer-nant la situation des francophones à McGill. Où était Le Délit? Nous nous le demandons encore, puis-que le McGill Tribune s’est fait un plaisir de couvrir la nouvelle en janvier, mais pas Le Délit. Il est dé-solant que lorsque Le Délit parle de l’AÉUM, c’est souvent pour l’ac-

cuser (parfois à tort) de négliger les francophones et que lorsque l’AÉUM défend les intérêts des francophones, ces efforts ne se re-trouvent pas dans les pages du seul journal francophone à McGill.

— Marie Gagné et David-Marc Newman, commissaires francophones de l’AÉUM

Vous aussi voulez nous louer ou (plus vraisemblablement) vous plaindre? Écrivez-nous à [email protected] ou déposez votre lettre à notre at-tention au local B∙24 de l’édifice Sha-tner. Nous publierons intégralement les lettres jusqu’à 300 mots et corrigerons même l’orthographe au besoin. Ça, c’est du service.

Courrier du lecteur

DCLe guide alimentaire canadien accomplit un rôle crucial d’information

dans une réalité toujours plus marquée par la mondialisation. Dans sa toute nouvelle version, ce document permet de découvrir des ali-

ments aussi exotiques que le tofu, le couscous ou encore le kéfir. Par ailleurs, la plus récente mouture s’accorde bien avec la capacité d’attention du lecteur canadien moyen, semblable à un pigeon ou à un furet. Son système nominal permet aux obsessifs-compulsifs de mesurer les portions et de compter les calories avec toujours plus de précision. Par ailleurs, cette bible de la saine alimentation respecte les désirs gourmands du Canadien avec des suggestions suffisamment vagues et molasses pour être savamment ignorées.

Dans un tout autre ordre d’idées, la palette de couleurs énergique et la panoplie de dessins ludiques saura charmer toute une génération de bambins. Pendant quelques heures, ils pourront échapper à leurs devoirs de mathéma-tiques et à leurs dictées pour apprendre les subtilités de l’alimentation. Ces enfants privilégiés, tout en sirotant leur quintessenciel berlingot de lait, vont découvrir qu’il existe autre chose par-delà l’univers merveilleux des crottes au fromage, des saucisses à hot-dog (après le coup du chien chaud, voici que le journal officiel de mon correcteur automatique recommande de transformer le hot-dog en «sauci-pain») et des indescriptibles et gélatineuses sucreries.

Au final, on peut espérer que le guide alimentaire canadien permettra à la fière population de récolter un fameux prix Darwin. En insistant autant sur les bienfaits de la consommation d’eau, ce fascinant document parviendra peut-être à appliquer les préceptes de la sélection naturelle en inspirant à cer-taines gens une consommation démesurée d’eau et à mourir de déséquilibre électrolytique.

L’idée du guide alimentaire canadien m’est d’emblée profondément antipathique. D’une part, et cette seule raison devrait suffire, parce qu’il est outrageusement stupide d’apposer à un «guide alimentaire»

une citoyenneté. Le Canadien n’a pas à ma connaissance des besoins spécifiques. Son mode de vie est plus ou moins le même qu’un Américain, avec la poutine en plus, ou qu’un Allemand, la choucroute en moins. Un guide alimentaire c’est aussi très stupide parce qu’il est dommage qu’un pays prospère doive encore informer sa population sur la manière de s’alimenter.

Ensuite, l’élan révolutionnaire qui perpétuellement me porte à défendre ma liberté est contrarié. Si ma liberté, c’est de foncer chez Saint-Hubert à dix heures du soir pour m’y faire servir un poulet suralimenté avec des pétates frites imbibés de substances cancérigènes, c’est mon affaire! Si j’ai envie de passer mes fins de semaine à faire la tournée des cabanes à sucre du Québec, de quoi se mêle le Canada? Laissez-nous donc grossir et diabétiser en paix! Où du moins, au lieu de tanner la populace innocente, attaquez-vous plutôt à Air Canada, par exemple, qui juge bon de servir à des passagers qui resteront assis pendant cinq heures des sandwichs Subway dont l’apport calorique surpasse vraisemblablement le nombre de têtes nucléaires comptabilisées au Pentagone. On est en démocratie mautadit!

Enfin, le guide alimentaire est simplement nul. «Mangez au moins un légume foncé et un légume orangé chaque jour», conseille-t-il. Il oublie clairement la population daltonienne... Mais il fait surtout croire au bétail junk-foodés que nous sommes qu’UN malheureux brocoli et UNE carotte sont suffisants. Pas besoin d’un guide pour savoir que c’est faux.

Pour ou contre le Guide alimentaire canadien?

De temps à autres, Le Délit choisit un sujet controversé. Les journalistes devant défendre respectivement le pour et le contre sont tirés au hasard. Cette semaine, Maysa Pharès et Mathieu Ménard s’affrontent dans le ring. Il est à noter que les positions exprimées ne sont pas nécessairement partagées par leur auteur.

C D

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La principale Heather Munroe-Blum

invite étudiants, professeurs etmembres du personnel à

prendre part à un forum sur lesquestions relatives à la vie au

sein de la communauté del’Université McGill

ASSEMBLÉEGÉNÉRALE

Le lundi 12 février 2007De 12 h à 13 h 30 Pavillon d’anatomie et de médecine dentaire Strathcona3640, rue UniversitySalle M-1

HIVERNALE

C’est notre université. Oeuvrons ensemble à son amélioration.

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Parce que la culture, c’est toujours des bonnes nouvelles... venez nous recontrer le mardi à 18h15 dans le local du Délit.

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07xle délit | 6 février 2007www.delitfrancais.com

Le Délit (LD): Nous n’entendons plus parler du Plan directeur? Où en est-il? Heather Munroe-Blum (HMB): Il y a eu un rapport l’année dernière et le plan directeur vient d’être relancé cette année. J’attends du feedback au cours des prochains mois. En 185 ans, McGill n’a jamais eu de plan pleinement développé pour son infrastructure physique. C’est un point de départ. Ensuite il y a deux autres éléments au plan directeur. Nous avons un désir immédiat de faire en sorte que les nouveaux développements s’alignent sur les valeurs et les principes décrits dans le plan. Puis il y a la question des priorités en termes d’infrastructures. Faut-il que ce soient de nouveaux achats, ou la rénovation des infrastructures déjà existantes?

LD: Le développement durable est-il une priorité?HMB: Absolument. Mais la négligence n’amène pas la durabilité. Nous voulons être en harmonie avec l’environnement, mais nous avons des demandes d’espaces qui ne sont pas satisfaites pour le moment. Beaucoup d’anciens bâtiments n’ont pas été rénovés comme il le faut.

McGill Daily (MD): Vous dites avoir manifesté dans votre jeunesse pour la réduction des frais de scolarité. Aujourd’hui vous faites pression pour le dégel des frais québécois et la dérégulation des frais internationaux. Qu’est-ce qui a changé?HBM: Je pense qu’il est tout à fait naturel pour des étudiants de vouloir maintenir les frais à un montant qui soit le moins élevé possible. Les étudiants ont tendance à abor-der la question d’un point de vue individuel et non collectif, sans se soucier des consé-quences à long terme.

Tous les étudiants ne sont pas contre la dérégulation. Il existe plusieurs points de vue sur ce qui serait souhaitable au sein du monde étudiant. En tant qu’administration nous n’avons pas le luxe de proposer à tout étudiant qualifié de venir dans notre institu-tion, quels que soient ses moyens financiers. Nous aimerions le faire, mais nous ne rece-vons pas assez de financement du gouver-nement. Quiconque ne suit pas les impacts des politiques pense que si la scolarité est gratuite, plus de gens iront à l’université. Ce n’est pas une interprétation intuitive et ce n’est pas conforté par les faits. La réalité veut que les étudiants qui ont peu de ressources aient besoin de plus que la gratuité. Ils ont besoin de bourses pour faire face au coût de la vie. C’est là que se pose la question de la justice sociale.

Je pense qu’il est impératif que le gou-

vernement contribue à une part considérable du financement. La philanthropie, les dons, sont à la marge de cela. MD: Vous étiez à l’Université de Toronto durant le gouvernement conservateur de Mike Harris. Ici, vous militez pour l’augmentation des frais de scolarité et du financement gouvernemental. Mais vous savez qu’en Ontario, l’augmentation des frais de scolarité a abouti à des coupes dans le finance-ment des universités. Qu’est-ce qui vous permet de penser qu’il en sera autrement au Québec?HMB: À vrai dire, le gouvernement a aug-menté son financement des universités, sur le long terme. Le nombre d’étudiants venant de familles où les parents n’avaient pas été à l’université a en fait augmenté. Il faut un fort engagement public.

The Tribune (TT): On vous a reproché d’avoir mené votre Town Hall comme une démarche de relations publiques. Qu’en pensez-vous?HMB: Mes assemblées générales ne sont pas pour moi des exercices de relations publi-ques. C’est par la force des choses qu’elles le deviennent. En tant que rectrice d’une très grande université, je ne vois qu’une très pe-tite part de la communauté étudiante et je

vois toujours les mêmes étudiants. Ma mo-tivation est d’écouter des gens qui n’ont pas d’autres occasions d’interagir avec moi.

Je dirais que cette fois, la majorité des étudiants avaient orchestré leur intervention à l’avance et présenté leurs requêtes d’une manière agressive qui n’ouvrait pas la voie à la discussion, en m’opposant des faits qui n’en étaient pas. Aucun commentaire ni aucune question ne sont inappropriés. Mais cette assemblée générale n’était pas produc-tive par la manière oppositionnelle dont les commentaires ont été faits.

LD: Vous dites vouloir écouter la communauté étu-diante mais vos discours à l’externe insistent fa-rouchement sur la compétitivité de l’université, la-quelle semble reposer uniquement sur les étudiants en maîtrise et doctorat, pas les premiers cycles. Ne pensez-vous pas que cela peut être une cause de frustration?

HMB: Je me soucie profondément des étu-diants de premier cycle. Je parle même d’un modèle différent d’aide étudiante pour les étudiants de premier cycle et ceux de deuxiè-me cycle. Je pense être la seule rectrice à m’être engagée dans un groupe d’étude sur la vie étudiante et l’acquisition des connaissances (Life and Learning Taskforce). Pour moi, McGill a pour mandat l’excellence dans l’enseigne-ment et la recherche. Nous avons la plus grande population d’étudiants de deuxième cycle au Canada. C’est une part importante du caractère de l’université. Quand je parle d’être compétitif, il s’agit d’offrir le meilleur en termes de qualité de services, d’enseigne-ment, de soutien financier.

MD: Est-ce que Darren Entwistle et Thierry Vandal ont été nommés sur le Conseil de direction en vue de la campagne pour le capital?HMB: Ils ont été choisis pour le regard qu’ils amènent. Le Board doit apporter l’expertise nécessaire à une bonne gouvernance. Nous avons toujours eu une très petite proportion de personnes ayant une grande expérience financière, alors que nous faisons un mil-liard$ de revenus par an. Nous avons par

conséquent besoin d’un éventail d’expertise.

MD: Que pouvons-nous attendre de la campagne pour le capital de cet automne?HMB: Ce sera la première campagne de l’histoire de McGill destinée au finance-ment de nos priorités académiques. Nous espérons que les gouverneurs seront tous de bons ambassadeurs pour l’université. Nous avons pour mission d’augmenter les reve-nus de l’université pour soutenir les activi-tés académiques axées sur les gens, et moins sur les infrastructures. Nous travaillons beaucoup à solliciter l’engagement de nos anciens pour leur soutien financier et pour qu’ils se fassent les ambassadeurs de l’uni-versité. Vous verrez plus tard qu’avoir une alma mater reconnue dans le monde sera un atout indéniable.TT: Est-ce que le financement corporatif peut por-ter préjudice à la mission académique de McGill?

HMB: Nous voulons protéger la mis-sion académique quelle que soit l’origine du financement. Les gens qui nous donnent de l’argent pensent souvent nous dire quoi en faire. Nous n’acceptons pas d’argent qui nous mettrait en conflit avec nos valeurs académiques. Le gouvernement aussi [pas seulement les corporations] a un grand inté-rêt à ce que nos recherches servent l’indus-trie et l’économie. Nous travaillons fort pour protéger nos libertés.

LD: Vous avez rencontré le leader bloquiste Gilles Duceppe hier, qu’est-il ressorti de votre conversa-tion?HMB: Je ne l’avais jamais rencontré aupa-ravant. C’est un homme dynamique. C’était mutuellement informatif, intéressant et plaisant. Je pense qu’il est venu à McGill sachant ce qu’elle était en tant qu’univer-sité. Il a trouvé l’université changée. Nous sommes très fiers du caractère francophone de Montréal et du Québec et de ce que ça nous apporte. Il ne se définit pas comme Canadien, ce qui est intéressant. Mon rôle en tant que personnage public a beaucoup à voir avec le fait d’être Canadienne. Je pense que tant le Québec que le Canada jouent un rôle dans notre société. Nous avons parlé des domaines dans lesquels nous pourrions être en accord et travailler ensemble au-delà de nos importants désaccords idéologiques. LD: Comment vous sentez-vous face au mouve-ment souverainiste?HMB: Ma devise est de trouver les points communs, pas les différences. Je pense que ce qui sert McGill sert le Québec, qu’il soit souverain ou pas. Avoir une population édu-quée est une priorité du Québec. Je pense que nous avons plus en commun en termes de politiques publiques. Par ailleurs, quand un anglophone pense à la souveraineté, il a tendance à croire qu’il s’agit d’une sépara-tion totale du Canada. Or, je n’ai jamais vu quiconque se décrivant comme souverainis-te qui ait une telle idée, il s’agit d’un rapport différent au Canada. Mais c’est un débat in-téressant.

LD: Quelle est votre opinion sur l’accommodement raisonnable? Pensez-vous que McGill ait un rôle à jouer dans le débat?HMB: C’est une question qui nous concerne tous. Il est question de savoir comment nous nous percevons en tant que société. Il est re-marquable d’avoir tant d’étudiants d’origines différentes. Nous faisons beaucoup pour les accueillir et les accommoder. Les étudiants locaux viennent ici parce qu’ils savent qu’ils seront avec des gens venus de partout, et les étrangers viennent pour le mélange aussi. Je pense que nous jouons un grand rôle dans la société pour alimenter le débat. Beaucoup de nos universitaires font de la recherche et s’expriment sur la question. Je crois en l’im-portance de la recherche. L’accommodement durable a besoin de débats académiques. Il ne faut pas fuir les discussions difficiles.

Propos recueillis par Maysa Pharès et Alexandre de Lorimier.

De la rectrice à la presse mcgilloiseVendredi dernier, Le Délit, le McGill Daily et le Tribune étaient conviés à l’entrevue annuelle de Heather Munroe-Blum avec les médias étudiants.

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Heather Munroe-Blum se prête de bonne grâce au jeu des questions des médias étudiants.Mathieu Ménard/Le Délit

Nouvelles

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08xle délit | 6 février 2007www.delitfrancais.com

Nouvelles

Assemblée asphyxiée

Mathieu MénardLe Délit

La deuxième assemblée gé-nérale de l’AÉUM se tenait jeudi dernier, avec un ordre

du jour ambitieux de six motions et un exil de dernière minute au cen-tre Mont-Royal. Après un retard de trente minutes, la séance –bilin-gue– s’est ouverte sur une proposi-tion de fusion entre l’AÉUM et le Centre étudiant de l’université Mc-Gill (SCMU), afin de réunir l’asso-ciation étudiante et ses opérations financières. Simple formalité, la motion a obtenu l’approbation de l’assistance.

La motion d’imputabilité de l’exécutif, présentée par la vice-présidente aux clubs et services, Floh Herra-Vega, a été suivie d’un effervescent exercice de démo-cratie. Après la proposition d’un sous-sous-amendement établis-sant la parité des sexes dans l’accès au microphone, les intervenants se sont prononcés en faveur du vote. La motion et ses nombreux amen-

dements (présence obligatoire de l’exécutif, publication électronique des réponses, nécessité de l’exécutif de révéler ses opinions) ont obtenu l’accord de la centaine d’étudiants présents.

Les motions suggérant de consacrer le mois de février à l’his-toire des Noirs et de mettre en place un ensemble d’initiatives de développement durable ont été ap-prouvées rapidement à une majo-rité sans équivoque. Par la suite, les sceptiques ont remis en question la faisabilité et le pragmatisme du gel puis de l’abolition des frais de sco-larité. Les votants ont finalement appuyé ce qu’un étudiant a quali-fié d’«opposition aux plans débiles de Jean Charest» pour donner leur accord à la notion «d’éducation en tant que bien social plutôt que bien de marché».

La cinquième motion, portant sur l’interdiction des collectes de sang dans l’édifice Shatner, a été close par le président de l’assemblée pour raisons juridiques. Puisque les principes anti-discriminatoires et le contrôle des activités ayant lieu dans le bâtiment de l’AÉUM sont décrits dans la Constitution, Corey Shefman a établi ipso facto que la question était anticonstitu-tionnelle plutôt que de laisser place aux délibérations. «Nous avons at-tendu deux heures pour discuter

ce point», a protesté une étudiante, pendant que la salle se vidait pro-gressivement. «J’ai reçu les mo-tions trop tard pour obtenir un avis juridique», a expliqué le président. «Ce sont des problématiques con-troversées, l’assemblée peut être en désaccord avec mon jugement et en discuter quand même.» Sur ce, la motion a été mise de côté.

Une sixième motion était for-mulée comme un référendum rela-tif à l’organisation, par des groupes indépendants de l’AÉUM, de col-lectes de sang dans le pavillon Sha-tner. Ce vote dépassant désormais le mandat de l’assemblée générale, la proposition a été transformée en plébiscite. La motion a échoué. À ce moment, le quorum reposait précairement sur la présence d’une dizaine d’étudiants. Dans ces con-ditions, la discussion a été ajournée et la séance levée.

Le débat sur les collectes de sang est donc loin d’être clos. La discussion continue en arrière-scène entre l’exécutif de l’AÉUM et le Comité judiciaire, et l’éven-tualité d’un référendum lors de la prochaine période électorale n’est pas écartée. «La possibilité que nous puissions changer les cho-ses signifie que la protestation est justifiée», a déclaré un étudiant se décrivant comme «conservateur, hétérosexuel et fier». x

Andreea IliescuLe Délit

Joe Clark, premier ministre du Canada de 1979 à 1980 et secrétaire d’État aux Affaires étrangères de 1984 à 1991 a tiré

un signal d’alarme dans le cadre d’une con-férence à McGill, le 31 janvier dernier. Dans son discours, intitulé «La politique étrangère du Canada: reflet d’une Amérique du Nord différente», il a insisté sur l’urgence de ren-forcer la position privilégiée du Canada sur la scène internationale.

À travers une dénonciation plus ou moins masquée du gouvernement Harper qui «n’a pas hérité de traditions dans le do-maine des affaires internationales», Joe Clark tente de formuler ce qu’il considère être une politique étrangère souhaitable pour le Ca-

nada, sans pour autant discréditer les réus-sites de l’actuel premier ministre canadien, dont il souligne les bons coups.

Ottawa et WashingtonLe conférencier com-

pare d’emblée la po-litique étrangère du Canada à une mon-naie dont une face est marquée par des relations très proches avec les États-Unis et l’autre par le rôle que le Ca-nada se doit de jouer sur la scène in-ternationale. Selon lui, ce rôle consiste à être «aussi proche que possible des États-Unis et aussi indépendant que possible dans le monde».

Cinq superpuissances potentielles –les

États-Unis, l’Union européenne, la Répu-blique populaire de Chine, la Russie et l’In-

de– risquent de se partager le pouvoir d’ici 2020, prédit

Clark, en s’appuyant sur les propos du pro-fesseur Victor Bulmer Thomas. Ce dernier

met en garde contre l’idée d’un «parte-nariat stratégique

avec les États-Unis pour

r é s o u d r e les problè-mes mon-d i a u x » ,

soutenant que cette association

ne fonction-nera plus dans un m o n d e

partagé par plusieurs super-

puissances.

Les méfaits et dérapages de la politi-que étrangère canadienne

Joe Clark déplore le fait que le gouverne-ment Harper tende à privilégier les relations

avec les États-Unis et signale la «remarqua-ble similitude» entre les politiques étrangè-res des deux pays. Le Canada «investit [par exemple] dans le secteur militaire», tandis que «la part de l’aide officielle au développe-ment ne cesse de chuter.»

Il constate l’«absence de toute priorité évidente en ce qui concerne les problèmes des pays en développement» et souligne la «détérioration de l’influence canadienne auprès de la République populaire de Chi-ne». Le non-respect des droits de l’homme évoqué par Stephen Harper ne semble pas tout expliquer pour Joe Clark, qui s’inquiète de cette stratégie d’exclusion.

Pour finir, c’est en tant qu’ancien minis-tre des Affaires étrangères qu’il soutient que le statut du service diplomatique du Canada s’érode. Il déplore le fait que le pays ne re-çoive «ni l’encouragement ni les ressources» nécessaires pour maintenir sa place parmi «les meilleurs services diplomatiques du monde». Il pense que «monsieur Harper et ses collègues s’éloignent des éléments cen-traux de la politique étrangère du Canada», qui constituaient un «atout» des adminis-trations précédentes. La priorité en matière d’affaires étrangères serait, selon Joe Clark, de rétablir la «réputation et l’influence du Canada au sein de la communauté interna-tionale, au-delà des États-Unis». x

L’assemblée générale laisse la population étudiante déconfite.

L’ancien premier ministre Joe Clark partage son expérience en matière d’affaires internationales avec un auditoire mcgillois.

Quelle place pour le Canada dans le monde?

campus

campus

Le carton blanc, élément essentiel du processus démocratique.Mathieu Ménard/ Le Délit

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09xle délit | 6 février 2007www.delitfrancais.com

Hugo Lavallée Le Délit

L’environnement, la mission canadienne en Afghanistan et le déséquilibre fiscal sont

les dossiers auxquels le Bloc québé-cois consacrera le plus d’énergie au cours des prochains mois, a déclaré Gilles Duceppe à l’occasion d’une allocution présentée le 1er février à l’Université McGill. Questionné par certains étudiants, le leader souverainiste s’est aussi prononcé sur le rôle et les droits des anglo-phones et des autochtones dans un éventuel Québec souverain, de même que sur les accommode-ments raisonnables.

Malgré ce que le titre «McGill, institution montréalaise, institu-tion québécoise», laissait entendre, la conférence a essentiellement permis au chef bloquiste d’abor-der les enjeux politiques actuels, sur un ton que certains ont trouvé électoraliste. Devant les quelque cent cinquante étudiants et mem-bres de la presse nationale, le chef du Bloc a manifesté son désaccord avec la stratégie environnementale du gouvernement conservateur. «Le gouvernement Harper a renié ses engagements internationaux et envoyé le pire signal qui soit

au monde», a dénoncé le chef du Bloc qui n’a pas été plus tendre à l’endroit des libéraux fédéraux, dont il a déploré le «triste bilan» en matière d’environnement. «Le problème avec les libéraux, a-t-il déclaré, c’est qu’ils ne font pas ce qu’ils disent. Le problème avec les conservateurs, c’est malheureu-sement qu’ils ont tendance à faire ce qu’ils disent. Imaginez un seul instant si ce gouvernement était majoritaire.»

Sur le dossier de la mission ca-nadienne en Afghanistan, le chef du Bloc québécois a essentiellement repris les idées qu’il avait présen-tées la semaine dernière à l’occa-sion d’une conférence donnée de-vant le Centre d’étude et de recher-che internationales de l’Université de Montréal (CÉRIUM). Si le Bloc continue d’appuyer la mission, il exige qu’elle soit «rééquilibrée» afin que plus de ressources soient consacrées à la reconstruction des infrastructures afghanes, car pour Duceppe, «le meilleur moyen d’ar-rêter le terrorisme en Afghanistan –et ailleurs dans le monde–, c’est de donner de l’espoir aux gens, pas de les bombarder.»

Le Bloc juge par ailleurs qu’il est «urgent» de régler le problème du déséquilibre fiscal qu’il dési-gne comme étant à l’origine du sous-financement chronique des institutions universitaires. Le Bloc

prévient toutefois que le problème ne saurait être réglé par la simple hausse des paiements de transferts. S’il est sérieux dans sa volonté d’agir à long terme, le gouverne-ment conservateur devra aussi céder des points d’impôt au gou-vernement du Québec. «Le gou-vernement fédéral pourrait très bien augmenter les transferts cette année, si ça lui chante, et les cou-per l’année prochaine»

Durant la période de questions qui a suivi et à l’occasion d’une en-trevue accordée aux médias étu-diants, M. Duceppe a commenté plus longuement les dossiers ayant défrayé les manchettes depuis quelques semaines, à savoir les accommodements raisonnables, la place du français à Montréal et les problèmes internes du Parti québé-cois. Ainsi, en réaction à l’adoption par la municipalité d’Hérouxville d’un code de conduite sévère à l’intention des immigrants, le lea-der du Bloc suggère que des échan-ges aient lieu entre les maisons de jeunes de circonscriptions rurales et celles de la circonscription qu’il représente, Laurier–Sainte-Marie, située au cœur de Montréal. «[Les jeunes] se rendraient compte que ce sont deux réalités dans la même société. Favorisons cela.»

Le leader souverainiste a aussi beaucoup insisté sur les droits des membres de la communauté an-glophone québécoise, affirmant que ceux-ci ne seraient jamais re-mis en question dans un Québec souverain. «Ce sont des Québécois comme vous et moi, ils ont des droits et ils constituent un “plus” pour le Québec. Point final.» Pré-sentant Montréal comme «la seule vraie ville bilingue du Canada», Gilles Duceppe a précisé que, bien

que le français y demeure et doive y demeurer «la langue publique commune», il est possible pour les anglophones d’y «naître, étudier, tomber en amour, se marier, avoir des enfants et mourir», en anglais.

En réponse à une question posée par un étudiant autochtone, le chef du Bloc québécois a sou-ligné que le Québec avait été «le premier endroit où l’on a reconnu l’existence des premières nations» en 1985. Malgré une démographie

faible, M. Duceppe croit qu’«il faut négocier de nation à nation» avec elles, a précisé M. Duceppe. «Le Québec souverain ne pourra se développer sans qu’il y ait le plus profond respect pour les premières nations et particulièrement, [en ce qui a trait au] développement du Nord québécois, [pour] ceux qui le connaissent le plus, à savoir les Cris, les Inuits et les Innus», a con-clu le chef bloquiste. x

Duceppe à McGillAlors qu’il était venu d’environnement et d’Afghanisant, le leader bloquise est interrogé sur la place des anglophones et des autochtones dans un Québec souverain.

campus

Gilles Duceppe prêt à avaler le photographe.Louis Melançon/Le Délit

Nouvelles

Louis Melançon/Le Délit

Louis Melançon/Le Délit

Le chef du Bloc québécois a parlé de bien autre chose que de McGill...

Un conférencier aux interrogations désormais célèbres...

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11xle délit | 6 février 2007www.delitfrancais.com

Le milieu du conte québécois est en pleine effervescence. Au cours des dernières années, de nouveaux conteurs

se sont ouverts la bouche dans de nouveaux lieux de diffusion. Plusieurs événements voués à la valorisation et à la transmission de l’oralité sont aussi apparus dans le paysage québécois. Voici pour vous l’occasion de participer au renouveau.

Les dimanches du conteSERGENT-RECRUTEUR (www.dimanchesduconte.com), 4801, boul. St-Laurent. Tous les diman-ches, de septembre à mai. Les meilleurs mo-ments sont radiodiffusés les mardis à 19h sur les ondes de CIBL (101,5 FM) lors de l’émis-sion Aux portes du conte.

Les contes du Mardis-grasLe troisième mardi du mois, de septembre à avril, ANDRÉ LEMELIN (www.mardis-gras.net) accueille le public dans son salon (réservation obligatoire).

Les lundis du viceVICES & VERSA, (www.vicesetversa.com) 6631, boul. St-Laurent. Soirées de contes le premier lundi des mois d’hiver.

Soirées de contes avec micro libreLES UTOPISTES LIBRAIRIE-CAFÉ, 2316, av. Mont-Royal E. Les deuxièmes mardis du mois.

LE DÉPANNEUR CAFÉ, (http://www.ledepanneur-cafe.com et http://www.maisoninternationaledu-conte.com) 206, rue Bernard O. présente des événements en association avec La Maison international du conte.

Célébrations de la parole conteuseFESTIVAL VOIX D’AMÉRIQUE (www.fva.ca) du 2 au 9 février 2007. Sixième édition de l’événe-ment, consacré à la littérature orale, au spoken word et à la poésie performée.

L’ÉVÉNEMENT DE BOUCHES À OREILLE (festi-valdeconte.com) du 3 au 8 avril 2007 réunit à Montréal des conteurs du Québec et de la francophonie. Le public est invité à participer au concours de la meilleure menterie.

De nombreux festivals se tiennent également en région. Osez sortir de la métropole pour découvrir Trois-Pistoles (le Rendez-vous des grandes gueules), Tadoussac (festival de con-tes des portes de la Côte-Nord) ou Saint-Élie-de-Caxton (festival des contes et légendes de la Pierre angulaire).

Où aller pour se faire conter à l’oreille…

Le renouveau du conte, vers la fin des années 1980, répond à l’urgen-ce de sauvegarder une riche tradi-tion orale que d’aucuns croient

en perdition. Les aînés, souvent seuls dépositaires de cette mémoire non écrite, s’éteignent, et avec eux, cette ri-chesse collective. À leur époque, pas si lointaine, la littérature orale était bien souvent la seule accessible. Les con-tes égaillaient les veillées et les camps de bûcherons, se transmettaient de grands-mères à petits-fils. Ils appor-taient des réponses aux questions et du réconfort dans le doute. Dans les années 50, le Québec s’urbanise et la modernité s’amène avec son pouvoir d’uniformisation. La télévision envoie maintenant un message unique à tous les téléspectateurs, images incluses. Pour répondre à ses interrogations, la population se tourne vers le petit écran et vers la littérature écrite; la modernité ronge la tradition orale, qui cède sa place à l’écrit et au visuel.

Des conteurs caméléonsLa rupture de l’oralité, courroie

de transmission du conte québécois traditionnel, force les conteurs con-temporains à créer ou adapter leur répertoire à partir d’écrits. Tous n’ont pas eu la chance, à l’instar de Fred Pel-lerin, d’avoir un village et une grand-mère fertile en histoires et en souve-nirs. Heureusement, grâce au travail d’ethnologues, des enregistrements et

des retranscriptions de contes folklo-riques ont été conservés, bien à l’abri dans les archives universitaires. Les néo-conteurs doivent se reconstruire un répertoire, en mêlant l’oral, l’écrit et la création. Le conteur-créateur d’aujourd’hui est donc un artiste du métissage. Puisant dans le corpus écrit, il doit réussir à sortir le conte du livre et à se l’approprier pour le relancer sur le chemin de la parole. Le conteur contemporain doit recréer l’imaginaire des récits en intégrant sa propre vision des choses. Cela permet au conte de reprendre sa place, mais aussi de se renouveler par l’interpré-tation du conteur. Par lui, tradition et modernité s’enlacent et redonnent au conte sa force, sa capacité de renou-vellement perpétuel.

Cette nouvelle cohabitation de l’oral et de l’écrit influence la façon de travailler des conteurs. Plusieurs com-mencent par écrire avant de conter. Des versions écrites de contes con-temporains sont disponibles au public sous forme littéraire et constituent des œuvres à part entière. Les éditions Pla-nète rebelle, par exemple, proposent plusieurs recueils de contes sous forme de livres-disques. S’ils utilisent l’écrit comme base de travail, la plupart des conteurs n’hésitent pas à se détacher de la version papier lors de leur per-formance. Tous affirmeront d’ailleurs d’emblée qu’un conte se fait à trois: le conte lui-même, le conteur et le public sont tous essentiels et peuvent influen-cer le déroulement de l’histoire. Pour les néo-conteurs, l’écrit n’est donc qu’un canevas, sur lequel ils tissent un conte un peu différent à chaque fois.

La pop-oralitéLe retour de l’oralité dans le

monde contemporain propulse le conteur sur scène. Sorti du pourtour des feux de camps et des cuisines de village (malgré un André Lemelin qui propose encore aux Montréalais des soi-rées de contes dans son salon, voir l’encadré pour les détails), le conteur contemporain doit devenir performeur. Chacun doit développer un style qui lui est propre et user d’ingéniosité pour émouvoir un public le plus sou-vent constitué d’inconnus. Il est de plus en plus difficile de sur-prendre un public habitué aux OGM et au GPS. La technologie, en créant un monde où tout est possible, a extirpé la magie du quotidien. Le défi du conteur est de trouver un angle nouveau pour exposer le merveilleux en-tremêlé à la réalité. Certains intè-grent une gestuelle particulière, une performance musicale ou se démarquent par une utilisation ingénieuse de la langue.

Cette spectacularisation du conte, dans une société avide de divertissements, comporte un danger. Le conte devenu à la mode, la société marchande peut vouloir le récupérer pour en tirer un profit. Dans son Petit manifeste à l’usage du conteur contemporain, Jean-Marc Mas-sie, conteur et co-fondateur des Dimanches du conte, exhorte les conteurs à protéger leur li-

berté, car elle est garante du succès de leurs contes. On conte avant tout pour transmettre, pas pour recevoir une reconnaissance publique. En voulant demeurer en marge de la so-ciété marchande, le milieu du conte se prive aussi de la reconnaissance pu-blique que cette dernière pourrait lui apporter. Jusqu’où les néo-conteurs seront-ils prêts à aller pour protéger leur indépendance, pour préserver les particularités de la tradition orale? Ils ne seraient pas les premiers à ven-dre leurs âmes au diable... Ce piège de l’effet de mode ne semble, pour le moment, pas trop inquiéter le milieu du conte, la plupart des conteurs étant encore peu connus du grand public.

Les moyens de diffusion, souvent modiques et sans organisation rigide, aident également le milieu du conte à ne pas s’enliser dans les sables mou-vants de l’industrie. Les soirées sont souvent à contribution volontaire et, parfois, à micros ouverts. Une am-biance intime étant essentielle à la réussite du conte, les néo-conteurs préfèrent les petites salles, qui per-mettent d’établir un bon contact avec le public. Dans la proximité d’un bar ou d’un café, une écoute active réci-proque peut s’établir entre le conteur et l’auditoire.

L’immédiatetéLa communication interactive à

la base du conte fait figure de nou-veauté dans la société contempo-raine. Continuellement bombardés d’images par les médias de masse et gavés, dès le plus jeune âge, d’une

culture prête-à-consommer, se pour-rait-il que les citoyens en aient assez? La communication à sens unique ne répondant plus à leurs attentes, les gens cherchent à reprendre contact avec eux-mêmes et avec les autres. Le conte s’offre à eux comme un mode de résistance, un moyen d’échapper à l’homogénéisation et à l’anonymat de la société actuelle.

Catalyseur de réflexion, le conte laisse place à l’imaginaire et à l’in-terprétation tant du conteur que de l’auditoire. En misant sur l’évocation plutôt que sur la représentation, il offre à chacun la possibilité de re-prendre contact avec son imaginaire. L’engouement actuel pour le conte s’explique peut-être par la volonté de plusieurs de sortir du maelström mé-diatique qui nous entoure pour reve-nir aux bases de la communication.

Un art de la sèveEn réconciliant tradition et mo-

dernité, le conte brise cette antino-mie contemporaine. Dans la bouche du conteur, fantastique et réalisme inventent une nouvelle synergie. À la fois passeur et créateur de la culture, le néo-conteur lance un appel au ré-enchantement du quotidien. «Après avoir été séduit par la parole conteuse, on ne voit plus le monde de la même manière», prévient Jean-Marc Massie. Tel un tronc, le conte relie notre passé et notre présent. Il nous permet de se réapproprier la mémoire collective, sa propre mémoire. x

Le renouveau du conte au Québec: un phénix dans l’espace-temps

Le renouveau du conte au Québec: un phénix dans l’espace-temps

xle délit | 6 février 2007www.delitfrancais.com10

Vous savez, bien sûr, ce qu’est un conte. Vous avez, enfant, eu peur de Barbe bleue, sympa-thisé avec le marquis de Cara-bas (rappelez-vous, le maître du Chat botté) ou fait de l’in-somnie grâce à Shéhérazade. Certains chanceux ont peut-être même entendu leur grand-mère raconter les histoires de la belle du village ou d’un certain Ti-Jean. À l’heure d’Internet et de la télévision satellite, on croirait l’époque des contes ré-volue. Mais voilà que le conte, soutenu par une bande d’ir-réductibles, semble reprendre des forces. Après avoir relégué l’oralité aux oubliettes pendant plus de cinquante ans, le Qué-bec d’aujourd’hui retrouve avec émerveillement l’univers du conte. La tradition orale renaît de ses cendres. Julie Rousseau s’envole à la recherche de cette récente effervescence de l’uni-vers conté.

«La culture orale est vivante! Elle s’enrichit chaque jour de l’imaginaire de chacun. Elle se construit par et pour

les hommes de notre temps. Elle est garante d’une communication de qualité, d’une culture de proximité [...] elle est la sève d’un peuple qui parle, qui se raconte...»

– Jean-Claude Renoux, Parole de conteur Essai sur la pratique, l’historique et les approches du conte

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12xle délit | 6 février 2007www.delitfrancais.com

Nouvelles

Florence CoupryLe Délit

Qui était Rosemary Brown? Com-ment s’appelait le premier avocat noir du Canada (en 1914)? Saviez-

vous que les premiers Marrons de Jamaïque sont arrivés en Nouvelle-Écosse en 1796? Que dès 1870, on signalait la présence de cow-boys et de commerçants de fourrure noirs en Colombie-Britannique? Que con-naissez-vous de l’histoire de la communauté noire au Canada, terre d’asile depuis la pre-mière moitié du XIXe siècle pour ceux qui, fuyant alors l’esclavage en vigueur aux États-Unis, cherchaient un refuge en Ontario?

Le mois de l’histoire des Noirs est célé-bré chaque année depuis 1991, dans l’inten-tion de commémorer les aspects méconnus d’un destin collectif. La seizième édition de cet événement se veut porteuse d’un messa-ge d’espoir, et son thème, «Nourrir nos raci-nes pour un avenir meilleur», est évocateur. Sur cette question, le maire de Montréal, Gérald Tremblay, a en effet affirmé lors du gala d’ouverture qu’«il est essentiel de con-naître son passé pour le transmettre et pour avancer».

Un mois qui apporte un peu de chaleur. À l’hôtel de ville de Montréal, la ta-

ble ronde du mois de l’histoire des Noirs a inauguré, jeudi dernier, une série d’activités offertes aux montréalais jusqu’au mois de mars dans le but de les aider à découvrir la contribution des communautés noires à la culture québécoise: une exposition des œu-vres de Freddy Jean, un spectacle des frères Possé, un ballet folklorique haïtien, une re-présentation du concert de Mélanie Renaud à «la grande fiesta antillaise». Au total, plus

de trois cents conférences, films et ateliers. De nombreuses institutions sensibles à la portée de cette manifestation ont contribué à son bon fonctionnement, à l’instar du mi-nistère de l’Immigration et des Communau-tés culturelles du Québec, qui a reversé 100 millions$ cette année.

Si cette édition 2007 d’un événement désormais officiel est si particulière, c’est qu’elle célèbre à la fois les cent ans de la Union United Church, première église desti-née à servir la communauté noire de la ville, et le mérite des jeunes générations. Douze lauréats ont été sélectionnés pour leur cou-rage et leur engagement en faveur de la com-munauté. «Lorsque l’on est honoré, on de-vient un exemple de réussite pour d’autres jeunes», a souligné le maire Tremblay. Le mois de l’histoire des Noirs se veut porteur de mémoire et d’espoir dans une société où de nombreux défis restent encore à relever. «Même s’il fait froid, voici un mois où l’on apporte un peu de chaleur», a ainsi illus-tré André Joseph, vice-président du conseil d’administration de l’événement.

Assurer un avenir de qualité aux jeunes générations.

Le mois de l’histoire des Noirs, a estimé Michael Farkas, secrétaire du conseil d’ad-ministration de la table ronde organisée à cette occasion, est «une grande manifesta-tion» à laquelle on peut reprocher toutefois un certain «élitisme». Il s’est d’ailleurs pro-noncé en faveur d’une éventuelle collabora-tion avec les étudiants de McGill, «vénérable institution» dont l’engagement ne pourrait être que bénéfique. «On a reconnu la contri-bution exceptionnelle des jeunes», a précisé le maire Tremblay, «il faut nous préoccuper des jeunes et des valeurs à leur transmettre si nous voulons nous assurer d’un avenir de qualité». L’hommage qui leur est rendu est un moyen pour cette génération «d’assumer sa responsabilité dans la construction d’un avenir meilleur». x

Pour plus d’information sur le programme des activités, visitez le site internet www.ville.mon-treal.qc.ca/mhn.

Nourrir nos racines pour un avenir meilleur

Pour la gloire du devoir de mémoire: le lancement du mois de l’histoire des Noirs.

Dans un bain de lumière, le maire de Montréal Gérald Tremblay félicite divers membres de la communauté noire qui se sont illustrés par leurs actions dans la métropole.Florence Coupry/Le Délit

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13xle délit | 6 février 2007www.delitfrancais.comArts&Culture

Laurence Côté-FournierLe Délit

L’atypique filmographie du cinéaste Gus Van Sant, originaire du Kentucky, intrigue par sa richesse et par l’originalité du regard qu’elle pose sur la société

américaine. L’importante rétrospective dont le réalisateur est présentement l’objet à la Cinémathèque québécoise permet de découvrir les liens qui unissent des œuvres disparates, mais qui portent cependant toute l’empreinte d’un homme plaçant les préoccupations artistiques loin devant la logique hollywoodienne.

Au premier abord, quelle ressemblance en effet entre les paumés magnifiques de My Own Private Idaho, qui embrasent de leur verve une vie vouée à la drogue et à la prostitution, et un remake plan par plan de Psycho, curieux hommage à Hitchcock autant qu’exercice de style? Entre le chaleureux Good Will Hunting et l’ascétisme de Last Days? Peut-être une même sympathie pour les personnages que Van Sant filme, bien souvent de jeunes hommes avalés par une quête désespérée de sens, marginaux aussi libres que mal-aimés.

Van Sant lui-même a bien souvent participé à cet univers bohème tandis qu’il faisait ses premiers pas dans le monde artistique. Né en 1952 de parents riches, Van Sant choisit cependant de frayer avec le monde de la rue durant une jeunesse mouvementée qu’il dissipe à explorer la société sous toutes ses coutures et, plus raisonnablement, à étudier l’art visuel. Ce n’est que plus tard, dans son désir d’explorer de nouvelles formes d’expression artistique, que Van Sant se tourne définitivement vers le septième art. Son premier film, Mala Noche (1985), tourné avec moins de 20 000$, est remarqué par plusieurs producteurs séduits par cette histoire d’amour homosexuel, ce qui permet par la suite à Van Sant d’obtenir le financement nécessaire au tournage de ses films.

Ses deux œuvres suivantes comptent parmi ses plus réussies. Drugstore Cowboy (1989) met en scène un quatuor de junkies, qui, sous la houlette d’un Matt Dillon décidé coûte que coûte à échapper à une vie trop conventionnelle, dévalisent pharmacies et hôpitaux pour se procurer les moyens nécessaires à l’évasion hallucinée quotidienne qui est la seule fin de leur existence. D’emblée, dans le

traitement des personnages, perce la tendresse du réalisateur qui sait montrer leur humanité malgré leurs actes parfois terribles. Aucun moralisme grossier n’existe dans cet univers qui, sans être aussi stylisé que son proche parent Trainspotting, sait comme cet autre film décrire avec panache et justesse la réalité des drogués.

Van Sant atteint cependant un sommet difficilement égalé avec son film suivant, devenu désormais culte, My Own Private Idaho (1991). La performance absolument stupéfiante du défunt River Phoenix en prostitué narcoleptique recherchant jusqu’au bout du monde un amour qui lui est toujours refusé tient pour beaucoup dans le succès de ce film. Son corps de gamin fragile, sa voix frêle et son intensité émotive chargent d’une tristesse infinie la destinée de ce jeune homme bien trop vulnérable qui étouffe en silence son désir pour un autre prostitué. Ce dernier, joué avec un talent plus limité par Keanu Reeves, est un prince de la rue, fils du maire, qui adopte en dilettante un quotidien affreux dont il est toutefois libre de s’échapper. Dans cette œuvre, Van Sant allie avec une fulgurante maîtrise son talent pour l’image et les couleurs, héritage sans doute de sa formation plastique, à un scénario hautement inspiré qui mêle le Henri V de Shakespeare à la prose de la rue, pour en arriver à une oeuvre d’une grande richesse tant sur le plan de la forme que sur celui du contenu.

Les années 90 sont celles de l’éclatement pour Van Sant, qui réalise ses films les plus conventionnels (Good Will Hunting, Finding Forrester) mais se commet aussi dans diverses productions non dépourvues d’originalité (Even Cowgirl Get the Blues, To Die For). Ce n’est que dans les dernières années que le statut de réalisateur de premier plan de Van Sant se confirme, avec l’obtention de la très convoitée Palme d’or pour Elephant (2003).

Ce film, sans aucun doute la plus intéressante des œuvres à venir dans le cadre de cette rétrospective, est une exploration distanciée de la tuerie de l’école de Columbine. Le regard froid de la caméra, manipulée par Van Sant avec un savoir formel ahurissant, polarise et confronte le spectateur à sa propre réaction. Ne serait-ce que pour cet écho intérieur provoqué par Elephant, ce film reste absolument nécessaire. Il couronne avec brio la traversée de Van Sant en terre américaine, cette terre de mal-aimés si fascinants. x

La rétrospective de l’oeuvre de Gus Van Sant se poursuit jusqu’au 14 février à la Cinémathèque québécoise (335, boul. de Maisonneuve E.). L’entrée est de 6$ pour les étudiants. Pour tout renseignement, appelez au 514-842-9763 ou consultez le site Internet au www.cinematheque.qc.ca.

Le pays des mal-aimésGus Van Sant dévoile son univers à la Cinémathèque québécoise.

cinéma

Cinéaste de la marginalité, Van Sant est responsable de films aussi insaisissables que richesgracieuseté Cinémathèque québécoise

Last Days, ou la fin de Kurt Cobain revisitée

gracieuseté Scott Green - HBO Films

Kidman en Miss Météo dans To Die For L’incontournable Elephant dissèque la tuerie de Columbine

gracieuseté Cinémathèque québécoise gracieuseté Cinémathèque québécoise

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14xle délit | 6 février 2007www.delitfrancais.com

Arts&Culture

Laurence Bich-CarrièreLe Délit

Léo Delibes a situé son Lakmé (1883), opéra d’une lenteur qu’on s’imagine orientale,

dans l’éclat des paillettes et le cha-toiement des saris qui virevoltent, entre les fleurs de datura, aussi bel-les qu’empoisonnées et les lotus sacrés dont on devine presque les parfums , devant les temples sécu-laires et au cœur de foules bigar-rées, presque carnavalesque, dans le charivari des marchés et des pro-cessions à la gloire des mille dieux du panthéon hindou.

Les amateurs d’opéra de la fin du XIXe siècle aiment, il est vrai, les histoires d’Orient. C’est, après tout, l’époque des Pêcheurs de perles de Bizet, du Roi de Lahore de Massenet, et aussi de la nou-velle Rarahu ou le mariage de Loti, du trépidant Pierre Loti, qui a ins-piré Delibes et ses librettistes (à la rime forcée) Edmond Gondinet et Philippe Gille. D’ailleurs, que les férus d’histoire musicale se le tien-nent pour dit, il est possible, avant chaque représentation, d’assister à une conférence du musicologue Pierre Vachon sur cette (autre) his-toire d’amour impossible sur fond (très lointain) d’oppression colo-niale et son arrangement musical complexe et lancinant (qui semble ravir les étudiants connaisseurs).

L’opéra s’ouvre en effet dans un temple hindou sacré et opulent. Le grand brahmane Nilakantha (Randall Jakobsh, basse) y appelle ses fidèles à la révolte contre le colo-nisateur britannique. Alors qu’il se retire pour la prière, deux officiers anglais, Frédéric (James Westman, baryton) et Gérald (Frédéric Antoun, ténor) et leurs compagnes pénètrent dans la cour du temple, le temps de quelques airs où l’on parle de la beauté de la mystérieuse Lakmé (la splendide Aline Kutan), fille de Nilakantha dont il a fait une quasi-déesse. En restant derrière ses compagnons, Gérald surpren-dra Lakmé, dont il tombera, il va sans dire, éperdument amoureux. Lakmé, qui connaît l’exaltation et la soif de vengeance de son père, prie l’Anglais de partir, mais le mal est fait. Nilakantha n’a plus qu’un

but: obliger le «barbare» qui a posé les yeux sur sa famille à se montrer et le poignarder.

Pour l’attirer, il force Lakmé à chanter en public, ce qui donne lieu à une juste interprétation de «L’air des clochettes», un morceau qui commande une grande pré-cision vocale, de la part de la so-prano colorature Aline Kutan, dont c’est l’un des rôles-signature. Elle a également magistralement rendu «Sous le dôme épais» (air mieux connu qu’on ne le pense puisqu’on peut le trouver jusque sur la ban-de sonore de Tomb Raider II et de Superman Returns), duo languissant qu’elle interprète avec sa servante Mallika (Mireille Lebel, mezzo-so-prano de l’Atelier lyrique).

Autres duos à signaler: les rou-coulements amoureux de Lakmé et de Gérald dont l’agencement com-pense la théâtralité un peu raide. La performance d’Antoun, comme celles de la plupart des chanteurs, gagne d’ailleurs en profondeur et en texture au fil de la représenta-tion: il faut croire que le mysticisme de l’Inde vient peu à peu envelop-per de ses charmes tous les specta-teurs pour lui présenter une finale somptueuse, où Randall Jakobsh, brahmane vengeur et ténébreux à la prononciation douteuse (et qui porte probablement le costume le plus laid de toutes les flamboyan-tes créations de Mark Thompson, également responsable des décors), se joint aux amoureux.

L’OdM présentait en 2000 une version-concert de Lakmé, mais il fallait une adaptation scé-nique, signée Adam Cook, pour vraiment laisser éclater la lenteur hypnotisante de mélodies souples et charmeresses, les parfums des offrandes à Dourga aux dix mains, et surtout, dans les voix d’un cou-ple déchiré entre l’Orient et l’Oc-cident, leurs dieux, leurs devoirs et leur amour. x

L’opéra Lakmé sera présenté les 8, 10 et 14 février 2007 à 20h à la salle Wilfrid-Pelletier de la Place-des-Arts. Billeterie: 514-842-2112 (demandez le spécial 18-30 ans à 35$ pour le premier opéra, 25$ pour les suivants). La conférence de Pierre Vachon se donne au Piano Nobile à 18h30 (5$ pour les non-abonnés).

Charme d’OrientCoproduction de la compagnie lyrique Opera Australia (Sydney) et de l’Opéra de Montréal, Lakmé présente des airs languides et colorés sous le parfum des Indes coloniales.

opéra

Yves Renaud

Véronique SamsonLe Délit

Dès sa formation en 2006, la troupe du théâ-tre Antigun s’est donné comme mission d’aborder les préoccupations d’aujourd’hui.

Avec sa première pièce Elsemeur, présentée à la salle Fred-Barry, elle s’attaque avec ludisme à la question du suicide. Cette création de Katy Veilleux, qui campe aussi le rôle principal de Julie, est librement inspirée du roman Véronika décide de mourir de Paulo Coelho. Dans cette mise en scène de Luc St-Denis, on nous transpose dans un monde peuplé de personnages aux prises avec la vie.

Après l’échec de sa tentative de suicide, Julie se réveille à Elsemeur. Cet asile l’oblige à confronter son propre malheur, par la rencontre de ses compa-gnons d’enfermement. Sarah, jouée avec humour par Philomène Lévesque-Rainville, présente tous les symptômes d’une névrose, tandis qu’Alexis, joué par Charles-André Gaudreau, fuit sa réalité dans le per-sonnage shakespearien d’Hamlet. Au fil des jours pas-sés à Elsemeur, Julie se rapproche de ces âmes écor-chées qui, comme elle, ont à choisir entre être et ne pas être.

L’asile se dévoile peu à peu comme un monde dé-traqué et déréglé, et les membres du personnel, le doc-teur Raoul et madame Renée, respectivement campés par Benoît Finley et Sofi Lambert, ne font qu’ajouter à la folie du lieu par leurs excentricités. En revanche, la précision de la mise en scène de l’ensemble de la pièce, où les personnages réussissent à traduire leur intério-rité par le mouvement, est particulièrement réussie.

La coordination des effets scéniques est efficace-ment travaillée pour créer cette atmosphère de tension entre le désespoir et l’absurde. Le décor, constitué d’espèces de rochers où s’échouent les personnages de l’asile, surprend par son dépouillement et par son contraste avec les objets éclectiques qui entourent les membres du personnel. Avec les enregistrements sonores qui ouvrent la pièce et les extraits musicaux qui la complètent, l’effet dramatique s’avère tout à fait intéressant.

Elsemeur se révèle donc comme la puissante mise en scène d’un huis clos où Julie et ses compagnons peuvent se réfugier dans la folie qui les cerne ou ten-ter d’y échapper. Les acteurs, pour la plupart de jeu-nes finissants de l’école de théâtre du cégep de Saint-Hyacinthe, campent avec force et nuance ces person-nages voués à cette angoisse du déchirement. L’aller-retour d’Alexis entre lui-même et son Hamlet est particulièrement marquant. Réussissant une réflexion intéressante sur la fine ligne entre normalité et folie, la collaboration de Katy Veilleux et Luc St-Denis nous offre finalement une réalité porteuse d’espérance.

Il est à mentionner que la pièce s’adresse, sem-blablement, à un public d’adolescents et de jeunes adultes. La créatrice et le metteur en scène, voulant confronter une vision générationnelle décrite comme «désespérément noire et romantico-suicidaire», se permettent de nombreuses facilités dans l’humour de la pièce. La classe du secondaire dans le public a tout de même semblé apprécier les pitreries excessives du docteur Raoul et de madame Renée.

Si l’originalité du traitement du suicide y est, il reste que l’ensemble de la pièce tombe dans une sim-plicité décevante pour le spectateur à la recherche de profondeur. Elsemeur, par sa courte durée d’une heure vingt minutes, mise un peu trop sur l’effet de divertis-sement pour rejoindre les jeunes désespérés du pu-blic. x

Elsemeur est présentée jusqu’au 17 février, à la salle Fred-Barry (4353, rue Ste-Catherine E.). Pour la billetterie, com-posez le 514-253-8974, ou rendez-vous au www.denise-pelletier.qc.ca pour plus d’information.

Être ou ne pas être?Avec Elsemeur, Katy Veilleux présente la réalité du suicide dans une première création tout en contrastes.

théâtre

Un opéra qui s’adresse davantage à un public à la recherche de voix claires et justes et de musiques complexes qu’au néophyte qui voudrait être envoûté par une histoire enlevante.

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15xle délit | 6 février 2007www.delitfrancais.com

Amélie RousseauxLe Délit

Cœurs, le dernier film d’Alain Resnais, adaptation de la pièce Private Fears in Public Places d’Alan Ayckbourn, est

une comédie aigre-douce mettant en scène un chassé-croisé de sept Parisiens voulant à tout prix fuir leur solitude hivernale. Présenté à la 63e Mostra de Venise, le film de Resnais a remporté le Lion d’argent du meilleur réalisateur, quarante-cinq ans après le Lion d’or qu’avait remporté son Année Dernière à Marienbad.

Thierry (André Dussolier) est agent immobilier. Il vit avec sa sœur cadette Gaëlle (Isabelle Carré), qui recherche secrètement l’amour dans les petites annonces. Thierry aide Nicole (Laura Morante) et Dan (Lambert Wilson), couple au bord de la rupture, à rechercher l’appartement idéal. Il partage son bureau avec Charlotte (Sabine Azema). Il y a aussi Lionel (Pierre Arditi), barman dans un nouvel hôtel branché du XIIIe arrondissement. Pour assurer son service

du soir, Lionel fait appel à une assistante à domicile bénévole pour s’occuper de son père Arthur (Claude Rich), vieil homme malade et coléreux. C’est Charlotte qui se présente. Et ainsi, les actions d’un personnage vont transformer le destin d’un autre sans même qu’ils se soient rencontrés.

Cœurs se joue dans un décor représentatif du nouveau quartier de la Bibliothèque nationale de France, où les personnages vivent dans une bulle austère et artificielle. La neige qui tombe tout au long du film semble représenter une sorte de «déprime éphémère». Comme l’hiver? Cœurs est-il

sensé donner de l’espoir aux spectateurs? Espoir d’un jour meilleur? Cependant, les personnages ne se retrouvent jamais seuls. Toujours en paire, mais jamais en couple: Dan saoûl avec Lionel, «son» barman, Thierry et Charlotte collaborateurs refroidis, Dan et Gaëlle (histoire qui finira mal), qui se sont rencontrés via les petites annonces et ainsi de suite…

Le spectateur ne peut s’empêcher de s’égarer. On ne sait plus quoi penser de ce jeu surjoué, solitaire et froid gênant profondément les spectateurs. Resnais nous peint une société trop vieille pour être

d’actualité. Néanmoins, Jean-Michel Ribes a

très bien réussi son adaptation. Son texte dégage une certaine mélodie rappelant les comédies musicales précédentes de Resnais (divinement révélées par l’accent sensuel de la belle italienne Laura Morante). Aussi, le voile de neige entrecoupant les scènes donne un sentiment de légèreté au scénario, ainsi que les quelques merveilleux moments ironiques qui parsèment le film. Il y a par exemple cette scène où Charlotte prête à Thierry une cassette sur laquelle, à l’enregistrement d’un programme de variétés religieuses –son émission préférée– succède une danse érotique de Charlotte, qui troublera fortement Thierry.

Sur le plan esthétique, Resnais a encore une fois réussi son coup. La mise en scène, le décor, les couleurs, la lumière, les costumes et la musique forment un ensemble sans faute. Pour ceux qui ont vu On connaît la chanson ou Pas sur la bouche, Jacques Saulnier, chef décorateur fétiche de Resnais, reproduit ici la même ambiance que dans ses films précédents.

Malgré tout, Coeurs représente un hiver réellement froid. Il est donc fortement déconseillé aux spectateurs atteints du blues hivernal, vous en ressortirez encore plus refroidi. x

Coeurs, du réalisateur Alain Resnais, est présenté au cinéma Beaubien, 2396 rue Beaubien E.. tél.: 514-721-6060, et à l’Ex-Centris, 3536 boul. Saint-Laurent, tél.: 514-847-2206.

Des coeurs sans corps?Le dernier film d’Alain Resnais propose des rencontres déprimantes et mornes dans un Paris enneigé.

cinéma

Arts&Culture

Coeurs nous égare dans une société trop vieille pour être d’actualité.gracieuseté Christal Films

Pour se changer les idées, Sous-Zéro (lire: Robert Marcel Lepage lui-même) est allé faire une longue promenade,

mais son imagination débordante et les accords harmonieux et surprenants qu’il a donnés à sa vie reprennent le dessus: le banal des flocons scintillants se teinte d’onirisme, de réflexions clin-d’œil rythmées et de ping-pong d’images, de clichés et de figures de style. Je y est certainement un autre (un agent Glad de la philosophie, une grosse rousse qui aime le bowling, par exemple) et les boules de neige impertinentes y ont des jeux de mots légers: qu’est-ce qu’un piano de neige qui fond? C’est un piano aqueux.

Il y a quelque chose qui rappelle, vaguement, Fred (Le naufragé du A, L’histoire du corbac aux baskets): peut-être le ton vif et farfelu, peut-être le requin philosophe et la tête pleine de casse-tête, peut-être simplement le coup de crayon échevelé et mince. Cela dit, Fred dessinait mal mais dessinait mieux. Le trait de Lepage n’est qu’un crayonné rapide, avec ici et là des petits carreaux serrés pour faire comme s’il y avait une texture.

On pourra toujours justifier l’absence de décor en disant que la promenade du flâneur se fait dans la neige, puis prétendre que les

pages blanches figurent le déploiement nival dans sa splendeur immaculée ou qu’elles sont autant de pauses imposées au lecteur pour l’obliger à réfléchir sur ce qu’il vient de lire. En fait, les diverses pages sans texte, où le dessin se répète, finissent par ne plus compter comme des moments de silence propice au recueillement, mais à sentir le remplissage. Cent vingt pages auraient suffit aux divagations hivernales cadencées et aux déambulations capricieuses de l’auteur-ou-son-double, aux dialogues fantaisistes d’un musicien fantasque, à ses questions sans réponse mais avec beaucoup de répondant, en bref, à la rêverie d’une trêve imposée par la neige à la ville. x

Laurence Bich-Carrière

ROBERT MARCEL LEPAGELe piano de neige

bédés en folie

On a oublié le nom vrai du musée. On l’appelle musée du Révolu ou Voulu démesuré, ce sont des

anagrammes (qui d’ailleurs parsèment le récit). Son étendue est inconnue. On ignore avec exactitude son contenu. Eudes le Volumeur (autre anagramme) est un expert chargé d’en faire la recension. Il n’est pas le premier, il ne sera pas le dernier. Promenade à travers les entrailles du musée: les archives des donations, les sous-sols engloutis de l’art pompier, le département des copies, la réserve de bricabracologie, le dépôt des moules. Le lecteur aura compris que c’est un hommage au Louvre que signe Marc-Antoine Mathieu, deuxième opus d’une série amorcée avec Période glaciaire de Nicolas de Crécy. Il n’y a pas d’intrigue à proprement parler, que le déroulement de différents chapitres qui découpent le récit et entraînent le lecteur dans un dédale aussi absurde qu’ordonné. Cependant, malgré l’inventivité dont l’auteur fait preuve au sein de chaque chapitre, le tout est convenu et manque de rythme.

Mathieu offre cependant quelques beaux jeux graphiques, comme ce dessin qui s’assombrit au fur et à mesure que

l’expert avance dans une vieille galerie ou comme ce tableau gigogne complété par un rabat. Les clins d’œil au lecteur sont également de mise: le gardien du dépôt des cadres explique les mérites d’un encadrement «si simple qu’il permet à des tableaux se succédant chronologiquement de former un récit», encadrement qui reprend exactement les cases de la page, ou le directeur de l’atelier de restauration souligne «l’élégant paradoxe» de l’ombre gardienne des couleurs sensibles, ce qui est particulièrement paradoxal pour un album en noir et blanc!

Théories ingénieuses, dessin net et contrasté, ouvrage inventif, amusant et extravagant. Le lecteur ne pourra s’empêcher de sourire dans la pénombre d’un musée incommensurable. x

Laurence Bich-Carrière

MARC-ANTOINE MATHIEULes sous-sols du Révolu

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16xle délit | 6 février 2007www.delitfrancais.com

Arts&Culture

Danse postmoderne 101

Alexandra HavrylyshynLe Délit

Jeudi dernier le spectacle Brutalis était présenté à l’es-pace Tangente. Le spectacle

n’a duré que 55 minutes. Pendant cette petite heure, le spectateur a pu observer plusieurs étapes dis-tinctes. Au départ, dans une pièce complètement sombre, l’interprète était assise et on ne voyait que ses jambes croisées, à cause d’une lu-mière éclatante devant son torse. De là émerge une femme vieille et laide puis une petite fille fière et in-nocente et, enfin, une adolescente délicate et brisée. De cette danse il ressort que la danseuse belge

Karine Ponties cherche à exprimer l’évolution du corps humain. Mais l’humain n’est pas son seul sujet d’expérience: elle évoque parfois l’insecte ou le chien par ses mou-vements.

À l’apogée du spectacle, l’in-terprète, dos nu, s’est détournée des spectateurs. C’est à ce moment qu’on a compris son surnom de «déesse de la danse».

Rencontrée par Le Délit, Dena Davida, professeure de danse à

l’Université du Québec à Montréal et directrice de Tangente, con-seille trois points de départ pour interpréter la danse postmoderne: l’émotivité, l’intuitivité et la con-ceptualité. Pour ceux et celles qui sont plus émotifs, on demande quelles émotions la danse évoquait. Les danseurs et les danseuses, en regardant un spectacle, bougent avec l’interprète, ce que Davida appelle l’interprétation intuitive. Finalement, il y a l’interprétation

conceptuelle, ou intellectuelle. Pour sa part, Ponties dit vouloir ex-primer des concepts plus que des émotions et «cherche[r] à explorer la vie du corps dans sa fragmenta-tion».

La plus grande insulte que l’on puisse faire au chorégraphe, ajoute Davida, c’est que le spectacle res-semble à un autre. Si c’est l’origi-nalité que Ponties recherche, elle a réussi. Comme le dit Davida, «Je l’ai vue en spectacle en Belgique il

y a deux ans et celui-ci n’a jamais quitté mon esprit.»

Tangente fait partie de l’Agora de la danse, qui est soutenu par le Conseil des arts du Canada. Sa mission, selon sa fondatrice Dena Davida, est «d’établir des alliances durables avec des diffuseurs en danse en Amérique et en Europe,» pour familiariser le public avec de nouvelles perspectives. Pour un public qui n’est pas encore fami-liarisé avec la danse postmoderne, ce spectacle n’était peut-être pas le meilleur point de départ. Une pièce moins conceptuelle et plus proche de la danse classique serait peut-être mieux. Souvent on avait l’impression que l’interprète ne dansait pas, mais qu’elle bougeait inconfortablement. Quant à la musique, elle était plutôt convenue pour l’oreille de l’amateur. Pour un public d’inconditionnels, par con-tre, ce spectacle se démarquait par sa grande originalité. x

L’espace Tangente (840, rue Cherrier; tél.: 514-525-5584) commence la série Danser au-delà des frontières. Le prochain (de l’ensemble de 26) specta-cle sera CHALK, du 8 au 11 février. Pour plus d’informations, visitez le site Internet: www.tangente.qc.ca.

danse

Des spécialistes de la danse expliquent comment interpréter les créations contemporaines les plus poussées.

Triangle des Bermudes où se perd la conscience du corps ou simple démonstration de souplesse?Dominique Gastout

Un puzzle harmonieux

Victor RaynaudLe Délit

Puzzle Danse est un concept particulier dans le monde de la danse contem-poraine. Quatre chorégraphes, deux

du Québec et deux venant de France, tra-vaillent séparément sur un thème commun, celui du départ. Chaque chorégraphe a deux danseurs à sa disposition, avec un décor ré-duit au minimum et très épuré (il est modifié très rapidement entre les différentes scènes du spectacle). Ces règles avaient été posées dans l’espoir de donner un peu d’unité au spectacle. Une semaine avant la première, les quatre équipes se retrouvent pour tenter d’ajuster ce «puzzle de danse».

La première pièce, intitulée «Assauts intérieurs», a été chorégraphiée et mise en scène par Isira Makuloluwe. C’est l’histoire d’un jeune prisonnier qui noue des liens d’amitié avec une femme qui lui rend visite afin de l’aider à extérioriser sa rage. Cette

pièce représente la danse-théâtre dans sa forme la plus épurée. Le texte des acteurs se mélange très bien aux mouvements des danseurs: l’écriture devient danse. Un rideau sert à démarquer la cellule du prisonnier, en dehors et à l’intérieur de laquelle les dan-seurs-comédiens évoluent. Les danseurs se filment eux-mêmes sur scène et l’image est projetée sur le rideau, ce qui donne au spec-tateur une vision inhabituelle.

La deuxième «pièce» du puzzle s’appelle «Les petites feintes» et fait intervenir deux danseuses sur scène. Sur une musique qui rappelle étrangement le bruit que fait l’élec-tricité lorsque les plombs s’apprêtent à sau-ter, les deux danseuses se désarticulent dans des mouvements brusques et inhumains. Le mot d’ordre «sortir du cadre de son corps» est bien passé, si bien en fait que les corps des danseuses semblent être soumis non plus aux lois naturelles mais plutôt à un courant électrique que les actrices sont seu-les à ressentir.

L’avant-dernière pièce surprend par la joie qui s’en dégage. L’histoire de deux frères italiens qui meurent dans un accident de la route n’a pourtant rien d’hilarant. Mais ces deux hommes qui sautent partout et en-chaînent leurs mouvements tout en étant en parfaite synchronisation, le tout sous une musique très entraînante, apportent inexpli-cablement le sourire à nos lèvres.

Enfin, la quatrième pièce est très cathar-tique. Un couple sur le point de s’embrasser,

presque nu sous le jeu des lumières tamisées, tient la pose. On attend le happy end lorsque la femme commence à vouloir déchirer et mordre le visage de son mari. Il s’ensuit une danse sensuelle mais très frustrante entre les deux partenaires. Ils se haïssent mais ne peu-vent se séparer. Ils se frappent, se déchirent mais restent collés l’un à l’autre. Le senti-ment qui envahit le spectateur à la vue de cette odieuse situation est insoutenable. Le départ comme destruction de l’autre.

Puzzle Danse est une réussite artistique car pendant une heure, le spectateur ressent

des sentiments aussi forts que contradictoi-res. La souffrance, la joie, la peur, la haine; tout cela à travers un puzzle superbement agencé. x

Puzzle Danse était présenté jusqu’au 3 février à l’Agora de la Danse (840, rue Cherrier). Le prochain spectacle du studio sera Manitowapan et Mon père m’a raconté du 7 au 10 mars 2007. Pour réservez des billets, appellez au (514) 525-1500. Pour la programmation complète de l’Agora, tapez le http://www.agoradanse.com

danse

Puzzle Danse permet à des créateurs des deux côtés de l’Atlantique de faire jeu commun… et bande à part!

Enlacement des corps dans un poignant casse-tête humain. Guy Delahaye

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17xle délit | 6 février 2007www.delitfrancais.com

Arts&Culture

Humour touristique

sur la côte du Pacifique

par Matsa

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18xle délit | 6 février 2007www.delitfrancais.com

Arts&Culture

Université d’Ottawa

À l’Université d’Ottawa, la Faculté des arts accueille des étudiants et des professeurs-chercheurs passionnés des langues et des littératures du Canada et du monde entier. La plupart des étudiants de la Faculté des arts bénéficient d’un appui financier de 15 500 $ à 17 000 $ par année d’études.

• English • Espagnol • Interprétation de conférence • Lettres françaises • Linguistique • Traduction • Traduction juridique • Traductologie

Des études supérieuresen langues et littératures

Classée parmi les cinq universités canadiennes à plus haute intensité de recherche

www.arts.uOttawa.ca1 877 uOttawa 613-562-5700

Ça part d’ici.

Laurence MartinLe Délit

Oubliez madame Li et son poulet général Tao. Le café Idée magique n’obéit

à aucune de vos idées préconçues de quartier chinois, mais représen-te plutôt la nouvelle génération des grandes villes chinoises qui cher-che à s’occidentaliser –à sa ma-nière. La spécialité de la maison, le bubble tea, est d’ailleurs très popu-laire en ce moment chez les jeunes de Pékin et de Shanghai.

Le bubble tea, ou thé aux per-les, tire son nom des bulles de tapio-ca que l’on met dans une boisson froide de thé et de lait. La recette d’origine a évidemment évolué et Idée magique va bien au-delà des classiques et délicieux bubble teas au thé vert ou noir pour offrir à ses clients plus aventureux des goûts aussi osés que «jujube», «germe de blé» ou encore «jaune d’œuf ». (Le Délit ne prend par contre aucune responsabilité sur l’essai de ces dernières saveurs, particulièrement si vous optez pour le grand for-mat, qui est vraiment grand). Des choix plus fruités sont également

au menu et vous pouvez toujours demander votre verre avec ou sans lait et perles de tapioca si cela vous

effraie. On peut aussi manger au café mais les gens y viennent sur-tout pour prendre un verre dans

un cadre des plus intéressants. C’est là que se trouve d’ailleurs

l’attraction numéro deux d’Idée magique: l’ambiance kitsch du Shanghai moderne à son meilleur. Des murs d’un bleu solide, des jeux d’échec aux pions transparents, les multiples versions chinoises de la revue Elle, des magazines de ta-touage et surtout une immense télévision avec les vidéoclips des derniers boys bands taïwanais ou hongkongais, avec parfois quelques souvenirs (ô combien appréciés!) des Backstreet Boys ou de Britney Spears (heureusement, les frères Hanson ne semblent pas s’être rendus jusqu’en Chine). Bref, vous ne pouvez qu’adorer! x

Le café Idée magique est situé au 30 De la Gauchetière. Le prix d’un bubble tea varie entre 3$ et 4,45$, en fonction du format.

découverte

Bulles de tapioca et pop chinoiseIdée magique propose un excellent bubble tea dans une ambiance typique des nouveaux cafés branchés de Shanghai.

Mathieu Ménard/Le Délit

Le deuxième étage d’Idée Magique offre une vue imprenable sur la vie politique du quartier

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19xle délit | 6 février 2007www.delitfrancais.com

Arts&Culture

Les rêveries du lecteur solitairePierre-Olivier Brodeur

UNE ŒUVRE LITTÉRAIRE ESTconsidérée comme constituée par sa «chaîne lexicale» (l’expression est du théoricien Gérard Genette), c’est-à-dire par l’ensemble des mots du texte dans l’ordre qu’ils apparaissent. L’œuvre ainsi défi nie se trouve en quelque sorte déma-térialisée, puisque conçue uniquement comme contenu conceptuel. Pourtant, elle ne peut réellement exister sans le livre qui l’incarne et permet sa transmission comme sa conservation. Non seulement la notation est-elle une condition néces-saire à l’existence du texte, mais elle par-ticipe également, bien qu’indirectement, aux phénomènes de signifi cation littérai-re à travers le lien sensoriel qu’elle établit entre l’œuvre et le lecteur.

Avant même d’avoir commencé la lecture de l’œuvre, nos sens sont déjà en communication avec le livre. Lorsque mes doigts retrouvent le grain grossier et fi breux du papier bon marché, légèrement jauni, de la collection «J’ai lu science-fi c-

tion», je ne fais pas que retrouver mes étés adolescents passés sur des mondes in-connus. C’est tout mon esprit qui, dirigé par mes sens, se détend et retrouve une attitude naïve propice à l’émerveillement. La couverture tape-à-l’œil, l’encre qui s’efface déjà, l’absence de préface critique concourent toutes à me faire compren-dre que je n’ai, entre mes mains, qu’un produit de divertissement. C’est, de cette manière, toute ma lecture qui se trouve orientée par les propriétés physiques de l’œuvre.

C’est le même phénomène qui agit, à l’inverse, au contact de la couverture plein cuir d’un volume de la collection Pléïade. Le prestige du matériau utilisé, tout comme le volumineux appareil criti-ques (préface, notes et introduction d’un professeur érudit), confère à l’œuvre une aura de prestige. Le papier, doux et mince, dont la fragilité qui interdit de même pen-ser y écrire quelque note de lecture que ce soit; d’une blancheur immaculée, ce

papier-bible transforme le lecteur en véri-table adorateur, le texte en idole spirituel et le livre en dépositaire du Verbe sacré.

C’est toujours le même phénomène qui nous fait développer de l’affection –pour ne pas dire de l’amour– pour cer-tains livres. Lorsque mes yeux parcou-rent les fi ns caractères de mon édition en un volume de Lord of the Rings, véritable grimoire avec ses 1200 pages, ses cartes, annexes, notes érudites et son titre gravé d’or dans sa couverture de cuir bourgo-gne, se sont toutes mes nombreuses lec-tures de cet ouvrage qui se superposent dans mon esprit, conférant à l’œuvre une profondeur qui ne se trouve que dans mon passé de lecteur. Et lorsque je ren-contre cette légère tache de chocolat qui marque la page 700, c’est le jeune garçon hypnotisé par la fantastique mythologie de Tolkien, au point d’en oublier le cor-net qu’il tient à la main, que je retrouve entre les lignes.

kulturkalender compilé avec beaucoup d’amour et de patience par Laurence Martin

Dansez le tango pour votre santé!

La professeure de physiothérapie Patricia McKinley croit que faire du tango peut vous aider à vivre vieux. Sa recherche a prouvé que cette populaire danse a des effets bénéfi ques pour votre mobilité et votre équilibre, tout en stimulant vos facultés congnitives. Venez la rencontrer!

Où? Salle de bal du Faculty Club, 3450 rue McTavish.

Quand? 18h.Entrée: 25$.Plus d’infos? 514-398-7864.

Festival joie de la musique

Le conservatoire de McGill vous convie ce samedi à une journée entière de concerts et de performances variés. Consultez le site internet pour l’horaire détaillé.

Où? Lieux variés.Quand? 9h à 22h.Entrée : prix variés, de gratuit à 10$.Plus d’infos? 514-398-4547 ou visitez www.mcgill.ca/calendar pour la programmation.

Vieux Farka Touré

C’est bien le fi ls guitariste du légendaire «bluesman du désert», le malien Ali Farka Touré, qui nous rend visite. Le Festival international Nuits d’Afrique nous le présente, dans le cadre de sa tournée mondiale organisée pour lutter contre la malaria.

Ou? Kola Note, 5240 av. du Parc.Quand? 20h30.Entrée: 25 $.Plus d’inofs? www.festivalnuitsdafrique.

com ou 514-274-9339.

Vendredi 9 février

Freaky Friday!

Venez participer à l’exposé public du professeur de sciences atmosphérique et océanique Ronald Stewart sur les tempêtes déchaînées comme l’ouragan Katrina en 2005. La présentation sera suivie du visionnement du fi lm En pleine tempête (The Perfect Storm).

Où? Auditorium du musée Redpath, 859 rue Sherbrooke O.Quand? 17h.Entrée: 5$.Plus d’infos? 514-398-4086 poste 4094

Le corps de l’œuvre

Mercredi 6 février Jeudi 8 février

Samedi 10 février Dimanche 11 février Dimanche 11 février

Compétition d’instruments à vent

Venez renouer avec la musique classique (pour ceux qui en auraient besoin!) en assistant à la fi nale d’instruments à vent de l’école de musique Schulich.

Où? Hall Clara-Lichtenstein (C209) du pavillon de musique Strathcona, 555 rue Sherbrooke O.

Quand? 19h.Entrée gratuite.Plus d’infos? 514-398-4547

Journée Darwin (ou remède contre la crise identitaire)

Le professeur d’anthropologie de McGill André Costopoulos vous propose une présentation autour de la question «qu’est-ce qu’être à 98% un chimpanzé?». Voilà une autre façon de demander «qu’est-ce que cela signifi e être un Homme?».

Où? Auditorium du musée Redpath, 859 rue Sherbrooke O.

Quand? 16h.Entrée gratuite.Plus d’infos? 514-398-4086 poste 4094.

Extraits d’opéra

La classe de Joanne Kolomyjec de l’école de musique de McGill vous invite à entendre les quelques extraits d’opéra qu’ils présenteront ce dimanche. Ce n’est pas souvent que l’opéra nous est offert, alors profi tez-en!

Où? Hall Tanna-Schulich du nouveau pavillon de musique Strathcona, 527 rue Sherbrooke O.

Quand? 19h30.Entrée gratuite.Plus d’infos? 514-398-5145.

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������������������������������������ Fédération Canadienne des étudiantes et étudiants

������������������������Le mecredi, 7 février les étudiantes et étudiants de l’Univeristé McGill

auront l’opportunité de se joindre aux étudiantes et étudiants de Montréal, du Québec et du reste du Canada afin de diriger l’atention sur le besoin croissant d’une augmentation du financement, d’un système de

bourses d’études attribués en fonction du besoin, et de la fin de toute hausse de frais

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